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L’Argentine, en forme longue la République argentine (en espagnol : Argentina et República Argentina /reˈpuβlika aɾxenˈtina/[4]), est un pays d’Amérique du Sud partageant ses frontières avec le Chili à l’ouest, la Bolivie et le Paraguay au nord, le Brésil et l’Uruguay au nord-est, et enfin l’océan Atlantique à l'est et au sud. Son territoire américain continental couvre une grande partie du Cône Sud.
République argentine
(es) República Argentina
Devise | en espagnol : En Unión y Libertad (« Dans l'Union et la Liberté »), non officielle |
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Hymne |
en espagnol : Himno Nacional Argentino (« Hymne national argentin ») |
Fête nationale | |
· Événement commémoré |
Révolution de Mai ()
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Forme de l'État | République fédérale |
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Président de la Nation | Alberto Fernández |
Vice-présidente | Cristina Fernández de Kirchner |
Parlement | Congrès de la Nation |
Chambre haute Chambre basse |
Sénat Chambre des députés |
Langues officielles | Espagnol au niveau fédéral. Certaines provinces ont choisi en outre le guarani (Corrientes), le toba, le mocoví et le wichi (Chaco)[1] |
Capitale | Buenos Aires |
Plus grande ville | Buenos Aires |
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Superficie totale |
2 791 810 km2 (classé 8e) |
Superficie en eau | 1,1 |
Fuseau horaire | UTC -03:00 |
Indépendance | Espagne |
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Déclaration d'indépendance |
Gentilé | Argentin |
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Population totale (2020[2]) |
45 479 118 hab. (classé 32e) |
Densité | 16 hab./km2 |
Code ISO 3166-1 |
ARG, AR |
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Domaine Internet | .ar |
Indicatif téléphonique | +54 |
Organisations internationales | G20G24MercosurONUBADAPSCO (observateur)CPLP (observateur)OEIZPCASINBARGroupe de CairnsCDG15 |
Le , lors de la révolution de Mai, le pays n'accepte plus d'être gouverné par un vice-roi (gouverneur) et crée un gouvernement local, qui jure allégeance au roi d'Espagne. L'indépendance vis-à-vis de l'Espagne est définitivement déclarée le lors du Congrès de Tucumán[5].
La capitale est Buenos Aires, la langue prédominante est l'espagnol, dans sa variante rioplatense, la monnaie est le peso argentin et la religion nationale est le catholicisme. D'une superficie de 2 791 810 km2[6], l'Argentine a une densité de population de 16 habitants par km2.
L'Argentine fait partie des pays dits du Cône Sud et parmi les pays d'Amérique latine, il est, avec l'Uruguay et le Chili, celui où la culture européenne est la plus affirmée. L'Argentine est l'un des pays les plus développés du continent latino-américain. Le pays est également la troisième puissance économique d'Amérique latine après le Brésil et le Mexique, que ce soit en PIB nominal ou à parité de pouvoir d'achat (PPA).
En 2019, l'économie est en crise, l'industrie automobile ne fonctionne qu'à 15 % de la capacité installée, les ventes de voitures sont en chute libre (- 54 % sur un an), l'inflation atteint 54,7 % sur un an[7]. Le gouvernement sollicite un prêt du FMI, qui a débloqué en 2018 le versement de 56 milliards de dollars sur trois ans en contrepartie de coupes budgétaires. Près de 300 000 emplois ont été perdus en trois ans[8] et la pauvreté atteint son plus haut niveau ces 20 dernières années[9].
Sommaire
Origines du nom
Le nom « Argentina » (en français « Argentine ») dérive du nom latin argentum qui désignait l' argent (plata et prata en espagnol). Il fut probablement utilisé par les navigateurs vénitiens ou génois et son origine pourrait se trouver dans les cadeaux en argent faits par les peuples amérindiens aux explorateurs européens, notamment Sébastien Cabot, ou aux ornements qu'ils portaient[10]. Une autre explication pourrait être la légende de la Sierra de la Plata, trésor légendaire où le Río de la Plata était censé conduire.
Le nom « Río de la Plata » figure dans un atlas vénitien de 1536[11]. Le cartographe portugais Lopo Homem est le premier à utiliser le terme « Terra Argentea » sur une carte de 1554[12].
Le nom « Argentina » fut popularisé par le poème de Martín del Barco Centenera Argentina y Conquista del Rio de la Plata publié en 1602[13].
En 1860, « Argentina » devint le nom officiel de la République Argentine.
Géographie
Données générales
La surface totale de l'Argentine est répartie de la façon suivante (excepté l’Antarctique) :
- total : 2 766 891 km2 ;
- terre : 2 736 691 km2 ;
- eau : 30 200 km2.
L'Argentine s'étend sur 5 200 km (frontière avec le Chili) du nord au sud et 1 400 km d'est en ouest. Le territoire peut être divisé en quatre zones distinctes : les plaines fertiles de la pampa au centre du pays, le plat pays de la Patagonie au sud (s'étendant sur un gros quart sud du pays (28 %), jusqu'à la Terre de Feu), les plaines sèches du Gran Chaco au nord et enfin la région très élevée de la cordillère des Andes à l'ouest le long de la frontière avec le Chili dont le mont Aconcagua culmine à 6 960 m.
Le point culminant de l'Argentine — et de l'Amérique — est le mont Aconcagua. La dépression la plus profonde d'Amérique, la Laguna del Carbón à 105 m sous le niveau de la mer, se trouve aussi en Argentine, dans la province de Santa Cruz. Le centre géographique du pays est localisé dans la province de La Pampa.
Le climat est typique de façade orientale des continents, on rencontre un climat subtropical humide dans le nord et aride/subantarctique dans l'extrême sud du pays.
Régions géographiques
Le pays est traditionnellement divisé en différentes régions majeures.
Pampas
Les plaines à l'ouest et au sud de Buenos Aires. Appelée la pampa humide, cette région recouvre la plupart des provinces de Buenos Aires et de Córdoba ainsi que celles de Santa Fe et de la Pampa.
Cuyo
L'ouest de l'Argentine est dominé par l'imposante cordillère des Andes, à l'est se trouve une région aride appelée Cuyo, l'eau descendant des montagnes permet la viticulture et l'agriculture grâce à son irrigation, bien que le relief y soit accidenté.
Le point le plus haut du monde en dehors de l'Himalaya se retrouve en Argentine, au cerro Aconcagua, de 6 959 m. Parmi les plus hautes montagnes des Andes, une importante proportion se retrouve dans le pays. Le point le plus bas des Amériques se trouve aussi en Argentine, dans la province de Santa Cruz (Laguna del Carbón).
Gran Chaco
La région Gran Chaco se situe au nord du pays, avec des saisons humides et sèches, il permet l'élevage de bétail et la culture de coton. Il recouvre les provinces du Chaco et de Formosa. Il comprend également des forêts subtropicales où se développent la végétation et les animaux.
Mésopotamie argentine
Ce territoire se trouve entre le Rio Paraná et le Rio Uruguay, partagés entre les provinces de Corrientes et d'Entre Ríos, où l'on entretient le bétail et les Esteros del Iberá. Le climat de la province de Misiones est tropical. Les chutes d'Iguazú s'y trouvent.
Patagonie
Les steppes de la Patagonie dans les provinces de Neuquén, Río Negro, Chubut et Santa Cruz sont d'origines tertiaires. Le territoire est semi-aride au nord, froid et aride au sud, mais est constitué à l'ouest de plusieurs grands lacs et de forêts. La Terre de Feu, Antarctique et Îles de l'Atlantique Sud est froide et humide, modéré par l'influence océanique. Enfin, le nord peut être référé à Comahue.
Climat
En considérant la superficie du pays, les différences d'altitude (de −100 m à presque 7 000 m) et la longueur du pays (du 22e parallèle sud, correspondant dans l'hémisphère nord à la ville de La Havane, jusqu'au 55e parallèle sud, correspondant dans l'hémisphère nord à Copenhague, Moscou et la baie d'Hudson), une énorme diversité de climats coexiste dans le pays.
Le Nord est pratiquement tropical, quoique absolument toutes les régions du pays peuvent voir le mercure descendre à 0 °C.
Le Centre-Nord et l'Ouest connaissent des journées de chaleur insupportable l'été : la moyenne atteint 36 °C dans certains endroits, avec des températures très élevées avoisinant souvent les 45 °C.
L'hiver, la partie la plus septentrionale du pays enregistre des moyennes autour de 20 °C le jour, et de 10 °C la nuit, avec des périodes de 30 °C alternant avec des journées assez froides qui peuvent même rester en dessous de 10 °C, et des nuits proches de 0 °C. Les précipitations varient de 2 500 millimètres dans la jungle de Misiones, à 1 000 mm dans le Gran Chaco, et seulement 100 mm dans les régions les plus arides de l'Ouest argentin.
La Pampa concentre la majorité de la population et de la production du pays, grâce au climat tempéré à quatre saisons: les étés sont assez longs et chauds, avec des journées ayant une température moyenne de 30 °C et des nuits agréables à 17 °C, tandis que les hivers sont doux avec des journées ayant des températures moyennes de 15 °C et les nuits autour de 4 °C. Les gelées sont courantes pendant 3 à 4 mois, et les températures descendent souvent à −5 °C, mais rarement moins, quoique les records approchent les −10 °C. La neige, en revanche, est très rare étant donné que l'hiver est la saison la plus sèche. Les précipitations vont de 1 200 mm dans l'est, à seulement 150 mm dans l'Ouest du pays.
La Patagonie est la région la plus froide, mais le climat varie énormément d'un endroit à l'autre : il est extrêmement sec mais assez modéré sur la côte, très sec et rigoureux au centre, et très humide et un peu moins rigoureux dans les vallées des Andes, où l'air du Pacifique pénètre dans le continent. Sur la côte, il fait rarement moins de −10 °C, et l'été, il peut faire facilement 35 °C. La neige est assez rare, mais la pluie aussi (250 mm). Sur les plateaux du centre de la Patagonie, les étés sont tièdes mais avec des nuits froides (en dessous de 10 °C, avec du gel parfois en plein été) et les hivers sont assez rigoureux, avec des moyennes proches de 0 °C dans plusieurs endroits, accompagnés de chutes de neige fréquentes mais peu abondantes en raison de l'aridité du climat. La température descend facilement à −20 °C, et les records indiquent des valeurs proches de −35 °C lors d'hivers exceptionnels, où certains villages sont isolés par la neige pendant des semaines. Les vallées (très basses) à l'ouest ont des étés frais avec des nuits froides, et des hivers avec des moyennes de 2 °C (équivalent de l'Alsace), descendent rarement en dessous de −15 °C, quoique des valeurs de −20 °C sont possibles. La neige peut s'accumuler profondément, car beaucoup de secteurs reçoivent plus de 1 500 mm de pluie et neige, et quelques secteurs isolés voient jusqu'à 4 500 mm par an.
L'extrême sud mérite une note à part, car si les hivers sont semblables à ceux de l'ouest de la Patagonie, avec beaucoup de pluie, neige et mélanges, la particularité du climat est l'absence de l'été : au mois le plus chaud, la moyenne du jour atteint seulement 14 °C, alors que celle des nuits est de 5 °C. Il est très courant de voir des journées à 7 °C en plein été, et des chutes de neige ne sont pas à exclure. De plus, pendant les mois d'été on peut s'attendre à avoir trois ou quatre journées ensoleillées par mois, avec une quinzaine de journées de pluie, et une douzaine de journées nuageuses.
Dans toute la Patagonie, et surtout dans le sud, on enregistre les plus forts vents au monde: dans certaines villes, la moyenne dépasse les 30 km/h tous les mois, et lors des tempêtes, les vitesses de 100 km/h à 150 km/h sont courantes.
La côte Atlantique argentine a des températures assez froides même l'été, où l'eau n'atteint les 20 °C que quelquefois dans quelques endroits précis. Les températures les plus chaudes et les plus froides du continent ont été mesurées en Argentine : plus de 49 °C l'été, à Rivadavia, et −42 °C l'hiver, au Valle de los Patos, San Juan.
Rivières et lacs
Parmi les grands fleuves, citons le Paraguay, le Bermejo, le río Negro, le río Colorado, l'Uruguay, ainsi que le Paraná qui est le plus long fleuve d'Argentine. Les fleuves Paraná et Uruguay coulent vers l'océan Atlantique et se rejoignent pour former le delta du río de la Plata. Dans le parc national de Misiones, au nord du pays, les mini-chutes d'une selva saturée vont se réunir pour former le fleuve Panana. Des grands lacs comme des mers se sont formés au pied des Andes, dans des sites encore vierges tels le Nahuel Huapi, à San Carlos de Bariloche.
Environnement
Le pays abrite des paysages et écosystèmes très variés, en raison notamment d'un important gradient climatique. L'écosystème dominant est celui de la pampa qui abrite une biodiversité originale et souvent endémique.
La forêt a souvent fortement régressé au profit de boisements industriels (monocultures parfois), de l'élevage bovin et d'une agriculture souvent industrielle qui contribue à dégrader les sols. Le Sud du pays est exposé à une augmentation des UV solaires (cancérigènes, mutagènes), induite par le trou de la couche d'ozone, plus grand au-dessus de l'Antarctique qu'au-dessus de l'Arctique.
Depuis les années 1990, l'Argentine a perdu plus de 22 % de ses forêts[15].
En décembre 2018, Greenpeace révèle un « scandale de pollution massive » dont s'est rendue coupable la multinationale Total au nord de la Patagonie. Une « gigantesque piscine de déchets toxiques » s'est créée, l'entreprise pétrolière étant accusée de jeter des « résidus toxiques à l'air libre, dans de gigantesques piscines creusées sans aucune protection entre les déchets et le sol». Et ce, alors que des villages Mapuche sont installés à moins de 5 kilomètres[16].
Faune et flore
Dans les immenses étendues de la Pampa subsiste encore une faune précolombienne représentée en particulier par le tatou dit à neuf bandes : les gaúchos pourchassent ce mammifère xénarthre car ils redoutent ses terriers dans lesquels le bétail se casse les pattes.
En altitude, le lama est encore utilisé comme animal de portage.
D'après une étude publiée par plusieurs ONG en mars 2018, les forêts de la région du Gran Chaco disparaissent à un rythme comparable, voire supérieur à celui des forêts tropicales d’Amazonie. Cette déforestation a pour cause le développement des cultures de soja, principalement destinées à l’alimentation des animaux d’élevage. L'étude recense en outre différents impacts du développement de ces cultures : « déplacements forcés de populations autochtones vivant de la forêt, pollutions et destructions massives de terres, effets dévastateurs sur la santé publique de l’utilisation à outrance de pesticides (augmentation des malformations congénitales, des cancers et des maladies respiratoires) ».
Frontières terrestres
- 5 151 km avec le Chili : c'est la troisième plus longue frontière terrestre au monde.
- 1 880 km avec le Paraguay.
- 1 224 km avec le Brésil.
- 832 km avec la Bolivie.
- 579 km avec l'Uruguay.
Histoire
Époque pré-coloniale
Un grand nombre de tribus amérindiennes peuplait l'Argentine avant la conquête espagnole, comme les Mapuches (« Araucans »), les Diaguitas, les Pampas, les Tehuelches (« Chonks »), Tobas (« Qoms »), Wichís (« Matacos »), Selknams (« Onas ») et autres ; ceux du Sud, qui s'enveloppaient les jambes et les pieds de fourrure contre le froid, ont été surnommés par les colonisateurs « patagones » (terme dérivant de pata : « pied » en espagnol).
Colonisation espagnole
En 1516, l'Espagnol Juan Díaz de Solís découvre le Río de la Plata. Le pays est colonisé par les Espagnols entre le XVIe et le XVIIe siècle. Dans son Voyage d’un naturaliste autour du monde à bord du vaisseau HMS Beagle, Charles Darwin décrit les combats que livraient encore dans les années 1830 les peuples autochtones amérindiens contre les cultivateurs et éleveurs d'origine espagnole qui accaparaient leurs terres[17].
Indépendance
Ayant repoussé en 1806 et 1807 deux expéditions militaires anglaises, sous l'impulsion de Jacques de Liniers, chef d'escadre chargé d'assurer la défense de la vice-royauté du Rio de la Plata, les colons espagnols comprennent qu'ils peuvent se défendre seuls contre un ennemi autrement mieux armé qu'eux et bien décidé à les évincer. Ils se considèrent dès lors plus Argentins qu'Espagnols et des mouvements d'opposition contre la métropole apparaissent parmi eux à l'aube du XIXe siècle. Dès 1810 avec la révolution de Mai (), les Argentins deviennent indépendants de fait. En 1813 le gouvernement brûle en place publique les instruments de torture et le déclare l'abolition de l'esclavage (selon la Chronologie de l'abolition de l'esclavage).
L'indépendance déclarée le (lors du congrès constituant tenu dans la ville de San Miguel de Tucumán) n'est que la conséquence juridique venant entériner ce qui est déjà une réalité. Plusieurs années de guerre contre l'Empire colonial espagnol permettent aux Argentins de se séparer définitivement de l'emprise de l'Espagne. Les généraux José de San Martín, Manuel Belgrano et Martín Miguel de Güemes, entre autres, repoussent toute velléité espagnole de reprendre sa colonie. Au commandement d'une armée d'environ 4 000 soldats, San Martin réalise une campagne prodigieuse, traversant la cordillère des Andes. Au Chili, il inflige des défaites cruciales à l'armée espagnole, d'abord à la Cuesta de Chacabuco et puis (avec des troupes chiliennes de Bernardo O'Higgins) à Maipu, près de Santiago du Chili, où les Argentins triomphent définitivement de l'armée royaliste stationnée au Chili.
Guerre civile et invasions étrangères
La guerre contre l'Empire espagnol s’achève après la victoire des indépendantistes sud-américains à la bataille d'Ayacucho, en 1824. Cependant, le pays est en situation de guerre civile depuis une décennie. En 1813, avant la déclaration formelle de l'indépendance de toute l'Argentine, la Province Orientale (actuel Uruguay) avec José Gervasio Artigas a défendu le fédéralisme argentin contre le centralisme de la ville du Buenos Aires, menant à une guerre civile de cinquante ans entre fédéraux et unitaires. Toujours en plein conflit entre fédéraux et unitaires, l'Argentine a eu à affronter plusieurs agressions : l'invasion de la Province Orientale par l'Empire du Brésil, mais également l'occupation de la province de Tarija par les boliviens en 1826. En 1833, peu de temps après la fin de la guerre entre l'Argentine et le Brésil, les Britanniques occupent et colonisent les îles Malouines que l'Argentine avait héritées de l'Espagne. En 1836, l'Argentine se trouve à nouveau en guerre contre la Confédération péruvio-bolivienne et une contre les Empires anglais et français, alliés avec le Brésil, les Paraguayens et les Uruguayens. Ces luttes internes et les interventions étrangères expliquent la durée de l'hégémonie de Juan Manuel de Rosas (1833-1853). La constitution sera proclamée en 1853, après la fin de la dictature de Juan Manuel de Rosas.
L'année 1890 est considérée comme un tournant dans l'histoire politique de l'Argentine. C'est l'année d'un important soulèvement populaire par suite d'une crise économique qui avait accentué la misère des classes populaires et appauvri les classes moyennes. C'est aussi l'apparition de la dite « génération de 1890 » comprenant Leandro N. Alem (futur fondateur de l'Union civique radicale), Lisandro de la Torre (futur fondateur du Parti démocrate progressiste) et Juan B. Justo (futur fondateur du Parti socialiste). Cette nouvelle génération d'hommes politiques favorise une forme d'union des classes populaires et des classes moyennes, sous la direction de ces dernières, contre le pouvoir oligarchique des propriétaires fonciers, des grands commerçants et des banquiers. L'Union civique radicale — qui passe, après le suicide d'Alem, sous la direction d'Hipólito Yrigoyen — devient l'expression principale des classes moyennes et, dans une moindre mesure, populaires. Sa tactique allie, à partir de 1892, un dosage réfléchi entre le recours à la voie électorale légale et l'adoption de la voie insurrectionnelle[18].
En 1912, afin de réduire le risque d'un nouveau soulèvement révolutionnaire, le gouvernement conservateur accepte d'établir le suffrage universel masculin. Hipólito Yrigoyen est élu président et met en œuvre son programme réformiste : abolition du travail des enfants, repos dominical pour les travailleurs, salaire minimal pour certaines professions, recours à l'arbitrage pour les conflits sociaux, etc.. En économie, il déclare que « L’État doit acquérir, jour après jour, une position de plus grande activité dans les entreprises qui fournissent des services publics, et se substituer au capital privé existant pour que le service public devienne un instrument de gouvernement ». Plus tard, l'Union civique radicale se scinde avec le regroupement de son aile droite autour de Marcelo Torcuato de Alvear contre Yrigoyen. Les années de pouvoir de l'Union civique radicale représentent un héritage sujet à controverses ; si elles constituent une période de progrès démocratiques et sociaux, elles se caractérisent aussi par les ménagements à l'égard de l'oligarchie et par la conduite très brutale de l'armée[18].
De nombreux évènements tragiques surviennent au début du XXe siècle : durant la semaine du 7 au 14 janvier 1919, la répression et les massacres commis à Buenos Aires sur des ouvriers grévistes font des centaines de morts. Entre novembre 1920 et décembre 1921, quelque 1 500 ouvriers furent exécutés par l'armée à l'issue d'une grève insurrectionnelle en Patagonie. En juillet 1924, 500 indigènes qui protestaient contre leurs conditions de travail et la misère dans laquelle ils vivaient, sont massacrés par la police et des milices de propriétaires terriens[19].
L'anarcho-syndicalisme exerce une importante influence auprès des syndicats ouvriers à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle. Certains militants se dirigent par ailleurs vers la lutte armée, comme en 1929 quand le militant anarchiste Kurt Gustav Wilckens lance une bombe qui tue le colonel Varela, responsable des massacres de la Patagonie rebelle. Les associations socialistes se constituent dans les années 1890. En 1896 est formé le Parti ouvrier socialiste argentin, qui fait paraître Vanguardia, « journal socialiste scientifique défenseur de la classe ouvrière ». En 1904, Alfredo Palacios devient le premier député socialiste d'Amérique latine. Le Parti communiste argentin est fondé en 1918[18].
Dictatures du XXe siècle et péronisme
Les présidences se succèdent entre 1930 et 1983, mais sur seize présidents, onze sont des militaires et plusieurs sont « présidents de facto » (par opposition aux présidents élus). Perón fait alors ses débuts dans la politique : lieutenant-colonel titulaire de quelques secrétariats d'État du gouvernement militaire établi en juin 1943, il est élu président après la fin de la Seconde Guerre mondiale. Celle-ci ayant entraîné l’affaiblissement de l’Occident, l'Argentine devient, vers 1950, la neuvième puissance économique mondiale[20]. Après la guerre, de nombreux nazis fuient en Argentine et ailleurs en Amérique latine.
Au cours des années 1930, beaucoup d'Argentins ont souffert de la faim alors même que le pays était l’un des plus importants exportateurs de produits alimentaires du monde. Sur le plan politique, le latino-américaniste Alain Rouquié indique que « la souveraineté populaire et le suffrage sont fermement dirigés par les représentants de l’élite établie. Ceux-ci n’ont jamais tout à fait cessé de penser que « le suffrage universel est le triomphe de l’ignorance universelle », comme le déclara un ministre de l'Intérieur[21]. »
Le péronisme est un mouvement national et populaire ; il encadre la population argentine (syndicats, femmes, jeunes, ouvriers…) en leur octroyant des droits et un statut. Le partage des richesses est désormais moins déséquilibré et la classe ouvrière argentine, avec le soutien des syndicats, s'identifie au mouvement péroniste : les salaires sont augmentés, un salaire minimum et des congés payés sont instaurés, le droit à la retraite et au repos dominical sont reconnus. La politique sociale du gouvernement péroniste se traduisit également par un engagement inédit de l’État argentin en matière de santé et d’éducation. Ainsi, l’enseignement universitaire fut déclaré gratuitement accessible à tous les Argentins à partir de 1949, ce qui entraîna une augmentation de 300 % du nombre d’étudiants au cours de la présidence de Juan Perón[22]. Le taux d'analphabétisme se réduit assez significativement. L'effort est aussi porté sur l’amélioration des services de santé du pays, et surtout du nombre de personnes pouvant en bénéficier. Le taux de mortalité infantile peut alors être réduit de 80,1 pour 1000 en 1943 à 66,5 pour 1000 en 1953, tandis que l'espérance de vie s’accroît de 61,7 en 1947 à 66,5 ans en 1955[23].
Perón a donc le soutien de la classe ouvrière, en partie grâce à la redistribution des richesses nationales. Cependant, l'opposition de la bourgeoisie est pour le moins active ; le dirigeant populiste gouverne de façon autoritaire. L’Église se retourne également contre le gouvernement après les tentatives de Perón de laïciser l’enseignement et ses réformes en faveur des droits des femmes. Par ailleurs, sa deuxième femme (Perón était veuf depuis 1938) Eva Perón décédée, restée très aimée des « descamisados » (sans chemises) n'est plus là. Le soutien d'une majorité de la population au mouvement péroniste est néanmoins régulièrement confirmé par les élections et un système démocratique multipartite continue de fonctionner.
En 1955, un coup d'État le chasse du pouvoir (l'armée bombardera la place de Mai, tuant de nombreux civils). Désormais, l'Argentine entre dans une période d'instabilité à la fois économique et politique. Le puissant mouvement péroniste est décapité mais va renaître sous la forme clandestine (sabotage, grèves…). Les élites du pays, revenues au pouvoir, cherchent alors une impossible formule de démocratie sans péronisme. Les militaires organisent des élections, puis reprennent le pouvoir quelque temps après, et ce, à deux reprises.
En 1966 a lieu le coup d'État du général Juan Carlos Onganía. Ce dernier, partisan de la manière forte, met en place un régime bureaucratique et autoritaire. En réaction à la violence, les mouvements sociaux, les syndicats, les étudiants, les ouvriers se battent contre le régime jusqu'à prendre conscience de sa faiblesse. La situation s'aggrave jusqu'à l'année 1969, quand éclate le Cordobazo (une explosion de violence spontanée à la ville de Cordoba dont les ouvriers et les étudiants sont les protagonistes). C'est la première pueblada (il y en aura bien d'autres dans tout le pays) : la population s'attaque aux symboles du pouvoir autoritaire (police…) mais aussi à ceux des multinationales étrangères. Le lendemain, le pays est paralysé par la grève générale. Désormais, même la classe moyenne, traditionnellement anti-péroniste, s'associe au rejet du pouvoir bureaucratique et autoritaire. Les militaires se retirent alors en bonne et due forme, essayant de ne pas perdre la face. Mais il est trop tard et en 1973, la population assiste à la fin du régime militaire. Des élections démocratiques sont organisées, les militaires sont conspués, la gauche révolutionnaire voit ses organisations de masses légalisées et ses militants prisonniers sont tous libérés. L'extrême-gauche gagne des espaces de pouvoir au sein de l'État (Université…).
Après le retour du général Peron en 1973, qui se solde par le massacre d'Ezeiza (la droite péroniste ouvrant le feu sur des militants de l'aile gauche), le pays s'enfonce dans une meurtrière crise politique. José López Rega fonde secrètement l'Alliance anticommuniste argentine qui assassine plus de 300 personnes[24]. Après la mort de Perón, une guerre sale commence dans la province de Tucumán, dès l'opération Indépendance (en), qui impliquait la lutte contre la guérilla entre autres par l'enlèvement de partisans armés de la « révolution » et leur séjour dans des centres de détention clandestins, où ils étaient torturés. La très grande majorité n'y a pas survécu. À cette occasion, les leçons transmises par des militaires français sur la bataille d'Alger sont mises en pratique[25].
En mars 1976, un coup d'État dirigé par une junte de militaires (Jorge Videla, etc.) renverse la troisième femme de Perón, Isabel Martínez de Perón, ancienne vice-présidente de son époux, et sa veuve depuis 1974. La CONADEP -Commission nationale sur la disparition des personnes, fondée par le gouvernement démocratique de Raúl R. Alfonsín, a estimé que la répression militaire avait fait un peu moins de 10 000 victimes, dans la majorité des « disparus ». Buenos Aires participe avec d'autres pays à l’opération Condor (de coordination contre la subversion), et de nombreux réfugiés politiques et des « subversives » enfuis de pays voisins sont assassinés par le biais des services secrets ou d'escadrons de la mort (la Triple A). Il est à noter que cette Triple A a été créée en 1974 durant le gouvernement constitutionnel d'Isabel Perón et a commencé son travail dès cette année-là. L'ambassade américaine est souvent informée[26].
Guerre des Malouines et transition démocratique
Afin de relancer sa popularité, la junte de Buenos Aires, dirigée depuis décembre 1981 par Leopoldo Galtieri, l’un des plus « durs », décide d’envahir les îles Malouines en 1982, provoquant ainsi la guerre des Malouines contre le Royaume-Uni, alors dirigé par Margaret Thatcher. En raison de son anticommunisme viscéral et de la mise en place de l’opération Charly (pendant laquelle les services argentins ont transmis à leurs homologues d’Amérique centrale les techniques de la guerre sale : escadrons de la mort, torture systématique contre la population civile afin de la démoraliser, vols de la mort, etc.), Buenos Aires semblait penser pouvoir compter, à tort, sur le soutien de Ronald Reagan, nouvellement élu.
La défaite lors de la guerre des Malouines précipite la chute du régime et une lente transition démocratique.
Raúl Alfonsín (1983-1989) fut le symbole même du retour à la démocratie en République argentine. Dans les premiers jours de son mandat, en 1983, il abroge l’amnistie déclarée avant que les forces armées ne perdent le pouvoir et demande de poursuivre neuf dirigeants de la junte militaire. Il nomme en même temps une commission nationale sur la disparition des personnes et en choisit les membres : dix citoyens de premier plan, connus pour leur rôle dans la défense des droits de l’Homme. Aux yeux du monde éclate la cruauté des crimes de la junte militaire argentine : quelque 10 000 personnes torturées puis exécutées clandestinement.
Mais si les principaux responsables de violations des droits de l'Homme durant le régime militaire seront jugés et condamnés, la pression de l'establishment militaire va forcer Alfonsin à céder aux revendications des militaires. Trois ans plus tard, son gouvernement empêche le jugement de nombreux autres responsables, en instaurant les lois de pardon Punto Final et Obediencia Debida. La première prescrit les procès à venir et la seconde accorde l'amnistie aux officiers subalternes, responsables d'atrocités commises sous les ordres des chefs des forces armées. Depuis lors, plusieurs présidents se sont succédé : Carlos Menem (1989-1999), Fernando de la Rúa (1999-2001). Des lois d'amnistie sont votées sous Menem, notamment en raison de la rébellion de secteurs d’extrême droite dans l'armée (les Carapintadas, qui tentent plusieurs coups d’État à la fin des années 1980). Un procès durant lequel comparaissent les principaux responsables de la junte, ainsi que des Montoneros, se tient néanmoins en 1985 : c'est le Procès des Juntes (Juicio a las Juntas).
La décennie Menem est marquée par une libéralisation de l'économie, menant à la modernisation de la plus grande partie du pays, à l'enrichissement d'une part importante de la population, mais aussi à l'apparition de groupes contestataires, les piqueteros, qui deviendront célèbres après la crise économique de la fin des années 1990. En effet, de 1990 à 1998 se produit le miracle argentin, caractérisé par un libéralisme radical (alignement du peso sur le dollar, privatisations, réformes économiques et sociales) qui eut pour effet un fort taux de croissance économique exponentielle, se traduisant par un enrichissement et une modernisation jamais vus dans le pays. Le FMI aida beaucoup l'Argentine à se développer durant cette période. La consommation a augmenté considérablement, et les Argentins ont alors pu accéder aux mêmes biens matériels que les Européens ; l'Internet, la téléphonie mobile, l'électro-ménager moderne, etc. Cependant, ce libéralisme ne profita pas à toute la population. Les laissés-pour-compte du miracle économique représentaient une part non négligeable dans l'Argentine des années 1990 : 18 % de chômeurs en 1996.
Crise de 2001
Le choix de créer dans les années 1990 une caisse d'émission monétaire liée strictement au dollar, avait eu pour conséquence, lors de la hausse massive de celui-ci à la fin des années 1990, de provoquer un arrêt brusque des exportations argentines. Le Brésil avait dévalué fortement sa monnaie et l'Argentine, son principal partenaire commercial, s'était retrouvée à sec de devises. Cette situation avait engendré une fuite de capitaux massive pendant les mois d'août, septembre et octobre. La crise est partiellement jugulée par un contrôle draconien des dépôts bancaires, appelé Corralito, fondé sur l'obligation d'effectuer toutes les opérations financières à travers les banques et la restriction des retraits d'argent en numéraire. Le gros de la population n'étant pas bancarisé, la perception des rémunérations et salaires devient un véritable casse-tête, ce qui provoque une aggravation radicale de la crise en décembre 2001, provoquant un véritable chaos social, et des émeutes des classes sociales les plus appauvries par la crise. La répression cause 31 morts, le ministre des Finances est relevé de ses fonctions, mais cela ne suffit pas et le président signifie sa démission en s'enfuyant du palais du Gouvernement en hélicoptère. Le gouvernement, le FMI et la parité entre le peso et le dollar américain sont les thèmes les plus critiqués.
En dix jours, quatre présidents se succèdent (Camaño, Rodriguez Saa, Puerta, Duhalde), le gouvernement argentin se déclare en état de cessation de paiement, abroge la loi consacrant l'intangibilité des dépôts bancaires (ce qui provoque l’évaporation des dépôts des classes moyennes qui en avaient mais ne les avaient pas transférés) et, donc, par un approfondissement de la crise économique. Le , le nouveau gouvernement procède à un gel total des avoirs bancaires, appelé Corralón, et une dévaluation officielle du peso de 28 % par rapport au dollar, tandis que dans la rue le dollar se change à 1,60 peso pour atteindre très vite plus de 3 pesos[27].
Le monde entier a été surpris par les événements de décembre 2001. Les médias ont montré un pays caractérisé par les pillages de magasins et les concerts de casseroles des classes moyennes. Mais ces représentations sont simplistes et plus que subjectives. Les émeutes et les mobilisations ne sont pas nées à la fin de l'année 2001. Dès 1989, une vague de saccages de magasins a eu lieu, conséquence de l'hyperinflation. En décembre 1993, le pays a connu des révoltes, notamment à Santiago del Estero. En 1996, les premiers piqueteros établissaient des barrages à Cutral-Co, dans la province de Neuquen. Mais les médias n'avaient laissé que très peu de visibilité à ces mouvements.
Les protestations de décembre 2001 doivent être analysées en tenant compte des changements que le répertoire de l'action collective a connus ces dernières années en Argentine. Comme l'a expliqué Javier Ayuero, « loin d'être l'explosion d'une citoyenneté paraissant jusqu'alors repliée sur elle-même et incapable d'exprimer son mécontentement, le mois de décembre 2001 représente plutôt le point le plus critique d'un processus de mobilisation populaire datant environ d'une dizaine d'années »[28].
Eduardo Duhalde demeure président de l'Argentine entre janvier 2002 et mai 2003 où il met fin à la parité entre le peso argentin et le dollar américain et met en place un plan économique productiviste. Il appelle à des élections présidentielles anticipées en avril 2003 où il soutient le candidat péroniste de centre gauche Néstor Kirchner. Ce dernier est élu par défaut à la suite du retrait de Carlos Menem au second tour.
Gouvernement Kirchner
Néstor Kirchner exerce la fonction de président de la République argentine de 2003 à 2007. Il renégocie la dette du pays en 2005 (il refuse le remboursement de trois quarts des 100 milliards de dollars de dette extérieure). Il gèle les tarifs énergétiques et du transport, et taxe très fortement les importations, il relance l’activité économique (+ 50 % en cinq ans) soutenue par les dépenses publiques, et double la masse salariale (de 2003 à 2007). Néstor Kirchner est décédé en 2010 d'une crise cardiaque.
Son épouse, Cristina Fernández de Kirchner, élue au premier tour le lui succède le . En 2008 la présidente est confrontée à un lourd conflit social l'opposant aux agriculteurs et relatif, notamment, au niveau des taxes sur les exportations de soja. Les agriculteurs argentins ont engagé une grève d'ampleur de commercialisation des céréales[29].
Gouvernement Macri
En 2015, Mauricio Macri est élu président.
Le gouvernement supprime l'impôt sur les exportations, met fin au contrôle des changes, laisse flotter le peso et réduit les subventions à l’énergie. Une réforme du marché du travail vient faciliter les licenciements. La libéralisation du secteur financier entraine une fuite des capitaux estimée en 2019 à près de 109 milliards de dollars depuis l’élection de Mauricio Macri, soit environ un sixième du produit intérieur brut (PIB) argentin. La production industrielle baisse fortement du fait de l'arrêt d'une grande partie des subventions. Les taux d’intérêt considérables offerts aux investissements spéculatifs (afin de faire affluer les dollars) favorisent la mise en place d'un cercle vicieux par lequel les emprunts d’hier doivent être remboursés par d’autres, plus coûteux encore. Le pays s'enfonce dans une grave crise économique. Le Financial Times note en octobre 2017 que « Le gouvernement [argentin] a plus emprunté que n’importe quel autre pays émergent depuis l’élection de Mauricio Macri. Environ 100 milliards de dollars en deux ans ». La dette du pays, qui s’établissait à 40 % du PIB en 2015, dépasse 75 % en janvier 2019, après avoir grimpé de vingt points de pourcentage au cours de la seule année 2018. Le cours du peso chute de 118 % entre janvier et septembre 2018[21].
En octobre 2019, environ 40 % des Argentins vivent en dessous du seuil de pauvreté selon la chaîne nationale C5N[30] (35 % selon les chiffres officiels, soit une augmentation de 30 % en un an[31]). L’inflation dépasse les 54 % sur les 12 derniers mois et les 237 % depuis le début du mandat de Mauricio Macri. Les classes populaires ont de plus en plus de difficultés à se nourrir et beaucoup de personnes en viennent à sauter des repas. Selon la Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), cinq millions d’Argentins souffraient d’une « insécurité alimentaire » grave sur la période 2016-2018, ce qui représentait une multiplication par deux par rapport à la période 2014-2016, et la situation s'est depuis lors encore aggravée[30]. Le taux de chômage dépasse les 10 % selon des chiffres officiels vraisemblablement sous-évalués et une chute de 3,1 % du PIB est à prévoir pour l'année 2019 selon le Fonds monétaire international (FMI)[31].
Politique et administration
Répartition des pouvoirs
L'Argentine a un régime présidentiel dans une république fédérale. La Constitution argentine de 1853, révisée en 1860, 1866, 1898, 1957 et 1994 dispose que le mandat présidentiel est de quatre ans (renouvelable deux fois). Il y a possibilité de réélection, mais il faut laisser passer 4 ans. Le président devait être de religion catholique jusqu'en 1994 : Carlos Menem, d'origine syrienne et de confession musulmane dut se convertir au catholicisme pour être élu président.
Élu au suffrage universel, le président est à la fois à la tête de l'État et à la tête du gouvernement, le président actuel est Alberto Fernández.
La Constitution garantit la séparation des pouvoirs entre l'exécutif, le législatif et le judiciaire. L'exécutif est confié au président, le législatif au Congrès et le judiciaire à la Cour suprême d'Argentine composée de sept membres.
Le Congrès de la Nation argentine est composé de deux chambres :
- le Sénat : 72 membres (3 sénateurs par provinces) élus pour six ans ;
- la Chambre des députés : 257 membres élus au suffrage universel, renouvelables par moitié tous les deux ans. Un tiers des candidats doit être féminin.
La justice nationale est composée de différents tribunaux, dont le plus élevé est la Cour Suprême.
Provinces
Conformément à la constitution de 1853, révisée en 1994, l’Argentine est une république fédérale organisée en 23 provinces dirigés par des gouverneurs élus) et une cité autonome avec statut spécial : Buenos Aires, capitale fédérale. Les 24 jurisdictions sont les suivantes:
Les provinces ont de fait tous les pouvoirs qui n’ont pas été délégués expressément au gouvernement fédéral. Elles sont chargées d’administrer la justice et l’éducation primaire. Elles s’organisent comme elles l’entendent en élisant leurs pouvoirs exécutif et législatif. Les provinces peuvent régler entre elles toutes sortes d’accords de type judiciaire, économique ou social. Le pouvoir exécutif national a seulement le pouvoir d’intervenir afin d’assurer la forme républicaine du gouvernement et de repousser les invasions étrangères. La majorité des provinces du centre et du nord du pays sont antérieures à l’existence de l’Argentine comme État fédéral, cependant des provinces avec une grande présence aborigène ou une faible population (comme le sont au nord : Chaco, Formosa et Misiones ; et la grande partie sud du pays : La Pampa, Neuquén, Rio Negro, Chubut, Santa Cruz, la Terre de Feu, le territoire argentin en Antarctique et les îles de l’Atlantique sud) étaient à une époque des « territoires nationaux » dépendant du gouvernement fédéral. En devenant des provinces, elles acquirent le même statut administratif que celles qui existaient déjà.
Les derniers territoires à changer de statut furent la Terre de Feu, Antarctique et Îles de l'Atlantique Sud qui furent regroupés pour devenir une même et unique province en 1991, en dépit du fait que la définition de cette province contient des territoires contestés en Antarctique (avec le Chili et le Royaume-Uni) et du fait que l’Argentine a ratifié le traité sur l’Antarctique qui a gelé les prétentions territoriales, et les îles de l’Atlantique sud sont reconnues internationalement comme parties du Royaume-Uni (à l’exception des îles Shetland du Sud intégrées au traité sur l’Antarctique), seul le litige de souveraineté concernant le partage de la Terre de Feu ayant été résolu (par un traité international signé avec le Chili).
Un des anciens territoires nationaux, le territoire des Andes, ne parvint jamais à se convertir en province. Il fut formé en 1900 et couvrait alors la totalité de la Puna du nord-ouest du pays, mais, en raison d'un développement et d'une population très faibles, il fut dissous en 1943, les territoires étant alors incorporés aux provinces de Jujuy, Salta et Catamarca.
Perito Moreno Glacier, province de Santa Cruz, Patagonie argentine.
Cafayate, province de Salta.
Relations internationales
L'Argentine est membre permanent du Mercosur (communauté économique des pays de l'Amérique du Sud) avec le Brésil, le Paraguay, l'Uruguay et le Venezuela ; cinq autres pays y sont associés : la Bolivie, le Chili, le Pérou, la Colombie et l'Équateur[32].
L'Argentine est le seul pays d'Amérique du Sud à avoir pris part en 1991 à la Guerre du Golfe, mandatée par l'ONU[33]. Elle fut également le seul pays latin à participer à l'Opération Uphold Democracy à Haïti en 1994-95[34]. Enfin, elle s'engagea dans la force de maintien de la paix des Nations unies (Casques bleus)[35] à travers le monde dont les conflits concernant Salvador-Honduras-Guatemala-Nicaragua, Équateur-Pérou, le Sahara occidental, l’Angola, le Koweït, Chypre, la Croatie, le Kosovo, la Bosnie-Herzégovine ou le Timor oriental.
En , en reconnaissance de ses contributions à la sécurité internationale, le président des États-Unis Bill Clinton désigna l’Argentine comme l'un des alliés majeurs hors-OTAN[36]. En 2005, l'Argentine fut membre temporaire du Conseil de sécurité des Nations unies[37].
En 1993, l'Argentine lança l'initiative des casques blancs des Nations unies spécialisés dans l'aide humanitaire[38].
Depuis 2004, les relations habituellement cordiales entre l'Argentine et l'Uruguay se sont progressivement dégradées à cause de la construction en Uruguay de deux grandes usines de fabrication de cellulose, sur les rives du rio Uruguay qui marque la frontière entre les deux pays. Ce contentieux est surnommé en France la « guerre du papier ». L'Argentine met en avant les dégâts écologiques que subirait le fleuve. La polémique fut alimentée par une escalade de déclarations de la part des deux États, l'Argentine portant l'affaire devant la CIJ en mai 2006, puis l'Uruguay lui emboîtant le pas en novembre 2006. Des blocus routiers en Argentine ont empêché l'approvisionnement en matériaux de construction depuis le Chili, aggravant la situation[39],[40]. Les relations économiques et sociales entre les deux pays se sont améliorées en 2007.
Douze pays d'Amérique du Sud ont signé le la Déclaration de Cuzco visant à la réunion du Mercosur, de la Communauté andine et du Chili, du Guyana et du Suriname en une seule communauté supranationale, la Communauté sud-américaine des nations (CSN), sur le modèle de l'Union européenne. Cela est devenu UNASUR (Union des Nations sud-américaines) lors du premier sommet énergétique sud-américain organisé au Venezuela à la mi-avril 2007.
Outre une communauté économique, le projet inclut à terme :
- une monnaie commune ;
- une citoyenneté et un passeport commun ;
- un parlement commun.
Ce projet a pris naissance dans un contexte d'opposition au ZLEA, « Initiatives pour les Amériques », lancé par George Bush en 1990 puis concrétisé en 1994 au Sommet des Amériques, et donc dans un contexte d'opposition à l'ingérence nord-américaine dans les affaires politiques et économiques sud-américaines.
En 2005, la ville de Mar del Plata a accueilli le quatrième sommet des Amériques[41], marqué par de nombreuses protestations anti-US[42]. Si bien que l'année suivante, elle mit sa priorité dans les initiatives régionales telles que le Mercosur ou la Banque du Sud après une décennie de partenariat avec les États-Unis.
En contentieux avec le Royaume-Uni, l'Argentine réclame la souveraineté des îles Malouines[43], de la Géorgie du Sud, des îles Sandwich du Sud[44] et des îles Shetland du Sud (ces dernières également revendiquées par le Chili mais les prétentions des trois pays sont gelées depuis la signature du traité de l’Antarctique) et d'environ 1 million de kilomètres carrés du continent Antarctique[45]. Un autre sujet de discorde est la frontière avec le Chili, en particulier au sujet du tracé de la frontière extrême sud en Terre de Feu, un traité fut signé en 1984 entre les deux pays au Vatican[46].
Enfin, l'Argentine fut l'un des signataires initiaux du Traité sur l'Antarctique[47].
Armée
Population et société
Démographie
L'Argentine compte environ 43 millions d'habitants[48]. Parmi les multiples groupes ethniques habitant le pays, on en compte trois à l'origine de la population actuelle. Tout d'abord, les Amérindiens représentent, ensemble et sans tenir compte des différences ethnoculturelles à peu près 1,49 % de la population totale[49],[50]. Les descendants d'Africains amenés comme esclaves pendant les temps de domination espagnole représentent 0,37 %[51],[52]. Le groupe le plus large, les Européens principalement méditerranéen, (espagnol et italien) et métis constituent 97 % de la population selon la CIA[53],[2],[54]. Les Européens, qu'on appelle des criollos, sont issus des temps coloniaux, on compte de même des populations issues de l'immigration du XIXe siècle qui inclut entre autres, en plus des Italiens et des Espagnols, des Arabes, des Allemands, des Français, et des Asiatiques. Il faut bien préciser que lors de l'arrivée de ces immigrants, qui pour la plupart étaient des hommes seuls, un métissage très important a eu lieu entre les étrangers et les femmes locales, de souche européenne et indigène pour la plupart, ce qui a contribué à la diversité ethnique. Selon les résultats d'une étude menée en 2010 par le généticien Daniel Corach, 53,7 % de la population a au moins un ancêtre autochtone, presque toujours matrilinéaire[55]. Selon la Dirección Nacional de Migraciones, près de 45 % des Argentins seraient d'origine italienne et 31 % d'origine espagnole, faisant des Italiens et des Espagnols les principaux groupes ethniques en Argentine.
La population est très inégalement répartie, puisqu'un tiers de la population (environ 13 millions d'habitants) est concentré dans la capitale et l'agglomération de Buenos Aires, appelée aussi Gran Buenos Aires.
Outre la région de la capitale fédérale, la population est concentrée dans d'autres zones urbaines dont les principales sont les suivantes : Córdoba (centre, 1,6 million d'habitants), Rosario (est, 1,4 million d'habitants), Mendoza (ouest, 1 million d'habitants), San Miguel de Tucumán (nord, près d'un million d'habitants). Au total, environ 91 % de la population habite dans des agglomérations urbaines[48].
Traditionnellement, l'Argentine a joui d'un très haut niveau de vie en comparaison avec d'autres pays de la région, mais la crise économique des années 2001-2002 a diminué cette impression. Toutefois, plus de la moitié de la population reste considérée comme faisant partie de la classe moyenne[56], et depuis la crise, une forte reprise économique a aidé postérieurement à réduire la pauvreté à 23,4 % de la population. Plus de 8 % de la population vivait dans des conditions précaires, dans des villas miserias ou bidonvilles, dans le pays il y a 4 100 villas miseria[57],[58].
Études génétiques
- Homburguer et al., 2015, PLOS One Genetics: 67 % européen, 28 % amérindien, 4 % africain and 1,4 % asiatique[59].
- Avena et al., 2012, PLOS One Genetics: 65 % européen, 31 % amérindien, and 4 % africain[60].
- National Geographic: 52 % européenne, 27 % amérindien, 9 % africain et 9 % autres[61].
Langues
Il n'y a pas de langue officielle en Argentine, cependant, en raison du système fédéral du pays, chaque province peut établir la langue officielle de son territoire.
L'espagnol est parlé par la quasi-totalité des Argentins[62]. Le pays possède également le nombre le plus important d'hispanophones qui emploie couramment le voseo, l'utilisation du pronom vos au lieu de tú (« tu »), ce qui implique alors un changement dans la façon de conjuguer les verbes également. À cause de la grande extension géographique de l'Argentine, l'espagnol varie considérablement de régions en régions, le dialecte le plus important numériquement est l'espagnol rioplatense, principalement parlé autour du bassin de La Plata, qui possède un accent similaire à celui de la langue napolitaine[63]. L'italien serait beaucoup parlé en seconde langue, surtout par des personnes aux origines italiennes : par exemple, le pape François, d'origine italienne parle l'italien en seconde langue.
L'Argentine est un État observateur au sein de l'Organisation internationale de la francophonie depuis 2016[64]. À la suite de la conquête de 1759 en Nouvelle-France, environ 200 000 Français ont immigré en Argentine à partir des années 1857, même si les deux dates (1759 et 1857) semblent éloignées, le phénomène reste le même si l'on tient compte de l'apparition réelle des besoins en émigration des suites de l'effondrement de l'empire français en Amérique. En 2006, 17 % des Argentins se réclament d'ascendance française[65].
Religion
Religion | Pourcentage |
---|---|
Catholicisme | 71 % |
Protestantisme | 15 % |
Sans religion | 11 % |
Autres | 3 % |
La principale religion est le christianisme, principalement le catholicisme (qui est la religion d'État). La liberté de culte est garantie par l'article 14 de la constitution. Le catholicisme est dominant, avec des estimations du nombre de catholiques variant de 70 % à 90 % de la population[67]. En juillet 2014, une étude publiée par la CIA Factbook répertorie 92 % de catholiques dont 18 % de pratiquants[2]. Jorge Mario Bergoglio, prélat argentin, est élu pape le sous le nom de François, il est le premier pape issu du continent américain[68].
La société, la culture et l'histoire de l'Argentine sont profondément imprégnées par le catholicisme. L'Église catholique tient une place importante dans la société argentine, allant même jusqu'à faire partie de son identité nationale. La présence catholique en Amérique latine remonte à la fin du XVe siècle, au moment où les conquistadors espagnols débarquèrent dans le Nouveau Monde, amenant avec eux leur culture et leur religion.
Il y a sept universités catholiques en Argentine : l'université catholique argentine à Buenos Aires, l'Universidad Católica de Córdoba, l'université nationale de La Plata, l'université de Salta, l'université de Santa Fé, l'université de Cuyo, et l'université de Santiago del Estero. Suivant le modèle de l'Empire romain, l'Église argentine est divisée à travers le pays en plusieurs diocèses et archidiocèses, unités territoriales administratives placées sous l'autorité d'un évêque. Si la plupart des villes de tailles moyennes sont des diocèses, les archidiocèses interviennent dans les villes ou la population est plus importante. Ainsi, Buenos Aires, par exemple, est un archidiocèse en raison, non seulement de la taille de sa population, mais également de l'importance historique de la ville, qui fut en 1776 la capitale de la vice-royauté espagnole du Rio de la Plata. La cathédrale métropolitaine de Buenos Aires, principale église catholique de Buenos Aires et siège de l’archidiocèse, abrite le tombeau du célèbre général José de San Martín.
L'Argentine possède la plus importante communauté juive d'Amérique latine avec environ 230 000 personnes.
Selon une importante étude du Barometer d'Amérique latine, le paysage religieux argentin se répartit entre 77 % de catholiques, 7 % de protestants, 4 % des autres religions et 13 % de sans religion[69]. Le nombre d'athées est très important pour un pays d'Amérique latine, d'autant plus que dans les années 1960, il n'y avait que rarement d'Argentins sans religion.
La Convention baptiste évangélique Argentine est fondée en 1908[70],[71]. En 2016, elle compterait 670 églises et 85 000 membres[72].
Femmes, droit à l'avortement et droits LGBT
Sous le mandat de la présidente Cristina Fernández de Kirchner, le mariage homosexuel est légalisé en 2010, le droit à changer de sexe à l'état civil pour les personnes trans en 2012 et la PMA en 2013t[73]. Le 30 décembre 2020, sous le mandat d'Alberto Fernandez, un projet de loi légalisant l'avortement sans conditions jusqu'à la quatorzième semaine de grossesse est approuvé par le Sénat argentin, après un vote en faveur des députés argentins le 11 décembre[74]. L'Argentine, qui n'autorisait l'avortement depuis 1921 qu’en cas de viol ou de danger pour la vie de la mère, devient le quatrième pays d'Amérique Latine à légaliser l'IVG après Cuba, l'Uruguay et le Guyana[74]. Toutefois, les médecins peuvent toujours opposer leur « objection de conscience », dans un pays qui reste très divisé sur la question[74]. L'Argentine de 2020 compte 44 millions d'habitants et connaissait jusque-là 370 000 à 520 000 avortements clandestins par an (selon le gouvernement), menant eux-mêmes à une hospitalisation en raison de complications pour 38 000 femmes par an[74]. Dans le même temps, le pays, souhaitant réduire le nombre d'avortements pour raisons économiques, a créé une allocation financière destinée à aider les mères et leur enfant durant la grossesse et les premières années[74].
Système de retraite
Le gouvernement argentin nationalise en 2008 les retraites, mettant fin à quatorze ans de domination des Administradoras de Fondos de Jubilaciones y Pensiones (AFJP), des organismes privés de gestion de l’épargne-retraite. La mesure a provoqué une fuite des capitaux et de fortes baisses des Bourses de Buenos Aires et de Madrid (de nombreuses entreprises espagnoles détenaient participation dans les AFJP)[75].
Ces pensions, dont le montant était défini selon des critères retenus au moment de la souscription du contrat initial, obéissaient à plusieurs facteurs variables, tels le capital investi, les intérêts accumulés ou l’espérance de vie. Au moment du départ en retraite, elles étaient rarement conformes aux prévisions de départ et se révélaient généralement insuffisantes, voire misérables. Désormais, le système garantit dans la plupart des cas un revenu supérieur à 60 % des salaires[75].
La publication des montants considérables que les dirigeants des AFJP et des compagnies d’assurance s’octroyaient avait soulevé l’indignation d'une grande partie de l'opinion publique. En quatorze ans, plus d’un tiers des 12 milliards de dollars de rétributions pour « prestations de services » ont été destinés aux salaires des principaux dirigeants, tandis que les commissions versées aux directeurs commerciaux constituaient le deuxième poste de dépenses[75].
Économie
L'Argentine est un pays industrialisé souvent considéré comme émergent même si certains organismes ne reconnaissent pas cette définition, le pays ayant été un des plus riches de la planète jusqu'au début du XXe siècle mais étant souvent frappé par des crises économiques comme en 1989 ou en 2001. L'Argentine fait partie du G20. Souffrant d'inflation et de difficultés financières, le pays doit souvent faire appel aux organisations économiques internationales telles que le FMI.
L'Argentine est la deuxième puissance économique d'Amérique du Sud derrière le Brésil en termes de PIB nominal. Le pays possède une importante richesse agricole. Parmi les points forts de son agriculture, le pays était aussi régulièrement huitième au palmarès des producteurs mondiaux de céréales au milieu des années 2010, dominé par les États-Unis. Il a aussi de nombreuses capacités industrielles et un certain potentiel minier. Pourtant, l'Argentine connaît d'importants problèmes économiques. Le chômage et le bas niveau de vie continuent de marquer le pays, pourtant largement plus développé que les autres nations du tiers monde.
L'Argentine est le deuxième pays avec plus de développement humain après le Chili du continent latino-américain en 2018 selon les données des Nations unies[3]. Cependant, les inégalités sociales se sont accrues et l'existence de bidonvilles en périphérie des grandes villes persiste.
L'Argentine dispose de nombreuses richesses naturelles et d'une main-d'œuvre très qualifiée, d'une agriculture orientée vers l'exportation et d'un tissu industriel diversifié.
Jusque dans les années 1950, à son apogée économique, l'Argentine était l'un des pays les plus riches du monde. Son PIB par habitant le positionnait au douzième rang mondial, juste devant la France[76],[77].
Malgré ces atouts, l'Argentine a accumulé à la fin des années 1980 une lourde dette externe (dette qu'elle ne compte rembourser qu'en partie, « 10 % »), l'inflation atteignait 100 % par mois et la production avait considérablement chuté.
Pour lutter contre cette crise économique, le gouvernement de Menem a lancé une politique de libéralisation du commerce, de déréglementation et de privatisation. En 1991, le gouvernement décida d'ancrer le peso argentin au dollar américain (technique du currency board) et limita par une loi la croissance de la masse monétaire à la croissance de réserves monétaires. Ce système très particulier du currency board permet l'embellie des années 1990, mais se révèle particulièrement dangereux face aux mouvements erratiques et violents du marché des changes flottants qui suivent la crise économique asiatique et à la forte remontée du dollar qui rendent l'économie argentine non compétitive par rapport à celles de ses voisins. Il sombre lorsque l'économie mondiale entre en récession avec la crise de la bulle Internet au début des années 2000.
La récession, amplifiée par les mesures d'économie drastiques exigées par le Fonds monétaire international (FMI) en contrepartie de son aide en dollars, est extrêmement violente et entraîne une hausse spectaculaire de la pauvreté ainsi que d'importants mouvements sociaux et de rapides changements politiques. L'instabilité politique a plongé l'économie argentine dans une crise sans précédent (2002). Le PIB a chuté de 11 % en 2002 avec la fin de la parité 1 peso = 1 dollar. Cette crise a mené plus de 50 % de la population sous le seuil de pauvreté. Des manifestations ont alors été organisées, suivies de pillages de magasins. Les banques locales incapables de fournir en dollars sont en faillite technique. Le plan argentin de conversion de dette a pour conséquence des pertes sévères pour les créanciers privés. Le pays fait finalement défaut sur sa dette. Les créanciers étrangers comme EDF sont spoliés. Le gouvernement, en dévaluant, rétablit l'équilibre avec le réal brésilien.
Le pays sort de la partie la plus aigüe de la crise dès 2003. Les conséquences les plus durables sont les difficultés récurrentes des gouvernements à financer leurs budgets, le départ du pays de certains investisseurs industriels, une nette diminution de la confiance des créanciers privés et de longs contentieux avec des fonds vautour américains, contentieux qui se poursuivent jusque dans les années 2010. De 2003 à 2007 le PIB repart à 9 % de croissance annuelle, en produisant une réactivation économique dans tous les secteurs, une forte réduction de la pauvreté et un retour de la classe moyenne.
Le , l'Argentine et le Brésil signent, après près de trois ans de négociations, un accord qui doit permettre de protéger les secteurs de production qui pourraient être trop durement affectés par la compétition du pays voisin. Le Mécanisme d’adaptation compétitive (MAC) permet de fixer des droits de douane sur le produit « trop compétitif » du pays voisin pour trois ans, renouvelable une fois.
Depuis 2003, l’Argentine semble avoir repris le chemin de la forte croissance économique et de l'augmentation des salaires. Cependant, l'Argentine semble souffrir de la crise américaine et de la chute du dollar ; en effet, la forte inflation avec un taux « officiel » de 8 à 9 %, pourrait en réalité atteindre 25 % en 2008[78]. Officiellement, le taux de pauvreté était de 20,6 %[79], mais si l'on suppute une inflation de 25 %, en 2008, le taux de personnes vivant au-dessous du seuil de pauvreté a augmenté, passant à 30,3 %[78]. Ce serait le premier renversement de situation depuis 2003. Cependant, l'INDEC indique un taux de pauvreté de 15,8 % pour le second semestre 2008 ; il faut toutefois noter que l'opposition dénonce une manipulation des chiffres. En effet la moitié des Argentins seraient touchés par un niveau de vie inférieur à celui de la plupart des pays développés, et près d'un tiers vivrait sous le seuil de pauvreté national.
Au cours du second trimestre 2008, la croissance économique connaît un certain ralentissement. Au total, le revenu par habitant de l’Argentine est le quatrième plus haut[80] d’Amérique latine, mais sa croissance sur les vingt dernières années est faible et surtout particulièrement volatile. Le niveau de vie argentin est comparable à celui du Mezzogiorno, en Italie du sud.
Le gouvernement argentin introduit en 2020 une taxe sur les grandes fortunes afin de financer des aides sociales, des subventions aux petites entreprises et des programmes de relance économique dans un contexte de crise. La fiscalité est traditionnellement plutôt faible en Argentine et les recettes fiscales de l’État proviennent principalement de la TVA, ce qui favoriserait la montée des inégalités[81].
L'Argentine est en 2021 toujours en situation de profonde crise économique et sociale (taux de pauvreté de 40 %, taux d’inflation de 52 %, pression de la dette auprès du FMI). Dans ce contexte, près de 25% des adolescents âgés de 13 à 17 ans sont obligés de travailler pour aider leurs familles pauvres et endettées[82].
- Monnaie nationale : le peso argentin (ARS)
- PIB par habitant : 21 832 dollars (2014, valeur PPA)[83]
- Taux de chômage : 7,1 % (2014)[84]
- Population vivant sous le seuil de pauvreté : 25,7 % (2017)[85]
- Taux d'inflation : 28,5 % (2018) [86]
- Principaux clients : Brésil (17,3 %), Chili (9,4 %), États-Unis (8,7 %), Chine (7,5 %), Espagne (4,1 %)
- Principaux fournisseurs : Brésil (34,1 %), États-Unis (12,6 %), Chine (9,1 %), Allemagne (4,5 %)
- Gini : 42,4 (2016)[87]
Agriculture
Le secteur agricole contribue au PIB à hauteur de 18 % et représente 61 % du total des exportations. L'Argentine compte environ 200 000 familles de paysans, qui produisent près de 80 % des légumes consommés dans le pays. Pourtant, « la culture prédominante des grands propriétaires fonciers rend invisibles les petits producteurs », déplore Matías Bohl, référent de la Fédération nationale paysanne. La propriété de la terre est très inégalement répartie. Moins de 1 % des propriétaires terriens possèdent 40 % de la terre[88].
L’Argentine est l’un des cinq plus grands producteurs au monde de soja, maïs, tournesol, sorgho, citron et yerba mate, et l’un des 15 plus grands producteurs au monde de blé, orge et raisin. De plus, il est l'un des cinq plus grands producteurs au monde de bœuf et miel[89],[90].
Médias
Le groupe Clarín détient la principale chaîne de télévision du pays : Canal 13, ainsi que le journal argentin qui a le tirage le plus important, le quotidien centriste Clarín. Les quotidiens qui suivent, d'après leur tirage, sont La Nación, Página/12, Tiempo Argentino (es), Crónica (en), La Prensa, et Buenos Aires Herald.
Le service téléphonique a été privatisé en 1990 par le gouvernement de Carlos Menem[91]. Il y a 8,3 millions de lignes téléphoniques installées, soit 23 lignes pour 100 habitants. La téléphonie mobile relie 75 % de la population (28,5 millions de personnes)[92]. Ce nombre élevé est dû en partie au fait que des personnes de faible revenu ont pu durant les dernières années accéder à des plans de paiement.
Il y a près de 1 500 stations de radio, dont 260 sont AM et approximativement 1 150 sont FM.
L'Argentine est le pays d'Amérique latine où l'accès à la télévision par câble est le plus répandu : selon des données de 2001, la grande majorité des foyers possède au moins un téléviseur et 60 % des personnes équipées reçoivent la télévision câblée[93]. Les principales chaines de télévision qui transmettent depuis Buenos Aires sont Canal 13, Telefe, Canal 9 et América TV.
En 2005, 26,3 % de la population avait accès à internet avec plus de dix millions d'utilisateurs dans le pays[94].
En octobre 2009, le gouvernement péroniste argentin promulgue une importante réforme du système médiatique, consistant en une limitation de la concentration des licences, du capital et de l’actionnariat afin de permettre à des médias aux ressources financières plus modestes de se constituer. Après une bataille juridique de quatre ans contre le puissant conglomérat médiatique Clarín, qui contestait la constitutionnalité de la loi, celle-ci est finalement validée par la justice[95]. Sous la présidence de Mauricio Macri (élu en 2015) l'essentiel de la loi est abrogé[96].
Transports
- Autocar. Les compagnies de transport, à travers tout le pays, disposent d'autocars modernes et confortables. C'est le moyen de transport le plus répandu en Argentine. L'ensemble des compagnies assurent la liaison vers toutes les villes importantes du pays et vers les grandes villes des pays limitrophes.
- Chemin de fer. Dans les années 1950, l'Argentine possédait le meilleur réseau de chemin de fer d'Amérique latine, mais les choses ont changé. Le réseau ferroviaire est devenu quasiment inexistant, à l'exception de quelques lignes touristiques. Il reste intéressant de prendre le train pour aller vers les villes du nord et vers la Bolivie, ainsi que vers les villes de la Pampa (Mendoza, Cordoba, Mar del Plata, Tucuman) surtout de nuit. Les prix sont équivalents à ceux pratiqués par les autocars. Au total, il y a 33 744 km, dont 167 km de voies électrifiées.
- Avion. Les vols intérieurs constituent une solution pratique pour visiter l'ensemble du pays. En 2010, le pays comptait environ 1 141 aéroports[97]. Cependant la plupart sont de petits aéroports ou bien des aérodromes avec des pistes non goudronnées.
Rangs internationaux
Organisation | Enquête | Rang |
---|---|---|
Universités Columbia et Yale | Indice de performance environnementale | 38 sur 149 |
Reporters sans frontières | Indice de liberté de la presse | 68 sur 173 |
Transparency International | Indice de perception de la corruption | 105 sur 180 |
PNUD | Indice de développement humain | 45 sur 177 [98] |