Psychologie
La psychologie (du grec ÏÏ ÏÎź / psukháșż, « Ăąme », et λÏÎłÎżÏ / lĂłgos, « parole, discours »), est une discipline scientifique qui s'intĂ©resse Ă l'Ă©tude du corpus des connaissances sur les faits psychiques, les comportements et les processus mentaux. La psychologie est la connaissance empirique ou intuitive des sentiments, des idĂ©es, des comportements d'une personne et des maniĂšres de penser, de sentir, d'agir qui caractĂ©risent un individu ou un groupe[1]. Il est commun de dĂ©finir aussi la psychologie comme l'Ă©tude scientifique des comportements[2].
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Comportement humain état mental (en) psychisme psyché |
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La psychologie est une discipline qui appartient à la catégorie des sciences humaines. Divisée en de nombreuses branches d'étude dont les théories et les méthodes de recherche varient grandement, la psychologie a des applications nombreuses.
Ătymologie
Ătymologiquement, le mot psychologie dĂ©rive du latin psychologia, terme lui-mĂȘme formĂ© Ă partir du grec ancien ÏÏ ÏÎź (psukhÄ : le souffle, l'esprit, l'Ăąme) et -λογία (-logia, la science, l'Ă©tude, la recherche)[1] par le savant humaniste croate Marko MaruliÄ (1450-1524) et qui semble apparaĂźtre pour la premiĂšre fois dans le titre de Psichiologia de ratione animae humanae (fin XVe - dĂ©but XVIe) dont la trace a Ă©tĂ© perdue[3] - [4] si bien que la premiĂšre occurrence attestĂ©e se trouve chez le juriste et philosophe allemand Johann Thomas Freig (lat. Freigius, 1543-1583). Toutefois, le mot est vĂ©ritablement popularisĂ© par la RĂ©forme protestante en Allemagne, Ă travers les Ă©crits de Philippe Melanchthon qui reprend le terme dans ses Ă©tudes bibliques et ses commentaires de la philosophie aristotĂ©licienne. Le terme se retrouve ainsi jusque dans les discours Ă©sotĂ©riques, tel la Psichologie ou traictĂ© de l'apparition des esprits de NoĂ«l Taillepied (1588)[5].
La lettre grecque Κ (psi) est souvent utilisée comme une abréviation du terme psychologie.
Objet d'Ă©tude et objectifs
L'objet d'Ă©tude de la psychologie est un dĂ©bat non clos depuis des siĂšcles. En effet, selon les auteurs, la psychologie s'est trouvĂ©e centrĂ©e sur des objets trĂšs diffĂ©rents, sans qu'il soit encore possible aujourd'hui de dĂ©cider quelle est la thĂ©orie unitaire qui serait largement acceptĂ©e[1]. Ainsi les approches sur cette question extrĂȘmement complexe se partagent-elles traditionnellement entre celles qui considĂšrent que l'objet de la psychologie est le comportement et sa genĂšse, les processus de la pensĂ©e, les Ă©motions et le caractĂšre ou encore la personnalitĂ© et les relations humaines, etc.[1].
De plus, les comportements humains sont influencés par des facteurs nombreux et également divers : les stimuli de l'instant présent, l'héritage génétique, le systÚme physiologique, le systÚme cognitif (les connaissances, pensées, souvenirs, etc.), l'environnement social, l'environnement culturel, les expériences passées, les caractéristiques personnelles comme le niveau d'intelligence, la personnalité ou la présence d'une maladie mentale[2].
Les différentes branches de la psychologie se distinguent soit par la méthode utilisée (clinique ou expérimentale), soit par l'activité humaine considérée (travail, mémoire, perception, apprentissage, soin, comportement en groupe, etc.), soit par grand domaine d'investigation (psychologie cognitive, psychopathologie, psychologie sociale, psychologie de l'enfant et du développement, psychophysiologie, psychologie animale)[1].
Histoire de la psychologie
Le développement de la psychologie a été influencé par des courants de pensée ou « écoles ». Dans l'ordre chronologique de leur apparition, les principales approches de la psychologie sont l'approche physiologique issue de la médecine et biologie (Gustav Fechner qui tente de comprendre les liens entre sensation et stimuli, Wilhelm Wundt qui fonde le premier laboratoire de psychologie expérimentale au monde, en Allemagne au XIXe siÚcle) ; l'approche psychodynamique (issue de la psychanalyse avec Sigmund Freud dans les années 1890), le béhaviorisme ou comportementalisme (de John Watson, Ivan Pavlov et Burrhus Frederic Skinner aprÚs 1912), l'humanisme (avec Carl Rogers et Abraham Maslow dans les années 1950) et la psychologie cognitive (avec Donald Broadbent, Ulric Neisser, dans les années 1950)[6]. Ces approches sont présentées en détail dans les sections suivantes.
Sous-disciplines académiques et objets d'étude
Le tableau ci-dessous illustre la diversitĂ© de la psychologie, avec diffĂ©rentes approches thĂ©oriques (premiĂšre colonne), des objets d'investigation variĂ©s (deuxiĂšme colonne), des mĂ©thodes de recherches dĂ©pendant des questions posĂ©es et des thĂ©ories sous-jacentes (troisiĂšme colonne). Les applications de la psychologie sont Ă©galement nombreuses (quatriĂšme colonne). La derniĂšre colonne du tableau prĂ©sente des disciplines oĂč la psychologie a historiquement joint une autre discipline acadĂ©mique pour former une discipline indĂ©pendante. Ces listes ne correspondent pas Ă une nomenclature publiĂ©e et correspondent aux thĂšmes retrouvĂ©s dans divers manuels de rĂ©fĂ©rence.
Courants théoriques
Courant psychodynamique
L'approche psychodynamique de la psychologie est inspirée par la psychanalyse, discipline qui a été développée par Sigmund Freud à Vienne vers les années 1900[6]. Son approche se basait sur la méthode de traitement des troubles psychiques qu'il nomma la psychanalyse. Cette méthode d'étude du fonctionnement psychique l'amena à développer des théories sur le développement de l'enfant et de la personnalité qui vont fortement influencer la psychologie, en particulier dans le domaine de la psychopathologie[6]. Plusieurs psychanalystes ont influencé par leurs découvertes les théories de la psychologie de l'enfant. Les observations cliniques de Melanie Klein et Donald Winnicott ont mené à une meilleure compréhension de l'attachement. Les observations de Erik Erikson ont mené à une meilleure compréhension de l'influence sociale et culturelle sur le développement de la personnalité et la recherche de l'identité du moi, ainsi qu'à la mise en évidence de stades de développement psychosocial[7]. Les méthodes psychanalytiques ou psychodynamiques sont fondées sur l'observation clinique[7].
Courant béhavioriste
L'approche bĂ©havioriste fut dĂ©veloppĂ©e par John B. Watson en 1912 aux Ătats-Unis, se basant sur les recherches animales du physiologiste Ivan Pavlov, considĂ©rĂ© comme le dĂ©couvreur du conditionnement classique[6] - [8]. Dans les annĂ©es 1930, Burrhus F. Skinner dĂ©veloppe la thĂ©orie du conditionnement instrumental ou opĂ©rant dont le postulat est que d'un renforcement augmente la frĂ©quence d'apparition d'un comportement. Albert Bandura Ă©tend la thĂ©orie bĂ©havioriste en prenant en compte la dimension sociale de l'apprentissage (les modĂšles et imitations) et la libertĂ© du sujet (choix de ses modĂšles), dans sa thĂ©orie de l'apprentissage social qui devient la thĂ©orie sociale cognitive en 1989[8].
L'approche béhavioriste dresse les bases d'une psychologie qui veut développer des modÚles scientifiques et a ses origines dans la recherche animale. L'objet d'étude du béhaviorisme est l'apprentissage dans des conditions contrÎlées et les méthodes se basent sur des expériences menées en laboratoire de recherche[6].
Courant humaniste
Le courant humaniste en psychologie a commencĂ© Ă Ă©merger aux Ătats-Unis dans les annĂ©es 1950. Ses origines viennent de la philosophie[6]. Le courant est fondĂ© dans les annĂ©es 1960 par Carl Rogers en rĂ©action aux courants psychanalytiques et bĂ©havioristes. Le courant humaniste considĂšre l'humain comme fondamentalement bon, libre et capable d'orienter ses choix pour se rĂ©aliser pleinement (« actualisation de soi ») s'il est authentique et congruent avec lui-mĂȘme[9]. Abraham H. Maslow est un autre chef de file du courant humaniste et est connu pour avoir Ă©laborĂ© dans les annĂ©es 1970, la thĂ©orie de la hiĂ©rarchie des besoins dĂ©crivant les conditions nĂ©cessaires et prĂ©alables Ă l'actualisation de soi[9].
Tout comme l'approche psychodynamique, son principal objet est la thérapie dont l'objectif est d'amener les individus à réaliser leur plein potentiel[6]. Les méthodes de la psychologie humaniste sont cliniques et non directives[9].
Courant cognitiviste
Le courant cognitiviste s'est dĂ©veloppĂ© Ă partir des annĂ©es 1950 aux Ătats-Unis et au Royaume-Uni[6]. Le courant cognitiviste privilĂ©gie l'observation scientifique des comportements. Il est distinct du bĂ©haviorisme en ce qu'il tente de modĂ©liser les processus mentaux comme l'attention, la perception, le raisonnement, la rĂ©solution de problĂšme, ou encore la mĂ©moire[6].
Le projet cognitiviste a Ă©tĂ© de chercher Ă caractĂ©riser l'organisation des processus internes impliquĂ©s dans le comportement. Ces Ă©volutions thĂ©oriques vont de pair avec des dĂ©veloppements expĂ©rimentaux qui forment les bases mĂ©thodologiques de l'expĂ©rimentation en psychologie cognitive. Parmi ceux-ci, le renouvellement de l'approche dite de la chronomĂ©trie mentale proposĂ©e un siĂšcle plus tĂŽt par le physiologiste nĂ©erlandais Franciscus Cornelis Donders selon laquelle la mesure du temps de rĂ©action fournit un indice du temps de traitement d'un stimulus donnĂ©[10]. La mĂ©taphore qui prĂ©vaut en psychologie cognitive est celle du cerveau-ordinateur, Ă une Ă©poque oĂč les progrĂšs en informatique sont pleins de promesses pour l'intelligence artificielle. Selon ce paradigme cognitiviste, l'information ferait l'objet d'un traitement sĂ©quentiel ou parallĂšle en circulant entre les diffĂ©rents processus qui constituent l'esprit humain selon la structure schĂ©matique : entrĂ©es (perception) Traitement cognitif Sorties (comportements)[11]. D'autres approches conceptuelles se sont dĂ©veloppĂ©es, par exemple, basĂ©e sur les modĂšles de rĂ©seaux de neurones oĂč l'information est distribuĂ©e au sein d'un rĂ©seau constituĂ© d'un grand nombre d'unitĂ© (cf. connexionnisme)[12] - [13].
Les recherches et méthodes de la psychologie cognitive, d'abord limitées aux expériences de laboratoire, ont été utilisées ensuite par d'autres disciplines, la psychologie du développement, du fonctionnement social, et le traitement de troubles mentaux[14]. Dans le domaine du développement de la cognition, Jean Piaget propose une théorie constructiviste du développement de l'intelligence et Lev Semenovitch Vygotsky propose une théorie socioculturelle du développement cognitif[15].
MĂ©thodes de recherche
Les thÚmes de recherche en psychologie sont innombrables du fait du grand nombre d'objets d'étude de la psychologie et de ses applications trÚs variées. Les méthodes de recherche sont par conséquent nombreuses. Certaines méthodes se basent sur des observations, dans des conditions plus ou moins contrÎlées. D'autres méthodes se basent sur des méthodes expérimentales aux protocoles stricts et donnant lieu à des analyses statistiques élaborées. Toutes ces méthodes ont des avantages et des limites : certaines sont utiles pour observer la complexité d'un sujet, d'autres pour invalider des hypothÚses et modÚles théoriques. Les méthodes sont choisies en fonction des objectifs du chercheur.
Méthodes expérimentales
Les méthodes de recherche les plus souvent utilisées par les psychologues sont les méthodes expérimentales. Les méthodes expérimentales consistent à situer une question dans une théorie qui fournit un modÚle explicatif du phénomÚne (par exemple, un comportement donné). Des hypothÚses expérimentales sont formulées, qui sont des prédictions des comportements basés sur la théorie. Une expérience est menée et les données analysées. Beaucoup de recherches prennent place dans des laboratoires, souvent situés dans les universités, mais d'autres méthodes d'investigation sont également fréquentes[16].
Expérience en laboratoire
L'avantage de la mĂ©thode expĂ©rimentale dans un laboratoire de psychologie est d'explorer des liens de cause Ă effet. En isolant des variables indĂ©pendantes et mesurant une ou des variables dĂ©pendantes, une relation statistique est Ă©tablie (ou invalidĂ©e). Si un effet y (variable dĂ©pendante) suit une condition x (variable indĂ©pendante), alors il est probable que la cause x ait provoquĂ© l'effet y. Ce raisonnement n'est pas infaillible et peut conduire Ă des conclusions erronĂ©es si d'autres variables sont ignorĂ©es ou inconnues. Un avantage de la mĂ©thode expĂ©rimentale cependant est sa rĂ©plicabilitĂ©. Si l'expĂ©rience est bien contrĂŽlĂ©e, d'autres chercheurs qui mĂšnent la mĂȘme expĂ©rience trouvent les mĂȘmes rĂ©sultats et peuvent faire progresser la thĂ©orie en pratiquant un changement contrĂŽlĂ© des variables lors d'une rĂ©plication[16] - [17].
Expérience sur le terrain
L'expĂ©rience sur le terrain est une expĂ©rience dont les variables sont contrĂŽlĂ©es par l'expĂ©rimentateur, mais qui prend place dans un milieu naturel afin d'en comprendre les effets. L'avantage des expĂ©riences de terrain est de recueillir cependant des comportements plus proches des rĂ©actions naturelles des participants. Sa validitĂ© externe est donc plus forte qu'une expĂ©rience de laboratoire. Cependant, sa validitĂ© interne risque d'ĂȘtre plus faible : l'expĂ©rience est moins bien contrĂŽlĂ©e que l'expĂ©rience en laboratoire et les comportements observĂ©s ne peuvent pas ĂȘtre rĂ©pĂ©tĂ©s de nombreuses fois pour chaque participant, comme c'est le cas en laboratoire[16] - [17].
Méthodes quasi-expérimentales
Certaines questions ne peuvent pas ĂȘtre traitĂ©es en assignant les participants Ă des groupes de maniĂšre alĂ©atoire, pour des raisons naturelles ou Ă©thiques. Par exemple, Ă©tudier la diffĂ©rence entre hommes et femmes, ou entre des enfants de parents divorcĂ©s ou non. Lorsque les variables indĂ©pendantes ne peuvent pas ĂȘtre prises au hasard et que les groupes expĂ©rimentaux sont dĂ©finis par les conditions naturelles, le plan d'expĂ©rience est dit quasi-expĂ©rimental[18].
Parmi les méthodes quasi-expérimentales, l'expérience naturelle consiste à utiliser un événement naturel pour étudier un phénomÚne. Par exemple, l'introduction d'une nouvelle technologie dans une communauté, ou l'observation des conséquences d'une catastrophe naturelle affectant une région[18] - [17].
L'avantage des plans quasi-expérimentaux est qu'ils permettent d'observer des conditions qu'il ne serait pas éthique de créer artificiellement, comme l'introduction d'un stress élevé et son impact sur la santé, ou l'effet de l'introduction d'une nouvelle technologie sur l'agressivité des enfants. L'inconvénient est que ces conditions naturelles, ou variables indépendantes, sont peu contrÎlables[18] - [17].
Ătude des corrĂ©lations
L'Ă©tude des corrĂ©lations vise Ă mesurer les relations entre des variables. Elle permet de mettre en Ă©vidence qu'une variable est liĂ©e Ă une autre sur un plan statistique, et de mesurer l'ampleur de la relation. Elle est utile pour Ă©tudier certaines variables qui ne sont pas manipulables expĂ©rimentalement comme le nombre de cigarettes fumĂ©es et les consĂ©quences sur certains marqueurs de santĂ©. Elle est utile pour collecter un grand nombre de variables, par exemple, en collectant des questionnaires sur de grands Ă©chantillons. Elle est utile lorsque des variables ne sont pas liĂ©es a priori et que l'interprĂ©tation des causes Ă effet ne sera pas ambiguĂ« (par exemple, dans l'Ă©tude du rapport entre vieillissement et niveau de bien-ĂȘtre psychologique, s'il est possible que le vieillissement puisse affecter le bien-ĂȘtre, il est impossible que le bien-ĂȘtre puisse provoquer le vieillissement)[19].
Si l'étude des corrélations ne permet pas de déterminer l'existence de liens de causalité, elle est en revanche, comme les autres méthodes non expérimentales, une bonne source d'hypothÚses de recherche. Elle est à la base de techniques statistiques plus sophistiquées permettant de mieux explorer les liens entre les variables en dégageant notamment des facteurs de maniÚre exploratoire (analyse factorielle), ou en employant des méthodes de régression. Les modÚles statistiques reposant sur des corrélations peuvent aussi conduire à combiner les analyses factorielles exploratoires à la méthode de recherche de relations causales (analyses causales ou Path analysis ) dans les modÚles d'équations structurelles.
Observation de terrain, ou naturaliste
L'observation naturaliste (en) est l'observation d'individus dans leur environnement familier sans intrusion, sans intervention ni changement des variables dans ce milieu naturel. La mĂ©thode a Ă©tĂ© mise en valeur par l'Ă©thologue Konrad Lorenz qui a Ă©tudiĂ© ainsi les comportements sociaux des animaux. Chez les humains, l'environnement naturel peut ĂȘtre l'Ă©cole, le lieu de travail, ou le domicile, par exemple[20].
La mĂ©thode prĂ©sente de nombreuses difficultĂ©s techniques. Les observateurs doivent ĂȘtre les plus discrets possibles pour ne pas interfĂ©rer avec les comportements naturels. Or les personnes qui se savent observĂ©es ont des comportements lĂ©gĂšrement diffĂ©rents (par exemple des mĂšres se sachant observĂ©es dans leurs interactions avec leurs jeunes enfants se montrent plus patientes)[20]. La prĂ©sence d'un expĂ©rimentateur intrusif peut provoquer de nombreux biais expĂ©rimentaux, comme un effet de dĂ©sirabilitĂ© sociale, l'effet Hawthorn, at autres biais expĂ©rimentaux (cf. liste de biais cognitifs).
Les données collectées sont nombreuses et complexes. Plusieurs méthodes d'échantillonnage permettent de limiter la collecte d'information pour simplifier la tùche de traitement de données. La méthode d'échantillonnage d'événements (en) vise à ne sélectionner que les actions ou événements qui intéressent les expérimentateurs. La méthode d'échantillonnage temporel consiste à ne traiter que les données de moments prédéterminés (par exemple, si la durée de l'observation porte sur plusieurs jours, ne traiter que les dix premiÚres minutes de chaque heure). La méthode des points consiste à n'observer qu'un participant à la fois (par exemple dans une cour de récréation), puis de passer aux autres participants à tour de rÎle d'aprÚs un plan déterminé à l'avance[20].
Un autre problĂšme est celui des interprĂ©tations des comportements et de leur codage. Par exemple, les intentions ou Ă©motions des participants comme la peur, ou l'agressivitĂ©, sont d'interprĂ©tation difficile. Pour Ă©viter les interprĂ©tations subjectives, les observations de terrain dĂ©crivent uniquement les comportements, ou reposent sur des techniques oĂč plusieurs codeurs indĂ©pendants analysent les comportements et leurs interprĂ©tations font l'objet de discussions en cas de dĂ©saccord[20].
Les observations naturalistes, ou de terrain, permettent une bonne description des comportements naturels et complexes ; elle est utile dans les situations oĂč les expĂ©rimentations de laboratoire ne sont pas possibles. Leur richesse permet d'Ă©mettre de nouvelles hypothĂšses de recherche[20].
Observation en laboratoire
L'observation en laboratoire est l'observation de personnes dans un milieu artificiel mais sans intervention de l'expérimentateur qui influenceraient les comportements. Elle est une bonne source d'hypothÚses de recherche.
Ătude de cas
L'Ă©tude de cas consiste Ă Ă©tudier un seul individu sur une longue durĂ©e. Elle est utilisĂ©e parfois quand un patient prĂ©sente une maladie rare pour laquelle un Ă©chantillon de plusieurs patients ne pourrait pas ĂȘtre observĂ©. C'est souvent le cas en neuropsychologie, quand un patient prĂ©sente des lĂ©sions cĂ©rĂ©brales uniques, Ă la suite d'un accident, ou de symptĂŽmes rares[21]. Des exemples cĂ©lĂšbres sont celui de PhinĂ©as Gage[22] ou encore des patients dĂ©crits par le neurologue Oliver Sacks dans ses livres de vulgarisation[23].
L'étude de cas est souvent employée en psychologie clinique et dans les disciplines cliniques qui en sont proches (psychanalyse, psychiatrie)[24]. Sigmund Freud s'est appuyé sur des études de cas pour développer ses théories psychanalytiques, par exemple, il décrit les détails de la cure psychanalytique d'un patient surnommé l'« homme aux loups »[25]. L'étude de cas est également préconisée par les expérimentalistes. Skinner écrit ainsi en 1966, que mieux vaut observer un seul rat pendant des milliers d'heures, que des milliers de rats pendant une heure chacun[21]. Combinant les deux avantages des études de cas, les études expérimentales menées individuellement sur des patients cérébro-lésés ont mené à des découvertes importantes sur le fonctionnement de processus cognitifs comme la mémoire. Ainsi, le patient HM a participé à des études expérimentales durant des décennies[26].
Entretien
L'entretien ou entrevue avec un participant est une situation dans laquelle le psychologue, expérimentateur ou clinicien, pose des questions directement au participant ou au patient. Les entretiens ont plusieurs désavantages : contrairement aux questionnaires anonymes, ils génÚrent un effet de désirabilité qui amÚne les participants à modifier leurs réponses ; ils n'informent que sur les processus conscients des participants, or les motivations d'un comportement sont en large partie inconscientes ; enfin, la qualité de l'interview dépend des qualités de l'expérimentateur[27].
Les entretiens varient énormément en termes de structure, c'est pourquoi ils sont parfois catégorisés en fonction de leur niveau de structure. Tandis que les entretiens peu structurés sont plus riches dans la diversité des réponses et moins artificiels, les entretiens plus structurés permettent de rendre les réponses des participants plus comparables. L'effet expérimentateur est minimisé, renforçant ainsi la fiabilité de la méthode. Les méthodes plus structurées sont plus faciles à répliquer et à dépouiller[27].
L'entretien non directif laisse le participant ou patient parler de ce qu'il désire avec trÚs peu de directives de la part du psychologue qui pratique l'écoute active. Ce type d'entretien est utilisé en psychothérapie[27] mais aussi dans certains entretiens dits ethnographiques, davantage utilisés en sociologie ou anthropologie.
L'entretien semi-structuré laisse le participant parler de certains sujets en détail, et le psychologue a un rÎle d'écoute active comme dans l'entretien non directif. Cependant, le psychologue pose des questions générales pour orienter les thÚmes de discussion. Cette technique a été utilisée avec succÚs par le sociologue Elton Mayo dans l'étude des travailleurs de la Hawthorne Works dans les années 1930[27].
Dans l'entretien structuré, ou guidé, l'interviewer pose des questions dans un ordre fixe en suivant un ordre préétabli. Les questions restent ouvertes pour laisser aux participants l'opportunité de répondre de la maniÚre la plus diverse possible (par exemple « comment imaginez-vous⊠? »)[27].
Dans l'interview suivant une mĂ©thode clinique, les questions sont les mĂȘmes pour tous les participants, mais le psychologue adapte certaines de ses questions en fonction des rĂ©ponses des participants, pour tenter de mieux comprendre leur point de vue ou leur raisonnement. Cette mĂ©thode Ă©tait privilĂ©giĂ©e par le psychologue Jean Piaget dans ses recherches sur la pensĂ©e chez l'enfant. Il a Ă©tĂ© critiquĂ© en raison de la complexitĂ© des questions parfois posĂ©es aux enfants en utilisant cette mĂ©thode[27].
L'entretien totalement directif et structuré ne laisse pas de place à l'improvisation et peu de place aux questions ouvertes. Les questions sont données dans un ordre précis et immuable. Les participants doivent y répondre par un choix multiple (« oui », « non », « je ne sais pas », ou par des réponses graduées, de type échelle de Likert)[27].
Ăthique de la recherche en psychologie
La recherche en psychologie doit adhĂ©rer aux rĂšgles gĂ©nĂ©rales d'Ă©thique de la recherche, aux rĂšgles d'Ă©thique de l'expĂ©rimentation sur sujets humains, et l'Ă©thique de la psychologie. Les rĂšgles Ă©thiques du consentement libre et Ă©clairĂ©, le respect de l'estime de soi, le droit Ă la confidentialitĂ© et Ă la vie privĂ©e, entre autres, doivent ĂȘtre respectĂ©es. Lorsque la recherche porte sur des personnes vulnĂ©rables, les rĂšgles Ă©thiques sont plus strictes. Les chercheurs menant des recherches sur les humains doivent adhĂ©rer aux dĂ©clarations internationales telles que la DĂ©claration de GenĂšve et la dĂ©claration d'Helsinki (dĂ©finissant des rĂšgles Ă©thiques internationales pour toute recherche impliquant un humain)[28]. L'American Psychological Association publie des rĂšgles Ă©thiques de conduite pour mener des recherches en psychologie[29].
Diversité des thÚmes et applications de la psychologie
Au niveau de la recherche scientifique en France, la psychologie est classée dans le groupe des SHS4 de la nouvelle nomenclature (2010) de la stratégie nationale pour la recherche et l'innovation (SNRI) des Sciences de l'Homme et de la Société (SHS)[30].
Psychologie sociale
La psychologie sociale étudie comment les humains sont liés les uns aux autres et à la société dans laquelle ils vivent. L'humain est un animal social. Qu'il soit seul ou en groupe, son comportement et ses pensées sont fortement influencées par les connaissances transmises par la société et par ses interactions dans cette société[2].
Psychologie comparée
La psychologie comparée étudie les espÚces non humaines, leurs comportements et leurs particularités biologiques. Elle cherche à comprendre l'humain de maniÚre indirecte en le comparant aux autres espÚces animales. Elle permet aussi de mener des expériences qui ne seraient pas possibles sur l'humain pour des raisons éthiques[2].
Biopsychologie et neurosciences
La biopsychologie étudie le comportement humain dans une perspective biologique. Elle s'intéresse aux processus biologiques dans le corps et en particulier dans le cerveau, et leur rapport avec les comportements et pensées. La biopsychologie a pris une importance majeure durant le XXe siÚcle avec le développement important de la médecine scientifique, de la génétique, des neurosciences, et des méthodes d'imagerie cérébrale[2].
Psychologie clinique et psychopathologie
La psychologie clinique désigne à la fois l'utilisation de la méthode clinique, et l'application de la psychologie dans le domaine de la psychopathologie de l'adulte et de l'enfant. La méthode clinique repose sur des entretiens et sur des analyses de cas individuels. Le psychologue clinicien a pour objectif l'évaluation, l'orientation, le soutien ou la psychothérapie. La psychologie clinique utilise aussi les méthodes qui sont créées par la psychométrie : les tests psychologiques[31].
La psychologie clinique est diversifiée depuis ses débuts qui remontent aux travaux fondateurs de Lightner Witmer (en), Pierre Janet et Sigmund Freud[31], ce dernier avec son travail avec Ida Bauer notamment[32]. Elle est restée diversifiée dans ses techniques et théories, intégrant les apports théoriques et les différentes formes de psychothérapies développés tout au long du XXe siÚcle: thérapie systémique familiale, gestalt-thérapie, du psychodrame, psychothérapie humaniste, etc.
Psychologie cognitive
La psychologie cognitive cherche Ă modĂ©liser les processus internes impliquĂ©s dans la perception, l'attention, la mĂ©moire, la pensĂ©e, le raisonnement, le langage. Au fur et Ă mesure de son histoire, la psychologie cognitive a progressivement influencĂ© d'autres disciplines qui ont adoptĂ© certaines approches expĂ©rimentales pour comprendre le dĂ©veloppement, le fonctionnement social, et mĂȘme le traitement des psychopathologies[2]. Elizabeth Loftus mĂšne d'abondantes recherches sur la mallĂ©abilitĂ© des souvenirs[33]. Elle est surtout connue pour son travail pionnier sur l'effet de dĂ©sinformation sur les souvenirs et les tĂ©moignages[33]. Mary Whiton Calkins, premiĂšre femme prĂ©sidente de l'Association amĂ©ricaine de psychologie et de l'American Philosophical Association, s'intĂ©resse Ă la mĂ©moire et, plus tard, au concept du self[34]. Elizabeth Loftus mĂšne d'abondantes recherches sur la mallĂ©abilitĂ© des souvenirs[33]. Elle est surtout connue pour son travail pionnier sur l'effet de dĂ©sinformation sur les souvenirs et les tĂ©moignages[33].
Psychologie développementale
La psychologie du développement, ou développementale, s'intéresse aux changements qui se produisent au cours d'une vie humaine. Historiquement, la discipline s'est surtout intéressée à la relation entre le développement de l'enfant et son impact sur l'adulte[2]. Frances Tustin, par exemple, se concentre sur l'étude de l'autisme chez les enfants et sur son évolution à l'ùge adulte[35]. Elle a mis en évidence la grande importance de la période enfantine, socialement, émotionnellement et intellectuellement, sur l'adulte. Eleanor Maccoby est spécialisée dans le domaine de la différences des sexes et du genre, les relations parent-enfant, la psychologie de l'enfant et le développement social du point de vue de l'enfant[36]. Eleanor Gibson s'intéresse à l'apprentissage de la lecture, et la perception de l'apprentissage chez les nourrissons et les tout-petits[37]. Mary Ainsworth joue un rÎle important dans la théorie de l'attachement. Grùce à son expérience, la strange situation (« situation étrange »), elle met en évidence différents types d'attachements[38]. La discipline s'intéresse aussi au développement durant la vie adulte et au vieillissement[2].
Ătudes, diplĂŽmes et formation continue en psychologie
Dans le monde, la psychologie s'étudie principalement dans les universités, et plus rarement en école privée[39] - [40].
En France, les Ă©tudes de psychologie peuvent mener Ă une carriĂšre de psychologue praticien, Ă la suite de l'obtention d'un DiplĂŽme d'Ătudes SupĂ©rieures SpĂ©cialisĂ©es (DESS) en psychologie[39]. Les Ă©tudes en psychologie peuvent mener Ă une carriĂšre dans la recherche par la voie du DiplĂŽme d'Ătudes Approfondies (DEA) et la prĂ©paration d'une thĂšse de Doctorat durant trois annĂ©es aprĂšs obtention du DEA, soit un total de huit annĂ©es d'Ă©tudes aprĂšs le baccalaurĂ©at[41].
Aux Ătats-Unis, le psychologue conserve son droit d'exercer la psychologie Ă condition de prĂ©senter des preuves de sa formation continue. Des crĂ©dits d'Ă©ducation continue (CE) peuvent ĂȘtre obtenus en suivant des programmes validĂ©s par l'Association de psychologie amĂ©ricaine APA, confĂ©rences, formations ou tests validant la lecture d'articles de mise Ă niveau[42] - [43].
MĂ©tiers de la psychologie
Code de déontologie
Dans nombre de pays, les rĂšgles de conduite des psychologues professionnels sont rĂ©gies par un Code de dĂ©ontologie des psychologues. L'exercice de la psychologie peut ĂȘtre rĂ©gulĂ© juridiquement et le titre de psychologue peut ĂȘtre protĂ©gĂ© par la loi.
En France, l'exercice de la psychologie est régulé par un cadre juridique de la santé mentale.
Liens avec d'autres disciplines
Sciences cognitives
Certaines disciplines de la psychologie sont Ă©galement du domaine des sciences cognitives. Les sciences cognitives sont une combinaison de psychologie cognitive, de sciences informatiques, de philosophie, de neurosciences, et de linguistique[44].
Neurosciences
Ă partir des annĂ©es 1970, la psychologie cognitive Ă©voluera fortement sous l'influence des neurosciences et des nouvelles mĂ©thodes d'Ă©tude du cerveau en activitĂ©. Avec les progrĂšs de la technologie, l'Ă©lectroencĂ©phalographie (EEG) permet de mesurer (par ĂlectroencĂ©phalographie quantitative) des potentiels Ă©lectriques depuis la surface du scalp qui reflĂštent la dynamique de l'activitĂ© globale des neurones. L'analyse de cette dynamique ouvre une voie d'accĂšs Ă la sĂ©quence temporelle des activitĂ©s nerveuses proposĂ©es d'identifier Ă la sĂ©quence d'opĂ©rations mentales mises en Ă©vidence par d'autres mĂ©thodes basĂ©es notamment la chronomĂ©trie mentale. Durant les annĂ©es 1980, de nouvelles mĂ©thodes d'imagerie cĂ©rĂ©brale feront leur apparition avec la tomographie par Ă©mission de positons (PET), puis l'imagerie par rĂ©sonance magnĂ©tique fonctionnelle (IRMf) dans les annĂ©es 1990. Ces techniques permettent de connaĂźtre les rĂ©gions spĂ©cifiquement actives lors d'une tĂąche expĂ©rimentale donnĂ©e. L'association entre opĂ©ration mentale se fait donc cette fois non pas sur la dimension temporelle, comme c'est le cas pour l'EEG, mais sur le plan spatial : l'objectif Ă©tant d'identifier les bases neurobiologiques des modules postulĂ©s par la psychologie cognitive.
Mathématiques
Les mathématiciens ont abordé trÚs tÎt certains aspects de la psychologie, au titre de la logique ou de l'heuristique. Au XXe siÚcle on peut citer George Pólya (sur la résolution de problÚmes) ou Imre Lakatos (sur la démarche mathématique en général, les idées motrices, l'affrontement des échecs).
Informatique
Les sciences cognitives et la psychologie cognitive se sont développées à mesure du développement de méthodes et théories informatiques. Le mathématicien américain Norbert Wiener (1894-1964) a appliqué les statistiques à la communication et a fondé la cybernétique (le contrÎle et la communication chez l'animal et la machine). Un des premiers à comparer le cerveau à un ordinateur, il est un pionnier des sciences cognitives modernes. Il a précisé les concepts de « but » et de « rétroaction » : le pilotage d'une activité passe par la détermination de divers buts hiérarchisés. L'activité fournit des informations qui sont constamment comparées aux buts, ce qui constitue la rétroaction et guide l'action (par exemple, pour atteindre un but personnel).
Le mathématicien américain d'origine hongroise John von Neumann (1903-1957) s'intéresse à la Physique quantique puis à la Théorie des jeux et à son application à l'économie mathématique. Précurseur de l'intelligence artificielle (IA), il a eu l'idée de coder les programmes et de faire coexister en mémoire données et traitements. Il s'intéressa aussi au traitement de l'information par les organismes biologiques pour définir des applications à des machines artificielles (précurseur du connexionnisme et des neurosciences).
Le mathématicien et logicien anglais Alan Turing (1912-1954) 1936, son modÚle dit Machine de Turing, qui constitue la base de la théorie des automates. Elle applique une succession de rÚgles dépendant des informations d'entrée et d'un état interne, et fournissant un nouvel état interne et un éventuel résultat, modÚle dépassant le behaviorisme. à la question « Une machine peut-elle penser ? » il répond par le test de Turing basé sur une conversation homme-machine. En 1954, il écrit un programme jouant aux échecs.
L'Ă©conomiste amĂ©ricain Herbert Simon (1916-2001), « prix Nobel d'Ă©conomie » en 1978, initiera le dĂ©bat sur les limites de la rationalitĂ© : contraintes sur la capacitĂ© des agents Ă traiter lâinformation disponible, Ă©volution de capacitĂ©s limitĂ©es dans un environnement immensĂ©ment complexe. Avec Allen Newell, lâun des pionniers de lâinformatique, ils dĂ©velopperont la question de la rĂ©solution de problĂšmes Ă travers des procĂ©dures (General Problem Solver) et Ă©laboreront la notion de processus cognitif dans un contexte dâIA.
Le pionnier de l'intelligence artificielle John McCarthy (), avec Marvin Minsky, incarne le courant mettant l'accent sur la logique symbolique. Il est également le créateur du langage LISP, en 1958, inspiré du lambda-calcul d'Alonzo Church. Il reçoit le prix Turing en 1971 pour ses travaux en intelligence artificielle.
ĂpidĂ©miologie et mĂ©decine
Vers la fin des annĂ©es 1990, Ian J. Deary a commencĂ© Ă entreprendre des recherches liant des donnĂ©es de l'Ă©pidĂ©miologie Ă certaines variables gĂ©nĂ©ralement Ă©tudiĂ©es par la psychologie diffĂ©rentielle, en particulier l'intelligence mais Ă©galement les traits de personnalitĂ©. Il a montĂ© le premier laboratoire d'Ă©tude sur le sujet, en Ăcosse[45].
Principaux débats et controverses
La psychologie est-elle scientifique ?
L'expression « psychologie scientifique » est apparue sous la plume de Johann Friedrich Herbart (1776-1841) comme une rĂ©ponse Ă l'emprise philosophique de l'idĂ©alisme allemand[46]. Longtemps controversĂ©e par son origine comme branche de la philosophie, la discipline a acquis le statut de discipline scientifique Ă part entiĂšre au travers d'une sĂ©rie de transformations Ă©pistĂ©mologiques, mĂ©thodologiques, institutionnelles et culturelles, intervenues Ă la fin du XIXe siĂšcle puis tout au long du XXe siĂšcle. L'intĂ©rĂȘt nouveau portĂ© Ă la perception par les psychophysiciens, la mise en Ćuvre de la mĂ©thode expĂ©rimentale et d'analyses quantitatives, le rapprochement avec les disciplines mĂ©dicales de la psychiatrie et de la neurologie, la crĂ©ation de laboratoires de recherche et de facultĂ©s universitaires, la structuration d'une communautĂ© scientifique autour de sociĂ©tĂ©s savantes et de revues scientifiques furent autant de facteurs qui contribuĂšrent Ă faire de la psychologie une science Ă©margeant Ă la fois au rang des sciences dites naturelles qu'Ă celui des sciences dites humaines[47].
Il reste cependant des arguments contestant à la psychologie son statut scientifique. D'une part, certains auteurs affirment que les méthodes utilisées[48] ne suffisent pas à faire de la psychologie une science, car beaucoup de ses concepts ne sont pas scientifiques, mais pré-scientifiques, dans le sens qu'ils sont trop souvent de forme anthropomorphiques (le vécu de l'individu sert de critÚre au savoir). Les défenseurs de cette thÚse expliquent que la psychologie ne pourra devenir une science que lorsque celle-ci distinguera le vécu de la description scientifique. Cette critique reproche à la psychologie de faire des classifications instinctives et non basées sur des critÚres objectifs, ou tout du moins explicitées sur des critÚres qui permettront de donner des groupes homogÚnes (exemple de la classification émotion/cognition ou de l'intelligence). « Les concepts psychologiques, au moins à certains égards déterminants, sont totalement aristotéliciens dans leur contenu réel, bien que, à d'autres égards, leur formulation ait été quelque peu civilisée, si l'on peut dire »[49].
Il existe Ă©galement un autre type de dĂ©bat autour de la psychologie scientifique, dĂ» au fait que Freud et beaucoup de psychanalystes Ă sa suite, ont dĂ©fendu l'idĂ©e que la psychologie ne peut pas ĂȘtre rĂ©duite Ă une sĂ©rie de dĂ©couvertes issues d'expĂ©riences et que l'entretien et l'Ă©tude de cas sont les meilleures techniques pour accĂ©der Ă la complexitĂ© de la pensĂ©e humaine[50]. Des dĂ©bats intenses ont eu lieu entre les dĂ©fenseurs de cette position et leurs opposants qui dĂ©fendaient les mĂ©thodes de la psychologie scientifique et souhaitaient donner Ă la psychologie un statut scientifique. Pierre Janet, Henri Ellenberger, Karl Popper ont Ă©tĂ© parmi les principaux critiques de la dĂ©marche psychanalytique Ă cet Ă©gard[51]. Des tentatives de conciliations ont Ă©tĂ© marquĂ©es par des ouvrages qui font la synthĂšse des Ă©tudes scientifiques confirmant ou invalidant les principales conclusions de la psychanalyse. Cependant, ces dĂ©bats continuent, car mĂȘme si des Ă©tudes valident des hypothĂšses de base de la psychanalyse, de nombreux psychanalystes restent opposĂ©s Ă la dĂ©marche expĂ©rimentale[50] - [52] - [53] - [54].
L'humain passif ou actif
Les différentes approches de la psychologie reflÚtent non seulement la diversité des problÚmes étudiés et des méthodes d'études en psychologie, mais illustre aussi des différences quant aux conceptions de l'humain. Certaines théories privilégient l'humain comme actif, généralement maßtre de son comportement et de son développement. C'est le cas des approches de Piaget (équilibre par assimilation et accommodation), Freud (renforcement du Moi), Erikson (construction de son sens d'identité) ou encore de Gibson (exploration de l'environnement). Tandis que des théories incluent aussi à différents degrés des processus passifs : les influences biologiques (Freud, Erikson, l'éthologie), l'expression de module innés (nativisme modulaire), les réponses automatiques aux stimuli (béhaviorisme), ou encore les processus d'apprentissage inconscients (connexionnisme, neurosciences, renforcement des contingences dans la théorie de l'apprentissage)[55].
RĂ©action aux stimuli ou structure interne
Une des grandes distinctions entre les approches tient aussi à l'explication de l'origine des causes comportementales, qui met plus ou moins l'accent sur les causes externes (l'environnement) ou internes. Les associations entre stimuli et réponses sont surtout mises en avant par le béhaviorisme, mais aussi en éthologie (réaction fixes) et traitement de l'information (une entrée engendre une réponse). De nombreuses théories leur opposent que les comportements viennent aussi de processus régis par la structure entiÚre : la structure cognitive (Piaget), les croyances, l'organisation du ça-moi-surmoi (Freud), la base de données (théories du traitement de l'information), et nombre d'autres facteurs internes[55].
Humain rationnel ou irrationnel
Des thĂ©ories tendent Ă mettre en valeur l'aspect rationnel de l'humain (Piaget, thĂ©ories du traitement de l'information), tandis que d'autres insistent sur le fait que leurs besoins compromettent souvent leur pensĂ©e rationnelle (Freud, Erikson). D'autres enfin sont neutres dans ce dĂ©bat car leurs thĂ©ories prĂ©disent des comportements parfois rationnels et parfois irrationnels. L'Ă©thologie, la psychologie Ă©volutionniste, la psychologie Gibsonienne et d'autres thĂ©ories prenant en compte l'adaptation Ă l'environnement prĂ©disent des comportements rationnels ou irrationnels, en fonction du type d'adaptation requis : les comportements seront plutĂŽt rationnels lorsque la pensĂ©e scientifique est souhaitable, et plutĂŽt irrationnels dans les relations interpersonnelles oĂč la sensibilitĂ© aux Ă©motions est souhaitable[55].
Individuel et collectif
Bien que toutes les thĂ©ories reconnaissent les interactions entre individus et sociĂ©tĂ©, certaines thĂ©ories privilĂ©gient l'impact que les personnes individuelles ont sur la sociĂ©tĂ© (conception individualiste), tandis que dâautres prĂ©fĂšrent partir du phĂ©nomĂšne social pour comprendre l'individuel (holisme).
Inné (nature) ou acquis (culture)
Des débats animés ont parfois opposé des conceptions différentes sur le rÎle de la nature et de l'inné, d'une part, et l'acquis et l'influence de la culture, d'autre part, sur le comportement humain. Ces débats ont été particuliÚrement virulents dans le domaine de la psycholinguistique (Noam Chomsky). De grandes controverses ont eu lieu sur les interprétations des différences entre groupes ethniques observées sur les mesures de l'intelligence, qui ont conduit à des théories racistes[56]. Les débats actuels n'opposent plus de maniÚre radicale des théories innéistes aux autres, dans les cercles scientifiques. Les débats portent plutÎt sur l'importance respective de l'inné et de l'acquis, et sur la description de leurs mécanismes d'interaction[57].
L'échantillon « WEIRD »
Définition de l'acronyme « WEIRD »
Un Ă©chantillon est composĂ© d'un groupe de personnes qui participe Ă une recherche (Gaspard, 2019). Avec lâajout de lâacronyme WEIRD, un Ă©chantillon WEIRD se traduit par des participants qui sont Blancs, ĂduquĂ©s, IndustrialisĂ©s, Riches et DĂ©mocrates (Darling, 2017). En dâautres mots, ce sont des participants qui proviennent des pays occidentaux.
L'échantillon « WEIRD » en psychologie
L'Ă©chantillon WEIRD est largement utilisĂ© dans la recherche psychologique. Cet acronyme a Ă©tĂ© introduit pour la premiĂšre fois dans lâarticle The weirdest people in the world? par Joseph Henrich, Steven J. Heine et Ara Norenzayan (Sokolova, 2022, p.145). Lâarticle affirme que « [p]resque toutes les recherches publiĂ©es par l'une des principales revues, Psychological Science, s'appuient sur des Ă©chantillons occidentaux » (Rad et al., 2018, p.11401). Plus prĂ©cisĂ©ment, « jusqu'Ă 80 % des participants Ă l'Ă©tude » (Azar, 2010) sont WEIRD, bien que ceux-ci reprĂ©sentent « seulement 12 % de la population mondiale » (Azar, 2010).
Les motifs de l'utilisation de l'échantillon « WEIRD »
LâĂ©chantillon WEIRD est frĂ©quemment utilisĂ© dĂ» Ă diverses obstacles que les chercheurs doivent y faire face. Lâarticle, The persistent sampling bias in developmental psychology: A call to action, a analysĂ© ces obstacles plus en dĂ©tail. PremiĂšrement, faire des recherches dans des pays non WEIRD est demandant en temps -car les chercheurs doivent Ă©tablir une certaine confiance avec la population Ă©tudiĂ©e, qui ne garantit pas toujours que le chercheur pourrait collecter des donnĂ©es sur la population- ainsi que demandant Ă©conomiquement, car de nombreux chercheurs reposent sur des subventions pour soutenir leurs recherches (Nielsen et al., 2017, p.33). Par consĂ©quent, les chercheurs WEIRD sont moins susceptibles de mener des recherches en dehors de leur pays.
Quant aux chercheurs venant des pays non WEIRD, ceux-ci ne sont pas susceptibles de publier dans des « journaux occidentaux », car ils ne parlent pas lâanglais ou ils ne rĂ©pondent pas aux exigences de publication des pays WEIRD. Ce qui les restreint à « publier que dans des revues locales ou pas du tout » (Nielsen et al., 2017, p.33).
L'impact des recherches « WEIRD » sur les recherches scientifiques
L'utilisation de l'Ă©chantillon WEIRD dans la recherche scientifique ne tient pas compte des effets culturels et contextuels, de sorte que les donnĂ©es ne sont pas reprĂ©sentatives et ne peuvent pas ĂȘtre gĂ©nĂ©ralisĂ©es Ă toutes les populations du monde (Rad et al., 2018, p.11401). En effet, les pays occidentaux, Ă©duquĂ©s, industrialisĂ©s, riches et dĂ©mocratiques ont des caractĂ©ristiques culturelles, sociales et Ă©conomiques uniques qui ne sont pas attributives au reste des populations. Alors que les cultures occidentales ont tendance Ă mettre l'accent sur l'individualisme -l'intĂ©rĂȘt de lâindividu-, de nombreuses cultures non occidentales mettent l'accent sur le collectivisme -lâintĂ©rĂȘt du groupe (Bebko et al., 2019, p.1014). Ces diffĂ©rences culturelles peuvent avoir un impact significatif sur le comportement humain et la cognition. Par exemple, dans lâarticle Emotion Regulation and Culture: Are the Social Consequences of Emotion Suppression Culture-Specific?, il est prĂ©sentĂ© deux Ă©tudes qui ont Ă©tĂ© faite sur un groupe de femmes amĂ©ricaines possĂ©dant des valeurs « europĂ©ennes » (individualistes) et un groupe de femmes asiatiques possĂ©dant des valeurs « asiatiques » (collectivistes). Dans la premiĂšre Ă©tude, il fut dĂ©montrĂ© que les femmes amĂ©ricaines sont plus susceptibles d'exprimer leurs Ă©motions que les femmes asiatiques et que si les femmes amĂ©ricaines n'expriment pas leurs Ă©motions c'Ă©tait pour se protĂ©ger, car elles ressentaient des Ă©motions nĂ©gatives Ă©levĂ©es qui Ă©taient tout Ă fait le contraire pour les femmes asiatiques (Butler et al., 2007, p.44). Dans la deuxiĂšme Ă©tude, il fut dĂ©montrĂ© que les femmes amĂ©ricaines sont beaucoup plus rĂ©actives et que si les femmes amĂ©ricaines n'Ă©taient pas rĂ©actives, celles-ci Ă©taient plus susceptibles d'avoir des rĂ©sultats sociaux nĂ©gatifs, qui encore une fois Ă©tait l'inverse pour les femmes asiatiques (Butler et al., 2007, p.44). Ainsi, l'utilisation d'Ă©chantillons WEIRD peut perpĂ©tuer des opinions prĂ©conçues des cultures qui nâont aucune validitĂ© scientifique, mais qui se retrouvent dans les recherches scientifiques, conduisant Ă une comprĂ©hension limitĂ©e du comportement et de la cognition humaine.
Qu'est-ce que c'est un échantillon « WEIRD »?
Le phĂ©nomĂšne de l'Ă©chantillon « WEIRD » devient de plus en plus Ă©vident dans la psychologie avec le plus de recherche qui est faite. Ce phĂ©nomĂšne est particuliĂšrement illustrĂ© par lâutilisation excessive des Ă©chantillons WEIRD dans la psychologie, souvent sociale. Les Ă©chantillons « WEIRD » sont caractĂ©risĂ©s par les populations occidentales, Ă©duquĂ©s, industrialisĂ©s, riches et dĂ©mocrates[58]. Lâutilisation prĂ©dominante de l'Ă©chantillon « WEIRD » est soutenu par le fait que, depuis 2009, environ 96% des Ă©chantillons psychologiques venaient des pays industrialisĂ©s occidentaux qui reprĂ©sentent seulement 12% de la population mondiale [59] - [60]. Plus prĂ©cisĂ©ment, le groupe le plus utilisĂ© pour la recherche psychologique sont les Ă©tudiants de premier cycle des universitĂ©s AmĂ©ricains[61].
Le problĂšme avec ceci est quand les psychologues essaient de gĂ©nĂ©raliser leurs rĂ©sultats d'Ă©tudes « WEIRD » et de faire des dĂ©clarations globales sur l'humanitĂ©. En rĂ©alitĂ©, avec plus d'Ă©tudes sur la diversitĂ© des populations, ceux dans les sociĂ©tĂ©s « WEIRD » sont souvent dans les extrĂ©mitĂ©s des distributions normales dans plusieurs mesures, indiquant que les Ă©tudes utilisant ces Ă©chantillons ne peuvent pas et ne doivent pas ĂȘtre gĂ©nĂ©ralisĂ©es Ă l'ensemble de l'homme[60]. On manque les variations cruciales et nuances quand les Ă©chantillons sont limitĂ©s Ă populations « WEIRD » et donc limitent les connaissances envers plusieurs phĂ©nomĂšnes psychologiques[58]. Avec lâutilisation des Ă©chantillons fortement basĂ© sur les Ă©tudiants dâuniversitĂ©, prĂ©sent une difficultĂ© pour gĂ©nĂ©ralisation en part que la plupart des Ă©tudiants de premier cycle sont des jeunes adultes avec un perspective limitĂ© de la vie et pouvait ĂȘtre systĂ©matiquement diffĂ©rent des non-Ă©tudiants envers plusieurs dimensions psychologiques ou comportementaux, en particulier les personnes plus ĂągĂ©es et possĂ©dant plus d'expĂ©riences de vie[61].
Impact des chercheurs « WEIRD »'
Un autre Ă©lĂ©ment de cette problĂ©matique est que la plupart des chercheurs psychologiques font partie d'une population « WEIRD », qui impacte le choix d'Ă©chantillons, car la plupart des chercheurs veulent les Ă©chantillons autour de lui, ou facile Ă accĂ©der[60]. Ă ce mĂȘme point, les chercheurs « WEIRD » peuvent avoir les prĂ©jugĂ©s culturels qui influencent le choix des Ă©chantillons spĂ©cifiques (ex Ă©tudiants le leur universitĂ©, de la mĂȘme culture) et les choix de sujets quâils considĂšrent comme intĂ©ressants. De plus, la plupart des outils et instruments psychologiques (comme les Ă©chelles standardisĂ©s) pour mesurer les donnĂ©es sont aussi crĂ©Ă©es par les chercheurs « WEIRD » qui peuvent ne pas convenir Ă d'autres populations[62].
Impact d'échantillons « WEIRD » sur la psychologie inter-culturelle
Depuis lâarticle de Henrich et al. en 2010 qui a vraiment mis ce sujet en connaissance pour la premiĂšre fois et rassemblĂ© le support scientifique, la plupart des scientifiques sociales (psychologues, sociologues, anthropologues) acceptent que la domination des donnĂ©es « WEIRD » est une crise[58]. Ceci implique fortement les psychologues sociaux, car en mĂȘme temps quâils utilisent les Ă©chantillons « WEIRD », leurs recherches sont basĂ©es sur les modĂšles expĂ©rimentaux conçus spĂ©cifiquement pour une culture spĂ©cifique qui ne pourraient pas ĂȘtre gĂ©nĂ©ralisĂ©s Ă dâautres populations (Ăąges, statuts socio-Ă©conomiques, etc)[63].
Avec l'essor de la psychologie inter-culturelle, il devient de plus en plus Ă©vident que la culture a de nombreuses dâimplications sur la façon dont les personnes pensent, agissent, interagissent avec le monde, utilisent le langage et plus. Ceci est crucial Ă prendre en compte lors de l'Ă©tude des phĂ©nomĂšnes psychologiques, oĂč les donnĂ©es de base consistent des populations « WEIRD » qui peuvent avoir une perspective trĂšs limitĂ©e envers ces phĂ©nomĂšnes ou une interprĂ©tation trĂšs spĂ©cifique reflĂ©tant leur culture[63].
Un exemple spĂ©cifique de lâĂ©chantillon « WEIRD » et la psychologie inter-culturelle est dĂ©crite dans l'Ă©tude de Medin et al. (2010). Ils prĂ©sentent le « dĂ©savantage du terrain dâorigine », qui dĂ©montre le dĂ©savantage Ă la recherche quand ils prennent un groupe culturel particulier comme la norme de recherche (souvent les chercheurs et Ă©tudiants de premier cycle des Ătats-Unis). Ce phĂ©nomĂšne affecte la recherche inter-culturelle fortement envers le niveau que les groupes culturels semblent plus uniformes ou diversifiĂ©s, si les croyances et pratiques culturelles dâun groupe semblent normales ou anormales et le processus par lequel les mĂ©thodes de recherche sont sĂ©lectionnĂ©es. Le statut de terrain dâorigine rend plus probable la dĂ©couverte d'une diffĂ©rence culturelle sans fondement dans la rĂ©alitĂ©[62].
Améliorations suggérées envers la situation
Plusieurs amĂ©liorations ont Ă©tĂ© suggĂ©rĂ©es Ă ce point pour ĂȘtre mises en Ćuvre dans le but dâamĂ©liorer le problĂšme d'Ă©chantillon « WEIRD ». Une suggestion est que pendant le processus dâĂ©valuation par les pairs, dâavoir les chercheurs quâapportent des diffĂ©rents modĂšles culturels et attentes implicites Ă l'hypothĂšse[60]. Par ailleurs, d'autres chercheurs suggĂšrent que les rĂ©sultats de recherche basĂ©s sur des Ă©tudiants universitaires devraient ĂȘtre reproduits avec des sujets non Ă©tudiants avant la gĂ©nĂ©ralisation globale et de mettre lâaccent sur la rĂ©plication des Ă©tudes en gĂ©nĂ©ral[61]. Un autre chercheur souligne lâimportance de prendre en compte l'interprĂ©tation des questions de recherche, comment les diffĂ©rentes cultures voient le monde, qui peuvent mener Ă exagĂ©rer ou manquer des diffĂ©rences psychologiques[63]. Un exemple de ceci est avec l'Ă©tude des diffĂ©rences culturelles dans les Ă©motions: il pourrait ĂȘtre problĂ©matique de commencer avec les termes Ă©motionnels anglais et dâessayer dâidentifier leurs Ă©quivalents dans une autre culture, car les Ă©quivalents sont possiblement non-existant et ceci peuvent crĂ©er un biais immĂ©diate envers ce quâon souhaite trouver[62].
En gĂ©nĂ©ral, pour aider avec le problĂšme d'Ă©chantillon « WEIRD », les recherches devraient inclure les diffĂ©rentes cultures et pays pour crĂ©er un rĂ©seau de recherche internationaux et interdisciplinaires oĂč les donnĂ©es sont collectĂ©es tout au long du cycle de vie et parmi diverses populations et cultures[60].
DĂ©bats autour des questions Ă©thiques
Les débats autour de l'utilisation éthique des connaissances en psychologie sont importants. Les connaissances en psychologie ont été utilisées durant les guerres, pour justifier des actes criminels (racisme), pour monter des campagnes de propagande, ou encore pour aider à développer des techniques de torture et humiliation[64].
La psychologie est utilisée dans le monde commercial pour influencer les consommateurs à leur insu. Elle est utilisée dans la publicité, dans le design des magasins, des étagÚres, ou encore des paquets et des produits, pour maximiser leurs ventes[64].
Biais en psychologie
Les débats concernant les biais en psychologie portent principalement sur l'ethnocentrisme, les questions de l'objectivité, le racisme, le sexisme[64].
Biais de l'ethnocentrisme
Lâethnocentrisme est la tendance, souvent involontaire, de baser ses perceptions et sa comprĂ©hension dâautres cultures sur sa propre culture (APA, 2023). Le phĂ©nomĂšne de lâethnocentrisme a menĂ© plusieurs psychologues Ă sâinterroger sur lâinfluence quâa la culture sur la psychologie des individus. La comprĂ©hension des diffĂ©rences culturelles pourrait ainsi permettre de diminuer les biais en psychologie et rendre cette discipline plus inclusive et reprĂ©sentative des diffĂ©rentes populations et cultures (Heine, 2020).
DĂ©but de la recherche interculturelle
Au dĂ©but des annĂ©es 1900, le domaine de la psychologie se concentrait particuliĂšrement sur la psychologie gĂ©nĂ©rale, soit lâĂ©tude au sens large des principes en lien avec la psychologie, notamment le comportement, la perception, les Ă©motions, la pensĂ©e, la mĂ©moire et la personnalitĂ© (APA, 2023; Heine 2020).
Vers le milieu des annĂ©es 1900, certains psychologues et anthropologues, tels que Jerome Bruner et Richard Shweder (en), ont commencĂ© Ă mettre lâemphase sur lâidĂ©e que les pratiques et croyances culturelles interagissent avec les processus psychologiques (APA, 2023; Bruner, 1990; Heine, 2020). Les psychologues culturels soutiennent que la psychologie et la culture sâinfluencent mutuellement et que les processus psychologiques peuvent varier entre cultures (Bruner, 1990; Heine, 2020; Shweder, 1990). Le domaine de la psychologie sâest donc Ă©galement tournĂ© vers la recherche interculturelle, soit lâĂ©tude des maniĂšres de pensĂ©e et des comportements humains dans plusieurs cultures, afin dâobserver les similitudes et les diffĂ©rences qui existent entre diverses populations (APA, 2023).
Base de données «WEIRD»
La majoritĂ© des Ă©tudes en psychologie sâest jusquâĂ prĂ©sent limitĂ©e Ă lâĂ©tude de participants venant de sociĂ©tĂ©s occidentales, qui regroupent principalement les pays dâEurope occidentale (Union EuropĂ©enne, Royaume-Uni, NorvĂšge, Islande, Suisse) ainsi que les pays façonnĂ©s par la culture de lâEurope occidentale (Ătats-Unis, Canada, Australie, Nouvelle-ZĂ©lande) (WPR, 2023), ce qui peut reprĂ©senter un dĂ©fi pour la comprĂ©hension de la psychologie et du comportement humain (Henrich et al., 2010). Les psychologues Joseph Henrich (en), Steven J. Heine (en) et Ara Norenzayan ont notamment dĂ©signĂ©s ces sociĂ©tĂ©s sous lâacronyme «WEIRD», qui signifie occidentales, Ă©duquĂ©es, industrialisĂ©es, riches et dĂ©mocratiques (en anglais Western, Educated, Industrialised, Rich and Democratic) (Henrich et al., 2010).
Une enquĂȘte menĂ©e en 2008 auprĂšs des principales revues de psychologie a dĂ©montrĂ© que 96% des personnes participant aux Ă©tudes en psychologie proviennent de pays occidentaux industrialisĂ©s, bien que ces pays reprĂ©sentent 12% de la population mondiale (Arnett, 2008). Une analyse plus rĂ©cente menĂ©e en 2017 a dĂ©montrĂ© des rĂ©sultats similaires au niveau des journaux de psychologie dĂ©veloppementale, qui mettent l'emphase sur le dĂ©veloppement de l'enfant (Nielsen et al., 2017). LâenquĂȘte de 2008 souligne Ă©galement que 70% des participants aux Ă©tudes en psychologie sont des Ă©tudiants universitaires de premier cycle en psychologie, rĂ©sultant en une comprĂ©hension de la psychologie qui est incomplĂšte et qui ne reprĂ©sente pas adĂ©quatement lâensemble des ĂȘtres humains (Arnett, 2008).
Généralisation et validité externe
LâĂ©tude dâĂ©chantillons occidentaux mĂšne Ă un problĂšme de gĂ©nĂ©ralisation. La gĂ©nĂ©ralisation, Ă©galement appelĂ©e validitĂ© externe, reprĂ©sente Ă quel point les rĂ©sultats dâune recherche menĂ©e dans une petite population peuvent sâappliquer Ă des populations plus grandes et plus diverses (Heine, 2020; Henrich et al., 2010). Certains psychologues se demandent donc jusquâĂ quel point les thĂ©ories psychologiques Ă©laborĂ©es dans des cultures occidentales peuvent sâappliquer aux cultures non-occidentales.
Par exemple, vers lâĂąge de 4-5 ans, les enfants dĂ©veloppent une ThĂ©orie de l'esprit, câest-Ă -dire quâils sont capables de comprendre que les personnes qui les entourent possĂšdent des croyances et des dĂ©sirs qui leur sont propres. La thĂ©orie de lâesprit a Ă©tĂ© observĂ©e dans des cultures occidentales ainsi que dans des cultures non-occidentales et reprĂ©sente un exemple de phĂ©nomĂšne psychologique pouvant ĂȘtre gĂ©nĂ©ralisĂ©, ou appliquĂ©, Ă travers diffĂ©rentes cultures (Norenzayan & Heine, 2005).
Dâun autre cĂŽtĂ©, une Ă©tude de Heine et al. portĂ©e en 2001 dĂ©montre que la tendance des AmĂ©ricains Ă sâauto-valoriser, câest-Ă -dire Ă persister dans une tĂąche Ă la suite d'une rĂ©ussite, ne sâapplique pas aux Japonais, qui vont plutĂŽt avoir tendance Ă sâauto-amĂ©liorer, câest-Ă -dire Ă persister dans une tĂąche Ă la suite d'un Ă©chec. Ainsi, les AmĂ©ricains sont motivĂ©s par leur succĂšs, tandis que les Japonais sont motivĂ©s par leurs Ă©checs, ce qui reprĂ©sente un exemple de variabilitĂ© culturelle dans laquelle les Ă©vĂšnements qui motivent le comportement des AmĂ©ricains ne sâappliquent pas nĂ©cessairement aux Japonais, et vice-versa (Heine et al., 2001).
Implications des échantillons «WEIRD» dans la recherche en psychologie
Auparavant, les processus psychologiques étaient considérés comme étant indépendants du contexte dans lequel les personnes se trouvent. Les chercheurs prenaient souvent pour acquis que les façons de mesurer les processus psychologiques lors de la recherche étaient efficaces indépendamment de la situation dans laquelle les participants se trouvent (Heine, 2020).
Cependant, lors dâune recherche interculturelle, Kanagawa et al. (2001) ont observĂ© que la façon dont des Ă©tudiants collĂ©giaux amĂ©ricains et japonais se dĂ©crivent eux-mĂȘmes diffĂšre selon le contexte dans lequel ils se trouvent. Les rĂ©ponses des AmĂ©ricains semblaient assez similaires dans les quatre diffĂ©rents contextes Ă©tudiĂ©s, soit en prĂ©sence dâun professeur, dâun autre Ă©tudiant, dâun grand groupe de personnes ou seul. Les participants amĂ©ricains Ă©taient donc relativement peu affectĂ©s par le contexte. En revanche, les rĂ©ponses des Japonais variaient considĂ©rablement en fonction de la situation; ils Ă©taient moins critiques sur leur description dâeux-mĂȘmes lorsquâils Ă©taient seuls que lorsquâils Ă©taient avec dâautres personnes. Lâattitude des Japonais envers eux-mĂȘmes semble donc varier en fonction des personnes qui se trouvent avec eux. Ainsi, la recherche en dehors des populations «WEIRD» dĂ©montrent que les mĂȘmes questions posĂ©es Ă diffĂ©rents groupes culturels lors dâĂ©tudes en psychologie peuvent donner des rĂ©sultats qui varient considĂ©rablement (Heine, 2020).
De plus, Cheung et al. (1996) ont observĂ© que dans certains pays oĂč la psychologie nâest pas encore complĂštement dĂ©veloppĂ©e, les tests psychologiques amĂ©ricain sont couramment empruntĂ©s et traduits afin de fournir efficacement des techniques dâĂ©valuation de processus psychologiques dans dâautres cultures. Par exemple, le modĂšle de la personnalitĂ© Ă cinq facteurs, couramment appelĂ© «Big Five» ou «OCEAN», est un outil de mesure de la personnalitĂ© considĂ©rĂ© comme Ă©tant valide dans la plupart des cultures (Heine, 2020). Cependant, certaines diffĂ©rences persistent en ce qui concerne les traits de personnalitĂ© qui sont applicables dans lâensemble des cultures. En effet, les modĂšles et outils de mesure ont pour la plupart Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ©s en fonction de termes utilisĂ©s en anglais, surtout aux Ătats-Unis, et peuvent ne pas avoir dâĂ©quivalents dans dâautres langues ou cultures (Cheung, 1996).
L'influence des façons de penser occidentales dans les populations non-occidentales a Ă©tĂ© mise en perspective dans une Ă©tude de Ma & Schoeneman portĂ©e au Kenya en 1997. Leur Ă©tude a contrastĂ© des groupes kenyans indigĂšnes traditionnels, qui ont peu dâexposition aux cultures occidentales, avec des Ă©tudiants universitaires kenyans, qui sont eux plus exposĂ©s aux cultures occidentales. Les participants ont fourni une description dâeux-mĂȘmes et les rĂ©sultats obtenus dĂ©montrent que les Ă©tudiants, Ă©tant plus exposĂ©s Ă la culture occidentale indĂ©pendante, font rĂ©fĂ©rence Ă des caractĂ©ristiques qui les dĂ©finissent personnellement, tandis que les groupes traditionnels moins exposĂ©s aux influences occidentales font plutĂŽt rĂ©fĂ©rence Ă leurs rĂŽles et leurs relations avec les autres. Les diffĂ©rences culturelles qui existent entre les sociĂ©tĂ©s occidentales et non-occidentales ont donc une influence marquĂ©e sur les façons de penser des individus, et ce mĂȘme s'ils vivent dans la mĂȘme rĂ©gion du monde (Ma & Schoeneman, 1997).
Perspectives de recherches interculturelles
La recherche interculturelle a augmentĂ© depuis la fin des annĂ©es 1980. En effet, le nombre de recherches incluant des thĂšmes culturels a doublĂ© de 1986 Ă 2014, le pourcentage dâarticles publiĂ©s Ă©tant passĂ© de 5% Ă 10% (Kashima, 2015). Heine (2020) mentionne Ă©galement que des recherches menĂ©es dans des sociĂ©tĂ©s non-occidentales en utilisant des mĂ©thodes diffĂ©rentes pourront permettre de tirer des conclusions plus exactes sur la gĂ©nĂ©ralisation des thĂ©ories psychologiques en dehors des sociĂ©tĂ©s occidentales.
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Annexes
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- Toutes les pages avec « psychologie » dans le titre
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