Psychologie dynamique
Ă lâorigine, la psychologie dynamique â empruntĂ© au grec ÎŽ Ï Îœ α ÎŒ Îč Îș Îż Ì Ï qui signifie « fort, puissant »[1], dĂ©rivĂ© de ÎŽÏΜαΌÎčÏ, dynamis (« puissance », « force ») â dĂ©signe lâĂ©tude des modifications que subissent les phĂ©nomĂšnes psychologiques quand la force des sujets est amenĂ©e Ă varier en intensitĂ©.
Historique
La psychologie dynamique comme Ă©tude des variations de force fut pratiquĂ©e dans la recherche expĂ©rimentale en psychologie, en Europe et aux Ătats-Unis, des annĂ©es 1850 aux annĂ©es 1950 environ. Ă cette date, en passe dâacquĂ©rir bientĂŽt son autonomie conceptuelle et institutionnelle, elle disparaĂźt subitement de lâuniversitĂ© (recherche expĂ©rimentale et enseignement supĂ©rieur), pour laisser la place au niveau international principalement Ă la psychologie cognitive et Ă la psychologie sociale. Le terme fut inventĂ© par Gregory Zilboorg puis repris par Henri F. Ellenberger, et est souvent utilisĂ© par des historiens, afin de retracer l'Ă©volution dans le temps de pratiques cliniques.
La psychologie dynamique a Ă©tĂ© pratiquĂ©e par une grande proportion des psychologues du monde entier, autour de 1900. Toutefois, ses plus illustres reprĂ©sentants sont peut-ĂȘtre William James aux Ătats-Unis et parmi les chercheurs expĂ©rimentaux, Pierre Janet en France, lequel emploie le terme explicitement Ă partir des annĂ©es 1920. Leurs travaux visent Ă prĂ©ciser en quoi les degrĂ©s de force ou de fatigue caractĂ©risent les actions concrĂštes et les phĂ©nomĂšnes cognitifs (perception, croyance, volontĂ©, raisonnement), et comment les oscillations de la force modifient tous ces Ă©lĂ©ments dans un sens prĂ©dictible. ParticuliĂšrement sensibles aux variations de la force, les Ă©motions et les motivations apparaissent des Ă©lĂ©ments centraux de la « personnalitĂ© », entendue comme ensemble de nos dispositions Ă agir, Ă vouloir et Ă croire. Pour Pierre Janet, la psychologie expĂ©rimentale doit donc complĂ©ter les mesures physiologiques et cognitives (mentales) par un entretien biographique approfondi avec le sujet, quâil nomme « analyse psychologique ». Cet entretien vise Ă dĂ©terminer â et comparer â les motivations personnelles du sujet, et le type dâactions quâil mĂšne habituellement dans sa vie quotidienne.
En considĂ©rant des variations de force extrĂȘmement dĂ©calĂ©es vers la fatigue, les lois de la psychologie dynamique ont trouvĂ© une application toute naturelle dans le champ de la psychiatrie, dĂšs le tournant du XXe siĂšcle. De nombreux grands psychiatres des annĂ©es 1950 et 1960 pratiquent encore la « psychiatrie dynamique », comme Henri Ey, Henri Baruk, ou Jean Delay. La « psychasthĂ©nie » â mot crĂ©Ă© par Pierre Janet â dĂ©signe alors un affaiblissement du « Moi » donnant prise Ă diffĂ©rents symptĂŽmes Ă©volutifs quâil ne sert Ă rien de traiter isolĂ©ment : câest toute la personnalitĂ© quâil faut aider. Dans les annĂ©es 1970, la psychiatrie dynamique suit la voie de la psychologie dynamique, et disparaĂźt Ă son tour des cabinets mĂ©dicaux et des laboratoires, remplacĂ©e principalement par les mĂ©dications psychotropes.
La psychologie dynamique aujourd'hui
Sous sa forme fondatrice dâĂ©tude expĂ©rimentale des variations de force, la psychologie dynamique (et son champ psychiatrique) nâest donc plus pratiquĂ©e aujourdâhui par les chercheurs, ni en psychologie ni en mĂ©decine. Toutefois, le terme a connu une trĂšs large extension en dehors de la recherche, au sein de communautĂ©s psychothĂ©rapiques, et dans le domaine du « dĂ©veloppement personnel » ou du « bien-ĂȘtre » actuellement en plein essor. Ă ce niveau, de trĂšs nombreuses approches se rĂ©clament aujourdâhui de la « psychologie dynamique » ou dâune thĂ©rapie « dynamique », ou plus gĂ©nĂ©ralement dâune approche « psychodynamique ». Ces nouvelles acceptions ne font plus rĂ©fĂ©rence aux variations de la force et de la fatigue du sujet auparavant Ă©tudiĂ©es dans la recherche, et possĂšdent maintenant plusieurs significations selon les Ă©coles qui les utilisent.
Parmi les principales significations actuellement utilisées pour « psychologie dynamique » ou « psychodynamique », on peut retenir :
- le fait que des énergies (parfois « forces ») de natures diverses, internes ou externes, orientent la vie du sujet, soit consciemment soit à son insu ;
- le fait que la séance ou la thérapie soit largement voire exclusivement basée sur la parole ;
- le fait que la séance ou la thérapie engage la participation active du patient ou du groupe ;
- le fait que la séance ou la thérapie théorise et utilise la ou les relations des personnes en présence, patient, groupe et thérapeute ;
- le fait que la séance ou la thérapie est centrée sur la « personnalité » ou certains de ses traits spécifiques ;
- le fait que la séance ou la thérapie vise particuliÚrement un « changement » de pensée ou de « comportement ».
Par un curieux renversement historique, certaines communautĂ©s de « psychologie dynamique » militent vigoureusement pour la reconnaissance dâune diffĂ©rence irrĂ©ductible entre lâapproche « dynamique » et lâapproche expĂ©rimentale au laboratoire de recherche⊠lĂ mĂȘme oĂč vers 1900 elle est apparue, a Ă©tĂ© dĂ©finie et a conquis ses premiers savoirs publiĂ©s et validĂ©s. Cette « diffĂ©rence » ne porte donc pas sur lâĂ©pistĂ©mologie des deux pratiques, mais sur lâĂ©tat tout actuel â de facto â des divergences dâapproche entre le secteur privĂ© et le secteur institutionnel, qui nâexistaient pas il y a quelques dĂ©cennies. Apparue et dĂ©veloppĂ©e pendant un siĂšcle comme pratique expĂ©rimentale des laboratoires, la psychologie dynamique prĂ©sente tous les caractĂšres Ă©pistĂ©mologiques dâune parfaite compatibilitĂ© avec la recherche publiĂ©e, critiquĂ©e et Ă©valuĂ©e. On retiendra donc, toutefois, le bien-fondĂ© de ces groupements Ă dĂ©fendre la « psychologie dynamique » dans lâoptique dâune pluralitĂ© et complĂ©mentaritĂ© des approches psychologiques, laquelle serait non seulement possible dans la recherche expĂ©rimentale aux cĂŽtĂ©s des psychologies cognitives et sociales, et de la psychiatrie mĂ©dicalisĂ©e, mais probablement, en outre, trĂšs prometteuse.
Articles connexes
Références
- « DYNAMIQUE : Définition de DYNAMIQUE », sur cnrtl.fr (consulté le ).