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Plutonium 238

Le plutonium 238, notĂ© 238Pu, est l'isotope du plutonium dont le nombre de masse est Ă©gal Ă  238 : son noyau atomique compte 94 protons et 144 neutrons avec un spin 0+ pour une masse atomique de 238,049 56 g/mol. Il est caractĂ©risĂ© par un excĂšs de masse de 46 163 keV et une Ă©nergie de liaison nuclĂ©aire par nuclĂ©on de 7 568,36 keV[1]. Un gramme de plutonium 238 prĂ©sente une radioactivitĂ© α de 633,2 GBq[2].

Plutonium 238
Description de cette image, également commentée ci-aprÚs
Cylindre de dioxyde de plutonium 238 238PuO2 luisant sous l'effet de sa propre chaleur de désintégration.

table

Général
Nom Plutonium 238
Symbole 238
94
Pu
144
Neutrons 144
Protons 94
Données physiques
Demi-vie 87,7 Â± 0,1 ans[1]
Produit de désintégration 234U
Masse atomique 238,0495582(12) u
Spin 0+
ExcĂšs d'Ă©nergie 46 163,1 Â± 1,1 keV[1]
Énergie de liaison par nuclĂ©on 7 568,361 Â± 0,005 keV[1]
Production radiogénique
Isotope parent Désintégration Demi-vie
238
93
Np
ÎČ− 2,099(2) jours
238
95
Am
ÎČ+ 98(2) min
242
96
Cm
α 162,8(2) jours
Désintégration radioactive
DĂ©sintĂ©gration Produit Énergie (MeV)
α 234
92
U
5,5932

Durant les années 1960 et 1970, les scientifiques du Laboratoire américain de Los Alamos ont mis au point une utilisation du plutonium 238 pour fournir l'énergie nécessaire à des pacemakers[3].

Propriétés nucléaires

Le plutonium 238 donne de l'uranium 234 par dĂ©sintĂ©gration α avec une Ă©nergie de dĂ©sintĂ©gration de 5,593 MeV, une puissance spĂ©cifique d'environ 567 W/kg et une pĂ©riode radioactive de 87,75 ans :

238
94
Pu
234
92
U
.

Il appartient ainsi Ă  la mĂȘme famille de dĂ©sintĂ©gration que l'uranium 238.

Le 234U donne ensuite, Ă  son tour, du thorium 230 par dĂ©sintĂ©gration α avec une pĂ©riode de 245 500 ans, donc Ă  un rythme relatif extrĂȘmement faible. L'essentiel de la radioactivitĂ© du plutonium 238 correspond donc Ă  la dĂ©sintĂ©gration de cet Ă©lĂ©ment.

Le 238Pu est donc un puissant émetteur de rayonnement α, ce qui en fait l'isotope de loin le plus utilisé dans les générateurs de chaleur et les générateurs thermoélectriques à radioisotopes qui alimentent les sondes spatiales et les équipements de haute technologie requérant une source d'énergie fiable sans maintenance (typiquement les dispositifs sous-marins de renseignement militaire) ; l'usage de polonium 210 à cette fin a été abandonné, malgré sa puissance, en raison de sa trop brÚve durée de vie.

Utilisation spatiale dans les RTG

RTG de Cassini. La mission de la sonde Cassini Ă©tait initialement de onze ans, d' Ă  juin 2008. Elle a pu ĂȘtre Ă©tendue une premiĂšre fois jusqu'en 2010, puis une seconde fois jusqu'en 2017, grĂące Ă  la bonne durĂ©e de vie de ses RTG.

Les sondes spatiales destinées à explorer les planÚtes lointaines ne peuvent pas dépendre de panneaux solaires : ces sondes sont donc équipées de générateurs à radioisotope afin de prendre le relais des panneaux solaires au-delà de l'orbite de Mars, comme les sondes Pioneer 10, Pioneer 11, Voyager 1, Voyager 2, Galileo, Ulysses, Cassini-Huygens, ou encore New Horizons. Ces générateurs permettent également aux robots déposés en surface des planÚtes de fonctionner la nuit, lorsque les panneaux solaires sont dans l'obscurité : les six Apollo Lunar Surface Experiments Packages déposés sur la Lune utilisent des GTR, tout comme les deux sondes martiennes Viking 1 et 2 et le rover Mars Science Laboratory.

La puissance thermique Pth gĂ©nĂ©rĂ©e par le plutonium 238 dĂ©croĂźt Ă  partir de la puissance initiale Pth0 en fonction du temps t Ă©coulĂ©, exprimĂ© en annĂ©es, Ă  raison de : Pth( t ) = Pth0 × 0,5 ( t  ⁄  87,75 ) ; ce qui signifie qu'elle perd 1 – 0,5 ( 1  ⁄  87,75 ) = 0,787 % de puissance thermique par an. Dans le cas, par exemple, des sondes du programme Voyager, lancĂ©es en 1977, la puissance initiale des gĂ©nĂ©rateurs Ă©tait de 470 W, et ne devait plus ĂȘtre 23 ans plus tard, en 2001, que de 392 W. Cependant :

  • compte tenu de la diminution de la chaleur produite par les Ă©lĂ©ments chauffant en oxyde de plutonium, la tempĂ©rature de ceux-ci diminue (ainsi d'ailleurs que celle du radiateur) ;
  • le rendement de conversion des thermocouples bimĂ©talliques convertissant en diffĂ©rence de potentiel le gradient de tempĂ©rature gĂ©nĂ©rĂ© par la dĂ©sintĂ©gration du plutonium 238 diminue ; le rendement de conversion est sensiblement proportionnel Ă  l'Ă©cart de tempĂ©rature entre les points chauds et points froids des thermocouples, lequel est proportionnel Ă  la puissance thermique qui diminue ;
  • en outre, un vieillissement des thermocouples se produit.

C'est ainsi que la puissance observĂ©e des gĂ©nĂ©rateurs de Voyager 1 et Voyager 2 en 2001 n'Ă©tait plus respectivement que de 315 W et 319 W.

La variation de puissance électrique relative est ainsi grossiÚrement proportionnelle au carré de la puissance thermique produite :

  • ( ( 315 + 319 )  ⁄  2)  ⁄  470 = 317  ⁄  470 = 0,6745
  • ( 392  ⁄  470 ) 2 = 0,6953
  • le faible Ă©cart restant correspondant au vieillissement des thermocouples.

On peut voir ainsi que la puissance Ă©lectrique dĂ©livrĂ©e Pe varie comme : Pe( t ) = Pe0 × 0,5 ( 2 t  ⁄  87,75 ) ; ce qui revient Ă  dire que tout se passe comme si la pĂ©riode du radioisotope Ă©tait divisĂ©e par 2.

On peut Ă©galement dire que les thermocouples fonctionnaient Ă  80 % de leur rendement nominal.

La mission New Horizons, lancĂ©e le pour atteindre Pluton le , emporte prĂšs de kg de plutonium 238 dans son RTG, qui fournissait une puissance Ă©lectrique de l'ordre de 240 W au lancement, contre environ 190 W prĂ©vus Ă  destination, soit environ 9,5 ans aprĂšs.

Histoire

Le plutonium 238 est le premier isotope du plutonium à avoir été synthétisé par l'équipe de Glenn Seaborg en 1941[4] par bombardement d'uranium 238 par des ions deutérium D+ :

2
1
D
+ 238
92
U
⟶ 240
93
Np
* ⟶ 2 1
0
n
+ ( 238
93
Np
⟶ 238
94
Pu
+ e− + Îœe).

Production

Principe physique

On le produit par capture neutronique en irradiant du neptunium 237 isolĂ© lors du traitement du combustible nuclĂ©aire usĂ© : pour fixer les idĂ©es, 100 kg de combustible pour rĂ©acteur Ă  eau lĂ©gĂšre irradiĂ© pendant trois ans ne contient que 700 g de neptunium 237, qui doit d'abord ĂȘtre purifiĂ© avant irradiation pour produire le plutonium 238, lequel doit ensuite ĂȘtre Ă  son tour purifiĂ© en solution avant de pouvoir ĂȘtre utilisĂ© sous forme de dioxyde de plutonium 238PuO2 :

1
0
n
+ 237
93
Np
⟶ 238
93
Np
238
94
Pu
.

Réacteur nucléaire

Du plutonium 238 est Ă©galement produit au sein des rĂ©acteurs nuclĂ©aires Ă  la suite de capture neutronique successive sur l'uranium 235 et l'238 suivi de dĂ©sintĂ©gration ÎČ− et/ou dĂ©sintĂ©gration α[5].

Situation mondiale

Les États-Unis ont produit du plutonium 238 sur le site de Savannah River jusqu'Ă  la fermeture de ce dernier en 1988. Le stock rĂ©siduel de plutonium 238 a pu alimenter la consommation amĂ©ricaines jusqu'en 1993, date Ă  laquelle les États-Unis se sont approvisionnĂ©s en Russie[6]. Face Ă  la demande en hausse de la NASA pour alimenter plusieurs projets dont les diffĂ©rents rovers martiens et Ă  des retards de livraison de la Russie[7], le dĂ©partement de l'Ă©nergie amĂ©ricain a relancĂ© la production de 238Pu d'abord en trĂšs petite quantitĂ©s en 2013, puis jusqu'Ă  50g en 2015 via un rĂ©acteur de recherche du laboratoire national d'Oak Ridge[8] - [9].

Notes et références

  1. (en) « Live Chart of Nuclides: 238
    94
    Pu
    144
    »
    , sur https://www-nds.iaea.org/, AIEA, (consulté le )
    .
  2. Los Alamos National Laboratory – The Actinide Research Quarterly: Summer 1997 NMT Division Recycles, Purifies Plutonium-238 Oxide Fuel for Future Space Missions.
  3. Kathy DeLucas, Jim Foxx et Robert Nance, « From heat sources to heart sources: Los Alamos made material for plutonium-powered pumper », sur Actinide Research Quarterly, Los Alamos National Laboratory, .
  4. Delphine Farmer, « An Elementary Problem: Artificial Atoms, Nobel Prizes, and Your Smoke Detectors », Berkeley Science Review.
  5. (en) Cornelis H. M. Broeders et GĂŒnther Kessler, « Fuel Cycle Options for the Production and Utilization of Denatured Plutonium », Nuclear Science and Engineering, vol. 156, no 1,‎ , p. 2 (DOI 10.13182/NSE07-A2681).
  6. Commonly asked questions about radioisotope power systms – space batteries, juillet 2005.
  7. (en) Brian Berger, « Russia Withholding Plutonium NASA Needs for Deep Space Exploration », sur https://spacenews.com/, (consulté le )
  8. (en) Ron Walli, « ORNL achieves milestone with plutonium-238 sample », Oak Ridge National Laboratory, (consulté le )
  9. (en) Chelsea Harvey, « This is the fuel NASA needs to make it to the edge of the solar system - and beyond », The Washington Post, (consulté le )

Annexes

Articles connexes

Liens externes


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