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Bisexualité

La bisexualitĂ© est le fait d'Ă©prouver de l'attirance sexuelle ou des sentiments amoureux pour plus d'un sexe ou genre[3]. Plus largement, la bisexualitĂ© est le fait d'avoir des relations amoureuses ou sexuelles aussi bien avec des personnes du mĂȘme genre qu'avec des personnes d'un autre genre[4] - [5] - [6] - [7].

L'Ă©chelle de Kinsey[MS 1] met en valeur le fait que le dĂ©sir ou les expĂ©riences amoureuses ou sexuelles ne sont pas polarisĂ©s selon un unique axe hĂ©tĂ©rosexualitĂ© (0) – homosexualitĂ© (6) mais qu'il existe des situations intermĂ©diaires.
Si le degrĂ© d'attirance pour un genre ou l'autre se situe entre ces deux pĂŽles (1, 2, 3, 4 ou 5), on parlera de « bisexualitĂ© » dĂšs lors qu'il y a attirance pour les deux genres, mĂȘme si l'un prĂ©domine sur l'autre[1] - [2].

Un bisexuel ou une bisexuelle est une personne dont l'orientation sexuelle est la bisexualité.

La bisexualitĂ© ne reprĂ©sente pas nĂ©cessairement une tendance Ă  ĂȘtre attirĂ© autant par un genre que par l'autre, le degrĂ© d'attirance envers les genres diffĂ©rents pouvant trĂšs largement varier sur l'Ă©chelle de Kinsey[MS 1].

Si le mot « bisexualité » n'a été forgé qu'au début du XXe siÚcle, la bisexualité a une histoire bien plus ancienne.

Dans le rĂšgne animal, nombre d'animaux, en particulier les dauphins ou les bonobos, sont activement bisexuels.

La perception binaire de la sexualitĂ© humaine, soit la conception selon laquelle on ne peut ĂȘtre qu'hĂ©tĂ©rosexuel ou homosexuel, gĂ©nĂ©ralisĂ©e dans la culture populaire et prĂ©sente dans nombre de travaux universitaires, a conduit Ă  une occultation de la bisexualitĂ© comme phĂ©nomĂšne spĂ©cifique, en particulier dans les sciences humaines des XIXe et XXe siĂšcles. Lorsque cette occultation est intĂ©riorisĂ©e, elle conduit des personnes de fait bisexuelles Ă  se prĂ©senter comme « hĂ©tĂ©rosexuelles » ou « homosexuelles », participant ainsi Ă  une invisibilitĂ© de la bisexualitĂ© dans la sociĂ©tĂ© en gĂ©nĂ©ral — et mĂȘme parfois au sein des mouvements LGBT (ainsi, seule une part marginale de la population Ă©tudiĂ©e dans des recherches sexologiques se dĂ©clare bisexuelle).

Toutefois, aprĂšs les approches psychanalytiques de la sexualitĂ© humaine (notamment celles de Freud, avec le concept de « bisexualitĂ© innĂ©e »), les Ă©tudes Ă©thologiques et neuroscientifiques des hominidĂ©s, ainsi que l'histoire mondiale de la bisexualitĂ©, un dĂ©bat contemporain s'est instaurĂ© sur le fait de savoir si la bisexualitĂ© serait l'orientation sexuelle naturelle de l'ĂȘtre humain.

Les femmes auraient plus de tendances à la bisexualité que les hommes, ou auraient une approche plus « fluide » de leur sexualité. Elles sont non seulement en proportion plus nombreuses à déclarer leur bisexualité par rapport aux hommes, mais elles sont également plus enclines à faire évoluer la maniÚre dont elles s'identifient. Une étude de l'université Columbia en 2016 pointe la stigmatisation associée à la bisexualité masculine comme raison de ne pas s'identifier comme bisexuel[8].

Origines et usages des mots « bisexualité » et « bisexuel »

Le mot « bisexualité » est formé du préfixe « bi » (« deux ») et de « sexualité »[5], sur le modÚle de « homosexualité » et « hétérosexualité ».

Il dĂ©signe couramment aujourd'hui le fait d'entretenir simultanĂ©ment ou successivement des relations amoureuses, sentimentales ou sexuelles avec des personnes du mĂȘme sexe et du sexe opposĂ©[Barker 1], ou la capacitĂ© Ă  ressentir une attraction physique, romantique ou amoureuse pour des personnes des deux sexes[1] - [9]. En psychologie, le terme sert Ă©galement Ă  dĂ©finir, selon la dĂ©finition du Larousse, la « coexistence dans tout psychisme humain de potentialitĂ©s Ă  la fois fĂ©minines et masculines »[10].

Le mot « bisexualité » peut toutefois avoir des sens différents selon le contexte.

Sens particulier du terme « bisexualité » dans l'Antiquité

Certains intellectuels, tels Luc Brisson ou Eva Cantarella, avancent que dans le contexte de l'AntiquitĂ©, le terme de « bisexualitĂ© » peut revĂȘtir, au-delĂ  du sens actuel, la signification de la possession simultanĂ©e des organes sexuels masculins et fĂ©minins[12] ; on parle Ă©galement lorsque ce cas se prĂ©sente d'un ĂȘtre « bisexuĂ© »[11]. En GrĂšce antique, si ce cas se prĂ©sentait chez un nouveau-nĂ©, le bĂ©bĂ© Ă©tait considĂ©rĂ© comme un « monstre[13] » et immĂ©diatement mis Ă  mort[12]. Il en est de mĂȘme dans la Rome antique jusqu'au dĂ©but de l'Empire, pĂ©riode durant laquelle les hermaphrodites sont exhibĂ©s en public comme des monstres de foire[12]. Avant cette Ă©volution de traitement, les hermaphrodites Ă©taient considĂ©rĂ©s Ă  Rome comme des annonciateurs de malheurs, notamment de la colĂšre des dieux ; ainsi, leur naissance ne concernait pas seulement leurs parents, mais engageait le sort de la collectivitĂ© tout entiĂšre[12].

Sens particulier en biologie

À l'origine, le terme « bisexuel » s'appliquait Ă  la biologie, en particulier dans la botanique française de la fin du XVIIIe siĂšcle, oĂč on utilisait ce terme pour qualifier des plantes ayant des organes des deux sexes (les Ă©tamines et les pistils)[Barker 2]. Il a ensuite pris le sens d'une prĂ©disposition biopsychologique Ă  la fois fĂ©minine et masculine propre Ă  tout ĂȘtre humain[14].

Il ne faut pas confondre la bisexualitĂ© avec l’androgynie, c’est-Ă -dire le cas d'un ĂȘtre humain dont l'apparence ne permet pas de dĂ©cider Ă  quel sexe il appartient. Quand une personne est physiquement porteuse des deux sexes, on parle plutĂŽt d'« intersexuation »[9] (ou anciennement d'hermaphrodisme).

En psychanalyse

Richard von Krafft-Ebing est l'un des premiers à considérer la notion de bisexualité, avec Havelock Ellis et Magnus Hirschfeld, comme une condition physique ou psychique introduisant des aspects masculins et féminins[15].

On distingue la bisexualitĂ© comme comportement de la « bisexualitĂ© psychique », thĂ©orisĂ©e notamment par Wilhelm Fliess et reprise par Sigmund Freud[16], qui serait selon lui le fondement psychique inconscient de tout ĂȘtre humain[MG 1]. L'incapacitĂ© Ă  rĂ©primer les tendances relevant du sexe opposĂ© fait partie des explications avancĂ©es par Freud pour dĂ©terminer l'origine de certains troubles de la personnalitĂ© de caractĂšre nĂ©vrotique[MG 1]. Par la suite, il considĂšre la bisexualitĂ© non plus comme une composante innĂ©e, mais comme la manifestation de la nature instable de l'identitĂ© sexuelle et du choix des objets sexuels[MG 1]. Il Ă©crit Ă©galement, s'appuyant sur l'exemple de la bisexualitĂ© grecque antique : « l'objet sexuel [des deux sexes] est alors une sorte de rĂ©flexion de la nature bisexuelle du sujet lui-mĂȘme »[MS 2].

Dans son livre XY, De l'identitĂ© masculine, Élisabeth Badinter reprend un passage de L'analyse avec fin et l'analyse sans fin oĂč Freud considĂšre que tous les ĂȘtres « peuvent prendre comme objets sexuels des personnes du mĂȘme sexe, comme de l'autre sexe [
]. Ils rĂ©partissent leur libido d'une maniĂšre soit manifeste, soit latente, sur des objets des deux sexes[17]. » Dans la mĂȘme perspective, la philosophe reprend Ă©galement un passage de Un souvenir d'enfance de LĂ©onard de Vinci, oĂč Freud estime que non seulement chacun est capable de faire un « choix » homosexuel, mais « l'a accompli Ă  un moment donnĂ© de sa vie, puis, ou bien s'y tient encore dans son inconscient, ou bien s'en dĂ©fend par une Ă©nergique attitude contraire »[18].

Dans Bi-Sexual Love (1920), Wilhelm Stekel affirme que tout ĂȘtre humain est par essence bisexuel et que l'hĂ©tĂ©rosexualitĂ© et l'homosexualitĂ© sont toutes deux contre-nature[MS 3]. Il estime Ă©galement que toute personne, mĂȘme parmi celles qui se dĂ©clarent homosexuelles, ressent des attirances hĂ©tĂ©rosexuelles et que l'on devient monosexuel par obligation sociale[MS 3].

Au regard de la notion de bisexualité en psychanalyse, il faut noter que l'Association américaine de psychologie distingue l'identité de genre de celle d'orientation sexuelle[19].

Sens actuel : orientation sexuelle ou comportement

Le sens moderne de bisexualitĂ© comme attirance sentimentale ou sexuelle pour des personnes des deux sexes se retrouve dĂšs le dĂ©but du XXe siĂšcle, notamment dans Studies in the Psychology of Sex, Volume II : Sexual Inversion (1915) de Henry Havelock Ellis, qui parle Ă©galement d'« hermaphrodisme psychosexuel »[MS 4]. Ainsi, dans son sens moderne, la bisexualitĂ© est une orientation sexuelle caractĂ©risĂ©e par l’amour ou le dĂ©sir sexuel pour les membres des deux sexes, distincte de l’homosexualitĂ© et de l’hĂ©tĂ©rosexualitĂ© ou encore de l’asexualitĂ©. Les personnes bisexuelles peuvent avoir des relations simultanĂ©es avec les partenaires de sexe masculin et fĂ©minin, pratiquer la monogamie en sĂ©rie avec des partenaires de l’un ou l’autre sexe, avoir des relations de plus ou moins longue durĂ©e avec des partenaires d’un seul sexe ou pratiquer la chastetĂ©[1] - [20]. La bisexualitĂ© se rĂ©fĂšre aux dĂ©sirs et au concept de soi, pas nĂ©cessairement au comportement : ainsi, une personne bisexuelle peut ne s'engager que dans des relations hĂ©tĂ©rosexuelles ou homosexuelles, mĂȘme si elle Ă©prouve des sentiments pour des personnes des deux sexes[21].

La bisexualité n'est pas une équivalence du type « j'aime autant les femmes que les hommes » ou « j'ai eu 50 % de mes relations amoureuses avec des femmes et 50 % avec des hommes » : elle englobe mais ne se limite pas à une égale attirance pour les deux sexes[1]. En effet, les degrés d'attirance envers les deux sexes peuvent infiniment varier[9] - [Klein 1], conduisant à une grande diversité d'expériences[22]. La bisexualité peut aussi se voir comme une sexualité « fluide » qui change au cours du temps[Barker 3].

Ainsi, de façon large, on peut dĂ©crire la bisexualitĂ© de ces maniĂšres : ĂȘtre attirĂ© par plus d'un genre ; ĂȘtre principalement attirĂ© par un genre, mais reconnaĂźtre que cette attirance n'est pas exclusive ; avoir une sexualitĂ© Ă©volutive (« fluide ») au fil du temps ; considĂ©rer que l'on peut ĂȘtre attirĂ© par une personne « quel que soit son genre » (en prenant en compte d'autres facteurs) ; ou contester qu'il n'existe que deux genres, et que l'on peut n'ĂȘtre attirĂ© que par l'un, l'autre, ou les deux[Barker 3].

Synonymes et débats sémantiques

D'autres mots ont Ă©galement pu ĂȘtre utilisĂ©s pour dĂ©signer la bisexualitĂ© dans le sens actuel du terme. Les expressions « pansexuel », « omnisexuel » ou encore « queer » ont ainsi pu ĂȘtre prĂ©fĂ©rĂ©s Ă  celui de « bisexuel » (le bi de « bisexualitĂ© » pouvant impliquer qu'il n'y a que deux genres[Barker 3] - [23]). Cependant, ces termes sont Ă©galement l'objet de critiques : les termes omnisexuel et pansexuel peuvent renvoyer Ă  une idĂ©e fausse associant le potentiel d'aimer les deux sexes avec de l'hypersexualitĂ©, alors que le terme queer (qui se rĂ©fĂšre Ă  l'ensemble des non-hĂ©tĂ©rosexuels, pas seulement aux bisexuels) prĂ©serve toujours son acception nĂ©gative originelle (« bizarre, Ă©trange » en anglais)[24]. Les termes ambisexuel et fluide ont Ă©galement Ă©tĂ© proposĂ©s, mais ils ne sont que trĂšs peu connus du grand public ; le terme bisexuel est en tout cas le plus connu de tous, et le plus usitĂ© dans la recherche scientifique[24].

Les asexuels peuvent également préférer le terme de « biromantique », qui n'implique pas d'aspect sexuel dans l'attirance envers les hommes et les femmes[Barker 3].

La terminologie du concept fait toujours dĂ©bat ; par exemple, le terme de « pansexuel » a pu ĂȘtre utilisĂ© en remplacement des termes classiques, notamment « bisexualitĂ© », car considĂ©rĂ©s comme pĂ©rimĂ©s ou obsolĂštes[25].

En sexologie

Comportements animaux et humains

Des comportements bisexuels sont rapportĂ©s par les scientifiques chez de nombreuses espĂšces animales[26]. Des relations homosexuelles ont Ă©tĂ© observĂ©es dans prĂšs de 400 espĂšces animales[27].

Les recherches scientifiques menées sur des mammifÚres autres que les primates montrent que l'organisation neuroanatomique générale des organismes mammaliens est spécifiquement conçue pour la copulation hétérosexuelle : des phéromones sexuelles attirent réciproquement les mùles vers les femelles[28], le réflexe de lordose permet de bien présenter le vagin pour la pénétration[29], la lubrification vaginale facilite le réflexe d'éjaculation, les sensations vaginales, clitoridiennes et péniennes (via le systÚme de récompense[30] - [31]) favorisent la motivation sexuelle[32], etc. Il existe ainsi, dans l'organisation neurobiologique innée de l'organisme, un véritable comportement de reproduction hétérosexuel chez les mammifÚres non-primates. Mais les études éthologiques du comportement sexuel des primates[33] - [34] et les études historiques et anthropologiques humaines[35] montrent que les activités bisexuelles sont pourtant possibles.

Les recherches rĂ©centes en neurosciences, depuis le dĂ©but du XXIe siĂšcle, permettent d'expliquer ces diffĂ©rences entre la copulation hĂ©tĂ©rosexuelle des mammifĂšres non-primates et les activitĂ©s bisexuelles des hominidĂ©s (ĂȘtre humain, chimpanzĂ©, bonobo, orang-outan, gorille, etc.). Elles ont montrĂ© qu'au cours de l’évolution, le contrĂŽle neurobiologique du comportement sexuel a changĂ©. Chez les primates et surtout chez les hominidĂ©s, la sexualitĂ© s'est progressivement dissociĂ©e des cycles hormonaux[36] - [37], 90 % des gĂšnes des rĂ©cepteurs aux phĂ©romones ont Ă©tĂ© altĂ©rĂ©s[38] - [39] et le rĂ©flexe sexuel de la lordose n'est plus fonctionnel. Au contraire, l'importance du systĂšme de rĂ©compense et de la cognition est devenue majeure[40]. En raison de ces modifications du systĂšme nerveux, on observe que les activitĂ©s sexuelles des hominidĂ©s changent : elles ne sont plus limitĂ©es Ă  la copulation vaginale[33] - [34] mais se dĂ©veloppent principalement autour de la stimulation des zones Ă©rogĂšnes car ces stimulations procurent des rĂ©compenses / renforcements dans le cerveau[40]. Ces rĂ©compenses, en particulier l'orgasme, sont perçues au niveau de la conscience comme des sensations de plaisirs Ă©rotiques et de jouissances. Chez l’ĂȘtre humain, le but fonctionnel du comportement sexuel n'est plus le coĂŻt vaginal mais la recherche des rĂ©compenses Ă©rotiques, procurĂ©es par la stimulation du corps et des zones Ă©rogĂšnes. Le comportement de reproduction a Ă©voluĂ© vers un comportement Ă©rotique[41] - [note 1].

Au cours de cette Ă©volution du comportement de reproduction, on observe que des caractĂšres Ă©rotiques et bisexuels apparaissent progressivement en fonction des facteurs neurobiologiques qui ont Ă©tĂ© modifiĂ©s. Mais comme les modifications des diffĂ©rents facteurs ne sont pas toutes graduelles et n'apparaissent pas toutes aux mĂȘmes pĂ©riodes phylogĂ©niques, les modifications comportementales sont discontinues. Le cerveau se corticalise progressivement, et les espĂšces de mammifĂšres les plus corticalisĂ©es sont les plus bisexuelles (Ă©lĂ©phants, dauphins, hominidĂ©s)[34]. Mais les Ă©lĂ©phants n'ont qu'un niveau intermĂ©diaire d'activitĂ©s bisexuelles[34] car les phĂ©romones jouent encore un rĂŽle important[42]. L'altĂ©ration des gĂšnes des rĂ©cepteurs aux phĂ©romones est importante Ă  partir des catarhiniens (cercopithĂšques, gibbons, hominidĂ©s)[39] et ces espĂšces ont davantage d'activitĂ©s bisexuelles. La dissociation des activitĂ©s sexuelles des cycles hormonaux est majeure Ă  partir de Pan Paniscus (bonobo)[43] - [44]. Au cours de l'Ă©volution, plus une espĂšce cumule de modifications neurobiologiques et plus ces modifications sont importantes, plus son comportement sexuel sera labile, variĂ© et bisexuel. Pour ces raisons, on observe que quasiment tous les primates ont des activitĂ©s bisexuelles[34] - [45], et en particulier les chimpanzĂ©s Pan paniscus (bonobo)[44] - [46] qui constituent l'espĂšce la plus proche de l'espĂšce humaine[43].

Les Bonobos sont, avec les Chimpanzés, les primates les plus proches génétiquement de l'espÚce humaine. Les premiers sont activement bisexuels[44] - [46] alors que les seconds ne le sont que peu ou pas[47].

Chez l'ĂȘtre humain, qui cumule le maximum de modifications neurobiologiques des facteurs du comportement de reproduction, on observe en particulier que le systĂšme cĂ©rĂ©bral spĂ©cifique de la reconnaissance du sexe opposĂ© a Ă©tĂ© altĂ©rĂ©. Plus de 90 % des gĂšnes (TAAR, VR1, VR2 et TCPR2) spĂ©cifiques Ă  la dĂ©tection des phĂ©romones sont altĂ©rĂ©s[38] - [39]. Bien qu'il existe encore des effets rĂ©siduels[48], l'influence comportementale des phĂ©romones est devenue mineure[49] - [50]. MĂȘme s'il existe encore des facteurs biologiques et phĂ©romonaux rĂ©siduels, le sexe du ou des partenaire(s) n'est plus le principal facteur biologique Ă  l'origine des activitĂ©s sexuelles[51]. Le systĂšme de rĂ©compense et la cognition sont devenus prĂ©pondĂ©rants[40].

Au niveau ethnologique et historique, on observe que dans les sociétés sexuellement libérales, les enfants et les adolescents ont des activités bisexuelles[52] - [53] - [54], et qu'apparemment, il existait dans toutes les sociétés anciennes de guerriers, avant l'avÚnement des religions actuelles qui sont peu favorables à la sexualité, des pratiques bisexuelles généralisées[35] - [55].

Ces donnĂ©es suggĂšrent qu'il existe une tendance significative Ă  la bisexualitĂ© chez l'ĂȘtre humain. La bisexualitĂ© n'est pourtant pas de nos jours gĂ©nĂ©ralisĂ©e dans les sociĂ©tĂ©s occidentales, notamment en raison de la grande valorisation culturelle du couple hĂ©tĂ©rosexuel, une trĂšs forte homophobie[56] et un trĂšs fort monosexualisme, expliquant d'une part le fait que les bisexuels sont souvent rejetĂ©s par les hĂ©tĂ©rosexuels et Ă©galement par les homosexuels, et d'autre part que la bisexualitĂ© n'existe pas au niveau des pratiques et des valeurs culturelles[57]. Il est donc extrĂȘmement difficile de vivre de maniĂšre bisexuelle[58] et beaucoup de bisexuels dissimulent en consĂ©quence leur vĂ©ritable orientation sexuelle[MS 5]. NĂ©anmoins, malgrĂ© la biphobie, l'homophobie et l'hĂ©tĂ©rocentrisme, on observe toutefois que pour les hommes Ă©tudiĂ©s par Alfred Kinsey dans son Sexual Behavior of the Human Male, 46 % d'entre eux ont une sexualitĂ© bisexuelle[59], mais que vraisemblablement, la plupart des personnes, en raison de toutes les difficultĂ©s et pressions psychologiques exposĂ©es prĂ©cĂ©demment, se conforment aux pratiques et aux valeurs dominantes[60] - [note 2].

Échelles de mesure de la sexualitĂ© humaine

Plusieurs sexologues ont conçu des échelles de mesure de la sexualité qui visent à rendre possible une étude des comportements sexuels humains plus précise que les catégories tranchées d'hétérosexualité, d'homosexualité ou de bisexualité.

Échelle d'Alfred Kinsey

Le premier et le plus connu des chercheurs Ă  rĂ©aliser une Ă©tude de ce genre est le sexologue amĂ©ricain Alfred Kinsey (lui-mĂȘme bisexuel[61]) : dans deux Ă©tudes connues sous le nom de rapports Kinsey (Sexual Behavior in the Human Male en 1948 et Sexual Behavior in the Human Female en 1953), il emploie une Ă©chelle qui, en se fondant sur les tĂ©moignages des personnes interrogĂ©es sur leurs pratiques sexuelles, les classe non pas en deux ou trois catĂ©gories tranchĂ©es, mais en sept catĂ©gories qui vont de l'hĂ©tĂ©rosexualitĂ© exclusive (degrĂ© 0) jusqu'Ă  l'homosexualitĂ© exclusive (degrĂ© 6). Les degrĂ©s intermĂ©diaires, de 1 Ă  5 dans le tableau ci-dessous, correspondent Ă  des comportements bisexuels[62] - [63]. Les rapports Kinsey font beaucoup de bruit Ă  leur parution, car ils montrent que les personnes ayant eu des rapports sexuels avec des personnes des deux sexes sont beaucoup plus nombreuses que ce que l'on croyait jusqu'alors. Par la suite, l'Ă©chelle de Kinsey est souvent Ă©voquĂ©e pour rĂ©futer la conception traditionnellement binaire de la vie sexuelle, qui se rĂ©sume Ă  « hĂ©tĂ©rosexualitĂ© ou homosexualitĂ© »[64].

Valeur Explication
0 Exclusivement hétérosexuel(le)
1 Prédominance hétérosexuelle, expérience homosexuelle
2 Prédominance hétérosexuelle, occasionnellement homosexuel(le)
3 Bisexuel sans préférence
4 Prédominance homosexuelle, occasionnellement hétérosexuel(le)
5 Prédominance homosexuelle, expérience hétérosexuelle
6 Exclusivement homosexuel(le)

Une des critiques que l'on peut adresser Ă  l'Ă©chelle de Kinsey est qu'elle ne prend en compte que la variable sexuelle proprement dite, sans aborder les sentiments amoureux, les fantasmes ou la dĂ©finition que les personnes ont d'elles-mĂȘmes[65].

Grille d'orientation sexuelle de Fritz Klein

Dans les annĂ©es 1970, un sexologue amĂ©ricain, Fritz Klein, lui-mĂȘme bisexuel, Ă©labore un autre instrument d'Ă©tude du comportement sexuel, encore plus prĂ©cis, afin de prendre en compte la grande variĂ©tĂ© des tĂ©moignages qu'il recueille au cours d'un forum sur la bisexualitĂ© qu'il crĂ©e et anime Ă  New York. Klein met au point cet outil pour pallier ce qu'il percevait comme les dĂ©fauts de la grille de Kinsey[65]. Il publie pour la premiĂšre fois cet outil, la grille d'orientation sexuelle de Klein, dans son ouvrage The Bisexual Option en 1978[20]. La grille d'orientation sexuelle de Klein n'est pas une Ă©chelle de mesure, mais un modĂšle de formulaire pour interroger les personnes sur leur sexualitĂ©. Elle prend en compte non pas seulement les pratiques sexuelles, mais aussi les sentiments de la personne ou encore ses fantasmes ; elle fait par ailleurs le distinguo entre la vie passĂ©e de la personne, sa vie prĂ©sente (la « fluiditĂ© sexuelle ») et son idĂ©al de vie[20] - [66]. Pour chacune de ses rĂ©ponses, la personne peut rĂ©pondre par des chiffres allant de 1 (le mĂȘme sexe seulement) jusqu'Ă  7 (l'autre sexe seulement). Les pratiques, le vĂ©cu, les dĂ©sirs et les sentiments des personnes interrogĂ©es sont ainsi pris en compte de maniĂšre plus nuancĂ©e, ce qui aboutit Ă  un profil d'orientation sexuelle composĂ© de 21 critĂšres diffĂ©rents[67].

Le modĂšle de Fritz Klein est le premier Ă  prendre en compte la maniĂšre dont la personne elle-mĂȘme se qualifie comme Ă©tant un aspect important de son orientation sexuelle. Il est Ă©galement le premier Ă  reconnaĂźtre que l'orientation sexuelle peut ĂȘtre dynamique, en Ă©voluant au cours de la vie. C'est par cet outil thĂ©orique que Fritz Klein a assis sa rĂ©putation, dans le monde anglophone, de spĂ©cialiste de la bisexualitĂ©[68]. Cet outil « s'est popularisĂ© parmi les militants, les Ă©ducateurs et les thĂ©rapeutes, parce qu'il reconnaĂźt la complexitĂ© de la sexualitĂ© humaine et en particulier la fluiditĂ© sexuelle dans le temps »[69]. Cependant, sa complexitĂ© a limitĂ© son usage et sa diffusion dans le milieu acadĂ©mique : il reste aujourd'hui encore peu connu des chercheurs[70].

Typologie de Rommel MendĂšs-Leite

Le sociologue brésilien Rommel MendÚs-Leite a proposé une typologie distinguant huit types de bisexuels masculins[71] :

  1. Le bisexuel circonstanciel ;
  2. Le bisexuel d'une seule femme ;
  3. Le bisexuel Ă  tendance homosexuelle ;
  4. Le bisexuel fortement sexualisé ;
  5. Le bisexuel expérimental ;
  6. Le bisexuel à tendance hétérosexuelle ;
  7. Le bisexuel souffrant ;
  8. Le bisexuel transitionnel.

Autres typologies possibles

Au-delĂ  des Ă©chelles attestant de diffĂ©rents degrĂ©s de la bisexualitĂ©, d'autres typologies ont Ă©tĂ© proposĂ©es, incluant la « bisexualitĂ© de dĂ©fense » (dans des pays oĂč l'homosexualitĂ© n'est pas acceptĂ©e), la « bisexualitĂ© latine » (dans certaines cultures mĂ©diterranĂ©ennes, les hommes qui tiennent le rĂŽle actif dans une relation homosexuelle masculine se considĂšrent comme strictement hĂ©tĂ©rosexuels), la « bisexualitĂ© rituelle » (oĂč une homosexualitĂ© initiatique prĂ©cĂšde une hĂ©tĂ©rosexualitĂ© maritale, comme dans certaines tribus d'OcĂ©anie) ; la « bisexualitĂ© maritale », la « bisexualitĂ© situationnelle » (dans certains contextes oĂč les individus ne sont pas disponibles comme les prisons, des relations dans les toilettes ; ou pour de l'argent), la « vĂ©ritable bisexualitĂ© » ou « bisexualitĂ© pure[65] » (oĂč la personne est autant attirĂ©e par les hommes que par les femmes[note 3]), la « bisexualitĂ© d'expĂ©rimentation » ou encore la « bisexualitĂ© technique » (lorsque l'on s'engage dans des relations avec des personnes travesties, ou avec des personnes du « troisiĂšme genre » comme l'ont fait certaines cultures)[MG 2].

À cette typologie, on peut ajouter une classification temporelle : la « bisexualitĂ© successive » (manifestement la plus courante) oĂč l'individu est en relation ou tombe amoureux d'une personne, homme ou femme ; la « bisexualitĂ© simultanĂ©e » oĂč l'individu a des partenaires masculins et fĂ©minins en mĂȘme temps ; et enfin la « bisexualitĂ© transitoire » entre hĂ©tĂ©rosexualitĂ© et homosexualitĂ©[65].

Une caractérisation de la bisexualité en trois sous-catégories majeures : « bi-gay », « bi-hétéro », et « bi-bi » a également été proposée[72].

Enfin, l'expression anglophone de « men who have sex with men and women » (ou MSMW) est un outil sexologique utilisé pour désigner, selon des critÚres médicaux, les personnes s'étant engagées dans des relations de nature sexuelle avec des hommes et des femmes[73].

Études et statistiques dans le monde

L'un des chercheurs ayant le plus travaillĂ© statistiquement sur la bisexualitĂ© est Alfred Kinsey (voir Rapports Kinsey). Dans une Ă©tude menĂ©e en 1948, il a dĂ©couvert que 46 % des sujets masculins interrogĂ©s (5 300 personnes) et de 6 Ă  14 % des femmes avaient eu une expĂ©rience sexuelle avec une femme et un homme, ou que ces personnes avaient dĂ©jĂ  sexuellement « rĂ©agi » Ă  des personnes des deux sexes[74]. Shere Hite est l'auteure d'une Ă©tude sur la sexualitĂ© masculine, Le Rapport Hite sur les hommes. Elle dĂ©couvre dans ses recherches que 43 % des hommes sondĂ©s ont eu, durant leur enfance ou leur adolescence, des rapports sexuels avec d'autres garçons, sans que cela les empĂȘche de mener ou de dĂ©velopper plus tard dans leur vie une sexualitĂ© hĂ©tĂ©rosexuelle[75].

Il est difficile de mesurer et d'estimer de façon fiable le nombre de bisexuels. En effet, de nombreux bisexuels ne se définissent pas comme tels, mais comme hétérosexuels ou homosexuels, deux catégories mieux acceptées socialement aujourd'hui[64]. Il arrive que des femmes ou des hommes, en difficulté dans leur vie amoureuse ou frappés par la monotonie du mariage, se découvrent bisexuel(le)s, mais la réalité quantitative de ce phénomÚne est encore peu connue[64].

Dans les annĂ©es 2000, une Ă©tude menĂ©e par Lisa M. Diamond, chercheuse en psychologie Ă  l'universitĂ© d'Utah aux États-Unis, qui a suivi un groupe de 79 femmes non hĂ©tĂ©rosexuelles pendant dix ans, a montrĂ© l'existence d'une orientation bisexuelle pĂ©renne chez les femmes, la pĂ©rennitĂ© de l'orientation bisexuelle (92 %) sur dix ans Ă©tant supĂ©rieure Ă  celle de l'orientation lesbienne (66 %)[76]. Par ailleurs, une Ă©tude amĂ©ricaine publiĂ©e en 2000 a montrĂ© que la dĂ©finition que les personnes non hĂ©tĂ©rosexuelles ont de leur propre sexualitĂ© est mouvante : des personnes se dĂ©clarant prĂ©cĂ©demment homosexuelles ou lesbiennes peuvent, Ă  la suite de nouvelles expĂ©riences, se qualifier de bisexuelles, et vice-versa[20] - [77].

D'aprĂšs des Ă©tudes amĂ©ricaines rĂ©centes, les personnes s'identifiant comme bisexuelles constituent le groupe le plus nombreux parmi les « LGB » (personnes qui s'identifient comme homosexuelles, bisexuelles et lesbiennes)[Barker 4] - [78] - [79], sachant que nombre de personnes ayant entretenu des relations avec des personnes de mĂȘme sexe ou ressentant une attirance pour des personnes du mĂȘme sexe ne s'identifient pas comme « LGB »[Barker 4] - [80]. NĂ©anmoins, la difficultĂ© Ă  quantifier prĂ©cisĂ©ment l'ampleur de la bisexualitĂ© vient notamment du fait que de nombreuses personnes bisexuelles de fait, pour des raisons diverses, ne se dĂ©finissent pas ainsi mais comme hĂ©tĂ©rosexuelles ou homosexuelles[Barker 5] - [MS 6].

Si les personnes bisexuelles de fait apparaissent comme une minoritĂ© importante de la population dans l'Ă©tude de Kinsey, trĂšs peu sont celles qui se prĂ©sentent comme telles dans des Ă©tudes rĂ©centes, conduisant Ă  des proportions de bisexuels « auto-identifiĂ©s » de l'ordre de seulement quelques pourcents[Barker 4], ce qui pose une claire distinction entre pratique et identitĂ© bisexuelle[81]. Ainsi, par exemple, lors d'une enquĂȘte sur l'orientation sexuelle en France menĂ©e par l'IFOP dĂ©but 2011[82] - [83], seules 3 % des personnes interrogĂ©es se dĂ©claraient bisexuelles. ExtrapolĂ© Ă  l'Ă©chelle du pays, ce pourcentage donne environ 1,48 million de personnes se dĂ©clarant bisexuelles en France[82]. L'enquĂȘte indique aussi que parmi les personnes qui se dĂ©clarent bisexuelles ou homosexuelles, on constate une lĂ©gĂšre surreprĂ©sentation des hommes par rapport aux femmes, ainsi qu'une lĂ©gĂšre surreprĂ©sentation des personnes ĂągĂ©es de moins de 50 ans, peut-ĂȘtre en raison de la libĂ©ration des mƓurs aprĂšs 1960[82]. Il n'y a en revanche aucune diffĂ©rence entre les bisexuels, les hĂ©tĂ©rosexuels et les homosexuels quant Ă  la rĂ©partition gĂ©ographique ou au milieu social[82]. Les bisexuels dĂ©clarĂ©s sont lĂ©gĂšrement plus nombreux que les homosexuels dĂ©clarĂ©s Ă  vivre en couple (55 % contre 46 %) ; ils sont aussi plus nombreux Ă  avoir des enfants Ă  la maison (24 % contre 14 %)[82].

Remise en cause de l'alternative hétérosexualité-homosexualité

Certaines études sexologiques ont depuis longtemps remarqué que le diptyque hétérosexualité-homosexualité était trop pauvre pour décrire convenablement la réalité des comportements sexuels humains, et leur fluidité dans le temps[22]. L'alternative hétérosexualité-homosexualité reste pourtant, malgré sa sursimplification des comportements sexuels, encore largement dominante, en particulier dans la culture et la recherche anglo-saxonne[MS 7].

Or des chercheurs, dĂšs les annĂ©es 1970, ont estimĂ© que « l'Ă©tude longitudinale de la vie sexuelle des ĂȘtres humains [
] permet de comprendre le flux et le reflux des expĂ©riences homosexuelles et hĂ©tĂ©rosexuelles et de remettre en question l'opinion commune selon laquelle on est soit homosexuel soit hĂ©tĂ©rosexuel[84]. » La bisexualitĂ© rompt en effet l'alternative stricte « hĂ©tĂ©rosexualitĂ© ou homosexualitĂ© » bien que celle-ci puisse rester, malgrĂ© les recherches et les Ă©tudes qui dĂ©montrent son invaliditĂ©, la rĂ©fĂ©rence de pensĂ©e pour de nombreuses personnes.

L'échelle de Kinsey a d'ailleurs été créée par le chercheur américain Alfred Kinsey et ses collÚgues, pour modéliser le fait que les résultats des études et recherches sexologiques ont montré qu'il n'y avait pas de séparation nette et tranchée entre comportement sexuel homosexuel et hétérosexuel[85]. L'échelle de Kinsey permet ainsi de prendre en compte la complexité et la fluidité des comportements sexuels humains. Elle montre aussi que l'identification personnelle n'est pas nécessairement corrélée aux pratiques sexuelles : on peut se considérer homosexuel ou hétérosexuel, et avoir un comportement sexuel bisexuel[67]. La complexification des travaux théoriques, comme avec la grille d'orientation sexuelle de Klein, qui prolonge et approfondit la grille de Kinsey, a permis de mieux comprendre la bisexualité qu'avec les méthodes dichotomiques traditionnelles[66].

Par ailleurs, parmi les personnes s'engageant dans des relations homosexuelles, peu sont celles qui excluent les relations hĂ©tĂ©rosexuelles. Ainsi, d'aprĂšs une Ă©tude française conduite en 1993, 96,6 % des hommes interrogĂ©s ayant eu des relations sexuelles homosexuelles ont aussi entretenu des relations hĂ©tĂ©rosexuelles[86]. Des Ă©tudes amĂ©ricaines ou danoises donnent des chiffres tout aussi considĂ©rables (de 90 Ă  96 %), ce qui montre que l'homosexualitĂ© (l'orientation sexuelle unique et exclusive envers les personnes de mĂȘme sexe) n'est que trĂšs marginale parmi les personnes s'engageant dans des relations avec des personnes de mĂȘme sexe[86].

L'Ă©tude sexologique Le rapport Hite sur les Hommes note elle aussi que malgrĂ© la fluiditĂ© sexuelle et l'existence d'expĂ©riences homosexuelles et hĂ©tĂ©rosexuelles chez de nombreux hommes, l'alternative « homosexuel-hĂ©tĂ©rosexuel » est toujours utilisĂ©e comme outil de dĂ©finition exclusif, sans toute la rigueur nĂ©cessaire : « Il n'y a pas de corrĂ©lation entre le fait qu'un garçon ait eu ou non une expĂ©rience sexuelle avec d'autres garçons et le fait qu'il se considĂšre « homosexuel » ou « hĂ©tĂ©rosexuel » plus tard dans la vie. Beaucoup d'homosexuels n'ont jamais eu de relations avec d'autres garçons pendant leur jeunesse, et beaucoup d'hĂ©tĂ©rosexuels en ont eu[87]. » De mĂȘme, les chercheurs Philip W. Blumstein et Pepper Schwartz, auteurs de Bisexuality: Some Social Psychological Issues (1977) constatent que nombre de personnes qui s'engagent dans ce type de relations enfants ou adolescents et qui mĂšnent par la suite des vies hĂ©tĂ©rosexuelles ne se considĂšrent pas comme bisexuels, et voient ces expĂ©riences comme de simple jeux sans grande importance dans la dĂ©finition de leur orientation sexuelle[MS 8].

Quant aux précautions à tenir dans l'usage des mots définissant une pratique sexuelle, un chercheur américain des études de genre estime qu'il n'est pas pertinent d'utiliser le mot « homosexuel » comme un nom pour désigner des personnes, mais qu'il est plus approprié de l'utiliser comme un adjectif à accoler à un acte ou à un comportement donné[88].

D'autres, Ă  l'instar de Jonathan Ned Katz, estiment qu'au nom du continuum de Kinsey et la frĂ©quence des pratiques homosexuelles chez les « hĂ©tĂ©rosexuels » que c'est le dualisme « homosexuel-hĂ©tĂ©rosexuel » lui-mĂȘme qui est Ă  abolir[89].

Historiquement, les Ă©tudes sociologiques et sexologiques n'ont que trĂšs tardivement Ă©tudiĂ© la bisexualitĂ© en tant que telle ; sans considĂ©ration spĂ©cifique, elle Ă©tait auparavant allĂšgrement confondue avec l'homosexualitĂ©, aucune diffĂ©rence qualitative n'Ă©tant faite entre les personnes uniquement attirĂ©es par les personnes de mĂȘme sexe et les bisexuels[22] - [90] - [91] - [92].

Tendances naturelles et universelles possibles

Depuis les travaux de Freud sur la psychologie de la sexualitĂ© humaine, la question de savoir si la bisexualitĂ© est la tendance naturelle de la sexualitĂ© humaine se retrouve dans la culture populaire[93] - [94] comme dans la recherche acadĂ©mique[95] - [96]. Ainsi, selon le Journal of the American Medical Association, « les ĂȘtres humains sont par nature psychiquement bisexuels, c'est-Ă -dire capable d'aimer des personnes des deux sexes[81]. »

Une des difficultĂ©s Ă  quantifier prĂ©cisĂ©ment l'ampleur de la bisexualitĂ© est que de nombreuses personnes bisexuelles de fait, pour des raisons diverses, ne se dĂ©finissent pas ainsi mais comme hĂ©tĂ©rosexuelles ou homosexuelles[91] - [MS 6]. En effet, lorsque l'on demande directement par des enquĂȘtes Ă  la population de se dĂ©finir, trĂšs peu sont les personnes se prĂ©sentant comme bisexuelles[91] ; si, en revanche, on cherche Ă  savoir qui a dĂ©jĂ  ressenti une attirance amoureuse ou sexuelle envers plus d'un genre, ou Ă  s'ĂȘtre engagĂ© dans des relations sexuelles avec des personnes des deux sexes, on obtient une minoritĂ© importante (le rapport Kinsey avance le chiffre de 46 % de la population masculine[74], le rapport Hite 43 %[75]), voire une majoritĂ© de la population[Barker 6]. Il y a beaucoup plus de personnes ressentant des attractions pour les deux sexes que de personnes s'engageant dans des relations avec les deux sexes ; et il y a beaucoup plus de personnes s'engageant dans des relations avec les deux sexes que de personnes se dĂ©finissant comme bisexuelles[91].

Histoire

Durant le XXe siÚcle, la bisexualité de certaines personnalités, comme ici l'activiste pour les droits des Afro-Américains, Malcolm X, était délibérément cachée[97].

Il est important de garder Ă  l'esprit que les termes d’hĂ©tĂ©rosexualitĂ©, d'homosexualitĂ©, de bisexualitĂ©, et plus gĂ©nĂ©ralement les notions mĂȘmes de sexualitĂ© et d'orientation sexuelle sont des concepts relativement rĂ©cents Ă  l'Ă©chelle de l'Histoire (comme le fait de s'auto-identifier selon une certaine orientation sexuelle[Barker 2]) puisqu'ils ont Ă©tĂ© introduits par la mĂ©decine et la psychologie au XIXe siĂšcle. Ils ne sont donc pas forcĂ©ment adaptĂ©s dans des contextes historiques plus anciens, Ă©tant donnĂ© que les sociĂ©tĂ©s anciennes ne rĂ©flĂ©chissaient pas dans les mĂȘmes termes et n'utilisaient pas (ou pas exactement) les mĂȘmes catĂ©gories de pensĂ©e. Il n'est cependant pas absurde de supposer que, de tout temps, il a existĂ© des personnes Ă©prouvant des attirances que nous appellerions aujourd'hui hĂ©tĂ©rosexuelles, homosexuelles ou bisexuelles, mĂȘme si ces attirances ne s'inscrivaient pas dans les mĂȘmes cadres sociaux (libertĂ©s, contraintes, modes de sociabilitĂ©, etc.). Par exemple, durant l'antiquitĂ© grecque ou romaine, elles ne prenaient pas les mĂȘmes formes et ne donnaient pas lieu Ă  l'Ă©laboration d'identitĂ©s individuelles (« je suis homosexuel », « je suis bisexuel », « je suis hĂ©tĂ©rosexuel ») comme c'est le cas Ă  partir de la fin du XXe siĂšcle[98].

Pour le sexologue Fred Klein, l'histoire de la bisexualité est pour l'essentiel restée inaperçue, ou sporadiquement évoquée : les bisexuels ayant été le plus souvent considérés comme homosexuels, ou parfois comme hétérosexuels, par occultation de la bisexualité. Il précise, à la suite d'une liste de personnages historiques qu'il estime avoir été bisexuels : « pour trouver mes sources, j'ai dû chercher dans l'histoire « homosexuelle ». J'ai ainsi débusqué ces gens qui étaient en fait bisexuels plutÎt qu'homosexuels. La connaissance historique de la bisexualité ne sortira pas de l'ombre tant qu'on n'aura pas au moins admis sa réalité[Klein 2]. »

Si l'on tente d'observer les comportements bisexuels et leur acceptation ou leur rejet dans les diffĂ©rentes sociĂ©tĂ©s Ă  travers le temps, il apparaĂźt que la bisexualitĂ© a une histoire universelle[35] - [99]. La plupart de ces relations bisexuelles Ă©taient attachĂ©es soit Ă  une pĂ©riode de la vie (comme pour le shudƍ dans le Japon prĂ©-moderne), soit Ă  un troisiĂšme genre (comme pour les Deux-Esprits des Nord-AmĂ©rindiens ou les bacchĂĄs d'Asie centrale). De fait, nombre de sociĂ©tĂ©s ont connu, avant de recevoir les apports religieux et culturels des trois grands monothĂ©ismes (en particulier de leur hĂ©tĂ©ronormativitĂ©), une bisexualitĂ© gĂ©nĂ©ralisĂ©e[100].

La majeure partie de ce que l’on appelle « homosexualitĂ© » dans les cultures anciennes est en fait une forme de bisexualitĂ©, dans la mesure oĂč les pratiques et relations homosexuelles sont trĂšs rarement conçues comme excluant toute relation hĂ©tĂ©rosexuelle (au contraire de la catĂ©gorisation actuelle, dans laquelle une personne homosexuelle est attirĂ©e exclusivement par les personnes du mĂȘme sexe)[101].

L'histoire de la bisexualitĂ© fĂ©minine est plus difficile Ă  Ă©tablir, dans la mesure oĂč les sociĂ©tĂ©s les mieux connues Ă©taient gĂ©nĂ©ralement patriarcales et oĂč les sources diverses nous renseignent plutĂŽt sur les relations entre hommes.

GrĂšce antique

Zeus, le roi des dieux dans la mythologie grecque. Marié à Héra, il désire de nombreuses autres femmes, déesses, ou nymphes mais aussi un jeune prince troyen, GanymÚde[102].

La bisexualité grecque antique est l'un des exemples de pratiques bisexuelles dans l'histoire les mieux connus[103].

En effet, en GrÚce antique, la bisexualité était omniprésente et socialement valorisée[Klein 3] - [note 4]. De trÚs illustres personnes de l'époque, telles que le chef militaire et politique Alexandre le Grand[104], et Socrate, un des plus grands philosophes de la civilisation occidentale, étaient bisexuelles[104].

Pédérastie

La pratique de la pĂ©dĂ©rastie (c'est-Ă -dire d'un adulte avec des adolescents) s'inscrit dans une conception de la vie sentimentale et sexuelle qui tient de la bisexualitĂ©[note 5]. Cette pratique essentiellement aristocratique se retrouve aussi bien Ă  AthĂšnes, Ă  Sparte, Ă  ThĂšbes qu'en CrĂšte[105]. Dans un premier temps, Ă  partir de la pubertĂ©, le jeune homme est en Ăąge d'ĂȘtre courtisĂ© par des hommes d'Ăąge mĂ»r et de lier avec l'un d'eux une relation pĂ©dĂ©rastique dans laquelle il est l'Ă©romĂšne (« l'aimĂ© »)[106]. Une fois adulte, l'homme mĂ»r peut avoir des relations homosexuelles, mais cette fois en tant qu'Ă©raste (« amant »), avec des hommes plus jeunes qu'il courtise comme lui-mĂȘme a Ă©tĂ© courtisĂ© pendant son adolescence[106].

Le modĂšle social fait donc coĂŻncider les Ăąges de la vie avec des rĂŽles diffĂ©rents dans la relation. Par exemple, les sources d'Ă©poque prĂ©sentent ainsi Alcibiade : « lorsqu'il Ă©tait jeune, il dĂ©tournait les hommes de leurs Ă©pouses, et lorsqu'il Ă©tait plus ĂągĂ©, il dĂ©tournait les femmes de leurs maris[107]. » L'homme adulte a le droit d'avoir des relations homosexuelles avec des jeunes gens, tant qu'il les courtise en suivant certaines rĂšgles (l'adulte ne doit pas choisir des enfants trop jeunes - le garçon doit ĂȘtre au stade de la pubertĂ©, et donc de « l'Ăąge de raison » - mais s'essayer Ă  une relation stable, faire la cour avec persĂ©vĂ©rance ; alors que le caractĂšre uniquement lubrique d'une relation est dĂ©noncĂ©e)[108]. Il est cependant mal vu de dĂ©daigner toute relation avec les femmes : l'homosexualitĂ© telle qu'on la conçoit de nos jours, c'est-Ă -dire une attirance entiĂšrement tournĂ©e vers les personnes du mĂȘme sexe, n'Ă©tait donc pas acceptĂ©e[106] - [109] - [110]. Ainsi, se marier et avoir des enfants est ce que l'on attend de chaque citoyen[111], alors qu'adopter un comportement effĂ©minĂ© ou se travestir est trĂšs mal considĂ©rĂ©[106].

Quoi qu'il en soit, les amours homosexuelles comme hétérosexuelles sont abondamment évoquées par les arts grecs antiques, aussi bien la céramique que la littérature. Un thÚme répandu est la comparaison de l'amour des filles et de l'amour des garçons, que l'on trouve dans le Dialogue sur l'amour de Plutarque[112], dans les Amours du pseudo-Lucien ou encore dans le roman grec Leucippé et Clitophon d'Achille Tatius[113].

Bisexualité féminine

La bisexualité féminine est moins bien documentée. La poétesse Sappho, connue pour ses amours lesbiennes, était en réalité engagée dans des relations amoureuses avec des hommes et des femmes. Elle évoque dans ses poÚmes des attirances pour des personnes des deux sexes[114] - [115]. On trouve également l'évocation de relations entre femmes dans certaines séquences des Dialogues des hétaïres attribués à Lucien[116].

La bisexualitĂ© des Grecs est Ă©galement prĂ©sente dans leurs mythes[102], oĂč de trĂšs nombreux dieux sont bisexuels : Zeus, mariĂ© Ă  HĂ©ra et qui courtise le beau mortel GanymĂšde, PosĂ©idon mariĂ© Ă  Amphitrite et qui a une relation amoureuse avec le mortel PĂ©lops, le hĂ©ros divinisĂ© Hercule, mariĂ© Ă  MĂ©gare et amant d'Hylas, ou encore Apollon, ayant eu (entre autres) des relations amoureuses avec les nymphes DaphnĂ© et CyrĂšne et avec les mortels Hyacinthe et Cyparisse.

Les mythes grecs ont la particularitĂ© de mentionner trois cas diffĂ©rents de bisexualitĂ©, chacun avec un sens diffĂ©rent : celle de TirĂ©sias, qui change de sexe par dĂ©cision divine ; celle d'Hermaphrodite (la bisexualitĂ© dans le sens d'ĂȘtre « bisexuĂ© ») et celle qui concerne les sentiments amoureux, celle qu'Ă©voque Aristophane dans son Ă©loge d'Éros dans Le Banquet de Platon[MG 3].

Rome antique

Dans une société qui ne proscrivait pas la bisexualité mais la passivité sexuelle chez l'homme libre, Jules César a été décrit par Curion l'Ancien comme « le mari de toutes les femmes et l'épouse de tous les maris[117]. »
(Marbre d'aprĂšs l'antique.)

La bisexualitĂ© est trĂšs courante chez les Romains[118]. Paul Veyne, dont l'analyse a considĂ©rablement influencĂ© la perception de la sexualitĂ© romaine, et en particulier les recherches ultĂ©rieures, parle Ă  cet effet de « bisexualitĂ© active »[119] - [120] - [note 6]. À Rome, la rĂšgle de comportement moral suppose qu'un homme libre soit actif, c'est-Ă -dire qu'il doit ĂȘtre celui qui pĂ©nĂštre : la passivitĂ© chez un citoyen libre est infamante et fait perdre toute masculinitĂ© Ă  celui qui s'est fait pĂ©nĂ©trer[121]. En consĂ©quence, on ne peut pĂ©nĂ©trer, en dehors de sa femme, aucune femme libre, cĂ©libataire ou mariĂ©e, et aucun homme libre[note 7] : si deux hommes libres ont des rapports, l'homme passif est, en thĂ©orie, sĂ©vĂšrement puni. Si un adulte a des rapports avec un jeune citoyen non-pubĂšre, il est Ă©galement sĂ©vĂšrement puni. Les esclaves et tous ceux qui ne sont pas romains, hommes et femmes, enfants, adolescents ou adultes, sont Ă  la disposition des maĂźtres, le pater familias pouvant avoir des relations sexuelles avec eux sans que personne y trouve Ă  redire[122]. Le philosophe SĂ©nĂšque rĂ©sume ce principe en ces termes : « La passivitĂ© sexuelle pour un homme de naissance libre est un crime, pour un esclave, une obligation, pour l'affranchi, un service obligĂ©[123]. » Ainsi l'orateur CicĂ©ron est mariĂ©, mais loue Ă©galement les charmes de son jeune esclave et secrĂ©taire favori[note 8].

Comme dans la GrĂšce antique, l'homosexualitĂ© Ă©tait trĂšs peu prĂ©sente — et dans tous les cas dĂ©valorisĂ©e — car jamais les relations sentimentales et sexuelles avec les femmes ne devaient cesser ou se subordonner aux rapports homosexuels[110]. Si les comportements bisexuels Ă©taient une norme dans la Rome antique, les homosexuels faisaient, eux, l'objet d'une condamnation Ă  la fois morale et juridique[124].

Les empereurs romains s'engageaient trĂšs souvent dans des relations bisexuelles : un exemple bien connu est celui de l'empereur Hadrien, qui, bien qu'Ă©tant mariĂ© Ă  l'impĂ©ratrice Sabine, aimait d'un amour fou l’éphĂšbe AntinoĂŒs[note 9]. De mĂȘme, l'empereur NĂ©ron s'est mariĂ© avec un eunuque, Sporus, aprĂšs son premier mariage avec Claudia Octavia[125].

Les pratiques bisexuelles sont attestĂ©es plus ou moins incidemment dans la littĂ©rature de l'Ă©poque. Sont souvent comparĂ©s l'amour qui lie aux femmes et celui qui lie aux jeunes hommes, notamment pour leurs avantages respectifs[126]. Est Ă©galement souvent rapprochĂ© le rĂŽle passif des femmes et celui des esclaves, condamnĂ©s Ă  une soumission sexuelle totale envers leurs maĂźtres[121]. Le poĂšte Horace Ă©crit : « Lorsque ton bas-ventre se gonfle, si tu as Ă  ta disposition une servante ou un esclave de ta maison sur lequel te jeter Ă  l'assaut immĂ©diatement, prĂ©fĂšres-tu par hasard crever de tension ? Moi non. »[102]. Catulle dĂ©clare son amour indiffĂ©remment pour des femmes comme pour des hommes ; s'adressant dans ces termes Ă  un homme : « Si sur tes yeux doux comme miel, Juventius, on me laissait mettre sans relĂąche mes baisers, j'en mettrais jusqu'Ă  trois cent mille »[102]. Cela ne l'empĂȘche pas de dĂ©clarer par ailleurs Ă  sa bien-aimĂ©e : « Je t'en prie, ma douce Ipsithilla, mes dĂ©lices, charme de ma vie, invite-moi Ă  venir passer chez toi cet aprĂšs-midi »[102].

Quant à l'homosexualité proprement dite, il n'existe pas d'exemple, dans la littérature latine qui nous est parvenue, d'exemple de relation de longue durée entre deux hommes libres, ni d'homme ayant exclusivement aimé d'autres hommes[121] - [note 10].

Les premiÚres lois romaines interdisant la bisexualité ont été adoptées vers le IIIe siÚcle apr. J.-C. (sous le rÚgne de Théodose Ier[105]) sous l'influence croissante de la religion chrétienne[109].

Scandinavie

Les sources qui nous sont parvenues du Moyen Âge scandinave sont assez parcellaires ; une loi de 1164 semble prohiber tout acte homosexuel, sans avoir Ă©tĂ© vĂ©ritablement appliquĂ©e. D'aprĂšs la littĂ©rature de l'Ă©poque, les pratiques homosexuelles seraient, pour les hommes, acceptables socialement seulement pour celui qui a le rĂŽle actif. Il semble qu'il ait Ă©galement Ă©tĂ© acceptable, pour la plupart des hommes, de faire preuve d'un dĂ©sir homoĂ©rotique, mais uniquement envers des esclaves[127].

Reste de l'Europe

Le roi de France Louis XIII, pĂšre de Louis XIV, connu pour ses favoris[note 11].

Des comportements bisexuels sont rapportĂ©s chez les peuples celtes de l'AntiquitĂ©, dont les rapports homosexuels Ă©taient de type pĂ©dĂ©rastiques. AthĂ©nĂ©e Ă©crit par exemple que les Celtes avaient des femmes trĂšs belles, mais aimaient aussi inviter des amoureux Ă  dormir sur leur peaux de bĂȘtes[128].

Europe médiévale

Dans l'Europe mĂ©diĂ©vale, la bisexualitĂ© Ă©tait, selon les Ă©poques et les lieux, et les personnes qui la pratiquaient, soit acceptĂ©e soit moquĂ©e. De maniĂšre gĂ©nĂ©rale, il est difficile pour un historien de quantifier prĂ©cisĂ©ment tout rapport et relation de type homosexuel en raison de la censure (notamment religieuse) de l'Ă©poque mais aussi de l'homophobie contemporaine de certains chercheurs[129]. La possible bisexualitĂ© de certaines hautes personnalitĂ©s a aussi Ă©tĂ© abordĂ©e, comme celle du monarque anglais Richard CƓur de Lion[130] qui serait tombĂ© amoureux dans sa jeunesse du roi Philippe II Auguste[131].

Le roi de France Henri III, bien qu'étant marié à Louise de Lorraine-Vaudémont, et ayant pour maßtresses Louise de La BéraudiÚre du Rouhet et Marie de ClÚves, a souvent été présenté par l'historiographie comme « homosexuel »[132] et il y a des raisons de croire qu'il était bisexuel[133]. Toutefois, il semble que les accusations de relations avec ses « mignons » soient davantage le fait de rumeurs lancées par ses opposants politiques dans une période de troubles et de disputes religieuses plutÎt qu'une réalité historique[134].

Au XVIe siĂšcle

Au XVIe siĂšcle, le roi Jacques Ier d'Angleterre, mariĂ© Ă  la reine Anne de Danemark, avec qui il eut pas moins de huit enfants, avait aussi publiquement des amants masculins[135] - [Barker 7]. Un autre exemple de comportements bisexuels dans les cours royales est celui du « bisexuel le plus cĂ©lĂšbre du [XVIIe siĂšcle][136] », Philippe d'OrlĂ©ans, frĂšre de Louis XIV. EffĂ©minĂ© et connu pour ses relations homosexuelles (on parlait au XVIIe siĂšcle du « vice italien »), il a de nombreux enfants de deux mariages diffĂ©rents[137]. Marie-Antoinette d'Autriche, Ă©pouse de Louis XVI, a quant Ă  elle fait les frais de lourdes critiques de la part des opposants politiques de son mari pour s'ĂȘtre engagĂ©e dans des relations avec d'autres femmes, des gravures graveleuses ayant mĂȘme Ă©tĂ© produites Ă  ce sujet[Barker 2] - [note 12].

À la Renaissance

À la Renaissance, en particulier dans sa version italienne, le « crime » de sodomie Ă©tait largement pratiquĂ© malgrĂ© l'Inquisition et les chĂątiments qu'elle infligeait[127]. L'Église fut vite dĂ©bordĂ©e puisque prĂšs de la moitiĂ© des hommes de la ville de Florence furent mis en examen par la justice pour sodomie[138]. Une fluiditĂ© sexuelle dans le temps — d'abord des comportements homosexuels durant la jeunesse, puis principalement hĂ©tĂ©rosexuels — Ă©tait considĂ©rĂ©e alors comme faisant intĂ©gralement partie du processus de croissance et de maturitĂ© des hommes[138]. En revanche, contrairement Ă  ce qui se passait en GrĂšce ou dans la Rome antiques, une fois mariĂ©s, les hommes abandonnaient quasiment tous les relations avec d'autres hommes[138]. Nicolas Machiavel indique par exemple d'un de ses contemporains : « Jeune, il dĂ©tournait les hommes de leurs Ă©pouses, Ă  prĂ©sent il dĂ©tourne les femmes de leurs maris[138]. »

Au XVIIIe siĂšcle

Le libertinage est aussi historiquement associĂ© Ă  la bisexualitĂ©, et ce, dĂšs le XVIIe siĂšcle. Il concernait le plus souvent les grands aristocrates qui pouvaient en raison de leur rang se le permettre sans trop de consĂ©quences[139]. L'exemple de Gaston de France, frĂšre du roi français Louis XIII, peut ĂȘtre citĂ© : ses loisirs allaient des chansons Ă  boire, aux poĂšmes Ă©rotiques en passant par les « parties de dĂ©bauche », dans une sorte d'« hĂ©donisme mondain »[139]. Les tĂ©moignages contemporains convergent Ă©galement pour indiquer que ThĂ©ophile de Viau Ă©tait bisexuel[140]. Cette appellation de « libertin » s'est poursuivie au XVIIIe siĂšcle, pour dĂ©signer les personnes entretenant ce type de relations. Comme elles contestaient aussi souvent le pouvoir de l'Église et les mƓurs de l'Ă©poque, le pouvoir religieux ne leur Ă©tait pas favorable[141].

En Russie tsariste, certains membres de l'aristocratie affichaient leur bisexualité (pourtant interdite), à l'image du prince Félix Ioussoupov[142].

Au XIXe siĂšcle
L'écrivain irlandais Oscar Wilde, marié, deux enfants (ici avec son amant Alfred Douglas) est l'une des plus célÚbres illustrations de la bisexualité au XIXe siÚcle[143] - [Klein 4] - [MG 4].

Inde

Femme en caressant une autre pendant qu'elle se fait pénétrer par un homme. Illustration du Kamasutra, XIXe siÚcle.

Dans l'antique Kamasutra indien, des positions sexuelles homosexuelles sont présentes, tout comme sont montrées des pratiques hétérosexuelles[144] - [145]. Par ailleurs, les pratiques sexuelles dans la mythologie hindoue ont été considérées comme manifestant une « bisexualité universelle »[144]. Néanmoins, de par la colonisation britannique et le puritanisme de l'époque victorienne, toutes ces manifestations de la bisexualité dans la culture indienne originelle ont été effacées[145].

Dans l'Inde moderne, une grande partie des hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes sont mariés[146].

Chine

Dans la Chine impériale, les comportements bisexuels sont rapportés depuis le XVIe siÚcle av. J.-C.. Ainsi, dix des empereurs de la dynastie Han comptaient des hommes comme amants, en plus de leurs épouses, qui leur apportaient une descendance légitime[147].

Dans la Chine ancienne, la prĂ©valence de la bisexualitĂ© sur l'homosexualitĂ© s'explique par le besoin traditionnel de produire des hĂ©ritiers, nĂ©cessitĂ© qui irrigue alors l'ensemble de la sociĂ©tĂ© chinoise, de la paysannerie Ă  la classe dirigeante. La bisexualitĂ© est ainsi pratiquĂ©e dans les plus hauts cercles ; la sexualitĂ© se mĂȘlant Ă  la politique et les intrigues de la Cour[148].

Durant le XVIe siÚcle, il existe des prostitués masculins acceptés par la société sous l'influence du néo-confucianisme. Des auteurs comme Wang Yangming voient en effet les besoins sexuels comme naturels[149].

L'illĂ©galitĂ© des rapports entre personnes du mĂȘme sexe est venue assez tardivement dans l'histoire de la Chine : la premiĂšre fois que la pratique de relations sexuelles entre personnes de mĂȘme sexe a Ă©tĂ© pĂ©nalement condamnĂ©e date de 1740. La rĂ©volution culturelle est la pĂ©riode la plus difficile pour les personnes s’engageant dans des relations avec des personnes de leur sexe de tout l'histoire de la Chine. La situation s'est depuis trĂšs lĂ©gĂšrement adoucie[149].

Japon

Un Shudƍ : l'homme embrasse une femme, alors qu'il couvre les yeux de son compagnon.

Dans le Japon mĂ©diĂ©val, les aristocrates avaient trĂšs couramment des pratiques bisexuelles[111]. L'Ă©lite Ă©tait libre de s'engager dans des amours avec les deux sexes, pratiques et Ă©rotisme homosexuels et hĂ©tĂ©rosexuels n'Ă©tant absolument pas vus comme incompatibles[150]. Nombreux sont les aristocrates qui frĂ©quentaient des thĂ©Ăątres oĂč se produisaient des jeunes hommes ; l'amour dĂ©vorant qu'ils leur portaient pouvait les pousser jusqu'Ă  se ruiner pour disposer de leur compagnie[151].

Des pratiques bisexuelles de type pĂ©dĂ©rastiques sont Ă©galement reportĂ©es dans le wakashudƍ (« la voie des jeunes hommes »). Des hommes adultes, gĂ©nĂ©ralement hĂ©tĂ©rosexuellement mariĂ©s, poursuivaient de leurs ardeurs des jeunes hommes[150]. Dans la pĂ©dĂ©rastie japonaise, les garçons de 13 Ă  19 ans Ă©taient jugĂ©s aptes Ă  ĂȘtre aimĂ©s[151]. La bisexualitĂ© est Ă©galement prĂ©sente dans certaines Ɠuvres de la littĂ©rature japonaise : le poĂšte Ihara Saikaku dĂ©crit par exemple dans Kƍshoku ichidai otoko (« L'homme qui ne vĂ©cut que pour aimer », 1682) la vie amoureuse d'un libertin, dĂ©nombrant comme conquĂȘtes amoureuses 725 hommes et 3 742 femmes[152]. Il est clairement documentĂ© (en particulier par les journaux intimes de contemporains) que certains empereurs japonais maintenaient des relations homosexuelles en plus de leur vie sexuelle hĂ©tĂ©rosexuelle, et ce dĂšs le XIe siĂšcle (Shirakawa, Toba ou encore Go-Shirakawa en sont des exemples[153]).

En ce qui concerne les femmes, Ă  partir du dĂ©but du XXe siĂšcle, nombre de jeunes femmes japonaises quittĂšrent leurs foyers pour ĂȘtre concentrĂ©es dans des Ă©coles et pensionnats oĂč des relations intimes se nouaient assez frĂ©quemment. Cela ne prĂ©occupait pas outre mesure la sociĂ©tĂ© de l'Ă©poque, puisqu'un mariage hĂ©tĂ©rosexuel les attendait Ă  la sortie de leurs Ă©tudes[150]. Comme dans de nombreuses autres rĂ©gions du monde, ces pratiques commencent Ă  ĂȘtre mal vues peu aprĂšs les premiers contacts du Japon avec l'Occident[151]. Une loi est votĂ©e dĂšs 1873 pour criminaliser les rapports homosexuels[154]. NĂ©anmoins, et parce que le shudo est si enracinĂ© dans la culture du Japon du XIXe siĂšcle, le changement des comportements de certains militaires se rĂ©vĂšle long et difficile[154].

Moyen-Orient et monde arabo-musulman

Garçon dansant. Bien que la loi islamique prohibe les relations entre individus du mĂȘme sexe, de nombreux hommes puissants les exploitent pour satisfaire leurs plaisirs sexuels, et en font un symbole de leur pouvoir.

Trois siĂšcles avant notre Ăšre, Darius III, roi de Perse, possĂ©dait dans son harem Ă  la fois des femmes et des eunuques ; aprĂšs la victoire militaire d'Alexandre le Grand sur Darius, Alexandre usa lui aussi d'eunuques comme partenaires sexuels[155]. Des pratiques bisexuelles ont longtemps Ă©tĂ© reportĂ©es en Perse : ainsi, au XIe siĂšcle, un notable conseille Ă  son fils « de diviser Ă©quitablement son attention envers les femmes et les jeunes hommes[156]. » Au XVIIe siĂšcle, un EuropĂ©en qui visite la Perse note qu'ils « convoitaient les garçons autant que les femmes[156]. » Nombre de grands poĂšmes perses sont adressĂ©s Ă  de jeunes hommes, l'art Ă©rotique Ă©tant, lui aussi, divisĂ© entre scĂšnes hĂ©tĂ©rosexuelles et homosexuelles[156]. Selon le juriste musulman Ibrahim al-Bajuri (en), lors de la conquĂȘte musulmane du Moyen-Orient, de nombreux soldats arabes, loin de leurs femmes, se sont alors satisfaits d'hommes qu'ils trouvaient dans les territoires conquis[157].

La bisexualitĂ© est aussi bien documentĂ©e durant la pĂ©riode musulmane de l'histoire espagnole[158] : en particulier, Ă  cette Ă©poque, l'islam Ă©tait religieusement et sexuellement beaucoup plus tolĂ©rant que ne l'Ă©tait le christianisme[158]. Bien que le Coran prohibe les rapports amoureux et sexuels entre personnes de mĂȘme sexe, la sociĂ©tĂ© et les dirigeants n'avaient alors pas mĂȘme la volontĂ© de faire appliquer cette rĂšgle religieuse[158]. Il existe des exemples de dirigeants ouvertement bisexuels Ă  cette Ă©poque, maintenant des relations homosexuelles comme une vie de famille : c'est le cas d'Abd al-Rahman III[158]. La bisexualitĂ© s'exprimait aussi librement Ă  travers les arts, notamment la poĂ©sie : le poĂšte Ibn Quzman mentionne dans ses vers son mode de vie ouvertement bisexuel[158]. Ce cas n'est pas isolĂ©, d'autres poĂšmes Ă  cette Ă©poque traitent des joies Ă©gales de l'amour, tant homosexuel qu'hĂ©tĂ©rosexuel[158]. Il semble qu'Ă  cette Ă©poque ce soit une pratique homosexuelle de type pĂ©dĂ©rastique qui ait Ă©tĂ© privilĂ©giĂ©e[158].

AprĂšs la conquĂȘte, la bisexualitĂ© dans le monde arabe s'exprimait d'une maniĂšre Ă  peu prĂšs Ă©quivalente Ă  celle de la GrĂšce antique : un homme mariĂ© courtisait de jeunes garçons, sans que cela paraisse Ă©trange au reste de la sociĂ©tĂ©. La dĂ©sapprobation venait surtout des Ă©pouses, jalouses du fait que leurs maris puissent dĂ©sirer d'autres personnes qu'elles[159]. Ces pratiques Ă©taient si courantes au XVIIIe siĂšcle que l'orientaliste français Volney, visitant l'Égypte dans les annĂ©es 1780, s'Ă©tonna du fait que les hommes s'adonnaient au « vice des Grecs » alors qu'ils avaient dĂ©jĂ  des femmes. Les garçons courtisĂ©s pouvaient s'engager dans des relations avec des filles ou des femmes plus mĂ»res qu'eux[160]. On sait Ă©galement que la bisexualitĂ© masculine est gĂ©nĂ©ralisĂ©e au dĂ©but du XXe siĂšcle dans l'Empire ottoman, le turc Mustafa Kemal AtatĂŒrk Ă©tant, d'aprĂšs le biographe Patrick Balfour Kinross, symptomatique d'une « fin de siĂšcle ottomane bisexuelle[161]. »

Dans le Moyen-Orient, il semble que les approches traditionnelles de la sexualitĂ© diffĂšrent sensiblement de celles de l'Occident : les actes sexuels homosexuels sont considĂ©rĂ©s davantage comme simples actes plutĂŽt que comme rĂ©vĂ©lateurs d'une identitĂ© profonde. Il existe Ă©galement une tendance, hĂ©ritĂ©e de la civilisation grĂ©co-romaine, Ă  ne pas vraiment classifier en termes d'« hĂ©tĂ©rosexualitĂ© » ou d'« homosexualitĂ© » mais comme rĂŽle « passif » ou « actif », ce dernier impliquant beaucoup moins de dĂ©sapprobation sociale car ĂȘtre « passif » Ă©quivaut Ă  tenir le rĂŽle d'une femme. L' « actif » n'est d'ailleurs pas considĂ©rĂ© comme homosexuel. Par exemple, en Arabie saoudite contemporaine, nombre d'hommes s'engagent comme « actifs » dans des relations avec d'autres hommes car ils n'ont pas d'autres alternatives, lorsqu'il ne leur est pas possible d'avoir des relations hĂ©tĂ©rosexuelles. Un comportement homosexuel « passif » passager, associĂ© Ă  la jeunesse, est tolĂ©rĂ© tant qu'il ne continue pas dans la vie adulte[162].

Dans l'Afghanistan des annĂ©es 2010 survivent encore des pratiques bisexuelles ancestrales qui ont profondĂ©ment interpellĂ©, si ce n'est choquĂ©, les soldats amĂ©ricains et britanniques patrouillant dans ces zones dans le cadre de la guerre contre le terrorisme. En effet, dans certaines zones tribales, beaucoup d'hommes entretiennent des relations de type pĂ©dĂ©rastiques et pĂ©dophiles avec de jeunes hommes (le plus souvent de 9 Ă  15 ans[163]), Ă©tant donnĂ© qu'aucune relation avec des femmes non mariĂ©es n'est autorisĂ©e. Ainsi, de trĂšs nombreux hommes s'y adonnent avant leur mariage. Un des dictons les plus rĂ©pandus de cette partie du monde y est d'ailleurs : « Les femmes sont pour les enfants, les garçons sont pour le plaisir[163]. » Les hommes disposant de suffisamment d'argent et de pouvoir peuvent se permettre d'entretenir ainsi plusieurs garçons, une tradition culturellement acceptĂ©e qui ne choque personne. Un tel homme est appelĂ© un bacha bazi, et est souvent vu comme haut placĂ© dans l'Ă©chelle sociale : si quelqu'un veut montrer qu'il a de l'importance, il doit avoir un garçon Ă  lui[164] - [165] - [note 13].

Dans le Pakistan voisin, des comportements bisexuels (masculins) sont de nos jours assez pratiquĂ©s. Bien que les lois du pays prohibent officiellement toute relation entre personnes de mĂȘme sexe, il est possible d'en entretenir dans certaines villes, Ă  condition de rester particuliĂšrement discret et de ne pas revendiquer, dans la sphĂšre publique, la reconnaissance de droits spĂ©cifiques. Nombre de ces hommes ne se considĂšrent pas comme homosexuels, certains le faisant en alternance avec les relations qu'ils entretiennent avec leurs Ă©pouses ou pour de l'argent[166]. Dans une sociĂ©tĂ© trĂšs patriarcale, les hommes dont leurs inclinaisons les pousseraient uniquement vers les autres hommes sont une majoritĂ© a obĂ©ir aux normes sociales, et Ă  se marier afin de produire descendance, tout en maintenant des relations homosexuelles[167]. Il est d'ailleurs relativement aisĂ© pour les hommes de se procurer des prestations sexuelles par des « masseurs », certaines hautes personnalitĂ©s pouvant frĂ©quenter ce genre d'Ă©tablissements en toute discrĂ©tion[167]. Dans ce pays conservateur et musulman, les premiĂšres relations sexuelles des jeunes hommes se font souvent avec d'autres jeunes hommes ; la famille, et la sociĂ©tĂ©, ignorent (sans pour autant y porter un regard favorable) ces relations homosexuelles juvĂ©niles, tant que cela reste dans la discrĂ©tion, et que chacun finit par se marier hĂ©tĂ©rosexuellement : ce genre d'activitĂ©s Ă©tant pour l'entourage plus considĂ©rĂ© comme une phase par laquelle les jeunes « doivent passer » qu'un signal d'alarme[167].

Amériques

Les conquistadors espagnols et portugais punissaient sĂ©vĂšrement les Indiens lorsqu'ils s'adonnaient Ă  des relations homosexuelles. Ici, Vasco NĂșñez de Balboa envoie ses chiens dĂ©vorer des indigĂšnes.

Amérique du Nord

De nombreuses tribus des peuples natifs d'Amérique du Nord connaissaient une catégorie de troisiÚme genre, hommes qui s'habillaient comme des femmes, avaient des occupations traditionnellement dévolues aux femmes et occupaient des rÎles à part dans les tribus (comme guérisseurs ou chaman). Les explorateurs français entrés au contact de ces tribus nommÚrent ces individus « berdaches »[note 14], du nom alors utilisé en Europe pour désigner le partenaire le plus jeune dans une relation homosexuelle masculine. Les hommes mariés à des berdaches étaient généralement bisexuels[168] : nombre d'Amérindiens (et parmi eux, le chef Crazy Horse) possédaient parmi leurs épouses des berdaches[169].

Amérique centrale et du Sud

Chez les Mayas, cela faisait partie des coutumes que d'avoir eu, au long de son existence, des relations avec des hommes et des femmes, tout au moins pour les hommes. En effet, au dĂ©but de l'adolescence, le garçon se retrouvait ĂȘtre l'amant d'un adolescent plus ĂągĂ© que lui, qui se mariait ensuite Ă  une femme lorsqu'il atteignait une vingtaine d'annĂ©es. Le jeune garçon aimĂ© se retrouver plus tard Ă  aimer Ă  son tour un garçon plus jeune, et ainsi se poursuivait indĂ©finiment le cycle[170]. Ainsi, les hommes mayas connaissaient une fluiditĂ© sexuelle dans le temps, la jeunesse Ă©tant associĂ©e Ă  des relations homosexuelles, avant de laisser place Ă  un mode de vie hĂ©tĂ©rosexuel dans le mariage[171].

La bisexualitĂ© est documentĂ©e dans de nombreux autres peuples indigĂšnes : la pĂ©riode de l'adolescence est la plus associĂ©e Ă  celle des relations entre personnes du mĂȘme sexe, bien que des hommes mariĂ©s et ayant des enfants puissent aussi s'engager dans de telles relations[172]. Une autre pratique courante est d'Ă©lever un garçon comme une femme pour ensuite le donner en mariage Ă  un homme ayant dĂ©jĂ  plusieurs Ă©pouses. Ces « hommes-Ă©pouses » Ă©taient gĂ©nĂ©ralement plus apprĂ©ciĂ©s que les femmes Ă©pouses[172].

Afrique

Lois concernant la sexualitĂ© entre personnes de mĂȘme sexe en Afrique. Un grand nombre d'États africains actuels condamnent fortement les relations entre personnes de mĂȘme sexe : les sanctions allant de la prison (orange), prison Ă  vie (orange foncĂ©e) Ă  la peine de mort (brun). Certains États n'appliquent pas des sanctions pourtant inscrites dans le droit, ou un statut juridique ambigu (jaune). L'Afrique du Sud autorise en 2006 le mariage homosexuel.

Les études sur ce type de sexualité sont trÚs rares en Afrique, par tabou le plus souvent. Les pratiques homosexuelles y sont en effet généralement fortement condamnées moralement et souvent juridiquement[173]. Cependant, dans certains pays comme le Sénégal, des études ont été menées à partir des années 2000 pour prendre en compte la réalité et la diversité de ces phénomÚnes[173].

Des chercheurs occidentaux ont rĂ©vĂ©lĂ© qu'il existait de trĂšs nombreuses pratiques bisexuelles dans la pĂ©riode prĂ©-coloniale mais qu'elles ont Ă©tĂ© abandonnĂ©es[174], dĂ©nigrĂ©es puis criminalisĂ©es par les Africains eux-mĂȘmes aprĂšs que des influences Ă©trangĂšres ont imposĂ© les « critĂšres » sexuels hĂ©tĂ©ronormĂ©s du christianisme ou de l'islam. Ainsi, les pratiques Ă©tant jugĂ©es « amorales » ou « contre nature » par les nouveaux-venus seront systĂ©matiquement tues ou effacĂ©es des mĂ©moires. DĂšs le XVIIIe siĂšcle, on croyait ainsi que seule l'hĂ©tĂ©rosexualitĂ© existait en Afrique. La croyance que « l'homosexualitĂ© [prise au sens large d'attirance pour des personnes du mĂȘme sexe] n'a jamais existĂ© en Afrique », est ainsi un mythe qui perdure encore aujourd'hui[175]. Existe Ă©galement le mythe que les pratiques homosexuelles seraient exclusivement occidentales et qu'elles auraient Ă©tĂ© « importĂ©es » par les colons, alors que c'est prĂ©cisĂ©ment le contraire[176] : un universitaire amĂ©ricain remarque que les pays africains ont en rĂ©alitĂ© criminalisĂ© l'homosexualitĂ© en s'inspirant des lĂ©gislations d'alors des anciens colonisateurs[177]. Par exemple, l'anthropologue allemand Kurt Falk estimait dans les annĂ©es 1920 que, parmi les tribus indigĂšnes qu'il avait Ă©tudiĂ©es en Afrique de l'Ouest, les hommes Ă©taient quasiment tous bisexuels[175], avançant le chiffre d'une prĂ©valence de 90 %[178].

Comme illustration, on peut citer la tribu des Gangellas dans ce qui est aujourd'hui l'Angola : un adolescent de 18 ans pouvait publiquement dĂ©clarer son amour pour un autre, plus jeune, et vivre avec lui (des prĂ©sents Ă©taient accordĂ©s en Ă©change aux parents). Le plus ĂągĂ© se mariait ensuite avec une femme et pouvait avoir des relations sexuelles avec son Ă©pouse et son amant jusqu'Ă  ce que le plus jeune soit suffisamment ĂągĂ© Ă  son tour pour dĂ©sirer se marier. Plus largement, on peut parler de pratique de type pĂ©dĂ©rastiques entre des hommes et des adolescents, des relations sexuelles entre des hommes et des femmes mariĂ©s, mais l'interdiction ou la condamnation morale de relations sexuelles entre deux hommes d'Ăąge mĂ»r[174]. Un autre exemple de bisexualitĂ© ancestrale de nature pĂ©dĂ©rastique se trouvait prĂšs de l'oasis de Siwa, prĂšs de l'actuelle frontiĂšre Ă©gypto-libyenne. Des hommes mariĂ©s s'associaient Ă  des adolescents dans des bĂątiments situĂ©s en dehors de l'enceinte du village proprement-dit. Ils formaient des couples guerriers Ă  vocation dĂ©fensive (les familles restant Ă  l'intĂ©rieur du village). La relation qui liait les deux partenaires Ă©tait de nature sentimentale et sexuelle, mais Ă©galement Ă©ducative[179].

En ce qui concerne la bisexualité contemporaine, une étude de 2009 indique une trÚs grande majorité des hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH) ont également maintenu des rapports sexuels avec des femmes, dans des pays comme le Sénégal (87 % - 94 %), le Nigeria (86 %), et l'Ouganda (73 %)[173] - [note 15].

Océanie

Dans de nombreuses sociĂ©tĂ©s ocĂ©aniennes traditionnelles, la bisexualitĂ© Ă©tait largement pratiquĂ©e, l'homosexualitĂ© (en tant que monosexualitĂ©) Ă©tant beaucoup plus rare[180]. La bisexualitĂ© peut aussi ĂȘtre ritualisĂ©e ou socialement codifiĂ©e : c'est le cas des tribus mĂ©lanĂ©siennes, oĂč les jeunes garçons doivent quitter leurs familles pour vivre avec leurs amants masculins, eux-mĂȘmes mariĂ©s, auxquels ils pratiquent des fellations (le liquide sĂ©minal Ă©tant considĂ©rĂ© comme participant, de mĂȘme que le lait maternel, Ă  la croissance)[111]. Une fois devenu grand, le jeune homme se marie et prend Ă  son tour un garçon chez lui. Ainsi il y a fluiditĂ© sexuelle dans le temps : initiation sexuelle homosexuelle durant la jeunesse puis comportement hĂ©tĂ©rosexuel reproductif[MS 9].

Dans la partie Est de la MĂ©lanĂ©sie, une phase d'homosexualitĂ© transitoire peut Ă©galement ĂȘtre regardĂ©e comme un moyen de compenser, durant l'adolescence, l'absence de possibilitĂ© de relations sexuelles hĂ©tĂ©rosexuelles avant le mariage[181]. Des pratiques homosexuelles peuvent Ă©galement faire partie de certains processus d'initiation ; enfin des pratiques homosexuelles peuvent Ă©galement ĂȘtre observĂ©es tout au long de la vie adulte, de pair avec des relations hĂ©tĂ©rosexuelles[181]. Dans la tribu des Nambas, le fait d'avoir plusieurs femmes et garçons est un attribut de pouvoir et de prestige social[182]. Les jeunes hommes apparaissent comme une propriĂ©tĂ©, et peuvent mĂȘme ĂȘtre prĂȘtĂ©s, voire vendus pour un certain laps de temps Ă  d'autres hommes par leurs « maris »[182].

Bisexualité actuelle

Il existe de nombreuses manifestations contemporaines de bisexualité. Malgré cela, celle-ci reste un des plus importants tabous modernes[64]. Cela tient pour partie du fait que des millions de personnes sont aujourd'hui de fait bisexuelles (c'est-à-dire s'engageant dans des relations avec des hommes ou des femmes, ou se sentant ou s'étant sentis attirées par des personnes des deux sexes), mais ne l'assument pas ou le cachent volontairement, ce qui prévient l'émergence d'une véritable visibilité de la bisexualité[62].

Bicuriosité

« Bicurieux » est un adjectif s'appliquant Ă  quelqu'un se dĂ©finissant comme hĂ©tĂ©rosexuel ou homosexuel, mais qui montre un certain intĂ©rĂȘt pour, ou entretient des fantasmes d'avoir une liaison avec une personne du sexe qu'ils ne favorisent pas d'habitude, tout en n'assumant pas ou en rejetant l'Ă©tiquette de bisexuel[183] - [184]. D'aprĂšs une rĂ©cente Ă©tude amĂ©ricaine, la bicuriositĂ© est une tendance trĂšs courante parmi les femmes se considĂ©rant comme « hĂ©tĂ©rosexuelles » : 60 % d'entre elles auraient dĂ©jĂ  ressenti de l'excitation sexuelle envers une autre femme et 45 % d'entre elles auraient dĂ©jĂ  embrassĂ© une autre femme[185]. Yvonne Jewkes, universitaire britannique, constate qu'Ă  cause des nombreux tabous subsistant aujourd'hui encore sur toute relation autre qu'hĂ©tĂ©rosexuelle, nombre de personnes « bicurieuses » utilisent Internet comme moyen de faire des rencontres avec des personnes du mĂȘme sexe, tout en prĂ©servant publiquement une hĂ©tĂ©rosexualitĂ© de façade[186]. Elle note Ă©galement que le concept de « bicuriositĂ© », bien que suscitant l'intĂ©rĂȘt des mĂ©dias vu son apparente augmentation, ne remet pas en cause l'« hĂ©gĂ©monie hĂ©tĂ©rosexuelle », mais permet Ă  certaines femmes d'expĂ©rimenter leur sexualitĂ©[186].

Il apparaĂźt gĂ©nĂ©ralement que si cet intĂ©rĂȘt et cette curiositĂ© peuvent ĂȘtre aussi importants pour les hommes, ils ne s'engagent pas aussi facilement dans un comportement ou un mode de vie bisexuels de par une rĂ©action moins favorable de la sociĂ©tĂ© envers la bisexualitĂ© masculine. La sexologue clinicienne Nathalie Mayor dĂ©clare Ă  ce propos : « Internet a aussi fondamentalement changĂ© la donne
 Dans les mĂ©dias, on parle presque tous les jours de triolisme, d'Ă©changisme, de bisexualité  Les femmes ont de plus en plus envie de tenter, d'essayer. La curiositĂ© est plus forte ! Prenons la bisexualitĂ© des femmes, elle n'est plus aussi mal vue dans notre sociĂ©tĂ© et est tellement Ă©vidente si vous prenez la littĂ©rature, les Ɠuvres cinĂ©matographiques, les clips vidĂ©os
 Pour les hommes, par contre, c'est encore un sujet dĂ©licat mĂȘme si l'envie de tester est bien prĂ©sente[187]. »

Bisexuel chic

Ouvertement bisexuelle[188], Madonna a embrassé sur scÚne Britney Spears et Christina Aguilera en 2003, un geste vu comme un exemple typique de « bisexuel chic »[189] - [190].

Ce terme décrit les personnes s'engageant dans des relations de séduction avec des hommes et des femmes pour faire parler de soi dans une perspective de glamour. Ce serait la chanteuse américaine Madonna qui aurait inventé la premiÚre ce concept avec le clip de sa chanson Justify My Love en 1990 dans lequel elle embrassait tour à tour un homme et une femme[189]. Le terme est souvent appliqué aux stars depuis le baiser de Madonna et Britney Spears en 2003[189], baiser qui choqua le public[191]. Depuis, de trÚs nombreuses femmes célÚbres, comme Fergie[note 16], Kylie Minogue[192], Drew Barrymore, Megan Fox, Katy Perry[note 17], Rihanna[193] ou encore Ke$ha[194] ont par la suite utilisé le « bisexuel chic ». Certaines célébrités, telles les chanteuses Rihanna[195] ou Miley Cyrus[196], ont également été l'objet de spéculations ou de rumeurs quant à leur possible bisexualité.

Le bisexuel chic masculin est plus rare de nos jours, mais Ă©tait largement prĂ©sent dans les annĂ©es 1980 avec des personnalitĂ©s comme David Bowie, Mick Jagger, Marlon Brando et Lou Reed[189]. L'instrumentalisation qui est ainsi faite de la bisexualitĂ© est rejetĂ©e par les associations bisexuelles comme participant Ă  la diffusion de clichĂ©s sur la bisexualitĂ©[189]. Le fait de l'utiliser pour promouvoir sa carriĂšre pour les femmes d'Hollywood est aussi critiquĂ©[189]. Peut-ĂȘtre consĂ©quence de cette mĂ©diatisation, une Ă©tude a montrĂ© que 40 % des jeunes femmes suisses se considĂ©rant comme hĂ©tĂ©rosexuelles ont dĂ©jĂ  embrassĂ© une autre femme[189]. Plus gĂ©nĂ©ralement, il apparaĂźt que voir deux belles femmes s'embrasser soit l'un des plus importants fantasmes masculins modernes[197].

Down low

Au début du XXe siÚcle, on désigne sous le terme de « Down low » le mode de vie propre à certains Afro-Américains qui entretiennent des relations homosexuelles cachées tout en préservant une vie publique hétérosexuelle, maintenant par exemple souvent des relations amoureuses et sexuelles avec leurs épouses ou petites amies [198].

Fluidité sexuelle

Les expressions « fluiditĂ© sexuelle » ou « sexualitĂ© fluide » renvoient Ă  la variation des comportements sexuels dans le temps, en particulier le passage d'une sexualitĂ© primordialement hĂ©tĂ©rosexuelle Ă  un comportement homosexuel et inversement[91]. En anglais amĂ©ricain, le terme fluid (« fluide ») a pu ĂȘtre utilisĂ© pour remplacer le terme « bisexuel(le)[199]. »

Le caractĂšre fluide d'une sexualitĂ© peut Ă©galement signifier qu'elle n'est pas exclusive et monolithique mais qu'elle peut Ă©voluer dans un « entre deux » entre les deux monosexualitĂ©s que sont l'hĂ©tĂ©rosexualitĂ© et l'homosexualitĂ©[200]. Le terme de « fluiditĂ© » est souvent associĂ© Ă  la vie sentimentale des femmes qui semblent dans les sociĂ©tĂ©s modernes plus Ă  mĂȘme de reconnaĂźtre des attirances ou des relations homosexuelles que les hommes[201]. Cette notion pivot du thĂšme de la bisexualitĂ© a notamment Ă©tĂ© modĂ©lisĂ©e par les travaux de Kinsey (qui a complexifiĂ© l'approche sexologique de la sexualitĂ© humaine, avec son Ă©chelle Ă  7 niveaux) et encore davantage par les apports de Klein (qui a affinĂ© encore davantage cette distinction conceptuelle en avançant pas moins de 21 niveaux diffĂ©rents de classification)[200].

Gay for pay

L'acteur pornographique Jeff Stryker est l'un des plus célÚbres exemples de Gay for pay.

Ce terme anglophone s'applique aux personnes se dĂ©finissant comme hĂ©tĂ©rosexuelles mais qui s'engagent dans des relations sexuelles avec des personnes du mĂȘme sexe contre de l'argent[202]. Il est frĂ©quent dans l'industrie pornographique (avec l'exemple du triolisme) ou chez les prostituĂ©es et gigolos[203]. Dans Bigger Than Life: The History of Gay Porn Cinema from Beefcake to Hardcore, Jeffrey Escoffier (en) estime ainsi que 30 Ă  40 % des acteurs jouant dans des films pornographiques homosexuels sont des Gays for pay. Il cite comme exemples des personnalitĂ©s comme Jeff Stryker, Ryan Idol ou Ken Ryker[204].

Hétéroflexibilité

Le terme dĂ©signe une personne principalement hĂ©tĂ©rosexuelle qui serait toutefois occasionnellement attirĂ©e par les personnes du mĂȘme genre ou pourrait imaginer avoir une relation gay ou lesbienne[197] - [205] - [206].

Lesbian until graduation

Ce terme anglophone décrit les femmes étudiantes à l'université s'engageant durant leurs études dans des relations avec d'autres femmes puis adoptant une fois diplÎmées une attitude strictement hétérosexuelle, se mariant par exemple quelques années aprÚs avec des hommes[207] - [MG 5].

Le terme « lesbienne » entretient par ailleurs des relations complexes avec la bisexualité. Il est par exemple apparu que de nombreuses femmes se présentant comme « lesbiennes » éprouvaient des sentiments amoureux pour les hommes et s'engageaient dans des relations amoureuses ou sexuelles avec eux : elles se référent en réalité à l'identité politique et communautaire lesbienne et pas à l'orientation sexuelle monosexuelle[MG 5].

Mostly straight

L'acteur Josh Hutcherson s'est défini en 2013 comme « mostly straight ».

Ce terme anglophone, que l'on pourrait traduire par « presque hĂ©tĂ©ro », « habituellement hĂ©tĂ©ro » ou « plutĂŽt hĂ©tĂ©ro »[208] est parfois utilisĂ© par des personnes dont le comportement amoureux et sexuel est principalement, mais pas exclusivement hĂ©tĂ©rosexuel (on peut le compter comme un Ă©quivalent du score de 1 sur l'Ă©chelle de Kinsey)[209]. Une autre dĂ©finition, avancĂ©e par les personnes qui se dĂ©finissent elles-mĂȘmes ainsi, est celle de quelqu'un qui se voit comme « hĂ©tĂ©rosexuel, jusqu'Ă  que l'on rencontre la bonne personne [du mĂȘme sexe] » mais aussi celle de quelqu'un « qui est hĂ©tĂ©rosexuel mais qui n'exclut pas a priori de vivre des relations homosexuelles » (« straight but not narrow »)[209]. L'acteur amĂ©ricain Josh Hutcherson a ainsi dĂ©clarĂ© que, bien qu'Ă©tant hĂ©tĂ©rosexuel et n'ayant jamais Ă©prouvĂ© d'attirance sexuelle pour un homme, il ne s'interdisait rien[210] et Ă©galement qu'il considĂ©rait que « se dĂ©finir comme Ă©tant quelque chose Ă  100 %, c’est un peu ĂȘtre obtus et fermĂ©[211]. » Les personnes se dĂ©finissant de cette maniĂšre ont moins tendance Ă  s'engager dans des histoires d'amour homosexuelles que les personnes qui se dĂ©crivent comme « bisexuelles[209]. » La prĂ©valence des personnes « presque hĂ©tĂ©ro » varie grandement d'une Ă©tude Ă  l'autre : de 1,2 % Ă  23 % des femmes et 1,7 % Ă  9 % des hommes[209]. D'aprĂšs certaines Ă©tudes, les personnes qui se dĂ©finissent comme « mostly straight » se dĂ©finiraient probablement comme « hĂ©tĂ©rosexuelles » plutĂŽt que « bisexuelles » si un questionnaire ayant ces deux cases, mais pas celle de « mostly straight », venait Ă  leur ĂȘtre soumis[209].

Une étude portant sur les femmes se considérant comme « mostly straight » indique qu'elles constituent un groupe à part, différent des femmes « exclusivement hétérosexuelles ». Est également noté que les femmes « mostly straight » partagent certaines similitudes avec les « bisexuelles » et les « lesbiennes » en matiÚre d'identité[212].

Dans la jeunesse

Il semble que la bisexualité soit mieux accueillie et représentée dans la jeunesse d'aujourd'hui qu'auparavant[213] - [214] ; les générations montantes apparaissant en effet moins prendre en considération la traditionnelle dichotomie hétérosexualité-homosexualité[215] - [216]. Ce serait plus particuliÚrement le cas pour les jeunes femmes[217].

Une Ă©tude française publiĂ©e par l'IFOP en 2013 indique par exemple que la proportion de jeunes s'identifiant comme homosexuels ou bisexuels a beaucoup augmentĂ© de 2006 Ă  2013 : pour la tranche des 18-24 ans, la proportion de garçons s'identifiant comme homosexuels ou bisexuels est de 9 %, contre seulement 2,7 % en 2006 (les valeurs sont respectivement de 9 % en 2013 et 1,4 % en 2006 pour les filles). D'aprĂšs cette Ă©tude, les jeunes s'identifiant comme bisexuels sont deux fois plus nombreux que les jeunes s'identifiant comme homosexuels ou lesbiennes (6 % du total, contre 3 %)[218]. L'enquĂȘte montre Ă©galement que la proportion de jeunes dĂ©clarant avoir « dĂ©jĂ  Ă©tĂ© attirĂ©s par une personne du mĂȘme sexe » augmente avec l'Ăąge : si elle concerne 8 % des garçons et 12 % des filles de 15-17 ans, elle passe respectivement Ă  11 % et 20 % pour les 18-24 ans[219] - [note 18].

Une Ă©tude sexologique menĂ©e au Royaume-Uni en 2015 par YouGov revĂšle que 43 % des 18-24 ans interrogĂ©s se placent eux-mĂȘmes comme appartenant aux niveaux 1 Ă  5 de l'Ă©chelle de Kinsey, soit les diffĂ©rents degrĂ©s de bisexualitĂ© que comporte cette grille[220]. La bisexualitĂ© se fait plus frĂ©quente pour les groupes d'Ăąge les plus jeunes[220]. Au total, 19 % des personnes interrogĂ©es (tous Ăąges confondus) se dĂ©finissent comme appartenant aux niveaux 1 Ă  5 de l'Ă©chelle[220].

Bisexualité féminine

Une étude américaine de 2015 indique que les femmes auraient plus de tendances à la bisexualité que les hommes, ou qu'elles auraient une approche plus « fluide » de leur sexualité[221]. D'aprÚs cette étude (qui porte sur plusieurs milliers de participants des deux sexes, de 1994 à 2008[222]), les femmes sont non seulement en proportion plus nombreuses à déclarer leur bisexualité par rapport aux hommes, mais elles sont également plus enclines à faire évoluer la maniÚre dont elles s'identifient[223].

Une Ă©tude de l'universitĂ© de l'Essex de 2015 rĂ©alisĂ©e avec 235 femmes met en avant que 74 % des femmes participantes se considĂ©rant comme « hĂ©tĂ©rosexuelles » avaient Ă©tĂ© sexuellement excitĂ©es (ce qui est mesurĂ© par la dilatation des pupilles) par des vidĂ©os d'hommes nus et des vidĂ©os de femmes nues[224]. Certains titres de presse anglo-saxons ont interprĂ©tĂ© cette Ă©tude pour suggĂ©rer que les femmes ne pouvaient ĂȘtre que bisexuelles ou lesbiennes, mais jamais hĂ©tĂ©rosexuelles[224] - [225].

HĂ©donisme et libertinage

Giacomo Casanova est connu pour avoir été un grand homme à femmes, mais il a également maintenu plusieurs relations avec des hommes[226].

La bisexualité est souvent associée à l'hédonisme, et à certains environnements libéraux ou libertins comme la sexualité de groupe ou les ménages à trois[MS 8]. Une étude de l'IFOP dans le cadre strictement français tend à montrer que les personnes qui s'identifient comme « bisexuelles » sont comparativement à la population générale plus enclines à avoir eu des relations de groupe de type « orgiaques »[227] - [note 19].

Dans A History of Gay Literature: The Male Tradition, Gregory Woods (en) note que la bisexualitĂ© est souvent reprĂ©sentĂ©e comme un moyen, pour le libertin, de « doubler ses opportunitĂ©s de plaisir », non seulement en ajoutant des hommes aux femmes comme partenaires sexuels potentiels, mais en s'ouvrant Ă©galement Ă  la possibilitĂ© d'ĂȘtre pĂ©nĂ©trĂ©, en plus de la possibilitĂ© de pĂ©nĂ©trer[228]. Il estime que l'on peut retracer ces deux histoires croisĂ©es jusqu'Ă  la Vie des douze CĂ©sars de SuĂ©tone, prenant en exemple NĂ©ron et son mariage avec Sporus, ou les orgies organisĂ©es par TibĂšre[228].

Homophobie comme non-acceptation

Dans une étude menée en 1996, Henry Adams, professeur émérite de psychologie à l'université de Géorgie, a fait regarder à des hommes se déclarant hétérosexuels et homophobes des films pornographiques gays et a constaté que selon des capteurs placés sur leurs pénis[229], 80 % d'entre eux ont été excités par cette vision[230]. Cette étude a contribué à populariser l'idée selon laquelle la plupart des homophobes sont des hommes n'assumant ou n'acceptant pas leurs propres attirances envers les autres hommes[231].

Plus d'un quart des hommes se dĂ©clarant hĂ©tĂ©rosexuels et non homophobes ont par ailleurs Ă©tĂ© excitĂ©s par la vision de ces vidĂ©os[232]. Une Ă©tude de l'universitĂ© de Rochester datant de 2012 conclut que « l'homophobie est plus prononcĂ©e chez les individus ayant une attirance inconsciente envers les individus du mĂȘme sexe qu'eux, et qui ont Ă©tĂ© Ă©levĂ©s par des parents autoritaires, qui interdisaient l'expression de tels dĂ©sirs[233]. » De tels individus se conçoivent seulement comme « hĂ©tĂ©rosexuels »[233].

Un article de The Economist, rĂ©digĂ© par un journaliste spĂ©cialement dĂ©pĂȘchĂ© en AmĂ©rique latine, connue pour sa culture bisexuelle masculine gĂ©nĂ©ralisĂ©e et sa trĂšs forte homophobie culturelle, constate que « l'AmĂ©rique latine a une longue histoire d'ambivalence et d'hypocrisie sur l'homosexualitĂ©[234]. » La culture latino-amĂ©ricaine, trĂšs machiste, accepte que des hommes aient des relations sexuelles avec d'autres hommes, mais seulement s'ils tiennent le rĂŽle actif[234] - [MS 10] ; les hommes en question, qui s'engagent dans des relations sexuelles avec des hommes et des femmes se voient comme « hĂ©tĂ©rosexuels »[MS 11]. Seuls sont stigmatisĂ©s les hommes effĂ©minĂ©s, ceux qui sont supposĂ©s ĂȘtre passifs dans la relation[234]. Une anthropologue norvĂ©gienne Ă©crit sur ce phĂ©nomĂšne : « Le mĂ©pris pour l'homosexuel effĂ©minĂ© est prĂ©cisĂ©ment ce qui rend acceptable la bisexualitĂ© pour les hommes masculins, et c'est pourquoi l'homophobie, le machisme et une bisexualitĂ© masculine gĂ©nĂ©ralisĂ©e forment un ensemble parfaitement cohĂ©rent[234]. »

Prostitution

Dans le contexte des dĂ©bats français sur une Ă©ventuelle pĂ©nalisation des clients de la prostitution, un directeur de boĂźte de nuit parisienne estime dans un ouvrage sur la prostitution masculine que la majoritĂ© des clients sont des hommes, en couple avec des femmes, qui entretiennent l'illusion sociale d'une hĂ©tĂ©rosexualitĂ© de façade[235]. Un article de 2013 publiĂ© par Rue89 donne la parole Ă  un Ă©tudiant prostituĂ© : « le client-type ressemble Ă  monsieur Tout-le-monde. Entre 40 et 60 ans, mariĂ©, une famille et une bonne situation financiĂšre. Il n’assume pas (ou peu) son attirance pour les hommes et cherche Ă  assouvir ses fantasmes sans trop se mouiller » ; prĂ©cisant ĂȘtre particuliĂšrement « sidĂ©rĂ© de la proportion d’hommes mariĂ©s. Certains se confient et nous parlent de leur femme, de leurs enfants[236]. » Des tendances similaires apparaissent au ViĂȘt Nam, oĂč des prostituĂ©s homosexuels, souvent effĂ©minĂ©s, ont une clientĂšle majoritairement constituĂ©e d'hommes bisexuels, qui sont souvent mariĂ©s et ont des enfants, et qui ne sont pas mis Ă  l'Ă©cart de la sociĂ©tĂ© contrairement aux homosexuels effĂ©minĂ©s[237].

Ces pratiques prostitutionnelles peuvent ĂȘtre rapprochĂ©es du phĂ©nomĂšne du « tearoom trade »[238], un terme anglophone provenant d'un travail d'observation sociale publiĂ© en 1970 comme thĂšse de doctorat par Laud Humphreys, un sociologue amĂ©ricain[239]. L'objet d'Ă©tude Ă©taient les hommes s'engageant dans des relations homosexuelles dans certains lieux publics (comme les toilettes des restaurants) de maniĂšre anonyme et « impersonnelle ». Ces hommes sont trĂšs souvent conservateurs, de statut social plutĂŽt favorisĂ©, trĂšs respectĂ©s dans leurs communautĂ©s respectives[238], mariĂ©s (Ă  des femmes) et religieux[239]. Laud Humphreys caractĂ©rise la contradiction entre leur puissante affirmation d'une identitĂ© hĂ©tĂ©rosexuelle, et de positions religieuses, souvent moralisatrices et leurs relations homosexuelles cachĂ©es comme un « plastron de vertu[239]. »

Vie carcérale

Dans les prisons, les prisonniers sont habituellement séparés selon leur sexe, et de nombreux cas de viols d'hommes par d'autres hommes ont été reportés. L'ONG Human Rights Watch, qui a consacré un rapport sur ce phénomÚne dans les prisons américaines, note que « l'hypothÚse du « prédateur homosexuel » est sans fondement ». Selon ses observations, les violeurs s'identifient d'abord comme hétérosexuels, et s'engagent pour leur quasi-totalité dans des rapports sexuels hétérosexuels lorsqu'ils sont en liberté[240].

En ce qui concerne les femmes emprisonnĂ©es, nombre d'entre elles s'engagent dans des relations homosexuelles en prison, un comportement manifestement important pour leur bien-ĂȘtre psychique. Une fois libĂ©rĂ©es, elles reviennent la plupart du temps Ă  la vie hĂ©tĂ©rosexuelle qu'elles avaient menĂ©e jusqu'Ă  leur incarcĂ©ration[MS 12].

Vie de famille

L'actrice américaine Maria Bello, qui a un fils de sa précédente relation avec le producteur Dan McDermott, révÚle publiquement en 2013 qu'elle vit en couple avec une femme, Clare Munn[241]. Elle a parlé de sa situation familiale comme une « famille moderne[242]. »

La majorité des enfants qu'ont les couples homosexuels sont les enfants biologiques issus d'une précédente union hétérosexuelle de l'un des conjoints[243] - [244] - [245] - [246].

Par ailleurs, un certain nombre de couples hĂ©tĂ©rosexuels mariĂ©s sont composĂ©s d'un ou de plusieurs conjoints bisexuels. Aux États-Unis, dans les annĂ©es 1990, on estime entre 1,7 million et 3,4 millions les femmes mariĂ©es Ă  des hommes activement bisexuels (un rapport sexuel homosexuel durant les cinq prĂ©cĂ©dentes annĂ©es)[135]. La trĂšs grande majoritĂ© d'entre eux aiment leurs femmes, et certains se considĂšrent comme des hĂ©tĂ©rosexuels qui ont quelques dĂ©sirs homosexuels, qu'ils espĂšrent pouvoir maĂźtriser en s'engageant dans une vie maritale et de famille[135]. Les mariages peuvent parfois Ă©chouer du fait de l'orientation sexuelle diffĂ©rente des conjoints, qui peut ne pas ĂȘtre rĂ©vĂ©lĂ©e dĂšs le dĂ©but de la vie de famille[135].

Viols et violences sexuelles

Aux États-Unis, 46 % des femmes bisexuelles sont victimes de viol, contre 13 % des lesbiennes et 17 % des hĂ©tĂ©rosexuelles[247]. Elles sont 32 % Ă  n'avoir connu qu'un agresseur, 31 % deux et 36 % trois ou plus[247]. Pour 98 % d'entre elles, le ou les agresseurs est toujours un homme[247]. Le premier viol dont elles sont victimes arrive quand elles ont entre 11 et 17 ans pour 48 % d'entre elles et quand elles ont entre 18 et 24 ans pour 33 %[247]. Les bisexuelles sont Ă  22 % victimes de viol conjugal et Ă  40 % d'autres violences sexuelles de la part de leur partenaire[247]. La prĂ©valence pour toutes les violences sexuelles s'Ă©lĂšve Ă  75 % pour les bisexuelles et Ă  47 % pour les hommes bisexuels[247]. L'agresseur est alors un homme dans 87 % des cas pour les femmes bisexuelles, et dans 65 % des cas pour les hommes bisexuels[247].

Violences conjugales

Aux États-Unis, les femmes bisexuelles sont victimes Ă  57 % de violence physique de la part de leur partenaire et Ă  31 % de harcĂšlement[247] ; les hommes bisexuels sont victimes de violence physique de la part de leur partenaire Ă  37 %[247]. Au Canada, 28 % des personnes bisexuelles rapportent ĂȘtre victimes de violence conjugale[248]. 50 % des bisexuelles sont victimes de violence physique sĂ©vĂšre et 15 % ont dĂ©jĂ  eu un couteau ou un pistolet utilisĂ© contre elles[247]. 27 % des hommes bisexuels ont dĂ©jĂ  Ă©tĂ© giflĂ©s, bousculĂ©s ou poussĂ©s par leur partenaire[247]. Les femmes bisexuelles sont victimes de violences psychologiques de la part de leur partenaire Ă  76 % et les hommes bisexuels Ă  53 %[247].

Ces violences sont des formes de contrĂŽle coercitif pour 60 % des femmes, tels que la menace de se suicider (53 %), d'en arriver Ă  la violence physique (52 %) ou empĂȘcher l'utilisation de son propre argent (20 %). 15 % des bisexuelles ont eu leur partenaire qui a essayĂ© de les faire tomber enceinte contre leur volontĂ© et 9 % un partenaire qui refusait l'usage du prĂ©servatif[247]. Dans 40 % des cas pour les femmes et 54 % pour les hommes, la violence conjugale contre les personnes bisexuelles se retrouve chez plusieurs partenaires[247]. 90 % des auteurs de violence conjugal contre les femmes bisexuelles sont des hommes et 79 % des auteurs contre des hommes bisexuels sont des femmes[247].

Impact des violences conjugales et sexuelles

Lorsque victimes de violences conjugales et/ou sexuelles, les femmes bisexuelles subissent dans 57 % des cas un impact sur leur santĂ© ou leur bien-ĂȘtre : 46 % prĂ©sentent des symptĂŽmes de stress post-traumatique, 16 % se retrouvent dans un Ă©tat nĂ©cessitant une intervention mĂ©dicale et 11 % une intervention lĂ©gale[247].

Viols de guerre

Dans le cadre de nombreux conflits, le viol est utilisĂ© comme une arme de guerre. Les RĂ©seaux d'information rĂ©gionaux intĂ©grĂ©s rapportent que si les viols de femmes sont des atrocitĂ©s reconnues et Ă©tudiĂ©es, ceux qui visent des hommes sont une rĂ©alitĂ© ignorĂ©e ou largement sous-estimĂ©e[249]. Or, les violences sexuelles liĂ©es aux guerres peuvent affecter de maniĂšre relativement indistincte les hommes et les femmes : une Ă©tude publiĂ©e en 2010 dans le Journal of the American Medical Association estime que 22 % des hommes et 30 % des femmes de la rĂ©gion est de la rĂ©publique dĂ©mocratique du Congo avaient souffert de violences sexuelles dues au conflit dans cette partie du pays[250]. On peut voir dans cette « bisexualitĂ© de la terreur »[251] une manifestation de puissance et d'agressivitĂ© brutes, oĂč la victime n'est plus vue que comme un objet « dĂ©sexuĂ© »[251].

Santé

Il apparaßt que, de maniÚre générale, les personnes bisexuelles ont les moins bonnes conditions de santé des principales orientations sexuelles en raison de la biphobie et de l'invisibilité de la bisexualité, du manque de soutien auxquels les bisexuels font souvent face et de la « double discrimination » qui les frappe, de la part à la fois de la communauté hétérosexuelle et homosexuelle[91] - [252]. Des études ont démontré que les adolescents bisexuels sont généralement une population bien plus à risque de développer des problÚmes psychiatriques, des pensées suicidaires, des problÚmes d'alcool ou de drogues que les hétérosexuels[253]. Des études prouvent également que le soutien familial permet de réduire ces problÚmes de santé[253].

Santé mentale

Les personnes bisexuelles sont particuliÚrement à risque de souffrir de dépression et d'avoir des pensées suicidaires : 56 % des adolescents bisexuels ont déjà pensé au suicide (avec 26 % de tentatives), contre 57 % des adolescents homosexuels (7 % de tentatives) et 38 % des adolescents hétérosexuels (13 % de tentatives)[254]. Ce risque accru se maintient à l'ùge adulte, avec 14 % de tentatives de suicides chez les bisexuels, contre 2 et 4 % chez les hétérosexuels et homosexuels[254]. En SuÚde, 25 % des femmes bisexuelles ont eu des pensées suicidaires dans l'année, comparé à 18 % des hommes gays et bisexuels, 14 % des lesbiennes et 5 % des hétérosexuels[255].

Toxicologie

Bien qu'en baisse, la consommation de tabac est Ă©levĂ©e parmi les jeunes bisexuelles, passant au Canada de 38 % en 1998 Ă  22 % en 2003[256]. Selon la mĂȘme Ă©tude, 62 % des jeunes bisexuelles ont dĂ©jĂ  essayĂ© la marijuana en 2003 et ont un taux de consommation rĂ©guliĂšre deux fois et demi plus Ă©levĂ© que les hĂ©tĂ©rosexuelles[256].

La pratique du binge drinking est en augmentation chez les jeunes bisexuelles, passant de 12 % en 1992 à 43 % en 2003[256]. Les bisexuelles et les filles se définissant comme « presque hétérosexuelles » sont les catégories présentant la plus haute consommation d'alcool[257].

Émergence des communautĂ©s aux XXe et XXIe siĂšcles

Causes du militantisme

Une pancarte aux couleurs du drapeau bisexuel, indiquant « Proud to bi myself » (« FiĂšre d'ĂȘtre bi/moi-mĂȘme »), Ă  la Marche des fiertĂ©s de Paris, en 2021.

Un prĂ©jugĂ© rĂ©pandu estime que les bisexuels ne seraient que des « homosexuels » qui chercheraient Ă  prĂ©server un « privilĂšge hĂ©tĂ©rosexuel »[258]. En dĂ©coule l’idĂ©e reçue que tous ceux qui s’identifient comme bisexuels sont en rĂ©alitĂ© des gays ou lesbiennes ayant peur de l’admettre[62]. Cette idĂ©e fausse explique cependant un des adages de la culture gay : « Bi maintenant, gay plus tard »[259] (ainsi, d'aprĂšs une enquĂȘte d'Advocate menĂ©e en 1994, 40 % des hommes homosexuels interrogĂ©s s'Ă©taient d'abord prĂ©sentĂ©s comme bisexuels avant de s'affirmer comme homosexuels[260]). Beaucoup de bisexuels ne se sentent de vĂ©ritable place ni dans la communautĂ© gay ni dans le monde hĂ©tĂ©rosexuel, parce qu’ils ont tendance Ă  rester invisibles au public (c'est-Ă -dire vivant sans attirer l’attention des sociĂ©tĂ©s homosexuelles et hĂ©tĂ©rosexuelles[62]). La communautĂ© bisexuelle se forme notamment pour lutter contre cette occultation de la bisexualitĂ©[261].

Le mot « biphobie » est un nĂ©ologisme[note 20] caractĂ©risant une personne pensant que la bisexualitĂ© n'existe pas, ayant de nombreux prĂ©jugĂ©s contre ces personnes, c'est-Ă -dire croyant qu'on ne peut ĂȘtre qu'hĂ©tĂ©rosexuel ou homosexuel, ou possĂ©dant des clichĂ©s dĂ©favorables sur la bisexualitĂ©, comme le fait qu'ĂȘtre bisexuel rendrait infidĂšle ou instable[91]. Le modĂšle binaire, monosexualiste, qui ne reconnaĂźt que l'hĂ©tĂ©rosexualitĂ© et l'homosexualitĂ© reste encore prĂ©pondĂ©rant. Dans les annĂ©es 2000, au sein des sociĂ©tĂ©s occidentales, la bisexualitĂ© est beaucoup mieux acceptĂ©e chez les femmes que chez les hommes[262] ; les bisexuelles sont d'autant plus libres de parler ouvertement de leur sexualitĂ© que les bisexuels[262].

Il existe aussi de nombreux clichĂ©s et prĂ©jugĂ©s sur les bisexuels ou la bisexualitĂ© en gĂ©nĂ©ral : ainsi on pense souvent que les bisexuels s'engagent dans des relations sexuelles avec de trĂšs nombreuses personnes[263], qu'ils ont des mƓurs lĂ©gĂšres, ou encore qu'ils sont infidĂšles. Une autre forme de biphobie est de penser, ce qui arrive notamment dans la communautĂ© homosexuelle, que la bisexualitĂ© ne serait qu'une « phase transitoire » entre l'hĂ©tĂ©rosexualitĂ© et l'homosexualitĂ©, et que les bisexuels ne seraient que des homosexuels ne s'assumant pas[91] - [93]. MĂȘme la communautĂ© scientifique, en particulier les psychiatres, vĂ©hiculait de telles conceptions biphobes durant les annĂ©es 1970 et 1980[MS 13].

États-Unis

Groupes de militants bisexuels, pansexuels et queer lors de la National Equality March de Washington, en 2009.

Le militantisme bisexuel aux États-Unis commence Ă  partir des annĂ©es 1980, avec des pionniers comme l'Ă©crivaine Lani Ka'ahumanu, l'une des premiĂšres personnalitĂ©s Ă  faire son coming out bisexuel public dans une revue homosexuelle de San Francisco, qui cofonde par la suite le groupe BiPOL et devient une porte-parole rĂ©guliĂšre des revendications bisexuelles, fĂ©ministes et queer[264] - [265].

En 1987, un groupe de militants bisexuels fonde le North American Bisexual Network (NABN) aprĂšs une manifestation Ă  Washington ; il devient en 1991 le BiNet USA[266]. Plusieurs autres associations de bisexuels fleurissent Ă©galement dans diffĂ©rentes parties des États-Unis. De 1990 Ă  2002, le magazine Anything That Moves (« Tout ce qui bouge ») contribue Ă  lutter contre la biphobie (en reprenant ironiquement Ă  son compte le clichĂ© biphobe selon lequel les bisexuels « sautent sur tout ce qui bouge ») et Ă  donner une meilleure visibilitĂ© aux bisexuels au sein des mouvements LGBT[MG 6]. Le sexologue et psychiatre Fritz Klein entretient Ă©galement une activitĂ© de militant : il crĂ©e en 1998 l'American Institute of Bisexuality, qui a pour but de favoriser les Ă©tudes portant sur la bisexualitĂ©, mais aussi de mieux diffuser les connaissances Ă  ce sujet et donc de lutter contre les clichĂ©s[267].

Grande-Bretagne

Une communautĂ© bisexuelle active Ă©merge en Grande-Bretagne au cours des annĂ©es 1980-1990[268]. En 1994, un rassemblement de militants bisexuels dĂ©bouche sur l'institution de confĂ©rences nationales annuelles sur la bisexualitĂ©, qui se transforment quelques annĂ©es plus tard en une importante convention, la BiCon[269]. À partir de 1995, un fanzine mensuel, Bi Community News, diffuse l'actualitĂ© de la communautĂ© bisexuelle britannique. Il existe plusieurs associations et groupes de bisexuels, comme le Bisexual Index, fondĂ© lors d'une BiCon en 2007[269] - [270].

France

En France, la premiĂšre association nationale de bisexuels, Bi'Cause, est crĂ©Ă©e en 1997 Ă  Paris par un groupe de femmes lassĂ©es d'ĂȘtre confrontĂ©es Ă  la biphobie au sein de la communautĂ© lesbienne[271] - [272]. Elle cĂ©lĂšbre la « JournĂ©e de la bisexualitĂ© » Ă  partir de 2009[273].

En 2007, est créé à Strasbourg Ambivalence, groupe de soutien pour personnes bisexuelles et de lutte contre la biphobie[274].

Ailleurs dans le monde

Le nombre d'associations bisexuelles dans le monde s'accroĂźt Ă©normĂ©ment au cours des annĂ©es 1990. L'Ă©dition 2001 du Bisexual Resource Guide, un document produit par le Bisexual Resource Center et qui contient un annuaire des associations bisexuelles dans le monde, rĂ©pertorie 2 134 organisations bisexuelles dans 68 pays (incluant des pays aussi divers que le Botswana, la Colombie, les Ăźles Fidji, la Hongrie, la Lituanie, la Namibie, Singapour, la CorĂ©e du Sud ou l'Uruguay)[67].

Symboles et visibilité

Une « communauté invisible »

La biphobie et l'occultation de la bisexualitĂ© font que la bisexualitĂ© est trĂšs peu Ă©tudiĂ©e et reconnue pour elle-mĂȘme, au point que l'on a pu parler de « communautĂ© invisible »[Barker 7]. Cette sexualitĂ© peut ĂȘtre vue comme « invisible », « exclue » ou « silencieuse » dans de nombreux domaines, incluant les mĂ©dias de masse, les communautĂ©s homosexuelles, la recherche sexologique, la psychologie, la psychothĂ©rapie ou encore les lĂ©gislations et politiques publiques[Barker 7]. L'absence de vĂ©ritables moyens d'identification et de reconnaissance de la bisexualitĂ© peut Ă©galement ĂȘtre une cause de l'invisibilitĂ© de la bisexualitĂ©[103]. Cette invisibilitĂ© de la bisexualitĂ© peut ĂȘtre la principale difficultĂ© des personnes bisexuelles cherchant Ă  bĂ©nĂ©ficier de services d'aide gouvernementaux spĂ©cifiques et appropriĂ©s[91]. Le nĂ©ologisme de « bi-invisibilitĂ© » (ou « invisi-bi-litĂ© ») a Ă©tĂ© formĂ© pour dĂ©signer le « manque de reconnaissance, et l'ignorance des preuves claires indiquant que la bisexualitĂ© existe »[79].

La bisexualitĂ© apparaĂźt comme particuliĂšrement peu visible Ă  cĂŽtĂ© de l'homosexualitĂ©[275], bien qu'elle soit statistiquement bien plus courante[213] - [275] (l'universitaire amĂ©ricaine Lisa M. Diamond dĂ©clare Ă  ce propos qu'« il est bien plus frĂ©quent d'ĂȘtre un peu attirĂ© par quelqu'un de son propre sexe que d'ĂȘtre exclusivement attirĂ© par quelqu'un de son propre sexe »[276]). Kenji Yoshino, un universitaire amĂ©ricain enseignant Ă  la facultĂ© de droit de Yale estime que si la bisexualitĂ© est si peu visible, c'est parce que les communautĂ©s homosexuelle et hĂ©tĂ©rosexuelle ont toutes deux un intĂ©rĂȘt Ă  ce que la bisexualitĂ© soit effacĂ©e de la sociĂ©tĂ©[275]. Le mĂȘme argumentaire est repris par Marjorie Garber, auteure de Vice-Versa: Bisexuality and the Eroticism of Everyday Life[277]. En particulier, la communautĂ© homosexuelle a tendance Ă  s'approprier des histoires ou des personnes ne lui appartenant pas ; Chris Calge parle ainsi d'une « historiographie monosexuelle gay »[278]. Plus largement, la bisexualitĂ© apparaĂźt comme Ă©tant la catĂ©gorie la moins connue et reconnue de toute la communautĂ© LGBT[279]. La communautĂ© bisexuelle tend toutefois Ă  se former pour lutter contre cet effacement[275].

Une des causes de l’invisibilitĂ© des bisexuels est que l'on ne peut les identifier par le sexe de la personne avec lesquels ils sont en relation : ainsi, on va faussement dĂ©signer comme automatiquement « gay » un homme en couple avec un autre homme, ou comme « hĂ©tĂ©rosexuel » un homme en couple avec une femme[280]. Cette pensĂ©e hĂ©tĂ©rosexiste Ă©rige en « bien » ou « normal » les relations hĂ©tĂ©rosexuelles, en « mal » ou « anormal » les relations homosexuelles, et ne laisse aucun espace possible entre ces deux pĂŽles[280].

Ces occultations et biphobies sont telles que nombre de bisexuels, mĂȘme jusqu'au sein de la communautĂ© LGBT, ne se prĂ©sentent pas ainsi, mais comme « homosexuels » ou « lesbiennes », ces termes Ă©tant mieux acceptĂ©s[269].

Drapeau de la fierté bisexuelle

Le drapeau de la fierté bisexuelle est créé par Michael Page en 1998[281].

Pour plus de visibilité, et pour donner un symbole au rassemblement de la communauté bisexuelle, Michael Page a créé le « drapeau de la fierté bisexuelle » en 1998, sur le modÚle du drapeau arc-en-ciel, afin d'accroßtre la visibilité des bisexuels au sein et en dehors de la communauté LGBT[282].

Le drapeau bisexuel affiche une bande rose en haut pour l’homosexualitĂ©, une bande bleue en bas pour l’hĂ©tĂ©rosexualitĂ© et une bande violette au milieu pour reprĂ©senter la bisexualitĂ©, le violet Ă©tant la combinaison du rouge et du bleu[282]. Cette derniĂšre est plus petite que les autres, figurant ainsi la non-visibilitĂ© des bisexuels dans la sociĂ©tĂ©[283].

Journée internationale de la bisexualité

La journée de la bisexualité a été créée en 1999 ; elle a lieu chaque année le 23 septembre[284]. Elle donne lieu à diverses initiatives militantes de communication auprÚs du grand public et de lutte contre la biphobie[285] - [286].

Évocations dans les arts

Cinéma

Le premier film Ă  dĂ©peindre la bisexualitĂ© semble ĂȘtre A Florida Enchantment, un film amĂ©ricain de 1914[288]. Hollywood ayant une rĂ©putation sulfureuse Ă  cause de la drogue qui y circule et de la grande libertĂ© sexuelle des employĂ©s de l'industrie cinĂ©matographique (et en particulier des acteurs), le secteur du cinĂ©ma tente de s'auto-rĂ©guler pour gagner en respectabilitĂ©. En 1934, le code Hays commence Ă  ĂȘtre appliquĂ© : toute reprĂ©sentation de scĂšnes ou de personnages bisexuels ou homosexuels devient interdite aux scĂ©naristes[288]. Ainsi, durant les annĂ©es 1930 et 1940, la bisexualitĂ© disparaĂźt du cinĂ©ma amĂ©ricain. AprĂšs la Seconde Guerre mondiale, des rĂ©alisateurs audacieux commencent Ă  passer outre cette rĂšgle, qui se rĂ©vĂšle obsolĂšte et sera complĂštement abandonnĂ©e dans les annĂ©es 1960[288]. L'abandon du code Hays ne se traduit pourtant pas immĂ©diatement par une reprĂ©sentation positive de la bisexualitĂ© : dans Inside Daisy Clover (1966), le protagoniste, bisexuel, renvoie une image d'Ă©goĂŻsme et d'amoralisme[288]. Dans Basic Instinct (1992), Sharon Stone joue une femme fatale bisexuelle et suspectĂ©e d'assassinat. Le film est froidement accueilli par les mouvements LGBT, qui lui reprochent son assimilation de la bisexualitĂ© avec le crime[288], bien que la suspecte soit finalement innocentĂ©e. La personne coupable est au-dessus de tout soupçon. L'hĂ©roĂŻne bisexuelle rĂ©apparaĂźt dans une suite, Basic Instinct 2.

La bisexualitĂ© de figures historiques aussi diverses que James Dean, Montgomery Clift, Judy Garland, Janis Joplin, Oscar Wilde ou encore Frida Kahlo a pu ĂȘtre reprĂ©sentĂ©e dans des films biographiques[289].

Le thÚme est abordé dans Mort à Venise (1971) par l'intermédiaire du personnage principal, von Aschenback[Klein 5]. Le film est récompensé lors du Festival de Cannes de 1971[290].

Dans Les Chansons d'amour, film musical du réalisateur français Christophe Honoré avec une musique d'Alex Beaupain sorti en 2007, l'un des personnages principaux est bisexuel : il entretient des relations amoureuses avec des femmes puis avec un homme.

En 2013 La Vie d'AdÚle, d'Abdellatif Kechiche[291], est ovationné par la critique, qui reçoit notamment la Palme d'or à l'unanimité[292] ainsi que le Prix Fipresci du festival de Cannes[293].

Dans les industries cinĂ©matographiques et tĂ©lĂ©visuelles anglo-saxonnes contemporaines, en particulier Hollywood, la bisexualitĂ© et les personnes bisexuelles continuent d'ĂȘtre prĂ©sentĂ©es de maniĂšre dĂ©favorable, gĂ©nĂ©ralement par des clichĂ©s biphobes[Barker 2] - [note 21].

Littérature

William Shakespeare, l'un des plus grands dramaturges de la littĂ©rature occidentale, Ă©tait bisexuel[294]. MariĂ©, et ayant eu plusieurs enfants, il adressait des sonnets enflammĂ©s Ă  un homme, le fair Lord. La bisexualitĂ© de Shakespeare a Ă©tĂ© constamment et dĂ©libĂ©rĂ©ment cachĂ©e par les diffĂ©rents universitaires qui ont Ă©tudiĂ© son Ɠuvre durant les quatre derniers siĂšcles[295].
Portrait de Colette, « la Reine de la bisexualité » par Ferdinand Humbert, (vers 1896).
François Mauriac, bisexuel (ici, lors de son entrée à l'Académie française)..

Comme dans de nombreux autres domaines, la bisexualitĂ© a Ă©tĂ© largement occultĂ©e en tant que telle dans les Ɠuvres littĂ©raires au cours des siĂšcles[296]. NĂ©anmoins, de nombreux auteurs et autrices sont connus pour leur bisexualitĂ©, qui est selon les cas abordĂ©e dans leurs Ɠuvres ou non. Citons, dans la littĂ©rature française, Louis Aragon (mariĂ© Ă  Elsa Triolet, il s'engage, aprĂšs la mort de celle-ci, dans des relations avec des jeunes hommes[297]) ou Paul Verlaine[143] (mariĂ©, mais entretenant une cĂ©lĂšbre relation avec Arthur Rimbaud), l'acadĂ©micienne Marguerite Yourcenar[298] (qui Ă©crivit un livre sur l'empereur romain bisexuel Hadrien qui connut un succĂšs mondial, les MĂ©moires d'Hadrien), Simone de Beauvoir[299] ou encore Colette[Klein 4] - [Klein 6]. La littĂ©rature anglophone compte parmi son panthĂ©on des figures de proue bisexuelles ou considĂ©rĂ©es probablement bisexuelles, telles que William Shakespeare[300], Oscar Wilde[301] ou encore Katherine Mansfield[302] et Virginia Woolf[303], dont les Ɠuvres sont parfois parsemĂ©es d'allusions homo-Ă©rotiques souvent voilĂ©es Ă  l'aide de jeux d'inversion de genre.

ReflĂ©tant la bisexualitĂ© gĂ©nĂ©ralisĂ©e des sociĂ©tĂ©s grecques et romaines antiques, le thĂšme est trĂšs couramment abordĂ© dans la littĂ©rature de cette Ă©poque[296], que ce soit des discussions philosophiques (Le Banquet par exemple) ou des romans (le Satyricon par exemple). Eva Cantarella, auteure de Selon la nature, l'usage et la loi : la bisexualitĂ© dans le monde antique, remarque que la bisexualitĂ© est frĂ©quemment abordĂ©e dans les Ɠuvres d'HomĂšre, d'AnacrĂ©on et de Pindare, du cĂŽtĂ© grec, et par Plutarque, CicĂ©ron et Catulle, chez les Romains[296].

La bisexualitĂ© fait gĂ©nĂ©ralement partie de la littĂ©rature libertine, celle qui postule que chaque dĂ©sir sexuel doit ĂȘtre menĂ© Ă  son terme sans se prĂ©occuper de la dĂ©sapprobation morale de la sociĂ©tĂ©. Ainsi, par exemple, dans Les Liaisons dangereuses (1782) de Pierre Choderlos de Laclos, l'auteur fait apparaĂźtre un des principaux personnages, la marquise de Merteuil, redoutable sĂ©ductrice ayant eu un nombre incalculable d'amants, comme attirĂ©e par une jeune femme d'une quinzaine d'annĂ©es, CĂ©cile Volanges[304] ; de mĂȘme le personnage du Chevalier dans La Philosophie dans le boudoir du marquis de Sade, s'engage dans des expĂ©riences homosexuelles lorsqu'elles lui sont proposĂ©es par DolmancĂ©, tout en prĂ©cisant que « tout cela ce sont des extravagances que je ne prĂ©fĂ©rerai jamais au plaisir des femmes »[305] - [note 22]. Si des descriptions d'orgies bisexuelles sont trĂšs frĂ©quentes dans l'Ɠuvre de Sade, l'homosexualitĂ© est, elle, trĂšs rare[306].

Plus récemment, le thÚme de la bisexualité et du libertinage ont été abordés par Jean-Baptiste Del Amo dans Une éducation libertine (2008), qui lui a permis de remporter le Prix Goncourt du premier roman[307].

Musique et chansons

La chanteuse amĂ©ricaine Lady Gaga Ă©voque sa bisexualitĂ© dans son Ɠuvre musicale et milite pour les droits des personnes LGBT, notamment le retrait du Don't ask, don't tell aux États-Unis[308].

Certains chanteurs ont révélé au grand public leur bisexualité, tel David Bowie dÚs les années 1970. Kurt Cobain (du groupe Nirvana) a indiqué au magazine The Advocate sa bisexualité, notant que s'il n'avait pas rencontré Courtney Love, il aurait certainement continué à établir des relations avec des hommes et des femmes[MG 7]. Plus récemment, Brian Molko (du groupe Placebo) s'est aussi déclaré bisexuel[309]. On sait également qu'une personnalité « rebelle » comme Janis Joplin est bisexuelle[Klein 4]. Bessie Smith, chanteuse afro-américaine trÚs populaire dans les années 1920 et grande inspiration de cette derniÚre, était également bisexuelle[MG 8].

Le monde du rap amĂ©ricain, considĂ©rĂ© parmi les plus homophobes et biphobes (discriminations qui se manifestent, entre autres, dans les paroles des chansons[310]), voit peu Ă  peu les choses Ă©voluer. Alors que Nicki Minaj a dĂ©jĂ  dĂ©voilĂ© sa bicuriositĂ©, la rappeuse Azealia Banks a indiquĂ© sa bisexualitĂ© dans une interview au New York Times en 2012[310]. La mĂȘme annĂ©e, Frank Ocean a dĂ©cidĂ© de reconnaĂźtre publiquement sa bisexualitĂ© (il a Ă©crit une lettre publique dans laquelle il a dĂ©clarĂ© que son premier amour de jeunesse Ă©tait un jeune homme de son Ăąge[311]), un geste qui pourrait faire Ă©voluer la mentalitĂ© du milieu vers davantage de tolĂ©rance[312].

Le thÚme de la bisexualité a été abordé dans les chansons suivantes :

Séries télévisées

L'acteur Pedro Pascal, qui interprÚte Oberyn Martell dans Game of Thrones, un prince-guerrier bisexuel, s'est publiquement félicité que son personnage amÚne davantage de diversité sexuelle dans la série et a reconnu que cela a pu aider certains fans de la série à accepter leur sexualité[320].

La décennie écoulée a permis de faire émerger, dans les séries télévisées, en particulier américaines, davantage de représentations de personnages bisexuels et de la bisexualité en général qu'il n'y en avait jamais eu par le passé[321]. Cette visibilité accrue concerne tout particuliÚrement la bisexualité féminine[322] - [323]. Toutefois, la Gay & Lesbian Alliance Against Defamation note dans une étude reprise en 2014 par The Advocate que la bisexualité reste largement sous-représentée, en particulier par rapport aux autres personnages LGBT[324].

Voici quelques exemples de personnages bisexuels dans les séries télévisées.

Web-séries

  • Rose by Any Other Name
 (en), une web-sĂ©rie rĂ©alisĂ©e par Kyle Schickner pour FenceSitter Films et lancĂ©e en 2009, a pour personnage principal une femme qui s'identifie d'abord comme lesbienne, puis se dĂ©couvre bisexuelle lorsqu'elle tombe amoureuse d'un homme[340].
  • La ThĂ©orie du Y est une web-sĂ©rie belge produite par la RTBF en 2016 et qui a pour thĂšme principal la bisexualitĂ©. Il s'agit de l'adaptation de la piĂšce de thĂ©Ăątre Ă©ponyme de Caroline Taillet. On y suit Anna, une jeune femme qui se questionne sur sa sexualitĂ© aprĂšs une rencontre impromptue avec une autre femme lors d'une soirĂ©e.

Jeux-vidéos

  • Fallout 2 (1998) : Le personnage jouable peut ĂȘtre bisexuel et entamer une romance avec Miria et Davin, peu importe son sexe de dĂ©part[341].
  • Fable (2004) : Le personnage du joueur, s'il est un homme, peut entrer en couple et se marier avec un pnj masculin[342].
  • Mass Effect (2007) : Si le Commandant Shepard est une femme, elle peut entamer un triangle amoureux avec l'extraterrestre Liara T'Soni et le lieutenant Kaidan Alenko[343].
  • Mass Effect 2 (2010) : Les personnages de Kelly Chambers et Samara peuvent dĂ©buter une romance avec Shepard, peu importe son sexe.
  • Dragon Age II (2011) : Les personnages d'Anders, Fenris, Isabela et Merrill sont des options de romance disponibles pour le joueur, sans distinction de son sexe[344].
  • Saint Row IV (2013) : Le joueur, sous un caractĂšre parodique, peut dĂ©buter des relations sexuelles avec l'ensemble de son Ă©quipage.
  • Dragon Age: Inquisition (2014) : Les personnages de Josephine Montiliyet et Iron Bull sont des choix de romance disponibles pour l'inquisiteur, qu'il soit un homme ou une femme.
  • The Witcher 3: Wild Hunt (2015) : Ciri, la fille adoptive de Geralt, est dĂ©crite comme bisexuelle, tout comme dans les romans dont le jeu fait office de suite.
  • Assassin's Creed Odyssey (2018) : Les personnages jouables d'Alexios ou Cassandra peuvent entamer plusieurs relations avec d'autres personnages de sexe diffĂ©rents au cours du jeu[345].
  • The Last of Us Part II (2020) : Au cours de l'histoire, Dina entre en couple avec Ellie aprĂšs avoir rompu avec son petit-ami Jesse.
  • Cyberpunk 2077 (2020) : V, le protagoniste, peut entamer plusieurs romances avec plusieurs personnages de sexe diffĂ©rents.

Notes et références

Notes

  1. Les distinctions entre « comportement sexuel », « comportement de reproduction » et « comportement Ă©rotique » sont expliquĂ©es dans les articles Comportement Ă©rotique et Comportement de reproduction. Ces expressions ont Ă©tĂ© proposĂ©es par les auteurs Martin H. Johnson et Barry J. Everitt dans leur ouvrage Reproduction, 5e Ă©dition, publiĂ© chez De Boeck UniversitĂ© en 2001, car les diffĂ©rences neurobiologiques, cognitives et comportementales entre les espĂšces modifient la dynamique du comportement sexuel. L'ouvrage qui prĂ©sente le plus de vĂ©rifications expĂ©rimentales de ces distinctions est « Functional and dysfunctional sexual behavior »(Archive.org ‱ Wikiwix ‱ Archive.is ‱ Google ‱ Que faire ?) du neurobiologiste Anders Agmo.
  2. Marjorie Garber, dans Bisexuality and The Eroticism of Everyday Life, Routledge (2000), s'interroge (page 249 et suivantes) sur les raisons qui poussent à ne pas s'engager dans des pratiques bisexuelles, la difficulté à déterminer ce qui constitue la bisexualité et la grande diversité des sondages ou estimations qui en résultent sur la proportion de personnes bisexuelles dans la population générale, qui peuvent aller de 10 % à 80 % dans certaines études ou estimations qu'elle a rassemblées.
  3. Cette bisexualité correspond à un classement de 3 sur l'échelle de Kinsey.
  4. Se reporter Ă  ce sujet Ă  l'ouvrage d'Eva Cantarella, Bisexuality in the Ancient World, Yale University Press, 2002 (ISBN 0300093020).
  5. Le terme de « bisexualité » est employé par Eva Cantarella, dans Selon la nature, l'usage et la loi : la bisexualité dans le monde antique, La Découverte, 1991. Elle justifie dans son introduction l'emploi de ce terme contemporain à propos des sociétés antiques.
  6. L'historien Jean-Jacques Aubert, mettant l'accent sur le caractÚre dominateur et prédateur de la sexualité du citoyen romain, parle quant à lui de « bisexualité de viol » ; cf. Sarah Scholl, « Bisexualité antique : l'histoire questionne nos clichés », entretien avec Jean-Jacques Aubert paru dans Le Courrier du 2 juillet 2004 (lire en ligne).
  7. Pour dĂ©montrer ce fait, GĂ©raldine Puccini-Delbey met en avant dans La vie sexuelle Ă  Rome (Éditions Points (2010), 383 pages, p. 25-26) les paroles d'un esclave d'une comĂ©die de Plaute, qu'elle estime reprĂ©senter « parfaitement » la distinction entre les relations licites et illicites : « Pourvu que tu t'abstiennes de femme mariĂ©e, de veuve, de vierge, de jeunes hommes et d'enfants de condition libre, aime ce qu'il te plaĂźt. ».
  8. Paul Veyne remarque dans Sexe et pouvoir à Rome, Points histoire (2007), page 189 (ISBN 978-2757804209) : « Ainsi l'homophilie active est-elle partout présente dans les textes grecs et aussi romains. Catulle se vante de ses prouesses et Cicéron a chanté les baisers qu'il cueillait sur les lÚvres de son esclave-secrétaire. ».
  9. Voir L'Histoire Auguste, Vie d'Adrien, X : « On a beaucoup blùmé dans Adrien cette curiosité, mais surtout sa passion pour les jeunes gens et ses adultÚres avec des femmes mariées. ».
  10. S'il n'existe nul exemple d'homosexuel dans la littérature latine, il n'est toutefois pas possible de conclure que les homosexuels n'existent pas du temps de l'Antiquité romaine.
  11. Le roi, marié et pÚre de famille, a selon les termes de Pierre Chevallier, incontestablement des « tendances homosexuelles » (cf « Louis XIII », Larousse, édition 2005 numérisée (lire en ligne)) ; Fred Klein le place ainsi comme faisant partie des bisexuels célÚbres de l'histoire (cf (en) Fred Klein, The Bisexual Option, p. 136).
  12. Il semble pour autant difficile de garantir avec une assurance certaine de la réalité de ces accusations ; voir une entrevue à ce sujet avec l'historienne Evelyne Lever, dans « Marie-Antoinette aimait-elle (aussi) les femmes ? », de Nora Bouazzouni, FranceTVinfo.fr (lire en ligne).
  13. Il y a eu des frictions diplomatiques entre le prĂ©sident Hamid Karzai et les États-Unis, car peut-ĂȘtre deux de ses six frĂšres tremperaient dans ce type de relations. De mĂȘme, des Ă©ditorialistes amĂ©ricains se sont demandĂ© avec colĂšre si c'Ă©tait pour protĂ©ger des « dizaines de milliers de pĂ©dophiles » que des centaines de soldats de l'OTAN se battaient et mouraient (cf. (en) Joel Brinkley, « Afghanistan's dirty little secret », The San Francisco Chronicles, 29 aoĂ»t 2010 (lire en ligne). L'ONU a appelĂ© le gouvernement Ă  mettre fin Ă  ces pratiques (cf. (en) « 64th session of the United Nations General Assembly », ONU, 14 octobre 2009 (lire en ligne).
  14. Dans les années 1990 émerge une autre appellation, « Deux-esprits », mise en avant par certaines communautés amérindiennes.
  15. L'Ă©tude prend le soin de prĂ©ciser que les sujets d'Ă©tude sont originaires de trois grandes villes du SĂ©nĂ©gal et qu'il s'agit d'un Ă©chantillon non reprĂ©sentatif de toute la communautĂ© HSH sĂ©nĂ©galaise, notant toutefois « [C]’est le seul mode de recrutement possible pour une enquĂȘte menĂ©e auprĂšs d’une population trĂšs stigmatisĂ©e et pour laquelle aucune base de sondage n’existe. ».
  16. Bien que celle-ci s'en défende, voir notamment (en) « Fergie: labels and love », The Advocate, 10 novembre 2009.
  17. Notamment avec la chanson I Kissed a Girl (2008) qui l'a fait connaĂźtre au grand public.
  18. La proportion des jeunes ayant concrĂ©tisĂ© cette attirance par une relation sexuelle augmente elle aussi avec l'Ăąge : elle est de 6 % des garçons et 7 % des filles de 15-17 ans, et de 11 % des garçons et 10 % des filles de 18-24 ans (cf. « GĂ©nĂ©ration YouPorn : mythe ou rĂ©alitĂ© ? EnquĂȘte sur l’influence des nouvelles technologies sur les comportements sexuels des jeunes », enquĂȘte de l'IFOP publiĂ©e le 16 octobre 2013, p. 40 (lire en ligne)).
  19. Il ne faut cependant pas conclure que bisexualitĂ© est synonyme de dĂ©bauche ou de plus intense activitĂ© sexuelle que la normale ; dans son Rapport sur l'homophobie 2013, SOS homophobie note Ă  ce propos qu'« ĂȘtre bisexuel(le) recouvre une multitude de situations et ne veut pas dire que l’on a plusieurs relations sexuelles en mĂȘme temps, ni mĂȘme qu’on change rĂ©guliĂšrement de partenaire dans un souci systĂ©matique d’alterner les genres » (SOS homophobie, « Rapport sur l'homophobie 2013 », p. 41), ainsi que « un clichĂ© rĂ©pandu est la sur-sexualisation des bisexuel(le)s, qualifiĂ©(e)s pĂ©jorativement de « partouzeur-se-s », comme si la capacitĂ© d’éprouver dĂ©sir et plaisir avec les deux sexes ne pouvait s’expliquer que par un appĂ©tit sexuel dĂ©bridĂ©. » (Ibid., p. 43). .
  20. Il figure notamment dans le Dictionnaire de l'homophobie dirigé par Louis-Georges Tin (PUF, 2003).
  21. D'une maniÚre générale, la Gay & Lesbian Alliance Against Defamation déplore en 2012, à partir d'une étude du Journal of Bisexuality, que des clichés et stéréotypes biphobes sont toujours utilisés dans les médias lorsqu'ils représentent la bisexualité ou des personnes bisexuelles, les associant notamment avec de l'hypersexualité et de l'« indécision ». Voir (en) Alexandra Bolles, « Study Shows Stereotypes about Bisexuality are Harmful », 31 mai 2012, Gay & Lesbian Alliance Against Defamation (lire en ligne).
  22. Il apparaßt plus largement que tous les protagonistes soient bisexuels, chacun avec leurs préférences et leurs singularités ; cf (en) Neil Schaeffer, The Marquis de Sade: A Life, Harvard University Press (2000), 577 p., p. 456.
  23. Cf. « Meanwhile, Merritt supplies his own tremulous baritone for "Underwear, " an encomium to both the "pretty girls" and the "pretty boys" who don it. », Matthew D. Johnson, « Merritt, Stephin (b. 1966?) and the Magnetic Fields », p. 2, 2005, glbtq.com:An Encyclopaedia of Gay, Lesbian, Bisexual, Transgender and Queer Culture, (lire en ligne). Les paroles commencent par « A pretty girl in her underwear / If there's anything better in this world who cares » (« Une jolie fille en sous-vĂȘtements / S'il y a quelque chose de mieux au monde, qui s'en soucie ? ») et se poursuivent par « A pretty boy in his underwear / If there's a better reason to jump for joy who cares » (« Un joli garçon en sous-vĂȘtements / S'il y a une meilleure raison de bondir vers le plaisir, qui s'en soucie ? »).
  24. Ysa Ferrer a Ă©crit la chanson en hommage Ă  la communautĂ© bisexuelle, comme elle l'explique dans une interview sur le site CitĂ© Gay le 1er fĂ©vrier 2008 : « Tof : Pourquoi as-tu voulu parler de ce sujet lĂ  en particulier ? – Ysa Ferrer : Je trouve qu'en France on est vraiment trĂšs loin du top de la tolĂ©rance et quand je vais sur des sites oĂč on parle de Bi, je m'aperçois que c'est un sujet encore totalement tabou chez les gens. À mon sens c'est vraiment LA communautĂ© qui est le moins reprĂ©sentĂ©e. Et j'ai Ă©tĂ© particuliĂšrement sensible au fait qu'ils parlent d'eux-mĂȘmes comme Ă©tant « le peuple de l'Invisible » . Je trouve ça monstrueux de vivre comme ça ! Apparemment aujourd'hui on peut ĂȘtre homo ou lesbienne, mais les bi n'ont pas le droit d'exister. ».

Références

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  3. p. 11.
  4. p. 13.
  5. p. 12.
  6. p. 4 : « It is extremely difficult to determine the number of bisexual people due to both a lack of research and different definitions of bisexuality. If the term is defined narrowly, for example as the number of people who self-identify as ‘bisexual’ on a national UK survey, then the proportions tend to be small. If the term is defined as broadly as all people who have ever had an attraction to more than one gender then it may include a significant minority, or even a majority, of the population. »
  7. p. 14.

Autres références

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] "Why doesn't everyone have erotic relationships with both men and women?", then the answers are not far to seek: repression, religion, repugnance, denial, laziness, shyness, lack of opportunity, premature specialization, a failure of imagination [
] ».
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  99. Étudiant sur la construction sociale de la virilitĂ©, Élisabeth Badinter Ă©crit : « Des Grecs aux Sambia, des Romains aux Scandinaves du Moyen Âge, des samouraĂŻs japonais aux Baruyas, tous ont pensĂ© que la vraie virilitĂ© passait par une relation Ă©troite entre deux hommes. » (XY, De l'identitĂ© masculine (1992), Le Livre de poche, p. 123) ; ajoutant que « l'homosexualitĂ© est une pratique transitoire mais nĂ©cessaire pour gagner sa masculinitĂ© hĂ©tĂ©rosexuelle » (ibidem, p. 130).
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  101. Élisabeth Badinter constate dans XY, De l'identitĂ© masculine (1992) que de trĂšs nombreuses civilisations passĂ©es ont pratiquĂ© une certaine « pĂ©dagogie » homosexuelle, et que les rapports amoureux et sexuels entre les hommes Ă©taient nĂ©cessaires Ă  la constitution de la pleine virilitĂ©. Elle insiste toutefois sur le fait que ce comportement sexuel homosexuel est une Ă©tape vers un comportement hĂ©tĂ©rosexuel nĂ©cessaire Ă  assurer la reproduction sexuĂ©e, afin de permettre la survie de la sociĂ©tĂ© en question (p. 130-131).
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] ».
  130. Cf Ă  ce sujet l'apprĂ©ciation du mĂ©diĂ©viste Jean Flori : « PlutĂŽt qu'un homosexuel absolu et excessif, Richard semble bien avoir Ă©tĂ© avant tout, comme son pĂšre Henri II et comme ses aĂŻeux, un jouisseur. Moins pĂ©dophile, sans doute, que son pĂšre mais probablement bisexuel. Pour faire court, un paillard polyvalent », dans « Richard CƓur de Lion. Le roi-chevalier », critique de la biographie de Jean Flori publiĂ© par le magazine L'Histoire le premier fĂ©vrier 2000, no 240 Ă  la page 87 (lire en ligne).
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  140. « D’autres tĂ©moignages de l’époque convergent Ă  propos de la bisexualitĂ© de « l’illustre dĂ©bauchĂ© » (comme le baptise Jean Chapelain), lui attribuant, Ă  la fois, une connaissance hors du commun en matiĂšre de plaisirs sodomites et de nombreuses conquĂȘtes fĂ©minines », Filippo D’Angelo, Libertinage, hermaphrodisme et masculinitĂ©, Groupe de Recherches Interdisciplinaires sur l'Histoire du LittĂ©raire (lire en ligne).
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  304. Dans une de ses lettres au vicomte de Valmont, la marquise Ă©crit au sujet de l'adolescente : « Je lui conseillai de se coucher, ce qu'elle accepta ; je lui servis de Femme de chambre, elle n'avait point fait de toilette, et bientĂŽt ses cheveux Ă©pars tombĂšrent sur ses Ă©paules et sur sa gorge entiĂšrement dĂ©couvertes ; je l'embrassai ; elle se laissa aller dans mes bras [
] Dieu ! Qu'elle Ă©tait belle ! Si Magdeleine Ă©tait ainsi, elle dut ĂȘtre bien plus dangereuse pĂ©nitente que pĂ©cheresse. » (lettre 63).
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  313. Cf. « Chansons de bi ! », Yagg, 2 septembre 2012 (lire en ligne). La chanson exprime les doutes d'une femme dont le mari, aprÚs des années de mariage heureux, semble soudain troublé par un homme : « Quand nous faisons l'amour / Dis-moi à qui tu penses / Il y a sous nos caresses / Des points de suspension / Dieu que tu as changé / Depuis qu'il vient chez nous / Toi l'invulnérable et tendre / Qui ne jurais que par moi / Parfois j'ai peur de comprendre / Ce qui se révÚle en toi ».
  314. Dans une entrevue accordĂ©e Ă  L'HumanitĂ©, Nicola Sirkis indique que « [Indochine] a Ă©crit une chanson il y a trente ans, TroisiĂšme Sexe, qui parlait dĂ©jĂ  de l’intolĂ©rance vestimentaire, de la diffĂ©rence et de la bisexualitĂ© ». Cf. Victor Hache, « Indochine sur la route avec le Black City Tour 2 avant l’apothĂ©ose au Stade de France en juin », L'HumanitĂ©, 12 octobre 2013 (lire en ligne) Le thĂšme principal de la chanson est l'ambiguĂŻtĂ© de genre, puisqu'il est question de garçons habillĂ©s de façon fĂ©minine et vice-versa, mais le refrain inclut la phrase : « et j'aime cette fille aux cheveux longs / et ce garçon qui pourrait dire non. ».
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  316. Katy Perry a indiqué que cette chanson lui avait été inspirée par ses attirances pour des femmes, mais elle ne se définit pas comme lesbienne ; cf. (en) « Katy Perry: The New Gay Interview », The New Gay, 10 juin 2008 (lire en ligne).
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Annexes

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Articles connexes

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