Onction des malades
L'onction des malades, appelĂ©e chez les catholiques « extrĂȘme-onction » avant le concile Vatican II, et sacrement des saintes huiles chez les orthodoxes, est un sacrement des Ăglises catholique romaine, orthodoxes de tout genre et anglicane par lequel celui qui souffre est confiĂ© Ă la compassion du Christ (parfois dit Christ mĂ©decin). L'onction est faite avec une huile bĂ©nite et est cĂ©lĂ©brĂ©e par un prĂȘtre.
Plusieurs Ăglises Ă©vangĂ©liques pratiquent aussi l'onction d'huile pour les malades, mais ne la considĂšrent pas comme un sacrement. L'onction des malades est une ordonnance de la prĂȘtrise dans l'Ăglise de JĂ©sus-Christ des saints des derniers jours (mormons).
Fondement biblique dans le Nouveau Testament
Jésus s'est servi de signes pour guérir, comme la salive et l'imposition des mains ( Marc 7, 32-36 et 8, 22625) la boue et les ablutions (Jean 9, 6). Matthieu a vu dans les guérisons qu'il opérait l'accomplissement de la prophétie d'Isaïe 53, 4 : "Il a pris nos infirmités et s'est chargé de nos maladies ". (Mathieu 8, 17). Et la compassion de Jésus pour les malades l'a conduit à annoncer qu'il dira lors du jugement dernier : "J'ai été malade et vous m'avez visité " (Matthieu 25, 36)[1].
Le principal fondement scripturaire de cette pratique sacramentelle se trouve dans l'ĂpĂźtre de Jacques (au chapitre 5, versets 14 et 15) : « Quelqu'un parmi vous est-il malade ? Qu'il appelle les anciens (presbytres ou prĂȘtres) de l'Ăglise, et que les anciens prient pour lui, en l'oignant d'huile au nom du Seigneur ; la priĂšre de la foi sauvera le malade, et le Seigneur le relĂšvera ; et s'il a commis des pĂ©chĂ©s, il lui sera pardonnĂ© ». Il est bien clair que cette prescription de l'apĂŽtre Jacques se situe dans le prolongement de l'action de JĂ©sus lui-mĂȘme, JĂ©sus dont les Ă©vangĂ©listes nous ont rapportĂ© avec insistance les guĂ©risons. Par exemple, dans l'Ăvangile selon Marc (Marc, 6, 13) les apĂŽtres prolongent cette action guĂ©rissante du Christ : « Ils chassaient beaucoup de dĂ©mons, et ils oignaient d'huile beaucoup de malades et les guĂ©rissaient. » Marc rapporte plus loin ce qu'annonce JĂ©sus concernant ses disciples : "Par mon nom (...) ils imposeront les mains aux malades et ceux-ci seront guĂ©ris. " (Marc 16, 17-18). Matthieu rapporte de son cĂŽtĂ© l' injonction de JĂ©sus Ă ses disciples: "GuĂ©rissez le malades." (Matthieu 10, 8)[2].
Dans l'Ăglise catholique
Le concile de Florence (1439-1445) prĂ©cise la matiĂšre et la forme du sacrement de l'extrĂȘme onction[3], et un siĂšcle plus tard, le Concile de Trente affirme Ă propos de l'extrĂȘme onction : « Cette onction sainte des malades a Ă©tĂ© instituĂ©e par le Christ notre Seigneur comme un sacrement du Nouveau Testament, vĂ©ritablement et proprement dit, insinuĂ© par Marc (6, 13), mais recommandĂ© aux fidĂšles et promulguĂ© par Jacques, apĂŽtre et frĂšre du Seigneur (Jacques 5, 14-15). »[4] Seuls les Ă©vĂȘques et les prĂȘtres sont habilitĂ©s Ă confĂ©rer l'onction des malades[5].
Si Ă partir de ses plus anciennes attestations au IIIe siĂšcle, le rituel de l'onction des malades est employĂ© principalement en vue de la guĂ©rison du corps[6], cette onction prend progressivement la forme du dernier sacrement des mourants (et plus seulement des malades), Ă partir notamment de l'Ă©poque carolingienne et de son association avec le viatique (derniĂšre communion) et la derniĂšre confession (in articulo mortis) On l'appellera alors extrĂȘme-onction[7]. AprĂšs le concile Vatican II (n°74-75 de la Constitution Sacrosanctum Concilium sur la liturgie), la Constitution apostolique Sacram unctionem infirmorum, du , a Ă©tabli le rite de l'onction par l'huile alors que le prĂȘtre prononce une seule fois : « Per istam sanctam unctionem et suam piissimam misericordiam adiuvet te Dominus gratia Spiritus Sancti, ut a peccatis liberatum te salvet atque propitius allevet. (« Par cette onction sainte, que le Seigneur, en sa grande bontĂ© vous rĂ©conforte par la grĂące de l'Esprit saint. Ainsi, vous ayant libĂ©rĂ© de tous pĂ©chĂ©s, qu'il vous sauve et vous relĂšve ») ». On parle aussi de sacrement des malades.
L'onction n'est donc plus le sacrement des malades en danger de mort mais un sacrement de tous les malades graves, avec l'aide du prĂȘtre et des proches du malade, sans que le sens du sacrement (rĂ©tablissement ou accompagnement spirituel) soit clairement dĂ©terminĂ©. L'onction des malades peut naturellement ĂȘtre rĂ©pĂ©tĂ©e (alors que l'extrĂȘme-onction Ă©tait plutĂŽt considĂ©rĂ©e comme un sacrement unique quoiqu'il pĂ»t ĂȘtre rĂ©pĂ©tĂ© dans le cas oĂč la personne, guĂ©rie, se trouvait de nouveau en danger de mort du fait d'une autre maladie ou accident)[8].
La grùce du sacrement des malades est d'abord le réconfort de paix et de courage apporté par l'Esprit Saint pour traverser les épreuves de la maladie et des approches de la mort. Elle permet l'union intime à la passion du Christ et ainsi une participation à son oeuvre de salut. Le sacrement aide enfin ceux qui sont proches de la mort, en les configurant à celle de Jésus, et il est alors accompagné du don eucharistique qui porte en l'occurrence le nom de viatique[9].
Dans les Ăglises orthodoxes et protestantes
Dans lâorthodoxie, lâoffice de lâonction des malades peut ĂȘtre cĂ©lĂ©brĂ© soit dans lâĂ©glise, dans lâassemblĂ©e des fidĂšles, soit Ă la maison du malade. Il est dâusage dâadministrer le Mercredi saint le sacrement de lâonction des malades Ă tous les fidĂšles, pour la guĂ©rison de leurs maux et de leurs pĂ©chĂ©s. Cet office comporte dâabord les sept priĂšres de bĂ©nĂ©diction de lâhuile, en grec ancien : ΔáœÏÎλαÎčÎżÎœ. Puis sont lus les sept passages des ĂpĂźtres et des Ăvangiles qui manifestent tout lâamour du Christ pour les malades et les pĂ©cheurs[10].
Les Ăglises protestantes n'ont pas toutes la mĂȘme position concernant la priĂšre pour les malades. En 1545, Martin Luther fournissait un ordre de culte pour l'onction des malades. Au XXIe siĂšcle, l'onction des malades est pratiquĂ©e Ă la demande du malade dans les Ăglises anglicanes, ĂvangĂ©liques et charismatiques. Ce sont les responsables de la communautĂ© (appelĂ©s parfois les anciens) qui prient et appliquent l'huile sur le front du malade selon ce qui est Ă©crit dans l'Ă©pĂźtre de Jacques citĂ©e plus haut.
Notes et références
- Catéchisme de l'Eglise Catholique, Paris, Mame Plon, , n° 1503-1506.
- Catéchisme de l'Eglise Catholique, Paris, Mame Plon, , n° 1506-1510.
- Denzinger, Paris, Cerf, , n°1324.
- Denzinger, Paris, Cerf, , n° 1695.
- Code de Droit Canon, n° 1003.
- Ortemann, p. 37
- cf. Concile de Trente, Session XIV, "Doctrina de sacramento extremae unctionis"
- Catéchisme de l'Eglise Catholique, Paris, Mame Plon, , n° 1514-1515.
- Catéchisme de l'Eglise Catholique, Paris, Mame Plon, , p. 1520-1524.
- Dieu est vivant, Catéchisme pour les familles par une équipe de chrétiens orthodoxes, éditions du Cerf, 1979, p. 369.
Voir aussi
Bibliographie
- Pierre AdnĂšs (prĂ©f. Henri PĂ©quignot), Lâonction des malades, Histoire et thĂ©ologie, Paris, Fac-Ăditions, , 91 p. (prĂ©sentation en ligne) (ThĂ©ologie nouvelle).
- Arnaud BĂ©rard, Lâonction des malades. Sacrement de guĂ©rison ou de prĂ©paration Ă la mort, Paris 1996.
- Antoine Chavasse, Ătude sur lâOnction des infirmes dans lâĂglise latine du IIIe au XIe siĂšcle. T. 1 : Du IIIe siĂšcle Ă la rĂ©forme carolingienne, Lyon 1942.
- Cardinal Jean-Marie Lustiger, Le sacrement de lâonction des malades, Paris, Cerf, (1re Ă©d. 1990), 80 p. (ISBN 978-2204107839).
- AimĂ©-Georges Martimort, LâĂglise en priĂšre, III, Les sacrements, Paris, Ăd. ID, , p. 132-153, PriĂšre pour les malades et onction sacramentelle.
- Henry Mottu, Le geste prophĂ©tique, pour une pratique protestante des sacrements, GenĂšve 1998, 204-212 [âOindre les maladesâ].
- Claude Ortemann, Le sacrement des malades, Lyon, Ă©ditions du chalet,
- Louis-Michel Renier, Lâonction des malades, Angers, 1996.
- Jean-Philippe Revel, TraitĂ© des sacrements, vol. VI, Lâonction des malades, Paris, Cerf, coll. « ThĂ©ologies », , 227 p. (prĂ©sentation en ligne)