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Charles Maurras

Charles Maurras, né le à Martigues (Bouches-du-Rhône) et mort le à Saint-Symphorien-lès-Tours (Indre-et-Loire), est un journaliste, essayiste, homme politique et poète français.

Charles Maurras
Charles Maurras en 1937.
Fonctions
Majoral du Félibrige
-
Édouard Aude (d)
Pierre Julian (d)
Fauteuil 16 de l'Académie française
-
Biographie
Naissance
Décès
Sépulture
Cimetière de Roquevaire (d)
Nom de naissance
Charles Marie Photius Maurras
Surnom
Le Martégal
Pseudonymes
Octave Martin, Pierre Garnier, Léon Rameau, Xénophon 03, Xénophon 3, Xénophon III, Pellisson
Nationalité
Activités
Rédacteur à
La Revue félibréenne (d), Lou Viro-Soulèu (d)
Père
Aristide Maurras (d)
Mère
Marie-Pélagie Maurras (d)
Fratrie
Romain Maurras (d)
Joseph Maurras (d)
Autres informations
Partis politiques
Membre de
Académie française ()
Félibrige
Escolo parisenco dóu Felibrige (d)
Mouvements
Maître
Genres artistiques
Influencé par
Condamné pour
Menace de mort (), Provocation au meurtre (en) (), Intelligence avec l'ennemi ()
Distinction
Archives conservées par
signature de Charles Maurras
Signature
Sépulture de Charles Maurras au cimetière de Roquevaire.

Écrivain provençal appartenant au Félibrige et agnostique dans sa jeunesse, il se rapproche ensuite des milieux catholiques et antidreyfusards. Autour de Léon Daudet, Jacques Bainville, et Maurice Pujo, il dirige le journal L'Action française, fer de lance du mouvement homonyme, d’inspiration royaliste, nationaliste et contre-révolutionnaire qui devient le principal mouvement intellectuel et politique d'extrême droite sous la Troisième République. Sa doctrine prône une monarchie héréditaire, tout en se réclamant antisémite, antiprotestante, antimaçonnique et xénophobe.

Bien qu’antigermanique, il soutient le régime de Vichy, l'instauration d'une législation antisémite et la création de la milice. Poursuivant la publication de L'Action française sous l'occupation allemande, il réclame l'exécution de résistants. Arrêté à la Libération, il est condamné à la réclusion criminelle à perpétuité et à la dégradation nationale en raison de ses articles. Il est gracié pour raisons de santé en .

Élu à l'Académie française le 9 juin 1938, sa condamnation à la dégradation nationale entraîne automatiquement sa radiation de l’Institut de France. Mais il fut en fait décidé, lors de la séance du , qu’on déclarerait vacant le fauteuil de Maurras, sans pour autant voter la radiation. Ainsi, Charles Maurras ne fut remplacé sous la Coupole qu’après sa mort.

Son parcours et sa pensée jouent un rôle essentiel dans les courants de pensée de droite et d'extrême droite en France.

Biographie

Enfance et adolescence (1868-1886)

Charles Maurras en 1877.

En 1868, le 20 avril, naît à Martigues[3], au 13 quai Saint-Sébastien, Charles Marie Photius Maurras[G 1], en Provence. Il est le second fils de Jean Aristide Maurras (1811-1874), percepteur, ayant des convictions libérales, et de Marie-Pélagie Garnier (1836-1922)[G 2], profondément catholique. Ce couple de condition assez modeste se fait apprécier par les aides qu'il prodigue aux plus pauvres[G 3]. Quelques mois avant la naissance de Charles, ils ont perdu leur premier fils, Romain, âgé de deux ans.

En 1872, la naissance de François Joseph Émile agrandit la famille. La famille Maurras s'est installée à Martigues au XVIIe siècle ; elle était originaire du pays gavot (Haut-Var), au sud de Gréoux, près de Saint-Julien-le-Montagnier[G 4]. En 1873, Charles est mis à l'école communale : sa famille est étonnée par sa vivacité, ses dons et sa capacité à réciter l'histoire sainte et l'histoire romaine mais il est réprimandé quand il rapporte du provençal à la maison[G 5]. Charles Maurras écrira que s'il lui était donné de revivre une période de sa vie, ce serait sa petite enfance[4]. Le 3 janvier 1874, il devient orphelin de père[G 5]. À six ans, Charles part vivre avec sa mère et son petit frère à Aix-en-Provence. En octobre 1876, Charles entre en classe de huitième au collège catholique, à Aix-en-Provence, rue Lacépède. À la fin de la septième, il obtient onze prix et pendant quatre ans, il remporte le premier prix de latin[G 6]. En 1879, promu « élève d'honneur », il reçoit le premier prix d'instruction religieuse mais ce n'est pas un élève sage et il a souvent des sautes d'humeur[G 7]. Malhabile en mathématiques et en anglais, le latin et le grec le ravissent[G 7]. Au collège, il se lie avec Xavier de Magallon, auquel le lie une passion pour la poésie et Alfred de Musset, puis il s'enthousiasme pour Frédéric Mistral[G 8].

À quatorze ans, la surdité[n 1] dont il est soudainement atteint, dégrade aussi ses capacités vocales. Désespéré, le jeune Charles voit s'effondrer tous ses projets, dont celui d'entrer à l'École navale comme le père de sa mère[G 10]. L'abbé Jean-Baptiste Penon, futur évêque de Moulins et premier latiniste et helléniste du diocèse, propose à Mme Maurras d'aider son fils et celui-ci dira que cette offre spontanée fut la grande bénédiction de sa vie[5]. L'abbé Penon donne des cours particuliers au jeune Charles, ce qui lui permet de revenir parfois au collège pour des cours de rhétorique et philosophie[G 11]. Alors que Maurras est en révolte contre sa surdité, la lecture de Pascal, qu'il assimile au dolorisme[n 2], contribue à lui faire perdre la foi[G 12]. La perte de la foi et sa surdité le désespèrent et le conduisent à une tentative de suicide qui échouera[G 13] et n'est connue que par des témoignages indirects[6].

En 1884, il se raccroche progressivement à la vie et est désigné par ses maîtres, avec quelques-uns de ses amis et condisciples, pour donner des conférences organisées au collège du Sacré-Cœur : Charles Maurras y prononce sa première conférence, qui est aussi son premier texte publié, sur Thomas d'Aquin étudiant et lecteur de l'université à Paris[G 14]. La même année, il est reçu avec mention à son premier baccalauréat, en 1884, où il excelle en latin et en grec[G 15]. Il approfondit alors ses lectures philosophiques, s'intéresse à Hippolyte Taine et Ernest Renan[G 15]. En 1885, après un échec à la seconde partie du baccalauréat[n 3] en juillet du fait d'une copie de philosophie jugée trop thomiste, Charles Maurras est admis en novembre de la même année avec la mention Bien : il est reçu en premier en sciences et en philosophie[G 16]. L’abbé Penon incite Charles Maurras à aller à Paris car il souhaite l’introduire dans les revues et journaux qu’il connaît, ce qui amène la famille Maurras à quitter Martigues et à s'installer à Paris le 2 décembre 1885[G 16].

Période de formation avant l'Action française (1886-1898)

Avant la création de l'Action française, Charles Maurras approfondit ses questionnements métaphysiques, s'implique dans la vie littéraire et enrichit sa réflexion politique tout en se lançant dans le journalisme.

Réflexion philosophique

Charles Maurras, vers 1888.

Charles s’inscrit en histoire à la faculté des lettres de Paris, rencontre l’historien orléaniste Paul Thureau-Dangin mais ne peut suivre les cours du fait de son infirmité. En revanche, il se montre un bourreau de travail : lectures innombrables à la bibliothèque Sainte-Geneviève, à l’Arsenal, à la Sorbonne, annotations et rédactions d’articles, perfectionnement de son latin, notamment pour éviter les traductions de Lucrèce en alexandrins qui lui « font mal à force de le faire rire[G 17] ».

Maurras écrit dans La Réforme sociale, revue conduite par le sociologue Frédéric Le Play, qui développe une analyse de la société moderne critiquant l’individualisme et prônant des idées corporatistes et familiales dans l’esprit des encycliques papales ; il écrit également pendant cinq ans dans les Annales de philosophie chrétienne, revue dont l’ambition est de combiner la théologie du Docteur Angélique et les idées modernes issues de Lamennais[G 18]. Entre 1886 et 1888, il collabore au Polybiblion littéraire pour des comptes-rendus d’ouvrages sociologiques ; à partir de l'automne 1886, il rédige aussi le feuilleton bibliographique (« Les livres de la semaine ») de L’Instruction publique, revue de l’enseignement supérieur d’inspiration conservatrice et libérale jusqu’en 1890[G 19].

La tournure de sa pensée est encouragée par l’atmosphère intellectuelle du temps qui oscille entre le déterminisme kantien et le pessimisme de Schopenhauer. Il affirme : « Le nœud de tous les doutes peut être tranché en un point : en résolvant les problèmes de causalité. […] L’unique mobile de ma vie est l’espoir de rencontrer la vérité »[G 20].

Entre 1886 et 1889, le questionnement philosophique s'amplifie comme le dialogue épistolaire entre le jeune homme et l’abbé Penon qui tente de le guider vers l’aperception de l’origine divine de la causalité première mais Maurras bute sur la substitution des témoignages de la tradition chrétienne aux preuves rationnelles[G 21]. Il reconnaît être troublé par la philosophie kantienne de la connaissance ; tout en admirant la méthode « géométrique » de saint Thomas, il qualifie d’« enfantine » la théorie scolastique de la connaissance[G 21]. Charles Maurras dialogue avec l’abbé Huvelin, vicaire de l’église Saint-Augustin, « animal convertisseur » selon l’expression de Pierre Boutang, avec des amis séminaristes, avec des philosophes catholiques comme Maurice Blondel et Léon Ollé-Laprune qui ont apprécié ses articles ; mais son exigence de la certitude scientifique empêche Maurras de rencontrer la foi : tiraillé entre le travail de la raison et le désir de certitude religieuse, son agnosticisme se renforce[G 22]. Ne trouvant pas la foi, Charles Maurras trouve la paix intellectuelle dans la distraction de la littérature car la poésie l’éblouit et dans la méthode positiviste car l’histoire et la philosophie le passionnent[G 22].

Activité littéraire

En 1886, Maurras découvre Frédéric Mistral dans le texte ; il rêve de constituer une anthologie de poésie et de prose provençales et commence un travail de documentation dans ce but[G 23].

En 1887, se définissant comme « un pur contemplatif et un solitaire dans le goût sinon de l'école de Spinoza », il s'investit dans La Réforme sociale avec pas moins de cent soixante-dix articles jusqu'en juin 1891[G 23]. Le 23 décembre 1887, il entre au quotidien catholique L'Observateur français dont il deviendra secrétaire de rédaction en octobre 1888 et auquel donnera cent-soixante quatorze articles mais cette grande activité ne fait pas refluer son amour et sa nostalgie de la Provence. Très vite, le jeune homme rencontre des félibres comme Paul Arène et Albert Tournier[G 23].

En 1888, il obtient le prix du Félibrige pour un éloge du poète provençal Théodore Aubanel[7] ; il devient membre de cette académie qui s’est fixé comme objectif la restauration de la langue et de la culture d’oc. Durant l’été de la même année, il fait la connaissance de son compatriote Frédéric Mistral, puis, en décembre, du Lorrain Maurice Barrès. À l'âge de vingt ans, il est un des membres les plus influents du Félibrige[8].

En 1889, il rencontre Frédéric Amouretti lors des Fêtes félibréennes de Sceaux et devient le secrétaire du Félibrige de Paris. Il publie son premier ouvrage, consacré à Aubanel et devient journaliste littéraire[9].

En 1890, il rencontre Jean Moréas et devient le théoricien de l'École romane, fondée par le poète du Pèlerin passionné, prônant un néo-classicisme peu enclin à l'académisme[10]. Maurras cherchera à rapprocher félibres et poètes romans[G 24]. La même année, il ébauche un vaste chant épique de trois mille alexandrins, rassemblés sous le titre de Théocléa et inspiré par la figure de Pythagore en qui il voit le plus grand moraliste de l'Antiquité[G 25]. Il se lie d'amitié à Anatole France[11], ce qui contribue au renforcement de son agnosticisme. Il travaille avec ses amis à faire connaître les poètes provençaux au public parisien et à établir des ponts entre symbolisme et provençalisme, notamment en travaillant à un numéro spécial de La Plume[G 24].

En 1891, il consacre son deuxième essai critique au poète Jean Moréas, le chef de file de l’École romane, qui lui a été présenté l’année précédente. Il prépare également un court traité visant à établir une doctrine de vivre et de mourir, La Merveille du monde, qui ramasse la recherche philosophique du jeune Maurras mais ne l'achève pas[G 25].

Jusqu'en 1898, c'est dans la Revue encyclopédique que Maurras livre la plupart de ses articles littéraires[G 26] : il chronique ainsi les œuvres de Paul Bourget, Jules Lemaître, Jean Psichari, Willy, Jules Tellier, Gabriele D'Annunzio, Paul Adam, Tristan Bernard, Marcel Schwob, Frédéric Plessis, Jean de Tinan, Remy de Gourmont, Stuart Merrill, Jean Moréas, Hugues Rebell, Pierre Louÿs, Marcel Proust, Henri de Régnier, Pierre Quillard… Dans un article du 1er janvier 1895 de la Revue encyclopédique, le jeune Martégal, qui a lu et analysé l'œuvre de Verlaine, décèle dans les écrits de l’ancien décadent un retour vers le classicisme qu’il salue et contextualise[n 4]. Vers la même époque (seconde moitié des années 1890), il fait passer quelques articles dans La Libre Parole avant de rejoindre Le Soleil[12].

Évolution politique

De 1885 à 1889, Charles Maurras ne s'intéresse qu'à la philosophie mais le centenaire de la Révolution et le boulangisme qu'il soutient du bout des lèvres ainsi que des recherches historiques en Provence le conduisent à centrer sa réflexion sur la politique. En 1889, il vote ainsi pour le candidat boulangiste Alfred Naquet d'origine juive[13].

En 1887, il participe à la première manifestation de sa vie à 19 ans : celle pour pousser le président Grévy à la démission[14].

En 1889, lors du centenaire de la Révolution française, une ébullition historique et philosophique contraste avec la célébration officielle ; des penseurs de différentes tendances, monarchistes, libéraux, conservateurs, catholiques, positivistes mènent une réflexion critique sur les principes revendiqués par la République et qui selon eux menacent le destin français[G 27] : Ernest Renan affirme que « le jour où la France a coupé la tête de son roi, elle a commis un suicide », Edmond Schérer analyse les limites de la démocratie, Émile Montégut parle de la « banqueroute de la Révolution ». Colloques, publications, débats dans la presse marquent l'anticentenaire intellectuel auquel Maurras participe en suggérant aux « hommes les plus intelligents après les cris de triomphe officiels, de douloureux examens de conscience[15] ». Charles Maurras, ancien rédacteur de La Réforme sociale, fonde sa critique de la Révolution en suivant les développements de l'école de Frédéric Le Play : elle dresse un bilan négatif de la Révolution en défendant un programme fondé sur la famille, la hiérarchie sociale, la commune, la participation des citoyens à leur administration, l'indépendance du gouvernement par rapport aux divisions de l'opinion[G 27].

De fait, s'il est hostile à la Révolution, il est encore républicain et concède que la République est « le meilleur gouvernement pour la France[16]. » Il fonde alors sa critique de la philosophie politique de Jean-Jacques Rousseau sur les analyses de Pierre Laffitte qui en soulignent les contradictions plus que sur les théories de Louis de Bonald et de Joseph de Maistre[G 27].

Cependant, il est fondamentalement attaché à la décentralisation : en août 1889, se rendant aux archives de Martigues pour une analyse des documents remontant à cent ans en arrière, il découvre les systèmes coutumiers et empiriques, des mécanismes de protection sociale et de solidarité, servant de relais et de protection entre l'individu et l'État central, certains obsolètes mais d'autres utiles et vivaces[G 27]. Pour Maurras, avec la centralisation, la République n'a pas fait des Français des citoyens mais des administrés[17]. Il développe à l'opposé de l'image de l'historiographie révolutionnaire d'un roi au pouvoir illimité, une image paternelle nourrie de bienveillance et de savoir-faire au sommet d'un État fort mais limité[G 27].

En 1894, il se rapproche du nationalisme en collaborant au journal La Cocarde de Maurice Barrès.

En 1895, Maurras amorce sa conversion au principe monarchique, suivant une démarche intellectuelle se combinant avec le respect pour la personne du comte de Paris[G 28] - [n 5]. Jusque-là il s'est accommodé d'un sentiment politique conservateur, acceptant volontiers de travailler avec des démocrates et des socialistes. Son patriotisme est viscéral, mais cela ne constitue pas une originalité, la gauche de l'époque articulant généralement le discours sur la justice sociale avec l'impératif patriotique et les valeurs républicaines[G 28]. L'échec de la décentralisation dans le cadre républicain, l'inefficacité du régime parlementaire dans le domaine primordial de la politique étrangère face au danger allemand, l'admiration qu'il porte comme homme d'ordre et de tradition pour le système britannique qui a établi l'équilibre politique et social du peuple de Grande-Bretagne, la lecture de Démosthène et du rôle de la démocratie dans l'effondrement de la Grèce, constituent autant de thèmes de réflexion qui l'inclinent au royalisme en 1895[G 29]. Il accepte alors de collaborer au journal royaliste Le Soleil[G 29].

Du 8 avril au 3 mai 1896, La Gazette de France le charge de couvrir comme reporter les premiers jeux Olympiques modernes, à Athènes. Se basant sur les exemples allemands et anglais, il en revient convaincu que le régime monarchique rend plus fortes les nations qui l'adoptent[18].

Naissance de l'Action française (1898-1914)

Le Café de Flore vers 1900, lieu de réunion habituel des fondateurs de l'Action française à partir de 1898.

En avril 1898, Henri Vaugeois et Maurice Pujo fondent un « Comité d'action française », qui ne compte aucun royaliste et vise en prévision des élections à ranimer l'esprit de 1875 en instaurant une république patriote conforme au nationalisme originel de la Révolution[19] - [G 30] ; républicains, ils avaient participé à l'union pour l'Action morale de Paul Desjardins, groupement d'inspiration kantienne, attaché à faire triompher la morale et la vertu dans les affaires publiques ; Vaugeois se veut l'héritier consciencieux du républicanisme révolutionnaire, auquel le relie la mémoire de son grand-oncle conventionnel[19]. Maurras rejoint ce petit groupe qui se réunit habituellement au Café de Flore[20], même s'il aurait préféré le complément de nom « d'intérêt commun » à celui « d'action française », moins poignant mais plus précis[21].

Antidreyfusisme

Au milieu d'une cérémonie militaire, Alfred Dreyfus se tient droit en uniforme vierge de tout insigne. Ses insignes et son fourreau sont à ses pieds, et en face de lui, un adjudant est en train de casser son sabre en deux sur son genou.
La dégradation d'Alfred Dreyfus, le . Dessin d'Henri Meyer en couverture du Petit Journal du , légendé « Le traître »[22].

En , Maurras se range dans le camp des antidreyfusards : il s'oppose publiquement à la demande de révision du procès du capitaine Alfred Dreyfus, alors relancée à la suite des aveux et du suicide d'Hubert Henry, officier qui avait fabriqué plusieurs faux pour faire croire à la culpabilité du capitaine[23]. Maurras rédige un éloge d'Henry dans La Gazette de France[24].

Revenant sur l'affaire Dreyfus en 1930, Maurras dit : « Je ne veux pas rentrer dans le vieux débat, innocent ou coupable. Mon premier avis là-dessus avait été que, si Dreyfus était innocent, il fallait le nommer maréchal de France, mais fusiller une douzaine de ses principaux défenseurs pour le triple tort qu'ils faisaient à la France, à la paix et à la raison[10]. » Il avait écrit en à Maurice Barrès : « Le parti de Dreyfus mériterait qu'on le fusillât tout entier comme insurgé »[25].

Léon de Montesquiou rappelle le rôle crucial de l'affaire Dreyfus dans la naissance de l'Action française qui s'était fixé comme objectif de lutter contre la trahison, « non pas tant la trahison de Dreyfus que celle des dreyfusards »[26]. Il s'agit pour l'Action française de défendre l'armée comme première condition de vie du pays et des hommes qui la composent contre une justice qui lui porterait tort[27].

Pour Maurras, l'affaire et la mise en cause de l'armée nuisent à la préparation d'une guerre inévitable, où il s'agit de retrouver des provinces perdues ; cette polémique ferait perdre de vue au pays le réalisme politique dans un contexte international menaçant. Maurras prétend ainsi défendre la raison d'État en soutenant l'armée coûte que coûte pour éviter le désastre d'une nouvelle guerre perdue contre l'Allemagne. Il affirme les lois d'un réalisme politique fondé sur un mélange de machiavélisme raisonné et de froide prudence car, selon lui, la confusion entre morale et politique peut engendrer des tragédies pires que les injustices qu'elle prétend corriger[G 31].

Stéphane Giocanti estime que Maurras combat moins le capitaine Dreyfus comme personne que le dreyfusisme comme courant d'opinion qui fragiliserait un pays entouré de « grands carnassiers »[G 30]. Toutefois, Laurent Joly rappelle que L'Action française persiste à publier des réquisitoires contre la personne d'Alfred Dreyfus plusieurs années après la fin de l'affaire : « de 1908 à 1914, la rubrique « Échos » et le « Calendrier de l'affaire Dreyfus » du quotidien L'Action française comportent des menaces à peine voilées à l’encontre d'Alfred Dreyfus, dont les déplacements sont notés au jour le jour »[28].

Le capitaine Dreyfus intente plusieurs procès au journal et y fait publier des lettres sur décision de justice. Le 29 janvier 1912, Charles Maurras présente ces textes « dans une formulation qui sonne comme une condamnation à mort », observe Olivier Dard : à cette occasion, le chef de l'Action française qualifie Dreyfus de « traître juif » [qui] « entrevoi[t] en frissonnant (…) [les] douze balles [qui] lui apprendront enfin l'art de ne plus trahir et de ne plus troubler l'ordre de ce pays qui l'hospitalise »[29].

Fondation de l'Action française

En janvier 1899, Maurras rencontre ce groupe[G 30] puis rejoint la Revue d'Action française, fondée par Maurice Pujo et Henri Vaugeois ; en novembre 1899, sa stratégie et son ambition prennent corps : convertir au royalisme tous les nationalistes français à l'heure où le nationalisme est associé au nom de Déroulède et Barrès[G 32] ; il devient l'inspirateur de la mouvance gravitant autour de la revue qu'il convertit du nationalisme républicain au nationalisme royaliste et au milieu de 1901, la revue est en passe de devenir monarchiste[30]. En revanche, le débat tourne court avec les antisémites de La Libre Parole qui refusent la royauté et préfèrent rester républicains[31] - [n 6].

Charles Maurras, vers 1908.

En 1905, il fonde la Ligue d'Action française dont Henri Vaugeois est le président et Léon de Montesquiou le secrétaire général pour lever des fonds en faveur de la Revue d'Action française, mensuel devenu l'organe de presse du mouvement. Maurras publie L’Avenir de l’intelligence, qui met en garde contre le règne de l’argent et son emprise sur les intellectuels. Jules Monnerot, François Huguenin, Élisabeth Lévy ont placé haut ce livre, préparé par quinze ans de fréquentation des milieux littéraires et politiques, manifeste pour la liberté de l'esprit, précurseur d'Orwell et Bernanos, voire de la critique situationniste[G 30].

Duel à l'épée entre Charles Maurras et Paul de Cassagnac (1912).

En 1906, l’Institut d’action française voit le jour et, en mars 1908, paraît le premier numéro du quotidien L’Action française[32] , né de la transformation de la revue mensuelle (la Revue d’Action française) créée neuf ans plus tôt.

En 1909, Maurras publie, ensuite, une deuxième édition de sa célèbre Enquête sur la monarchie, dans laquelle il se prononce en faveur d’« une monarchie traditionnelle, héréditaire, antiparlementaire et décentralisée ».

En 1911, il préside le Cercle Proudhon, lancé par de jeunes monarchistes hostiles au capitalisme libéral et appelant à l’union avec le courant syndicaliste révolutionnaire inspiré par Georges Sorel. Il reste, cependant, davantage influencé par les conceptions corporatistes et associationnistes du catholique social René de La Tour du Pin.

Première Guerre mondiale (1914-1918)

Charles Maurras, avant 1909.

Dans l'immédiat avant-guerre, Maurras pointe avec angoisse les effets de la politique de ses adversaires ; selon lui, les campagnes dreyfusardes ont occasionné l'affaiblissement de l'armée, notamment par le démembrement du Deuxième Bureau, ce qui participerait selon lui à l'impréparation de la France et fait que l'Allemagne sait qu'elle combattra un ennemi borgne. Dans Kiel et Tanger, il vitupère un régime qui ne sait contrer ni les aléas de l'opinion et qui vit de ses divisions, forcément néfaste pour tout pays cerné d'ennemis : « Au bas mot, en termes concrets, la faiblesse du régime doit nous représenter 500 000 jeunes Français couchés froids et sanglants, sur leur terre mal défendue »[G 33]. En 1913, il écrit : « La République nous a mis en retard sur l'Europe entière : nous en sommes à percevoir l'utilité d'une armée forte et d'une marine puissante […] à l'heure où les organisations ennemies sont prêtes »[33].

Maurras souligne ce qu'il estime être la supériorité institutionnelle de l'Allemagne : « Nous avons perdu quarante ans à entrechoquer les syndicats patronaux et les syndicats ouvriers dans la fumée d'une lutte des classes singulièrement favorable au concurrent et à l'ennemi germanique ; pendant ce temps, Guillaume II négociait entre ses socialistes, ses armateurs et ses financiers, dont les forces uniques, se faisant notre parasite, fructifiaient à nos dépens »[34].

Il soutient alors toutes les initiatives permettant selon lui le renforcement de la France et Louis Barthou dira à Pujo à propos de la loi des trois ans de service militaire : « sans vos Camelots du roi, je n'aurais jamais pu la faire passer ». Inversement, Maurras dénonce les campagnes antimilitaristes des socialistes contre « la folie des armements » qui n'auront selon lui pour conséquence que de conduire au massacre de la jeunesse française : comme Tardieu et Poincaré, il s'oppose aux conséquences concrètes de l'utopisme pacifiste et de l'irréalisme des internationalistes et dénonce la faiblesse des budgets militaires[G 34].

En 1914, il s'insurge contre l'idée répandue par certains de ses adversaires que Raoul Villain, l'assassin de Jean Jaurès, serait d'Action française, alors qu'il fut membre du Sillon puis de la Ligue des jeunes amis de l'Alsace-Lorraine, et aussi un déséquilibré[G 34]. Il critique ce qu'il appelle le manque de réalisme des socialistes qui avaient selon lui conçu « l'avenir suivant un développement unilinéaire […], les faits nationaux devant se décomposer »[35].

Dès la déclaration de guerre, il appelle ses partisans à l'union nationale et renonce à la lutte systématique contre le régime républicain comme y invite le duc d'Orléans dans un appel solennel dans L'Écho de Paris du 23 avril 1914. Comme preuve de sa bonne volonté, Maurras supprime le chiffre 444 en une du journal, qui renvoyait au décret qui avait innocenté Dreyfus[G 35]. Il soutient le gouvernement radical de Viviani et même Aristide Briand, bête noire de l'Action française ou Albert Thomas ancien rédacteur de L'Humanité et ministre des armements.

L'Action française dénonce des industriels traitant selon elle avec l'Allemagne, accusant souvent sans preuve. Il en résulte de nombreux procès en diffamation, dont un conduit à la confiscation du quotidien pendant une semaine. Des descentes de police dans les locaux du journal ont lieu de même que des perquisitions chez Charles Maurras, Marius Plateau ou encore Maxime Real del Sarte. En octobre 1917, au cours de l'une de ces perquisitions, diverses armes sont saisies. Le journal de l'Action française tourne alors en dérision ce « complot des panoplies », le gouvernement recule et, en novembre 1917, Clemenceau remplacera Painlevé mis en minorité avec l'appui de l'Action française[36].

En avril 1917, L'Action française lance une campagne en faveur des soldats et de leurs familles[G 36] ; Maurras défend la création d'une caisse de primes militaires qui associera le combattant aux produits de la Victoire ; ce projet reçoit le soutien de Poincaré et l'État autorisera en juin 1918 la souscription lancée par l'Action française. De même, Maurras se met à la disposition de Poincaré pour combattre l'influence germanique en Espagne, en particulier dans les milieux catalans[G 37].

C'est avec l'appui de l'Action française qu'en novembre 1917 Georges Clemenceau est nommé à la tête du gouvernement en dépit de la réticence de Maurras pour ce jacobin anticlérical qui a refusé l'offre de paix séparée proposée par l'impératrice Zita ; néanmoins, Clemenceau cherche l'appui moral de l'Action française via l'entremise du député royaliste Jules Delahaye[G 38].

Renforcement du prestige de Maurras

Charles Maurras durant les années 1920.

La Grande Guerre est pour Charles Maurras une période de développement de l'audience de son journal et de sa pensée. En 1917, le journal voit son nombre d'abonnés augmenter de 7 500. Le journal comptait 1 500 lecteurs en 1908, 22 000 en 1912, 30 000 en 1913, et tire à 156 000 exemplaires en 1918[G 39]. Les souscriptions augmentent également, ce qui permet en 1917 à L'Action française de quitter son local de la Chaussée d'Antin dans lequel elle avait emménagé en 1908 pour la rue de Rome.

D'après Bainville, dans les milieux républicains et radicaux, on dit alors que Maurras, en restaurant la grande discussion politique en France a rendu un immense service à la République elle-même en l'obligeant à faire son examen de conscience[37]. Poincaré se justifie de sa politique auprès en écrivant à Maurras et le félicite de délicieuse préface de Trois aspects du président Wilson, « elle aussi chargée de pensée et illuminée de raison française »[38]. Le 1er mars 1925, élu « Prince des écrivains » par les membres de « La plume », succédant ainsi à Anatole France[G 40].

Cette popularité de l'Action française au lendemain de la Grande Guerre se traduit par l'élection de Léon Daudet comme député de Paris à la Chambre bleu horizon ou par la publication par Henri Massis dans Le Figaro du 19 juillet 1919 d'un manifeste « Pour un parti de l'intelligence » signé par cinquante-quatre personnalités dont Daniel Halévy, Francis Jammes, Jacques Maritain[G 41]. Cependant, un grand nombre des espoirs militants et dirigeants de l'Action française sont tombés et Maurras leur rendra hommage dans Tombeaux en 1921 : Henry Cellerier, André du Fresnois, Pierre Gilbert, Léon de Montesquiou, Lionel des Rieux, Jean-Marc Bernard, Albert Bertrand-Mistral, vingt-et-un rédacteurs de la Revue critique comme Joachim Gasquet, Octave de Barral, Henry Lagrange, Augustin Cochin.

L'assassinat de Marius Plateau en 1923, celui d'Ernest Berger en 1925 et d'autres attentats commis contre l'Action française contribuent aussi à créer un élan de solidarité autour de Charles Maurras[G 42], dont témoignent les paroles de Jacques Maritain : « L'idée des dangers que vous courez, rend encore plus cher au cœur de tous ceux qui aiment la France et l'intelligence »[39]. Cependant, les thèses de Maurras sont condamnées par le pape Pie XI en 1926 et mises à l'Index.

Le 25 mai 1923, un anarchiste s'introduit dans les locaux de l'Action française et tire une balle dans le plafond. L'Action française y voit une nouvelle tentative d'assassinat contre Charles Maurras[40].

Critique de la paix de Versailles

Les Camelots du Roi au Palais : Charles Maurras (à gauche) et Maxime Real del Sarte en 1923.

Pour Charles Maurras, la république prépare mal la guerre, ne peut la gagner qu'en renonçant à elle-même, et assure mal la paix ; selon lui, la guerre a été gagnée par des procédés de dictature monarchique qui ont permis de rattraper les erreurs de l'avant-guerre mais au prix de la mort d'un million cinq cent mille Français, trois fois plus qu'annoncé dans Kiel et Tanger[G 43].

En 1918, Maurras réclame donc une paix française qui serve le mieux les intérêts de la nation : la division de l'Allemagne, l'annexion du Landau et de la Sarre, un protectorat français sur la Rhénanie. L'Action française se prononce contre l'application sans discernement du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. S'il salue la visite de Wilson au Pape, ses « quatorze points » le scandalisent par leur naïveté utopique car « nulle revanche du droit n'est sérieuse sans un équilibre du fait »[G 44].

Crise du 6 février 1934

Lors de la crise du 6 février 1934, Maurras se trouve rue du Boccador avec Marie de Roux à préparer la une du journal du lendemain : pour lui la manifestation contre la corruption du régime ne peut déboucher sur le coup de force car les nationalistes non royalistes ne suivraient pas l'Action française et le préalable au renversement du régime est absent. L’armée, la police, l’administration n’ont pas été infiltrées, ce qui aurait nécessité des mois de préparation et un personnel spécifique dont l’Action française était dépourvue ; de plus, la perspective d'une guerre civile lui répugne[G 45]. Plus tard dans la soirée, Maurras compose un poème provençal dédié à Marthe Daudet[41].

Après le 6 février 1934, si L'Action française gagne dix mille abonnés de plus[G 45], Maurras perd le magistère de la rébellion contre le régime auprès de certains des militants qui la quittent alors comme Pierre de Bénouville, Jacques Renouvin, Michel de Camaret. Le « comte de Paris » est également déçu et le 6 février le déterminera à s'émanciper.

De plus, si les années 1930 voient éclore une nouvelle génération de nouveaux jeunes penseurs maurrassiens comme Thierry Maulnier, Jean-Pierre Maxence, Jean de Fabrègues, ceux-ci n’hésiteront pas à prendre du recul par rapport au vieux maître, critiquant notamment son nationalisme vu par eux comme étroit et son évolution conservatrice – qu’ils estiment inadaptée aux nouveaux enjeux sociaux. L'échec du 6 février les confortera dans cette prise de distance.

Emprisonnement

Inculpé de provocation au meurtre, Maurras (accompagné de Georges Calzant) est interrogé le 15 février 1936 par un juge d'instruction à la suite de l'agression commise contre Léon Blum par des camelots du roi et ligueurs de l'Action française (Le Populaire, 16 février 1936).
Léon Blum après la tentative de lynchage commise par des militants de l'Action française.

Le , Léon Blum, Georges Monnet et son épouse Germaine Monnet passent en automobile à proximité du cortège qui assiste aux funérailles de l'historien Jacques Bainville, boulevard Saint-Germain, à Paris. Reconnu, le dirigeant de la SFIO, alors âgé de 63 ans, est violemment attaqué : roué de coups, il saigne abondamment en raison d'une blessure à la veine temporale. L'enquête montrera que « la plupart des agresseurs portaient des brassards et insignes d'Action française », et le chapeau de Blum sera retrouvé dans les locaux du mouvement royaliste. Léon Andurand, Édouard Aragon, architecte de 50 ans, et Louis Courtois, 38 ans, employé dans une compagnie d’assurances, sont condamnés à des peines de 15 jours à trois mois de prison en avril 1936 par le Tribunal correctionnel de Paris[42] - [43] - [44].

Les historiens Louis Bodin et Jean Touchard observent que « L'Action française ne revendique pas ce coup d'éclat ; au contraire, le récit qu'elle en fait [le 14 février 1936] inverse singulièrement les rôles » en attribuant « toute la responsabilité de l'incident » à un Blum soi-disant provocateur et insolent, et le beau rôle aux ligueurs et camelots du roi qui auraient protégé le député socialiste de « la fureur du public »[45] - [46]. L'historien Frédéric Monier relève également que des « journaux d'extrême droite évoquent « l'incident Blum » et cherchent à en minorer la violence, voire à en justifier l'éclatement. (…) L'inversion de la culpabilité se retrouve dans plusieurs journaux de droite, qui rejettent la faute de l'agression sur les victimes »[47].

Frédéric Monier note également qu'aux yeux des contemporains, l'agression commise contre Léon Blum représente l'aboutissement des campagnes violentes menées par le journal L'Action française, et particulièrement l'appel au meurtre du député socialiste, formulé préalablement par Maurras le [48] : « C'est un monstre de la République démocratique. C’est un hircocerf de la dialectique heimatlos. Détritus humain à traiter comme tel… L'heure est assez tragique pour comporter la réunion d'une cour martiale qui ne pourrait fléchir. M. Reibel demande la peine de mort contre les espions. Est-elle imméritée pour les traîtres ? Vous me direz qu'un traître doit être de notre pays : M. Blum en est-il ? Il suffit qu'il ait usurpé notre nationalité pour la décomposer et la démembrer. Cet acte de volonté, pire qu'un acte de naissance aggrave son cas. C’est un homme à fusiller, mais dans le dos »[49] - [50] - [48].

Ce « cycle de violences initié par l'extrême droite »[51] suscite de vives réactions dans le camp socialiste et en particulier une menace de mort lancée contre Henri Béraud et Maurras[52] par le député Anatole Sixte-Quenin alias « Jarjaille »[53]. En effet, le , Anatole Sixte-Quenin écrit dans Le Populaire que si la guerre était déclarée, « les mobilisés abattront MM. Béraud et Maurras comme des chiens »[54]. Le député SFIO revendique ultérieurement sa tirade[55] et la justifie en prétendant reprendre les termes utilisés par Maurras dans sa menace de mort contre Abraham Schrameck de juin 1925[56].

Malgré les brutalités subies par Léon Blum le , « les désirs de vengeance ou de réplique violente » sont « très minoritaires du côté des organisations d'autodéfense socialiste », selon Frédéric Monier[57]. Le 16 février, le quotidien royaliste affiche en une : « Arrêtez les assassins du Front populaire ! »[58], ce qui conduit Le Canard enchaîné à publier le 19 février cette manchette ironique : « L'odieux attentat de M. Léon Blum contre M. Charles Maurras a piteusement échoué »[46].

L'agression de février 1936 pousse le gouvernement intérimaire, dirigé par le radical Albert Sarraut, à dissoudre la Ligue d’Action française, les camelots et la Fédération nationale des étudiants d'Action française[51]. Le , une instruction judiciaire est ouverte contre Maurras pour complicité de provocation au meurtre. Il est initialement condamné le à quatre mois de prison ferme, peine aggravée pour avoir répété ses menaces de mort contre Léon Blum[59] le : « C'est en tant que Juif qu'il faut voir, concevoir, entendre, combattre et abattre le Blum. Ce dernier verbe paraîtra un peu fort de café : je me hâte d'ajouter qu'il ne faudra abattre physiquement Blum que le jour où sa politique nous aura amené la guerre impie qu'il rêve contre nos compagnons d'armes italiens. Ce jour-là, il est vrai, il ne faudra pas le manquer. (…) Si, par chance, un État régulier a pu être substitué au démocratique Couteau de cuisine, il conviendra que M. Blum soit guillotiné dans le rite des parricides : un voile noir tendu sur ses traits de chameau »[60] - [51].

Le chef de l'Action française est emprisonné à la prison de la Santé du au [59]. Il reçoit de très nombreux témoignages de soutien, dont celui du pape Pie XI et de mère Agnès, sœur aînée de sainte Thérèse de Lisieux et supérieure du Carmel[G 46] ; de cent députés et sénateurs alsaciens qui signent une protestation de soutien[G 47]. Le , entre quarante à soixante mille personnes, viennent rendre hommage à Maurras à l’occasion de sa libération au Vélodrome d'Hiver en présence de la maréchale Joffre[G 46]. Pendant sa captivité, Charles Maurras écrit chaque jour son article politique pour L'Action française ainsi que plusieurs ouvrages : Les Vergers sur la mer, Dans Arles aux temps des fées, Devant l’Allemagne éternelle, la Dentelle du rempart et Mes idées politiques[n 7].

Entrée à l'Académie française

Réception de Charles Maurras à l'Académie française le .

Entretemps, Maurras a été élu à l’Académie française au fauteuil de l’avocat Henri-Robert. Après un premier échec en 1923 contre Charles Jonnart, il est élu à l’Académie française le au fauteuil 16, succédant à Henri-Robert, par 20 voix contre 12 à Fernand Gregh ; il est reçu le 8 juin de l’année suivante par Henry Bordeaux[61], mais le président Albert Lebrun refuse de le recevoir comme le voulait l'usage.

L'épée académique de Maurras, sculptée par Maxime Real del Sarte, porte la silhouette de sainte Geneviève[62].

Face à l'hitlérisme

Affiche de l'Action française associant le régime républicain au danger représenté par Hitler.

Dès 1922, Maurras a des informations précises sur Hitler en provenance d'un agent secret à Munich par le président Raymond Poincaré[63]. En novembre 1922, l'Action française présente Hitler comme le « Mussolini bavarois »[64]. Dès lors, s'il dénonce le pangermanisme de la classe politique allemande de la république de Weimar, comme celui de Stresemann favorable à l'Anschluss[G 48], Maurras attire régulièrement l'attention de ses lecteurs sur les dangers propres du national-socialisme : ainsi, en 1924, il dénonce la déroute des Wittelsbach au profit du « racisme antisémite » du NSDAP et le « rapide accroissement du bloc dit raciste sorti de terre en quelques mois et fondé ou échafaudé sur de vieilles imaginations périmées avec sa philosophie abracadabrante de la Race et du Sang[65]. »

Le général Adolphe Guillaumat avec le drapeau français, devant la porte du Deutschhaus de Mayence, le 30 juin 1930.

En 1930, Maurras dénonce l’abandon de Mayence par l’armée française et titre « Le crime contre la Patrie » là où Léon Blum écrit « la paix est faite[66] ». La même année, L’Action française publie une série d'articles sur le parti national-socialiste allemand, présenté comme « un des plus grands dangers pour la France[67] », alors que le 1er janvier 1933, Le Populaire annonce sa prochaine disparition[68].

L'obsession de la menace hitlérienne se traduit par l'ouverture du journal à des officiers d’État-major signant parfois sous pseudonyme : comme chroniqueurs militaires, ils suivront l’évolution du budget militaire allemand avec une inquiétude croissante jusqu’au désastre[G 49]. En 1932, le général Weygand, proche de l'Action française, dénonce dans ses rapports secrets la politique de désarmement menée par la gauche : « L’armée française est descendue au plus bas niveau que permette la sécurité de la France[69] » mais son légalisme l'empêche d'exprimer publiquement sa proximité avec Maurras[70]. En 1933, Maurras écrit : « Quoi que fassent ces barbares, il suffit d’appartenir au monde officiel, au monde de la gauche française, pour incliner à leur offrir de l’encens, le pain, le sel et la génuflexion[71]. » Maurras voit dans l’arrivée d’Hitler au pouvoir la confirmation de ses pronostics[72] et dénonce le prohitlérisme : « Le halo du prohitlérisme joue autour de ces brigandages, les défend et les auréole, ce qui permet aux forces de Hitler un rapide, puissant et formidable accroissement continu. Nous aurons laissé dépouiller et envahir nos amis[73]. »

En 1934, après la nuit des Longs Couteaux, il dénonce l’« abattoir hitlérien » et félicite la presse britannique énergique dans sa condamnation et annonce le Pacte germano-soviétique : « Je le répète : il n’y a pas de plus grand danger que l’hitlérisme et le soviétisme. À égalité ! Et ces égaux-là sont faits pour s’entendre. La carte le confirme. L’avenir le vérifiera[74]. » Pour Maurras, il n’y a pas de ménagement possible avec Hitler : l’invasion progressive du centre et de l’est européen entraînera celui de la Belgique et donc la soumission de la France à un géant écrasant le continent de sa puissance. Selon Stéphane Giocanti, Maurras, Bainville et Daudet rivalisent de démonstrations et d’accents polémiques pour que la France s'arme suffisamment pour se défendre et éventuellement attaquer préventivement[G 50]. La menace allemande constitue le fil rouge de ses préoccupations : dans ses écrits, les débats intérieurs lui sont subordonnés : la politique étrangère qu’il défend consiste à ménager les puissances secondaires d’Europe, celles que menacent l’URSS et le Reich allemand : Pologne, Hongrie, Tchécoslovaquie. Il exalte l’union des pays latins France, Italie, Espagne, Roumanie avec la Grande-Bretagne, la Hongrie, la Pologne[G 51]. En 1936, Maurras écrit la préface de l'ouvrage contre le nazisme de la comtesse Joachim de Dreux-Brézé, qui sera sa maîtresse[G 52] ; il y déplore l'assassinat de Dollfuss par les nationaux-socialistes[75].

En 1937, il publie Devant l’Allemagne éternelle, sous-titré « Chronique d’une résistance » ; il rassemble quarante ans d’écrits sur l’Allemagne, le pangermanisme et l’influence allemande en France.

Maurras essaie de détourner Mussolini de l'alliance avec Hitler : la « supériorité génétique » qu’invoque l’hitlérisme se formule « par rapport à ce que l’on appelle les races latines et (comme il n’y a pas de race latine) sur ce qu’il faut appeler l’esprit latin. Mussolini doit savoir cela aussi bien que nous, il l’oublie, il veut l’oublier. Mais l’oubli se paie cher[G 51]. » Pour Maurras, le tort italien est déterminé par la conduite de Londres et Paris, qui par leurs sanctions contre l’Italie ont poussé cette dernière à fauter[76] ; selon lui encore, le Front populaire, en plaçant l’antifascisme avant la politique d'équilibre, contribue à renforcer l’Allemagne et à préparer des lendemains douloureux au pays : il attaque violemment Léon Blum et ceux qui ont mené des campagnes de désarmement lorsque la France était plus puissante que l’Allemagne et veulent désormais engager une guerre incertaine pour des raisons idéologiques alors que la France n’a plus les moyens de la victoire[G 51] - [n 8]. En 1938, il défend les accords de Munich (29 et 30 septembre 1938), convaincu qu'ils n'empêcheront pas la guerre mais qu'ils la retarderont et que la France aura comblé son retard militaire face à l'Allemagne. Pourtant le 27 septembre 1938, L'Action française titre « À BAS LA GUERRE ! » Le 29 septembre, elle titre : « HONNEUR À CHAMBERLAIN » et publie cette parodie de L'Internationale :

« S'ils s'obstinent, ces cannibales,
À faire de nous des héros,
Il faut que nos premières balles
Soient pour Mandel, Blum et Reynaud[77] ! »
Robert Brasillach et Charles Maurras, vers 1938.

Selon François Huguenin, Maurras n’est pas devenu favorable à un rapprochement avec l’Allemagne, mais il estime que la France n’est pas prête militairement et court à la défaite ; il accepte les accords comme une défaite sanctionnant les erreurs de la politique étrangère de la République, tout en appelant au réarmement[78]. Il s'agit d'éviter de déclencher prématurément une guerre pour des raisons de doctrine et de préparer la France à l'affronter avec de vraies chances de succès : cette position se veut le contraire d'une position germanophile, il s'agit d'appliquer le si vis pacem, para bellum[78], de ne pas lâcher la Pologne mais de sauver d'abord la France pour sauver l'avenir polonais[79]. Toutefois, L'Action française donne des raisons plus idéologiques au soutien aux accords de Munich : « La paix ! La paix ! Les Français ne veulent se battre, ni pour les Juifs, ni pour les Russes, ni pour les francs-maçons de Prague. » (28 septembre 1938)[80]. Deux jours plus tôt, le même journal écrivait : « L’affaire tchécoslovaque ne nous regarde en rien, ne nous intéresse en rien. » En 1939, Maurras titre « La mort d’un peuple » quand les Allemands envahissent la Tchécoslovaquie dont il a admiré la renaissance littéraire et se lamente que l'on n'ait pas écouté vingt ans de mises en garde[81]. Il ne veut pas la guerre car il croit que la France a toutes les chances de la perdre, comme l'écrit le colonel Gauché du Deuxième Bureau : « Jamais, à aucune période de son histoire, la France ne s'est engagée dans une guerre dans des conditions aussi défavorables[82]. » Mais il affirme que si elle advient, elle devra être menée avec détermination[83]. Inquiet, il prend diverses initiatives pour renforcer les chances de la France :

  • il lance une campagne de souscription en faveur de l’aviation militaire : vingt quotidiens parisiens, cinquante journaux de province le rejoignent mais Daladier s’y oppose[84] ;
  • il écrit à Franco afin de le convaincre de détourner l’Italie de l’alliance avec l’Allemagne. Maurras a salué la victoire militaire du dictateur Franco, selon lui gage de sécurité contre le communisme et les persécutions contre les catholiques et dont il pense qu’elle ne peut être que l’ennemie de l’Allemagne[85] - [n 9]. L'obsession allemande a d'ailleurs influé sur la position de Maurras quant à la guerre civile espagnole : il a soutenu les insurgés mais, à l'arrivée du Front populaire, il défend une neutralité de principe pour éviter une entrée en guerre officielle de l'Allemagne aux côtés de Franco, qui satelliserait l'Espagne et ruinerait la politique méditerranéenne de la France[87]. La victoire acquise et ce danger écarté, le pari stratégique de Maurras sera confirmé dans les faits : Franco refusera la possibilité à Hitler de traverser le territoire espagnol pour envahir l'Afrique du Nord, ce qui aura un impact important sur l'issue de la guerre[78] ;
  • en liaison avec des intellectuels britanniques, il prône l’alliance avec l’Angleterre jusqu’à l’extrême limite du possible[88] - [89] - [n 10] ;
  • il soutient le gouvernement républicain d'Édouard Daladier dans sa volonté d'interdire le Parti communiste, dont des militants ont participé à des opérations de sabotage de l'effort de guerre.

En 1940, un message en caractères énormes ouvre le journal : « Le chien enragé de l’Europe, les hordes allemandes envahissent la Hollande, la Belgique, le Luxembourg. » Maurras écrit : « Nous avons devant nous une horde bestiale et, menant cette horde, l’individu qui en est la plus complète expression. Nous avons affaire à ce que l’Allemagne a de plus sauvagement barbare, c’est-à-dire une cupidité sans mesure et des ambitions que rien ne peut modérer. […] Nul avenir ne nous est permis que dans le bonheur des armes[90]. »

Seconde Guerre mondiale (1939-1945)

Dès que la guerre est déclarée, le 3 septembre 1939, Charles Maurras reprend les accents bellicistes de l’Union sacrée. Jusqu’aux derniers combats de juin 1940, il apporte un soutien sans faille à l’effort de guerre, mais il approuve l’armistice comme la majorité des Français. Maurras est regardé comme un adversaire par les autorités d'occupation qui font piller par la Gestapo les bureaux de l'Action française et placent certains livres de Maurras sur la liste Otto des livres interdits (du fait de leur caractère anti-allemand) ; en 1943, le haut responsable des forces d'occupation en France, le conseiller Schleier, place Maurras parmi les personnes à arrêter en cas de débarquement[G 53] - [91].

En mai de la même année, en dépit de sa franche hostilité à Pierre Laval, il reçoit des mains de Pétain la Francisque no 2068[92].

Nature et formes du soutien au maréchal Pétain

La victoire allemande sur la France désespère Maurras et il dira au moment de l'arrivée de soldats allemands en Provence voir réalisé le « cauchemar de son existence »[G 54]. La raison principale de son soutien à Vichy serait la recherche de l'unité française comme condition du redressement et donc de la revanche contre l'Allemagne, indépendamment de toute considération idéologique.

Maurras affirme lui-même que le soutien au gouvernement Pétain est de même nature que celui apporté aux gouvernements républicains de la Première guerre mondiale ; à Pierre Gaxotte, il déclare[G 55] : « Je soutiens Pétain comme j’ai soutenu tous les gouvernements pendant la guerre de 1914-1918 » ; ce soutien procède de la volonté de sauver l'unité française coûte que coûte car elle est la « condition de l'Espérance[93] ». À Pierre Boutang, il affirme que l'unité française est « un outil de revanche[94] ». Pour Maurras, le vainqueur de Verdun ne peut que défendre les intérêts du peuple français et toute dissidence affaiblit la France et compromet son rétablissement. Le soutien à Pétain est en 1940 très répandu : le maréchal était notamment estimé sous le Front populaire, par exemple par Pierre Cot[95], à cause de sa réputation de soldat républicain, contrairement à Weygand ou Lyautey, jugés monarchistes[G 55]. Dans cette optique, le soutien à Vichy ne serait donc pas originellement un choix idéologique, ni tactique, mais une donnée, posée au-dessus de toute référence, par l'exigence de l'unité du pays[96]. Ce soutien se veut de même nature que celui que Maurras a apporté à la Troisième République pendant la Première Guerre mondiale contre les monarchies traditionnelles allemande et autrichienne ; il s'agit de faire le choix de l'Union sacrée qui passe par le soutien à l'État[97]. Dans les deux cas, c'est le souci de l'unité française qui prime mais, autant après 1918, ce soutien au gouvernement français aura été profitable au prestige et l'influence de l'Action française, autant après 1945, il aura des conséquences désastreuses sur l'aura de Maurras[98], « en ruinant le crédit d'un demi-siècle d'aventure intellectuelle, en occultant tout un mouvement varié de pensée que l'on ne peut réduire par amalgame au régime de Vichy[99] ».

L'historien Jacques Prévotat analyse que Maurras, sous l'Occupation, « s'enferme dans un schématisme abstrait, détaché du réel concret, mais dont l'orientation, systématiquement favorable au régime de Vichy et hostile à la cause alliée, tourne à une complicité de fait avec l'occupant ». Les contemporains ne sont pas dupes. De Londres, où il écrit dans La France libre, Raymond Aron porte, six mois à peine après l'installation du nouveau régime, cette appréciation sur le chef de l'Action française : « M. Maurras, promu doctrinaire officiel du nouveau régime, n'en écrit pas plus aujourd'hui sur la IIIe République qu'il n'en écrivait depuis trente ans. La seule différence est qu'il est désormais gouvernemental et conformiste, qu'il trouve une sorte de jouissance morose dans les malheurs qui accablent notre patrie, parce qu'ils ont liquidé le régime détesté et permis cette « merveille d'État national » que le maréchal Pétain est en train de construire (15 décembre 1940) »[100].

Pour Maurras, la France demeure et n'a besoin ni de l'Angleterre, ni de l'Allemagne pour être ; ceux qui le croient et rejoignent ce qu'il appelle le « clan des yes » et le « clan des ja », deviennent des agents de l'étranger : ce thème est celui de la France seule. À l'été 1940, malgré les conseils de Pierre Gaxotte, Maurras fait reparaître L'Action française à Lyon, avec en tête le slogan « La France seule ».

Maurras apprécie également l'idée d'une remise en cause des idées démocratiques et la défaite « a eu le bon résultat de nous débarrasser de nos démocrates[101] ». En effet, pour Maurras, l'invasion et l'occupation du territoire français sont le résultat de l'application de la politique révolutionnaire et de la rupture avec la sagesse de la politique étrangère de l'Ancien Régime, en 1940 comme en 1814, 1815, 1870. Maurras a d'ailleurs déclaré au préfet de la Vienne : « Que voulez-vous, monsieur le Préfet, soixante-dix ans de démocratie, ça se paie ! » La « divine surprise » n'est pas la victoire de l'Allemagne comme certains ont cherché à le faire croire à la Libération[102] mais l'accession au pouvoir du Maréchal Pétain et le sabordage de la République par le vote majoritaire des Parlementaires républicains eux-mêmes[103] - [104]. En effet, sur certains plans, des convergences peuvent être détectées entre les thèmes de la Révolution nationale et ceux de l'Action française. En septembre 1940, lorsque le maréchal Pétain lui demande sa conception de la Révolution nationale, il répond « un bon corps d'officiers et un bon clergé »[105], une position qu'il appelle : « défendre l'héritage en l'absence d'héritier »[106]. Il soutient le régime de Vichy, non la politique de collaboration[107] car il est un nationaliste profondément germanophobe. Il félicite successivement le régime de Vichy pour la loi portant statut des Juifs et pour l'abolition du décret Crémieux (9 octobre 1940) qui avait accordé la nationalité française aux Juifs algériens[108].

Mais ce soutien va surtout à la personne du Maréchal Pétain et non à tous les dirigeants ou toute la politique de Vichy : Maurras fête le renvoi de Laval dans les locaux de L'Action française[98]. Maurras cherche à user de son influence auprès des dirigeants de Vichy comme il le fit auprès de Raymond Poincaré pour contrer les mesures qui lui semblaient mauvaises. Au cours des mois de juillet et août 1940, il joue de ses relations auprès du maréchal Pétain qu’il rencontre le 27 juillet pour faire échec au projet de parti unique lancé par Marcel Déat. Il écrit que de toute évidence, Marcel Déat est égaré par l’exemple de l’Allemagne et de l’Italie[109]. À un journaliste japonais, Marcel Déat confiera qu’il s’est heurté par-dessus tout dans son projet d'État totalitaire et de nouvel ordre européen à la résistance de l’Action française[110]. Maurras s'oppose à toute orientation germanophile ; il voit dans les partisans de la collaboration les continuateurs de Jaurès et Briand et note comme l’un des hauts responsables nazis en France, Schleier, que « la grande majorité des partisans de la politique de collaboration vient de la gauche française : Déat, Doriot, Pucheu, Marion, Laval, une grande partie de l’ancien personnel briandiste[111]. »

La question de l'influence de la pensée de Maurras sur l'idéologie et la politique de Vichy est débattue par l'historiographie : pour Loubet del Bayle, Vichy se situe à l'intersection des idées du technocratisme planiste, d'Action française, du catholicisme social, du personnalisme[112]. L'influence propre de l'Action française est difficile à identifier et isoler ; certains nient l'influence de la pensée de Maurras comme Limore Yagil ; d'autres, comme François Huguenin, voient dans Vichy l'héritière de l'esprit des années 1930 et d'abord de ses rejets, rejets dont certains se retrouvent aussi dans la Résistance : antiparlementarisme, anticapitalisme, anti-individualisme, anticommunisme[113]. Simon Epstein rappelle que Vichy n'attend pas longtemps pour se délester d'une bonne partie de ses maurrassiens[114] : dès 1941, Raphaël Alibert, ministre de la Justice, Paul Baudouin, ministre des Affaires étrangères en 1941, Georges Groussard, ancien cagoulard qui commande les groupes de protection de Vichy et qui procéda à l'arrestation de Laval trop favorable à l'Allemagne et s'orienta vers la Résistance, quittent Vichy. Ceux qui ne sont pas partis quitteront le gouvernement lors du retour de Laval en 1942 : Pierre Caziot, Serge Huard, Yves Bouthillier, René Gillouin, Henry du Moulin de Labarthète, Xavier Vallat, c'est-à-dire avant l'entrée des partisans d'une franche collaboration avec l'Allemagne nationale-socialiste. Ces maurrassiens étaient mal vus des amis de Pierre Laval qui les accusent d'avoir favorisé son renvoi, des Allemands qui n'apprécient pas leur hostilité à la collaboration, des collaborationnistes qui les accusent d'être réactionnaires à l'intérieur et germanophobes à l'extérieur[115]. Les Dreyfusards collaborateurs tels Armand Charpentier et René de la Marmande attaquèrent régulièrement ses positions[116]. Les pacifistes des années 1920 reprochaient à Maurras d'être hostile au rapprochement franco-allemand. Devenus collaborateurs, certains de ces pacifistes témoigneront de ténacité idéologique et constance argumentaire, puisqu'ils lui feront le même reproche sous l'Occupation[117].

Après la Seconde Guerre mondiale, Charles Maurras nie avoir exercé une influence sur Philippe Pétain : après avoir rappelé qu'ils se voyaient à peine avant 1939, il proteste contre « la fable intéressée qui fait de moi une espèce d'inspirateur ou d'Éminence grise du Maréchal. Sa doctrine est sa doctrine. Elle reste républicaine. La mienne est restée royaliste. Elles ont des contacts parce qu'elles tendent à réformer les mêmes situations vicieuses et à remédier aux mêmes faiblesses de l'État. […] L'identité des problèmes ainsi posée rend compte de la parenté des solutions. L'épouvantable détresse des temps ne pouvait étouffer l'espérance que me donnait le remplacement du pouvoir civil impersonnel et irresponsable, par un pouvoir personnel, nominatif, unitaire et militaire[118] - [n 11] ».

Division des partisans de Maurras

Pendant l'Occupation, les membres et anciens proches de l'Action française se divisèrent en trois groupes opposés : celui des maurrassiens orthodoxes, anti-allemands mais soutenant le régime de Vichy conduit par le maréchal Pétain, celui des collaborationnistes et ouvertement pro-nazis, tels Robert Brasillach, Charles Lesca, Louis Darquier de Pellepoix ou Joseph Darnand, et celui des résistants contre les occupants allemands, tels Honoré d'Estienne d'Orves, Michel de Camaret, Henri d'Astier de La Vigerie, Gilbert Renault, Pierre de Bénouville, Daniel Cordier ou Jacques Renouvin[119].

Il n'y a pas de statistiques sur la répartition de ces trois groupes mais, à l'époque, l'idée que les dirigeants suivent Maurras dans son soutien à Pétain mais qu'une majorité des sympathisants maurrassiens soutient la Résistance contre l'avis de Maurras est répandue[120]. Pierre Mendès France soutiendra cette position[121] : « L’Action française, sous l’influence directe de Maurras, suit Vichy, mais là encore, la principale partie des troupes a abandonné les chefs. Comme la plupart des anciens Croix-de-Feu, les militants de l’Action française, surtout les éléments jeunes, sont aujourd’hui antiallemands et absolument hostiles à la soumission à l’occupant ». Le colonel Rémy dira que sa décision de résister résulta de son imprégnation de la pensée de Maurras : « Le réflexe qui m'a fait partir pour l'Angleterre le 18 juin 1940 trouvait son origine dans l'enseignement que, depuis vingt ans, je recevais quotidiennement sous sa signature[122] ». Si des maurrassiens résistants affirment comme le colonel Rémy que leur engagement dans la résistance résulte d'une application de la pensée de Maurras, a contrario, certains de ceux qui ont rejoint le collaborationnisme disent qu'ils ont rompu avec la personne et le mouvement, mais pas avec l'essence de sa pensée. C'est le cas de Lucien Rebatet qui se déchaînera contre Maurras dans de nombreux écrits, mais dont l'engagement est inspiré par « le Maurras le plus durable et le plus général[123] », ou de Robert Brasillach que Maurras refusera de revoir, mais qui lui rend hommage dans Notre avant-guerre.

La diversité des parcours posés entre 1940 et 1945 relève parfois du tempérament, voire du hasard des événements : la grille idéologique ne permet souvent pas d'expliquer seule tant de prises de positions différentes, ni d'analyser des choix[124].

Hostilité envers les ultras de la Collaboration

L'écrivain Jean Grenier note au sujet de l'agence de presse Inter-France que Charles Maurras est tout à fait opposé au groupe de journalistes « qui a fondé l'agence de presse Inter-France germanophile »[125].

L'anglophobie de Maurras ne compensait pas aux yeux des Allemands sa germanophobie virulente, ce qui lui valut en 1942 d'être mis au rang des incorrigibles ennemis de l'Allemagne aux côtés de Massis, Claudel et Mauriac par le docteur Payr, dirigeant de l'Amt Schrifttum, dépendant de l'Office Rosenberg, quand il rend compte de la littérature française[126]. Le conseiller Schleier dénonce dans une note au ministre Ribbentrop son « comportement fondamental d'antiallemand[127] ». Maurras rompt avec Brasillach, en 1941, quand celui-ci envisage de refaire paraître Je suis partout à Paris : « Je ne reverrai jamais les gens qui admettent de faire des tractations avec les Allemands[98]. »

Les collaborationnistes Marcel Déat, Robert Brasillach, Lucien Rebatet se déchaîneront en attaques contre Maurras ; Rebatet écrit que « Maurras est de tous les Français celui qui détestait le plus profondément l'Allemagne », s'insurge contre les propos de Maurras qui qualifie le Führer de « possédé », condamne la « germanophobie aveugle et maniaque » de L'Action française[128].

Le collaborationniste Pierre-Antoine Cousteau dira après la guerre : « Maurras m’inspirait une horreur sacrée, uniquement parce qu’il faisait de la pérennité des guerres franco-allemandes la base de son système et que j’étais déjà convaincu (c’est le seul point sur lequel je n’ai jamais varié) que l’Europe ne serait jamais viable sans entente franco-allemande, que c’était le premier de tous les problèmes, le seul vraiment important, celui dont dépendait la guerre et la paix, la vie et la mort[129]. »

Dénonciation de la Résistance

Maurras se proclame « antigaulliste » et qualifie les résistants de « terroristes »[130], appelant à la répression la plus violente contre eux à la suite de la politique d'attentats menée par les résistants communistes[G 56] et la mort de plusieurs membres de l'Action française et de ses amis[131] : il exige « des otages et des exécutions », il recommande « la mise à mort des gaullistes faits prisonniers », sans autre forme de procès, il déclare que si « la peine de mort n'était pas suffisante pour mettre un terme aux activités des gaullistes, il fallait se saisir des membres de leur famille comme otages et exécuter ceux-ci »[132].

Maurras écrit en 1944 que « si les Anglo-Américains devaient gagner, cela signifierait le retour des francs-maçons, des Juifs et de tout le personnel politique éliminé en 1940 », et que soutenir les Alliés serait prendre parti « du mauvais côté »[133]. Dans une lettre à Jean Arfel en 1948, Maurras affirme qu'il y avait une part de feinte destinée à tromper les Allemands dans son hostilité aux gaullistes et aux maquisards et le souci d'éviter une guerre civile en France : « Mon escrime quotidienne contre les collaborationnistes et philoboches était toujours accompagnée, comme sa feinte protectrice, d'une pointe contre le Gaullisme et les maquisards, feinte qui a toujours trompé les Allemands à leur grand détriment […]. Je voulais tout tenter, à tout prix, pour épargner à la France le malheur de redevenir un champ de bataille et pour obtenir qu'elle fût libérée autrement [que par la guerre sur le territoire national] »[134].

Yves Chiron et François Huguenin affirment que le jeu de la censure allemande fait qu'il est imprudent d'interpréter la pensée de Maurras et d'avoir une idée juste de ses réactions en se référant à ses écrits pendant la guerre[135] - [136].

Libération (1944)

Maurras durant son procès en 1945.
Lors du procès tenu en , il est rappelé que sous l'Occupation, Maurras avait dénoncé Roger Worms et sa famille en publiant un article antisémite dans L'Action française le [137] - [138] - [139]
(Ce soir, ).

En 1944, Charles Maurras maintient sa méfiance pour la France libre, qu'il pense manipulée par Moscou[G 57]. Le débarquement de Normandie le déconcerte à cause de la destruction des villes françaises par des bombardements massifs ; en revanche, celui de Provence le réjouit car il obéit à une progression inoffensive pour les populations[G 57].

Après le débarquement, il préconise de ne rien faire pour aggraver les maux publics, car il craint plus que tout la guerre civile : cette position attentiste est scandaleuse, selon les collaborationnistes[140], mais elle ne satisfait pas non plus les résistants ; Maurras ne veut rien faire pour empêcher que la libération puisse se faire et laisser au Maréchal Pétain la possibilité de négocier avec les libérateurs, illusion qu’il partage avec l’amiral Auphan en tractation secrète avec les Américains[G 57]. Maurras exulte lorsqu’il apprend la libération de Paris ; le 3 septembre 1944, il arrose l’événement chez son ami Henri Rambaud, ivre de joie et de vin, mais les communistes saccagent ses bureaux le 6 septembre et le 9 septembre.

Il est arrêté à Lyon lors d'une conférence de presse[141] , à l'instigation du résistant et commissaire de la république Yves Farge, lui-même proche du Parti communiste : il faudra deux mois pour que Maurras prenne connaissance de son inculpation pour « intelligence avec l’ennemi » et son procès commencera le [142] - [G 58] - [143].

Pendant celui-ci, au cours duquel sera mise en avant sa critique de la résistance gaulliste et communiste, Charles Maurras met en avant son antigermanisme. Des résistants comme Georges Gaudy ou le capitaine Darcel témoignent en sa faveur[n 12].

Maurras durant son procès.

Concernant l'antisémitisme[n 13], il affirme qu'il ignorait qu'en février 1944, « désigner un Juif à l'attention publique, c'était le désigner lui ou sa famille aux représailles de l'occupant, à la spoliation et aux camps de concentration, peut-être à la torture ou à la mort[150] ». Il dira également que ses invectives étaient des menaces et ne résultaient pas d'une volonté de nuire physiquement[151] - [n 14].

Le , la cour de justice de Lyon déclare Charles Maurras coupable de haute trahison et d'intelligence avec l'ennemi et le condamne à la réclusion criminelle à perpétuité et à la dégradation nationale[152] - [153].

Maurras commenta sa condamnation par une exclamation célèbre : « C'est la revanche de Dreyfus ! »[154] Selon l'historien américain Eugen Weber, le procès qui dura seulement trois jours fut un procès politique : les jurés ont été choisis sur une liste établie par des ennemis politiques de Maurras, les vices de forme et les trucages ont été nombreux, le motif choisi est le plus infamant et le plus contradictoire avec le sens de sa vie. Pour ses partisans, le régime condamne celui qui n'a cessé de le mettre en face de ses responsabilités et lui fait payer le prix de ses propres erreurs[G 60].

De sa condamnation (article 21 de l'ordonnance du 26 décembre 1944), découle son exclusion[n 15] automatique de l'Académie française[152] - [155] (l'ordonnance prévoit l'exclusion de l'Institut). Conformément à la loi[152], l'Académie déclare vacant le siège de Maurras lors de la séance du [152] - [155] mais, selon la décision du secrétaire perpétuel Georges Duhamel, ne procède pas au vote de radiation[152]. L’Académie décida de ne procéder à l'élection du remplaçant de Maurras qu'après son décès, ce qui ne sera pas le cas pour les académiciens collaborationnistes comme Abel Bonnard et Abel Hermant, remplacés de leur vivant[152] - [155] - [n 16].

Après-Seconde Guerre mondiale (1945-1952)

Tête de Charles Maurras dans son jardin de Martigues, 22, chemin du Paradis, Bouches-du-Rhône, Provence.

Entre 1945 et 1952, Charles Maurras publia quelques-uns de ses textes les plus importants[156]. Bien qu'affaibli, il collabore sous le pseudonyme d'« Octave Martin » à Aspects de la France, journal fondé par des maurrassiens en 1947, à la suite de l'interdiction de l'Action française. Il dénonce l'épuration et s'en prend particulièrement à François de Menthon, pour avoir été le ministre de la Justice du Gouvernement provisoire de la République française[157]. Il fait 7 mois à Riom[158], condamné à la dégradation civique et à la prison[159]. Ses dernières années, passées en grande partie à la prison de Clairvaux, furent aussi l'occasion d'une introspection sur la question de la Résistance ou du traitement infligé aux Juifs pendant la guerre. Ainsi, en 1948, il fait part de son admiration pour l'épopée Leclerc et pour les « belles pages » du maquis et reconnaît une erreur dont il a conscience et tente d'excuser : il n'a pas su distinguer dans l'ensemble de la Résistance et son incapacité à voir clair découlerait alors de l'obsession de la mort de la France, crispation défensive qui lui fit ignorer les perspectives minces au début, puis plus larges d'une victoire possible[160].

En 1949, Maurras et Pujo écrivent au garde des sceaux pour demander la révision de leur procès[161].

Tout en continuant d'affirmer la nécessité d'un antisémitisme d'État du fait que les Juifs posséderaient une nationalité propre qu'il reconnaît glorieuse, mais différente de la française[162], il s'oppose à Maurice Bardèche sur le drame de la déportation : « Français ou non, bons ou mauvais habitants de la France, les Juifs déportés par l'Allemagne étaient pourtant sujets ou hôtes de l'État français, et l'Allemagne ne pouvait pas toucher à eux sans nous toucher ; la fierté, la justice, la souveraineté de la France devaient étendre sur eux une main protectrice »[163] - [164].

Charles Maurras fut un écrivain provençal : élu majoral du Félibrige en 1941, il en fut exclu en 1945, tout en usant d'un droit réglementaire à présenter une réponse, qu'il composa en provençal et qui fut lue[165].

Le 10 août 1951, Charles Maurras est transféré à l’hôtel-Dieu de Troyes. Il publie peu après plusieurs ouvrages : Jarres de Biot où il redit sa fidélité au fédéralisme, revendiquant même la qualité de « plus ancien fédéraliste de France » , À mes vieux oliviers et Tragi-comédie de ma surdité. Le 21 mars 1952[166], bénéficiant d'une grâce médicale[167] accordée par le président de la République Vincent Auriol[166], grâce réclamée maintes fois par l'écrivain Henry Bordeaux, auprès du président, par divers courriers, Charles Maurras est transféré à la clinique Saint-Grégoire[168] de Saint-Symphorien-lès-Tours[169]. Quelques mois avant sa mort, Maurras écrivait qu’il « n’avait pas fait un pas dans la direction des choses éternelles » ; les théologiens qui l’entouraient ne cessaient d’espérer un signe de conversion, mais Maurras était las de cet empressement et « souhaitait qu’on mît fin à cette volonté obstinée de “donner à boire à un âne qui n’a plus soif” »[170]. Cependant, il meurt le 16 novembre 1952[158] - [171], après avoir reçu les derniers sacrements et plusieurs témoins ont attesté de l'intensité de sa conversion à l'article de la mort[172] - [173] - [G 61].

Caractère

Pour Stéphane Giocanti, l’image d’un Maurras froid et austère est un contre-sens ; il a au contraire un caractère sanguin et contrasté : à la fois tendre et violent, contemplatif et actif, patient et impatient, tantôt inflexible et obstiné, tantôt bon et généreux ; sachant à l'occasion reconnaître ses torts, pardonner et s’effacer devant les autres, il est tour à tour exaspérant et charmant : « Il peut s’entêter, se raidir, entrer dans des colères, devenir une teigne, quitte à le regretter ensuite comme Bossuet ». Il a la frénésie de la discussion et de la dialectique car il a la passion de la vérité, de l’ordre, de l’unité. Il a l’intransigeance et la fierté d’un homme de la fin du dix-neuvième siècle qui ne revient pas sur sa parole et réserve ses doutes pour lui-même. Il s’engage radicalement et est prêt à mourir pour la Cause d’autant qu’il engage les autres dans son périple. Généreux vis-à-vis de ses amis et fidèle en amitié, il peut être un amant passionné, un charmeur blaguant, diseur de vers et buveur de bon vin. Très sensible aux femmes, il s’affirme bon causeur caustique, pétillant et aimant la complicité des dames élégantes[174]. Il suscita des attachements très forts et reçut d’innombrables marques de fidélité et d’admiration : ainsi, avant de gagner l’horizon polaire avec l’explorateur Roald Amundsen, deux pilotes survolant la maison de leur maître lâchèrent sur le jardin une pluie de pétales de roses, message de fidélité placé sous le signe de sainte Thérèse de l’Enfant Jésus[175]. Pierre Gaxotte écrivit à son propos : « Maurras était en pleine force, insensible à la fatigue, aux incommodités, aux menaces, aux dangers. On était pris d'abord par son regard, où rayonnaient l'intelligence, l'autorité, l'énergie le courage, la bienveillance, une attention extrême et parfois la gaieté. Mais on était conquis aussi par sa jeunesse, son ardeur, son alacrité[176]. »

Charles Maurras qui aimait la simplicité et avait le « sens de la pauvreté », gagnait volontairement moins que le plus petit ouvrier qualifié de son journal ; après 1940, il versa ses droits d'auteur à une œuvre de prisonniers[177].

Famille

Le 22 novembre 1925, lors d’une réunion organisée par l'Action française en réaction à la victoire du cartel des gauches à Luna Park où trente mille personnes se rendent, Charles Maurras aurait eu la prescience de la mort de son frère. Il apprend le lendemain la mort au Tonkin du médecin et chirurgien Joseph Maurras, qui donnait une chronique médicale à L'Action française très suivie par la profession. Il télégraphie à sa belle-sœur Henriette qu’il adopte son neveu Jacques et ses nièces Hélène et Jeanne ; il logera son neveu avec sa mère avenue Mozart et leur trouvera un précepteur, l’abbé Rupert ; Jacques sera bachelier au lycée Janson-de-Sailly[178], diplômé de l’École libre des sciences politiques, licencié en droit[n 17]. Maurras était également le parrain de François Daudet, un des fils de Léon Daudet.

Vie privée

Dans les années 1890, Maurras a dû affronter la séparation de la belle Valentine de Saint-Pons, puis il a été l'amant de la bouillonnante Mme Paul Souday, qu'il continua de fréquenter amicalement après leur séparation.

Il tomba ensuite amoureux de la comtesse de la Salle-Beaufort, nièce de Gustave Janicot, qui travaillait avec lui à La Gazette de France et qu'il connaissait depuis 1892. La jeune femme, mariée et mère de plusieurs enfants, cultivée et touchée par cet amour ardent, ne voulut pas tout abandonner pour lui, ce qui lui donna des envies de suicide[179]. Maurras ne rompait jamais avec les femmes : il correspondit avec la comtesse jusqu'en 1930[180].

En 1910 et jusqu'à son mariage, Mme Jules Stefani, née Rachel Legras (alias Pierre Chardon), fut l'amante de Maurras qui lui confia la publication de son Dictionnaire politique et critique, encyclopédie qui traitait de tous les domaines auxquels Maurras toucha : politique littérature, histoire, sociologie, philosophie[181].

En 1925, l’objet de ses sentiments amoureux fut Alice Gannat, intendant au collège des jeunes filles de la Légion d’honneur, mais celle-ci ne consentit qu'à une relation amicale.

En 1928, il se lia avec la princesse Yvonne Rospigliosi, baronne de Villenfagne de Sorinnes (1887-1946) mariée au prince Ferdandino Carlo Rospiglios ; celle-ci habita chez Maurras rue de Verneuil et ils connurent des amours tempétueuses.

Sa dernière amie fut Mme de Dreux-Brézé, qui s'installa dans un logement tout près de sa prison et avec laquelle il eut une correspondance suivie après la Seconde Guerre mondiale[182]. Il eut également une liaison avec Mme Espinasse-Mongenet[183].

De façon générale, Charles Maurras aimait les femmes et cela se traduisit par des prises de position politiques. En 1910, il salua l'entrée des femmes dans le cycle des études supérieures : « Représentez-vous ce que les 2 500 étudiantes de Paris nous annoncent d'artistes, de lettrées, d'avocats, de doctoresses et tout ce qu'elles vont faire d'imitatrices, étudiantes de demain, parmi les fillettes qui sautent à la corde ou préparent leur première communion ? »[184]. Favorable au droit de vote des femmes, il rappelait que les femmes avaient voté sous Louis XVI dans les paroisses[185]. Touchée par les pages que lui consacra Maurras, la poétesse saphique Renée Vivien compara Maurras à un « Archange »[186] - [n 18].

Idées politiques

Nationalisme intégral et monarchisme

Charles Maurras vers 1908.

La principale originalité de Maurras réside dans le fait qu’il entend réaliser de manière rigoureuse l’amalgame de deux tendances jusqu’alors distinctes : le traditionalisme contre-révolutionnaire et le nationalisme[187]. Ses travaux ont particulièrement marqué la droite et l'extrême droite française. Cela tient à ce qu'il parvint à théoriser un très grand nombre des idées politiques défendues par les différentes familles politiques de droite en une seule et unique doctrine cohérente en apparence. Le nationalisme intégral se réclame ainsi comme un ensemble cohérent ; d'après l'historien Alain-Gérard Slama, l'efficacité de Maurras tiendrait dans le rassemblement intellectuellement ordonné d'idées provenant de divers courants de droite alors que les familles politiques de droite étaient jusqu'alors caractérisées essentiellement par l'opposition aux idées républicaines.

D'autres raisons ont été invoquées pour expliquer le rayonnement du nationalisme intégral[G 62]. Une d'entre d'elles est que le nationalisme intégral est défendu par des revues se voulant de qualité sur le plan intellectuel. La qualité littéraire de L'Action française, son intérêt apporté au cinéma, la densité, la liberté de ton et de goût de ses pages critiques, la confiance faite à de très jeunes gens comme Boutang, Maulnier, Brasillach contribuent au succès du quotidien.

La monarchie, garantie de l'unité nationale selon Maurras

Maurras entend dépasser le nationalisme, doctrine rendue nécessaire par les temps, en l'ouvrant à ce qui théoriquement ne procède pas d'un parti selon lui. Il veut trouver un principe capable d'assurer l'unité politique d'une nation et qui se trouve au-dessus des opinions d'après lui. Il s'agit pour Maurras du roi qui seul peut rassembler les Français. Maurras n'entend pas restaurer la monarchie non pour elle-même mais pour ce qu'elle peut apporter à la nation selon lui[188]. La conclusion de Maurras est le nationalisme intégral, c’est-à-dire la monarchie : sans la monarchie, la nation périra.

Le nationalisme maurrassien se définit ainsi comme la volonté de restaurer un pouvoir fort dont le but est de rendre la nation à elle-même en rétablissant les fondements de l’État, l’armée, la magistrature, l’Église, et ce, en excluant les étrangers et immigrés sans racines selon lui, qui « campent » sur le territoire national, c’est-à-dire ce qu'il appelle les « quatre États confédérés », à savoir les juifs, les protestants, les francs-maçons et les métèques[189].

Le point de départ des idées monarchistes et nationalistes de Maurras est à chercher dans les deux premiers fascicules de l’Enquête sur la monarchie qui paraissent en 1900 dans les colonnes de la Gazette de France (le troisième paraît en 1903). Il y affirme que « l'ouvrier, le serviteur, le chef de la défense et de la grandeur françaises ne peut être que le descendant des Chefs fondateurs et conservateurs, le Roi ». La légitimité du pouvoir monarchique en France repose pour Maurras sur sa capacité à assurer le salut public[190].

En disciple d’Auguste Comte, Maurras entend que « le pouvoir spirituel » soit le dénominateur commun à partir duquel la société pourra se reconstruire et définit le royalisme comme « une union nationale supérieure à toute division de partis » et accueillante aux « libertins de gauche », comme aux catholiques de droite. Il déclare notamment à Barrès son ambition de « conquérir au royalisme non seulement l’Action, mais vous-même et la France entière »[191].

Depuis la mort du comte de Chambord en 1883, le sentiment royaliste était frappé à mort. Son déclin s'était précipité avec le soutien au boulangisme et avec la mort du comte de Paris (1894)[C 1]. Le zèle, « la conviction têtue et la force persuasive » de Maurras et le ralliement d'une poignée de jeunes hommes allaient régénérer « le vieux tronc et lui infuser une sève nouvelle » : un néo royalisme plus combatif et plus jeune mais sans « l'attachement quasi religieux à la personne du roi »[C 1], un royalisme positiviste[C 2].

La fameuse formule « politique d’abord » de Maurras ne signifie donc pas que l’économie a moins d’importance que la politique, mais qu’il faut commencer par réformer les institutions : « Ne pas se tromper sur le sens de « politique d’abord ». L’économie est plus importante que la politique. Elle doit donc venir après la politique, comme la fin vient après le moyen. » La monarchie selon Maurras est traditionnelle, héréditaire, antiparlementaire et décentralisée. À propos de ces quatre critères, les maurrassiens parlent de « quadrilatère »[192].

  1. Les deux caractères, traditionnelle et héréditaire, résultent immédiatement de la « politique naturelle ». « Tradition veut dire transmission », transmission d’un héritage. Maurras parle du « devoir d’héritier » ainsi que du « devoir de léguer et de tester ». Il souligne les bienfaits de l’institution parentale : « Les seuls gouvernements qui vivent longuement, écrit-il dans la préface de Mes idées politiques, les seuls qui soient prospères, sont, toujours et partout, publiquement fondés sur la forte prépondérance déférée à l’institution parentale. » Il est partisan d’une noblesse héréditaire, il conseille aux fils de diplomates d’être diplomate, aux fils de commerçants d’être commerçant, etc. La mobilité sociale lui paraît provoquer une déperdition du « rendement humain », expression dont il se sert dans l’Enquête sur la monarchie. Pour Maurras, le gouvernement légitime, le bon gouvernement c’est celui qui fait ce qu’il a à faire, celui qui fait le bien, celui qui réussit l’œuvre du bien public. Sa légitimité se vérifie à son utilité. Or, le souci vigilant de l’intérêt public est selon lui cruellement dispersé dans la démocratie alors qu'en monarchie il est rassemblé dans la personne du souverain : « Ce que le prince aura de cœur et d’âme, ce qu’aura d’esprit, grand, petit ou moyen, offrira un point de concentration à la conscience publique : le mélange d’égoïsme innocent et d’altruisme spontané inhérent aux réactions d’une conscience de roi, ce que Bossuet nomme son patriotisme inné, se confondra psychologiquement avec l’exercice moral de ses devoirs d’État : le possesseur de la couronne héréditaire en est aussi le serf, il y est attaché comme à une glèbe sublime qu’il lui faut labourer pour vivre et pour durer[193]. » La nation a intérêt à être dirigé par un dirigeant dont les intérêts coïncident avec les siens et dont l'égoïsme privé devient une vertu publique. L'égoïsme des politiciens tend à s'identifier avec celui des partis, celui du Roi tend à s'identifier avec celui de la Patrie.
  2. La doctrine de Maurras est antidémocratique et antiparlementaire. Sur ce thème, il affirme que l'histoire prouve qu’une république fondée sur les aléas de la démocratie parlementaire est incapable d’avoir une politique étrangère cohérente dans la durée ou du moins d’avoir les moyens de sa politique : les intérêts à court terme des partis passent avant les intérêts à long terme de la patrie. Il s’en prend au respect du nombre et au mythe de l’égalité devant la loi (l’inégalité est pour lui naturelle et bienfaisante), au principe de l’élection (contrairement à ce que croient les démocrates, « le suffrage universel est conservateur »), au culte de l’individualisme. Il dénonce le « panjurisme » démocratique, qui ne tient aucun compte des réalités. Il attaque avec une particulière violence les instituteurs, les Juifs, les démocrates chrétiens. Il affirme qu’il n’y a pas un Progrès mais des progrès, pas une Liberté mais des libertés : « Qu’est-ce donc qu’une liberté ? - Un pouvoir. » D’autre part Maurras déteste le « règne de l’argent », non pas les financiers et les capitalistes en tant que tels, mais l'influence illégitime qu'ils peuvent chercher à exercer sur l'État. Il souligne les liens entre démocratie et capitalisme ; son traditionalisme est opposé au pouvoir exclusif de la bourgeoisie ; sur ce point, il est d’accord avec Péguy[194] et sa doctrine est en harmonie avec les sentiments des hobereaux plus ou moins ruinés qui constituaient souvent les cadres locaux de L’Action française.
  3. Maurras est un adversaire de la centralisation napoléonienne. Il estime en effet que cette centralisation, qui a pour conséquence l’étatisme et la bureaucratie (rejoignant ainsi les idées de Proudhon), est inhérente au régime démocratique. Il affirme que les républiques ne durent que par la centralisation, seules les monarchies étant assez fortes pour décentraliser. Maurras dénonce l'utilisation insidieuse du mot décentralisation par l'État, qui lui permet de déconcentrer son pouvoir tout en se donnant un prestige de liberté : à quoi bon créer des universités en province si l'État central les commande entièrement[195]. Comme Maurice Barrès, Charles Maurras exalte la vie locale comme la condition même du fait politique et du civisme, annihilée ou atrophiée par la centralisation : c'est par le biais décentralisateur et fédéraliste, par la défense des traditions locales que doit s'effectuer le passage d'un nationalisme jacobin, égalitaire et étatiste, à un nationalisme historique et patrimonial appuyé sur les diversités de la nation française, hostile à l'emprise de l'État central : « Il n'est guère enviable d'être mené comme un troupeau, à coup de règlements généraux, de circulaires contradictoires, ni d'être une organisation toute militaire[196]. » Pour Maurras, il faut refonder l'État, un État véritable : « l'État redevenu la Fédération des régions autonomes, la région, la province redevenues une Fédération de communes ; et le commune, enfin, premier centre et berceau de la vie sociale ». Pour Maurras, il ne s'agit pas de faire revivre les provinces de l'Ancien Régime, car leur découpage a varié d'un siècle à l'autre par l'effet des traités, des donations, des mariages, des coutumes du droit féodal, mais de réfléchir au projet de création de régions épousant les désirs de la nature, ses vœux, ses tendances[197]. Décentralisation territoriale sans doute, mais aussi et surtout décentralisation professionnelle, c’est-à-dire corporatisme : il faut redonner une vie nouvelle aux corps de métier, à toutes ces communautés naturelles dont l’ensemble forme une nation.

Le nationalisme maurrassien se veut contre-révolutionnaire, rationnel, réaliste, germanophobe, non ethniciste et conforme à la conception française de la nation.

Son nationalisme intégral rejetait tout principe démocratique qu'il jugeait contraire à l’« inégalité protectrice », et critiquait les conséquences de la Révolution française : il prônait le retour à une monarchie traditionnelle, héréditaire, antiparlementaire et décentralisée. Le nationalisme de Maurras se veut intégral en ce que la monarchie fait partie selon lui de l'essence de la nation et de la tradition françaises. Maurras rejette le nationalisme de Paul Déroulède et son égalitarisme mystique, ancré sur les images de l'An II et 1848[G 63]. Le royalisme est le nationalisme intégral car sans roi, tout ce que veulent conserver les nationalistes s'affaiblira d'abord et périra ensuite.

La nation est pour Maurras une réalité avant d'être une idée ; il s'agit de dissocier le mot nation de son acception révolutionnaire : « L'idée de nation n'est pas une nuée ; elle est la représentation en termes abstrait d'une forte réalité. La nation est le plus vaste des cercles communautaires qui soient (au temporel) solides et complets. Brisez-le et vous dénudez l'individu. Il perdra toute sa défense, tous ses appuis tous ses concours[198]. »

Critique de la Révolution française

Charles Maurras était hanté par l'idée de « décadence », partiellement inspirée par ses lectures d'Hippolyte Taine et d'Ernest Renan. Comme ces derniers, il pensait ainsi que la décadence de la France trouvait son origine dans la Révolution de 1789 ; la Révolution française, écrivait-il dans L’Observateur, était objectivement négative et destructive par les massacres, les guerres, la terreur, l'instabilité politique, le désordre international, la destruction du patrimoine artistique et culturel dont elle fut la cause.

L'origine de la Révolution se trouve selon lui dans les Lumières et à la Réforme ; il décrivait la source du mal comme étant « des idées suisses », une référence à la nation adoptive de Calvin et la patrie de Jean-Jacques Rousseau. Ce dernier incarnait la rupture avec le classicisme que Maurras considérait comme l'expression du génie grec et latin, ce qui se ressent nettement dans ses recueils de poèmes, notamment La Musique intérieure et La Balance intérieure. La critique du protestantisme est thème récurrent de ses écrits : ainsi quand il définit la notion de Civilisation et son principe dans ses Œuvres capitales, il affirme que la Réforme a eu pour effet le recul de la Civilisation[199]. Il ajoutait que « la Révolution n'était que l'œuvre de la Réforme » en ce que l'« esprit protestant » symbolise selon lui l'individualisme exacerbé, destructeur du lien social et politique, tel qu'Auguste Comte le décrit et le condamne[200]. Il y aura toutefois une composante protestante à l'Action française dont Jacques Delebecque et Henri Boegner sont les plus connus[200]. Maurras tempèrera son antiprotestantisme par la suite et se livrera à la mort du géographe protestant Onésime Reclus à son panégyrique, regrettant sa rencontre manquée avec lui[201].

Pour Maurras, la Révolution française avait contribué à instaurer le règne de l'étranger et de l'« Anti-France », qu'il définissait comme « les quatre États confédérés des protestants, juifs, francs-maçons, et métèques »[202]. En effet, pour lui, protestants, juifs et francs-maçons étaient comme des « étrangers internes » dont les intérêts en tant que communautés influentes ne coïncidaient pas avec ceux de la France.

Le nationalisme de Charles Maurras, contrairement à celui de Péguy qui assume l'ensemble de la tradition française, ou à celui de Barrès qui ne récuse pas l'héritage de la Révolution, rejette l'héritage de 1789.

La pensée de Maurras est également caractérisée par un militantisme antimaçonnique. À propos de la franc-maçonnerie, il écrit dans son Dictionnaire politique et critique : « Si la franc-maçonnerie était jadis un esprit, d’ailleurs absurde, une pensée, d’ailleurs erronée, une propagande, d’ailleurs funeste, pour un corps d’idées désintéressées, il n’est aujourd'hui plus animé ni soutenu que par la communauté des ambitions grégaires et des appétits individuels. »[203].

Maurras pensait ainsi que la Réforme, les Lumières, et la Révolution française ont eu pour effet l'invasion de la philosophie individualiste dans la cité française[n 19]. Les citoyens qui la composent se préoccupant, d'après Maurras, avant tout de leur sort personnel avant de s'émouvoir de l'intérêt commun, celui de la nation. Il croyait alors que cette préoccupation individualiste et antinationale était la cause d'effets indésirables sur la France ; la démocratie et le libéralisme ne faisant qu'empirer les choses.

Critique de la démocratie

Dans l'avant-propos de son ouvrage Mes idées politiques, Charles Maurras entend définir le domaine au sein duquel la notion de justice a un sens. Pour lui, l'ordre social et les inégalités ne sont ni justes ni injustes, mais elles résultent de l'histoire, du hasard ou de données de fait indépendantes de la volonté des individus. Il n'y a pas de sens à parler d'un ordre social juste ou injuste car la place que chacun occupe au sein de la société ne résulte pas d'une volonté extérieure ou consciente. Maurras considère que nombreuses erreurs politiques procèdent d'une extension abusive du concept de justice : « L'erreur est de parler justice qui est vertu ou discipline des volontés, à propos de ces arrangements qui sont supérieurs (ou inférieurs) à toute convention volontaire des hommes. Quand le portefaix de la chanson marseillaise se plaint de n'être pas sorti des braies d'un négociant ou d'un baron, sur qui va peser son reproche ? À qui peut aller son grief ? Dieu est trop haut, et la Nature indifférente. Le même garçon aurait raison de se plaindre de n'avoir pas reçu le dû de son travail ou de subir quelque loi qui l'en dépouille ou qui l'empêche de le gagner. Telle est la zone où ce grand nom de justice a un sens. »

Pour Maurras, l'inégalité peut être bienfaisante en ce qu'elle permet une répartition protectrice des rôles et il doit s'agir pour l'État non soumis à la démagogie de les organiser au bénéfice de tous. Il est vain de vouloir supprimer les inégalités, cela est même dangereux du fait des effets secondaires pires que le mal que l'on prétend résoudre : « Les iniquités à poursuivre, à châtier, à réprimer, sont fabriquées par la main de l'homme, et c'est sur elles que s'exerce le rôle normal d'un État politique dans une société qu'il veut juste. Et, bien qu'il ait, certes, lui, État, à observer les devoirs de la justice dans l'exercice de chacune de ses fonctions, ce n'est point par justice, mais en raison d'autres obligations qu'il doit viser, dans la faible mesure de ses pouvoirs, à modérer et à régler le jeu des forces individuelles ou collectives qui lui sont confiées. Mais il ne peut gérer l'intérêt public qu'à la condition d'utiliser avec une passion lucide les ressorts variés de la nature sociale, tels qu'ils sont, tels qu'ils jouent, tels qu'ils rendent service. L'État doit se garder de prétendre à la tâche impossible de les réviser et de les changer ; c'est un mauvais prétexte que la « justice sociale » : elle est le petit nom de l'égalité. L'État politique doit éviter de s'attaquer aux infrastructures de l'état social qu'il ne peut pas atteindre et qu'il n'atteindra pas, mais contre lesquelles ses entreprises imbéciles peuvent causer de généreuses blessures à ses sujets et à lui-même. Les griefs imaginaires élevés, au nom de l'égalité, contre une Nature des choses parfaitement irresponsable ont l'effet régulier de faire perdre de vue les torts, réels ceux-là, de responsables criminels : pillards, escrocs et flibustiers, qui sont les profiteurs de toutes les révolutions. […] Quant aux biens imaginaires attendus de l'Égalité, ils feront souffrir tout le monde. La démocratie, en les promettant, ne parvient qu'à priver injustement le corps social des biens réels qui sortiraient, je ne dis pas du libre jeu, mais du bon usage des inégalités naturelles pour le profit et pour le progrès de chacun. »

Maurras voit dans la république démocratique un régime démesuré où la démagogie égalitaire inspirée par une fausse conception de la justice fragilise les murailles de la cité et finit par emporter les degrés de la civilisation[G 64]. Dans la démocratie, Maurras discerne un régime entropique d’élimination de la polis à laquelle se substitue une société amorphe d'individus égaux et épars, point sur lequel il rejoint Tocqueville. « Prise en fait la démocratie c'est le mal, la démocratie c'est la mort. Le gouvernement du nombre tend à la désorganisation du pays. Il détruit par nécessité tout ce qui le tempère, tout ce qui diffère de soi : religion, famille, tradition, classes, organisation de tout genre. Toute démocratie isole et étiole l'individu, développe l’État au-delà de la sphère qui est propre à l’État. Mais dans la Sphère où l’État devrait être roi, elle lui enlève le ressort, l'énergie, même l’existence. […] Nous n'avons plus d’État, nous n'avons que des administrations »[G 65].

Maurras ne rejette pas le suffrage universel. Il invite ses partisans à jouer le rôle des institutions et du suffrage universel qu’il s’agit non de supprimer mais de le rendre utile selon lui : ne pas diriger la nation mais la représenter. Maurras demande à ses lecteurs de jouer au maximum le jeu des institutions, il faut voter à toutes les élections : le mot d'ordre est celui du moindre mal[G 66].Il veut abolir la République au sommet de l’État et l’établir où elle n’est pas c'est-à-dire au niveau commune, des régions et au sein des corporations professionnelles[G 66].

Différences avec les traditions orléaniste et légitimiste

Même si Maurras prônait un retour à la monarchie, par bien des aspects son royalisme ne correspondait pas à la tradition monarchiste française orléaniste, ou à la critique de la Révolution de type légitimiste. Son antiparlementarisme l'éloignait de l'orléanisme et son soutien à la monarchie et au catholicisme étaient explicitement pragmatiques et non fondés sur une conception providentialiste ou religieuse caractéristique du légitimisme. L'hostilité de Maurras à la Révolution se combinait avec une admiration pour le philosophe positiviste Auguste Comte dans laquelle il trouvait une contre-balance à l'idéalisme allemand et qui l'éloignait de la tradition légitimiste. Du comtisme, Maurras ne retient ni la théorie des trois âges, ni la religion du Grand Être, ni la filiation avec l'athéisme philosophique mais l'idée que l’Église catholique a joué un rôle bénéfique pour la civilisation, la société et l'Homme indépendamment de l'affirmation personnelle de foi[205]. Contrairement au royalisme légitimiste qui met en avant la providence divine, Maurras se borne à vouloir chercher les lois de l'évolution des sociétés et non ses causes premières qu'il ne prétend pas identifier.

Certaines intuitions de Maurras à propos du langage annoncent le structuralisme et se détachent de toute recherche métaphysique : « Ce qui pense en nous, avant nous, c'est le langage humain, qui est, non notre œuvre personnelle, mais l'œuvre de l'humanité, c'est aussi la raison humaine, qui nous a précédés, qui nous entoure et nous devance[206]. »

D'autres influences incluant Frédéric Le Play lui permirent d'associer rationalisme et empirisme, pour aboutir au concept d'« empirisme organisateur », principe politique monarchique permettant de sauvegarder ce qu'il y a de meilleur dans le passé[207].

Alors que les légitimistes rechignaient à s'engager vraiment dans l'action politique, se retranchant dans un conservatisme catholique intransigeant et une indifférence à l'égard du monde moderne considéré comme mauvais du fait de sa contamination par l'esprit révolutionnaire, Maurras était préparé à s'engager entièrement dans l'action politique, par des manières autant orthodoxes que non orthodoxes (les Camelots du roi de l'Action française étaient fréquemment impliqués dans des bagarres de rue contre des opposants de gauche, tout comme les membres du Sillon de Marc Sangnier). Sa devise était « politique d'abord ».

Méthode de Maurras et influence du scientisme

Charles Maurras est le fondateur du nationalisme positiviste. Au sentimentalisme barrésien s'oppose le positivisme maurrassien. Maurras considère la politique comme une science. Sa « politique naturelle » se veut une politique scientifique, fondée sur le réel, objectivement observable et descriptible, c'est-à-dire une politique fondée sur la biologie et sur l'histoire.

Charles Maurras est ainsi hostile à l'influence politique sur le royalisme du romantisme dans lequel il voit une manifestation d'un esprit incompatible avec le génie gréco-latin, avec l'esprit d'ordre et de clarté qui doit selon lui animer l'esprit français. Il s'en prend en particulier à Chateaubriand dont la pensée ne constitue pas pour les royalistes français un appui solide ; il ne méconnaît pas le génie littéraire de l'homme mais il perçoit que Chateaubriand n'aime la monarchie qu'au passé : « Chateaubriand n'a jamais cherché dans la mort et dans le passé, le transmissible, le fécond, le traditionnel, l'éternel : mais le passé, comme passé, et la mort, comme mort, furent ses uniques plaisirs. » Il a habitué ses lecteurs à l'idée que la monarchie aussi belle qu'elle soit, n'était au fond qu'un beau souvenir, sans voir ce qu'elle pourrait apporter dans le futur[208].

En contraste également avec Maurice Barrès, théoricien d'un nationalisme romantique basé sur l'ego, Maurras dit vouloir baser sa conception du nationalisme sur la raison plus que sur les sentiments, sur la loyauté et sur la foi. Mais Maurras place très haut la pensée de Maurice Barrès car elle serait selon lui le fruit d'une évolution profonde partant des doutes et des confusions du moi. Elle aurait pris peu à peu conscience de la nation, de la tradition et de la sociabilité, qui la déterminent et l'élèvent : le culte du moi aboutit à une piété du nous[G 67].

Pour Maurras comme pour tous les théoriciens de la Contre-Révolution, Burke, Maistre, Hippolyte Taine, la nature se confond avec l'histoire. Lorsqu'il écrit que les sociétés sont « des faits de nature et de nécessité », il veut dire qu'il faut se conformer aux leçons de l'histoire : « Notre maîtresse en politique c'est l'expérience. »

De telles affirmations se retrouvent chez d'autres auteurs anti-modernes, mais ce qui distingue Maurras de Maistre et des théocrates sur ce plan, c'est le recours à la biologie ; ici se manifeste l'influence du comtisme et du darwinisme. Un des développements de Mes idées politiques est intitulé « De la biologie à la politique ». Si Maurras préconise le recours à la monarchie, ce n'est nullement parce qu'il croit au « droit divin des rois ». Il ne prend pas en compte cet argument théologique et prétend ne recourir qu'à des arguments scientifiques : la biologie moderne a découvert la sélection naturelle, c'est donc que la démocratie égalitaire est condamnée par la science. Les théories transformistes mettent au premier plan le principe de continuité : le meilleur régime pour incarne la continuité nationale serait donc la monarchie selon Maurras.

Pour Maurras, l'État est menacé de perdre l'indépendance de son pouvoir de décision et de son arbitrage. Il lui manque d'être ab-solutus, sans lien de dépendance avec des partis qui tendent à compromettre le service qu'il doit rendre à l'ensemble de la nation et non à l'une ou l'autre de ses composantes[G 68]. Sa conception du bien commun et de la raison d'État doit aussi à une certaine lecture de saint Thomas d'Aquin et de l'encyclique Diuturnum illud que ses maîtres d'Aix avaient publiée dans La Semaine religieuse et ainsi commentée : « Une société ne peut exister ni être conçue sans qu'il y ait quelqu'un pour modérer les volontés de chacun de façon à ramener la pluralité à une sorte d'unité, et pour leur donner l'impulsion, selon le droit et l'ordre, vers le bien commun »[G 68].

D'où la position centrale du nationalisme intégral dans ses idées politiques. Celles-ci sont les bases de son soutien tant au royalisme français qu'à l'Église catholique et au Vatican. Cependant, il n'avait aucune loyauté personnelle envers la maison d'Orléans, et était un agnostique convaincu jusqu'à son retour au catholicisme à la fin de sa vie[172] - [G 61] - [173].

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Hostilité à l'Allemagne

Maurras et Léon Daudet à la fête nationale de Jeanne d'Arc et du patriotisme, Paris, place Saint-Augustin, .

Le nationalisme de Charles Maurras est fondamentalement germanophobe ; Maurras, comme Fustel de Coulanges, était très hostile à l'idée de l'origine franque de la noblesse française et à la tendance à écrire l'histoire de France selon la méthode allemande[G 69]. La méfiance à l'égard de l'Allemagne se traduit par une vigilance sur la politique de ce pays ; Walter Benjamin note à cet égard que « l’orientation de l’Action française lui semble finalement la seule qui permette sans s’abêtir, de scruter les détails de la politique allemande »[209].

Cette hostilité à l'Allemagne induit une méfiance à l'égard de tout ce qui peut détourner la France de la Revanche ; en particulier, Maurras est opposé aux conquêtes coloniales de la Troisième République ; le nationalisme maurrassien n'est pas impérialiste et Maurras se décrira à Barrès, comme un « vieil adversaire de la politique coloniale »[G 70].

Les dirigeants de l'Action française défilant lors de la fête de Jeanne d'Arc, le .

Par ailleurs, le nationalisme maurrassien n'est pas antibritannique ; Maurras s'inquiète ainsi de l'antibritannisme qui pourrait détourner de la Revanche[G 70]. Maurras admire l'élan vital de l'Angleterre qui concilie sagement le cosmopolitisme et le « mieux défendu des nationalismes ». Il rappelle son goût ancien et très vif pour Shakespeare qu'en 1890, il avait nommé un « grand Italien », tant son œuvre est selon lui mue par la tradition latine et par Machiavel. Le peuple anglais lui apporte une image de ce que les Français ne sont plus, fiers dans leur roi d'être ce qu'ils sont[G 71] : « C'est qu'en Angleterre les choses sont à leur place »[210].

La théorie nationale de Maurras rejette le messianisme et l'ethnicisme que l'on retrouve chez les nationalistes allemands héritiers de Fichte[G 70]. La nation qu'il décrit correspond à l'acception politique et historique de Renan dans Qu'est-ce qu'une nation ?, aux hiérarchies vivantes que Taine décrit dans Les Origines de la France contemporaine, aux amitiés décrites par Bossuet[G 72].

Le nationalisme maurrassien se veut un réalisme opposé aux « idéalismes naïfs » et « utopies internationalistes » qui par leur irréalisme sont des pourvoyeurs de cimetières[G 66].

Le nationalisme d'Action française est à la fois militariste, c'est-à-dire pour le renforcement permanent de l'armée afin que dans l'éventualité d'une guerre, la nation soit victorieuse et souffre le moins possible, mais pacifiste, c'est-à-dire qu'économe du sang français, elle ne prône la guerre que si la France est en position de l'emporter et pour éviter un péril grave pour elle. L'Action française ne sera pas favorable au déclenchement des hostilités, ni en 1914, ni en 1939, la France n'étant pas prête pour gagner selon elle ; en revanche, elle prônera une intervention militaire en 1936 contre l'Allemagne afin d'empêcher qu'elle ne devienne dangereuse et conquérante. Pour l'Action française, ce ne sont pas les nationalismes qui sont fauteurs de guerre mais les impérialismes[G 73].

Maurras et la colonisation

Maurras est hostile à l'expansion coloniale impulsée par les gouvernements républicains qui détourne de la Revanche contre l'Allemagne et disperse ses forces ; de plus, il est hostile à la politique jacobine et républicaine d'assimilation qui vise à imposer la culture française à des peuples ayant leur propre culture. Comme Lyautey, il pense qu'il faut faire aimer la France et non imposer la culture française au nom d'un universalisme abstrait[211]. Cette dernière conception attire à lui des faveurs dans les élites des peuples colonisés ; ainsi, Ferhat Abbas, est d’abord un Algérien maurrassien : il est le fondateur de L’Action algérienne, organe se réclamant du nationalisme intégral[212] et se battant pour l’adoption de propositions concrètes : toutes vont dans le sens de la démocratie locale et organisée, la seule forme de démocratie pour laquelle Maurras militait, parce que d’après lui, elle est la seule vraiment réelle : autonomie des corporations indigènes locales et régionales, autonomie en matière de réglementation sociale et économique, suffrage universel dans les élections municipales, large représentation de corporations, des communes, des notables et chefs indigènes, constituant une assemblée auprès du gouvernement français : « En 1920, écrit Abbas, les hommes de ma génération avaient vingt ans, personnellement je me mis à penser que l’Algérie ressemblait à la France d’ancien régime à la veille de 1789. Il n’y a rien dans le Livre saint qui puisse empêcher un Algérien musulman d’être nationalement un Français […] au cœur loyal conscient de sa solidarité nationale »[213]. Parmi l’élite musulmane d’Algérie, Ferhat Abbas n'est pas le seul soutien de l’Action française : on compte parmi eux Hachemi Cherief, qui sera plus tard le conseiller juridique de Mohammed V et l’avocat de Ben Bella, ainsi que des Kabyles, gênés par la prépondérance arabe et attirés par la vision décentralisatrice de Charles Maurras[212]. Pendant ses deux voyages en Algérie, en 1935 et 1938, Maurras est surtout proche des colons de toute condition et apprécie leur esprit pionnier, leur attachement aux valeurs traditionnelles et à la « terre éternelle » ; même l'immigration espagnole, nombreuse dans l'ouest du pays, lui paraît le signe d'une fusion harmonieuse des peuples latins[214]. Sans pour autant se déclarer en faveur du droit de vote des « indigènes d’Algérie », pour Maurras la solution réside dans une refondation politique : « Il suffit de remettre la souveraineté où elle est, où il faut qu’elle soit, entre les mains de notre dynastie historique, pour qu’il devienne possible et facile de faire aux vaillants indigènes d’Algérie, qui se sont signalés par tant de services militaires sous les plis du drapeau français, une place digne d’eux dans notre cité : ils seront comme nous, sujets du roi de France, ils n’y usurperont aucune autorité. »[215]. Dans Pages africaines, récit de son voyage en Algérie en 1935, publié en 1940, il considère que « le vrai statut moral des rapports entre Arabes, Berbères et Français nous semble être inscrit d'un trait simple et pur : la cordialité entre humains. »[216].

Maurras et le fascisme

Dès le début de la dictature fasciste en Italie, l'Action française fait partie du courant qui « approuve non seulement les objectifs du fascisme, mais encore ses méthodes »[217]. Le 13 octobre 1935, hostile aux sanctions de la SDN contre l'Italie qui vient d'attaquer l'Éthiopie, Maurras appelle à « couper le cou » à « ceux qui poussent à la guerre »[218]. Selon François Huguenin, comprendre la position de Maurras face au fascisme nécessite de prendre en compte trois ordres de préoccupation autonomes parfois confondus : celui de la politique extérieure, celui de l'idéologie, celui de la réussite révolutionnaire[219].

Sur le plan de la technique de la prise de pouvoir, les maurrassiens seront impressionnés par la capacité du fascisme à mettre fin au « désordre démocratique libéral »[219].

Sur le plan de la politique extérieure, Maurras ne cessera de prôner face au péril allemand une union latine englobant la France, l'Italie, l'Espagne et le Portugal[220]. En 1935, Maurras s'opposera aux sanctions contre le régime fasciste pour empêcher de pousser Mussolini à s'allier avec Hitler[220], alors que Mussolini souhaitait initialement contrer l'expansion du national-socialisme en liaison avec les alliés de l'Italie pendant la Première Guerre mondiale comme la France. L'idéologie ne dicte par cette volonté d'alliance orientée contre l'Allemagne qui explique la discrétion des critiques de Maurras contre le fascisme italien, critiques pourtant contenues dans l'anti-étatisme de Maurras.

Sur le plan idéologique, Maurras met en garde contre une trop grande admiration de Mussolini et sa position évolue avec l'évolution du fascisme ; au tout début du fascisme, avant le développement de l'étatisme et la théorisation par le fascisme du totalitarisme, Maurras souligne la parenté entre certaines de ses idées et celles du mouvement de Mussolini[221] ; mais dès 1928, il écrit[222] : « C'est la naïveté courante. Ceux qui la formulent et la propagent innocemment ne se rendent pas compte qu'une action d'ordre et de progrès comme celle du fascisme italien suppose une base solide et stable, que la Monarchie fournit et qu'un certain degré d'aristocratie, ou, si l'on veut, d'antidémocratie doit encore la soutenir. » Comme Massis, Maurras s'inquiétera des lois scolaires du fascisme[223]. Quand en 1932, Mussolini déclare qu'« en dehors de l'État, rien de ce qui est humain ou spirituel n'a une valeur quelconque », Maurras dénonce une conception aux antipodes de sa pensée : rappelant le double impératif de « fortifier l'État » et d'« assurer la liberté des groupes sociaux intermédiaires », il réaffirme combien les partisans du nationalisme intégral ne sont pas étatistes[224].

Le souci de ménager l'Italie pour éviter qu'elle ne s'engage militairement avec l'Allemagne et l'admiration de la réussite d'un coup de force tranchant avec l'impuissance des nationalistes français expliqueraient la faible insistance à souligner les divergences importantes avec le fascisme italien[225].

Charles Maurras, dans sa réflexion centrée sur la France, n'a jamais pris la peine de réfuter les expériences politiques étrangères, ce qui vaut pour le marxisme comme pour le fascisme et l'Action française s’accommodera pour l'étranger de régimes dont elle ne voudrait pas pour la France[226]. C'est à un de ses disciples, Thierry Maulnier, que reviendra de dénoncer le fascisme, comme si l'attraction fasciste était plus sensible pour un homme de sa génération que pour un homme comme Maurras ; Thierry Maulnier multipliera dans le quotidien de Maurras ou dans d'autres publications les écrits contre le fascisme, « ce collectivisme autoritaire, religieux, total et désolant » et la « civilisation française »[227]. De façon générale, nombre de maurrassiens ont affirmé que la pensée de Maurras les avaient prémunis de l'attraction du fascisme ; dans les années 1990, Raoul Girardet dira : « Même ébréchée, la doctrine maurrassienne constituait à cet égard une barrière solide : la conception totalitaire de l'État et de la société lui était complètement étrangère »[228].

Maurras et le national-socialisme

La condamnation du national-socialisme se fonde sur une série d'arguments se situant à différents niveaux d'analyse.

Maurras dénonce le racisme depuis le début de son activité politique : « Nous ne pouvions manquer, ici d’être particulièrement sensibles : le racisme est notre vieil ennemi intellectuel ; dès 1900, ses maîtres français et anglais, Gobineau, Vacher de Lapouge, Houston Chamberlain, avaient été fortement signalés par nous à la défiance des esprits sérieux et des nationalistes sincères »[229]. Charles Maurras écrit en 1933 : « Nous ne croyons pas aux nigauderies du racisme[230]. » Maurras traite de « basses sottises » les idées de Joseph de Gobineau et de Georges Vacher de Lapouge et rappelle : « J'ai, pour mon compte, toujours pris garde de séparer les réflexions sur l'hérédité politique et économique d'avec les généralisations vagues, aventureuses et captieuses sur la stricte hérédité physiologique »[231]. Pour Maurras : « Nous sommes des nationalistes. Nous ne sommes pas des nationalistes allemands. Nous n'avons aucune doctrine qui nous soit commune avec eux. Toutes les falsifications, tous les abus de textes peuvent être tentés : on ne fera pas de nous des racistes ou des gobinistes »[232]. Maurras écrit à propos du nazisme : « l’entreprise raciste est certainement une folie pure et sans issue »[233].

Maurras précise sa critique métaphysique du nazisme en soulignant ses fondements fichtéens : il dénonce l’image de l’homme allemand défini par Fichte, initiateur du narcissisme originel et fondamental où Hitler se retrouve ; Maurras insiste sur l'horreur fichtéenne d'Hitler pour le fédéralisme, sa démagogie métaphysique, son déisme à la Robespierre[234]. Maurras est un des rares à souligner la dimension et l’inversion théologique du nazisme, son imitation caricaturale et perverse d’Israël et comme Alain Besançon, il voit le national-socialisme procéder à une contrefaçon fichtéenne de la notion de peuple élu[235]. Dès le début des années 1930, Maurras et l'Action française mettent en garde contre le messianisme du nationalisme allemand dont le national-socialisme est l'expression qui accomplira jusqu'à la folie la logique dominatrice[236].

Le nationalisme de Maurras est héritier de Fustel de Coulanges et de Renan, historique et politique, on n'y trouve « ni linguisticisme, ni racisme : politique d’abord ! […] Entre tous, l’élément biologique est le plus faiblement considéré et le moins sérieusement déterminé. Dès lors, ces déterminations vagues d’une part, ces faibles déterminations d’autre part, ne peuvent porter qu’un effet : l’exaltation des fanatismes d’où sortent les exagérations que le Vatican dénonçait l’autre jour, et l’encouragement aux méprises et aux malentendus »[237].

Sa critique du national-socialisme est aussi fondée sur le fait que celui-ci est selon lui un aboutissement logique du rousseauisme et de la démagogie démocratique : dans De Demos à César, il analyse l’évolution des régimes contemporains et discerne les liens de continuité entre la société démocratique et les tyrannies bolcheviques ou nazies, le prolongement que le despote moderne fournit au moi rousseauiste, en absorbant l’individu dans la collectivité[238].

Bien qu'agnostique Maurras défend la civilisation catholique et il perçoit dans le nazisme un ennemi du catholicisme et de ses valeurs : lorsque le pape Pie XI promulgue Mit brennender Sorge, le 25 mars 1937, Maurras approuve avec enthousiasme et précise sa position : « Tous les esprits impartiaux qui ont étudié le nationalisme français, même intégral, surtout intégral, savent combien il est profondément hostile à ce que l'Encyclique d'hier appelle « la théorie du sol et du sang », théorie métaphysique, bien entendu, qui substitue aux relations normales et objectives des hommes, au jeu naturel des apports collectifs nationaux et professionnels, une distribution toute subjective fondée sur les races et sur les climats, dérivée du principe que l'Homme allemand (« all-mann ») est l'Homme par excellence, le tout de l'Homme, et de ce que Luther incarna cet Homme dans l'histoire politique et dans l'histoire des religions[239] ». Les maurrassiens dénonceront le national-socialisme à la lumière d'une critique plus générale de l'esprit allemand[240].

Sa critique du national-socialisme est aussi une critique implicite du totalitarisme. C’est la nation que Maurras défend et pas l’idolâtrie de son État : « un nationalisme n’est pas un nationalisme exagéré ni mal compris quand il exclut naturellement l’étatisme »[241]. Il discerne dans le totalitarisme une usurpation de l’État sur la société : « Quand l’autorité de l’État est substituée à celle du foyer, à l’autorité domestique, quand elle usurpe les autorités qui président naturellement à la vie locale, quand elle envahit les régulateurs autonomes de la vie des métiers et des professions, quand l’État tue ou blesse, ou paralyse les fonctions provinciales indispensables à la vie et au bon ordre du pays, quand il se mêle des affaires de la conscience religieuse et qu’il empiète sur l’Église, alors ce débordement d’un État centralisé et centralisateur nous inspire une horreur véritable : nous ne concevons pas de pire ennemi »[242].

Maurras s’inquiète de ce que certains pourraient voir dans l’Allemagne un rempart contre le communisme, il y voit un piège politique : « Les cornichons conservateurs […] qui prendraient Hitler pour un sauveur de l’ordre — de l’ordre français — sont certainement coupables d’un crime devant l’esprit au moins égal à celui de nos moscoutaires »[243]. Il note même que « l’intrigue hitlérienne est plus dangereuse que celle des Soviets »[244]. En avril 1936, Maurras dénonce le péril national-socialiste et le déclare même pire pour la France que le péril communiste : « Hitler est encore notre ennemi numéro 1. Moscou est bien moins dangereux »[78].

Maurras dénonce Hitler qu'il appelait le « chien enragé de l'Europe »[245] car son idéologie est porteuse de barbarie ; il s’en prend à la presse qui « travaille à créer pour cette gloire de primate, un cercle de respect béant et d’inhibition ahurie à l’égard du dictateur walkyrien »[G 52]. Face à la barbarie nazie, Maurras écrit : « Ce ne peut être en vain que la France a été pendant des siècles la civilisatrice et l’institutrice du monde. Elle a le devoir de ne pas renoncer à ce rôle »[246]. Hitler prépare la « barbarisation méthodique » de l'Europe[244].

Il alerte les Français sur l'eugénisme : « Le 1er janvier 1934, une certaine loi sur la stérilisation est entrée en vigueur ; si elle joue contre l’indigène du Reich, croit-on que l’étranger s’en défendra facilement[247] - [n 20] ? » Afin de mettre en garde les Français sur ce qui les attend, il réclame une traduction non expurgée de Mein Kampf, dont certains passages laissant prévoir les ambitions hitlériennes avaient été censurés dans la version française[236].

Toutefois, il écrit dans L'Action française du 28 août 1942 : « Avec toute la France, les prisonniers heureusement libérés remercient M. Hitler. »

Discours social

En dépit de l'appui mesuré et prudent qu'il donna au Cercle Proudhon, cercle d'intellectuels lancé par de jeunes monarchistes hostiles au capitalisme libéral et appelant à l’union avec le courant syndicaliste révolutionnaire inspiré par Georges Sorel[248] Charles Maurras défendit une politique sociale plus proche de celle de René de La Tour du Pin ; Maurras ne fait pas comme Georges Sorel et Édouard Berth le procès systématique de la bourgeoisie où il voit un appui possible[249]. À la lutte des classes, Maurras préfère opposer comme en Angleterre, une forme de solidarité nationale dont le roi peut constituer la clef de voûte.

À l'opposé d'une politique de masse, il aspire à l'épanouissement de corps intermédiaires librement organisés et non étatiques, l'égoïsme de chacun tournant au bénéfice de tous. Les thèmes sociaux que traite Charles Maurras sont en concordance avec le catholicisme social et avec le magistère de l’Église tout en relevant également d'une stratégie politique pour arracher à la gauche son emprise sur la classe ouvrière[250].

Comme l'Action française, le Cercle Proudhon est décentralisateur et fédéraliste, et insiste sur le rôle de la raison et de l'empirisme ; il se trouve loin de l'irrationalisme, du jeunisme du populisme, de l'intégration des masses dans la vie nationale qui caractériseront par exemple les ambitions du fascisme italien, gonflé par les conséquences sociales de la guerre[249]. Charles Maurras veilla cependant à ce que le Cercle Proudhon ne fût pas intégré à l'Action française : il rejetait en effet le juridisme contractualiste de Proudhon, qui représente pour lui un point de départ plutôt qu'une conclusion : « Je ne dirai jamais : lisez Proudhon à qui a débuté par la doctrine réaliste et traditionnelle, mais je n'hésiterai pas à donner ce conseil à quiconque ayant connu les nuées de l'économie libérale ou collectiviste, ayant posé en termes juridiques ou métaphysiques le problème de la structure sociale, a besoin de retrouver les choses vivantes sous les signes sophistiqués ou sophistiqueurs ! Il y a dans Proudhon un fort goût des réalités qui peut éclairer bien des hommes »[251].

Antisémitisme

Charles Maurras forge sa doctrine antisémite en s'inspirant notamment des écrits de son « maître à penser » René de La Tour du Pin, l'un des chefs de la droite catholique. Dans son « programme social » de 1889, La Tour du Pin envisage de « dénationaliser » les juifs français, puis il précise sa pensée en 1898, durant l'affaire Dreyfus : les juifs seraient mis sur le « même pied que les indigènes de nos colonies » ; leur nouveau statut de « sujets français », inférieur à celui des citoyens de « souche française », leur garantirait la protection des autorités tout en leur interdisant l'accès aux fonctions publiques[252]. À son tour, Maurras va prôner pour les Juifs un statut personnel les excluant des fonctions publiques[253]

Entre 1904 et 1906[254], Charles Maurras élabore sa théorie des « quatre États confédérés[n 21] » soi-disant constitutifs de « l'anti-France[254]. » Le théoricien du nationalisme intégral cible ainsi les juifs, la franc-maçonnerie et les protestants, conformément à la théorie du complot judéo-maçonnique dont « il va élargir encore le champ » en y ajoutant les « métèques », explique Pierre-André Taguieff[254]. Maurras accuse ces quatre « États confédérés » de défendre leur intérêt et non celui de la nation, tout en soumettant l'État à leur influence :

« Contre l'hérédité de sang juif, il faut l'hérédité de naissance française, et ramassée, concentrée, signifiée dans une race, la plus vieille, la plus glorieuse et la plus active possible. […] Décentralisée contre le métèque, antiparlementaire contre le maçon, traditionnelle contre les influences protestantes, héréditaire enfin contre la race juive, la monarchie se définit, on le voit bien, par les besoins du pays. Nous nous sommes formés en carré parce qu’on attaquait la patrie de quatre côtés[255]. »

Lors de la création de la Ligue d'Action française au printemps 1905, « la lutte antijuive est au cœur du combat contre la République. Jusque-là, l'AF était une association d'intellectuels qui se réunissaient au café de Flore et lançaient leurs mots d'ordre dans une revue paraissant tous les quinze jours. Dorénavant, le mouvement dispose de troupes préparées à l'agitation et au coup de poing. La doctrine est fixée, la stratégie également : ces combats prendront pour cible privilégiée les Juifs », souligne Laurent Joly[256]. Ainsi, chaque ligueur de l'Action française doit prêter un serment qui affirme notamment : « Seule, la Monarchie assure le salut public et, répondant de l’ordre, prévient les maux publics que l’antisémitisme et le nationalisme dénoncent[256]. »

Maurras affirme que dans un régime fédéraliste, la France peut être une « fédération de peuples autonomes » dans le cadre des provinces mais il ne peut en être de même pour les Juifs qui n'auraient pas de sol à eux en France car ils en possèderaient de droit un hors de France, en Palestine[257]. Maurras conçoit l'antisémitisme comme un instrument, un ressort dialectique et insurrectionnel, une idée à la fois contre-révolutionnaire et naturaliste[258], un levier qui permettrait de mobiliser les énergies contre l'installation de la démocratie libérale.

« C'était là reconnaître le caractère instrumental de l'antisémitisme dans la perspective de l'élaboration d'une identité française substantielle, émondée de ses ennemis de l’intérieur (Juifs, francs-maçons, protestants et « métèques ») », observe Taguieff[254].

Selon François Huguenin, Maurras partagerait cette vision avec des syndicalistes révolutionnaires de l'extrême gauche engagés dans la lutte insurrectionnelle[259] - [260]. Rappelant que le discours antisémite n'est pas l'apanage des courants de pensée réactionnaires ou nationalistes au moment de la naissance de l'Action française, le même auteur affirme que Jaurès et Clemenceau ont contre les Juifs des formules que « jamais Maurras n'osera »[261]. Huguenin soutient également qu'il n'y a pas chez Maurras, ni dans l'ensemble de la rédaction de L'Action française, une plus grande hostilité à la communauté juive qu'aux protestants, et qui sous-tendrait un racisme fondamental[262].

L'historien Laurent Joly objecte que François Huguenin et Stéphane Giocanti, « plus ou moins des admirateurs, des disciples de Maurras », tentent de présenter ainsi « un Maurras « light », aseptisé (…) [en] minor[ant] son antisémitisme. Celui-ci est au fondement de l'Action française, née en 1899, en pleine affaire Dreyfus. Maurras importe dans les milieux royalistes le nationalisme antisémite qui s'est cristallisé autour de Drumont. Il incarne à cet égard une ligne dure, prônant la dénaturalisation de tous les juifs français et le renvoi des étrangers. Or que nous dit-on ? Que tout le monde était antisémite à l'époque… Mais c'est faux ! L'antisémitisme de Maurras était perçu comme transgressif, et d’une violence insupportable. Par deux fois, il a été condamné pour incitation au meurtre contre des hommes politiques juifs. Et il ne sera pas moins virulent sous l’Occupation, ce qui est impardonnable[263]. »

Laurent Joly avance également que « chez Charles Maurras, la haine du Juif occupe une place prépondérante tant dans son univers mental que dans la construction politique qu’il a élaborée. Et il est exagéré de mettre, comme on le fait souvent, son antisémitisme sur le même plan que ses sentiments à l’égard des protestants et des francs-maçons, et de ne le considérer que comme une conséquence de son idéologie antilibérale et monarchiste. Habituellement virulent contre ses adversaires politiques, Maurras peut modérer son point de vue vis-à-vis des protestants, comme les Monod par exemple. Il ne manifestera jamais la même clémence à l’égard d’un Juif. Ce dernier peut rendre des services à la nation, il ne sera jamais un vrai Français. » Laurent Joly s'appuie en particulier sur deux citations de Maurras. L'une à propos des protestants : « Nous n’attaquons pas les protestants ; nous nous défendons contre eux, ce qui n’est pas la même chose. Nous n’avons jamais demandé d’exclure les protestants de l’unité française, nous ne leur avons jamais promis le statut des Juifs. » L'autre à propos des francs-maçons et des protestants à la fois : « Nous en avons à leur gouvernement et à leur tyrannie, non à leur existence [contrairement aux Juifs] »[264]. S. Giocanti argue que Charles Maurras eut des propos positifs sur des politiciens juifs comme Benjamin Disraeli[265], mais Disraeli s'était converti au christianisme.

Maurras priorise ainsi « la formule antijuive », selon l'expression utilisée par Maurice Barrès dans un « article-programme » publié dans Le Figaro en février 1890[266]. Dans L'Action française du , le chef de l'Action française admet que :

« Tout paraît impossible, ou affreusement difficile, sans cette providence de l'antisémitisme. Par elle tout s'arrange, s'aplanit et se simplifie[267]. »

Déclaration signée en 1936 par les adhérents à la Ligue d'Action française. Ce serment revendique le nationalisme et l'antisémitisme.

Bien que Maurras ne fasse pas de la race « le facteur central de l'histoire et de la géopolitique de l'Europe », Carole Reynaud-Paligot note que les « représentations essentialistes » imprègnent sa vision d'une « race française » (qu'il dote de « fondements biologiques »), de même que sa germanophobie. Le dirigeant de l'Action française déploie un argumentaire consistant à dénier le caractère raciste de son « antisémitisme d'État », qu'il prend soin de distinguer d'un « antisémitisme de peau » qui relèverait soi-disant d'une « tradition de brutalité » inhérente aux Allemands. Son antigermanisme « renforc[e] sa volonté de se démarquer d'approches trop biologisantes » : ainsi, lorsqu'il reprend dans son Dictionnaire politique et critique le texte de son article paru le 26 mai 1895 dans La Gazette de la France, il en supprime le passage « Et moi aussi je suis raciste. ». Or l'historienne souligne que « Laurent Joly a pourtant montré que Maurras et ses compagnons de l'Action française adhèrent pleinement à une conception naturalisante de la judéité et qu'ils soutiennent que l'hérédité raciale, en assurant la transmission des caractères intellectuels et moraux, rend le Juif inassimilable. Cette déclaration de Maurras au début de l'Occupation en témoigne : « J'ai vu ce que devient un milieu juif, d'abord patriote et même nationaliste, quand la passion de ses intérêts proprement juifs y jaillit tout à coup : alors, à coup presque sûr, tout change, tout se transforme, et les habitudes de cœur et d'esprit acquises en une ou deux générations se trouvent bousculées par le réveil des facteurs naturels beaucoup plus profonds, ceux qui viennent de l'être juif »[268]. »

Hommage rendu à Édouard Drumont dans l’Almanach de l'Action française en 1918 : « Tout le mouvement d'antisémitisme auquel l’Action française entre autres doit une partie de ses origines, est issu de l'essor de Drumont. »

Par conséquent, en dépit des tentatives de Maurras visant à distinguer son antisémitisme d'État de « l'antisémitisme de peau », autrement dit l'antisémitisme biologique[n 22], cette différence demeure théorique selon Ralph Schor : « dans la pratique, le maître à penser de l'Action française ne différait guère des autres antisémites[273]. »

En 1907, l'Action française tente en particulier de racheter La Libre Parole, journal de Drumont, car le mouvement royaliste « ambitionne de se poser en successeur légitime du père de La France juive[274]. » En 1911, Maurras qualifie Drumont de « maître génial » et de « grand Français » qui a posé « la difficile question » de « l'antisémitisme d'État. » Maurras ajoute : « Le Juif d’Algérie, le Juif d’Alsace, le Juif de Roumanie sont des microbes sociaux. Le Juif de France est microbe d'État : ce n’est pas le crasseux individu à houppelande prêtant à la petite semaine, portant ses exactions sur les pauvres gens du village ; le Juif d’ici opère en grand et en secret[275]. » Selon Jean Touchard et Louis Bodin, l'antisémitisme de Charles Maurras, de L'Action française en général, et de quelques autres auteurs d'extrême droite atteint « en 1936 un degré de violence qui fait paraître modérés les écrits d'Édouard Drumont »[276].

Lors de la Première Guerre mondiale, Maurras déclare respecter l'Union sacrée en honorant les « héros juifs » tombés au champ d'honneur[n 23], tout en réaffirmant son antisémitisme dont les « principes [posés] avant cette guerre » consistent à se lamenter « de voir les Juifs gouverner la France[278]. » Les historiens Léon Poliakov[279] et Michel Dreyfus résument cette position ainsi : « pour L'Action française de Maurras un bon Juif est d'abord un Juif mort au combat[280]. » Du reste, cela n'empêche pas Léon Daudet de rééditer en 1915, sous le titre L'avant-guerre, son ouvrage antisémite publié initialement en 1912, L'espionnage juif allemand en France[281]. Dénonçant les influences allemandes sur le tsar Nicolas II et son épouse, Maurras évoque « le danger juif allemand » en 1916. Néanmoins, L'Action française ne fait pas allusion aux Juifs lors de la révolution russe de 1917. C'est à partir de 1919 que Maurras reprend à son compte le thème du « bolchevisme juif », qu'il qualifie de « judéo-germano-wilsonien »[282]. La théorie du complot juif permet également à L'Action française d'« expliquer » l'abandon de la France par ses anciens alliés anglo-saxons, leitmotiv exploité dans l'ouvrage Le règne d'Israël chez les Anglo-Saxons (1921) par le maurrassien Roger Lambelin, auteur de la préface française des Protocoles des Sages de Sion[283].

Maurras n'écrit pas de livre spécifique sur la « question juive » mais dénonce régulièrement « l'influence juive » en recourant à la violence verbale allant jusqu'à la menace de mort explicite. Dans son quotidien L'Action française, Maurras publie ainsi une lettre ouverte à Abraham Schrameck, ministre de l'Intérieur, en 1925 (après l'assassinat de plusieurs dirigeants de l'Action française comme Marius Plateau) :

« De vous, rien n'est connu. Mais vous êtes le Juif. Vous êtes l'Étranger. Vous êtes le produit du régime et de ses mystères. Vous venez des bas-fonds de la police, des loges et, votre nom semble l'indiquer, des ghettos rhénans. Vous nous apparaissez comme directeur des services pénitentiaires vers 1908 ou 1909. Là, vous faites martyriser Maxime Real del Sarte et ses compagnons coupables d'avoir milité pour la fête de Jeanne d'Arc. Vos premiers actes connus établissent votre fidélité à la consigne ethnique donnée par votre congénère Alfred Dreyfus le jour de sa dégradation : Ma race se vengera sur la vôtre. Votre race, une race juive dégénérée, car il y a des Juifs bien nés qui en éprouvent de la honte, la race des Trotsky et des Krassine, des Kurt Eisner et des Bela Kuhn, vous a chargé maintenant, d'organiser la révolution dans notre patrie. (…) C'est sans haine comme sans crainte que je donnerai l'ordre de verser votre sang de chien s'il vous arrive d'abuser de la force publique pour ouvrir les écluses de sang français sous les balles et les poignards de vos chers bandits de Moscou[56]. »

Léon Blum est la cible de plusieurs articles antisémites de Maurras.

Cet article lui vaut d'être condamné pour menace de mort. Il récidive en 1935 et 1936 contre Léon Blum, avant comme après la nomination de celui-ci à la présidence du Conseil :

« Ce Juif allemand naturalisé, ou fils de naturalisé [la famille Blum était française de plein droit depuis 1791], qui disait aux Français, en pleine Chambre, qu’il les haïssait [Blum n'a jamais dit cela[284]], n’est pas à traiter comme une personne naturelle. C'est un monstre de la République démocratique. Et c’est un hircocerf de la dialectique heimatlos. Détritus humain à traiter comme tel. (…) L’heure est assez tragique pour comporter la réunion d'une cour martiale qui ne saurait fléchir.
M. Reibel demande la peine de mort contre les espions. Est-elle imméritée des traîtres ?
Vous me direz qu'un traître doit être de notre pays : M. Blum en est-il ?
Il suffit qu’il ait usurpé notre nationalité pour la décomposer et la démembrer. Cet acte de volonté, pire qu'un acte de naissance, aggrave son cas.
C'est un homme à fusiller, mais dans le dos[49]. »

« C'est en tant que Juif qu'il faut voir, concevoir, entendre, combattre et abattre le Blum.
Ce dernier verbe paraîtra un peu fort de café : je me hâte d'ajouter qu'il ne faudra abattre physiquement Blum que le jour où sa politique nous aura amené la guerre impie qu'il rêve contre nos compagnons d'armes italiens. Ce jour-là, il est vrai, il ne faudra pas le manquer. (…) Si, par chance, un État régulier a pu être substitué au démocratique Couteau de cuisine, il conviendra que M. Blum soit guillotiné dans le rite des parricides : un voile noir tendu sur ses traits de chameau[60]. »

« La France sous le Juif », manchette de L'Action française du 5 juin 1936.

Certes, Maurras ne réservait pas, dans le deuxième cas, sa menace au seul Léon Blum mais contre l'ensemble des parlementaires partisans de sanction contre l'Italie fasciste, qui avait envahi l'Éthiopie, en violation de la charte de la Société des Nations[n 24] ; mais, outre que seul Léon Blum fut victime d'une agression physique par des maurrassiens (en février 1936), du 6 au 21 juin 1936, au moins sept manchettes de L'Action française sont des attaques antisémites visant le gouvernement du Front populaire[276]. De même, après l'attaque verbale de Xavier Vallat contre Léon Blum, ce fut essentiellement la presse d'Action française, Maurras en tête, qui fit de la surenchère antisémite[285]. Déjà, en 1911, la plupart des articles publiés par Maurras cette année-là contenaient des attaques antisémites et une vingtaine étaient spécifiquement consacrés à « la question juive[286]. »

En 1938, l'antisémitisme de Maurras franchit un palier lorsqu'il écrit : « Le Juif veut votre peau. Vous ne la lui donnerez pas ! Mais nous l’engageons à prendre garde à la sienne, s’il lui arrive de nous faire accéder au massacre universel »[287].

Charles Maurras reçut des témoignages de fidélité de juifs français, comme celui du sergent Pierre David que Maurras nommera le héros juif d'Action française[288]. D'autres juifs deviendront des ligueurs d'Action française comme Marc Boasson, Georges et Pierre-Marius Zadoc, Raoul-Charles Lehman, le professeur René Riquier, les écrivains Louis Latzarus et René Groos[277].

Certains maurrassiens théorisent l'antisémitisme ; ainsi, Octave Tauxier, pour qui l'antisémitisme, en manifestant que les communautés d'intérêt existent, agissent et vivent pour leur compte, ruine par les faits la théorie révolutionnaire jacobine refusant l'homme de chair mais concevant un homme abstrait comme une unité raisonnable forçant sa nature rebelle aux groupements que seule la tradition rend stable[289]. Léon de Montesquiou déclare : « Le Juif est l'agent destructeur de notre foi et de la patrie. Nous sommes prêts à sacrifier nos existences pour débarrasser la France des Juifs ». Léon Daudet ajoute : « La guerre est déclarée comme en 1870. […] C’est une guerre franco-juive. Une première bataille a été livrée, elle a été gagnée ; il s’agit de continuer »[290]. Daudet écrit aussi, dans le contexte du Front populaire :

« Du fait de la République, régime de l’étranger, nous subissons actuellement trois invasions : la russe, l’allemande, et notamment la juive allemande, l’espagnole. La crapule de ces trois nations s’infiltre et s’installe chez nous. Elle y pille, elle y corrompt et elle y assassine. Ce mouvement immonde, et qui va en accélérant, annonce la guerre. Il date de loin, de l’affaire du traître Dreyfus. La domination d’un Juif rabbinique, Léon Blum, totalement étranger à nos mœurs, coutumes et façons de comprendre et de ressentir, multiplie actuellement le danger par dix »[291].

D’autres maurrassiens seraient indifférents à ce thème[262] - [n 25].

Maurras et le catholicisme

Les rapports de Charles Maurras avec le catholicisme et avec l'Église catholique ont évolué avec le temps.

Jeunesse

Dans son enfance et jusqu'à son adolescence, il reçoit une éducation religieuse marquée par la foi de sa mère qu'il partage. Lors de son adolescence, sa surdité et la révolte qu'elle génère puis la difficulté à consolider sa foi par des arguments rationnels en plus de témoignages de la tradition chrétienne contribuent à la lui faire perdre.

Lors de ses premières années à Paris, désireux de préciser sa position sur le plan religieux, il noue un dialogue avec des théologiens, des philosophes, des prêtres, des séminaristes qui cherchent à le convertir mais n'y parviennent pas. Dans la dernière décennie du XIXe siècle, la déception qui en découle conjugué à une hostilité croissante à l'esprit et l'influence hébraïques le conduisent à publier des textes empreints d'hostilité au christianisme au sein duquel il prétend distinguer ce qui relève de l'esprit juif et ce qui relève de l'esprit gréco-latin. Il ne croit pas aux dogmes de l'Église, ni aux Évangiles, écrits, selon son expression, « par quatre obscurs juifs »[293]. Cependant, il persiste à admirer et aimer l'Église catholique pour être parvenue à concilier bien des « dangereux apprentissages » de la Bible dont il soupçonnait qu'ils avaient conduit à l'émergence des erreurs révolutionnaires en France et en Europe. L'interprétation de Maurras à propos de la Bible fut alors critiquée fermement par bien des membres du clergé. Dans Le Chemin de Paradis, il guerroie contre la version la plus révolutionnaire du christianisme. Maurras s'avouant alors impuissant à croire affirmait néanmoins respecter la croyance religieuse : « Je n'ai pas été « dédaigneux de la foi » ! On ne dédaigne pas ce qu'on a tant cherché. On ne traite pas sans respect la faculté de croire quand on l'estime aussi naturelle à l'homme et plus nécessaire que la raison »[294].

Naissance de l'Action française

Dans les années 1900, sans retrouver la foi, Maurras se rapproche du catholicisme et renforce son soutien à l'Église catholique.

Il subit tout d'abord l'influence de Léon de Montesquiou, de Louis Dimier, de prêtres comme le bénédictin Dom Besse et de l'abbé de Pascal, tous désireux de le rapprocher du catholicisme voire de faire renaître en lui la foi.

Il s'appuie sur le philosophe positiviste Auguste Comte : il aurait en effet eu une « nuit d'extase » après la lecture de la Synthèse subjective de ce philosophe[295]. Comte lui permet d'étudier la réalité sociale, de penser la politique en l'absence de foi, tout en admirant le catholicisme. Il n'y a alors plus sous sa plume d'attaques indirectes contre le christianisme, d'autant que sa mère très croyante lit tout ce qu'il écrit ; il perçoit dans la morphologie historique du catholicisme un principe de paix et de civilisation[296]. Maurras voit dans l'Église le grand principe d'ordre qui arrache l'homme à l'individualisme, qui discipline les intelligences et les sensibilités. Maurras, amenant des Français de toutes origines à raisonner ainsi, en a conduit plusieurs à considérer le catholicisme comme un bien pour la France, voire à retrouver la foi.

Il s'appuie sur le lien historique entre le catholicisme, la tradition et l'identité françaises ; n'ayant jamais cessé de soutenir l'influence et le prestige de l'Église catholique comme composante politique, parce qu'elle était intimement liée à l'Histoire de France et que sa structure hiérarchique, et son élite cléricale reflétaient l'image qu'il se faisait de la société idéale. Il considérait que l'Église devait être le mortier chargé d'unir la France, et la chaîne chargée de lier tous les Français. L'Action française se veut ouverte à tous : croyants, positivistes, sceptiques ; mais elle affirmait clairement que tout Français patriote se devait de défendre le catholicisme comme religion historique du peuple français[297].

Il s'engage fougueusement et sincèrement aux côtés de l'Église chaque fois que celle-ci se sent persécutée : affaire des fiches, interdiction aux religieux d'enseigner, Inventaires, interventions de l'armée dans les monastères, exil de milliers de moines et de religieux, prescription aux instituteurs de dénigrer le christianisme renvoyé avec la monarchie dans les ténèbres de l'histoire de France[296].

Il s'en prend au laïcisme, qui n'est pas une pure neutralité, mais procède d'une métaphysique d'État intolérante, véritable théologie « d'autant plus ardente, fanatique, féroce, qu'elle évite de prononcer le nom de Dieu »[296].

Il laisse voir dans ses écrits que son silence sur la foi et le surnaturel est suspensif et qu'il respecte la foi en autrui : « La libre pensée ne consiste qu'à délier l'individu, elle dit : de ses chaînes ; nous disons : de ses points d'appui, de ses aides et de ses contreforts »[297].

Ces prises de position firent que Maurras fut suivi par bien des monarchistes : à la suite des inventaires, deux officiers chassés de l'armée, Bernard de Vesins et Robert de Boisfleury rejoignent l'Action française comme le jeune Bernanos qui assimile les Camelots du roi à une nouvelle chevalerie chrétienne[298]. Beaucoup d'ecclésiastiques, dont des assomptionnistes, sont séduits par le mouvement.

En dépit de différences essentielles, il y a une coïncidence entre la métaphysique de l'Ordre chez Maurras et celle de saint Thomas. Ce soutien de milieux catholiques joua un rôle important dans le rayonnement de l'Action française et attira vers Maurras des théologiens comme Jacques Maritain. Dès sa naissance, l'Action française est apparue comme l'alliée du catholicisme antimoderne et du renouveau thomiste et comme un recours face à l'anticléricalisme croissant des républicains. L'Action française est nourrie par le catholicisme social d'Albert de Mun et de René de La Tour du Pin et Charles Maurras loua le Syllabus, catalogue des erreurs modernes établi en 1864 par le pape Pie IX[299].

Rapport avec le Sillon

En 1904, Maurras regarda avec sympathie la création par trois anciens du collège Stanislas à Paris, dont Marc Sangnier, du mouvement du Sillon afin de former des groupes pour faire rayonner les forces morales et sociales du catholicisme. Un rapprochement entre le Sillon et l'Action française eut alors lieu : pour Firmin Braconnier, les deux organisations ont le même but : le perfectionnement moral, intellectuel et social de la personnalité humaine rejetées ensemble par la gauche[298]. Mais en dépit d'échanges de haut niveau et au début fort aimables, les deux hommes ne s'entendirent pas, Marc Sangnier voulant opposer le positivisme et le christianisme social, ce que Maurras percevait comme un faux dilemme car :

  • retrouver les lois naturelles par l'observation des faits et par l'expérience historique ne saurait contredire les justifications métaphysiques qui en constituent pour les chrétiens le vrai fondement ; car le positivisme, pour l'Action française, n'était nullement une doctrine d'explication mais seulement une méthode de constatation ; c'est en constatant que la monarchie héréditaire était le régime le plus conforme aux conditions naturelles, historiques, géographiques, psychologiques de la France que Maurras était devenu monarchiste : « Les lois naturelles existent, écrivait-il ; un croyant doit donc considérer l'oubli de ces lois comme une négligence impie. Il les respecte d'autant plus qu'il les nomme l'ouvrage d'une Providence et d'une bonté éternelles. » ;
  • le christianisme social se retrouve davantage dans l'Action française que dans le Sillon : s'il y a de nombreux chrétiens sociaux dans les rangs de l'Action française, c'est précisément car les chrétiens sociaux ont toujours préconisé « l'organisation d'institutions permanentes, capables de secourir la faiblesse des hommes » ; or, pour Maurras, Marc Sangnier croyait qu'il fallait d'abord donner à l'individu une âme de saint avant de vouloir modifier les institutions. Dans cette optique Marc Sangnier est « le continuateur du préjugé individualiste » qui avait engendré la question sociale et contre lequel les catholiques sociaux, de Villeneuve-Bargemont à Albert de Mun et au marquis de La Tour du Pin avaient toujours réagi.

Le fondateur du Sillon s'expliqua sur sa conception de la démocratie, régime qui doit « porter au maximum la conscience et la responsabilité de chacun ». Il se défendait d'avoir voulu se fonder sur une unanimité de saints, une minorité lui suffisait : « Les forces sociales sont en général orientées vers des intérêts particuliers, dès lors, nécessairement contradictoires et tendant à se neutraliser […] Il suffit donc que quelques forces affranchies du déterminisme brutal de l'intérêt particulier soient orientées vers l'intérêt général pour que la résultante de ces forces, bien que numériquement inférieure à la somme de toutes les autres forces, soit pourtant supérieure à leur résultat mécanique. » Et quel sera le centre d'attraction ? « Le Christ est pour nous cette force, la seule que nous sachions victorieusement capable d'identifier l'intérêt général et l'intérêt particulier. » Et d'expliquer : « plus il y aura de citoyens conscients et responsables, mieux sera réalisé l'idéal démocratique. » Cet optimisme suscita les objections renouvelées de Maurras, pour qui :

  • Rêver, en oubliant le péché originel, d'un État dont le fondement serait la vertu est irréaliste. Si la vertu est nécessaire et si la chrétienté a suscité de grands élans d'héroïsme et de sainteté, ce fut dans le respect de la « vénérable sagesse de l'Église », laquelle, sachant que la seule prédication du bien ne saurait suffire à transformer une société, a toujours voulu multiplier, pour encadrer l'individu, les habitudes, les institutions, les communautés qui le portaient à surmonter ses penchants égoïstes ; pour Maurras, s'il faut des élites morales, il faut aussi des chefs capables, eux, par la place qu'ils occupent, de savoir exactement en quoi consiste l'intérêt général car sinon les efforts de l'élite de saints risquent d'être vains ;
  • « Être sublime à jet continu, héroïque à perpétuité, tendre et bander son cœur sans repos et dans la multitude des ouvrages inférieurs qui, tout en exigeant de la conscience et du désintéressement veulent surtout la clairvoyance, l'habileté, la compétence, la grande habitude technique, s'interdire tous les mobiles naturels et s'imposer d'être toujours surnaturel, nous savons que cela n'est pas au pouvoir des meilleurs ». Maurras voit dans la démocratie de Sangnier une autre forme de celle de Rousseau, qui pensaient que le perfectionnement moral par l'accroissement de la liberté individuelle rendrait les hommes de plus en plus aptes au seul régime démocratique : « Si la république réclame beaucoup de vertu de la part des républicains, cela tient à ce qu'elle est un gouvernement faible et grossier […] et que sa pauvreté naturelle ne saurait être compensée que par la bonté des individus. »

Ainsi, si Charles Maurras et Marc Sangnier cherchèrent à surmonter leurs différends, la tentative échoua. Les partisans du Sillon verront dans la condamnation de leur mouvement par le Pape Pie X, qui l'accusait de « convoyer la Révolution l'œil fixé sur une chimère », le résultat de l'influence de théologiens proches de l'Action française[300]. À leur tour les maurrassiens prétendront que les hommes du Sillon se vengèrent en cherchant à faire condamner l'Action française. L'essentiel de ses échanges entre les deux hommes fut publié dans Le Dilemme de Marc Sangnier[301].

Rapport avec la papauté : la condamnation de l'Action française et sa levée

Sous Léon XIII, et en dépit du ralliement de 1892, essentiellement tactique, l'Église catholique continuait de se méfier de la République française, régime né de la Terreur, dont les soutiens travaillaient à l'extirpation de la religion de la sphère sociale et politique[302]. La doctrine politique de Léon XIII n'excluait pas la monarchie comme forme possible de régime, conformément à la théologie de saint Thomas d'Aquin qui la recommande et sur laquelle s'appuie largement le magistère de l'Église[302]. En 1901, Maurras fut frappé par une encyclique de ce pape suggérant qu'une monarchie pouvait sous certaines conditions correspondre aux exigences de la démocratie chrétienne au sens où ce texte l'entend : une société organisée mais tournée vers Dieu[297].

Sous Pie X, les relations avec la papauté se développèrent. Louis Dimier fut reçu par le Pape Pie X et ce voyage fut reçu par Maurras et ses amis comme un encouragement exaltant[296]. Pie X s'opposa à ceux qui voulait condamner globalement Maurras à cause de certains écrits témoignant de son agnosticisme et d'une métaphysique non chrétienne.

Sous Pie XI, son agnosticisme suscita l'inquiétude d'une part de la hiérarchie catholique et en 1926, le pape classa certains écrits de Maurras dans la catégorie des « Livres Interdits » et condamna la lecture du journal L'Action française. Cette condamnation du pape fut un grand choc pour bon nombre de ses partisans, qui comprenaient un nombre considérable de membres du clergé français, et causa un grand préjudice à l'Action française.

Cette mise à l'index fut cependant levée par Pie XII en 1939[303], un an après que Maurras fut élu à l'Académie française.

Plusieurs raisons ont été avancées pour expliquer la condamnation de l'Action française par Pie XI puis sa réhabilitation par Pie XII. La pensée de Maurras ayant peu évolué pendant le quart de siècle pendant lequel l'Action française ne fit l'objet d'aucun blâme, des raisons liées au contexte politique et géopolitique ont été mises en avant. En 1921, la République a rétabli les relations diplomatiques avec le Saint-Siège et Pie XI préconise une politique d’apaisement systématique avec l’Allemagne : il approuve les accords de Locarno et l’entrée de l’Allemagne à la SDN, contrairement à Maurras qui les dénonce avec virulence car pouvant contribuer au renforcement et donc aux possibilités de revanche de l'Allemagne. L'Action française entre en opposition avec les objectifs de la diplomatie papale. En plus du contexte, un élément déclencheur provoque l'inquiétude de certains ecclésiastiques face à une influence jugée grandissante : dans une enquête de Louvain, les jeunes catholiques disent être fidèles à la Bible et à Maurras comme s’il était possible de les mettre sur le même plan ; mais une part du haut clergé français, des associations, des ordres religieux et quelques-uns des principaux théologiens soutiennent Maurras en dépit des réserves qu’ils témoignent vis-à-vis de certains aspects de sa pensée[304]. Pie XI entend néanmoins balancer l’influence prépondérante détenue au sein de l’Église par l’épiscopat nommé du temps de Pie X et de la réaction antimoderniste et son désir d’avoir les mains libres pour développer des mouvements d’action catholique du type de la JOC et de la JAC est fort[180].

Le Pape chargea alors le cardinal Andrieu de mettre en garde les fidèles contre l'Action française : celui-ci, qui avait chaleureusement remercié Maurras en 1915 pour l'envoi de L'Étang de Berre, qualifié de « monument de piété tendre », lui disant qu'il défendait l'Église « avec autant de courage que de talent »[305], prétendait désormais percevoir chez lui l'athéisme, l'agnosticisme, l'antichristianisme, un antimoralisme individuel et social ; ces accusations publiées dans La Semaine religieuse d'août 1926 furent perçue comme excessives. Maurras et les siens furent rassurés par les soutiens dont ils bénéficièrent ; cependant, loin d'adopter une attitude soumise et humble, Maurras fit bruyamment savoir que si la soumission à l’autorité romaine doit être totale sur le plan spirituel, si celle-ci intervient dans le domaine politique de manière critiquable, alors la résistance s’impose sur le terrain[306]. Réagissant à une allocution papale mettant indirectement en garde contre l'influence de l'Action française en décembre 1926, conseillés par plusieurs théologiens, les dirigeants catholiques de l’Action française publièrent une déclaration maladroite intitulée « Non possumus » qui fit d’eux des rebelles alors qu'ils s'y identifiaient aux premiers martyrs chrétiens[306]. La condamnation fut publiée par décret de la Congrégation du Saint-Office tombe le 29 décembre 1926 : elle touchait Le Chemin de Paradis, Anthinéa, Les Amants de Venise, Trois idées politiques, L'Avenir de l'intelligence, La Politique religieuse et Si le coup de force est possible, ouvrages présentant un caractère naturaliste au sens métaphysique et dont certains aspects peuvent être qualifiés de philo-païens, ainsi que le quotidien.

Appliquée par les évêques et les prêtres, la condamnation fut ressentie comme une blessure, une injustice et un drame par de nombreux croyants, y compris au plus haut niveau de l'Église : pour le cardinal Billot, la condamnation fut « une heure de la puissance des ténèbres[307] ». Le 19 décembre 1927, il remit au pape sa pourpre cardinalice et se retire dans un monastère[308]. Paradoxalement, elle ramena à l'Action française plusieurs catholiques comme Georges Bernanos qui, dans Comœdia et La Vie catholique, en prit la défense[304]. La condamnation papale ne portait ni sur le royalisme, ni sur le nationalisme[309]. Bien que de nombreux catholiques firent le choix de rester à l'Action française, la condamnation affaiblit le mouvement.

Charles Maurras contesta avoir fait de l'adhésion à tous ses écrits une condition d'adhésion à l’Action française : jamais son positivisme et son naturalisme, d'ailleurs partiels, n’ont constitué des articles de foi pour les militants. Il ne fondait pas sa doctrine politique sur des conceptions philosophiques morales ou religieuses. On pouvait critiquer tel ou tel point de sa pensée mais non la rejeter en bloc. En 1919, dans la nouvelle version d’Anthinéa, il n’avait pas hésité à supprimer un chapitre entier pour ne pas heurter les catholiques. Il rappela que l'Action française avait contribué à ramener à la foi de nombreux français : dès 1913, Bernard de Vesins avait établi une liste de militants et abonnés entrés dans les ordres[310], tel André Sortais qui devint abbé général des cisterciens réformés[311], afin d'illustrer le fait que le mouvement maurrassien fut une pépinière pour l’Église.

Sous Pie XII, la condamnation sera levée ; il fut sans doute pris en compte que si Maurras avait été véritablement pleinement païen, sa rébellion eût été plus totale et sa vindicte antichrétienne eût trouvé de quoi se nourrir[308]. Les tractations avaient commencé sous Pie XI qui ne rejeta pas Maurras et qui lui écrira même lorsqu'il fut emprisonné.

Liens avec le carmel de Lisieux

La pensée de Maurras quant à la religion et sa philosophie ne fut jamais une chose figée et homogène ; ses doutes n'ont pas éteint en lui l'espérance de la foi ; dans une lettre non envoyée au père Doncœur, il expliquera avoir volontairement tu les doutes et tourments liés à la question de la foi et gardé dans « le tête-à-tête solitaire de sa conscience et de sa pensée » ses doutes, rechutes et angoisses philosophiques ou religieuses[312]. Maurras eût eu tout intérêt à se convertir et donc à feindre la conversion ; les gains pour lui ou son mouvement eussent été énormes mais il ne le fit pas et en cela il est l'homme intègre décrit par ses opposants catholiques comme Marc Sangnier[313]. Comme Maritain le lui prédit, la condamnation fit renaître en lui le désir de retrouver la foi.

De fait, nombreux furent ceux qui prièrent pour sa conversion. En 1926, à l’heure de la condamnation, une jeune fille dont Maurras avait connu la mère entra au Carmel de Lisieux en offrant sa vie pour la conversion de Maurras. En 1936, lorsque cette carmélite mourut, mère Agnès, sœur aînée de sainte Thérèse de Lisieux et supérieure du Carmel, écrivit une lettre à Maurras pour lui révéler le sens de cette mort et pour lui promettre d’intervenir auprès de Pie XI au sujet de la condamnation ; il s'ensuivra une correspondance suivie[G 46]. De fait, Pie XI écrivit à Maurras pour lui apporter son soutien quand il fut emprisonné en 1937[G 46]. Et Maurras lui répondit qu'à sa libération il irait se recueillir à Lisieux sur le tombeau de « celle dont les Sœurs et les Filles m’ont entrouvert un monde de beauté et de charité toujours en fleur, comme le mystique rosier de la petite et grande sainte Thérèse de l’Enfant Jésus »[314]. Après la seconde guerre mondiale, les liens avec le Carmel de Lisieux se poursuivirent : il correspondit avec sœur Marie-Madeleine de Saint-Joseph. En 1948, le carmel lui envoie une image de sainte Thérèse avec une prière de Mère Agnès : « Ô Thérèse, Illuminez votre pèlerin et sanctifiez le dans la vérité »[315]. Le carmel lui envoie également les dix volumes de L’Année liturgique de Dom Guéranger[182].

Mort

Dans ses dernières années, Maurras confia à des prêtres comme l’abbé Van Den Hout, fondateur de La Revue catholique des idées et des faits en Belgique, la souffrance qu’il ressent dans la perte de la foi. Son agnosticisme est un agnosticisme insatisfait. Ceci transparaît dans ses dernières œuvres poétiques où il exprime l'idée que la miséricorde de Dieu dépasse sa justice, autrement dit le symbole de la justice divine n’est pas la balance mais le don infini[316] : « Chère Âme, croyez-vous aux célestes balances ? Cet instrument d’airain n’est rêvé que d’en bas ; Du très Haut, du très Bon, du Très Beau ne s’élance Que l’or du bien parfait qu’il ne mesure pas[317]. »

Tous les témoignages attestent que les derniers mois de Maurras ont été marqués par le désir de croire et le 13 novembre 1952, il fait demander l’extrême onction[G 61]. La question du retour de Maurras à la foi a longtemps constitué le fil directeur de la critique maurrassienne. Ivan Barko, en 1961, trouva plus intéressant d’imaginer un Maurras agnostique jusqu’à la fin, ne conservant de l'extrême onction que la ritualité. Selon Stéphane Giocanti, une telle interprétation ne tient pas compte de l’extrême probité de l’homme à l’égard d’une foi qu’il mit toute sa vie à vouloir retrouver intacte, ayant la défiance de la moindre simulation[G 61].

Certains démocrates-chrétiens ont cherché à accréditer la thèse de la conversion inventée rétrospectivement, mais le témoignage et les commentaires de Gustave Thibon attestent la réalité de l'expérience mystique finale de Maurras : « Je n'en finirais pas d'évoquer ce que fut pour moi le contact avec Maurras : je l'ai vu deux fois à Tours et je l'entends encore me parler de Dieu et de la vie éternelle avec cette plénitude irréfutable qui jaillit de l'expérience intérieure. J'ai rencontré beaucoup de théologiens dans ma vie : aucun d'eux ne m'a donné, en fait de nourriture spirituelle, le quart de ce que j'ai reçu de cet « athée » ! Toute la différence entre le géographe et l'explorateur, Lui qui préfère l’athée qui cherche Dieu au croyant installé dans les apparences de la foi »[173].

Maurras parvint à suivre la cérémonie de l'extrême-onction avec attention et il récita le confiteor. Vers 23 h 30, le 15 novembre, il demanda son chapelet et selon ses proches, ses dernières paroles furent un alexandrin : « Pour la première fois, j’entends quelqu’un venir »[318]. Il meurt le matin du 16 novembre 1952.

L’abbé Giraud confiera au poète ardéchois Charles Forot sa réaction devant la mort de Maurras : « Je revois, très souvent, mon inoubliable entretien avec le grand protégé de la Petite Thérèse. Sa fin chrétienne si édifiante ne m’a point surpris… Je l’attendais avec la plus totale confiance. […] Lisieux ne l’oublie pas non plus, et son souvenir est souvent évoqué dans mon courrier par sœur Madeleine de Saint-Joseph, qui fut pour lui, l’ange gardien visible[172]. »

Influence de Charles Maurras

Influence sur les intellectuels français

En tant que penseur, Charles Maurras exerça une très grande influence sur la vie intellectuelle de la France : il fut à l'origine de nombreuses aventures intellectuelles et littéraires. De nombreux auteurs ou hommes politiques ont subi l'influence de Maurras sans nécessairement se réclamer de lui.

En 1908, année de la fondation du quotidien L'Action française, les jeunes intellectuels maurrassiens se regroupaient autour de la Revue critique des idées et des livres, qui fut jusqu'en 1914 la grande rivale de la NRF d'André Gide. La revue défendait l'idée d'un « classicisme moderne », s'ouvrait aux théories nouvelles (Henri Bergson, Georges Sorel…) et formait une nouvelle génération de critiques et d'historiens. Pendant l'entre-deux-guerres, l'expérience de la Revue Critique se poursuivit dans un grand nombre de revues : Revue universelle, Latinité, Réaction pour l'ordre, La Revue du siècle

Le démocrate-chrétien Jacques Maritain était aussi proche de Maurras avant la condamnation du pape, et critiqua la démocratie dans l'un de ses premiers écrits, Une opinion sur Charles Maurras ou Le Devoir des Catholiques.

Chez les psychanalystes, Élisabeth Roudinesco a montré que Maurras a constitué une étape dans la genèse de la pensée de Jacques Lacan : ce dernier rencontra personnellement Maurras et participa à des réunions d’Action française ; Lacan trouva chez son aîné un certain héritage positiviste, l’idée que la société se composait plus de familles que d’individus, l’insistance sur la longue durée au détriment de l’événementiel, l’inanité des convulsions révolutionnaires et l’importance primordiale du langage[319] : « Partant de Maurras, il arrivait ainsi à Freud, pour rappeler […] combien la tradition, malgré les apparences, pouvait favoriser le progrès »[320]. Il faut également citer Édouard Pichon, le maître de Françoise Dolto, qui dans les années 1930 fera de la pensée maurrassienne l’axe de son combat pour la constitution d’un freudisme français[321].

Chez les libéraux, Daniel Halévy ou Pierre Lasserre ont subi le pouvoir d'attraction politique et philosophique du Maurrassisme alors qu'a priori leur héritage politique ne les prédisposait pas à être séduit par un penseur contre-révolutionnaire[322].

Dans les milieux littéraires, le climat patriotique de la première guerre mondiale, le prestige de Maurras et la qualité de son quotidien font que Henri Ghéon, Alfred Drouin, Marcel Proust, André Gide, Augustin Cochin, Auguste Rodin, Guillaume Apollinaire lisent tous L'Action française[G 38]. Anna de Noailles prie Maurras de croire à ses sentiments de profonde admiration[323]. Les années 1920 correspondent à l'apogée littéraire de Maurras avec une force d'attraction dont Jean Paulhan témoigne : « Maurras ne nous laisse pas le droit en politique d'être médiocres ou simplement moyens »[324]. L'apogée littéraire se traduit par le portrait que publie Albert Thibaudet dans la série « Trente ans de vie française » à la NRF, où Les Idées de Charles Maurras précèdent La Vie de Maurice Barrès et Le bergsonisme. Cette monographie est un livre important puisqu'en formulant objections et réserves, il éclaire la partie supérieure de la pensée et de l'œuvre de Maurras, celle qui sort du poids du quotidien et échappe au discours partisan et polémique.

Après la première guerre mondiale, il reçoit en abondance des lettres pleines de respect et d'admiration d'Arnold van Gennep, Gabriel Marcel, René Grousset, Colette, Marguerite Yourcenar, Henry de Montherlant, Charles Ferdinand Ramuz, Paul Valéry[325] ; le jeune Malraux a écrit une notice pour la réédition de Mademoiselle Monk et exprime son envie de rencontrer Maurras[326] - [n 26].

Charles Maurras eut une forte influence parmi les étudiants et la jeunesse intellectuelle de l'entre-deux-guerres : quand Jean-Baptiste Biaggi, futur compagnon de De Gaulle accueille Maurras au nom des étudiants en droit de Paris, il a autour de lui Pierre Messmer, Edgar Faure, Edmond Michelet et parmi les Camelots du Roi, on compte François Périer et Michel Déon ; Maurras reçoit Des témoignages d'admiration de Pierre Fresnay et Elvire Popesco et est entouré par les jeunes Raoul Girardet, François Léger, François Sentein, Roland Laudenbach, Philippe Ariès[327] ; Maurras aime s'entourer de jeunes dont il pressent le talent et il prend pour secrétaires particuliers Pierre Gaxotte et Georges Dumézil, l'un le jour l’autre la nuit[328].

Maurras et de Gaulle

Avant la Seconde Guerre mondiale, il semble que Charles de Gaulle, dont le père lisait L'Action française et se qualifiait de « monarchiste de regret » et qui discuta avec le comte de Paris de la possibilité d'une restauration de la royauté, ait été influencé par l'Action française et que cette dernière l'ait considéré avant la France libre avec sympathie[329].

Au printemps 1934, sous l'égide du Cercle Fustel de Coulanges, une vitrine de l’Action française, Charles de Gaulle prononça une série de conférences à la Sorbonne[330]. De Gaulle savait qu’il avait dans l’Action française un allié attentif ; le 1er juin 1934, l'Action française consacra un article élogieux à Vers l’armée de métier qui défendait le principe d’une armée professionnelle très compétente et mobile se superposant à l’armée conscrite ; Le Populaire et Léon Blum suspectèrent le danger d’un coup d’État et c’est dans L’Action française que l’ouvrage fit l’objet du seul encadré publicitaire auquel il eut droit[331]. De Gaulle écrira à Hubert de Lagarde, chroniqueur militaire de L'Action française : « Monsieur Charles Maurras apporte son puissant concours à l'Armée de métier. Au vrai, il y a longtemps qu'il le fait par le corps de ses doctrines. Voulez-vous me dire s'il a lu mon livre que j'ai eu l'honneur de lui adresser au mois de mai ? »[332]. Maurras avait découvert de Gaulle en lisant un article de La Revue hebdomadaire et s'était exclamé : « Quelle confirmation de nos idées les plus générales sur l'armée ! »[333].

En 1940, la nomination au grade de général de Charles de Gaulle provoqua la jubilation de Charles Maurras dans L'Action française des 1er et 3 juin 1940 ; Maurras y qualifia de Gaulle de « pénétrant philosophe militaire » et affirmait avoir voulu rester discret à son endroit pour ne pas le gêner notamment : « Sa thèse nous paraissait suffisamment contraire à la bêtise démocratique pour ne pas ajouter à ces tares intrinsèques, la tare extrinsèque de notre appui. Mieux valait ne pas compromettre quelqu'un que, déjà, ses idées compromettaient toutes seules ».

Paul Reynaud, qui rencontra en captivité en Allemagne la sœur du général de Gaulle, Marie-Agnès Caillau, affirme que selon elle le chef de la France libre serait resté maurrassien jusqu'aux accords de Munich, soit seulement un an avant le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale[334] : « Très franche, intelligente et bonne, [elle] nous raconte que Charles était monarchiste, qu'il défendait Maurras contre son frère Pierre jusqu'à en avoir les larmes aux yeux dans une discussion. Mais au moment de Munich, il a désapprouvé entièrement l'attitude de Maurras ».

Christian Pineau dira à André Gillois « que le général avait reconnu devant lui qu’il avait été inscrit à l’Action française et qu’il s’était rallié à la République pour ne pas aller contre le sentiment des Français »[335].

De Gaulle dit à Claude Guy qu'il n'aimait pas la Révolution française[336] : « À entendre les républicains, la France a commencé à retentir en 1789 ! Incroyable dérision : c'est au contraire depuis 1789 que nous n'avons cessé de décliner ». Il confia également à Alain Peyrefitte son peu d'enthousiasme pour la république : « Je n'aime pas la république pour la république. Mais comme les Français y sont attachés, j'ai toujours pensé qu'il n'y avait pas d'autre choix »[337]. Il lui confia également en 1962, alors qu'il annonçait une « initiative pour assurer la continuité de l'État », qu'un roi pourrait être utile à la France : « Ce qu'il faudrait à la France, c'est un roi »[338].

Maurice Schumann, porte-parole de la France libre, prête par ailleurs à de Gaulle la formule : « Maurras est devenu fou à force d'avoir raison. »[339]. Selon Claude Mauriac, chef du secrétariat particulier du général de Gaulle à la Libération, ce dernier porta une très grande attention au sort du théoricien du nationalisme intégral ; il interviendra ainsi pour que Maurras ne passe pas devant la cour de justice de Lyon en septembre 1944, mais devant la Haute Cour, réputée plus indulgente[340]. Le 13 mai 1958, Jean-Baptiste Biaggi fit remarquer à de Gaulle que d’autres et lui-même devaient leur nationalisme à Charles Maurras, ce dont le général convint, regrettant que Maurras l'eût critiqué : « Aussi bien, je n’ai jamais rien dit contre lui. Que ne m’a-t-il imité ! »[341]. Charles Maurras en a toujours voulu à de Gaulle d'avoir rompu avec Pétain.

À l'étranger

Maurras et l'Action française ont exercé une influence sur différents penseurs se réclamant d'un nationalisme se voulant contre-révolutionnaire et chrétien dans le monde.

En Belgique, nous trouvons Paul Dresse de Lébioles et son cousin germain Adrien de Meeûs parmi ses fidèles.

En Grande-Bretagne, Charles Maurras fut suivi et admiré par des écrivains et philosophes et a plusieurs correspondants britanniques, universitaires ou directeurs de revue ; en 1917, il a été sollicité par Huntly Carter du New Age et de The Egoist[89] - [342]. Plusieurs de ses poèmes furent traduits et publiés en Grande-Bretagne où Maurras a de nombreux lecteurs parmi les High Church de l'anglicanisme et les milieux conservateurs[343]. On compte parmi ses lecteurs T. S. Eliot ou T. E. Hulme. Eliot trouva les raisons de son antifascisme chez Maurras : son antilibéralisme est traditionaliste, au bénéfice d’une certaine idée de la monarchie et de la hiérarchie. Music within me, qui reprend en traduction les pièces principales de La Musique intérieure paraîtra en 1946, sous la houlette du comte G.W.V. Potcoki de Montalk, directeur et fondateur de la The Right Review[344] - [345]. La condamnation de 1926 eut ainsi des effets jusqu'en Grande-Bretagne où elle détourna du catholicisme des partisans de la High Church, déçus par le juridisme romain : la conversion de T. S. Eliot à l’anglicanisme, l’éloignement du catholicisme de personnalités comme Ambrose Bebb sont liés à cet événement[308]. Eliot inséra une citation en français de L’Avenir de l’intelligence dans son poème « Coriolan » qu’il tenait pour un maître livre pour sa satire des honneurs officiels[346].

Au Mexique, Jesús Guiza y Acevedo, surnommé « le petit Maurras », et l'historien Carlos Pereyra (es).

En Espagne, il existe un mouvement proche de l'Action française Cultura Española et sa revue Acción Española. L’influence de la pensée maurrasienne a été montrée chez les auteurs et les intellectuels comme Azorín[347], José María Salaverría (es)[348], Eugenio d'Ors[349], Víctor Pradera[350], Antonio Goicoechea (es)[350], ou Álvaro Alcalá-Galiano y Osma (es)[351], et, de même, elle a également influencé des mouvements politiques tels que le maurisme[350].

Au Pérou, le marquis de Montealegre de Aulestia a été influencé par Maurras. Ce grand penseur réactionnaire péruvien, admiratif de sa doctrine monarchique, le rencontre en 1913.

En Argentine, le militaire argentin Juan Carlos Onganía, tout comme Alejandro Agustín Lanusse, avaient participé aux Cursillos de la Cristiandad, ainsi que les dominicains Antonio Imbert Barrera (es) et Elias Wessin y Wessin (es), opposants militaires à la restauration de la Constitution de 1963.

Au Portugal, António de Oliveira Salazar qui gouverna le pays de 1932 à 1968 admirait Maurras même s'il n'était pas monarchiste et il adressa ses condoléances à sa mort en 1952[352].

Affaire Maurras de 2018

À l'occasion du cent-cinquantième anniversaire de la naissance de Charles Maurras, l'historien Olivier Dard rédige une notice de trois pages pour le livre des commémorations nationales 2018. À la suite de protestations d'associations antiracistes, la ministre de la Culture, Françoise Nyssen, retire la référence à l'écrivain dans le livre ; les trois pages de Dard sont intégralement « supprimées » et les ouvrages déjà imprimés envoyés au pilon[353] - [354].

Membres du Haut Comité des Commémorations nationales dont la mission « est de contribuer, au hasard des anniversaires, à une meilleure prise de conscience des épisodes du passé », les historiens Jean-Noël Jeanneney et Pascal Ory soulignent à cette occasion que « commémorer, ce n'est pas célébrer. C'est se souvenir ensemble d'un moment ou d'un destin ». En outre, ils rappellent qu'en 2011, le terme « célébrations » a été remplacé par « commémorations » dans l'intitulé du Haut Comité à la suite de la polémique relative à Louis-Ferdinand Céline[355].

Le journaliste et écrivain Gilles Heuré critique également la décision de la ministre, en arguant qu'« évacuer Maurras des commémorations nationales n’a aucun sens, sinon celui de se bercer dans l’illusion qu’il ne faudrait se souvenir que de ce dont la République, la « gueuse » comme disaient les antiparlementaires, peut se glorifier. On pourrait même aller jusqu’à rayer, dans les biographies autorisées, l’influence qu’exerça Maurras sur la jeunesse d’un certain Charles de Gaulle. Charles Maurras est une figure abjecte de notre histoire. Le passer sous silence ne résout rien du rayonnement qui fut le sien dans des décennies incandescentes, ni du système d’idées qui fomenta toute une idéologie. Une idéologie qui, elle, n’est pas morte en 1952 »[356].

Dans Libération, Daniel Schneidermann reproche à Olivier Dard de n'avoir pas évoqué plus clairement l'antisémitisme de Maurras autrement que par cette phrase qu'il juge « contournée » : « Antidreyfusard, [Maurras] dénonce « le syndicat de la trahison », que symbolise « l'Anti-France », celle des « quatre États confédérés » (juifs, francs-maçons, protestants, et métèques) ». Toutefois, le journaliste souligne que les concepteurs de la notice officielle sont, à ses yeux, « insoupçonnables de toute complaisance à l'égard de l’antisémitisme (…) Olivier Dard compris, qui convint sur France Culture, que oui, Maurras était incontestablement antisémite, tellement antisémite qu'il ne valait pas la peine de le rappeler »[357].

Le 7 mars 2018, lors du 33e dîner annuel du Conseil Représentatif des Institutions Juives de France, Emmanuel Macron juge qu'il ne fallait « pas occulter la figure de Maurras »[358]. Le président souligne que le choix du Haut comité a été fait par « un groupe d'experts qui ont déterminé ce qui est non pas, un hommage national qu'il faut rendre à une personne, mais l'inscription des dates qui ont fait l'histoire de France »[359].

Le 21 mars 2018, dix membres sur douze du Haut comité des commémorations nationales démissionnent en adressant une lettre ouverte à Françoise Nyssen[360] - [361].

Confusions

Le 15 novembre 2018, le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux pensait citer Marc Bloch en employant les formules de « pays légal » et « pays réel » alors qu'il s'agissait de Charles Maurras[362].

Le 16 juillet 2022, Jean-Luc Mélenchon affirme que Maurras aurait demandé que les autorités n'oublient pas de déporter les enfants juifs avec leurs parents lors de la rafle du vel d'hiv[363]. Il s'agit en fait d'une confusion avec un article de Robert Brasillach dans Je suis partout[364].

Œuvres

Liste chronologique

  • 1887 : premiers articles publiés
  • 1889 : Théodore Aubanel. Description
  • 1890 : Lire, écouter l'Antigone... de Sophocle.
  • 1891 : Jean Moréas
  • 1895 : Le Chemin de Paradis. Mythes et fabliaux [lire en ligne sur archive.org le texte de l'édition remaniée (1922)]
    Recueil comprenant notamment Harmonies : La Bonne Mort qui fut supprimé des éditions ultérieures.
  • 1896 : Lettres des Jeux olympiques
    Lettres parues du 15 au 22 avril 1896 dans La Gazette de France et recueillies en 1901 dans Anthinéa.
  • 1898 :
  • 1899 : Dictateur et Roi
    Texte rédigé en 1899, prévu pour être édité en 1903 et publié dans Enquête sur la monarchie, édition de 1924.
  • 1900-1903 : Enquête sur la monarchie [lire en ligne sur archive.org]
    Réédité et augmenté en 1909 et 1924.
    • Premier livre. Chez nos exilés, 1900
    • Deuxième livre. Lettres et opinions, 1900
    • Troisième livre. Jules Lemaître et son ami, 1903
  • 1901 : Anthinéa [lire en ligne sur archive.org]
    Texte réédité en 1932 sous le titre Anthinéa. D'Athènes à Florence. La première partie (le livre I) intitulée Le Voyage d'Athènes comprend, entre autres, Lettres des Jeux olympiques et Athènes antique et a été rééditée séparément en 1927. Le livre IV a été réédité séparément en 1929 sous le titre Promenades italiennes.
  • 1901 : Ironie et Poésie
    Première publication dans la Gazette de France en 1901. Parution en volume en 1923. Repris dans Barbarie et Poésie, 1925.
  • 1902 : Invocation à Minerve
    Publié sans nom d'auteur dans la revue Minerva. Repris en 1905 comme appendice dans L'Avenir de l'intelligence.
  • 1902 : Les Amants de Venise. George Sand et Musset
  • 1905 : L'Avenir de l'intelligence, suivi d'Auguste Comte, le Romantisme féminin et Mademoiselle Monk [lire en ligne sur archive.org]
    Textes parus en 1902 et 1903 dans la revue Minerva.
  • 1906 : Le Dilemme de Marc Sangnier. Essai sur la démocratie religieuse.
  • 1910 :
    • Kiel et Tanger, 1895-1905. La République française devant l'Europe
    • Idées royalistes
      Réédité en 1919 sous le titre Les Idées royalistes sur les partis, l"État, la Nation.
    • Si le coup de force est possible, coécrit avec Henri Dutrait-Crozon
      Recueil de textes de 1905 et 1908 repris dans Enquête sur la monarchie, édition de 1924.
  • 1911 : Une campagne royaliste au "Figaro". Août 1901-janvier 1902
    Reprise intégrale dans Enquête sur la monarchie, 1924.
  • 1911 : Pour Psyché
    Poèmes publiés en 1892 et repris dans La Musique intérieure, 1925.
  • 1912 : La Politique religieuse
  • 1913 :
    • Trois Études : Verlaine - Brunetière - Barrès
      Reprend des textes parus dans La Revue encyclopédique en 1895 (Paul Verlaine), 1899 (La Décadence de M. Ferdinand Brunetière) et en 1903 dans La Gazette de France (Maurice Barrès), avec une introduction de Henri Clouard : "Charles Maurras et la critique des lettres".
    • L'Action française et la Religion catholique
    • Notes sur Dante
  • 1915 : L'Étang de Berre [lire en ligne sur archive.org]
  • 1916 : Quand les Français ne s'aimaient pas [lire en ligne sur archive.org]
  • 1916-1918 : Les Conditions de la victoire, 4 volumes [lire en ligne sur archive.org, vol. 1], vol. 2, vol. 3
    Recueils d'articles publiés dans L'Action française.
  • 1917 : Le Pape, la Guerre et la Paix [lire en ligne sur archive.org]
  • 1918 :
    • Les Chefs socialistes pendant la guerre
    • La Paix de sang, l'espérance est militaire
    • Athènes antique
      Reprise de passages de Anthinéa (1901), de L'Invocation à Minerve (1902) et de Quand les Français ne s'aimaient pas (1916).
  • 1919 : préface à Rome, Naples et Florence de Stendhal
    Préface reprise dans Pages littéraires choisies (1922) et l'article Stenhal du tome V du Dictionnaire Politique et Critique, 1934.
  • 1920 : Le Conseil de Dante, 1321-1921 [lire en ligne sur archive.org]
    Édition remaniée du texte des Notes sur Dante de 1913.
  • 1920 : Les Trois Aspects du Président Wilson. La neutralité, l'intervention, l'armistice
    Recueil d'articles de L'Action française.
  • 1921 : Tombeaux
  • 1921 : La Démocratie religieuse
  • 1922 :
  • 1923 :
    • Les Nuits d'épreuves et la Mémoire de l'État. Chronique du bombardement de Paris
      Recueil d'articles publiés en 1918, repris dans Heures immortelles (1932).
    • Mademoiselle Monk
    • Poètes
      Reprend les Trois Études sur Verlaine - Brunetière - Barrès avec des textes sur Mallarmé, Valéry, Du Plessis et Bernard,
    • L'Allée des philosophes
  • 1924 : Enquête sur la Monarchie, suivie de Une campagne royaliste au "Figaro", et Si le coup de force est possible
    Édition définitive (première édition en 1909), avec Dictateur et Roi (1899) et une préface nouvelle [lire en ligne sur archive.org]
  • 1924 : Premiers Pas sur l'Acropole
    Reprise du texte L'Acropole, extrait de Anthinéa (1901).
  • 1925 : La Musique intérieure
  • 1925 : Barbarie et Poésie. Vers un art intellectuel
  • 1926 :
    • La Bonne Mort, conte, ill. par Paul Devaux
      Tiré à 715 exemplaires, reprend un conte paru en 1894.
    • La Sagesse de Mistral (tiré à 530 exemplaires)
    • Lorsque Hugo eut les cent ans. Indications
      Reprise de trois textes de 1901-1902.
  • 1927 : L'Action française et le Vatican
  • 1927 : Le Voyage d'Athènes
  • 1928 :
    • La Politique du Vatican. Sous la terreur
    • Le Prince des nuées
    • Un débat sur le romantisme
    • L'Anglais qui a connu la France
      Texte de 1902 sur John Bodley (en) (1853-1925) qui fut repris en 1937 dans Devant l'Allemagne éternelle.
    • Corps glorieux ou Vertu de la perfection
  • 1929 :
  • 1930 :
  • 1931 :
    • Méditation sur la politique de Jeanne d'Arc
    • Triptyque de Paul Bourget
      Recueil de trois textes parus en 1895, 1900 et 1923.
    • Le Quadrilatère. Galliéni 1916, Mangin 1925, Foch 1930, Joffre 1931
    • Au signe de Flore. Souvenirs de vie politique, l'affaire Dreyfus, la fondation de L'Action française (1898-1900).
    • Pour la Défense nationale, 3 volumes
      Le volume 2, recueil d'articles, est intitulé Décernez-moi le prix nobel de la paix.
    • Principes
  • 1932 : Heures immortelles, 1914-1919
  • 1932 : Prologue d'un essai sur la critique
    Publié dans la Revue Encyclopédique Larousse en 1896, puis dans La Revue Universelle en 1927.
  • 1933 : Paysages et Cités de Provence
    Texte repris en 1934 dans l'article Provence du Dictionnaire politique et critique et réédité en 1938 sous le titre La Montagne provencale.
  • 1933 : L'Amitié de Platon
    Préface du Banquet – Phédon. Traduction nouvelle de Léon Robin.
  • 1932-1934 : Dictionnaire politique et critique, 5 volumes
  • 1934 : Le Long du Rhône et de la mer
  • 1935 : Louis XIV et la France. Essai sur la grandeur qui dure
  • 1937 :
    • Quatre Poèmes d'Eurydice
    • Les Vergers sur la mer. Attique, Italie et Provence, recueil
      « Les vergers sur la mer font suite à la jeune Anthinéa, la complétent et la corrigent. » (Charles Maurras).
    • Jeanne d'Arc, Louis XIV, Napoléon
    • Devant l'Allemagne éternelle
    • Mes idées politiques
    • La Dentelle du Rempart. Choix de pages civiques en prose et en vers, 1886-1936
  • 1938 : Jacques Bainville et Paul Bourget
  • 1939 : Le Fauteuil de Henry Robert. Discours de réception de Charles Maurras à l'Académie française et réponse de Henry Bordeaux
  • 1939 : Louis XIV ou l'Homme roi
  • 1940 : Pages africaines
  • 1941 :
  • 1942 : De la colère à la justice. Réflexions sur un désastre.
  • 1943 : Vers l'Espagne de Franco
  • 1944 :
    • Poésie et Vérité
      recueil de critiques littéraires.
    • Paysages mistraliens
    • Le Pain et le Vin
  • 1945 : L'Allemagne et nous. Déclaration de Charles Maurras à la Cour de Justice du Rhône les 24 et 25 janvier 1945
  • 1945 : Où suis-je ?, poème.
  • 1946 : Au-devant de la nuit (sous le pseudonyme de Léon Rameau).
  • 1948 :
    • Pour un réveil français
      Texte rédigé d'après une conférence faite en 1943.
    • Les Deux Justices ou Notre J'accuse
      Publié sous le nom « Les Amis de Charles Maurras ».
    • Antigone, Vierge-Mère de l'Ordre
      Texte en prose précédé d'un poème écrit à Riom en 1946.
    • L'Ordre et le Désordre. Les idées positives et la révolution
    • Réflexions sur la Révolution de 1789
    • Maurice Barrès
    • Le Parapluie de Marianne (sous le pseudonyme d'Octave Martin).
    • Une promotion de Judas (sous le pseudonyme de Pierre Garnier).
    • Réponse à André Gide
  • 1949 :
    • Inscriptions sur nos ruines, recueil d'articles de 1941 à 1943.
    • Le Cintre de Riom, poèmes.
    • Mon jardin qui s'est souvenu
    • Pour un jeune Français. Mémorial en réponse à un questionnaire
      Le chapitre dix (sur douze), intitulé L'Avenir du nationalisme français, a été repris dans les Œuvres Capitales de 1954.
    • Au Grand Juge de France. Requête en révision d'un arrêt de Cour de Justice (en collaboration avec Maurice Pujo)
  • 1950 : La Prière de la fin
  • 1950 : Le Mont de Saturne. Conte moral, magique et policier
  • 1951 :
    • Pour réveiller le Grand Juge (en collaboration avec Maurice Pujo)
    • Tragi-comédie de ma surdité
      Texte écrit fin 1944-janvier 1945, à la prison St-Paul, à Lyon.
    • Jarres de Biot. Lettre à mon ancien confrère Georges Duhamel
    • À mes vieux oliviers
  • 1952 :
    • La Balance intérieure, poèmes
    • Le Beau Jeu des reviviscences. Un après-midi d'hiver à Clairvaux
    • Le Bienheureux Pie X, sauveur de la France
    • Le Guignon français ou le Rouge et le blanc
    • Le Procureur et l'Habitant. Deuxième lettre à M. le Procureur général près la Cour d'appel de Lyon par Charles Maurras
    • Lettre à Mr Vincent Auriol, Président de la République suivi de Touchés
    • Originaux de ma Provence. Types et paysages, Éditions Detaille, Marseille, 1952

Œuvres posthumes

  • 1953 : Pascal puni (conte infernal), Flammarion (posthume)
  • 1953 : Votre Bel aujourd'hui. Dernière lettre à Mr Vincent Auriol, Président de la IV° République, Fayard (posthume).
  • 1954 : Maîtres et Témoins de ma Vie d'Esprit. Barrès - Mistral - France - Verlaine - Moréas, Flammarion (posthume)
    Recueil de textes publiés en 1913 (Les époques de la poésie de Verlaine et Barrès poète), 1924 (Anatole France, politique et poète), 1939-1941 (textes de conférences données en 1932) et 1950 (Moréas).
  • 1954 : Œuvres capitales (posthume). 4 volumes 16×23 - chez Flammarion
    Établie par l'auteur dans la dernière année de sa vie, l'édition des Œuvres capitales est constituée de :
  • 1963 : Soliloque du prisonnier (posthume).
  • 1996 : Journal de Charles Maurras. Jeux Olympiques d'Athènes, Amis de la Maison du Chemin de Paradis, 1996, journal tenu par Charles Maurras pendant les J. O. de 1896
  • 2003 : La Merveille du Monde, Bulletin Charles Maurras no 18, Anthinéa, 2003, texte de 1891

Éditions récentes

Sources primaires

Interrogatoire de Charles Maurras par le juge d'instruction du tribunal de Lyon.

Archives

Les papiers personnels de Charles Maurras sont conservés aux Archives nationales sous la cote 576 AP[365].

L'interrogatoire de Charles Maurras par le juge de Lyon le est disponible aux Archives départementales du Rhône, cote 394 W 150.

Correspondance

  • 1958 : Lettres de prison (8 septembre 1944 - 16 novembre 1952) (posthume).
  • 1960 : Lettres à H. Mazel (1895-1896, posthume).
  • 1966 : Lettres passe-murailles, correspondance échangée avec Xavier Vallat (1950-1952) (posthume).
  • 1970 : La République ou le Roi ? Correspondance inédite de Maurice Barrès et de Charles Maurras, 1888-1923, Plon, 1970.
  • 2007 : Dieu et le Roi – Correspondance entre Charles Maurras et l'abbé Penon (1883-1928), présentée par Axel Tisserand, Privat, coll. « Histoire », Paris, novembre 2007, 750 p. (ISBN 978-2-7089-6881-3).
  • 2022 : Un chemin de conversion : Correspondance choisie entre Charles Maurras et deux carmélites de Lisieux (1936-1952) (préf. Jean Sévillia), Paris, Téqui, , 472 p. (ISBN 9782740324820).

Notes et références

Notes

  1. Pour se faire comprendre de lui, il faudra lui parler à la racine du nez[G 9].
  2. Doctrine attribuant à la douleur une valeur morale, esthétique et intellectuelle, le dolorisme réclame d'accepter ses souffrances. Le dolorisme est une doctrine étrangère au christianisme provençal.
  3. Jusqu'en 1963, le baccalauréat comportait deux parties. L'obtention de la première partie était obligatoire pour passer en terminale et postuler au baccalauréat. La première partie est remplacée en 1963 par un « examen probatoire », qui ne durera que deux ans (supprimé en 1965). En 1969, est introduite une épreuve anticipée de français en classe de première, puisque les élèves de terminale étudient la philosophie en lieu et place du français.
  4. En ne donnant à la vie de Verlaine que la place nécessaire pour comprendre l’œuvre, mais pas plus.
  5. Une majorité de royalistes de l'époque reconnaît dans le comte de Paris le « roi de France Philippe VII ».
  6. Maurras est alors pris en considération comme un acteur du débat politique et intellectuel : en 1900, le duc d'Orléans donne son approbation publique à Maurras ; les échanges de ce dernier avec Le Temps et L'Éclair montrent que ses adversaires prennent ses arguments au sérieux : même si la restauration paraît lointaine et indésirable, on estime indispensable de la combattre ; le rayonnement de Maurras joue sans doute un rôle dans le découragement politique qui saisit en 1901 Maurice Barrès qui ne parvient pas à susciter une école intellectuelle ou une force politique définie capable d'unifier les nationalistes.
  7. Ce dernier ouvrage doctrinal compose la synthèse politique, économique et sociale de sa pensée. La préface, intitulée « La politique naturelle », est un manifeste anthropologique qui envisage l’homme comme un être naissant et grandissant au sein de structures d’appartenance qui le relient à la société (famille, métier, commune, paroisse, région, nation) et lui permettent d’accéder à des libertés réelles. La politique considérée comme « naturelle » est celle qui met en œuvre « l’empirisme organisateur », lequel déduit des lois du passé les enseignements de l’avenir.
  8. Maurras écrit le 13 janvier 1937 dans L'Action française que la politique réclamée par Blum, Delbos et Viénot a rendu la France faible et maintenant, « voilà les mêmes gens qui ne rêvent que plaies et bosses. […] D’où il suit que ces beaux messieurs n’ont cessé de vouloir la paix quand nous pouvions soutenir victorieusement une guerre juste et sensée ; mais aussitôt que nous avons été affaiblis topographiquement, privés de positions fortes qui faisaient notre supériorité, ils se sont mis à hurler à la guerre, à cette guerre que nous ne pouvions plus faire que dans des positions extrêmement difficiles et périlleuses ! Est-ce de la bêtise ? Est-ce de la trahison ? Est-ce de l’une et de l’autre ? »
  9. Le 30 août 1939, Maurras écrit à Franco pour qu'il travaille à détacher Mussolini d'Hitler[86].
  10. Le 13 septembre 1939, son « confrère et ami » Morton Fullerton correspondant du Times, lui écrit une lettre chaleureuse et s’en prend au Deutschzender qui a inventé un texte anglophobe à Maurras lui en attribuant la paternité. Maurras écrit dans L’Action française le 6 novembre 1939 : : « Les dix dernières années ont marqué plus d’une liaison utile entre les Britanniques et nous. On connaît d’habiles traductions de nos œuvres parues à la revue The Criterion. Un professeur de Melbourne a une traduction de L’Avenir de l’Intelligence que l’on dit très exacte. […] Un très grand nombre de mes vers ont été publiés dans The Right Review. […] En 1937, des Anglais de haute distinction ont bien voulu signer la pétition qui me proposait au prix Nobel de la Paix. Il serait absolument incompréhensible que, dans l'état de tels rapports intellectuels, j'aie énoncé les absurdités que me prête le Deutschzender allemand - et en des termes d'une telle grossièreté. » En 1939, le professeur Eccles célèbre Maurras dans la Weekly Review.
  11. Le projet de constitution du 30 janvier 1944 que prépara le Maréchal Pétain se voulait d'ailleurs explicitement républicain même s'il renforçait le rôle du chef de l'État, président de la République. Charles Maurras considérait cette orientations préférable à celle du régime précédent et il avait confiance en Philippe Pétain pour ne pas engager militairement la France aux côtés de l'Allemagne, ce que souhaitait les collaborationnistes, mais selon Simon Epstein cela ne suffit pas à faire du régime de Vichy une émanation idéologique de l'Action française.
  12. Dans une conférence au café Neuf de Lyon, le 3 février 1943, Maurras proclama publiquement que l’Allemagne restait pour la France l’ennemi no 1, la censure empêchant que ses prises de position soient publiées[144] ; s’il a approuvé dans un premier temps la création de la Milice comme une police qui protégerait les gens contre les attentats communistes qui visaient indifféremment de vrais collaborationnistes et des pétainistes anti-allemands, il la désapprouva énergiquement dès qu’il apprit que son commandement était soumis à l’autorité allemande et interdit à ses partisans de s’y engager[145] ; de fait, les miliciens réquisitionnèrent ses bureaux et lui firent une « figure féroce[146] » ; à un correspondant qui lui proposait d'annoncer une exposition anti-soviétique dans L'Action française, il répondit que ce n'étaient pas les Russes qui occupaient la France et que si on organisait une exposition anti-allemande, il en rendrait compte dans ses articles[147] ; il met en avant que ses articles visaient à tromper la censure pour mieux faire passer un message anti-allemand ; ainsi, le , il montre l’impossibilité d’intégrer la France dans un ensemble européen et pour son partisan Pierre Boutang, il ne pouvait y avoir alors de tract clandestin plus utile contre l’Occupant[148].
  13. Il écrit en septembre 1941 : « l'humanité veut que nous assurions aux Juifs qui résident chez nous la sécurité, le respect, la bienveillance, la justice, avec toute l'amitié possible[149]. »
  14. François Huguenin soutient que cette affirmation peut paraître intolérable mais demeure « plausible » compte tenu du milieu confiné dans lequel vivait Maurras à Lyon et de la vieille habitude pratiquée par Maurras de l'invective violente jamais suivie d'effet[150] (sauf dans l'exemple de l'agression de Blum). C’est en 1945 que Maurras apprendra l’horreur des camps d'extermination et qu’il prononcera des paroles de compassion[G 59]. Il a été cependant ému par la mort de Georges Mandel assassiné par des miliciens : il lui consacre dans L'Action française du un article fleuve à la fois critique et élogieux, rappelant ses divergences tout en déplorant la mort d’un homme qu’il a rencontré plusieurs fois depuis 1918, qui a rendu par son entremise un service aux Orléans.
  15. Le Larousse 2008, (ISBN 978-2-03-582503-2), MAURRAS (Charles), p. 1510, emploie le mot « radié » : [Acad. fr., radié en 1945] ; ce terme est employé par ce dictionnaire de manière constante, il figure par exemple sur l'édition de 1952, p. 1534.
  16. Ce remplacement eut lieu le 29 janvier 1953, avec l'élection d'Antoine de Lévis-Mirepoix au fauteuil 16.
  17. Né le 10 mai 1917 à Dijon et décédé le 7 avril 2003, Jacques Maurras sera Directeur de la Société Paris-Outre-mer (1946-1958), Directeur de la Société Pierre Rivière et Cie (1958-1964), Directeur général adjoint (1965), puis Président-directeur général (1969-1980) de la société Les Grandes Marques continentales, Président-délégué de la Confédération nationale des vins et spiritueux (commerce extérieur) (1970-1984), Président (1967), Président d'honneur (depuis 1996) de la Fédération des importateurs de vins et spiritueux, Administrateur du Salon international de l’alimentation (1969-1994), Conseiller du Commerce extérieur de la France (depuis 1973), Membre d'honneur du comité directeur de la Fédération internationale des vins et spiritueux (depuis 1991). Il fut par ailleurs Chevalier de la Légion d’honneur et de l’ordre national du Mérite, Croix de guerre 39-45, Chevalier du Mérite agricole, Commandeur de l’ordre de l’Infant Henrique (Portugal) et du Mérite civil (Espagne), Officier de l’ordre de l’Empire britannique.
  18. L'homosexualité masculine lui est incompréhensible même s'il la tolère autour de lui.
  19. « Cité » doit être compris dans le sens donné par Aristote dans sa Politique : « Un citoyen au sens plein ne peut pas être mieux défini que par la participation à une fonction judiciaire et […] à « une magistrature sans limite » […], le citoyen comme nous l'avons défini existe surtout en démocratie ; […] et nous appelons, en bref, cité l'ensemble des gens de cette sorte. Note interne concernant la magistrature - Livre I, Note 1 : « Magistrat » sera désormais, dans la traduction comme dans les notes, pris en son sens général de celui qui exerce une fonction (une charge) politique, et non au sens juridique qui tend, de nos jours, à s'imposer »[204].
  20. Maurras écrit : « Fort de sa mission de Messie humain, ce peuple de Seigneurs, cette race de maîtres, s’entraîne déjà à compter quelles légitimes violences devront être imposées aux mâles des peuples vaincus et quelle hontes pèseront sur leurs femmes et leurs enfants […] Un statut nouveau de l’humanité se prépare, un droit particulier est élaboré : un code de nouveaux devoirs, auprès desquels les pauvres petites corvées et translations pangermanistes de 1918 feront l’effet de jeux d’enfants. Le racisme hitlérien fera assister au règne tout-puissant de sa Horde et dernier gémissement de nos paisibles populations ahuries, il sera contesté que d’aussi révoltantes iniquités puissent être éclairées par notre soleil : - Le soleil du XXe siècle ! Prestige évanoui ! Le soleil est vieux ; ayant tout vu, il est bien pour tout revoir. »
  21. Pour nommer sa théorie des « quatre États confédérés », Charles Maurras s'est inspiré d'une expression utilisée par Henri Vaugeois en juin 1899[200].
  22. Maurras affirme en 1937 : « L'antisémitisme est un mal, si l'on entend par là cet antisémitisme de peau qui aboutit au pogrom et qui refuse de considérer dans le Juif une créature humaine pétrie de bien et de mal, dans laquelle le bien peut dominer. On ne me fera pas démordre d'une amitié naturelle pour les Juifs bien nés »[269]. Lors de la promulgation du statut des Juifs, Charles Maurras insiste de nouveau sur cette « distinction »[150], affirmant que l'État ne doit en vouloir « ni à la foi religieuse des Israélites, ni à leur sang, ni à leur bien »[270]. En 1941, il réaffirme la « spécificité » de son antisémitisme d'État : « On pose bien mal la question. Il ne s'agit pas de flétrir une race. Il s'agit de garder un peuple, le peuple français, du voisinage d'un peuple, qui, d'ensemble, vit en lui comme un corps distinct de lui […]. Le sang juif alors ? Non. Ce n'est pas quelque chose d'essentiellement physique. C'est l'état historique d'un membre du peuple juif, le fait d'avoir vécu et de vivre lié à cette communauté, tantôt grandie, tantôt abaissée, toujours vivace »[271]. Dans sa Philosophie de l'antisémitisme, Michel Herszlikowicz affirme que Maurras avait compris les dangers du racisme et des mouvements de masse mais que « son erreur consiste dans l'idée que l'antisémitisme peut devenir une conception dépouillée de toute sentimentalité et de toute brutalité[259] - [272]. »
  23. Par exemple, L'Action française publie l'éloge funèbre d'Abraham Bloch, grand-rabbin de Lyon, mort au combat au cours de la bataille de la Marne[277].
  24. « Ceux qui poussent à la guerre doivent avoir le cou coupé. Comme la guillotine n’est pas à la disposition des bons citoyens, ni des citoyens logiques, il reste à dire à ces derniers : ― Vous avez quelque part un pistolet automatique, un revolver, ou même un couteau de cuisine ? Cette arme, quelle qu’elle soit, devra servir contre les assassins de la paix dont vous avez la liste.Charles Maurras, L’Action française, 13 octobre 1935. »
  25. On cite parfois Jacques Bainville, pourtant selon les historiens William Blanc, Aurore Chéry et Christophe Naudin, « l'antisémitisme a été une constante chez Bainville »[292].
  26. En 1972, la prise de distance de Malraux implique un dernier hommage quand il affirme : « J'ai accepté de rédiger ce texte comme on se livre à un exercice. J'aurais aussi bien écrit sur Hegel. »

Références

  • Olivier Dard, Charles Maurras - le maître et l'action: le nationalisme intégral, Dunod, , 422 p. (ISBN 978-2-100-79376-1).
      • Simon Epstein, Les Dreyfusards sous l'Occupation, Paris, Albin Michel, coll. « Histoire », , 368 p. (ISBN 2226122257).
        1. p. 32.
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        29. p. 142-143.
        30. p. 175-176.
        31. p. 166-167.
        32. p. 180.
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        34. p. 255.
        35. p. 257.
        36. p. 267.
        37. p. 263.
        38. p. 270.
        39. p. 273.
        40. p. 310.
        41. p. 283.
        42. p. 298.
        43. p. 272.
        44. p. 279.
        45. p. 376.
        46. p. 392-393.
        47. p. 302.
        48. p. 381.
        49. p. 353.
        50. p. 368.
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                  […] voilà bien des années que l’Action française travaille : elle n’a jamais cessé de redire qu’elle s’adresse au Peuple français tout entier.
                  Elle l’a dit dans sa “Revue”. Elle l’a enseigné dans son Institut. […] En tête du journal destiné à propager quotidiennement sa pensée, l’Action française a le devoir de répéter qu’elle n’a jamais fait appel à un parti
                  […] À bas la République ! et, pour que vive la France, vive le Roi !
                  [signé] Henri Vaugeois, Léon Daudet, Charles Maurras, Léon de Montesquiou, Lucien Moreau, Jacques Bainville, Louis Dimier, Bernard de Vesins, Robert de Boisfleury, Paul Robain, Frédéric Delebecque, Maurice Pujo »
                  .
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                129. Lucien Rebatet et Pierre-Antoine Cousteau, Dialogue de « vaincus », (prison de Clairvaux, janvier-décembre 1950), Paris, éd. Berg international, 1999, p. 252.
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                131. Eugen Weber, L'Action française, 1985, p. 515.
                132. Eugen Weber, L'Action française, éd. Fayard, 1985, p. 509 et 515-516.
                133. Eugen Weber, op. cit., p. 513.
                134. Charles Maurras, Lettre à Jean Arfel du 12 avril 1948, dans Lettres de prison, éd. Flammarion, 1958, p. 114.
                135. Huguenin 2011, p. 475.
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                137. Rousso 1993, p. 749-750.
                138. Michel Winock, Le Siècle des intellectuels, Seuil, « Essais », 1997 (rééd. Seuil, « Points » 1999).
                139. Patrick Lienhardt et Olivier Philipponnat, Roger Stéphane : enquête sur l'aventurier, Paris, Grasset, , 879 p. (ISBN 2-246-52901-8), p. 302-303.
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                147. François-Marin Fleutot, Des Royalistes dans la Résistance, éd. Flammarion, 2000, p. 162.
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                149. Écrit de Charles Maurras dans L'Action française du 30 septembre 1941, cité par Stéphane Giocanti dans son livre "Charles Maurras", page 428 et repris dans "Céline, la race, le Juif" d'Annick Duraffour et de Pierre-André Taguieff, éditions Fayard, 2017, page 363.
                150. Huguenin 2011, p. 479.
                151. Le procès de Charles Maurras, éd. Albin Michel, 1946, p. 154-157.
                152. Collectif - Fondation Charles de Gaulle, De Gaulle et la Libération, Éditions Complexes, Paris, 2004, 221 p. (ISBN 978-2-8048-0016-1) [présentation en ligne], chapitre : « De Gaulle et la République des lettres », par Nicole Racine : p. 184-186 : « […] L'ordonnance du entraînait automatiquement la destitution et l'exclusion de toutes fonctions, offices publics et corps constitués de quiconque était déclaré coupable d'indignité nationale. Comme la loi l'y obligeait, l'Académie française déclara le 1er février, la vacance du fauteuil de Charles Maurras […], mais à l'initiative de Georges Duhamel ne vota pas sur la radiation. […] »
                  Ont participé à cet ouvrage : Claire Andrieu, Serge Berstein, Michèle et Jean-Paul Cointet, Laurent Douzou, René Hostache, Chantal Morelle, Nicole Racine, Odile Rudelle, Maurice Vaïsse, Dominique Veillon, Olivier Wieviorka. Textes tirés des actes du colloque des 6, 7 et 8 octobre 1994 organisé par la Fondation Charles-de-Gaulle, la Fondation nationale des sciences politiques, l'Association française de droit constitutionnel et la participation de l'université de Caen ; publié en version intégrale : Le rétablissement de la légalité républicaine, 1944, Éditions Complexes, 1996.
                153. Catherine Fillon, « Le procès de Charles Maurras (24-27 janvier 1945) », Histoire de la justice, no 18, , p. 59-71 (lire en ligne)
                154. Cité par Prévotat, p. 103.
                155. Site de l'Académie française, Charles Maurras (1868-1952) : « […] Sa condamnation entraînait automatiquement sa radiation de l'Académie (article 21 de l'ordonnance du 26 décembre 1944) ; il fut en fait décidé, lors de la séance du 1er février 1945, qu'on déclarerait vacant le fauteuil de Maurras, sans pour autant voter la radiation. Ainsi, Charles Maurras, comme le maréchal Pétain, mais à la différence d'Abel Hermant et Abel Bonnard, ne fut remplacé sous la Coupole qu'après sa mort. »
                156. Huguenin 2011, p. 483.
                157. Herbert Lottman, L’Épuration (1943–1953), Fayard, Paris, 1986, p. 308.
                158. Aron et Séchan 1997, p. 26.
                159. Aron et Séchan 1997, p. 26, n. 1.
                160. Huguenin 2011, p. 477.
                161. « Paris-presse, L’Intransigeant 5 octobre 1949 », sur Retronews - Le site de presse de la BnF (consulté le )
                162. Charles Maurras, Votre bel aujourd'hui, éd. Fayard, 1953, p. 457-458.
                163. Octave Martin (alias Charles Maurras), « Au service d'Hitler », Aspects de la France, 3 février 1949.
                164. Huguenin 2011, p. 498-499.
                165. Le texte est consultable en ligne sur le site de la bibliothèque provençale en ligne Ciel d'oc : [lire en ligne] ; on peut y relever parmi d'autres le passage suivant : « […] coume auriéu pouscu boulega lou bout dóu det en visto de servi, d’ajuda, de favourisa l’Alemagno, Iéu, l’anti-aleman, Iéu lou germanophobe e que lou sièu Toujours. dis moussu l’avoucat generau ? Acò n’es pas poussible. Acò se countre-dis. Sieù o bèn coume d’acò, vo bèn coume d’aqui; noun sièu d’acò emai d’aqui » (« […] comment aurais-je pu bouger le bout du doigt en vue de servir, d'aider, de favoriser l'Allemagne, Moi, l'anti-allemand, Moi le germanophobe attendu que je le suis toujours. dit Monsieur l'avocat général ? Cela n'est pas possible. Cela se contre-dit. Je suis ou bien comme ceci, ou bien comme cela : je ne suis pas d'ici et en plus de là. »
                166. Guillaume Gros, Philippe Ariès : un traditionaliste non-conformiste : de l'Action française à l'École des hautes études en sciences sociales, 1914-1984, éd. Presses Univ. Septentrion, 2008, 346 p. (ISBN 978-2-7574-0041-8) [présentation en ligne sur books.google.fr], pp. 105-106.
                167. Aron et Séchan 1997, p. 26, n.1.
                168. Agnès Callu, Patricia Gillet et textes de Charles Maurras, Lettres à Charles Maurras – Amitiés politiques, lettres autographes, 1898-1952, éd. Presses Univ. Septentrion, 2008, 256 p. (ISBN 978-2-7574-0044-9) [lire en ligne], p. 170 : « clinique Saint-Grégoire ».
                169. Site de l'Académie française, Charles Maurras (1868-1952) : « […] En 1952, sa santé déclinante le fit admettre à la clinique de Saint-Symphorien-lès-Tours, où il devait s’éteindre ».
                170. Jacques Prévotat, op. cit., pp. 520-521.
                171. Paris-presse, L’Intransigeant, 18 novembre 1952
                172. Lettre de l’abbé Giraud à Charles Forot, 4 juillet 1958, archives départementales de Privas, dossier 24J25.
                173. Gustave Thibon, « Hommage à Charles Maurras », Points et contre-points, juin 1953, p. 72.
                174. Giocanti 2006, p. 337.
                175. Giocanti 2006, p. 338.
                176. Pierre Gaxotte, Les autres et moi, éd. Flammarion, 1975, p. 42.
                177. Giocanti 2006, p. 464.
                178. Giocanti 2006, p. 309.
                179. Giocanti 2006, p. 208-209.
                180. Giocanti 2006, p. 209.
                181. Giocanti 2006, p. 363.
                182. Giocanti 2006, p. 475.
                183. Giocanti 2006, p. 250.
                184. Cahiers Charles Maurras, no 47, p. 54
                185. Giocanti 2006, p. 238.
                186. Giocanti 2006, p. 239.
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                188. Giocanti 2006, p. 183.
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                209. Walter Benjamin, Correspondance avec Theodor W. Adorno, t. I, 1910-1928, Aubier Montaigne, 1979, p. 320.
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                213. Thérèse-Charles Vallin, « Nationalisme algérien et nationalisme maurrassien », EM, 3, 1974, p. 43.
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                215. Charles Maurras, Dictionnaire politique et critique, compléments établi par les soins de Jean Pélissier, fascicule 4, Paris, Cahiers Charles Maurras [supplément au n° 9], p. 251, extrait d’un article de l’Action française, 21 décembre 1938. Cité par Olivier Dard dans « Les droites radicales et l’empire colonial au vingtième siècle » In À droite de la droite : Droites radicales en France et en Grande-Bretagne au xxe siècle, Presses universitaires du Septentrion, 2012. lire en ligne
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                Voir aussi

                Bibliographie

                Articles connexes

                Liens externes

                Notices et ressources

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