Divine surprise
La « divine surprise » est une expression célèbre prononcée par le journaliste et homme politique français Charles Maurras, directeur de L'Action française. La formule saluait originellement l'accession au pouvoir du maréchal Pétain le 11 juillet 1940.
Présentation
Contexte
Le vote des pleins pouvoirs constituants à Philippe Pétain a lieu le 10 juillet 1940. Le lendemain, Pétain se proclame chef de l'État français et s'arroge tous les pouvoirs.
La formule « divine surprise » est écrite pour la première fois par Maurras dans le journal Candide du pour saluer l'arrivée du maréchal Pétain au pouvoir comme une « divine surprise »[1] - [2]. Il développe ensuite cette formule dans Le Petit Marseillais du 9 février 1941[3] - [4]. Enfin, Maurras reprend l'expression dans son livre De la colère à la justice publié en 1942[5] - [6].
Analyse
L'historien Olivier Dard souligne que l'expression « renvoie non à la défaite et à l'effondrement de la République mais à « celui auquel tout le monde faisait crédit », le Maréchal Pétain »[4].
Le journaliste François Honti confirme que Maurras ne se réjouit aucunement de la défaite de la France face à l'Allemagne nazie et commente uniquement « le fait que dans leur malheur les Français aient trouvé en Pétain un chef autour de qui ils pouvaient se rassembler »[7].
Pour le sociologue Julien Damon, Maurras voyait dans cette accession au pouvoir de Pétain, « une revanche sur la Révolution – selon lui le plus grand malheur de l’histoire, cause principale de la dissolution des liens sociaux – et sur la République – selon lui responsable de tous les maux, en particulier de la défaite de 1940 »[1].
Mésinterprétations
L'expression a été l'objet de nombreuses polémiques dès l'Occupation[8]. Marcel Déat détourne le sens de l'expression dès le dans un article paru dans L'Œuvre pour la retourner contre son auteur.
Par méconnaissance, certaines individus font référence à cette expression comme une célébration de la victoire nazie ou de la défaite française. Le , l'abbé François Varillon, dénonce « le poète qui baptisa la défaite une divine surprise » sur Radio-Lyon[5].
Postérité
Cette formule est parfois employée dans le langage courant pour insister sur le caractère inattendu et sidérant d'un événement. Le critique de cinéma Pierre Murat emploie à ce titre l'expression maurrassienne dans une critique de l'hypermédiatisation et du matérialisme[9]. Le journaliste Thomas Legrand en fait le même usage pour qualifier l'irruption de la candidature d'Éric Zemmour aux élections présidentielles de 2022[10].
Notes et références
- Julien Damon, « La pensée de… Charles Maurras (1868-1952): », Informations sociales, vol. n° 121, no 1,‎ , p. 119–119 (ISSN 0046-9459, DOI 10.3917/inso.121.0119, lire en ligne, consulté le )
- Paul Claudel, Journal: Tome 2, Gallimard, (ISBN 978-2-07-010146-7, lire en ligne)
- Le Petit Marseillais, (lire en ligne)
- Olivier Dard, Charles Maurras: Le maître et l'action, Armand Colin, (ISBN 978-2-200-29030-6, lire en ligne)
- Albert Marty, L'Action française racontée par elle-même, Nouvelles Éditions Latines, (ISBN 978-2-7233-0325-5, lire en ligne), p. 437
- Charles Maurras, De la colère à la justice, édition du Milieu du Monde, Paris, 1942, p. 85-93.
- François Honti, « Charles Maurras et son Action française », sur Le Monde diplomatique, (consulté le )
- « La « divine surprise » en fut-elle une ? », Le Crapouillot,‎ (lire en ligne, consulté le )
- Pierre Murat, « Divine surprise », Les cahiers de mediologie, vol. 13, no 1,‎ , p. 189–199 (ISSN 1270-0665, lire en ligne, consulté le )
- Thomas Legrand, « Eric Zemmour, la «divine surprise» de Marine Le Pen », sur Libération (consulté le )