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Liste Otto

La liste Otto est le nom donnĂ© au document de 12 pages intitulĂ© « Ouvrages retirĂ©s de la vente par les Ă©diteurs ou interdits par les autoritĂ©s allemandes », publiĂ© le , qui recense les livres interdits pendant l'occupation allemande de la France. Elle s'oppose Ă  la "liste Mathias" qui recense des ouvrages Ă  promouvoir (essentiellement des classiques de la littĂ©rature allemande et des ouvrages de propagande nazie)[1].

Les trois listes Otto

La première liste Otto, ainsi nommĂ©e en rĂ©fĂ©rence Ă  l'ambassadeur d'Allemagne Ă  Paris, Otto Abetz, reprend le principe de la première liste d'ouvrages interdits par les autoritĂ©s allemandes, la liste Bernhard, qui censure 143 livres politiques. Mais alors que celle-ci, mise en Ĺ“uvre Ă  Paris fin [2], a Ă©tĂ© Ă©laborĂ©e Ă  Berlin, la liste Otto, diffusĂ©e par la Propaganda Abteilung et la Propagandastaffel, est Ă©tablie avec la collaboration du Syndicat des Ă©diteurs français et des maisons d'Ă©dition. C'est Henri Filipacchi, chef du service des librairies Ă  Hachette, qui en rĂ©dige la version initiale après avoir consultĂ© les Ă©diteurs.

La première liste Otto[3] publiĂ©e en comporte 1 060 titres, parmi lesquels Mein Kampf[4] - [5] et des essais critiquant l'Allemagne ou le racisme, comme ceux du gĂ©nĂ©ral Mordacq, d'Edmond Vermeil, du R.P. Pierre Chaillet ou d'Hermann Rauschning, ainsi que des textes d'auteurs juifs, communistes ou opposants au nazisme, dont Heinrich Heine, Thomas Mann, Stefan Zweig, Max Jacob, Joseph Kessel, Sigmund Freud, Carl Gustav Jung, Julien Benda, LĂ©on Blum, Karl Marx, LĂ©on Trotski et Louis Aragon.

Après la rupture du pacte germano-soviétique en , d'autres ouvrages marxistes sont ajoutés à la liste. En , c'est au tour de livres d'auteurs britanniques et américains d'y figurer.

Application

La liste Otto doit ĂŞtre appliquĂ©e dans toutes les librairies, les maisons d'Ă©dition et les bibliothèques de la zone occupĂ©e. Dès sa diffusion, des opĂ©rations policières aboutissent Ă  la saisie de 713 382 livres. Ceux-ci sont acheminĂ©s dans un entrepĂ´t, avenue de la Grande-ArmĂ©e Ă  Paris, avant d’être pilonnĂ©s.

Le jour même de la diffusion de la liste, les autorités allemandes signent avec le Syndicat des éditeurs une « convention de censure » concernant les nouveaux ouvrages, qui définit les nouvelles règles en matière de censure. Le respect de cette « convention » permet aux éditeurs français de poursuivre leur activité en échange de l'application de l'interdiction de diffusion des ouvrages de la liste.

La liste Otto sera aussi effective quelques mois plus tard en zone libre à l’initiative du régime de Vichy. Dans les écoles et les bibliothèques, les préfets et les maires sont chargés de la faire respecter sous l'autorité du ministre de l’Éducation nationale et du directeur de l’Enseignement supérieur.

Versions suivantes

Une deuxième liste Otto de quinze pages prend le relais le . ClassĂ©e par Ă©diteurs, elle recense 1 170 titres interdits : ouvrages jugĂ©s anti-allemands, Ĺ“uvres d’écrivains juifs ou consacrĂ©s Ă  des Juifs, livres communistes, traductions d'auteurs anglais et polonais.

Une troisième édition de la liste des « ouvrages littéraires français non désirables » sera publiée le , complétée en annexe par une liste de 739 « écrivains juifs de langue française ».

Les listes

  • Liste Otto. Ouvrages retirĂ©s de la vente par les Ă©diteurs ou interdits par les autoritĂ©s allemandes. Paris, Messageries Hachette, 1940[6]
  • Liste Otto. Index par auteurs[7]
  • Deuxième liste Otto. UnerwĂĽnschte französische Literatur (« littĂ©rature française non dĂ©sirable »), Paris, Syndicat des Ă©diteurs, 1942
  • Troisième liste Otto : Ouvrages littĂ©raires non dĂ©sirables en France — troisième Ă©dition (complĂ©tĂ©e et corrigĂ©e) mai 1943 (feuille Excel)[8].

Notes et références

  1. Jacques Cantier, Histoire culturelle de la France au XXe siècle, Paris, Ellipses, , 179 p. (ISBN 978-2-7298-6403-3), p. 70
  2. Anton Ridderstad, « L'édition française sous l'Occupation (1940-1944) » [PDF], XV Skandinaviske romanistkongress, (consulté le ).
  3. « Liste Otto » [PDF], sur Gottfried Wilhelm Leibniz Bibliothek (consulté le )
  4. Manu Braganca, « La curieuse histoire de « Mein Kampf » en français », sur sudouest.fr, (consulté le ).
  5. Page 4/13 : « La Défense française » (dépôt : Librairie critique).
  6. « Ouvrages retirés de la vente par les éditeurs ou interdits par les autorités allemandes », sur Gallica, (consulté le ).
  7. « Liste Otto. Index par auteurs », sur Gallica, (consulté le ).
  8. Collectif, « La liste Otto », sur https://leautaud.com, (consulté le )

Voir aussi

Bibliographie

  • Jean-Pierre AzĂ©ma, « Paris Ă  l'heure allemande », in Le Monde, .
  • Les Cahiers du Futur, nÂş 2 - La dictature, Champ libre, 1974.
  • Marie Kuhlmann, Élus et bibliothĂ©caires aux prises avec la censure, (version en ligne).
  • Anton Ridderstad, L’Édition française sous l’Occupation (1940-44), Oslo, 2002 (version en ligne[PDF]).
  • Albrecht Betz et Stefan Martens, Les Intellectuels et l'Occupation : 1940-1944, collaborer, partir, rĂ©sister, Autrement, « mĂ©moires », 2004.
  • StĂ©phanie Debray, La vie culturelle sous l'Occupation, Paris, Perrin, , 407 p. (ISBN 978-2-262-01758-3, OCLC 638818764).
  • Pascal FouchĂ©, Les Éditions françaises sous l’Occupation : 1940-1944, vol., Paris, 1987
  • GĂ©rard Loiseaux, La littĂ©rature de la dĂ©faite et de la collaboration : d'après Phönix oder Asche? (PhĂ©nix ou cendres?) de Bernard Payr, Paris, Publications de la Sorbonne, coll. « Publications de la Sorbonne » (no 19/20), (ISBN 978-2-85944-069-5, OCLC 59871663)
  • Martine Poulain, Livres pillĂ©s, lectures surveillĂ©es : les bibliothèques françaises sous l'Occupation, Paris, Gallimard, coll. « NRF essais », , 587 p. (ISBN 978-2-07-012295-0, OCLC 638802414)

Articles connexes

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