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RĂ©volution de Mai

La rĂ©volution de Mai (en espagnol RevoluciĂłn de Mayo) est une sĂ©rie d'Ă©vĂ©nements s’échelonnant sur une semaine, qui eurent lieu du 18 au Ă  Buenos Aires. Cette ville Ă©tait alors la capitale de la vice-royautĂ© du RĂ­o de la Plata, colonie faisant partie de l’Empire espagnol et comprenant le territoire des actuels États d’Argentine, de Bolivie, du Paraguay et de l’Uruguay. Lesdits Ă©vĂ©nements, qui sont commĂ©morĂ©s en Argentine sous le nom de Semaine de Mai (en esp. Semana de Mayo), conduisirent Ă  l’éviction du dernier vice-roi Baltasar Hidalgo de Cisneros et Ă  l’établissement, le , d’un gouvernement local, appelĂ© PremiĂšre Junte (esp. Primera Junta).

RĂ©volution de Mai
Description de cette image, également commentée ci-aprÚs
La RevoluciĂłn de Mayo par Francisco Fortuny.
Date –
Lieu Buenos Aires (vice-royauté du Río de la Plata)
Résultat Fin de la vice-royauté du Río de la Plata et de la domination espagnole ;
Création des Provinces-Unies du Río de la Plata et instauration de la PremiÚre Junte
Chronologie
Cabildo ouvert dans le cabildo de Buenos Aires
Formation d’un gouvernement autonome, la PremiĂšre Junte ; dĂ©signation de Cornelio Saavedra comme son prĂ©sident
Destitution du vice-roi Baltasar Hidalgo de Cisneros

La rĂ©volution de Mai Ă©tait une consĂ©quence directe de la guerre d’indĂ©pendance espagnole, qui s’était dĂ©roulĂ©e au cours des deux annĂ©es prĂ©cĂ©dentes. En 1808, le roi d’Espagne, Ferdinand VII, abdiqua en faveur de NapolĂ©on Bonaparte, qui fit don du trĂŽne Ă  son frĂšre Joseph. Une Junte suprĂȘme centrale mena la rĂ©sistance contre le gouvernement de Joseph et l’occupation française de l’Espagne, mais finit, aprĂšs avoir subi une sĂ©rie de revers, par perdre la moitiĂ© nord du pays. Le , les troupes françaises s’emparĂšrent de SĂ©ville et Ă©tendirent leur domination sur une majeure partie de l’Andalousie. La Junte suprĂȘme dut se replier sur Cadix et se dissoudre pour faire place au Conseil de RĂ©gence d'Espagne et des Indes. Par des journaux, en provenance d’Espagne et du reste de l’Europe, apportĂ©s par des navires britanniques, la nouvelle de ces Ă©vĂ©nements parvint finalement Ă  Buenos Aires le 18 mai.

Afin de prĂ©server le statu quo politique, le vice-roi Cisneros tenta d’occulter cette nouvelle, mais un groupe d’avocats criollos et de hauts militaires rĂ©ussit Ă  obtenir que fĂ»t organisĂ© le 22 mai un cabildo ouvert (esp. cabildo abierto), rĂ©union extraordinaire des notables de la ville, en vue de dĂ©cider de l’avenir de la vice-royautĂ©. Les participants Ă  cette rĂ©union se refusĂšrent Ă  reconnaĂźtre le Conseil de RĂ©gence espagnol et rĂ©solurent de constituer une junte destinĂ©e Ă  gouverner Ă  la place de Cisneros, attendu que le gouvernement qui l’avait nommĂ© vice-roi avait cessĂ© d’exister. Dans une tentative de perpĂ©tuer l'ordre social Ă©tabli, c’est d’abord Cisneros lui-mĂȘme qui fut dĂ©signĂ© prĂ©sident de la junte par le Cabildo ; cependant, Ă  la suite de la forte agitation que cette dĂ©signation provoqua parmi le peuple, Cisneros dĂ©missionna le . La PremiĂšre Junte nouvellement instituĂ©e invita d’autres villes de la vice-royautĂ© Ă  envoyer des dĂ©lĂ©guĂ©s afin que ceux-ci se joignissent Ă  la Junte de Buenos Aires ; cela eut cependant pour effet de dĂ©clencher une guerre entre les rĂ©gions acceptant l'aboutissement des Ă©vĂ©nements de Buenos Aires, et celles rĂ©cusant cet aboutissement.

La rĂ©volution de Mai est considĂ©rĂ©e comme le point de dĂ©part de la guerre d’indĂ©pendance de l’Argentine, quoique aucune dĂ©claration formelle d’indĂ©pendance n’eĂ»t Ă©tĂ© faite Ă  ce moment-lĂ , et que la PremiĂšre Junte continuĂąt de gouverner au nom du roi dĂ©posĂ© Ferdinand VII. En outre, compte tenu que des Ă©vĂ©nements semblables eurent lieu Ă©galement dans nombre d’autres villes de l’AmĂ©rique du Sud espagnole lorsqu’y fut parvenue la nouvelle de la dissolution de la Junte suprĂȘme centrale, la rĂ©volution de Mai est considĂ©rĂ©e comme un des points de dĂ©part de toutes les guerres d'indĂ©pendance en AmĂ©rique du Sud. Les historiens discutent aujourd’hui sur le propos de savoir si les rĂ©volutionnaires Ă©taient rĂ©ellement loyaux envers la couronne d’Espagne ou si la dĂ©claration de fidĂ©litĂ© au roi n’était qu’un subterfuge nĂ©cessaire destinĂ© Ă  dissimuler le vĂ©ritable objectif ― rĂ©aliser l’indĂ©pendance ― Ă  une population non encore prĂȘte Ă  accepter un changement aussi radical. Une dĂ©claration formelle d’indĂ©pendance de l’Argentine ne fut finalement prononcĂ©e que lors du congrĂšs de TucumĂĄn le .

Causes

Causes extérieures

Le couronnement de Joseph Bonaparte eut pour effet de mettre en doute la lĂ©gitimitĂ© de l’autoritĂ© vice-royale.

AprĂšs que les États-Unis eurent en 1776 proclamĂ© leur indĂ©pendance d’avec la Grande-Bretagne, les criollos Ă  leur tour Ă©taient portĂ©s Ă  penser qu'une rĂ©volution pour obtenir l’indĂ©pendance vis-Ă -vis de l’Espagne Ă©tait un objectif rĂ©alisable[1]. De 1775 Ă  1783 en effet, les Treize colonies dĂ©clenchĂšrent la RĂ©volution amĂ©ricaine, puis menĂšrent une guerre d’indĂ©pendance contre leur puissance de tutelle. De plus, le fait que l’Espagne fut venue en aide aux colonies nord-amĂ©ricaines dans leur lutte contre la Grande-Bretagne avait mis Ă  mal l’argument selon lequel mettre fin Ă  l’allĂ©geance Ă  la mĂ©tropole devait ĂȘtre considĂ©rĂ© comme un crime[2].

D’autre part, les idĂ©aux de la RĂ©volution française de 1789 s’étaient, par le processus dit de la RĂ©volution atlantique, propagĂ©s au-delĂ  de l’Atlantique. La RĂ©volution française mit un terme Ă  des siĂšcles de monarchie et aboutit au renversement, puis Ă  l’exĂ©cution du roi Louis XVI et de la reine Marie-Antoinette, et Ă  la suppression des privilĂšges de la noblesse. La mise en cause du concept de monarchie de droit divin, par l’effet conjuguĂ© des idĂ©es de la RĂ©volution française, en particulier la DĂ©claration des droits de l’homme et du citoyen, de certaine phrase de la dĂ©claration d’indĂ©pendance amĂ©ricaine, affirmant que tous les hommes ont Ă©tĂ© crĂ©Ă©s Ă©gaux, et mĂȘme de certaines prises de position de l’Église espagnole[3], permit l’instauration d’un rĂ©gime rĂ©publicain en France et aux États-Unis en lieu et place des monarchies, et aussi l’avĂšnement de monarchies constitutionnelles, comme en Grande-Bretagne[4].

La dĂ©claration d'indĂ©pendance des États-Unis suscita des mouvements similaires dans les colonies espagnoles d’AmĂ©rique du Sud.

Cependant, la diffusion de telles idĂ©es Ă©tait interdite dans les territoires espagnols, de mĂȘme que la mise en vente et la dĂ©tention non autorisĂ©e des livres qui les exposaient. Ces proscriptions furent Ă©dictĂ©es aprĂšs que l'Espagne eut dĂ©clarĂ© la guerre Ă  la France Ă  la suite de l’exĂ©cution de Louis XVI, et maintenues ensuite nonobstant le traitĂ© de paix de 1796. Tous les efforts pour les garder Ă  distance ne purent empĂȘcher les nouvelles des Ă©vĂ©nements de 1789 et les publications rĂ©volutionnaires de se rĂ©pandre en Espagne. De nombreux criollos de l’époque des LumiĂšres firent connaissance avec les ouvrages d’auteurs critiques lors de leurs Ă©tudes universitaires, que ce soit en Europe ou Ă  l’universitĂ© de Chuquisaca dans le Haut-PĂ©rou[5]. Des livres en provenance des États-Unis parvenaient dans les colonies espagnoles par Caracas, en raison de la proximitĂ© de cette ville avec les États-Unis et les Indes occidentales anglaises[6].

La rĂ©volution industrielle, engagĂ©e d’abord en Grande-Bretagne, rendue possible par l’utilisation des chemins de fer et de la machine Ă  vapeur, entraĂźna une augmentation spectaculaire des capacitĂ©s de production britanniques[7] et dĂ©termina le besoin de nouveaux marchĂ©s pour Ă©couler les produits. La tĂąche de trouver des dĂ©bouchĂ©s Ă©tait devenue particuliĂšrement difficile en raison des guerres napolĂ©oniennes, oĂč s’affrontaient la France et la Grande-Bretagne, et en particulier du blocus continental, imposĂ© par NapolĂ©on, qui interdisait Ă  la Grande-Bretagne d'avoir des Ă©changes commerciaux avec aucun pays europĂ©en. La Grande-Bretagne avait donc besoin de pouvoir commercer avec les colonies espagnoles[8], mais en Ă©tait empĂȘchĂ© par l'obligation qu’avaient ces colonies de ne commercer qu’avec leur mĂ©tropole[9]. Pour atteindre leurs objectifs Ă©conomiques, la Grande-Bretagne entreprit initialement d’envahir militairement le RĂ­o de la Plata aux fins de conquĂ©rir les villes-clef de l’AmĂ©rique espagnole. AprĂšs l’échec de cette tentative, les Britanniques choisirent de miser sur les volontĂ©s hispano-amĂ©ricaines d’émancipation vis-Ă -vis de l’Espagne[9].

Le soulĂšvement d'Aranjuez (1808) conduisit Ă  l’abdication du roi d’Espagne Charles IV en faveur de son fils Ferdinand VII[10]. Charles IV sollicita NapolĂ©on de le restaurer sur le trĂŽne, mais, au lieu de cela, NapolĂ©on couronna son propre frĂšre Joseph Bonaparte comme le nouveau roi d’Espagne[10], Ă©vĂ©nement connu sous le nom d’abdication de Bayonne. Le couronnement de Joseph, rencontrant une forte rĂ©sistance en Espagne, dĂ©clencha la guerre d’indĂ©pendance espagnole, tandis que la Junte de SĂ©ville prit le pouvoir au nom du roi absent. L’Espagne, qui jusque-lĂ  avait Ă©tĂ© une alliĂ©e sĂ»re de la France contre la Grande-Bretagne, fit Ă  prĂ©sent alliance avec la Grande-Bretagne contre la France. La Junte de SĂ©ville nĂ©anmoins fut finalement vaincue, et remplacĂ©e par un Conseil de RĂ©gence siĂ©geant Ă  Cadix[11].

Causes intérieures

Le couronnement de l’infante Charlotte Joachime fut envisagĂ© pendant un temps comme solution de rechange Ă  la rĂ©volution.

L’Espagne interdisait Ă  ses possessions amĂ©ricaines de commercer avec d’autres pays ou avec des colonies Ă©trangĂšres, et s’imposait elle-mĂȘme comme seul pays acheteur et fournisseur pour les Ă©changes internationaux. Cette situation Ă©tait prĂ©judiciable Ă  la Vice-royautĂ©, attendu que l’économie espagnole n’avait pas la capacitĂ© d’absorber toutes les marchandises provenant des colonies[12], et provoquait des pĂ©nuries Ă©conomiques et la rĂ©cession. Les voies commerciales espagnoles privilĂ©giaient les ports de Mexico et de Lima, au dĂ©triment de Buenos Aires ; cette politique de la mĂ©tropole s’explique par la prĂ©sence de la piraterie, qui obligeait Ă  faire accompagner d’une forte escorte militaire les navires de commerce, et par le fait que Buenos Aires en contrepartie ne dĂ©tenait pas de ressources en or ou argent, ni ne disposait de populations indigĂšnes Ă©tablies desquelles obtenir des matiĂšres premiĂšres ou susceptibles d’ĂȘtre soumises au systĂšme de l’encomienda, ce qui rendait les convois de navires Ă  destination de Buenos Aires beaucoup moins rentables que ceux Ă  destination de Mexico ou Lima[13]. Il en rĂ©sulta que la ville se fournissait par la contrebande en produits qu’on ne pouvait obtenir lĂ©galement. Cette activitĂ© contrebandiĂšre, laquelle Ă©tait, quoique illĂ©gale, tolĂ©rĂ©e comme un moindre mal par la plupart des autoritĂ©s locales, Ă©galait Ă  l’occasion en volume le commerce lĂ©gal avec l’Espagne[14]. Deux factions antagonistes se faisaient face : les hacendados, propriĂ©taires de haciendas (grands domaines agricoles), souhaitaient le libre-Ă©change afin de pouvoir vendre leurs productions outre-mer, alors que les marchands, qui, Ă  l’inverse, profitaient du prix Ă©levĂ© des produits importĂ©s en contrebande, s’opposaient au libre-Ă©change, de peur de voir les prix baisser[15].

La monarchie espagnole nommait ses propres candidats Ă  la plupart des fonctions politiques de la Vice-royautĂ©, gĂ©nĂ©ralement en donnant la prĂ©fĂ©rence Ă  des Espagnols d’Europe[16]. Dans la plupart des cas, les personnes ainsi dĂ©signĂ©es n’avaient qu’une faible connaissance des questions locales ou s’y montraient peu intĂ©ressĂ©es. Il en rĂ©sulta une rivalitĂ© croissante entre criollos, gens de souche europĂ©enne mais nĂ©s en AmĂ©rique, et pĂ©ninsulaires, Espagnols nĂ©s en Europe. La plupart des criollos estimaient que les pĂ©ninsulaires bĂ©nĂ©ficiaient d’avantages immĂ©ritĂ©s et d’un traitement prĂ©fĂ©rentiel en politique et dans la sociĂ©tĂ©. Le bas clergĂ© avait un sentiment semblable Ă  l’endroit des Ă©chelons supĂ©rieurs de la hiĂ©rarchie religieuse[17]. Les Ă©vĂ©nements, certes, se succĂ©daient Ă  un rythme plus lent que dans le mouvement indĂ©pendantiste aux États-Unis. Cela s’explique en partie par le fait que la totalitĂ© du systĂšme scolaire en AmĂ©rique espagnole Ă©tait encore aux mains du clergĂ© ; aussi la population tendait-elle Ă  avoir les mĂȘmes idĂ©es conservatrices et Ă  suivre les mĂȘmes coutumes que celles en vigueur en Espagne[18].

Buenos Aires et Montevideo rĂ©ussirent par deux fois Ă  rĂ©sister victorieusement Ă  une invasion britannique du RĂ­o de la Plata. En 1806, un petit corps d’armĂ©e britannique, commandĂ© par William Carr Beresford, s’empara de Buenos Aires pour une brĂšve pĂ©riode ; la ville fut libĂ©rĂ©e par l’armĂ©e montĂ©vidĂ©enne sous le commandement de Jacques de Liniers[19]. L’annĂ©e suivante, un corps d’armĂ©e plus important s’empara Ă  nouveau de Montevideo, mais fut submergĂ© par les forces de Buenos Aires et dut capituler et restituer Montevideo Ă  la vice-royautĂ©[19]. Aucun secours ne vint d’Espagne lors de ces deux invasions. Les prĂ©paratifs de dĂ©fense prĂ©cĂ©dant la deuxiĂšme invasion comportaient aussi la formation de milices criollos, nonobstant leur interdiction[20]. L’armĂ©e criollo la plus importante Ă©tait le premier rĂ©giment d’infanterie, ou rĂ©giment de Patriciens (esp. Regimiento de Patricios), commandĂ© par Cornelio Saavedra. Ces faits donnĂšrent aux criollos un pouvoir militaire et une influence politique qu’ils n’avaient pas auparavant ; en outre, la victoire ayant Ă©tĂ© obtenue sans aucune aide de l’Espagne, la confiance des criollos dans leurs capacitĂ©s d’indĂ©pendance en sortit grandie[21].

En 1808, la famille royale portugaise, ayant Ă©chappĂ© Ă  l’invasion du Portugal par Bonaparte, quitta l’Europe pour s’établir au BrĂ©sil. Charlotte Joachime, sƓur de Ferdinand VII, Ă©tait l’épouse d’un prince portugais. Comme elle avait pu ainsi se soustraire Ă  la capture de la famille royale espagnole, elle tenta de prendre la tĂȘte, en tant que rĂ©gente, des vice-royautĂ©s espagnoles. Ce projet politique, connu sous le nom de charlottisme, fut conçu dans le but d’empĂȘcher une invasion des AmĂ©riques par les Français. Une petite sociĂ©tĂ© secrĂšte, composĂ©e de politiciens criollos tels que Manuel Belgrano et Juan JosĂ© Castelli, et de militaires comme Antonio Beruti et HipĂłlito Vieytes, soutenait ce projet. Ils y voyaient la possibilitĂ© de crĂ©er un gouvernement local appelĂ© Ă  remplacer la tutelle europĂ©enne, c'est-Ă -dire de franchir un premier pas potentiel en direction d’une dĂ©claration d’indĂ©pendance[22]. S’opposaient au projet le vice-roi Liniers, la plupart des pĂ©ninsulaires, et des criollos comme Mariano Moreno, Juan JosĂ© Paso, et Cornelio Saavedra, qui soupçonnaient que ce projet cachĂąt des ambitions expansionnistes portugaises dans la rĂ©gion[23]. Charlotte Joachime elle-mĂȘme rejeta finalement le projet, car les porteurs de celui-ci se proposaient de la mettre Ă  la tĂȘte d’une monarchie constitutionnelle, alors qu'elle entendait rĂ©gner sous un rĂ©gime de monarchie absolue ; elle dĂ©nonça au vice-roi les motivations rĂ©volutionnaires contenues dans les lettres d’appui qui lui avaient Ă©tĂ© envoyĂ©es. Sans autre appui important, les prĂ©tentions de Charlotte s’évanouirent, mĂȘme si, aprĂšs la rĂ©volution encore, certains maintinrent l’idĂ©e de son couronnement comme stratĂ©gie dilatoire. Mais dĂ©jĂ , l’infante elle-mĂȘme dĂ©sapprouvait totalement le tour qu’avaient pris les Ă©vĂ©nements. Dans une lettre Ă  JosĂ© Manuel Goyeneche, elle Ă©crivit :

« Dans ces circonstances, je crois de mon devoir de te requĂ©rir et de te charger d’employer tous tes efforts Ă  aller dĂšs que possible Ă  Buenos Aires ; et finis-en une fois pour toutes avec ces perfides rĂ©volutionnaires, avec les mĂȘmes exĂ©cutions que tu as pratiquĂ©es dans la ville de La Paz. »

La Grande-Bretagne, solidement ancrĂ©e dans l’Empire portugais, s’opposait Ă©galement au projet : elle voulait empĂȘcher que l’Espagne n'Ă©clatĂąt en une multitude de royaumes, et jugeait Charlotte Joachime incapable de faire barrage aux sĂ©paratismes[24].

Prélude

En 1810, les opinions divergentes des diffĂ©rents secteurs de la sociĂ©tĂ© quant Ă  la voie Ă  suivre dans la vice-royautĂ© tendaient Ă  se rejoindre dans une attitude expectative. Une situation analogue s’était produite un siĂšcle auparavant, lors de la guerre de Succession d’Espagne opposant les Habsbourg et les Bourbons, lorsque, pendant quinze ans, les colonies espagnoles ne surent pas qui reconnaĂźtre comme leur lĂ©gitime souverain. À cette occasion, dĂšs que Philippe V se fut installĂ© sur le trĂŽne d’Espagne, les fonctionnaires des colonies le reconnurent, et tout reprit son cours normal. Il est probable qu’en 1810, beaucoup, en particulier parmi les Espagnols, croyaient qu’il suffirait de constituer une junte de gouvernement, puis attendre que la normalitĂ© revĂźnt en Espagne[25].

Le gouvernement de Liniers

Jacques de Liniers régna en tant que vice-roi de 1807 à 1809.

Buenos Aires une fois reconquise aprĂšs les invasions britanniques du RĂ­o de la Plata en 1806, la population ne pouvait accepter que Rafael de Sobremonte, Ă  qui elle reprochait de s’ĂȘtre enfui Ă  CĂłrdoba avec le trĂ©sor public alors que la bataille faisait encore rage, fĂ»t maintenu vice-roi. Il existait certes une loi, promulguĂ©e par Pedro de Cevallos, requĂ©rant que le trĂ©sor fĂ»t placĂ© en lieu sĂ»r en cas d’attaque Ă©trangĂšre, nĂ©anmoins Sobremonte Ă©tait perçu comme un poltron par la population[26]. La Real Audiencia de Buenos Aires ne lui permit pas de retourner Ă  Buenos Aires et nomma Santiago de Liniers, acclamĂ© comme un hĂ©ros populaire, vice-roi par intĂ©rim. C’était lĂ , fait sans prĂ©cĂ©dent, la premiĂšre fois qu’un vice-roi espagnol Ă©tait destituĂ© par un organe de gouvernement local, et non par le roi d’Espagne lui-mĂȘme[27]. Cette nomination fut nĂ©anmoins ratifiĂ©e ultĂ©rieurement par le roi Charles IV[28]. Liniers entreprit d’armer l’ensemble de la population de Buenos Aires, y compris les criollos et les esclaves, et sut refouler une deuxiĂšme tentative britannique d’invasion en 1807.

Le gouvernement de Liniers avait la faveur des criollos, mais non des pĂ©ninsulaires, tels que le nĂ©gociant MartĂ­n de Álzaga ou le gouverneur de Montevideo, Francisco Javier de ElĂ­o[29]. Ce dernier requit des autoritĂ©s espagnoles de dĂ©signer un nouveau vice-roi ; Ă  la suite de l’éclatement de la guerre d’indĂ©pendance espagnole, il mit sur pied Ă  Montevideo une junte chargĂ©e de passer au crible tous les ordres en provenance de Buenos Aires, et qui se rĂ©servait le droit d’ignorer ces ordres, sans toutefois nier ouvertement l’autoritĂ© du vice-roi ou dĂ©clarer Montevideo indĂ©pendant[30].

MartĂ­n de Álzaga lança une rĂ©bellion, dite Asonada de Álzaga, afin d’écarter Liniers. Le premier janvier 1809, un cabildo ouvert ― rĂ©union extraordinaire de citoyens tenue dans le cabildo (conseil municipal) local ― prĂ©sidĂ© par Álzaga, exigea la dĂ©mission de Liniers et nomma une junte au nom de Ferdinand VII ; la milice espagnole et un groupe de gens convoquĂ©s par le conseil s'Ă©taient rassemblĂ©s pour appuyer la rĂ©bellion. Certains criollos, en particulier Mariano Moreno, soutinrent la mutinerie, y voyant un moyen de rĂ©aliser l'indĂ©pendance, mais ils Ă©taient en petit nombre[31]. D’autres soupçonnaient Álzaga de vouloir Ă©carter le vice-roi afin de se soustraire Ă  son autoritĂ© politique, tout en se proposant de maintenir inchangĂ©es les disparitĂ©s sociales entre criollos et pĂ©ninsulaires[32]. L’émeute fut promptement brisĂ©e aprĂšs que les milices criollos menĂ©es par Cornelio Saavedra eurent cernĂ© la place et dispersĂ© les insurgĂ©s. La mutinerie ratĂ©e eut pour rĂ©sultat que les milices rebelles, c'est-Ă -dire toutes les milices pĂ©ninsulaires, furent dĂ©sarmĂ©es, et que le pouvoir des criollos fut corrĂ©lativement augmentĂ©. La rivalitĂ© entre criollos et pĂ©ninsulaires s’exacerba. Les meneurs du complot, Ă  l’exception de Moreno, furent envoyĂ©s en exil Ă  Carmen de Patagones. Javier de ElĂ­o les en libĂ©ra et leur accorda l’asile politique Ă  Montevideo[33].

Le gouvernement de Cisneros

Baltasar Hidalgo de Cisneros, dernier vice-roi ayant gouverné à Buenos Aires.

La Junte de SĂ©ville remplaça Liniers par l’officier de marine Baltasar Hidalgo de Cisneros, ancien combattant de la bataille de Trafalgar, pour mettre fin Ă  l’agitation politique dans le RĂ­o de la Plata. Il arriva Ă  Montevideo en pour la passation de pouvoir. Manuel Belgrano proposa que Liniers rĂ©sistĂąt, au motif qu’il avait Ă©tĂ© confirmĂ© dans le rĂŽle de vice-roi par l’autoritĂ© du roi d’Espagne, alors qu’une telle lĂ©gitimitĂ© faisait dĂ©faut Ă  Cisneros[34]. Quoique les milices criollos fussent disposĂ©es Ă  soutenir Liniers contre Cisneros[35], Liniers remit sans rĂ©sistance le pouvoir entre les mains de Cisneros. Javier de ElĂ­o accepta l’autoritĂ© du nouveau vice-roi et dĂ©cida de dissoudre la Junte de Montevideo. Cisneros rĂ©arma les milices pĂ©ninsulaires dĂ©mantelĂ©es, et gracia les partis responsables de la mutinerie[36]. Álzaga en revanche ne fut pas libĂ©rĂ©, mais sa sentence commuĂ©e en assignation Ă  rĂ©sidence[37].

Dans le Haut-PĂ©rou, les Ă©vĂ©nements d’Espagne faisaient Ă©galement l'objet de prĂ©occupations et la lĂ©gitimitĂ© des autoritĂ©s locales y Ă©tait aussi mise en cause. Le , Ă  la suite d'une rĂ©volution Ă  Chuquisaca, le gouverneur RamĂłn GarcĂ­a de LeĂłn y Pizarro (es) fut dĂ©posĂ© et remplacĂ© par Juan Antonio Álvarez de Arenales[38]. Le 16 juillet, dans la ville de La Paz, un deuxiĂšme mouvement rĂ©volutionnaire, dirigĂ© par le colonel Pedro Domingo Murillo, dĂ©mit le gouverneur et Ă©lut une junte, la dĂ©nommĂ©e Junta Tuitiva de los Derechos del Pueblo (litt. Junte Gardienne des Droits du Peuple)[39]. Une rĂ©action vive des autoritĂ©s espagnoles permit de dĂ©faire ces rĂ©bellions. Une armĂ©e de 1 000 hommes envoyĂ©e de Buenos Aires ne rencontra aucune rĂ©sistance Ă  Chuquisaca, s’empara de la ville, et destitua la Junte[40]. Murillo tenta de dĂ©fendre La Paz, mais ses 800 hommes Ă©taient complĂštement surpassĂ©s en nombre par les plus de 5 000 hommes envoyĂ©s de Lima[41]. Il fut dĂ©capitĂ© par la suite, en mĂȘme temps que d’autres meneurs, et leurs tĂȘtes furent exhibĂ©es en guise de dissuasion[42]. Ces mesures contrastaient fortement avec la grĂące dont avaient bĂ©nĂ©ficiĂ© MartĂ­n de Álzaga et d’autres aprĂšs une brĂšve pĂ©riode d’emprisonnement, ce qui eut pour effet d’exacerber encore le ressentiment des criollos envers les pĂ©ninsulaires[43].

Juan JosĂ© Castelli assistait aux dĂ©libĂ©rations Ă  l’universitĂ© Saint-François-Xavier, au moment oĂč Bernardo de Monteagudo conçut le Syllogisme de Chuquisaca, qui servit de justification lĂ©gale Ă  l’autonomie, et qu’il formula ainsi : « Doit-on suivre le destin de l’Espagne ou rĂ©sister en AmĂ©rique ? Les Indes sont une possession personnelle du roi d’Espagne ; le roi est empĂȘchĂ© de rĂ©gner ; en consĂ©quence, les Indes doivent se gouverner elles-mĂȘmes. » Ce raisonnement dĂ©termina l’attitude adoptĂ©e par Castelli lors de la Semaine de Mai[44].

Le , Cisneros institua la Cour de Surveillance politique (Juzgado de Vigilancia PolĂ­tica), chargĂ©e de poursuivre les francisĂ©s (afrancesados) et les indĂ©pendantistes[45]. Cependant, il rejeta la proposition de l’économe JosĂ© MarĂ­a Romero de bannir un certain nombre de personnes considĂ©rĂ©es dangereuses pour le rĂ©gime espagnol, comme Saavedra, Paso, Chiclana, Vieytes, Balcarce, Castelli, Larrea, Guido, Viamonte, Moreno et SĂĄenz[46]. Il mit en garde de ne pas propager de nouvelles pouvant ĂȘtre considĂ©rĂ©es comme subversives.

Les criollos Ă©taient conscients que n’importe quel prĂ©texte pouvait suffire Ă  provoquer l’éclatement d’une rĂ©volution. En avril 1810, Cornelio Saavedra prononça sa cĂ©lĂšbre phrase devant ses amis : « Ce n’est pas l’heure encore, laissez le temps aux figues de mĂ»rir, et alors nous les mangerons »[47], signifiant par lĂ  qu’il n’appuierait aucune action irrĂ©flĂ©chie contre le vice-roi, mais qu’il attendait quelque moment stratĂ©giquement favorable, tel qu’un avantage dĂ©cisif remportĂ© par les forces napolĂ©oniennes dans leur guerre contre l'Espagne[48].

DĂ©roulement de la Semaine de Mai

Claude Victor-Perrin, commandant des troupes françaises qui prirent Séville lors de la guerre d'indépendance espagnole.

Les historiens dĂ©finissent la Semaine de Mai comme l’intervalle de temps situĂ© entre la confirmation de la chute de la Junte de SĂ©ville le , et la destitution de Cisneros et l’instauration de la PremiĂšre Junte le [49].

Le , la goĂ©lette de guerre britannique HMS Mistletoe, en provenance de Gibraltar, aborda Ă  Buenos Aires, porteuse de journaux europĂ©ens rapportant la dissolution de la Junte de SĂ©ville au mois de janvier prĂ©cĂ©dent. La ville de SĂ©ville avait Ă©tĂ© envahie par les troupes françaises, qui occupaient dĂ©jĂ  une majeure partie de la pĂ©ninsule IbĂ©rique. AprĂšs que le roi Ferdinand VII eut Ă©tĂ© dĂ©posĂ© par les abdications dites de Bayonne, la Junte Ă©tait l’un des derniers bastions du pouvoir de la couronne espagnole. Le 17, des nouvelles concordantes venues de Montevideo, apportĂ©es le 13 par la frĂ©gate britannique HMS John Paris, parvinrent Ă  Buenos Aires ; s’y ajoutait l’information que quelques-uns des anciens membres de la Junte s’étaient rĂ©fugiĂ©s sur l’üle de LeĂłn Ă  Cadix, pour y Ă©tablir une Junte. Un Conseil de rĂ©gence d’Espagne et des Indes fut constituĂ©, mais aucun des deux vaisseaux ne transmit cette nouvelle. Au contraire de la Junte de SĂ©ville, perçue comme rĂ©ceptive aux idĂ©es nouvelles, le Conseil de RĂ©gence de Cadix ne fut pas considĂ©rĂ© comme le prolongement de la rĂ©sistance espagnole, mais comme une tentative de restaurer l’absolutisme en Espagne. Les patriotes sud-amĂ©ricains craignaient autant une restauration absolutiste qu’une victoire française complĂšte dans la pĂ©ninsule IbĂ©rique[50]. Cisneros tenta d’occulter les nouvelles en contrĂŽlant les vaisseaux britanniques et en faisant saisir tout journal qui arrivait, mais un exemplaire parvint nĂ©anmoins entre les mains de Manuel Belgrano et de son cousin Juan JosĂ© Castelli[51]. Ils rĂ©pandirent la nouvelle chez les autres patriotes et mirent en cause la lĂ©gitimitĂ© du vice-roi, celui-ci ayant Ă©tĂ© nommĂ© par la Junte dĂ©chue[51].

La nouvelle parvint Ă©galement aux oreilles de Cornelio Saavedra, commandant du rĂ©giment de Patriciens. Saavedra, qui, Ă  des occasions antĂ©rieures, avait dĂ©conseillĂ© de prendre des mesures Ă  l’encontre du vice-roi, et considĂ©rait que du point de vue stratĂ©gique, le moment idĂ©al pour mettre en Ɠuvre le projet rĂ©volutionnaire serait l'instant oĂč les forces napolĂ©oniennes auraient obtenu un avantage dĂ©cisif dans leur guerre contre l’Espagne, conclut Ă  prĂ©sent que l’heure idĂ©ale Ă©tait venue de tenter des actions contre Cisneros[52]. MartĂ­n RodrĂ­guez proposa de renverser le vice-roi par la force, mais Castelli et Saavedra rejetĂšrent cette idĂ©e et proposĂšrent la tenue d’un cabildo ouvert[53].

Vendredi 18 mai et samedi 19 mai

Quelque effort qu’eĂ»t fait le vice-roi Cisneros pour occulter la nouvelle de la dĂ©faite espagnole, la rumeur s’était propagĂ©e Ă  travers tout Buenos Aires. La population Ă©tait inquiĂšte, une grande activitĂ© rĂ©gnait dans les casernes et sur la Plaza, et la plupart des magasins avaient fermĂ© leurs portes[54]. Le CafĂ© des Catalans (CafĂ© de los Catalanes) et la Fonda de Naciones, lieux de rĂ©union habituels des criollos, devinrent des enceintes de discussions politiques et les lieux de proclamations radicales ; Francisco JosĂ© Planes y clama que Cisneros devait ĂȘtre pendu sur la Plaza Mayor en reprĂ©sailles de l’exĂ©cution des chefs de l’infortunĂ©e rĂ©volution de La Paz[55]. Ceux qui avaient sympathisĂ© avec le gouvernement absolutiste furent houspillĂ©s, mais les bagarres furent de peu de consĂ©quence, car nul n'Ă©tait autorisĂ© Ă  se saisir des fusils ou des sabres dans les casernes[56].

Le vice-roi, Ă  l’effet d'apaiser les criollos, donna sa propre version des Ă©vĂ©nements par la voie d’une proclamation. Bien que connaissant la nouvelle[57], il se borna Ă  relever que la situation dans la pĂ©ninsule IbĂ©rique Ă©tait dĂ©licate, sans confirmer la chute de la Junte. RequĂ©rant de faire allĂ©geance au roi Ferdinand VII, il proposa de crĂ©er un corps de gouvernement qui dirigerait au nom de Ferdinand VII, conjointement avec le vice-roi du PĂ©rou JosĂ© Fernando de Abascal y Sousa, le gouverneur de PotosĂ­ Francisco de Paula Sanz et le prĂ©sident de l’Audiencia royale de Charcas Vicente Nieto[58]. La proclamation comportait le passage suivant : « En AmĂ©rique espagnole, le trĂŽne des Rois catholiques se maintiendra, eĂ»t-il succombĂ© dans la pĂ©ninsule. (...) L’autoritĂ© supĂ©rieure ne prendra une quelconque dĂ©cision qui n'ait Ă©tĂ© prĂ©alablement convenue conjointement avec toutes les reprĂ©sentations de la capitale, auxquelles se seront jointes postĂ©rieurement celles des provinces de son ressort, pendant qu’entre-temps s'Ă©tablisse, en accord avec les autres vice-royautĂ©s, une reprĂ©sentation de la souverainetĂ© du seigneur Ferdinand VII[59] ».

Sur ces entrefaites cependant, l’agitation populaire ne cessait de croĂźtre. Ne se laissant pas berner par le communiquĂ© du vice-roi, quelques criollos tenaient au domicile de NicolĂĄs RodrĂ­guez Peña et d’HipĂłlito Vieytes des rĂ©unions secrĂštes, oĂč ils dĂ©signĂšrent une commission reprĂ©sentative, composĂ©e de Juan JosĂ© Castelli et de MartĂ­n RodrĂ­guez, Ă  l’effet de requĂ©rir que Cisneros convĂźnt d’un cabildo ouvert pour dĂ©cider de l’avenir de la vice-royautĂ©.

Dans la nuit du 19 mai, les discussions se poursuivaient au domicile de RodrĂ­guez Peña. Saavedra, appelĂ© par Viamonte, rejoignit la rĂ©union. Il y avait des chefs militaires, tels que RodrĂ­guez, Ocampo, Balcarce et DĂ­az VĂ©lez ; et des chefs civils, comme Castelli, Vieytes, Alberti et Paso. Ils convinrent que Belgrano et Saavedra se mettraient en rapport avec l’alcade Juan JosĂ© de Lezica, et Castelli avec le procureur JuliĂĄn de Leiva, pour solliciter leur appui. Ils rĂ©clameraient que le vice-roi permĂźt la tenue d’un cabildo ouvert, Ă  dĂ©faut de quoi, ajoutĂšrent-ils, le peuple et les troupes criollos marcheraient sur la Plaza Mayor, pour forcer par tous les moyens utiles le vice-roi Ă  dĂ©missionner, et le remplacer ensuite par un gouvernement de patriotes[60]. Saavedra fit Ă  Lezica la remarque que lui-mĂȘme (Saavedra) Ă©tait soupçonnĂ© d’ĂȘtre un traĂźtre potentiel pour avoir prĂŽnĂ© Ă  plusieurs reprises de procĂ©der par dĂ©marches prudentes et mesurĂ©es ― remarque destinĂ©e en rĂ©alitĂ© Ă  presser Lezica Ă  mettre en branle le systĂšme lĂ©gal pour permettre au peuple de s’exprimer, sous peine de risquer une rĂ©bellion de grande ampleur[61]. Lezica demanda de la patience et du temps pour convaincre le vice-roi, et pria de rĂ©server en ultime recours la tenue d’une manifestation massive, argumentant que si le vice-roi Ă©tait dĂ©posĂ© de cette maniĂšre, cela Ă©quivaudrait Ă  une rĂ©bellion, et transformerait les rĂ©volutionnaires en criminels[62]. Manuel Belgrano fixa le lundi prochain comme dernier dĂ©lai pour agrĂ©er le cabildo ouvert ; ensuite il passerait Ă  l’action directe[63]. UltĂ©rieurement, au cours de la RĂ©volution, Leiva devait intervenir comme mĂ©diateur, agissant Ă  la fois comme confident de Cisneros et comme nĂ©gociateur de confiance pour les rĂ©volutionnaires plus modĂ©rĂ©s[64].

Dimanche 20 mai

Juan José Castelli sollicitant un cabildo ouvert auprÚs de Baltasar Hidalgo de Cisneros.

Lezica ayant fait part Ă  Cisneros de la requĂȘte, le vice-roi consulta JuliĂĄn de Leyva, qui se dĂ©clara favorable Ă  la tenue d’un cabildo ouvert. Avant de prendre sa dĂ©cision, le vice-roi ordonna aux chefs militaires de se rendre au fort Ă  sept heures du soir. Des rumeurs se rĂ©pandirent selon lesquelles il s’agissait d’un guet-apens destinĂ© Ă  les capturer et Ă  se rendre maĂźtre des casernes. Pour prĂ©venir ce risque, les chefs militaires prirent d’abord le commandement des grenadiers qui gardaient le fort et s’assurĂšrent les clefs de tous les accĂšs de celui-ci pendant l’audience chez le vice-roi[65]. AprĂšs que Cisneros leur eut, selon ce qu’il rapporta lui-mĂȘme dans ses MĂ©moires, rappelĂ© les serments de fidĂ©litĂ© rĂ©pĂ©tĂ©s par lesquels ils s’étaient engagĂ©s Ă  dĂ©fendre l’autoritĂ© et Ă  maintenir l’ordre public, qu’il les eut exhortĂ©s de mettre en pratique leur fidĂ©litĂ© Ă  Sa MajestĂ© et Ă  la patrie, et qu’il eut Ă  cet effet rĂ©clamĂ© des renforts militaires, le colonel Cornelio Saavedra, chef du rĂ©giment de Patriciens, rĂ©pliqua, au nom de tous les rĂ©giments crĂ©oles, en comparant la situation internationale actuelle avec celle prĂ©valant au moment de la mutinerie d’Álzaga, un an auparavant, et en soulignant que l'Espagne Ă©tait Ă  prĂ©sent presque totalement sous la domination napolĂ©onienne ; il remarqua que les provinces espagnoles non encore vaincues Ă©taient trĂšs exiguĂ«s en comparaison des AmĂ©riques et rejeta les prĂ©tentions de souverainetĂ© de celles-lĂ  sur celles-ci. Il conclut que les armĂ©es locales ne souhaitaient pas suivre le destin de l’Espagne, mais au contraire suivre leur propre voie. Enfin, il fit observer que la Junte de SĂ©ville, qui avait nommĂ© vice-roi Cisneros, avait cessĂ© d’exister, en raison de quoi il dĂ©niait Ă  Cisneros toute lĂ©gitimitĂ© comme vice-roi, et refusait de lui apporter la protection des troupes sous son commandement[66].

À minuit, au domicile de RodrĂ­guez Peña, eut lieu une rĂ©union oĂč les dirigeants discutaient des Ă©vĂ©nements de la journĂ©e Ă©coulĂ©e. Castelli et MartĂ­n RodrĂ­guez furent dĂ©pĂȘchĂ©s vers le fort pour une entrevue avec Cisneros. Terrada, commandant des grenadiers d’infanterie, dont la caserne se trouvait sous les fenĂȘtres de Cisneros, les rejoignit, sa prĂ©sence Ă©tant propre Ă  empĂȘcher le vice-roi de faire appel Ă  une aide militaire pour faire prisonniers ses visiteurs[67]. Les gardes les ayant laissĂ© passer sans les annoncer, ils trouvĂšrent Cisneros occupĂ© Ă  jouer aux cartes avec le brigadier Quintana, le procureur Caspe et l'aide de camp Coicolea. Castelli et RodrĂ­guez rĂ©itĂ©rĂšrent leur requĂȘte d’un cabildo ouvert, ce Ă  quoi Cisneros rĂ©agit avec colĂšre, estimant leur requĂȘte outrageante. RodrĂ­guez, l'interrompant, lui enjoignit de donner une rĂ©ponse dĂ©finitive[68]. À l’issue de brefs conciliabules avec Caspe, Cisneros finit, de mauvaise grĂące, par donner son consentement[69]. Le cabildo ouvert aurait lieu le 22 mai.

Ce mĂȘme soir, il y avait dans la ville une reprĂ©sentation thĂ©Ăątrale sur le thĂšme de la tyrannie, intitulĂ©e Rome sauvĂ©e, et Ă  laquelle assistaient nombre de rĂ©volutionnaires. L’acteur principal Ă©tait Morante, dans le rĂŽle de CicĂ©ron. Le commissaire de police requit Morante de feindre une maladie et de ne pas apparaĂźtre sur scĂšne, de sorte que la piĂšce pĂ»t ĂȘtre remplacĂ©e par Misanthropie et Repentance du poĂšte allemand August von Kotzebue. Des rumeurs de censure policiĂšre se propagĂšrent promptement ; Morante dĂ©daigna l'injonction et joua la piĂšce comme prĂ©vu. Au quatriĂšme acte, Morante prononça une allocution patriotique, oĂč il fut question de la Rome antique menacĂ©e par les Gaulois et de la nĂ©cessitĂ© d’une direction forte pour rĂ©sister au danger[70]. Cela eut l’effet d’exalter les esprits rĂ©volutionnaires, et provoqua une frĂ©nĂ©tique ovation. Juan JosĂ© Paso se dressa, criant ÂĄViva Buenos Aires libre!, et une petite rixe s’ensuivit[70]. La reprĂ©sentation terminĂ©e, les rĂ©volutionnaires retournĂšrent au domicile de Peña. Ils firent part du rĂ©sultat de la derniĂšre entrevue, mais doutaient que Cisneros tiendrait parole. Ils organisĂšrent une manifestation pour le jour suivant pour assurer que le cabildo ouvert eĂ»t bien lieu comme dĂ©cidĂ©[70].

Lundi 21 mai

Billet d'invitation au cabildo ouvert du 22 mai.

Les prĂ©paratifs du cabildo ouvert, commencĂ©s Ă  trois heures de l’aprĂšs-midi, furent interrompus par l’arrivĂ©e de 600 hommes armĂ©s, groupĂ©s sous l'appellation de LĂ©gion infernale, qui entreprirent d’occuper la place de la Victoire (Plaza de la Victoria, l'actuelle Plaza de Mayo) et rĂ©clamaient haut et fort la tenue d’un cabildo ouvert et la dĂ©mission du vice-roi Cisneros. Ils brandissaient un portrait de Ferdinand VII et les revers de leur veste Ă©taient ornĂ©s d’un ruban blanc symbolisant l’unitĂ© criollo-espagnole. Les meneurs des agitateurs (chisperos) Ă©taient Domingo French, le facteur de la ville, et Antonio Beruti, employĂ© du TrĂ©sor. Des rumeurs circulaient selon lesquelles Cisneros avait Ă©tĂ© tuĂ© et Saavedra s’apprĂȘtait Ă  prendre la direction du gouvernement[71]. Saavedra, qui se trouvait au mĂȘme moment Ă  la caserne, Ă©tait embarrassĂ© par cette manifestation. S’il estimait que la violence devait ĂȘtre stoppĂ©e et que des mesures radicales telles que la mise Ă  mort de Cisneros devaient ĂȘtre Ă©vitĂ©es, il pensait en mĂȘme temps que les troupes se mutineraient si les manifestations Ă©taient rĂ©primĂ©es[72]. Les gens amassĂ©s sur la place ne croyaient pas que Cisneros autoriserait le cabildo ouvert le jour suivant. Comme Leiva quittait le Cabildo, Belgrano, au nom de la foule, exigea une rĂ©ponse dĂ©finitive ; Leiva dĂ©clara que tout se passerait comme prĂ©vu, mais qu’il fallait du temps pour prĂ©parer le Cabildo. Leiva requit Belgrano d’aider le Cabildo dans les prĂ©paratifs, son intervention pouvant en effet ĂȘtre interprĂ©tĂ©e par la foule comme la garantie que leurs exigences ne seraient pas ignorĂ©es. La foule se retira alors de la salle principale, mais resta sur la place. Belgrano contesta la liste des invitĂ©s, oĂč ne figuraient que les citoyens les plus fortunĂ©s, jugeant que si les pauvres Ă©taient mis Ă  l’écart, les troubles sociaux ne cesseraient pas. Les membres du Cabildo tentĂšrent de le convaincre de donner son appui, mais il s’en alla.

Le dĂ©part de Belgrano, sans qu’il eĂ»t donnĂ© d’explications sur ce qui s’était passĂ©, mit la foule en rage, et le peuple redoutait une trahison. La revendication d’un cabildo ouvert fut remplacĂ©e par l’exigence de la dĂ©mission immĂ©diate de Cisneros. Cependant, aprĂšs l’intervention de Saavedra, assurant que les revendications de la LĂ©gion infernale bĂ©nĂ©ficieraient de son appui militaire, le peuple finit par se calmer et se dispersa[73].

Des invitations furent distribuĂ©es Ă  450 fonctionnaires et citoyens de haut rang de la capitale. La liste des participants avait Ă©tĂ© Ă©tablie par le Cabildo, qui voulait s’assurer du rĂ©sultat en ayant soin de choisir les personnes les plus susceptibles de soutenir le vice-roi. Les rĂ©volutionnaires firent piĂšce Ă  cette manƓuvre par un stratagĂšme Ă  eux : AgustĂ­n Donado, Ă  qui l’on avait confiĂ© la tĂąche d’imprimer les invitations, en imprima prĂšs de 600 au lieu des 450 commandĂ©s, et distribua le surplus entre les criollos[74]. Tout au long de la soirĂ©e, Castelli, RodrĂ­guez, French et Beruti parcoururent toutes les casernes pour haranguer les troupes et les prĂ©parer pour le lendemain[75].

Le carton d’invitation Ă©tait ainsi conçu : L’Excellentissime Cabildo vous convoque pour que vous daigniez assister, demain le 22 courant, Ă  neuf heures, sans insigne aucun, et en qualitĂ© d’habitant, au cabildo ouvert que, en accord avec l’Excellentissime Seigneur Vice-Roi, il a consenti Ă  organiser ; il y aura lieu de produire le prĂ©sent faire-part aux troupes qui garderont les avenues de cette place, pour qu'il vous soit permis de passer librement.

Mardi 22 mai

Le cabildo ouvert du à Buenos Aires, d'aprÚs un tableau de Pedro Subercaseaux. Ce cabildo ouvert fut organisé pour débattre de la légitimité du vice-roi et de l'opportunité d'un gouvernement local autonome qui viendrait le remplacer.

Selon les relevĂ©s officiels, 251 seulement des 450 invitĂ©s assistĂšrent au cabildo ouvert[76]. French et Beruti, Ă  la tĂȘte de 600 hommes armĂ©s de coutelas, de fusils et de carabines de chasse, contrĂŽlaient l’accĂšs Ă  la place, pour assurer que le cabildo ouvert eĂ»t une majoritĂ© de criollos. Tous les notables, religieux et civils, Ă©taient prĂ©sents, ainsi que les chefs de milices et de nombreux rĂ©sidents de premier rang. La seule absence notable Ă©tait celle de MartĂ­n de Álzaga, toujours en rĂ©sidence surveillĂ©e. Les troupes, encasernĂ©es, Ă©taient en Ă©tat d’alerte, prĂȘtes Ă  passer Ă  l’action en cas de commotion[77]. Le nĂ©gociant JosĂ© Ignacio de Rezabal, qui assista au cabildo ouvert, exprima dans une missive adressĂ©e au prĂȘtre JuliĂĄn S. de AgĂŒero ses doutes sur cette façon de procĂ©der, prĂ©cisant que ces doutes Ă©taient partagĂ©s par d’autres gens proches de lui ; il craignait en effet que le parti qui l’emporterait dans le cabildo ouvert, quel qu’il fĂ»t, ne se vengeĂąt contre les autres, comme la mutinerie d’Álzaga en avait Ă©tĂ© un rĂ©cent prĂ©cĂ©dent[78]. Il estimait que le cabildo ouvert serait dĂ©nuĂ© de lĂ©gitimitĂ© si, Ă  cause de la susmentionnĂ©e manipulation de la liste d’invitĂ©s, les criollos Ă©taient admis Ă  y participer en surnombre[79].

La sĂ©ance, avec ses diverses phases ― lecture de la proclamation, dĂ©bats et votes ―, dura du matin jusqu’à minuit. Le vote n’était pas Ă  bulletin secret : les voix Ă©taient demandĂ©es une Ă  une, puis consignĂ©es dans les minutes du dĂ©bat. Le thĂšme principal des discussions Ă©tait la lĂ©gitimitĂ© du gouvernement et l’autoritĂ© du vice-roi. Le principe de RĂ©troversion de la souverainetĂ© des peuples (esp. RetroversiĂłn de la soberanĂ­a de los pueblos), lieu commun de la scolastique espagnole et de la philosophie rationaliste, stipulait qu’en l’absence de monarque lĂ©gitime le pouvoir devait retourner au peuple, et lĂ©gitimait donc la formation d’un nouveau gouvernement ; toutefois, il n’existait aucun prĂ©cĂ©dent oĂč ce principe avait Ă©tĂ© appliquĂ©[80]. La question de la validitĂ© de ce principe divisait l’assemblĂ©e en deux groupes principaux : l’un, qui rejetait ce principe, arguait qu’il n’y avait pas lieu de changer l’état de choses actuel et soutenait Cisneros dans sa fonction de vice-roi ; l’autre, qui appelait au changement, considĂ©rait qu’il convenait d’établir une junte de gouvernement, similaire Ă  celles mises sur pied en Espagne, destinĂ©e Ă  remplacer le vice-roi. Un troisiĂšme groupe, enfin, plus modĂ©rĂ©, dĂ©fendait une position mĂ©diane[81]. Les partisans du changement ne reconnaissaient pas l’autoritĂ© du Conseil de RĂ©gence, soulignant que les colonies amĂ©ricaines n’avaient pas Ă©tĂ© consultĂ©es lors de sa formation. La question de la rivalitĂ© entre criollos et pĂ©ninsulaires ne fut qu'effleurĂ©e au cours des dĂ©bats ; ceux favorables au maintien en place du vice-roi estimaient que le vƓu des pĂ©ninsulaires devait prĂ©valoir sur celui des criollos.

Un des orateurs de la premiĂšre position Ă©tait l’évĂȘque de Buenos Aires, Benito LuĂ© y Riega, chef de l’église locale. LuĂ© y Riega fit valoir que :

« Non seulement il n’y a point lieu d’innover avec le vice-roi, mais encore, quand bien mĂȘme il n’y aurait plus aucune partie de l’Espagne qui ne fĂ»t subjuguĂ©e, les Espagnols qui se trouvent en AmĂ©rique doivent reprendre et exercer le gouvernement de celle-ci, ce gouvernement ne pouvant incomber aux fils du pays que s'il ne s’y trouvait plus aucun Espagnol. DĂ»t-il ne rester qu’un seul membre de la Junte de SĂ©ville et qu'il accostĂąt nos plages, nous devrions le recevoir comme le Souverain[82]. »

Juan JosĂ© Castelli Ă©tait le principal orateur en faveur des rĂ©volutionnaires. Son allocution reposait sur deux idĂ©es centrales : la dĂ©chĂ©ance du gouvernement lĂ©gitime — il releva que la Junte de SĂ©ville Ă©tait dissoute et n’était pas habilitĂ©e Ă  dĂ©signer une RĂ©gence — et le principe de rĂ©troversion de souverainetĂ©[83]. Il prit la parole aprĂšs Riega, affirmant que c’était au peuple amĂ©ricain de prendre en main son propre gouvernement en attendant que Ferdinand VII fĂ»t en mesure de retourner sur le trĂŽne.

« Nul n’a pu rĂ©puter criminels ni la nation entiĂšre, ni les individus qui ont exprimĂ© ouvertement leurs opinions politiques. Si le droit de conquĂȘte appartient, par origine, au pays conquĂ©rant, il serait juste que l’Espagne donne raison au rĂ©vĂ©rend Ă©vĂȘque en renonçant Ă  rĂ©sister aux Français et en se soumettant, selon les mĂȘmes principes que ceux en vertu desquels il est prĂ©tendu que les AmĂ©ricains se soumettent aux hameaux de Pontevedra. La raison et la rĂšgle doivent ĂȘtre Ă©gales pour tous. Ici, il n’y a ni conquis ni conquĂ©rants, il n’y a ici que des Espagnols. Les Espagnols d’Espagne ont perdu leur terre. Les Espagnols d’AmĂ©rique essayent de sauver la leur. Que ceux d’Espagne s’entendent lĂ -bas comme ils le peuvent et qu’ils ne se prĂ©occupent pas : nous, AmĂ©ricains, savons ce que nous voulons et oĂč nous allons. Aussi, je propose que l’on vote : qu’à l’autoritĂ© du vice-roi en soit subrogĂ©e une autre, qui dĂ©pendra de la mĂ©tropole si celle-ci se sauve des Français, qui sera indĂ©pendante si l’Espagne reste subjuguĂ©e[84] »

Pascual Ruiz Huidobro argumenta que si l’autoritĂ© qui avait nommĂ© Cisneros Ă©tait caduque, celui-ci n’avait plus sa place dans le gouvernement. Il estimait que le Cabildo devait prendre la direction des affaires, Ă©tant donnĂ© qu’il Ă©tait le reprĂ©sentant du peuple. Se ralliĂšrent Ă  son vote Melchor FernĂĄndez, Juan LeĂłn Ferragut, JoaquĂ­n Grigera, et d’autres[85].

Cornelio Saavedra, élu à la majorité des suffrages lors du cabildo ouvert, devint le premier président des Provinces-Unies du Río de la Plata.

L’avocat Manuel Genaro Villota, reprĂ©sentant des Espagnols conservateurs, dĂ©clara que la ville de Buenos Aires n’avait pas le droit de dĂ©cider unilatĂ©ralement de la lĂ©gitimitĂ© du vice-roi ou du Conseil de RĂ©gence, sans en confĂ©rer aussi avec les autres villes de la Vice-royautĂ©. Il argua que pareille action briserait l’unitĂ© du pays, Ă©tablissant autant de souverainetĂ©s que le pays compte de villes. Ce point de vue, qui Ă©quivalait Ă  repousser Ă  plus tard quelque action que ce fĂ»t, Ă©tait une habile manƓuvre dilatoire visant Ă  maintenir Cisneros au pouvoir[86]. Juan JosĂ© Paso reconnut le bien-fondĂ© de son premier point, mais argumenta que la situation en Europe et la possibilitĂ© que les forces napolĂ©oniennes vinssent Ă  conquĂ©rir les colonies amĂ©ricaines exigeait une rĂ©solution urgente[87]. Il excipa alors du droit d’aĂźnesse de Buenos Aires, qui habiliterait cette ville Ă  prendre l’initiative et Ă  procĂ©der aux changements jugĂ©s nĂ©cessaires et appropriĂ©s, certes sous la condition expresse que les autres villes en fussent avisĂ©es et invitĂ©es le plus tĂŽt possible Ă  Ă©mettre des remarques[88]. La figure rhĂ©torique de la sƓur aĂźnĂ©e (hermana mayor), comparable au principe de negotiorum gestio[89], est un concept postulant une analogie entre les rapports de Buenos Aires avec les autres villes de la vice-royautĂ© et la relation filiale[90].

Le prĂȘtre Juan Nepomuceno SolĂĄ proposa alors que le commandement provisoire fĂ»t confiĂ© au Cabildo, en attendant la constitution d’une junte de gouvernement composĂ©e de reprĂ©sentants de toutes les populations de la Vice-royautĂ©. Sa motion fut soutenue par Manuel Alberti, AzcuĂ©naga, Escalada, Cosme Mariano Argerich, Juan Pedro Aguirre, et par d’autres[91].

Cornelio Saavedra suggĂ©ra pour sa part que le gouvernement fĂ»t dĂ©lĂ©guĂ© au Cabildo jusqu’à la formation d’une junte de gouvernement dans les modalitĂ©s et la forme que le Cabildo jugerait appropriĂ©es. Il utilisa l’expression « (...) et il n’est point douteux que c’est le peuple qui fait l’autoritĂ© ou le commandement. »[76]. Au moment du vote, la position de Castelli s’était accordĂ©e avec celle de Saavedra[92].

Manuel Belgrano se tenait debout prĂšs d’une fenĂȘtre, de sorte Ă  pouvoir, au cas oĂč les choses prendraient un mauvais tour, donner le signal en agitant un linge blanc. Les gens rassemblĂ©s sur la place eussent alors forcĂ© le passage jusque dans le Cabildo. Cependant, aucun problĂšme sĂ©rieux ne survint, et ce plan d’urgence n’eut pas Ă  ĂȘtre mis en Ɠuvre[93]. L’historien Vicente Fidel LĂłpez, fils de Vicente LĂłpez y Planes, rĂ©vĂ©la que son pĂšre, prĂ©sent Ă  l’évĂ©nement, vit que Mariano Moreno Ă©tait devenu inquiet vers la fin, en dĂ©pit de la majoritĂ© acquise. Moreno confia Ă  Planes que le Cabildo Ă©tait sur le point de le trahir.

Mercredi 23 mai

Les dĂ©bats se poursuivirent toute la journĂ©e, et les voix ne furent comptĂ©es que fort tard dans la soirĂ©e. Les exposĂ©s faits, les participants avaient Ă  voter soit pour le maintien au pouvoir du vice-roi, seul ou en association, soit pour sa destitution. Les idĂ©es exposĂ©es cristallisĂšrent en un petit nombre de propositions, dĂ©signĂ©es par le nom de leur principal dĂ©fenseur, et les gens votĂšrent ensuite en faveur d’une d’entre elles. De ce vote, qui dura longtemps, il rĂ©sulta, Ă  une large majoritĂ© de 155 voix contre 69, que le vice-roi devait ĂȘtre destituĂ©.

La proposition de Manuel JosĂ© Reyes, qui estimait qu’il n’y avait aucune raison de dĂ©poser le vice-roi, et qu’il suffisait de dĂ©signer une junte dirigĂ©e par Cisneros, obtint une trentaine de voix. Trente autres voix appuyaient Ă©galement Cisneros, mais en rejetant tout changement au systĂšme politique en vigueur. Un petit groupe enfin appuyait la proposition de MartĂ­n JosĂ© de Choteco, qui soutenait Ă©galement Cisneros[94].

Les voix contre Cisneros Ă©taient elles aussi rĂ©parties en plusieurs propositions diffĂ©rentes. Beaucoup de celles-ci tenaient que les nouvelles autoritĂ©s appelĂ©es Ă  se substituer au vice-roi devaient ĂȘtre Ă©lues par le Cabildo. Pascual Ruiz Huidobro vota en faveur d’une phase intĂ©rimaire au cours de laquelle le Cabildo dirigerait et s’emploierait Ă  dĂ©signer un nouveau gouvernement, mais cette proposition ne mettait pas en avant la souverainetĂ© populaire, ni n’évoquait la mise sur pied d’une junte. Cette proposition eut la faveur de trente-cinq membres, dont du reste une grande partie voyaient en Huidobro le meilleur candidat Ă  la tĂȘte du nouveau gouvernement qui serait constituĂ© si la proposition l’eĂ»t emportĂ©[95]. Juan Nepomuceno SolĂĄ vota pour la proposition portant que le Cabildo devait gouverner dans l’intĂ©rim, tout en s’efforçant entre-temps de constituer une junte composĂ©e de dĂ©putĂ©s de toutes les provinces de la vice-royautĂ©. Cette proposition obtint prĂšs de vingt voix. Cornelio Saavedra eut le plus grand nombre de voix, et le reste des voix se rĂ©partissait sur diverses propositions obtenant chacune peu de voix.

Le Ă  l’aube, le Cabildo publia un document annonçant que le vice-roi mettrait fin Ă  son mandat. L’autoritĂ© supĂ©rieure serait transfĂ©rĂ©e temporairement au Cabildo, jusqu’à la dĂ©signation d’une junte de gouvernement[96].

Des avis, annonçant la crĂ©ation imminente d’une junte et reproduisant l'appel lancĂ© aux provinces pour qu'elles envoyassent des reprĂ©sentants Ă  Buenos Aires, furent placardĂ©s en diffĂ©rents points de la ville. D’autres avis appelaient le public Ă  s’abstenir de tenter des actions contraires Ă  l’ordre public[97].

Jeudi 24 mai

Le Cabildo entreprit, en application des rĂ©sultats du cabildo ouvert, de former la nouvelle junte chargĂ©e de gouverner jusqu’à l’arrivĂ©e des reprĂ©sentants des autres villes. Leyva fit en sorte que le ci-devant vice-roi Cisneros fĂ»t dĂ©signĂ© prĂ©sident de la junte et commandant en chef des forces armĂ©es. Furent aussi Ă©lus, outre Cisneros, les quatre autres membres suivants : les criollos Cornelio Saavedra et Juan JosĂ© Castelli, et les pĂ©ninsulaires Juan Nepomuceno SolĂĄ et JosĂ© Santos Inchaurregui[98]. Les points de vue divergent quant aux motifs de cette dĂ©cision. Un code constitutionnel de treize articles, propre Ă  rĂ©guler l’action de la junte, avait Ă©tĂ© rĂ©digĂ© par Leyva : la junte n’était pas habilitĂ©e Ă  exercer le pouvoir judiciaire, lequel Ă©tait rĂ©servĂ© Ă  la Audiencia royale de Buenos Aires ; Cisneros ne pouvait pas agir sans l'appui des autres membres de la junte ; le Cabildo avait pouvoir de rĂ©voquer ceux qui nĂ©gligeaient d’accomplir leur devoir ; l’assentiment du Cabildo Ă©tait requis pour lever de nouveaux impĂŽts ; et enfin, la junte devait dĂ©crĂ©ter une amnistie gĂ©nĂ©rale pour ceux qui avaient exprimĂ© leur opinion lors du cabildo ouvert, et appeler les autres villes Ă  dĂ©pĂȘcher des dĂ©putĂ©s. Les commandants des forces armĂ©es, y compris Saavedra et Pedro AndrĂ©s GarcĂ­a, acquiescĂšrent Ă  ce code. La junte prĂȘta serment dans l’aprĂšs-midi[99].

La nouvelle prit les rĂ©volutionnaires au dĂ©pourvu. Ils ne savaient pas avec certitude ce qu’il y avait Ă  faire dans l’immĂ©diat, et craignaient de subir la mĂȘme rĂ©pression que celle qui s’était abattue sur les rĂ©volutionnaires de Chuquisaca et de La Paz. Moreno abjura toute relation avec les autres et se claquemura dans sa maison[100]. Une rĂ©union eut lieu au domicile de RodrĂ­guez Peña. Certains Ă©taient d’avis que le Cabildo n’avait pu ourdir un tel complot sans la bĂ©nĂ©diction de Saavedra, et que Castelli devait dĂ©missionner de la junte. Tagle rejeta cette proposition : il pensait que Saavedra avait pu accepter par faiblesse ou par naĂŻvetĂ©, et que Castelli devait donc rester afin de contrebalancer l’influence qu’avaient les autres sur Saavedra[101]. Entre-temps, la place avait Ă©tĂ© envahie par une foule emmenĂ©e par French et Beruti. Le maintien au pouvoir de Cisneros, fĂ»t-ce mĂȘme dans une fonction autre que celle de vice-roi, Ă©tait ressentie comme une injure Ă  la volontĂ© du cabildo ouvert. Le colonel MartĂ­n Rodriguez expliqua que si ses soldats recevaient l’ordre de soutenir Cisneros, cela signifierait que l’ordre leur serait donnĂ© de faire feu sur la population ; la plupart des soldats alors se rĂ©volteraient, car ils partageaient le souhait de voir le vice-roi quitter le pouvoir[102].

Ce mĂȘme soir, Castelli et Saavedra informĂšrent Cisneros de leur intention de dĂ©missionner de la Junte nouvellement formĂ©e, faisant valoir que la population Ă©tait au bord d’une rĂ©volution violente et qu’elle Ă©carterait Cisneros par la force s’il ne dĂ©missionnait pas lui aussi. Ils soulignĂšrent qu’ils Ă©taient impuissants Ă  stopper cela ― Castelli, Ă  contenir ses amis, Saavedra, Ă  empĂȘcher le RĂ©giment de Patriciens de se mutiner[103]. Cisneros souhaitait attendre jusqu’au lendemain, mais ils lui reprĂ©sentĂšrent que l’heure n’était plus aux ajournements, de sorte qu’il finit par accepter de dĂ©missionner. Il rĂ©digea sa lettre de dĂ©mission et la fit parvenir au Cabildo, qui devait en dĂ©libĂ©rer le jour suivant. Chiclana, se sentant encouragĂ© aprĂšs que Saavedra eut dĂ©missionnĂ©, se mit Ă  solliciter des signatures pour un manifeste de la volontĂ© du peuple. Quant Ă  Moreno, il se refusait Ă  tout autre engagement, mais Castelli et Peña Ă©taient confiants qu'il finirait par vouloir les rejoindre si les Ă©vĂ©nements se dĂ©roulaient comme ils l’escomptaient[104].

Vendredi 25 mai

Le matin du , malgrĂ© le mauvais temps, une foule nombreuse, rejointe par la milice commandĂ©e par Domingo French et Antonio Beruti, se rassembla sur la Plaza de la Victoria. Tous rĂ©clamaient la rĂ©vocation de la junte Ă©lue le jour prĂ©cĂ©dent, la dĂ©mission dĂ©finitive de Cisneros, et la composition d’une nouvelle junte dont ce dernier fĂ»t exclu. L’historien BartolomĂ© Mitre rapporte que French et Beruti distribuĂšrent des rubans bleu et blanc, semblables Ă  la cocarde argentine moderne, aux personnes prĂ©sentes. Plus tard, d’autres historiens mirent cela en doute, sans exclure toutefois que les rĂ©volutionnaires eussent utilisĂ© quelque marque distinctive pour permettre leur identification[105]. La rumeur courut qu’il se pouvait que le Cabildo rejetĂąt la dĂ©mission de Cisneros[106]. La rĂ©solution officielle tardant Ă  ĂȘtre rendue publique, la foule commença Ă  remuer, clamant « le peuple veut savoir de quoi il s’agit ! ».

Le Cabildo se rĂ©unit Ă  9 heures du matin et refusa effectivement la dĂ©mission de Cisneros, estimant que la foule n’avait aucun droit lĂ©gitime Ă  influencer une dĂ©cision prise et dĂ©jĂ  exĂ©cutĂ©e par le Cabildo. Il considĂ©rait que l’agitation populaire devait ĂȘtre rĂ©primĂ©e par la force, et, attendu que la Junte dĂ©tenait maintenant le pouvoir, tenait les membres de celle-ci pour comptables de tout changement qui serait apportĂ© Ă  la politique dĂ©cidĂ©e[107]. Afin de faire exĂ©cuter ces ordres, ils mandĂšrent les commandants en chef, mais ceux-ci n’y donnĂšrent aucune suite. Beaucoup d’entre eux, Saavedra inclus, n’apparurent point ; mais mĂȘme ceux qui parurent alors annoncĂšrent ne pas vouloir endosser l’ordre du gouvernement, arguant que les commandants seraient Ă  coup sĂ»r dĂ©sobĂ©is s’ils ordonnaient aux troupes de rĂ©primer les manifestants.

L’agitation de la foule s’accrut, et le cabildo fut pris d’assaut. Leiva et Lezica requirent que quelqu’un habilitĂ© Ă  agir en porte-parole du peuple voulĂ»t les rejoindre Ă  l’intĂ©rieur de la salle et exposer les vƓux du peuple. Beruti, Chiclana, French et Grela furent admis Ă  passer. Leiva tenta de dissuader Pancho Planes de se joindre Ă  eux[108], mais il pĂ©nĂ©tra lui aussi dans la salle[109]. Le Cabildo argumenta que Buenos Aires n’avait pas le droit de dĂ©manteler le systĂšme politique de la vice-royautĂ© sans en discuter d’abord avec les autres provinces ; French et Chiclana rĂ©torquĂšrent que la convocation d’un CongrĂšs Ă©tait d’ores et dĂ©jĂ  dĂ©cidĂ©e[110]. Le Cabildo convoqua les commandants afin d’aviser avec eux. Ainsi que cela avait dĂ©jĂ  Ă©tĂ© fait plusieurs fois dans les derniers jours, Romero reprĂ©senta au Cabildo que les soldats se mutineraient s’ils Ă©taient forcĂ©s de combattre la foule sur ordre de Cisneros. Le Cabildo toutefois ne voulut point en dĂ©mordre, jusqu’à ce que le bruit de la manifestation eut pĂ©nĂ©trĂ© dans la salle, faisant craindre que les manifestants pussent envahir le bĂątiment et les atteindre. MartĂ­n RodrĂ­guez dĂ©clara que la seule maniĂšre de calmer les manifestants Ă©tait d’accepter la dĂ©mission de Cisneros. Leiva cette fois fut d’accord et en convainquit les autres membres, et la multitude reflua alors vers la place. RodrĂ­guez se dirigea vers la maison d’AzcuĂ©naga pour y rencontrer les autres rĂ©volutionnaires et planifier les derniĂšres Ă©tapes de la rĂ©volution. La manifestation envahit derechef le Cabildo, poussant cette fois jusqu’à la salle de dĂ©libĂ©ration. Beruti prit la parole au nom du peuple, exigeant que la nouvelle junte fĂ»t Ă©lue par le peuple, et non par le Cabildo[111]. Il laissa entendre que, outre les 400 personnes dĂ©jĂ  rassemblĂ©es, les casernes Ă©taient remplies de gens qui leur Ă©taient loyaux et qui, si besoin Ă©tait, prendraient le commandement. Le Cabildo rĂ©pliqua en requĂ©rant que leurs revendications fussent formulĂ©es par Ă©crit. Au terme d’un long intervalle, un document contenant 411 signatures fut remis au Cabildo[112]. Ce document, qui a pu ĂȘtre conservĂ©, proposait une nouvelle composition de la junte de gouvernement, et un corps expĂ©ditionnaire de 500 hommes pour assister les provinces ; y figurent la plupart des chefs militaires et nombre de rĂ©sidents notables, en plus d'une grande quantitĂ© de signatures illisibles. French et Beruti le signĂšrent, en prĂ©cisant « pour moi et pour six cents autres »[113]. Les historiens ne s’accordent pas cependant sur la paternitĂ© du contenu de ce document.

Sur ces entrefaites, le temps s’était amĂ©liorĂ©, et le soleil perça Ă  travers les nuages, illuminant le ciel. Les gens amassĂ©s sur la place y virent un bon prĂ©sage pour la rĂ©volution. Le Soleil de Mai, un des emblĂšmes de l’Argentine et de l’Uruguay, allait ĂȘtre crĂ©Ă© quelques annĂ©es plus tard en rĂ©fĂ©rence Ă  ce phĂ©nomĂšne[112].

Le Cabildo accepta le document et se rendit au balcon pour le soumettre directement au peuple pour ratification. Mais, Ă  cause de l’heure tardive et de la mĂ©tĂ©o, le nombre de gens prĂ©sents sur la place s’était amenuisĂ©. Leiva ridiculisa la prĂ©tention des reprĂ©sentants restants Ă  parler au nom du peuple, ce qui mit Ă  rude Ă©preuve la patience des rares personnes encore sur la place sous la pluie. Beruti, refusant tout nouvel atermoiement, menaça d’appeler le peuple aux armes[114]. Devant la perspective d'une montĂ©e de violence, l’on fit donner lecture de la requĂȘte du peuple, laquelle fut immĂ©diatement ratifiĂ©e par l'assistance. Les rĂšgles rĂ©gissant la Junte Ă©taient grosso modo les mĂȘmes que celles Ă©dictĂ©es la veille, mais complĂ©tĂ©es par la stipulation que le Cabildo contrĂŽlerait l’activitĂ© des membres de la Junte et qu’en cas de poste devenu vacant, la Junte Ă©tait elle-mĂȘme habilitĂ©e Ă  pourvoir aux remplacements[115]. Saavedra s’adressa Ă  la foule, puis se rendit au Fort, sous les salves d’artillerie et les sonneries de cloches. Entre-temps, Cisneros dĂ©pĂȘcha JosĂ© Melchor Lavin Ă  CĂłrdoba pour prĂ©venir Santiago de Liniers de ce qui venait de se passer Ă  Buenos Aires, et demanda une intervention militaire contre la Junte.

La version du vice-roi Cisneros

Le vice-roi destitué Cisneros livra sa version des faits de la Semaine de Mai dans une missive adressée au roi Ferdinand VII, portant la date du :

« J’avais ordonnĂ© que pour cet acte l’on postĂąt une compagnie dans chaque rue dĂ©bouchant sur la place, de sorte Ă  ne permettre d’accĂ©der Ă  celle-ci, ni de monter dans les Maisons Capitulaires, Ă  nulle personne qui ne fĂ»t de celles citĂ©es ; mais la troupe et les officiers Ă©taient du parti ; ils faisaient ce que leurs commandants leur avaient prĂ©alablement et secrĂštement dit de faire, c'est-Ă -dire que ceux-lĂ  leur dirent ce que la faction leur avait ordonnĂ© de dire : ils refusaient le passage vers la place aux habitants honorables et l'accordaient Ă  ceux de la confabulation ; quelques officiers avaient un exemplaire des innombrables convocations et avec celles-ci ils introduisaient dans les bĂątiments de l'hĂŽtel de ville des sujets non citĂ©s par le Cabildo, ou dont ils savaient la partialitĂ©, ou parce qu’ils les gagnaient avec de l’argent, de sorte que, dans une ville de plus de trois mille citoyens de distinction et de nom, seuls deux cents de ceux-ci furent prĂ©sents, mais de nombreux Ă©piciers, quelques artisans, d’autres fils de famille et les plus ignorants, dĂ©pourvus de la moindre notion pour discuter d’une question de la plus grande gravitĂ©[116]. »

Composition de la PremiĂšre Junte

Le gouvernement issu du cabildo ouvert, qu’il est d’usage de dĂ©signer par PremiĂšre Junte (Primera Junta), Ă©tait composĂ© comme suit :

Président

Membres

Secrétaires

ÉvĂ©nements subsĂ©quents

De la révolution de Mai surgira la PremiÚre Junte, premier gouvernement autonome du Río de la Plata.

Ni le Conseil de RĂ©gence, ni les membres de l'Audiencia royale de Buenos Aires, ni la population espagnole d’origine europĂ©enne ne crurent en la sincĂ©ritĂ© de la dĂ©claration de loyautĂ© envers le roi captif Ferdinand VII, et ce n’est que de mauvaise grĂące qu’ils se rĂ©signĂšrent Ă  la nouvelle situation. L’Audiencia jura en secret fidĂ©litĂ© au Conseil de RĂ©gence et expĂ©dia des circulaires aux autres villes de la Vice-royautĂ©, les exhortant Ă  ne pas reconnaĂźtre le nouveau gouvernement. Pour mettre un terme Ă  ces manƓuvres, la Junte convoqua l’ensemble des membres de l’Audiencia, ainsi que l’évĂȘque LuĂ© y Riega et le ci-devant vice-roi Cisneros, pour les embarquer ensuite, sous le prĂ©texte que leurs vies fussent en danger, sur le navire britannique Dart. Consigne fut donnĂ©e par Larrea au capitaine Mark Brigut de ne faire escale dans aucun port amĂ©ricain et de les transporter tous vers les Ăźles Canaries. Cette opĂ©ration accomplie avec succĂšs, une nouvelle Audiencia fut nommĂ©e, entiĂšrement composĂ©e de criollos loyaux Ă  la rĂ©volution[117].

À l’exception de la ville de CĂłrdoba, toutes les villes sur le territoire actuel de l’Argentine appuyĂšrent la PremiĂšre Junte. Les villes du Haut-PĂ©rou (actuelle Bolivie) cependant ne prirent pas position ouvertement, en raison sans doute du prĂ©cĂ©dent des rĂ©centes rĂ©volutions de Chuquisaca et de La Paz et de leur dĂ©nouement. Asuncion rejeta la Junte et prĂȘta serment de fidĂ©litĂ© au Conseil de RĂ©gence. La bande Orientale, sous Francisco Javier de ElĂ­o, demeura un bastion royaliste, de mĂȘme que le Chili[118].

À CĂłrdoba, l’ancien vice-roi Jacques de Liniers se mit Ă  la tĂȘte d’une contre-rĂ©volution et dĂ©clencha ainsi la premiĂšre campagne militaire qu’eut Ă  mener le nouveau gouvernement indĂ©pendant. En dĂ©pit de la stature de Liniers et de son prestige de hĂ©ros populaire, que lui avait valu son rĂŽle lors des invasions anglaises, la population de CĂłrdoba se rallia Ă  la rĂ©volution. Les dĂ©sertions et actes de sabotage qui s’ensuivirent ayant sensiblement entamĂ© la puissance des troupes contre-rĂ©volutionnaires[119], le soulĂšvement de Liniers fut promptement Ă©crasĂ© par les forces sous le commandement de Francisco Ortiz de Ocampo. Toutefois, Ocampo refusa ensuite de fusiller Liniers qu’il avait capturĂ©, eu Ă©gard au fait que celui-ci avait combattu Ă  ses cĂŽtĂ©s contre les Anglais ; c’est Juan JosĂ© Castelli qui dut se charger de l’exĂ©cution telle qu’ordonnĂ©e par la Junte. La rĂ©bellion de CĂłrdoba rĂ©primĂ©e, l’on entreprit d’envoyer des expĂ©ditions militaires vers d’autres villes de l’intĂ©rieur, en exigeant qu’elles appuyassent la PremiĂšre Junte et lui envoyassent des dĂ©putĂ©s pour les reprĂ©senter[120]. Le service militaire fut exigĂ© de presque toutes les familles, pauvres comme riches ; cependant, la plupart des familles patriciennes dĂ©cidĂšrent d’envoyer leurs esclaves Ă  l’armĂ©e au lieu de leurs propres fils ― c’est lĂ  sans doute une des raisons de la diminution de la population noire en Argentine.

Portrait apocryphe de Mariano Moreno, membre influent de la PremiĂšre Junte.

Montevideo, mieux outillĂ©e pour rĂ©sister Ă  une attaque de Buenos Aires, et poussĂ©e en outre par la rivalitĂ© historique entre ces deux villes, fit rĂ©solument opposition Ă  la PremiĂšre Junte ; le Conseil de RĂ©gence la proclama nouvelle capitale de la Vice-royautĂ©, et nomma Francisco Javier de ElĂ­o comme nouveau vice-roi. Des villes plus pĂ©riphĂ©riques, situĂ©es dans la bande Orientale, soutinrent, Ă  l’encontre de la volontĂ© de Montevideo, la Junte de Buenos Aires ; elles Ă©taient conduites par JosĂ© Gervasio Artigas, qui mit le siĂšge devant Montevideo. Les royalistes montĂ©vidĂ©ens furent dĂ©finitivement battus par Carlos MarĂ­a de Alvear[121].

La Capitainerie gĂ©nĂ©rale du Chili connut un processus politique analogue Ă  celui de la rĂ©volution de Mai, et, aprĂšs avoir Ă  son tour Ă©lu une junte de gouvernement en septembre, entra dans la courte pĂ©riode connue sous le nom de Patria Vieja. Ladite junte fut cependant vaincue en 1814 lors de la bataille de Rancagua, et la consĂ©cutive reconquĂȘte du Chili en fit Ă  nouveau un bastion loyaliste. La cordillĂšre des Andes dressait une barriĂšre efficace entre rĂ©volutionnaires et royalistes chiliens, raison pour laquelle il n’y eut pas d’affrontements armĂ©s au Chili avant 1817, date oĂč l’ArmĂ©e des Andes sous le commandement de JosĂ© de San MartĂ­n franchit la cordillĂšre et infligea une dĂ©faite dĂ©finitive aux royalistes chiliens[122].

La PremiĂšre Junte s’augmenta des dĂ©putĂ©s envoyĂ©s par les provinces et intĂ©grĂ©s en son sein, et fut alors rebaptisĂ©e Junta Grande. Elle fut dissoute peu aprĂšs la dĂ©faite patriote de Ă  la bataille de Huaqui, pour laisser la place Ă  deux triumvirats successifs, qui exercĂšrent le pouvoir exĂ©cutif sur les Provinces Unies de l’AmĂ©rique du Sud. En 1814, le second triumvirat fut remplacĂ© par le gouvernement du Directeur suprĂȘme des Provinces Unies du RĂ­o de la Plata[123]. Entre-temps, MartĂ­n Miguel de GĂŒemes rĂ©ussissait Ă  contenir Ă  Salta les armĂ©es royalistes dĂ©pĂȘchĂ©es par le PĂ©rou, tandis que San MartĂ­n faisait mouvement, par voie de mer, vers le bastion royaliste de Lima, lors d’une campagne conjointe chilienne et argentine. Le thĂ©Ăątre des indĂ©pendances se dĂ©plaçait ainsi peu Ă  peu vers le nord du continent sud-amĂ©ricain[124]. En Argentine mĂȘme, l’évolution politique dĂ©riva vers une longue guerre civile.

Conséquences

D’aprĂšs l’ouvrage Breve historia de los Argentinos de l’historien FĂ©lix Luna, une des consĂ©quences politiques les plus importantes de la rĂ©volution de Mai fut le changement de paradigme dans la relation entre population et gouvernants. Jusque-lĂ  avait prĂ©valu le concept de bien commun : cependant que l’autoritĂ© royale restait pleinement respectĂ©e, si une instruction Ă©manant de la cour d’Espagne Ă©tait jugĂ©e prĂ©judiciable au bien commun de la population locale, elle n’était suivie qu’à moitiĂ© ou tout simplement dĂ©daignĂ©e[16]. Avec la rĂ©volution, le concept de bien commun fut supplantĂ© par le concept de souverainetĂ© populaire, tel que l’avaient thĂ©orisĂ© Moreno, Castelli et Monteagudo, parmi d’autres. L’idĂ©e tenait qu’en l’absence d’autoritĂ© lĂ©gitime, le peuple avait le droit de dĂ©signer lui-mĂȘme ses propres dirigeants. Au fil du temps, la souverainetĂ© populaire devait cĂ©der le pas Ă  la doctrine de la rĂšgle majoritaire. Cette maturation des idĂ©es fut lente et progressive, et prit de longues dĂ©cennies Ă  cristalliser en des systĂšmes Ă©lectoraux et politiques stables, mais dĂ©boucha finalement sur l’adoption du systĂšme rĂ©publicain comme forme de gouvernement pour l’Argentine[125]. Domingo Faustino Sarmiento exprima des points de vue similaires dans son Facundo, en relevant que les villes Ă©taient plus rĂ©ceptives aux idĂ©es rĂ©publicaines, alors que les zones rurales leur Ă©taient plus rĂ©fractaires, ce qui permettait au phĂ©nomĂšne des caudillos de se dĂ©velopper dans les provinces[126].

Une autre consĂ©quence de la rĂ©volution de Mai fut, toujours selon FĂ©lix Luna, la dĂ©sintĂ©gration des territoires appartenant autrefois Ă  la Vice-royautĂ© du RĂ­o de la Plata en plusieurs unitĂ©s distinctes. La plupart des villes et des provinces avaient des populations, des Ă©conomies, des mentalitĂ©s, des contextes et des intĂ©rĂȘts diffĂ©rents. Jusqu’alors, toutes ces populations Ă©taient maintenues ensemble par l’autoritĂ© du gouvernement espagnol, mais aprĂšs la disparition de celle-ci, les habitants de Montevideo, du Paraguay et du Haut-PĂ©rou commencĂšrent Ă  s’éloigner de Buenos Aires. La durĂ©e d’existence de la Vice-royautĂ© du RĂ­o de la Plata, de 38 ans Ă  peine, avait Ă©tĂ© insuffisante pour permettre Ă  une conscience patriotique de se forger et pour crĂ©er dans l’ensemble de la population un sentiment d’appartenance Ă  une mĂȘme communautĂ©[127]. Il manquait au nouveau pays un concept Ă©tabli d’identitĂ© nationale propre Ă  unir la population sous une commune idĂ©e de l’État[128]. Juan Bautista Alberdi dĂ©cĂšle dans la RĂ©volution de Mai une des manifestations prĂ©coces de la lutte de pouvoir entre la ville de Buenos Aires et les provinces de l’intĂ©rieur — un des antagonismes centraux Ă  l’Ɠuvre dans les guerres civiles argentines. Alberdi Ă©crivit dans son ouvrage Escritos pĂłstumos :

« La rĂ©volution de Mai 1810 Ă  Buenos Aires, dont le dessein Ă©tait d'obtenir l'indĂ©pendance de l'Argentine d’avec l’Espagne, eut Ă©galement pour effet d’émanciper de l’Argentine la province de Buenos Aires, ou plutĂŽt, d’imposer l’autoritĂ© de cette province Ă  la nation tout entiĂšre Ă©mancipĂ©e de l’Espagne. Ce jour-lĂ , si la tutelle espagnole s’acheva sur les provinces argentines, celle de Buenos Aires fut instaurĂ©e[129]. »

D'autre part, la vie culturelle dans le RĂ­o de la Plata connut aprĂšs la rĂ©volution de Mai une floraison sans prĂ©cĂ©dent, en particulier par la quantitĂ© de nouvelles publications de toute sorte. En effet, en regard de l’unique journal autorisĂ© auparavant, la rĂ©volution laissa libre carriĂšre Ă  la presse, permettant l’émergence d’une profusion de titres tels que La Lira Argentina, la Gazeta de Buenos Aires, El Correo de Comercio, MĂĄrtir o Libre, El Censor de la RevoluciĂłn, El Independiente et El Grito del Sud. Le mĂȘme vent de libertĂ© bĂ©nĂ©ficia Ă  la crĂ©ation littĂ©raire et fit surgir des poĂštes rĂ©volutionnaires, dont BartolomĂ© Hidalgo, Vicente LĂłpez y Planes et Esteban de Luca[130].

Perspectives historiques

L’historiographie de la rĂ©volution de Mai n’a, quant aux faits eux-mĂȘmes, que peu de sujets d’incertitude, et n’a pas non plus Ă  dĂ©plorer la perte de nombreux dĂ©tails. La plupart des informations ont Ă©tĂ© recueillies et adĂ©quatement consignĂ©es pendant les Ă©vĂ©nements, puis mises Ă  la disposition du public par la PremiĂšre Junte en guise de propagande patriotique. Il en rĂ©sulte que les diverses visions historiques de l’évĂ©nement diffĂšrent les unes des autres non pas par la description des faits eux-mĂȘmes, mais par l’interprĂ©tation que chacune de ces visions entend donner de la signification, des causes et des consĂ©quences des Ă©vĂ©nements. Du reste, la version moderne des faits ne s’écarte pas sensiblement de la version contemporaine[131].

BartolomĂ© Mitre, auteur d’une des premiĂšres interprĂ©tations historiques de la rĂ©volution de Mai.

Les premiers Ă  Ă©crire sur la RĂ©volution furent ses protagonistes. Cependant, les mĂ©moires, biographies et carnets qu’ils firent paraĂźtre poursuivaient des buts autres qu’historiographiques ; il s’agissait notamment d’exposer les raisons de leurs actions, de blanchir leur image publique, ou de manifester leur soutien ou leur rejet des figures et des idĂ©es de l’époque[132]. Par exemple, Manuel Moreno rĂ©digea une biographie de son frĂšre Mariano destinĂ©e Ă  servir en Europe de matĂ©riel de propagande en faveur de la RĂ©volution[133], et Cornelio Saavedra Ă©crivit son autobiographie Ă  un moment oĂč son personnage Ă©tait fortement mis en cause, afin de se justifier auprĂšs de ses fils[134].

La premiĂšre Ă©cole historiographique importante qui se soit consacrĂ©e Ă  l'histoire de l'Argentine et Ă  son interprĂ©tation fut fondĂ©e par des auteurs romantiques des annĂ©es 1830, notamment BartolomĂ© Mitre[135]. Mitre voyait la rĂ©volution de Mai comme une expression emblĂ©matique de l’égalitarisme politique : un conflit entre les libertĂ©s modernes et l’oppression, incarnĂ©e en l’espĂšce par la monarchie espagnole, et la tentative d’établir une organisation nationale s’appuyant sur des principes constitutionnels, par opposition Ă  l'autoritĂ© charismatique des caudillos[136]. La vision de ces auteurs romantiques eut valeur canonique jusqu’à la fin du XIXe siĂšcle, c'est-Ă -dire jusqu’au moment oĂč, encouragĂ©s par la proximitĂ© du centenaire de la RĂ©volution, les auteurs recherchaient des perspectives nouvelles. Ces auteurs divergeaient quant au poids Ă  accorder aux diffĂ©rentes causes de la rĂ©volution de Mai ou quant Ă  savoir de qui l’intervention dans les Ă©vĂ©nements de mai fut la plus dĂ©cisive[137], mais sans que l’on vĂźnt Ă  remettre en question les principales thĂšses de Mitre, Ă  savoir que la RĂ©volution Ă©tait Ă  considĂ©rer comme l’acte de naissance de l’Argentine moderne[138] et comme un Ă©vĂ©nement inĂ©luctable[139]. Ils introduisirent, comme autre Ă©lĂ©ment-clef, l’idĂ©e d’une participation populaire[140]. Dans la premiĂšre moitiĂ© du XXe siĂšcle, des auteurs de tendance libĂ©rale s’évertuĂšrent Ă  Ă©laborer et Ă  faire adopter une vision historique dĂ©finitive et incontestable ; Ricardo Levene et l’Academia Nacional de la Historia, principaux exposants de cette entreprise, reprirent toutefois Ă  leur compte la plupart des perspectives dĂ©veloppĂ©es par Mitre[141]. Les auteurs de gauche, de leur cĂŽtĂ©, mirent en avant leur vision rĂ©visionniste, accentuant les aspects nationalistes et anti-impĂ©rialistes ; ils tendaient Ă  minimiser l’antagonisme entre criollos et pĂ©ninsulaires, et Ă  expliquer les Ă©vĂ©nements sous l’angle d’un conflit entre pensĂ©e des LumiĂšres et absolutisme[142] ; cependant, c’est sur d’autres pĂ©riodes historiques que portait la majeure partie de leurs travaux[143].

La rĂ©volution de Mai ne fut pas le rĂ©sultat des actions d’un seul parti politique, au projet clair et bien dĂ©fini, mais de la convergence de plusieurs secteurs sociaux aux intĂ©rĂȘts variĂ©s. Il s’ensuit une pluralitĂ© de perspectives diffĂ©rentes, parfois contradictoires, selon que les historiens ont privilĂ©giĂ© tel ou tel aspect de l’évĂ©nement[144]. Mitre et le parti des nĂ©gociants se servirent de La RepresentaciĂłn de los Hacendados, opuscule rĂ©digĂ© par Mariano Moreno, pour affirmer que la rĂ©volution de Mai voulait le libre-Ă©change et l'intĂ©gration Ă©conomique avec l’Europe[145]. Les rĂ©visionnistes de droite mettent l’accent sur Saavedra et les coutumes sociales de cette Ă©poque pour dĂ©crire la rĂ©volution dans une optique conservatrice[146] ; et les rĂ©visionnistes de gauche mettent en avant les effigies de Moreno, de Castelli et des agitateurs (chisperos) emmenĂ©s par French et Beruti pour prĂ©senter Mai comme une rĂ©volution radicale[147].

Intentions des révolutionnaires

La rĂ©volution de Mai fit profession de loyautĂ© Ă  Ferdinand VII d’Espagne.

Le gouvernement formĂ© le se dĂ©clara loyal au roi espagnol destituĂ© Ferdinand VII, mais les historiens ne s’accordent pas sur le point de savoir si cette loyautĂ© Ă©tait ou non sincĂšre. Depuis Mitre, beaucoup d’historiens pensent que cette loyautĂ© professĂ©e n’était qu’un leurre politique, destinĂ© Ă  masquer une volontĂ© d’autonomie[148] - [149] - [150]. La PremiĂšre Junte ne jura pas fidĂ©litĂ© au Conseil de RĂ©gence d’Espagne et des Indes, organisme Ă©manant pourtant de la monarchie espagnole et toujours en activitĂ©, tandis que la possibilitĂ© que NapolĂ©on fĂ»t vaincu et que Ferdinand montĂąt Ă  nouveau sur le trĂŽne (ce qui advint finalement le , avec la signature du traitĂ© de Valençay) paraissait alors — en 1810 — Ă©loignĂ©e et improbable[48]. La manƓuvre consistant Ă  prĂ©tendre que l’autoritĂ© monarchique Ă©tait toujours respectĂ©e et qu’aucune rĂ©volution n’avait eu lieu, visait Ă  se donner du temps pour consolider la position de la cause patriotique et Ă  Ă©viter les rĂ©actions qu’une rĂ©volution ouvertement assumĂ©e eĂ»t Ă©tĂ© susceptible de provoquer. Cette ruse est connue sous la dĂ©nomination de Masque de Ferdinand VII, et fut maintenue par la PremiĂšre Junte, par la Grande Junte, puis par les premier et second triumvirats. L’AssemblĂ©e de l'an XIII (Asamblea del Año XIII, 1813), pourtant convoquĂ©e pour proclamer l’indĂ©pendance, s’en abstint en raison de divers conflits politiques entre ses membres. Toutefois, elle dĂ©cida de supprimer la mention de Ferdinand VII dans les documents officiels. Les Directeurs SuprĂȘmes, quant Ă  eux, envisagĂšrent d’autres options, telles que de nĂ©gocier avec l’Espagne ou de se transformer en protectorat britannique, jusqu’à ce qu’intervint enfin la DĂ©claration d’indĂ©pendance de l’Argentine de 1816.

Pour la Grande-Bretagne, le changement de rĂ©gime fut bĂ©nĂ©fique, dans la mesure oĂč les Ă©changes avec les villes du sous-continent furent facilitĂ©s, sans plus ĂȘtre entravĂ©s par le monopole sĂ©culaire que l’Espagne maintenait sur ses colonies[151]. Toutefois, la Grande-Bretagne, pour qui la prioritĂ© Ă©tait alors la guerre en Europe contre la France, devait se garder de donner l’impression de soutenir les mouvements indĂ©pendantistes en AmĂ©rique et avait soin d’éviter que les efforts militaires de l’Espagne eussent Ă  se dĂ©ployer sur deux fronts diffĂ©rents. En consĂ©quence, les Britanniques faisaient pression pour que des revendications d’indĂ©pendance ne fussent pas ouvertement formulĂ©es. Ces pressions Ă©taient exercĂ©es par le biais de Lord Strangford, ambassadeur de Grande-Bretagne Ă  la cour de Rio de Janeiro, qui manifesta son appui Ă  la Junte, mais y mit cependant la condition que «...toujours la conduite de cette Capitale soit consĂ©quente et qu’elle se maintienne sous le nom du Seigneur Ferdinand VII et de ses successeurs lĂ©gitimes. »[152] Plus tard, les conflits entre Buenos Aires, Montevideo et Artigas donnĂšrent lieu, sur le front britannique, Ă  des conflits internes, entre Strangford et le rĂ©gent portugais Jean VI de Portugal[152].

AprĂšs Juan Bautista Alberdi, des historiens ultĂ©rieurs comme Norberto Galasso[153], Luis Romero et JosĂ© Carlos Chiaramonte[154] ont mis en doute l’interprĂ©tation de Mitre, et en ont proposĂ© une autre. Alberdi pensait que « la rĂ©volution argentine (Ă©tait) un chapitre de la rĂ©volution hispano-amĂ©ricaine, qui elle-mĂȘme en est un de l’espagnole, et celle-ci, Ă  son tour, de la rĂ©volution europĂ©enne. »[155] Ils ne la considĂ©raient plus comme un conflit entre indĂ©pendantisme et colonialisme, mais entre idĂ©es libĂ©rales nouvelles et absolutisme. L’intention des rĂ©volutionnaires n’était pas de couper les liens avec l'Espagne, mais de redessiner la relation avec celle-ci. De ce point de vue, la rĂ©volution de Mai serait donc plutĂŽt de la nature d’une guerre civile[156]. Certains Ă©lĂ©ments tendent Ă  accrĂ©diter cette thĂšse, notamment l’inclusion dans la Junte de Larrea, Matheu et Belgrano, et, plus tard, l’apparition de JosĂ© de San MartĂ­n ; Larrea et Matheu en effet Ă©taient Espagnols, Belgrano avait Ă©tudiĂ© pendant de longues annĂ©es en Espagne[157], et San MartĂ­n, enfin, avait passĂ© la majeure partie de sa vie adulte Ă  faire la guerre en Espagne contre les Français[158] : quand il faisait allusion Ă  ses ennemis, il les appelait royalistes ou Goths, jamais Espagnols[159].

Selon ces historiens, la rĂ©volution espagnole contre l’absolutisme vint se greffer sur la guerre d’indĂ©pendance espagnole. Charles IV Ă©tait vu comme un roi au pouvoir absolu, et Ferdinand VII, en regard de son pĂšre, pouvait donner la fausse impression Ă  beaucoup d’Espagnols qu’il sympathisait avec les idĂ©es nouvelles des LumiĂšres[160]. Ainsi, les rĂ©volutions dĂ©clenchĂ©es dans les AmĂ©riques au nom de Ferdinand VII (comme la rĂ©volution de Mai, la RĂ©volution de Chuquisaca, ou la rĂ©volution chilienne) auraient-elles, selon cette thĂ©orie, visĂ© Ă  remplacer le pouvoir absolu par un rĂ©gime inspirĂ© des idĂ©es nouvelles. Bien que l’Espagne fĂ»t en guerre avec la France, les idĂ©aux de la RĂ©volution française, tels que condensĂ©s dans sa devise, Ă©taient nĂ©anmoins tenus en honneur par les progressistes espagnols[161]. Ces rĂ©volutions, quoique se proclamant elles-mĂȘmes ennemies de NapolĂ©on, n’eurent Ă  affronter de la part des Français aucune attaque militaire active ; elles donnĂšrent lieu au contraire Ă  des affrontements entre combattants espagnols pour le maintien de l’ordre ancien ou pour l’avĂšnement d’un ordre nouveau. Cette situation devait changer avec la dĂ©faite dĂ©finitive de NapolĂ©on et le retour sur le trĂŽne de Ferdinand VII, celui-ci s’employant en effet Ă  restaurer l’absolutisme et Ă  persĂ©cuter en Espagne les tenants des nouvelles idĂ©es libĂ©rales. Pour la population d'AmĂ©rique du Sud, continuer de faire partie de l’Empire espagnol, fĂ»t-ce dans une relation nouvelle avec la mĂ©tropole, avait cessĂ© d’ĂȘtre une option envisageable : les seules possibilitĂ©s qui s’offraient dĂ©sormais Ă©taient soit le retour Ă  l’absolutisme, soit l’indĂ©pendance[162].

Postérité

La pyramide de Mai, monument commémoratif se dressant sur la place de Mai à Buenos Aires.

Le , date de la constitution du premier gouvernement patriote, est commĂ©morĂ© chaque annĂ©e comme un Ă©vĂ©nement patriotique en Argentine, avec le statut de fĂȘte nationale, reconnu par la loi 21.329. Il s’agit d’un jour fĂ©riĂ© inamovible, c'est-Ă -dire tombant toujours exactement le , indĂ©pendamment du jour de la semaine[163].

Si la date du fut proclamĂ©e date patriotique en 1813, la dĂ©claration d’indĂ©pendance de l’Argentine, survenue le , a fourni une fĂȘte nationale alternative. Durant la guerre civile argentine, le choix de la fĂȘte nationale opposait Buenos Aires et les provinces, la date du renvoyant en effet Ă  Buenos Aires et celle du se rapportant au pays dans son ensemble[164]. Ainsi Bernardino Rivadavia, appartenant au parti unitaire, supprima-t-il la cĂ©lĂ©bration du , tandis que le fĂ©dĂ©raliste Juan Manuel de Rosas la rĂ©institua, sans pour autant renoncer au . En 1880, avec la fĂ©dĂ©ralisation de Buenos Aires, la connotation locale disparut et la rĂ©volution de Mai prit la signification de naissance de la nation argentine[164].

Hommages et commémorations

Le centenaire et le bicentenaire de la rĂ©volution de Mai furent cĂ©lĂ©brĂ©s respectivement en 1910 et 2010. Pour honorer l’évĂ©nement, le nom, la date, de mĂȘme qu’une image gĂ©nĂ©rique du Cabildo de Buenos Aires, ont Ă©tĂ©, sous diverses variantes, mis Ă  contribution. Les cas les plus notoires sont l’avenue de Mai (en espagnol Avenida de Mayo) et la place de Mai (Plaza de Mayo) Ă  Buenos Aires, toutes deux Ă  proximitĂ© du Cabildo. Une pyramide de Mai (PirĂĄmide de Mayo) fut Ă©rigĂ©e sur cette derniĂšre un an aprĂšs la rĂ©volution, et reconstruite en sa forme actuelle en 1856. Plusieurs villes, subdivisions administratives, lieux publics et entitĂ©s gĂ©ographiques en Argentine ont Ă©tĂ© baptisĂ©s Veinticinco de Mayo (Vingt-cinq mai). Des dĂ©partements portant ce nom se rencontrent dans les provinces de Chaco, Misiones, San Juan, RĂ­o Negro et Buenos Aires, cette derniĂšre comprenant par ailleurs une ville dĂ©nommĂ©e Veinticinco de Mayo. Les villes de Rosario (Santa Fe), JunĂ­n (Buenos Aires) et de Resistencia (Chaco) possĂšdent une place de ce nom. L’Île du Roi-George, objet de revendications de souverainetĂ© de la part de l’Argentine, de la Grande-Bretagne et du Chili, en tant que partie intĂ©grante resp. de l’Antarctique argentine, du Territoire antarctique britannique et du Territoire antarctique chilien, est nommĂ©e par l’Argentine Isla 25 de Mayo[165].

Les piĂšces de monnaie de 25 centavos portent l'effigie commĂ©morative du Cabildo[166], et celles de 5 centavos sont ornĂ©es d’une reprĂ©sentation du Soleil de Mai (Sol de Mayo)[167]. Une image du Cabildo, sous l’aspect qu’il prĂ©sentait pendant la RĂ©volution, se trouvait reproduite sur l’envers des billets de 5 pesos de l’ancien Peso Moneda Nacional.

La révolution de Mai dans la culture argentine

En raison du statut de date patriote du , la rĂ©volution de Mai fait chaque annĂ©e en Argentine l’objet de nombreux articles dans des revues de jeunesse, p.ex. dans Billiken, ainsi que d’évocations dans les manuels scolaires de l’enseignement primaire. Ces publications ont tendance Ă  omettre certains aspects de l’évĂ©nement historique qui, par leur violence ou portĂ©e politique, pourraient sembler inappropriĂ©s aux mineurs d’ñge, aspects tels que le taux Ă©levĂ© de dĂ©tention d’armes de la population Ă  cette Ă©poque (sĂ©quelle des prĂ©paratifs contre la deuxiĂšme invasion anglaise) ou que la lutte des classes entre criollos et Espagnols pĂ©ninsulaires. La rĂ©volution est au contraire dĂ©peinte comme un Ă©vĂ©nement exempt de violence, destinĂ© Ă  survenir inĂ©vitablement d’une maniĂšre ou d’une autre, et l’accent est mis sur des aspects secondaires, tels que le temps qu’il faisait ce , s’il pleuvait ou non, ou si l’usage de parapluies Ă©tait largement rĂ©pandu ou limitĂ© Ă  une minoritĂ©[168].

Le prĂ©sident Arturo Frondizi lors d’une manifestation pour le 150e anniversaire de la rĂ©volution de Mai.

Le centenaire de la RĂ©volution fit naĂźtre un grand nombre d’Ɠuvres d'art ayant l’évĂ©nement pour sujet et de reprĂ©sentations imagĂ©es de celui-ci. Le peintre chilien Pedro Subercaseaux rĂ©alisa, sur sollicitation d'Adolfo Carranza, de nombreux tableaux sur le sujet, notamment le Cabildo ouvert du 22 mai 1810, Mariano Moreno Ă©crivant Ă  sa table de travail, l’Embrassade de MaipĂș entre San MartĂ­n et Bernardo O'Higgins, et la PremiĂšre ExĂ©cution de l’hymne national argentin le . Beaucoup de ces Ɠuvres devaient plus tard s'Ă©lever au rang d'images canoniques[169]. Le centenaire est Ă©galement Ă  l’origine d’un prĂ©coce film muet intitulĂ© La RevoluciĂłn de Mayo, tournĂ© en 1909 par Mario Gallo, et dont la premiĂšre eut lieu en 1910. Ce film fut le premier film de fiction argentin rĂ©alisĂ© avec des acteurs professionnels[170].

Parmi les chansons inspirées des événements de Mai, sont à signaler en particulier : le Candombe de 1810 ; El Sol del 25, sur des paroles de Domingo Lombardi et James Rocca, interprété par le chanteur de tangos Carlos Gardel ; Salve Patria, d'Eugenio Cårdenas et de Guillermo Barbieri ; Gavota de Mayo, composé par Peter Berruti, sur une musique folklorique.

Le roman d'AndrĂ©s Rivera (en), La RevoluciĂłn es un Sueño Eterno (litt. la RĂ©volution est un songe Ă©ternel), paru en 1987, apporte, par le biais de la fiction littĂ©raire, une analyse particuliĂšre de la rĂ©volution de Mai. Le rĂ©cit est constituĂ© des carnets imaginaires de Juan JosĂ© Castelli, qui fut jugĂ© pour sa conduite dans la dĂ©sastreuse premiĂšre campagne du Haut-PĂ©rou. À travers le compte rendu imaginaire fait par un Castelli mortellement malade, Rivera critique l’histoire officielle et la nature de la RĂ©volution[171].

Le bicentenaire de 2010 fut moins fĂ©cond en Ɠuvres traitant de la rĂ©volution que ne l’avait Ă©tĂ© le centenaire. Il parut toutefois un grand nombre d’ouvrages touchant de prĂšs Ă  l’évĂ©nement, tels que 1810 de Felipe Pigna, Enigmas de la historia argentina de Diego Valenzuela, Hombres de Mayo de Ricardo de Titto, et Historias de corceles y de acero de Daniel Balmaceda[172].

Références

  1. Moses, p. 36-37
  2. Moses, p. 35.
  3. Abad de SantillĂĄn, p. 387. espagnol : Francisco SuĂĄrez sostenĂ­a que el poder, la autoridad, no pasa de Dios al gobernante, sino por intermedio del pueblo [...]; si esos gobernantes no cumplen su funciĂłn de gerentes del bien comĂșn se transforman en tiranos, los pueblos tienen derecho a resistir la opresiĂłn. [...] ProponĂ­a, pues, la doctrina del origen democrĂĄtico del poder
    français : Francisco SuĂĄrez soutenait que le pouvoir, l’autoritĂ©, ne passe pas de Dieu au gouvernant, si ce n’est par l’intermĂ©diaire du peuple [...] ; si ces gouvernants ne remplissent pas leur fonction de gĂ©rants du bien commun, ils se transforment en tyrans, et le peuple a le droit de rĂ©sister Ă  leur oppression. [...] Il proposait donc la doctrine de l’origine dĂ©mocratique du pouvoir.
  4. Brownson, p. 86.
  5. Moses, p. 29
  6. Moses, p. 34.
  7. Mantoux, p. 25.
  8. Heckscher, p. 243.
  9. Kaufmann, p. 8.
  10. Fremont-Barnes, p. 29.
  11. Shumway, p. 19.
  12. Luna, Independencia..., p. 28. espagnol : España habĂ­a demostrado que econĂłmicamente no podĂ­a ejercer el papel de una metrĂłpoli porque no tenĂ­a capacidad para abastecer a sus dominios de las mercaderĂ­as necesarias ni podĂ­a absorber los productos primarios que aquĂ©llos producĂ­an: sĂłlo una forzada polĂ­tica comercial lograba mantener la hegemonĂ­a de los comerciantes de CĂĄdiz. français : L’Espagne avait dĂ©montrĂ© qu’elle n’était pas en mesure Ă©conomiquement de jouer le rĂŽle de mĂ©tropole, car elle n’avait les capacitĂ©s ni d’approvisionner ses possessions en marchandises nĂ©cessaires, ni d’absorber les matiĂšres premiĂšres que celles-ci produisaient : seule une politique commerciale contraignante rĂ©ussissait Ă  maintenir l’hĂ©gĂ©monie des marchands de Cadix.
  13. Shumway, p. 8-9
  14. Abad de SantillĂĄn, p. 391. espagnol : Los ingleses tuvieron en las colonias españolas, a pesar del monopolio comercial metropoletano, fuertes intereses: el comercio ilĂ­cito se aproximaba en su monto casi al valor del autorizado por España; el contrabando se convirtiĂł en un medio importante de vida para los propios colonos y tambiĂ©n para los gobernantes encargados de reprimirlo. français : Les Anglais avaient dans les colonies espagnoles, en dĂ©pit du monopole commercial mĂ©tropolitain, des intĂ©rĂȘts importants : le commerce illicite avait un montant total proche de la valeur de celui autorisĂ© par l’Espagne ; la contrebande devint un important moyen de subsistance pour les colons eux-mĂȘmes, et aussi pour les gouvernants chargĂ©s de la rĂ©primer.
  15. Shumway, p. 15.
  16. Shumway, p. 3.
  17. Abad de SantillĂĄn, p. 391. espagnol : ...la apariciĂłn de un sector criollo que aguantaba el predominio de los españoles nativos en las funciones pĂșblicas, sentimiento que se extendĂ­a tambiĂ©n al bajo clero. français : ...l’apparition d’une fraction criollo de la population, qui endurait la prĂ©dominance des Espagnols de naissance dans la fonction publique, sentiment qui s’étendait aussi au bas clergĂ©.
  18. Moses, p. 4.
  19. Shumway, p. 17.
  20. Abad de SantillĂĄn, p. 376. espagnol : El blanco estaba obligado a servir en la milicia personalmente, [...] eran los Ășnicos que podĂ­an llevar armas y hacer uso de ellas; el privilegio fue superado en los momentos de gran apremio en que era preciso contar con mayores contingentes para la defensa
    français : Le blanc Ă©tait obligĂ© de servir dans la milice personnellement, (
) ils Ă©taient les seuls Ă  pouvoir porter une arme et Ă  en faire usage ; le privilĂšge fut levĂ© dans les moments de grande urgence, oĂč il Ă©tait nĂ©cessaire de prĂ©voir des contingents plus importants pour la dĂ©fense.
  21. Luna, Independencia..., p. 28. espagnol : El pacto con España estaba gravemente vulnerado en el Río de la Plata a partir de las Invasiones Inglesas: la metrópoli no había podido defender a sus colonias del ataque externo y habían sido los habitantes de Buenos Aires y de la Banda Oriental los que rechazaron el intento britånico.
    français : Le pacte avec l’Espagne se trouvait gravement entamĂ© dans le RĂ­o de la Plata depuis les invasions anglaises : la mĂ©tropole n’avait pas Ă©tĂ© en mesure de dĂ©fendre ses colonies contre l’attaque extĂ©rieure, et c’étaient les habitants de Buenos Aires et de la bande Orientale qui repoussĂšrent la tentative britannique.
  22. Luna, Independencia..., p. 20. espagnol : Para unos, la soluciĂłn de aceptar a Carlota Joaquina como heredera de Carlos IV era una aceptable fĂłrmula de transiciĂłn hacia una independencia ordenada. Para otros, una simple fachada que era conveniente usar hasta tanto madurasen las condiciones para una ruptura con España. Aunque tambiĂ©n se pensaba que proporcionaba los elementos para preservar la fidelidad al rey cautivo. Pour les uns, la solution d’accepter Charlotte Joachime comme hĂ©ritiĂšre de Charles IV Ă©tait une formule de transition acceptable en vue d’une indĂ©pendance ordonnĂ©e. Pour d’autres, c’était une simple façade qu’il Ă©tait commode d’utiliser jusqu’à ce que les conditions eussent suffisamment mĂ»ri pour permettre une rupture avec l’Espagne. Cependant, l’idĂ©e existait Ă©galement que cela constituait le moyen de prĂ©server la fidĂ©litĂ© au roi captif.
  23. Luna, Independencia..., p. 20. espagnol : El carlotismo estaba pues cargado de ambigĂŒedades y equĂ­vocos, los que, a la larga, terminaron por debilitarlo como proyecto alternativo. Se sospechaba que tras su formulaciĂłn se ocultaban apenas el brazo expansionista de Portugal o las apetencias britĂĄnicas. Le charlottisme en effet Ă©tait chargĂ© d’ambiguĂŻtĂ©s et de malentendus, qui Ă  la longue finirent par l’affaiblir en tant que projet politique de rechange. L’on suspectait que derriĂšre cette proposition se cachait difficilement le bras expansionniste du Portugal ou les appĂ©tences britanniques.
  24. Kaufmann, p. 58.
  25. Félix Luna, Breve historia de los argentinos, Planeta Argentina, , 272 p., « La etapa colonial / Las Invasiones Inglesas »
  26. Luna, Breve..., p. 52. espagnol : Sobremonte, en efecto aparece como un timorato a los ojos de los porteños por acatar instrucciones que databan de la Ă©poca de Cevallos, segĂșn las cuales, si habĂ­a un ataque exterior, el primer deber del virrey era asegurar los fondos reales y el dinero de los particulares y escapar, poniĂ©ndolos a buen recaudo. Lo hizo, y quedĂł ante la historia como un cobarde
    français : Sobremonte en effet apparaĂźt aux yeux des PortĂšgnes comme un timorĂ© pour s’ĂȘtre tenu Ă  des instructions datant de l’époque de Cevallos, aux termes desquelles le premier devoir du vice-roi Ă©tait, si une attaque Ă©trangĂšre survenait, de mettre en sĂ»retĂ© les fonds royaux et les avoirs privĂ©s et de s’échapper, en ayant soin de les mettre Ă  l’abri. C’est ce qu’il fit, et resta marquĂ© de poltron devant l’histoire.
  27. Luna, Breve..., p. 52. espagnol : Este es un precedente fundamental: el pueblo de Buenos Aires derroca al virrey, algo nunca visto en el imperio español.
    français : C’était un prĂ©cĂ©dent fondamental : le peuple de Buenos Aires renverse le vice-roi, chose jamais vue dans l’empire espagnol.
  28. Luna, ...Santiago de Liniers, p. 120 espagnol : Pronto llegaron los reconocimientos: en primer lugar el del Rey Carlos IV. Liniers obtuvo el ascenso a brigadier, [...] y finalmente el cargo efectivo de virrey. Les reconnaissances arrivĂšrent promptement : en premier lieu, celle du roi Charles IV. Liniers fut promu brigadier, [...] et obtint finalement la charge effective de vice-roi.
  29. Luna, ...Santiago de Liniers, p. 128. espagnol : En esto tuvieron mucha responsabilidad los miembros del sector español monopolista, del que Álzaga formaba parte. Ese grupo tenía también mucha fuerza en Montevideo, pues sus miembros pugnaban, desde hacía tiempo, por desembarazarse de la tutela de Buenos Aires. Poco les costó poner a Elío de su parte.
    français : Au sein de celui-ci, les membres de la faction espagnole monopoliste, dont faisait partie Álzaga, avaient beaucoup de responsabilitĂ©. Ce groupe Ă©tait puissant Ă©galement Ă  Montevideo, ses membres cherchant en effet depuis un certain temps Ă  s’affranchir de la tutelle de Buenos Aires. Il leur en avait coĂ»tĂ© peu de mettre ElĂ­o de leur cĂŽtĂ©.
  30. Javier de Elío, cité par Mitre, p. 251-252. espagnol : "La Junta se erige con el laudable, católico y religioso designio de conservar incólumnes e intactos los derechos del rey natural don Fernando VII [...] y que serå al fin una Junta que obrarå en todo con acuerdo de la capital"
    français : « La Junte est constituĂ©e avec le louable, catholique et religieux dessein de garder intacts et indemnes les droits du roi naturel don Ferdinand VII [...] et qu’elle sera finalement une Junte qui Ɠuvrera en tout avec l’accord de la capitale ».
  31. Luna, ...Juan JosĂ© Castelli, p. 55.espagnol : Algunos criollos, como Mariano Moreno, depositan su esperanza en la asonada alzaguista. Pero el "partido de la independencia" considera que, en la disyuntiva entre Álzaga y Liniers, el mĂĄs peligroso para sus planes es el jefe del Cabildo. français : Quelques criollos, comme Mariano Moreno, placent leur espoir dans l'Ă©meute alzaguiste. Mais le parti de l’indĂ©pendance considĂšre que dans l’alternative entre Álzaga et Liniers, le plus dangereux pour leurs projets est le chef du cabildo.
  32. Luna, ...Juan JosĂ© Castelli, p. 55. espagnol : No es una contradicciĂłn: la independencia que busca Álzaga es la de los ricos peninsulares, para perpetuar su dominio en Buenos Aires. français : Ce n’est pas une contradiction : l’indĂ©pendance que recherche Álzaga est celle des riches pĂ©ninsulaires, pour perpĂ©tuer leur domination Ă  Buenos Aires.
  33. Pigna, p. 221. espagnol : Los dirigentes de esta "asonada", como se la llamĂł y como pasĂł a la historia, entre ellos el propio Álzaga, fueron detenidos y enviados a la zona de lo que hoy es Carmen de Patagones. Poco despuĂ©s fueron rescatados por ElĂ­o y llevados a Montevideo. français : Les dirigeants de cette asonada, comme on l’appela et comme elle passa Ă  l’histoire, et parmi eux Álzaga lui-mĂȘme, furent dĂ©tenus et envoyĂ©s Ă  Carmen de Patagones. Peu aprĂšs, ils furent dĂ©livrĂ©s par ElĂ­o et emmenĂ©s Ă  Montevideo.
  34. Belgrano, p. 65. espagnol : Entonces aspiré a inspirar la idea å Liniers de que no debía entregar el mando, por no ser autoridad legítima la que lo despojaba.
    français : Je m’appliquais alors Ă  insuffler Ă  Liniers l’idĂ©e qu’il ne devait pas se dessaisir du commandement, attendu que l'autoritĂ© qui l’en dĂ©pouillait n’en Ă©tait pas une lĂ©gitime.
  35. Belgrano, p. 65. espagnol : los ĂĄnimos de los militares estaban adheridos ĂĄ esta opiniĂłn.
    français : L'état d'esprit des militaires était proche de cette opinion.
  36. Pigna, p. 224.espagnol : En la Banda Oriental, ElĂ­o disolviĂł la Junta de Montevideo y aceptĂł la autoridad del nuevo virrey, que volviĂł a armar a las milicias españolas y decretĂł una amnistĂ­a que dejĂł en libertad a los que habĂ­an conspirado contra Liniers. français : Dans la bande Orientale, ElĂ­o dĂ©cida de dissoudre la Junte de Montevideo et accepta l’autoritĂ© du nouveau vice-roi, qui rĂ©arma les milices espagnoles et dĂ©crĂ©ta une amnistie qui remit en libertĂ© ceux qui avaient conspirĂ© contre Liniers.
  37. Scenna, p. 24. espagnol : Permitió [Cisneros] que Martín de Álzaga regresara a Buenos Aires con una suave prisión domiciliaria, mås teórica que real
    français : (Cisneros) permit à Martín de Álzaga de retourner à Buenos Aires avec une douce peine de résidence surveillée, plus théorique que réelle.
  38. Abad de Santillån, p. 398. espagnol : Después de algunos hechos de violencia, el presidente García Pizarro renunció al cargo el 25 de mayo de 1809 y el mando fue asumido por la Audiencia, que nombró comandante general de armas al teniente coronel Juan Antonio Álvarez de Arenales
    français : AprĂšs quelques faits violents, le prĂ©sident GarcĂ­a Pizarro dĂ©missionna le 25 mai 1809, et le commandement fut assumĂ© par l’Audiencia, laquelle nomma commandant gĂ©nĂ©ral des armes le lieutenant-colonel Juan Antonio Álvarez de Arenales.
  39. Abad de SantillĂĄn, p. 398. espagnol : Un movimiento insurreccional [...] se produjo el 16 de julio, bajo la direcciĂłn de Pedro Domingo Murillo y de Juan Pedro Idaburu. Los rebeldes impusieron la renuncia del gobernador y del obispo y constituyeron una junta con carĂĄcter de cuerpo consultativo.
    français : Un mouvement insurrectionnel [...] se produisit le 16 juillet, sous la direction de Pedro Domingo Murillo et de Juan Pedro Idaburu. Les rebelles contraignirent le gouverneur et l’évĂȘque Ă  dĂ©missionner, et constituĂšrent une junte Ă  caractĂšre de corps consultatif.
  40. Abad de SantillĂĄn, p. 398. espagnol : El mariscal Vicente Nieto fue designado por Liniers para pacificar a Chuquisaca; cuando llegĂł a la villa rebelde con 900 o 1000 hombres, la hallĂł tranquila y dispuesta a someterse; la junta revolucionaria quedĂł disuelta y se constituyĂł una nueva audiencia.
    français : Le marĂ©chal Vicente Nieto fut dĂ©signĂ© par Liniers pour pacifier Chuquisaca ; lorsqu’il arriva Ă  la citĂ© rebelle avec 900 ou 1 000 hommes, il la trouva tranquille et disposĂ©e Ă  se soumettre ; la junte rĂ©volutionnaire resta dissoute et une nouvelle Audiencia fut constituĂ©e.
  41. Abad de Santillån, p. 398. espagnol : En total la columna punitiva sumaba 5000 hombres, frente a los cuales los paceños sólo podían disponer de ochocientos fusiles y once piezas de artillería
    français : La colonne punitive comptait au total 5 000 hommes, face auxquels les PacĂšgnes disposaient de seulement 800 fusils et de onze piĂšces d’artillerie.
  42. Mitre, p. 286. espagnol : Los que sobrevivieron a la derrota fueron condenados a muerte por el inhumano Goyeneche, quien sin sujetarse a ninguna forma de juicio hizo ahorcar a nueve de ellos, mandando clavar de firme sus miembros ensangrentados en las columnas militarias, que en aquel paĂ­s sirven de guĂ­a al caminante.
    français : Ceux qui survĂ©curent Ă  la dĂ©faite furent condamnĂ©s Ă  mort par l’inhumain Goyeneche, qui, ne voulant accorder aucune forme de jugement, fit pendre neuf d'entre eux, et ordonna d'attacher leurs corps ensanglantĂ©s aux colonnes militaires, lesquelles en ce pays servent de points de repĂšre aux voyageurs.
  43. Mitre, p. 287-288. espagnol : Esta aprobaciĂłn de las matanzas de La Paz contribuyĂł a hacer mĂĄs odioso el nombre de Cisneros entre los americanos, [...] que castigaba con el destierro y el suplicio en una parte, el mismo hecho que habĂ­a alentado y premiado en Montevideo, sĂłlo porque unos eran americanos y otros eran españoles. français : Cette approbation des tueries de La Paz contribua Ă  rendre plus odieux le nom de Cisneros chez les AmĂ©ricains, [...] (Cisneros en effet) chĂątiait par l’exil et le supplice d’une part, tandis que d’autre part le mĂȘme acte Ă©tait encouragĂ© et rĂ©compensĂ© Ă  Montevideo, cela seulement parce que les uns Ă©taient AmĂ©ricains et les autres Espagnols.
  44. (es) Pacho O'Donnell, « El Silogismo de Charcas », Editorial Sudamericana (consulté le )
  45. Pigna, p. 227. espagnol : Ante la posibilidad de que estos sucesos se repitieran, [...] el virrey decidió crear un Juzgado de Vigilancia Política [...]. français : Devant la possibilité de ce que de tels événements se répétassent, [...] le vice-roi décida de créer une Cour de Surveillance politique [...].
  46. Scenna, p. 26. espagnol : En esa lista, dada por el mismo Romero a la posteridad, figuran Saavedra, Paso, Chiclana, Vieytes, Balcarce, Castelli, Larrea, Guido, Viamonte, Moreno, el presbĂ­tero SĂĄenz, el canĂłnigo Belgrano y otros que no identifica.
    français : Dans cette liste, donnĂ©e par Romero lui-mĂȘme Ă  la postĂ©ritĂ©, figurent Saavedra, Paso, Chiclana, Vieytes, Balcarce, Castelli, Juan Larrea, Guido, Viamonte, Moreno, le prĂȘtre SĂĄenz, le chanoine Belgrano et d’autres qu’il n’identifie pas.
  47. Saavedra, p. 59. espagnol : No es tiempo, dejen ustedes que las brevas maduren y entonces las comeremos.
  48. Cornelio Saavedra, Memoria autĂłgrafa, Buenos Aires, Editorial del Nuevo Extremo, , 59 p. (ISBN 978-987-609-171-8)
    « espagnol : A la verdad, quiĂ©n era en aquel tiempo el que no juzgase que NapoleĂłn triunfarĂ­a y realizarĂ­a sus planes con la España? Esto era lo que yo esperaba muy en breve, la oportunidad o tiempo que creĂ­a conveniente para dar el grito de libertad en estas partes. Esta era la breva que decĂ­a era Ăștil esperar que madurase. »
    français : En vĂ©ritĂ©, quel Ă©tait en ce temps-lĂ  celui qui ne considĂ©rait pas que NapolĂ©on triompherait et rĂ©aliserait ses projets pour l’Espagne ? C’est ce Ă  quoi moi-mĂȘme je m’attendais Ă  trĂšs brĂšve Ă©chĂ©ance, l’occasion ou le moment que je croyais propice Ă  donner le cri de la libertĂ© dans ces rĂ©gions. VoilĂ  la figue dont je disais qu’il Ă©tait utile d’attendre qu’elle mĂ»rĂźt.
  49. (es) « Semana de Mayo », Ministerio de Educación de la Nación, Subsecretaría de Coordinación Administrativa, (consulté le )
  50. Galasso, "El pueblo...", p. 43. espagnol : ...es necesario enarbolar alto las banderas, puesto que un doble peligro acecha: la imposición del poder francés y la restauración del absolutismo español.
    français : ...il est nĂ©cessaire d’arborer haut les drapeaux, vu qu’un pĂ©ril double guette : l’imposition du pouvoir français et la restauration de l’absolutisme espagnol.
  51. Pigna, p. 228.espagnol : En un principio, el virrey tratĂł de ocultar las novedades incautĂĄndose de todos los periĂłdicos que traĂ­a el barco. Pero, segĂșn cuenta Mario Belgrano, uno de ellos llegĂł a manos de Belgrano y Castelli, que se encargaron de difundir la noticia. français : Au dĂ©but, le vice-roi essaya d’occulter les nouvelles en confisquant tous les journaux que transportait le navire. Mais, ainsi que le relate Mario Belgrano, un de ceux-ci vint entre les mains de Belgrano et de Castelli, qui se chargĂšrent de diffuser la nouvelle.
  52. Saavedra, p. 60. espagnol : ...Entonces me pusieron en las manos la proclama de aquel dĂ­a. Luego que la leĂ­, les dije: "Señores, ahora digo que no sĂłlo es tiempo, sino que no se debe perder una sola hora". français : ...Alors ils me remirent en mains la proclamation de ce jour-lĂ . AprĂšs l’avoir lue, je leur dis : « Messieurs, je dis maintenant que non seulement il est temps, mais qu’il n’y a pas une seule heure Ă  perdre ».
  53. Luna, ...Juan José Castelli, p. 70. espagnol : Castelli y Saavedra, los jefes mås notorios de esos días, desecharon el plan de Martín Rodríguez para derrocar a Cisneros por la fuerza. français : Castelli et Saavedra, les chefs les plus notables de ces journées, repoussÚrent le projet de Martín Rodríguez visant à renverser Cisneros par la force.
  54. (Anonyme) LĂłpez, p. 31 espagnol : Con esto todo se ha puesto en alboroto, la gente se concentra en los cuarteles, las calles estĂĄn solas, pero la plaza estĂĄ llena, y todas las tiendas y bandolas emparejadas, porque como tĂș sabes, son casi todas de godos.
    français : Avec cela, tout est pris de frénésie, les gens se concentrent dans les casernes, les rues sont désertées, mais la Plaza est remplie, et tous les magasins et toutes les échoppes sont fermés, parce que, comme tu le sais, ils sont presque tous des goths (Espagnols péninsulaires, NdT).
  55. (Anonyme) LĂłpez, p. 31 espagnol : TĂș sabes que no tiene empacho ni vergĂŒenza para nada; pero tiene muchĂ­simo talento, y es un patriota a macho: ÂĄfigĂșrate que sostuvo que debĂ­amos ahorcar al sordo en media plaza por los asesinatos de La Paz!
    français : Tu sais bien, toi, qu’il n’a ni pudeur, ni scrupule en rien ; mais il a un trùs grand talent, et c’est un vaillant patriote : figure-toi qu’il a soutenu que nous devions pendre le sourd au milieu de la Plaza pour les assassinats de La Paz !
  56. (Anonymous) LĂłpez, p. 39 espagnol : En las pulperĂ­as se notan muchas reuniones, y se arman pleitos a cada momento entre criollos y maturrangos, de los que resaltan bastante heridos a cuchillo porque a nadie se le deja sacar fusil o sable de los cuarteles.
    français : On remarque de nombreuses rĂ©unions dans les Ă©piceries, et des disputes surgissent Ă  tout moment entre criollos et pĂ©ninsulaires, d’oĂč sortent pas mal de blessĂ©s au couteau, puisqu’on ne laisse personne prendre des fusils ou des sabres dans les casernes.
  57. Abad de SantillĂĄn, p. 404. espagnol : No menciona la sustituciĂłn de la Junta de Sevilla por el Consejo de Regencia, aunque estaba ya en su conocimiento.
    français : Il ne mentionne pas la substitution du Conseil de Régence à la Junte de Séville, alors que cela était déjà en sa connaissance.
  58. (Anonyme) López, p. 31. espagnol : Dice que en sus manos estå segura la patria, y que se va a poner de acuerdo con Abascal, con Sanz y con Nieto para formar un gobierno que represente aquí a Fernando VII. ¥Qué badulaque!
    français : Il dit qu’entre ses mains la patrie est en sĂ»retĂ©, et qu’il va se mettre d’accord avec Abascal, Sanz et Nieto pour former un gouvernement qui reprĂ©sente ici Ferdinand VII. Quelle chiffe !
  59. (es) Felipe Pigna, Los mitos de la historia argentina, Argentina, Grupo editorial Norma, , 26e éd., 229 p. (ISBN 978-987-545-149-0 et 987-545-149-5), « La Revolución de Mayo »
  60. (Anonyme) LĂłpez, p. 31.espagnol : Al momento se fueron a ver al Alcalde Lezica y le exigieron un Cabildo Abierto, amenazĂĄndole de que si no se cita al vecindario acudirĂĄn todos a la Plaza Mayor con las tropas y con el pueblo para deponer al virrey, y nombrar un gobierno de patriotas.
    français : AussitĂŽt ils s’en furent voir le maire Lezica et exigĂšrent de lui un cabildo ouvert, menaçant, au cas oĂč les citoyens n’étaient pas convoquĂ©s, de se rendre tous Ă  la Plaza Mayor avec les troupes et avec le peuple pour dĂ©poser le vice-roi et nommer un gouvernement de patriotes.
  61. (Saavedra) López, p. 44. espagnol : La cosa es tan seria, señor alcalde, que yo mismo estoy ya sindicado de traidor porque contengo a los paisanos, aconsejåndoles moderación hasta que ustedes llamen al pueblo por los resortes legítimos. Si ustedes no me ayudan, y si para el lunes 21 no se convoca al pueblo, no me queda mås remedio que ponerme a su cabeza, y ¥qué sé yo lo que vendrå! Ustedes serån los responsables de lo que suceda.
    français : La chose est si sĂ©rieuse, monsieur le Maire, que mĂȘme moi je suis taxĂ© de trahison parce que je contiens les concitoyens, leur conseillant la modĂ©ration jusqu’à ce que vous convoquiez le peuple par les voies lĂ©gales. Si vous ne m’aidez point, et si lundi 21 le peuple n’a pas Ă©tĂ© convoquĂ©, je n’aurai d’autre ressource que de me mettre Ă  sa tĂȘte, et je ne sais ce qui alors adviendrait ! Vous seriez responsable de ce qui se passerait.
  62. (Arzac) LĂłpez, p. 32. espagnol : Que quiso, o que no quiso, Lezica vio que la cosa iba muy seria; y rogĂł que le dieran tiempo para conferenciar con el virrey y para reducirlo a prestar su consentimiento al Cabildo Abierto; haciendo presente a nuestros amigos que de otro modo el caso serĂ­a ya de una rebeliĂłn manifiesta y que eso lo debĂ­amos dejar para el Ășltimo extremo.
    français : Qu’il le voulĂ»t ou non, Lezica vit que les choses devenaient trĂšs sĂ©rieuses, et demanda qu'on lui accordĂąt quelque temps pour se concerter avec le vice-roi et le conduire Ă  donner son consentement au cabildo ouvert ; il reprĂ©senta Ă  mes amis que sans cela il s’agirait d’un cas de rĂ©bellion manifeste, ce Ă  quoi nous ne devions avoir recours qu’en toute derniĂšre extrĂ©mitĂ©.
  63. (Belgrano) LĂłpez, p. 44–45. espagnol : Y dĂ­gale usted de nuestra parte que si el lunes no hay Cabildo Abierto, obraremos de nuestra cuenta; sin consideraciĂłn a nadie, porque esto no admite vacilaciones ni tĂ©rminos medios: el pueblo quiere ser soberano y libre.
    français : Et dites-lui de notre part que s'il n’y a pas de cabildo ouvert d’ici lundi, nous agirons par nous-mĂȘmes ; sans Ă©gard Ă  personne, car ceci n’admet pas de tergiversations ni de moyens termes : le peuple veut ĂȘtre souverain et libre.
  64. Galasso, p. 49. espagnol : Leiva, por su parte, se convierte en amigo de los revolucionarios [...] mientras también aparece como amigo y consejero ante el virrey.
    français : Leiva, pour sa part, se convertit en ami des rĂ©volutionnaires [...] tandis qu’en mĂȘme temps, il apparaĂźt aussi comme ami et conseiller du vice-roi.
  65. (Arzac) LĂłpez, p. 45. espagnol : Se convino que Terrada con J. R. Balcarce, Bustos y DĂ­az VĂ©lez, tomasen el mando de los granaderos que daban guardia en el Fuerte; que se apoderasen de todas las llaves de las entradas, mientras los demĂĄs subĂ­an a los salones del virrey.
    français : Il fut convenu que Terrada, avec J. R. Balcarce, Bustos et DĂ­az VĂ©lez prissent le commandement des grenadiers tenant la garde du fort, et qu’ils s’emparassent de toutes les clefs des entrĂ©es, pendant que les autres monteraient aux salons du vice-roi.
  66. Saavedra, p. 61-62.espagnol : Señor, son muy diversas las Ă©pocas del 1Âș de enero de 1809 y la de mayo de 1810, en que nos hallamos. En aquella existĂ­a la España, aunque ya invadida por NapoleĂłn; en Ă©sta, toda ella, todas sus provincias y plazas estĂĄn subyugadas por aquel conquistador, excepto solo CĂĄdiz y la isla de LeĂłn, como nos aseguran las gacetas que acaban de venir y V.E. en su proclama de ayer. ÂżY quĂ©, señor? ÂżCĂĄdiz y la isla de LeĂłn son España? Este territorio inmenso, sus millones de habitantes, han de reconocer soberanĂ­a en los comerciantes de CĂĄdiz y en los pescadores de la isla de LeĂłn? ÂżLos derechos de la Corona de Castilla a que se incorporaron las AmĂ©ricas, han recaĂ­do en CĂĄdiz y la isla de LeĂłn, que son una parte de una de las provincias de AndalucĂ­a? No señor, no queremos seguir la suerte de la España, ni ser dominados por los franceses, hemos resuelto reasumir nuestros derechos y conservarnos por nosotros mismos. El que a V.E. dio autoridad para mandarnos ya no existe; de consiguiente usted tampoco la tiene ya, asĂ­ que no cuente con las fuerzas de mi mando para sostenerse en ella.
    français : Sire, ce sont des Ă©poques fort diffĂ©rentes que celle du 1er janvier 1809 et celle de mai 1810, dans laquelle nous nous trouvons prĂ©sentement ; Ă  la premiĂšre, l’Espagne existait encore, quoique dĂ©jĂ  envahie par NapolĂ©on ; Ă  la seconde, l’Espagne entiĂšre, toutes ses provinces et places, ont Ă©tĂ© subjuguĂ©es par ce conquĂ©rant, Ă  la seule exception de Cadix et de l’üle de LĂ©on, ainsi que nous l’assurent les journaux qui viennent d’arriver, et Son Excellence elle-mĂȘme dans sa proclamation d’hier. Et quoi, sire ? Cadix et l’üle de LĂ©on sont l’Espagne ? Les immenses territoires d’ici, ses millions d’habitants, sont tenus de reconnaĂźtre la souverainetĂ© des nĂ©gociants de Cadix et des pĂȘcheurs de l’üle de LĂ©on ? Les droits de la couronne de Castille, sur laquelle vinrent Ă  se greffer les AmĂ©riques, sont Ă©chues dĂ©sormais Ă  Cadix et Ă  l’üle de LĂ©on, qui ne sont qu’une partie d’une des provinces d’Andalousie ? Non sire, nous ne voulons pas suivre la destinĂ©e de l’Espagne, ni ĂȘtre dominĂ©s par les Français, et avons rĂ©solu de rĂ©assumer nos droits et de nous soutenir par nous-mĂȘmes. Tout cela mĂȘme qui avait confĂ©rĂ© Ă  Son Excellence l’autoritĂ© pour nous gouverner, n’existe plus ; par voie de consĂ©quence, vous non plus ne la dĂ©tenez plus ; ainsi, ne comptez pas sur les forces que je commande pour vous maintenir en elle.
  67. Martín Rodrígez, autobiographie, cité par de Titto, p. 331. espagnol : Resultó el nombramiento en el doctor Castelli y yo, y para asegurarnos mejor, pedimos que el comandante de granaderos de infantería Terrada, fuese con nosotros; pues su batallón estaba acuartelado en el fuerte, y bajo los balcones del mismo Cisneros, y como en él había muchos oficiales españoles, temíamos que, al momento de la intimación, se asomase Cisneros a un balcón, llamase a los granaderos y nos hiciese amarrar.
    français : Il fut convenu de missionner le docteur Castelli et moi-mĂȘme, et pour mieux nous assurer, nous priĂąmes le commandant des grenadiers d’infanterie Terrada de nous accompagner ; son bataillon en effet Ă©tait casernĂ© dans le fort, sous les balcons de Cisneros lui-mĂȘme, et comme beaucoup d’officiers espagnols se trouvaient dans ce bataillon, nous craignions qu’au moment oĂč nous serions face-Ă -face avec Cisneros, celui-ci ne se penchĂąt au balcon pour appeler les grenadiers et nous mettre en dĂ©tention.
  68. Luna, ...Juan José Castelli, p. 70. espagnol : Rodríguez, que estå exaltado, reclama una urgente contestación al pedido de Cabildo Abierto.
    français : Rodriguez, en Ă©tat d’exaltation, rĂ©clame une rĂ©ponse urgente Ă  la demande de cabildo ouvert.
  69. Luna, ...Juan José Castelli, p. 71 espagnol : Ofuscado e impotente, Cisneros sólo puede decir "Señores, cuanto siento los males que van a venir sobre este pueblo de resultas de este paso; pero puesto que el pueblo no me quiere y el ejército me abandona, hagan ustedes lo que quieran"
    français : CourroucĂ© et impuissant, Cisneros ne put que dire « Messieurs, combien je pressens les maux qui vont s’abattre sur ce peuple par l’effet de cette dĂ©marche ; mais vu que le peuple ne m'aime pas et que l’armĂ©e m’abandonne, faites donc ce que vous voulez ».
  70. Buena Ventura Arzac, « Buenos Aires, domingo 20 de mayo de 1810 a la una de la noche », Carlos Casavalle Editor, 1810 (date originale), 1896 (consulté le )
  71. Juan Andrés Pueyrredón, « San Isidro, 21 de mayo de 1810 », Carlos Casavalle Editor, (consulté le )
  72. (Anonyme) López, p. 36. espagnol : Saavedra se había enojado mucho y anduvo muy inquieto toda la noche del viernes, repitiendo que era preciso contener al populacho y a los desaforados que lo animaban a tales extremos; pero que el oficial le repetía también: "No se engañe, coronel, la cosa no se puede atajar; y estoy cierto que si usted se empeña en contenerlos, a usted mismo lo han de hacer a un lado. Reflexione bien lo que va a hacer."
    français : Saavedra s’était fort fĂąchĂ© et resta trĂšs inquiet toute la soirĂ©e du vendredi, rĂ©pĂ©tant qu’il fallait contenir la populace et les extrĂ©mistes qui l'incitaient Ă  de telles extrĂ©mitĂ©s ; mais l’officier, d’un autre cĂŽtĂ©, lui rĂ©pĂ©tait : « Ne vous leurrez pas, mon colonel, on ne pourra pas stopper cette chose, et je suis sĂ»r que si vous vous entĂȘtez Ă  les contenir, ils vous pousseront de cĂŽtĂ© vous aussi. RĂ©flĂ©chissez bien Ă  ce que vous allez faire ».
  73. Pigna, p. 232. espagnol : El clima se fue caldeando y tuvo que intervenir [...] Cornelio Saavedra, que logrĂł calmarlos garantizĂĄndoles el apoyo militar a sus reclamos.
    français : Les esprits s’échauffaient et Cornelio Saavedra dut intervenir (
), qui parvint Ă  les calmer en leur garantissant l’appui militaire Ă  leurs exigences.
  74. Pigna, p. 233. espagnol : Parece que don AgustĂ­n imprimiĂł unas cuantas tarjetas de mĂĄs y las repartiĂł entre sus compañeros, que reemplazaron a varios realistas, que no pudieron ingresar. français : Il semble que M. AgustĂ­n imprima une quantitĂ© de cartons d’invitation en surplus et les distribua entre ses compagnons, qui prirent la place de plusieurs royalistes, qui ne purent pas entrer.
  75. Luna, ...Juan JosĂ© Castelli, p. 75. espagnol : La misma noche del dĂ­a 21, Castelli, MartĂ­n RodrĂ­guez, Domingo French y Antonio Berutti recorrieron los cuarteles, arengando a las tropas, que a la mañana siguiente, se apostaron en los puntos estratĂ©gicos de la Plaza para controlar el acceso al Cabildo. français : Ce mĂȘme soir du 21, Castelli, MartĂ­n RodrĂ­guez, French et Antonio Beruti parcoururent les casernes, haranguant les troupes, lesquelles se postĂšrent le lendemain aux endroits stratĂ©giques de la Place pour contrĂŽler l’accĂšs au Cabildo.
  76. « Actas capitulares desde el 21 hasta el 25 de Mayo de 1810, en Buenos Aires », Buenos Aires cabildo, 23 mai 1810 (publication originale) (consulté le )
  77. Saavedra, p. 62. espagnol : Concurrieron todas las corporaciones eclesiĂĄsticas y civiles; un crecido nĂșmero de vecinos y un inmenso pueblo, don Pascual Ruiz Huidobro y todos los comandantes y jefes de los cuerpos de la guarniciĂłn. Las tropas estaban fijas en sus respectivos cuarteles con el objeto de acudir donde la necesidad lo demandase.
    français : Toutes les corporations ecclĂ©siastiques et civiles y assistĂšrent ; un nombre croissant d’habitants et une immense foule, don Pascual Ruiz Huidobro et l’ensemble des commandants et chefs des corps de la garnison. Les troupes se tenaient prĂȘts dans leurs casernes respectives avec la consigne d’accourir lĂ  oĂč la nĂ©cessitĂ© le requerrait.
  78. (Rezabal) López, p. 51-53. espagnol : Usted comprenderå bien los temores que me asaltan desde que, por el suceso del 1° del año pasado, quedé sindicado y perseguido por el partido de Liniers, que a las claras es el que se ha declarado ahora contra el señor virrey y contra nosotros los europeos.
    français : Vous comprendrez bien les craintes qui m’assaillent depuis que, Ă  la suite de l’évĂ©nement du premier de l’an passĂ©, j’ai Ă©tĂ© mis en accusation et persĂ©cutĂ© par le parti de Liniers, qui est manifestement celui qui s’est dĂ©clarĂ© Ă  prĂ©sent contre monseigneur le vice-roi et contre nous EuropĂ©ens.
  79. (Rezabal) López, p. 51-53.espagnol : Los facciosos y alborotadores del día estaban resueltos a no permitir el Cabildo Abierto en la forma en que se ha citado, limitåndolo a la parte sana y principal del pueblo, sino que exigían que se admitiese en él a la tropa y a los hijos de familia que andan todos rebelados contra sus padres, siguiendo el funesto ejemplo que se les dio el año seis contra el Excmo. señor Sobremonte de donde viene toda la corrupción y desquicio en que hoy nos hallamos envueltos.
    français : Les factieux et les fauteurs de troubles du jour Ă©taient rĂ©solus Ă  ne pas permettre au cabildo ouvert de se dĂ©rouler dans la forme oĂč il a Ă©tĂ© convoquĂ©, c'est-Ă -dire limitĂ© Ă  la partie saine et principale du peuple, et exigeaient au contraire que fussent admis la troupe et les fils de famille qui se sont tous rebellĂ©s contre leurs parents, suivant en cela le funeste exemple qui leur fut donnĂ© en l’an 1806 contre l’excellentissime Sobremonte, exemple dont nous vient toute la corruption et le dĂ©rĂšglement dont nous nous trouvons aujourd’hui entourĂ©s.
  80. Luna, Independencia..., p. 32. espagnol : Aunque la idea de que, cesada la autoridad legĂ­tima, el pueblo podĂ­a recomponerla por su voluntad era relativamente comĂșn en la doctrina escolĂĄstica española, en la IlustraciĂłn y en la filosofĂ­a racionalista, hacer de este principio un elemento activo, operativo, era revolucionario. français : Bien que l’idĂ©e que le peuple, lorsqu’a cessĂ© d’exister l’autoritĂ© lĂ©gitime, pouvait reconstituer celle-ci par sa volontĂ©, fĂ»t relativement commune dans la doctrine scolastique espagnole, dans la pensĂ©e des LumiĂšres et dans la philosophie rationaliste, faire de ce principe un Ă©lĂ©ment actif, opĂ©ratoire, Ă©tait rĂ©volutionnaire.
  81. Luna, Independencia..., p. 34. espagnol : En el curso del debate se habían definido tres corrientes: la españolista, la revolucionaria, y una intermedia o moderada, capitaneada por el cura de Monserrat.
    français : Au cours du dĂ©bat s’étaient formĂ©s trois courants : l’espagnoliste, le rĂ©volutionnaire, et un intermĂ©diaire ou moderĂ©, avec Ă  sa tĂȘte le curĂ© de Monserrat.
  82. Pigna, p. 234. espagnol : No solamente no hay por quĂ© hacer novedad con el virrey, sino que aĂșn cuando no quedase parte alguna de la España que no estuviese sojuzgada, los españoles que se encontrasen en la AmĂ©rica deben tomar y reasumir el mando de ellas y que Ă©ste sĂłlo podrĂ­a venir a manos de los hijos del paĂ­s cuando ya no hubiese un español en Ă©l. Aunque hubiese quedado un solo vocal de la Junta Central de Sevilla y arribase a nuestras playas, lo deberĂ­amos recibir como al Soberano.
  83. Luna, Independencia..., p. 32. espagnol : Dos ideas fundamentales lucen en el discurso de Castelli: caducidad del gobierno legĂ­timo [...] y reversiĂłn o retroversiĂłn de la soberanĂ­a en el pueblo de Buenos Aires.
    français : Deux idées fondamentales sous-tendent le discours de Castelli : la caducité du gouvernement légitime [...] et la réversion ou la rétroversion de souveraineté au peuple de Buenos Aires.
  84. Pigna, p. 236.espagnol : Nadie ha podido reputar por delincuente a la nación entera, ni a los individuos que han abierto sus opiniones políticas. Si el derecho de conquista pertenece, por origen, al país conquistador, justo sería que la España comenzase por darle la razón al reverendo obispo abandonando la resistencia que hace a los franceses y sometiéndose, por los mismos principios con que se pretende que los americanos se sometan a las aldeas de Pontevedra. La razón y la regla tienen que ser iguales para todos. Aquí no hay conquistados ni conquistadores, aquí no hay sino españoles. Los españoles de España han perdido su tierra. Los españoles de América tratan de salvar la suya. Los de España que se entiendan allå como puedan y que no se preocupen, los americanos sabemos lo que queremos y adónde vamos. Por lo tanto propongo que se vote: que se subrogue otra autoridad a la del virrey que dependerå de la metrópoli si ésta se salva de los franceses, que serå independiente si España queda subyugada.
  85. Abad de SantillĂĄn, p. 408. espagnol : ...la fĂłrmula decisiva, pues, fue esta y primĂł en buena parte de los concurrentes a la reuniĂłn: Melchor FernĂĄndez, [...] Juan LeĂłn Ferragut, [...] JoaquĂ­n Grigera.
    français : ...la formule dĂ©cisive fut donc celle-lĂ , et c’est elle qui l’emporta chez bon nombre de participants Ă  la rĂ©union : Melchor FernĂĄndez, [...] Juan LeĂłn Ferragut, [...] JoaquĂ­n Grigera.
  86. Luna, Independencia..., p. 32.espagnol : Era una hĂĄbil chicana: aceptarla implicaba perder la enorme ventaja de la oportunidad y postergar el cambio a un tiempo indefinido que podrĂ­a estar encuadrado por circunstancias muy diferentes. français : C’était une habile chicane : l’accepter impliquait de perdre l’énorme avantage de l’occasion prĂ©sente, et repousserait le changement Ă  une date indĂ©terminĂ©e, oĂč pourraient prĂ©valoir des circonstances trĂšs diffĂ©rentes.
  87. Pigna, p. 237. espagnol : Juan José Paso: "Dice muy bien el señor Fiscal, que debe ser consultada la voluntad general de los demås pueblos del Virreinato; pero piénsese bien que en el actual estado de peligros a que por su situación local se ve envuelta esta capital, ni es prudente ni conviene el retardo que importa el plan que propone. Buenos Aires necesita con mucha urgencia sea cubierto de los peligros que la amenazan, por el poder de la Francia y el triste estado de la Península. Para ello, una de las primeras medidas debe ser la inmediata formación de la junta provisoria de gobierno a nombre del señor don Fernando VII; y que ella proceda sin demora a invitar a los demås pueblos del Virreinato a que concurran por sus representantes a la formación del gobierno permanente"
    français : Juan JosĂ© Paso : « C’est Ă  bon escient que M. le Procureur a relevĂ© que devait ĂȘtre consultĂ©e la volontĂ© gĂ©nĂ©rale des autres peuples de la Vice-royautĂ© ; mais que l’on s’avise bien que dans l’état actuel de pĂ©rils oĂč se trouve la capitale de par sa situation locale, le retard qu’implique le plan qu’il propose n’est ni prudent ni appropriĂ©. Buenos Aires a besoin, de grande urgence, d’ĂȘtre gardĂ©e des dangers qui la menacent par la puissance de la France et le triste Ă©tat de la PĂ©ninsule. Pour cela, une des premiĂšres mesures Ă  prendre doit ĂȘtre la formation immĂ©diate de la junte provisoire de gouvernement au nom de Don Ferdinand VII, pour qu’ensuite celle-ci se propose sans dĂ©lai d’inviter les autres peuples de la Vice-royautĂ© Ă  participer, Ă  travers leurs reprĂ©sentants, Ă  la formation du gouvernement permanent. »
  88. Luna, Breve..., p. 62. espagnol : Buenos Aires obtuvo el derecho de introducir este cambio substancial en la estructura de poder virreinal, bajo la condición de convocar después a las otras jurisdicciones y pedirles su opinión.
    français : Buenos Aires obtint le droit d’introduire ce changement substantiel dans la structure de pouvoir de la vice-royautĂ©, sous la condition de convoquer par aprĂšs les autres juridictions et de leur demander leur opinion.
  89. López, p. 92. espagnol : Passo (sic) procuró rebatirlo, invocando el caso de urgencia, con la teoría jurídica del "negotiorum gestor". Buenos Aires, dijo, que es la hermana mayor de esas provincias y vecindarios, cuyos derechos se invoca, se encuentra de improviso con que todo el gobierno de la monarquía se ha derrumbado en derredor suyo. No hay rey, no hay sucesor, no hay nación española.
    français : Passo tenta de le rĂ©futer, en invoquant le cas d’urgence, selon la thĂ©orie juridique du negotiorum gestio. Buenos Aires, dit-il, que est la sƓur aĂźnĂ©e de ces provinces et contrĂ©es, les droits desquelles sont ici invoquĂ©s, se trouve soudainement confrontĂ©e Ă  ce qu’autour d’elle le gouvernement de la monarchie s’est effondrĂ©. Il n’y a pas de roi, pas de successeur, pas de nation espagnole.
  90. Luna, Breve..., p. 62. espagnol : Oportunamente, la persona beneficiada se enterarĂĄ, pero en principio se actĂșa como buen padre de familia o hermano mayor.
    français : La personne bĂ©nĂ©ficiaire en sera avisĂ©e en temps opportun, mais en principe l’on agit en bon pĂšre de famille ou en frĂšre aĂźnĂ©.
  91. Abad de Santillån, p. 408. espagnol : Se adhirieron a su criterio 19 de los presentes, entre ellos Manuel Alberti, Azcuénaga, Antonio José de Escalada, Cosme Argerich, Juan Pedro de Aguirre.
    français : Se rangÚrent à son argumentation 19 des personnes présentes, parmi lesquelles Manuel Alberti, Azcuénaga, Antonio José de Escalada, Cosme Argerich, Juan Pedro de Aguirre.
  92. Abad de SantillĂĄn, p. 409. espagnol : La fĂłrmula comprende la de Castelli, e incluye a los que dieron el voto con el agregado favorable al sĂ­ndico.
    français : La proposition comprend celle de Castelli, et eut l’adhĂ©sion de ceux qui donnĂšrent leur voix Ă  l’annexe favorable au Cabildo.
  93. Belgrano, espagnol : Allí presidió el orden; una porción de hombres estaban preparados para la señal de un pañuelo blanco, atacar å los que quisieran violentarnos [...] pero nada fué preciso, porque todo caminó con la mayor circunspección y decoro.
    français : L’ordre y rĂ©gnait : un groupe d’hommes se tenait prĂȘt, au signal d’un foulard blanc, Ă  attaquer ceux qui eussent voulu nous violenter (...) mais rien de cela ne fut nĂ©cessaire, puisque tout se dĂ©roula avec les plus grands Ă©gards et dans la plus grande dignitĂ©.
  94. Galasso, El Pueblo..., p. 59-60.
  95. Galasso, "El pueblo...", p. 61-62.
  96. Pigna, p. 238. espagnol : Hecha la regulaciĂłn con el mĂĄs prolijo examen resulta de ella que el Excmo. Señor Virrey debe cesar en el mando y recae Ă©ste provisoriamente en el Excmo. Cabildo [...] hasta la erecciĂłn de una Junta que ha de formar el mismo Excmo. Cabildo, en la manera que estime conveniente. français : Des vĂ©rifications, effectuĂ©es avec la plus grande minutie, il rĂ©sulte que l’excellentissime seigneur Vice-roi doit renoncer au commandement, celui-ci Ă©chĂ©ant Ă  titre provisoire Ă  l’excellentissime Cabildo (
) jusqu’à l’installation d’une junte qu’aura Ă  former ce mĂȘme excellentissime Cabildo, de telle maniĂšre qui lui paraĂźtra convenable.
  97. Abad de SantillĂĄn, p. 410. espagnol : "Se hace saber al pĂșblico, por medio del presente bando, para su gobierno e inteligencia, y que desechen cualesquiera deseos que hayan podido infundirle las Ășltimas infaustas noticias recibidas de la penĂ­nsula; bien entendido que este exmo. Cabildo procederĂĄ inmediatamente a la elecciĂłn de la Junta que haya de encargarse del mando superior hasta que se congregue a los diputados que se convocarĂĄn de las provincias"
    français : « Par le prĂ©sent arrĂȘtĂ©, il est portĂ© Ă  la connaissance du public, pour sa gouverne et sa bonne comprĂ©hension, et pour qu’il repousse tous dĂ©sirs qu’aient pu lui inspirer les funestes nouvelles parvenues de la pĂ©ninsule, que l’excellentissime Cabildo procĂ©dera incessamment Ă  l’élection de la junte destinĂ©e Ă  assumer le commandement supĂ©rieur jusqu'Ă  ce que se soient rĂ©unis les dĂ©putĂ©s qui auront Ă©tĂ© convoquĂ©s des provinces.
  98. Abad de SantillĂĄn, p. 410. espagnol : El 24 determinĂł el Cabildo que continĂșe en el mando el excelentisimo señor virrey Baltasar Hidalgo de Cisneros, asociado a los señores Juan Nepomuceno de SolĂĄ, Juan JosĂ© Castelli, Cornelio Saavedra y JosĂ© Santos de Inchaurregui.
    français : Le 24, le Cabildo disposa que resterait Ă  la tĂȘte du pays l’excellentissime seigneur vice-roi Baltasar Hidalgo de Cisneros, associĂ© Ă  messieurs Juan Nepomuceno de SolĂĄ, Juan JosĂ© Castelli, Cornelio Saavedra et JosĂ© Santos de Inchaurregui.
  99. LĂłpez, p. 64. espagnol : Lo Ășnico que te puedo decir es que hoy ha tenido lugar la comedia de la instalaciĂłn del nuevo Gobierno encabezado por el virrey.
    français : La seule chose que je puis te dire est qu’aujourd’hui a eu lieu la comĂ©die de l’installation du nouveau gouvernement dirigĂ© par le vice-roi.
  100. (Moreno) LĂłpez, p. 60. espagnol : Yo le juro a usted que si esto no se ataja, no quiero saber de nada, ni he de salir ya de mi casa para nada. No cuenten conmigo.
    français : Je le jure devant vous, si cela ne s'arrĂȘte pas, je ne veux plus en entendre parler, et il n’y a plus lieu dĂ©sormais que je sorte de ma maison pour rien. Ne comptez plus sur moi.
  101. (Tagle) LĂłpez, p. 60. espagnol : Miren ustedes; Castelli debe aceptar. FĂ­jense ustedes en que si don Cornelio ha hecho lo que se sospecha, habrĂĄ sido por debilidad o por inadvertencia, y que no se le debe dejar solo. Nuestra Ășnica garantĂ­a, pues, es de que lo acompañe Juan JosĂ© mientras nos desenvolvemos y obra el pueblo. Castelli impedirĂĄ toda medida peligrosa: asistirĂĄ al conciliĂĄbulo, le mostrarĂĄ a don Cornelio el abismo a que nos llevan, le harĂĄ oĂ­r la voz del patriotismo y cĂłmo es que quieren abusar de su rectitud y de su ĂĄnimo moderado, para perdernos; y don Cornelio es hombre que desde que se aperciba de todo esto, ha de volver sobre sus pasos y se ha de poner todo entero con nosotros: yo tendrĂ© confianza en Ă©l, desde que Ă©ste -designando a Castelli-, estĂ© a su lado y entre a la Junta del virrey.
    français : Écoutez-moi bien ; Castelli doit accepter. Soyez bien conscients que si don Cornelio a fait ce qu’on soupçonne, c’est sans doute par faiblesse ou par naĂŻvetĂ©, et il ne faut pas alors le laisser seul. Notre seule garantie est donc que Juan JosĂ© (Castelli) l’accompagne pendant que nous faisons notre Ɠuvre et que le peuple agit. Castelli empĂȘchera toute mesure dangereuse : il assistera aux pourparlers, il fera voir Ă  don Cornelio l’abĂźme vers lequel il nous entraĂźne, il lui fera entendre la voix du patriotisme, et lui fera toucher du doigt comment on veut abuser de sa droiture et de son esprit modĂ©rĂ©, pour nous perdre ; et don Cornelio, dĂšs qu’il se sera aperçu de tout cela, est homme Ă  revenir sur ses pas et se ranger complĂštement de notre cĂŽtĂ© : j’aurai confiance en lui, tant que lui ― dĂ©signant alors Castelli ― se tient Ă  ses cĂŽtĂ©s et entre dans la Junte du vice-roi.
  102. Pigna, p. 238. espagnol : Si nosotros nos comprometemos a sostener esa combinaciĂłn que mantiene en el gobierno a Cisneros, en muy pocas horas tendrĂ­amos que abrir fuego contra nuestro pueblo, nuestros mismos soldados nos abandonarĂ­an; todos sin excepciĂłn reclaman la separaciĂłn de Cisneros.
    français : Si nous nous engageons Ă  soutenir cette combinaison qui maintient Cisneros au gouvernement, nous devrons d’ici peu d’heures ouvrir le feu contre notre peuple, et nos soldats nous abandonneraient ; tous sans exception rĂ©clament le dĂ©part de Cisneros.
  103. (Arzac) LĂłpez, p. 66. espagnol : don Cornelio y Castelli le dijeron a Cisneros, que por mejor voluntad que tuvieran para acompañarlo, les era imposible responder del orden pĂșblico: que el pueblo estaba armado, concentrado en los cuarteles, resuelto a derrocar al gobierno y hacer una revoluciĂłn si el virrey no renunciaba en aquella misma noche: que su influjo era nulo para evitar esto; y que ni el uno podrĂ­a contener a sus amigos, ni el otro contener a su propio regimiento, que estaba ya sublevado y decidido a seguir a sus oficiales.
    français : Don Cornelio et Castelli dirent Ă  Cisneros que, quelque bonne volontĂ© qu’ils aient de l’accompagner, il leur Ă©tait impossible de rĂ©pondre de l’ordre public ; que le peuple Ă©tait armĂ©, concentrĂ© dans les casernes, rĂ©solu de renverser le gouvernement et de faire une rĂ©volution si le vice-roi ne dĂ©missionnait pas le soir mĂȘme ; que leur influence Ă©tait nulle pour Ă©viter cela, et que ni l’un ne pourrait contenir ses amis, ni l’autre contenir son propre rĂ©giment, qui s’était d’ores et dĂ©jĂ  soulevĂ© et Ă©tait dĂ©cidĂ© Ă  suivre ses officiers.
  104. (Arzac) López, p. 68. espagnol : Hemos mandado llamar a Moreno, pero nos ha contestado con Boizo que después de lo que ha pasado, no saldrå de su casa para nada. Peña y Castelli se han reído, y cuentan con que ha de ayudarnos cuando vea que la cosa se harå a su gusto.
    français : Nous avons mandĂ© Moreno, mais il nous a rĂ©pondu par Bozio qu'aprĂšs ce qui s’était passĂ©, il ne sortirait plus de sa maison pour quoi que soit. Peña et Castelli en ont ri, et comptaient bien qu’il nous aiderait dĂšs qu’il aurait vu que la chose tournait selon ses vƓux.
  105. (es) « 18 de Mayo – DĂ­a de la Escarapela Argentina », Mercedes (Corrientes), Mi Mercedes, (consultĂ© le )
  106. Luna, Independencia..., p. 37. espagnol : Se sabĂ­a que el Cabildo rechazarĂ­a la dimisiĂłn del virrey, y asĂ­ fue a primera hora.
    français : L’on savait que le Cabildo dĂ©clinerait la dĂ©mission du vice-roi, et c’est ce qui se produisit aux premiĂšres heures.
  107. (Arzac) López, p. 67. espagnol : Dicen que no admiten la renuncia: que nosotros no somos pueblo, y que no tenemos derecho de influir en la menor innovación de lo que estå resuelto y hecho; que teniendo la Junta el mando de las armas, estå estrechada a sujetar con ella a los descontentos, y a tomar contra nosotros providencias prontas y vigorosas; y que de lo contrario, el ayuntamiento hace responsables a los Miembros de la Junta de las consecuencias que puedan venir por cualquier variación de lo ya resuelto. ¿Qué tal? Esto se llama ser mentecatos.
    français : Ils disent qu’ils n’admettent pas la dĂ©mission : que nous ne sommes pas le peuple, et que nous n’avons pas le droit d’apporter la moindre innovation Ă  ce qui a Ă©tĂ© dĂ©cidĂ© et appliquĂ© ; que la Junte, dĂ©tenant le commandement des armes, est contrainte de soumettre Ă  l’aide de celles-ci les mĂ©contents et de prendre Ă  notre encontre des mesures promptes et vigoureuses ; et que, Ă  dĂ©faut, le cabildo rendrait responsables les membres de la Junte des consĂ©quences qui rĂ©sulteraient de tout Ă©cart par rapport aux dĂ©cisions dĂ©jĂ  prises. Qu’en penser ? Cela s’appelle ĂȘtre des benĂȘts.
  108. (Argerich) López, p. 71. espagnol : En el momento se adelantaron Beruti, Chiclana, French y el doctor Grela. Pancho Planes iba también a entrar, pero Leiva le puso la mano y le dijo: -No amigo mío, usted es muy loco para este negocio; con estos caballeros hay lo bastante pues son hombres de representación, y lo mejor es que no haya tantos con quien hablar.
    français : À ce moment, Beruti, Chiclana, French et le docteur Grela s’avancĂšrent. Pancho Planes allait entrer lui aussi, mais Leiva posa la main sur lui et lui dit : non, mon ami, tu es bien fou pour te mettre dans cette affaire ; c’est bien assez avec ces messieurs-lĂ , car ce sont hommes de reprĂ©sentation, et c’est mieux qu’il n’y en ait point tant avec qui parler.
  109. (Argerich) LĂłpez, p. 71. espagnol : En esto, el doctor Planes se habĂ­a introducido furtivamente en la sala, y con todo atrevimiento, levantĂł la voz
    français : LĂ -dessus, le docteur Planes s’était faufilĂ© au-dedans de la salle, et en toute audace Ă©leva la voix.
  110. (Argerich) LĂłpez, p. 71. espagnol : El Cabildo objetĂł que aquello era variar todo el orden de la monarquĂ­a sin consultar a los demĂĄs pueblos del virreinato; pero French y Chiclana contestaron que no, porque en esa misma representaciĂłn se decĂ­a que se convocarĂĄ un congreso nombrado por todos esos pueblos con libertad.
    français : Le Cabildo objecta que cela reviendrait Ă  changer tout l’ordre de la monarchie sans consulter les autres peuples de la vice-royautĂ© ; mais French et Chiclana rĂ©pondirent que non, Ă©tant donnĂ© que dans cette reprĂ©sentation elle-mĂȘme, il avait Ă©tĂ© dit qu’un congrĂšs, nommĂ© librement par tous les autres peuples, serait convoquĂ©.
  111. (Beruti) LĂłpez, p. 76. espagnol : ...el pueblo ha reasumido la autoridad que habĂ­a trasmitido, y es su voluntad que la Junta de Gobierno se componga de los sujetos que Ă©l quiere nombrar...
    français : 
 le peuple a repris possession de l’autoritĂ© qu’il avait dĂ©lĂ©guĂ©e, et c’est sa volontĂ© que la Junte se compose des personnes qu’il lui plaira de nommer...
  112. Crow, p. 457
  113. Luna, Independencia..., p. 37. espagnol : ...los nombres rubricados de French y de Beruti, cada uno agregando "Por mĂ­ y por seiscientos mĂĄs".
  114. (Beruti) López, p. 78. espagnol : El pueblo en cuyo nombre hablamos estå armado en los cuarteles y una gran parte del vecindario espera en otras partes la voz de alarma para venir aquí. Quieren ustedes verlo, toquen la campana, y si es que no tienen el badajo, nosotros tocaremos generala, y verån ustedes la cara de ese pueblo, cuya presencia echan de menos. ¥Sí o no! pronto, señores: decidirlo ahora mismo porque no estamos dispuestos a sufrir demoras y engaños, pero si volvemos con las armas en la mano, no respondemos de nada.
    français : Le peuple, au nom duquel nous parlons, se tient armĂ© dans les casernes et une grande partie des habitants de la ville attend dans d’autres lieux le cri d’alarme pour venir ici. Si vous voulez le voir, sonnez la cloche, et s’il se trouve que vous n’en avez pas le battant, c’est nous qui sonnerons l’alerte gĂ©nĂ©rale, et vous verrez alors le visage de ce peuple, dont la prĂ©sence vous manque. Oui ou non ! vite, messieurs : dĂ©cidez-le sur-le-champ, car nous ne sommes pas disposĂ©s Ă  supporter retards et tromperies, mais si nous revenons les armes Ă  la main, nous ne rĂ©pondons de rien.
  115. (Leiva et la Junte) López, p. 79. espagnol : -La segunda que el Cabildo quede con la autoridad necesaria para vigilar la conducta de los miembros de la Junta./-¥No, señor, no queremos, negado!/-Pero, señores, el Cabildo no procederå en eso sino con justa causa./El pueblo gritaba ¥bueno! y ¥negado!, sin que fuera posible averiguar si aceptaba o no./-La tercera que no se impongan nuevas contribuciones./-De acuerdo./-Y que la Junta llene las vacantes por elección en su seno./-De acuerdo.
    français : -La deuxiĂšme, que le Cabildo garde l’autoritĂ© nĂ©cessaire pour surveiller la conduite des membres de la Junte./-Non, monsieur, nous ne voulons pas, refusĂ© !/-Mais, messieurs, le Cabildo n’y aura point recours, si ce n’est avec une juste cause./-Le peuple criait « bon ! » et « refusĂ© ! », sans qu’il fĂ»t possible de vĂ©rifier s’il acceptait ou non./-La troisiĂšme, que ne soient pas levĂ©s de nouveaux impĂŽts./-D’accord./-Et que la Junte pourvoie aux postes vacants par un vote en son sein./-D’accord.
  116. Archivo General de Indias. Sevilla. E. 122 C.C.L.26, 1810. Carta del Virrey de Buenos Aires donde cuenta a Su Majestad con varios documentos que acompaña, de los sucesos ocurridos en la Capital, en el mes de mayo de aquel año. Buenos Aires, 23 de junio de 1810.
  117. FĂ©lix Luna, La Independencia..., p. 47-48.
  118. SantillĂĄn, p. 417-433.
  119. (es) Félix Luna, Grandes protagonistas de la Historia Argentina - Mariano Moreno, Buenos Aires, Planeta, , 108 p. (ISBN 950-49-1248-6), « El Enemigo - La contrarevolución »
  120. SantillĂĄn, p. 424-426.
  121. SantillĂĄn, p. 516.
  122. Luna, "La independencia...", p. 108-116.
  123. Luna, "La independencia...", p. 77-86.
  124. Luna, "La independencia...", p. 116-126.
  125. Luna, Breve..., p. 65-66. espagnol : Desde luego fue un cambio lento, que se fue afirmando a través de medidas de gobierno y del pensamiento de algunos dirigentes, pero un cambio que apuntaba a la formación de una sociedad republicana y democråtica.
    français : Bien sĂ»r, ce fut un changement lent, qui allait s’affirmant au travers de mesures gouvernementales et de la pensĂ©e de quelques dirigeants, mais un changement qui allait en direction de la formation d'une sociĂ©tĂ© rĂ©publicaine et dĂ©mocratique.
  126. Sarmiento, p. 79.
  127. Luna, Breve..., p. 66-67. espagnol : Su gran defecto, sin embargo, se vinculaba a la grandeza del territorio: el virreinato se componía de elementos muy heterogéneos, cuyos climas, producciones, pueblos, mentalidades e intereses eran distintos entre sí, y en algunos casos contradictorios. Como el virreinato duró solamente treinta años, no hubo tiempo para que sus elementos fraguasen convirtiéndolo en una nación con conciencia de sí misma.
    français : Cependant, son grand dĂ©faut Ă©tait liĂ© Ă  la grandeur du territoire : la vice-royautĂ© se composait d’élĂ©ments trĂšs hĂ©tĂ©rogĂšnes, dont les climats, les productions, les peuples, les mentalitĂ©s et les intĂ©rĂȘts Ă©taient diffĂ©rents entre eux, voire, dans quelques cas, contradictoires. Comme la vice-royautĂ© ne dura que 30 ans, il n’y eut pas de temps pour que ses Ă©lĂ©ments pussent fusionner en une nation dotĂ©e de conscience d’elle-mĂȘme.
  128. Shumway, p. 3-4.
  129. DĂłmina, pp. 84 et 85.
  130. Harari hombrecitos asustados, par FabiĂĄn Harari (Grupo de InvestigaciĂłn de la RevoluciĂłn de Mayo, CEICS).
  131. Archer, p. 3-5
  132. Gelman, p. 32. espagnol : ...muchos buscan el objetivo de justificar acciones en las que cumplieron algĂșn rol o se inclinan partidariamente por algunos personajes o grupos de acuerdo con sus afinidades polĂ­ticas.
    français : ...beaucoup poursuivent l’objectif de justifier les actions dans lesquelles ils avaient eu quelque rĂŽle Ă  jouer, ou expriment avec partialitĂ© leur inclination pour tel ou tel personnage ou groupe, selon leurs affinitĂ©s politiques.
  133. Gelman, p. 53-54. espagnol : Estas memorias fueron escritas con un fin claro: son un alegato para Europa a favor de la RevoluciĂłn, y personifican este proceso en la figura del secretario de la Primera Junta de Mayo
    français : Ces mĂ©moires furent Ă©crites dans un but clair : elles sont un plaidoyer pour la RĂ©volution Ă  l’intention de l’Europe, et personnifient ce processus dans la figure du secrĂ©taire de la PremiĂšre Junte de Mai.
  134. Saavedra, p. 105-106. espagnol : He concluido esta breve memoria que dejo a mis hijos para que sepan la historia de su padre [...], si después de mi fallecimiento la calumnia, la detracción y la maledicencia volviesen a acometerlo [...] a ellos es que con especialidad incumbe estar en centinela ante mi sepulcro, para que la calumnia no llegue a perturbar el reposo de mis cenizas
    français : J’ai conclu ces brĂšves mĂ©moires que je laisse Ă  mes fils pour qu’ils sachent l’histoire de leur pĂšre (...), si aprĂšs ma mort la calomnie, la dĂ©traction et la mĂ©disance l’attaquent Ă  nouveau (...) c’est Ă  eux en particulier qu’il incombe de se poster en sentinelle devant ma tombe, de sorte que la calomnie ne vienne pas perturber le repos de mes cendres.
  135. Poli Gonzalvo, p. 19-20.
  136. Poli Gonzalvo, p. 22.
  137. Gelman, p. 191. espagnol : ...los temas que estudiaron estos intelectuales presentan una fuerte continuidad con los que ocuparon a sus predecesores...
    français : ...les thÚmes étudiés par ces intellectuels présentent une forte continuïté avec ceux qui avaient occupé leurs prédécesseurs...
  138. Gelman, p. 16. espagnol : La "NaciĂłn", la "RepĂșblica", se habĂ­an de constituir necesariamente hacia 1810. Aunque las fuerzas que llevaran a ese resultado podĂ­an variar, [...] no se discutĂ­a ese carĂĄcter necesario de la revoluciĂłn.
    français : La Nation, la RĂ©publique, devaient ĂȘtre instaurĂ©es nĂ©cessairement vers 1810. Quoique les forces qui conduisirent Ă  ce rĂ©sultat aient pu varier, (...) le caractĂšre nĂ©cessaire de la rĂ©volution ne se discutait pas.
  139. Gelman, p. 17. espagnol : en casi todos los casos se acuerda en que se llegĂł a donde se tenĂ­a que llegar necesariamente.
    français : Dans presque tous les cas, l’on s’accordait Ă  dire que l’on arriva lĂ  oĂč il fallait que l’on arrivĂąt nĂ©cessairement.
  140. Gelman, p. 191. espagnol : Desde diferentes miradas, varios de los autores de este perĂ­odo llevan a un primer plano la participaciĂłn de los sectores populares en la revoluciĂłn.
    français : Selon des angles de vue diffĂ©rents, plusieurs auteurs de cette pĂ©riode mettent Ă  l’avant - plan la participation des secteurs populaires Ă  la rĂ©volution.
  141. Gelman, p. 256. espagnol : ...la consolidación en la década de 1930 de la "tradición liberal" que luego serå llamada "historia oficial". Muestras de ello son la elevación de Ricardo Levene por parte del estado al sitial de gran historiador nacional y el encargo que aquel hizo a la Junta de Historia y Numismåtica, pronto convertida en Academia Nacional de la Historia, de elaborar una historia argentina "definitiva".
    français : ...la consolidation dans la dĂ©cennie 1930 de la « tradition libĂ©rale », qui par la suite sera appelĂ©e « histoire officielle ». En sont la manifestation l’élĂ©vation par l’État de Ricardo Levene au statut de grand historien national, et la mission que celui-ci confia au ComitĂ© d’histoire et de numismatique, promptement convertie en AcadĂ©mie nationale d’histoire, d’élaborer une histoire argentine « dĂ©finitive ».
  142. Gelman, p. 257. espagnol : ...matizando la idea de un enfrentamiento entre criollos y españoles en la revolución...
    français : ...nuançant l’idĂ©e d’un affrontement entre criollos et Espagnols lors de la rĂ©volution...
  143. Gelman, p. 257. espagnol : El posicionamiento revisionista no centró su atención inicial en el período de la independencia, sino que, en los años 1930, se dedicó sobre todo a exaltar la figura de Juan Manuel de Rosas...
    français : À ses dĂ©buts, la position rĂ©visionniste ne centrait pas son attention sur la pĂ©riode de l’indĂ©pendance, mais s’appliquait avant tout, dans les annĂ©es 1930, Ă  exalter la figure de Juan Manuel de Rosas...
  144. Galasso, p. 86-87. espagnol : Desde el principio no hay un solo "Mayo" con perfil indiscutido e inequívoco, sino muy diversos "Mayos" que pronto entrarån en colisión. El Mayo revolucionario de los "chisperos" y Moreno, [...] el Mayo timorato y conservador de Saavedra [...] y finalmente el Mayo librecambista, antiespañol y probritånico [...].
    français : DĂšs le dĂ©but, il n’y a pas un « Mai » unique, au profil indiscutĂ© et univoque, mais des « Mai » trĂšs divers, qui allaient tĂŽt entrer en collision. Le Mai rĂ©volutionnaire des « agitateurs » (chisperos) et de Moreno (...), le Mai timorĂ© et conservateur de Saavedra (...), et finalement le Mai libre-Ă©changiste, anti-espagnol et pro-britannique (...).
  145. Galasso, p. 87. espagnol : ...acentuando la óptica sobre uno de los sectores intervinientes, Mitre pudo fabricar su Mayo liberal, elitista, pro-inglés, realizado por la gente decente con paraguas, cuyo programa era La Representación de los Hacendados y su objetivo incorporarse a Europa.
    français : (
) en focalisant sur une des factions intervenantes, Mitre rĂ©ussit Ă  fabriquer son Mai libĂ©ral, Ă©litiste et pro-anglais, rĂ©alisĂ© par des gens comme-il-faut portant parapluie, dont le programme Ă©tait La RepresentaciĂłn de los Hacendados et l’objectif de s’incorporer Ă  l’Europe.
  146. Galasso, p. 87. espagnol : ...el revisionismo nacionalista de derecha aceptó el Mayo rupturista de España pero lo signó con un perfil conservador al colocar a Saavedra como principal figura opuesta al presunto iluminismo exótico de Moreno.
    français : (...) le rĂ©visionnisme nationaliste de droite accepta le Mai de rupture avec l’Espagne, mais le marqua d’un profil conservateur en plaçant Saavedra comme principale figure opposĂ©e au prĂ©tendu illuminisme exotique de Moreno.
  147. Galasso, p. 87. espagnol : ...nos quedamos con el Mayo de Moreno y los "chisperos", con la revolución auténtica y profundamente democråtica, reivindicadora del esclavo y del indio, defensora por sobre todo de los derechos del pueblo...
    français : (
) demeure pour nous le Mai de Moreno et des agitateurs (chisperos), avec la rĂ©volution authentique et profondĂ©ment dĂ©mocratique, revendicative pour l’esclave et l’indien, dĂ©fenderesse par-dessus tout des droits du peuple...
  148. (es) Félix Luna, Grandes protagonistas de la historia argentina : Mariano Moreno, Buenos Aires, Planeta, (ISBN 950-49-1248-6), « Consecuencias de la asonada », p. 25
    « espagnol : El joven abogado sigue fiel a su posición, y sabe que el sector juvenil y republicano del partido patriota lo apoya. Promueve la constitución de una Junta de gobierno autónoma que, enarbolando la måscara de sumisión a Fernando VII, respete la voluntad popular. »
    français : Le jeune avocat (savoir : Mariano Moreno) reste fidĂšle Ă  sa position, et sait que le secteur jeune et rĂ©publicain du parti patriotique le soutient. Il favorise la constitution d’une junte de gouvernement autonome qui, tout en revĂȘtant le masque de soumission Ă  Ferdinand VII, respecte la volontĂ© populaire.
  149. (es) Felipe Pigna, Los mitos de la historia argentina, Argentina, Grupo Editorial Norma, , 26e éd., 423 p. (ISBN 978-987-545-149-0 et 987-545-149-5), « La Revolución de Mayo », p. 243
    « espagnol : La llamada "MĂĄscara de Fernando" era, contrariamente a lo que muchos creen, un acto de clara independencia. Por aquellos dĂ­as nadie en su sano juicio podĂ­a suponer que NapoleĂłn serĂ­a derrotado ni que Fernando volverĂ­a al trono español y recuperarĂ­a sus colonias americanas. Por lo tanto, prometer fidelidad a un rey fantasma—y no a un Consejo de Regencia existente—era toda una declaraciĂłn de principios que abrĂ­a el camino hacia una voluntad independentista que no podĂ­a explicitarse por las presiones de Gran Bretaña. »
    français : Le dĂ©nommĂ© Masque de Ferdinand Ă©tait, contrairement Ă  ce que beaucoup croient, un acte de claire indĂ©pendance. En ces jours-lĂ , personne ne pouvait raisonnablement prĂ©sumer que NapolĂ©on serait battu, ni que Ferdinand remonterait sur le trĂŽne et rĂ©cupĂ©rerait ses colonies amĂ©ricaines. DĂšs lors, promettre fidĂ©litĂ© Ă  un roi fantĂŽme — et non Ă  un Conseil de RĂ©gence existant — constituait toute une dĂ©claration de principes qui prĂ©parait la voie Ă  une volontĂ© indĂ©pendantiste, qui ne pouvait pas ĂȘtre exprimĂ©e ouvertement Ă  cause des pressions de la Grande-Bretagne.
  150. Tulio Halperín Donghi, Historia contemporånea de América Latina, Buenos Aires, Alianza, , 6e éd. (ISBN 950-40-0019-3), p. 96
    « espagnol : ¿Hasta qué punto era sincera esta imagen que la revolución presentaba de sí misma? Exigir una respuesta clara significa acaso no situarse en la perspectiva de 1810. Sin duda había razones para que un ideario independentista maduro prefiriese ocultarse a exibirse: junto al vigor de la tradición de lealismo monårquico entre las masas populares (...) pesaba la coyuntura internacional que obligaba a contar con la benevolencia inglesa. »
    français : Jusqu’à quel point cette image que la rĂ©volution prĂ©sentait d’elle-mĂȘme Ă©tait-elle sincĂšre ? Exiger ici une rĂ©ponse claire signifie peut-ĂȘtre ne pas se replacer dans la perspective de 1810. Sans aucun doute, il y avait des raisons pour qu'une pensĂ©e indĂ©pendantiste mĂ»rie prĂ©fĂ©rĂąt s’occulter elle-mĂȘme plutĂŽt que de s’exhiber : outre la vigueur de la tradition de loyautĂ© Ă  la monarchie chez les masses populaires (...) pesait Ă©galement la situation internationale, qui obligeait Ă  tenir compte de la bienveillance britannique.
  151. Kaufmann, p. 49
  152. Kaufmann, p. 59.
  153. (es) Norberto Galasso, « El pueblo quiere saber de qué se trató », (consulté le )
  154. Cf. entretien avec l'historien Norberto Galasso par Juan Manuel Fonrouge, intitulé El deber de reescribir la historia, , dans l'émission 2010 : espagnol : Hoy, inclusive los profesores de la línea de Halperín Donghi -como L.A. Romero y José Carlos Chiaramonte- admiten que no comparten la versión de la historia mitrista sobre Mayo.
    français : Aujourd’hui, mĂȘme les professeurs de la ligne HalperĂ­n Donghi ― comme L.A. Romero et JosĂ© Carlos Chiaramonte ― admettent qu’ils ne partagent pas la version mitriste (des Ă©vĂ©nements) de Mai.
  155. Juan Bautista Alberdi, Mitre al desnudo, Buenos Aires, CoyoacĂĄn, 1961, p. 28.
  156. Galasso, p. 23. espagnol : La opresiĂłn no era de un paĂ­s extranjero sobre un grupo racial y culturalmente distinto (cuestiĂłn nacional) sino de un sector social sobre otro dentro de una misma comunidad hispanoamericana.
    français : Ce n’était pas l’oppression d’un pays Ă©tranger contre un groupe racialement et culturellement distinct (une question nationale), mais d’un secteur social contre un autre Ă  l’intĂ©rieur de la mĂȘme communautĂ© hispano-amĂ©ricaine.
  157. Galasso, p. 10-11. espagnol : Pero resulta que este dirigente [Larea] de una revolución antiespañola es... ¥español! Y a su lado estå Domingo Matheu... ¥también español! Y mås allå, Manuel Belgrano y Miguel de Azcuénaga que han nutrido gran parte de su juventud y sus conocimientos en España.
    français : Mais il se trouve que ce dirigeant [Larrea] d’une rĂ©volution anti-espagnole est... un Espagnol ! Et Domingo Matheu se tient Ă  ses cĂŽtĂ©s... Espagnol lui aussi ! Et ensuite, Manuel Belgrano et Miguel de AzcuĂ©naga, qui ont passĂ© une grande partie de leur jeunesse en Espagne et y ont acquis la plupart de leurs connaissances.
  158. Galasso, p. 12. espagnol : Al regresar [San Martín] al Río de la Plata, de donde había partido a los siete años, era un hombre de 34 años, con 27 de experiencias vitales españolas, desde el lenguaje, las costumbres, la primera novia, el bautismo de fuego y el riesgo de muerte en cada batalla [...]. El San Martín que regresó en 1812 debía ser un español hecho y derecho, y no venía al Río de la Plata precisamente a luchar contra la nación donde había transcurrido la mayor parte de su vida.
    français : Lorsqu’il (San MartĂ­n) revint dans le RĂ­o de la Plata, qu’il avait quittĂ© Ă  l’ñge de sept ans, il Ă©tait un homme de 34 ans, dont 27 annĂ©es d’expĂ©riences de vie espagnoles, depuis le langage, les coutumes, la premiĂšre fiancĂ©e, jusqu’au baptĂȘme du feu et le risque de mort dans chaque bataille (...). Le San MartĂ­n qui rentra en 1812 devait ĂȘtre un Espagnol Ă  part entiĂšre, et n’était pas venu dans le RĂ­o de la Plata pour combattre le pays prĂ©cisĂ©ment dans lequel il avait passĂ© la majeure partie de sa vie.
  159. Galasso, p. 11. espagnol : Curioso antihispanismo éste [...] que enfrenta a los ejércitos enemigos (que San Martín llama siempre "realistas", "chapetones" o "godos", y no "españoles") enarbolando bandera española...
    français : Curieux antihispanisme que celui-là (...) qui affronte les armées ennemies (que San Martín appelle toujours royalistes, balourds ou goths, mais jamais Espagnols) en arborant le drapeau espagnol...
  160. Galasso, p. 18. espagnol : ...el pueblo encuentra al príncipe Fernando que se ha manifestado en contra de sus propios padres, y lo idealiza convirtiéndolo en jefe de la gran regeneración española.
    français : ...le peuple dĂ©couvre le prince Ferdinand, qui s’est manifestĂ© contre ses propres parents, et l’idĂ©alise, en le convertissant en chef du grand relĂšvement espagnol.
  161. Galasso, p. 17. espagnol : La lucha por la democracia, el gobierno del pueblo y los cambios económicos y sociales nace de la postración del pueblo español y de la presión que ejercen, paradójicamente, las ideas que los revolucionarios franceses han expandido por Europa a partir de 1789.
    français : La lutte pour la dĂ©mocratie, le gouvernement du peuple et les changements Ă©conomiques et sociaux naĂźt de la prostration du peuple espagnol et de la pression qu’exercent, paradoxalement, les idĂ©es que les rĂ©volutionnaires français ont propagĂ©es Ă  travers l’Europe depuis 1789.
  162. Norberto Galasso et Felipe Pigna, interview par Juan Manuel Fonrouge, El deber de reescribir la historia, 2010, Buenos Aires,
    « DĂšs lors que la rĂ©volution dĂ©mocratique espagnole est dĂ©faite en 1814 et que revient l’absolutisme, repoussant la constitution dĂ©mocratique de 1812, la rupture devient nĂ©cessaire. Si l’on veut Ă©viter de retomber sous l’absolutisme, l’indĂ©pendance devient urgente, attendu que l’Espagne se propose d’envoyer deux flottes de guerre pour reconquĂ©rir « ses » colonies. »
  163. Loi sur les jours fériés généraux et sur le glissement des jours non ouvrables. (es)
  164. Silvia Sigal, « Mayo, la disputa por el sentido », Ñ, ClarĂ­n, no 343,‎ , p. 11
  165. « Jubany », Marambio Base, (consulté le )
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  167. « 5 centavos », Banque centrale de l’Argentine (consultĂ© le )
  168. (es) Felipe Pigna, Los mitos de la historia argentina, Argentina, Grupo Editorial Norma, , 26e éd., 423 p. (ISBN 978-987-545-149-0 et 987-545-149-5), « La Revolución de Mayo », p. 218
    « espagnol : A lo sumo, el sistema fomenta debates tan trascendentes como la existencia o inexistencia de paraguas en aquellos días de 1810, o sesudos contrapuntos meteorológicos basados en la contradicción marcada por la canción "El sol del 25 viene asomando" y las ilustraciones del Billiken, el Simulcop y el Manual del Alumno, que muestran una plaza indudablemente lluviosa. A esto se pretende reducir, conciente o inconcientemente, el proceso que marcaría a fuego nuestro futuro como Nación. »
    français : Au mieux, le systĂšme stimule des dĂ©bats aussi importants que l’existence ou inexistence de parapluies en ces journĂ©es de 1810, ou de pointues controverses mĂ©tĂ©orologiques basĂ©es sur la contradiction entre la chanson El sol del 25 viene asomando (le Soleil du 25 commence Ă  poindre) et les dessins de Billiken, de Simulcop et du Manuel de l’élĂšve, qui montrent une place indubitablement pluvieuse. C’est Ă  cela que l’on entend rĂ©duire, consciemment ou inconsciemment, le processus qui allait marquer au feu notre futur en tant que nation.
  169. Daniel Balmaceda, Historias de corceles y de acero, Buenos Aires, Sudamericana, , 121–124 p. (ISBN 978-950-07-3180-5)
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