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Philippe PĂ©tain

Philippe PĂ©tain, nĂ© le Ă  Cauchy-Ă -la-Tour (Pas-de-Calais) et mort en dĂ©tention le sur l'Ăźle d'Yeu (VendĂ©e), est un militaire, diplomate et homme d'État français. ÉlevĂ© Ă  la dignitĂ© de marĂ©chal de France en 1918, il est frappĂ© d'indignitĂ© nationale et dĂ©chu de sa distinction militaire en 1945.

Philippe PĂ©tain
Illustration.
Portrait officiel de Philippe PĂ©tain (c. 1941).
(photographie de propagande, imprimerie Draeger)
Fonctions
Chef de l'État français
(RĂ©gime de Vichy)
–
(4 ans, 1 mois et 9 jours)
Chef du gouvernement Pierre Laval
Vice-président du Conseil Pierre Laval
Pierre-Étienne Flandin
François Darlan
Prédécesseur Albert Lebrun (président de la République)
Successeur Charles de Gaulle (président du Gouvernement provisoire)
Président du Conseil des ministres[alpha 1]
–
(1 an, 10 mois et 1 jour)
Président Albert Lebrun (1940)
Chef de l'État Lui-mĂȘme (Ă  partir de 1940)
Vice-président du Conseil Camille Chautemps
Pierre Laval
Pierre-Étienne Flandin
François Darlan
Gouvernement PĂ©tain
Laval V
Flandin II
Darlan
Prédécesseur Paul Reynaud
Successeur Lui-mĂȘme (chef de l'État français)[1] - [2]
Pierre Laval (chef du gouvernement)
Vice-président du Conseil des ministres
–
(29 jours)
Président Albert Lebrun
Gouvernement Reynaud
Prédécesseur Camille Chautemps
Successeur Camille Chautemps
Ministre d'État
–
(3 jours)
Président Albert Lebrun
Gouvernement Bouisson
Ministre de la Guerre
–
(8 mois et 30 jours)
Président Albert Lebrun
Gouvernement Doumergue (2)
Prédécesseur Joseph Paul-Boncour
Successeur Louis Maurin
Biographie
Nom de naissance Henri Philippe BĂ©noni Omer Joseph PĂ©tain
Date de naissance
Lieu de naissance Cauchy-Ă -la-Tour (France)
Date de décÚs
Lieu de décÚs Port-Joinville, Vendée (France)
Nature du décÚs Mort naturelle
SĂ©pulture Port-Joinville (L'Île-d'Yeu)
Nationalité Française
Conjoint Eugénie Hardon
DiplĂŽmĂ© de École spĂ©ciale militaire de Saint-Cyr
Profession Militaire
Religion Catholicisme

Signature de Philippe PĂ©tain

Militaire de carriĂšre s'Ă©tant dĂ©marquĂ© Ă  l'École de guerre de la doctrine dominante de l'offensive Ă  outrance, il est sur le point de terminer sa carriĂšre comme colonel lorsque la Grande Guerre Ă©clate, en 1914. Chef militaire Ă  l'action importante, il est gĂ©nĂ©ralement prĂ©sentĂ© comme le vainqueur de la bataille de Verdun et, avec Georges Clemenceau, comme l'artisan du redressement du moral des troupes aprĂšs les mutineries de 1917. Remplaçant Nivelle en , il reste commandant en chef des forces françaises jusqu'Ă  la fin de la guerre, bien que placĂ© sous les ordres de son rival Ferdinand Foch nommĂ© gĂ©nĂ©ralissime des troupes alliĂ©es aprĂšs la rupture du front le .

Auréolé d'un immense prestige au lendemain de la guerre, il est le chef de l'armée d'aprÚs-guerre. En 1925, il commande personnellement les forces françaises combattant aux cÎtés de l'Espagne dans la guerre du Rif, remplaçant le maréchal Lyautey. Devenu académicien en 1929, il occupe les fonctions de ministre de la Guerre de à , puis est nommé ambassadeur en Espagne en 1939, alors que le pays est dirigé par le général Franco.

RappelĂ© au gouvernement le , aprĂšs le dĂ©but de l'invasion allemande, il s'oppose Ă  la poursuite d'une guerre qu'il considĂšre comme perdue et dont il impute bientĂŽt la responsabilitĂ© au rĂ©gime rĂ©publicain. Il devient prĂ©sident du Conseil en remplacement de Paul Reynaud le ; le lendemain, il appelle Ă  cesser le combat. Selon la volontĂ© d'Adolf Hitler, il fait signer l’armistice du 22 juin 1940 avec le TroisiĂšme Reich, Ă  Rethondes. Investi des pleins pouvoirs constituants par l'AssemblĂ©e nationale, le , il s'octroie le lendemain le titre de « chef de l'État français », Ă  84 ans. Il conserve cette fonction durant les quatre annĂ©es de l'occupation de la France par l’Allemagne nazie.

InstallĂ© en zone libre Ă  Vichy Ă  la tĂȘte d'un rĂ©gime autoritaire, il abolit les institutions rĂ©publicaines et les libertĂ©s fondamentales, dissout les syndicats et les partis politiques, et instaure une lĂ©gislation antisĂ©mite[alpha 2] dĂšs aoĂ»t-. Il engage le pays dans la rĂ©volution nationale et dans la collaboration avec l'Allemagne nazie. Le « rĂ©gime de Vichy », qu'il dirige jusqu'en , est dĂ©clarĂ© « illĂ©gitime, nul et non avenu » par le gĂ©nĂ©ral de Gaulle Ă  la LibĂ©ration.

EmmenĂ© contre son grĂ© par les Allemands Ă  Sigmaringen puis en Suisse, oĂč il se rend aux autoritĂ©s françaises, Philippe PĂ©tain est jugĂ© pour intelligence avec l'ennemi et haute trahison par la Haute Cour de justice en . Il est frappĂ© d'indignitĂ© nationale, condamnĂ© Ă  la confiscation de ses biens et Ă  la peine de mort. Alors que la cour recommande la non-application de cette derniĂšre en raison de son grand Ăąge, sa peine est commuĂ©e en emprisonnement Ă  perpĂ©tuitĂ© par le gĂ©nĂ©ral de Gaulle. Il meurt sur l’üle d'Yeu, oĂč il est inhumĂ©.

Biographie

Jeunesse et formation

Henri Philippe BĂ©noni Omer PĂ©tain naĂźt le Ă  Cauchy-Ă -la-Tour, dans une famille de cultivateurs installĂ©e dans la commune depuis le XVIIIe siĂšcle[3]. Il est le fils d'Omer-Venant PĂ©tain (1816-1888) et de Clotilde Legrand (1824-1857)[3]. Il a quatre sƓurs, Marie-Françoise Clotilde (1852-1950), AdĂ©laĂŻde (1853-1919), Sara (1854-1940) et JosĂ©phine (1857-1862)[3]. Sa mĂšre meurt et son pĂšre se remarie avec Marie-Reine Vincent. Trois autres enfants, demi-frĂšre et sƓurs, voient le jour : Élisabeth (1860-1952), Antoine (1861-1948)[4] - [5] et Laure (1862-1945)[3].

Bien que son acte de naissance porte les prénoms Henri, Philippe, Bénoni, Omer[6], c'est Philippe qu'il choisit et, tout au long de sa vie, il prend soin de rectifier[3].

Sa belle-mĂšre nĂ©glige les enfants du premier lit de son mari et Philippe PĂ©tain s'enferme dans le silence, ne parlant pas avant l'Ăąge de trois ans[7]. Il est Ă©levĂ© par ses grands-parents maternels ; sa grand-mĂšre lui apprend Ă  lire. En 1867, Ă  l'Ăąge de 11 ans, il entre au collĂšge Saint-Bertin situĂ© Ă  Saint-Omer, Ă  trente kilomĂštres de Cauchy, et y montre des qualitĂ©s en gĂ©omĂ©trie, grec, et anglais. La famille est marquĂ©e par le catholicisme. Philippe sert la messe quotidienne comme enfant de chƓur[8]. Un membre de la famille est canonisĂ© en 1881 par LĂ©on XIII ; un de ses oncles et deux de ses grands-oncles sont abbĂ©s[9] - [10].

Cet environnement influence Philippe PĂ©tain ; marquĂ© Ă  14 ans par la dĂ©faite de 1870, il dĂ©cide d’ĂȘtre militaire[8] - [11]. Son oncle paternel, l'abbĂ© Legrand, le prĂ©sente au chĂątelain du village de Bomy, Édouard Moullart de Vilmarest, qui souhaitait financer les Ă©tudes d'un jeune villageois se destinant Ă  une carriĂšre militaire. Philippe PĂ©tain prĂ©pare, au collĂšge des Dominicains d'Arcueil (1875), l'Ă©cole de Saint-Cyr, oĂč il entre en 1876.

Philippe PĂ©tain jeune officier.

À l’École spĂ©ciale militaire de Saint-Cyr, il est de la promotion Plewna, avec le vicomte Charles de Foucauld, futur saint catholique, et Antoine Manca de Vallombrosa, futur aventurier.

Entré parmi les derniers (403e sur 412), il sort en milieu de classement (229e sur 336).

Cinq ans sous-lieutenant, sept ans lieutenant, dix ans capitaine (promu en 1890), il gravit lentement les Ă©chelons militaires[12].

Il est admis en 1888 Ă  l'École supĂ©rieure de guerre et en sort brevetĂ© d'Ă©tat-major deux ans plus tard au rang modeste de 56e.

Plusieurs jeunes femmes de bonne famille (Antoinette Berthelin, Angéline Guillaume, Lucie Delarue, Marie-Louise Regad)[13] refusent ses demandes en mariage, car il n'est encore qu'un officier subalterne.

Sa vie personnelle est celle d'un homme à femmes: célibataire endurci jusqu'à son mariage avec Eugénie Hardon à 60 ans passés, il a de nombreuses maßtresses au cours de sa vie et fréquente souvent les maisons closes[7] - [14].

Opinions personnelles avant la guerre

ÉlevĂ© dans le catholicisme, mais ayant une vie personnelle « de garnison », confrontĂ© Ă  une certaine morgue de ses supĂ©rieurs et des « bonnes familles », PĂ©tain reste discret sur ses opinions, dans l'esprit de la « grande muette ». Sa carriĂšre est lente dans l'armĂ©e assez aristocratique des annĂ©es 1890. Lors de l’affaire Dreyfus, le capitaine PĂ©tain n'est pas antidreyfusard ; ultĂ©rieurement, il affirme Ă  son chef de cabinet civil Henry du Moulin de LabarthĂšte[15] : « J'ai toujours cru, pour ma part, Ă  l'innocence de Dreyfus ». Il juge cependant que Dreyfus s’était mal dĂ©fendu[16] et que sa condamnation Ă©tait logique : l'idĂ©e que FĂ©lix Gustave Saussier et Jean Casimir-Perier aient condamnĂ© Dreyfus en le sachant innocent l'aurait tourmentĂ©[alpha 3][17], voire scandalisĂ© d'aprĂšs les deux ministres pĂ©tainistes, Henri Moysset et Lucien Romier. En tout cas, il ne participe pas Ă  la souscription en vue du « monument Henry »[18], ouverte par le journal antisĂ©mite La Libre Parole, d'Édouard Drumont, pour la veuve du colonel Henry, responsable par ses faux de la condamnation du capitaine Dreyfus[19] - [20].

Philippe Pétain est promu dans la période de « républicanisation de l'armée » qui suit l'affaire Dreyfus : aide de camp de Joseph BrugÚre, général républicain nommé gouverneur militaire de Paris par le gouvernement de défense républicaine de Pierre Waldeck-Rousseau pour réduire l'influence antidreyfusarde dans l'armée[21], Pétain est également un proche du général Percin, officier républicain impliqué dans l'affaire des fiches[22].

Toutefois, le militaire PĂ©tain s'occupe fort peu de la vie politique de l'Ă©poque, et reste trĂšs discret sur ses opinions personnelles. Au contraire de beaucoup de militaires, il ne s’engage Ă  aucun moment, pas plus lors de l'affaire des fiches en 1904 que lors des dĂ©bats sur la sĂ©paration des Églises et de l'État en 1905.

Cette image d'un militaire républicain d'aucun parti perdurera dans l'entre-deux-guerres. Il ne semble pas avoir eu d'expression antisémite avant 1938 (en 1919, il signe une pétition demandant de « venir au secours des masses juives opprimées en Europe orientale »[23] et en 1938, une autre contre les persécutions en Allemagne).

PremiĂšre carriĂšre

Au début de sa carriÚre militaire, Philippe Pétain est affecté à différentes garnisons, mais ne participe à aucune des campagnes coloniales.

En 1900, chef de bataillon, il est nommĂ© instructeur Ă  l’École normale de tir du camp de ChĂąlons-sur-Marne[24]. Il s’oppose Ă  la doctrine officielle de l'Ă©poque qui veut que l'intensitĂ© du tir prime la prĂ©cision et qui privilĂ©gie les attaques Ă  la baĂŻonnette pour l'infanterie et la poursuite Ă  outrance pour la cavalerie[25]. Il prĂ©conise au contraire l'utilisation des canons pour les prĂ©parations et les barrages d'artillerie, afin de permettre la progression de l'infanterie, laquelle doit pouvoir tirer prĂ©cisĂ©ment sur des cibles individuelles[25]. Le directeur de l'Ă©cole signale la « puissance de dialectique [
] et l'ardeur [
] »[25] « avec lesquelles il dĂ©fend des thĂšses aussi aventurĂ©es »[25].

En 1901, il occupe un poste de professeur adjoint Ă  l’École supĂ©rieure de guerre, Ă  Paris, oĂč il se distingue par des idĂ©es tactiques originales. Il y est de nouveau de 1904 Ă  1907, puis de 1908 Ă  1911 reprenant sans mĂ©nagement le poste de titulaire de la chaire de tactique de l’infanterie Ă  Adolphe Guillaumat.

Il s’élĂšve alors violemment contre le dogme de la dĂ©fensive prescrit par l’instruction de 1867, « l’offensive seule pouvant conduire Ă  la victoire ». Mais il critique aussi le code d’instruction militaire de 1901 prĂŽnant la charge en grandes unitĂ©s, baĂŻonnette au canon, tactique en partie responsable des milliers de morts d’aoĂ»t et . HumiliĂ©s par la dĂ©faite de 1870, les Ă©tats-majors se montrent volontiers bravaches et revanchards. À partir de 1911, l'État-major prĂŽne l'offensive Ă  outrance[alpha 4]. PĂ©tain, lui, prĂ©conise la manƓuvre, la puissance matĂ©rielle, le mouvement, l’initiative : « le feu tue ». Ainsi, il dĂ©clare Ă  un Ă©lĂšve officier : « Accomplissez votre mission coĂ»te que coĂ»te. Faites-vous tuer s'il le faut, mais si vous pouvez remplir votre devoir tout en restant en vie, j'aime mieux cela. » Parmi les officiers rangĂ©s sous ses ordres, il est le , premier chef de corps de Charles de Gaulle, alors sous-lieutenant au 33e rĂ©giment d'infanterie stationnĂ©e Ă  Arras.

En , devant commenter, devant les officiers rĂ©unis, un exercice conçu par le gĂ©nĂ©ral Gallet, qui, lors de manƓuvres, a fait charger Ă  la baĂŻonnette des nids de mitrailleuses, qui naturellement tiraient Ă  blanc, le colonel PĂ©tain rĂ©pond que le gĂ©nĂ©ral commandant la 1re division d'infanterie vient de montrer, afin de frapper les esprits, toutes les erreurs qu'une armĂ©e moderne ne doit plus commettre. AprĂšs avoir dĂ©taillĂ© la puissance de feu des armes allemandes, il conclut par : « C’est par le feu qu’il faut dĂ©truire l’objectif avant de s’en emparer. Messieurs n’oubliez jamais que le feu tue ! »[26] - [27].

Franchet d'Esperey est nommé en commandant du 1er corps d'armée à Lille en remplacement du général anticlérical Henri Crémer. En , Franchet d'Esperey nomme le colonel Pétain pour assurer la vacance du général de Préval commandant la 3e brigade d'infanterie à Arras qui quitte l'armée d'active pour des problÚmes de santé.

Le , par permutation avec le gĂ©nĂ©ral Deligny[alpha 5] , Philippe PĂ©tain est nommĂ© au commandement de la 4e brigade d’infanterie qui est composĂ©e de deux rĂ©giments, le 8e rĂ©giment d'infanterie en garnison Ă  Saint-Omer, Calais et Boulogne et le 110e rĂ©giment d'infanterie en garnison Ă  Dunkerque, Bergues et Gravelines[29]. Le commandement du 33e rĂ©giment d'infanterie est repris par le lieutenant-colonel Stirn.

Arrivé à Saint-Omer, Philippe Pétain, pourtant excellent cavalier, fait une mauvaise chute de cheval. Le docteur Louis Ménétrel (pÚre de Bernard Ménétrel) interdit l'amputation et sauve la jambe gauche de Pétain[30].

Adolphe Messimy, qui est redevenu ministre de la Guerre le et qui a pris pour chef de cabinet militaire le général Guillaumat, adresse le un refus au général Anthoine, venu solliciter la nomination de Pétain au grade de général.

Ses biographes identifient ce manque de reconnaissance comme un des Ă©lĂ©ments structurant la personnalitĂ© de PĂ©tain. À 58 ans, en , le colonel Philippe PĂ©tain s’apprĂȘte Ă  prendre sa retraite aprĂšs une carriĂšre relativement modeste[alpha 6].

Promotion du général de la guerre de 1914-1918

Philippe PĂ©tain
Philippe PĂ©tain
Portrait de Philippe PĂ©tain en 1926 par Marcel Baschet.

Origine Française
Allégeance Drapeau de la France France
Grade Général de division[31] (1914)
AnnĂ©es de service 1876 – 1931
Commandement 1907 : 118e régiment d'infanterie
1911 : 33e régiment d'infanterie
1914 : 4e brigade du 1er corps d'armée
6e division d'infanterie
33e corps d'armée
1915 : 2e armée
1916 : Groupe d'armées du centre
1917 : chef d’État-Major gĂ©nĂ©ral
Général en chef des armées françaises
1920 : Vice-président du Conseil supérieur de la guerre
1931 : Inspecteur de la défense aérienne du territoire
Conflits PremiĂšre Guerre mondiale
Guerre du Rif
Seconde Guerre mondiale
Faits d'armes 1914 : bataille de la Marne (bataille des Deux Morins)
1915 : premier jour de la bataille de l'Artois
1916 : Bataille de Verdun
1917 : bataille de la Malmaison
1918 : bataille de Champagne
Distinctions Grand-croix de la LĂ©gion d'honneur (1917)
MĂ©daille militaire (1918)
Maréchal de France (1918)
Hommages La 127e promotion de
l’École spĂ©ciale militaire de Saint-Cyr (1940-1942) porte son nom

DĂšs le dĂ©but de la PremiĂšre Guerre mondiale, le , il se distingue Ă  la tĂȘte de la 4e brigade d’infanterie[32] en couvrant la retraite du gĂ©nĂ©ral Lanrezac en Belgique[33]. Il fait partie des officiers rapidement promus au dĂ©but de la guerre pour remplacer ceux qui ont Ă©chouĂ© : gĂ©nĂ©ral de brigade le [32] il commande la 6e division d'infanterie Ă  la tĂȘte de laquelle il participe Ă  la bataille de la Marne (durant laquelle il conseille l'usage de l'artillerie et de l'aviation).

Il devient général de division le [32].

Investi le de la fonction de gĂ©nĂ©ral commandant de corps d'armĂ©e, il prend le commandement du 33e corps[32]. AffectĂ© sur le secteur du front oĂč il avait grandi, il rĂ©alise des actions d’éclat lors de l'offensive en Artois effectuant la seule percĂ©e le () qu'il juge Ă  raison ne pouvant ĂȘtre exploitĂ©e. En , investi de la fonction de gĂ©nĂ©ral d'armĂ©e, il commande la IIe armĂ©e[32]. Ayant pourtant dĂ©sapprouvĂ© ouvertement l'offensive de Joffre en Champagne, il est au commandement d'une des deux armĂ©es engagĂ©es. Il obtient les meilleurs succĂšs et fait stopper l'offensive quand les pertes deviennent importantes. Son souci d’épargner leurs vies le rend populaire parmi ses hommes.

Bataille de Verdun

Soldats français à la bataille de Verdun.

Sous les ordres du futur marĂ©chal Joffre et du gĂ©nĂ©ral de Castelnau, il est l'un des 8 commandants Ă  la bataille de Verdun, en poste du au . Son sens de l'organisation, soutenu par un rĂ©el charisme ne sont pas Ă©trangers Ă  l’issue victorieuse du combat, huit mois plus tard, mĂȘme si la tĂ©nacitĂ© de ses troupes, comme celle du commandant Raynal au fort de Vaux, en a Ă©tĂ© le facteur dĂ©cisif. Sa vision stratĂ©gique de la bataille lui fait comprendre que le meilleur soldat du monde, s’il n’est pas ravitaillĂ©, Ă©vacuĂ© en cas de blessure ou relevĂ© aprĂšs de durs combats, est finalement vaincu.

PĂ©tain met en place une rotation des combattants. Il envoie au repos les rĂ©giments Ă©puisĂ©s qu'il fait remplacer par des troupes fraĂźches. Il organise des norias d’ambulances, de camions de munitions et de ravitaillement sur ce qui devient la « Voie sacrĂ©e » (terme de Maurice BarrĂšs). Comprenant la valeur de l’aviation dans les combats, il crĂ©e en la premiĂšre division de chasse aĂ©rienne pour dĂ©gager le ciel au-dessus de Verdun. Il rĂ©affirme cette vision dans une instruction de : « L’aviation doit assurer une protection aĂ©rienne de la zone d’action des chars contre l’observation et les bombardements des avions ennemis [
] »[34].

Il a tirĂ© de cette pĂ©riode le titre de « vainqueur de Verdun », mĂȘme si cette appellation a Ă©tĂ© surtout exploitĂ©e plus tard, sous le rĂ©gime de Vichy. Ce cĂ©libataire reçoit plus de 4 500 lettres d'admiratrices durant le premier conflit mondial[35].

Toutefois, Joffre, Foch et Clemenceau attribuent la victoire de Verdun à Nivelle et à Mangin. Certains reprochent à Pétain son pessimisme[36] - [alpha 7]. En fait, comme la réputation de Pétain s'affirme auprÚs des soldats aprÚs les erreurs de Nivelle (en 1917), il existe deux traditions de la victoire de Verdun, comme l'écrit Marc Ferro, biographe de Pétain : « celle des chefs militaires et politiques, qui la mettent au crédit de Nivelle, et celle des combattants, qui ne connaissent que Pétain »[37].

Le , le gĂ©nĂ©ral Nivelle, aurĂ©olĂ© de la reprise des forts de Vaux et de Douaumont, prend la tĂȘte des armĂ©es françaises, alors que Joffre, nommĂ© marĂ©chal, est Ă©vincĂ© du commandement. Le gĂ©nĂ©ral PĂ©tain est nommĂ© chef d'Ă©tat-major gĂ©nĂ©ral, poste spĂ©cialement recrĂ©Ă© pour lui. Il s’oppose Ă  Nivelle, peu Ă©conome du sang de ses hommes, dont la stratĂ©gie d’offensive Ă  outrance contraste avec le pragmatisme de PĂ©tain.

Clemenceau et Pétain au Conseil supérieur de la guerre (Trianon, - ).

Le commandement de Nivelle aboutit Ă  la bataille du Chemin des Dames, Ă  la mi- : 100 000 hommes sont mis hors de combat du cĂŽtĂ© français en une semaine. Devant cet Ă©chec et le sentiment des soldats qu'ils sont menĂ©s Ă  la mort pour rien, le mĂ©contentement gronde, provoquant des mutineries dans de nombreuses unitĂ©s. Nivelle est renvoyĂ©, et PĂ©tain se trouve en situation de lui succĂ©der, par sa rĂ©putation Ă  Verdun et ses prises de position visant Ă  limiter les pertes. Le , il est nommĂ© commandant en chef des armĂ©es françaises[38]. Son commandement cherche Ă  redonner confiance aux troupes en amĂ©liorant les conditions de vie des soldats, en accordant plus libĂ©ralement des permissions, en mettant fin aux offensives mal prĂ©parĂ©es, et en faisant condamner les mutins, dont seule une minoritĂ© de meneurs seront fusillĂ©s, malgrĂ© les exigences d'une partie des hommes politiques.

Pour ne pas gaspiller la vie des soldats, il lance des offensives plus limitĂ©es, et toutes victorieuses. Il reprend aux Allemands lors de la deuxiĂšme bataille de Verdun en tout le terrain perdu en 1916. Il reprend la crĂȘte du Chemin des Dames lors de la bataille de la Malmaison, en .

Le , les Allemands rompent le front britannique en Picardie, menaçant Amiens. PĂ©tain est un candidat possible au titre de gĂ©nĂ©ralissime des troupes alliĂ©es, mais, avec l'appui des Britanniques, Clemenceau, qui le juge trop portĂ© Ă  la dĂ©fensive et trop pessimiste, lui prĂ©fĂšre Foch, partisan de l'offensive[39], lors de la confĂ©rence de Doullens du [37]. À cette confĂ©rence, Douglas Haig, reprĂ©sentant les Britanniques et soutenu par le reprĂ©sentant amĂ©ricain, exige et obtient que PĂ©tain soit exclu de l'Ă©tat-major inter-alliĂ©. Foch, Ă  l’origine de la coordination des troupes alliĂ©es, en est dĂ©sormais le chef suprĂȘme. Mais chaque commandant d'une armĂ©e nationale conserve le droit de faire appel de toute dĂ©cision de Foch auprĂšs de son gouvernement. PĂ©tain conserve son rĂŽle de gĂ©nĂ©ral en chef des armĂ©es françaises, mais passe de fait sous les ordres de Foch.

Le , les Allemands percent le front français au Chemin des Dames, le gĂ©nĂ©ral DuchĂȘne, qui bĂ©nĂ©ficie de la protection de Foch, ayant refusĂ© d'appliquer la doctrine dĂ©fensive prescrite par PĂ©tain consistant Ă  transformer la premiĂšre position dĂ©fensive en ligne d’alerte et de dĂ©sorganisation, afin de reporter la rĂ©sistance ferme sur la deuxiĂšme position quelques kilomĂštres en arriĂšre[40]. L'armĂ©e française est contrainte de rĂ©trograder sur la Marne. PĂ©tain conseille la prudence, lĂ  oĂč Foch choisit la contre-offensive, qui s'avĂšrera en juillet victorieuse. Foch, ne pouvant atteindre directement PĂ©tain, fait limoger son major gĂ©nĂ©ral, le gĂ©nĂ©ral Anthoine. Le , le ComitĂ© de guerre retire Ă  PĂ©tain, qui a refusĂ© de sanctionner Anthoine, son droit d'en appeler au gouvernement en cas de dĂ©saccord avec Foch. Le , la nomination du gĂ©nĂ©ral Buat au poste de major gĂ©nĂ©ral est imposĂ©e par Foch et Clemenceau Ă  Buat et PĂ©tain afin de rendre plus souples et plus efficaces les relations entre les Ă©tats-majors de Foch et de PĂ©tain, dans l'espoir que l'armĂ©e française obĂ©isse directement Ă  Foch[41].

En , la mĂ©daille militaire est attribuĂ©e Ă  PĂ©tain : « Soldat dans l’ñme, n’a cessĂ© de donner des preuves Ă©clatantes du plus pur esprit du devoir et de haute abnĂ©gation. Vient de s’acquĂ©rir des titres impĂ©rissables Ă  la reconnaissance nationale en brisant la ruĂ©e allemande et en la refoulant victorieusement »[42].

En , il prĂ©pare une grande offensive en Lorraine qui aurait menĂ© les troupes franco-amĂ©ricaines jusqu’en Allemagne. Cette grande offensive, prĂ©vue Ă  partir du , n’a pas lieu : contre son avis, Foch et Clemenceau ont acceptĂ© de signer le l’armistice demandĂ© par les Allemands[39].

En présence de Clemenceau, le président Poincaré remet le bùton de maréchal à Pétain (Metz, ).

À la demande des officiers du GQG, le marĂ©chal Foch fait, le , une dĂ©marche auprĂšs du prĂ©sident du conseil Georges Clemenceau. Le , le gĂ©nĂ©ral PĂ©tain apprend Ă  midi par tĂ©lĂ©phone qu'il va obtenir le bĂąton de marĂ©chal puis, en dĂ©but d'aprĂšs-midi, assiste, impassible sur son cheval blanc suivi du gĂ©nĂ©ral Buat et de vingt-cinq officiers du GQG, au dĂ©filĂ© des troupes de la 10e armĂ©e entrant officiellement Ă  Metz par la porte Serpenoise sous les vivats d'une foule en liesse[43].

Pétain est élevé à la dignité de maréchal de France par décret du (publié au Journal officiel le 22)[44]. Il reçoit à Metz son bùton de maréchal, le .

Il est l'un des trÚs rares acteurs militaires de premier plan de la Grande Guerre à n'avoir jamais voulu publier ses mémoires de guerre. En 2014 est publié un manuscrit inédit de Philippe Pétain qui retrace le conflit tel que Pétain l'avait vécu[45]. Les différents témoignages à son sujet, « au-delà des inévitables références au grand soldat soucieux de la vie de ses hommes, soulignent son caractÚre secret, son manque d'humour, sa froideur, son apparence marmoréenne, terme qui revient souvent sous la plume des différents auteurs »[46]. L'historien Jean-Louis Crémieux-Brilhac rappelle que « Pétain était, dÚs 1914-1918, un chef d'un pessimisme que Clemenceau jugeait intolérable, bien qu'il l'ait toujours couvert »[47].

Entre-deux-guerres

Populaire, couvert d'honneurs, (le , il est Ă©lu membre de l’AcadĂ©mie des sciences morales et politiques), mariĂ© (le , Ă  64 ans, avec EugĂ©nie Hardon, 42 ans[alpha 8] - [48] - [49] sans descendance) PĂ©tain devient progressivement la rĂ©fĂ©rence principale pour les anciens combattants pendant l'entre-deux-guerres, profitant de la mise Ă  l'Ă©cart et des dĂ©cĂšs des autres marĂ©chaux.

Il reste jusqu'en 1931 chef de l'armĂ©e (Ă©cartant Joffre puis Foch auquel il succĂšde Ă  l'AcadĂ©mie française), quelle que soit la majoritĂ© politique en place (en 1924, au moment du cartel des gauches il se serait opposĂ© Ă  l'hypothĂšse d'un coup d'État militaire envisagĂ©e par Lyautey qu'il Ă©carte du Maroc en acceptant d'intervenir personnellement lors de la guerre du Rif). Il a une influence majeure sur la rĂ©organisation de l'armĂ©e entourĂ© d'un cabinet dont de Gaulle est l’une des plumes.

Toutefois Ă  partir de 1929, son opposition Ă  Maginot l'Ă©carte de la tĂȘte des armĂ©es au profit de la gĂ©nĂ©ration des collaborateurs de Foch (Weygand). Il s'appuie sur sa popularitĂ© auprĂšs des ligues pour obtenir, aprĂšs le , le ministĂšre de la Guerre, auquel il ne peut revenir en 1935 ni pendant le Front populaire. Le cabinet Chautemps le choisit comme ambassadeur auprĂšs de Franco aprĂšs la fin de la guerre d'Espagne jusqu'en .

Général en chef de l'armée française et opposant à la ligne Maginot

Philippe PĂ©tain en 1918.
Pétain photographié à la sortie du Conseil supérieur de la guerre, en .

GĂ©nĂ©ral en chef de l’armĂ©e française (il le reste jusqu’au ), il estime en 1919 Ă  6 875 le nombre de chars nĂ©cessaires Ă  la dĂ©fense du territoire (3 075 chars en rĂ©giment de premiĂšre ligne, 3 000 chars en rĂ©serve Ă  la disposition du commandant en chef et 800 chars pour le remplacement des unitĂ©s endommagĂ©es).

Il Ă©crit : « C’est lourd, mais l’avenir est au maximum d’hommes sous la cuirasse »[50].

De 1919 Ă  1929, avec la prĂ©sence d'un ami au poste de chef d'Ă©tat-major des armĂ©es (le gĂ©nĂ©ral Buat jusqu'en 1923, puis aprĂšs sa mort le gĂ©nĂ©ral Debeney), il s'oppose Ă  la construction de fortifications dĂ©fensives, prĂ©conisant au contraire la constitution d'un puissant corps de bataille mĂ©canisĂ© capable de porter le combat le plus loin possible sur le territoire ennemi dĂšs les premiers jours de la guerre. Il parvient Ă  rester l'instigateur principal de la stratĂ©gie, obtenant, en , la dĂ©mission du marĂ©chal Joffre de la prĂ©sidence de la Commission d'Ă©tude de l'organisation de la dĂ©fense du territoire crĂ©Ă©e quinze jours plus tĂŽt, et s'opposant, lors de la sĂ©ance du Conseil supĂ©rieur de la guerre du , Ă  la construction d’une ligne dĂ©fensive continue. Il y prĂŽne des mĂŽles dĂ©fensifs sur les voies d’invasion.

Lors de la sĂ©ance du , et contre l’avis de Foch, qui estime que PĂ©tain donne Ă  tort aux chars une importance capitale, il prĂ©conise et obtient l’étude de trois prototypes de chars (lĂ©ger, moyen et lourd).

Il doit, cependant, finir par s'incliner et accepter la construction de la ligne Maginot, lorsque André Maginot, alors ministre de la Guerre, déclare, lors du débat parlementaire du : « ce n'est pas Pétain qui commande, mais le ministre de la Guerre ».

Guerre du Rif

Durant la guerre du Rif, le maréchal Lyautey accueille au Maroc le maréchal Pétain à sa descente d'avion
(photographie agence Meurisse, ).

En 1925 et 1926, PĂ©tain combat la rĂ©volte des forces d’Abd el-Krim, chef de la trĂšs jeune rĂ©publique du Rif, au Maroc, contre leurs voisins espagnols. PĂ©tain remplace avec peu d'Ă©gards le marĂ©chal Lyautey, et commande les troupes françaises en campagne avec l'armĂ©e espagnole (450 000 hommes au total), dans laquelle se trouve Franco. La campagne est victorieuse, en partie grĂące Ă  l'emploi par les Espagnols d'armes chimiques sur les populations civiles[51] - [52]. Abd el-Krim se plaignit Ă  la SociĂ©tĂ© des Nations de l'utilisation par l'aviation française de gaz moutarde sur les douars et les villages[53].

Relations avec de Gaulle

Le capitaine Charles de Gaulle Ă  l'École supĂ©rieure de guerre, 44e promotion (1922-1924).

À partir de l’affectation de Charles de Gaulle au 33e rĂ©giment d’infanterie commandĂ© par Philippe PĂ©tain, alors colonel, le destin des deux hommes s'est rĂ©guliĂšrement croisĂ©. Charles de Gaulle est affectĂ© Ă  ce rĂ©giment le Ă  sa sortie de Saint-Cyr avec un grade de sous-lieutenant. En 1924, Ă  l'occasion d'une visite Ă  l'École de guerre, PĂ©tain s'Ă©tonne de la faiblesse des notes attribuĂ©es Ă  de Gaulle. Ses professeurs apprĂ©ciaient peu l'indĂ©pendance de celui-ci, trait de caractĂšre qu'il partageait avec PĂ©tain. L'intervention de PĂ©tain a probablement conduit Ă  une rectification Ă  la hausse desdites notes[54].

En 1925, Charles de Gaulle est dĂ©tachĂ© Ă  l'Ă©tat-major de Philippe PĂ©tain, vice-prĂ©sident du Conseil supĂ©rieur de la Guerre. PĂ©tain briguait l'AcadĂ©mie française et avait pu apprĂ©cier la qualitĂ© de la plume de De Gaulle en lisant La discorde chez l'ennemi, publiĂ© en 1924. Il lui demande de prĂ©parer la rĂ©daction d'un ouvrage sur l'histoire du soldat pour l'aider Ă  soutenir sa candidature. De Gaulle prĂ©pare le livre, Le Soldat Ă  travers les Ăąges, qui est quasiment fini Ă  la fin de l'annĂ©e 1927 lorsque de Gaulle tient Ă  l'École de guerre trois confĂ©rences remarquĂ©es, respectivement intitulĂ©es : « L'action de guerre et le chef », « Du caractĂšre » et « Du prestige » en prĂ©sence du MarĂ©chal. Mais son opinion envers PĂ©tain change en raison de l'attitude du MarĂ©chal vis-Ă -vis de Lyautey au moment de son Ă©viction. Lorsqu'en PĂ©tain veut faire retoucher le livre par un autre de ses collaborateurs, de Gaulle proteste Ă©nergiquement[55]. En 1929, PĂ©tain succĂšde Ă  Foch Ă  l'AcadĂ©mie française sans avoir eu besoin du livre. PĂ©tain demande Ă  de Gaulle d'Ă©crire l'Ă©loge de son prĂ©dĂ©cesseur sous la coupole, mais n'utilise pas le texte proposĂ©.

En 1931, au retour du Liban, de Gaulle qui souhaitait une chaire d'enseignement Ă  l'École de guerre est affectĂ© contre son vƓu au SecrĂ©tariat gĂ©nĂ©ral de la DĂ©fense nationale (SGDN) Ă  Paris. SollicitĂ©, PĂ©tain rĂ©pond Ă  de Gaulle : « vous y serez employĂ© Ă  des travaux qui pourront certainement vous aider Ă  faire mĂ»rir vos idĂ©es »[56]. De Gaulle est en dĂ©calage stratĂ©gique et en conflit littĂ©raire avec son supĂ©rieur ; PĂ©tain, lui, considĂšre qu'il a aidĂ© au mieux son subalterne qui fait montre d'un peu trop d'orgueil. En 1932, de Gaulle dĂ©die au marĂ©chal PĂ©tain son ouvrage Le Fil de l'Ă©pĂ©e : « Car rien ne montre mieux que votre gloire, quelle vertu l'action peut tirer des lumiĂšres de la pensĂ©e ». En 1938, de Gaulle rĂ©emploie le texte du Soldat Ă  travers les Ăąges pour rĂ©diger son livre La France et son armĂ©e. PĂ©tain s'oppose Ă  la publication de l'ouvrage, puis finit par y consentir aprĂšs une explication de vive voix avec son ancien porte-plume, qui corrige toutefois la dĂ©dicace proposĂ©e par le marĂ©chal. Celui-ci en garde une rancune tenace contre de Gaulle qu'il tient pour « orgueilleux, ingrat et aigri[57]. »

Élection Ă  l'AcadĂ©mie française

Philippe PĂ©tain vers 1930.

Le , il est Ă©lu Ă  l’unanimitĂ© membre de l’AcadĂ©mie française, au 18e fauteuil, oĂč il succĂšde au marĂ©chal Foch.

Le , il est reçu à l'Académie française par Paul Valéry, dont le discours de réception, qui retrace sa biographie, rappelle et développe une phrase sur laquelle insistait Pétain, « le feu tue » et comporte des considérations sur la façon dont « la mitrailleuse a modifié durablement les conditions du combat à terre » et les rÚgles de la stratégie. Le discours rappelle aussi les désaccords, dans le respect mutuel, entre Pétain et Joffre. Le discours de réception du maréchal Pétain est un hommage au maréchal Foch auquel il succÚde[58].

Selon Jacques Madaule, Philippe Pétain s'opposa à l'élection à l'Académie française de Charles Maurras, qui sera un de ses plus grands défenseurs, et il félicita François Mauriac d'avoir fait campagne contre lui[59].

Philippe Pétain n'était pas ouvertement antisémite avant d'accéder au pouvoir : ainsi, il critiqua fermement Louis Bertrand, qui avait protesté contre l'élection d'André Maurois, un Juif, à l'Académie française, Maurois lui en fut reconnaissant[60]. Néanmoins, dans ses échanges de correspondance privée avec le couple Pardee, voisin américain de sa maison du Var, Philippe Pétain se plaignait des Juifs[7].

Inspecteur général de la défense aérienne

Le , il est remplacĂ© par le gĂ©nĂ©ral Weygand au poste de vice-prĂ©sident du Conseil supĂ©rieur de la guerre (correspondant Ă  la fonction de commandant suprĂȘme de l’armĂ©e), et nommĂ© inspecteur gĂ©nĂ©ral de la dĂ©fense aĂ©rienne du territoire.

À ce titre, il Ă©crit le Ă  Pierre Laval, alors prĂ©sident du Conseil, pour lui demander la crĂ©ation d’une force aĂ©rienne puissante de dĂ©fense et d’attaque, indĂ©pendante de l’armĂ©e de terre et de la marine. Il prĂ©conise pour cela de prĂ©lever 250 millions de francs sur les crĂ©dits allouĂ©s Ă  la construction de la ligne Maginot.

Il reste influent dans le monde militaire et politique, est actif dans le mouvement antiparlementaire le Redressement français, qui souhaite un exécutif fort[7].

Ministre de la Guerre

De gauche Ă  droite, Pierre-Étienne Flandin, PĂ©tain et Adrien Marquet en 1934.

AprĂšs la crise du , le , Philippe PĂ©tain est nommĂ© ministre de la Guerre dans le gouvernement Doumergue de tendance radicale, fonction qu’il occupe jusqu’au renversement du cabinet le .

Sa présence, populaire parmi les anciens combattants qui avaient défilé, contribue à l'image d'union nationale voulue par Doumergue. Elle est symbolique de la fin du second cartel des gauches : les gouvernements des deux années 1934/36 sont, le plus souvent une alliance des radicaux et des partis de centre-droit. Ils conduisent des politiques sensiblement déflationnistes, visant à réduire les déficits en diminuant les dépenses.

Puis, l'arrivĂ©e au pouvoir de Hitler conduit la France Ă  abandonner progressivement sa politique de dĂ©sarmement, mĂȘme si simultanĂ©ment les choix budgĂ©taires contribuent Ă  maintenir une pression Ă  la baisse sur les crĂ©dits militaires. Les choix stratĂ©giques dĂ©fensifs absorbent en outre une forte partie des crĂ©dits. La polĂ©mique des annĂ©es 1940 sur les responsables du retard du rĂ©armement français (que PĂ©tain attribuera lors du procĂšs de Riom Ă  Édouard Daladier et LĂ©on Blum, ce dernier dĂ©nonçant en rĂ©plique le faible niveau des crĂ©dits allouĂ©s quand PĂ©tain Ă©tait ministre de la Guerre), et celle sur les choix stratĂ©giques qui conduisirent Ă  la dĂ©faite, expliquent la diversitĂ© des points de vue de l'historiographie Ă©valuant le passage de PĂ©tain au gouvernement.

PĂ©tain et Victor Denain en 1934.

La date du changement de politique budgĂ©taire militaire est prĂ©sentĂ©e avec des nuances : ainsi pour François Paulhac, entre 1934 et 1935, sous les gouvernements de centre droit, les dĂ©penses d'armement sont rĂ©duites de 32 %, tandis que les crĂ©dits militaires n'augmentent qu'Ă  partir de 1936, votĂ©s sans grande opposition, mis Ă  part celle d'une partie de la droite[61]. Pour Robert Frank, elles connaissent — aprĂšs celui de 1924-1930/31 — un « second envol [
] pendant la pĂ©riode de rĂ©armement proprement dit, dĂšs 1935, et surtout de 1936-1937 jusqu'Ă  la guerre »[62]. Jean-Luc Marret estime pour sa part que les rĂ©ductions budgĂ©taires ont cessĂ© en 1934, sans qu'il y ait pour autant cette annĂ©e-lĂ  d'importante augmentation de l'effort de dĂ©fense. Le gouvernement de Gaston Doumergue — oĂč PĂ©tain est ministre de la Guerre — fait ainsi voter des crĂ©dits militaires de trois milliards de francs[63].

Pour Guy Antonetti, la reprise des dĂ©penses — qu'il situe en 1935 — est consĂ©cutive Ă  l'inflexion de la politique Ă©trangĂšre, plus offensive, d'alliances renouĂ©es, entamĂ©e sous le gouvernement de Gaston Doumergue (1934) et son ministre des Affaires Ă©trangĂšres Louis Barthou puis sous le gouvernement de Pierre Laval (1935)[64]. Un article de Philippe Garraud en 2005 consacrĂ© Ă  la question du rĂ©armement[65], estime que d'une maniĂšre gĂ©nĂ©rale, « le bilan de la politique d'armement de 1919 Ă  1935 est extrĂȘmement limitĂ© et, durant toute cette pĂ©riode, les effectifs et le fonctionnement absorbent la plus grande part de budgets rĂ©duits » et que « le rĂ©armement commence rĂ©ellement en 1936 avec la mise en Ɠuvre du programme partiel de 1935 et le plan des 14 milliards », tout en prĂ©cisant qu'« au terme de cette pĂ©riode transitoire, l’annĂ©e 1935 paraĂźt nĂ©anmoins particuliĂšrement importante, et mĂȘme charniĂšre : d’une part elle marque le dĂ©but du rĂ©armement français, mĂȘme si la hausse du budget est encore limitĂ©e ; d’autre part, elle voit la mise au point de nombreux prototypes, qui commenceront Ă  faire l’objet de commandes importantes l’annĂ©e suivante »[65]. Concernant le rĂ©armement, Jean-Luc Marret en situe les « premiers indices » Ă  l'occasion de la rĂ©orientation de la politique Ă©trangĂšre française par Louis Barthou (en 1934) et Pierre Laval (en 1935)[66].

PĂ©tain limite les travaux de la ligne Maginot, en estimant que les Ardennes sont une barriĂšre naturelle difficilement franchissable par les Allemands. Le , il obtient le vote d’un crĂ©dit supplĂ©mentaire de 1,275 milliard de francs pour la modernisation de l’armement[67] - [68].

Partisan des chars de combat, il dĂ©cide avant de l’adoption du char B1 dont il avait fait faire les prototypes pendant son commandement. La mĂȘme annĂ©e, il dĂ©cide aussi de l’adoption du char D2 et de l’étude d’un char lĂ©ger[67]. Soucieux de la formation des officiers supĂ©rieurs, il ordonne que tous les postulants Ă  l’École supĂ©rieure de guerre effectuent des stages prĂ©alables dans des unitĂ©s de chars et d’aviation[69] - [67].

Le , convoquĂ© devant la Commission des finances, il exprime ses vues sur la fortification et renouvelle ses rĂ©serves sur l’efficacitĂ© de la ligne Maginot. Il explique ce qu’est pour lui la fortification : le bĂ©ton est un moyen pour Ă©conomiser les effectifs, mais l’essentiel reste une armĂ©e puissante, sans laquelle elle n’est qu’une fausse sĂ©curitĂ©. Le but de la fortification est de permettre le regroupement des troupes pour l’offensive ou la contre-offensive. Il aura cette phrase : « la ligne Maginot ne met pas Ă  l’abri d’une pĂ©nĂ©tration de l’ennemi, si l’armĂ©e n’est pas dotĂ©e de rĂ©serves motorisĂ©es aptes Ă  intervenir rapidement ». Il soutient nĂ©anmoins le principe de cette ligne. Cependant, selon Robert Aron, les conceptions stratĂ©giques qu'il dĂ©fend Ă  cette Ă©poque sont conformes Ă  son expĂ©rience de la Grande Guerre, ainsi :

« [
] Entre les deux guerres, les conceptions stratĂ©giques qu’il va dĂ©fendre et imposer Ă  l’ArmĂ©e française sont encore strictement conformes Ă  son expĂ©rience du dĂ©but de l’autre conflit : il ne croit pas au rĂŽle offensif des tanks ni aux divisions blindĂ©es. Il prĂ©conise l’édification de la ligne Maginot, derriĂšre laquelle nos combattants de 1939 vont se croire Ă  l’abri et attendront paisiblement l’offensive allemande, qui se dĂ©clenchera ailleurs[70]. »

Le , il convainc Louis Germain-Martin, ministre des Finances, de signer le « plan PĂ©tain pour 1935 » d'un montant de 3,415 milliards de francs, qui prĂ©voit notamment la construction de 1 260 chars[67]. La chute du Gouvernement, et le remplacement du marĂ©chal PĂ©tain par le gĂ©nĂ©ral Maurin, partisan de chars lourds et lents, retarderont la mise en Ɠuvre de ce plan de plusieurs mois.

AprĂšs son expĂ©rience ministĂ©rielle, PĂ©tain jouit d’une trĂšs grande popularitĂ©, Ă  droite mais aussi Ă  gauche. En tĂ©moigne en 1935, la cĂ©lĂšbre campagne lancĂ©e par Gustave HervĂ© intitulĂ©e « C’est PĂ©tain qu’il nous faut ». Le fait de vouloir faire appel en cas de pĂ©ril au marĂ©chal PĂ©tain n'est pas une spĂ©cificitĂ© de la droite et le radical-socialiste Pierre Cot dĂ©clara dĂšs 1934[71] : « Monsieur le MarĂ©chal, en cas de pĂ©ril national, la France compte sur vous ».

Membre du Conseil supérieur de la guerre

Il participe par la suite au Conseil supĂ©rieur de la guerre[alpha 9], oĂč il soutient la politique de guerre offensive promue par le colonel de Gaulle, qui fut un temps son « porte-plume », prĂ©conisant la concentration de chars dans des divisions blindĂ©es.

Il Ă©crit dans la Revue des Deux Mondes du : « Il est indispensable que la France possĂšde une couverture rapide, puissante, Ă  base d’avions et de chars [
] ». Et lors d'une confĂ©rence Ă  l’École de Guerre en : « Les unitĂ©s mĂ©canisĂ©es sont capables de donner aux opĂ©rations un rythme et une amplitude inconnus jusqu’ici [
] L’avion, en portant la destruction jusqu’aux centres vitaux les plus Ă©loignĂ©s fait Ă©clater le cadre de la bataille [
] On peut se demander si l’avion ne dictera pas sa loi dans les conflits de l’avenir [
] »[72]. Ainsi que dans la prĂ©face d'un ouvrage du gĂ©nĂ©ral Sikorsky : « Les possibilitĂ©s des chars sont tellement vastes qu’on peut dire que le char sera peut-ĂȘtre demain l’arme principale »[73].

Le , il dit, devant le prĂ©sident Lebrun, dans un discours Ă  l’École supĂ©rieure de Guerre : « Il est nĂ©cessaire de tenir le plus grand compte des perspectives ouvertes par l’engin blindĂ© et par l’aviation. L’automobile, grĂące Ă  la chenille et Ă  la cuirasse, met la vitesse au service de la puissance [
] La victoire appartiendra Ă  celui qui saura le premier exploiter au maximum les propriĂ©tĂ©s des engins modernes et combiner leur action ». En 1938, il prĂ©face le livre du gĂ©nĂ©ral Louis Chauvineau Une invasion est-elle encore possible, qui prĂŽnait l'utilisation de l'infanterie et des fortifications comme moyens de dĂ©fense, face au « front continu ». Dans cette prĂ©face, PĂ©tain considĂ©rait que l'utilisation des chars et des avions ne modifiaient pas les donnĂ©es de la guerre[74] : « Cela tient Ă  ce qu'il s'est appuyĂ© sur la base solide et inattaquable de donnĂ©es positives fournies par la technique : le front continu est une rĂ©alitĂ© qu'il y a pĂ©ril Ă  mĂ©connaĂźtre (
) On perçoit encore certaines tendances Ă  reprendre la doctrine de la guerre de mouvement dĂšs le dĂ©but des opĂ©rations, suivant les idĂ©es en honneur avant 1914. L'expĂ©rience de la guerre a Ă©tĂ© payĂ©e trop cher pour qu'on puisse revenir impunĂ©ment aux anciens errements ».

PĂ©tain est recrutĂ© Ă  l'École libre des sciences politiques en 1938 pour y donner un cours d'histoire militaire, oĂč il promeut les cuirassĂ©s et sa doctrine militaire sur la base de rĂ©cits de la PremiĂšre Guerre mondiale[75].

À l’instigation des grands chefs militaires (Foch, Joffre), les gouvernements de la fin des annĂ©es 1920 vont affecter d’importants efforts budgĂ©taires Ă  la construction de lignes de dĂ©fense. Cette stratĂ©gie est symbolisĂ©e par la coĂ»teuse, et de surcroĂźt incomplĂšte ligne Maginot qui fut arrĂȘtĂ©e Ă  la frontiĂšre belge. Winston Churchill, dans son ouvrage sur la Seconde Guerre mondiale[76], Ă©met l'avis que la ligne Maginot aurait pu ĂȘtre d'une trĂšs grande utilitĂ© si elle avait Ă©tĂ© correctement exploitĂ©e et qu'elle paraissait justifiĂ©e compte tenu, en particulier, du rapport numĂ©rique entre les populations de la France et de l'Allemagne[76].

Winston Churchill juge « extraordinaire qu'elle n'ait Ă©tĂ© prolongĂ©e au moins le long de la Meuse »[76] mais indique : « [
] Mais le marĂ©chal PĂ©tain s'Ă©tait opposĂ© Ă  cette extension [
]. Il soutenait avec force que l'on devait exclure l'hypothĂšse d'une invasion par les Ardennes en raison de la nature du terrain. En consĂ©quence, on Ă©carta cette Ă©ventualitĂ© »[76].

AprĂšs le succĂšs de la guerre-Ă©clair menĂ©e par les Allemands via les Ardennes, PĂ©tain ne pouvait plus ignorer que la dĂ©bĂącle de 1940 Ă©tait aussi due aux « grands chefs militaires », dont les autoritĂ©s gouvernementales n’avaient fait que suivre les orientations stratĂ©giques. Il fit pourtant juger les hommes politiques en charge avant 1940 comme « responsables » exclusifs de la dĂ©faite.

Ambassadeur en Espagne

Le gĂ©nĂ©ral Franco, entourĂ© par JosĂ© MoscardĂł et RamĂłn Serrano SĂșñer, en 1938.
L'ambassadeur Philippe PĂ©tain et le baron de las Torres, interprĂšte de Franco, sortant d'une entrevue avec le Caudillo Ă  Burgos en .

La France reconnaĂźt officiellement le nouveau gouvernement franquiste le [77]. Le , PĂ©tain est nommĂ© ambassadeur de France en Espagne. Hostile aux nationalistes espagnols, la gauche française proteste au nom de la rĂ©putation « rĂ©publicaine » du marĂ©chal. Ainsi, L'HumanitĂ© honore ce dernier en regard du « gĂ©nĂ©ral fĂ©lon » Franco tandis que dans Le Populaire du , LĂ©on Blum dĂ©crit alors PĂ©tain comme « le plus noble, le plus humain de nos chefs militaires », formule dont les partisans de la rĂ©habilitation de l'ancien « chef de l'État français » sauront tirer largement parti aprĂšs la Seconde Guerre mondiale[78]. Pour l'heure, la nomination de PĂ©tain — qui jouit d'un grand prestige en Espagne — vise Ă  amĂ©liorer l'image de la RĂ©publique française en attĂ©nuant le souvenir du soutien hexagonal aux rĂ©publicains espagnols pendant la guerre civile[79].

Le , le marĂ©chal prĂ©sente ses lettres de crĂ©ance au ministre de l'IntĂ©rieur, Serrano SĂșñer, qui le reçoit trĂšs froidement[80]. Selon l'historien Michel Catala, il gardera le souvenir de ce mauvais accueil et ses liens vis-Ă -vis de Franco resteront trĂšs critiques, malgrĂ© la propagande ultĂ©rieure dĂ©peignant des rapports privilĂ©giĂ©s entre le rĂ©gime de Vichy et la dictature du Caudillo[80]. Dans l'immĂ©diat, PĂ©tain a pour mission d'assurer la neutralitĂ© de l'Espagne en vue du prochain conflit europĂ©en[80]. Au nom du rapprochement diplomatique de la France avec l’Espagne, il lui incombe de superviser, dans le cadre des accords BĂ©rard-Jordana, le rapatriement Ă  Madrid des rĂ©serves d'or de la Banque d’Espagne, de l'armement rĂ©publicain[81] ainsi que des Ɠuvres d'art[82] que l’ancienne RĂ©publique espagnole avait transfĂ©rĂ©s Ă  l'abri en France durant la guerre civile. L'ambassadeur de France sait s'entourer d'une Ă©quipe de qualitĂ© mĂȘlant personnel diplomatique chevronnĂ© et officiers militaires dĂ©vouĂ©s[83]. En quelques mois, le marĂ©chal se rĂ©concilie avec l'Ă©lite espagnole. Sa prĂ©sence active dans le pays a pour consĂ©quence un renforcement de l'image de la France, en dĂ©pit d'une presse espagnole trĂšs francophobe[84].

Philippe Pétain, ambassadeur de France à Burgos, est accueilli par une délégation d'anciens combattants à son arrivée au Perthus.
Une du journal Excelsior, .

Malgré de nombreuses réticences du cÎté français, notamment en raison de tensions militaires franco-espagnoles au Maroc en mars-, Pétain engage son autorité auprÚs du président du Conseil Daladier afin de réaliser les accords Bérard-Jordana, condition sine qua non exigée par les autorités franquistes[85]. La France finit par céder, sans obtenir de contreparties significatives. La déclaration officielle de neutralité de l'Espagne le semble couronner les efforts français, mais résulte davantage du réalisme de Franco tenant compte des faibles capacités militaires espagnoles consécutives à la guerre civile. La « détente de façade de l'été 1939 » masque l'échec de la politique de conciliation française visant à obtenir des relations de bon voisinage et un accord militaire entre les deux pays. Si le Caudillo incline prudemment vers une neutralité de fait, il ne desserre pas pour autant ses liens avec le TroisiÚme Reich et l'Italie fasciste[86].

Conscient de la fragilitĂ© de la neutralitĂ© espagnole, PĂ©tain affirme que celle-ci « dĂ©pendra beaucoup » de l'attitude de la France. Son « objectif stratĂ©gique principal » demeure la rĂ©conciliation « Ă  n'importe quel prix avec l'Italie et l'Espagne afin de concentrer tous les efforts de la France contre l'Allemagne », souligne Michel Catala. Du reste, le marĂ©chal exprime depuis son souhait d'abandonner sa mission plĂ©nipotentiaire[87]. Le rĂ©tablissement partiel des rapports commerciaux et culturels franco-espagnols dans les derniers mois de 1939 et les premiers mois de 1940 ne modifie pas l'ambiguĂŻtĂ© de la position franquiste vis-Ă -vis de l'Axe et de la France[88]. Tout au plus PĂ©tain peut-il ĂȘtre crĂ©ditĂ© d'une amorce de normalisation — « superficielle et Ă©minemment provisoire » — des relations franco-espagnoles[89].

En dĂ©pit de l'insuccĂšs de sa stratĂ©gie vis-Ă -vis de Franco, « la rĂ©ussite personnelle de PĂ©tain est indĂ©niable » puisqu'il confirme son autoritĂ© sur les militaires français et Ă©tablit son aptitude Ă  imposer ses vues au gouvernement, en sus d'acquĂ©rir une rĂ©putation de fin diplomate. Or Michel Catala doute que le marĂ©chal ait rĂ©alisĂ© le fiasco de sa mission d'ambassadeur, eu Ă©gard Ă  sa future politique allemande Ă  Vichy oĂč il fera « preuve de la mĂȘme obstination et du mĂȘme aveuglement Ă  poursuivre une politique de concessions afin d'obtenir des amĂ©liorations des conditions d'armistice »[90].

Pendant la drĂŽle de Guerre : un recours possible

Philippe PĂ©tain vers 1940.

À la dĂ©claration de guerre, en , le marĂ©chal PĂ©tain, depuis Madrid, refuse une proposition du prĂ©sident du Conseil Édouard Daladier d'entrer au gouvernement, et il se tient prudemment Ă  l'Ă©cart des sollicitations officielles. Cette proposition avait Ă©tĂ© inspirĂ©e par le prĂ©sident de la Chambre des dĂ©putĂ©s, le radical-socialiste Édouard Herriot, comme condition Ă  son acceptation Ă©ventuelle du ministĂšre des Affaires Ă©trangĂšres[91].

Cependant, Pétain ne fait nullement mystÚre de son hostilité personnelle à la guerre contre Hitler. « Autant il est certain qu'il n'a eu aucune part dans les intrigues tramées en vue d'une paix de compromis, autant il est manifeste qu'il a, depuis le début, son rÎle dans les calculs de Laval et de certains membres du complot de la paix », souligne l'historien Jean-Louis Crémieux-Brilhac[92].

Chef de file des parlementaires « dĂ©faitistes », Pierre Laval songe ainsi prĂ©cocement Ă  un gouvernement PĂ©tain dont il serait le chef rĂ©el, et expose fin Ă  l'un de ses interlocuteurs : « Je n'ai pas, comme on dit, partie liĂ©e avec PĂ©tain, mais je sais son prestige. [
] Qu'est-ce qu'on lui demandera ? D'ĂȘtre un dessus de cheminĂ©e, une statue sur un socle. Son nom ! Son prestige ! Pas davantage »[93].

Le , un rapport de l'ambassadeur d'Italie note que « le marĂ©chal PĂ©tain fait figure de reprĂ©sentant de la politique de paix en France [
] PĂ©tain croit que, mĂȘme en cas de victoire, la France n'en recueillerait pas les fruits. Si la question de la paix devenait aiguĂ« en France, PĂ©tain y jouerait un rĂŽle »[93].

Arrivé au pouvoir le , la situation militaire se dégradant, le président du Conseil Paul Reynaud songe également à utiliser le prestige du maréchal Pétain auprÚs des Français et lui propose en vain, début mai, d'entrer au gouvernement[94]. Jugeant la situation favorable pour lui, Pétain accepte de revenir à Paris et d'intégrer le gouvernement note l'historien Gérard Boulanger.

Au moment de retourner aux responsabilitĂ©s, le marĂ©chal « partage le mĂ©pris de la droite antiparlementaire pour le rĂ©gime qui l'a couvert d'honneurs. [
] La France selon son cƓur est la France paysanne dont il est issu, respectueuse des hiĂ©rarchies et de l'ordre Ă©tabli, telle qu'il souhaitera la faire revivre Ă  Vichy. Ses vues politiques sont courtes : il ne supporte pas les bavardages politiciens ; il reproche aux instituteurs socialistes d'avoir favorisĂ© l'antipatriotisme, comme au Front populaire d'avoir favorisĂ© le dĂ©sordre. Son bon sens proverbial va de pair avec une grande ignorance et des vues simplistes en matiĂšre de politique Ă©trangĂšre. [
] Il ne voit rien de plus en Hitler qu'un Guillaume II plĂ©bĂ©ien ; il ne doute pas qu'on puisse s'accommoder avec lui moyennant quelques sacrifices », analyse Jean-Louis CrĂ©mieux-Brilhac[47]. De surcroĂźt, l'action de PĂ©tain est marquĂ©e par une anglophobie et un dĂ©faitisme dĂ©jĂ  sensibles en 1914-1918[47].

Vice-président du Conseil pendant l'invasion de 1940

Pétain, vice-président du Conseil, dans son bureau en .
De gauche Ă  droite : Maxime Weygand, Paul Baudouin, Paul Reynaud et Philippe PĂ©tain ().

Le , une semaine aprĂšs l'offensive allemande, PĂ©tain, alors ĂągĂ© de 84 ans, est nommĂ© vice-prĂ©sident du Conseil dans le gouvernement de Paul Reynaud. Franco lui avait conseillĂ© de ne pas accepter d’apporter sa caution Ă  ce gouvernement. Pour Reynaud, il s'agit de remonter le moral des Français, de resserrer les rangs et de renforcer sa propre image au parlement[95]. Cette nomination est bien accueillie dans le pays, au Parlement et dans la presse, quoiqu'elle reçoive moins de publicitĂ© que celle de Weygand comme gĂ©nĂ©ralissime, ou que celle de Georges Mandel, partisan de la rĂ©sistance Ă  tout prix, comme ministre de l'IntĂ©rieur[96].

Comme la plupart de ses ministres ou des parlementaires, Paul Reynaud sous-estime le vieil homme initialement taciturne et passif qu’est PĂ©tain, et il n’imagine pas qu’il puisse jouer plus qu’un rĂŽle purement symbolique[97].

Cependant, dĂšs le , dans une note Ă  Paul Reynaud, PĂ©tain refuse de considĂ©rer les chefs militaires comme responsables de la dĂ©faite, et rejette la responsabilitĂ© du dĂ©sastre sur « les fautes que [le pays] a et que nous avons tous commises, ce goĂ»t de la vie tranquille, cet abandon de l'effort qui nous ont amenĂ©s lĂ  oĂč nous sommes »[98]. Cette interprĂ©tation moraliste de la dĂ©faite n'est pas sans annoncer les appels Ă  la contrition nationale et la politique d'ordre moral qui caractĂ©riseront le rĂ©gime de Vichy.

Le , il fait preuve d’anglophobie et de pessimisme devant l’ambassadeur amĂ©ricain Bullit. Accusant l'Angleterre de ne pas fournir une aide suffisante Ă  la France en pĂ©ril, il lui explique qu'en cas de dĂ©faite « le gouvernement français doit faire tout son possible pour venir Ă  composition avec les Allemands, sans se prĂ©occuper du sort de l’Angleterre »[96]. Le 6, il ne rĂ©agit pas lorsque le gĂ©nĂ©ral Spears, reprĂ©sentant de Churchill auprĂšs du gouvernement français, l'avertit que si la France s'entendait avec l'Allemagne, « elle ne perdrait pas seulement son honneur, mais, physiquement, elle ne s’en relĂšverait pas. Elle serait liĂ©e Ă  une Allemagne sur la gorge de laquelle nos poings ne tarderont pas Ă  se refermer »[99].

À partir du , alors que la bataille de France est perdue et le gouvernement repliĂ© en Touraine, PĂ©tain se fait ouvertement l'un des avocats les plus constants de l’armistice au sein du gouvernement. Ce jour-lĂ , il lit au Conseil des ministres une note dans laquelle il dĂ©clare qu’il n’est aucunement question pour lui de quitter la France pour poursuivre la lutte[100].

Le , Paris est occupĂ© par l’armĂ©e allemande. Le Gouvernement, le prĂ©sident de la RĂ©publique et les AssemblĂ©es sont alors rĂ©fugiĂ©s Ă  Bordeaux. PĂ©tain s'y confirme comme le chef de file des partisans de l’armistice, et met sa dĂ©mission dans la balance.

Pétain s'oppose au projet de fusion entre les gouvernements britannique et français.

Président du Conseil et armistice

Le , se croyant en minoritĂ© au sein du Conseil des ministres, Ă  tort semble-t-il[101] - [102], Paul Reynaud prĂ©sente la dĂ©mission du Gouvernement et suggĂšre, suivi en cela par les prĂ©sidents du SĂ©nat et de la Chambre des dĂ©putĂ©s, de confier la prĂ©sidence du Conseil au marĂ©chal PĂ©tain, choix aussitĂŽt approuvĂ© par le prĂ©sident de la RĂ©publique Albert Lebrun (voir gouvernement Philippe PĂ©tain)[100]. Il semble avoir espĂ©rĂ© qu'un Ă©chec de PĂ©tain Ă  obtenir l’armistice lui permette de revenir trĂšs vite au pouvoir.

Le , suivant le conseil Ă©noncĂ© le par le gĂ©nĂ©ral Maxime Weygand, chef d’état-major des armĂ©es, PĂ©tain fait demander aux Allemands, par l'intermĂ©diaire du gouvernement espagnol, les conditions d'un armistice[100].

Pétain lisant un discours radiodiffusé, vers 1940-1944.
Une de La Petite Gironde rapportant le discours de PĂ©tain du .

Depuis le lycĂ©e Longchamps (aujourd'hui lycĂ©e Montesquieu)[103] il enregistre un discours qui est radiodiffusĂ© et oĂč il dĂ©clare, alors qu'il n'a fait que demander les conditions d'un armistice et que les nĂ©gociations n'ont pas commencĂ© : « C’est le cƓur serrĂ© que je vous dis aujourd'hui qu’il faut cesser le combat »[104] - [105] - [106]. Le discours a un effet dĂ©sastreux sur le moral des troupes et prĂ©cipite de fait l’effondrement des armĂ©es françaises. Du Ă  l’entrĂ©e en vigueur de l’armistice le 25, les Allemands font ainsi plus de prisonniers que depuis le dĂ©but de l’offensive le [107].

Dans le mĂȘme discours, PĂ©tain anticipe la crĂ©ation de son propre rĂ©gime en dĂ©clarant qu’il fait « don de sa personne Ă  la France »[100]. Le , dans un nouveau discours[108] rĂ©digĂ©, tout comme le premier, par l'intellectuel de religion juive Emmanuel Berl, il annonce les tractations en vue de l'armistice. Il en dĂ©taille les motifs, ainsi que les leçons que, selon lui, il faudra en tirer. Il y fustige « l'esprit de jouissance » : « [
] Depuis la victoire [de 1918], l'esprit de jouissance l'a emportĂ© sur l'esprit de sacrifice. On a revendiquĂ© plus qu'on n'a servi. On a voulu Ă©pargner l'effort ; on rencontre aujourd'hui le malheur ».

L’armistice est finalement signĂ© le dans la clairiĂšre de CompiĂšgne, aprĂšs avoir Ă©tĂ© approuvĂ© par le Conseil des ministres et le prĂ©sident de la RĂ©publique[100].

Le , PĂ©tain annonce les conditions « sĂ©vĂšres » de l'armistice et dĂ©crit les territoires qui seront sous contrĂŽle allemand. La dĂ©mobilisation fait partie de ces conditions. Il annonce : « C'est vers l'avenir que dĂ©sormais nous devons tourner nos efforts. Un ordre nouveau commence [
] ». Les causes de la dĂ©faite sont Ă  rechercher selon lui dans l'esprit de relĂąchement : « Notre dĂ©faite est venue de nos relĂąchements. L'esprit de jouissance dĂ©truit ce que l'esprit de sacrifice a Ă©difiĂ© [
] »[109] - [110] - [111].

Le , le Gouvernement s’installe dans la rĂ©gion de Clermont-Ferrand puis, en raison des capacitĂ©s d’hĂ©bergement limitĂ©es, dĂ©mĂ©nage Ă  nouveau le pour Vichy, en zone non occupĂ©e par l’armĂ©e allemande[112]. Cette ville prĂ©sentait les avantages d’un rĂ©seau tĂ©lĂ©phonique extrĂȘmement performant et de la prĂ©sence d’une multitude d’hĂŽtels qui furent rĂ©quisitionnĂ©s pour abriter les diffĂ©rents ministĂšres et les ambassades.

Vote des pleins pouvoirs

Le , une loi, dite « constitutionnelle »[113] - [114], votĂ©e par les deux Chambres (569 voix pour, 80 voix contre[115], 20 abstentions, 176 absents et 1 ne prenant pas part au vote) rĂ©unies en AssemblĂ©e nationale au casino de Vichy « donne tous pouvoirs au gouvernement de la RĂ©publique, sous l'autoritĂ© et la signature du marĂ©chal PĂ©tain », sans contrĂŽle de l’AssemblĂ©e, avec pour mission la promulgation d’une nouvelle Constitution. Celle-ci ne verra jamais le jour[116].

L'« État français » (nouveau nom officiel de la France, remplaçant la dĂ©nomination « RĂ©publique française ») allait donc demeurer un État provisoire.

La constitutionnalitĂ© de cette rĂ©forme fut contestĂ©e pour plusieurs motifs, dont le fait que la Constitution ne peut pas ĂȘtre modifiĂ©e sous la menace directe d'un ennemi. Surtout, la confusion de tous les pouvoirs (constituant, lĂ©gislatif, exĂ©cutif et judiciaire) entre les mĂȘmes mains Ă©tait contraire aux fondements mĂȘme des lois constitutionnelles de 1875, fondĂ©es sur une sĂ©paration des pouvoirs. Il en rĂ©sulta un rĂ©gime anti-dĂ©mocratique, sans constitution et sans contrĂŽle parlementaire.

Ce rĂ©gime sera qualifiĂ© de « dictature pluraliste » par Stanley Hoffmann, qui dĂ©montre, entre autres, les aspects dictatoriaux dans une publication parue en 1956[117]. D'autres auteurs, comme Robert Aron, Robert Paxton et Marc Ferro, Ă©voquent, au sujet de PĂ©tain, des dictateurs[118] tels que Salazar[119] - [120] - [121] et son rĂ©gime[119], Franco[120] - [122], voire Mussolini[121]. Pour Aron : « La premiĂšre [pĂ©riode du pouvoir de Vichy], qui va de l'armistice au , est celle oĂč PĂ©tain peut encore avoir l'illusion d'ĂȘtre un chef d'État autoritaire, qui ne doit rien Ă  personne et dont le pouvoir en France est presque l'Ă©quivalent de celui des dictateurs Salazar au Portugal, Franco en Espagne, ou Mussolini en Italie »[121].

Selon Paxton, « PĂ©tain lui-mĂȘme se trouvait plus de points communs avec Franco et Salazar qu'avec Hitler »[120], tandis que pour Ferro c'est l'exemple de Salazar qui inspire le programme du marĂ©chal, ainsi : « le rĂ©gime [qu'il] institue Ă©voque effectivement plutĂŽt le salazarisme [
] »[119] et : « Les rĂ©gimes de Kemal, Horthy, Franco, avaient ses prĂ©fĂ©rences par rapport Ă  celui de Mussolini du fait de la dualitĂ© Mussolini-Victor-Emmanuel III et selon l'idĂ©e qu'il se fait de son pouvoir : « le MarĂ©chal n'a de compte Ă  rendre qu'Ă  sa conscience », mais de loin il prĂ©fĂ©rait celui de Salazar [
] »[123].

Pouvoir personnel
Acte constitutionnel numĂ©ro 2 fixant les pouvoirs du chef de l'État français, signĂ© par PĂ©tain le , Archives nationales de France.

DĂšs le , par trois « actes constitutionnels », PĂ©tain se proclame chef de l'État français et s'arroge tous les pouvoirs[124] - [125] - [126].

Par son acte constitutionnel no 1 du [124], il abroge l'article 2 de la loi constitutionnelle du , ce qui consiste Ă  dĂ©truire le fondement mĂȘme de la RĂ©publique, sachant que cet article de loi — non modifiable depuis la rĂ©vision du [127] — est celui qui Ă©tablissait le rĂ©gime rĂ©publicain en France.

Pierre Laval lui dit un jour : « Connaissez-vous, Monsieur le MarĂ©chal, l'Ă©tendue de vos pouvoirs ? [
] Ils sont plus grands que ceux de Louis XIV, parce que Louis XIV devait remettre ses Ă©dits au Parlement, tandis que vous n'avez pas besoin de soumettre vos actes constitutionnels au Parlement, parce qu'il n'est plus lĂ  »[121], PĂ©tain rĂ©pondit : « C'est vrai »[128].

Aux traditionnels attributs rĂ©galiens (droit de grĂące, nominations et rĂ©vocations des ministres et des hauts fonctionnaires), PĂ©tain ajoute en effet des droits tout Ă  fait inĂ©dits, mĂȘme du temps de la monarchie absolue. Il peut ainsi rĂ©diger et promulguer seul une nouvelle Constitution, il peut dĂ©signer son successeur (qui est le vice-prĂ©sident du Conseil), il « a la plĂ©nitude du pouvoir gouvernemental, il nomme et rĂ©voque les ministres et secrĂ©taires d'État, qui ne sont responsables que devant lui »[125] et il « exerce le pouvoir lĂ©gislatif, en conseil des ministres [
] »[125]. Les lois, adoptĂ©es de sa seule autoritĂ©, sont promulguĂ©es sur la formule : « Nous, marĂ©chal de France, le Conseil des ministres entendu, dĂ©cidons
 ». Par prudence, par contre, PĂ©tain Ă©vite de s’attribuer le droit de dĂ©clarer la guerre seul : il doit pour cela consulter les Ă©ventuelles assemblĂ©es.

  • Drapeau français durant le rĂ©gime de Vichy,.
    Drapeau français durant le régime de Vichy[129] - [130].
  • La francisque, emblĂšme personnel de Philippe PĂ©tain, utilisĂ©e comme symbole officieux du rĂ©gime de Vichy.
    La francisque, emblÚme personnel de Philippe Pétain, utilisée comme symbole officieux du régime de Vichy[131].
  • Marque de commandement de Philippe PĂ©tain, chef de l’État français, ornĂ©e de la francisque et de ses sept Ă©toiles de marĂ©chal de France.
    Marque de commandement de Philippe PĂ©tain, chef de l’État français, ornĂ©e de la francisque et de ses sept Ă©toiles de marĂ©chal de France.

Jusqu’en , PĂ©tain reste Ă  la fois chef de l’État et chef du gouvernement en titre, Pierre Laval, Pierre-Étienne Flandin et l'amiral François Darlan n’étant que vice-prĂ©sidents du Conseil. Il gouverne de maniĂšre autoritaire.

Ainsi, le , il Ă©vince brusquement Pierre Laval du pouvoir, non par dĂ©saveu de la politique de collaboration avec l’Allemagne nazie menĂ©e par ce dernier, mais par irritation devant sa maniĂšre trop indĂ©pendante de la conduire. Il est remplacĂ© par Flandin. ParallĂšlement, PĂ©tain signe la rĂ©vocation de nombreux maires, prĂ©fets et hauts fonctionnaires rĂ©publicains, dont le prĂ©fet d'Eure-et-Loir, Jean Moulin, et le prĂ©sident de la Cour des comptes Émile Labeyrie[132].

Le MarĂ©chal supprime prĂ©cocement tous les contre-pouvoirs institutionnels Ă  son autoritĂ©, et tout ce qui rappelle trop le rĂ©gime rĂ©publicain, dĂ©sormais honni. Le mot mĂȘme de RĂ©publique disparaĂźt. Les libertĂ©s publiques sont suspendues, tout comme les partis politiques, Ă  l’exception de ceux des collaborationnistes parisiens, qui subsistent en zone nord. Les centrales syndicales sont dissoutes, les unions dĂ©partementales subsistantes unifiĂ©es dans une organisation corporatiste du travail. La franc-maçonnerie est mise hors-la-loi.

Toutes les assemblĂ©es Ă©lues sont mises en sommeil ou supprimĂ©es, les Chambres aussi bien que les conseils gĂ©nĂ©raux. Des milliers de municipalitĂ©s, dont les maires qui n'ont pas voulu signer un serment d'allĂ©geance (non pas Ă  l'État, mais Ă  PĂ©tain lui-mĂȘme) sont destituĂ©es, et remplacĂ©es par des « dĂ©lĂ©gations spĂ©ciales », nommĂ©es par dĂ©cret du pouvoir central, et dont la prĂ©sidence revient Ă  des personnalitĂ©s prĂ©sentant les garanties exigĂ©es du marĂ©chal. Des juridictions d’exception sont mises en place.

Par ordre de Pétain, les journaux reçoivent la consigne d'annoncer, en gros caractÚres et sur 5 colonnes, « le chùtiment des responsables » présumés de la défaite[133] ().

Le , PĂ©tain promulgue la crĂ©ation de la Cour suprĂȘme de justice (dite « cour de Riom »), juridiction d'exception chargĂ©e de conduire le procĂšs des hommes politiques et du gĂ©nĂ©ral Maurice Gamelin que le marĂ©chal estime responsables de l'imprĂ©paration et de la dĂ©faite militaires du pays. LĂ©on Blum, Édouard Daladier et le gĂ©nĂ©ral Gamelin sont ainsi arrĂȘtĂ©s. De surcroĂźt, PĂ©tain envisage de faire condamner Paul Reynaud et Georges Mandel mais ceux-ci, Ă©galement incarcĂ©rĂ©s, ne peuvent pas ĂȘtre inclus dans la procĂ©dure de Riom[134]. CensĂ© servir la propagande vichyste en jugeant les ministres du Front populaire et, au-delĂ , les institutions dĂ©mocratiques de la TroisiĂšme RĂ©publique comme seuls comptables de la dĂ©bĂącle, le procĂšs de Riom tourne Ă  la confusion des accusateurs, devenus Ă  leur tour accusĂ©s. Blum et Daladier bousculent les juges par leur connaissance des dossiers relatifs Ă  la dĂ©fense nationale, rappelant notamment la responsabilitĂ© du gouvernement Doumergue, dont PĂ©tain faisait partie en tant que ministre de la Guerre, dans la rĂ©duction des crĂ©dits militaires en 1934[135] - [136]. Somme toute, le , PĂ©tain reporte le procĂšs sine die par un « dĂ©cret laconique »[137]. Les accusĂ©s, toujours en instance de jugement, demeurent internĂ©s. Fin , le rĂ©gime de Vichy cĂšde devant les exigences des autoritĂ©s allemandes qui, sous prĂ©texte d'empĂȘcher une tentative de libĂ©ration amĂ©ricaine, transfĂšrent les prisonniers sur le territoire du Reich[138] - [139].

Par ailleurs, dĂšs le , Vichy fait condamner Ă  mort par contumace Charles de Gaulle (mĂȘme si PĂ©tain prĂ©tend qu'il veillera Ă  ce que la sentence ne soit pas appliquĂ©e[140] - [141]) puis ses compagnons, qui sont dĂ©chus de la nationalitĂ© française avec ceux qui les rejoignent. Des procĂšs iniques sont intentĂ©s Ă  diverses personnalitĂ©s rĂ©publicaines, ainsi Ă  Pierre MendĂšs France, condamnĂ© en Ă  Clermont-Ferrand pour une prĂ©tendue « dĂ©sertion » (l'affaire du Massilia, bateau-piĂšge), avec Jean Zay et quelques autres.

À l’automne 1941, grĂące Ă  des lois ouvertement antidatĂ©es, Vichy envoie Ă  la guillotine plusieurs prisonniers communistes, dont le dĂ©putĂ© Jean Catelas, en reprĂ©sailles Ă  des attentats anti-allemands[142].

Culte du chef et popularité
Imagerie de propagande : sous la devise « Travail, Famille, Patrie », le portrait de Pétain en médaillon soutenu par une francisque au-dessus d'une scÚne représentant la France rurale et industrielle, 1942.
Une mĂšre de famille avec des enfants tenant le portrait de PĂ©tain.

Jouant le plus possible sur la rĂ©putation du « vainqueur de Verdun », le rĂ©gime exploite le prestige du marĂ©chal et diffuse un culte de la personnalitĂ© omniprĂ©sent : les photos du marĂ©chal figurent dans les vitrines de tous les magasins, sur les murs des citĂ©s, dans toutes les administrations, ainsi qu’aux murs des classes dans tous les locaux scolaires et dans ceux des organisations de jeunesse. On le retrouve jusque sur les calendriers des PTT. Le rĂŽle de Bernard MĂ©nĂ©trel, mĂ©decin et secrĂ©taire particulier du marĂ©chal est prĂ©dominant dans cette action de communication et de propagande.

Le visage du chef de l’État apparaĂźt aussi sur les timbres[143] et les piĂšces de monnaie, tandis que les bustes de Marianne sont retirĂ©s des mairies. La Saint-Philippe, chaque , est cĂ©lĂ©brĂ©e Ă  l’instar d’une fĂȘte nationale. Un hymne Ă  sa gloire, le cĂ©lĂšbre MarĂ©chal, nous voilĂ  ![144], est interprĂ©tĂ© dans de nombreuses cĂ©rĂ©monies en lieu et place de la Marseillaise.

À qui douterait, des affiches de propagande proclament : « Êtes-vous plus Français que lui ? » ou encore « Connaissez-vous mieux que lui les problĂšmes de l’heure ? ».

PĂ©tain exige aussi un serment de fidĂ©litĂ© des fonctionnaires d'État Ă  sa propre personne. L'acte constitutionnel no 7 du oblige dĂ©jĂ  les secrĂ©taires d'État, les hauts dignitaires, et les hauts fonctionnaires Ă  jurer fidĂ©litĂ© au chef de l'État[145].

AprĂšs son discours du (discours dit du « vent mauvais »[146] - [147], oĂč il dĂ©plore les contestations croissantes de son autoritĂ© et de son gouvernement), PĂ©tain Ă©tend le nombre de fonctionnaires devant lui prĂȘter serment. Les actes constitutionnels no 8 et no 9 du concernent respectivement les militaires et les magistrats. Le serment est prĂȘtĂ© par tous les juges Ă  l’exception d’un seul, Paul Didier, aussitĂŽt rĂ©voquĂ© et internĂ© au camp de ChĂąteaubriant. Puis c'est l’ensemble des fonctionnaires qui doit jurer fidĂ©litĂ© au chef de l'État par l’acte constitutionnel no 10 du . Il concernera donc les instituteurs jusqu'aux postiers. NĂ©anmoins, en zone occupĂ©e, oĂč l'autoritĂ© de Vichy est moins assurĂ©e, de hauts fonctionnaires nommĂ©s avant 1940, Ă©viteront discrĂštement de prĂȘter serment Ă  PĂ©tain et, aprĂšs la guerre, pourront ainsi conserver leur poste.

Toute une littĂ©rature, relayĂ©e par la presse sous contrĂŽle et par maints discours officiels ou particuliers, trouve des accents quasi-idolĂątres pour exalter le marĂ©chal comme un sauveur messianique, pour cĂ©lĂ©brer son « sacrifice », pour le comparer Ă  Jeanne d'Arc ou Ă  VercingĂ©torix, pour vanter l’allant et la robustesse physique du vieillard, ou encore la beautĂ© de ses cĂ©lĂšbres yeux bleus. Un chĂȘne pluri-centenaire reçoit son nom en forĂȘt de Tronçais. De nombreuses rues sont dĂ©baptisĂ©es et prennent son nom sur ordre.

Le serment prĂȘtĂ© par les titulaires de la Francisque prĂ©voit : « Je fais don de ma personne au marĂ©chal PĂ©tain comme il a fait don de la sienne Ă  la France. » Henri Pourrat, saluĂ© par le prix Goncourt en 1941 pour son livre Vent de Mars, devient le chantre officiel du nouveau rĂ©gime et se fait l'hagiographe du chef de l'État français avec la sortie de son livre Le Chef français publiĂ© par Robert Laffont en 1942[148].

« La terre, elle, ne ment pas. »
Imagerie de propagande du régime de Vichy.

La popularitĂ© du marĂ©chal ne repose cependant nullement sur le seul appareil de propagande. L’intĂ©ressĂ© sait l’entretenir par de nombreux voyages Ă  travers toute la zone sud, surtout en 1940-1942, oĂč des foules considĂ©rables viennent l’acclamer. Il reçoit de nombreux prĂ©sents de partout ainsi qu'un abondant courrier quotidien, dont des milliers de lettres et de dessins des enfants des Ă©coles. PĂ©tain entretient aussi le contact avec la population par un certain nombre de rĂ©ceptions Ă  Vichy, ou surtout par ses frĂ©quents discours Ă  la radio. Il sait employer dans ses propos une rhĂ©torique sobre et claire, ainsi qu’une sĂ©rie de formules percutantes, pour faire mieux accepter son autoritĂ© absolue et ses idĂ©es rĂ©actionnaires : « La terre, elle, ne ment pas », « Je hais ces mensonges qui vous ont fait tant de mal » (), « Je vous ai parlĂ© jusqu’ici le langage d’un pĂšre, je vous parle Ă  prĂ©sent le langage d’un chef. Suivez-moi, gardez confiance en la France Ă©ternelle » ().

« Revolution nationale » : affiche de 1940

Par ailleurs, de nombreux Ă©vĂȘques et hommes d’Église mettent leur autoritĂ© morale au service d’un culte ardent du marĂ©chal, saluĂ© comme l’homme providentiel. Le , le primat des Gaules, le cardinal Gerlier, proclame ainsi, Ă  la primatiale Saint-Jean de Lyon, en prĂ©sence du marĂ©chal : « Car PĂ©tain, c'est la France et la France, aujourd'hui, c'est PĂ©tain ! »[149]. L’AssemblĂ©e des cardinaux et archevĂȘques de France, en 1941, assure le chef de l’État de sa « vĂ©nĂ©ration », dans une rĂ©solution sans Ă©quivalent au XXe siĂšcle. Mais de nombreux Français de tous bords et de toutes croyances communient pareillement dans la confiance au MarĂ©chal. En particulier, le vieux chef monarchiste Charles Maurras salue son arrivĂ©e comme une « divine surprise »[150].

BasĂ©s Ă  Paris[151], les « ultras de la Collaboration[152] » se montrent gĂ©nĂ©ralement hostiles Ă  Vichy et Ă  la rĂ©volution nationale, qu’ils jugent trop rĂ©actionnaires et pas engagĂ©s assez loin dans l’appui Ă  l’Allemagne nazie. Cependant, Ă  la suite de Philippe Burrin et Jean-Pierre AzĂ©ma, l’historiographie rĂ©cente insiste davantage sur les passerelles qui existent entre les hommes de Vichy et ceux de Paris.

Un ultra-collaborationniste comme le futur chef de la Milice française, Joseph Darnand, est ainsi pendant toute l’Occupation un inconditionnel fervent du MarĂ©chal. Le chef fasciste français Jacques Doriot proclame quant Ă  lui jusqu’à fin 1941 qu’il est « un homme du MarĂ©chal ». Son rival Marcel DĂ©at a essayĂ© en 1940 de convertir PĂ©tain Ă  son projet de parti unique et de rĂ©gime totalitaire, s’attirant de ce dernier une fin de non-recevoir (« un parti ne peut pas ĂȘtre unique ») ; déçu, DĂ©at quitte dĂ©finitivement Vichy et agonit dĂ©sormais PĂ©tain d'attaques dans son journal L’ƒuvre, Ă  tel point que le marĂ©chal, en 1944, se dĂ©brouille pour ne jamais contresigner sa nomination comme ministre. D'autres entourent PĂ©tain de leur vĂ©nĂ©ration sans bornes, tels Gaston Bruneton, chargĂ© de l’action sociale auprĂšs des travailleurs français en Allemagne (volontaires et forcĂ©s) en Ă©troite collaboration avec le DAF (Front allemand du travail), ou encore se voient confier des fonctions importantes par Vichy.

Choix prioritaire du maréchal Pétain
Projet d'affiche conçu pour promouvoir la révolution nationale et stigmatiser la TroisiÚme République prétendument en proie au capitalisme, au communisme, à l'affairisme, aux juifs et aux francs-maçons. Illustration de R. Vachet, Centre de propagande de la révolution nationale d'Avignon.

Instaurant un rĂ©gime contre-rĂ©volutionnaire et autoritaire, le rĂ©gime de Vichy veut rĂ©aliser une « rĂ©volution nationale », Ă  fortes consonances antisĂ©mites, qui rompt avec la tradition rĂ©publicaine et instaure un ordre nouveau fondĂ© sur l’autoritĂ©, la hiĂ©rarchie, le corporatisme, l’inĂ©galitĂ© entre les citoyens. Sa devise « Travail, Famille, Patrie », empruntĂ©e aux « Croix-de-Feu », remplace le triptyque « LibertĂ©, ÉgalitĂ©, FraternitĂ© ». DĂšs l’étĂ© 1940, un discours du marĂ©chal PĂ©tain prĂ©vient que le nouveau rĂ©gime « sera une hiĂ©rarchie sociale. Il ne reposera plus sur l'idĂ©e fausse de l'Ă©galitĂ© naturelle des hommes, mais sur l'idĂ©e nĂ©cessaire de l'Ă©galitĂ© des « chances » donnĂ©es Ă  tous les Français de prouver leur aptitude Ă  « servir ». »[153] - [154] - [155].

La rĂ©volution nationale est la prioritĂ© de PĂ©tain, dont il fait son affaire personnelle, et qu'il encourage par ses discours et ses interventions en Conseil des ministres. Cependant, dĂšs , il avoue Ă  la radio « la faiblesse des Ă©chos qu’ont rencontrĂ© » ses projets, parmi la masse de la population. À partir du retour au pouvoir de Laval en , la rĂ©volution nationale n’est plus Ă  l’ordre du jour.

L’historiographie rĂ©cente, depuis les travaux d'Henri Michel, Robert Paxton ou Jean-Pierre AzĂ©ma, tend Ă  montrer que le dĂ©sir de pouvoir enfin « redresser » la France Ă  sa façon a poussĂ© largement PĂ©tain, en , Ă  retirer la France de la guerre par l’armistice. C’est Ă©galement lui qui le pousse Ă  accepter l’entente avec le vainqueur : la rĂ©volution nationale ne peut prospĂ©rer que dans une France dĂ©faite, car c'est la dĂ©faite qui rend caduques les institutions rĂ©publicaines qui l'ont provoquĂ©e et justifie la nĂ©cessitĂ© d'une telle rĂ©volution. Pour les pĂ©tainistes, une victoire alliĂ©e signifierait de plus le retour des Juifs, des francs-maçons, des rĂ©publicains et des communistes.

Selon ces historiens, PĂ©tain nĂ©glige aussi le pĂ©ril et la contradiction qu’il y a Ă  entreprendre ses rĂ©formes sous le regard de l’occupant. Cette illusion est d’ailleurs dĂ©noncĂ©e dĂšs l’époque par la France libre du gĂ©nĂ©ral de Gaulle, mais Ă©galement par nombre de rĂ©sistants, dont certains avaient pu au dĂ©part ĂȘtre tentĂ©s par le programme de PĂ©tain, mais qui estiment dangereux de se tromper sur les prioritĂ©s et vain d'entreprendre des rĂ©formes, tant que les Allemands ne sont pas chassĂ©s du pays.

En , François Valentin, le chef de la LĂ©gion française des combattants, nommĂ© Ă  ce poste par PĂ©tain lui-mĂȘme, rejoint Londres, enregistre et fait diffuser Ă  la BBC un message retentissant dans lequel il fait son autocritique et dĂ©nonce la faute grave du marĂ©chal et de ses fidĂšles : « On ne reconstruit pas sa maison pendant qu’elle flambe ! »[156]

Mais, si les historiens ont déterminé les intentions de Pétain, ce n'était pas toujours le cas des personnes vivant à l'époque, et, si Pétain conduisit par exemple une politique antisémite, ceux qui l'admiraient n'avaient pas forcément de telles idées. Enfin, les « vichysto-résistants »[157], souvent séduits par la révolution nationale mais hostiles à la collaboration et à l'occupant, furent nombreux.

RĂ©formes, contrĂŽles et exclusions
Texte du statut des Juifs, annoté de la main de Pétain (page 1). Archives Mémorial de la Shoah.
Marque obligatoire bilingue allemand-français à afficher sur la devanture des entreprises juives, France, .

Les premiÚres mesures sont prises par la loi du qui dissout les sociétés secrÚtes et interdit la franc maçonnerie en France et dans toutes les colonies et territoires sous mandat français.

Par décret pris quelques jours aprÚs la loi, les siÚges des obédiences sont occupés par la police et les lieux d'exercice (temples maçonniques) sont fermés. En , le gouvernement oblige tous les agents publics à faire une déclaration, afin de servir le nouveau régime, certifiant qu'ils ne sont pas francs maçons ; s'ils le sont, ils se retrouvent exclus de la fonction publique ou de l'armée.

Les secondes mesures sont notamment dirigées contre les Juifs dÚs la loi du , bien que le maréchal semble avoir été imperméable à l'antisémitisme avant la guerre : il soutint la candidature d'André Maurois à l'Académie française, fut représenté à l'enterrement d'Edmond de Rothschild en 1934, fut témoin au mariage de l'économiste israélite Jacques Rueff en 1937 et le parrain de sa fille en 1938[60].

Une du journal Le Matin du , annonçant la promulgation du statut des Juifs ainsi que la révocation du franc-maçon Louis Doignon.

DĂšs la troisiĂšme semaine de , ainsi, des mesures sont prises pour Ă©carter des fonctionnaires juifs, et une commission est fondĂ©e pour rĂ©viser et annuler des milliers de naturalisations accordĂ©es depuis 1927. En , sans aucune demande particuliĂšre de la part des Allemands, des lois d’exclusion adoptĂ©es Ă  la hĂąte contre les Juifs sont promulguĂ©es[158] (voir l’article : rĂ©gime de Vichy).

Selon le tĂ©moignage du ministre des Affaires Ă©trangĂšres Paul Baudouin[159], PĂ©tain a personnellement participĂ© Ă  la rĂ©daction du statut des Juifs et insistĂ© pour qu’ils soient par exemple davantage exclus du milieu mĂ©dical et de l'enseignement. Le brouillon originel de ce texte, qui est redĂ©couvert en , annotĂ© de la main du marĂ©chal, prouvant ainsi son implication personnelle[160], confirme bien que PĂ©tain a durci la version premiĂšre et fait Ă©tendre l'exclusion Ă  la totalitĂ© des Juifs de France, alors qu'elle ne devait concerner d'abord que les Juifs ou descendants de Juifs naturalisĂ©s aprĂšs 1860[161].

Les textes discriminatoires du sont durcis le : ils excluent ainsi les Français de « race juive » (dĂ©terminĂ©e par la religion des grands-parents) de la plupart des fonctions et activitĂ©s publiques. Des quotas sont fixĂ©s pour l’admission des Juifs au barreau, dans le monde universitaire ou mĂ©dical. Lors du statut du , la liste des mĂ©tiers interdits s’allonge dĂ©mesurĂ©ment.

Dans le mĂȘme temps par une loi du , promulguĂ©e par le marĂ©chal, est crĂ©Ă© un « Commissariat gĂ©nĂ©ral aux questions juives »[162].

AuprĂšs du marĂ©chal se pressent des hommes de tous bords, mĂȘlant de façon baroque, au sein de sa « dictature pluraliste »[117], des technocrates modernistes et des rĂ©volutionnaires déçus du marxisme aussi bien que des maurrassiens et des rĂ©actionnaires. PĂ©tain cependant manifeste personnellement des orientations proches de L’Action française (seul journal qu’il lise quotidiennement) et cite surtout en exemple Ă  ses proches les rĂ©gimes conservateurs et clĂ©ricaux de Salazar et de Franco, qu’il connaĂźt personnellement depuis 1939.

ParallĂšlement au dĂ©veloppement d’un pouvoir centralisĂ©, le marĂ©chal se consacre au « relĂšvement de la France » : rapatriement des rĂ©fugiĂ©s, dĂ©mobilisation, ravitaillement, maintien de l’ordre. Mais loin de se limiter Ă  gĂ©rer les affaires courantes et Ă  assurer la survie matĂ©rielle des populations, son rĂ©gime est le seul en Europe Ă  dĂ©velopper un programme de rĂ©formes intĂ©rieures, indĂ©pendant des demandes allemandes.

Certaines mesures prises Ă  cette Ă©poque ont survĂ©cu, comme la crĂ©ation d’un ministĂšre de la Reconstruction, l’unification du permis de construire, la transformation du service gĂ©ographique des armĂ©es en IGN en , l’étatisation des polices municipales par une loi en en vue de faciliter le contrĂŽle des populations, ou encore une politique familiale, dĂ©jĂ  amorcĂ©e par la IIIe RĂ©publique finissante et prolongĂ©e sous la IVe RĂ©publique. D’autres dispositions sont adoptĂ©es : campagne contre l’alcoolisme, interdiction de fumer dans les salles de spectacle, inscription de la fĂȘte des MĂšres au calendrier. D’autres encore portent la marque des projets rĂ©actionnaires du chef de l’État, comme la pĂ©nalisation des relations homosexuelles avec des personnes mineures. De nombreux Ă©trangers supposĂ©s « en surnombre dans l’économie française » sont incorporĂ©s de force dans des Groupes de travailleurs Ă©trangers (GTE). Les Écoles normales, bastion de l’enseignement laĂŻc et rĂ©publicain, sont supprimĂ©es Ă  la fin de l'annĂ©e 1940 et le baccalaurĂ©at devient alors obligatoire pour pouvoir enseigner dans l'enseignement primaire, le futur instituteur se formant alors « sur le tas » en Ă©tant en stages pendant plus d'une annĂ©e, dans les Ă©coles maternelles ou Ă©lĂ©mentaires. Les lois des 11 et contre l’emploi des femmes en renvoient des milliers au foyer de grĂ© ou de force. Le divorce est rendu nettement plus difficile, et le nombre de poursuites judiciaires et de condamnations pour avortement explose littĂ©ralement par rapport Ă  l’entre-deux-guerres[163]. En , apparaĂźt le premier statut gĂ©nĂ©ral des fonctionnaires civils. Rompant avec l'usage existant depuis prĂšs de cinquante ans qui accordait la grĂące prĂ©sidentielle aux femmes condamnĂ©es Ă  mort, il la refuse Ă  Élisabeth Lamouly qui est guillotinĂ©e en , quatre autres femmes seront ainsi chĂątiĂ©es dont l'avorteuse, Marie-Louise Giraud, qui sera guillotinĂ©e en [164]. Autre rupture avec la IIIe RĂ©publique, les rapports Ă©troits nouĂ©s avec les Églises : PĂ©tain, personnellement peu croyant, voit comme Maurras en la religion un facteur d’ordre, et ne manque pas d’assister Ă  chaque messe dominicale Ă  l’église Saint-Louis de Vichy.

Dans l’optique de la « restauration » de la France, le rĂ©gime de Vichy crĂ©e trĂšs tĂŽt, sous la direction de Joseph de La Porte du Theil, un fidĂšle trĂšs proche du marĂ©chal PĂ©tain, des camps de formation qui durent six mois et qui deviendront plus tard les Chantiers de la jeunesse française. L’idĂ©e est de rĂ©unir toute une classe d’ñge (en remplacement du service militaire interdit par les Allemands), et, Ă  travers une vie au grand air, par des mĂ©thodes proches du scoutisme, leur inculquer les valeurs morales du nouveau rĂ©gime (culte de la hiĂ©rarchie, rejet de la ville industrielle corruptrice), ainsi que la vĂ©nĂ©ration Ă  l’égard du chef de l’État.

D’autres moyens de contrĂŽle sont Ă©galement mis en place dans le domaine Ă©conomique, comme les ComitĂ©s professionnels d’organisation et de rĂ©partition, ayant un pouvoir de juridiction sur leurs membres ou un pouvoir de rĂ©partition des matiĂšres premiĂšres, pouvoir capital en ces temps de restrictions gĂ©nĂ©ralisĂ©es.

À Paris, l'armĂ©e d'occupation allemande sĂ©lectionne les futurs travailleurs du Service du travail obligatoire.

À destination des ouvriers, PĂ©tain prononce le un important discours Ă  Saint-Étienne, oĂč il expose sa volontĂ© de mettre fin Ă  la lutte des classes en prohibant Ă  la fois le capitalisme libĂ©ral et la rĂ©volution marxiste. Il Ă©nonce les principes de la future Charte du travail, promulguĂ©e en . Celle-ci interdit Ă  la fois les grĂšves et le lock-out, instaure le systĂšme du syndicat unique et le corporatisme, mais met aussi en place des comitĂ©s sociaux (prĂ©figuration des comitĂ©s d'entreprise) et prĂ©voit la notion de salaire minimum. La Charte sĂ©duit de nombreux syndicalistes et thĂ©oriciens de tous bords (RenĂ© Belin, Hubert Lagardelle). Mais elle peine Ă  entrer en application, et ne tarde pas Ă  se briser sur l’hostilitĂ© de la classe ouvriĂšre au rĂ©gime et Ă  ces idĂ©es, l’aggravation des pĂ©nuries, l’instauration du Service du travail obligatoire (STO) en , et enfin sur la lutte menĂ©e contre elle par les syndicats clandestins de la RĂ©sistance intĂ©rieure française.

VĂ©ritables enfants chĂ©ris de Vichy, les paysans passent cependant longtemps pour les vrais bĂ©nĂ©ficiaires du rĂ©gime de PĂ©tain. Lui-mĂȘme propriĂ©taire terrien en sa rĂ©sidence de Villeneuve-Loubet, un vaste domaine agricole qu'il gĂšre lui-mĂȘme[165], le marĂ©chal affirme que « la terre, elle, ne ment pas », et encourage le retour Ă  la terre — politique soldĂ©e sur un Ă©chec, moins de 1 500 personnes en quatre ans tentant de suivre ses conseils. La Corporation paysanne est fondĂ©e par une loi du [166] - [167] - [168]. Une partie des membres se dĂ©tache du rĂ©gime fin 1943 et lui font aussi servir de base Ă  la crĂ©ation d'un syndicalisme paysan clandestin fin 1943, la ConfĂ©dĂ©ration gĂ©nĂ©rale de l'agriculture (CGA)[167] qui voit le jour officiellement le , lors de la dissolution de la Corporation paysanne par les autoritĂ©s et qui se prolongera sous la forme de la FNSEA en 1946[169].

DĂ©veloppant frĂ©quemment et complaisamment la vision doloriste d’une France « dĂ©cadente » qui expie maintenant ses « fautes » antĂ©rieures, PĂ©tain entretient les Français dans une mentalitĂ© de vaincu : « Je ne cesse de me rappeler tous les jours que nous avons Ă©tĂ© vaincus » (Ă  une dĂ©lĂ©gation, ), et manifeste un souci particulier pour les soldats prisonniers, images mĂȘmes de la dĂ©faite et de la souffrance : « Je pense Ă  eux parce qu’ils souffrent [
] », (NoĂ«l 1941). Selon son chef de cabinet, Henry du Moulin de LabarthĂšte, le tiers du temps de travail quotidien du marĂ©chal Ă©tait consacrĂ© aux prisonniers. De ces derniers, Vichy rĂȘvait de faire les propagateurs de la rĂ©volution nationale Ă  leur retour.

De la LĂ©gion Ă  la Milice
Joseph Darnand, secrétaire général de la Milice.
Arrestation de résistants par la Milice, .

La pĂ©riode consĂ©cutive Ă  l’armistice voit aussi la crĂ©ation de la « LĂ©gion française des combattants » (LFC), Ă  laquelle sont ensuite agrĂ©gĂ©s les « Amis de la LĂ©gion » et les « Cadets de la LĂ©gion ». FondĂ©e par le trĂšs antisĂ©mite Xavier Vallat le , elle est prĂ©sidĂ©e par le marĂ©chal PĂ©tain en personne. Pour Vichy, elle doit servir de fer de lance de la rĂ©volution nationale et du rĂ©gime. À cĂŽtĂ© des parades, des cĂ©rĂ©monies et de la propagande, les LĂ©gionnaires actifs doivent surveiller la population, et dĂ©noncer les dĂ©viants et les fautifs de « mauvais esprit ».

Au sein de cette lĂ©gion se constitue un Service d’ordre lĂ©gionnaire (SOL) qui s’engage immĂ©diatement dans la voie du collaborationnisme. Cet organisme est commandĂ© par Joseph Darnand, hĂ©ros de la PremiĂšre Guerre mondiale et de la campagne de 1940, et fervent partisan de PĂ©tain (sollicitĂ© en 1941 de joindre la RĂ©sistance, il refuse, selon le tĂ©moignage de Claude Bourdet, parce que « le MarĂ©chal » ne comprendrait pas). Ce mĂȘme organisme devient en la « Milice française ». À la fin de la guerre, alors que Vichy est devenu un rĂ©gime fantoche aux ordres des Allemands, la Milice qui compte au maximum 30 000 hommes, dont beaucoup d’aventuriers et de droit-communs, participe activement Ă  la lutte contre la RĂ©sistance, avec les encouragements publics du marĂ©chal PĂ©tain comme de Pierre Laval, son prĂ©sident officiel. HaĂŻe de la population, la Milice perpĂštre rĂ©guliĂšrement dĂ©lations, tortures, rafles, exĂ©cutions sommaires, qui se mĂȘlent Ă  d’innombrables vols, viols, voies de faits sur la voie publique ou contre des fonctionnaires.

PĂ©tain attend le pour les dĂ©savouer dans une note Ă  Darnand, trop tardivement pour que ce dernier soit dupe. « Pendant quatre ans », rappellera Darnand dans sa rĂ©ponse caustique au marĂ©chal, « vous m’avez encouragĂ© au nom du bien de la France, et maintenant que les AmĂ©ricains sont aux portes de Paris, vous commencez Ă  me dire que je vais ĂȘtre la tache de l’Histoire de France. On aurait pu s’y prendre avant ! ».

Collaboration d’État

Le maréchal Pétain écoutant la voix de son maßtre.
Parodiant un célÚbre logo canin, la caricature est signée Arthur Szyk, New York, 1941[170].

Sur le plan de la politique extĂ©rieure, PĂ©tain a retirĂ© d’emblĂ©e le pays du conflit mondial en cours, et affecte de croire que ce dernier ne concerne plus du tout la France. S’il refuse jusqu’au bout toute rentrĂ©e dans la guerre aux cĂŽtĂ©s d’un des deux camps, il ne refuse pourtant pas le combat contre les AlliĂ©s chaque fois qu'il en a l'occasion et annonce dĂšs , son intention de reprendre par la force les territoires sous autoritĂ© de la France libre[171]. Il pratique donc une « neutralitĂ© dissymĂ©trique » qui profite aux Allemands. Il choisit en effet de s’entendre avec le vainqueur et imagine que la France, avec son empire colonial, sa flotte et sa bonne volontĂ© Ă  coopĂ©rer, peut obtenir une bonne place dans une Europe durablement allemande. Ceci peut ĂȘtre perçu comme une certaine naĂŻvetĂ© de la part de PĂ©tain : dans l’idĂ©ologie nazie, la France Ă©tait en effet l’ennemie irrĂ©ductible de l’Allemagne, elle devait ĂȘtre Ă©crasĂ©e et ne pouvait en aucun cas bĂ©nĂ©ficier d’une quelconque place privilĂ©giĂ©e Ă  ses cĂŽtĂ©s.

Il est bien Ă©tabli, depuis les travaux d'Eberhard JĂ€ckel[172] et surtout de Robert Paxton, que PĂ©tain a activement recherchĂ© et poursuivi cette collaboration avec l’Allemagne nazie. Elle ne lui a pas Ă©tĂ© imposĂ©e. Moins intĂ©ressĂ© par la politique extĂ©rieure que par la rĂ©volution nationale, sa vraie prioritĂ©, PĂ©tain laisse Darlan et Laval mettre en Ɠuvre les volets concrets de la collaboration d’État. Mais l’une est en rĂ©alitĂ© le revers de l’autre, selon les constats concordants de l’historiographie contemporaine : les rĂ©formes vichystes n’ont pu se mettre en place qu’en profitant du retrait de la France de la guerre, et elles ne sauraient survivre Ă  une victoire alliĂ©e. Par ailleurs, le « mythe PĂ©tain »[173] est indispensable pour faire accepter Ă  bien des Français la collaboration. Le prestige du vainqueur de Verdun, son pouvoir lĂ©gal sinon lĂ©gitime, brouillent en effet dans les consciences en dĂ©sarroi la perception des devoirs et des prioritĂ©s.

Rencontre de Montoire
PĂ©tain et Hitler Ă  Montoire, le .

Situation de la France sous le gouvernement de Philippe PĂ©tain :

  • en juillet 1940, selon les accords de Montoire, le pays est coupĂ© en quatre : zone occupĂ©e, zone libre (sĂ©parĂ©es par une ligne de dĂ©marcation), Alsace-Moselle annexĂ©e de facto par le Reich, et deux dĂ©partements du Nord sous l'administration militaire allemande de Bruxelles ;
  • en novembre 1942 la zone occupĂ©e allemande s'Ă©tend : Ă  la zone initiale (dite « zone Nord ») s'ajoute la majeure partie de la zone libre (dite « zone Sud » Ă  partir de ) ; simultanĂ©ment l'Italie occupe la plupart des territoires Ă  l'est du RhĂŽne et la Corse ; Philippe PĂ©tain choisit cependant de rester en France et de poursuivre la Collaboration avec l'aide de Pierre Laval, tandis que l'amiral Darlan, alors Ă  Alger, prend le parti des AlliĂ©s (mais meurt assassinĂ© peu aprĂšs) ;
  • en octobre 1943 les Italiens se retirent, la zone occupĂ©e allemande s'Ă©tend Ă  tout le pays, mais simultanĂ©ment la Corse se libĂšre ; la Collaboration s'intensifie ;
  • durant l'Ă©tĂ© 1944, Ă  partir du 6 juin, la plus grande partie du territoire est libĂ©rĂ©e par les forces AlliĂ©es et celles de la RĂ©sistance : Philippe PĂ©tain et son gouvernement sont alors transportĂ©s par les Allemands Ă  Sigmaringen.

AprĂšs avoir affectĂ© pendant trois mois de rester neutre dans le conflit en cours entre l’Axe et le Royaume-Uni, PĂ©tain engage personnellement et officiellement, par son discours radiodiffusĂ© du , le rĂ©gime de Vichy dans la collaboration[174] - [171], Ă  la suite de l’entrevue de Montoire du , durant laquelle il rencontra Hitler[175]. Cette « poignĂ©e de main de Montoire », sera par la suite largement diffusĂ©e aux actualitĂ©s cinĂ©matographiques, et exploitĂ©e par la propagande allemande.

Certes, l’armistice avait permis, en un premier temps, de limiter l’occupation allemande Ă  la moitiĂ© nord et ouest du territoire. Mais l’autonomie de la zone sud est toute relative, car PĂ©tain, avec ou sans discussion prĂ©liminaire, plie le plus souvent devant les exigences des autoritĂ©s allemandes, quand son gouvernement ne va pas spontanĂ©ment au-devant de celles-ci.

Cette collaboration d’État entraĂźne plusieurs consĂ©quences. Le marĂ©chal, alors que son prestige reste immense, s’interdit de protester, au moins publiquement, contre les exactions de l’occupant et de ses auxiliaires français ou contre l’annexion de fait, contraire Ă  la convention d’armistice, de l’Alsace et de la Moselle. Aux parlementaires des trois dĂ©partements, qu’il reçoit le alors que commence l’incorporation massive et illĂ©gale des Français d'Alsace et de Lorraine, dits les malgrĂ©-nous dans la Wehrmacht, il ne conseille que la rĂ©signation. La veille, il avait fait remettre par Laval une protestation officielle, qui restera sans suite.

En 1941, le régime de Pétain est de facto allié avec les forces militaires allemandes lors de la guerre de Syrie contre les Alliés.

Le général Weygand, connu pour son hostilité à la collaboration, ayant été limogé en , Pétain obtient une entrevue avec Göring à Saint-Florentin le [176]. Mais c'est un échec, les Allemands refusant de céder à ses demandes : extension de la souveraineté de Vichy à toute la France sauf l'Alsace-Lorraine, réduction des frais d'occupation et du nombre de prisonniers de guerre et renforcement des moyens militaires de l'Empire[177].

En , sous la pression allemande, mais aussi parce qu’il est déçu des maigres rĂ©sultats de Darlan, PĂ©tain accepte le retour au pouvoir de Pierre Laval, dĂ©sormais dotĂ© du titre de « chef du gouvernement ».

Il n’y a pas de diffĂ©rence en politique extĂ©rieure entre un « Vichy de PĂ©tain » et un « Vichy de Laval », comme l’ont suggĂ©rĂ© AndrĂ© Siegfried, Robert Aron ou Jacques Isorni. S’il n’a aucune affection personnelle pour Laval, PĂ©tain couvre sa politique de son autoritĂ© et de son charisme, approuve ses orientations en Conseil des ministres, et mĂȘme parfois les mots de ses discours. Ainsi celui du oĂč Laval prononce ces mots retentissants : « Je souhaite la victoire de l’Allemagne parce que, sans elle, le bolchevisme, demain, s'installerait partout » : Charles Rochat a tĂ©moignĂ© par Ă©crit pour la Haute Cour de justice que PĂ©tain les avait avalisĂ©s, en faisant mĂȘme changer un « Je crois » initial en un « Je souhaite » encore plus critique[178].

En , devant une dĂ©lĂ©gation de visiteurs Ă  Vichy, PĂ©tain assure qu’il agit « main dans la main » avec Laval, que les ordres de ce dernier sont « comme les [siens] » et que tous lui doivent obĂ©issance « comme Ă  [lui-mĂȘme] ». Lors du procĂšs de PĂ©tain, Laval dĂ©clarera sans ambiguĂŻtĂ© qu’il n’agissait qu’aprĂšs en avoir dĂ©fĂ©rĂ© Ă  l'avis du marĂ©chal : tous ses actes avaient Ă©tĂ© approuvĂ©s prĂ©alablement par le chef de l’État.

Rafle du billet vert par la police française en 1941

Sur la base des recensements effectuĂ©s, 6 694 Juifs Ă©trangers, des Polonais pour la plupart, des hommes de 18 Ă  60 ans habitant en rĂ©gion parisienne, reçoivent une convocation pour « examen de situation » (le billet vert), les sommant de se rendre, accompagnĂ©s d'un proche, dans divers lieux de rassemblement le . Plus de la moitiĂ© (3 747) obĂ©issent et sont aussitĂŽt arrĂȘtĂ©s pendant que la personne qui les accompagne est invitĂ©e Ă  aller leur chercher des affaires et des vivres. Ils sont transfĂ©rĂ©s en autobus Ă  la gare d'Austerlitz et dĂ©portĂ©s le jour mĂȘme par quatre trains spĂ©ciaux vers les camps d'internement du Loiret (Ă  peu prĂšs 1 700 Ă  Pithiviers et 2 000 Ă  Beaune-la-Rolande)

Dans leur trÚs grande majorité, les victimes de cette opération sont déportées lors des premiers convois de juin et et assassinées à Auschwitz-Birkenau.

En , les Allemands exĂ©cutent 48 otages en reprĂ©sailles aprĂšs la mort de Karl Hotz, Feldkommandant des troupes d'occupation du dĂ©partement de Loire-InfĂ©rieure. À la suite de ces reprĂ©sailles qui soulĂšvent l’indignation gĂ©nĂ©rale, PĂ©tain a des vellĂ©itĂ©s secrĂštes de se constituer lui-mĂȘme comme otage Ă  la ligne de dĂ©marcation, mais son ministre Pierre Pucheu l’en dissuade vite au nom de la politique de collaboration, et le marĂ©chal ne fait finalement de discours que pour blĂąmer les auteurs d’attentats et appeler les Français Ă  les dĂ©noncer.

Au printemps 1944 encore, PĂ©tain ne condamne jamais les dĂ©portations, les rafles et les massacres quasi-quotidiens, se taisant par exemple sur le massacre d'Ascq, oĂč 86 civils sont massacrĂ©s par les Waffen SS dans le Nord, prĂšs de Lille.

Par contre, il ne manque pas de dĂ©noncer « les crimes terroristes » de la RĂ©sistance ou les bombardements alliĂ©s sur les objectifs civils. Il encourage les membres de la LĂ©gion des volontaires français (LVF) qui combattent en URSS sous uniforme allemand, leur garantissant dans un message public qu’ils dĂ©tiennent « une part de notre honneur militaire ».

Rafle du Vel' d'Hiv'

Lorsque fin , Laval informe le Conseil des ministres de la prochaine mise en Ɠuvre de la rafle du VĂ©lodrome d'Hiver, le procĂšs-verbal tĂ©moigne que PĂ©tain agrĂ©e comme « juste » la livraison de milliers de Juifs aux nazis. Puis le , la zone sud devint le seul territoire de toute l’Europe d’oĂč des Juifs, souvent internĂ©s par Vichy depuis 1940 dans les trĂšs durs camps de Gurs, NoĂ©, Rivesaltes, furent envoyĂ©s Ă  la mort alors mĂȘme qu’aucun soldat allemand n’était prĂ©sent.

Maintenant antisĂ©mite, PĂ©tain s’est opposĂ© en Ă  l'introduction en zone sud du port obligatoire de l’étoile jaune, mais il n’a pas protestĂ© contre son introduction en zone nord, et en zone sud son gouvernement fait apposer le tampon « Juif » sur les papiers d’identitĂ© Ă  partir de fin 1942. En , comme les Allemands pressent Vichy de retirer en bloc la nationalitĂ© française aux Juifs, ce qui aurait favorisĂ© leur dĂ©portation, le nonce le fait prĂ©venir discrĂštement que « le pape s’inquiĂšte pour l’ñme du MarĂ©chal », ce qui impressionne le vieil homme et contribue Ă  l’échec du projet[179]. En tout, 76 000 Juifs parmi lesquels 11 000 enfants, non rĂ©clamĂ©s au dĂ©part par les Allemands, ont Ă©tĂ© dĂ©portĂ©s de France sous l’Occupation, dont 80 % ont Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©s par la police française. Un tiers avait la nationalitĂ© française. Seuls 3 % survivront aux dĂ©portations dans les camps de concentration.

À ce sujet, l'historien AndrĂ© Kaspi Ă©crit : « Tant que la zone libre n'est pas occupĂ©e, on y respire mieux [pour les Juifs] que dans la zone Nord. Qui le nierait ? Surtout pas ceux qui ont vĂ©cu cette triste pĂ©riode. De lĂ  cette conclusion : Vichy a sacrifiĂ© les Juifs Ă©trangers pour mieux protĂ©ger les Juifs français, mais sans PĂ©tain, les Juifs de France auraient subi le mĂȘme sort que ceux de Belgique, des Pays-Bas ou de Pologne. Pendant deux ans, ils ont d'une certaine maniĂšre bĂ©nĂ©ficiĂ© de l'existence de l'État français »[180]. Pour l'avocat Serge Klarsfeld cet « argument tombe » lorsque l'on constate l'implication personnelle de PĂ©tain dans la politique antisĂ©mite dĂšs [160].

En , un tĂ©lĂ©gramme signĂ© PĂ©tain fĂ©licite Hitler d’avoir fait Ă©chec Ă  la tentative de dĂ©barquement alliĂ© Ă  Dieppe.

Le , PĂ©tain promulgue la premiĂšre loi fondant le Service du travail obligatoire, complĂ©tĂ©e par celle du . Le STO organise en une dizaine de mois le dĂ©part forcĂ© de plus de 600 000 travailleurs français, qui vont renforcer malgrĂ© eux l'Allemagne nazie.

AprĂšs le tournant de
Entrevue entre les maréchaux Pétain et Göring, gare de Saint-Florentin - Vergigny, .

Lorsque les AlliĂ©s dĂ©barquent en Afrique du Nord le , au Maroc, Ă  Oran et dans le port d'Alger, PĂ©tain donne officiellement l’ordre de les combattre, en dĂ©clarant : « La France et son honneur sont en jeu. Nous sommes attaquĂ©s. Nous nous dĂ©fendons. C'est l'ordre que je donne. » L'existence mĂȘme de Vichy est alors en cause : si les forces de Vichy ne rĂ©sistent pas Ă  l'invasion alliĂ©e, les Allemands envahiront inĂ©luctablement la France non occupĂ©e et le reste de l'Afrique du Nord[181]. Pendant quelques jours, les AlliĂ©s doivent donc faire face Ă  une authentique rĂ©sistance de la part de l'ArmĂ©e de Vichy, obĂ©issant aux ordres de ses chefs[182].

En rĂ©action Ă  ce dĂ©barquement, le , violant la convention d’armistice, les Allemands envahissent la zone sud. PĂ©tain refuse l'idĂ©e de gagner l'Afrique du Nord, d'ordonner Ă  la flotte de Toulon d’appareiller, de replacer la France dans le camp des AlliĂ©s. Pour justifier sa dĂ©cision, il va en privĂ© jusqu'Ă  invoquer que son mĂ©decin lui a dĂ©conseillĂ© de prendre l’avion
 Il veut surtout pouvoir continuer Ă  « servir d'Ă©cran entre le peuple de France et l'occupant ». Il proteste contre cette invasion par une dĂ©claration plusieurs fois diffusĂ©e sur les ondes. En fait, soulignent Robert Paxton et R. Franck, il reste fidĂšle Ă  son choix de 1940, associant Ă©troitement retrait de la guerre, collaboration et rĂ©volution nationale.

Sa dĂ©cision déçoit d'innombrables Français qui croyaient encore en un hypothĂ©tique « double jeu » secret du marĂ©chal et s'imaginaient qu'il souhaitait en secret prĂ©parer la reprise de la lutte et la revanche contre l'ennemi. Nombre d’entre eux se dĂ©tachent du rĂ©gime de Vichy tout en conservant gĂ©nĂ©ralement leur respect pour la personne du marĂ©chal PĂ©tain et vont parfois gonfler les rangs clandestins des « vichysto-rĂ©sistants »[157] inspirĂ©s notamment par les gĂ©nĂ©raux Giraud et de Lattre de Tassigny. Le surnom de « MarĂ©chal PĂ©toche »[183] - [184], dont certains l’avaient affublĂ©, se rĂ©pand.

La dissidence de la plus grande partie de l'Empire, la fin de la « zone libre », le sabordage de la flotte française Ă  Toulon, le , la dissolution de l’armĂ©e d'armistice font perdre Ă  Vichy ses derniers atouts face aux Allemands. En maintenant sa politique de collaboration, PĂ©tain perd beaucoup de la popularitĂ© dont il jouissait depuis 1940, et la RĂ©sistance s’intensifie malgrĂ© le durcissement de la rĂ©pression.

Pétain et Pierre Laval dans le parc du pavillon Sévigné à Vichy, vers 1942.

PĂ©tain fait officiellement dĂ©choir de la nationalitĂ© française et condamner Ă  mort ses anciens fidĂšles François Darlan et Henri Giraud, qui sont passĂ©s au camp alliĂ© en Afrique du Nord. Il ne proteste Ă  aucun moment lorsque fin 1942, puis Ă  nouveau Ă  l’automne 1943, une vague d'arrestations frappe son propre entourage et Ă©carte de lui un nombre important de conseillers et de fidĂšles dont Maxime Weygand, Lucien Romier ou Joseph de La Porte du Theil, internĂ© en Allemagne. Il consent des dĂ©lĂ©gations croissantes de pouvoirs Ă  Pierre Laval, redevenu son dauphin, qui place ses fidĂšles Ă  tous les postes-clĂ©s et qui obtient de lui, Ă  partir du , de signer seuls les lois et les dĂ©crets.

Fin 1943, voyant le sort de l’Axe scellĂ©, PĂ©tain tente de jouer en France le rĂŽle du marĂ©chal Badoglio en Italie, lequel en , aprĂšs avoir longtemps servi le fascisme, a fait passer le pays du cĂŽtĂ© alliĂ©. PĂ©tain espĂšre ainsi qu’un nouveau gouvernement moins compromis aux yeux des AmĂ©ricains, dotĂ© d’une nouvelle constitution pourra, au « jour J », Ă©carter le gĂ©nĂ©ral de Gaulle du jeu et nĂ©gocier avec les libĂ©rateurs l’impunitĂ© de Vichy et la ratification de ses actes.

Le , alors que PĂ©tain s'apprĂȘte Ă  prononcer le lendemain un discours radiodiffusĂ© par lequel il annoncerait Ă  la nation une rĂ©vision constitutionnelle selon laquelle il reviendrait Ă  l'AssemblĂ©e nationale de dĂ©signer son successeur, ce qui aurait remis en cause le statut officiel de dauphin de Laval, les Allemands, par l'intermĂ©diaire du consul gĂ©nĂ©ral Krug von Nidda, bloquent ce projet[185] - [186] - [187].

AprĂšs six semaines de « grĂšve du pouvoir », PĂ©tain se soumet. Le projet de constitution rĂ©publicaine est finalisĂ© et approuvĂ© par PĂ©tain le (Projet de constitution du ) mais il ne fut jamais promulguĂ©. PĂ©tain accroĂźt encore les pouvoirs de Laval tout en acceptant la fascisation progressive de son rĂ©gime par l’entrĂ©e au gouvernement de Joseph Darnand, Philippe Henriot et Marcel DĂ©at (, et ).

Dans les derniers mois de l’Occupation, PĂ©tain affecte dĂ©sormais d’ĂȘtre un simple « prisonnier » des Allemands, tout en continuant Ă  couvrir en fait de son autoritĂ© et de son silence la collaboration qui se poursuit jusqu’au bout, ainsi que les atrocitĂ©s de l’ennemi et de la Milice française. En , il tente de dĂ©lĂ©guer l’amiral Auphan auprĂšs de De Gaulle pour lui transmettre rĂ©guliĂšrement le pouvoir sous rĂ©serve que le nouveau gouvernement reconnaisse la lĂ©gitimitĂ© de Vichy et de sauvegarder « le principe de lĂ©gitimitĂ© que j’incarne »[188]. « Aucune rĂ©ponse ne fut donnĂ©e Ă  ce monument de candeur »[189].

Sigmaringen

Vue extérieure du chùteau de Sigmaringen.

Le , les Allemands, en la personne de Cecil von Renthe-Fink, « dĂ©lĂ©guĂ© spĂ©cial diplomatique du FĂŒhrer auprĂšs du chef de l'État français », demandent Ă  PĂ©tain de se laisser transfĂ©rer en zone nord[190]. Celui-ci refuse et demande une formulation Ă©crite de cette demande[190]. Von Renthe-Fink renouvelle sa requĂȘte par deux fois le 18, puis revient le 19, Ă  11 h 30, accompagnĂ© du gĂ©nĂ©ral von Neubroon qui lui indique qu'il a des « ordres formels de Berlin »[190]. Le texte Ă©crit est soumis Ă  PĂ©tain : « Le gouvernement du Reich donne instruction d’opĂ©rer le transfert du chef de l’État, mĂȘme contre sa volontĂ© »[190]. Devant le refus renouvelĂ© du marĂ©chal, les Allemands menacent de faire intervenir la Wehrmacht pour bombarder Vichy[190]. AprĂšs avoir pris Ă  tĂ©moin l'ambassadeur de Suisse, Walter Stucki, du chantage dont il est l’objet, PĂ©tain se soumet, et « [
] lorsqu'Ă  19 h 30 Renthe-Fink entre dans le bureau du MarĂ©chal, Ă  l'hĂŽtel du Parc, avec le gĂ©nĂ©ral von Neubronn, le chef de l’État est en train de surveiller la confection de ses valises et de ranger ses papiers »[190]. Le lendemain, , il est emmenĂ© contre son grĂ© par l’armĂ©e allemande Ă  Belfort puis, le , Ă  Sigmaringen dans le sud-ouest de l'Allemagne[191], oĂč s’étaient rĂ©fugiĂ©s les dignitaires de son rĂ©gime.

À Sigmaringen, PĂ©tain refuse d’exercer encore ses fonctions et de participer aux activitĂ©s de la Commission gouvernementale prĂ©sidĂ©e par Fernand de Brinon. Il se cloĂźtre dans ses appartements, tout en prĂ©parant sa dĂ©fense aprĂšs avoir appris que la Haute Cour de justice française se dispose Ă  le mettre en accusation par contumace[192].

Arrestation et retour en France

Le , aprĂšs avoir obtenu des Allemands qu'ils le conduisent en Suisse, et des Suisses qu'ils l'acceptent sur leur territoire, PĂ©tain demande Ă  regagner la France. Par l'intermĂ©diaire du diplomate Carl Burckhardt, le gouvernement suisse transmet cette requĂȘte au gĂ©nĂ©ral de Gaulle. Le gouvernement provisoire de la RĂ©publique dĂ©cide de ne pas s'y opposer. Le , les autoritĂ©s suisses lui font rejoindre la frontiĂšre puis il est remis aux autoritĂ©s françaises le . Le gĂ©nĂ©ral KƓnig est chargĂ© de le prendre en charge Ă  Vallorbe. Le marĂ©chal est ensuite internĂ© au fort de Montrouge[193].

ProcĂšs et condamnation

Philippe PĂ©tain durant son procĂšs, .
« Pétain au poteau ! »,
tract de l'Union de la jeunesse républicaine de France, vers 1945.

Le procĂšs du marĂ©chal PĂ©tain[194] - [195] dĂ©bute le devant la Haute Cour de justice crĂ©Ă©e le . AprĂšs que six autres magistrats se sont rĂ©cusĂ©s, le tribunal est prĂ©sidĂ© par Paul Mongibeaux, promu Ă  cette occasion par le gouvernement provisoire du gĂ©nĂ©ral de Gaulle, premier prĂ©sident de la Cour de cassation, assistĂ© du prĂ©sident de la chambre criminelle Ă  la Cour de cassation Donat-Guigne, et Picard, premier prĂ©sident de la Cour d'appel. Tous trois avaient prĂȘtĂ© serment de fidĂ©litĂ© au marĂ©chal[196]. Le ministĂšre public est reprĂ©sentĂ© par le procureur gĂ©nĂ©ral AndrĂ© Mornet, prĂ©sident honoraire de la Cour de cassation. L’instruction est assurĂ©e par Pierre Bouchardon, prĂ©sident de la commission de la Haute Cour, choisi personnellement par de Gaulle. Le jury de vingt-quatre personnes est constituĂ© de douze parlementaires (et quatre supplĂ©ants) et de douze non-parlementaires issus de la RĂ©sistance (et quatre supplĂ©ants)[197]. Ce jury est choisi dans deux listes, la premiĂšre Ă©tant celle de cinquante parlementaires n'ayant pas votĂ© les pleins pouvoirs Ă  PĂ©tain, la deuxiĂšme Ă©tant composĂ©e de personnalitĂ©s de la RĂ©sistance ou proches d'elle[198]. La dĂ©fense use de son droit de rĂ©cusation pour quelques noms sortant du tirage au sort[197], notamment Robert Pimienta et Lucie Aubrac[199].

AprÚs récusations de la défense, les jurés sont[200] :

DĂ©fendu par Jacques Isorni, Jean Lemaire et le bĂątonnier Fernand Payen[201], Philippe PĂ©tain dĂ©clare le premier jour qu’il avait toujours Ă©tĂ© un alliĂ© cachĂ© du gĂ©nĂ©ral de Gaulle et qu’il n’était responsable que devant la France et les Français qui l’avaient dĂ©signĂ© et non devant la Haute Cour de justice. Dans ces conditions, il ne rĂ©pondra pas aux questions qui lui seront posĂ©es. Viennent dĂ©poser de nombreuses personnalitĂ©s en tant que tĂ©moins soit Ă  charge : Édouard Daladier, Paul Reynaud, LĂ©on Blum, Pierre Laval, soit Ă  dĂ©charge : le gĂ©nĂ©ral Weygand, le pasteur Marc Boegner, ou encore l’aumĂŽnier des prisonniers de guerre Jean Rodhain, seul homme d'Église Ă  tĂ©moigner Ă  dĂ©charge[202].

Le procĂšs s’achĂšve le Ă  quatre heures et demie du matin. Suivant les rĂ©quisitions du procureur gĂ©nĂ©ral AndrĂ© Mornet[203], la cour dĂ©clare Philippe PĂ©tain coupable d’intelligence avec l’ennemi et de haute trahison. Elle le condamne Ă  mort, Ă  l'indignitĂ© nationale, et Ă  la confiscation de ses biens, assortissant toutefois ces condamnations du vƓu de non-exĂ©cution de la sentence de mort, en raison de son grand Ăąge[204].

Le verdict de la Haute Cour de justice[205] reconnaĂźt Philippe PĂ©tain coupable d'indignitĂ© nationale et le condamne Ă  la dĂ©gradation nationale[206] ; cette dĂ©cision emporte « la destitution de toutes fonctions, emplois, offices publics et corps constituĂ©s / la perte de tous grades dans l'armĂ©e »[207] - [208]. À la fin du procĂšs, il se dĂ©pouille de son uniforme[209] avant d'ĂȘtre incarcĂ©rĂ©, mais c’est avec ce mĂȘme uniforme qu’il fut inhumĂ© en 1951.

Accomplissant le vƓu de la Haute Cour de justice, le gĂ©nĂ©ral de Gaulle, chef du Gouvernement provisoire de la RĂ©publique, commue la sentence de mort en peine de rĂ©clusion Ă  perpĂ©tuitĂ© le [206]. Compte tenu de la peine de dĂ©gradation nationale (article 21 de l'ordonnance du ), Philippe PĂ©tain est exclu automatiquement de l'AcadĂ©mie française[210] - [211] - [212] (l'ordonnance prĂ©voit l'exclusion de l'Institut). Toutefois, celle-ci s’abstint d’élire un remplaçant de son vivant au 18e fauteuil[210] - [211], Ă©gard dont bĂ©nĂ©ficia Ă©galement Charles Maurras[210] (tandis qu’Abel Bonnard et Abel Hermant sont remplacĂ©s dĂšs 1946[210]).

Emprisonnement

Philippe PĂ©tain est emprisonnĂ© au fort du Portalet, un fort de montagne, dans les PyrĂ©nĂ©es-Atlantiques (alors les Basses-PyrĂ©nĂ©es), du au . L'unique photo de PĂ©tain enfermĂ© dans ce lieu a Ă©tĂ© prise clandestinement par Michel Larre, chargĂ© de l'entretien du fort Ă  cette Ă©poque[213]. Pendant le rĂ©gime de Vichy, ce fort avait servi de lieu de dĂ©tention pour plusieurs personnalitĂ©s politiques. Il est ensuite transfĂ©rĂ© au fort de Pierre-LevĂ©e sur l'Ăźle d'Yeu, au large de la VendĂ©e. Il est, hormis ses gardiens, le seul occupant du fort. Son Ă©pouse, installĂ©e Ă  son tour dans l’üle, bĂ©nĂ©ficie d’un droit de visite quotidien.

Au cours de ces annĂ©es, les avocats de Philippe PĂ©tain et plusieurs dignitaires Ă©trangers, parmi lesquels l'ancien roi Édouard VIII et la reine Mary, rĂ©clament sa libĂ©ration auprĂšs des gouvernements successifs. Ceux-ci, emmĂȘlĂ©s dans l'instabilitĂ© politique de la QuatriĂšme RĂ©publique, prĂ©fĂšrent cependant ne pas prendre de risque sur un sujet sensible pour l'opinion publique. DĂ©but , le prĂ©sident amĂ©ricain Harry Truman intervient sans succĂšs pour rĂ©clamer sa libĂ©ration, proposant de lui accorder l'asile politique aux États-Unis[214].

La santĂ© mentale de Philippe PĂ©tain dĂ©cline Ă  partir de la fin des annĂ©es 1940[215], les moments de luciditĂ© devenant de plus en plus rares. AprĂšs avoir pris position en ce sens dĂšs 1949[216], le gĂ©nĂ©ral de Gaulle dĂ©clare le Ă  Oran, dans un discours prononcĂ© place d'Armes devant une foule d'environ huit mille personnes, qu'« il est lamentable pour la France, au nom du passĂ© et de la rĂ©conciliation nationale indispensable, qu'on laisse mourir en prison le dernier MarĂ©chal »[217] - [218]. Eu Ă©gard Ă  cette situation, aprĂšs un examen mĂ©dical rĂ©alisĂ© par le professeur RenĂ© PiedeliĂšvre[219], le Conseil supĂ©rieur de la magistrature, prĂ©sidĂ© par Vincent Auriol, prĂ©sident de la RĂ©publique, en vue d’adoucir une fin prĂ©visible, autorise le « l’élargissement » du prisonnier et son assignation Ă  rĂ©sidence « dans un Ă©tablissement hospitalier ou tout autre lieu pouvant avoir ce caractĂšre ». Le transfert dans une maison privĂ©e de Port-Joinville a lieu le , soit moins d'un mois avant sa mort.

Mort, inhumation et tombe

Le , Philippe PĂ©tain meurt Ă  Port-Joinville, Ă  l'Ăąge de 95 ans. VeillĂ© par Jean Rodhain, il est inhumĂ© le surlendemain dans le cimetiĂšre de la mĂȘme commune[202].

La translation de la dĂ©pouille du marĂ©chal PĂ©tain Ă  la nĂ©cropole de Douaumont Ă  cĂŽtĂ© de Verdun est rĂ©clamĂ©e Ă  plusieurs reprises par l'Association pour dĂ©fendre la mĂ©moire du marĂ©chal PĂ©tain (ADMP) Ă  partir de 1951, au nom de la « rĂ©conciliation nationale ». Ce transfert correspond Ă  un souhait de PĂ©tain, tel qu’écrit dans son testament de 1938, qui souhaitait reposer auprĂšs des centaines de milliers de soldats français qui sont tombĂ©s pendant la bataille de Verdun. L'association organise notamment une pĂ©tition en ce sens en , soutenue par de trĂšs nombreuses associations d'anciens combattants de 1914-1918, qui recueille prĂšs de 70 000 signatures. Les gouvernements français successifs s'opposeront toujours Ă  cette demande. Il s'agit en fait avec celle-ci, selon l'analyse d'Henry Rousso, « d'oublier le marĂ©chal de 1940 au profit du gĂ©nĂ©ral de 1916, d'utiliser la mĂ©moire des anciens combattants de la Grande Guerre, pour qui PĂ©tain reste l'homme du « On les aura ! », au profit d'une idĂ©ologie »[220].

Dans la nuit du , le cercueil du marĂ©chal PĂ©tain est enlevĂ© par des membres de l’extrĂȘme droite, Ă  l'instigation de Jean-Louis Tixier-Vignancour, ancien de l’OAS, afin d’opĂ©rer le transfert de sa dĂ©pouille Ă  Douaumont. MalgrĂ© les prĂ©cautions prises, l'enlĂšvement est dĂ©couvert quelques heures plus tard ; il fait rapidement la une des mĂ©dias français et mobilise les autoritĂ©s. Le commando abandonne alors sa route vers Verdun, trop risquĂ©e, et remonte sur Paris. Le cercueil est dissimulĂ© dans un garage de Saint-Ouen tandis que Tixier-Vignancour tente de nĂ©gocier un transfert de la dĂ©pouille aux Invalides. Hubert Massol, chef du commando, se rend finalement le , aprĂšs l'arrestation de ses complices et indique oĂč se trouve le cercueil. Celui-ci est ramenĂ© Ă  l'Ăźle d'Yeu le lendemain et rĂ©inhumĂ© aprĂšs une brĂšve cĂ©rĂ©monie. La tombe est cette fois bĂ©tonnĂ©e[221].

Tombe de Philippe Pétain sur l'ßle d'Yeu, en Vendée.

La tombe de Philippe PĂ©tain est fleurie au nom de la prĂ©sidence de la RĂ©publique le (sous le gĂ©nĂ©ral de Gaulle, Ă  l'occasion du 50e anniversaire de l'armistice de 1918)[222] - [223] - [224], le (sous Georges Pompidou, Ă  la suite de la rĂ©inhumation suivant le vol du cercueil)[224] et en 1978 (sous ValĂ©ry Giscard d'Estaing, 60e commĂ©moration de la victoire de 1918)[224]. Pendant la prĂ©sidence de François Mitterrand, elle est fleurie le (jour de la rencontre avec le chancelier Helmut Kohl Ă  Verdun[225]), puis le (70e anniversaire de la bataille de Verdun), puis chaque entre 1987 et 1992. Cette pratique ne cesse qu’aprĂšs de nombreuses protestations dont celles de la communautĂ© juive[224] - [226].

Sa tombe est vandalisée une à deux fois par an[227], ce qui donne lieu à des dépÎts de plainte[228] - [229] - [230].

Position de l'opinion publique Ă  son Ă©gard

De la Grande Guerre Ă  1940

Militaire Ă  la rĂ©ussite tardive, PĂ©tain doit son premier prestige moins Ă  son rĂŽle Ă  Verdun qu’à sa gestion de la crise du moral en 1917. En arrĂȘtant les offensives inutilement meurtriĂšres, et en libĂ©ralisant le rĂ©gime des permissions, il gagne et conserve auprĂšs des hommes et jusque dans certains cercles pacifistes la rĂ©putation d’un chef comprĂ©hensif et soucieux d’épargner le sang des soldats. MĂȘme si certains[231] rappellent (pour l’exalter ou pour le dĂ©noncer) son rĂŽle de « fusilleur » des mutins de 1917, c’est cette rĂ©putation qui se maintient pendant l’entre-deux-guerres.

Il fut reconnu tout au long de l'entre-deux-guerres: fait marĂ©chal en 1918, il est, avec Louis Franchet d'EspĂšrey, le dernier titulaire de cette dignitĂ© aprĂšs 1934 ; membre de l’AcadĂ©mie française, inspecteur gĂ©nĂ©ral de l’ArmĂ©e, il est un Ă©phĂ©mĂšre ministre de la Guerre en 1934 puis ambassadeur de France en Espagne en 1939.

Pendant ces annĂ©es, il Ă©vite de prendre des partis trop tranchĂ©s, ce qui lui mĂ©nage mĂȘme dans les milieux rĂ©publicains voire de gauche la rĂ©putation d’un militaire modĂ©rĂ© et politiquement fiable. Peu clĂ©rical au contraire d’un Foch ou d’un Castelnau, il ne se mĂȘle pas de la crise de 1924, oĂč ce dernier prend la tĂȘte d’un mouvement de masse contre l’anticlĂ©ricalisme du gouvernement Herriot ; il Ă©vite de dĂ©noncer en public le Front populaire et l’Espagne rĂ©publicaine ; il est informĂ© du complot de la « Cagoule » visant Ă  renverser la RĂ©publique et Ă  porter un militaire prestigieux (lui-mĂȘme ou Franchet d’Esperey) Ă  la tĂȘte de l’État, mais se garde de s’y compromettre (1937). En 1939, lorsqu’il est nommĂ© ambassadeur auprĂšs de Franco, LĂ©on Blum proteste dans Le Populaire qu’on envoie au dictateur espagnol « ce que nous avons de meilleur ». Seul le colonel de Gaulle soupçonne qu’il prend goĂ»t au pouvoir, et confie : « Il acceptera n’importe quoi, tant le gagne l’ambition sĂ©nile »[232].

En , Paul Reynaud ne se mĂ©fie pas davantage de PĂ©tain quand il l’appelle Ă  la vice-prĂ©sidence du Conseil. Or, aprĂšs s’ĂȘtre d’abord longuement tu, PĂ©tain prend la tĂȘte des partisans de l’armistice.

MarĂ©chalistes, pĂ©tainistes et opinion pendant l’Occupation

Il est hors de doute qu’une majoritĂ© de Français, sonnĂ©s par la dĂ©route d’une armĂ©e qu’ils croyaient invincible, ont accueilli l’armistice comme un soulagement, de mĂȘme que le maintien d’un gouvernement français dirigĂ© par un sauveur providentiel et susceptible Ă  leurs yeux de faire Ă©cran entre eux et l’occupant. TrĂšs peu ont perçu sur le coup que le retrait de la guerre condamnait le pays Ă  une longue occupation nĂ©cessitant l’entente avec le vainqueur. Par ailleurs, souligne Olivier Wieviorka, ni l’essentiel des Français ni la majoritĂ© des parlementaires Ă  lui voter les pleins pouvoirs ne voulaient lui donner ainsi mandat pour exclure les Juifs, briser l’unitĂ© nationale ou atteler la France au char allemand[233].

Contrairement Ă  une lĂ©gende encore tenace, il n’y a pas eu non plus en 1940 « quarante millions de pĂ©tainistes »[234] qui seraient devenus en 1944 quarante millions de gaullistes[235].

La distinction de Stanley Hoffmann entre « marĂ©chalistes » et « pĂ©tainistes » s’est imposĂ©e en effet Ă  l’historiographie contemporaine. Les « marĂ©chalistes » font confiance Ă  PĂ©tain comme bouclier des Français. Beaucoup plus minoritaires, les « pĂ©tainistes » approuvent en plus son idĂ©ologie rĂ©actionnaire et sa politique intĂ©rieure, voire la collaboration d’État. Maurras lui-mĂȘme diagnostique publiquement sans fard dĂšs le dĂ©calage entre le soutien de l’opinion publique Ă  la personne du MarĂ©chal et la mĂ©fiance ou l’opposition face Ă  l’Ɠuvre de rĂ©volution nationale[236] : « Un trĂšs net et trĂšs fort courant d’affection nationale s’était dĂ©chaĂźnĂ©. Il allait croissant. Seulement il allait Ă  l’homme, il s’arrĂȘtait devant l’Ɠuvre ».

Nombre de rĂ©sistants de la premiĂšre heure furent ainsi un temps marĂ©chalistes par erreur, croyant que PĂ©tain jouait double-jeu et qu’en prĂ©parant la revanche, ils rĂ©pondaient Ă  ses vƓux secrets. Henri Frenay ou le journal clandestin DĂ©fense de la France citent ainsi Ă©logieusement PĂ©tain en 1941-1942, avant de revenir de leurs illusions et de dĂ©noncer son rĂŽle comme Ă©quivoque et nĂ©faste.

D’autres encore, les « vichysto-rĂ©sistants »[157], ont participĂ© au rĂ©gime de Vichy et Ă  la mise en Ɠuvre de sa politique avant de se dĂ©tourner de lui surtout aprĂšs , tout en gardant leur respect pour PĂ©tain et pour tout ou partie de ses idĂ©es. Souvent, ils n’ont pas d’objection de fond Ă  faire Ă  celles-ci, mais considĂšrent que le moment choisi pour les appliquer est inappropriĂ©, tant que l’Allemand occupe encore le territoire.

Des déçus de la IIIe RĂ©publique ont cru aussi que le rĂ©gime de PĂ©tain pouvait leur servir Ă  mettre en place leurs propres projets, et se sont ralliĂ©s Ă  tout ou partie de sa rĂ©volution nationale. Ainsi, Emmanuel Mounier, qui obtient la reparution d’Esprit en et dont le premier numĂ©ro de la revue paraĂźt plutĂŽt favorable Ă  la rĂ©volution nationale[237], rompt avec PĂ©tain dĂšs par rejet radical de l'antisĂ©mitisme et passe Ă  la RĂ©sistance. Sa revue cesse de paraĂźtre aprĂšs [237]. François Mitterrand, prisonnier Ă©vadĂ© travaillant aux bureaux officiels de Vichy, est reçu par le marĂ©chal PĂ©tain en mais n’en rejoint pas moins la RĂ©sistance quelques mois plus tard..

Si beaucoup de « collaborationnistes parisiens » mĂ©prisent Vichy et son chef qu’ils jugent trop rĂ©actionnaires et toujours trop peu engagĂ©s aux cĂŽtĂ©s du TroisiĂšme Reich, nombre des ultras de la collaboration sont de trĂšs fervents fidĂšles de PĂ©tain, dont ils estiment relayer les appels publics Ă  collaborer avec l’occupant : ainsi Joseph Darnand ou encore Jacques Doriot qui se dit « un homme du MarĂ©chal » jusqu’à fin 1941. Un groupuscule clairement pro-nazi de zone nord se baptise mĂȘme les « Jeunes du MarĂ©chal ». De nombreux ultras sont d’ailleurs plus ou moins prĂ©cocement nommĂ©s membres du gouvernement PĂ©tain Ă  Vichy : ainsi Gaston Bruneton, Abel Bonnard, Jean Bichelonne, Fernand de Brinon, et plus tard Philippe Henriot ou Marcel DĂ©at.

Selon le Pr Jean Quellien[238], « PĂ©tain a Ă©tĂ© responsable de l’engagement de bien des hommes dans la collaboration » : 19 % des collaborationnistes du Calvados interrogĂ©s aprĂšs la guerre confient s’ĂȘtre inscrits Ă  des partis « collabos » d’abord parce qu’ils pensaient suivre ainsi les volontĂ©s du marĂ©chal.

Les travaux pionniers de Pierre Laborie et de nombreux historiens permettent aujourd’hui de mieux cerner l’évolution de l’opinion publique sous Vichy. GĂ©nĂ©ralement, la rĂ©volution nationale, souci premier de PĂ©tain, intĂ©resse peu les Français, et « patine » dĂšs 1941. La collaboration est trĂšs largement rejetĂ©e, mais beaucoup croient Ă  tort que le marĂ©chal est de bonne foi et veut protĂ©ger les Français, voire qu’il est forcĂ© par les Allemands Ă  collaborer ou mĂȘme prisonnier d’un entourage « collabo ». Reprenant le thĂšme ancestral du bon monarque trompĂ© par ses mauvais ministres, la masse des Français distingue entre le marĂ©chal et ses ministres, Ă  commencer par le trĂšs impopulaire Pierre Laval, unanimement haĂŻ, et chargĂ© seul de toutes les turpitudes et de tous les Ă©checs du rĂ©gime.

Nombre de Français ne font toutefois pas la diffĂ©rence, qu’ils soient rĂ©sistants ou non. Dans bien des Ă©coles, l’instituteur nĂ©glige d’apprendre aux Ă©lĂšves le MarĂ©chal, nous voilĂ  !. Globalement, le prestige de PĂ©tain est nettement plus faible chez les ouvriers que chez les paysans ou dans la bourgeoisie, et encore faut-il apporter de nombreuses nuances. Les prisonniers de guerre, coupĂ©s depuis 1940 de la rĂ©alitĂ© française et choyĂ©s par la propagande du rĂ©gime, sont en gĂ©nĂ©ral restĂ©s marĂ©chalistes ou pĂ©tainistes plus longtemps que les autres Français. Si la grande majoritĂ© de l’épiscopat français est restĂ©e trĂšs marĂ©chaliste voire pĂ©tainiste jusqu’en 1944, les catholiques ont Ă©tĂ©, avec les communistes, une des catĂ©gories les plus engagĂ©es dans la RĂ©sistance. Enfin, la zone sud, « royaume du MarĂ©chal »[239] est beaucoup plus marquĂ©e par la prĂ©sence de PĂ©tain et de son rĂ©gime que la zone nord, oĂč le chef de l’État, Vichy et la rĂ©volution nationale sont des rĂ©alitĂ©s bien plus lointaines. Dans son Nord-Pas-de-Calais natal, coupĂ© de l’Hexagone et dirigĂ© depuis Bruxelles, PĂ©tain ne jouit avec son rĂ©gime d’aucune considĂ©ration : l’Occupation y est d’emblĂ©e trop brutale, pire que celle dĂ©jĂ  subie entre 1914 et 1918, l’anglophilie traditionnelle trop forte, pour laisser la moindre place aux thĂšmes de la collaboration et du « redressement » intĂ©rieur.

AprĂšs les rafles de Juifs de l’étĂ© 1942, l’invasion de la zone sud en , puis l’instauration du STO, le discrĂ©dit de Vichy est massif, mais Ă©pargne toutefois majoritairement la figure tutĂ©laire du marĂ©chal. Cependant, celui-ci devient de plus en plus lointain aux yeux des Français.

Le , lorsque PĂ©tain vient pour la premiĂšre fois Ă  Paris en quatre ans, une foule nombreuse l'acclame et chante La Marseillaise[240] - [241].

Les sondages d’opinion effectuĂ©s Ă  l’automne 1944 ne montrent pas une nette majoritĂ© de Français favorables Ă  la condamnation du « traĂźtre » PĂ©tain, cependant, la proportion exigeant la peine capitale ne cesse d'augmenter au fil des mois. À la question posĂ©e de savoir s'il faut infliger une peine au marĂ©chal, les rĂ©ponses sont les suivantes[242] :

  • en , un sondage de l'IFOP recueille 58 % de rĂ©ponses nĂ©gatives, 32 % de positives et 10 % sans opinion ;
  • en , un nouveau sondage chiffre Ă  28 % la population des Français favorables Ă  la peine de mort, tandis que les opposants Ă  toute peine ne sont plus que 22 % ;
  • en , Ă  l'ouverture du procĂšs, un sondage recueille 76 % d'opinions favorables Ă  la condamnation dont 37 % Ă  la peine de mort. Le taux des opposants Ă  toute peine est tombĂ© Ă  15 %.

Le PCF mena quant Ă  lui une virulente campagne contre « PĂ©tain-Bazaine », assimilant ainsi le chef de Vichy au fameux traĂźtre de la guerre de 1870. La condamnation de PĂ©tain au chĂątiment suprĂȘme, puis sa grĂące, furent majoritairement approuvĂ©s[243].

Cependant, une ordonnance du nie la lĂ©galitĂ© du rĂ©gime de Vichy et rĂ©affirme la lĂ©galitĂ© rĂ©publicaine Ă  compter du . La nullitĂ© de la lĂ©gislation de Vichy est prĂ©cisĂ©e Ă  l’article 2 du texte : « Sont, en consĂ©quence, nuls et de nul effet tous les actes constitutionnels, lĂ©gislatifs ou rĂ©glementaires, ainsi que les arrĂȘtĂ©s pris pour leur exĂ©cution, sous quelque dĂ©nomination que ce soit, promulguĂ©s sur le territoire continental postĂ©rieurement au et jusqu’au rĂ©tablissement du gouvernement provisoire de la RĂ©publique française »[244].

AprĂšs la Seconde Guerre mondiale

Au procĂšs PĂ©tain, l’avocat Jacques Isorni avec ses confrĂšres Jean Lemaire et le bĂątonnier Fernand Payen lance la lĂ©gende du « dĂ©tournement de vieillard » : PĂ©tain aurait Ă©tĂ© abusĂ© par Pierre Laval qui aurait profitĂ© de son grand Ăąge. Sous la IVe RĂ©publique, le RPF gaulliste emploie la fameuse phrase de Charles de Gaulle dans ses mĂ©moires : « la vieillesse est un naufrage », « la tragĂ©die est que le MarĂ©chal est mort en 1925 et que personne ne s’en est aperçu ». L’historien Éric Roussel, entre autres, a montrĂ© que ce jugement gaullien n’explique en rien les choix du chef de l’État français, et qu’il n’a en rĂ©alitĂ© qu’une finalitĂ© Ă©lectorale : pour rallier le plus possible de voix contre le « rĂ©gime des partis » honni, les gaullistes doivent rallier les ex-pĂ©tainistes sans se dĂ©juger de leur action dans la RĂ©sistance, d’oĂč cette excuse commode de PĂ©tain par l’ñge de l’intĂ©ressĂ©.

En rĂ©alitĂ©, comme le montrent Marc Ferro, Jean-Pierre AzĂ©ma ou François BĂ©darida, les choix de PĂ©tain Ă©taient parfaitement cohĂ©rents et bĂ©nĂ©ficiaient d’appuis dans les milieux les plus divers de la sociĂ©tĂ©. Yves Durand souligne qu’il bĂątissait son rĂ©gime comme s’il avait du temps devant lui, sans se soucier de la possibilitĂ© de sa disparition prochaine[245]. Quant aux fameuses « absences du MarĂ©chal » rapportĂ©es par Jean-Raymond Tournoux, Marc Ferro ou Jean-Paul Brunet (il se mettait Ă  disserter soudain sur le menu du jour ou le temps dehors face Ă  des visiteurs), il s’agissait surtout d’une tactique pour Ă©luder les questions gĂȘnantes en jouant du respect qu’inspirait sa qualitĂ© d’octogĂ©naire. Au reste, Ă  la fin de son rĂ©gime, tant les observateurs[246] que les ultras de la collaboration[247] louaient encore publiquement sa santĂ© et sa clartĂ© d’esprit.

Pour Robert Paxton, le journaliste Robert Aron aurait contribuĂ© Ă  lancer la lĂ©gende parallĂšle de « l’épĂ©e et du bouclier » : PĂ©tain aurait tentĂ© de rĂ©sister pied Ă  pied aux demandes allemandes, et secrĂštement cherchĂ© Ă  aider les AlliĂ©s, pendant que de Gaulle prĂ©parait la revanche ; d’autre part, il y aurait un « Vichy de PĂ©tain » opposĂ© au « Vichy de Laval ». Ces deux thĂšses sont les chevaux de bataille des apologistes de la mĂ©moire de PĂ©tain, mais ces distinctions ont volĂ© en Ă©clats Ă  partir de la parution de son livre La France de Vichy en 1973[248]. Archives allemandes puis françaises Ă  l’appui, les historiens actuels dĂ©montrent, Ă  sa suite, que la collaboration a Ă©tĂ© recherchĂ©e par PĂ©tain, alors qu'Adolf Hitler n’y croyait pas et n’a jamais voulu traiter la France en partenaire. Si la collaboration n’est pas allĂ©e aussi loin qu’elle aurait pu, c’est bien en raison des rĂ©ticences de Hitler, et non grĂące Ă  une quelconque rĂ©sistance de PĂ©tain aux demandes de l’occupant. Ainsi, la collaboration rĂ©pondait aux choix fondamentaux et intangibles de PĂ©tain comme de Laval, que le marĂ©chal a nommĂ© et laissĂ© agir en aidant son gouvernement de son charisme. Quant au fameux « double jeu » du marĂ©chal, il n’a jamais existĂ©. Les quelques sondages informels qu’il a autorisĂ©s avec Londres, fin 1940, n’ont eu aucune suite[249] - [250], et ne pĂšsent rien au regard de son maintien constant de la collaboration d’État jusqu’à la fin de son rĂ©gime, Ă  l’étĂ© 1944.

Loin d’avoir protĂ©gĂ© les Français, selon les historiens[248] - [251], PĂ©tain a accru leurs souffrances en permettant aux Allemands de rĂ©aliser Ă  moindres frais leurs objectifs : livraisons de Juifs dans le cadre de la Shoah[252] - [253], rĂ©pression de la RĂ©sistance, envoi forcĂ© de main-d’Ɠuvre au STO, pillage alimentaire et Ă©conomique. Avec son peu de troupes, de fonctionnaires et de policiers, jamais l’occupant n’aurait vu ses projets aboutir sans le concours indispensable des autoritĂ©s de Vichy, et sans le prestige de PĂ©tain, qui maintenait les Français dans le doute ou dans la conviction qu’ils faisaient leur devoir en collaborant. 80 % des 76 000 Juifs de France dĂ©portĂ©s et exterminĂ©s par les nazis dans les camps de la mort ont ainsi Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©s par la police française[254].

De plus, en excluant de sa propre initiative des catĂ©gories entiĂšres de la communautĂ© nationale (Juifs, communistes, rĂ©publicains, francs-maçons, et bien sĂ»r rĂ©sistants), PĂ©tain les a rendues plus vulnĂ©rables Ă  la rĂ©pression allemande, et a Ă©cartĂ© d’emblĂ©e ces catĂ©gories de son hypothĂ©tique protection, tout comme les Alsaciens-Mosellans, abandonnĂ©s et pour nombre d'entre eux morts ou blessĂ©s Ă  vie Ă  cause d'Hitler, dans les mains d'un pouvoir ennemi. Aussi PĂ©tain apparaĂźt-il aujourd’hui aux historiens, selon le mot de Jean-Pierre AzĂ©ma, comme « un bouclier percĂ© ».

Depuis 1945, huit demandes en révision du procÚs Pétain ont été rejetées, ainsi que la demande répétée du transfert de sa dépouille à Douaumont. Dans une note à Alexandre Sanguinetti, le , le général de Gaulle, alors président de la République, signifia ainsi sa position sur cette question :

« Les signataires de la « pĂ©tition » relative au « transfert » des restes de PĂ©tain Ă  Douaumont n'ont aucunement Ă©tĂ© mandatĂ©s par les 800 000 anciens combattants pour s'emparer de cette question politique. Ils ne sont mandatĂ©s que pour faire valoir les intĂ©rĂȘts spĂ©cifiques de leurs associations. Le leur dire[255] »

Dans la foulée de l'épuration, la plupart des voies nommées en hommage à Pétain en France sont renommées, quelques-unes subsistant, la derniÚre jusque 2013[256].

En 1995, le prĂ©sident Jacques Chirac reconnut officiellement la responsabilitĂ© de l’État dans la rafle du VĂ©lodrome d'Hiver et, en 2006, pour les 90 ans de la bataille de Verdun, son discours mentionna Ă  la fois le rĂŽle de PĂ©tain dans la bataille et ses choix dĂ©sastreux de la Seconde Guerre mondiale[257].

Une longue bataille judiciaire a eu lieu d' à au sujet de la mémoire du maréchal Pétain. Jacques Isorni et François Lehideux avaient fait paraßtre le dans le quotidien Le Monde un encart publicitaire intitulé « Français, vous avez la mémoire courte »[258], dans lequel, au nom de l'Association pour défendre la mémoire du maréchal Pétain et l'Association nationale Pétain-Verdun, ils prenaient sa défense.

À la suite d'une plainte dĂ©posĂ©e par l'Association nationale des anciens combattants de la RĂ©sistance pour apologie de crimes ou dĂ©lits de collaboration avec l'ennemi, le procureur de la RĂ©publique prit un rĂ©quisitoire dĂ©finitif de non-lieu le , mais le juge d'instruction renvoya, une semaine plus tard, les parties devant le tribunal correctionnel de Paris, qui relaxa les prĂ©venus le — jugement confirmĂ© par la Cour d'appel de Paris le . L'arrĂȘt de la Cour d'appel fut cassĂ© par la Cour de cassation le . La Cour d'appel de Paris se dĂ©jugea le en dĂ©clarant les constitutions de parties civiles recevables ; elle infirma le jugement de relaxe, et condamna les prĂ©venus Ă  un franc de dommages et intĂ©rĂȘts et Ă  la publication de l'arrĂȘt dans Le Monde. Le pourvoi en cassation dĂ©posĂ© par les prĂ©venus fut rejetĂ© par la Cour le . Enfin, le (par l'arrĂȘt Lehideux et Isorni contre France) la Cour europĂ©enne des droits de l'Homme dĂ©cida par quinze voix contre six qu'il y avait eu violation de l'article 10 de la Convention europĂ©enne des droits de l'Homme — portant sur la libertĂ© d'expression : l'opinion majoritaire chez les juges fut qu'il devait ĂȘtre possible de prĂ©senter un personnage, quel qu'il soit, sous un jour favorable et de promouvoir sa rĂ©habilitation — au besoin en passant sous silence les faits qui peuvent lui ĂȘtre reprochĂ©s — et que la condamnation pĂ©nale subie en France par les requĂ©rants Ă©tait disproportionnĂ©e[259].

Point de vue de Charles de Gaulle

« Toute la carriĂšre de cet homme d’exception avait Ă©tĂ© un long effort de refoulement. Trop fier pour l’intrigue, trop fort pour la mĂ©diocritĂ©, trop ambitieux pour ĂȘtre arriviste, il nourrissait en sa solitude une passion de dominer, longuement durcie par la conscience de sa propre valeur, les traverses rencontrĂ©es, le mĂ©pris qu’il avait des autres. La gloire militaire lui avait, jadis, prodiguĂ© ses caresses amĂšres. Mais elle ne l’avait pas comblĂ©, faute de l’avoir aimĂ© seul. Et voici que, tout Ă  coup, dans l’extrĂȘme hiver de sa vie, les Ă©vĂ©nements offraient Ă  ses dons et Ă  son orgueil l’occasion tant attendue de s’épanouir sans limites, Ă  une condition, toutefois, c’est qu’il acceptĂąt le dĂ©sastre comme pavois de son Ă©lĂ©vation et le dĂ©corĂąt de sa gloire [
] MalgrĂ© tout, je suis convaincu qu’en d’autres temps, le marĂ©chal PĂ©tain n’aurait pas consenti Ă  revĂȘtir la pourpre dans l’abandon national. Je suis sĂ»r, en tout cas, qu’aussi longtemps qu’il fut lui-mĂȘme, il eĂ»t repris la route de la guerre dĂšs qu’il put voir qu’il s’était trompĂ©, que la victoire demeurait possible, que la France y aurait sa part. Mais, hĂ©las ! Les annĂ©es, par-dessous l’enveloppe, avaient rongĂ© son caractĂšre. L’ñge le livrait aux manƓuvres de gens habiles Ă  se couvrir de sa majestueuse lassitude. La vieillesse est un naufrage. Pour que rien ne nous fĂ»t Ă©pargnĂ©, la vieillesse du marĂ©chal PĂ©tain allait s’identifier avec le naufrage de la France[260]. »

— Charles de Gaulle, MĂ©moires de guerre, l’Appel, 1940-1942.

SynthĂšse de son parcours

CarriĂšre militaire

Fonctions politiques

Publications

  • Cours d'Infanterie enseignĂ© Ă  l'École supĂ©rieure de Guerre (1911), prĂ©sentation par le gĂ©nĂ©ral (CR) Jean Delmas, Ă©ditions du Cosmogone, 2010, XIV-210 pages.
  • La Bataille de Verdun, Paris, Payot, 1929, 157 pages.
  • La Crise morale et militaire de 1917, note prĂ©liminaire par Alfred Conquet, Nouvelles Ă©ditions latines / NEL, 1966, 160 pages.
  • La Guerre mondiale 1914-1918, avant-propos et bibliographie de Marc Ferro, prĂ©sentation (« Chronique d'un manuscrit oubliĂ© ») par Jean Jacques Dumur, Toulouse, Ă©ditions Privat, 2014, 373 p., (ISBN 978-2-7089-6961-2)
  • Paroles aux Français : messages et Ă©crits 1934-1941, Ă©ditions DĂ©terna, 2010, 262 pages.
  • La France nouvelle : principes de la communautĂ©, suivis des Appels et messages -, Paris, Fasquelle, Éditeurs, 1941, 172 pages.

Iconographie

Dans la culture populaire

Musique

Cinéma

Télévision

Roman graphique

Juger Pétain, textes de Sébastien Vassant et Philippe Saada, dessins de Sébastien Vassant, éditions Glénat, coll. 1000 Feuilles, 133 pages, 2015.

Divers

Le nom de « MarĂ©chal PĂ©tain » a Ă©tĂ© donnĂ© Ă  un paquebot des Messageries Maritimes lancĂ© le 8 juin 1944, mais rebaptisĂ© La Marseillaise en 1945 avant d'ĂȘtre mis en service en 1949[261].

Le village de Beni Amrane en Algérie porta le nom de « Maréchal Pétain » entre 1942 et 1943[262].

Le dictateur fasciste roumain pendant la guerre, le maréchal Antonescu, s'auto-proclamait « Pétain roumain » (Petainul romùn) et « Guide de la nation » (Conducatorul neamului)[263].

Notes et références

Notes

  1. Nominativement à partir du , date à laquelle Pierre Laval devient vice-président du Conseil et forme un gouvernement.
  2. Pétain promulgue également une loi antimaçonnique
  3. Pour Louis-Dominique Girard, qui fut l'un de ses proches collaborateurs
  4. Jusqu'au limogeage en 1911 du chef d'État-major le gĂ©nĂ©ral Michel par le ministre de la guerre Messimy, la doctrine française est dĂ©fensive (sans ĂȘtre statique) avec pour objectif de tenir face Ă  une attaque allemande en attendant l'intervention des russes et des anglais. NommĂ© Ă  la tĂȘte de l'État-major, le gĂ©nĂ©ral Joffre, n'ayant jamais mis les pieds Ă  l'École SupĂ©rieure de Guerre, adopte la doctrine de l'offensive Ă  outrance thĂ©orisĂ©e par le colonel de Grandmaison qui est chef du 3e bureau (chargĂ© des opĂ©rations) Ă  l'Ă©tat-major du ministĂšre de la guerre entre 1908 et 1911 et n'a jamais enseignĂ© Ă  l'École SupĂ©rieure de Guerre. La mystique de l'offensive incarnĂ©e par Ferdinand Foch directeur de l'École SupĂ©rieure de Guerre de 1907 Ă  1911, est, en 1914, partagĂ©e par les armĂ©es des autres puissances europĂ©ennes.
  5. Le gĂ©nĂ©ral Deligny commandant la 4e brigade qui s'ennuie Ă  son PC de Saint-Omer est nommĂ© commandant de la 3e brigade Ă  Arras oĂč il prend en outre le commandement par intĂ©rim de la 2e division d'infanterie en remplacement du gĂ©nĂ©ral Charles Ferdinand Bizard dont Franchet d'Esperey obtient le dĂ©part le 20 mars 1914[28].
  6. De mĂȘme, le futur marĂ©chal Fayolle, qui a lui aussi fait Ă©voluer l'enseignement de l'École supĂ©rieure de guerre, prend une modeste retraite de gĂ©nĂ©ral de brigade le .
  7. Georges Clemenceau écrit dans ses mémoires : « S'il m'est demandé de répondre à la question : « Quel est le vainqueur de la bataille de Verdun ? », je dirai que celle-ci a été gagnée par le général Nivelle heureusement secondé par le général Mangin. »
  8. Divorcée de François Deherain ; un fils, Pierre, était né de cette union. Pétain l'avait précédemment demandée en mariage en 1901.
  9. Les maréchaux de France (Pétain et Franchet d'EspÚrey) sont membres par principe du Conseil supérieur de la guerre.

Références

  1. « Loi constitutionnelle du 10 juillet 1940 », sur le site de l’AssemblĂ©e nationale, assemblee-nationale.fr, consultĂ© le 27 dĂ©cembre 2008.
  2. [PDF] Fonction cumulant les attributions de prĂ©sident de la RĂ©publique et de prĂ©sident du Conseil : cf. JĂ©rĂŽme Cotillon, « Les entourages de Philippe PĂ©tain, chef de l’État français, 1940-1942 », Histoire@Politique – Politique, culture, sociĂ©tĂ©, no 8, mai-aoĂ»t 2009.
    Voir en particulier la note 42, p. 16.
    .
  3. Herbert R. Lottman (trad. BĂ©atrice Vierne), PĂ©tain, Éditions du Seuil, Paris, 1984, 732 p. (ISBN 978-2-02-006763-8 et 978-2020067638), p. 13-15.
  4. Dont l'un des fils, Hermant () sera tué devant Douaumont, le .
  5. SGA MĂ©moire des Hommes 14-18.
  6. « 5 MIR 217/1 Cauchy-à-la-Tour an I-1886 », sur pasdecalais.fr (consulté le ).
  7. Henry Rousso, Paule Muxel et Bertrand de Solliers, documentaire « Philippe Pétain » sur Arte, 2010.
  8. « L'enfance et l'adolescence », marechal-petain.com.
  9. Henri Amouroux, PĂ©tain avant Vichy : la Guerre et l'amour, Paris, Ă©ditions Fayard, , 312 p., p. 13-14.
  10. Aron 1962, p. 25-26.
  11. Son grand-oncle lui écrit notamment : « Mon cher neveu, je ne souhaite qu'une chose : c'est que toujours dans la famille il y ait des hommes qui portent la croix ou l'épée. »
  12. « L’officier d'Ă©tat-major – L'École de guerre », marechal-petain.com.
  13. Biographie du Maréchal Philippe Pétain.
  14. Hervé Bentegeat, « Et surtout pas un mot à la Maréchale ». Pétain et ses femmes, Albin Michel, , 230 p..
  15. Simon Epstein, Les Dreyfusards sous l'Occupation, Albin Michel, , 358 p. (ISBN 978-2-226-12225-4), p. 197.
  16. Ferro 2009, p. 789.
  17. Epstein 2001, p. 208.
  18. Pierre Quillard, Le monument Henry – Liste des souscripteurs classĂ©s mĂ©thodiquement et selon l'ordre alphabĂ©tique, Ă©d. Pierre-Victor Stock, Paris, 1899, chap. « L'ArmĂ©e », [PDF] [consultable en ligne sur le site gallica.bnf.fr (page consultĂ©e le 3 juillet 2009)] ; 18 listes publiĂ©es par La Libre Parole, entre le et le .
  19. Henry du Moulin de LabarthĂšte, Le Temps des illusions – Souvenirs (-), Ă©d. La diffusion du livre, 1947, p. 97.
  20. Epstein 2001, p. 209.
  21. Epstein 2001, p. 185.
  22. Epstein 2001, p. 189.
  23. Joël Hanhart, Waldemar Mordekhaï Haffkine (1860-1930), Paris, Honoré Champion, , 692 p. (ISBN 978-2-7453-3074-1), « Mutatis Mutandis, Versailles-Odessa, Nuances », p. 343.
  24. Biographie de Philippé Pétain sur le site Chemins de mémoire du Gouvernement français, cheminsdememoire.gouv.fr.
  25. Robert Aron, « PĂ©tain : sa carriĂšre, son procĂšs », Grands dossiers de l'histoire contemporaine, Paris, Librairie AcadĂ©mique Perrin,‎ 1962-1964, p. 31.
    Aron indique : « [
] le chef de bataillon PĂ©tain est promu professeur Ă  l'Ă©cole de tir de ChĂąlons. »
    .
  26. Aubagnac Gilles, « Du corps à corps au corps franc », Corps, 2014/1 (No 12), p. 103-107. DOI : 10.3917/corp1.012.0103. URL : https://www.cairn.info/revue-corps-2014-1-page-103.htm.
  27. Pedroncini 1998, p. 27.
  28. Maréchal Franchet d'Esperey, « le 1e corps d'armée en août et septembre 1914 - I de Lille à Dinant », sur revuedesdeuxmondes.fr,
  29. « Fonds Philippe Pétain, p. 7 », sur servicehistorique.sga.defense.gouv.fr, .
  30. Roger Maudhuy, « Vichy les procÚs de la collaboration », sur books.google.fr, Ixelles éditions, .
  31. C’était alors le plus haut grade.
  32. Aron 1962, p. 32.
  33. « Le 1e corps d'armée en août et septembre 1914 II de Charleroi à la Marne », sur revuedesdeuxmondes.fr, 2nde quinzaine de juillet 1939.
  34. Instructions du .
  35. Intervention de Marc Ferro dans le documentaire Philippe Pétain, un film de Paule Muxel et Bertrand de Solliers, coécrit avec Henry Rousso en 2010.
  36. Aron 1962, p. 35-36.
  37. Ferro 2009, p. 678.
  38. Philippe PĂ©tain (1856-1951) sur cheminsdememoire.gouv.fr.
  39. Ferro 2009, p. 25.
  40. Michel Goya, « Quand la désobéissance met la patrie en danger : Pétain et la défense en profondeur ».
  41. Edmond Buat, « Journal 1914-1923 », sur books.google.fr, Perrin, , p. 610-611.
  42. Décret du attribuant la médaille militaire au général Pétain.
  43. Edmond Buat, « Journal 1914-1923 », sur books.google.fr, Perrin, , p. 697-698.
  44. HervĂ© Pinoteau, Le chaos français et ses signes : Étude sur la symbolique de l'État français depuis la RĂ©volution de 1789, La Roche-Rigault, Presses Sainte-Radegonde, , 514 p. (ISBN 2-908571-17-X), p. 424.
  45. « Manuscrit inĂ©dit : la Grande Guerre vue par PĂ©tain », La DĂ©pĂȘche, .
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  47. Crémieux-Brilhac, p. 577.
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  49. « Vente du vendredi - Autographes – Lot no 426 », sur le site galileoauction.com, consultĂ© le .
  50. Guy Pedroncini, Pétain, le soldat, 1914-1940, 1998, p. 339. Voir aussi : Guy Pedroncini, « Remarques sur les grandes décisions stratégiques françaises de 1914 à 1940 », en ligne depuis 2005.
  51. (es) Javier Espinoza, « Gas mostaza sobre el Rif », El Mundo, .
  52. L’historien britannique Sebastian Balfour dans Étreinte mortelle, Éditions PenĂ­nsula, ainsi que Rolf-Dieter MĂŒller dans son livre Giftgas Gegen Abd El Krim: Deutschland, Spanien und der Gaskrieg in Spanisch-marokko, 1922-1927.
  53. Omar Mezoug, « Chronique du livre de Courcelle-Labrousse et Marmié », « La guerre du Rif, Maroc 1921-1926 », dans La Quinzaine littéraire no 973, , p. 26.
  54. Philippe de Gaulle et Michel Tauriac, De Gaulle, mon pĂšre, t. I, Ă©ditions Plon, (ISBN 2-266-14330-1), p. 378.
  55. Max Gallo, L'appel du destin, Paris, Pocket, 1998, cf. « Lettre de de Gaulle à Pétain » p. 244.
  56. Philippe de Gaulle et Michel Tauriac, De Gaulle, mon pĂšre : entretiens avec Michel Tauriac, t. I, Paris, Ă©ditions Plon, , 827 p. (ISBN 2-266-14330-1), p. 38.
  57. Ferro 1987, p. 54-56.
  58. Site de l'Académie française, discours de réception du maréchal Pétain..
  59. Centre de documentation juive contemporaine, La France et la question juive. 1940-1944, Paris, Sylvie Messinger, 1981, p. 129-130.
  60. Epstein 2001, p. 199.
  61. Cf. François Paulhac, Les Accords de Munich : et les origines de la guerre de 1939, éd. J. Vrin, 1988, p. 81, extrait en ligne.
  62. Robert Frank, [http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/reco_0035-2764_1980_num_31_4_408550 « Intervention Ă©tatique et rĂ©armement en France 1935-1939 », La Revue Ă©conomique, 4e numĂ©ro de l'annĂ©e 1980, p. 745 : « AprĂšs un dĂ©gonflement prĂ©visible entre 1918 et 1924, [les dĂ©penses de DĂ©fense nationale] reprennent leur ascension jusqu'en 1930-1931 [
]. Puis — troisiĂšme phase — elles furent l'objet de la double dĂ©pression pacifiste et surtout dĂ©flationniste des annĂ©es 1932-1934, pour enfin prendre un second envol, pendant la pĂ©riode de rĂ©armement proprement dit, dĂšs 1935, et surtout de 1936-1937 jusqu'Ă  la guerre ».
  63. La France et le dĂ©sarmement, Jean-Luc Marret, Éditions L'Harmattan, 1998, page 133 : « Les dĂ©cisions prises en 1934, bien que le gouvernement Doumergue ait Ă©tĂ© engagĂ© dans une lutte dĂ©flationniste, de faire voter des crĂ©dits militaires pour 3 milliards de francs [
] montrĂšrent que s'il n'y avait pas encore augmentation importante de l'effort de dĂ©fense, il n'y avait plus de rĂ©ductions budgĂ©taires ».
  64. Guy Antonetti, Histoire contemporaine, politique et sociale, PUF, 2003, p. 451-452, « Abandonnant les illusions de la sĂ©curitĂ© collective briandiste, Barthou renoue avec la politique des alliances, avec la TchĂ©coslovaquie, la Roumanie, la Yougoslavie. En avril 1934, il dĂ©clare : « la France assurera seule sa dĂ©fense », seule, c'est-Ă -dire hors de la SDN. Il est assassinĂ© en octobre Ă  Marseille avec le roi de Yougoslavie, qu'il est allĂ© accueillir en France. Son successeur, Pierre Laval, conclut le 2 mai 1935 le pacte franco-soviĂ©tique d'assistance mutuelle, rĂ©surrection de l'alliance franco-russe de 1891-1892. Cette nouvelle politique Ă©trangĂšre conduit normalement Ă  augmenter les dĂ©penses de dĂ©fense et d'armement. D'oĂč la contradiction : au moment oĂč on cherche d'un cĂŽtĂ© Ă  comprimer les dĂ©fenses (pour lutter contre la crise Ă©conomique), on provoque de l'autre leur augmentation (pour conjurer le pĂ©ril militaire allemand) ». Page 457, il est prĂ©cisĂ© : « Laval poursuit avec obstination sa politique de dĂ©flation : Ă  coups de dĂ©crets-lois, il impose la diminution des dĂ©penses publiques de 10 % [
]. Rançon du rĂ©armement, le dĂ©ficit budgĂ©taire au lieu de se rĂ©sorber s'Ă©tendit ».
  65. Philippe Garraud, « La politique française de rĂ©armement de 1936 Ă  1940 : prioritĂ©s et contraintes », Guerres mondiales et conflits contemporains, Paris, Presses universitaires de France, no 219,‎ , p. 87-102 (lire en ligne).
  66. La France et le dĂ©sarmement, Jean-Luc Marret, Éditions L'Harmattan, 1998, p. 133.
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  68. L'éniqme de notre manque de divisions blindées, Général Alfred Conquet, Nouvelles éditions latines.
  69. Journal officiel du .
  70. Aron 1962, p. 36.
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  72. ConfĂ©rence du Ă  l’École de Guerre.
  73. PrĂ©face du livre du gĂ©nĂ©ral WƂadysƂaw Sikorski, La Guerre moderne.
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  107. Cf. Yves Durand, Henri Michel, J.P. Azéma.
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  132. Le , Émile Labeyrie fut en mĂȘme temps rĂ©voquĂ© de la prĂ©sidence de la Cour des comptes et de sa fonction de maire d'Aire-sur-l'Adour, payant ainsi ses responsabilitĂ©s Ă  l'Ă©poque du Front populaire, cf. Histoire sociale des Landes.
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  166. sciences-sociales.ens.fr, Julien Kurtz, Matthieu Pujuguet, Jacques-Benoit Rauscher, Les politiques agricoles de 1939 Ă  1958 : D’une agriculture protĂ©gĂ©e Ă  une agriculture dirigĂ©e, Ens Cachan [lire en ligne].
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    « [
] [En mars 1945] La CGA est une confĂ©dĂ©ration composĂ©e de 7 branches dont la FNSEA, qui majoritaire, ne peut cependant pas imposer sa loi et seule la CGA est reconnue par les pouvoirs publics comme reprĂ©sentative du monde paysan [
] ». « 1946 janvier-fĂ©vrier. L’épreuve de vĂ©ritĂ© pour la CGA a lieu en 1946 quand les paysans sont appelĂ©s Ă  Ă©lire librement les reprĂ©sentants Ă  la FNSEA. Dans la plupart des rĂ©gions ces Ă©lections sont interprĂ©tĂ©es comme un rĂ©fĂ©rendum sur les nouvelles institutions agricoles. Deux tendances se dessinent alors dans le monde agricole : la FNSEA plus droite d’un cĂŽtĂ© et de l’autre la CGA. Ce sont deux visions de l’agriculture qui s’affrontent [
] »
  170. (en) Joseph P. Ansell, Arthur Szyk : Artist, Jew, Pole, Liverpool, Liverpool University Press, coll. « The Littman Library of Jewish Civilization », , XVI-332 p. (ISBN 978-1-874774-94-5, lire en ligne), p. 139.
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  172. Eberhard JĂ€ckel, Frankreich in Hitlers Europa – Die deutsche Frankreichpolitik im Zweiten Weltkrieg, Deutsche Verlag-Anstalg GmbH, Stuttgart, 1966 ; traduction : La France dans l'Europe de Hitler (prĂ©face de Alfred Grosser, traduction de Denise Meunier), Ă©d. Fayard, coll. « Les grandes Ă©tudes contemporaines », 1968, 554 p. ; citĂ© par Stanley Hoffmann dans sa prĂ©face Ă  La France de Vichy, Paxton 1999, p. 41.
  173. Ferro 2009, p. ??.
  174. Il dĂ©clare notamment : « C’est dans l’honneur et pour maintenir l’unitĂ© française, une unitĂ© de dix siĂšcles, dans le cadre d’une activitĂ© constructive du nouvel ordre europĂ©en, que j’entre aujourd’hui dans la voie de la collaboration [
] Cette collaboration doit ĂȘtre sincĂšre [
] ».
  175. Cette entrevue ne fit l'objet d'aucun compte rendu officiel, mais on sait que seul le principe de la collaboration fut Ă©tabli sans qu'aucun engagement ne soit pris d'aucune part. Il est d'ailleurs important de souligner que cette entrevue intervint en mĂȘme temps que les dĂ©bats de la commission d'armistice entre la France et l'Allemagne, tout en Ă©tant totalement distincte. Cf. : Marc Ferro, Questions sur la Seconde Guerre mondiale, Éditions Complexe, 2007, p. 38.
  176. AndrĂ© Kaspi, Ralph Schor, « La Seconde Guerre mondiale : chronologie commentĂ©e », Éditions Complexe, 1995 (ISBN 2870275919), p. 252.
  177. André Béziat, Franklin Roosevelt et la France (1939-1945), L'Harmattan, 1997 (ISBN 2738460704), p. 160-161.
  178. ProcÚs du maréchal Pétain devant la Haute Cour de justice, 1945 (Musée Criminocorpus, p. 336).
  179. Jacques Duquesne, Les Catholiques sous l’Occupation, Points-Seuil, 1996.
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  182. Paxton 2004, p. 372.
  183. Louis Aragon popularisera l’expression en la reprenant dans son poĂšme J’écris dans un pays dĂ©vastĂ© par la peste lorsqu’il dĂ©crit « Mis en coupe rĂ©glĂ©e au nom du Roi PĂ©toche/Un pays de frayeur en proie aux loups-garous. »
  184. http://www.cndp.fr/poetes-en-resistance/poetes/louis-aragon/jecris-dans-un-pays-devaste-par-la-peste/pistes-pedagogiques.html.
  185. Aron et Elgey 1954, p. 636-642.
  186. Afin d'en référer à son gouvernement, le consul général allemand Krug von Nidda, mis au courant, bloque le projet. Il aurait été averti par le ministre des Affaires étrangÚres Ribbentrop qu'un délai était nécessaire pour étudier le texte. La nouvelle du refus définitif fut ensuite apportée à l'hÎtel du Parc par le représentant allemand à Vichy.
  187. Pierre Nicolle, Cinquante mois d'armistice, Éditions AndrĂ© Bonne, p. 288.
  188. Robert Paxton, La France de Vichy, Le Seuil, 1997 (1972), p. 382.
  189. Raymond Cartier, La Seconde Guerre mondiale, t. II : 1942-1945, Paris, Larousse et Paris-Match, , p. 241.
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  208. La Fabrique de l’Histoire, « Épisode 4/38 : PĂ©tain et la Grande Guerre : InvitĂ©s : Bruno Cabanes (historien, professeur Ă  la Ohio State University), Henry Rousso (historien, universitaire). », 10’35’’ [audio], sur France Culture, (consultĂ© le )
  209. questions.fr/proces%20et%20affaire/proces%20petain%20verdict.html histoire-en-questions.fr, Un moment d'Histoire, « Le verdict ».
  210. Collectif - Fondation Charles de Gaulle, De Gaulle et la LibĂ©ration, Éditions Complexes, Paris, 2004, 221 p. (ISBN 978-2-8048-0016-1) [prĂ©sentation en ligne], chapitre : « De Gaulle et la RĂ©publique des lettres », par Nicole Racine : p. 184-186 : « [
] L'ordonnance du 26 dĂ©cembre 1944 entraĂźnait automatiquement la destitution et l'exclusion de toutes fonctions, offices publics et corps constituĂ©s de quiconque Ă©tait dĂ©clarĂ© coupable d'indignitĂ© nationale. [
] »
    Ont participĂ© Ă  cet ouvrage : Claire Andrieu, Serge Berstein, MichĂšle et Jean-Paul Cointet, Laurent Douzou, RenĂ© Hostache, Chantal Morelle, Nicole Racine, Odile Rudelle, Maurice VaĂŻsse, Dominique Veillon, Olivier Wieviorka. Textes tirĂ©s des actes du colloque des 6, 7 et 8 octobre 1994 organisĂ© par la Fondation Charles-de-Gaulle, la Fondation nationale des sciences politiques, l'Association française de droit constitutionnel et la participation de l'universitĂ© de Caen ; publiĂ© en version intĂ©grale : Le rĂ©tablissement de la lĂ©galitĂ© rĂ©publicaine, 1944, Éditions Complexes, 1996.
  211. Site de l'AcadĂ©mie française, Philippe PĂ©tain (1856-1951) : « [
] CondamnĂ© Ă  l’indignitĂ© nationale, le marĂ©chal PĂ©tain fut exclu de l’AcadĂ©mie française ; son siĂšge ne devait pas ĂȘtre pourvu de son vivant. ».
  212. Le Larousse 2008 (ISBN 978-2-03-582503-2), « PÉTAIN (Philippe) », p. 1592 emploie le mot « radiĂ© » : [Acad. fr., 1929 ; radiĂ© en 1945] ; ce terme est employĂ© par ce dictionnaire de maniĂšre constante, il figure par exemple sur l'Ă©dition de 1952, p. 1607.
  213. Joseph Simon PĂ©tain, mon prisonnier, Ă©ditions Plon, 1978.
  214. Williams 2005, p. 520.
  215. Documentaire On a volé le maréchal (réalisateur : Cédric Condom, auteur : Jean-Yves Le Naour), 2012, 52'.
  216. « Aujourd’hui [
] il y a un vieillard dans un fort ; un vieillard dont moi et beaucoup d’autres reconnaissons qu’il a rendu jadis de grands services Ă  la France. Nous ne l’oublions pas et nous ne devons pas l’oublier. Je l’ai dit Ă  Verdun mĂȘme. Pourquoi ce vieillard mourrait-il sans qu’il ait pu revoir un arbre ou une pelouse ? Je ne crois pas que ce soit une trĂšs grande chose que de l’y condamner. VoilĂ  ma conviction. Je crois que le moment est venu de faire le nĂ©cessaire. Il faut laisser mourir entourĂ© d’une certaine dignitĂ© un homme qui a portĂ© Ă  certains moments la gloire de la France et qui, pour s’ĂȘtre terriblement trompĂ©, n’en est pas moins Ă  l’heure qu’il est un vieillard inoffensif. » ConfĂ©rence de presse du gĂ©nĂ©ral de Gaulle du , Le Monde, , citĂ©e par BĂ©nĂ©dicte Vergez-Chaignon, PĂ©tain, Perrin, 2014.
  217. L'Écho d'Oran (quotidien), .
  218. Philippe Héduy, Algérie française, 1942-1962, Société de production littéraire, 1980, p. 64.
  219. René PiedeliÚvre, Souvenirs d'un médecin légiste, Flammarion (Paris), 1966, p. 157-165.
  220. Rousso 1990, p. 61-62.
  221. Jean-Yves Le Naour, « PĂ©tain bouge encore », L’Histoire, no 381, , p. 30-31.
  222. Rousso 1990, p. 385.
  223. Conan et Rousso 1996, p. ??.
  224. crdp-reims.fr, CRDP Champagne-Ardenne, « La reconnaissance progressive de la responsabilitĂ© de l'État Français ».
  225. Rousso 1990, p. 389.
  226. Extraits de l'entretien de François Mitterrand, accordée à Radio J le (diffusée le 22), sur la commémoration de la rafle du Vel d'Hiv de 1942 et la polémique autour du dépÎt d'une gerbe sur la tombe du maréchal Pétain.
  227. « La tombe du marĂ©chal PĂ©tain vandalisĂ©e Ă  l’üle d’Yeu », sur lemonde.fr,
  228. « La tombe du maréchal Pétain a été vandalisée », tempsreel.nouvelobs.com, .
  229. « La tombe du maréchal Pétain vandalisée », lefigaro.fr, .
  230. RaphaĂ«l Godet, « « Il y en a mĂȘme qui viennent dĂ©fĂ©quer dessus » : sur l'Ăźle d'Yeu, « l'encombrante » tombe du marĂ©chal PĂ©tain », sur France Info, (consultĂ© le ).
  231. C'est ce que montre par exemple le jugement de Simone de Beauvoir : « PĂ©tain : le responsable de la rĂ©pression de Verdun, l’ambassadeur qui avait couru fĂ©liciter Franco de sa victoire, un intime ami des Cagoulards », dans La Force de l’ñge, Gallimard, 1960, p. 510.
  232. Collectif, Chronique du XXe siùcle, Éditions Chronique, , 1438 p. (ISBN 978-2-36602-013-7, lire en ligne), p. 1930.
  233. Olivier Wieviorka, « Une dĂ©faite inĂ©vitable ? Les causes de la dĂ©faite de 1940 (confĂ©rence) », sur chrd.lyon.fr, (consultĂ© le ) : « le vote du 10 juillet est un vote d’adhĂ©sion. Mais, dirait Robert Paxton, adhĂ©sion Ă  quoi ? [
] des attentes extrĂȘmement diverses et souvent contradictoires convergent vers PĂ©tain (52’05’’). ».
  234. Titre du tome 2 de 'La grande histoire des Français sous l'Occupation' (juin 1940-juin 1941) par Henri Amouroux.
  235. Jean-Marie Flonneau, « L'évolution de l'opinion publique de 1940 à 1944 » dans Jean-Pierre Azéma et François Bédarida (dir.), Le Régime de Vichy et les Français, Paris, Fayard, 1992, p. 506-522.
  236. « Étapes douloureuses » (Ce dĂ©calage entre l’appui Ă  la personne du MarĂ©chal PĂ©tain et l’opposition ou la mĂ©fiance envers la politique menĂ©e par Vichy est diagnostiquĂ©e sans fard par Maurras en dĂ©cembre 1942.), Candide,‎ , p. 1 (lire en ligne).
  237. VĂ©ronique AuzĂ©py-Chavagnac, Jean de FabrĂšgues et la jeune droite catholique (lire en ligne), p. 325-356 (Chapitre XI. L’engagement dans la RĂ©volution nationale).
  238. Pr Jean Quellien, Opinion et comportements dans le Calvados sous l’Occupation, 1995.
  239. Cf. J.R. Tournoux.
  240. Muriel Frat, « Pétain avant Pétain », sur Le Figaro, (consulté le ).
  241. Jean-Pierre Bertin-Maghit, « "Les voyages du marĂ©chal" : trois historiens en quĂȘte d'images », VingtiĂšme SiĂšcle. Revue d'histoire no 32, 1991, p. 85-92.
  242. Jacques Le Groignec, RĂ©plique aux diffamateurs de la France 1940-1945, Ă©dit. Nouvelles Ă©ditions latines, 2006 (ISBN 978-2-7233-2063-4).
  243. J.-P. Rioux, La France de la IVe RĂ©publique, Points-Seuil.
  244. « Ordonnance du 9 août 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine sur le territoire continental », sur Légifrance
  245. Yves Durand, Vichy 1940-1944, Bordas, 1972.
  246. « Allocution de Monseigneur Valerio Valeri » (« demandons Ă  la divine providence de vous conserver dans cette vigueur de corps et d’esprit dont donnez Ă  tous un si magnifiques exemple »), L’action française,‎ , p. 1 (lire en ligne).
  247. Cousteau, « Sans Ă©quivoque
 », Je suis partout,‎ , p. 1 (lire en ligne).
  248. Paxton 1999, p. ??.
  249. Winston Churchill, The Second World War, Plon, 1948-1954 ; rééd. La Seconde Guerre mondiale, Le Cercle du Bibliophile, 12 vol., 1965-1966, t. IV, « L'heure tragique, l'Angleterre seule, 1940 », chap. XI, p. 203-227.
  250. Jean Lacouture, Charles de Gaulle, I. Le rebelle 1890-1944, édit. Le Seuil, 1984 (ISBN 978-2-02-006969-4), chap. 23 « L'ombre de Vichy », p. 449-462.
  251. Janine Bourdin, Critique du livre de Paxton dans : Revue française de science politique, persee.fr [lire en ligne].
  252. ac-reims.fr « 1945 : La libération des camps nazis et la révélation du génocide », Bulletin de Liaison des Professeurs d'Histoire-Géographie de l'Académie de Reims, no 6, 1993..
  253. appli-etna.ac-nantes.fr, « Quelques rappels sur la déportation 1933-1945 ».
  254. crdp-reims.fr, Centre de recherche et de documentation pédagogique, « La déportation et le systÚme concentrationnaire nazi ».
  255. Cité par Marcel Jullian, De Gaulle, Pensées, répliques et anecdotes, éd. Le cherche midi, 1994 (ISBN 978-2-7242-8462-1) ; rééd. France Loisirs, Paris, 1995, p. 99.
  256. Agence France-Presse, « Plus aucune rue au nom de Pétain », sur lefigaro.fr, (consulté le ).
  257. « Discours de Jacques Chirac du 25 juin 2006 - Verdun-Meuse.fr », sur verdun-meuse.fr (consulté le ).
  258. Le titre de l'encart fait référence à une phrase, restée célÚbre, de l'allocution du maréchal Pétain le .
  259. credho.org, Credho Paris Sud, « CEHD, Liberté d'expression et apologie de la collaboration, affaire Lehideux et Isorni () », par Patrice Rolland, professeur à l'université de Paris XII.
  260. Charles de Gaulle, MĂ©moires de guerre – L'appel : 1940-1942 (t. I), Ă©d. Plon, Paris, 1954 ; rĂ©Ă©d. Pocket, 1999 (nouvelle Ă©dition 2007) 440 p. (texte intĂ©gral) (ISBN 978-2-266-09526-6 et 978-2-266-09526-6), p. 78-79.
  261. La Marseillaise.
  262. RaphaĂ«lle Branche, « Le rĂ©cit historique et les intentions des acteurs. RĂ©ponse Ă  François Buton », Le Mouvement social, vol. 1, no 238,‎ , p. 87-93 (lire en ligne, consultĂ© le ). Via Cairn.info.
  263. Mihai Pelin, Antonescu, le Pétain roumain et ses guerres, Ed. Iosif Constantin Drăgan, Venise 1988.

Voir aussi

Mémoires et témoignages

  • Le ProcĂšs du marĂ©chal PĂ©tain - Compte-rendu stĂ©nographique, Albin Michel (2 tomes), coll. « des grands procĂšs contemporains », 1945, vol. 1, vol. 2.
  • Le ProcĂšs du marĂ©chal PĂ©tain, texte intĂ©gral du Journal Officiel, Éditions du Trident, Paris, 3 volumes, 1450 pages.
  • MaĂźtre Maurice Garçon, Le ProcĂšs du marĂ©chal PĂ©tain, Ă©ditions VariĂ©tĂ©s, 1949.
  • FrĂ©dĂ©ric Pottecher, Le ProcĂšs PĂ©tain : 20 journĂ©es d'audiences, 1981, 542 p., Ă©ditions LattĂšs.
  • Henry Du Moulin de LabarthĂšte, Le temps des illusions : souvenirs, juillet 1940-avril 1942, Paris, DĂ©terna, coll. « Documents pour l'histoire », (1re Ă©d. 1946), 436 p. (ISBN 978-2-36006-050-4, OCLC 820122084).
  • Jean-Henri Jauneaud, J'accuse le MarĂ©chal PĂ©tain, Ă©ditions Pygmalion, 1949.
  • Paul Racine, J'ai servi PĂ©tain. Le dernier tĂ©moin, Paris, Le Cherche-midi, 2014.
  • Gilbert Renault (colonel RĂ©my, compagnon de la LibĂ©ration), Dans l'ombre du marĂ©chal, Presses de la citĂ©, 1971.
  • Jean Tracou, Le MarĂ©chal aux liens, Éd. AndrĂ© Bonne, 1949.
  • M.A Combaluzier, J'ai vu mourir Philippe PĂ©tain, Flammarion, 1966.
  • Actes et Ă©crits de Philippe PĂ©tain, prĂ©sentĂ©s par Jacques Isorni, Flammarion, 1974.
  • GĂ©nĂ©ral Émile Laure, PĂ©tain, Éd. Berger-Levrault, 1942.
  • Albert Massonie, J'ai soignĂ© PĂ©tain, Tallandier, 2017.
  • LĂ©on Zeller, annotĂ© par Claude Franc, Souvenirs sur les marĂ©chaux Foch et PĂ©tain, Economica, 2018.

Sur PĂ©tain

Sur le régime de Vichy et la collaboration

Articles connexes

Liens externes


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