RĂ©volution de La Paz
La rĂ©volution de La Paz est le soulĂšvement qui eut lieu le dans la ville de La Paz, dans ce qui Ă©tait alors la vice-royautĂ© du RĂo de la Plata, subdivision de lâEmpire espagnol.
Le mouvement Ă©clata dans la foulĂ©e de la rĂ©volution de Chuquisaca, qui sâĂ©tait produite quelques semaines auparavant et avait dĂ©clenchĂ© dans le Haut-PĂ©rou, sur la zone de tutelle de lâAudiencia de Charcas, correspondant grosso modo Ă lâactuelle Bolivie, une sĂ©rie de rĂ©bellions, suivies de la mise en place de comitĂ©s de gouvernement autonomes (juntas[1]). Les insurgĂ©s de La Paz, aprĂšs sâĂȘtre emparĂ© de la caserne, battu le rappel du peuple et organisĂ© un cabildo ouvert, instaurĂšrent un gouvernement rĂ©volutionnaire local dĂ©nommĂ© Junta Tuitiva de los Derechos del Rey y del Pueblo, soit Junte protectrice des droits du roi et du peuple (en abrĂ©gĂ© Junta Tuitiva). Ladite Junte, dont les membres Ă©taient des indĂ©pendantistes crĂ©oles (c.-Ă -d. des EuropĂ©ens nĂ©s aux AmĂ©riques), auxquels vinrent se joindre quelques Indiens, prirent des mesures fiscales, exigĂšrent un serment de fidĂ©litĂ© de la part des pĂ©ninsulaires (EuropĂ©ens nĂ©s en Espagne), et publiĂšrent une Proclamation restĂ©e cĂ©lĂšbre. Les autoritĂ©s espagnoles rĂ©agirent bientĂŽt, par lâenvoi de troupes tant de Lima que de Buenos Aires, lesquelles vinrent facilement Ă bout des milices rĂ©volutionnaires mal Ă©quipĂ©es. Les principaux meneurs, dont Pedro Domingo Murillo, figure de hĂ©ros national bolivien, furent envoyĂ©s Ă la potence.
Antécédents
Le avait Ă©clatĂ© dans la ville actuellement nommĂ©e Sucre la rĂ©volution de Chuquisaca, lors de laquelle fut destituĂ© le prĂ©sident de la Real Audiencia de Charcas, RamĂłn GarcĂa de LeĂłn y Pizarro, accusĂ© de conspirer en faveur de lâinfante Charlotte-Joachime d'Espagne, sĆur de Ferdinand VII et reine rĂ©gente de Portugal au BrĂ©sil, laquelle revendiquait pour elle-mĂȘme les titres de son frĂšre sur les terres espagnoles en AmĂ©rique. Un groupe de militants indĂ©pendantistes dĂ©cida de mettre Ă profit les circonstances â le vide de pouvoir consĂ©cutif Ă lâinvasion napolĂ©onienne de lâEspagne â pour promouvoir secrĂštement lâindĂ©pendance du territoire, Ă lâeffet de quoi ils dĂ©pĂȘchĂšrent des Ă©missaires de Chuquisaca vers diffĂ©rentes villes du Haut-PĂ©rou pour y propager leurs idĂ©es. Câest ainsi que, missionnĂ© par lâAudiencia de Chuquisaca, Mariano Michel Mercado partit pour La Paz, pour sây rĂ©unir avec les partisans de lâindĂ©pendance durant tout le mois quâil sĂ©journa dans la ville[2].
DĂ©roulement
Profitant de ce que lâattention Ă©tait accaparĂ©e par la procession de Notre-Dame du Mont-Carmel, patronne de la corporation militaire, festivitĂ© en vue de laquelle les troupes avaient reçu leur congĂ©, les rĂ©volutionnaires emmenĂ©s par Pedro Domingo Murillo et appuyĂ©s par le bataillon de milices sous les ordres de son chef en second, Juan Pedro de Indaburu, sâemparĂšrent de la caserne des VĂ©tĂ©rans, mirent les officiers en dĂ©tention, convoquĂšrent, en faisant sonner les cloches, le peuple sur la place, rĂ©clamĂšrent un cabildo ouvert (conseil municipal exceptionnel oĂč la population Ă©tait admise Ă prendre part), et requirent que fussent dĂ©mis de leurs fonctions lâĂ©vĂȘque de La Paz Remigio de la Santa y Ortega et le gouverneur-intendant supplĂ©ant Tadeo DĂĄvila. Celui-ci tenta dâĂ©touffer la rĂ©volte, se rendit Ă la caserne, mais fut mis en arrestation. Le cabildo accepta dâorganiser le soir mĂȘme un cabildo ouvert, oĂč seraient admis, en tant que reprĂ©sentants du peuple, Gregorio GarcĂa Lanza, Juan Bautista SagĂĄrnaga et Juan Basilio CatĂĄcora. AprĂšs la dĂ©mission du gouverneur et de lâĂ©vĂȘque, la destitution des maires ordinaires et des sous-dĂ©lĂ©guĂ©s, le cabildo sĂ©culier de la ville dĂ©signa Pedro Murillo comme commandant militaire de la province avec le grade de colonel, et comme son second Juan Pedro de Indaburu, Ă©levĂ© au grade de lieutenant-colonel. Toutes les dettes au crĂ©dit du fisc furent supprimĂ©es et les documents que les attestaient furent brĂ»lĂ©s.
Le cabildo se donna le nom de Junta Gobernadora (âComitĂ© de gouvernementâ), pour se doter ensuite de la forme dâun comitĂ© consultatif de douze membres, dĂ©nommĂ© Junta Tuitiva de los derechos del Rey y del Pueblo (litt. âJunte de dĂ©fense des droits du roi et du peupleâ) et composĂ© comme suit :
- PrĂ©sident de la Junte : le colonel commandant Pedro Domingo Murillo ; membres : Melchor LeĂłn de la Barra (curĂ© de Caquiaviri), JosĂ© Antonio Medina (cura de Sicasica), Juan Manuel Mercado (vicaire), Antonio Ăvila, Gregorio GarcĂa Lanza (auditeur militaire), Juan Basilio CatĂĄcora, Juan de la Cruz Monje y Ortega (assesseur) ; secrĂ©taires : SebastiĂĄn Aparicio, Juan Manuel CĂĄceres (greffier).
- UltĂ©rieurement furent nommĂ©s les membres supplĂ©ants suivants : SebastiĂĄn Arrieta (trĂ©sorier de lâadministration des finances), Antonio Ăvila, Francisco Diego Palacios, JosĂ© MarĂa Santos Rubio et Buenaventura Bueno. Plus tard se joignirent Ă la Junte les dĂ©putĂ©s indigĂšnes des partidos : Francisco Figueredo Incacollo y Catan (Francisco Katari Inca Kollo, reprĂ©sentant du partido de Yungas), Gregorio Rojas (reprĂ©sentant du partido de Inquisivi), JosĂ© Zanco (reprĂ©sentant du partido de Larecaja ou Sorata).
Le lendemain, les Espagnols nĂ©s en Europe (les « pĂ©ninsulaires ») furent convoquĂ©s sur la place et invitĂ©s Ă prĂȘter le serment de :
« [...] faire alliance perpétuelle avec les criollos, de ne rien tenter à leur détriment, et de défendre avec eux la religion et la patrie. »
Proclamation
Le fut approuvĂ© le Plan de gouvernement, de dix articles, que dâaucuns considĂšrent comme le premier statut constitutionnel dâAmĂ©rique latine, encore quâil eĂ»t une portĂ©e uniquement locale. Des dĂ©putĂ©s furent dĂ©pĂȘchĂ©s vers chacun des six partidos de lâintendance de La Paz, et lâon constitua trois ministĂšres, appelĂ©s dĂ©partements : Gouvernement, GrĂące Justice, et Culte et Finances.
La Proclamation de la Junte (Proclama de la Junta Tuitiva) â dont lâintitulĂ© complet sâĂ©nonçait Proclama de la ciudad de La Plata a los valerosos habitantes de la ciudad de La Paz (litt. âProclamation de la ville de La Plata aux valeureux habitants de la ville de La Paz') â Ă©tait un manifeste en provenance de Chuquisaca (La Plata est l'ancien nom de Chuquisaca) et rĂ©digĂ© dans la rhĂ©torique et le style propres aux juristes de lâAcadĂ©mie caroline, lâĂ©cole de droit de lâuniversitĂ© de Chuquisaca, oĂč un grand nombre parmi les avocats de la Paz qui prirent part au soulĂšvement du avaient fait leurs Ă©tudes ; ce sont en particulier : Basilio Catacora, Juan Bautista SagĂĄrnaga, Manuel de Oma y EchevarrĂa, Gregorio Lanza, Tiburcio LeĂłn de la Barra, JoaquĂn de la Riva, Felipe de la Riva, Juan PĂłrcel, Manuel Ortiz, Federico de Castro, JosĂ© Aliaga, BartolomĂ© Andrade, Gabino Estrada, Baltasar Alquiza, CrispĂn Santos Diez de Medina et GerĂłnimo CalderĂłn de la Barca. Câest du reste aussi Ă Chuquisaca quâils Ă©taient entrĂ©s en contact avec les rĂ©seaux indĂ©pendantistes et qu'ils avaient cĂŽtoyĂ© plusieurs des principaux rĂ©volutionnaires sud-amĂ©ricains : Jaime Zudåñez, Juan JosĂ© Castelli, Bernardo de Monteagudo, etc. qui sâĂ©taient eux aussi formĂ©s Ă lâAcadĂ©mie caroline.
La proclamation fait partie dâun ensemble de documents qui furent expĂ©diĂ©s de Chuquisaca Ă destination de diffĂ©rents lieux en AmĂ©rique espagnole. En voici le texte :
« Compatriotes : JusquâĂ prĂ©sent, nous avons tolĂ©rĂ© une espĂšce de bannissement au sein mĂȘme de notre patrie ; nous avons vu avec indiffĂ©rence durant plus de trois siĂšcles notre primitive libertĂ© soumise au despotisme et Ă la tyrannie dâun usurpateur injuste qui, nous dĂ©gradant hors de lâespĂšce humaine, nous a regardĂ©s comme des esclaves ; nous avons gardĂ© un silence assez semblable Ă la stupiditĂ© qui nous est attribuĂ©e par lâinculte Espagnol, en souffrant avec impassibilitĂ© que le mĂ©rite des AmĂ©ricains fĂ»t toujours un prĂ©sage dâhumiliation et de ruine. Il est temps donc de secouer le joug, aussi funeste Ă notre fĂ©licitĂ© quâil est favorable Ă lâorgueil national espagnol. Il est temps maintenant de lever enfin lâĂ©tendard de la libertĂ© dans ces colonies disgraciĂ©es, acquises sans y avoir le moindre titre et conservĂ©es avec la plus grande injustice et tyrannie. Valeureux habitants de La Paz et de tout lâempire du PĂ©rou, rĂ©vĂ©lez vos projets en vue de leur mise en Ćuvre ; mettez Ă profit les circonstances oĂč nous nous trouvons ; ne regardez pas avec dĂ©dain la fĂ©licitĂ© de notre sol, ni ne perdez jamais de vue lâunion qui doit rĂ©gner en tous, afin dâĂȘtre dorĂ©navant aussi heureux que nous Ă©tions disgraciĂ©s jusquâĂ prĂ©sent. »
Le manuscrit original est conservĂ© aux Archives gĂ©nĂ©rales de la Nation argentine Ă Buenos Aires, parmi les papiers confisquĂ©s et transmis aux autoritĂ©s de la vice-royautĂ© du RĂo de la Plata, auquel ressortissait la Real Audiencia de Charcas.
Quelques politiciens et intellectuels de La Paz prĂ©sentent cette proclamation comme un texte « Ă©crit Ă La Paz », mais les historiens en ont Ă©lucidĂ© lâorigine depuis un temps dĂ©jĂ et les manuscrits de lâĂ©poque ne laissent aucun doute Ă cet Ă©gard : la proclamation fut rĂ©digĂ©e dans la ville de Chuquisaca (La Plata, actuelle Sucre), ce qui par ailleurs ne diminue en rien lâimportance de la Junta Tuitiva instaurĂ©e Ă La Paz, ni la portĂ©e rĂ©volutionnaire de la politique quâelle mit en Ćuvre.
La Junte envoya un avis au gouverneur-intendant de PotosĂ pour expliquer son action :
« Si le peuple dâici, rĂ©uni avec toutes les hiĂ©rarchies que le constituent, rĂ©clama Ă voix haute la destitution de ses autoritĂ©s, câest parce que celles-ci lui Ă©taient suspectes et marchaient de concert avec dâautres dirigeants de ce royaume pour rĂ©aliser leurs visĂ©es infĂąmes et ambitieuses. »
Réaction des autorités espagnoles
Sur ces entrefaites, le gouverneur-intendant de PotosĂ, Francisco de Paula Sanz, rĂ©pudia lâAudiencia de Charcas, laquelle avait Ă©mis un syllogisme indĂ©pendantiste et appuyait la Junta Tuitiva de La Paz. Ă PotosĂ, il prit soin d'abord dâĂ©carter du bataillon de la garde civique tous les officiers amĂ©ricains et fit mettre en detention plusieurs personnalitĂ©s sympathisant avec lâAudiencia indĂ©pendantiste, parmi lesquels les chefs du bataillon des Amalgameurs (Azogueros). En outre, il sollicita des secours auprĂšs du vice-roi du PĂ©rou JosĂ© Fernando de Abascal y Sousa. Sur instruction du vice-roi Abascal, le prĂ©sident par intĂ©rim de la Real Audiencia de Cuzco, le brigadier JosĂ© Manuel de Goyeneche, offrit au vice-roi du RĂo de la Plata Baltasar Hidalgo de Cisneros ses forces militaires pour sĂ©vir contre les insurgĂ©s de La Paz et de Chuquisaca. Cisneros accepta le , moyennant quâil y eĂ»t coordination avec le gĂ©nĂ©ral Vicente Nieto, qui venait dâĂȘtre nommĂ© prĂ©sident de lâAudiencia de Charcas.
Abascal envoya le gouverneur dâHuarochiri, le colonel Juan RamĂrez Orozco, prendre le commandement des troupes Ă la frontiĂšre de lâintendance de Puno (situĂ©e dans la vice-royautĂ© du PĂ©rou) et de celle de La Paz. Orozco Ă©tablit son campement dans le village de Zepita, dâoĂč il dĂ©pĂȘcha une compagnie du RĂ©giment royal de VĂ©tĂ©rans et des milices dâArequipa, de Cuzco et de Puno. Lâavant-garde, placĂ©e sous les ordres du colonel PiĂ©rola, dĂ©logea les rĂ©volutionnaires du pont sur le fleuve rĂo Desaguadero, qui forme ici la frontiĂšre entre les deux vice-royautĂ©s.
Le , Goyeneche Ă son tour se mit en marche pour le campement de Zepita, tandis que le gouverneur-intendant de PotosĂ, Paula Sanz, mobilisait ses troupes en direction de Chuquisaca et que Cisneros dĂ©pĂȘchait depuis Buenos Aires un contingent de prĂšs dâun millier de soldats commandĂ© par le nouveau prĂ©sident de lâAudiencia de Charcas, le gĂ©nĂ©ral Vicente Nieto et par le sous-inspecteur gĂ©nĂ©ral Bernardo Lecocq. Ces troupes partirent de Buenos Aires le et incorporĂšrent quelques soldats Ă Salta. En faisaient partie des vĂ©tĂ©rans du corps de dragons, du RĂ©giment dâinfanterie fixe de Buenos Aires et du Corps royal dâartillerie, une compagnie de marine, des milices patriciennes, et des bataillons dâArribeños (litt. âriverainsâ, en lâespĂšce : riverains du RĂo de la Plata), dâAndalous, de Cantabres et des artilleurs de la UniĂłn.
Affrontements
La Junte rĂ©volutionnaire de La Paz organisa la dĂ©fense de la ville, envoya Victoriano Lanza Ă Chuquisaca pour y demander des renforts, et sâefforça en mĂȘme temps de propager lâinsurrection dans dâautres villes. LâĂ©quipement militaire prĂ©sent dans la ville consistait en seulement 800 fusils et 11 piĂšces dâartillerie. Goyeneche recevait en secret des courriers du sous-dĂ©lĂ©guĂ© de Larecaja, Francisco Mutari, qui lui servait dâagent de liaison avec ses partisans dans La Paz. Le fut dĂ©jouĂ©e une contre-rĂ©volution royaliste emmenĂ©e par Francisco SancristĂłbal, qui fut incarcĂ©rĂ©. La dissolution de la Junta Tuitiva, dĂ©cidĂ©e le , permit Ă Pedro Murillo de prendre le commandement politique et militaire, tandis quâĂ©tait dissous Ă©galement lâescadron de hussards. Le , une nouvelle tentative contre-rĂ©volutionnaire royaliste fut mise en Ă©chec.
Le , Goyeneche quitta le campement de Zepita et mit le cap sur La Paz, pendant que le , Murillo transfĂ©rait ses troupes et son artillerie Ă Chacaltaya, non loin de La Paz, Ă lâexception dâune compagnie chargĂ©e de garder la ville. Câest de cette compagnie que Juan Pedro de Indaburu, passĂ© aux royalistes, rĂ©ussira Ă sâemparer le ; il se saisit de plusieurs rĂ©volutionnaires et le lendemain fit pendre Pedro RodrĂguez. Murillo revint alors sur ses pas et pĂ©nĂ©tra dans la ville avec ses troupes, opĂ©ration lors de laquelle Indaburu sera blessĂ© puis exĂ©cutĂ© par Antonio de Castro, les troupes s'en retournant ensuite, aprĂšs avoir pillĂ© la ville, Ă Chacaltaya le mĂȘme jour.
Le , Goyeneche attaqua Chacaltaya Ă lâartillerie, forçant les rĂ©volutionnaires Ă prendre la fuite en direction du partido de Las Yungas en abandonnant toute leur artillerie et 200 fusils, et permettant ainsi lâentrĂ©e de Goyeneche dans la ville la mĂȘme journĂ©e. De lĂ , il envoya le colonel Domingo TristĂĄn avec une division de 100 hommes vers Las Yungas, oĂč, entre octobre et , il battit Victorio GarcĂa Lanza lors des batailles dâIrupana et de Chicaloma. Ă lâissue de cette derniĂšre bataille, Lanza et Antonio de Castro furent exĂ©cutĂ©s et leurs tĂȘtes fichĂ©es sur des piques. Entre-temps, Murillo fut fait prisonnier lui aussi dans les premiers jours de dĂ©cembre Ă Zongo, suivi de nombreux autres rĂ©volutionnaires[3].
RĂ©pression
Lâinsurrection matĂ©e, Goyeneche ordonna la mise en jugement des rĂ©volutionnaires. Le vice-roi Cisneros lui enjoignit « de procĂ©der contre les coupables promptement et militairement, en appliquant toute la rigueur de la loi », tandis que de son cĂŽtĂ© le gĂ©nĂ©ral Vicente Nieto demandait de « pratiquer un chĂątiment prompt, expĂ©ditif et rapide ». Dix des meneurs furent pendus, dâautres furent dĂ©capitĂ©s et leurs tĂȘtes fichĂ©es sur des pieux, que lâon exposa ensuite sur la voie publique, et dâautres encore furent emprisonnĂ©s ou proscrits vers les Ăźles Malouines et les Philippines ; tous se virent confisquer leurs biens. Au total, 86 procĂšs eurent lieu jusquâen [4]. Les exĂ©cutĂ©s du Ă©taient Basilio Catacora, Buenaventura Bueno, Melchor JimĂ©nez, Mariano Graneros, Juan Antonio Figueroa, Apolinar JaĂ©n, Gregorio GarcĂa Lanza, Juan Bautista SagĂĄrnaga et Pedro Domingo Murillo, lequel, selon une lĂ©gende diffusĂ©e Ă La Paz, prononça, avant son exĂ©cution par la potence, les paroles suivantes :
« Compatriotes, je meurs, mais le brandon allumĂ© que je laisse derriĂšre moi, nul ne pourra lâĂ©teindre â Vive la libertĂ© ! »[5]
Le , Goyeneche quitta La Paz pour regagner Cuzco, laissant dans la ville Juan RamĂrez Orozco comme gouverneur-intendant, avec 400 hommes.
Références
- Observons que le terme junta nâa pas en espagnol la connotation nĂ©gative quâil a dans les autres langues, notamment en français, et dĂ©signe, de façon tout Ă fait gĂ©nĂ©rale, tout groupe de personnes aptes ou habilitĂ©es Ă prendre des dĂ©cisions au nom dâune collectivitĂ©, quelle que soit la taille et la nature de celle-ci et quelle que soit la matiĂšre concernĂ©e. Ainsi, un comitĂ© dâentreprise est appelĂ© junta de empresa, le conseil communal junta municipal, etc. Pour mieux coller aux dĂ©nominations historiques originales, nous avons jugĂ© opportun de garder le mot â sous sa forme francisĂ©e de junte â dans PremiĂšre Junte, Grande Junte, Junte protectrice, etc., plutĂŽt que dâadopter des appellations telles que Premier ComitĂ© de gouvernement, Grand ComitĂ©, etc., sans doute plus neutres, mais assez malcommodes et peu Ă©vocatrices.
Quant au vocable tuitivo, il signifie 'qui garde, protĂšge, prĂ©serveâ et son sens apparaĂźt mieux quand on considĂšre la dĂ©nomination complĂšte de la junte de La Paz : Junta Tuitiva de los Derechos del Rey y del Pueblo, soit : Junte protectrice (ou de dĂ©fense ou gardienne) des droits du Roi et du Peuple. - Juan R. Muñoz Cabrera, La guerra de los 15 años en el Alto PerĂș, 1867.
- 16 de julio de 1809, la primera revoluciĂłn independentista del continente
- Levantamiento de La Paz - 1809 « Copie archivée » (version du 1 août 2008 sur Internet Archive)
- En espagnol : « Compatriotas, yo muero, pero la tea que dejo encendida nadie la podrĂĄ apagar, ÂĄviva la libertad! ». Cf. GalerĂa de hombres cĂ©lebres de Bolivia, p. 186.