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Eugénisme

L’eugĂ©nisme est « l’ensemble des mĂ©thodes et pratiques visant Ă  sĂ©lectionner le patrimoine gĂ©nĂ©tique des gĂ©nĂ©rations futures d'une population en fonction d'un cadre de sĂ©lection prĂ©dĂ©fini ». Il peut rĂ©sulter d’une politique Ă©tatique mais aussi d’une somme de dĂ©cisions individuelles prises par les futurs parents, dans une sociĂ©tĂ© oĂč primerait la recherche de l’« enfant parfait », ou du moins « indemne de nombreuses affections graves »[1].

Logo du deuxiÚme CongrÚs international de l'eugénisme, New York, 1921.

Le terme eugenics a Ă©tĂ© employĂ© pour la premiĂšre fois en 1883 par le scientifique britannique Francis Galton, dont les travaux participĂšrent Ă  la constitution de la mouvance eugĂ©niste. MenĂ© par des scientifiques et des mĂ©decins, l'eugĂ©nisme qui se met en place au tournant du XXe siĂšcle milite pour une politique d'Ă©radication de caractĂšres jugĂ©s handicapants ou de dĂ©veloppement de caractĂšres jugĂ©s bĂ©nĂ©fiques. Son influence sur la lĂ©gislation s’est traduite principalement dans trois domaines : la mise en place de programmes de stĂ©rilisation contrainte lĂ  oĂč la culture dominante le permettait, un durcissement de l’encadrement juridique du mariage et des mesures de restriction ou de promotion de tel ou tel type d’immigration.

En 1906, l'eugĂ©nisme se dĂ©veloppe aux États-Unis, avec John Harvey Kellogg, qui fournit des fonds pour aider Ă  la crĂ©ation de la « Race Betterment Foundation (en) » Ă  Battle Creek (Michigan)[2]. Dans un pays oĂč les lois contre le mĂ©tissage, sont en vigueur depuis le XVIIe siĂšcle. Ă  partir de 1907 y est pratiquĂ© la stĂ©rilisation contrainte. Plus de 64 000 personnes sont ainsi stĂ©rilisĂ©es entre 1907 et 1963[3]. La Loi d'immigration Johnson-Reed de 1924 est proposĂ©e dans un contexte de forte xĂ©nophobie visant les immigrants d'Europe orientale et mĂ©ridionale comme les Juifs issus des pays slaves, les Italiens, les Grecs, les Slaves et les Asiatiques[4] - [5].

À partir du 14 juillet 1933, le rĂ©gime nazi adopte une loi visant Ă  Ă©radiquer les maladies hĂ©rĂ©ditaires par l'euthanasie d'enfants handicapĂ©s. Dans les dĂ©cennies qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale, l'eugĂ©nisme a Ă©tĂ© largement abandonnĂ©, bien que certains pays occidentaux (les États-Unis, le Canada et la SuĂšde) aient continuĂ© Ă  pratiquer des stĂ©rilisations forcĂ©es. En 1983[6], Singapour a mis en place, ainsi que la Chine, un systĂšme qualifiĂ© d'eugĂ©niste[7].

Dans la période contemporaine, les progrÚs du génie génétique et le développement des techniques de procréation médicalement assistée ouvrent de nouvelles possibilités médicales (diagnostic prénatal, diagnostic préimplantatoire
) qui nourrissent les débats éthiques sur la convergence des techniques biomédicales et des pratiques sélectives.

L'Ă©ventuelle rĂ©surgence d’une forme d’eugĂ©nisme, aprĂšs des dĂ©cennies de promotion des droits de l’homme, se heurte Ă  des critiques en dehors du dĂ©bat Ă©thique. En particulier, l’eugĂ©nisme nĂ©gatif apparaĂźt comme une violation des droits humains fondamentaux, qui incluent le droit de reproduction. D'autre part, l'eugĂ©nisme peut aboutir Ă  une perte de diversitĂ© gĂ©nĂ©tique, perturbant artificiellement des millions d’annĂ©es d’évolution humaine.

Concept

L'eugénisme classique peut se définir comme un programme d'amélioration biologique de populations humaines par sélection artificielle. Elle se donne comme science et comme technique, calquée sur l'amélioration des plantes (par exemple, l'horticulture) et des animaux (élevage domestique).

Cet eugénisme s'est développé dans une période historique déterminée, des années 1860 (aprÚs la parution de l'Origine des espÚces de Charles Darwin, en 1859) jusqu'à la fin de la seconde guerre mondiale.

Jean Gayon distingue quatre « strates » de l'eugénisme à une échelle historique plus vaste, car l'eugénisme s'inscrit dans une longue tradition ancienne, susceptible de persister au XXIe siÚcle (« retour de l'eugénisme », ou « nouvel eugénisme »)[8].

« L'eugénisme est l'autodirection de l'évolution humaine » : logo du Second International Congress of Eugenics, en 1921, décrivant l'eugénisme comme un arbre dont le tronc est créé à partir des différents champs de connaissances de l'humanité.

Avant l'apparition du terme eugénisme, l'idée de sauvegarder les qualités d'une lignée familiale par le contrÎle des mariages remonte au moins à l'Antiquité. Dans la République, Platon soutient que, dans la Cité idéale (la Callipolis), l'élite de la société (les gardiens) doit se reproduire uniquement entre elle, afin que la population garde sa qualité ; en utilisant la métaphore animale, il soutient que « il faut de plus élever les enfants des [gardiens], non ceux des [classes laborieuses], si l'on veut maintenir au troupeau toute son excellence »[9].

Ce thÚme est repris par la littérature utopique des XVIe et XVIIe siÚcles, comme Utopia de Thomas More, ou La cité du Soleil de Tommaso Campanella. Campanella soutient qu'il faut unir « grasses avec les maigres, et les maigrelettes avec les gros », « pour modérer une qualité par son contraire » explique Constance Mercadante[10].

Perfectionner l'espÚce humaine par des mariages judicieux (« faire de beaux enfants ») devient un thÚme médical, puis politique, notamment avec Condorcet dans Esquisse d'un tableau historique des progrÚs de l'esprit humain (1795). Selon Gayon, ces idées sont « transculturelles et transhistoriques ».

La deuxiĂšme strate est reprĂ©sentĂ©e par une coupure majeure, avec la crĂ©ation du mot eugĂ©nisme par Francis Galton. Les idĂ©es prĂ©cĂ©dentes laissent la place Ă  une idĂ©ologie complexe et ambiguĂ«, dans un contexte historique prĂ©cis. L'eugĂ©nisme se prĂ©sente Ă  la fois comme une technoscience et comme une biopolitique, autorisant des interprĂ©tations multiples allant de l'hygiĂ©nisme humaniste jusqu'au racisme d'État de l'Allemagne nazie[8].

La troisiĂšme strate apparait Ă  partir des annĂ©es 1910, oĂč l'eugĂ©nisme n'est plus seulement une idĂ©ologie, mais aussi une pratique institutionnelle avec des formes juridico-politiques (lois eugĂ©nistes) trĂšs variĂ©es selon les pays. AprĂšs la seconde guerre mondiale, les termes eugĂ©nisme et eugĂ©nique sont peu Ă  peu discrĂ©ditĂ©s, jusqu'Ă  associer de fait l'eugĂ©nisme et le nazisme[11].

La quatriĂšme strate est constituĂ©e par l'apparition d'un nouveau contexte scientifique. L'eugĂ©nisme classique « s'appuyait sur une science de l'hĂ©rĂ©ditĂ© plus fantasmĂ©e que rĂ©elle »[11]. Avec le dĂ©veloppement d'une gĂ©nĂ©tique mĂ©dicale dans la deuxiĂšme moitiĂ© du XXe siĂšcle, apparaissent des pratiques et des techniques telles que le conseil gĂ©nĂ©tique, le diagnostic prĂ©natal, le diagnostic prĂ©implantatoire
 avec le choix individuel ou parental de poursuivre ou non une grossesse[12].

Ce serait alors un retour Ă  l'eugĂ©nisme (1992), titre de l'ouvrage de Troy Duster (en), d'un eugĂ©nisme nouveau ou domestique, oĂč ce n'est pas l'État ou sa biopolitique qui contrĂŽle la population et sa reproduction, mais les individus eux-mĂȘmes qui utilisent les moyens biotechnologiques mis Ă  leur disposition pour Ă©viter des souffrances rĂ©elles ou anticipĂ©es. D'oĂč l'existence de plusieurs dĂ©bats Ă©thiques, portant non seulement sur la difficultĂ© de distinguer entre ce qui est eugĂ©nique (sens pĂ©joratif) et ce qui ne l'est pas, mais aussi sur les distinctions individu et sociĂ©tĂ©, intentions et effets, contrainte et volontariat[12].

Origines de l’eugĂ©nisme galtonien

Francis Galton, l'inventeur du terme « eugénisme ».

L'Ă©tymologie du mot « eugĂ©nisme » est grecque : eu (« bien ») et gennaĂŽ (« engendrer »), ce qui signifie littĂ©ralement « bien naĂźtre ». Ce nĂ©ologisme a Ă©tĂ© utilisĂ© pour la premiĂšre fois en 1883 par le Britannique Francis Galton, cousin de Charles Darwin par le biais d'Erasmus Darwin. La prĂ©occupation de Galton pour l’amĂ©lioration de l’espĂšce humaine prĂ©cĂšde nĂ©anmoins largement l’invention de ce terme. À la fin des annĂ©es 1850, la lecture de L'Origine des espĂšces de son cousin Charles Darwin renforce sa conviction sĂ©lectionniste. En 1869, dans Hereditary Genius, une Ă©tude consacrĂ©e au gĂ©nie des grands hommes britanniques, il conclut Ă  son caractĂšre hĂ©rĂ©ditaire[13]. Il lui paraĂźt alors nĂ©cessaire de maintenir les lignĂ©es des grands hommes de la nation par une organisation rationnelle des mariages, une discipline qu’il dĂ©signe sous le nom de « viriculture ». En 1883, Galton publie Inquiries into human faculty and its development : la viriculture y devient l’eugĂ©nisme que Galton considĂšre comme la « science de l’amĂ©lioration des lignĂ©es » et qu’il entend appliquer aux ĂȘtres humains sur le modĂšle de l’élevage sĂ©lectif des animaux.

Eugénisme, spencérisme, pensée évolutionniste

L'eugénisme ou le galtonisme est souvent amalgamé au spencérisme.

Or, le galtonisme est une conception conservatrice ou néoconservatrice de l'évolution des sociétés forgée par Francis Galton. C'est forcer la sélection naturelle par une sélection artificielle contre des tares supposées, préjugeant une dégénérescence de la société et des individus.

Tandis que le spencĂ©risme est une conception libĂ©rale de l'Ă©volution des sociĂ©tĂ©s forgĂ©e par Herbert Spencer. C'est laisser faire la sĂ©lection naturelle au sein de la sociĂ©tĂ© permettant une rĂ©gĂ©nĂ©rescence de la sociĂ©tĂ© par elle-mĂȘme en Ă©liminant naturellement, sans aide extĂ©rieure, les moins adaptĂ©s Ă  l'environnement social.

Spencerisme et galtonisme sont des pensées évolutionnistes dont la base centrale est exclusivement la sélection naturelle bien que d'autres facteurs soient mis en jeu dans l'évolution de la nature et des sociétés.

Inquiétude de la dégénérescence

Pour le philosophe Jean-Paul Thomas, « l’eugĂ©nisme [
] est habitĂ© par l’obsession de la dĂ©cadence »[14]. Dans le contexte de la rĂ©volution industrielle, qui provoque un mouvement d’urbanisation et de prolĂ©tarisation des populations les plus pauvres, la prolifĂ©ration dĂ©sordonnĂ©e des classes laborieuses constitue un motif d’inquiĂ©tude profond pour les Ă©lites victoriennes[15]. Les maux sociaux et sanitaires (tuberculose, syphilis, alcoolisme
) qui se multiplient dans le Royaume-Uni apparaissent comme autant de manifestations de la contamination de l’espĂšce humaine par les tares congĂ©nitales vĂ©hiculĂ©es par les couches les plus pauvres de la population. Comme l’indique le succĂšs des thĂ©ories malthusiennes, la diffĂ©rence de fĂ©conditĂ© entre classes attire plus particuliĂšrement l’attention des scientifiques britanniques. Galton n’échappe pas Ă  la rĂšgle. À terme, les individus les plus pauvres, conçus comme naturellement infĂ©rieurs, lui semblent devoir irrĂ©mĂ©diablement submerger les reprĂ©sentants des classes sociales aisĂ©es qui cumulent les caractĂ©ristiques physiques, intellectuelles et morales les plus hautes.

SĂ©paration sociale

Pour Galton, les classes sociales possĂšdent des qualitĂ©s propres, transmises hĂ©rĂ©ditairement. La prĂ©servation des qualitĂ©s des familles de bonne lignĂ©e nĂ©cessite d’éviter le mĂ©lange des sangs qui ne peut conduire qu’à la disparition des caractĂšres les plus hauts de la race humaine. Cette reprĂ©sentation du monde, qui prĂ©existe Ă  ses travaux « eugĂ©niques », le conduit Ă  traduire les diffĂ©rences sociales sur un strict plan biologique. Elle valorise explicitement un modĂšle d’homme qui correspond prĂ©cisĂ©ment au groupe social dont Galton est issu : l’élite de la sociĂ©tĂ© britannique correspond pour lui aux professions libĂ©rales, aux vieilles familles de l’aristocratie terrienne et aux hommes de science. Les nouvelles fortunes, bĂąties sur l’industrie et le commerce, ne trouvent pas grĂące Ă  ses yeux[16]. Sur le plan politique, l’eugĂ©nisme galtonien apparaĂźt ainsi comme une thĂ©orie dĂ©fensive qui vise Ă  protĂ©ger un groupe social dĂ©fini contre une menace largement fantasmĂ©e. Sous couvert d’une apparente scientificitĂ©, elle revient en effet Ă  prĂ©server le maintien de l’ordre social en exigeant une stricte limitation des unions entre les individus d’origines sociales diffĂ©rentes[17].

Civilisation contre la sélection naturelle

Les eugĂ©nistes trouvent dans la lecture de L'Origine des espĂšces de Darwin, et dans le dĂ©placement de ses conclusions Ă  l’espĂšce humaine, une clĂ© explicative de leur hantise de la dĂ©cadence. De leur point de vue, la civilisation, en enrayant les mĂ©canismes de la sĂ©lection naturelle, court Ă  sa perte. Les dispositifs sociaux de protection des plus pauvres, des malades et des plus faibles en gĂ©nĂ©ral constituent la premiĂšre de leurs cibles. Pour ClĂ©mence Royer, la premiĂšre traductrice de Charles Darwin en France, la charitĂ© chrĂ©tienne puis les valeurs de solidaritĂ© dĂ©veloppĂ©es avec les idĂ©es dĂ©mocratiques ne peuvent que mener Ă  la dĂ©gĂ©nĂ©rescence de la race humaine[18].

Galton partage largement les positions de Royer. Comme nombre de ses confrĂšres eugĂ©nistes aprĂšs lui, il s’est converti, aprĂšs la lecture de l’ouvrage phare de son cousin, Ă  un antichristianisme farouche. Sur le plan politique, s’il n’embrasse pas explicitement le credo de l’anthropologue français Vacher de Lapouge qui entendait substituer Ă  la formule rĂ©volutionnaire « LibertĂ©, Ă©galitĂ©, fraternitĂ© » celle de « DĂ©terminisme, InĂ©galitĂ©, SĂ©lection »[19], il s’oppose aux principes de l’égalitĂ© naturelle et donc politique des hommes[20].

Science, alliée du progrÚs sociétal ?

MalgrĂ© la menace de la dĂ©gĂ©nĂ©rescence, l’eugĂ©nisme reste marquĂ© par quelque optimisme (voir l'article Scientisme), pourvu que l’homme daigne utiliser les enseignements de la science. Le salut de la civilisation, en tout cas occidentale, passe par la prise en compte par le politique des acquis scientifiques. Galton place ainsi ses espoirs dans la science, prĂ©sentĂ©e comme un substitut prĂ©fĂ©rable aux religions traditionnelles[21]. Vacher de Lapouge rĂ©sume cette idĂ©e, centrale chez les eugĂ©nistes, quand il affirme que « c’est la science qui nous donnera [
] la religion nouvelle, la morale nouvelle, et la politique nouvelle »[22]. Si les rĂšgles sociales sont venues perturber le processus de sĂ©lection naturelle, il faut donc pour les eugĂ©nistes exercer, en lieu et place de la nature, les mesures sĂ©lectives indispensables Ă  l’évolution de l’espĂšce humaine, bien que pas nĂ©cessairement par les mĂȘmes moyens (on peut Ă©voquer par exemple Singapour accordant des primes Ă  des couples dont les deux membres sont issus de l'enseignement supĂ©rieur).

Paradigme héréditariste

L’eugĂ©nisme s’appuie, avec la gĂ©nĂ©tique balbutiante, sur la croyance que les capacitĂ©s et les aptitudes humaines sont dĂ©terminĂ©es par des caractĂšres biologiques transmissibles. À l’époque de la premiĂšre formulation des thĂ©ories eugĂ©nistes de Galton, les travaux de Gregor Mendel ne sont pas encore connus de la communautĂ© scientifique. La connaissance des lois de l’hĂ©rĂ©ditĂ© n’est basĂ©e que sur l’expĂ©rience des agriculteurs dans la sĂ©lection de leurs variĂ©tĂ©s animales et vĂ©gĂ©tales. Toute l’ambition de Galton est de montrer le caractĂšre hĂ©rĂ©ditaire des « capacitĂ©s naturelles » de l’homme et d’en comprendre le mĂ©canisme de transmission dans le but avouĂ© de dĂ©couvrir les moyens d’« amĂ©liorer la race humaine » sur le modĂšle de l’élevage animal. DĂšs 1869, il lui paraĂźt ainsi « tout Ă  fait possible de produire une race humaine surdouĂ©e par des mariages judicieux pendant plusieurs gĂ©nĂ©rations consĂ©cutives »[23].

Souhaitant dĂ©couvrir les lois de l’hĂ©rĂ©ditĂ© qui seules pourraient lui permettre de donner une base scientifique Ă  son projet d’amĂ©lioration de l’espĂšce, il adopte une mĂ©thode statistique, inĂ©dite Ă  l’époque dans le domaine de la biologie, en s’appuyant sur la loi normale gaussienne, dont la densitĂ© de distribution dessine une courbe en cloche[24]. Il applique la distribution normale Ă  l’étude des populations, comme l’avait fait peu avant lui le Belge Adolphe Quetelet. Il mesure ainsi les variations par rapport Ă  la moyenne de diffĂ©rents Ă©lĂ©ments d’une population de pois de senteur et de leur gĂ©nĂ©ration suivante, et commence Ă  collecter des donnĂ©es sur la taille et le poids de la population britannique.

Le plus important rĂ©side dans le prĂ©supposĂ© de sa dĂ©marche. Galton applique un schĂ©ma explicatif trĂšs diffĂ©rent de son confrĂšre belge. LĂ  oĂč Quetelet dĂ©duit des rĂ©gularitĂ©s statistiques qu’il observe des « causes constantes morales », Galton conclut invariablement Ă  l’origine biologique et hĂ©rĂ©ditaire des phĂ©nomĂšnes qu’il Ă©tudie[25]. MalgrĂ© une mĂ©thode innovante, les rĂ©sultats de Galton furent minces. En 1892, il reconnaĂźt que « le grand problĂšme de l’amĂ©lioration de la race humaine n’a pas pour l’instant dĂ©passĂ© le stade de l’intĂ©rĂȘt acadĂ©mique »[26].

Entre la science et l'idéologie

Alexis Carrel, prix Nobel de médecine 1912, connut un succÚs international avec son essai eugéniste L'homme, cet inconnu.

Une part du succĂšs de l’eugĂ©nisme tient aux liens Ă©troits qu’il entretient avec les principaux courants idĂ©ologiques de la fin du XIXe siĂšcle : l'Ă©volutionnisme, qu’il soit libĂ©ral-spencĂ©rien ou marxiste, le malthusianisme, le darwinisme social ou le racisme trouveront tous Ă  s’articuler Ă  l’eugĂ©nisme. Comme l’ensemble de ces idĂ©ologies, l’eugĂ©nisme tire sa lĂ©gitimitĂ© des rapports qu’il entretient avec la science. L’eugĂ©nisme peut ainsi ĂȘtre considĂ©rĂ© comme une « idĂ©ologie scientifique » au sens que lui donne Georges Canguilhem. Il s’appuie sur une science instituĂ©e dont il utilise le prestige pour lĂ©gitimer un projet politique[27]. L’eugĂ©nisme partage avec la science biologique des prĂ©supposĂ©s hĂ©rĂ©ditaristes et, pour un temps, une mĂȘme approche statistique des populations. Pour AndrĂ© Pichot, ce rapport n’est cependant pas univoque. Si la science biologique participe Ă  la lĂ©gitimation de la doctrine eugĂ©niste, cette doctrine renforce en retour le rĂŽle social de la science. Le projet eugĂ©niste participe ainsi Ă  la construction de l’image que la science de la fin du XIXe siĂšcle se fait d’elle-mĂȘme et qu’elle veut reflĂ©ter aux yeux du reste de la sociĂ©tĂ© : l’eugĂ©nisme figure aux cĂŽtĂ©s de la vaccination ou de l’électricitĂ© au nombre des bienfaits que la science entend offrir Ă  l’humanitĂ©. La gĂ©nĂ©tique naissante et encore mal assurĂ©e y trouve la clĂ© de voĂ»te de son projet de recherche et de sa justification idĂ©ologique.

Darwin et l'eugénisme

Avant mĂȘme la dĂ©finition du terme « eugĂ©nisme », Francis Galton s’est inspirĂ© de la thĂ©orie de l’évolution de Charles Darwin dans ses travaux, amenant ce dernier Ă  se prononcer sur la question de la doctrine eugĂ©niste naissante. Dans son ouvrage La Filiation de l'homme et la sĂ©lection liĂ©e au sexe, paru en 1871, Darwin reprend les conclusions de son cousin sur l’hĂ©rĂ©ditĂ© en affirmant qu'il est probable que le « talent » et le « gĂ©nie » chez l'Homme soient hĂ©rĂ©ditaires[28]. Il lui paraĂźt Ă©galement vraisemblable que les protections sociales vont Ă  l’encontre de la sĂ©lection naturelle[29]. Il se refuse cependant Ă  adopter les conclusions politiques de Galton, plaçant l’esprit de fraternitĂ© humaine au-dessus des lois scientifiques : « nous ne saurions restreindre notre sympathie, en admettant mĂȘme que l’inflexible raison nous en fĂźt une loi, sans porter prĂ©judice Ă  la plus noble partie de notre nature », dĂ©clare-t-il ainsi dans le mĂȘme ouvrage[30]. Ce n’est qu’aprĂšs la mort de son cousin qui intervint en 1882 que Galton commença Ă  appeler « eugĂ©nisme » sa philosophie sociale. Le nom de Darwin y resta cependant durablement attachĂ©, Ă  cause de l’implication de sa famille — outre Galton, son fils Leonard Darwin en fut l’un des promoteurs les plus influents au Royaume-Uni — et des principaux dĂ©fenseurs du darwinisme dans le dĂ©veloppement de la doctrine. Les travaux de Galton scellent en effet une union durable entre la science en gĂ©nĂ©ral, la gĂ©nĂ©tique en particulier, et la doctrine eugĂ©niste[31].

Génétique des populations

Pour AndrĂ© Pichot ou Troy Duster, le succĂšs de l’eugĂ©nisme qui s’amplifie au dĂ©but du XXe siĂšcle est en partie dĂ©terminĂ© par des causes internes Ă  l’histoire des sciences, et notamment par la prĂ©pondĂ©rance de la gĂ©nĂ©tique des populations dans le domaine de la biologie[32].

L’approche de Galton, qui deviendra la biomĂ©trie avec l’apport de Karl Pearson, pose en effet les jalons de la gĂ©nĂ©tique des populations qui restera, avec sa variante mendĂ©lienne, l’approche dominante en matiĂšre de gĂ©nĂ©tique jusqu’à la Seconde Guerre mondiale. La gĂ©nĂ©tique des populations se fixe l’objectif de dĂ©couvrir les lois du modĂšle darwinien de l’évolution en s’appuyant sur des mĂ©thodes statistiques. Ses deux axes de recherche principaux sont l’étude de la frĂ©quence de la version des gĂšnes dans une population (frĂ©quence allĂ©lique) et le rĂŽle jouĂ© par la sĂ©lection naturelle dans cette rĂ©partition[33]. En s’appuyant sur la gĂ©nĂ©tique des populations, la thĂ©orie de l’évolution connut des dĂ©veloppements importants jusqu’à la formulation de la thĂ©orie synthĂ©tique de l'Ă©volution (ou nĂ©o-darwinisme) qui constitue toujours le schĂ©ma explicatif dominant.

EugĂ©nisme et gĂ©nĂ©tique des populations, dont les origines sont liĂ©es Ă  travers les figures de Galton et Pearson, avaient donc des prĂ©occupations et des mĂ©thodes trĂšs proches : il s’agissait, grĂące au recours Ă  l’étude statistique de grands segments de population, de dĂ©couvrir les lois rĂ©gissant l’évolution. Une grande partie des reprĂ©sentants de la gĂ©nĂ©tique des populations de la premiĂšre moitiĂ© du XXe siĂšcle a ainsi exprimĂ© des positions eugĂ©nistes, militant mĂȘme souvent ouvertement dans les principales organisations du mouvement. Le biologiste August Weismann (1834-1914), auteur de la thĂ©orie du plasma germinatif, Ă©tait membre de la sociĂ©tĂ© d’hygiĂšne raciale allemande[34]. L’AmĂ©ricain Charles Davenport, l’un des principaux promoteurs de la thĂ©orie mendĂ©lienne aux États-Unis, fut l’un des leaders de l’eugĂ©nisme amĂ©ricain. Les prestigieux biologistes Julian Huxley, John Haldane ou Ronald Fisher, tenu pour le fondateur de la gĂ©nĂ©tique moderne, militĂšrent quant Ă  eux pour un eugĂ©nisme moins dur, que l’on qualifiait de « rĂ©formiste »[35].

Au-delĂ  du champ de la biologie, l’inventeur Alexander Graham Bell ou Luther Burbank, un influent agronome amĂ©ricain, ont Ă©tĂ© d’actifs militants eugĂ©nistes. En France les plus cĂ©lĂšbres des scientifiques eugĂ©nistes furent les prix Nobel de mĂ©decine Alexis Carrel et Charles Richet.

Racisme

Charles Richet, prix Nobel de médecine 1913 et président de la Société française d'eugénisme de 1920 à 1926.

DĂšs l’origine, l’eugĂ©nisme de Galton est imprĂ©gnĂ© du racisme de son promoteur, dont les prĂ©jugĂ©s initiaux ont Ă©tĂ© renforcĂ©s par le voyage qu’il a menĂ© en Afrique du Sud en 1850[36]. Racisme et eugĂ©nisme se mĂȘlent frĂ©quemment dans les argumentaires des eugĂ©nistes conservateurs, en particulier lorsqu’ils abordent la question de l’immigration. Galton, comme beaucoup de ses contemporains, prenait le fait d'ĂȘtre anglais pour un fait racial.

Cette date de 1850 mĂ©rite d'ĂȘtre remarquĂ©e : en effet, L'Origine des espĂšces ne paraĂźtra qu'en 1859, et ne peut donc avoir eu la moindre influence sur ce point de vue.

Au dĂ©but du XXe siĂšcle, la prĂ©occupation de « dĂ©tĂ©rioration nationale » se renforce avec la mise en place d’outils statistiques de mesure des conscrits. Sur la base de ces chiffres, on conclut rĂ©guliĂšrement Ă  une dĂ©gĂ©nĂ©rescence physique et intellectuelle de la population. On s’inquiĂšte particuliĂšrement des diffĂ©rences de fĂ©conditĂ© entre les « races nordiques » et les nouveaux migrants venus de l’est. La peur de la fĂ©conditĂ© des classes populaires s’accompagne ainsi rĂ©guliĂšrement d’inquiĂ©tudes concernant celle des migrants catholiques irlandais et juifs polonais, russes et allemands, qui alimentent un antisĂ©mitisme latent[37], mais seront Ă©galement un des Ă©lĂ©ments plus tard de la guerre civile d'Irlande du Nord.

Aux États-Unis la prĂ©occupation est plus forte encore et aboutira Ă  une limitation sĂ©vĂšre de l’immigration. Les eugĂ©nistes sont Ă  la pointe du combat pour une lĂ©gislation anti-immigration. Pour le cĂ©lĂšbre Ă©conomiste Irving Fisher la focalisation de la sociĂ©tĂ© sur les questions migratoires « Ă©tait une occasion rĂȘvĂ©e pour amener les gens Ă  s’intĂ©resser Ă  l’eugĂ©nisme »[38].

SituĂ© dans une perspective plus vaste que la simple proclamation du devoir de dĂ©fense de la « puretĂ© de la race », le projet de nombreux eugĂ©nistes Ă©tait d’amĂ©liorer les capacitĂ©s de l’humanitĂ© dans son ensemble. Pour Charles Richet, le prix Nobel français de mĂ©decine de 1913, « lorsqu’il s’agira de la race jaune, et, Ă  plus forte raison, de la race noire, pour conserver, et surtout pour augmenter notre puissance mentale, il faudra pratiquer non plus la sĂ©lection individuelle comme avec nos frĂšres les blancs, mais la sĂ©lection spĂ©cifique, en Ă©cartant rĂ©solument tout mĂ©lange avec les races infĂ©rieures ». Il faut ainsi qu’une autoritĂ© conduise l’« Ă©limination des races infĂ©rieures » puis celle des « anormaux »[39].

Le rĂ©gime nazi consommera tragiquement les noces du racisme et de l’eugĂ©nisme, en s’attaquant avec ses lois de stĂ©rilisation aux Noirs nĂ©s de l’occupation de la Ruhr par les troupes coloniales françaises en 1923 (un Ă©pisode dĂ©noncĂ© comme la Honte noire avant mĂȘme l’avĂšnement du nazisme) puis en appliquant mĂ©thodiquement le programme d’élimination des « races infĂ©rieures » aux Juifs et aux Tsiganes ; en Allemagne un concept raciste avait Ă©tĂ© introduit par un mĂ©decin, l'hygiĂšne raciale, dĂšs le dĂ©but du siĂšcle.

Le sociologue allemand Théo Welfringer a d'ailleurs souligné les liens étroits entre ces deux doctrines à cette période de l'histoire : « L'eugénisme, c'est un racisme médical ».

Dimensions hygiénistes et esthétiques

L’eugĂ©nisme s’accorda aussi largement avec le dĂ©goĂ»t pour le dĂ©sordre, la saletĂ© et la matĂ©rialitĂ© organique qui accompagna le dĂ©veloppement des courants hygiĂ©nistes dans les sociĂ©tĂ©s occidentales. L’obsession pour le culte du corps parfait qui s’incarna dans la construction de stĂ©rĂ©otypes nationaux virils constitua un des aspects de ce rapport renouvelĂ© au corps. Le nazisme envisagea mĂȘme de porter ce principe Ă  son extrĂ©mitĂ©, en rĂ©flĂ©chissant Ă  une lĂ©gislation qui conduirait Ă  l’élimination des prisonniers de droit commun les plus laids[40].

Mouvement eugéniste

Arthur Balfour, prononça le discours d'ouverture du Ier congrĂšs international d’eugĂ©nisme en 1912.

Loin de se cantonner Ă  un petit cercle de croyants ou de scientifiques marginaux, la doctrine eugĂ©niste s’est progressivement rĂ©pandue dans le grand public. Au dĂ©but du XXe siĂšcle, le mot « eugĂ©nisme » devint d’usage courant (on parlait ainsi de « mariage eugĂ©nique ») et les manifestations et rassemblements visant Ă  promouvoir la doctrine rencontrĂšrent de larges Ă©chos[41]. Galton lui-mĂȘme fut anobli en 1909 et reçut en 1910 la trĂšs prestigieuse mĂ©daille Copley dĂ©cernĂ©e par la Royal Society[42]. Il est le premier organisateur d’un mouvement qui devint rapidement international. En 1912, se tint ainsi Ă  Londres le Ier congrĂšs international d’eugĂ©nisme dont le discours d’ouverture fut assurĂ© par l’ancien Premier ministre Arthur Balfour[43].

LĂ©gislation ou Ă©ducation

Si le principe gĂ©nĂ©ral de l’eugĂ©nisme Ă©tait fixĂ© — il s’agissait d’amĂ©liorer gĂ©nĂ©tiquement l’espĂšce humaine grĂące aux progrĂšs de la science —, de nombreuses questions se posĂšrent quant Ă  son application concrĂšte. Le mouvement eugĂ©niste hĂ©sita, Ă  l’image de Galton, entre deux possibilitĂ©s : l’intervention de l'État et l’éducation des masses. Galton pensait originellement que le programme eugĂ©niste devait s’appuyer sur la libre volontĂ© des personnes et que seule l’inculcation d’un « mode de pensĂ©e » eugĂ©niste pouvait avoir des effets durables[44]. Il s’agissait d’ancrer dans les esprits une nouvelle maniĂšre de voir le monde qui devait mettre l’eugĂ©nisme au premier rang des prĂ©occupations humaines. Plus tardivement, la position de Galton et celle d’une grande partie des eugĂ©nistes conservateurs Ă©volua. L’intervention de l’État, concernant notamment les cas considĂ©rĂ©s comme les plus graves, devint une de leurs principales revendications. MĂȘme ceux qui, se rĂ©clamant du darwinisme social, se refusaient Ă  voir l’État intervenir dans la vie sociale et Ă©conomique estimĂšrent indispensable de s’écarter sur ce point de la doctrine du « laissez-faire » pour adopter des mesures de « sĂ©lection artificielle »[45].

Eugénisme « négatif » et « positif »

Les eugĂ©nistes se divisaient aussi sur la question des moyens Ă  mettre en Ɠuvre pour parvenir Ă  leur but. Les partisans d’un « eugĂ©nisme nĂ©gatif » comptaient amĂ©liorer l’ĂȘtre humain en Ă©liminant les gĂšnes indĂ©sirables de la population : la restriction du mariage, la stĂ©rilisation, voire l’élimination physique des individus porteurs des gĂšnes indĂ©sirables furent les options dĂ©fendues par l'« eugĂ©nisme nĂ©gatif ». L'« eugĂ©nisme positif » comptait quant Ă  lui amĂ©liorer l’espĂšce en stimulant la reproduction des individus dont le potentiel gĂ©nĂ©tique lui apparaissait comme le plus Ă©levĂ©[46]. Il militait par exemple pour la mise en place d’incitations financiĂšres devant favoriser la procrĂ©ation des classes favorisĂ©es ou des individus jugĂ©s conformes aux canons physiques et moraux. Les eugĂ©nistes rĂ©formistes ou marxistes entendaient pour leur part lever les barriĂšres de classes qui empĂȘchaient selon eux les meilleurs Ă©lĂ©ments de l’humanitĂ© de pouvoir unir leur sang[47]. La distinction entre eugĂ©nisme positif et nĂ©gatif n'est pas disjonctive : les deux positions peuvent s'exclure dans un cadre moral, mais se sont parfois aussi combinĂ©es dans la pratique.

Eugénisme « classique » et « réformiste »

Loin d’ĂȘtre monolithique, le mouvement eugĂ©niste Ă©tait secouĂ© de dĂ©bats rĂ©currents concernant les questions du mariage, du divorce ou de la sexualitĂ©. La mĂ©connaissance des rĂšgles prĂ©cises de l’hĂ©rĂ©ditĂ© ouvrait par ailleurs de nombreuses controverses au sein mĂȘme de la communautĂ© scientifique. Les milieux eugĂ©nistes qui partageaient les mĂȘmes prĂ©occupations et souvent les mĂȘmes membres Ă©taient logiquement traversĂ©s par les mĂȘmes clivages. De maniĂšre schĂ©matique, on peut avec Daniel Kevles, distinguer deux familles principales d’eugĂ©nistes : les eugĂ©nistes « classiques » ou conservateurs qui accordent un rĂŽle prĂ©pondĂ©rant voire exclusif Ă  l’hĂ©rĂ©ditĂ© dans l’explication des phĂ©nomĂšnes sociaux. Sur le plan politique, ils sont favorables au maintien de l’ordre social et sexuel. Les eugĂ©nistes « rĂ©formistes », appartenant aux milieux progressistes ou socialistes, concilient la recherche d’un horizon rĂ©volutionnaire ou la dĂ©fense de revendications fĂ©ministes et l’avĂšnement d’un « homme nouveau », conçu sur des bases biologiques.

Royaume-Uni

Le statisticien Karl Pearson, principal disciple de Galton et fondateur de la biométrie.

L’eugĂ©nisme constitua jusqu’à la Seconde Guerre mondiale un Ă©lĂ©ment incontournable du dĂ©bat politique britannique : Arthur Balfour, Arthur Neville Chamberlain[48] ou Winston Churchill[49] pour ne citer que des Premiers ministres, dĂ©fendront des points de vue eugĂ©nistes. Churchill proposa en 1911 de dĂ©porter 120 000 inadaptĂ©s mentaux aux colonies[50].

Karl Pearson, le principal disciple de Galton continua l’Ɠuvre de son mentor, en s’appuyant sur une approche statistique dont il raffina les mĂ©thodes pour en faire une discipline Ă  part entiĂšre : la biomĂ©trie. Sur le plan scientifique, il participa ainsi Ă  l’émergence de la gĂ©nĂ©tique des populations mais fut progressivement marginalisĂ© par le dĂ©veloppement de la gĂ©nĂ©tique mendĂ©lienne. Si les travaux de son laboratoire furent rĂ©guliĂšrement utilisĂ©s par les militants eugĂ©nistes, il rechigna tout au long de sa carriĂšre Ă  intervenir directement dans le dĂ©bat public[51].

Il n’adhĂ©ra ainsi jamais Ă  la SociĂ©tĂ© pour l’éducation eugĂ©niste (Eugenics education society), crĂ©Ă©e en 1907 et existant toujours aujourd’hui sous le nom d’Institut Galton (Galton Institute). Elle devint la principale association britannique de promotion de l’eugĂ©nisme. Francis Galton ne s’y engagea lui-mĂȘme qu’aprĂšs de longues hĂ©sitations, devenant en 1908 son prĂ©sident honoraire[52]. La sociĂ©tĂ© essaima rapidement sur l’ensemble du territoire britannique et compta mĂȘme une reprĂ©sentation locale en Australie[53]. Si elle n’atteignit jamais la taille d’une organisation de masse — elle ne compta jamais plus de 1 700 adhĂ©rents —, elle parvint toutefois Ă  faire entendre sa voix dans le dĂ©bat public. Sa composition sociale en faisait une organisation fermĂ©e mais influente. Majoritairement investie par des scientifiques, des avocats et des notables, elle pouvait se targuer de rĂ©unir quelques-uns des noms les plus prestigieux du royaume. De 1911 Ă  1928, son prĂ©sident fut ainsi le fils de Charles Darwin, Leonard Darwin[44].

Ses modes d’intervention ont Ă©tĂ© repris par l’ensemble des organisations similaires, aux États-Unis notamment : la publication d’une revue — l’Eugenics review —, de brochures, la rĂ©alisation d’un film et l’organisation de congrĂšs qui traitĂšrent des principales prĂ©occupations du mouvement (l’hĂ©rĂ©ditĂ©, l’hygiĂšne, le mariage et la sexualitĂ©)[54]. L’un des effets du mouvement eugĂ©niste fut ainsi paradoxalement de porter sur la place publique des sujets qui en avaient longtemps Ă©tĂ© exclus par la rigueur morale victorienne. La SociĂ©tĂ© pour l’éducation eugĂ©niste exerça aussi une importante activitĂ© de lobbying en organisant des dĂ©lĂ©gations auprĂšs du Parlement du Royaume-Uni sur des sujets comme les lois sur les pauvres, les maladies vĂ©nĂ©riennes ou le traitement des dĂ©ficients mentaux[55]. Elle milita notamment pour un internement en asile de ces derniers de façon Ă  les empĂȘcher de procrĂ©er. La loi sera votĂ©e en 1913[56], sans toutefois qu’apparaisse explicitement le motif qui sous-tendait la dĂ©marche des eugĂ©nistes.

Le courant conservateur, dont le principal reprĂ©sentant Ă©tait Leonard Darwin, Ă©tait majoritaire au sein de la SociĂ©tĂ© eugĂ©niste. Favorable Ă  la stĂ©rilisation et Ă  l’internement des dĂ©ficients mentaux, les conservateurs militaient sur le plan des mƓurs pour la conservation de rĂŽles sociaux sexuellement diffĂ©renciĂ©s, exprimant notamment leur opposition Ă  la contraception, considĂ©rĂ©e comme une puissante incitation Ă  la dĂ©bauche[57]. OpposĂ©s Ă  l’accĂšs des femmes aux Ă©tudes supĂ©rieures, ils considĂ©raient que l’exercice des tĂąches de direction ne pouvait que les dĂ©tourner de la fonction procrĂ©atrice qui constituait selon eux « leur devoir naturel le plus glorieux »[58].

MĂȘme s’ils Ă©taient minoritaires, les « rĂ©formateurs sociaux » participĂšrent rapidement, parfois mĂȘme au sein de la SociĂ©tĂ© d’éducation eugĂ©niste, Ă  la promotion de la nouvelle doctrine. Les militants socialistes de la Fabian Society Sidney Webb, George Bernard Shaw ou Havelock Ellis, qui devint mĂȘme vice-prĂ©sident de la SociĂ©tĂ© eugĂ©niste, dĂ©fendaient des positions sensiblement diffĂ©rentes des conservateurs. Partisans d’un enseignement des principes eugĂ©nistes, ils pensaient, comme Galton, que l’éducation Ă©tait le meilleur moyen de faire pĂ©nĂ©trer les principes eugĂ©nistes dans les esprits[49]. Ils s’attachaient surtout Ă  articuler l’eugĂ©nisme et la « question fĂ©minine ». Pour les rĂ©formistes, l’indĂ©pendance financiĂšre des femmes devait leur permettre de choisir un mari conforme aux prĂ©occupations eugĂ©nistes, le contrĂŽle des naissances et la contraception de dĂ©coupler sexualitĂ© et procrĂ©ation[59]. Enfin, la disparition des classes sociales devait permettre de favoriser une rationalisation des arrangements matrimoniaux, jusqu’ici contrariĂ©e par les barriĂšres de classe. « Si leur idĂ©al, dans leur majoritĂ©, consistait, Ă  l'instar de Galton, Ă  imaginer une sociĂ©tĂ© de castes, certains socialistes pouvaient jouer Ă  l'intĂ©rieur de la SociĂ©tĂ© eugĂ©nique sur la nĂ©cessitĂ© d'agir sur l'environnement. C'est ce que firent, par exemple, certains membres de la sociĂ©tĂ© fabienne comme Sidney et BĂ©atrice Webb. »[60].

États-Unis

En 1922, la SociĂ©tĂ© amĂ©ricaine d’eugĂ©nisme (en) (American Eugenics Society) est crĂ©Ă©e pour coordonner l’action des militants eugĂ©nistes amĂ©ricains. Elle comptera des dĂ©lĂ©gations dans 28 États[52]. Comme sa cousine britannique, elle resta une organisation de taille modeste ne dĂ©passant jamais les 1 200 adhĂ©rents mais regroupa principalement des scientifiques et des notables. Elle fut ainsi prĂ©sidĂ©e par l’économiste Irving Fisher et financĂ©e par John D. Rockefeller[44]. Une des principales revendications des eugĂ©nistes amĂ©ricains est la limitation de l’immigration en provenance du sud et de l’est de l’Europe[61]. La SociĂ©tĂ© amĂ©ricaine d’eugĂ©nisme se dota ainsi en 1923 d’un « comitĂ© sur l’immigration sĂ©lective » qui milita, dans la lignĂ©e des analyses de Madison Grant, en faveur d’une loi de restriction permanente de l’immigration[62]. Elle est proposĂ©e dans un contexte de forte xĂ©nophobie et vise les immigrants d'Europe orientale et mĂ©ridionale comme les Juifs issus des pays slaves, les Italiens, les Grecs, les Slaves et les Asiatiques[4] - [5].

De nos jours, le mouvement eugĂ©niste aux Etats-Unis a repris autour de diffĂ©rentes figures, souvent fortunĂ©es et proches des idĂ©es libertariennes, comme Jeffrey Epstein, Sam Altman, Elon Musk ou encore Simone et Malcolm Collins. Ces derniers, crĂ©ateurs de l’association Pronatalist.org, promeuvent une politique nataliste eugĂ©niste pour bĂątir les « nouvelles classes dominantes »[63].

France

En France, la crĂ©ation de la SociĂ©tĂ© française d’eugĂ©nisme intervient le 29 janvier 1913[64]. Dans les annĂ©es qui ont prĂ©cĂ©dĂ© sa fondation, les prĂ©occupations eugĂ©nistes se sont nourries du discours sur le dĂ©clin dĂ©mographique du pays, alimentĂ©es par les plus Ă©minents dĂ©mographes[65].

Ce courant de pensĂ©e dĂ©cliniste se montre particuliĂšrement attentif aux dĂ©bats qui se tiennent outre-Manche sur ces questions. Un comitĂ© consultatif français qui rĂ©unit 45 personnes est ainsi formĂ© pour participer au premier CongrĂšs international d’eugĂ©nisme qui se tient Ă  Londres en 1912. Il inclut, outre des scientifiques, des mĂ©decins et des statisticiens, deux hommes politiques Ă  la pointe du mouvement nataliste, Paul Doumer et Paul Strauss[66]. De retour en France, plusieurs participants du CongrĂšs sont convaincus de la nĂ©cessitĂ© d’organiser leurs forces. À l’appel du statisticien Lucien March, une premiĂšre rĂ©union se tient le Ă  l’École de mĂ©decine de Paris[67] avant que les statuts de l’association soient finalisĂ©s en janvier. La rĂ©union inaugurale rĂ©unit 104 personnes dont 64,5 % de mĂ©decins[68].

D'une maniÚre générale en France, l'eugénisme fut surtout un hygiénisme social pasteurien et lamarckiste avec des mesures de nature environnementale et sociale contre la propagation des tares que l'on croyait alors héréditaires : tuberculose, syphilis, la protection des femmes enceintes et des nourrissons, l'éradication de l'alcoolisme.

Ainsi les scientifiques français, encore significativement lamarckistes, sont restés à l'écart du mouvement eugéniste international puisqu'il leur fallait déjà approuver le darwinisme. Le néodarwiniste, Lucien Cuénot, contrairement au reste du monde néodarwiniste minimise par exemple le rÎle de la sélection naturelle et propose un mélange des classes sociales et des races pour la vigueur hybride. Cela n'était cependant pas de l'avis de certains membres de l'institut de France comme Charles Richet.

Japon

A la fin du XIXÚme siÚcle, les idées eugénistes gagnent l'archipel nippon : certains Japonais, comme le journaliste Takashi Yoshio, proposent alors d'améliorer la "race" japonaise en promouvant les mariages avec des femmes occidentales[69]. D'autres ont pensé pouvoir changer le physique des Japonais en modifiant leur régime alimentaire, jugé pauvre en protéines[69]. En 1896, un médecin élabore une opération de chirurgie esthétique pour débrider les yeux[69].

Lois eugénistes

L’influence du mouvement eugĂ©niste sur la lĂ©gislation s’est traduite dans trois domaines principaux : la mise en place de programmes de stĂ©rilisation contrainte, le durcissement de l’encadrement juridique du mariage et la restriction de l’immigration, qui constitue un de ses principaux champs d’intervention aux États-Unis.

Pays occidentaux

Le premier pays Ă  adopter une lĂ©gislation eugĂ©niste fut les États-Unis oĂč ce type de dispositions relĂšve de la compĂ©tence des États. En 1907, l’État d’Indiana autorise la stĂ©rilisation de certains types de criminels et de malades. Il est suivi en 1909 par la Californie, le Connecticut et l’État de Washington. En 1917, quinze États avaient votĂ© des dispositifs de ce type[70] ; ils Ă©taient trente-trois en 1950[71]. Les criminels rĂ©cidivistes, les violeurs, divers types de malades — les Ă©pileptiques, les malades mentaux, les idiots — et parfois les alcooliques et les toxicomanes Ă©taient visĂ©s par ces lois de stĂ©rilisation[72]. Des stĂ©rilisations furent encore pratiquĂ©es dans l'État de la Virginie jusqu'en 1972[73].

Pendant l’entre-deux-guerres, plusieurs États europĂ©ens votent Ă  leur tour des textes similaires : la Suisse en 1928, le Danemark en 1929, la NorvĂšge et l’Allemagne en 1934, la Finlande et la SuĂšde en 1935, l'Estonie en 1937[74]. La plupart des pays protestants furent touchĂ©s, Ă  l'exception notable de la Grande-Bretagne, oĂč cette revendication fut toutefois portĂ©e par une partie du mouvement eugĂ©niste.

Allemagne nazie

Avant mĂȘme l'arrivĂ©e d'Adolf Hitler au pouvoir, une majoritĂ© de scientifiques et une large partie de la classe politique allemande Ă©taient favorables Ă  l’eugĂ©nisme[75]. Une politique eugĂ©niste propre Ă  l'Allemagne nazie, qui s’insĂšre dans un programme plus vaste que l’on peut qualifier d’« eugĂ©nico-raciste »[76] est mise en place dĂšs 1933. BasĂ©e sur des techniques Ă  prĂ©tention scientifiques et organisĂ©e par l'administration, elle est dĂ©finie par un ensemble de lois et de dĂ©crets dont les objectifs consistent :

  • d'une part Ă  favoriser la fĂ©conditĂ© des humains considĂ©rĂ©s comme supĂ©rieurs (politique nataliste, soutien familial, pouponniĂšres, lebensborn
) ;
  • d'autre part Ă  prĂ©venir la reproduction des humains considĂ©rĂ©s comme infĂ©rieurs et socialement indĂ©sirables (les criminels, handicapĂ©s physiques ou mentaux, homosexuels, sourds et aveugles de naissance, alcooliques sĂ©vĂšres, etc.) ou racialement « impurs » (Juifs, Tziganes, Noirs ou Slaves) ; tous les patients hospitalisĂ©s depuis au moins cinq ans.

L'Allemagne a ainsi durci la lĂ©gislation contre l’avortement pour les femmes considĂ©rĂ©es comme supĂ©rieures, alors que dans le mĂȘme temps la circulaire secrĂšte de 1934 aux Offices de la santĂ© du peuple autorisait l'avortement pour les femmes si une « descendance hĂ©rĂ©ditairement malade » Ă©tait considĂ©rĂ©e comme prĂ©visible[77]. Le dĂ©cret secret du a Ă©tĂ© plus loin en rendant obligatoire l'avortement pour les femmes « infĂ©rieures »[77].

La loi du 14 juillet 1933 portant sur la stĂ©rilisation eugĂ©nique est rĂ©digĂ©e Ă  l'aide de la participation active du mĂ©decin et haut fonctionnaire Arthur GĂŒtt[78], du juriste Falk Ruttke et du psychiatre suisse Ernst RĂŒdin[79]. Cette loi qui entre en vigueur le impose la stĂ©rilisation obligatoire pour les malades atteints de neuf maladies considĂ©rĂ©es comme hĂ©rĂ©ditaires ou congĂ©nitales (cĂ©citĂ©, alcoolisme, schizophrĂ©nie
), ainsi que, par dĂ©cision expresse d'Hitler, pour les enfants mĂ©tis dits « bĂątards de RhĂ©nanie ». Ces stĂ©rilisations ont fait l'objet d'un quasi consensus dans la communautĂ© mĂ©dicale allemande. On estime qu’environ 400 000 personnes ont Ă©tĂ© stĂ©rilisĂ©es entre 1934 et 1945, en incluant les territoires annexĂ©s par l’Allemagne aprĂšs 1937 oĂč la loi fut aussi appliquĂ©e[80].

L'homosexualitĂ©, considĂ©rĂ©e par le pouvoir nazi et la trĂšs grande majoritĂ© des mĂ©decins et psychiatres de l’époque comme une « dĂ©gĂ©nĂ©rescence pathologique hĂ©rĂ©ditaire », a fait l’objet d’une lĂ©gislation spĂ©cifique. L'Allemagne eugĂ©niste imposait aux homosexuels de choisir entre la castration volontaire ou la dĂ©tention en camp de concentration.

Les assassinats de masse commis dans le cadre de l’Aktion T4, la mission gĂ©nocidaire des Einsatzgruppen ainsi que la crĂ©ation des Centres d'extermination nazis peuvent ĂȘtre vus comme une extension de la politique eugĂ©niste allemande exacerbĂ© par le rĂ©gime hitlĂ©rien.

Reste de l'Europe

La SuĂšde a maintenu un programme eugĂ©niste de 1934 Ă  1976[81]. On estime que prĂšs de 63 000 personnes ont Ă©tĂ© stĂ©rilisĂ©es durant les quarante annĂ©es de ce programme[81]. Les femmes ayant purgĂ© une peine de prison, les alcooliques, les malades mentaux, les « socialement inadaptĂ©s » et ceux qui Ă©taient de diffĂ©rentes « races » Ă©taient en particulier visĂ©s[81]. Fin aoĂ»t 1997, le quotidien suĂ©dois Dagens Nyheter rĂ©vĂšle ces pratiques au grand public[82].

Le canton suisse de Vaud adopte une loi de stérilisation en 1928 qui n'est abolie qu'en 1985. La mesure est reprise au Danemark en 1929, en NorvÚge en 1934, en Finlande en 1935, en Estonie en 1936, en Islande en 1938[50].

Japon Shƍwa

Lors de la phase de l'expansionnisme du Japon Shƍwa, les gouvernements nippons successifs mirent en place des mesures visant la stĂ©rilisation des handicapĂ©s mentaux et des « dĂ©viants », dont notamment une Loi nationale sur l'EugĂ©nisme, promulguĂ©e en 1940 par le gouvernement Konoe[83].

En vertu de la Loi EugĂ©nique de Protection (1948), la stĂ©rilisation pouvait ĂȘtre imposĂ©e aux criminels « avec des prĂ©dispositions gĂ©nĂ©tiques au crime », aux patients souffrant de maladies gĂ©nĂ©tiques comme l'hĂ©mophilie, l'albinisme, l'ichtyose, et de maladies mentales comme la schizophrĂ©nie, la maniaco-dĂ©pression et l'Ă©pilepsie[84].

D'autre part, les Lois sur la PrĂ©vention de la LĂšpre de 1907, 1931 et 1953, la derniĂšre n'Ă©tant abolie qu'en 1996, permettaient l'internement des malades dans des sanatoriums oĂč l'avortement et la stĂ©rilisation Ă©taient monnaie courante[85], en raison notamment du fait que bon nombre de scientifiques nippons soutenaient que la constitution physique prĂ©disposant Ă  la lĂšpre Ă©tait hĂ©rĂ©ditaire[86]. En vertu de l'ordonnance coloniale corĂ©enne de prĂ©vention de la lĂšpre, les malades corĂ©ens pouvaient aussi ĂȘtre soumis Ă  des travaux forcĂ©s[87].

Japon aprÚs la catastrophe nucléaire de Fukushima

AprÚs la catastrophe nucléaire de Fukushima, des avortements systématiques sont imposés aux femmes dont les enfants semblent subir des modifications génétiques liées aux radiations.

Si pour l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire français, le taux de fausse couche et d'avortement n'a pas augmenté de façon significative[88], pour l'Organisation mondiale de la santé de février 2013, une augmentation des cancers a été notée chez certaines catégories de la population dans la préfecture de Fukushima[89]. Une augmentation notable de l'iode 131 aprÚs l'accident a participé aux craintes des autorités sanitaires[90]. Un déclin du taux de naissance, lié aux avortements spontanés a été observé au Japon dÚs les 9 mois ayant suivi la catastrophe, avec un déclin de 15,1 % dans la préfecture de Fukushima et de 4,7 % dans l'ensemble du Japon. Une augmentation des avortements avait également été constatée en Ukraine aprÚs la catastrophe nucléaire de Tchernobyl[91].

Corée du Nord

Selon le rapport publiĂ© en avril 2009 par l'Institut corĂ©en pour l'unification nationale, le gouvernement de la CorĂ©e du Nord pratique Ă©galement l'eugĂ©nisme : les nains devaient subir une vasectomie et ĂȘtre mis en quarantaine et dans les annĂ©es 1980, des opĂ©rations contraceptives se pratiquaient aussi sur des femmes de moins de 1,50 mĂštre[92].

Dans la bande dessinée Pyongyang, Guy Delisle remarque l'absence totale de handicapés, alors que le guide affirme qu'il n'y en a pas dans la « race coréenne ».

L'ONU remarque en 2006 que les handicapés mentaux sont envoyés dans des camps de concentration[93].

Chine

La Chine et Singapour sont les seuls pays au monde Ă  s'ĂȘtre dotĂ©s Ă  la fin du XXe siĂšcle d'une loi eugĂ©niste, « la loi pour la protection de la mĂšre et de l'enfant », destinĂ©e Ă  « amĂ©liorer la qualitĂ© de la population »[94]. EntrĂ©e en vigueur le , elle impose un examen prĂ©nuptial et prĂ©voit que les porteurs d'une maladie infectieuse, d'un trouble mental ou de maladies gĂ©nĂ©tiques pourront se voir interdire le droit d'avoir un enfant. Ils devront s'engager Ă  une « stĂ©rilisation », une « contraception de longue durĂ©e » ou Ă  se faire avorter en cas de grossesse. Sinon, il leur sera interdit de se marier.

Cette politique d'eugénisme franchement affirmée vise à favoriser les naissances dans les milieux urbains aisés et à les limiter dans les milieux ruraux défavorisés. Les experts locaux ont précisé que « des ressources humaines de qualité » étaient nécessaires à la modernisation du pays mais que les tendances présentes laissaient présager une « qualité de population moindre » »[95].

La politique de l'enfant unique et celle du wan xi shao, mises en place par les autorités chinoises dans les années 1970, répondaient au risque de voir le pays sombrer dans une catastrophe démographique. D'aprÚs les estimations officielles, en trois décennies, environ quatre cents millions de naissances ont été évitées[96]. D'autre part, et à la différence de beaucoup de pays occidentaux, la RPC autorisa les minorités ethniques vivant en Chine de pouvoir avoir, elles, deux enfants par femme. Ce n'est pas dans les villes, mais plutÎt dans les campagnes, avec l'introduction du libéralisme et du besoin croissant de bras pour le paysan indépendant, que cette loi fut le plus souvent contournée.

La Chine a lancĂ© dĂ©but 2013 un grand programme de sĂ©quençage de l'ADN des surdouĂ©s. Deux mille deux cents individus porteurs d'un quotient intellectuel au moins Ă©gal Ă  160 vont ĂȘtre sĂ©quencĂ©s. Ce programme sera rĂ©alisĂ© par le Beijing Genomics Institute (BGI), qui est le plus important centre de sĂ©quençage de l'ADN du monde. L'objectif du gouvernement chinois est de dĂ©terminer les variants gĂ©nĂ©tiques favorisant l'intelligence, en comparant le gĂ©nome des surdouĂ©s Ă  celui d'individus Ă  QI moyen afin de sĂ©lectionner les embryons disposant du meilleur patrimoine neurogĂ©nĂ©tique[97].

Singapour

Singapour a mis en Ɠuvre dans la premiĂšre moitiĂ© des annĂ©es 1980 une politique incitative visant Ă  favoriser les naissances dans les milieux aisĂ©s et Ă  les limiter dans les milieux modestes. En 1983, le Graduate Mums Scheme entend favoriser la fertilitĂ© des femmes diplĂŽmĂ©es, notamment par le biais de rĂ©duction d’impĂŽts au-delĂ  du troisiĂšme enfant. Ce premier dispositif s’est accompagnĂ© en 1984 d’une politique d’incitation Ă  la stĂ©rilisation pour les femmes de moins de 30 ans dont le revenu est infĂ©rieur Ă  1 500 dollars, sous la forme d’une prime de 10 000 dollars. Fortement critiquĂ©, le Graduate Mums Scheme a Ă©tĂ© abandonnĂ© en 1985, tandis que le second volet de cette politique n’a jamais rencontrĂ© d’échos significatifs auprĂšs de la population[6].

PĂ©rou

En 1995, le dictateur péruvien Alberto Fujimori lance un plan de stérilisation des Amérindiennes[98].

LĂ©gislations concernant le mariage

Aux États-Unis, l’influence du mouvement eugĂ©niste a aussi conduit Ă  une Ă©volution de la lĂ©gislation concernant le mariage dans une trentaine d'États : les nouvelles lois annulaient le mariage des idiots ou des malades mentaux et restreignaient le droit au mariage des individus atteints de maladies vĂ©nĂ©riennes, parfois mĂȘme des alcooliques comme dans l’Indiana[99].

Le contrĂŽle des mariages fut un des terrains d’intervention principaux des eugĂ©nistes français. L’examen prĂ©nuptial, instituĂ© par le rĂ©gime de Vichy avec la loi du , est la seule disposition juridique française s’étant explicitement rĂ©clamĂ©e d’un objectif « eugĂ©nique »[100]. Il est restĂ© obligatoire jusqu’au .

Législation de l'Union européenne

L'Union européenne aussi interdit l'eugénisme avec sa Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne adoptée en 2000, affirmant l'interdiction des pratiques eugéniques, notamment celles qui ont pour but la sélection des personnes[101].

Anthropométrie

Église catholique

Dans l'entre-deux-guerres, alors que plusieurs pays protestants europĂ©ens, le Japon, l'URSS ou encore le Canada, lancent des programmes de stĂ©rilisation forcĂ©e, l'Église catholique condamne officiellement l'eugĂ©nisme en 1935[98].

Notes et références

  1. Conseil d'État, « La rĂ©vision des lois de bioĂ©thique », sur Vie publique, Paris, La Documentation française, (ISBN 978-2-11007712-7, consultĂ© le ), p. 40
  2. (Selden 2005, p. 202)
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