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Flérovium

Le flĂ©rovium (symbole Fl) est l'Ă©lĂ©ment chimique de numĂ©ro atomique 114. Il correspond Ă  l'ununquadium (Uuq) de la dĂ©nomination systĂ©matique de l'IUPAC, et est encore appelĂ© Ă©lĂ©ment 114 dans la littĂ©rature. Il a Ă©tĂ© synthĂ©tisĂ© pour la premiĂšre fois en dĂ©cembre 1998 par une rĂ©action 244Pu (48Ca, 3n) 289Fl au Flerov Laboratory for Nuclear Reactions (FLNR) de l'Institut unifiĂ© de recherches nuclĂ©aires (JINR) situĂ© Ă  Doubna, dans l'oblast de Moscou. L'IUPAC a validĂ© son identification le 1er juin 2011[5] et lui a donnĂ© son nom dĂ©finitif le 30 mai 2012[6] en rĂ©fĂ©rence au FLNR.

Il s'agit d'un transactinide trĂšs radioactif, dont l'isotope le plus stable, le 289Fl, a une pĂ©riode radioactive d'environ 2,6 s. Il possĂ©derait cependant un isomĂšre nuclĂ©aire 289mFl dont la demi-vie atteindrait plusieurs dizaines de secondes, ce qui serait la plus longue jamais observĂ©e pour un Ă©lĂ©ment superlourd. Selon la thĂ©orie MM (Microscopic-Macroscopic) dĂ©crivant le noyau atomique, l'isotope 298Fl, avec le « nombre magique » de 184 neutrons, pourrait ĂȘtre au centre d'un Ăźlot de stabilitĂ© prĂ©dit par le modĂšle en couches de la structure nuclĂ©aire des atomes.

Le flérovium présenterait des affinités avec la famille des métaux pauvres, bien qu'on ait initialement suspecté un comportement de gaz rare induit par une configuration électronique modifiée par des effets quantiques de couplage spin-orbite et d'électrodynamique quantique[7].

La validation par l'IUPAC de l'observation du flérovium est la suite logique de celle de la caractérisation du copernicium, qui impliquait de facto la validation des données expérimentales relatives au flérovium à travers la chaßne de désintégrations[8] :

.

SynthĂšse

Une Ă©quipe de l'Institut unifiĂ© de recherches nuclĂ©aires (JINR) Ă  Doubna en Russie a publiĂ©[9] en janvier 1999 avoir bombardĂ© une cible de plutonium 244 avec des ions calcium 48, produisant un unique atome identifiĂ© comme du 289Fl avec une dĂ©sintĂ©gration α Ă  9,67 MeV en 30 s. Cette observation n'a toutefois pas pu ĂȘtre renouvelĂ©e, et on suppose qu'il pourrait s'agir d'un isomĂšre mĂ©tastable 289mFl.

La mĂȘme Ă©quipe a publiĂ©[10] en juillet 1999 avoir remplacĂ© la cible de plutonium 244 par du plutonium 242 afin de produire d'autres isotopes et obtenu deux atomes de 287Fl avec une dĂ©sintĂ©gration α Ă  10,29 MeV en 5,5 s. LĂ  encore, l'observation n'a pu ĂȘtre renouvelĂ©e, et on l'attribue Ă  un possible isomĂšre mĂ©tastable 287mFl.

La synthĂšse Ă  prĂ©sent confirmĂ©e des premiers noyaux de flĂ©rovium a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©e en juin 1999 lorsque la mĂȘme Ă©quipe a repris l'expĂ©rience rĂ©alisĂ©e avec le plutonium 244 : deux atomes de flĂ©rovium ont Ă©tĂ© Ă  nouveau produits, avec une dĂ©sintĂ©gration α Ă  9,82 MeV en 2,6 s[11]. Cette observation a Ă©tĂ© attribuĂ©e dans un premier temps Ă  du 288Fl en raison des observations prĂ©cĂ©dentes, mais une analyse approfondie a permis de l'attribuer de façon certaine Ă  du 289Fl[8].

48
20
Ca
+ 244
94
Pu
⟶ 292
144
Fl*
⟶ 289
144
Fl
+ 3 1
0
n
.

La pĂ©riode radioactive thĂ©orique de la dĂ©sintĂ©gration α des isotopes du flĂ©rovium est conforme aux observations[12] - [13]. L'isotope 298Fl aurait une pĂ©riode radioactive thĂ©orique de 17 jours[14] - [15].

La synthÚse du 283Cn, publiée en mai 2009[16], est venue confirmer indirectement les résultats obtenus précédemment sur le 287Fl (ainsi que sur le 291Lv).

Le tableau ci-dessous résume l'état de l'art en matiÚre de production d'isotopes du flérovium :

Ion Cible Isotope Statut de l'expérience
76Ge 208Pb 284Fl Échec[17]
54Cr 232Th 286Fl Réaction non publiée
50Ti 238U 288Fl Réaction non publiée
48Ca 244Pu 292Fl SuccĂšs
48Ca 242Pu 290Fl SuccĂšs
48Ca 239Pu 287Fl Réaction non publiée
40Ar 248Cm 288Fl Réaction non publiée
36S 249Cf 285Fl Réaction non publiée

Propriétés

Des expériences assez complexes d'adsorption de 287Fl sur de l'or ont été réalisées au printemps 2007 par des équipes du Flerov Laboratory for Nuclear Reactions (FLNR, au sein du JINR à Dubna, en Russie) et de l'Institut Paul Scherrer (PSI, dans le canton d'Argovie, en Suisse), qui ont suggéré un comportement en accord avec celui attendu pour un gaz rare volatil[18] ; ces résultats viennent appuyer des études théoriques indiquant que le flérovium pourrait avoir le comportement d'un gaz rare en raison d'effets relativistes dans son cortÚge électronique qui en modifieraient la configuration[7].

Îlot de stabilitĂ© : isotope 298 du flĂ©rovium

La thĂ©orie MM (Microscopic-Macroscopic) dĂ©crivant la structure nuclĂ©aire suggĂšre de rechercher l'hypothĂ©tique « Ăźlot de stabilitĂ© » autour du nuclĂ©ide 298Fl, qui serait « doublement magique » avec 114 protons et 184 neutrons. Cela pousse Ă  crĂ©er des isotopes de flĂ©rovium plus riches en neutrons que ceux synthĂ©tisĂ©s jusqu'Ă  prĂ©sent, qui demeurent trĂšs instables et se dĂ©sintĂšgrent par fission spontanĂ©e (produisant une variĂ©tĂ© de radionuclĂ©ides), dĂ©sintĂ©gration α, Ă©mission de positron ou capture Ă©lectronique (donnant de l'Ă©lĂ©ment 113). La difficultĂ© est alors de trouver la combinaison de l'ion lourd et de la cible qui permettra de synthĂ©tiser un noyau comportant exactement 184 neutrons pour 114 protons : il faudrait par exemple utiliser des ions calcium 50 sur une cible plutonium 248 pour avoir le compte juste, ce qui n'est pas envisageable compte tenu de l'extrĂȘme difficultĂ© Ă  obtenir des quantitĂ©s suffisantes de 50Ca et surtout de 248Pu. L'idĂ©e alternative serait alors de procĂ©der Ă  la quasi-fusion de noyaux massifs, en misant sur le caractĂšre stabilisateur des couches nuclĂ©aires saturĂ©es qui tendrait Ă  orienter les rĂ©actions nuclĂ©aires vers la production de noyaux doublement sphĂ©riques, via par exemple la rĂ©action :

204
80
Hg
+ 136
54
Xe
⟶ 298
114
Fl
+ 40
20
Ca
+ 2 1
0
n

dans laquelle les nuclĂ©ides 298Fl et 40Ca sont « doublement magiques » — du moins si 114 est bien un nombre magique de protons dans un noyau ayant 184 neutrons comme l'affirme la thĂ©orie MM.

Notes et références

  1. (en) Darleane C. Hoffman, Diana M. Lee et Valeria Pershina, « Transactinide Elements and Future Elements », The Chemistry of the Actinide and Transactinide Elements,‎ , p. 1652-1752 (ISBN 978-94-007-0210-3, DOI 10.1007/978-94-007-0211-0_14, Bibcode 2011tcot.book.1652H, lire en ligne)
  2. (en) Burkhard Fricke, « Superheavy elements a prediction of their chemical and physical properties », Structure and Bonding, vol. 21,‎ , p. 89-144 (DOI 10.1007/BFb0116498, lire en ligne)
  3. (en) Andreas Hermann, JĂŒrgen FurthmĂŒller, Heinz W. GĂ€ggeler et Peter Schwerdtfeger, « Spin-orbit effects in structural and electronic properties for the solid state of the group-14 elements from carbon to superheavy element 114 », Physicar Review B, vol. 82, no 15,‎ , article no 155116 (DOI 110.1103/PhysRevB.82.155116, Bibcode 2010PhRvB..82o5116H, lire en ligne)
  4. Mark Winter, « WebElements – Element 114 », The University of Sheffield & WebElements Ltd, UK, (consultĂ© le )
  5. (en) « IUPAC International Union of Pure and Applied Chemistry – 9 juin 2011 »(Archive.org ‱ Wikiwix ‱ Archive.is ‱ Google ‱ Que faire ?) (consultĂ© le ) « News: Discovery of the Elements with Atomic Number 114 and 116. » DOI 10.1351/PAC-REP-10-05-01
  6. (en) IUPAC International Union of Pure and Applied Chemistry – 30 mai 2012 « Element 114 is Named Flerovium and Element 116 is Named Livermorium »
  7. (en) Gas Phase Chemistry of Superheavy Elements : ConfĂ©rence de Heinz W. GĂ€ggeler, Novembre 2007 — Page consultĂ©e le 07/07/2009.
  8. (en) Oganessian et al., « Measurements of cross sections for the fusion-evaporation reactions 244Pu(48Ca,xn)292−x114 and 245Cm(48Ca,xn)293−x116 » dans Phys. Rev. C, vol. 6, n° 9, 2004, p. 054607. Lien direct consultĂ© le 03/03/2008.
  9. (en) Oganessian et al., « Synthesis of Superheavy Nuclei in the 48Ca + 244Pu Reaction », dans Phys. Rev. Lett., vol. 83, 1999, p. 3154-3157(4). Lien direct consulté le 3 mars 2008.
  10. (en) Oganessian et al., « Synthesis of nuclei of the superheavy element 114 in reactions induced by 48Ca », dans Nature, vol. 400, 15/07/1999, p. 242-245(4). Lien direct consulté le 03/03/2008.
  11. (en) Oganessian et al., Synthesis of superheavy nuclei in the 48Ca+244Pu reaction: 288114 dans Phys. Rev. C, vol. 62, 2000, p. 041604. Lien direct consulté le 03/03/2008.
  12. (en) P. Roy Chowdhury, C. Samanta, D. N. Basu, « α decay half-lives of new superheavy elements », Phys. Rev. C, vol. 73,‎ , p. 014612 (DOI 10.1103/PhysRevC.73.014612, lire en ligne)
  13. (en) C. Samanta, P. Roy Chowdhury, D. N. Basu, « Predictions of alpha decay half lives of heavy and superheavy elements », Nucl. Phys. A, vol. 789,‎ , p. 142–154 (DOI 10.1016/j.nuclphysa.2007.04.001, lire en ligne)
  14. (en) P. Roy Chowdhury, C. Samanta, D. N. Basu, « Search for long lived heaviest nuclei beyond the valley of stability », Phys. Rev. C, vol. 77,‎ , p. 044603 (DOI 10.1103/PhysRevC.77.044603, lire en ligne)
  15. (en) P. Roy Chowdhury, C. Samanta, D. N. Basu, « Nuclear half-lives for α-radioactivity of elements with 100 ≀ Z ≀ 130 », At. Data & Nucl. Data Tables, vol. 94,‎ , p. 781–806 (DOI 10.1016/j.adt.2008.01.003, lire en ligne)
  16. « Discovery of the element with atomic number 112 »(Archive.org ‱ Wikiwix ‱ Archive.is ‱ Google ‱ Que faire ?) (consultĂ© le )
  17. Par fusion froide en 2003 au GANIL de Caen, dans le Calvados
  18. (en) Rapport 2008 du FLNR au JINR : « Chimie des éléments 112 et 114 », p. 87, consulté le 08/07/2009.

Voir aussi

Articles connexes

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