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Niveau de la mer

Le niveau de la mer est la position moyenne de la surface de la mer, constituant un niveau de référence considéré comme stable. D'une façon très simplifiée, c'est la ligne médiane entre une marée basse moyenne et une marée haute moyenne à un endroit côtier particulier, hors influence des vagues. La moyenne s'établit sur une échelle de temps au moins annuelle.

Illustration de la variabilité et de la difficulté d'établir le niveau de la mer.
Indication du niveau de la mer, entre JĂ©rusalem et la mer Morte.

Le niveau moyen de la mer est une référence verticale géodésique et altimétrique normalisée qui permet notamment de définir une altitude topographique, positive au-dessus, négative en dessous. Cette référence est utilisée notamment en cartographie, en navigation maritime, dans l'aviation et en météorologie.

Le niveau moyen de la mer est affectĂ© par de nombreux processus et a variĂ© au cours des temps gĂ©ologiques. Il a Ă©tĂ© très stable depuis 2 500 ans et jusqu'au dĂ©but du XXe siècle, oĂą il commence Ă  augmenter. L'Ă©lĂ©vation du niveau de la mer en cours depuis le XXe siècle est causĂ©e par le changement climatique.

Le rayon de la Terre au niveau de la mer varie de plus de 21 km entre celui de l'Ă©quateur et celui du pĂ´le Nord.

Depuis 1985 il existe un système mondial d'observation du niveau de la mer (Global Sea Level Observing System : GLOSS)[1].

Mesures

Il est difficile de réaliser une mesure directe du niveau moyen de la mer. L'altimétrie satellitale permet néanmoins de rapporter l'altitude de la mer à un référentiel terrestre (géoïde ou système géodésique). On peut aussi mesurer la variation du niveau moyen en fonction du temps. Cette variation sert d'indication notamment sur le réchauffement climatique. Toutefois, il n'est pas possible d'effectuer une mesure directe des variations du niveau moyen. En effet, de nombreuses perturbations affectent les mesures avec notamment dans l'ordre d'importance, la marée, les effets de la pression atmosphérique, la houle…

Ces perturbations sont dites hautes fréquences, car leur signature est rapide dans le temps : quelques secondes pour les vagues et quelques heures ou jours pour les marées.

Afin d'obtenir une estimation de la variation du niveau moyen dans le temps, il est nécessaire de soustraire ces perturbations. Les variations du niveau moyen sont très lentes, donc basse fréquence. Ainsi, il suffit d'appliquer sur les séries temporelles de mesures (enregistrées avec un marégraphe) une fonction mathématique dite filtre passe-bas. Cette fonction a pour caractéristique de ne conserver que les basses fréquences d'un signal. Ainsi, les perturbations sont éliminées du signal. Il est nécessaire toutefois pour appliquer ce filtre de posséder un enregistrement de grande qualité et de longue durée (1 an minimum)[2].

Il est également nécessaire de comparer et intégrer les mesures faites localement dans un système de référence mondial commun[3].

La recherche s'intéresse aussi à la mesure rétrospective des changements passés du niveau marin. Les études se fondent pour cela sur divers indices géologiques et paléoenvironnementaux (fossiles, dont foraminifères[4], analyses isotopiques, évaluation des températures et de la salinité en subsurface[5], etc.).

Références

Les divers niveaux de référence utilisés en Europe

La localisation précise de ce point est liée à la définition d'un référentiel géodésique, un ensemble de points dont les coordonnées sont connues. Plusieurs systèmes de ce type coexistent ; en France, l'Institut national de l'information géographique et forestière utilise entre autres un réseau géodésique couvrant le territoire du pays, dont l'origine d'altitude est déterminée par un marégraphe situé à Marseille : définir le niveau de la mer à un autre endroit, visible depuis la terre ferme, peut ensuite se faire par nivellement.

En haute mer, une dĂ©finition moderne fait appel Ă  un gĂ©oĂŻde de rĂ©fĂ©rence, une surface couvrant le globe de telle façon que la gravitĂ© terrestre lui soit toujours perpendiculaire en tout point. En l'absence de forces extĂ©rieures, le niveau de la mer coĂŻnciderait avec ce gĂ©oĂŻde, puisqu'il s'agirait d'une surface Ă©quipotentielle du champ de gravitĂ© terrestre. En rĂ©alitĂ©, les diffĂ©rences de pression, de tempĂ©rature, de salinitĂ© et les courants marins font que ce n'est pas le cas, mĂŞme sur une moyenne Ă  long terme : Ă  l'Ă©chelle du globe, le niveau de la mer n'est donc pas constant et les variations atteignent ±2 m par rapport au gĂ©oĂŻde de rĂ©fĂ©rence. Le niveau de l'ocĂ©an Pacifique Ă  un bout du canal de Panama est par exemple 20 cm plus Ă©levĂ© que celui de l'ocĂ©an Atlantique Ă  l'autre bout.

Le géoïde de référence est une surface complexe. Pour simplifier le problème, on a souvent recours à un ellipsoïde de référence (WGS 84), plus facile à modéliser. Le niveau de la mer résultant varie en revanche beaucoup plus, pouvant s'éloigner d'une centaine de mètres par rapport à l'ellipsoïde de référence par le fait d'anomalies gravitationnelles.

Variations

Plogoff : plage suspendue entre la pointe de Plogoff et la pointe du Mouton

Le niveau de la mer a varié de façon plus ou moins rapide, au cours des âges.

Le dernier minimum date d'il y a environ 20 000 ans, le niveau de la mer Ă©tait un peu plus de 100 m plus bas qu'actuellement. MalgrĂ© cela, le niveau de la mer semble ĂŞtre de nos jours Ă  l'un des niveaux les plus bas depuis plusieurs centaines de millions d'annĂ©es.

Ses oscillations sont dues à de multiples facteurs, en particulier les variations absolues du niveau de la mer (dilatation thermique de l'eau de mer[6], eustatisme dû aux glaciations et au regain d'activité des dorsales), les variations absolues du niveau des continents (isostasie, subsidence[7], tectonique des plaques, rejeu de failles)[8].

La formation ou la fonte de glace flottante (banquise, icebergs) n'a pas d'impact sur le niveau de la mer, du fait du principe d'Archimède.

Le niveau plus élevé de la mer, par exemple lors de la transgression flandrienne, explique la formation des plages suspendues, plages fossiles situées au-dessus du niveau actuel de la mer.

Sur les 30 derniers millénaires

La frise suivante rĂ©sume les variations du niveau de la mer sur les 30 000 dernières annĂ©es et ses implications sur la gĂ©ographie (principalement europĂ©enne). Depuis les 10 000 dernières annĂ©es la montĂ©e du niveau de la mer atteint en moyenne 65 cm par siècle[9].

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Sur les dernières décennies

Selon la synthèse des connaissances scientifiques publiĂ©e en 2021 par le GIEC, le niveau de la mer a augmentĂ© de 0,20 m (intervalle de confiance très probable : 0,15 Ă  0,25 m) entre 1901 et 2018[10], et il augmente de plus en plus rapidement[10]. Entre 2006 et 2018, le niveau de la mer a augmentĂ© de 3,7 mm/an (intervalle de confiance très probable : 3,2 Ă  4,2 mm/an)[10].

Entre et , l’élĂ©vation du niveau moyen des mers est estimĂ©e, après application de la correction de rebond post-glaciaire, Ă  3,11 mm/an. Cette mesure, Ă©tablie par CLS/CNES/LEGOS, est fondĂ©e sur les missions des satellites altimĂ©triques TOPEX/Poseidon et Jason (1 et 2). Les mesures des missions ERS (1 et 2) et ENVISAT servent de comparaison pour d’éventuelles corrections[11].

Prévision

D'après la synthèse des connaissances scientifiques rĂ©alisĂ©e par le GIEC dans le cadre du rapport spĂ©cial ocĂ©ans et cryosphère de 2019, le niveau moyen de la mer augmentera d'ici Ă  2100 (par rapport Ă  sa moyenne sur la pĂ©riode 1986–2005) d'environ 0,43 m (probablement entre 0,29 et 0,59 m) dans un scĂ©nario de faible Ă©mission de gaz Ă  effet de serre (RCP2.6) et d'environ 0,84 m (probablement entre 0,61 et 1,10 m) dans un scĂ©nario de forte Ă©mission de gaz Ă  effet de serre (RCP8.5)[12]. Ce rapport souligne qu'il existe des incertitudes structurelles quant Ă  la vitesse de fonte de l'inlandsis de l'Antarctique, sa vitesse de fonte pourrait ĂŞtre sous-estimĂ©e dans les intervalles de confiance probables, estimĂ©s statistiquement, et pourraient conduire (faible confiance) Ă  une hausse du niveau des mers de 2,3 Ă  5,4 m « Ă  l'Ă©chelle de siècles ou de millĂ©naires » pour le scĂ©nario RCP8.5[12].

A long terme, si toute la glace qui se trouve sur le continent Antarctique fondait, le niveau de la mer s'Ă©lèverait de 70 mètres. Si la glace du Groenland fondait, cela ajouterait 7 mètres supplĂ©mentaires[13].

Une Ă©tude pluridisciplinaire des archives gĂ©ologiques publiĂ©e dans la revue Science en montre que, durant les dernières pĂ©riodes interglaciaires, des rĂ©chauffements de quelques degrĂ©s des zones polaires, analogues Ă  ceux observĂ©s actuellement, ont conduit Ă  des Ă©lĂ©vations des niveaux ocĂ©aniques de plus de 6 mètres[14].

Notes et références

  1. (en) « The Global Sea Level Observing System (GLOSS) », sur gloss-sealevel.org (consulté le )
  2. Variations régionales des dérives du niveau de la mer mesurées par Topex-Poseidon, sur le site cnrs.fr
  3. Merrifield, M., T. Aarup, A. Aman, P. Caldwell, R.M.S. Fernandes, H. Hayashibara, B. Kilonsky, B. Martin Miguez, G. Mitchum, B. Perez Gomez, L. Rickards, D. Rosen, T. Schöne, L. Testut, P.L. Woodworth et G.Wöppelmann (2009) The Global Sea Level Observing System (GLOSS). In OceanObs’09, Ocean Information for society: sustaining the benefits, organizing the potential, Community White Papers, 21-25 Sept. 2009, Venice, Italy. DOI 10.5270/OceanObs09.cwp.63
  4. Leorri, E., B.P. Horton et A. Cearreta, (2008) Development of a foraminifera-based transfer function in the Basque marshes, N. Spain: implications for sea-level studies in the Bay of Biscay. Marine Geology, 251, 60-74.
  5. Ishii M., M. Kimoto, K. Sakamoto et S.I. Iwasaki, 2006, Steric sea level changes estimated from historical ocean subsurface temperature and salinity analyses. Journal of Oceanography, 62, 155-170.DOI : 10.1007/s10872-006-0041-y
  6. Pierre Thomas, « Fonte des glaces, dilatation thermique de l'eau et montée du niveau marin », sur ENS Planet-Terre, (ISSN 2552-9250, consulté le )
  7. Par exemple, la fonte d'une calotte glaciaire provoque un phĂ©nomène de rebond isostatique avec relèvement de l'emplacement de l'ancienne calotte, pendant que la pĂ©riphĂ©rie de l'ancienne calotte (telle que la Bretagne) s'enfonce. Cette subsidence pĂ©ri-palĂ©o-calotte dure pendant 15 000 Ă  20 000 ans après la dĂ©glaciation et se produit toujours actuellement. cf. Pierre Thomas, « "Diapirs" d'argiles tourbeuses quaternaires, plage de Trez-Rouz, presqu'Ă®le de Crozon, Finistère », sur [planet-terre.ens-lyon.fr], .
  8. Charles Pomerol, Yves Lagabrielle, Maurice Renard et Stéphane Guillot, Éléments de géologie, Dunod, , p. 192, 297.
  9. (en) R. C. Anderson, « Submarine topography of Maldivian atolls suggests a sea level of 130 metres below present at the last glacial maximum », Coral Reefs, vol. 17, no 4,‎ , p. 339–341 (DOI 10.1007/s003380050135).
  10. AR6 WGI SPM, p. 6.
  11. Évolution du niveau moyen des mers vu par les altimètres, sur le site aviso.oceanobs.com, consulté le 26 avril 2013.
  12. (en) Intergovernmental Panel on Climate Change, publisher., Special report on the ocean and cryosphere in a changing climate, (lire en ligne), Technical Summary, TS.4.Projections, p 56
  13. L'augmentation du niveau de la mer, sur le site atmosphere.mpg.de
  14. (en) Sea-level rise due to polar ice-sheet mass loss during past warm periods, Science du .

Voir aussi

Bibliographie

Articles connexes

Liens externes

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