Pyramide de Mai
La pyramide de Mai (en esp. PirĂĄmide de Mayo, en rĂ©alitĂ© un obĂ©lisque) se dresse au centre de la place de Mai Ă Buenos Aires et est le premier monument patriotique â c'est-Ă -dire commĂ©morant lâindĂ©pendance â dont se dota la capitale argentine. Son histoire dĂ©bute en , lorsque la Grande Junte dĂ©cida de faire construire un monument sur le cĂŽtĂ© ouest de la place, pour cĂ©lĂ©brer le premier anniversaire de la rĂ©volution de Mai de 1810, Ă©vĂ©nement qui enclencha le processus dâindĂ©pendance.
au centre de la place de Mai Ă Buenos Aires
Type | |
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Destination initiale |
monument commémoratif de la révolution de Mai |
Destination actuelle |
idem |
Style | |
Architecte |
Francisco Cañete (Ćuvre originelle de 1811) ; Prilidiano PueyrredĂłn (remaniement de 1856) ; et Joseph Dubourdieu (statue de la LibertĂ© sur le faĂźte) |
Matériau | |
Construction | |
Hauteur |
prĂšs de 19 m |
Propriétaire |
Autorité fédérale argentine |
Patrimonialité | |
Site web |
Pays | |
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Commune |
Coordonnées |
34° 36âČ 32âł S, 58° 22âČ 20âł O |
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En 1856, sous la direction de lâartiste Prilidiano PueyrredĂłn, cette premiĂšre version du monument fut remplacĂ©e par une nouvelle, construite sur les fondations de lâancienne ; câest cette nouvelle pyramide que lâon peut observer sur la place de Mai actuellement.
En 1912, aprĂšs lui avoir fait subir quelques modifications, on la dĂ©plaça vers son emplacement actuel, 63 m plus Ă lâest du lieu oĂč elle se trouvait Ă lâorigine, dans lâintention (non rĂ©alisĂ©e) dâĂ©riger autour dâelle un Ă©norme monument qui lâeĂ»t contenue dans son intĂ©rieur.
La statue de la LibertĂ©, Ćuvre du sculpteur français Joseph Dubourdieu, couronne le monument et servit de modĂšle Ă la reprĂ©sentation allĂ©gorique de la rĂ©publique argentine. Telle quelle, la Pyramide mesure, depuis le sol jusquâau bonnet phrygien coiffant ladite statue, 18,76 m[1].
« Buenos Aires possĂšde son monument fondamental unique, Ă©ponyme : la pyramide de Mai. Site et symbole ombilical de la libertĂ© (...) ; pour qui regarde de la rue, câest une norme, un ferment et un point de dĂ©part ; pour qui la contemple des balcons du palais du gouvernement, un indice ou un reproche. (...) On ne la peut dĂ©crire, et il nây a pas lieu que le touriste la comprenne ; on la chĂ©rit, on la sent. De mĂȘme, nous nâallons presque jamais la visiter, mais il nous est indispensable de savoir quâelle se tient lĂ . Câest elle la vĂ©ritable capitale de la Nation[2]. »
â Florencio EscardĂł, 1945.
Histoire
Inauguration
En , le gouvernement de la Grande Junte disposa que le premier anniversaire de la rĂ©volution de Mai fĂ»t cĂ©lĂ©brĂ© le de cette mĂȘme annĂ©e, et sollicita le cabildo dâen dĂ©finir les modalitĂ©s les plus appropriĂ©es. Le , le cabildo approuva le programme des festivitĂ©s, lequel incluait dâĂ©riger une transitoire colonne du 25-Mai. Il ne subsiste aucun document qui permettrait de savoir pourquoi lâon choisit la forme dâun obĂ©lisque pour le monument ; il est certain quâen dĂ©pit de cette forme le monument a toujours Ă©tĂ© dĂ©signĂ© par le terme de pyramide[1].
Ă cette Ă©poque sâĂ©tirait encore, au milieu de lâactuelle place de Mai, la Recova de Buenos Aires, sorte de marchĂ© couvert tout en longueur et en arcades, achevĂ© de construire en 1804, laquelle divisait la place de Mai en deux places distinctes juxtaposĂ©es : celle sise en face de lâactuelle Casa Rosada, construite Ă lâemplacement de lâancien fort (en esp. fuerte), qui se nommait Plazoleta del Fuerte, et celle sise devant le cabildo, appelĂ©e Plaza de la Victoria, dont le centre fut choisi pour recevoir la pyramide.
La construction du monument fut confiĂ©e Ă Francisco Cañete, maĂźtre dâĆuvre, qui fut assistĂ© de Juan Gaspar HernĂĄndez, professeur de sculpture de Valladolid, et sur indication de qui lâobĂ©lisque fut Ă©rigĂ© en matĂ©riaux solides, e.a. 500 briques, au lieu du bois initialement prĂ©vu[1] - [3].
Le de la mĂȘme annĂ©e, lâon posa les fondations, pendant que de petits orchestres crĂ©aient une ambiance festive.
Le , lâĆuvre fut inaugurĂ©e, nonobstant que Cañete nâeĂ»t pas rĂ©ussi Ă lâachever dans les dĂ©lais prescrits et que la pyramide ne le serait que plusieurs jours plus tard. Lâon fixa au pied du monument les banniĂšres des rĂ©giments de Patriciens, dâArribeños, de Pardos y Morenos (noirs et mĂ©tis), dâArtillerie, de Hussards et de Grenadiers de la garnison de Buenos Aires. En mĂȘme temps que la pyramide, la CathĂ©drale fut illuminĂ©e Ă profusion, et la Recova brillait de ses 1141 bougies. Les festivitĂ©s, qui incluaient des danses, des tirages au sort et des affranchissements dâesclaves, se prolongĂšrent pendant quatre jours[1].
Le jour de lâinauguration, MarĂa Guadalupe Cuenca, lâĂ©pouse de Mariano Moreno, ignorante encore de ce que celui-ci Ă©tait dĂ©cĂ©dĂ© dâune intoxication accidentelle le en haute mer, Ă©crivit une lettre Ă son mari, dans laquelle elle lâentretenait sur la journĂ©e de lâinauguration : « On est dans une grande cĂ©rĂ©monie dâaction de grĂąces pour lâinstallation de la Junte ; ChorroarĂn prononce un prĂȘche, on a fait des arcs de triomphe, une Pyramide au milieu de la place, bien quâon ait pas pu la terminer ». Auparavant dĂ©jĂ , le , dans une autre lettre, elle lui communiquait « quâon dressait une pyramide sur la place principale... », cette lettre Ă©tant du reste la premiĂšre Ă©vocation de ce monument faite par un particulier. Pour sa part, le chroniqueur portĂšgne Juan Manuel Beruti Ă©crivit Ă propos de la fĂȘte dâinauguration : « Ă cette mĂȘme occasion a Ă©tĂ© construite la grande pyramide qui dĂ©core la plaza Mayor de cette capitale et rappelle Ă la postĂ©ritĂ© les triomphes de cette ville, et dont les fondations ont commencĂ© Ă ĂȘtre posĂ©es le dernier ; mais, quoiquâelle ne soit pas encore dotĂ©e des hiĂ©roglyphes, grillages et ornements quâil est prĂ©vu quâelle ait, Ă cause du peu de temps dont on disposait, nĂ©anmoins on lui a apposĂ© sur les quatre faces, provisoirement, un dizain en vers, faisant allusion aux Ćuvres et aux victoires rĂ©alisĂ©es par les valeureuses troupes de cette immortelle citĂ©... »[4] - [5]
Si les plans dessinĂ©s par Cañete nâont pas pu ĂȘtre retrouvĂ©s, des Ă©tudes effectuĂ©es ultĂ©rieurement ont conclu quâil sâagissait dâune pyramide creuse, le manque de temps nâayant pas permis en effet de la construire en maçonnerie compacte. Elle Ă©tait faite de briques dâadobe et avait une hauteur de 13 mĂštres environ (montĂ©e sur son socle, elle atteignait environ 15 m)[1]; elle sâĂ©levait sur un soubassement Ă deux gradins surmontĂ© dâun piĂ©destal simple Ă quatre angles rentrants et corniche rĂ©gnant sur lâensemble. Une sphĂšre dĂ©corative couronnait le tout. Elle Ă©tait entourĂ©e dâune grille soutenue par douze piliers se terminant chacun par une poire ronde. Aux quatre angles du grillage furent placĂ©s en 1812 un mĂȘme nombre de poteaux, desquels pendaient des lampadaires alimentĂ©s par de la graisse de cheval[1].
Les jours de fĂȘtes patriotiques, il Ă©tait de coutume dâorner profusĂ©ment le monument de rubans, fanions, lampions et dâĂ©criteaux se rĂ©fĂ©rant Ă la rĂ©volution de Mai.
En 1826, le prĂ©sident Bernardino Rivadavia projeta dâĂ©riger un monument aux grands hommes de la rĂ©volution de Mai, « se substituant Ă celui existant aujourdâhui », qui eĂ»t consistĂ© en une magnifique fontaine de bronze et eĂ»t portĂ© lâinscription : « La RĂ©publique argentine, aux auteurs de la rĂ©volution lors du mĂ©morable ». Lâon dĂ©battait alors de lâopportunitĂ© de faire enlever la pyramide de Mai. Quoi quâil en soit, par suite de la dĂ©mission de Rivadavia en 1827, le projet nâaboutit pas, nonobstant que le CongrĂšs eĂ»t dĂ©jĂ adoptĂ© la loi concernĂ©e[1].
En 1834, la pyramide se trouvait en ruines, dĂ©crĂ©pie et rabougrie, et son grillage de clĂŽture tordu et rouillĂ©. Le gouvernement provincial engagea le maçon Juan Sidders et le ferronnier Robert M. Gaw pour une rĂ©fection. Le travail fut achevĂ© et livrĂ© en janvier de lâannĂ©e suivante, deux mois aprĂšs lâaccession de Juan Manuel de Rosas au poste de gouverneur[4]. En 1852, les frĂšres Jaunet, utilisant un petit gazomĂštre, illuminĂšrent lâobĂ©lisque Ă lâaide de lampes Ă gaz, ce qui ne laissa pas dâĂ©tonner le public, qui nâavait jusque-lĂ connu que les falots alimentĂ©s de graisse de cheval[1].
En 1854, Ă lâoccasion de la prestation de serment Ă la constitution de lâĂtat de Buenos Aires le , quatre autres pyramides, de style gothique, pourvues dâinscriptions et abondamment ornĂ©es de dĂ©corations florales, furent posĂ©es aux quatre angles du monument.
La nouvelle Pyramide
En 1856, le monument se trouva de nouveau fort dĂ©labrĂ©. Le de cette annĂ©e, un nouvel exĂ©cutif municipal fut investi Ă Buenos Aires, et la rĂ©paration du monument sera lâune de ses premiĂšres mesures. Une commission nommĂ©e Ă cet effet, dont faisait partie Domingo Faustino Sarmiento, Felipe Botet et Isaac FernĂĄndez Blanco, confia au peintre et architecte Prilidiano PueyrredĂłn le soin de le rĂ©nover. Celui-ci conçut un projet tendant Ă le rendre plus artistique et plus grandiose. Cette idĂ©e acceptĂ©e, lâon Ă©difia la pyramide actuelle, en gardant au-dedans de la nouvelle pyramide une partie de lâoriginelle, qui fut recouverte de briques et de mortier[1]. Lâarchitecte modifia le piĂ©destal et le sommet dâorigine, rendant le monument plus haut et plus large[3]. Il fut ornĂ© Ă son faĂźte dâune statue de la LibertĂ© coiffĂ©e dâun bonnet phrygien, allĂ©gorie de la rĂ©publique dâArgentine. Ladite statue, haute de 3,6 m, fut rĂ©alisĂ©e, en employant un mĂ©lange de matĂ©riaux, par le sculpteur français Joseph Dubourdieu. Ce mĂȘme artiste fut chargĂ© Ă©galement de rĂ©aliser les figures symboliques de lâIndustrie, du Commerce, des Sciences et des Arts, lesquelles furent disposĂ©es aux quatre angles du socle.
Sur les faces de lâobĂ©lisque furent apposĂ©s : un soleil dorĂ© rayonnant tournĂ© vers le levant (c'est-Ă -dire en direction de lâactuelle Casa Rosada), et, sur les trois autres faces, des hauts-reliefs reprĂ©sentant des couronnes de lauriers. PueyrredĂłn remania Ă©galement le piĂ©destal et le chapiteau original en augmentant leur hauteur et leur largeur. Le blason national de lâArgentine fut apposĂ© sur chacun des quatre cĂŽtĂ©s du socle. Lâon installa un nouveau grillage avec Ă chacun de ses angles un rĂ©verbĂšre Ă gaz. Lâouvrage fut achevĂ© le . Le monument fut dotĂ© de stuc imitant le marbre pour lui confĂ©rer un aspect plus rutilant, opĂ©ration qui ne fut pas une rĂ©ussite, Ă telle enseigne quâun an seulement plus tard, le stuc dut ĂȘtre renouvelĂ©[4].
Le , le monument fut tĂ©moin de la prestation de serment Ă la constitution de la Nation argentine par les autoritĂ©s de la province de Buenos Aires, avec Ă leur tĂȘte BartolomĂ© Mitre.
Les voyageurs en visite dans la ville exprimĂšrent des opinions divergentes sur le monument :
« La place de la Victoire, avec sa statue de la LibertĂ©, au haut piĂ©destal, Ă©tait aux yeux de Seymour la partie la plus jolie de la ville ; Burton en revanche releva, concernant lâobĂ©lisque de brique emplĂątrĂ©e, les rachitiques lilas de Perse, « purs poteaux en aoĂ»t », ainsi que tout lâentour, qui lui paraissait petit, pauvre et laid[6]. »
En 1859, le revĂȘtement utilisĂ© nâayant pas fait preuve de la durabilitĂ© escomptĂ©e, lâon recouvrit sa base de plaques de marbre. En 1873, les statues, faites en terre cuite et stuc, Ă©taient en mauvais Ă©tat, raison pour laquelle elles furent retirĂ©es et remplacĂ©es par des sculptures en marbre de Carrare (la GĂ©ographie, lâAstronomie, la Navigation et lâIndustrie), qui ornaient auparavant le premier Ă©tage de la Banco Provincia, rue San MartĂn. Ces statues y restĂšrent ensuite jusquâen 1912, date Ă laquelle, Ă lâoccasion du dĂ©placement de la pyramide (cf. ci-aprĂšs), elles furent enlevĂ©es et rangĂ©es dans le dĂ©pĂŽt municipal, pour ĂȘtre enfin, le , disposĂ©es sur lâancienne placette Saint-François (Plazoleta de San Francisco), Ă lâintersection des rues Defensa et Alsina, Ă quelque 150 m de lâemplacement actuel de la pyramide, et oĂč elles se trouvent encore[1].
En 1883, sous lâintendance de Torcuato de Alvear, la Recova fut dĂ©molie et, depuis lors, les deux places â de la Victoire et du Fort â nâen formĂšrent plus quâune seule, lâactuelle place de Mai. Lâintendant considĂ©rait que la pyramide devait elle aussi ĂȘtre dĂ©molie pour faire place Ă un autre monument, plus grandiose, projet pour lâexĂ©cution duquel il sollicita lâautorisation au ComitĂ© de dĂ©libĂ©ration de la municipalitĂ©. Ce comitĂ© sâemploya Ă recueillir lâopinion de plusieurs citoyens distinguĂ©s : les anciens prĂ©sidents BartolomĂ© Mitre, Domingo Faustino Sarmiento et NicolĂĄs Avellaneda ; Vicente F. LĂłpez ; AndrĂ©s Lamas ; Miguel EstĂ©vez SeguĂ, qui fut commissaire de police en chef et prĂ©sident de lâexĂ©cutif municipal ; Ăngel Justiniano Carranza, Manuel Ricardo Trelles et JosĂ© Manuel Estrada. Quatre parmi eux, Avellaneda, Lamas, Estrada et EstĂ©vez SeguĂ, penchaient pour sauvegarder lâobĂ©lisque. Ă lâinverse, Mitre p.ex. estimait que « si ce monument existait dans sa primitive et austĂšre simplicitĂ©, il ne serait pas douteux quâil faille le conserver (...mais...) il a Ă©tĂ© altĂ©rĂ© dâune telle sorte, dans ses lignes gĂ©nĂ©rales et dans ses proportions ainsi que dans son rustique style architectural, que, (... ayant ainsi Ă©tĂ© rejetĂ©) hors de la tradition historique qui lui a donnĂ© sa signification (...), il peut et doit ĂȘtre dĂ©moli comme tel, car constituant une falsification. »[7] Il ne considĂ©rait comme digne dâĂȘtre respectĂ© et conservĂ© que le seul soubassement.
Sarmiento rĂ©pudiait les profanations pratiquĂ©es sur la pyramide originelle. Le Dr. NicolĂĄs Avellaneda Ă©tait dâavis quâon devait la rĂ©tablir dans sa forme primitive, en la dĂ©pouillant des ornementations ajoutĂ©es plus tard, mais sans cependant la dĂ©truire[3].
Pour AndrĂ©s Lamas au contraire, le monument devait ĂȘtre prĂ©servĂ©, pour un certain nombre de raisons :
1) il reprĂ©sente le point de dĂ©part de notre propre vie, Ă partir duquel sâest Ă©crite une histoire exclusivement argentine et Ă partir duquel la Plaza de la Victoria sâest muĂ©e en forum du peuple ;
2) le peuple le relie aux premiĂšres victoires patriotiques, et câest au pied de ce monument que se cĂ©lĂšbrent toutes les fĂȘtes commĂ©moratives importantes, ce qui le hisse au statut dâautel de la libertĂ© ;
3) il incarne la vĂ©ritĂ© de son temps, et sâil est pauvre, câest parce que les patriotes Ă©taient pauvres mais libres ;
4) pour pouvoir le dĂ©molir, il est nĂ©cessaire dâadopter une loi nationale qui le permette, attendu que la municipalitĂ© nâa pas compĂ©tence sur lui[8].
Les opinions et protestations journalistiques furent telles que le ComitĂ© de dĂ©libĂ©ration et Alvear jugĂšrent prĂ©fĂ©rable de ne plus prendre aucune initiative en la matiĂšre. Pourtant, le , le CongrĂšs de la nation dĂ©cida dâĂ©liminer le « triste monument » et dâinstaller Ă sa place « une magnifique fontaine de bronze », mais lâinitiative nâaboutit pas.
DĂ©placement
En 1906, pour le centenaire de la rĂ©volution de Mai, on conçut le dessein dâĂ©difier un grandiose « Monument Ă la rĂ©volution de 1810 », avec lâidĂ©e, une fois encore, que ce nouveau monument renfermĂąt dans son intĂ©rieur lâancienne Pyramide. Un concours international fut lancĂ© et gagnĂ© par deux Italiens. Lâemplacement du monument devait ĂȘtre le centre de la place de Mai, ce pour quoi il Ă©tait donc nĂ©cessaire de dĂ©placer la Pyramide. Cette opĂ©ration eut lieu en 1912, sous la direction dâAnselmo Borrel. PrĂ©alablement, le ComitĂ© historique et numismatique (Junta HistĂłrica y NumismĂĄtica, prĂ©dĂ©cesseur de lâAcadĂ©mie nationale dâhistoire) avait rĂ©alisĂ© une analyse, qui confirma que la pyramide dâorigine se trouvait bien sous les additions effectuĂ©es en 1857[9].
Dâabord, comme indiquĂ© ci-haut, les statues de marbre qui entouraient la pyramide lui furent enlevĂ©es pour de bon. Ensuite, on lâenroba dâune armature de bois pour la protĂ©ger pendant la manĆuvre. Lâon disposa deux rails, distants lâun de lâautre de 4 m, supportĂ©s par des piliers de maçonnerie et aptes Ă soutenir le poids de 225 tonnes. AprĂšs quâeut Ă©tĂ© glissĂ©e sous la Pyramide une plateforme de bĂ©ton appuyĂ©e sur de solides roues, lâopĂ©ration de traction put sâeffectuer, par le moyen de treuils. Le monument parcourut ainsi, pas Ă pas, du 12 au , une distance de 63,17 m. La manĆuvre terminĂ©e, lâon disposa sous la pyramide une urne de mĂ©tal avec une lĂ©gende rappelant son transfert.
Toutefois, le dessein de lâenfermer dans un autre monument plus vaste resta lettre morte, en partie par suite du dĂ©clenchement de la PremiĂšre Guerre mondiale[1] - [3] et en partie Ă cause des protestations de ceux dĂ©favorables au dĂ©placement de la Pyramide. Ainsi, en 1915, une fois exaucĂ© le vĆu des journaux de voir remises Ă leur ancienne place les plaques dâhommage auparavant enlevĂ©es, tout retourna donc Ă lâĂ©tat antĂ©rieur, abstraction faite du dĂ©placement et de ce que, outre les statues, lâon avait Ă©galement retirĂ© le grillage, remplacĂ© par une fosse peu profonde couverte de gazon[4] - [9].
Ensuite ressurgit derechef lâidĂ©e de reconstituer le monument Ă son Ă©tat historique, en lui faisant retrouver, dans la mesure du possible, son ancienne silhouette. On construisit des marches et on replaça la grille qui lâentourait, tout en faisant enlever lâarmature de stuc et les figures inopportunes. Mais dans les rĂ©solutions postĂ©rieures, les rĂ©novations se limitaient Ă ramener la Pyramide au niveau du sol, Ă renouveler sa peinture et Ă remplacer les Ă©cussons par celui de 1813, en plus de lui restituer son grillage originaire.
Le , la Commission des monuments historiques dévoila, prÚs de la base de la Pyramide, du cÎté ouest, une plaque soulignant le caractÚre éminent du monument, lequel fut ensuite déclaré monument historique par décret du Pouvoir exécutif national no 120.412 du .
Le , les autoritĂ©s de lâUruguay offrirent Ă lâArgentine une plaque, qui fut apposĂ©e sur la face est et qui proclamait [4]:
« Hommage du gouvernement et peuple Oriental Ă la grande nation argentine Ă lâoccasion du 150e anniversaire de la rĂ©volution de Mai, date glorieuse qui fut lâamorce du processus dâĂ©mancipation des peuples libres du RĂo de la Plata. »
Le jardinet qui lâentoure contient de la terre en provenance de chacune des provinces dâArgentine[10].
La Pyramide et les disparus de la dictature militaire
Sous la dictature militaire autonommĂ©e « Processus de rĂ©organisation nationale » (1976-1983), les MĂšres de la place de Mai et les Grands-mĂšres de la place de Mai dĂ©cidĂšrent de faire chaque jeudi une marche autour de la Pyramide, en ayant la chevelure couverte dâun fichu blanc, en signe de protestation contre la dĂ©tention-disparition de membres de leurs familles, parmi lesquels quelque 500 bĂ©bĂ©s[11].
Le , la LĂ©gislature de la ville autonome de Buenos Aires adopta la loi 1653, qui dĂ©clara « site historique » la zone entourant la pyramide de Mai. Dans cet espace se trouvent actuellement peints, de maniĂšre stylisĂ©e, selon une disposition radiale formant un cercle, les emblĂ©matiques fichus que les mĂšres de personnes disparues durant la dictature militaire avaient coutume de porter sur la tĂȘte en guise dâidentification [3].
Le de la mĂȘme annĂ©e, Ă la requĂȘte de ses enfants, les cendres dâAzucena Villaflor furent dĂ©posĂ©es auprĂšs de la Pyramide, sur le lieu mĂȘme oĂč elle avait commencĂ© Ă organiser la lutte des mĂšres de la place de Mai[12].
Restauration en vue du bicentenaire de lâArgentine
En , grĂące Ă une initiative privĂ©e Ă©manant dâun studio de restauration nommĂ© Uffizi, un groupe de huit personnes dirigĂ©es par JosĂ© MastrĂĄngelo restaura la Pyramide afin de la mettre en consonance avec les grandes festivitĂ©s du bicentenaire de la rĂ©volution de Mai. Le studio assura le financement tant des matĂ©riaux que de la main-dâĆuvre[13]. Le monument fut alors soumis Ă des opĂ©rations dâinspection, par sondages exploratoires ; lâon procĂ©da au comblement du corps principal et Ă un reprofilage des arĂȘtes corrodĂ©es par le temps, et le monument fut revĂȘtu Ă neuf au moyen dâune peinture au latex[14].
Plaque commémorative sur la face ouest
Sur la flanc ouest de la pyramide se trouve apposĂ©e une plaque singuliĂšre, de bronze, de 85 cm de long sur 57 cm de haut, dont tout le contenu consiste en ces deux seules mentions : Felipe Pereyra de Lucena et Manuel Artigas. Ces deux noms, aujourdâhui assurĂ©ment inconnus pour la majoritĂ© des passants, furent inscrits sur la Pyramide en 1891, sous la prĂ©sidence du Dr. Carlos Pellegrini, Ă lâinitiative dâune commission de personnes prĂȘtes Ă en assumer les coĂ»ts, et en exĂ©cution de ce qui avait Ă©tĂ© en son temps dĂ©cidĂ© par la Grande Junte le , savoir : inscrire sur la Pyramide les noms de ces deux hommes, qui furent les deux premiers officiers Ă perdre la vie sur les champs de bataille en combattant pour lâindĂ©pendance de lâArgentine â ce sont :
- Manuel Artigas, nĂ© Ă Montevideo en 1774, cousin du caudillo oriental JosĂ© Gervasio Artigas, faisait partie lors de la rĂ©volution de Mai du groupe rĂ©volutionnaire auquel appartenaient Ă©galement Domingo French et Antonio Luis Beruti et participa comme capitaine Ă la marche sur le Paraguay. ĂlevĂ© au grade de commandant, il combattit en hĂ©ros Ă la bataille de Campichuelo et, blessĂ© le Ă San JosĂ©, succomba Ă ses blessures le , Ă lâĂąge de 33 ans[1].
- Felipe Pereyra de Lucena, nĂ© en 1789, prit part en tant que cadet Ă la rĂ©sistance aux invasions britanniques. Durant la rĂ©volution de Mai, porteur dĂ©jĂ du grade de lieutenant, il sâengagea dans la premiĂšre campagne auxiliaire du Haut-PĂ©rou, obtenant en sa promotion au grade de capitaine. BlessĂ© sur le territoire de lâactuelle Bolivie, il fut transportĂ© dans la localitĂ© de JesĂșs de Machaca, oĂč il dĂ©cĂ©da le , Ă ĂągĂ© de 22 ans[1].
La nouvelle de ces deux pertes fit impression et le comitĂ© de gouvernement disposa que leurs noms fussent gravĂ©s dans une lame de bronze. Toutefois, la plaque nâayant pu ĂȘtre financĂ©e, la dĂ©cision ne fut pas mise Ă exĂ©cution, en dĂ©pit des instances du pĂšre du capitaine Pereyra de Lucena en 1812. Des membres de la famille du capitaine insistĂšrent une nouvelle fois en 1856, mais lâaffaire resta en suspens. Ce nâest quâen 1891 que finalement, Ă lâinstigation dâun groupe de personnes, les fonds nĂ©cessaires purent ĂȘtre rĂ©unis par voie de souscription populaire, et la plaque apposĂ©e le de cette mĂȘme annĂ©e [1].
RĂ©pliques
Dans la ville de La Punta (province de San Luis) ont été construites des répliques de la pyramide de Mai et du cabildo de Buenos Aires, selon les plans originaux[15].
Le , Ă la faveur de la cĂ©lĂ©bration du 150e anniversaire du premier cri de libertĂ© de la nation argentine, une rĂ©plique de la pyramide de Mai fut inaugurĂ©e dans la ville de Campana (province de Buenos Aires), sur la place Eduardo Costa, face Ă lâhĂŽtel de ville. Le monument fut rĂ©alisĂ© sur sollicitation de lâadjoint au maire Calixto B. Dellepiane et offert par un donateur privĂ©, aprĂšs approbation par la municipalitĂ©[16].
En outre, Ă lâune des extrĂ©mitĂ©s de la place San MartĂn dans la ville de BelĂ©n de Escobar, Ă©galement dans la province de Buenos Aires, se dresse une autre rĂ©plique de la pyramide de Mai, bĂątie en acier et en bĂ©ton[17].
Une autre rĂ©plique encore a Ă©tĂ© crĂ©Ă©e dans la ville uruguayenne de San JosĂ© de Mayo, oĂč le capitaine Manuel Artigas, lâune des deux personnalitĂ©s honorĂ©es sur la plaque de bronze sur la face ouest de la Pyramide originale, mourut le des suites des blessures contractĂ©es lors de la bataille survenue dans cette localitĂ©[18] - [19].
Enfin, la ville italienne de Potenza Picena hĂ©berge elle aussi une rĂ©plique de la Pyramide, cadeau offert par des immigrants italiens qui aprĂšs plusieurs annĂ©es passĂ©es en Argentine sâen Ă©taient retournĂ©s dans leur pays dâorigine.
Références
- Revista Buenos Aires nos cuenta nÂș 15 (1991).
- Florencio EscardĂł, GeografĂa de Buenos Aires. Buenos Aires, Ă©d. Losada, 1945.
- Escultura y Poder, de MarĂa del CĂĄrmen Magaz, 2007.
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- Recuerdos y festejos del 25 de Mayo, par Mario Golman, dans la revue Todo es Historia, n° 515, juin 2010.
- DÂŽAgostino, GarcĂa de Rebok et Asato y LĂłpez, Imagen de Buenos Aires a travĂ©s de los viajeros, 1870-1910, Buenos Aires, UBA, ColecciĂłn del IV Centenario de Buenos Aires, 1981, p. 28.
- Romulo Zabala, Historia de la pirĂĄmide de Mayo, Academia nacional de la histoire, Buenos Aires 1962.
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Sources consultées
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- Revue Buenos Aires nos cuenta nÂș 15 (1991). Revue dirigĂ©e par Elisa Casella de CalderĂłn.
- Carlos Vigil, Los Monumentos y lugares histĂłricos de la Argentina, AtlĂĄntida,