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Hermaphrodisme

L'hermaphrodisme est un phénomène biologique dans lequel l'individu présente à la fois des organes mâles et femelles, soit simultanément soit alternativement (hermaphrodisme successif). Ce concept est à la fois utilisé en botanique et en zoologie.

Hermaphrodite endormi, musée du Louvre.

Le langage courant emploie ce terme pour désigner tous les cas ambigus du développement sexuel mais, dans une acception scientifique, seuls les individus ayant la capacité de se reproduire comme mâles et femelles au cours de leur vie sont considérés comme hermaphrodites[1] - [2].

Il s'oppose au gonochorisme qui correspond au sexe séparé.

Origine du mot

Le symbole de l'hermaphrodisme.

Dans la mythologie grecque, Hermaphrodite est issu de l'union entre Hermès et Aphrodite, né sur le mont Ida de Troade. Alors qu'il se baignait dans une source d'Halicarnasse en Carie, la naïade de la source, Salmacis, s'éprit de lui. Repoussée, Salmacis fit alors le vœu que les dieux unissent leurs deux corps pour n'en faire plus qu'un. La naïade fut exaucée, ce qui donna naissance à un être humain mâle et femelle à la fois, que l'on a représenté dans la statuaire comme doté d'un pénis et de seins. La légende est notamment relatée dans les Métamorphoses d'Ovide.

Les représentations d'Hermaphrodite sont fréquentes dans l'art, notamment antique. L'une des plus célèbres est l’Hermaphrodite endormi, une statue de l'époque hellénistique dont les principaux exemplaires sont exposés à la Galerie Borghèse et au musée du Louvre.

Hermaphrodisme en botanique

Fleur hermaphrodite de pommier.

De nombreuses espèces de plantes présentent des organes de reproduction femelles et mâles sur un même organisme. Mais le terme hermaphrodisme ne s'applique qu'aux cas des plantes à fleurs (le pommier par exemple) qui portent, dans la même fleur, les organes sexuels mâles et femelles (étamine et pistil). Il n'y a donc qu'un seul type de fleur.

Dans ce cas, plusieurs systèmes peuvent empêcher l'autofécondation :

Des plantes portant des fleurs de types mâles ou femelles séparées ne sont pas dites hermaphrodites mais dites « monoïque » ; c'est le cas par exemple du maïs, qui porte les épis mâles en hauteur et les épis femelles plus bas.

L'androdioécie est la coexistence dans une même population de mâles et d'hermaphrodites, ce qui est bien plus rare que l'inverse (gynodioécie ou coexistence de femelles et d'hermaphrodites). De rares angiospermes sont androdioïques, dont l'arbuste Phillyrea angustifolia (anémophile), qui a fait l'objet d'une thèse pour tenter d'expliquer le taux élevé de mâles en zone méditerranéenne, alors qu'on pourrait penser qu'un tel taux n'a pas d'intérêt sélectif. L'hypothèse posée par la thèse était qu'une sélection « fréquence - dépendante » induite par une liaison génétique entre locus de stérilité femelle et locus d'incompatibilité pourrait favoriser les mâles. S'il y a stérilité femelle dominante « avec peu d'allèles d'incompatibilité, les fréquences de mâles à l'équilibre peuvent atteindre des valeurs élevées sans nécessiter de forts avantages mâles en fertilité[3]. »

Hermaphrodisme en zoologie

On parle d'hermaphrodisme chez un animal lorsque l’organisme possède des gonades correspondant aux deux sexes, ceux-ci ne produisant pas nécessairement les gamètes associés.

Hermaphrodisme normal

On distingue trois types normaux d'hermaphrodisme.

Hermaphrodisme simultané

Accouplement de la grande loche (Arion rufus).

Il existe à l'état naturel chez certains animaux comme certaines cochenilles, certaines coquilles Saint-Jacques, l'escargot et le lombric. On peut assister alors à une autofécondation : la fécondation des œufs se fait par les spermatozoïdes du même organisme. Mais ce phénomène reste plutôt rare car cela ne favorise pas le brassage génétique[4].

La plupart des fécondations chez ce type d'hermaphrodite sont donc des fécondations croisées : elles nécessitent l'accouplement entre individus, ce qui peut être facilité par la séparation très nette dans l'espace des organes des deux sexes.

Hermaphrodisme successif ou séquentiel

Certaines espèces animales (généralement marines) sont au cours de leur vie d'abord mâles puis deviennent femelles. C'est le cas, par exemple, des crépidules (mollusques marins), du poisson clown, de certains batraciens et reptiles…

On parle de protandrie lorsque les gamètes mâles sont produits avant les gamètes femelles (huître…) et, plus rarement, de protogynie dans le cas contraire (mérou…).

Par ailleurs, l'hermaphrodisme simultané n'est pas nécessairement constant tout au long de la vie d'un même individu. Il peut être précédé par une phase d'hermaphrodisme successif. Dans ce cas, chaque individu passe ainsi successivement par trois stades[5].

Hermaphrodisme juvénile précoce

Traduit les espèces gonochoriques adultes qui ont une phase hermaphrodite, mais qui ne produisent pas de gamètes lors de leur développement.

DĂ©veloppement embryonnaire atypique

Au cours du développement embryonnaire, des mutations génétiques peuvent survenir et donner naissance à des individus portant les attributs des deux sexes : fusion de deux embryons qui auraient dû donner un mâle et une femelle (chimère), ou bien un ovule fécondé par deux spermatozoïdes apportant respectivement un gêne mâle et un gêne femelle[6].

Mise en cause de la pollution

À partir de 2003, des chercheurs danois puis bien d'autres ont mis en évidence qu'une contamination par des matières polluantes véhiculées par la chaîne alimentaire, en particulier :

  • les PCB semblent responsables ou coresponsables d'une augmentation notable des cas d'hermaphrodisme chez les ours polaires ;
  • aux États-Unis en Floride, le Pr. Lou Guillette (zoologiste) constate lui, que les alligators naissent avec des attributs mâles fortement rĂ©duits, dans un lac autrefois contaminĂ© par des pesticides ;
  • une biologiste amĂ©ricaine, la Pr. Shanna Swan, mandatĂ©e par l'AcadĂ©mie des Sciences des États-Unis confirme des Ă©tudes sur la reproduction allant dans ce sens ;
  • un dĂ©veloppement de pĂ©nis chez des buccins des cĂ´tes françaises a Ă©galement Ă©tĂ© constatĂ©, peut-ĂŞtre Ă  cause des concentrations Ă©levĂ©es en produits nettoyants pour les coques des bateaux ;
  • les phtalates et d'autres Ĺ“stromimĂ©tiques fĂ©minisants sont fortement soupçonnĂ©s d'ĂŞtre Ă  l'origine d'une multiplication du nombre et de la gravitĂ© des malformations gĂ©nitales des petits garçons. Chez le mâle on parle de syndrome de dysgĂ©nĂ©sie testiculaire pour dĂ©crire l'ensemble des symptĂ´mes associĂ©es, qui s'accompagnent aussi d'une augmentation du risque de cancer des testicules.

L'hermaphrodisme dans l'espèce humaine

Dans le sens le plus rigoureux, l'hermaphrodisme n'a jamais été observé chez l'humain, dans le sens où il n'a jamais été constaté de personne capable de se reproduire à la fois en tant qu'homme et que femme[7] - [8].

Représentation en cire d'un sexe humain hermaphrodite au Panoptikum, musée de cire de Hambourg.

Dans l'espèce humaine le terme « hermaphrodisme » (vrai ou pseudo) est employé dans le langage courant pour désigner l'intersexuation. Le terme d'hermaphrodisme appliqué aux humains a commencé à être employé par la médecine vers la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle[9]. Une partie des médecins considèrent l'hermaphrodisme comme une pathologie.

Le terme est parfois critiqué, car il repose sur des connaissances scientifiques datées, qu'il a été construit sur des principes arbitraires, et qu'il peut être préjudiciable au patient ou au praticien[10].

Une personne dans cet état est le plus souvent infertile, même si on rapporte des cas d'ovulations ou de spermatogénèse. Les taux de testostérone et d'œstrogènes ont souvent tendance à s'inhiber l'un et l'autre (de sorte que ni les seins ni le système pileux ne se développent normalement, et parfois les organes externes restent trop peu développés pour permettre aisément un coït avec pénétration). Le phallus mesure généralement entre 4 et 8 cm.

À la naissance, on pratique en général l'ablation de l'attribut le moins développé, opération doublée d'une hormonothérapie. Cette opération est vivement contestée et considérée comme une mutilation génitale traumatisante et non nécessaire. On peut aussi se déterminer en étudiant l'histologie des gonades.

On distingue différents types d'hermaphrodisme, l'hermaphrodisme vrai, le pseudo-hermaphrodisme féminin et le pseudo-hermaphrodisme masculin[11]

Hermaphrodisme vrai

L'hermaphrodisme vrai désigne des cas rare d'intersexuation dans lesquels les individus disposent à la fois de tissus gonadiques mâles et femelles : ovaire, testicule, ovotestis.

Leur formule chromosomique est variable :

  • 46, XX dans 70 % des cas, avec une forte surreprĂ©sentation de personnes noires,
  • une forme de mosaĂŻcisme ou de chimĂ©risme dans 20 % des cas (gĂ©nĂ©ralement 46,XX/46,XY),
  • 46, XY dans 16 % des cas,
  • Dans les cas restants, une autre formule, notamment 47,XXY, 47,XYY, 45,XO, 46 X del X.

Le chromosome Y joue un rôle important dans la formation d'un testicule. La présence de deux chromosomes X conduit plus couramment à la formation d'un ovotestis. Néanmoins, ce n'est pas le chromosome Y qui détermine la différentiation du testicule, mais la présence de l'antigène HY.

La personne naît le plus souvent avec une ambiguïté sexuelle et la présence simultanée de tissus testiculaires et ovariens, conduisant au développement complet ou partiel de structures masculines (véritable pénis érectile et prostate) et féminines (vagin et utérus).

Les tissus ovariens (ovaires ou ovotestis) ont tendance à se retrouver sur le côté gauche tandis que les tissus testiculaires (testicule ou ovotestis) ont tendance à être sur le côté droit.

Distribution des paires de gonades chez les personnes hermaphrodites vraies[12]
Ovaire-testicule31 %
Ovotestis-ovaire30%
Ovotestis-ovotestis23 %
Ovotestis-testicule11 %
Ovotestis-autre5 %

Sur l'ensemble des gonades observées dans la population des hermaphrodites vrais, l'ovotestis est la gonade la plus fréquente (44 % des gonades observées), suivie par l'ovaire (33 %) puis le testicule (22 %).

Lorsqu'il y a un ovaire, il a souvent une apparence normale, parfois kystique. La plupart ne montrent pas de signe d'ovulation. Lorsqu’il y a un testicule, on le retrouve généralement dans le scrotum, moins souvent en position ovarienne, et parfois dans la région inguinale. Il est souvent plus petit que la normale. Les tissus ont les mêmes anomalies que dans les ovotestis, avec néanmoins une spermatogenèse parfois observée[12].

Rarement, des grossesses sont observées chez des personnes de caryotype 46, XX et plus rarement 46,XX/46,XY. Selon le niveau de développement utérin et l'accompagnement médical, il est possible que ces grossesses arrivent à terme. La fertilité masculine est en revanche considérablement réduite : la spermatogenèse n'a été observée que dans deux cas, l'un d'eux aurait possiblement donné naissance à un enfant en tant que père[7].

La médecine ne dénombre officiellement qu'environ 500 cas d'hermaphrodisme vrai[7].

Environ 75 % des personnes hermaphrodites vraies sont assignés masculins ; l'explication la plus vraisemblable est que la plupart des personnes hermaphrodites vraies disposent d'un phallus à la naissance. La tendance est maintenant d'assigner plus souvent ces personnes comme femme, en regard du caractère fonctionnel de leurs différents organes génitaux, en particulier dans une perspective reproductive[7].

Pseudo-hermaphrodisme

  • Le pseudo-hermaphrodite fĂ©minin a des ovaires et un caryotype (46, XX) avec des organes gĂ©nitaux externes ambigus. Il est dĂ» Ă  une exposition prĂ©coce aux androgènes, ce qui peut se rencontrer si le sujet a une hyperplasie congĂ©nitale des surrĂ©nales, si sa mère a une tumeur des surrĂ©nales ou a Ă©tĂ© exposĂ©e enceinte Ă  un traitement hormonal inappropriĂ©. Les organes gĂ©nitaux externes (OGE) sont virilisĂ©s de façon variable, le clitoris peut avoir la forme d'un pĂ©nis avec hypospadias, le scrotum est toujours vide, il y a parfois une oblitĂ©ration vaginale. Les organes gĂ©nitaux internes (vagin, utĂ©rus, ovaires et trompes) sont normaux. La grossesse est possible.
  • Le pseudo-hermaphrodite masculin a des testicules et un caryotype (46, XY) masculins associĂ©s Ă  des voies gĂ©nitales et des organes gĂ©nitaux externes (OGE) ambigus. Il est dĂ» Ă  un dĂ©ficit en dihydrotestostĂ©rone (la DHT, hormone dĂ©rivant de la testostĂ©rone et rĂ©gulant la diffĂ©renciation masculine des organes gĂ©nitaux externes) par dĂ©ficit par mutation de la 5 alpha-rĂ©ductase. Il peut ĂŞtre dĂ» Ă  un dĂ©ficit en testostĂ©rone, dans ce cas les canaux de Wolff et de MĂĽller, dĂ©pendants des androgènes pour leur diffĂ©renciation sont Ă©galement touchĂ©s. Dans les dĂ©ficiences isolĂ©es en 5 alpha rĂ©ductase, les OGE peuvent Ă©voluer vers une diffĂ©renciation masculine Ă  la pubertĂ©, sous l'effet de la production pubertaire de testostĂ©rone, le sujet peut avoir des enfants normalement.

Hermaphrodisme et sociétés

Il ne faut pas confondre l'hermaphrodite vrai (terme que la plupart des personnes concernées rejettent), qui a du tissu testiculaire et ovarien, avec l'androgyne, dont l'apparence seulement prête à confusion mais dont les caractères sexuels sont exprimés normalement, ni avec certaines personnes trans qui demandent une orthosexuation.

Hermaphrodisme et politique

Les militants intersexes sensibilisent les populations sur la différence qui existe entre eux-mêmes et les personnes trans, les travestis, les transformistes, le milieu transgenre ou le troisième sexe que reconnaissent certaines sociétés.

Par ailleurs dans les sociétés musulmanes où la part de la fille dans l'héritage représente la moitié de celle du garçon, les hermaphrodites, vrais ou pseudo, ont très tôt posé problème. En l'absence des données scientifiques dont nous disposons aujourd'hui, les juristes du IXe siècle décidaient du sexe de l'hermaphrodite en examinant l'emplacement de son orifice urinaire.

Quelques hermaphrodites connus ou supposés

Voici quelques hermaphrodites connus :

Représentations dans la culture populaire

Photo, cinéma, télévision

Littérature et bande dessinée

Chanson

Jeux vidéo

Notes et références

  1. Hermaphrodisme sur le site de l'Encyclopædia Universalis
  2. (en)Hermaphrodism, A primer on the biology, ecology and evolution of dual sexuality, John C. Avise, Columbia University Press, 2011 (ISBN 978-0-231-52715-6)
  3. Christine Vassiliadis, « Évolution et maintien de l'androdioécie Étude théorique et approches expérimentales chez Phillyrea angustifolia L = Evolution and maintenance of androdioecy. Theoretical study and experimental approaches on Phillyrea angustifolia L », travaux universitaires - thèse nouveau doctorat, 1999, bibl. : 153 ref. (No : 99 LIL1 0204) (Fiche INIST/CNRS).
  4. Philippe Jarne et Bernard Delay, chercheurs à l’Institut des sciences de l’évolution, unité associée CNRS-Université Montpellier 2.
  5. Micheline Martoja, Mollusques, Institut océanographique, , p. 95.
  6. « Distingue-t-on encore les sexes chez les hermaphrodites ? », sur Science & Vie, consulté le 2 octobre 2017.
  7. « La fertilité chez les hommes hermaphrodites vrais est grandement réduite. La spermatogenèse n'a été documentée que chez deux individus, l'un ayant apparemment donné naissance à une fille, néanmoins il n'a pas été mentionné de tests prouvant sa paternité. »
    (en) True hermaphroditism: geographical distribution, clinical findings, chromosomes and gonadal histology, G. Krob, A. Braun, U. Kuhnle, 1994 DOI 10.1007/BF02000779
  8. (en)Hermaphrodite, Kevin A. Rosenfield dans Encyclopedia of Animal Cognition and Behavior, Springer, 2018 DOI 10.1007/978-3-319-47829-6_329-1
  9. Elsa Dorlin, Sexe, genre et sexualités, Paris, PUF, 2008, p. 33.
  10. (en)Changing the nomenclature/taxonomy for intersex: a scientific and clinical rationale, AD. Dreger, C. Chase, A. Sousa, PA. Gruppuso PA, J. Frader, Journal of Pediatric Endocrinology & Metabolism. 18 (8): 729–33, août 2005, DOI 10.1515/jpem.2005.18.8.729
  11. « Pathologies de la différenciation sexuelle d'origine génétique et hormonale », sur embryology.ch (consulté le ).
  12. (en) The gonads of human true hermaphrodites, W. A. van Niekerk, A. E. Retief, 1981, DOI 10.1007/BF00284158
  13. Voir sur lesdessousdusport.fr.
  14. Entretien avec la danseuse Noor, 2012
  15. Voir sur ici.tou.tv.
  16. Voir sur cavi.univ-paris3.fr.
  17. « Accueil / Home », sur editions2l (consulté le )

Voir aussi

Bibliographie

  • Jean-Yves Tamet, DiffĂ©renciation sexuelle et identitĂ©s, Ă©ditions In Press, Paris, 2012

Articles connexes

Liens externes

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