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Isotopes du plomb

Le plomb (Pb, numéro atomique 82) possède 38 isotopes connus, de nombre de masse variant de 178 à 215, ainsi que 46 isomères nucléaires. Quatre de ces isotopes, 204Pb, 206Pb, 207Pb et 208Pb, sont stables, ou du moins ont été observés stables jusqu'à présent, puisqu'ils sont tous soupçonnés de se désintégrer par désintégration α en isotopes du mercure correspondants, avec des demi-vies extrêmement longues. Le plomb 204 est entièrement un nucléide primordial et pas un nucléide radiogénique. Les isotopes plomb 206, plomb 207, et plomb 208 sont les produits finaux de trois chaînes de désintégration, respectivement la chaine de l'uranium (ou du radium, 4n+2), de l'actinium (4n+3) et du thorium (4n+0). Chacun de ces isotopes est aussi à un certain pourcentage un nucléide primordial, produits par les supernovas. Le ratio du plomb 204 vis-à-vis des autres isotopes primordiaux étant connu et stable, une variation peut servir à estimer la quantité supplémentaire d'isotopes radiogéniques présente dans la roche, produite par la désintégration de l'uranium et du thorium (voir Datation par le plomb-plomb (en) et Datation par l'uranium-plomb).

Les quatre isotopes stables 204Pb, 206Pb, 207Pb et 208Pb sont présents dans la nature, cinq radioisotopes sont aussi présents à l'état de trace. La masse atomique standard du plomb est de 207,2(1) u.

Parmi les 34 radioisotopes du plomb, les plus stables sont 205Pb avec une demi-vie d'environ ~15,3 millions d'années suivi de 202Pb avec une demi-vie d'environ ~53 000 années. Tous les radioisotopes naturels ont une demi-vie comprise entre 22 ans et 27 minutes. Lorsqu'il est totalement ionisé, l'isotope 205Pb devient stable[1].

Les radioisotopes les plus légers dont on connait le mode de désintégration (181Pb à 185Pb) se désintègrent principalement par désintégration α en isotopes du mercure. Au-delà, les isotopes plus lourds mais plus légers que les isotopes stables (187Pb à 200Pb) se désintègrent principalement par émission de positron+) en isotopes du thallium ; 186Pb est à la frontière entre les deux groupes, se désintégrant selon les deux modes. Les isotopes les plus proches des isotopes stables (201Pb, 202Pb, 203Pb et 205Pb) se désintègrent eux par capture électronique, également en isotopes du thallium. Les six radioisotopes les plus lourds se désintègrent eux quasi exclusivement par désintégration β en isotopes du bismuth.

En raison de la présence de plomb dans toutes les chaînes de désintégration majeures (séries du radium, du thorium et de l'actinium), plusieurs isotopes du plomb ont reçu des appellations historiques, aujourd'hui tombées en désuétude.

Isotopes notables

Plomb naturel

Le plomb a ceci de particulier qu'il est l'aboutissement des trois chaînes de désintégration radioactives présentes dans la nature : le 208Pb (majoritaire) est le produit de désintégration ultime, stable, du thorium 232, le 206Pb est celui de l'uranium 238, et le 207Pb est celui de l'uranium 235. Les quantités relatives des différents isotopes stables du plomb ont donc évolué au cours du temps, un phénomène à l'origine de la datation par le plomb-plomb (en). Les isotopes radiogéniques sont largement majoritaires.

Le plomb naturel est donc constitué des quatre isotopes stables 204Pb (le seul non radiogénique), 206Pb, 207Pb et 208Pb, ainsi que de traces des radioisotopes présents dans les trois chaînes de désintégration majeures : 209Pb comme produit de désintégration de clusters de 223Ra qui a lieu dans la chaîne de désintégration de 235U, 210Pb et 214Pb comme produits de désintégration intermédiaires de 238U, 211Pb comme produit de désintégration intermédiaire de 235U, et 212Pb comme intermédiaire dans la chaîne de désintégration du 232Th. Parmi ces radioisotopes, seul le plomb 210 (demi-vie de 22,2 années) est présent en quantités « appréciables » (quelques nanogrammes par tonne de roche) ; les autres ont tous des demi-vies trop courtes (quelques heures) pour être quantifiables dans le sol.

Isotope Abondance

(pourcentage molaire)

Gamme de

variation naturelle

204Pb 1,4 (1) % 1,04 - 1,65 %
206Pb 24,1 (1) % 20,84 - 27,48 %
207Pb 22,1 (1) % 17,62 - 23,65 %
208Pb 52,4 (1) % 51,28 - 56,21 %

Plomb 204

Le plomb 204 est l'un des quatre isotopes stables du plomb, le seul qui ne soit pas l'aboutissement d'une chaîne de désintégration radioactive majeure, et le plus rare dans la nature (moins de 2 %).

Plomb 205

Avec une demi-vie de 15,3 Ma, le plomb 205 fait partie du petit groupe des radioactivités éteintes.

Plomb 206

Le plomb 206 fait partie de la chaîne de désintégration du radium 226[alpha 1], il en constitue l'aboutissement stable. Il était historiquement appelé radium G.

Plomb 207

Le plomb 207 fait partie de la chaîne de désintégration de l'uranium 235, il en constitue l'aboutissement stable. Il était historiquement appelé actinium D.

Plomb 208

Le plomb 208 fait partie de la chaîne de désintégration du thorium 232, il en constitue l'aboutissement stable. Il était historiquement appelé thorium D. C'est l'isotope le plus abondant, représentant plus de la moitié du plomb naturel.

Plomb 210

Le plomb 210, radioactif de période 22,26 a, fait partie de la chaîne de désintégration de l'uranium 238 (de période 4,47 Ga), via le radium 226 de période 1 600 a (210Pb a historiquement été appelé radium D ou radio-plomb au tout début du XXe siècle[2]) et le radon 222 de période 3,82 j.

Le plomb 210 est présent naturellement dans la croûte terrestre (et dans les gisements de plomb) en raison de sa production à partir de l'uranium, et dans l'atmosphère en raison de sa production par le radon 222 atmosphérique (lui-même issu de l'uranium de la croûte). Il a aussi été produit en quantités importantes lors des essais nucléaires atmosphériques.

Dans certaines applications technologiques nécessitant des niveaux très bas de radioactivité, le plomb 210 interdit l'utilisation de plomb d'extraction récente. On peut alors voir l'utilisation de plomb archéologique.

La datation par le plomb 210 est une méthode de datation radiométrique.

Plomb 211

Le plomb 211 fait partie de la chaîne de désintégration de l'uranium 235, il était historiquement appelé actinium B.

Plomb 212

Le plomb 212 fait partie de la chaîne de désintégration du thorium 232, il était historiquement appelé thorium B. C'est un émetteur β à demi-vie relativement courte (10,6 h), qui est considéré comme un candidat intéressant pour des applications en alpha-immunothérapie, comme précurseur du bismuth 212, de demi-vie 61 min et qui est émetteur alpha (primaire ou secondaire selon sa voie de désintégration).

Plomb 214

Le plomb 214 fait partie de la chaîne de désintégration du radium 226[alpha 1], il était historiquement appelé radium B.

Table des isotopes

Symbole
de l'isotope
Z (p) N (n) Masse isotopique (u) Demi-vie Mode(s) de
désintégration[3] - [n 1]
Isotope(s)

fils[n 2]

Spin

nucléaire

Énergie d'excitation
178Pb 82 96 178,003830(26) 0,23(15) ms 0+
179Pb 82 97 179,00215(21)# 3# ms 5/2-#
180Pb 82 98 179,997918(22) 4,5(11) ms 0+
181Pb 82 99 180,99662(10) 45(20) ms α (98 %) 177Hg 5/2-#
β+ (2 %) 181Tl
182Pb 82 100 181,992672(15) 60(40) ms
[55(+40-35) ms]
α (98 %) 178Hg 0+
β+ (2 %) 182Tl
183Pb 82 101 182,99187(3) 535(30) ms α (94 %) 179Hg (3/2-)
β+ (6 %) 183Tl
183mPb 94(8) keV 415(20) ms α 179Hg (13/2+)
β+ (rare) 183Tl
184Pb 82 102 183,988142(15) 490(25) ms α 180Hg 0+
β+ (rare) 184Tl
185Pb 82 103 184,987610(17) 6,3(4) s α 181Hg 3/2-
β+ (rare) 185Tl
185mPb 60(40)# keV 4,07(15) s α 181Hg 13/2+
β+ (rare) 185Tl
186Pb 82 104 185,984239(12) 4,82(3) s α (56 %) 182Hg 0+
β+ (44 %) 186Tl
187Pb 82 105 186,983918(9) 15,2(3) s β+ 187Tl (3/2-)
α 183Hg
187mPb 11(11) keV 18,3(3) s β+ (98 %) 187Tl (13/2+)
α (2 %) 183Hg
188Pb 82 106 187,980874(11) 25,5(1) s β+ (91,5 %) 188Tl 0+
α (8,5 %) 184Hg
188m1Pb 2578,2(7) keV 830(210) ns (8-)
188m2Pb 2800(50) keV 797(21) ns
189Pb 82 107 188,98081(4) 51(3) s β+ 189Tl (3/2-)
189mPb 40(30)# keV 1# min β+ (99,6 %) 189Tl (13/2+)
α (0,4 %) 185Hg
190Pb 82 108 189,978082(13) 71(1) s β+ (99,1 %) 190Tl 0+
α (0,9 %) 186Hg
190m1Pb 2614,8(8) keV 150 ns (10)+
190m2Pb 2618(20) keV 25 µs (12+)
190m3Pb 2658,2(8) keV 7,2(6) µs (11)-
191Pb 82 109 190,97827(4) 1,33(8) min β+ (99,987 %) 191Tl (3/2-)
α (0,013 %) 187Hg
191mPb 20(50) keV 2,18(8) min β+ (99,98 %) 191Tl 13/2(+)
α (0,02 %) 187Hg
192Pb 82 110 191,975785(14) 3,5(1) min β+ (99,99 %) 192Tl 0+
α (0,0061 %) 188Hg
192m1Pb 2581,1(1) keV 164(7) ns (10)+
192m2Pb 2625,1(11) keV 1,1(5) µs (12+)
192m3Pb 2743,5(4) keV 756(21) ns (11)-
193Pb 82 111 192,97617(5) 5# min β+ 193Tl (3/2-)
193m1Pb 130(80)# keV 5,8(2) min β+ 193Tl 13/2(+)
193m2Pb 2612,5(5)+X keV 135(+25-15) ns (33/2+)
194Pb 82 112 193,974012(19) 12,0(5) min β+ (100 %) 194Tl 0+
α (7,3×10−6 %) 190Hg
195Pb 82 113 194,974542(25) ~15 min β+ 195Tl 3/2#-
195m1Pb 202,9(7) keV 15,0(12) min β+ 195Tl 13/2+
195m2Pb 1759,0(7) keV 10,0(7) µs 21/2-
196Pb 82 114 195,972774(15) 37(3) min β+ 196Tl 0+
α (3×10−5 %) 192Hg
196m1Pb 1049,20(9) keV <100 ns 2+
196m2Pb 1738,27(12) keV <1 µs 4+
196m3Pb 1797,51(14) keV 140(14) ns 5-
196m4Pb 2693,5(5) keV 270(4) ns (12+)
197Pb 82 115 196,973431(6) 8,1(17) min β+ 197Tl 3/2-
197m1Pb 319,31(11) keV 42,9(9) min β+ (81 %) 197Tl 13/2+
TI (19 %) 197Pb
α (3×10−4 %) 193Hg
197m2Pb 1914,10(25) keV 1,15(20) µs 21/2-
198Pb 82 116 197,972034(16) 2,4(1) h β+ 198Tl 0+
198m1Pb 2141,4(4) keV 4,19(10) µs (7)-
198m2Pb 2231,4(5) keV 137(10) ns (9)-
198m3Pb 2820,5(7) keV 212(4) ns (12)+
199Pb 82 117 198,972917(28) 90(10) min β+ 199Tl 3/2-
199m1Pb 429,5(27) keV 12,2(3) min TI (93 %) 199Pb (13/2+)
β+ (7 %) 199Tl
199m2Pb 2563,8(27) keV 10,1(2) µs (29/2-)
200Pb 82 118 199,971827(12) 21,5(4) h β+ 200Tl 0+
201Pb 82 119 200,972885(24) 9,33(3) h CE (99 %) 201Pb 5/2-
β+ (1 %) 201Tl
201m1Pb 629,14(17) keV 61(2) s 13/2+
201m2Pb 2718,5+X keV 508(5) ns (29/2-)
202Pb 82 120 201,972159(9) 52,5(28)×103 a CE (99 %) 202Tl 0+
α (1 %) 198Hg
202m1Pb 2169,83(7) keV 3,53(1) h TI (90,5 %) 202Pb 9-
CE (9,5 %) 202Tl
202m2Pb 4142,9(11) keV 110(5) ns (16+)
202m3Pb 5345,9(13) keV 107(5) ns (19-)
203Pb 82 121 202,973391(7) 51,873(9) h CE 203Tl 5/2-
203m1Pb 825,20(9) keV 6,21(8) s TI 203Pb 13/2+
203m2Pb 2949,47(22) keV 480(7) ms 29/2-
203m3Pb 2923,4+X keV 122(4) ns (25/2-)
204Pb[n 3] 82 122 203,9730436(13) Observé stable[n 4] 0+
204m1Pb 1274,00(4) keV 265(10) ns 4+
204m2Pb 2185,79(5) keV 67,2(3) min 9-
204m3Pb 2264,33(4) keV 0,45(+10-3) µs 7-
205Pb 82 123 204,9744818(13) 15,3(7)×106 a CE 205Tl 5/2-
205m1Pb 2,329(7) keV 24,2(4) µs 1/2-
205m2Pb 1013,839(13) keV 5,55(2) ms 13/2+
205m3Pb 3195,7(5) keV 217(5) ns 25/2-
206Pb[n 3] - [n 5] 82 124 205,9744653(13) Observé stable[n 6] 0+
206m1Pb 2200,14(4) keV 125(2) µs 7-
206m2Pb 4027,3(7) keV 202(3) ns 12+
207Pb[n 3] - [n 7] 82 125 206,9758969(13) Observé stable[n 8] 1/2-
207mPb 1633,368(5) keV 806(6) ms TI 207Pb 13/2+
208Pb[n 9] 82 126 207,9766521(13) Observé stable[n 10] 0+
208mPb 4895(2) keV 500(10) ns 10+
209Pb 82 127 208,9810901(19) 3,253(14) h β 209Bi 9/2+
210Pb 82 128 209,9841885(16) 22,20(22) a β (100 %) 210Bi 0+
α (1,9×10−6 %) 206Hg
210mPb 1278(5) keV 201(17) ns 8+
211Pb 82 129 210,9887370(29) 36,1(2) min β 211Bi 9/2+
212Pb 82 130 211,9918975(24) 10,64(1) h β 212Bi 0+
212mPb 1335(10) keV 5(1) µs (8+)
213Pb 82 131 212,996581(8) 10,2(3) min β 213Bi (9/2+)
214Pb 82 132 213,9998054(26) 26,8(9) min β 214Bi 0+
215Pb 82 133 215,00481(44)# 36(1) s 5/2+#
  1. Abréviations :
    CE : capture électronique ;
    TI : transition isomérique.
  2. Isotopes stables en gras ; en gras et italique ceux stables à notre échelle de temps.
  3. Utilisé dans la datation par le plomb-plomb (en).
  4. Soupçonné de désintégration α en 200Hg avec une demi-vie supérieure à 140×1018 années.
  5. Produit de désintégration final de la chaîne de désintégration 4n + 2 de l'uranium 238.
  6. Soupçonné de désintégration α en 202Hg avec une demi-vie supérieure à 2,5×1021 années.
  7. Produit de désintégration final de la chaîne de désintégration 4n + 3 de l'uranium 235 (plutonium 239).
  8. Soupçonné de désintégration α en 203Hg avec une demi-vie supérieure à 1,9×1021 années.
  9. Produit de désintégration final de la chaîne de désintégration 4n du thorium 232.
  10. Nucléide le plus lourd observé stable, soupçonné de désintégration α en 204Hg avec une demi-vie supérieure à 2,6×1021 années.

Remarques

  • L'évaluation de la composition isotopique est valable pour la plupart des échantillons commerciaux, mais pas tous.
  • La précision de l'abondance isotopique et de la masse atomique est limitée par des variations. Les échelles de variations données sont normalement valables pour tout matériel terrestre normal.
  • Il existe des échantillons géologiques exceptionnels dont la composition isotopique est en dehors de l'échelle donnée. L'incertitude sur la masse atomique de tels spécimens peut excéder les valeurs données.
  • Les valeurs marquées # ne sont pas purement dérivées des données expérimentales, mais aussi au moins en partie à partir des tendances systématiques. Les spins avec des arguments d'affectation faibles sont entre parenthèses.
  • Les incertitudes sont données de façon concise entre parenthèses après la décimale correspondante. Les valeurs d'incertitude dénotent un écart-type, à l'exception de la composition isotopique et de la masse atomique standard de l'IUPAC qui utilisent des incertitudes élargies[4].

Notes et références

Notes

  1. Le radium 226 est lui-même un produit, d'assez longue demi-vie, de la chaîne de désintégration de l'uranium 238.

Références

  1. K Takahashi, R. N. Boyd, G. J. Mathews et K. Yokoi, « Bound-state beta decay of highly ionized atoms », Physical Review C, New York, NY, American Institute of Physics for the American Physical Society, vol. 36, no 4, (ISSN 0556-2813, OCLC 1639677, lire en ligne, consulté le )
  2. Ernest Rutherford (trad. Simon Villeneuve, relu par Cantons-de-l'Est), « Produits de transformation lente du radium », (consulté le )
  3. (en)Universal Nuclide Chart
  4. (en) « 2.5.7. Standard and expanded uncertainties », Engineering Statistics Handbook (consulté le )

Sources


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