RĂ©volution de Mai
La rĂ©volution de Mai (en espagnol RevoluciĂłn de Mayo) est une sĂ©rie d'Ă©vĂ©nements sâĂ©chelonnant sur une semaine, qui eurent lieu du 18 au Ă Buenos Aires. Cette ville Ă©tait alors la capitale de la vice-royautĂ© du RĂo de la Plata, colonie faisant partie de lâEmpire espagnol et comprenant le territoire des actuels Ătats dâArgentine, de Bolivie, du Paraguay et de lâUruguay. Lesdits Ă©vĂ©nements, qui sont commĂ©morĂ©s en Argentine sous le nom de Semaine de Mai (en esp. Semana de Mayo), conduisirent Ă lâĂ©viction du dernier vice-roi Baltasar Hidalgo de Cisneros et Ă lâĂ©tablissement, le , dâun gouvernement local, appelĂ© PremiĂšre Junte (esp. Primera Junta).
Date | â |
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Lieu | Buenos Aires (vice-royautĂ© du RĂo de la Plata) |
RĂ©sultat |
Fin de la vice-royautĂ© du RĂo de la Plata et de la domination espagnole ; CrĂ©ation des Provinces-Unies du RĂo de la Plata et instauration de la PremiĂšre Junte |
Cabildo ouvert dans le cabildo de Buenos Aires | |
Formation dâun gouvernement autonome, la PremiĂšre Junte ; dĂ©signation de Cornelio Saavedra comme son prĂ©sident | |
Destitution du vice-roi Baltasar Hidalgo de Cisneros |
La rĂ©volution de Mai Ă©tait une consĂ©quence directe de la guerre dâindĂ©pendance espagnole, qui sâĂ©tait dĂ©roulĂ©e au cours des deux annĂ©es prĂ©cĂ©dentes. En 1808, le roi dâEspagne, Ferdinand VII, abdiqua en faveur de NapolĂ©on Bonaparte, qui fit don du trĂŽne Ă son frĂšre Joseph. Une Junte suprĂȘme centrale mena la rĂ©sistance contre le gouvernement de Joseph et lâoccupation française de lâEspagne, mais finit, aprĂšs avoir subi une sĂ©rie de revers, par perdre la moitiĂ© nord du pays. Le , les troupes françaises sâemparĂšrent de SĂ©ville et Ă©tendirent leur domination sur une majeure partie de lâAndalousie. La Junte suprĂȘme dut se replier sur Cadix et se dissoudre pour faire place au Conseil de RĂ©gence d'Espagne et des Indes. Par des journaux, en provenance dâEspagne et du reste de lâEurope, apportĂ©s par des navires britanniques, la nouvelle de ces Ă©vĂ©nements parvint finalement Ă Buenos Aires le 18 mai.
Afin de prĂ©server le statu quo politique, le vice-roi Cisneros tenta dâocculter cette nouvelle, mais un groupe dâavocats criollos et de hauts militaires rĂ©ussit Ă obtenir que fĂ»t organisĂ© le 22 mai un cabildo ouvert (esp. cabildo abierto), rĂ©union extraordinaire des notables de la ville, en vue de dĂ©cider de lâavenir de la vice-royautĂ©. Les participants Ă cette rĂ©union se refusĂšrent Ă reconnaĂźtre le Conseil de RĂ©gence espagnol et rĂ©solurent de constituer une junte destinĂ©e Ă gouverner Ă la place de Cisneros, attendu que le gouvernement qui lâavait nommĂ© vice-roi avait cessĂ© dâexister. Dans une tentative de perpĂ©tuer l'ordre social Ă©tabli, câest dâabord Cisneros lui-mĂȘme qui fut dĂ©signĂ© prĂ©sident de la junte par le Cabildo ; cependant, Ă la suite de la forte agitation que cette dĂ©signation provoqua parmi le peuple, Cisneros dĂ©missionna le . La PremiĂšre Junte nouvellement instituĂ©e invita dâautres villes de la vice-royautĂ© Ă envoyer des dĂ©lĂ©guĂ©s afin que ceux-ci se joignissent Ă la Junte de Buenos Aires ; cela eut cependant pour effet de dĂ©clencher une guerre entre les rĂ©gions acceptant l'aboutissement des Ă©vĂ©nements de Buenos Aires, et celles rĂ©cusant cet aboutissement.
La rĂ©volution de Mai est considĂ©rĂ©e comme le point de dĂ©part de la guerre dâindĂ©pendance de lâArgentine, quoique aucune dĂ©claration formelle dâindĂ©pendance nâeĂ»t Ă©tĂ© faite Ă ce moment-lĂ , et que la PremiĂšre Junte continuĂąt de gouverner au nom du roi dĂ©posĂ© Ferdinand VII. En outre, compte tenu que des Ă©vĂ©nements semblables eurent lieu Ă©galement dans nombre dâautres villes de lâAmĂ©rique du Sud espagnole lorsquây fut parvenue la nouvelle de la dissolution de la Junte suprĂȘme centrale, la rĂ©volution de Mai est considĂ©rĂ©e comme un des points de dĂ©part de toutes les guerres d'indĂ©pendance en AmĂ©rique du Sud. Les historiens discutent aujourdâhui sur le propos de savoir si les rĂ©volutionnaires Ă©taient rĂ©ellement loyaux envers la couronne dâEspagne ou si la dĂ©claration de fidĂ©litĂ© au roi nâĂ©tait quâun subterfuge nĂ©cessaire destinĂ© Ă dissimuler le vĂ©ritable objectif â rĂ©aliser lâindĂ©pendance â Ă une population non encore prĂȘte Ă accepter un changement aussi radical. Une dĂ©claration formelle dâindĂ©pendance de lâArgentine ne fut finalement prononcĂ©e que lors du congrĂšs de TucumĂĄn le .
Causes
Causes extérieures
AprĂšs que les Ătats-Unis eurent en 1776 proclamĂ© leur indĂ©pendance dâavec la Grande-Bretagne, les criollos Ă leur tour Ă©taient portĂ©s Ă penser qu'une rĂ©volution pour obtenir lâindĂ©pendance vis-Ă -vis de lâEspagne Ă©tait un objectif rĂ©alisable[1]. De 1775 Ă 1783 en effet, les Treize colonies dĂ©clenchĂšrent la RĂ©volution amĂ©ricaine, puis menĂšrent une guerre dâindĂ©pendance contre leur puissance de tutelle. De plus, le fait que lâEspagne fut venue en aide aux colonies nord-amĂ©ricaines dans leur lutte contre la Grande-Bretagne avait mis Ă mal lâargument selon lequel mettre fin Ă lâallĂ©geance Ă la mĂ©tropole devait ĂȘtre considĂ©rĂ© comme un crime[2].
Dâautre part, les idĂ©aux de la RĂ©volution française de 1789 sâĂ©taient, par le processus dit de la RĂ©volution atlantique, propagĂ©s au-delĂ de lâAtlantique. La RĂ©volution française mit un terme Ă des siĂšcles de monarchie et aboutit au renversement, puis Ă lâexĂ©cution du roi Louis XVI et de la reine Marie-Antoinette, et Ă la suppression des privilĂšges de la noblesse. La mise en cause du concept de monarchie de droit divin, par lâeffet conjuguĂ© des idĂ©es de la RĂ©volution française, en particulier la DĂ©claration des droits de lâhomme et du citoyen, de certaine phrase de la dĂ©claration dâindĂ©pendance amĂ©ricaine, affirmant que tous les hommes ont Ă©tĂ© crĂ©Ă©s Ă©gaux, et mĂȘme de certaines prises de position de lâĂglise espagnole[3], permit lâinstauration dâun rĂ©gime rĂ©publicain en France et aux Ătats-Unis en lieu et place des monarchies, et aussi lâavĂšnement de monarchies constitutionnelles, comme en Grande-Bretagne[4].
Cependant, la diffusion de telles idĂ©es Ă©tait interdite dans les territoires espagnols, de mĂȘme que la mise en vente et la dĂ©tention non autorisĂ©e des livres qui les exposaient. Ces proscriptions furent Ă©dictĂ©es aprĂšs que l'Espagne eut dĂ©clarĂ© la guerre Ă la France Ă la suite de lâexĂ©cution de Louis XVI, et maintenues ensuite nonobstant le traitĂ© de paix de 1796. Tous les efforts pour les garder Ă distance ne purent empĂȘcher les nouvelles des Ă©vĂ©nements de 1789 et les publications rĂ©volutionnaires de se rĂ©pandre en Espagne. De nombreux criollos de lâĂ©poque des LumiĂšres firent connaissance avec les ouvrages dâauteurs critiques lors de leurs Ă©tudes universitaires, que ce soit en Europe ou Ă lâuniversitĂ© de Chuquisaca dans le Haut-PĂ©rou[5]. Des livres en provenance des Ătats-Unis parvenaient dans les colonies espagnoles par Caracas, en raison de la proximitĂ© de cette ville avec les Ătats-Unis et les Indes occidentales anglaises[6].
La rĂ©volution industrielle, engagĂ©e dâabord en Grande-Bretagne, rendue possible par lâutilisation des chemins de fer et de la machine Ă vapeur, entraĂźna une augmentation spectaculaire des capacitĂ©s de production britanniques[7] et dĂ©termina le besoin de nouveaux marchĂ©s pour Ă©couler les produits. La tĂąche de trouver des dĂ©bouchĂ©s Ă©tait devenue particuliĂšrement difficile en raison des guerres napolĂ©oniennes, oĂč sâaffrontaient la France et la Grande-Bretagne, et en particulier du blocus continental, imposĂ© par NapolĂ©on, qui interdisait Ă la Grande-Bretagne d'avoir des Ă©changes commerciaux avec aucun pays europĂ©en. La Grande-Bretagne avait donc besoin de pouvoir commercer avec les colonies espagnoles[8], mais en Ă©tait empĂȘchĂ© par l'obligation quâavaient ces colonies de ne commercer quâavec leur mĂ©tropole[9]. Pour atteindre leurs objectifs Ă©conomiques, la Grande-Bretagne entreprit initialement dâenvahir militairement le RĂo de la Plata aux fins de conquĂ©rir les villes-clef de lâAmĂ©rique espagnole. AprĂšs lâĂ©chec de cette tentative, les Britanniques choisirent de miser sur les volontĂ©s hispano-amĂ©ricaines dâĂ©mancipation vis-Ă -vis de lâEspagne[9].
Le soulĂšvement d'Aranjuez (1808) conduisit Ă lâabdication du roi dâEspagne Charles IV en faveur de son fils Ferdinand VII[10]. Charles IV sollicita NapolĂ©on de le restaurer sur le trĂŽne, mais, au lieu de cela, NapolĂ©on couronna son propre frĂšre Joseph Bonaparte comme le nouveau roi dâEspagne[10], Ă©vĂ©nement connu sous le nom dâabdication de Bayonne. Le couronnement de Joseph, rencontrant une forte rĂ©sistance en Espagne, dĂ©clencha la guerre dâindĂ©pendance espagnole, tandis que la Junte de SĂ©ville prit le pouvoir au nom du roi absent. LâEspagne, qui jusque-lĂ avait Ă©tĂ© une alliĂ©e sĂ»re de la France contre la Grande-Bretagne, fit Ă prĂ©sent alliance avec la Grande-Bretagne contre la France. La Junte de SĂ©ville nĂ©anmoins fut finalement vaincue, et remplacĂ©e par un Conseil de RĂ©gence siĂ©geant Ă Cadix[11].
Causes intérieures
LâEspagne interdisait Ă ses possessions amĂ©ricaines de commercer avec dâautres pays ou avec des colonies Ă©trangĂšres, et sâimposait elle-mĂȘme comme seul pays acheteur et fournisseur pour les Ă©changes internationaux. Cette situation Ă©tait prĂ©judiciable Ă la Vice-royautĂ©, attendu que lâĂ©conomie espagnole nâavait pas la capacitĂ© dâabsorber toutes les marchandises provenant des colonies[12], et provoquait des pĂ©nuries Ă©conomiques et la rĂ©cession. Les voies commerciales espagnoles privilĂ©giaient les ports de Mexico et de Lima, au dĂ©triment de Buenos Aires ; cette politique de la mĂ©tropole sâexplique par la prĂ©sence de la piraterie, qui obligeait Ă faire accompagner dâune forte escorte militaire les navires de commerce, et par le fait que Buenos Aires en contrepartie ne dĂ©tenait pas de ressources en or ou argent, ni ne disposait de populations indigĂšnes Ă©tablies desquelles obtenir des matiĂšres premiĂšres ou susceptibles dâĂȘtre soumises au systĂšme de lâencomienda, ce qui rendait les convois de navires Ă destination de Buenos Aires beaucoup moins rentables que ceux Ă destination de Mexico ou Lima[13]. Il en rĂ©sulta que la ville se fournissait par la contrebande en produits quâon ne pouvait obtenir lĂ©galement. Cette activitĂ© contrebandiĂšre, laquelle Ă©tait, quoique illĂ©gale, tolĂ©rĂ©e comme un moindre mal par la plupart des autoritĂ©s locales, Ă©galait Ă lâoccasion en volume le commerce lĂ©gal avec lâEspagne[14]. Deux factions antagonistes se faisaient face : les hacendados, propriĂ©taires de haciendas (grands domaines agricoles), souhaitaient le libre-Ă©change afin de pouvoir vendre leurs productions outre-mer, alors que les marchands, qui, Ă lâinverse, profitaient du prix Ă©levĂ© des produits importĂ©s en contrebande, sâopposaient au libre-Ă©change, de peur de voir les prix baisser[15].
La monarchie espagnole nommait ses propres candidats Ă la plupart des fonctions politiques de la Vice-royautĂ©, gĂ©nĂ©ralement en donnant la prĂ©fĂ©rence Ă des Espagnols dâEurope[16]. Dans la plupart des cas, les personnes ainsi dĂ©signĂ©es nâavaient quâune faible connaissance des questions locales ou sây montraient peu intĂ©ressĂ©es. Il en rĂ©sulta une rivalitĂ© croissante entre criollos, gens de souche europĂ©enne mais nĂ©s en AmĂ©rique, et pĂ©ninsulaires, Espagnols nĂ©s en Europe. La plupart des criollos estimaient que les pĂ©ninsulaires bĂ©nĂ©ficiaient dâavantages immĂ©ritĂ©s et dâun traitement prĂ©fĂ©rentiel en politique et dans la sociĂ©tĂ©. Le bas clergĂ© avait un sentiment semblable Ă lâendroit des Ă©chelons supĂ©rieurs de la hiĂ©rarchie religieuse[17]. Les Ă©vĂ©nements, certes, se succĂ©daient Ă un rythme plus lent que dans le mouvement indĂ©pendantiste aux Ătats-Unis. Cela sâexplique en partie par le fait que la totalitĂ© du systĂšme scolaire en AmĂ©rique espagnole Ă©tait encore aux mains du clergĂ© ; aussi la population tendait-elle Ă avoir les mĂȘmes idĂ©es conservatrices et Ă suivre les mĂȘmes coutumes que celles en vigueur en Espagne[18].
Buenos Aires et Montevideo rĂ©ussirent par deux fois Ă rĂ©sister victorieusement Ă une invasion britannique du RĂo de la Plata. En 1806, un petit corps dâarmĂ©e britannique, commandĂ© par William Carr Beresford, sâempara de Buenos Aires pour une brĂšve pĂ©riode ; la ville fut libĂ©rĂ©e par lâarmĂ©e montĂ©vidĂ©enne sous le commandement de Jacques de Liniers[19]. LâannĂ©e suivante, un corps dâarmĂ©e plus important sâempara Ă nouveau de Montevideo, mais fut submergĂ© par les forces de Buenos Aires et dut capituler et restituer Montevideo Ă la vice-royautĂ©[19]. Aucun secours ne vint dâEspagne lors de ces deux invasions. Les prĂ©paratifs de dĂ©fense prĂ©cĂ©dant la deuxiĂšme invasion comportaient aussi la formation de milices criollos, nonobstant leur interdiction[20]. LâarmĂ©e criollo la plus importante Ă©tait le premier rĂ©giment dâinfanterie, ou rĂ©giment de Patriciens (esp. Regimiento de Patricios), commandĂ© par Cornelio Saavedra. Ces faits donnĂšrent aux criollos un pouvoir militaire et une influence politique quâils nâavaient pas auparavant ; en outre, la victoire ayant Ă©tĂ© obtenue sans aucune aide de lâEspagne, la confiance des criollos dans leurs capacitĂ©s dâindĂ©pendance en sortit grandie[21].
En 1808, la famille royale portugaise, ayant Ă©chappĂ© Ă lâinvasion du Portugal par Bonaparte, quitta lâEurope pour sâĂ©tablir au BrĂ©sil. Charlotte Joachime, sĆur de Ferdinand VII, Ă©tait lâĂ©pouse dâun prince portugais. Comme elle avait pu ainsi se soustraire Ă la capture de la famille royale espagnole, elle tenta de prendre la tĂȘte, en tant que rĂ©gente, des vice-royautĂ©s espagnoles. Ce projet politique, connu sous le nom de charlottisme, fut conçu dans le but dâempĂȘcher une invasion des AmĂ©riques par les Français. Une petite sociĂ©tĂ© secrĂšte, composĂ©e de politiciens criollos tels que Manuel Belgrano et Juan JosĂ© Castelli, et de militaires comme Antonio Beruti et HipĂłlito Vieytes, soutenait ce projet. Ils y voyaient la possibilitĂ© de crĂ©er un gouvernement local appelĂ© Ă remplacer la tutelle europĂ©enne, c'est-Ă -dire de franchir un premier pas potentiel en direction dâune dĂ©claration dâindĂ©pendance[22]. Sâopposaient au projet le vice-roi Liniers, la plupart des pĂ©ninsulaires, et des criollos comme Mariano Moreno, Juan JosĂ© Paso, et Cornelio Saavedra, qui soupçonnaient que ce projet cachĂąt des ambitions expansionnistes portugaises dans la rĂ©gion[23]. Charlotte Joachime elle-mĂȘme rejeta finalement le projet, car les porteurs de celui-ci se proposaient de la mettre Ă la tĂȘte dâune monarchie constitutionnelle, alors qu'elle entendait rĂ©gner sous un rĂ©gime de monarchie absolue ; elle dĂ©nonça au vice-roi les motivations rĂ©volutionnaires contenues dans les lettres dâappui qui lui avaient Ă©tĂ© envoyĂ©es. Sans autre appui important, les prĂ©tentions de Charlotte sâĂ©vanouirent, mĂȘme si, aprĂšs la rĂ©volution encore, certains maintinrent lâidĂ©e de son couronnement comme stratĂ©gie dilatoire. Mais dĂ©jĂ , lâinfante elle-mĂȘme dĂ©sapprouvait totalement le tour quâavaient pris les Ă©vĂ©nements. Dans une lettre Ă JosĂ© Manuel Goyeneche, elle Ă©crivit :
« Dans ces circonstances, je crois de mon devoir de te requĂ©rir et de te charger dâemployer tous tes efforts Ă aller dĂšs que possible Ă Buenos Aires ; et finis-en une fois pour toutes avec ces perfides rĂ©volutionnaires, avec les mĂȘmes exĂ©cutions que tu as pratiquĂ©es dans la ville de La Paz. »
La Grande-Bretagne, solidement ancrĂ©e dans lâEmpire portugais, sâopposait Ă©galement au projet : elle voulait empĂȘcher que lâEspagne n'Ă©clatĂąt en une multitude de royaumes, et jugeait Charlotte Joachime incapable de faire barrage aux sĂ©paratismes[24].
Prélude
En 1810, les opinions divergentes des diffĂ©rents secteurs de la sociĂ©tĂ© quant Ă la voie Ă suivre dans la vice-royautĂ© tendaient Ă se rejoindre dans une attitude expectative. Une situation analogue sâĂ©tait produite un siĂšcle auparavant, lors de la guerre de Succession dâEspagne opposant les Habsbourg et les Bourbons, lorsque, pendant quinze ans, les colonies espagnoles ne surent pas qui reconnaĂźtre comme leur lĂ©gitime souverain. Ă cette occasion, dĂšs que Philippe V se fut installĂ© sur le trĂŽne dâEspagne, les fonctionnaires des colonies le reconnurent, et tout reprit son cours normal. Il est probable quâen 1810, beaucoup, en particulier parmi les Espagnols, croyaient quâil suffirait de constituer une junte de gouvernement, puis attendre que la normalitĂ© revĂźnt en Espagne[25].
Le gouvernement de Liniers
Buenos Aires une fois reconquise aprĂšs les invasions britanniques du RĂo de la Plata en 1806, la population ne pouvait accepter que Rafael de Sobremonte, Ă qui elle reprochait de sâĂȘtre enfui Ă CĂłrdoba avec le trĂ©sor public alors que la bataille faisait encore rage, fĂ»t maintenu vice-roi. Il existait certes une loi, promulguĂ©e par Pedro de Cevallos, requĂ©rant que le trĂ©sor fĂ»t placĂ© en lieu sĂ»r en cas dâattaque Ă©trangĂšre, nĂ©anmoins Sobremonte Ă©tait perçu comme un poltron par la population[26]. La Real Audiencia de Buenos Aires ne lui permit pas de retourner Ă Buenos Aires et nomma Santiago de Liniers, acclamĂ© comme un hĂ©ros populaire, vice-roi par intĂ©rim. CâĂ©tait lĂ , fait sans prĂ©cĂ©dent, la premiĂšre fois quâun vice-roi espagnol Ă©tait destituĂ© par un organe de gouvernement local, et non par le roi dâEspagne lui-mĂȘme[27]. Cette nomination fut nĂ©anmoins ratifiĂ©e ultĂ©rieurement par le roi Charles IV[28]. Liniers entreprit dâarmer lâensemble de la population de Buenos Aires, y compris les criollos et les esclaves, et sut refouler une deuxiĂšme tentative britannique dâinvasion en 1807.
Le gouvernement de Liniers avait la faveur des criollos, mais non des pĂ©ninsulaires, tels que le nĂ©gociant MartĂn de Ălzaga ou le gouverneur de Montevideo, Francisco Javier de ElĂo[29]. Ce dernier requit des autoritĂ©s espagnoles de dĂ©signer un nouveau vice-roi ; Ă la suite de lâĂ©clatement de la guerre dâindĂ©pendance espagnole, il mit sur pied Ă Montevideo une junte chargĂ©e de passer au crible tous les ordres en provenance de Buenos Aires, et qui se rĂ©servait le droit dâignorer ces ordres, sans toutefois nier ouvertement lâautoritĂ© du vice-roi ou dĂ©clarer Montevideo indĂ©pendant[30].
MartĂn de Ălzaga lança une rĂ©bellion, dite Asonada de Ălzaga, afin dâĂ©carter Liniers. Le premier janvier 1809, un cabildo ouvert â rĂ©union extraordinaire de citoyens tenue dans le cabildo (conseil municipal) local â prĂ©sidĂ© par Ălzaga, exigea la dĂ©mission de Liniers et nomma une junte au nom de Ferdinand VII ; la milice espagnole et un groupe de gens convoquĂ©s par le conseil s'Ă©taient rassemblĂ©s pour appuyer la rĂ©bellion. Certains criollos, en particulier Mariano Moreno, soutinrent la mutinerie, y voyant un moyen de rĂ©aliser l'indĂ©pendance, mais ils Ă©taient en petit nombre[31]. Dâautres soupçonnaient Ălzaga de vouloir Ă©carter le vice-roi afin de se soustraire Ă son autoritĂ© politique, tout en se proposant de maintenir inchangĂ©es les disparitĂ©s sociales entre criollos et pĂ©ninsulaires[32]. LâĂ©meute fut promptement brisĂ©e aprĂšs que les milices criollos menĂ©es par Cornelio Saavedra eurent cernĂ© la place et dispersĂ© les insurgĂ©s. La mutinerie ratĂ©e eut pour rĂ©sultat que les milices rebelles, c'est-Ă -dire toutes les milices pĂ©ninsulaires, furent dĂ©sarmĂ©es, et que le pouvoir des criollos fut corrĂ©lativement augmentĂ©. La rivalitĂ© entre criollos et pĂ©ninsulaires sâexacerba. Les meneurs du complot, Ă lâexception de Moreno, furent envoyĂ©s en exil Ă Carmen de Patagones. Javier de ElĂo les en libĂ©ra et leur accorda lâasile politique Ă Montevideo[33].
Le gouvernement de Cisneros
La Junte de SĂ©ville remplaça Liniers par lâofficier de marine Baltasar Hidalgo de Cisneros, ancien combattant de la bataille de Trafalgar, pour mettre fin Ă lâagitation politique dans le RĂo de la Plata. Il arriva Ă Montevideo en pour la passation de pouvoir. Manuel Belgrano proposa que Liniers rĂ©sistĂąt, au motif quâil avait Ă©tĂ© confirmĂ© dans le rĂŽle de vice-roi par lâautoritĂ© du roi dâEspagne, alors quâune telle lĂ©gitimitĂ© faisait dĂ©faut Ă Cisneros[34]. Quoique les milices criollos fussent disposĂ©es Ă soutenir Liniers contre Cisneros[35], Liniers remit sans rĂ©sistance le pouvoir entre les mains de Cisneros. Javier de ElĂo accepta lâautoritĂ© du nouveau vice-roi et dĂ©cida de dissoudre la Junte de Montevideo. Cisneros rĂ©arma les milices pĂ©ninsulaires dĂ©mantelĂ©es, et gracia les partis responsables de la mutinerie[36]. Ălzaga en revanche ne fut pas libĂ©rĂ©, mais sa sentence commuĂ©e en assignation Ă rĂ©sidence[37].
Dans le Haut-PĂ©rou, les Ă©vĂ©nements dâEspagne faisaient Ă©galement l'objet de prĂ©occupations et la lĂ©gitimitĂ© des autoritĂ©s locales y Ă©tait aussi mise en cause. Le , Ă la suite d'une rĂ©volution Ă Chuquisaca, le gouverneur RamĂłn GarcĂa de LeĂłn y Pizarro (es) fut dĂ©posĂ© et remplacĂ© par Juan Antonio Ălvarez de Arenales[38]. Le 16 juillet, dans la ville de La Paz, un deuxiĂšme mouvement rĂ©volutionnaire, dirigĂ© par le colonel Pedro Domingo Murillo, dĂ©mit le gouverneur et Ă©lut une junte, la dĂ©nommĂ©e Junta Tuitiva de los Derechos del Pueblo (litt. Junte Gardienne des Droits du Peuple)[39]. Une rĂ©action vive des autoritĂ©s espagnoles permit de dĂ©faire ces rĂ©bellions. Une armĂ©e de 1 000 hommes envoyĂ©e de Buenos Aires ne rencontra aucune rĂ©sistance Ă Chuquisaca, sâempara de la ville, et destitua la Junte[40]. Murillo tenta de dĂ©fendre La Paz, mais ses 800 hommes Ă©taient complĂštement surpassĂ©s en nombre par les plus de 5 000 hommes envoyĂ©s de Lima[41]. Il fut dĂ©capitĂ© par la suite, en mĂȘme temps que dâautres meneurs, et leurs tĂȘtes furent exhibĂ©es en guise de dissuasion[42]. Ces mesures contrastaient fortement avec la grĂące dont avaient bĂ©nĂ©ficiĂ© MartĂn de Ălzaga et dâautres aprĂšs une brĂšve pĂ©riode dâemprisonnement, ce qui eut pour effet dâexacerber encore le ressentiment des criollos envers les pĂ©ninsulaires[43].
Juan JosĂ© Castelli assistait aux dĂ©libĂ©rations Ă lâuniversitĂ© Saint-François-Xavier, au moment oĂč Bernardo de Monteagudo conçut le Syllogisme de Chuquisaca, qui servit de justification lĂ©gale Ă lâautonomie, et quâil formula ainsi : « Doit-on suivre le destin de lâEspagne ou rĂ©sister en AmĂ©rique ? Les Indes sont une possession personnelle du roi dâEspagne ; le roi est empĂȘchĂ© de rĂ©gner ; en consĂ©quence, les Indes doivent se gouverner elles-mĂȘmes. » Ce raisonnement dĂ©termina lâattitude adoptĂ©e par Castelli lors de la Semaine de Mai[44].
Le , Cisneros institua la Cour de Surveillance politique (Juzgado de Vigilancia PolĂtica), chargĂ©e de poursuivre les francisĂ©s (afrancesados) et les indĂ©pendantistes[45]. Cependant, il rejeta la proposition de lâĂ©conome JosĂ© MarĂa Romero de bannir un certain nombre de personnes considĂ©rĂ©es dangereuses pour le rĂ©gime espagnol, comme Saavedra, Paso, Chiclana, Vieytes, Balcarce, Castelli, Larrea, Guido, Viamonte, Moreno et SĂĄenz[46]. Il mit en garde de ne pas propager de nouvelles pouvant ĂȘtre considĂ©rĂ©es comme subversives.
Les criollos Ă©taient conscients que nâimporte quel prĂ©texte pouvait suffire Ă provoquer lâĂ©clatement dâune rĂ©volution. En avril 1810, Cornelio Saavedra prononça sa cĂ©lĂšbre phrase devant ses amis : « Ce nâest pas lâheure encore, laissez le temps aux figues de mĂ»rir, et alors nous les mangerons »[47], signifiant par lĂ quâil nâappuierait aucune action irrĂ©flĂ©chie contre le vice-roi, mais quâil attendait quelque moment stratĂ©giquement favorable, tel quâun avantage dĂ©cisif remportĂ© par les forces napolĂ©oniennes dans leur guerre contre l'Espagne[48].
DĂ©roulement de la Semaine de Mai
Les historiens dĂ©finissent la Semaine de Mai comme lâintervalle de temps situĂ© entre la confirmation de la chute de la Junte de SĂ©ville le , et la destitution de Cisneros et lâinstauration de la PremiĂšre Junte le [49].
Le , la goĂ©lette de guerre britannique HMS Mistletoe, en provenance de Gibraltar, aborda Ă Buenos Aires, porteuse de journaux europĂ©ens rapportant la dissolution de la Junte de SĂ©ville au mois de janvier prĂ©cĂ©dent. La ville de SĂ©ville avait Ă©tĂ© envahie par les troupes françaises, qui occupaient dĂ©jĂ une majeure partie de la pĂ©ninsule IbĂ©rique. AprĂšs que le roi Ferdinand VII eut Ă©tĂ© dĂ©posĂ© par les abdications dites de Bayonne, la Junte Ă©tait lâun des derniers bastions du pouvoir de la couronne espagnole. Le 17, des nouvelles concordantes venues de Montevideo, apportĂ©es le 13 par la frĂ©gate britannique HMS John Paris, parvinrent Ă Buenos Aires ; sây ajoutait lâinformation que quelques-uns des anciens membres de la Junte sâĂ©taient rĂ©fugiĂ©s sur lâĂźle de LeĂłn Ă Cadix, pour y Ă©tablir une Junte. Un Conseil de rĂ©gence dâEspagne et des Indes fut constituĂ©, mais aucun des deux vaisseaux ne transmit cette nouvelle. Au contraire de la Junte de SĂ©ville, perçue comme rĂ©ceptive aux idĂ©es nouvelles, le Conseil de RĂ©gence de Cadix ne fut pas considĂ©rĂ© comme le prolongement de la rĂ©sistance espagnole, mais comme une tentative de restaurer lâabsolutisme en Espagne. Les patriotes sud-amĂ©ricains craignaient autant une restauration absolutiste quâune victoire française complĂšte dans la pĂ©ninsule IbĂ©rique[50]. Cisneros tenta dâocculter les nouvelles en contrĂŽlant les vaisseaux britanniques et en faisant saisir tout journal qui arrivait, mais un exemplaire parvint nĂ©anmoins entre les mains de Manuel Belgrano et de son cousin Juan JosĂ© Castelli[51]. Ils rĂ©pandirent la nouvelle chez les autres patriotes et mirent en cause la lĂ©gitimitĂ© du vice-roi, celui-ci ayant Ă©tĂ© nommĂ© par la Junte dĂ©chue[51].
La nouvelle parvint Ă©galement aux oreilles de Cornelio Saavedra, commandant du rĂ©giment de Patriciens. Saavedra, qui, Ă des occasions antĂ©rieures, avait dĂ©conseillĂ© de prendre des mesures Ă lâencontre du vice-roi, et considĂ©rait que du point de vue stratĂ©gique, le moment idĂ©al pour mettre en Ćuvre le projet rĂ©volutionnaire serait l'instant oĂč les forces napolĂ©oniennes auraient obtenu un avantage dĂ©cisif dans leur guerre contre lâEspagne, conclut Ă prĂ©sent que lâheure idĂ©ale Ă©tait venue de tenter des actions contre Cisneros[52]. MartĂn RodrĂguez proposa de renverser le vice-roi par la force, mais Castelli et Saavedra rejetĂšrent cette idĂ©e et proposĂšrent la tenue dâun cabildo ouvert[53].
Vendredi 18 mai et samedi 19 mai
Quelque effort quâeĂ»t fait le vice-roi Cisneros pour occulter la nouvelle de la dĂ©faite espagnole, la rumeur sâĂ©tait propagĂ©e Ă travers tout Buenos Aires. La population Ă©tait inquiĂšte, une grande activitĂ© rĂ©gnait dans les casernes et sur la Plaza, et la plupart des magasins avaient fermĂ© leurs portes[54]. Le CafĂ© des Catalans (CafĂ© de los Catalanes) et la Fonda de Naciones, lieux de rĂ©union habituels des criollos, devinrent des enceintes de discussions politiques et les lieux de proclamations radicales ; Francisco JosĂ© Planes y clama que Cisneros devait ĂȘtre pendu sur la Plaza Mayor en reprĂ©sailles de lâexĂ©cution des chefs de lâinfortunĂ©e rĂ©volution de La Paz[55]. Ceux qui avaient sympathisĂ© avec le gouvernement absolutiste furent houspillĂ©s, mais les bagarres furent de peu de consĂ©quence, car nul n'Ă©tait autorisĂ© Ă se saisir des fusils ou des sabres dans les casernes[56].
Le vice-roi, Ă lâeffet d'apaiser les criollos, donna sa propre version des Ă©vĂ©nements par la voie dâune proclamation. Bien que connaissant la nouvelle[57], il se borna Ă relever que la situation dans la pĂ©ninsule IbĂ©rique Ă©tait dĂ©licate, sans confirmer la chute de la Junte. RequĂ©rant de faire allĂ©geance au roi Ferdinand VII, il proposa de crĂ©er un corps de gouvernement qui dirigerait au nom de Ferdinand VII, conjointement avec le vice-roi du PĂ©rou JosĂ© Fernando de Abascal y Sousa, le gouverneur de PotosĂ Francisco de Paula Sanz et le prĂ©sident de lâAudiencia royale de Charcas Vicente Nieto[58]. La proclamation comportait le passage suivant : « En AmĂ©rique espagnole, le trĂŽne des Rois catholiques se maintiendra, eĂ»t-il succombĂ© dans la pĂ©ninsule. (...) LâautoritĂ© supĂ©rieure ne prendra une quelconque dĂ©cision qui n'ait Ă©tĂ© prĂ©alablement convenue conjointement avec toutes les reprĂ©sentations de la capitale, auxquelles se seront jointes postĂ©rieurement celles des provinces de son ressort, pendant quâentre-temps s'Ă©tablisse, en accord avec les autres vice-royautĂ©s, une reprĂ©sentation de la souverainetĂ© du seigneur Ferdinand VII[59] ».
Sur ces entrefaites cependant, lâagitation populaire ne cessait de croĂźtre. Ne se laissant pas berner par le communiquĂ© du vice-roi, quelques criollos tenaient au domicile de NicolĂĄs RodrĂguez Peña et dâHipĂłlito Vieytes des rĂ©unions secrĂštes, oĂč ils dĂ©signĂšrent une commission reprĂ©sentative, composĂ©e de Juan JosĂ© Castelli et de MartĂn RodrĂguez, Ă lâeffet de requĂ©rir que Cisneros convĂźnt dâun cabildo ouvert pour dĂ©cider de lâavenir de la vice-royautĂ©.
Dans la nuit du 19 mai, les discussions se poursuivaient au domicile de RodrĂguez Peña. Saavedra, appelĂ© par Viamonte, rejoignit la rĂ©union. Il y avait des chefs militaires, tels que RodrĂguez, Ocampo, Balcarce et DĂaz VĂ©lez ; et des chefs civils, comme Castelli, Vieytes, Alberti et Paso. Ils convinrent que Belgrano et Saavedra se mettraient en rapport avec lâalcade Juan JosĂ© de Lezica, et Castelli avec le procureur JuliĂĄn de Leiva, pour solliciter leur appui. Ils rĂ©clameraient que le vice-roi permĂźt la tenue dâun cabildo ouvert, Ă dĂ©faut de quoi, ajoutĂšrent-ils, le peuple et les troupes criollos marcheraient sur la Plaza Mayor, pour forcer par tous les moyens utiles le vice-roi Ă dĂ©missionner, et le remplacer ensuite par un gouvernement de patriotes[60]. Saavedra fit Ă Lezica la remarque que lui-mĂȘme (Saavedra) Ă©tait soupçonnĂ© dâĂȘtre un traĂźtre potentiel pour avoir prĂŽnĂ© Ă plusieurs reprises de procĂ©der par dĂ©marches prudentes et mesurĂ©es â remarque destinĂ©e en rĂ©alitĂ© Ă presser Lezica Ă mettre en branle le systĂšme lĂ©gal pour permettre au peuple de sâexprimer, sous peine de risquer une rĂ©bellion de grande ampleur[61]. Lezica demanda de la patience et du temps pour convaincre le vice-roi, et pria de rĂ©server en ultime recours la tenue dâune manifestation massive, argumentant que si le vice-roi Ă©tait dĂ©posĂ© de cette maniĂšre, cela Ă©quivaudrait Ă une rĂ©bellion, et transformerait les rĂ©volutionnaires en criminels[62]. Manuel Belgrano fixa le lundi prochain comme dernier dĂ©lai pour agrĂ©er le cabildo ouvert ; ensuite il passerait Ă lâaction directe[63]. UltĂ©rieurement, au cours de la RĂ©volution, Leiva devait intervenir comme mĂ©diateur, agissant Ă la fois comme confident de Cisneros et comme nĂ©gociateur de confiance pour les rĂ©volutionnaires plus modĂ©rĂ©s[64].
Dimanche 20 mai
Lezica ayant fait part Ă Cisneros de la requĂȘte, le vice-roi consulta JuliĂĄn de Leyva, qui se dĂ©clara favorable Ă la tenue dâun cabildo ouvert. Avant de prendre sa dĂ©cision, le vice-roi ordonna aux chefs militaires de se rendre au fort Ă sept heures du soir. Des rumeurs se rĂ©pandirent selon lesquelles il sâagissait dâun guet-apens destinĂ© Ă les capturer et Ă se rendre maĂźtre des casernes. Pour prĂ©venir ce risque, les chefs militaires prirent dâabord le commandement des grenadiers qui gardaient le fort et sâassurĂšrent les clefs de tous les accĂšs de celui-ci pendant lâaudience chez le vice-roi[65]. AprĂšs que Cisneros leur eut, selon ce quâil rapporta lui-mĂȘme dans ses MĂ©moires, rappelĂ© les serments de fidĂ©litĂ© rĂ©pĂ©tĂ©s par lesquels ils sâĂ©taient engagĂ©s Ă dĂ©fendre lâautoritĂ© et Ă maintenir lâordre public, quâil les eut exhortĂ©s de mettre en pratique leur fidĂ©litĂ© Ă Sa MajestĂ© et Ă la patrie, et quâil eut Ă cet effet rĂ©clamĂ© des renforts militaires, le colonel Cornelio Saavedra, chef du rĂ©giment de Patriciens, rĂ©pliqua, au nom de tous les rĂ©giments crĂ©oles, en comparant la situation internationale actuelle avec celle prĂ©valant au moment de la mutinerie dâĂlzaga, un an auparavant, et en soulignant que l'Espagne Ă©tait Ă prĂ©sent presque totalement sous la domination napolĂ©onienne ; il remarqua que les provinces espagnoles non encore vaincues Ă©taient trĂšs exiguĂ«s en comparaison des AmĂ©riques et rejeta les prĂ©tentions de souverainetĂ© de celles-lĂ sur celles-ci. Il conclut que les armĂ©es locales ne souhaitaient pas suivre le destin de lâEspagne, mais au contraire suivre leur propre voie. Enfin, il fit observer que la Junte de SĂ©ville, qui avait nommĂ© vice-roi Cisneros, avait cessĂ© dâexister, en raison de quoi il dĂ©niait Ă Cisneros toute lĂ©gitimitĂ© comme vice-roi, et refusait de lui apporter la protection des troupes sous son commandement[66].
Ă minuit, au domicile de RodrĂguez Peña, eut lieu une rĂ©union oĂč les dirigeants discutaient des Ă©vĂ©nements de la journĂ©e Ă©coulĂ©e. Castelli et MartĂn RodrĂguez furent dĂ©pĂȘchĂ©s vers le fort pour une entrevue avec Cisneros. Terrada, commandant des grenadiers dâinfanterie, dont la caserne se trouvait sous les fenĂȘtres de Cisneros, les rejoignit, sa prĂ©sence Ă©tant propre Ă empĂȘcher le vice-roi de faire appel Ă une aide militaire pour faire prisonniers ses visiteurs[67]. Les gardes les ayant laissĂ© passer sans les annoncer, ils trouvĂšrent Cisneros occupĂ© Ă jouer aux cartes avec le brigadier Quintana, le procureur Caspe et l'aide de camp Coicolea. Castelli et RodrĂguez rĂ©itĂ©rĂšrent leur requĂȘte dâun cabildo ouvert, ce Ă quoi Cisneros rĂ©agit avec colĂšre, estimant leur requĂȘte outrageante. RodrĂguez, l'interrompant, lui enjoignit de donner une rĂ©ponse dĂ©finitive[68]. Ă lâissue de brefs conciliabules avec Caspe, Cisneros finit, de mauvaise grĂące, par donner son consentement[69]. Le cabildo ouvert aurait lieu le 22 mai.
Ce mĂȘme soir, il y avait dans la ville une reprĂ©sentation thĂ©Ăątrale sur le thĂšme de la tyrannie, intitulĂ©e Rome sauvĂ©e, et Ă laquelle assistaient nombre de rĂ©volutionnaires. Lâacteur principal Ă©tait Morante, dans le rĂŽle de CicĂ©ron. Le commissaire de police requit Morante de feindre une maladie et de ne pas apparaĂźtre sur scĂšne, de sorte que la piĂšce pĂ»t ĂȘtre remplacĂ©e par Misanthropie et Repentance du poĂšte allemand August von Kotzebue. Des rumeurs de censure policiĂšre se propagĂšrent promptement ; Morante dĂ©daigna l'injonction et joua la piĂšce comme prĂ©vu. Au quatriĂšme acte, Morante prononça une allocution patriotique, oĂč il fut question de la Rome antique menacĂ©e par les Gaulois et de la nĂ©cessitĂ© dâune direction forte pour rĂ©sister au danger[70]. Cela eut lâeffet dâexalter les esprits rĂ©volutionnaires, et provoqua une frĂ©nĂ©tique ovation. Juan JosĂ© Paso se dressa, criant ÂĄViva Buenos Aires libre!, et une petite rixe sâensuivit[70]. La reprĂ©sentation terminĂ©e, les rĂ©volutionnaires retournĂšrent au domicile de Peña. Ils firent part du rĂ©sultat de la derniĂšre entrevue, mais doutaient que Cisneros tiendrait parole. Ils organisĂšrent une manifestation pour le jour suivant pour assurer que le cabildo ouvert eĂ»t bien lieu comme dĂ©cidĂ©[70].
Lundi 21 mai
Les prĂ©paratifs du cabildo ouvert, commencĂ©s Ă trois heures de lâaprĂšs-midi, furent interrompus par lâarrivĂ©e de 600 hommes armĂ©s, groupĂ©s sous l'appellation de LĂ©gion infernale, qui entreprirent dâoccuper la place de la Victoire (Plaza de la Victoria, l'actuelle Plaza de Mayo) et rĂ©clamaient haut et fort la tenue dâun cabildo ouvert et la dĂ©mission du vice-roi Cisneros. Ils brandissaient un portrait de Ferdinand VII et les revers de leur veste Ă©taient ornĂ©s dâun ruban blanc symbolisant lâunitĂ© criollo-espagnole. Les meneurs des agitateurs (chisperos) Ă©taient Domingo French, le facteur de la ville, et Antonio Beruti, employĂ© du TrĂ©sor. Des rumeurs circulaient selon lesquelles Cisneros avait Ă©tĂ© tuĂ© et Saavedra sâapprĂȘtait Ă prendre la direction du gouvernement[71]. Saavedra, qui se trouvait au mĂȘme moment Ă la caserne, Ă©tait embarrassĂ© par cette manifestation. Sâil estimait que la violence devait ĂȘtre stoppĂ©e et que des mesures radicales telles que la mise Ă mort de Cisneros devaient ĂȘtre Ă©vitĂ©es, il pensait en mĂȘme temps que les troupes se mutineraient si les manifestations Ă©taient rĂ©primĂ©es[72]. Les gens amassĂ©s sur la place ne croyaient pas que Cisneros autoriserait le cabildo ouvert le jour suivant. Comme Leiva quittait le Cabildo, Belgrano, au nom de la foule, exigea une rĂ©ponse dĂ©finitive ; Leiva dĂ©clara que tout se passerait comme prĂ©vu, mais quâil fallait du temps pour prĂ©parer le Cabildo. Leiva requit Belgrano dâaider le Cabildo dans les prĂ©paratifs, son intervention pouvant en effet ĂȘtre interprĂ©tĂ©e par la foule comme la garantie que leurs exigences ne seraient pas ignorĂ©es. La foule se retira alors de la salle principale, mais resta sur la place. Belgrano contesta la liste des invitĂ©s, oĂč ne figuraient que les citoyens les plus fortunĂ©s, jugeant que si les pauvres Ă©taient mis Ă lâĂ©cart, les troubles sociaux ne cesseraient pas. Les membres du Cabildo tentĂšrent de le convaincre de donner son appui, mais il sâen alla.
Le dĂ©part de Belgrano, sans quâil eĂ»t donnĂ© dâexplications sur ce qui sâĂ©tait passĂ©, mit la foule en rage, et le peuple redoutait une trahison. La revendication dâun cabildo ouvert fut remplacĂ©e par lâexigence de la dĂ©mission immĂ©diate de Cisneros. Cependant, aprĂšs lâintervention de Saavedra, assurant que les revendications de la LĂ©gion infernale bĂ©nĂ©ficieraient de son appui militaire, le peuple finit par se calmer et se dispersa[73].
Des invitations furent distribuĂ©es Ă 450 fonctionnaires et citoyens de haut rang de la capitale. La liste des participants avait Ă©tĂ© Ă©tablie par le Cabildo, qui voulait sâassurer du rĂ©sultat en ayant soin de choisir les personnes les plus susceptibles de soutenir le vice-roi. Les rĂ©volutionnaires firent piĂšce Ă cette manĆuvre par un stratagĂšme Ă eux : AgustĂn Donado, Ă qui lâon avait confiĂ© la tĂąche dâimprimer les invitations, en imprima prĂšs de 600 au lieu des 450 commandĂ©s, et distribua le surplus entre les criollos[74]. Tout au long de la soirĂ©e, Castelli, RodrĂguez, French et Beruti parcoururent toutes les casernes pour haranguer les troupes et les prĂ©parer pour le lendemain[75].
Le carton dâinvitation Ă©tait ainsi conçu : LâExcellentissime Cabildo vous convoque pour que vous daigniez assister, demain le 22 courant, Ă neuf heures, sans insigne aucun, et en qualitĂ© dâhabitant, au cabildo ouvert que, en accord avec lâExcellentissime Seigneur Vice-Roi, il a consenti Ă organiser ; il y aura lieu de produire le prĂ©sent faire-part aux troupes qui garderont les avenues de cette place, pour qu'il vous soit permis de passer librement.
Mardi 22 mai
Selon les relevĂ©s officiels, 251 seulement des 450 invitĂ©s assistĂšrent au cabildo ouvert[76]. French et Beruti, Ă la tĂȘte de 600 hommes armĂ©s de coutelas, de fusils et de carabines de chasse, contrĂŽlaient lâaccĂšs Ă la place, pour assurer que le cabildo ouvert eĂ»t une majoritĂ© de criollos. Tous les notables, religieux et civils, Ă©taient prĂ©sents, ainsi que les chefs de milices et de nombreux rĂ©sidents de premier rang. La seule absence notable Ă©tait celle de MartĂn de Ălzaga, toujours en rĂ©sidence surveillĂ©e. Les troupes, encasernĂ©es, Ă©taient en Ă©tat dâalerte, prĂȘtes Ă passer Ă lâaction en cas de commotion[77]. Le nĂ©gociant JosĂ© Ignacio de Rezabal, qui assista au cabildo ouvert, exprima dans une missive adressĂ©e au prĂȘtre JuliĂĄn S. de AgĂŒero ses doutes sur cette façon de procĂ©der, prĂ©cisant que ces doutes Ă©taient partagĂ©s par dâautres gens proches de lui ; il craignait en effet que le parti qui lâemporterait dans le cabildo ouvert, quel quâil fĂ»t, ne se vengeĂąt contre les autres, comme la mutinerie dâĂlzaga en avait Ă©tĂ© un rĂ©cent prĂ©cĂ©dent[78]. Il estimait que le cabildo ouvert serait dĂ©nuĂ© de lĂ©gitimitĂ© si, Ă cause de la susmentionnĂ©e manipulation de la liste dâinvitĂ©s, les criollos Ă©taient admis Ă y participer en surnombre[79].
La sĂ©ance, avec ses diverses phases â lecture de la proclamation, dĂ©bats et votes â, dura du matin jusquâĂ minuit. Le vote nâĂ©tait pas Ă bulletin secret : les voix Ă©taient demandĂ©es une Ă une, puis consignĂ©es dans les minutes du dĂ©bat. Le thĂšme principal des discussions Ă©tait la lĂ©gitimitĂ© du gouvernement et lâautoritĂ© du vice-roi. Le principe de RĂ©troversion de la souverainetĂ© des peuples (esp. RetroversiĂłn de la soberanĂa de los pueblos), lieu commun de la scolastique espagnole et de la philosophie rationaliste, stipulait quâen lâabsence de monarque lĂ©gitime le pouvoir devait retourner au peuple, et lĂ©gitimait donc la formation dâun nouveau gouvernement ; toutefois, il nâexistait aucun prĂ©cĂ©dent oĂč ce principe avait Ă©tĂ© appliquĂ©[80]. La question de la validitĂ© de ce principe divisait lâassemblĂ©e en deux groupes principaux : lâun, qui rejetait ce principe, arguait quâil nây avait pas lieu de changer lâĂ©tat de choses actuel et soutenait Cisneros dans sa fonction de vice-roi ; lâautre, qui appelait au changement, considĂ©rait quâil convenait dâĂ©tablir une junte de gouvernement, similaire Ă celles mises sur pied en Espagne, destinĂ©e Ă remplacer le vice-roi. Un troisiĂšme groupe, enfin, plus modĂ©rĂ©, dĂ©fendait une position mĂ©diane[81]. Les partisans du changement ne reconnaissaient pas lâautoritĂ© du Conseil de RĂ©gence, soulignant que les colonies amĂ©ricaines nâavaient pas Ă©tĂ© consultĂ©es lors de sa formation. La question de la rivalitĂ© entre criollos et pĂ©ninsulaires ne fut qu'effleurĂ©e au cours des dĂ©bats ; ceux favorables au maintien en place du vice-roi estimaient que le vĆu des pĂ©ninsulaires devait prĂ©valoir sur celui des criollos.
Un des orateurs de la premiĂšre position Ă©tait lâĂ©vĂȘque de Buenos Aires, Benito LuĂ© y Riega, chef de lâĂ©glise locale. LuĂ© y Riega fit valoir que :
« Non seulement il nây a point lieu dâinnover avec le vice-roi, mais encore, quand bien mĂȘme il nây aurait plus aucune partie de lâEspagne qui ne fĂ»t subjuguĂ©e, les Espagnols qui se trouvent en AmĂ©rique doivent reprendre et exercer le gouvernement de celle-ci, ce gouvernement ne pouvant incomber aux fils du pays que s'il ne sây trouvait plus aucun Espagnol. DĂ»t-il ne rester quâun seul membre de la Junte de SĂ©ville et qu'il accostĂąt nos plages, nous devrions le recevoir comme le Souverain[82]. »
Juan JosĂ© Castelli Ă©tait le principal orateur en faveur des rĂ©volutionnaires. Son allocution reposait sur deux idĂ©es centrales : la dĂ©chĂ©ance du gouvernement lĂ©gitime â il releva que la Junte de SĂ©ville Ă©tait dissoute et nâĂ©tait pas habilitĂ©e Ă dĂ©signer une RĂ©gence â et le principe de rĂ©troversion de souverainetĂ©[83]. Il prit la parole aprĂšs Riega, affirmant que câĂ©tait au peuple amĂ©ricain de prendre en main son propre gouvernement en attendant que Ferdinand VII fĂ»t en mesure de retourner sur le trĂŽne.
« Nul nâa pu rĂ©puter criminels ni la nation entiĂšre, ni les individus qui ont exprimĂ© ouvertement leurs opinions politiques. Si le droit de conquĂȘte appartient, par origine, au pays conquĂ©rant, il serait juste que lâEspagne donne raison au rĂ©vĂ©rend Ă©vĂȘque en renonçant Ă rĂ©sister aux Français et en se soumettant, selon les mĂȘmes principes que ceux en vertu desquels il est prĂ©tendu que les AmĂ©ricains se soumettent aux hameaux de Pontevedra. La raison et la rĂšgle doivent ĂȘtre Ă©gales pour tous. Ici, il nây a ni conquis ni conquĂ©rants, il nây a ici que des Espagnols. Les Espagnols dâEspagne ont perdu leur terre. Les Espagnols dâAmĂ©rique essayent de sauver la leur. Que ceux dâEspagne sâentendent lĂ -bas comme ils le peuvent et quâils ne se prĂ©occupent pas : nous, AmĂ©ricains, savons ce que nous voulons et oĂč nous allons. Aussi, je propose que lâon vote : quâĂ lâautoritĂ© du vice-roi en soit subrogĂ©e une autre, qui dĂ©pendra de la mĂ©tropole si celle-ci se sauve des Français, qui sera indĂ©pendante si lâEspagne reste subjuguĂ©e[84] »
Pascual Ruiz Huidobro argumenta que si lâautoritĂ© qui avait nommĂ© Cisneros Ă©tait caduque, celui-ci nâavait plus sa place dans le gouvernement. Il estimait que le Cabildo devait prendre la direction des affaires, Ă©tant donnĂ© quâil Ă©tait le reprĂ©sentant du peuple. Se ralliĂšrent Ă son vote Melchor FernĂĄndez, Juan LeĂłn Ferragut, JoaquĂn Grigera, et dâautres[85].
Lâavocat Manuel Genaro Villota, reprĂ©sentant des Espagnols conservateurs, dĂ©clara que la ville de Buenos Aires nâavait pas le droit de dĂ©cider unilatĂ©ralement de la lĂ©gitimitĂ© du vice-roi ou du Conseil de RĂ©gence, sans en confĂ©rer aussi avec les autres villes de la Vice-royautĂ©. Il argua que pareille action briserait lâunitĂ© du pays, Ă©tablissant autant de souverainetĂ©s que le pays compte de villes. Ce point de vue, qui Ă©quivalait Ă repousser Ă plus tard quelque action que ce fĂ»t, Ă©tait une habile manĆuvre dilatoire visant Ă maintenir Cisneros au pouvoir[86]. Juan JosĂ© Paso reconnut le bien-fondĂ© de son premier point, mais argumenta que la situation en Europe et la possibilitĂ© que les forces napolĂ©oniennes vinssent Ă conquĂ©rir les colonies amĂ©ricaines exigeait une rĂ©solution urgente[87]. Il excipa alors du droit dâaĂźnesse de Buenos Aires, qui habiliterait cette ville Ă prendre lâinitiative et Ă procĂ©der aux changements jugĂ©s nĂ©cessaires et appropriĂ©s, certes sous la condition expresse que les autres villes en fussent avisĂ©es et invitĂ©es le plus tĂŽt possible Ă Ă©mettre des remarques[88]. La figure rhĂ©torique de la sĆur aĂźnĂ©e (hermana mayor), comparable au principe de negotiorum gestio[89], est un concept postulant une analogie entre les rapports de Buenos Aires avec les autres villes de la vice-royautĂ© et la relation filiale[90].
Le prĂȘtre Juan Nepomuceno SolĂĄ proposa alors que le commandement provisoire fĂ»t confiĂ© au Cabildo, en attendant la constitution dâune junte de gouvernement composĂ©e de reprĂ©sentants de toutes les populations de la Vice-royautĂ©. Sa motion fut soutenue par Manuel Alberti, AzcuĂ©naga, Escalada, Cosme Mariano Argerich, Juan Pedro Aguirre, et par dâautres[91].
Cornelio Saavedra suggĂ©ra pour sa part que le gouvernement fĂ»t dĂ©lĂ©guĂ© au Cabildo jusquâĂ la formation dâune junte de gouvernement dans les modalitĂ©s et la forme que le Cabildo jugerait appropriĂ©es. Il utilisa lâexpression « (...) et il nâest point douteux que câest le peuple qui fait lâautoritĂ© ou le commandement. »[76]. Au moment du vote, la position de Castelli sâĂ©tait accordĂ©e avec celle de Saavedra[92].
Manuel Belgrano se tenait debout prĂšs dâune fenĂȘtre, de sorte Ă pouvoir, au cas oĂč les choses prendraient un mauvais tour, donner le signal en agitant un linge blanc. Les gens rassemblĂ©s sur la place eussent alors forcĂ© le passage jusque dans le Cabildo. Cependant, aucun problĂšme sĂ©rieux ne survint, et ce plan dâurgence nâeut pas Ă ĂȘtre mis en Ćuvre[93]. Lâhistorien Vicente Fidel LĂłpez, fils de Vicente LĂłpez y Planes, rĂ©vĂ©la que son pĂšre, prĂ©sent Ă lâĂ©vĂ©nement, vit que Mariano Moreno Ă©tait devenu inquiet vers la fin, en dĂ©pit de la majoritĂ© acquise. Moreno confia Ă Planes que le Cabildo Ă©tait sur le point de le trahir.
Mercredi 23 mai
Les dĂ©bats se poursuivirent toute la journĂ©e, et les voix ne furent comptĂ©es que fort tard dans la soirĂ©e. Les exposĂ©s faits, les participants avaient Ă voter soit pour le maintien au pouvoir du vice-roi, seul ou en association, soit pour sa destitution. Les idĂ©es exposĂ©es cristallisĂšrent en un petit nombre de propositions, dĂ©signĂ©es par le nom de leur principal dĂ©fenseur, et les gens votĂšrent ensuite en faveur dâune dâentre elles. De ce vote, qui dura longtemps, il rĂ©sulta, Ă une large majoritĂ© de 155 voix contre 69, que le vice-roi devait ĂȘtre destituĂ©.
La proposition de Manuel JosĂ© Reyes, qui estimait quâil nây avait aucune raison de dĂ©poser le vice-roi, et quâil suffisait de dĂ©signer une junte dirigĂ©e par Cisneros, obtint une trentaine de voix. Trente autres voix appuyaient Ă©galement Cisneros, mais en rejetant tout changement au systĂšme politique en vigueur. Un petit groupe enfin appuyait la proposition de MartĂn JosĂ© de Choteco, qui soutenait Ă©galement Cisneros[94].
Les voix contre Cisneros Ă©taient elles aussi rĂ©parties en plusieurs propositions diffĂ©rentes. Beaucoup de celles-ci tenaient que les nouvelles autoritĂ©s appelĂ©es Ă se substituer au vice-roi devaient ĂȘtre Ă©lues par le Cabildo. Pascual Ruiz Huidobro vota en faveur dâune phase intĂ©rimaire au cours de laquelle le Cabildo dirigerait et sâemploierait Ă dĂ©signer un nouveau gouvernement, mais cette proposition ne mettait pas en avant la souverainetĂ© populaire, ni nâĂ©voquait la mise sur pied dâune junte. Cette proposition eut la faveur de trente-cinq membres, dont du reste une grande partie voyaient en Huidobro le meilleur candidat Ă la tĂȘte du nouveau gouvernement qui serait constituĂ© si la proposition lâeĂ»t emportĂ©[95]. Juan Nepomuceno SolĂĄ vota pour la proposition portant que le Cabildo devait gouverner dans lâintĂ©rim, tout en sâefforçant entre-temps de constituer une junte composĂ©e de dĂ©putĂ©s de toutes les provinces de la vice-royautĂ©. Cette proposition obtint prĂšs de vingt voix. Cornelio Saavedra eut le plus grand nombre de voix, et le reste des voix se rĂ©partissait sur diverses propositions obtenant chacune peu de voix.
Le Ă lâaube, le Cabildo publia un document annonçant que le vice-roi mettrait fin Ă son mandat. LâautoritĂ© supĂ©rieure serait transfĂ©rĂ©e temporairement au Cabildo, jusquâĂ la dĂ©signation dâune junte de gouvernement[96].
Des avis, annonçant la crĂ©ation imminente dâune junte et reproduisant l'appel lancĂ© aux provinces pour qu'elles envoyassent des reprĂ©sentants Ă Buenos Aires, furent placardĂ©s en diffĂ©rents points de la ville. Dâautres avis appelaient le public Ă sâabstenir de tenter des actions contraires Ă lâordre public[97].
Jeudi 24 mai
Le Cabildo entreprit, en application des rĂ©sultats du cabildo ouvert, de former la nouvelle junte chargĂ©e de gouverner jusquâĂ lâarrivĂ©e des reprĂ©sentants des autres villes. Leyva fit en sorte que le ci-devant vice-roi Cisneros fĂ»t dĂ©signĂ© prĂ©sident de la junte et commandant en chef des forces armĂ©es. Furent aussi Ă©lus, outre Cisneros, les quatre autres membres suivants : les criollos Cornelio Saavedra et Juan JosĂ© Castelli, et les pĂ©ninsulaires Juan Nepomuceno SolĂĄ et JosĂ© Santos Inchaurregui[98]. Les points de vue divergent quant aux motifs de cette dĂ©cision. Un code constitutionnel de treize articles, propre Ă rĂ©guler lâaction de la junte, avait Ă©tĂ© rĂ©digĂ© par Leyva : la junte nâĂ©tait pas habilitĂ©e Ă exercer le pouvoir judiciaire, lequel Ă©tait rĂ©servĂ© Ă la Audiencia royale de Buenos Aires ; Cisneros ne pouvait pas agir sans l'appui des autres membres de la junte ; le Cabildo avait pouvoir de rĂ©voquer ceux qui nĂ©gligeaient dâaccomplir leur devoir ; lâassentiment du Cabildo Ă©tait requis pour lever de nouveaux impĂŽts ; et enfin, la junte devait dĂ©crĂ©ter une amnistie gĂ©nĂ©rale pour ceux qui avaient exprimĂ© leur opinion lors du cabildo ouvert, et appeler les autres villes Ă dĂ©pĂȘcher des dĂ©putĂ©s. Les commandants des forces armĂ©es, y compris Saavedra et Pedro AndrĂ©s GarcĂa, acquiescĂšrent Ă ce code. La junte prĂȘta serment dans lâaprĂšs-midi[99].
La nouvelle prit les rĂ©volutionnaires au dĂ©pourvu. Ils ne savaient pas avec certitude ce quâil y avait Ă faire dans lâimmĂ©diat, et craignaient de subir la mĂȘme rĂ©pression que celle qui sâĂ©tait abattue sur les rĂ©volutionnaires de Chuquisaca et de La Paz. Moreno abjura toute relation avec les autres et se claquemura dans sa maison[100]. Une rĂ©union eut lieu au domicile de RodrĂguez Peña. Certains Ă©taient dâavis que le Cabildo nâavait pu ourdir un tel complot sans la bĂ©nĂ©diction de Saavedra, et que Castelli devait dĂ©missionner de la junte. Tagle rejeta cette proposition : il pensait que Saavedra avait pu accepter par faiblesse ou par naĂŻvetĂ©, et que Castelli devait donc rester afin de contrebalancer lâinfluence quâavaient les autres sur Saavedra[101]. Entre-temps, la place avait Ă©tĂ© envahie par une foule emmenĂ©e par French et Beruti. Le maintien au pouvoir de Cisneros, fĂ»t-ce mĂȘme dans une fonction autre que celle de vice-roi, Ă©tait ressentie comme une injure Ă la volontĂ© du cabildo ouvert. Le colonel MartĂn Rodriguez expliqua que si ses soldats recevaient lâordre de soutenir Cisneros, cela signifierait que lâordre leur serait donnĂ© de faire feu sur la population ; la plupart des soldats alors se rĂ©volteraient, car ils partageaient le souhait de voir le vice-roi quitter le pouvoir[102].
Ce mĂȘme soir, Castelli et Saavedra informĂšrent Cisneros de leur intention de dĂ©missionner de la Junte nouvellement formĂ©e, faisant valoir que la population Ă©tait au bord dâune rĂ©volution violente et quâelle Ă©carterait Cisneros par la force sâil ne dĂ©missionnait pas lui aussi. Ils soulignĂšrent quâils Ă©taient impuissants Ă stopper cela â Castelli, Ă contenir ses amis, Saavedra, Ă empĂȘcher le RĂ©giment de Patriciens de se mutiner[103]. Cisneros souhaitait attendre jusquâau lendemain, mais ils lui reprĂ©sentĂšrent que lâheure nâĂ©tait plus aux ajournements, de sorte quâil finit par accepter de dĂ©missionner. Il rĂ©digea sa lettre de dĂ©mission et la fit parvenir au Cabildo, qui devait en dĂ©libĂ©rer le jour suivant. Chiclana, se sentant encouragĂ© aprĂšs que Saavedra eut dĂ©missionnĂ©, se mit Ă solliciter des signatures pour un manifeste de la volontĂ© du peuple. Quant Ă Moreno, il se refusait Ă tout autre engagement, mais Castelli et Peña Ă©taient confiants qu'il finirait par vouloir les rejoindre si les Ă©vĂ©nements se dĂ©roulaient comme ils lâescomptaient[104].
Vendredi 25 mai
Le matin du , malgrĂ© le mauvais temps, une foule nombreuse, rejointe par la milice commandĂ©e par Domingo French et Antonio Beruti, se rassembla sur la Plaza de la Victoria. Tous rĂ©clamaient la rĂ©vocation de la junte Ă©lue le jour prĂ©cĂ©dent, la dĂ©mission dĂ©finitive de Cisneros, et la composition dâune nouvelle junte dont ce dernier fĂ»t exclu. Lâhistorien BartolomĂ© Mitre rapporte que French et Beruti distribuĂšrent des rubans bleu et blanc, semblables Ă la cocarde argentine moderne, aux personnes prĂ©sentes. Plus tard, dâautres historiens mirent cela en doute, sans exclure toutefois que les rĂ©volutionnaires eussent utilisĂ© quelque marque distinctive pour permettre leur identification[105]. La rumeur courut quâil se pouvait que le Cabildo rejetĂąt la dĂ©mission de Cisneros[106]. La rĂ©solution officielle tardant Ă ĂȘtre rendue publique, la foule commença Ă remuer, clamant « le peuple veut savoir de quoi il sâagit ! ».
Le Cabildo se rĂ©unit Ă 9 heures du matin et refusa effectivement la dĂ©mission de Cisneros, estimant que la foule nâavait aucun droit lĂ©gitime Ă influencer une dĂ©cision prise et dĂ©jĂ exĂ©cutĂ©e par le Cabildo. Il considĂ©rait que lâagitation populaire devait ĂȘtre rĂ©primĂ©e par la force, et, attendu que la Junte dĂ©tenait maintenant le pouvoir, tenait les membres de celle-ci pour comptables de tout changement qui serait apportĂ© Ă la politique dĂ©cidĂ©e[107]. Afin de faire exĂ©cuter ces ordres, ils mandĂšrent les commandants en chef, mais ceux-ci nây donnĂšrent aucune suite. Beaucoup dâentre eux, Saavedra inclus, nâapparurent point ; mais mĂȘme ceux qui parurent alors annoncĂšrent ne pas vouloir endosser lâordre du gouvernement, arguant que les commandants seraient Ă coup sĂ»r dĂ©sobĂ©is sâils ordonnaient aux troupes de rĂ©primer les manifestants.
Lâagitation de la foule sâaccrut, et le cabildo fut pris dâassaut. Leiva et Lezica requirent que quelquâun habilitĂ© Ă agir en porte-parole du peuple voulĂ»t les rejoindre Ă lâintĂ©rieur de la salle et exposer les vĆux du peuple. Beruti, Chiclana, French et Grela furent admis Ă passer. Leiva tenta de dissuader Pancho Planes de se joindre Ă eux[108], mais il pĂ©nĂ©tra lui aussi dans la salle[109]. Le Cabildo argumenta que Buenos Aires nâavait pas le droit de dĂ©manteler le systĂšme politique de la vice-royautĂ© sans en discuter dâabord avec les autres provinces ; French et Chiclana rĂ©torquĂšrent que la convocation dâun CongrĂšs Ă©tait dâores et dĂ©jĂ dĂ©cidĂ©e[110]. Le Cabildo convoqua les commandants afin dâaviser avec eux. Ainsi que cela avait dĂ©jĂ Ă©tĂ© fait plusieurs fois dans les derniers jours, Romero reprĂ©senta au Cabildo que les soldats se mutineraient sâils Ă©taient forcĂ©s de combattre la foule sur ordre de Cisneros. Le Cabildo toutefois ne voulut point en dĂ©mordre, jusquâĂ ce que le bruit de la manifestation eut pĂ©nĂ©trĂ© dans la salle, faisant craindre que les manifestants pussent envahir le bĂątiment et les atteindre. MartĂn RodrĂguez dĂ©clara que la seule maniĂšre de calmer les manifestants Ă©tait dâaccepter la dĂ©mission de Cisneros. Leiva cette fois fut dâaccord et en convainquit les autres membres, et la multitude reflua alors vers la place. RodrĂguez se dirigea vers la maison dâAzcuĂ©naga pour y rencontrer les autres rĂ©volutionnaires et planifier les derniĂšres Ă©tapes de la rĂ©volution. La manifestation envahit derechef le Cabildo, poussant cette fois jusquâĂ la salle de dĂ©libĂ©ration. Beruti prit la parole au nom du peuple, exigeant que la nouvelle junte fĂ»t Ă©lue par le peuple, et non par le Cabildo[111]. Il laissa entendre que, outre les 400 personnes dĂ©jĂ rassemblĂ©es, les casernes Ă©taient remplies de gens qui leur Ă©taient loyaux et qui, si besoin Ă©tait, prendraient le commandement. Le Cabildo rĂ©pliqua en requĂ©rant que leurs revendications fussent formulĂ©es par Ă©crit. Au terme dâun long intervalle, un document contenant 411 signatures fut remis au Cabildo[112]. Ce document, qui a pu ĂȘtre conservĂ©, proposait une nouvelle composition de la junte de gouvernement, et un corps expĂ©ditionnaire de 500 hommes pour assister les provinces ; y figurent la plupart des chefs militaires et nombre de rĂ©sidents notables, en plus d'une grande quantitĂ© de signatures illisibles. French et Beruti le signĂšrent, en prĂ©cisant « pour moi et pour six cents autres »[113]. Les historiens ne sâaccordent pas cependant sur la paternitĂ© du contenu de ce document.
Sur ces entrefaites, le temps sâĂ©tait amĂ©liorĂ©, et le soleil perça Ă travers les nuages, illuminant le ciel. Les gens amassĂ©s sur la place y virent un bon prĂ©sage pour la rĂ©volution. Le Soleil de Mai, un des emblĂšmes de lâArgentine et de lâUruguay, allait ĂȘtre crĂ©Ă© quelques annĂ©es plus tard en rĂ©fĂ©rence Ă ce phĂ©nomĂšne[112].
Le Cabildo accepta le document et se rendit au balcon pour le soumettre directement au peuple pour ratification. Mais, Ă cause de lâheure tardive et de la mĂ©tĂ©o, le nombre de gens prĂ©sents sur la place sâĂ©tait amenuisĂ©. Leiva ridiculisa la prĂ©tention des reprĂ©sentants restants Ă parler au nom du peuple, ce qui mit Ă rude Ă©preuve la patience des rares personnes encore sur la place sous la pluie. Beruti, refusant tout nouvel atermoiement, menaça dâappeler le peuple aux armes[114]. Devant la perspective d'une montĂ©e de violence, lâon fit donner lecture de la requĂȘte du peuple, laquelle fut immĂ©diatement ratifiĂ©e par l'assistance. Les rĂšgles rĂ©gissant la Junte Ă©taient grosso modo les mĂȘmes que celles Ă©dictĂ©es la veille, mais complĂ©tĂ©es par la stipulation que le Cabildo contrĂŽlerait lâactivitĂ© des membres de la Junte et quâen cas de poste devenu vacant, la Junte Ă©tait elle-mĂȘme habilitĂ©e Ă pourvoir aux remplacements[115]. Saavedra sâadressa Ă la foule, puis se rendit au Fort, sous les salves dâartillerie et les sonneries de cloches. Entre-temps, Cisneros dĂ©pĂȘcha JosĂ© Melchor Lavin Ă CĂłrdoba pour prĂ©venir Santiago de Liniers de ce qui venait de se passer Ă Buenos Aires, et demanda une intervention militaire contre la Junte.
La version du vice-roi Cisneros
Le vice-roi destitué Cisneros livra sa version des faits de la Semaine de Mai dans une missive adressée au roi Ferdinand VII, portant la date du :
« Jâavais ordonnĂ© que pour cet acte lâon postĂąt une compagnie dans chaque rue dĂ©bouchant sur la place, de sorte Ă ne permettre dâaccĂ©der Ă celle-ci, ni de monter dans les Maisons Capitulaires, Ă nulle personne qui ne fĂ»t de celles citĂ©es ; mais la troupe et les officiers Ă©taient du parti ; ils faisaient ce que leurs commandants leur avaient prĂ©alablement et secrĂštement dit de faire, c'est-Ă -dire que ceux-lĂ leur dirent ce que la faction leur avait ordonnĂ© de dire : ils refusaient le passage vers la place aux habitants honorables et l'accordaient Ă ceux de la confabulation ; quelques officiers avaient un exemplaire des innombrables convocations et avec celles-ci ils introduisaient dans les bĂątiments de l'hĂŽtel de ville des sujets non citĂ©s par le Cabildo, ou dont ils savaient la partialitĂ©, ou parce quâils les gagnaient avec de lâargent, de sorte que, dans une ville de plus de trois mille citoyens de distinction et de nom, seuls deux cents de ceux-ci furent prĂ©sents, mais de nombreux Ă©piciers, quelques artisans, dâautres fils de famille et les plus ignorants, dĂ©pourvus de la moindre notion pour discuter dâune question de la plus grande gravitĂ©[116]. »
Composition de la PremiĂšre Junte
Le gouvernement issu du cabildo ouvert, quâil est dâusage de dĂ©signer par PremiĂšre Junte (Primera Junta), Ă©tait composĂ© comme suit :
Président
Membres
- Dr Manuel Alberti
- Col. Miguel de Azcuénaga
- Dr Manuel Belgrano
- Dr Juan José Castelli
- Domingo Matheu
- Juan Larrea
Secrétaires
ĂvĂ©nements subsĂ©quents
Ni le Conseil de RĂ©gence, ni les membres de l'Audiencia royale de Buenos Aires, ni la population espagnole dâorigine europĂ©enne ne crurent en la sincĂ©ritĂ© de la dĂ©claration de loyautĂ© envers le roi captif Ferdinand VII, et ce nâest que de mauvaise grĂące quâils se rĂ©signĂšrent Ă la nouvelle situation. LâAudiencia jura en secret fidĂ©litĂ© au Conseil de RĂ©gence et expĂ©dia des circulaires aux autres villes de la Vice-royautĂ©, les exhortant Ă ne pas reconnaĂźtre le nouveau gouvernement. Pour mettre un terme Ă ces manĆuvres, la Junte convoqua lâensemble des membres de lâAudiencia, ainsi que lâĂ©vĂȘque LuĂ© y Riega et le ci-devant vice-roi Cisneros, pour les embarquer ensuite, sous le prĂ©texte que leurs vies fussent en danger, sur le navire britannique Dart. Consigne fut donnĂ©e par Larrea au capitaine Mark Brigut de ne faire escale dans aucun port amĂ©ricain et de les transporter tous vers les Ăźles Canaries. Cette opĂ©ration accomplie avec succĂšs, une nouvelle Audiencia fut nommĂ©e, entiĂšrement composĂ©e de criollos loyaux Ă la rĂ©volution[117].
Ă lâexception de la ville de CĂłrdoba, toutes les villes sur le territoire actuel de lâArgentine appuyĂšrent la PremiĂšre Junte. Les villes du Haut-PĂ©rou (actuelle Bolivie) cependant ne prirent pas position ouvertement, en raison sans doute du prĂ©cĂ©dent des rĂ©centes rĂ©volutions de Chuquisaca et de La Paz et de leur dĂ©nouement. Asuncion rejeta la Junte et prĂȘta serment de fidĂ©litĂ© au Conseil de RĂ©gence. La bande Orientale, sous Francisco Javier de ElĂo, demeura un bastion royaliste, de mĂȘme que le Chili[118].
Ă CĂłrdoba, lâancien vice-roi Jacques de Liniers se mit Ă la tĂȘte dâune contre-rĂ©volution et dĂ©clencha ainsi la premiĂšre campagne militaire quâeut Ă mener le nouveau gouvernement indĂ©pendant. En dĂ©pit de la stature de Liniers et de son prestige de hĂ©ros populaire, que lui avait valu son rĂŽle lors des invasions anglaises, la population de CĂłrdoba se rallia Ă la rĂ©volution. Les dĂ©sertions et actes de sabotage qui sâensuivirent ayant sensiblement entamĂ© la puissance des troupes contre-rĂ©volutionnaires[119], le soulĂšvement de Liniers fut promptement Ă©crasĂ© par les forces sous le commandement de Francisco Ortiz de Ocampo. Toutefois, Ocampo refusa ensuite de fusiller Liniers quâil avait capturĂ©, eu Ă©gard au fait que celui-ci avait combattu Ă ses cĂŽtĂ©s contre les Anglais ; câest Juan JosĂ© Castelli qui dut se charger de lâexĂ©cution telle quâordonnĂ©e par la Junte. La rĂ©bellion de CĂłrdoba rĂ©primĂ©e, lâon entreprit dâenvoyer des expĂ©ditions militaires vers dâautres villes de lâintĂ©rieur, en exigeant quâelles appuyassent la PremiĂšre Junte et lui envoyassent des dĂ©putĂ©s pour les reprĂ©senter[120]. Le service militaire fut exigĂ© de presque toutes les familles, pauvres comme riches ; cependant, la plupart des familles patriciennes dĂ©cidĂšrent dâenvoyer leurs esclaves Ă lâarmĂ©e au lieu de leurs propres fils â câest lĂ sans doute une des raisons de la diminution de la population noire en Argentine.
Montevideo, mieux outillĂ©e pour rĂ©sister Ă une attaque de Buenos Aires, et poussĂ©e en outre par la rivalitĂ© historique entre ces deux villes, fit rĂ©solument opposition Ă la PremiĂšre Junte ; le Conseil de RĂ©gence la proclama nouvelle capitale de la Vice-royautĂ©, et nomma Francisco Javier de ElĂo comme nouveau vice-roi. Des villes plus pĂ©riphĂ©riques, situĂ©es dans la bande Orientale, soutinrent, Ă lâencontre de la volontĂ© de Montevideo, la Junte de Buenos Aires ; elles Ă©taient conduites par JosĂ© Gervasio Artigas, qui mit le siĂšge devant Montevideo. Les royalistes montĂ©vidĂ©ens furent dĂ©finitivement battus par Carlos MarĂa de Alvear[121].
La Capitainerie gĂ©nĂ©rale du Chili connut un processus politique analogue Ă celui de la rĂ©volution de Mai, et, aprĂšs avoir Ă son tour Ă©lu une junte de gouvernement en septembre, entra dans la courte pĂ©riode connue sous le nom de Patria Vieja. Ladite junte fut cependant vaincue en 1814 lors de la bataille de Rancagua, et la consĂ©cutive reconquĂȘte du Chili en fit Ă nouveau un bastion loyaliste. La cordillĂšre des Andes dressait une barriĂšre efficace entre rĂ©volutionnaires et royalistes chiliens, raison pour laquelle il nây eut pas dâaffrontements armĂ©s au Chili avant 1817, date oĂč lâArmĂ©e des Andes sous le commandement de JosĂ© de San MartĂn franchit la cordillĂšre et infligea une dĂ©faite dĂ©finitive aux royalistes chiliens[122].
La PremiĂšre Junte sâaugmenta des dĂ©putĂ©s envoyĂ©s par les provinces et intĂ©grĂ©s en son sein, et fut alors rebaptisĂ©e Junta Grande. Elle fut dissoute peu aprĂšs la dĂ©faite patriote de Ă la bataille de Huaqui, pour laisser la place Ă deux triumvirats successifs, qui exercĂšrent le pouvoir exĂ©cutif sur les Provinces Unies de lâAmĂ©rique du Sud. En 1814, le second triumvirat fut remplacĂ© par le gouvernement du Directeur suprĂȘme des Provinces Unies du RĂo de la Plata[123]. Entre-temps, MartĂn Miguel de GĂŒemes rĂ©ussissait Ă contenir Ă Salta les armĂ©es royalistes dĂ©pĂȘchĂ©es par le PĂ©rou, tandis que San MartĂn faisait mouvement, par voie de mer, vers le bastion royaliste de Lima, lors dâune campagne conjointe chilienne et argentine. Le thĂ©Ăątre des indĂ©pendances se dĂ©plaçait ainsi peu Ă peu vers le nord du continent sud-amĂ©ricain[124]. En Argentine mĂȘme, lâĂ©volution politique dĂ©riva vers une longue guerre civile.
Conséquences
DâaprĂšs lâouvrage Breve historia de los Argentinos de lâhistorien FĂ©lix Luna, une des consĂ©quences politiques les plus importantes de la rĂ©volution de Mai fut le changement de paradigme dans la relation entre population et gouvernants. Jusque-lĂ avait prĂ©valu le concept de bien commun : cependant que lâautoritĂ© royale restait pleinement respectĂ©e, si une instruction Ă©manant de la cour dâEspagne Ă©tait jugĂ©e prĂ©judiciable au bien commun de la population locale, elle nâĂ©tait suivie quâĂ moitiĂ© ou tout simplement dĂ©daignĂ©e[16]. Avec la rĂ©volution, le concept de bien commun fut supplantĂ© par le concept de souverainetĂ© populaire, tel que lâavaient thĂ©orisĂ© Moreno, Castelli et Monteagudo, parmi dâautres. LâidĂ©e tenait quâen lâabsence dâautoritĂ© lĂ©gitime, le peuple avait le droit de dĂ©signer lui-mĂȘme ses propres dirigeants. Au fil du temps, la souverainetĂ© populaire devait cĂ©der le pas Ă la doctrine de la rĂšgle majoritaire. Cette maturation des idĂ©es fut lente et progressive, et prit de longues dĂ©cennies Ă cristalliser en des systĂšmes Ă©lectoraux et politiques stables, mais dĂ©boucha finalement sur lâadoption du systĂšme rĂ©publicain comme forme de gouvernement pour lâArgentine[125]. Domingo Faustino Sarmiento exprima des points de vue similaires dans son Facundo, en relevant que les villes Ă©taient plus rĂ©ceptives aux idĂ©es rĂ©publicaines, alors que les zones rurales leur Ă©taient plus rĂ©fractaires, ce qui permettait au phĂ©nomĂšne des caudillos de se dĂ©velopper dans les provinces[126].
Une autre consĂ©quence de la rĂ©volution de Mai fut, toujours selon FĂ©lix Luna, la dĂ©sintĂ©gration des territoires appartenant autrefois Ă la Vice-royautĂ© du RĂo de la Plata en plusieurs unitĂ©s distinctes. La plupart des villes et des provinces avaient des populations, des Ă©conomies, des mentalitĂ©s, des contextes et des intĂ©rĂȘts diffĂ©rents. Jusquâalors, toutes ces populations Ă©taient maintenues ensemble par lâautoritĂ© du gouvernement espagnol, mais aprĂšs la disparition de celle-ci, les habitants de Montevideo, du Paraguay et du Haut-PĂ©rou commencĂšrent Ă sâĂ©loigner de Buenos Aires. La durĂ©e dâexistence de la Vice-royautĂ© du RĂo de la Plata, de 38 ans Ă peine, avait Ă©tĂ© insuffisante pour permettre Ă une conscience patriotique de se forger et pour crĂ©er dans lâensemble de la population un sentiment dâappartenance Ă une mĂȘme communautĂ©[127]. Il manquait au nouveau pays un concept Ă©tabli dâidentitĂ© nationale propre Ă unir la population sous une commune idĂ©e de lâĂtat[128]. Juan Bautista Alberdi dĂ©cĂšle dans la RĂ©volution de Mai une des manifestations prĂ©coces de la lutte de pouvoir entre la ville de Buenos Aires et les provinces de lâintĂ©rieur â un des antagonismes centraux Ă lâĆuvre dans les guerres civiles argentines. Alberdi Ă©crivit dans son ouvrage Escritos pĂłstumos :
« La rĂ©volution de Mai 1810 Ă Buenos Aires, dont le dessein Ă©tait d'obtenir l'indĂ©pendance de l'Argentine dâavec lâEspagne, eut Ă©galement pour effet dâĂ©manciper de lâArgentine la province de Buenos Aires, ou plutĂŽt, dâimposer lâautoritĂ© de cette province Ă la nation tout entiĂšre Ă©mancipĂ©e de lâEspagne. Ce jour-lĂ , si la tutelle espagnole sâacheva sur les provinces argentines, celle de Buenos Aires fut instaurĂ©e[129]. »
D'autre part, la vie culturelle dans le RĂo de la Plata connut aprĂšs la rĂ©volution de Mai une floraison sans prĂ©cĂ©dent, en particulier par la quantitĂ© de nouvelles publications de toute sorte. En effet, en regard de lâunique journal autorisĂ© auparavant, la rĂ©volution laissa libre carriĂšre Ă la presse, permettant lâĂ©mergence dâune profusion de titres tels que La Lira Argentina, la Gazeta de Buenos Aires, El Correo de Comercio, MĂĄrtir o Libre, El Censor de la RevoluciĂłn, El Independiente et El Grito del Sud. Le mĂȘme vent de libertĂ© bĂ©nĂ©ficia Ă la crĂ©ation littĂ©raire et fit surgir des poĂštes rĂ©volutionnaires, dont BartolomĂ© Hidalgo, Vicente LĂłpez y Planes et Esteban de Luca[130].
Perspectives historiques
Lâhistoriographie de la rĂ©volution de Mai nâa, quant aux faits eux-mĂȘmes, que peu de sujets dâincertitude, et nâa pas non plus Ă dĂ©plorer la perte de nombreux dĂ©tails. La plupart des informations ont Ă©tĂ© recueillies et adĂ©quatement consignĂ©es pendant les Ă©vĂ©nements, puis mises Ă la disposition du public par la PremiĂšre Junte en guise de propagande patriotique. Il en rĂ©sulte que les diverses visions historiques de lâĂ©vĂ©nement diffĂšrent les unes des autres non pas par la description des faits eux-mĂȘmes, mais par lâinterprĂ©tation que chacune de ces visions entend donner de la signification, des causes et des consĂ©quences des Ă©vĂ©nements. Du reste, la version moderne des faits ne sâĂ©carte pas sensiblement de la version contemporaine[131].
Les premiers Ă Ă©crire sur la RĂ©volution furent ses protagonistes. Cependant, les mĂ©moires, biographies et carnets quâils firent paraĂźtre poursuivaient des buts autres quâhistoriographiques ; il sâagissait notamment dâexposer les raisons de leurs actions, de blanchir leur image publique, ou de manifester leur soutien ou leur rejet des figures et des idĂ©es de lâĂ©poque[132]. Par exemple, Manuel Moreno rĂ©digea une biographie de son frĂšre Mariano destinĂ©e Ă servir en Europe de matĂ©riel de propagande en faveur de la RĂ©volution[133], et Cornelio Saavedra Ă©crivit son autobiographie Ă un moment oĂč son personnage Ă©tait fortement mis en cause, afin de se justifier auprĂšs de ses fils[134].
La premiĂšre Ă©cole historiographique importante qui se soit consacrĂ©e Ă l'histoire de l'Argentine et Ă son interprĂ©tation fut fondĂ©e par des auteurs romantiques des annĂ©es 1830, notamment BartolomĂ© Mitre[135]. Mitre voyait la rĂ©volution de Mai comme une expression emblĂ©matique de lâĂ©galitarisme politique : un conflit entre les libertĂ©s modernes et lâoppression, incarnĂ©e en lâespĂšce par la monarchie espagnole, et la tentative dâĂ©tablir une organisation nationale sâappuyant sur des principes constitutionnels, par opposition Ă l'autoritĂ© charismatique des caudillos[136]. La vision de ces auteurs romantiques eut valeur canonique jusquâĂ la fin du XIXe siĂšcle, c'est-Ă -dire jusquâau moment oĂč, encouragĂ©s par la proximitĂ© du centenaire de la RĂ©volution, les auteurs recherchaient des perspectives nouvelles. Ces auteurs divergeaient quant au poids Ă accorder aux diffĂ©rentes causes de la rĂ©volution de Mai ou quant Ă savoir de qui lâintervention dans les Ă©vĂ©nements de mai fut la plus dĂ©cisive[137], mais sans que lâon vĂźnt Ă remettre en question les principales thĂšses de Mitre, Ă savoir que la RĂ©volution Ă©tait Ă considĂ©rer comme lâacte de naissance de lâArgentine moderne[138] et comme un Ă©vĂ©nement inĂ©luctable[139]. Ils introduisirent, comme autre Ă©lĂ©ment-clef, lâidĂ©e dâune participation populaire[140]. Dans la premiĂšre moitiĂ© du XXe siĂšcle, des auteurs de tendance libĂ©rale sâĂ©vertuĂšrent Ă Ă©laborer et Ă faire adopter une vision historique dĂ©finitive et incontestable ; Ricardo Levene et lâAcademia Nacional de la Historia, principaux exposants de cette entreprise, reprirent toutefois Ă leur compte la plupart des perspectives dĂ©veloppĂ©es par Mitre[141]. Les auteurs de gauche, de leur cĂŽtĂ©, mirent en avant leur vision rĂ©visionniste, accentuant les aspects nationalistes et anti-impĂ©rialistes ; ils tendaient Ă minimiser lâantagonisme entre criollos et pĂ©ninsulaires, et Ă expliquer les Ă©vĂ©nements sous lâangle dâun conflit entre pensĂ©e des LumiĂšres et absolutisme[142] ; cependant, câest sur dâautres pĂ©riodes historiques que portait la majeure partie de leurs travaux[143].
La rĂ©volution de Mai ne fut pas le rĂ©sultat des actions dâun seul parti politique, au projet clair et bien dĂ©fini, mais de la convergence de plusieurs secteurs sociaux aux intĂ©rĂȘts variĂ©s. Il sâensuit une pluralitĂ© de perspectives diffĂ©rentes, parfois contradictoires, selon que les historiens ont privilĂ©giĂ© tel ou tel aspect de lâĂ©vĂ©nement[144]. Mitre et le parti des nĂ©gociants se servirent de La RepresentaciĂłn de los Hacendados, opuscule rĂ©digĂ© par Mariano Moreno, pour affirmer que la rĂ©volution de Mai voulait le libre-Ă©change et l'intĂ©gration Ă©conomique avec lâEurope[145]. Les rĂ©visionnistes de droite mettent lâaccent sur Saavedra et les coutumes sociales de cette Ă©poque pour dĂ©crire la rĂ©volution dans une optique conservatrice[146] ; et les rĂ©visionnistes de gauche mettent en avant les effigies de Moreno, de Castelli et des agitateurs (chisperos) emmenĂ©s par French et Beruti pour prĂ©senter Mai comme une rĂ©volution radicale[147].
Intentions des révolutionnaires
Le gouvernement formĂ© le se dĂ©clara loyal au roi espagnol destituĂ© Ferdinand VII, mais les historiens ne sâaccordent pas sur le point de savoir si cette loyautĂ© Ă©tait ou non sincĂšre. Depuis Mitre, beaucoup dâhistoriens pensent que cette loyautĂ© professĂ©e nâĂ©tait quâun leurre politique, destinĂ© Ă masquer une volontĂ© dâautonomie[148] - [149] - [150]. La PremiĂšre Junte ne jura pas fidĂ©litĂ© au Conseil de RĂ©gence dâEspagne et des Indes, organisme Ă©manant pourtant de la monarchie espagnole et toujours en activitĂ©, tandis que la possibilitĂ© que NapolĂ©on fĂ»t vaincu et que Ferdinand montĂąt Ă nouveau sur le trĂŽne (ce qui advint finalement le , avec la signature du traitĂ© de Valençay) paraissait alors â en 1810 â Ă©loignĂ©e et improbable[48]. La manĆuvre consistant Ă prĂ©tendre que lâautoritĂ© monarchique Ă©tait toujours respectĂ©e et quâaucune rĂ©volution nâavait eu lieu, visait Ă se donner du temps pour consolider la position de la cause patriotique et Ă Ă©viter les rĂ©actions quâune rĂ©volution ouvertement assumĂ©e eĂ»t Ă©tĂ© susceptible de provoquer. Cette ruse est connue sous la dĂ©nomination de Masque de Ferdinand VII, et fut maintenue par la PremiĂšre Junte, par la Grande Junte, puis par les premier et second triumvirats. LâAssemblĂ©e de l'an XIII (Asamblea del Año XIII, 1813), pourtant convoquĂ©e pour proclamer lâindĂ©pendance, sâen abstint en raison de divers conflits politiques entre ses membres. Toutefois, elle dĂ©cida de supprimer la mention de Ferdinand VII dans les documents officiels. Les Directeurs SuprĂȘmes, quant Ă eux, envisagĂšrent dâautres options, telles que de nĂ©gocier avec lâEspagne ou de se transformer en protectorat britannique, jusquâĂ ce quâintervint enfin la DĂ©claration dâindĂ©pendance de lâArgentine de 1816.
Pour la Grande-Bretagne, le changement de rĂ©gime fut bĂ©nĂ©fique, dans la mesure oĂč les Ă©changes avec les villes du sous-continent furent facilitĂ©s, sans plus ĂȘtre entravĂ©s par le monopole sĂ©culaire que lâEspagne maintenait sur ses colonies[151]. Toutefois, la Grande-Bretagne, pour qui la prioritĂ© Ă©tait alors la guerre en Europe contre la France, devait se garder de donner lâimpression de soutenir les mouvements indĂ©pendantistes en AmĂ©rique et avait soin dâĂ©viter que les efforts militaires de lâEspagne eussent Ă se dĂ©ployer sur deux fronts diffĂ©rents. En consĂ©quence, les Britanniques faisaient pression pour que des revendications dâindĂ©pendance ne fussent pas ouvertement formulĂ©es. Ces pressions Ă©taient exercĂ©es par le biais de Lord Strangford, ambassadeur de Grande-Bretagne Ă la cour de Rio de Janeiro, qui manifesta son appui Ă la Junte, mais y mit cependant la condition que «...toujours la conduite de cette Capitale soit consĂ©quente et quâelle se maintienne sous le nom du Seigneur Ferdinand VII et de ses successeurs lĂ©gitimes. »[152] Plus tard, les conflits entre Buenos Aires, Montevideo et Artigas donnĂšrent lieu, sur le front britannique, Ă des conflits internes, entre Strangford et le rĂ©gent portugais Jean VI de Portugal[152].
AprĂšs Juan Bautista Alberdi, des historiens ultĂ©rieurs comme Norberto Galasso[153], Luis Romero et JosĂ© Carlos Chiaramonte[154] ont mis en doute lâinterprĂ©tation de Mitre, et en ont proposĂ© une autre. Alberdi pensait que « la rĂ©volution argentine (Ă©tait) un chapitre de la rĂ©volution hispano-amĂ©ricaine, qui elle-mĂȘme en est un de lâespagnole, et celle-ci, Ă son tour, de la rĂ©volution europĂ©enne. »[155] Ils ne la considĂ©raient plus comme un conflit entre indĂ©pendantisme et colonialisme, mais entre idĂ©es libĂ©rales nouvelles et absolutisme. Lâintention des rĂ©volutionnaires nâĂ©tait pas de couper les liens avec l'Espagne, mais de redessiner la relation avec celle-ci. De ce point de vue, la rĂ©volution de Mai serait donc plutĂŽt de la nature dâune guerre civile[156]. Certains Ă©lĂ©ments tendent Ă accrĂ©diter cette thĂšse, notamment lâinclusion dans la Junte de Larrea, Matheu et Belgrano, et, plus tard, lâapparition de JosĂ© de San MartĂn ; Larrea et Matheu en effet Ă©taient Espagnols, Belgrano avait Ă©tudiĂ© pendant de longues annĂ©es en Espagne[157], et San MartĂn, enfin, avait passĂ© la majeure partie de sa vie adulte Ă faire la guerre en Espagne contre les Français[158] : quand il faisait allusion Ă ses ennemis, il les appelait royalistes ou Goths, jamais Espagnols[159].
Selon ces historiens, la rĂ©volution espagnole contre lâabsolutisme vint se greffer sur la guerre dâindĂ©pendance espagnole. Charles IV Ă©tait vu comme un roi au pouvoir absolu, et Ferdinand VII, en regard de son pĂšre, pouvait donner la fausse impression Ă beaucoup dâEspagnols quâil sympathisait avec les idĂ©es nouvelles des LumiĂšres[160]. Ainsi, les rĂ©volutions dĂ©clenchĂ©es dans les AmĂ©riques au nom de Ferdinand VII (comme la rĂ©volution de Mai, la RĂ©volution de Chuquisaca, ou la rĂ©volution chilienne) auraient-elles, selon cette thĂ©orie, visĂ© Ă remplacer le pouvoir absolu par un rĂ©gime inspirĂ© des idĂ©es nouvelles. Bien que lâEspagne fĂ»t en guerre avec la France, les idĂ©aux de la RĂ©volution française, tels que condensĂ©s dans sa devise, Ă©taient nĂ©anmoins tenus en honneur par les progressistes espagnols[161]. Ces rĂ©volutions, quoique se proclamant elles-mĂȘmes ennemies de NapolĂ©on, nâeurent Ă affronter de la part des Français aucune attaque militaire active ; elles donnĂšrent lieu au contraire Ă des affrontements entre combattants espagnols pour le maintien de lâordre ancien ou pour lâavĂšnement dâun ordre nouveau. Cette situation devait changer avec la dĂ©faite dĂ©finitive de NapolĂ©on et le retour sur le trĂŽne de Ferdinand VII, celui-ci sâemployant en effet Ă restaurer lâabsolutisme et Ă persĂ©cuter en Espagne les tenants des nouvelles idĂ©es libĂ©rales. Pour la population d'AmĂ©rique du Sud, continuer de faire partie de lâEmpire espagnol, fĂ»t-ce dans une relation nouvelle avec la mĂ©tropole, avait cessĂ© dâĂȘtre une option envisageable : les seules possibilitĂ©s qui sâoffraient dĂ©sormais Ă©taient soit le retour Ă lâabsolutisme, soit lâindĂ©pendance[162].
Postérité
Le , date de la constitution du premier gouvernement patriote, est commĂ©morĂ© chaque annĂ©e comme un Ă©vĂ©nement patriotique en Argentine, avec le statut de fĂȘte nationale, reconnu par la loi 21.329. Il sâagit dâun jour fĂ©riĂ© inamovible, c'est-Ă -dire tombant toujours exactement le , indĂ©pendamment du jour de la semaine[163].
Si la date du fut proclamĂ©e date patriotique en 1813, la dĂ©claration dâindĂ©pendance de lâArgentine, survenue le , a fourni une fĂȘte nationale alternative. Durant la guerre civile argentine, le choix de la fĂȘte nationale opposait Buenos Aires et les provinces, la date du renvoyant en effet Ă Buenos Aires et celle du se rapportant au pays dans son ensemble[164]. Ainsi Bernardino Rivadavia, appartenant au parti unitaire, supprima-t-il la cĂ©lĂ©bration du , tandis que le fĂ©dĂ©raliste Juan Manuel de Rosas la rĂ©institua, sans pour autant renoncer au . En 1880, avec la fĂ©dĂ©ralisation de Buenos Aires, la connotation locale disparut et la rĂ©volution de Mai prit la signification de naissance de la nation argentine[164].
Hommages et commémorations
Le centenaire et le bicentenaire de la rĂ©volution de Mai furent cĂ©lĂ©brĂ©s respectivement en 1910 et 2010. Pour honorer lâĂ©vĂ©nement, le nom, la date, de mĂȘme quâune image gĂ©nĂ©rique du Cabildo de Buenos Aires, ont Ă©tĂ©, sous diverses variantes, mis Ă contribution. Les cas les plus notoires sont lâavenue de Mai (en espagnol Avenida de Mayo) et la place de Mai (Plaza de Mayo) Ă Buenos Aires, toutes deux Ă proximitĂ© du Cabildo. Une pyramide de Mai (PirĂĄmide de Mayo) fut Ă©rigĂ©e sur cette derniĂšre un an aprĂšs la rĂ©volution, et reconstruite en sa forme actuelle en 1856. Plusieurs villes, subdivisions administratives, lieux publics et entitĂ©s gĂ©ographiques en Argentine ont Ă©tĂ© baptisĂ©s Veinticinco de Mayo (Vingt-cinq mai). Des dĂ©partements portant ce nom se rencontrent dans les provinces de Chaco, Misiones, San Juan, RĂo Negro et Buenos Aires, cette derniĂšre comprenant par ailleurs une ville dĂ©nommĂ©e Veinticinco de Mayo. Les villes de Rosario (Santa Fe), JunĂn (Buenos Aires) et de Resistencia (Chaco) possĂšdent une place de ce nom. LâĂle du Roi-George, objet de revendications de souverainetĂ© de la part de lâArgentine, de la Grande-Bretagne et du Chili, en tant que partie intĂ©grante resp. de lâAntarctique argentine, du Territoire antarctique britannique et du Territoire antarctique chilien, est nommĂ©e par lâArgentine Isla 25 de Mayo[165].
Les piĂšces de monnaie de 25 centavos portent l'effigie commĂ©morative du Cabildo[166], et celles de 5 centavos sont ornĂ©es dâune reprĂ©sentation du Soleil de Mai (Sol de Mayo)[167]. Une image du Cabildo, sous lâaspect quâil prĂ©sentait pendant la RĂ©volution, se trouvait reproduite sur lâenvers des billets de 5 pesos de lâancien Peso Moneda Nacional.
La révolution de Mai dans la culture argentine
En raison du statut de date patriote du , la rĂ©volution de Mai fait chaque annĂ©e en Argentine lâobjet de nombreux articles dans des revues de jeunesse, p.ex. dans Billiken, ainsi que dâĂ©vocations dans les manuels scolaires de lâenseignement primaire. Ces publications ont tendance Ă omettre certains aspects de lâĂ©vĂ©nement historique qui, par leur violence ou portĂ©e politique, pourraient sembler inappropriĂ©s aux mineurs dâĂąge, aspects tels que le taux Ă©levĂ© de dĂ©tention dâarmes de la population Ă cette Ă©poque (sĂ©quelle des prĂ©paratifs contre la deuxiĂšme invasion anglaise) ou que la lutte des classes entre criollos et Espagnols pĂ©ninsulaires. La rĂ©volution est au contraire dĂ©peinte comme un Ă©vĂ©nement exempt de violence, destinĂ© Ă survenir inĂ©vitablement dâune maniĂšre ou dâune autre, et lâaccent est mis sur des aspects secondaires, tels que le temps quâil faisait ce , sâil pleuvait ou non, ou si lâusage de parapluies Ă©tait largement rĂ©pandu ou limitĂ© Ă une minoritĂ©[168].
Le centenaire de la RĂ©volution fit naĂźtre un grand nombre dâĆuvres d'art ayant lâĂ©vĂ©nement pour sujet et de reprĂ©sentations imagĂ©es de celui-ci. Le peintre chilien Pedro Subercaseaux rĂ©alisa, sur sollicitation d'Adolfo Carranza, de nombreux tableaux sur le sujet, notamment le Cabildo ouvert du 22 mai 1810, Mariano Moreno Ă©crivant Ă sa table de travail, lâEmbrassade de MaipĂș entre San MartĂn et Bernardo O'Higgins, et la PremiĂšre ExĂ©cution de lâhymne national argentin le . Beaucoup de ces Ćuvres devaient plus tard s'Ă©lever au rang d'images canoniques[169]. Le centenaire est Ă©galement Ă lâorigine dâun prĂ©coce film muet intitulĂ© La RevoluciĂłn de Mayo, tournĂ© en 1909 par Mario Gallo, et dont la premiĂšre eut lieu en 1910. Ce film fut le premier film de fiction argentin rĂ©alisĂ© avec des acteurs professionnels[170].
Parmi les chansons inspirées des événements de Mai, sont à signaler en particulier : le Candombe de 1810 ; El Sol del 25, sur des paroles de Domingo Lombardi et James Rocca, interprété par le chanteur de tangos Carlos Gardel ; Salve Patria, d'Eugenio Cårdenas et de Guillermo Barbieri ; Gavota de Mayo, composé par Peter Berruti, sur une musique folklorique.
Le roman d'AndrĂ©s Rivera (en), La RevoluciĂłn es un Sueño Eterno (litt. la RĂ©volution est un songe Ă©ternel), paru en 1987, apporte, par le biais de la fiction littĂ©raire, une analyse particuliĂšre de la rĂ©volution de Mai. Le rĂ©cit est constituĂ© des carnets imaginaires de Juan JosĂ© Castelli, qui fut jugĂ© pour sa conduite dans la dĂ©sastreuse premiĂšre campagne du Haut-PĂ©rou. Ă travers le compte rendu imaginaire fait par un Castelli mortellement malade, Rivera critique lâhistoire officielle et la nature de la RĂ©volution[171].
Le bicentenaire de 2010 fut moins fĂ©cond en Ćuvres traitant de la rĂ©volution que ne lâavait Ă©tĂ© le centenaire. Il parut toutefois un grand nombre dâouvrages touchant de prĂšs Ă lâĂ©vĂ©nement, tels que 1810 de Felipe Pigna, Enigmas de la historia argentina de Diego Valenzuela, Hombres de Mayo de Ricardo de Titto, et Historias de corceles y de acero de Daniel Balmaceda[172].
Références
- Moses, p. 36-37
- Moses, p. 35.
- Abad de SantillĂĄn, p. 387. espagnol : Francisco SuĂĄrez sostenĂa que el poder, la autoridad, no pasa de Dios al gobernante, sino por intermedio del pueblo [...]; si esos gobernantes no cumplen su funciĂłn de gerentes del bien comĂșn se transforman en tiranos, los pueblos tienen derecho a resistir la opresiĂłn. [...] ProponĂa, pues, la doctrina del origen democrĂĄtico del poder
français : Francisco SuĂĄrez soutenait que le pouvoir, lâautoritĂ©, ne passe pas de Dieu au gouvernant, si ce nâest par lâintermĂ©diaire du peuple [...] ; si ces gouvernants ne remplissent pas leur fonction de gĂ©rants du bien commun, ils se transforment en tyrans, et le peuple a le droit de rĂ©sister Ă leur oppression. [...] Il proposait donc la doctrine de lâorigine dĂ©mocratique du pouvoir. - Brownson, p. 86.
- Moses, p. 29
- Moses, p. 34.
- Mantoux, p. 25.
- Heckscher, p. 243.
- Kaufmann, p. 8.
- Fremont-Barnes, p. 29.
- Shumway, p. 19.
- Luna, Independencia..., p. 28. espagnol : España habĂa demostrado que econĂłmicamente no podĂa ejercer el papel de una metrĂłpoli porque no tenĂa capacidad para abastecer a sus dominios de las mercaderĂas necesarias ni podĂa absorber los productos primarios que aquĂ©llos producĂan: sĂłlo una forzada polĂtica comercial lograba mantener la hegemonĂa de los comerciantes de CĂĄdiz. français : LâEspagne avait dĂ©montrĂ© quâelle nâĂ©tait pas en mesure Ă©conomiquement de jouer le rĂŽle de mĂ©tropole, car elle nâavait les capacitĂ©s ni dâapprovisionner ses possessions en marchandises nĂ©cessaires, ni dâabsorber les matiĂšres premiĂšres que celles-ci produisaient : seule une politique commerciale contraignante rĂ©ussissait Ă maintenir lâhĂ©gĂ©monie des marchands de Cadix.
- Shumway, p. 8-9
- Abad de SantillĂĄn, p. 391. espagnol : Los ingleses tuvieron en las colonias españolas, a pesar del monopolio comercial metropoletano, fuertes intereses: el comercio ilĂcito se aproximaba en su monto casi al valor del autorizado por España; el contrabando se convirtiĂł en un medio importante de vida para los propios colonos y tambiĂ©n para los gobernantes encargados de reprimirlo. français : Les Anglais avaient dans les colonies espagnoles, en dĂ©pit du monopole commercial mĂ©tropolitain, des intĂ©rĂȘts importants : le commerce illicite avait un montant total proche de la valeur de celui autorisĂ© par lâEspagne ; la contrebande devint un important moyen de subsistance pour les colons eux-mĂȘmes, et aussi pour les gouvernants chargĂ©s de la rĂ©primer.
- Shumway, p. 15.
- Shumway, p. 3.
- Abad de SantillĂĄn, p. 391. espagnol : ...la apariciĂłn de un sector criollo que aguantaba el predominio de los españoles nativos en las funciones pĂșblicas, sentimiento que se extendĂa tambiĂ©n al bajo clero. français : ...lâapparition dâune fraction criollo de la population, qui endurait la prĂ©dominance des Espagnols de naissance dans la fonction publique, sentiment qui sâĂ©tendait aussi au bas clergĂ©.
- Moses, p. 4.
- Shumway, p. 17.
- Abad de SantillĂĄn, p. 376. espagnol : El blanco estaba obligado a servir en la milicia personalmente, [...] eran los Ășnicos que podĂan llevar armas y hacer uso de ellas; el privilegio fue superado en los momentos de gran apremio en que era preciso contar con mayores contingentes para la defensa
français : Le blanc Ă©tait obligĂ© de servir dans la milice personnellement, (âŠ) ils Ă©taient les seuls Ă pouvoir porter une arme et Ă en faire usage ; le privilĂšge fut levĂ© dans les moments de grande urgence, oĂč il Ă©tait nĂ©cessaire de prĂ©voir des contingents plus importants pour la dĂ©fense. - Luna, Independencia..., p. 28. espagnol : El pacto con España estaba gravemente vulnerado en el RĂo de la Plata a partir de las Invasiones Inglesas: la metrĂłpoli no habĂa podido defender a sus colonias del ataque externo y habĂan sido los habitantes de Buenos Aires y de la Banda Oriental los que rechazaron el intento britĂĄnico.
français : Le pacte avec lâEspagne se trouvait gravement entamĂ© dans le RĂo de la Plata depuis les invasions anglaises : la mĂ©tropole nâavait pas Ă©tĂ© en mesure de dĂ©fendre ses colonies contre lâattaque extĂ©rieure, et câĂ©taient les habitants de Buenos Aires et de la bande Orientale qui repoussĂšrent la tentative britannique. - Luna, Independencia..., p. 20. espagnol : Para unos, la soluciĂłn de aceptar a Carlota Joaquina como heredera de Carlos IV era una aceptable fĂłrmula de transiciĂłn hacia una independencia ordenada. Para otros, una simple fachada que era conveniente usar hasta tanto madurasen las condiciones para una ruptura con España. Aunque tambiĂ©n se pensaba que proporcionaba los elementos para preservar la fidelidad al rey cautivo. Pour les uns, la solution dâaccepter Charlotte Joachime comme hĂ©ritiĂšre de Charles IV Ă©tait une formule de transition acceptable en vue dâune indĂ©pendance ordonnĂ©e. Pour dâautres, câĂ©tait une simple façade quâil Ă©tait commode dâutiliser jusquâĂ ce que les conditions eussent suffisamment mĂ»ri pour permettre une rupture avec lâEspagne. Cependant, lâidĂ©e existait Ă©galement que cela constituait le moyen de prĂ©server la fidĂ©litĂ© au roi captif.
- Luna, Independencia..., p. 20. espagnol : El carlotismo estaba pues cargado de ambigĂŒedades y equĂvocos, los que, a la larga, terminaron por debilitarlo como proyecto alternativo. Se sospechaba que tras su formulaciĂłn se ocultaban apenas el brazo expansionista de Portugal o las apetencias britĂĄnicas. Le charlottisme en effet Ă©tait chargĂ© dâambiguĂŻtĂ©s et de malentendus, qui Ă la longue finirent par lâaffaiblir en tant que projet politique de rechange. Lâon suspectait que derriĂšre cette proposition se cachait difficilement le bras expansionniste du Portugal ou les appĂ©tences britanniques.
- Kaufmann, p. 58.
- Félix Luna, Breve historia de los argentinos, Planeta Argentina, , 272 p., « La etapa colonial / Las Invasiones Inglesas »
- Luna, Breve..., p. 52. espagnol : Sobremonte, en efecto aparece como un timorato a los ojos de los porteños por acatar instrucciones que databan de la Ă©poca de Cevallos, segĂșn las cuales, si habĂa un ataque exterior, el primer deber del virrey era asegurar los fondos reales y el dinero de los particulares y escapar, poniĂ©ndolos a buen recaudo. Lo hizo, y quedĂł ante la historia como un cobarde
français : Sobremonte en effet apparaĂźt aux yeux des PortĂšgnes comme un timorĂ© pour sâĂȘtre tenu Ă des instructions datant de lâĂ©poque de Cevallos, aux termes desquelles le premier devoir du vice-roi Ă©tait, si une attaque Ă©trangĂšre survenait, de mettre en sĂ»retĂ© les fonds royaux et les avoirs privĂ©s et de sâĂ©chapper, en ayant soin de les mettre Ă lâabri. Câest ce quâil fit, et resta marquĂ© de poltron devant lâhistoire. - Luna, Breve..., p. 52. espagnol : Este es un precedente fundamental: el pueblo de Buenos Aires derroca al virrey, algo nunca visto en el imperio español.
français : CâĂ©tait un prĂ©cĂ©dent fondamental : le peuple de Buenos Aires renverse le vice-roi, chose jamais vue dans lâempire espagnol. - Luna, ...Santiago de Liniers, p. 120 espagnol : Pronto llegaron los reconocimientos: en primer lugar el del Rey Carlos IV. Liniers obtuvo el ascenso a brigadier, [...] y finalmente el cargo efectivo de virrey. Les reconnaissances arrivĂšrent promptement : en premier lieu, celle du roi Charles IV. Liniers fut promu brigadier, [...] et obtint finalement la charge effective de vice-roi.
- Luna, ...Santiago de Liniers, p. 128. espagnol : En esto tuvieron mucha responsabilidad los miembros del sector español monopolista, del que Ălzaga formaba parte. Ese grupo tenĂa tambiĂ©n mucha fuerza en Montevideo, pues sus miembros pugnaban, desde hacĂa tiempo, por desembarazarse de la tutela de Buenos Aires. Poco les costĂł poner a ElĂo de su parte.
français : Au sein de celui-ci, les membres de la faction espagnole monopoliste, dont faisait partie Ălzaga, avaient beaucoup de responsabilitĂ©. Ce groupe Ă©tait puissant Ă©galement Ă Montevideo, ses membres cherchant en effet depuis un certain temps Ă sâaffranchir de la tutelle de Buenos Aires. Il leur en avait coĂ»tĂ© peu de mettre ElĂo de leur cĂŽtĂ©. - Javier de ElĂo, citĂ© par Mitre, p. 251-252. espagnol : "La Junta se erige con el laudable, catĂłlico y religioso designio de conservar incĂłlumnes e intactos los derechos del rey natural don Fernando VII [...] y que serĂĄ al fin una Junta que obrarĂĄ en todo con acuerdo de la capital"
français : « La Junte est constituĂ©e avec le louable, catholique et religieux dessein de garder intacts et indemnes les droits du roi naturel don Ferdinand VII [...] et quâelle sera finalement une Junte qui Ćuvrera en tout avec lâaccord de la capitale ». - Luna, ...Juan JosĂ© Castelli, p. 55.espagnol : Algunos criollos, como Mariano Moreno, depositan su esperanza en la asonada alzaguista. Pero el "partido de la independencia" considera que, en la disyuntiva entre Ălzaga y Liniers, el mĂĄs peligroso para sus planes es el jefe del Cabildo. français : Quelques criollos, comme Mariano Moreno, placent leur espoir dans l'Ă©meute alzaguiste. Mais le parti de lâindĂ©pendance considĂšre que dans lâalternative entre Ălzaga et Liniers, le plus dangereux pour leurs projets est le chef du cabildo.
- Luna, ...Juan JosĂ© Castelli, p. 55. espagnol : No es una contradicciĂłn: la independencia que busca Ălzaga es la de los ricos peninsulares, para perpetuar su dominio en Buenos Aires. français : Ce nâest pas une contradiction : lâindĂ©pendance que recherche Ălzaga est celle des riches pĂ©ninsulaires, pour perpĂ©tuer leur domination Ă Buenos Aires.
- Pigna, p. 221. espagnol : Los dirigentes de esta "asonada", como se la llamĂł y como pasĂł a la historia, entre ellos el propio Ălzaga, fueron detenidos y enviados a la zona de lo que hoy es Carmen de Patagones. Poco despuĂ©s fueron rescatados por ElĂo y llevados a Montevideo. français : Les dirigeants de cette asonada, comme on lâappela et comme elle passa Ă lâhistoire, et parmi eux Ălzaga lui-mĂȘme, furent dĂ©tenus et envoyĂ©s Ă Carmen de Patagones. Peu aprĂšs, ils furent dĂ©livrĂ©s par ElĂo et emmenĂ©s Ă Montevideo.
- Belgrano, p. 65. espagnol : Entonces aspirĂ© a inspirar la idea ĂĄ Liniers de que no debĂa entregar el mando, por no ser autoridad legĂtima la que lo despojaba.
français : Je mâappliquais alors Ă insuffler Ă Liniers lâidĂ©e quâil ne devait pas se dessaisir du commandement, attendu que l'autoritĂ© qui lâen dĂ©pouillait nâen Ă©tait pas une lĂ©gitime. - Belgrano, p. 65. espagnol : los ĂĄnimos de los militares estaban adheridos ĂĄ esta opiniĂłn.
français : L'Ă©tat d'esprit des militaires Ă©tait proche de cette opinion. - Pigna, p. 224.espagnol : En la Banda Oriental, ElĂo disolviĂł la Junta de Montevideo y aceptĂł la autoridad del nuevo virrey, que volviĂł a armar a las milicias españolas y decretĂł una amnistĂa que dejĂł en libertad a los que habĂan conspirado contra Liniers. français : Dans la bande Orientale, ElĂo dĂ©cida de dissoudre la Junte de Montevideo et accepta lâautoritĂ© du nouveau vice-roi, qui rĂ©arma les milices espagnoles et dĂ©crĂ©ta une amnistie qui remit en libertĂ© ceux qui avaient conspirĂ© contre Liniers.
- Scenna, p. 24. espagnol : PermitiĂł [Cisneros] que MartĂn de Ălzaga regresara a Buenos Aires con una suave prisiĂłn domiciliaria, mĂĄs teĂłrica que real
français : (Cisneros) permit Ă MartĂn de Ălzaga de retourner Ă Buenos Aires avec une douce peine de rĂ©sidence surveillĂ©e, plus thĂ©orique que rĂ©elle. - Abad de SantillĂĄn, p. 398. espagnol : DespuĂ©s de algunos hechos de violencia, el presidente GarcĂa Pizarro renunciĂł al cargo el 25 de mayo de 1809 y el mando fue asumido por la Audiencia, que nombrĂł comandante general de armas al teniente coronel Juan Antonio Ălvarez de Arenales
français : AprĂšs quelques faits violents, le prĂ©sident GarcĂa Pizarro dĂ©missionna le 25 mai 1809, et le commandement fut assumĂ© par lâAudiencia, laquelle nomma commandant gĂ©nĂ©ral des armes le lieutenant-colonel Juan Antonio Ălvarez de Arenales. - Abad de SantillĂĄn, p. 398. espagnol : Un movimiento insurreccional [...] se produjo el 16 de julio, bajo la direcciĂłn de Pedro Domingo Murillo y de Juan Pedro Idaburu. Los rebeldes impusieron la renuncia del gobernador y del obispo y constituyeron una junta con carĂĄcter de cuerpo consultativo.
français : Un mouvement insurrectionnel [...] se produisit le 16 juillet, sous la direction de Pedro Domingo Murillo et de Juan Pedro Idaburu. Les rebelles contraignirent le gouverneur et lâĂ©vĂȘque Ă dĂ©missionner, et constituĂšrent une junte Ă caractĂšre de corps consultatif. - Abad de SantillĂĄn, p. 398. espagnol : El mariscal Vicente Nieto fue designado por Liniers para pacificar a Chuquisaca; cuando llegĂł a la villa rebelde con 900 o 1000 hombres, la hallĂł tranquila y dispuesta a someterse; la junta revolucionaria quedĂł disuelta y se constituyĂł una nueva audiencia.
français : Le marĂ©chal Vicente Nieto fut dĂ©signĂ© par Liniers pour pacifier Chuquisaca ; lorsquâil arriva Ă la citĂ© rebelle avec 900 ou 1 000 hommes, il la trouva tranquille et disposĂ©e Ă se soumettre ; la junte rĂ©volutionnaire resta dissoute et une nouvelle Audiencia fut constituĂ©e. - Abad de SantillĂĄn, p. 398. espagnol : En total la columna punitiva sumaba 5000 hombres, frente a los cuales los paceños sĂłlo podĂan disponer de ochocientos fusiles y once piezas de artillerĂa
français : La colonne punitive comptait au total 5 000 hommes, face auxquels les PacĂšgnes disposaient de seulement 800 fusils et de onze piĂšces dâartillerie. - Mitre, p. 286. espagnol : Los que sobrevivieron a la derrota fueron condenados a muerte por el inhumano Goyeneche, quien sin sujetarse a ninguna forma de juicio hizo ahorcar a nueve de ellos, mandando clavar de firme sus miembros ensangrentados en las columnas militarias, que en aquel paĂs sirven de guĂa al caminante.
français : Ceux qui survĂ©curent Ă la dĂ©faite furent condamnĂ©s Ă mort par lâinhumain Goyeneche, qui, ne voulant accorder aucune forme de jugement, fit pendre neuf d'entre eux, et ordonna d'attacher leurs corps ensanglantĂ©s aux colonnes militaires, lesquelles en ce pays servent de points de repĂšre aux voyageurs. - Mitre, p. 287-288. espagnol : Esta aprobaciĂłn de las matanzas de La Paz contribuyĂł a hacer mĂĄs odioso el nombre de Cisneros entre los americanos, [...] que castigaba con el destierro y el suplicio en una parte, el mismo hecho que habĂa alentado y premiado en Montevideo, sĂłlo porque unos eran americanos y otros eran españoles. français : Cette approbation des tueries de La Paz contribua Ă rendre plus odieux le nom de Cisneros chez les AmĂ©ricains, [...] (Cisneros en effet) chĂątiait par lâexil et le supplice dâune part, tandis que dâautre part le mĂȘme acte Ă©tait encouragĂ© et rĂ©compensĂ© Ă Montevideo, cela seulement parce que les uns Ă©taient AmĂ©ricains et les autres Espagnols.
- (es) Pacho O'Donnell, « El Silogismo de Charcas », Editorial Sudamericana (consulté le )
- Pigna, p. 227. espagnol : Ante la posibilidad de que estos sucesos se repitieran, [...] el virrey decidiĂł crear un Juzgado de Vigilancia PolĂtica [...]. français : Devant la possibilitĂ© de ce que de tels Ă©vĂ©nements se rĂ©pĂ©tassent, [...] le vice-roi dĂ©cida de crĂ©er une Cour de Surveillance politique [...].
- Scenna, p. 26. espagnol : En esa lista, dada por el mismo Romero a la posteridad, figuran Saavedra, Paso, Chiclana, Vieytes, Balcarce, Castelli, Larrea, Guido, Viamonte, Moreno, el presbĂtero SĂĄenz, el canĂłnigo Belgrano y otros que no identifica.
français : Dans cette liste, donnĂ©e par Romero lui-mĂȘme Ă la postĂ©ritĂ©, figurent Saavedra, Paso, Chiclana, Vieytes, Balcarce, Castelli, Juan Larrea, Guido, Viamonte, Moreno, le prĂȘtre SĂĄenz, le chanoine Belgrano et dâautres quâil nâidentifie pas. - Saavedra, p. 59. espagnol : No es tiempo, dejen ustedes que las brevas maduren y entonces las comeremos.
- Cornelio Saavedra, Memoria autĂłgrafa, Buenos Aires, Editorial del Nuevo Extremo, , 59 p. (ISBN 978-987-609-171-8)
français : En vĂ©ritĂ©, quel Ă©tait en ce temps-lĂ celui qui ne considĂ©rait pas que NapolĂ©on triompherait et rĂ©aliserait ses projets pour lâEspagne ? Câest ce Ă quoi moi-mĂȘme je mâattendais Ă trĂšs brĂšve Ă©chĂ©ance, lâoccasion ou le moment que je croyais propice Ă donner le cri de la libertĂ© dans ces rĂ©gions. VoilĂ la figue dont je disais quâil Ă©tait utile dâattendre quâelle mĂ»rĂźt.« espagnol : A la verdad, quiĂ©n era en aquel tiempo el que no juzgase que NapoleĂłn triunfarĂa y realizarĂa sus planes con la España? Esto era lo que yo esperaba muy en breve, la oportunidad o tiempo que creĂa conveniente para dar el grito de libertad en estas partes. Esta era la breva que decĂa era Ăștil esperar que madurase. » - (es) « Semana de Mayo », Ministerio de EducaciĂłn de la NaciĂłn, SubsecretarĂa de CoordinaciĂłn Administrativa, (consultĂ© le )
- Galasso, "El pueblo...", p. 43. espagnol : ...es necesario enarbolar alto las banderas, puesto que un doble peligro acecha: la imposición del poder francés y la restauración del absolutismo español.
français : ...il est nĂ©cessaire dâarborer haut les drapeaux, vu quâun pĂ©ril double guette : lâimposition du pouvoir français et la restauration de lâabsolutisme espagnol. - Pigna, p. 228.espagnol : En un principio, el virrey tratĂł de ocultar las novedades incautĂĄndose de todos los periĂłdicos que traĂa el barco. Pero, segĂșn cuenta Mario Belgrano, uno de ellos llegĂł a manos de Belgrano y Castelli, que se encargaron de difundir la noticia. français : Au dĂ©but, le vice-roi essaya dâocculter les nouvelles en confisquant tous les journaux que transportait le navire. Mais, ainsi que le relate Mario Belgrano, un de ceux-ci vint entre les mains de Belgrano et de Castelli, qui se chargĂšrent de diffuser la nouvelle.
- Saavedra, p. 60. espagnol : ...Entonces me pusieron en las manos la proclama de aquel dĂa. Luego que la leĂ, les dije: "Señores, ahora digo que no sĂłlo es tiempo, sino que no se debe perder una sola hora". français : ...Alors ils me remirent en mains la proclamation de ce jour-lĂ . AprĂšs lâavoir lue, je leur dis : « Messieurs, je dis maintenant que non seulement il est temps, mais quâil nây a pas une seule heure Ă perdre ».
- Luna, ...Juan JosĂ© Castelli, p. 70. espagnol : Castelli y Saavedra, los jefes mĂĄs notorios de esos dĂas, desecharon el plan de MartĂn RodrĂguez para derrocar a Cisneros por la fuerza. français : Castelli et Saavedra, les chefs les plus notables de ces journĂ©es, repoussĂšrent le projet de MartĂn RodrĂguez visant Ă renverser Cisneros par la force.
- (Anonyme) LĂłpez, p. 31 espagnol : Con esto todo se ha puesto en alboroto, la gente se concentra en los cuarteles, las calles estĂĄn solas, pero la plaza estĂĄ llena, y todas las tiendas y bandolas emparejadas, porque como tĂș sabes, son casi todas de godos.
français : Avec cela, tout est pris de frĂ©nĂ©sie, les gens se concentrent dans les casernes, les rues sont dĂ©sertĂ©es, mais la Plaza est remplie, et tous les magasins et toutes les Ă©choppes sont fermĂ©s, parce que, comme tu le sais, ils sont presque tous des goths (Espagnols pĂ©ninsulaires, NdT). - (Anonyme) LĂłpez, p. 31 espagnol : TĂș sabes que no tiene empacho ni vergĂŒenza para nada; pero tiene muchĂsimo talento, y es un patriota a macho: ÂĄfigĂșrate que sostuvo que debĂamos ahorcar al sordo en media plaza por los asesinatos de La Paz!
français : Tu sais bien, toi, quâil nâa ni pudeur, ni scrupule en rien ; mais il a un trĂšs grand talent, et câest un vaillant patriote : figure-toi quâil a soutenu que nous devions pendre le sourd au milieu de la Plaza pour les assassinats de La Paz ! - (Anonymous) LĂłpez, p. 39 espagnol : En las pulperĂas se notan muchas reuniones, y se arman pleitos a cada momento entre criollos y maturrangos, de los que resaltan bastante heridos a cuchillo porque a nadie se le deja sacar fusil o sable de los cuarteles.
français : On remarque de nombreuses rĂ©unions dans les Ă©piceries, et des disputes surgissent Ă tout moment entre criollos et pĂ©ninsulaires, dâoĂč sortent pas mal de blessĂ©s au couteau, puisquâon ne laisse personne prendre des fusils ou des sabres dans les casernes. - Abad de SantillĂĄn, p. 404. espagnol : No menciona la sustituciĂłn de la Junta de Sevilla por el Consejo de Regencia, aunque estaba ya en su conocimiento.
français : Il ne mentionne pas la substitution du Conseil de Régence à la Junte de Séville, alors que cela était déjà en sa connaissance. - (Anonyme) López, p. 31. espagnol : Dice que en sus manos estå segura la patria, y que se va a poner de acuerdo con Abascal, con Sanz y con Nieto para formar un gobierno que represente aquà a Fernando VII. ¥Qué badulaque!
français : Il dit quâentre ses mains la patrie est en sĂ»retĂ©, et quâil va se mettre dâaccord avec Abascal, Sanz et Nieto pour former un gouvernement qui reprĂ©sente ici Ferdinand VII. Quelle chiffe ! - (es) Felipe Pigna, Los mitos de la historia argentina, Argentina, Grupo editorial Norma, , 26e Ă©d., 229 p. (ISBN 978-987-545-149-0 et 987-545-149-5), « La RevoluciĂłn de Mayo »
- (Anonyme) LĂłpez, p. 31.espagnol : Al momento se fueron a ver al Alcalde Lezica y le exigieron un Cabildo Abierto, amenazĂĄndole de que si no se cita al vecindario acudirĂĄn todos a la Plaza Mayor con las tropas y con el pueblo para deponer al virrey, y nombrar un gobierno de patriotas.
français : AussitĂŽt ils sâen furent voir le maire Lezica et exigĂšrent de lui un cabildo ouvert, menaçant, au cas oĂč les citoyens nâĂ©taient pas convoquĂ©s, de se rendre tous Ă la Plaza Mayor avec les troupes et avec le peuple pour dĂ©poser le vice-roi et nommer un gouvernement de patriotes. - (Saavedra) LĂłpez, p. 44. espagnol : La cosa es tan seria, señor alcalde, que yo mismo estoy ya sindicado de traidor porque contengo a los paisanos, aconsejĂĄndoles moderaciĂłn hasta que ustedes llamen al pueblo por los resortes legĂtimos. Si ustedes no me ayudan, y si para el lunes 21 no se convoca al pueblo, no me queda mĂĄs remedio que ponerme a su cabeza, y ÂĄquĂ© sĂ© yo lo que vendrĂĄ! Ustedes serĂĄn los responsables de lo que suceda.
français : La chose est si sĂ©rieuse, monsieur le Maire, que mĂȘme moi je suis taxĂ© de trahison parce que je contiens les concitoyens, leur conseillant la modĂ©ration jusquâĂ ce que vous convoquiez le peuple par les voies lĂ©gales. Si vous ne mâaidez point, et si lundi 21 le peuple nâa pas Ă©tĂ© convoquĂ©, je nâaurai dâautre ressource que de me mettre Ă sa tĂȘte, et je ne sais ce qui alors adviendrait ! Vous seriez responsable de ce qui se passerait. - (Arzac) LĂłpez, p. 32. espagnol : Que quiso, o que no quiso, Lezica vio que la cosa iba muy seria; y rogĂł que le dieran tiempo para conferenciar con el virrey y para reducirlo a prestar su consentimiento al Cabildo Abierto; haciendo presente a nuestros amigos que de otro modo el caso serĂa ya de una rebeliĂłn manifiesta y que eso lo debĂamos dejar para el Ășltimo extremo.
français : Quâil le voulĂ»t ou non, Lezica vit que les choses devenaient trĂšs sĂ©rieuses, et demanda qu'on lui accordĂąt quelque temps pour se concerter avec le vice-roi et le conduire Ă donner son consentement au cabildo ouvert ; il reprĂ©senta Ă mes amis que sans cela il sâagirait dâun cas de rĂ©bellion manifeste, ce Ă quoi nous ne devions avoir recours quâen toute derniĂšre extrĂ©mitĂ©. - (Belgrano) LĂłpez, p. 44â45. espagnol : Y dĂgale usted de nuestra parte que si el lunes no hay Cabildo Abierto, obraremos de nuestra cuenta; sin consideraciĂłn a nadie, porque esto no admite vacilaciones ni tĂ©rminos medios: el pueblo quiere ser soberano y libre.
français : Et dites-lui de notre part que s'il nây a pas de cabildo ouvert dâici lundi, nous agirons par nous-mĂȘmes ; sans Ă©gard Ă personne, car ceci nâadmet pas de tergiversations ni de moyens termes : le peuple veut ĂȘtre souverain et libre. - Galasso, p. 49. espagnol : Leiva, por su parte, se convierte en amigo de los revolucionarios [...] mientras tambiĂ©n aparece como amigo y consejero ante el virrey.
français : Leiva, pour sa part, se convertit en ami des rĂ©volutionnaires [...] tandis quâen mĂȘme temps, il apparaĂźt aussi comme ami et conseiller du vice-roi. - (Arzac) LĂłpez, p. 45. espagnol : Se convino que Terrada con J. R. Balcarce, Bustos y DĂaz VĂ©lez, tomasen el mando de los granaderos que daban guardia en el Fuerte; que se apoderasen de todas las llaves de las entradas, mientras los demĂĄs subĂan a los salones del virrey.
français : Il fut convenu que Terrada, avec J. R. Balcarce, Bustos et DĂaz VĂ©lez prissent le commandement des grenadiers tenant la garde du fort, et quâils sâemparassent de toutes les clefs des entrĂ©es, pendant que les autres monteraient aux salons du vice-roi. - Saavedra, p. 61-62.espagnol : Señor, son muy diversas las Ă©pocas del 1Âș de enero de 1809 y la de mayo de 1810, en que nos hallamos. En aquella existĂa la España, aunque ya invadida por NapoleĂłn; en Ă©sta, toda ella, todas sus provincias y plazas estĂĄn subyugadas por aquel conquistador, excepto solo CĂĄdiz y la isla de LeĂłn, como nos aseguran las gacetas que acaban de venir y V.E. en su proclama de ayer. ÂżY quĂ©, señor? ÂżCĂĄdiz y la isla de LeĂłn son España? Este territorio inmenso, sus millones de habitantes, han de reconocer soberanĂa en los comerciantes de CĂĄdiz y en los pescadores de la isla de LeĂłn? ÂżLos derechos de la Corona de Castilla a que se incorporaron las AmĂ©ricas, han recaĂdo en CĂĄdiz y la isla de LeĂłn, que son una parte de una de las provincias de AndalucĂa? No señor, no queremos seguir la suerte de la España, ni ser dominados por los franceses, hemos resuelto reasumir nuestros derechos y conservarnos por nosotros mismos. El que a V.E. dio autoridad para mandarnos ya no existe; de consiguiente usted tampoco la tiene ya, asĂ que no cuente con las fuerzas de mi mando para sostenerse en ella.
français : Sire, ce sont des Ă©poques fort diffĂ©rentes que celle du 1er janvier 1809 et celle de mai 1810, dans laquelle nous nous trouvons prĂ©sentement ; Ă la premiĂšre, lâEspagne existait encore, quoique dĂ©jĂ envahie par NapolĂ©on ; Ă la seconde, lâEspagne entiĂšre, toutes ses provinces et places, ont Ă©tĂ© subjuguĂ©es par ce conquĂ©rant, Ă la seule exception de Cadix et de lâĂźle de LĂ©on, ainsi que nous lâassurent les journaux qui viennent dâarriver, et Son Excellence elle-mĂȘme dans sa proclamation dâhier. Et quoi, sire ? Cadix et lâĂźle de LĂ©on sont lâEspagne ? Les immenses territoires dâici, ses millions dâhabitants, sont tenus de reconnaĂźtre la souverainetĂ© des nĂ©gociants de Cadix et des pĂȘcheurs de lâĂźle de LĂ©on ? Les droits de la couronne de Castille, sur laquelle vinrent Ă se greffer les AmĂ©riques, sont Ă©chues dĂ©sormais Ă Cadix et Ă lâĂźle de LĂ©on, qui ne sont quâune partie dâune des provinces dâAndalousie ? Non sire, nous ne voulons pas suivre la destinĂ©e de lâEspagne, ni ĂȘtre dominĂ©s par les Français, et avons rĂ©solu de rĂ©assumer nos droits et de nous soutenir par nous-mĂȘmes. Tout cela mĂȘme qui avait confĂ©rĂ© Ă Son Excellence lâautoritĂ© pour nous gouverner, nâexiste plus ; par voie de consĂ©quence, vous non plus ne la dĂ©tenez plus ; ainsi, ne comptez pas sur les forces que je commande pour vous maintenir en elle. - MartĂn RodrĂgez, autobiographie, citĂ© par de Titto, p. 331. espagnol : ResultĂł el nombramiento en el doctor Castelli y yo, y para asegurarnos mejor, pedimos que el comandante de granaderos de infanterĂa Terrada, fuese con nosotros; pues su batallĂłn estaba acuartelado en el fuerte, y bajo los balcones del mismo Cisneros, y como en Ă©l habĂa muchos oficiales españoles, temĂamos que, al momento de la intimaciĂłn, se asomase Cisneros a un balcĂłn, llamase a los granaderos y nos hiciese amarrar.
français : Il fut convenu de missionner le docteur Castelli et moi-mĂȘme, et pour mieux nous assurer, nous priĂąmes le commandant des grenadiers dâinfanterie Terrada de nous accompagner ; son bataillon en effet Ă©tait casernĂ© dans le fort, sous les balcons de Cisneros lui-mĂȘme, et comme beaucoup dâofficiers espagnols se trouvaient dans ce bataillon, nous craignions quâau moment oĂč nous serions face-Ă -face avec Cisneros, celui-ci ne se penchĂąt au balcon pour appeler les grenadiers et nous mettre en dĂ©tention. - Luna, ...Juan JosĂ© Castelli, p. 70. espagnol : RodrĂguez, que estĂĄ exaltado, reclama una urgente contestaciĂłn al pedido de Cabildo Abierto.
français : Rodriguez, en Ă©tat dâexaltation, rĂ©clame une rĂ©ponse urgente Ă la demande de cabildo ouvert. - Luna, ...Juan JosĂ© Castelli, p. 71 espagnol : Ofuscado e impotente, Cisneros sĂłlo puede decir "Señores, cuanto siento los males que van a venir sobre este pueblo de resultas de este paso; pero puesto que el pueblo no me quiere y el ejĂ©rcito me abandona, hagan ustedes lo que quieran"
français : CourroucĂ© et impuissant, Cisneros ne put que dire « Messieurs, combien je pressens les maux qui vont sâabattre sur ce peuple par lâeffet de cette dĂ©marche ; mais vu que le peuple ne m'aime pas et que lâarmĂ©e mâabandonne, faites donc ce que vous voulez ». - Buena Ventura Arzac, « Buenos Aires, domingo 20 de mayo de 1810 a la una de la noche », Carlos Casavalle Editor, 1810 (date originale), 1896 (consultĂ© le )
- Juan Andrés Pueyrredón, « San Isidro, 21 de mayo de 1810 », Carlos Casavalle Editor, (consulté le )
- (Anonyme) LĂłpez, p. 36. espagnol : Saavedra se habĂa enojado mucho y anduvo muy inquieto toda la noche del viernes, repitiendo que era preciso contener al populacho y a los desaforados que lo animaban a tales extremos; pero que el oficial le repetĂa tambiĂ©n: "No se engañe, coronel, la cosa no se puede atajar; y estoy cierto que si usted se empeña en contenerlos, a usted mismo lo han de hacer a un lado. Reflexione bien lo que va a hacer."
français : Saavedra sâĂ©tait fort fĂąchĂ© et resta trĂšs inquiet toute la soirĂ©e du vendredi, rĂ©pĂ©tant quâil fallait contenir la populace et les extrĂ©mistes qui l'incitaient Ă de telles extrĂ©mitĂ©s ; mais lâofficier, dâun autre cĂŽtĂ©, lui rĂ©pĂ©tait : « Ne vous leurrez pas, mon colonel, on ne pourra pas stopper cette chose, et je suis sĂ»r que si vous vous entĂȘtez Ă les contenir, ils vous pousseront de cĂŽtĂ© vous aussi. RĂ©flĂ©chissez bien Ă ce que vous allez faire ». - Pigna, p. 232. espagnol : El clima se fue caldeando y tuvo que intervenir [...] Cornelio Saavedra, que logrĂł calmarlos garantizĂĄndoles el apoyo militar a sus reclamos.
français : Les esprits sâĂ©chauffaient et Cornelio Saavedra dut intervenir (âŠ), qui parvint Ă les calmer en leur garantissant lâappui militaire Ă leurs exigences. - Pigna, p. 233. espagnol : Parece que don AgustĂn imprimiĂł unas cuantas tarjetas de mĂĄs y las repartiĂł entre sus compañeros, que reemplazaron a varios realistas, que no pudieron ingresar. français : Il semble que M. AgustĂn imprima une quantitĂ© de cartons dâinvitation en surplus et les distribua entre ses compagnons, qui prirent la place de plusieurs royalistes, qui ne purent pas entrer.
- Luna, ...Juan JosĂ© Castelli, p. 75. espagnol : La misma noche del dĂa 21, Castelli, MartĂn RodrĂguez, Domingo French y Antonio Berutti recorrieron los cuarteles, arengando a las tropas, que a la mañana siguiente, se apostaron en los puntos estratĂ©gicos de la Plaza para controlar el acceso al Cabildo. français : Ce mĂȘme soir du 21, Castelli, MartĂn RodrĂguez, French et Antonio Beruti parcoururent les casernes, haranguant les troupes, lesquelles se postĂšrent le lendemain aux endroits stratĂ©giques de la Place pour contrĂŽler lâaccĂšs au Cabildo.
- « Actas capitulares desde el 21 hasta el 25 de Mayo de 1810, en Buenos Aires », Buenos Aires cabildo, 23 mai 1810 (publication originale) (consulté le )
- Saavedra, p. 62. espagnol : Concurrieron todas las corporaciones eclesiĂĄsticas y civiles; un crecido nĂșmero de vecinos y un inmenso pueblo, don Pascual Ruiz Huidobro y todos los comandantes y jefes de los cuerpos de la guarniciĂłn. Las tropas estaban fijas en sus respectivos cuarteles con el objeto de acudir donde la necesidad lo demandase.
français : Toutes les corporations ecclĂ©siastiques et civiles y assistĂšrent ; un nombre croissant dâhabitants et une immense foule, don Pascual Ruiz Huidobro et lâensemble des commandants et chefs des corps de la garnison. Les troupes se tenaient prĂȘts dans leurs casernes respectives avec la consigne dâaccourir lĂ oĂč la nĂ©cessitĂ© le requerrait. - (Rezabal) LĂłpez, p. 51-53. espagnol : Usted comprenderĂĄ bien los temores que me asaltan desde que, por el suceso del 1° del año pasado, quedĂ© sindicado y perseguido por el partido de Liniers, que a las claras es el que se ha declarado ahora contra el señor virrey y contra nosotros los europeos.
français : Vous comprendrez bien les craintes qui mâassaillent depuis que, Ă la suite de lâĂ©vĂ©nement du premier de lâan passĂ©, jâai Ă©tĂ© mis en accusation et persĂ©cutĂ© par le parti de Liniers, qui est manifestement celui qui sâest dĂ©clarĂ© Ă prĂ©sent contre monseigneur le vice-roi et contre nous EuropĂ©ens. - (Rezabal) LĂłpez, p. 51-53.espagnol : Los facciosos y alborotadores del dĂa estaban resueltos a no permitir el Cabildo Abierto en la forma en que se ha citado, limitĂĄndolo a la parte sana y principal del pueblo, sino que exigĂan que se admitiese en Ă©l a la tropa y a los hijos de familia que andan todos rebelados contra sus padres, siguiendo el funesto ejemplo que se les dio el año seis contra el Excmo. señor Sobremonte de donde viene toda la corrupciĂłn y desquicio en que hoy nos hallamos envueltos.
français : Les factieux et les fauteurs de troubles du jour Ă©taient rĂ©solus Ă ne pas permettre au cabildo ouvert de se dĂ©rouler dans la forme oĂč il a Ă©tĂ© convoquĂ©, c'est-Ă -dire limitĂ© Ă la partie saine et principale du peuple, et exigeaient au contraire que fussent admis la troupe et les fils de famille qui se sont tous rebellĂ©s contre leurs parents, suivant en cela le funeste exemple qui leur fut donnĂ© en lâan 1806 contre lâexcellentissime Sobremonte, exemple dont nous vient toute la corruption et le dĂ©rĂšglement dont nous nous trouvons aujourdâhui entourĂ©s. - Luna, Independencia..., p. 32. espagnol : Aunque la idea de que, cesada la autoridad legĂtima, el pueblo podĂa recomponerla por su voluntad era relativamente comĂșn en la doctrina escolĂĄstica española, en la IlustraciĂłn y en la filosofĂa racionalista, hacer de este principio un elemento activo, operativo, era revolucionario. français : Bien que lâidĂ©e que le peuple, lorsquâa cessĂ© dâexister lâautoritĂ© lĂ©gitime, pouvait reconstituer celle-ci par sa volontĂ©, fĂ»t relativement commune dans la doctrine scolastique espagnole, dans la pensĂ©e des LumiĂšres et dans la philosophie rationaliste, faire de ce principe un Ă©lĂ©ment actif, opĂ©ratoire, Ă©tait rĂ©volutionnaire.
- Luna, Independencia..., p. 34. espagnol : En el curso del debate se habĂan definido tres corrientes: la españolista, la revolucionaria, y una intermedia o moderada, capitaneada por el cura de Monserrat.
français : Au cours du dĂ©bat sâĂ©taient formĂ©s trois courants : lâespagnoliste, le rĂ©volutionnaire, et un intermĂ©diaire ou moderĂ©, avec Ă sa tĂȘte le curĂ© de Monserrat. - Pigna, p. 234. espagnol : No solamente no hay por quĂ© hacer novedad con el virrey, sino que aĂșn cuando no quedase parte alguna de la España que no estuviese sojuzgada, los españoles que se encontrasen en la AmĂ©rica deben tomar y reasumir el mando de ellas y que Ă©ste sĂłlo podrĂa venir a manos de los hijos del paĂs cuando ya no hubiese un español en Ă©l. Aunque hubiese quedado un solo vocal de la Junta Central de Sevilla y arribase a nuestras playas, lo deberĂamos recibir como al Soberano.
- Luna, Independencia..., p. 32. espagnol : Dos ideas fundamentales lucen en el discurso de Castelli: caducidad del gobierno legĂtimo [...] y reversiĂłn o retroversiĂłn de la soberanĂa en el pueblo de Buenos Aires.
français : Deux idĂ©es fondamentales sous-tendent le discours de Castelli : la caducitĂ© du gouvernement lĂ©gitime [...] et la rĂ©version ou la rĂ©troversion de souverainetĂ© au peuple de Buenos Aires. - Pigna, p. 236.espagnol : Nadie ha podido reputar por delincuente a la naciĂłn entera, ni a los individuos que han abierto sus opiniones polĂticas. Si el derecho de conquista pertenece, por origen, al paĂs conquistador, justo serĂa que la España comenzase por darle la razĂłn al reverendo obispo abandonando la resistencia que hace a los franceses y sometiĂ©ndose, por los mismos principios con que se pretende que los americanos se sometan a las aldeas de Pontevedra. La razĂłn y la regla tienen que ser iguales para todos. AquĂ no hay conquistados ni conquistadores, aquĂ no hay sino españoles. Los españoles de España han perdido su tierra. Los españoles de AmĂ©rica tratan de salvar la suya. Los de España que se entiendan allĂĄ como puedan y que no se preocupen, los americanos sabemos lo que queremos y adĂłnde vamos. Por lo tanto propongo que se vote: que se subrogue otra autoridad a la del virrey que dependerĂĄ de la metrĂłpoli si Ă©sta se salva de los franceses, que serĂĄ independiente si España queda subyugada.
- Abad de SantillĂĄn, p. 408. espagnol : ...la fĂłrmula decisiva, pues, fue esta y primĂł en buena parte de los concurrentes a la reuniĂłn: Melchor FernĂĄndez, [...] Juan LeĂłn Ferragut, [...] JoaquĂn Grigera.
français : ...la formule dĂ©cisive fut donc celle-lĂ , et câest elle qui lâemporta chez bon nombre de participants Ă la rĂ©union : Melchor FernĂĄndez, [...] Juan LeĂłn Ferragut, [...] JoaquĂn Grigera. - Luna, Independencia..., p. 32.espagnol : Era una hĂĄbil chicana: aceptarla implicaba perder la enorme ventaja de la oportunidad y postergar el cambio a un tiempo indefinido que podrĂa estar encuadrado por circunstancias muy diferentes. français : CâĂ©tait une habile chicane : lâaccepter impliquait de perdre lâĂ©norme avantage de lâoccasion prĂ©sente, et repousserait le changement Ă une date indĂ©terminĂ©e, oĂč pourraient prĂ©valoir des circonstances trĂšs diffĂ©rentes.
- Pigna, p. 237. espagnol : Juan JosĂ© Paso: "Dice muy bien el señor Fiscal, que debe ser consultada la voluntad general de los demĂĄs pueblos del Virreinato; pero piĂ©nsese bien que en el actual estado de peligros a que por su situaciĂłn local se ve envuelta esta capital, ni es prudente ni conviene el retardo que importa el plan que propone. Buenos Aires necesita con mucha urgencia sea cubierto de los peligros que la amenazan, por el poder de la Francia y el triste estado de la PenĂnsula. Para ello, una de las primeras medidas debe ser la inmediata formaciĂłn de la junta provisoria de gobierno a nombre del señor don Fernando VII; y que ella proceda sin demora a invitar a los demĂĄs pueblos del Virreinato a que concurran por sus representantes a la formaciĂłn del gobierno permanente"
français : Juan JosĂ© Paso : « Câest Ă bon escient que M. le Procureur a relevĂ© que devait ĂȘtre consultĂ©e la volontĂ© gĂ©nĂ©rale des autres peuples de la Vice-royautĂ© ; mais que lâon sâavise bien que dans lâĂ©tat actuel de pĂ©rils oĂč se trouve la capitale de par sa situation locale, le retard quâimplique le plan quâil propose nâest ni prudent ni appropriĂ©. Buenos Aires a besoin, de grande urgence, dâĂȘtre gardĂ©e des dangers qui la menacent par la puissance de la France et le triste Ă©tat de la PĂ©ninsule. Pour cela, une des premiĂšres mesures Ă prendre doit ĂȘtre la formation immĂ©diate de la junte provisoire de gouvernement au nom de Don Ferdinand VII, pour quâensuite celle-ci se propose sans dĂ©lai dâinviter les autres peuples de la Vice-royautĂ© Ă participer, Ă travers leurs reprĂ©sentants, Ă la formation du gouvernement permanent. » - Luna, Breve..., p. 62. espagnol : Buenos Aires obtuvo el derecho de introducir este cambio substancial en la estructura de poder virreinal, bajo la condiciĂłn de convocar despuĂ©s a las otras jurisdicciones y pedirles su opiniĂłn.
français : Buenos Aires obtint le droit dâintroduire ce changement substantiel dans la structure de pouvoir de la vice-royautĂ©, sous la condition de convoquer par aprĂšs les autres juridictions et de leur demander leur opinion. - LĂłpez, p. 92. espagnol : Passo (sic) procurĂł rebatirlo, invocando el caso de urgencia, con la teorĂa jurĂdica del "negotiorum gestor". Buenos Aires, dijo, que es la hermana mayor de esas provincias y vecindarios, cuyos derechos se invoca, se encuentra de improviso con que todo el gobierno de la monarquĂa se ha derrumbado en derredor suyo. No hay rey, no hay sucesor, no hay naciĂłn española.
français : Passo tenta de le rĂ©futer, en invoquant le cas dâurgence, selon la thĂ©orie juridique du negotiorum gestio. Buenos Aires, dit-il, que est la sĆur aĂźnĂ©e de ces provinces et contrĂ©es, les droits desquelles sont ici invoquĂ©s, se trouve soudainement confrontĂ©e Ă ce quâautour dâelle le gouvernement de la monarchie sâest effondrĂ©. Il nây a pas de roi, pas de successeur, pas de nation espagnole. - Luna, Breve..., p. 62. espagnol : Oportunamente, la persona beneficiada se enterarĂĄ, pero en principio se actĂșa como buen padre de familia o hermano mayor.
français : La personne bĂ©nĂ©ficiaire en sera avisĂ©e en temps opportun, mais en principe lâon agit en bon pĂšre de famille ou en frĂšre aĂźnĂ©. - Abad de SantillĂĄn, p. 408. espagnol : Se adhirieron a su criterio 19 de los presentes, entre ellos Manuel Alberti, AzcuĂ©naga, Antonio JosĂ© de Escalada, Cosme Argerich, Juan Pedro de Aguirre.
français : Se rangĂšrent Ă son argumentation 19 des personnes prĂ©sentes, parmi lesquelles Manuel Alberti, AzcuĂ©naga, Antonio JosĂ© de Escalada, Cosme Argerich, Juan Pedro de Aguirre. - Abad de SantillĂĄn, p. 409. espagnol : La fĂłrmula comprende la de Castelli, e incluye a los que dieron el voto con el agregado favorable al sĂndico.
français : La proposition comprend celle de Castelli, et eut lâadhĂ©sion de ceux qui donnĂšrent leur voix Ă lâannexe favorable au Cabildo. - Belgrano, espagnol : AllĂ presidiĂł el orden; una porciĂłn de hombres estaban preparados para la señal de un pañuelo blanco, atacar ĂĄ los que quisieran violentarnos [...] pero nada fuĂ© preciso, porque todo caminĂł con la mayor circunspecciĂłn y decoro.
français : Lâordre y rĂ©gnait : un groupe dâhommes se tenait prĂȘt, au signal dâun foulard blanc, Ă attaquer ceux qui eussent voulu nous violenter (...) mais rien de cela ne fut nĂ©cessaire, puisque tout se dĂ©roula avec les plus grands Ă©gards et dans la plus grande dignitĂ©. - Galasso, El Pueblo..., p. 59-60.
- Galasso, "El pueblo...", p. 61-62.
- Pigna, p. 238. espagnol : Hecha la regulaciĂłn con el mĂĄs prolijo examen resulta de ella que el Excmo. Señor Virrey debe cesar en el mando y recae Ă©ste provisoriamente en el Excmo. Cabildo [...] hasta la erecciĂłn de una Junta que ha de formar el mismo Excmo. Cabildo, en la manera que estime conveniente. français : Des vĂ©rifications, effectuĂ©es avec la plus grande minutie, il rĂ©sulte que lâexcellentissime seigneur Vice-roi doit renoncer au commandement, celui-ci Ă©chĂ©ant Ă titre provisoire Ă lâexcellentissime Cabildo (âŠ) jusquâĂ lâinstallation dâune junte quâaura Ă former ce mĂȘme excellentissime Cabildo, de telle maniĂšre qui lui paraĂźtra convenable.
- Abad de SantillĂĄn, p. 410. espagnol : "Se hace saber al pĂșblico, por medio del presente bando, para su gobierno e inteligencia, y que desechen cualesquiera deseos que hayan podido infundirle las Ășltimas infaustas noticias recibidas de la penĂnsula; bien entendido que este exmo. Cabildo procederĂĄ inmediatamente a la elecciĂłn de la Junta que haya de encargarse del mando superior hasta que se congregue a los diputados que se convocarĂĄn de las provincias"
français : « Par le prĂ©sent arrĂȘtĂ©, il est portĂ© Ă la connaissance du public, pour sa gouverne et sa bonne comprĂ©hension, et pour quâil repousse tous dĂ©sirs quâaient pu lui inspirer les funestes nouvelles parvenues de la pĂ©ninsule, que lâexcellentissime Cabildo procĂ©dera incessamment Ă lâĂ©lection de la junte destinĂ©e Ă assumer le commandement supĂ©rieur jusqu'Ă ce que se soient rĂ©unis les dĂ©putĂ©s qui auront Ă©tĂ© convoquĂ©s des provinces. - Abad de SantillĂĄn, p. 410. espagnol : El 24 determinĂł el Cabildo que continĂșe en el mando el excelentisimo señor virrey Baltasar Hidalgo de Cisneros, asociado a los señores Juan Nepomuceno de SolĂĄ, Juan JosĂ© Castelli, Cornelio Saavedra y JosĂ© Santos de Inchaurregui.
français : Le 24, le Cabildo disposa que resterait Ă la tĂȘte du pays lâexcellentissime seigneur vice-roi Baltasar Hidalgo de Cisneros, associĂ© Ă messieurs Juan Nepomuceno de SolĂĄ, Juan JosĂ© Castelli, Cornelio Saavedra et JosĂ© Santos de Inchaurregui. - LĂłpez, p. 64. espagnol : Lo Ășnico que te puedo decir es que hoy ha tenido lugar la comedia de la instalaciĂłn del nuevo Gobierno encabezado por el virrey.
français : La seule chose que je puis te dire est quâaujourdâhui a eu lieu la comĂ©die de lâinstallation du nouveau gouvernement dirigĂ© par le vice-roi. - (Moreno) LĂłpez, p. 60. espagnol : Yo le juro a usted que si esto no se ataja, no quiero saber de nada, ni he de salir ya de mi casa para nada. No cuenten conmigo.
français : Je le jure devant vous, si cela ne s'arrĂȘte pas, je ne veux plus en entendre parler, et il nây a plus lieu dĂ©sormais que je sorte de ma maison pour rien. Ne comptez plus sur moi. - (Tagle) LĂłpez, p. 60. espagnol : Miren ustedes; Castelli debe aceptar. FĂjense ustedes en que si don Cornelio ha hecho lo que se sospecha, habrĂĄ sido por debilidad o por inadvertencia, y que no se le debe dejar solo. Nuestra Ășnica garantĂa, pues, es de que lo acompañe Juan JosĂ© mientras nos desenvolvemos y obra el pueblo. Castelli impedirĂĄ toda medida peligrosa: asistirĂĄ al conciliĂĄbulo, le mostrarĂĄ a don Cornelio el abismo a que nos llevan, le harĂĄ oĂr la voz del patriotismo y cĂłmo es que quieren abusar de su rectitud y de su ĂĄnimo moderado, para perdernos; y don Cornelio es hombre que desde que se aperciba de todo esto, ha de volver sobre sus pasos y se ha de poner todo entero con nosotros: yo tendrĂ© confianza en Ă©l, desde que Ă©ste -designando a Castelli-, estĂ© a su lado y entre a la Junta del virrey.
français : Ăcoutez-moi bien ; Castelli doit accepter. Soyez bien conscients que si don Cornelio a fait ce quâon soupçonne, câest sans doute par faiblesse ou par naĂŻvetĂ©, et il ne faut pas alors le laisser seul. Notre seule garantie est donc que Juan JosĂ© (Castelli) lâaccompagne pendant que nous faisons notre Ćuvre et que le peuple agit. Castelli empĂȘchera toute mesure dangereuse : il assistera aux pourparlers, il fera voir Ă don Cornelio lâabĂźme vers lequel il nous entraĂźne, il lui fera entendre la voix du patriotisme, et lui fera toucher du doigt comment on veut abuser de sa droiture et de son esprit modĂ©rĂ©, pour nous perdre ; et don Cornelio, dĂšs quâil se sera aperçu de tout cela, est homme Ă revenir sur ses pas et se ranger complĂštement de notre cĂŽtĂ© : jâaurai confiance en lui, tant que lui â dĂ©signant alors Castelli â se tient Ă ses cĂŽtĂ©s et entre dans la Junte du vice-roi. - Pigna, p. 238. espagnol : Si nosotros nos comprometemos a sostener esa combinaciĂłn que mantiene en el gobierno a Cisneros, en muy pocas horas tendrĂamos que abrir fuego contra nuestro pueblo, nuestros mismos soldados nos abandonarĂan; todos sin excepciĂłn reclaman la separaciĂłn de Cisneros.
français : Si nous nous engageons Ă soutenir cette combinaison qui maintient Cisneros au gouvernement, nous devrons dâici peu dâheures ouvrir le feu contre notre peuple, et nos soldats nous abandonneraient ; tous sans exception rĂ©clament le dĂ©part de Cisneros. - (Arzac) LĂłpez, p. 66. espagnol : don Cornelio y Castelli le dijeron a Cisneros, que por mejor voluntad que tuvieran para acompañarlo, les era imposible responder del orden pĂșblico: que el pueblo estaba armado, concentrado en los cuarteles, resuelto a derrocar al gobierno y hacer una revoluciĂłn si el virrey no renunciaba en aquella misma noche: que su influjo era nulo para evitar esto; y que ni el uno podrĂa contener a sus amigos, ni el otro contener a su propio regimiento, que estaba ya sublevado y decidido a seguir a sus oficiales.
français : Don Cornelio et Castelli dirent Ă Cisneros que, quelque bonne volontĂ© quâils aient de lâaccompagner, il leur Ă©tait impossible de rĂ©pondre de lâordre public ; que le peuple Ă©tait armĂ©, concentrĂ© dans les casernes, rĂ©solu de renverser le gouvernement et de faire une rĂ©volution si le vice-roi ne dĂ©missionnait pas le soir mĂȘme ; que leur influence Ă©tait nulle pour Ă©viter cela, et que ni lâun ne pourrait contenir ses amis, ni lâautre contenir son propre rĂ©giment, qui sâĂ©tait dâores et dĂ©jĂ soulevĂ© et Ă©tait dĂ©cidĂ© Ă suivre ses officiers. - (Arzac) LĂłpez, p. 68. espagnol : Hemos mandado llamar a Moreno, pero nos ha contestado con Boizo que despuĂ©s de lo que ha pasado, no saldrĂĄ de su casa para nada. Peña y Castelli se han reĂdo, y cuentan con que ha de ayudarnos cuando vea que la cosa se harĂĄ a su gusto.
français : Nous avons mandĂ© Moreno, mais il nous a rĂ©pondu par Bozio qu'aprĂšs ce qui sâĂ©tait passĂ©, il ne sortirait plus de sa maison pour quoi que soit. Peña et Castelli en ont ri, et comptaient bien quâil nous aiderait dĂšs quâil aurait vu que la chose tournait selon ses vĆux. - (es) « 18 de Mayo â DĂa de la Escarapela Argentina », Mercedes (Corrientes), Mi Mercedes, (consultĂ© le )
- Luna, Independencia..., p. 37. espagnol : Se sabĂa que el Cabildo rechazarĂa la dimisiĂłn del virrey, y asĂ fue a primera hora.
français : Lâon savait que le Cabildo dĂ©clinerait la dĂ©mission du vice-roi, et câest ce qui se produisit aux premiĂšres heures. - (Arzac) LĂłpez, p. 67. espagnol : Dicen que no admiten la renuncia: que nosotros no somos pueblo, y que no tenemos derecho de influir en la menor innovaciĂłn de lo que estĂĄ resuelto y hecho; que teniendo la Junta el mando de las armas, estĂĄ estrechada a sujetar con ella a los descontentos, y a tomar contra nosotros providencias prontas y vigorosas; y que de lo contrario, el ayuntamiento hace responsables a los Miembros de la Junta de las consecuencias que puedan venir por cualquier variaciĂłn de lo ya resuelto. ÂżQuĂ© tal? Esto se llama ser mentecatos.
français : Ils disent quâils nâadmettent pas la dĂ©mission : que nous ne sommes pas le peuple, et que nous nâavons pas le droit dâapporter la moindre innovation Ă ce qui a Ă©tĂ© dĂ©cidĂ© et appliquĂ© ; que la Junte, dĂ©tenant le commandement des armes, est contrainte de soumettre Ă lâaide de celles-ci les mĂ©contents et de prendre Ă notre encontre des mesures promptes et vigoureuses ; et que, Ă dĂ©faut, le cabildo rendrait responsables les membres de la Junte des consĂ©quences qui rĂ©sulteraient de tout Ă©cart par rapport aux dĂ©cisions dĂ©jĂ prises. Quâen penser ? Cela sâappelle ĂȘtre des benĂȘts. - (Argerich) LĂłpez, p. 71. espagnol : En el momento se adelantaron Beruti, Chiclana, French y el doctor Grela. Pancho Planes iba tambiĂ©n a entrar, pero Leiva le puso la mano y le dijo: -No amigo mĂo, usted es muy loco para este negocio; con estos caballeros hay lo bastante pues son hombres de representaciĂłn, y lo mejor es que no haya tantos con quien hablar.
français : Ă ce moment, Beruti, Chiclana, French et le docteur Grela sâavancĂšrent. Pancho Planes allait entrer lui aussi, mais Leiva posa la main sur lui et lui dit : non, mon ami, tu es bien fou pour te mettre dans cette affaire ; câest bien assez avec ces messieurs-lĂ , car ce sont hommes de reprĂ©sentation, et câest mieux quâil nây en ait point tant avec qui parler. - (Argerich) LĂłpez, p. 71. espagnol : En esto, el doctor Planes se habĂa introducido furtivamente en la sala, y con todo atrevimiento, levantĂł la voz
français : LĂ -dessus, le docteur Planes sâĂ©tait faufilĂ© au-dedans de la salle, et en toute audace Ă©leva la voix. - (Argerich) LĂłpez, p. 71. espagnol : El Cabildo objetĂł que aquello era variar todo el orden de la monarquĂa sin consultar a los demĂĄs pueblos del virreinato; pero French y Chiclana contestaron que no, porque en esa misma representaciĂłn se decĂa que se convocarĂĄ un congreso nombrado por todos esos pueblos con libertad.
français : Le Cabildo objecta que cela reviendrait Ă changer tout lâordre de la monarchie sans consulter les autres peuples de la vice-royautĂ© ; mais French et Chiclana rĂ©pondirent que non, Ă©tant donnĂ© que dans cette reprĂ©sentation elle-mĂȘme, il avait Ă©tĂ© dit quâun congrĂšs, nommĂ© librement par tous les autres peuples, serait convoquĂ©. - (Beruti) LĂłpez, p. 76. espagnol : ...el pueblo ha reasumido la autoridad que habĂa trasmitido, y es su voluntad que la Junta de Gobierno se componga de los sujetos que Ă©l quiere nombrar...
français : ⊠le peuple a repris possession de lâautoritĂ© quâil avait dĂ©lĂ©guĂ©e, et câest sa volontĂ© que la Junte se compose des personnes quâil lui plaira de nommer... - Crow, p. 457
- Luna, Independencia..., p. 37. espagnol : ...los nombres rubricados de French y de Beruti, cada uno agregando "Por mĂ y por seiscientos mĂĄs".
- (Beruti) LĂłpez, p. 78. espagnol : El pueblo en cuyo nombre hablamos estĂĄ armado en los cuarteles y una gran parte del vecindario espera en otras partes la voz de alarma para venir aquĂ. Quieren ustedes verlo, toquen la campana, y si es que no tienen el badajo, nosotros tocaremos generala, y verĂĄn ustedes la cara de ese pueblo, cuya presencia echan de menos. ÂĄSĂ o no! pronto, señores: decidirlo ahora mismo porque no estamos dispuestos a sufrir demoras y engaños, pero si volvemos con las armas en la mano, no respondemos de nada.
français : Le peuple, au nom duquel nous parlons, se tient armĂ© dans les casernes et une grande partie des habitants de la ville attend dans dâautres lieux le cri dâalarme pour venir ici. Si vous voulez le voir, sonnez la cloche, et sâil se trouve que vous nâen avez pas le battant, câest nous qui sonnerons lâalerte gĂ©nĂ©rale, et vous verrez alors le visage de ce peuple, dont la prĂ©sence vous manque. Oui ou non ! vite, messieurs : dĂ©cidez-le sur-le-champ, car nous ne sommes pas disposĂ©s Ă supporter retards et tromperies, mais si nous revenons les armes Ă la main, nous ne rĂ©pondons de rien. - (Leiva et la Junte) LĂłpez, p. 79. espagnol : -La segunda que el Cabildo quede con la autoridad necesaria para vigilar la conducta de los miembros de la Junta./-ÂĄNo, señor, no queremos, negado!/-Pero, señores, el Cabildo no procederĂĄ en eso sino con justa causa./El pueblo gritaba ÂĄbueno! y ÂĄnegado!, sin que fuera posible averiguar si aceptaba o no./-La tercera que no se impongan nuevas contribuciones./-De acuerdo./-Y que la Junta llene las vacantes por elecciĂłn en su seno./-De acuerdo.
français : -La deuxiĂšme, que le Cabildo garde lâautoritĂ© nĂ©cessaire pour surveiller la conduite des membres de la Junte./-Non, monsieur, nous ne voulons pas, refusĂ© !/-Mais, messieurs, le Cabildo nây aura point recours, si ce nâest avec une juste cause./-Le peuple criait « bon ! » et « refusĂ© ! », sans quâil fĂ»t possible de vĂ©rifier sâil acceptait ou non./-La troisiĂšme, que ne soient pas levĂ©s de nouveaux impĂŽts./-Dâaccord./-Et que la Junte pourvoie aux postes vacants par un vote en son sein./-Dâaccord. - Archivo General de Indias. Sevilla. E. 122 C.C.L.26, 1810. Carta del Virrey de Buenos Aires donde cuenta a Su Majestad con varios documentos que acompaña, de los sucesos ocurridos en la Capital, en el mes de mayo de aquel año. Buenos Aires, 23 de junio de 1810.
- FĂ©lix Luna, La Independencia..., p. 47-48.
- SantillĂĄn, p. 417-433.
- (es) Félix Luna, Grandes protagonistas de la Historia Argentina - Mariano Moreno, Buenos Aires, Planeta, , 108 p. (ISBN 950-49-1248-6), « El Enemigo - La contrarevolución »
- SantillĂĄn, p. 424-426.
- SantillĂĄn, p. 516.
- Luna, "La independencia...", p. 108-116.
- Luna, "La independencia...", p. 77-86.
- Luna, "La independencia...", p. 116-126.
- Luna, Breve..., p. 65-66. espagnol : Desde luego fue un cambio lento, que se fue afirmando a través de medidas de gobierno y del pensamiento de algunos dirigentes, pero un cambio que apuntaba a la formación de una sociedad republicana y democråtica.
français : Bien sĂ»r, ce fut un changement lent, qui allait sâaffirmant au travers de mesures gouvernementales et de la pensĂ©e de quelques dirigeants, mais un changement qui allait en direction de la formation d'une sociĂ©tĂ© rĂ©publicaine et dĂ©mocratique. - Sarmiento, p. 79.
- Luna, Breve..., p. 66-67. espagnol : Su gran defecto, sin embargo, se vinculaba a la grandeza del territorio: el virreinato se componĂa de elementos muy heterogĂ©neos, cuyos climas, producciones, pueblos, mentalidades e intereses eran distintos entre sĂ, y en algunos casos contradictorios. Como el virreinato durĂł solamente treinta años, no hubo tiempo para que sus elementos fraguasen convirtiĂ©ndolo en una naciĂłn con conciencia de sĂ misma.
français : Cependant, son grand dĂ©faut Ă©tait liĂ© Ă la grandeur du territoire : la vice-royautĂ© se composait dâĂ©lĂ©ments trĂšs hĂ©tĂ©rogĂšnes, dont les climats, les productions, les peuples, les mentalitĂ©s et les intĂ©rĂȘts Ă©taient diffĂ©rents entre eux, voire, dans quelques cas, contradictoires. Comme la vice-royautĂ© ne dura que 30 ans, il nây eut pas de temps pour que ses Ă©lĂ©ments pussent fusionner en une nation dotĂ©e de conscience dâelle-mĂȘme. - Shumway, p. 3-4.
- DĂłmina, pp. 84 et 85.
- Harari hombrecitos asustados, par FabiĂĄn Harari (Grupo de InvestigaciĂłn de la RevoluciĂłn de Mayo, CEICS).
- Archer, p. 3-5
- Gelman, p. 32. espagnol : ...muchos buscan el objetivo de justificar acciones en las que cumplieron algĂșn rol o se inclinan partidariamente por algunos personajes o grupos de acuerdo con sus afinidades polĂticas.
français : ...beaucoup poursuivent lâobjectif de justifier les actions dans lesquelles ils avaient eu quelque rĂŽle Ă jouer, ou expriment avec partialitĂ© leur inclination pour tel ou tel personnage ou groupe, selon leurs affinitĂ©s politiques. - Gelman, p. 53-54. espagnol : Estas memorias fueron escritas con un fin claro: son un alegato para Europa a favor de la RevoluciĂłn, y personifican este proceso en la figura del secretario de la Primera Junta de Mayo
français : Ces mĂ©moires furent Ă©crites dans un but clair : elles sont un plaidoyer pour la RĂ©volution Ă lâintention de lâEurope, et personnifient ce processus dans la figure du secrĂ©taire de la PremiĂšre Junte de Mai. - Saavedra, p. 105-106. espagnol : He concluido esta breve memoria que dejo a mis hijos para que sepan la historia de su padre [...], si despuĂ©s de mi fallecimiento la calumnia, la detracciĂłn y la maledicencia volviesen a acometerlo [...] a ellos es que con especialidad incumbe estar en centinela ante mi sepulcro, para que la calumnia no llegue a perturbar el reposo de mis cenizas
français : Jâai conclu ces brĂšves mĂ©moires que je laisse Ă mes fils pour quâils sachent lâhistoire de leur pĂšre (...), si aprĂšs ma mort la calomnie, la dĂ©traction et la mĂ©disance lâattaquent Ă nouveau (...) câest Ă eux en particulier quâil incombe de se poster en sentinelle devant ma tombe, de sorte que la calomnie ne vienne pas perturber le repos de mes cendres. - Poli Gonzalvo, p. 19-20.
- Poli Gonzalvo, p. 22.
- Gelman, p. 191. espagnol : ...los temas que estudiaron estos intelectuales presentan una fuerte continuidad con los que ocuparon a sus predecesores...
français : ...les thĂšmes Ă©tudiĂ©s par ces intellectuels prĂ©sentent une forte continuĂŻtĂ© avec ceux qui avaient occupĂ© leurs prĂ©dĂ©cesseurs... - Gelman, p. 16. espagnol : La "NaciĂłn", la "RepĂșblica", se habĂan de constituir necesariamente hacia 1810. Aunque las fuerzas que llevaran a ese resultado podĂan variar, [...] no se discutĂa ese carĂĄcter necesario de la revoluciĂłn.
français : La Nation, la RĂ©publique, devaient ĂȘtre instaurĂ©es nĂ©cessairement vers 1810. Quoique les forces qui conduisirent Ă ce rĂ©sultat aient pu varier, (...) le caractĂšre nĂ©cessaire de la rĂ©volution ne se discutait pas. - Gelman, p. 17. espagnol : en casi todos los casos se acuerda en que se llegĂł a donde se tenĂa que llegar necesariamente.
français : Dans presque tous les cas, lâon sâaccordait Ă dire que lâon arriva lĂ oĂč il fallait que lâon arrivĂąt nĂ©cessairement. - Gelman, p. 191. espagnol : Desde diferentes miradas, varios de los autores de este perĂodo llevan a un primer plano la participaciĂłn de los sectores populares en la revoluciĂłn.
français : Selon des angles de vue diffĂ©rents, plusieurs auteurs de cette pĂ©riode mettent Ă lâavant - plan la participation des secteurs populaires Ă la rĂ©volution. - Gelman, p. 256. espagnol : ...la consolidaciĂłn en la dĂ©cada de 1930 de la "tradiciĂłn liberal" que luego serĂĄ llamada "historia oficial". Muestras de ello son la elevaciĂłn de Ricardo Levene por parte del estado al sitial de gran historiador nacional y el encargo que aquel hizo a la Junta de Historia y NumismĂĄtica, pronto convertida en Academia Nacional de la Historia, de elaborar una historia argentina "definitiva".
français : ...la consolidation dans la dĂ©cennie 1930 de la « tradition libĂ©rale », qui par la suite sera appelĂ©e « histoire officielle ». En sont la manifestation lâĂ©lĂ©vation par lâĂtat de Ricardo Levene au statut de grand historien national, et la mission que celui-ci confia au ComitĂ© dâhistoire et de numismatique, promptement convertie en AcadĂ©mie nationale dâhistoire, dâĂ©laborer une histoire argentine « dĂ©finitive ». - Gelman, p. 257. espagnol : ...matizando la idea de un enfrentamiento entre criollos y españoles en la revoluciĂłn...
français : ...nuançant lâidĂ©e dâun affrontement entre criollos et Espagnols lors de la rĂ©volution... - Gelman, p. 257. espagnol : El posicionamiento revisionista no centrĂł su atenciĂłn inicial en el perĂodo de la independencia, sino que, en los años 1930, se dedicĂł sobre todo a exaltar la figura de Juan Manuel de Rosas...
français : Ă ses dĂ©buts, la position rĂ©visionniste ne centrait pas son attention sur la pĂ©riode de lâindĂ©pendance, mais sâappliquait avant tout, dans les annĂ©es 1930, Ă exalter la figure de Juan Manuel de Rosas... - Galasso, p. 86-87. espagnol : Desde el principio no hay un solo "Mayo" con perfil indiscutido e inequĂvoco, sino muy diversos "Mayos" que pronto entrarĂĄn en colisiĂłn. El Mayo revolucionario de los "chisperos" y Moreno, [...] el Mayo timorato y conservador de Saavedra [...] y finalmente el Mayo librecambista, antiespañol y probritĂĄnico [...].
français : DĂšs le dĂ©but, il nây a pas un « Mai » unique, au profil indiscutĂ© et univoque, mais des « Mai » trĂšs divers, qui allaient tĂŽt entrer en collision. Le Mai rĂ©volutionnaire des « agitateurs » (chisperos) et de Moreno (...), le Mai timorĂ© et conservateur de Saavedra (...), et finalement le Mai libre-Ă©changiste, anti-espagnol et pro-britannique (...). - Galasso, p. 87. espagnol : ...acentuando la Ăłptica sobre uno de los sectores intervinientes, Mitre pudo fabricar su Mayo liberal, elitista, pro-inglĂ©s, realizado por la gente decente con paraguas, cuyo programa era La RepresentaciĂłn de los Hacendados y su objetivo incorporarse a Europa.
français : (âŠ) en focalisant sur une des factions intervenantes, Mitre rĂ©ussit Ă fabriquer son Mai libĂ©ral, Ă©litiste et pro-anglais, rĂ©alisĂ© par des gens comme-il-faut portant parapluie, dont le programme Ă©tait La RepresentaciĂłn de los Hacendados et lâobjectif de sâincorporer Ă lâEurope. - Galasso, p. 87. espagnol : ...el revisionismo nacionalista de derecha aceptĂł el Mayo rupturista de España pero lo signĂł con un perfil conservador al colocar a Saavedra como principal figura opuesta al presunto iluminismo exĂłtico de Moreno.
français : (...) le rĂ©visionnisme nationaliste de droite accepta le Mai de rupture avec lâEspagne, mais le marqua dâun profil conservateur en plaçant Saavedra comme principale figure opposĂ©e au prĂ©tendu illuminisme exotique de Moreno. - Galasso, p. 87. espagnol : ...nos quedamos con el Mayo de Moreno y los "chisperos", con la revoluciĂłn autĂ©ntica y profundamente democrĂĄtica, reivindicadora del esclavo y del indio, defensora por sobre todo de los derechos del pueblo...
français : (âŠ) demeure pour nous le Mai de Moreno et des agitateurs (chisperos), avec la rĂ©volution authentique et profondĂ©ment dĂ©mocratique, revendicative pour lâesclave et lâindien, dĂ©fenderesse par-dessus tout des droits du peuple... - (es) FĂ©lix Luna, Grandes protagonistas de la historia argentina : Mariano Moreno, Buenos Aires, Planeta, (ISBN 950-49-1248-6), « Consecuencias de la asonada », p. 25
français : Le jeune avocat (savoir : Mariano Moreno) reste fidĂšle Ă sa position, et sait que le secteur jeune et rĂ©publicain du parti patriotique le soutient. Il favorise la constitution dâune junte de gouvernement autonome qui, tout en revĂȘtant le masque de soumission Ă Ferdinand VII, respecte la volontĂ© populaire.« espagnol : El joven abogado sigue fiel a su posiciĂłn, y sabe que el sector juvenil y republicano del partido patriota lo apoya. Promueve la constituciĂłn de una Junta de gobierno autĂłnoma que, enarbolando la mĂĄscara de sumisiĂłn a Fernando VII, respete la voluntad popular. » - (es) Felipe Pigna, Los mitos de la historia argentina, Argentina, Grupo Editorial Norma, , 26e Ă©d., 423 p. (ISBN 978-987-545-149-0 et 987-545-149-5), « La RevoluciĂłn de Mayo », p. 243
français : Le dĂ©nommĂ© Masque de Ferdinand Ă©tait, contrairement Ă ce que beaucoup croient, un acte de claire indĂ©pendance. En ces jours-lĂ , personne ne pouvait raisonnablement prĂ©sumer que NapolĂ©on serait battu, ni que Ferdinand remonterait sur le trĂŽne et rĂ©cupĂ©rerait ses colonies amĂ©ricaines. DĂšs lors, promettre fidĂ©litĂ© Ă un roi fantĂŽme â et non Ă un Conseil de RĂ©gence existant â constituait toute une dĂ©claration de principes qui prĂ©parait la voie Ă une volontĂ© indĂ©pendantiste, qui ne pouvait pas ĂȘtre exprimĂ©e ouvertement Ă cause des pressions de la Grande-Bretagne.« espagnol : La llamada "MĂĄscara de Fernando" era, contrariamente a lo que muchos creen, un acto de clara independencia. Por aquellos dĂas nadie en su sano juicio podĂa suponer que NapoleĂłn serĂa derrotado ni que Fernando volverĂa al trono español y recuperarĂa sus colonias americanas. Por lo tanto, prometer fidelidad a un rey fantasmaây no a un Consejo de Regencia existenteâera toda una declaraciĂłn de principios que abrĂa el camino hacia una voluntad independentista que no podĂa explicitarse por las presiones de Gran Bretaña. » - Tulio HalperĂn Donghi, Historia contemporĂĄnea de AmĂ©rica Latina, Buenos Aires, Alianza, , 6e Ă©d. (ISBN 950-40-0019-3), p. 96
français : JusquâĂ quel point cette image que la rĂ©volution prĂ©sentait dâelle-mĂȘme Ă©tait-elle sincĂšre ? Exiger ici une rĂ©ponse claire signifie peut-ĂȘtre ne pas se replacer dans la perspective de 1810. Sans aucun doute, il y avait des raisons pour qu'une pensĂ©e indĂ©pendantiste mĂ»rie prĂ©fĂ©rĂąt sâocculter elle-mĂȘme plutĂŽt que de sâexhiber : outre la vigueur de la tradition de loyautĂ© Ă la monarchie chez les masses populaires (...) pesait Ă©galement la situation internationale, qui obligeait Ă tenir compte de la bienveillance britannique.« espagnol : ÂżHasta quĂ© punto era sincera esta imagen que la revoluciĂłn presentaba de sĂ misma? Exigir una respuesta clara significa acaso no situarse en la perspectiva de 1810. Sin duda habĂa razones para que un ideario independentista maduro prefiriese ocultarse a exibirse: junto al vigor de la tradiciĂłn de lealismo monĂĄrquico entre las masas populares (...) pesaba la coyuntura internacional que obligaba a contar con la benevolencia inglesa. » - Kaufmann, p. 49
- Kaufmann, p. 59.
- (es) Norberto Galasso, « El pueblo quiere saber de qué se trató », (consulté le )
- Cf. entretien avec l'historien Norberto Galasso par Juan Manuel Fonrouge, intitulĂ© El deber de reescribir la historia, , dans l'Ă©mission 2010 : espagnol : Hoy, inclusive los profesores de la lĂnea de HalperĂn Donghi -como L.A. Romero y JosĂ© Carlos Chiaramonte- admiten que no comparten la versiĂłn de la historia mitrista sobre Mayo.
français : Aujourdâhui, mĂȘme les professeurs de la ligne HalperĂn Donghi â comme L.A. Romero et JosĂ© Carlos Chiaramonte â admettent quâils ne partagent pas la version mitriste (des Ă©vĂ©nements) de Mai. - Juan Bautista Alberdi, Mitre al desnudo, Buenos Aires, CoyoacĂĄn, 1961, p. 28.
- Galasso, p. 23. espagnol : La opresiĂłn no era de un paĂs extranjero sobre un grupo racial y culturalmente distinto (cuestiĂłn nacional) sino de un sector social sobre otro dentro de una misma comunidad hispanoamericana.
français : Ce nâĂ©tait pas lâoppression dâun pays Ă©tranger contre un groupe racialement et culturellement distinct (une question nationale), mais dâun secteur social contre un autre Ă lâintĂ©rieur de la mĂȘme communautĂ© hispano-amĂ©ricaine. - Galasso, p. 10-11. espagnol : Pero resulta que este dirigente [Larea] de una revoluciĂłn antiespañola es... ÂĄespañol! Y a su lado estĂĄ Domingo Matheu... ÂĄtambiĂ©n español! Y mĂĄs allĂĄ, Manuel Belgrano y Miguel de AzcuĂ©naga que han nutrido gran parte de su juventud y sus conocimientos en España.
français : Mais il se trouve que ce dirigeant [Larrea] dâune rĂ©volution anti-espagnole est... un Espagnol ! Et Domingo Matheu se tient Ă ses cĂŽtĂ©s... Espagnol lui aussi ! Et ensuite, Manuel Belgrano et Miguel de AzcuĂ©naga, qui ont passĂ© une grande partie de leur jeunesse en Espagne et y ont acquis la plupart de leurs connaissances. - Galasso, p. 12. espagnol : Al regresar [San MartĂn] al RĂo de la Plata, de donde habĂa partido a los siete años, era un hombre de 34 años, con 27 de experiencias vitales españolas, desde el lenguaje, las costumbres, la primera novia, el bautismo de fuego y el riesgo de muerte en cada batalla [...]. El San MartĂn que regresĂł en 1812 debĂa ser un español hecho y derecho, y no venĂa al RĂo de la Plata precisamente a luchar contra la naciĂłn donde habĂa transcurrido la mayor parte de su vida.
français : Lorsquâil (San MartĂn) revint dans le RĂo de la Plata, quâil avait quittĂ© Ă lâĂąge de sept ans, il Ă©tait un homme de 34 ans, dont 27 annĂ©es dâexpĂ©riences de vie espagnoles, depuis le langage, les coutumes, la premiĂšre fiancĂ©e, jusquâau baptĂȘme du feu et le risque de mort dans chaque bataille (...). Le San MartĂn qui rentra en 1812 devait ĂȘtre un Espagnol Ă part entiĂšre, et nâĂ©tait pas venu dans le RĂo de la Plata pour combattre le pays prĂ©cisĂ©ment dans lequel il avait passĂ© la majeure partie de sa vie. - Galasso, p. 11. espagnol : Curioso antihispanismo Ă©ste [...] que enfrenta a los ejĂ©rcitos enemigos (que San MartĂn llama siempre "realistas", "chapetones" o "godos", y no "españoles") enarbolando bandera española...
français : Curieux antihispanisme que celui-lĂ (...) qui affronte les armĂ©es ennemies (que San MartĂn appelle toujours royalistes, balourds ou goths, mais jamais Espagnols) en arborant le drapeau espagnol... - Galasso, p. 18. espagnol : ...el pueblo encuentra al prĂncipe Fernando que se ha manifestado en contra de sus propios padres, y lo idealiza convirtiĂ©ndolo en jefe de la gran regeneraciĂłn española.
français : ...le peuple dĂ©couvre le prince Ferdinand, qui sâest manifestĂ© contre ses propres parents, et lâidĂ©alise, en le convertissant en chef du grand relĂšvement espagnol. - Galasso, p. 17. espagnol : La lucha por la democracia, el gobierno del pueblo y los cambios econĂłmicos y sociales nace de la postraciĂłn del pueblo español y de la presiĂłn que ejercen, paradĂłjicamente, las ideas que los revolucionarios franceses han expandido por Europa a partir de 1789.
français : La lutte pour la dĂ©mocratie, le gouvernement du peuple et les changements Ă©conomiques et sociaux naĂźt de la prostration du peuple espagnol et de la pression quâexercent, paradoxalement, les idĂ©es que les rĂ©volutionnaires français ont propagĂ©es Ă travers lâEurope depuis 1789. - Norberto Galasso et Felipe Pigna, interview par Juan Manuel Fonrouge, El deber de reescribir la historia, 2010, Buenos Aires,
« DĂšs lors que la rĂ©volution dĂ©mocratique espagnole est dĂ©faite en 1814 et que revient lâabsolutisme, repoussant la constitution dĂ©mocratique de 1812, la rupture devient nĂ©cessaire. Si lâon veut Ă©viter de retomber sous lâabsolutisme, lâindĂ©pendance devient urgente, attendu que lâEspagne se propose dâenvoyer deux flottes de guerre pour reconquĂ©rir « ses » colonies. »
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français : Au mieux, le systĂšme stimule des dĂ©bats aussi importants que lâexistence ou inexistence de parapluies en ces journĂ©es de 1810, ou de pointues controverses mĂ©tĂ©orologiques basĂ©es sur la contradiction entre la chanson El sol del 25 viene asomando (le Soleil du 25 commence Ă poindre) et les dessins de Billiken, de Simulcop et du Manuel de lâĂ©lĂšve, qui montrent une place indubitablement pluvieuse. Câest Ă cela que lâon entend rĂ©duire, consciemment ou inconsciemment, le processus qui allait marquer au feu notre futur en tant que nation.« espagnol : A lo sumo, el sistema fomenta debates tan trascendentes como la existencia o inexistencia de paraguas en aquellos dĂas de 1810, o sesudos contrapuntos meteorolĂłgicos basados en la contradicciĂłn marcada por la canciĂłn "El sol del 25 viene asomando" y las ilustraciones del Billiken, el Simulcop y el Manual del Alumno, que muestran una plaza indudablemente lluviosa. A esto se pretende reducir, conciente o inconcientemente, el proceso que marcarĂa a fuego nuestro futuro como NaciĂłn. » - Daniel Balmaceda, Historias de corceles y de acero, Buenos Aires, Sudamericana, , 121â124 p. (ISBN 978-950-07-3180-5)
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