Norodom Sihanouk
Norodom Sihanouk (en khmer : ááááááá áážá áá», NĂŽroĆtdĂĄm SeihÄnĆ, /nÉroËtÉÉm sÉjhanuÊ/), nĂ© le 31 octobre 1922 Ă Phnom Penh et mort le 15 octobre 2012 Ă PĂ©kin, est un homme d'Ătat cambodgien, figure dominante de la vie politique de son pays dans la seconde moitiĂ© du XXe siĂšcle. Il a Ă©tĂ© tour Ă tour et parfois simultanĂ©ment roi, Premier ministre, « chef d'Ătat » du royaume, chef de plusieurs gouvernements en exil, puis Ă nouveau roi.
Norodom Sihanouk ááááááá áážá áá» | ||
Norodom Sihanouk en 1983. | ||
Titre | ||
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Roi du Cambodge (2e rĂšgne) | ||
â (11 ans, 3 mois et 23 jours) |
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Premier ministre | Hun Sen Norodom Ranariddh Ung Huot Hun Sen |
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PrĂ©dĂ©cesseur | Chea Sim (prĂ©sident du Conseil d'Ătat) | |
Successeur | Norodom Sihamoni | |
Chef d'Ătat du Cambodge | ||
â (11 mois et 16 jours) |
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Premier ministre | Penn Nouth | |
PrĂ©dĂ©cesseur | Sak Sutsakhan (en) (ComitĂ© suprĂȘme, RĂ©publique khmĂšre) | |
Successeur | Khieu Samphùn (Président du Praesidium) | |
â (9 ans, 8 mois et 26 jours) |
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Premier ministre | Pho Proeung Penn Nouth Lui-mĂȘme Nhiek Tioulong Chau Sen Cocsal Chum Norodom Kanthoul Lon Nol Son Sann Penn Nouth Lon Nol |
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Prédécesseur | Norodom Suramarit | |
Successeur | Cheng Heng (intérim) | |
Premier ministre du Cambodge | ||
â (2 mois et 27 jours) |
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Chef de l'Ătat | Lui-mĂȘme | |
Prédécesseur | Penn Nouth | |
Successeur | Nhiek Tioulong | |
â (9 mois et 9 jours) |
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RĂ©gent | Sisowath Monireth Sisowath Kosamak |
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Prédécesseur | Sim Var | |
Successeur | Pho Proeung | |
â (3 mois et 8 jours) |
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Monarque | Norodom Suramarit | |
Prédécesseur | Sam Yun | |
Successeur | Sim Var | |
â (1 mois) |
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Monarque | Norodom Suramarit | |
Prédécesseur | Khim Tit | |
Successeur | Sam Yun | |
â (24 jours) |
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Monarque | Norodom Suramarit | |
Prédécesseur | Oum Cheang Sun | |
Successeur | Khim Tit | |
â (3 mois et 2 jours) |
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Monarque | Norodom Suramarit | |
Prédécesseur | Leng Ngeth | |
Successeur | Oum Cheang Sun | |
â (11 jours) |
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Monarque | Lui-mĂȘme | |
Prédécesseur | Chan Nak | |
Successeur | Penn Nouth | |
â (7 mois et 8 jours) |
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Monarque | Lui-mĂȘme | |
Prédécesseur | Huy Kanthoul | |
Successeur | Penn Nouth | |
â (1 mois et 2 jours) |
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Monarque | Lui-mĂȘme | |
Prédécesseur | Yem Sambaur | |
Successeur | Sisowath Monipong | |
â (4 mois et 26 jours) |
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Monarque | Lui-mĂȘme | |
Prédécesseur | Poste créé | |
Successeur | Son Ngoc Thanh | |
Roi du Cambodge (1er rĂšgne) | ||
â (13 ans, 11 mois et 5 jours) |
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Couronnement | ||
Premier ministre | Lui-mĂȘme Son Ngoc Thanh Sisowath Monireth Sisowath Youtevong Sisowath Vatchayavong Chean Vam Penn Nouth Yem Sambaur Ieu Koeus Yem Sambaur Lui-mĂȘme Sisowath Monipong Oum Cheang Sun Huy Kanthoul Lui-mĂȘme Penn Nouth Chan Nak Lui-mĂȘme Penn Nouth Leng Ngeth |
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Prédécesseur | Sisowath Monivong | |
Successeur | Norodom Suramarit | |
Biographie | ||
Dynastie | Norodom | |
Nom de naissance | Norodom Sihanouk | |
Date de naissance | ||
Lieu de naissance | Phnom Penh (Cambodge, Indochine française) | |
Date de décÚs | [1] | |
Lieu de décÚs | Pékin (Chine) | |
Parti politique | Sans Ă©tiquette (1945-1955) Sangkum (1955-1970) Funcinpec (1981-1991) |
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PĂšre | Norodom Suramarit | |
MĂšre | Sisowath Kossamak | |
Conjoint | voir famille | |
Enfants | 14 enfants dont Norodom Bopha Devi Norodom Ranariddh Norodom Sihamoni |
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Monarques du Cambodge Premiers ministres du Cambodge |
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NommĂ© le 24 avril 1941, Ă l'Ăąge de 18 ans, roi du Cambodge alors sous protectorat français il fait accĂ©der son pays Ă lâindĂ©pendance le 17 octobre 1953 avant dâabdiquer, le 3 mars 1955 au profit de son pĂšre pour remplir un rĂŽle politique que la constitution refuse Ă sa fonction royale. Ayant fondĂ© son propre parti politique, le Sangkum Reastr Niyum, Sihanouk dirige sans partage le royaume du Cambodge, d'abord comme Premier ministre, puis, aprĂšs la mort de son pĂšre, en tant que « chef d'Ătat ». Il fait, pendant la guerre froide, le choix du neutralisme, mais son hostilitĂ© envers l'ingĂ©rence amĂ©ricaine en Asie du Sud-Est le pousse Ă se rapprocher de l'URSS et de la Chine, tout en rĂ©primant les communistes cambodgiens. Dirigeant autocratique, il est chassĂ© du pouvoir le 18 mars 1970 par lâaile droite de son mouvement et forme alors un front de rĂ©sistance avec ses anciens adversaires communistes, les Khmers rouges. Ces derniers prennent le pouvoir le 17 avril 1975 ; Sihanouk, officiellement chef de lâĂtat, est cantonnĂ© dans un rĂŽle de pure figuration. Il dĂ©missionne le 2 avril 1976 et est alors assignĂ© Ă rĂ©sidence tandis que les Khmers rouges massacrent une partie de la population du pays. Le Cambodge est envahi le 25 dĂ©cembre 1978 par l'armĂ©e vietnamienne. Sihanouk, rĂ©fugiĂ© Ă l'Ă©tranger, prend le 22 juin 1982 la tĂȘte d'une coalition contre l'occupation vietnamienne, qui continue Ă inclure les Khmers rouges. AprĂšs des accords de paix, il rentre au Cambodge et partage alors le pouvoir avec les anciens communistes pro-vietnamiens, tandis que les Khmers rouges sont exclus de la transition politique. Redevenu roi le 24 septembre 1993, il abdique le 7 octobre 2004.
QualifiĂ© de « fou gĂ©nial » par un ancien responsable militaire de lâIndochine française[2] - [note 1], ses dĂ©tracteurs lui reprochent son instabilitĂ©[4] alors que ses sympathisants louent sa capacitĂ© Ă retourner des situations qui paraissaient compromises[5].
Quand il était vénéré comme un dieu-roi, il se faisait appeler Samdech Euv (« Monseigneur Papa »)[6], mais aprÚs son abdication, en 2004, il prit le titre officiel de Preah Karuna Preah Moha Virak Ksatr Preah Vorakreach Beida Cheat en khmer, traduit par « roi-pÚre » dans les langues occidentales[7].
Considéré comme l'un des pÚres fondateurs de la francophonie, avec le Sénégalais Léopold Sédar Senghor et le Nigérien Hamani Diori[8], Norodom Sihanouk était également, à ses heures, réalisateur de films.
Ătymologie
Le nom dynastique « Norodom » dérive du sanskrit « Narottama » : « le meilleur (uttama) des hommes (nara) », épithÚte de Vishnou.
Le prénom Sihanouk est issu du pùli « Sihahanu » : « à la mùchoire (hanu, cf. Hanuman) de lion (siha) », qui est une épithÚte du Bouddha et le nom du grand-pÚre paternel de celui-ci.
Famille
Ang Duong | ||||||||||||||||
Norodom du Cambodge | ||||||||||||||||
Pen | ||||||||||||||||
Norodom Sutharot | ||||||||||||||||
Bossaba Yem | ||||||||||||||||
Norodom Suramarit | ||||||||||||||||
Ang Duong | ||||||||||||||||
Norodom du Cambodge | ||||||||||||||||
Pen | ||||||||||||||||
Norodom Phangangam | ||||||||||||||||
Lothia Sa | ||||||||||||||||
Kama Sujati Puspa Nuari | ||||||||||||||||
Norodom Sihanouk | ||||||||||||||||
Ang Duong | ||||||||||||||||
Sisowath du Cambodge | ||||||||||||||||
Neang Pou | ||||||||||||||||
Sisowath Monivong | ||||||||||||||||
Van | ||||||||||||||||
Sisowath Kossamak | ||||||||||||||||
Norodom du Cambodge | ||||||||||||||||
Norodom Hassakan | ||||||||||||||||
Norodom Kanviman | ||||||||||||||||
Sao | ||||||||||||||||
Sao Sambhat | ||||||||||||||||
Yura Varman | ||||||||||||||||
Norodom Sihanouk est le fils de la princesse Sisowath Kossamak Nearirath Serey Vatthana, fille du roi Sisowath Monivong et de Norodom Suramarit, lui-mĂȘme petit-fils du roi Norodom Ier[9]. Il est de ce fait un descendant des deux branches rivales, les Norodom (par son pĂšre) et les Sisowath (par sa mĂšre), qui se disputent depuis le protectorat français lâaccĂšs au trĂŽne et sont aujourdâhui encore les seules Ă pouvoir fournir des prĂ©tendants Ă lâintronisation[10].
Si comme ses prĂ©dĂ©cesseurs, il a pratiquĂ© dans sa jeunesse la polygamie, il semble avoir renoncĂ© Ă cette pratique peu aprĂšs sâĂȘtre mis en mĂ©nage avec sa derniĂšre compagne qui est restĂ©e Ă ses cĂŽtĂ©s la majeure partie de sa vie. Il a eu sept Ă©pouses et quatorze enfants[11] :
- en 1942, il épouse Neak Moneang Phat Kanhol (1920-1969), danseuse étoile du ballet royal ; elle lui donnera deux enfants (avant de le quitter en 1945, de se remarier et d'avoir d'autres enfants, dont Chap Nhalyvoud qui sera gouverneur de Siem Reap au début des années 2000[12] - [13]) :
- la princesse Norodom Bopha Devi (1943-2019)
- le prince Norodom Ranariddh (1944-2021)
- également en 1942, il épouse la princesse Sisowath Pongsanmoni (1929-1974), fille du roi Monivong et de Khun Nath, une de ses concubines ; la princesse était ainsi la demi-tante de son époux. Ils auront sept enfants, avant de se séparer en 1951[14] - [15] :
- le prince Norodom Yuvaneath (1943-2021)
- le prince Norodom Rachvivong (1944-1973)
- le prince Norodom Chakrapong (né en 1945)
- la princesse Norodom Sorya Roeungsy (1947-1976)
- la princesse Norodom Kantha Buppha (1948-1952)
- le prince Norodom Khemanourak (1949-1975)
- la princesse Norodom Botoum Buppha (1951-1976)
- en 1943, il épouse Anak Munang Thach, une des derniÚres favorites du roi Monivong avec qui il n'aura aucun enfant. Leur liaison ne sera révélée par Norodom Sihanouk qu'une soixantaine d'années plus tard[16].
- en 1944, il Ă©pouse la princesse Sisowath Naralaksha Munikesara (1929-1946), une autre fille du roi Monivong, et donc demi-sĆur de Pongsanmoni et de la mĂšre de Sihanouk. Ils ont un fils adoptif :
- en 1946, et de maniĂšre officielle le 4 mars 1955, il se marie avec la princesse Devisa Naralakshmi (1927-2017), qui prendra le nom de Norodom Thaveth Norleak ; ils n'auront aucun enfant et ils divorceront Ă une date inconnue[19] - [20].
- en 1949, il Ă©pouse Mam Manivan Phanivong (en) (1934-1975), fille dâun dignitaire laotien ; il aura avec elle deux enfants :
- en 1952, il se marie avec Paule-Monique Izzi, fille de Jean-François Izzi, un Français d'origine italienne, directeur du CrĂ©dit foncier de l'Indochine et proche de Norodom Suramarit, pĂšre de Sihanouk. La mĂšre de celle qui allait devenir la princesse Monique puis la reine Monineath, Pomme Peang, entretenait pour sa part des relations dâamitiĂ© avec Khun Nath, la mĂšre de Pongsanmoni. Monique restera aux cĂŽtĂ©s de Sihanouk jusquâĂ la mort du souverain[23] - [24]. Ils auront deux enfants :
- le prince Norodom Sihamoni (né en 1953), roi du Cambodge depuis 2004
- le prince Norodom Narindrapong (1954-2003)
Jeunesse
Lâastrologue du palais royal ayant prĂ©dit au futur monarque un grand destin Ă la condition quâil soit trĂšs tĂŽt sĂ©parĂ© de ses parents, il fut Ă©levĂ© dâabord par une arriĂšre-grand-mĂšre maternelle avant, Ă la mort de cette derniĂšre en 1929, dâĂȘtre confiĂ© Ă ses grands-parents paternels[25].
Enfant unique de parents sĂ©parĂ©s, Norodom Sihanouk estime avoir eu une enfance solitaire et introvertie[26], alors que dâautres se rappellent un prince turbulent[27]. Quand son pĂšre, prince royal, nâĂ©tait pas pris par le protocole, il passait son temps dans des activitĂ©s sociales[28].
AprĂšs un dĂ©but de scolaritĂ© dans un Ă©tablissement francophone, lâĂcole primaire François Baudouin de Phnom Penh, il effectua sa sixiĂšme au lycĂ©e Sisowath, toujours dans la capitale cambodgienne, puis intĂ©gra le prestigieux lycĂ©e Chasseloup-Laubat de SaĂŻgon afin dây prĂ©parer un baccalaurĂ©at de philosophie[29].
Une partie importante du programme Ă©tait consacrĂ©e Ă lâhistoire et Ă la culture française. ĂlĂšve dâun bon niveau mais peu studieux, il excellait dans les matiĂšres artistiques, goĂ»t quâil conservera toute sa vie. Son statut royal empĂȘchant les autres Cambodgiens dâavoir trop de contact avec lui, il se lia dâamitiĂ© avec plusieurs Ă©tudiants français[30].
NĂ©anmoins, il ne put terminer ses Ă©tudes et dut retourner Ă 18 ans au Cambodge pour une mission Ă laquelle il allait consacrer le reste de sa vie[31].
CarriĂšre politique
Celui dont Gilles Cayatte a vantĂ© la capacitĂ© Ă rebondir et Ă qui il attribuait neuf vies[32], peut se targuer dâun nombre impressionnants de titres, quâil porta parfois de maniĂšre simultanĂ©e, tels que roi (deux fois), chef de l'Ătat (deux fois Ă©galement), prĂ©sident, Premier ministre (neuf fois), chef de front ou de gouvernement en exil et enfin Roi-PĂšre.
Le jeune roi (24 avril 1941)
Les dĂ©buts dâun roi (1941-1944)
La carriĂšre politique de Norodom Sihanouk dĂ©butait en 1941, lorsque Ă la mort de son grand-pĂšre le roi Sisowath Monivong, il a Ă©tĂ© appelĂ© Ă lui succĂ©der sur le trĂŽne. Ce sera aussi lâoccasion de la premiĂšre des nombreuses controverses qui alimenteront sa vie. Alors que sa biographie se contente de dĂ©clarer laconiquement quâil « est Ă©lu Roi du Cambodge par le Conseil de la Couronne, Ă Phnom Penh »[33], il Ă©crira dans ses mĂ©moires quâil a Ă©tĂ© choisi par lâamiral Decoux, alors gouverneur gĂ©nĂ©ral de lâIndochine au dĂ©triment de Sisowath Monireth, fils du roi dĂ©funt car la France pensait que le jeune roi serait plus facile Ă manĆuvrer que son oncle[34]. Lâamiral Decoux donne cependant dans ses mĂ©moires une version tout opposĂ©e et prĂ©tend quâalors que les autoritĂ©s coloniales avaient manifestĂ© leur prĂ©fĂ©rence pour Monireth qui Ă©tait allĂ© suivre une formation militaire en France, elles avaient dĂ» sâincliner devant lâancĂȘtre du Conseil du TrĂŽne[note 3] qui choisissait Ă lâunanimitĂ© le jeune Norodom Sihanouk[36]. On notera quand mĂȘme que la premiĂšre version fait quasiment lâunanimitĂ©[37] - [38] - [39].
Les quatre premiĂšres annĂ©es de son rĂšgne, Norodom Sihanouk fut un monarque accommodant et un Ă©lĂšve volontaire. Ses activitĂ©s Ă©taient fermement contrĂŽlĂ©es par lâadministration française qui le laissait entreprendre quelques rĂ©formes lĂ©gislatives et protocolaires mesurĂ©es et lâencourageait Ă effectuer des visites dans les campagnes, une coutume Ă laquelle il prendra goĂ»t et quâil affectionnera durant le reste de sa carriĂšre[40].
Fin de lâhĂ©gĂ©monie française (1945)
En mars 1945, l'empire du Japon prenait le contrĂŽle de l'Indochine, dĂ©truisant l'administration coloniale française. PressĂ© par les Japonais, Norodom Sihanouk proclama l'indĂ©pendance du Cambodge, mais sans trop s'avancer dans la collaboration avec le nouvel occupant[41]. Il fut de ce fait trĂšs vite mis sous la tutelle de Son Ngoc Thanh, dirigeant nationaliste jusque-lĂ en exil Ă Tokyo qui, par sa francophobie, offrait de meilleures garanties de soutien aux autoritĂ©s nippones. Son Ngoc Thanh, se proclama chef du gouvernement dans la nuit du 8 au 9 aoĂ»t[42]. Cette premiĂšre indĂ©pendance, toute relative, sera de courte durĂ©e et prendra fin en octobre de la mĂȘme annĂ©e, quand les Français revenant aux affaires, emprisonnaient Son Ngoc Thanh en mĂ©tropole et le remplaçaient sur place par Sisowath Monireth[43].
Toutefois, la situation au Cambodge nâĂ©tait plus celle dâavant-guerre et le nouveau chef de gouvernement rĂ©clamait une certaine autonomie pour son pays ; il obtenait la crĂ©ation dâune assemblĂ©e au rĂŽle consultatif et la rĂ©daction dâune constitution. Le jeune roi tint alors Ă sortir de son rĂŽle de figuration et demanda deux amendements importants : alors quâil Ă©tait prĂ©vu dâĂ©lire lâassemblĂ©e au suffrage censitaire et dâainsi favoriser les Ă©lites locales, Norodom Sihanouk insista pour quâil lui soit substituĂ© le suffrage universel. Il demandait aussi que la rĂ©daction de cette constitution qui devait ĂȘtre lâĆuvre dâun comitĂ© soit en fait dĂ©volue Ă lâassemblĂ©e Ă©lue[44].
Premiers pas vers lâautonomie (1946-1949)
Les Ă©lections eurent lieu en septembre 1946 et virent la victoire du Parti dĂ©mocrate proche des milieux indĂ©pendantistes. Ă cette occasion, le roi entravera les manĆuvres dâintimidation du pouvoir colonial et de Monireth qui pour des raisons diverses voulaient Ă©viter cette victoire. Il devra ensuite insister auprĂšs de son oncle pour quâil accepte de laisser la place au Prince Sisowath Youtevong, dirigeant du parti vainqueur[45].
Les dĂ©mocrates, dĂ©sireux de faire accĂ©der le Cambodge Ă lâindĂ©pendance tentĂšrent de rĂ©Ă©crire la constitution et Youtevong fit des sĂ©jours frĂ©quents au Palais pour prĂ©senter des amendements. Norodom Sihanouk fit alors preuve dâune « ardeur juvĂ©nile » pour ces rĂ©formes, mais pas dâune forte assiduitĂ©. Cette passivitĂ© peut paraĂźtre surprenante, si on se rappelle que plus tard il nâhĂ©sitera pas Ă prĂ©senter la constitution comme un cadeau quâil avait fait au peuple cambodgien[46]. Les dĂ©mocrates firent alors une erreur de jugement concernant le jeune monarque, mettant, Ă tort, sa timiditĂ© et sa complaisance sur le compte dâun engouement pour les rĂ©formes dĂ©mocratiques et par la mĂȘme, pour une limitation de ses pouvoirs et privilĂšges[47].
Le pouvoir colonial dĂ©cidait dans le mĂȘme temps de parfaire la formation du monarque et lâenvoyait en 1946 et 1948 Ă lâĂ©cole d'application de l'arme blindĂ©e et de la cavalerie de Saumur[48]. Il sâagissait pour lui du premier voyage hors des limites de lâIndochine française et outre le sĂ©jour en mĂ©tropole, il profitera du trajet pour Ă©galement visiter Singapour, la Birmanie, les Indes britanniques, Ceylan, lâArabie saoudite et lâĂgypte. Il sâagissait alors dâun avant-goĂ»t des nombreuses tournĂ©es Ă lâĂ©tranger qui rythmeront sa longue carriĂšre[49].
Sur le plan politique, le Parti démocrate cambodgien, malgré sa situation de mouvement majoritaire, perdit rapidement de sa cohérence. Sisowath Youtevong mourut dÚs juillet 1947, compromettant l'unité du parti, auquel la victoire aux élections de novembre ne suffisait pas à apporter la sérénité. Les Français étaient en outre inquiets des liens de certains membres du Parti avec les rebelles indépendantistes Khmers Issarak. La chambre étant dominée par les démocrates divisés, le Cambodge souffrait d'instabilité ministérielle. Norodom Sihanouk, profitant des dissensions au sein du parti majoritaire, décidait finalement de dissoudre l'assemblée le . Prétextant l'insécurité régnant dans certaines régions, il s'abstint d'organiser de nouvelles élections[50].
Cela lui permettait de diriger le pays par dĂ©cret. Dans le mĂȘme temps, Jean de Raymond, le nouveau commissaire de la RĂ©publique française, louait lâapolitisme et la bonne intelligence qui rĂ©gnait dans le nouveau gouvernement. En plusieurs autres occasions, le commissaire mentionnait le contraste entre le patriotisme de Norodom Sihanouk et lâ« immaturitĂ© » des Ă©lus cambodgiens. FlattĂ© par ce jugement, il nâallait pas tarder Ă partager ce point de vue[51].
La position de Sihanouk Ă©tait encore renforcĂ©e par la dĂ©fection de Dap Chhuon, l'un des chefs Khmers Issarak, qui annonçait, le 1er octobre, un ralliement au gouvernement royal avec ses 400 hommes, ralliement confirmĂ© lors dâune cĂ©rĂ©monie grandiose dans le parc dâAngkor Thom[52]. Chhuon devint le commandant du Corps franc khmer et contrĂŽlait le nord de la province de Siem Reap. Il y fit cependant preuve d'une indĂ©pendance et d'une indiscipline totales, faisant Ă l'occasion double jeu avec les Issarak qu'il ravitaillait de temps Ă autre et menaçait de rallier en cas d'atteinte Ă sa libertĂ© d'action[53].
Sihanouk nĂ©gocia aussi avec les Français pour faire Ă©voluer le statut de son pays, et, le 8 novembre 1949, il signait avec la puissance coloniale un traitĂ© franco-khmer, qui abolissait formellement le protectorat et reconnaissait lâautonomie du Cambodge dans le cadre de l'Union française[54]. Sihanouk prĂ©tendra plus tard quâil sâagissait dâune « indĂ©pendance Ă 50 % ». La France gardait la mainmise sur lâĂ©conomie et la dĂ©fense mais faisait quelques concessions en matiĂšre de relations extĂ©rieures. Le royaume khmer pouvait recevoir des lĂ©gations diplomatiques, prĂ©alablement accrĂ©ditĂ©es par le pouvoir colonial et envoyer des reprĂ©sentants Ă lâĂ©tranger. Les Ătats-Unis et le Royaume-Uni reconnurent aussitĂŽt les nouveaux Ă©tats du Cambodge, Laos et ViĂȘt Nam ; lâaide Ă©conomique et militaire amĂ©ricaines ne tardĂšrent pas Ă affluer. La demande pour ĂȘtre membre de lâOrganisation des Nations unies essuya par contre un veto de lâURSS, mais le royaume put quand mĂȘme rejoindre certains organismes internationaux tels lâOrganisation mondiale de la santĂ© ou lâUNESCO[55].
Sentant que le temps travaillait pour leur pays, Sihanouk et son nouveau Premier ministre, Yem Sambaur, maintenaient la pression sur les autoritĂ©s françaises. Comme beaucoup de leurs compatriotes, ils Ă©taient circonspects quant au maintien dâune Indochine au sein de lâUnion française qui serait dominĂ©e par les Vietnamiens. Ils espĂ©raient Ă©galement pouvoir obtenir de lâancienne puissance coloniale la reconnaissance de ce quâils estimaient ĂȘtre les droits inaliĂ©nables du Cambodge sur la Cochinchine. De ce fait, ils refusaient de signer un accord sur la frontiĂšre khmĂ©ro-vietnamienne qui aurait constituĂ© de facto un renoncement Ă leurs prĂ©tentions. Les Français trouvaient cette position totalement utopique. Partageant le mĂȘme point de vue, un diplomate britannique Ă©crivait dans une note retrouvĂ©e par David Chandler, que les Cambodgiens « perdaient le sens des rĂ©alitĂ©s et quâils Ă©taient un cas classique de peuple qui essayait de courir avant de savoir marcher »[56].
PremiĂšres frictions avec lâassemblĂ©e (1950-1951)
Au dĂ©but de 1950, Norodom Sihanouk tentait des rĂ©formes constitutionnelles qui pouvaient restreindre le pouvoir de lâassemblĂ©e, mais il nâĂ©tait soutenu ni par les dĂ©mocrates ni par les libĂ©raux qui voulaient de nouvelles Ă©lections. Les petits partis, qui nâavaient pas de reprĂ©sentants, militaient eux pour un renforcement du pouvoir royal, rejoints par le commissaire de Raymond et le roi qui se considĂ©rait comme le « pĂšre de la nation et le premier citoyen cambodgien », une vision quâil maintiendra pendant le reste de sa carriĂšre. Alors que les partis en place soutenaient lâidĂ©e dâun gouvernement dâunion nationale dont serait exclu Yem Sambaur, le monarque affirmait quâil dĂ©sirait continuer Ă travailler avec lui[57]. Toutefois Ă la fin avril Yem Sambaur dĂ©missionnait et Sihanouk retrouvait un poste de Premier ministre quâil avait briĂšvement tenu lors de lâoccupation japonaise de 1945, mais le cĂ©dait moins dâun mois plus tard Ă son oncle le prince Sisowath Monipong[58].
La prĂ©paration de nouvelles Ă©lections voyait une confrontation entre dâune part Norodom Sihanouk, le pouvoir colonial ainsi que les conservateurs cambodgiens et dans lâautre camp le Parti dĂ©mocrate alliĂ© de fait avec les rebelles indĂ©pendantistes. Afin dâassurer les bases de nouveaux votes, le Premier ministre Sisowath Monipong proposait une nouvelle loi Ă©lectorale mais les libĂ©raux et les dĂ©mocrates exigeaient de reconduire lâAssemblĂ©e Ă©lue en 1947 alors que les petits partis qui nâavaient gagnĂ© aucun siĂšge en 1947 voulaient la tenue de nouvelles Ă©lections. Sihanouk demandait aux leaders des diffĂ©rentes formations de trouver un compromis. Impuissant Ă sortir de la crise, Monipong prĂ©sentait la dĂ©mission de son gouvernement Ă la fin de fĂ©vrier 1951. Un nouveau cabinet apolitique dirigĂ© par Oum Cheang Sun fut mis en place dĂšs le 3 mars 1951, mais les dĂ©mocrates refusaient de sâassocier Ă ce nouveau gouvernement[59].
Peu aprĂšs, Norodom Sihanouk confiait Ă Donald R. Heath (en), ministre amĂ©ricain aux Ătats associĂ©s, que le peuple « rĂ©clamait une assemblĂ©e et le maintien de la constitution ». Quelques jours plus tard, il affirma au haut-commissaire de Raymond que de nouvelles Ă©lections nâĂ©taient pas envisageables. En fait, il essayait de tenir Ă chaque interlocuteur le discours que ce dernier voudrait entendre, inaugurant un procĂ©dĂ© quâil utilisera toute sa vie. Il semble quâen rĂ©alitĂ© il voulait de nouvelles Ă©lections afin de laisser penser quâil faisait respecter la constitution, mais il espĂ©rait aussi une dĂ©faite des dĂ©mocrates[60].
MalgrĂ© les tentatives pour promouvoir dâautres partis, les Ă©lections du 9 septembre 1951 virent une nouvelle victoire des dĂ©mocrates. Norodom Sihanouk et les dirigeants des petits partis qui nâavaient pu gagner le moindre siĂšge, vĂ©curent ce nouveau scrutin comme un camouflet, et envisageaient de prendre ou de garder le pouvoir par des moyens moins conventionnels[61].
Depuis plusieurs annĂ©es, Norodom Sihanouk, influencĂ© par son pĂšre et des proches de celui-ci, demandait au pouvoir colonial de rĂ©duire la peine de Son Ngoc Thanh alors en rĂ©sidence surveillĂ©e dans le Poitou, et de lui permettre de revenir au Cambodge. Le roi aurait espĂ©rĂ© que ce retour pouvait diviser le Parti dĂ©mocrate. Dâautre part, dâaprĂšs un proche de Thanh, Sihanouk lui aurait aussi Ă©tĂ© reconnaissant dâavoir, en 1945, intercĂ©dĂ© en sa faveur auprĂšs des autoritĂ©s japonaises qui voulaient le remplacer par un membre de la famille royale moins francophile. Les Français, de leur cĂŽtĂ© ne considĂ©raient plus Thanh comme un danger et accepteront de le laisser rentrer[62].
Lâavion de Thanh arrivait Ă Phnom Penh lâaprĂšs-midi du 29 octobre 1951 et fut accueilli par des dirigeants du Parti dĂ©mocrate. Le trajet de sept kilomĂštres qui sĂ©pare lâaĂ©roport du centre-ville prit une heure dans une voiture dĂ©capotable au milieu dâune foule enthousiaste estimĂ©e Ă 100 000 personnes. Sihanouk se serait senti vexĂ© et aurait mis un point dâhonneur, deux ans plus tard, Ă parcourir le mĂȘme trajet pour clore une tournĂ©e Ă Siem Reap et Ă se faire acclamer par une affluence encore plus importante[63].
Dissensions avec les démocrates (1952)
Mais ce retour Ă la vie publique sera de courte durĂ©e et dĂšs le 9 mars 1952, Son Ngoc Thanh rejoignait les maquis de la forĂȘt de Siem Reap, oĂč Ă nouveau il exprimait le souhait dâune indĂ©pendance immĂ©diate et lâĂ©tablissement dâun gouvernement rĂ©publicain au Cambodge[64]. Ă Phnom Penh, la dĂ©cision des dĂ©mocrates de ne pas envoyer Ă Siem Reap des forces de sĂ©curitĂ© contre Thanh semble avoir marquĂ© un point de non-retour dans leurs relations, dĂ©jĂ orageuses, avec Norodom Sihanouk. Le dĂ©part de Son Ngoc Thanh servit de prĂ©texte Ă Norodom Sihanouk pour fustiger les dĂ©mocrates et ce que le monarque appelait la « politique dâinsĂ©curitĂ© et de trahison » de leur parti. La crise atteignit son paroxysme en mai et juin 1952. Ă Battambang, des Ă©tudiants manifestaient pour une indĂ©pendance immĂ©diate alors que dâautres Ă Kampong Cham arboraient des slogans rĂ©solument hostiles au roi. Les protestations sâĂ©tendirent et dĂ©gĂ©nĂ©rĂšrent en Ă©meutes ; Ă Battambang, la police tira sur la foule. Alors que les dĂ©mocrates jugeaient que ces Ă©vĂ©nements jouaient en leur faveur, Norodom Sihanouk y voyait le dĂ©but du chaos[65].
DĂ©but juin, rĂ©unis en congrĂšs Ă Phnom Penh, et aprĂšs avoir tĂ©moignĂ© de leur loyautĂ© envers le roi qui « a toujours daignĂ© conduire la nation ⊠sur le chemin de lâindĂ©pendance », les dĂ©mocrates nommaient un Ă©conomiste rĂ©putĂ©, Son Sann, prĂ©sident du parti. La formation se montrait prĂȘte Ă coopĂ©rer avec Norodom Sihanouk, mais le monarque semblait rĂ©ticent Ă rendre la pareille. Deux jours aprĂšs le congrĂšs, lors du discours dâouverture de la session parlementaire, oĂč le parti dĂ©mocrate Ă©tait largement majoritaire, le roi mettait en garde contre les risques de dictature rĂ©sultant dâun parti unique. Le ministĂšre de lâinformation mit dix jours Ă publier la traduction en français de la remarque royale. Cela provoqua la colĂšre de Sihanouk et, Ă partir du 7 juin, des tracts circulĂšrent demandant la dissolution de lâassemblĂ©e et le renvoi du Premier ministre Huy Kanthoul. Les partis minoritaires poussaient eux aussi dans cette voie anticonstitutionnelle[66].
Les dĂ©mocrates rĂ©agirent en envoyant la police aux domiciles des dirigeants de petits partis, notamment Sam Nhean, Lon Nol et Yem Sambaur qui furent placĂ©s en dĂ©tention quelques heures. DâaprĂšs Huy Kanthoul, lâarrestation de Yem Sambaur aurait fait suite Ă des soupçons dâimplication dans lâattentat qui, deux annĂ©es auparavant, avait coĂ»tĂ© la vie Ă Ieu Koeus, ancien Premier ministre, dirigeant du parti dĂ©mocrate. Une caisse de grenades fut dĂ©couverte Ă sa rĂ©sidence et trois fusils mitrailleurs furent saisis chez Lon Nol[67]. Le 14 juin les autoritĂ©s coloniales envoyaient Ă Phnom Penh un bataillon dâinfanterie marocain et un escadron armĂ© « pour une dizaine de jours », officiellement afin de prĂ©venir des troubles[68]. Jean Risterucci, le nouveau Commissaire de la RĂ©publique française au Cambodge, prĂ©tendra plus tard que la dĂ©cision dâenvoyer des troupes nâavait pas de lien avec les Ă©vĂ©nements qui allaient suivre. Il semble en fait que Sihanouk et ses parents aient Ă©tĂ© offusquĂ©s par lâarrestation dâYem Sambaur ; toujours est-il que lâarrivĂ©e de troupes coloniales et le fait que les astrologues du Palais royal avaient prĂ©dit quâune tentative de mise Ă lâĂ©cart des dĂ©mocrates serait couronnĂ©e de succĂšs poussait Sihanouk Ă passer Ă lâaction. Le soutien des Français Ă une telle action nâĂ©tait pas une surprise, mais les dĂ©mocrates semblent avoir Ă©tĂ© Ă©tonnĂ©s par ce qui allait suivre[69]. Le dimanche 15 juin, alors que les troupes marocaines se dĂ©ployaient en divers points de Phnom Penh, Norodom Sihanouk utilisait une des prĂ©rogatives que lui offrait la constitution pour dĂ©mettre brusquement lâensemble du gouvernement de Huy Kanthoul et prendre la tĂȘte dâun nouveau cabinet dans lequel il nommait son cousin Sisowath Sirik Matak Ă la dĂ©fense et Sim Var, un vieil ami de son pĂšre comme ministre de lâinformation. Le roi promettait dâĂ©radiquer la corruption pour 1954 et dâarracher aux Français lâindĂ©pendance totale avant 1955. Dans le mĂȘme temps, les troupes coloniales encerclaient lâAssemblĂ©e et les tanks sillonnaient les principales artĂšres de Phnom Penh. Deux jours plus tard elles retournaient Ă Saigon et un dĂ©cret royal Ă©tait promulguĂ©, interdisant les rĂ©unions politiques et la propagande. La croisade royale pour lâindĂ©pendance â une carte blanche politique que Sihanouk sâĂ©tait octroyĂ©e â Ă©tait en marche[70]. Sihanouk convoquait Thomas Gardiner Corcoran, le chargĂ© dâaffaires amĂ©ricain et son homologue thaĂŻ pour les informer des raisons de son action. Sihanouk justifiait le renvoi de Kanthoul par le support du parti dĂ©mocrate Ă Son Ngoc Thanh et par sa « politique dictatoriale envers les minoritĂ©s »[71].
Sihanouk restait au Palais royal pour quelques jours. James Guillion, le chargĂ© dâaffaires amĂ©ricain Ă SaĂŻgon lui rendit visite Ă ce moment et le trouvait « excitĂ© ». Il reconnaissait quâil avait besoin des Français pour soutenir lâĂ©conomie cambodgienne et pour lutter contre la rĂ©bellion, mais il voulait aussi Ă©laborer une stratĂ©gie personnelle. Les autoritĂ©s coloniales devaient penser quâaprĂšs lâavoir aidĂ© Ă Ă©carter les dĂ©mocrates, Norodom Sihanouk accepterait dâabandonner ses vues indĂ©pendantistes ; lâavenir montrera combien ils se trompaient[72] !
En France, les Ă©tudiants sâĂ©taient rangĂ©s du cĂŽtĂ© des dĂ©mocrates. Un numĂ©ro spĂ©cial de leur magazine Khemarak NisĆt (« lâĂtudiant Khmer »), est consacrĂ© au renvoi dâHuy Kanthoul. Outre Keng Vannsak (en) et Hou Yuon, Saloth SĂąr, sous le pseudonyme de Khmer Daeum (Khmer de base), attaquait Ă©nergiquement la royautĂ©. Le ton de lâarticle Ă©tait plus proche du parti dĂ©mocrate et de Son Ngoc Thanh que de lâidĂ©ologie marxiste, mais la mise sous lâĂ©teignoir de la formation dâHuy Kanthoul aurait amenĂ© plusieurs Ă©tudiants cambodgiens Ă embrasser les thĂšses du communisme[73].
Dans les mois qui suivaient, Sihanouk sâimpatientait devant les retards des Français Ă mettre en Ćuvre les rĂ©formes promises. Il faisait remarquer quâil portait sur ses Ă©paules « le poids Ă©crasant de 16 siĂšcles de royautĂ© qui ont amenĂ© la grandeur du pays et la paix Ă son peuple ». Il omettait juste de prĂ©ciser que depuis le XVIIe siĂšcle la plupart des rois cambodgiens Ă©taient faibles, impopulaires et dominĂ©s par des puissances Ă©trangĂšres. Si tel nâavait pas Ă©tĂ© le cas, la France aurait eu beaucoup plus de mal Ă instaurer le protectorat quâavait demandĂ© dĂšs 1853 Ang Duong pour se libĂ©rer de la tutelle siamoise. Par la suite, il allait souvent faire rĂ©fĂ©rence Ă la pĂ©riode angkorienne pour lĂ©gitimer son pouvoir⊠et passer sous silence celle qui a suivi[74].
Comme le roi Chulalongkorn avant lui au Siam, Sihanouk peut ĂȘtre considĂ©rĂ© comme un hĂ©ritier des despotes Ă©clairĂ©s, utilisant les techniques contemporaines pour asseoir un absolutisme jusque-lĂ cĂ©rĂ©moniel, dĂ©crĂ©pit et considĂ©rĂ© comme acquis. Les rĂ©gimes qui suivront intensifieront cette omnipotence et rejetteront toute forme de pluralisme susceptible de contester leur lĂ©gitimitĂ© Ă exercer seuls le pouvoir. Toutefois, contrairement Ă ces successeurs, il pouvait compter sur une forte popularitĂ© auprĂšs des populations rurales cambodgiennes qui lui attribuaient des pouvoirs surnaturels et la capacitĂ© Ă assurer la prospĂ©ritĂ© de leur pays[75].
La croisade pour lâindĂ©pendance (1953)
En janvier 1953, alors que la nouvelle session parlementaire sâouvrait, les dĂ©mocrates Ă©taient prĂȘts Ă en dĂ©coudre avec le roi. Ils estimaient que leur victoire aux Ă©lections leur donnait le droit de diriger le pays, mĂȘme si leur gouvernement avait Ă©tĂ© dissout. Le 11, Sihanouk sâadressait au parlement et demandait quâon lui accorde des pouvoirs spĂ©ciaux car la patrie aurait Ă©tĂ© en danger, prĂ©textant des grĂšves dans des lycĂ©es de Phnom Penh et Kampong Cham, ainsi que lâassassinat dâun gouverneur de province par le Viá»t Minh[76]. Il attribuait la responsabilitĂ© des troubles Ă Son Ngoc Thanh et reprochait aux dĂ©mocrates de supporter le leader indĂ©pendantiste. Sihanouk espĂ©rait que ces derniers allaient dĂ©missionner ou refuseraient sa demande et quâil pourrait alors les Ă©carter. Ils choisirent la seconde option et le roi fit encercler lâassemblĂ©e par la troupe, la fit dissoudre et abrogea une sĂ©rie de droits civiques[77]. Il annonçait en outre une sĂ©rie de rĂ©formes, et l'Ă©volution vers une indĂ©pendance « pleine et entiĂšre »[78].
Le Cambodge Ă©tait-il rĂ©ellement en danger ou Sihanouk essayait-il dâaccroitre son pouvoir ? Dans ses mĂ©moires, Sisowath Monireth indique que certains dĂ©mocrates, blessĂ©s par la conduite de Sihanouk lâannĂ©e prĂ©cĂ©dente, dĂ©siraient profiter de lâouverture de la nouvelle session parlementaire pour demander lâinstauration dâune rĂ©publique. La tentative serait venue aux oreilles de la princesse Kossamak, mĂšre de Sihanouk, grĂące Ă lâĂ©pouse dĂ©laissĂ©e dâun dĂ©putĂ©. Furieuse, elle aurait ordonnĂ© Ă lâimprimerie royale de prĂ©parer un dĂ©cret demandant la dissolution de lâAssemblĂ©e quâelle ferait signer Ă son fils. Si la thĂšse parait crĂ©dible, il semble toutefois que le « conjuration » en soit restĂ©e au stade de discussions entre personnes déçues par des annĂ©es dâhumiliation[79]. Toujours est-il que fort de ces pouvoirs spĂ©ciaux Sihanouk fit emprisonner dix-sept dĂ©mocrates, dont neuf anciens dĂ©putĂ©s, pour « complot contre lâĂtat ». Ils furent dĂ©tenus huit mois sans qu'ils passent jamais en jugement. Un Ă©ditorialiste tempĂ©rait peu aprĂšs la portĂ©e de lâĂ©vĂšnement, rappelant que les Cambodgiens ont lâhabitude depuis des siĂšcles de vivre dans une sociĂ©tĂ© « paternaliste et autoritaire » et que lâabsence de rĂ©action Ă lâincarcĂ©ration des responsables dĂ©mocrates prouvait lâassentiment populaire pour la mesure[80]. En fĂ©vrier 1953, Sihanouk partait pour la France, officiellement pour des vacances, en rĂ©alitĂ© pour tenter dâarracher plus de concessions au pouvoir colonial[66].
Personne nâattendait quoi que ce soit dâimportant du sĂ©jour en France de Norodom Sihanouk. Les autoritĂ©s coloniales au Cambodge approuvaient lâaction du Prince qui avait dĂ©mantelĂ© le gouvernement issu des Ă©lections lĂ©gislatives et espĂ©raient quâil exercerait un pouvoir absolu mais prĂ©serverait leurs intĂ©rĂȘts militaires et financiers. La francophilie du roi semblait les prĂ©munir contre des demandes inconsidĂ©rĂ©es[81].
Norodom Sihanouk Ă©tait en train de devenir un puissant dirigeant politique. Il estimait que le pouvoir des Français en Indochine touchait Ă sa fin. En outre, lâopposition politique venait de disparaĂźtre. Les dĂ©mocrates avaient Ă©tĂ© les seuls Ă avoir militĂ© pour une indĂ©pendance dans un cadre constitutionnel. Maintenant, Sihanouk allait faire sienne leur cause sans pour autant les en crĂ©diter dâaucune paternitĂ©. Comme il allait plus tard le montrer Ă maintes reprises, sous des dehors hautains, il cachait en fait un sens insoupçonnĂ© de la stratĂ©gie[82].
Entre fĂ©vrier et novembre 1953, le roi menait une campagne pour redonner lâindĂ©pendance au Cambodge. La croisade allait devenir son heure de gloire, mĂȘme si son implication tardive et sa francophilie faisaient au dĂ©part douter ses interlocuteurs de sa sincĂ©ritĂ©. Les Français Ă©taient Ă©tonnĂ©s que les vacances du monarque se transforment ainsi en visite dâĂtat et surpris par la lettre quâil adressait au prĂ©sident Vincent Auriol dans laquelle il affirmait que la population cambodgienne « unanime espĂ©rait rĂ©solument lâindĂ©pendance »[83].
Jean Letourneau, le Ministre des Relations avec les Ătats associĂ©s, fit savoir Ă Sihanouk que ses initiatives paraissaient dĂ©placĂ©es[84]. Nâayant obtenu aucune concession, le monarque dĂ©cidait dâabrĂ©ger son sĂ©jour et de rentrer en passant par le Canada, les Ătats-Unis et le Japon. Ă Washington, il fut mis en garde par John Foster Dulles, le SecrĂ©taire d'Ătat amĂ©ricain, contre une indĂ©pendance prĂ©maturĂ©e du Cambodge qui lui semblait dĂ©raisonnable. Sans la protection des Français, il pensait que le royaume khmer ne serait pas long Ă tomber aux mains des communistes[85]. « ProfondĂ©ment dĂ©sabusĂ© » par cet entretien, il accordait une interview au New York Times qui dâaprĂšs Sihanouk fit lâeffet dâune bombe sur lâopinion amĂ©ricaine et mondiale. Il demandait que les Français accordent aux diffĂ©rentes composantes de lâIndochine française un statut Ă©quivalent Ă celui des pays du Commonwealth et affirmait que si lâindĂ©pendance Ă©tait reportĂ©e, les Cambodgiens pourraient « se rĂ©volter contre le rĂ©gime actuel et rejoindre le Viá»t Minh »[86]. Lâinterview eut au moins un des effets dĂ©sirĂ©s : peu aprĂšs sa publication, les Français faisaient savoir quâils acceptaient de rouvrir des pourparlers avec les nĂ©gociateurs de Sihanouk restĂ©s Ă Paris. Ă la fin avril 1953, le roi se rendait au Japon quand il aurait reçu un message de Dulles le poussant Ă coopĂ©rer avec les Français[87].
De son voyage aux Ătats-Unis, Sihanouk avait acquis la conviction que les AmĂ©ricains et leur politique Ă©taient mĂ©prisants Ă son Ă©gard. Il trouvait choquants les sermons de Dulles et Ă©tait déçu que le PrĂ©sident Eisenhower ait refusĂ© de lâinviter Ă un dĂźner officiel[88]. Par opposition, Ă partir de 1955 et surtout dans les annĂ©es 1980, la rĂ©publique populaire de Chine et la France, ses principaux supports, prenaient garde Ă toujours le traiter avec dĂ©fĂ©rence et dâen faire lâinterlocuteur principal de toute discussion concernant son pays. Sa dĂ©fiance envers les Ătats-Unis aura des consĂ©quences non nĂ©gligeables sur lâhistoire contemporaine du Cambodge[89].
Pendant ce temps Ă Paris, les Français comme promis entamaient des nĂ©gociations sur les demandes de Sihanouk. Ils nâĂ©taient toujours pas dĂ©sireux de cĂ©der le contrĂŽle militaire des zones prĂšs de la frontiĂšre vietnamienne sous domination Viá»t Minh et dĂ©coupler les exportations cambodgiennes avec celles de la Cochinchine, oĂč leurs intĂ©rĂȘts sâaccroissaient. Le roi Ă©tait contrariĂ© mais allait ĂȘtre rĂ©confortĂ© par les soutiens quasi unanimes quâil trouva Ă son retour au Cambodge en mai 1953[90].
Pour se soustraire aux conseillers coloniaux, Sihanouk dĂ©plaçait son quartier gĂ©nĂ©ral Ă Siem Reap prĂšs des temples dâAngkor. Il bombardait les Français de demandes et accueillait les Khmers issarak qui rejoignaient sa cause[91]. Le gĂ©nĂ©ral de Langlade, le commandant militaire français au Cambodge, Ă©crivait Ă ses supĂ©rieurs que la situation dans le royaume khmer Ă©tait dĂ©sespĂ©rĂ©e. Il affirmait quâune victoire militaire nĂ©cessiterait quinze bataillons coloniaux supplĂ©mentaires, alors quâabandonner le pays le conduirait Ă lâanarchie. Peut-ĂȘtre pensait-il quâaccorder lâindĂ©pendance serait un moindre mal. AprĂšs tout, le roi ne prĂ©tendait-il pas que si on lui accordait une totale autonomie, il veillerait Ă ce que le pays reste proche de la France pour quatre-vingt-dix nouvelles annĂ©es. Le gĂ©nĂ©ral concluait sa lettre en prĂ©tendant que « les Cambodgiens » â il devait penser Ă Sihanouk â « Ă©taient vaniteux, susceptibles, idiots et trĂšs tĂȘtus ». Il trouvait vain de vouloir les attaquer de front, alors quâau contraire, si on savait prendre ses habitants, on pouvait sâattacher le pays pour de nombreuses annĂ©es[92].
Sihanouk, dans le mĂȘme temps restait Ă Angkor, isolĂ© des missions diplomatiques et de la presse Ă©trangĂšre. Sa croisade Ă©tait immobilisĂ©e. Ă la mi-juin, il dĂ©cidait dâaller Ă Bangkok pour sensibiliser le public Ă sa croisade. Quand il arriva dans la capitale thaĂŻlandaise, ses porte-paroles abreuvĂšrent les missions diplomatiques et les agences de presse locales de notices explicatives, rĂ©affirmant les revendications indĂ©pendantistes cambodgiennes. Les ThaĂŻs le remerciĂšrent de sa confiance mais ne lui fournirent aucune aide. LassĂ© au bout de quelques jours par lâinactivitĂ©, Sihanouk retourne de mauvaise humeur Ă Siem Reap. Son escapade convainquit toutefois les Français du caractĂšre instable du monarque et leur fit penser quâil Ă©tait sous lâinfluence au moins partielle des milieux francophobes et du Viá»t Minh[93].
Fin juin, Joseph Montllor, chargĂ© d'affaires amĂ©ricain Ă Phnom Penh rencontrait Jean Risterucci, le commissaire français au Cambodge. Celui-ci lui confiait quâil craignait que le roi ait excitĂ© le peuple avec une force telle que la situation risquait dâĂ©chapper Ă tout contrĂŽle. Quelques jours plus tard, dâaprĂšs David Chandler (en), Risterucci sâĂ©tait ravisĂ© et dans un autre entretien dĂ©clarait que lâhistoire en marche Ă©tait du cĂŽtĂ© des Cambodgiens. Dâautres sources confirmaient que lâopinion khmĂšre se rangeait largement derriĂšre la croisade royale. Pour la plupart, il Ă©tait temps que les Français sâen aillent. Les renseignements coloniaux abondaient dans ce sens en dĂ©clarant que « pour le roi, lâindĂ©pendance immĂ©diate Ă©tait une fin en soi, peu importe que le pays soit localement instable Ă cause dâune politique dĂ©magogique »[94].
Dans le mĂȘme temps, en France, le gouvernement Laniel cherchait un moyen honorable de mettre un terme Ă la « sale guerre » en Indochine. Les nĂ©gociations avec le Cambodge rĂ©pondaient aux initiatives gouvernementales et permettaient dâenvoyer les forces armĂ©es sur dâautres thĂ©Ăątres dâopĂ©rations. Sihanouk Ă©tait pour sa part rĂ©ticent Ă partager le crĂ©dit des Ă©vĂ©nements ou Ă lier le destin du Cambodge Ă celui du Laos ou du ViĂȘt Nam. Il vit que les Français Ă©taient prĂȘts Ă accĂ©der Ă ses demandes et Ă nĂ©gocier directement avec lui de la seule question cambodgienne. Afin de renforcer sa position, il mobilisait des forces populaires pour « dĂ©fendre le pays contre lâinsĂ©curitĂ©, le Viá»t Minh et Ă©ventuellement toute agression Ă©trangĂšre » ; la derniĂšre allusion visait de maniĂšre peu dĂ©tournĂ©e les Français. Ă la fin aoĂ»t, les forces armĂ©es comprenaient quelque 130 000 personnes, mal armĂ©es mais enthousiastes. Une demande Ă©tait faite aux autoritĂ©s coloniales pour les Ă©quiper, mais elle restera sans rĂ©ponse[95].
Les nĂ©gociations aboutissaient, le 17 octobre, Ă la signature dâune convention qui transfĂ©rait aux autoritĂ©s cambodgiennes le contrĂŽle de la police, de lâappareil judiciaire et dâune grande partie des forces armĂ©es. Le pouvoir colonial conservait la direction des opĂ©rations militaires Ă lâest du MĂ©kong. Ă part cette restriction, le Cambodge prĂ©sentait tous les signes de lâindĂ©pendance, ce qui ne signifiait pas pour autant quâil fĂ»t sĂ»r. Peut-ĂȘtre prĂšs dâun district sur six Ă©tait sous le contrĂŽle de la guĂ©rilla et plus de la moitiĂ© du pays subissait la nuit des attaques des Khmers Issarak ou du Viá»t Minh[96].
Une fois lâindĂ©pendance acquise, Sihanouk fit le voyage de Siem Reap Ă Phnom Penh, acclamĂ© par des milliers de sujets enthousiastes. Ce retour, qui intervenait deux ans jour pour jour aprĂšs celui de Son Ngoc Thanh, Ă©tait encore plus triomphal que le prĂ©cĂ©dent. Le 7 novembre, un corps composĂ© de parlementaires de lâassemblĂ©e dissoute 11 mois plus tĂŽt, Ă©levait Sihanouk au rang de hĂ©ros national. Deux jours plus tard, le 9 novembre 1953, lâindĂ©pendance du Cambodge Ă©tait officiellement proclamĂ©e[97].
AprĂšs cette victoire, une nouvelle partie commençait pour Sihanouk. Il nâavait alors pas de plan pour gouverner le Cambodge. Sa tournĂ©e avant sa croisade ne lui avait pas permis dâĂ©laborer le dĂ©but dâune politique Ă©trangĂšre ; il nâavait pas dĂ©fini de modĂšle Ă©conomique et encore moins des prioritĂ©s. Cependant, il avait dirigĂ© son pays et lâavait amenĂ© Ă lâindĂ©pendance. Il avait rĂ©ussi lĂ oĂč ses adversaires avaient Ă©chouĂ©[98].
Les Accords de GenĂšve (1954)
Dans les six mois qui suivirent, la France et le Viá»t Minh, poussĂ©s par les grandes puissances, engageaient des discussions Ă GenĂšve. Dans le mĂȘme temps, Sihanouk voulait montrer que le Cambodge Ă©tait capable de sâassumer militairement. Il dirigeait, lors de lâopĂ©ration Samaki (solidaritĂ©), une unitĂ© de lâarmĂ©e cambodgienne dans une zone du nord-ouest du pays aux mains des rebelles. Lâintervention de dix jours qui mobilisa un peu plus de 6 000 personnes permit de faire six prisonniers et de rĂ©cupĂ©rer une trentaine de grenades[99]. DâaprĂšs Ben Kiernan, le Viá»t Minh espĂ©rait crĂ©er une zone de regroupement dans la rĂ©gion avant que ne dĂ©butent les nĂ©gociations Ă GenĂšve, mais lâopĂ©ration en empĂȘchera la rĂ©alisation[100].
En juin 1954, lors dâune conversation avec le gĂ©nĂ©ral Paul Ăly, commandant militaire français de lâIndochine, il affirmait que « ceux qui favorisent la dĂ©mocratie au Cambodge sont des bourgeois ou des princes ⊠Le peuple cambodgien est un enfant. Ils (les Cambodgiens) ne connaissent rien Ă la politique et ne sâen soucient guĂšre »[101]. Ces vues Ă©taient partagĂ©es par les partisans de Sihanouk et ses conseillers français qui sâĂ©taient succĂ©dĂ© depuis 1947. Le monarque ne renoncera jamais Ă cette idĂ©e hĂ©ritĂ©e du pouvoir colonial qui voudrait que les Cambodgiens soient restĂ©s des enfants Ă qui seul un gouvernement autoritaire et paternaliste pouvait ĂȘtre appliquĂ©. Sihanouk, de ce fait, ne voyait pas lâintĂ©rĂȘt de modifier un tant soit peu sa maniĂšre de gouverner ; il maintenait des liens culturels Ă©troits avec la France qui partageait son point de vue[102].
Dans le mĂȘme temps, Ă la confĂ©rence qui venait de sâouvrir Ă GenĂšve, alors que les affaires du royaume khmer ne devaient occuper quâune place limitĂ©e dans lâagenda, la dĂ©lĂ©gation cambodgienne emmenĂ©e par Tep Phan, le ministre des Affaires Ă©trangĂšres de Sihanouk, et le gĂ©nĂ©ral Nhiek Tioulong fit preuve dâune pugnacitĂ© inattendue pour dĂ©fendre les acquis obtenus 8 mois plus tĂŽt. Ils obtinrent, contrairement au Laos, quâaucune partie du pays ne soit administrĂ©e par les alliĂ©s Khmers Issarak du Viá»t Minh, arguant que ceux-ci nâavait pas pris part au processus qui amena Ă lâindĂ©pendance. En outre, les Accords de GenĂšve, signĂ©s le 20 juillet 1954, reconnurent Ă©galement au Cambodge, et contrairement lĂ aussi au Laos et au ViĂȘt Nam, le droit, en cas de besoin de faire stationner des forces Ă©trangĂšres sur son territoire. Norodom Sihanouk attribuait Ă sa croisade â niant le rĂŽle prĂ©paratoire quâavait pu jouer les diffĂ©rentes guĂ©rillas â ce rĂ©sultat qui renforçait son royaume sur le plan international[103].
AprĂšs avoir en septembre 1954 tentĂ©, sans succĂšs, de rejoindre le gouvernement, Son Ngoc Thanh se rĂ©fugiait prĂšs de la frontiĂšre thaĂŻlandaise oĂč avec le soutien de Bangkok, il regroupa quelque 2 000 Khmers Serei (Khmers libres) dans un camp paramilitaire. On peut aujourdâhui penser que le consentement amĂ©ricain accordĂ© aux supports sud-vietnamien et thaĂŻlandais Ă Thanh ainsi quâaux divers complots qui se succĂ©deront lors des annĂ©es 1950 a contribuĂ© Ă altĂ©rer la confiance que Sihanouk aurait dĂ» avoir envers Washington[104]. Son oncle, Monireth, rĂ©putĂ© pro-occidental, Ă©crivait dans ses mĂ©moires que les officiels amĂ©ricains pratiquaient vis-Ă -vis du Cambodge une politique naĂŻve et envahissante. DâaprĂšs lui, aprĂšs les accords de GenĂšve, les Ătats-Unis bĂ©nĂ©ficiaient de nombreux atouts, notamment avec lâanticommunisme viscĂ©ral des Ă©lites de Phnom Penh, mais les perdirent lâun aprĂšs lâautre en quelques annĂ©es Ă cause de leurs maladresses[105].
Dans le mĂȘme temps et en prĂ©vision des Ă©lections prĂ©vues en 1955 par les accords de GenĂšve, Yem Sambaur, Sam Nhean, Nhiek Tioulong et Lon Nol, les responsables des petits partis nâayant aucun siĂšge dans lâassemblĂ©e prĂ©cĂ©dente, sâassociaient au sein de Sahapak (le Parti UnifiĂ©). Ils cherchaient une stratĂ©gie pour laisser les dĂ©mocrates hors-jeu et gouverner le pays. Ces dirigeants ayant Ă©tĂ© parmi ses plus proches collaborateurs, Sihanouk, ne fut pas long Ă leur accorder son soutien. Le roi comptait sur leur capacitĂ© dâorganisation alors quâen contrepartie ils espĂ©raient bĂ©nĂ©ficier de la popularitĂ© du monarque. Cette alliance perdurera jusquâĂ la dĂ©position de Norodom Sihanouk en 1970[106].
La réforme constitutionnelle avortée (1955)
Au dĂ©but de 1955, Sihanouk dĂ©cidait dâorganiser un rĂ©fĂ©rendum afin de soumettre les rĂ©sultats de sa croisade Ă lâassentiment populaire. PrĂšs dâun million de votants participaient Ă la consultation. Un membre canadien de la Commission internationale de contrĂŽle et de supervision issue des accords de GenĂšve, affirmait que le scrutin se dĂ©roulait dans lâordre mais nâĂ©tait pas du tout secret. Les rĂ©sultats publiĂ©s donnaient 925 667 bulletins en faveur du roi et 1 834 contre[107].
Une fois les rĂ©sultats connus, Sihanouk ordonna lâarrestation de plusieurs responsables de journaux qui remettaient en cause le fait quâil Ă©tait le seul artisan de lâindĂ©pendance du pays et datait celle-ci des accords de GenĂšve, minimisant la portĂ©e du traitĂ© de novembre 1953. Lâopposition ainsi muselĂ©e, les conseillers du souverain rĂ©Ă©crivaient la constitution. Le droit de vote Ă©tait accordĂ© aux femmes ; les pouvoirs du roi Ă©tait Ă©tendus et les Ă©lecteurs pouvaient rĂ©voquer des reprĂ©sentants « qui ne donnaient pas satisfaction ». La lĂ©gation britannique notait que ces propositions Ă©taient bien intentionnĂ©es et plus conforme aux rĂ©alitĂ©s cambodgiennes que la constitution de 1947. Toutefois, rajoutait le rapport, les idĂ©es pro-occidentales propres Ă instaurer une dĂ©mocratie libĂ©rale avaient Ă©tĂ© retirĂ©es et la nouvelle rĂ©glementation semblait faite pour protĂ©ger les intĂ©rĂȘts du roi. Les observateurs du Royaume-Uni sâopposaient Ă cette nouvelle constitution, car elle semblait destinĂ©e Ă remettre en cause la tenue dâĂ©lections nationales[108]. Sihanouk rechignait Ă faire approuver ces nouveaux textes par lâassemblĂ©e â quâil avait dissoute trois annĂ©es auparavant â arguant que la constitution ayant Ă©tĂ© attribuĂ©e par lui, il pouvait la modifier comme bon lui semblait. Cette opinion semblait influencĂ©e par un ensemble de facteurs comprenant la haine persistante quâil nourrissait Ă lâĂ©gard des dĂ©mocrates, lâidĂ©e quâil se faisait du « petit peuple cambodgien » et les conseils de quelques personnalitĂ©s opposĂ©es au parlement tels Lon Nol, Sam Sary ou Sim Var, qui lui recommandaient de « dĂ©politiser la politique cambodgienne ». Le 27 fĂ©vrier 1955, Ă la surprise gĂ©nĂ©rale et déçu par les rĂ©serves suscitĂ©es par ces nouveaux textes, Sihanouk dĂ©cidait de les faire retirer. Mais lâĂ©tonnement sera Ă son comble quand, quatre jours plus tard, le monarque lancera ce quâil appellera plus tard dans ses mĂ©moires sa « bombe atomique »[109].
Création du Sangkum et victoire aux élections (1955)
Le 3 mars 1955, prĂ©textant vouloir plus sâimpliquer dans la politique de son pays et « se rapprocher de son peuple », Sihanouk dĂ©cidait dâabandonner le rĂŽle cĂ©rĂ©moniel que lui donnait depuis quatorze ans son trĂŽne et abdiquait au profit de son pĂšre, Norodom Suramarit[110].
La dĂ©cision surprenait tout le monde et, mĂȘme dans ses mĂ©moires, Sihanouk nâen donne pas de motivation. Un rapport amĂ©ricain de lâĂ©poque prĂ©tend quâil aurait dĂ©couvert que les dĂ©monstrations populaires en faveur de ses rĂ©formes Ă©taient en fait orchestrĂ©es par ses conseillers et ses partisans. AttristĂ© que sa popularitĂ© puisse nâĂȘtre que de façade, il aurait craint de devenir lâinstrument dâun des partis dans les futures Ă©lections qui se profilaient. Quoi quâil en soit, lâabdication modifiait la donne politique. Les Ă©lections furent repoussĂ©es Ă septembre 1955 et Sihanouk prit le titre de Samdech upayuvareach (le prince qui avait abandonnĂ© son trĂŽne). Peu aprĂšs, dans un discours il donnait un aperçu de son futur programme en fustigeant « les politiciens, les riches, les gens Ă©duquĂ©s qui ont lâhabitude dâutiliser leur savoir pour duper les autres et joncher dâinnombrables obstacles la voie que je dois suivre pour diriger mon peuple »[111].
Pendant quelque temps, Sihanouk et ses conseillers pensaient former un gouvernement dâunion nationale dirigĂ© par lui-mĂȘme et qui se serait placĂ© au-dessus des partis. Le systĂšme multipartiste inspirĂ© des modĂšles occidentaux dĂ©faillait un peu partout en Asie du Sud-Est et un penchant pour le parti unique fleurissait dans les anciennes colonies au fur et Ă mesure quâelles accĂ©daient Ă leur indĂ©pendance[112].
DĂ©but avril, avant de sâenvoler pour la confĂ©rence de Bandung qui doit rĂ©unir en IndonĂ©sie les pays africains et asiatiques, Sihanouk annonçait la crĂ©ation dâun mouvement - il insistait pour qu'on ne lâappelle pas « parti » â national politique, le Sangkum Reastr Niyum, que lâon peut traduire par communautĂ© socialiste populaire[113]. Les statuts du mouvement dĂ©claraient que « notre association doit rĂ©pondre aux aspirations du petit peuple, le vrai peuple du Royaume du Cambodge que nous aimons. Notre communautĂ©... veut lutter contre lâinjustice, la corruption, les exactions, lâoppression et la trahison contre notre peuple et notre pays ». Tout membre du Sangkum devait sâengager Ă ne pas faire partie dâune formation politique[114].
Ă Bandung, Sihanouk sâaffirmait sur la scĂšne internationale. Il savourait cette nouvelle stature et profitait de lâoccasion pour rabaisser les dĂ©mocrates et le Pracheachon, prenant Ă son compte leur neutralisme et leur antiamĂ©ricanisme. CourtisĂ© par Nehru, Zhou Enlai ou encore Soekarno, il Ă©tait convaincu que son point de vue sur les problĂšmes internationaux comptait pour ses dirigeants. Il en dĂ©duisait que sa mĂ©fiance vis-Ă -vis des Ătats-Unis Ă©tait largement partagĂ©e et justifiĂ©e. Zhou Enlai lui conseillait mĂȘme de garder une mission dâaide militaire française et de rejeter lâassistance amĂ©ricaine quâil allait pourtant accepter[115].
En effet, dĂšs son retour, en mai, le gouvernement intĂ©rimaire de Sihanouk signait un accord dâaide militaire avec les Ătats-Unis, ce qui eut le don dâexaspĂ©rer les dĂ©fenseurs du parlement qui estimaient quâune telle dĂ©cision nĂ©cessitait lâaval de l'assemblĂ©e nationale. Lorsque le prince Norodom Phurissara (en), le secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral du parti dĂ©mocrate, protesta contre cet accord, le gouvernement menaça de le faire arrĂȘter. Avec cette alliance, lâimpopularitĂ© de Sihanouk Ă©tait Ă son paroxysme auprĂšs des plus radicaux de ses sujets[116].
La dĂ©cision dâaccepter lâaide amĂ©ricaine semblait toutefois logique, mais aura de lourdes consĂ©quences pour lâarmĂ©e cambodgienne qui bien que correctement Ă©quipĂ©e par Washington, ne sera jamais entraĂźnĂ©e au combat. La manĆuvre semblait adroite ; tout en menant une politique antiamĂ©ricaine, le Cambodge bĂ©nĂ©ficiait de lâassistance militaire des Ătats-Unis. Cette derniĂšre lui apportait un nombre important de soutien internationaux alors que son non-alignement lui attirait une certaine sympathie au sein de lâintelligentsia cambodgienne. Mais Sihanouk et ses conseillers voyaient dâun mauvais Ćil la dĂ©position Ă Saigon de BáșŁo ÄáșĄi et la mise en place dans la seconde partie de lâannĂ©e 1955, de la RĂ©publique du ViĂȘt Nam par NgĂŽ ÄĂŹnh Diá»m. Dans le mĂȘme temps, Ă Bangkok, le gouvernement de Plaek Pibulsonggram poursuivait son soutien Ă Son Ngoc Thanh. La dĂ©cision de se distancier de ces deux rĂ©gimes proches alliĂ©s des Ătats-Unis allait dans le sens de lâopinion publique locale et semblait en adĂ©quation avec lâintĂ©rĂȘt du royaume. En outre, le courant pro-amĂ©ricain Ă©tait alors trĂšs faible au Cambodge et dans le cas dâune confrontation dans le Sud-Est asiatique impliquant les Forces armĂ©es des Ătats-Unis, lâaide que le royaume khmer pourrait apporter semblait fragile[117].
En consĂ©quence, la position neutraliste de Sihanouk encouragea les services secrets amĂ©ricains, dont la CIA, Ă soutenir tout mouvement khmer se rĂ©clamant de lâanticommunisme. Comme les Français avant eux, les AmĂ©ricains trouvaient dur dâaccepter que le Cambodge puisse dĂ©fendre des intĂ©rĂȘts propres, diffĂ©rents de ceux du « monde libre ». Ainsi, lâambassadeur amĂ©ricain Ă Phnom Penh mettait la mĂ©fiance du monarque Ă lâĂ©gard de son pays sur le compte de son « besoin permanent de se justifier » plutĂŽt que sur celui de craintes pas forcĂ©ment infondĂ©es. Les radicaux cambodgiens de leur cĂŽtĂ© trouvaient le ralliement du prince Ă des positions plus neutres tardif et feint ; pour eux, le problĂšme restait lâaide militaire amĂ©ricaine qui pouvait faire de lâarmĂ©e de leur pays une force anticommuniste. Leurs arguments avaient toutefois Ă©tĂ© une nouvelle fois escamotĂ©s par Sihanouk qui tout en faisant sienne leur thĂšse avait obtenu, grĂące Ă lâassistance des Ătats-Unis, que le budget de la dĂ©fense nationale soit pris en charge par Washington pour les huit prochaines annĂ©es[118].
Alors que les Ă©lections se profilaient, Sihanouk tentait de soustraire la politique cambodgienne Ă lâinfluence des partis. Mais encore en avril, beaucoup dâobservateurs pensaient que le parti dĂ©mocrate remporterait le scrutin. Cependant, la police et la milice aux ordres de Dap Chhuon multipliaient les brutalitĂ©s et autres mesures dâintimidation. Plusieurs journaux indĂ©pendants furent fermĂ©s et leurs propriĂ©taires emprisonnĂ©s. En province, de nombreux communistes et dĂ©mocrates furent incarcĂ©rĂ©s puis libĂ©rĂ©s aprĂšs le scrutin, sans avoir Ă©tĂ© jugĂ©s. Ailleurs, des villageois Ă©taient rassemblĂ©s Ă la pagode oĂč ils devaient jurer devant des moines de voter pour le Sangkum. Dans certains districts, les candidats royalistes subissaient une forte pression pour garantir Ă leur mouvement au moins 80 % des suffrages. Les bruits quant aux actes de violence qui se rĂ©pandaient Ă travers le pays par le bouche-Ă -oreille suffisaient dans la plupart des cas Ă contenir les vellĂ©itĂ©s de contestation[119].
Le mĂ©lange de terreur, de favoritisme, de propagande et de mĂ©pris pour les Ă©lites qui sĂ©vissait alors allait devenir monnaie courante dans les annĂ©es qui suivront. AprĂšs 1955, la contestation allait ĂȘtre Ă©touffĂ©e et les dissidents emprisonnĂ©s. MalgrĂ© tout, la campagne continuait et les dĂ©mocrates, poursuivaient leurs discours oĂč ils fustigeaient lâabsolutisme et le sous-dĂ©veloppement endĂ©mique. Pour contrer ces arguments, la presse proche du Sangkum dĂ©veloppait une approche originale du malaise social, prĂ©textant que les indigents devaient leur pauvretĂ© Ă leurs mĂ©faits commis dans leurs vies prĂ©cĂ©dentes alors que les plus aisĂ©s jouissaient du fruit des bonnes actions de leurs existences passĂ©es. Cette affirmation allait par la suite devenir un des piliers du « socialisme bouddhiste » prĂŽnĂ© par le Sangkum[120].
Quand la date du scrutin arriva, le rĂ©sultat ne faisait aucun doute. Mais le score des candidats du Sangkum â crĂ©ditĂ© de 82 % des voix et la totalitĂ© des siĂšges â avait surpris la plupart des observateurs. Les dĂ©mocrates, qui nâavaient rĂ©uni que 12 % des votes, se plaignaient que dans les circonscriptions oĂč le mouvement royaliste avait perdu, les urnes aient Ă©tĂ© dĂ©truites et les candidats du Sangkum avaient Ă©tĂ© dĂ©crĂ©tĂ©s vainqueurs sans autre forme de procĂšs[121].
Il nâest pas possible de savoir quel score la formation sihanoukiste aurait obtenu sans les manĆuvres dâintimidation citĂ©e plus haut, mais il semble probable que le Sangkum aurait quand mĂȘme atteint une majoritĂ© confortable. Toutefois, le prince aurait dĂ» affronter une partie de lâassemblĂ©e rĂ©solument hostile. LâidĂ©e dâune telle opposition, mĂȘme stĂ©rile lui aurait Ă©tĂ© intolĂ©rable et il aurait voulu en exclure toute possibilitĂ©[122]. GrisĂ© par sa victoire, Sihanouk rĂ©unissait un congrĂšs du Sangkum Ă Phnom Penh. Plusieurs milliers de membres votaient alors Ă main levĂ©e la rĂ©forme constitutionnelle que le prince avait tentĂ© de faire accepter en dĂ©but dâannĂ©e. Ce vote Ă©vitait de devoir discuter ou modifier la rĂ©forme devant lâassemblĂ©e. Pour Sihanouk, le congrĂšs suivait le mode de fonctionnement de la dĂ©mocratie dans la GrĂšce antique et ces rĂ©unions allaient devenir banales dans les annĂ©es Ă venir[123].
La plupart des Cambodgiens Ă©taient alors prĂȘts Ă accepter que leur monarque, ĂągĂ© de trente-trois ans modifie un rĂ©gime parlementaire dont ils nâavaient pu percevoir les avantages pendant les neuf derniĂšres annĂ©es[124].
Le socialisme khmer (1956)
ConfortĂ© sur le plan intĂ©rieur, Sihanouk amorce, tout en prĂ©servant lâaide militaire amĂ©ricaine, un rapprochement avec les pays du camp communiste, moins exigeants que ceux du camp occidental au moment de fournir une assistance. Il entreprend ainsi durant lâannĂ©e 1956 des visites officielles en Chine et en Europe de lâEst[125].
Il affectionne tout particuliĂšrement ces tournĂ©es. Le premier dĂ©placement de lâannĂ©e sera toutefois pour les Philippines, oĂč le gouvernement et les mĂ©dias tentĂšrent en vain de lui forcer la main pour le faire adhĂ©rer Ă lâOTASE. Ă son retour, il expliquera quâil avait Ă©tĂ© facile de dĂ©jouer les plans des Philippins qui Ă©taient citoyens dâ« une nation qui Ă©tait tombĂ©e sous la domination dâune puissance Ă©trangĂšre ». Il espĂ©rait alors recevoir plus de soutien et dâappuis de la part de PĂ©kin, Ă©tape suivante de son pĂ©riple, que des Philippines et de leurs alliĂ©s pro-amĂ©ricains[126].
Le voyage en Chine fut plus gratifiant. Le prince louait ses hĂŽtes qui avaient su, contrairement au rĂ©gime de Manille, « rester sur leurs propres pieds ». Il fut impressionnĂ© par le sens du devoir des habitants ainsi que lâabsence apparente de hiĂ©rarchie et de corruption. Il retrouvait Zhou Enlai et se liait dâamitiĂ© avec Mao Zedong. On lui servit des plats somptueux et on sut le flatter. Les Chinois promirent une aide Ă©conomique de 40 millions de dollars qui contrairement Ă celle des AmĂ©ricains Ă©tait sans contrepartie. Plus tard dans lâannĂ©e, Sihanouk reçut le mĂȘme traitement lors de ses visites en TchĂ©coslovaquie et en Pologne[127].
Ă son retour de PĂ©kin, Sihanouk dut subir lâanimositĂ© des gouvernements thaĂŻlandais et sud-vietnamien dont les journaux lâaccusaient dâĂȘtre un prince rouge qui avait fait alliance avec le diable et dont le pays devenait une base avancĂ©e du communisme. Le gouvernement de Diá»m Ă SaĂŻgon imposait mĂȘme un blocus temporaire. Paradoxalement, ces mesures de rĂ©tention nâeurent pas lâeffet escomptĂ© mais confortĂšrent plutĂŽt Sihanouk dans ses convictions sur la justesse de ses choix[128].
Au mĂȘme moment, Robert McClintock, premier ambassadeur amĂ©ricain Ă Phnom Penh, jugeait Sihanouk maladroit, dogmatique et cassant. Le diplomate de son cĂŽtĂ© avait la rĂ©putation de manquer de subtilitĂ©. Ses avertissements Ă Sihanouk sur les dangers du communisme agaçaient ce dernier et lui rappelaient trop les leçons sur la dĂ©mocratie parlementaire que lui servaient les dĂ©mocrates quelques annĂ©es auparavant. En revanche, Pierre Gorce, lâambassadeur de France, estimait que les relations diplomatiques avec le Cambodge dĂ©pendaient du maintien de liens cordiaux avec le prince[129].
En mars 1956, Sihanouk se lançait dans un programme de « socialisme khmer ». Alors que des Ea Sichau, Thiounn Mumm ou autre Youtevong sâĂ©taient convertis au socialisme aprĂšs avoir lu de nombreux ouvrages, le prince semble avoir Ă©tĂ© sĂ©duit par le terme lui-mĂȘme et parce que de nombreux dirigeants tels ses nouveaux amis Nehru, Zhou Enlai ou Soekarno en Ă©pousaient les thĂšses. Devenir socialiste Ă©tait alors dans lâair du temps. Plus tard, le socialisme khmer se transforma en socialisme bouddhiste, affirmant chercher le consensus entre les dirigeants et les dirigĂ©s qui aurait permis aux rĂ©gimes angkoriens de progresser. Sihanouk prĂ©tendait prendre dans le communisme ce quâil y avait de meilleurs, laissant de cĂŽtĂ© le marxisme et la lutte des classes, ceci afin, toujours dâaprĂšs le monarque dâ« empĂȘcher le triomphe du communisme au Cambodge »[130].
Le prince souhaitait en rĂ©alitĂ© une sociĂ©tĂ© mobilisĂ©e pour perpĂ©tuer les traditions. Le socialisme khmer, puis bouddhiste, reposait sur une vision idĂ©aliste des relations sociales cambodgiennes. Pour le mettre en place, Sihanouk tablait sur la dĂ©fĂ©rence des plus modestes et sur la bonne volontĂ© des Ă©lites. Ce systĂšme impliquait une intervention de lâĂtat dans beaucoup de domaines de la vie courante, alors que lâagriculture et le commerce restait dans la sphĂšre privĂ©e. Sihanouk espĂ©rait que le socialisme permettrait de maintenir le statu quo tout en dĂ©veloppant lâĂ©ducation des masses[131].
Pour apprĂ©hender le contexte politique khmer de lâĂ©poque, il faut prendre en compte lâenvironnement social qui prĂ©dominait. Lâoptimisme de Sihanouk sur le potentiel du Cambodge Ă©tait largement partagĂ©. Jusquâen 1963, et peut ĂȘtre mĂȘme 1966, la plupart des promesses allaient ĂȘtre tenues et lâaffection du peuple khmer pour son monarque Ă©tait bien rĂ©elle. La volontĂ© des opposants de lâĂ©vincer restait marginale. Les sujets formaient une masse souriante, silencieuse et dĂ©fĂ©rente envers le prince. Quand ils pensaient politique, ils acceptaient leur statut et laissaient Sihanouk prĂ©sider Ă leurs destinĂ©es. GrĂące ou Ă cause de cette timiditĂ©, il pouvait compter sur des sujets pour la plupart loyaux et chaleureux Ă son Ă©gard[132].
Sihanouk Ă©tait trĂšs certainement le monarque le plus proche de ses sujets que le Cambodge ait jamais connu. Inlassablement, il sillonnait son royaume, inaugurant des Ă©coles, des hĂŽpitaux, des usines, des parcs ou des barrages. Parfois, il semble quâil Ă©tait mĂȘme prĂȘt Ă inaugurer dâanciens bĂątiments qui nâavaient eu quâune couche de peinture fraiche[133]. Dans ces circonstances, il se livrait Ă des discours de plusieurs heures devant des foules de notables locaux, de moines, dâĂ©coliers et de ceux que lâon appelait le petit peuple, immobiles en plein soleil. Durant ces allocutions, il admonestait ses opposants, plaisantait sur sa vie privĂ©e, fustigeait les Ă©trangers, fĂ©licitait ses auditeurs de lâĂ©couter et louait la gloire dâAngkor. Il demandait Ă tous de travailler dur pour la nation et Ă©voquait le prestige du Cambodge. Les discours Ă©taient retransmis plusieurs fois, mais les rĂ©sumĂ©s qui paraissaient dans la presse française faisaient lâimpasse sur les passages les plus polĂ©miques. En dâautres termes, Sihanouk faisait un discours en cambodgien pour ses « enfants » et un autre pour la postĂ©ritĂ©. Malheureusement pour lui si le but avait Ă©tĂ© dâĂ©dulcorer ses propos devant les mĂ©dias internationaux, les discours Ă©taient aussi enregistrĂ©s et traduits par la presse locale en chinois, la BBC, lâambassade des Ătats-Unis et le service information du dĂ©partement d'Ătat des Ătats-Unis[134]. En une occasion, en 1962, alors que Sihanouk avait fustigĂ© de maniĂšre peu amĂšne lâadministration de Washington, il avait tenu Ă rajouter quâil « nierait avoir tenu de tels propos si dâaventure on venait Ă le lui demander », provoquant lâhilaritĂ© de la foule et du prĂ©posĂ© de lâambassade amĂ©ricaine chargĂ© de retranscrire lâallocution[135].
Avant 1960, Sihanouk avait atteint son apogĂ©e. Son pouvoir nâĂ©tait pas encore absolu. JusquâĂ la mort de son pĂšre, ses parents ainsi que certains de ses proches avaient une influence, certes rĂ©duite, sur ses dĂ©cisions, mais lâopposition Ă son leadership Ă©tait dĂ©sorganisĂ©e et muselĂ©e. Le Cambodge Ă©tait alors dans une position beaucoup plus favorable quâelle ne le sera Ă partir de 1965, quand les combats commenceront Ă faire rage au ViĂȘt Nam voisin. Quasiment tout le monde mangeait Ă sa faim et la plupart des paysans possĂ©daient le sol quâils exploitaient. De nombreuses terres cultivables Ă©taient disponibles et les villes regorgeaient dâopportunitĂ©s dâembauche. Des centaines de milliers dâenfants frĂ©quentaient les Ă©coles nouvellement construites grĂące Ă lâaide internationale. Les dĂ©penses militaires Ă©taient prises en charge par les Ătats-Unis[136]. Pour la premiĂšre fois le Cambodge vivait en paix. ComparĂ© avec les pĂ©riodes qui allaient suivre et celles qui les avaient prĂ©cĂ©dĂ©es, les annĂ©es de 1955 Ă 1965 sont considĂ©rĂ©es par la plupart de ceux qui les ont vĂ©cues comme un Ăąge dâor. Une majoritĂ© de Cambodgiens estimaient quâils devaient cette embellie Ă leur dirigeant[137].
Toutefois, mĂȘme si Ă lâĂ©poque il semble avoir Ă©tĂ© probe, il ne fit rien pour dĂ©courager la corruption. Bien quâil sĂ»t se montrer trĂšs rancunier envers ceux qui avaient osĂ© le dĂ©fier et mĂȘme cruel envers ses opposants, il refusait de punir ses subordonnĂ©s ou les membres de sa famille accusĂ©s de corruption ou dâincompĂ©tence. Il considĂ©rait les Cambodgiens comme ses enfants et attendait dâeux avant tout quâils soient loyaux Ă son Ă©gard. De ce fait, si on excepte quelques vieux politiciens en qui il avait toute confiance tels Son Sann et Penn Nouth ou des conseillers Ă©trangers comme Charles Meyer et Donald Lancaster, son entourage Ă©tait composĂ© de sa famille, de courtisans et dâobligĂ©s[138].
Si en mars 1956, les journaux proches des dĂ©mocrates furent autorisĂ©s Ă paraitre Ă nouveau, on refusa toujours au parti dâorganiser des manifestations mĂȘme de soutien Ă la politique neutraliste du Prince. DĂšs cette Ă©poque, Norodom Sihanouk faisait un distinguo entre les rĂ©gimes communistes alliĂ©s et les membres des partis politiques « gauchistes » accusĂ©s de subversion[139].
Au mĂȘme moment, inspirĂ© par ce quâil avait vu en Chine, Sihanouk entreprenait des rĂ©formes, mais celles-ci restaient modestes, le prince nâĂ©tant pas dĂ©sireux de mettre en place des mesures qui pourraient remettre en cause sa position dominante. Il Ă©tait encouragĂ© dans cette voie par lâimage quâil avait de la plupart des chefs dâĂtat avec qui il avait les accointances les plus fortes tels Nicolae CeauÈescu, Kim Il-sung ou Tito qui comme lui Ă©taient connus pour ĂȘtre autoritaires et apprĂ©ciaient le pouvoir, ainsi que par les plus humbles de ses sujets qui de tout temps considĂ©raient les monarques du Cambodge comme des gĂ©nies tutĂ©laires du royaume khmer[140].
La fin des démocrates (1957)
MalgrĂ© (ou Ă cause de) la victoire Ă©crasante aux Ă©lections, les dĂ©putĂ©s ne tardĂšrent pas Ă braver les diffĂ©rents gouvernements. Certains parlementaires, qui avaient visitĂ© la France Ă©taient rentrĂ©s envieux du pouvoir quâavaient leurs homologues du Palais Bourbon, alors quâeux-mĂȘmes Ă©taient soumis au bon vouloir du prince qui pouvait dissoudre lâAssemblĂ©e Ă sa guise. Cette menace planait telle une Ă©pĂ©e de DamoclĂšs, au-dessus de la tĂȘte de personnes qui Ă©taient devenues pleines de ressentiment, dĂ©plorant que les membres des gouvernements ne participent pas aux dĂ©bats parlementaires et que la plupart dâentre eux nâĂ©taient pas issus des rangs de lâassemblĂ©e[141]. La succession des diffĂ©rentes crises amena Norodom Sihanouk Ă prĂ©senter sa dĂ©mission du poste de Premier ministre quâil occupait par intermittence, mais le roi Norodom Suramarit la rejeta six fois, avant de finalement lâaccepter en juillet 1957. Mais au lieu de prendre du repos, le prince dĂ©cidait de rester Ă Phnom Penh et de prĂ©sider le congrĂšs bisannuel du Sangkum ; un certain Phlek Phoeun, choisi par Sihanouk pour lui succĂ©der profita du congrĂšs pour nĂ©gocier la constitution de son gouvernement, ce qui eut le don dâirriter le monarque et lâamena dĂšs lors Ă saborder la candidature de son successeur dĂ©signĂ© et fit adopter une motion de dĂ©fiance Ă son Ă©gard. AprĂšs le congrĂšs, le prince se retira dans un monastĂšre prĂšs dâAngkor pour se reposer et le roi nomma Sim Var comme Premier ministre[142].
La maniĂšre dont le prince avait conduit le congrĂšs tĂ©moignait de sa grande lassitude. MĂȘme sâil Ă©tait et restera un bourreau de travail, habituĂ© Ă passer dix-huit heures dâaffilĂ©e sur les dossiers quâon lui prĂ©sentait, la gestion de tous ces ministĂšres lâavait extĂ©nuĂ©. Avant son dĂ©part vers Siem Reap, il diffusa une lettre ouverte dans laquelle il se plaignait dâessuyer des critiques qui le condamnaient sans rĂ©pit. Les dĂ©mocrates Ă©taient la cible privilĂ©giĂ©e de ces attaques et lors du congrĂšs il avait prĂ©tendu que sâil venait Ă mourir, ils ne seraient pas longs Ă reprendre le pouvoir[143].
Ă partir de ce moment, Sihanouk mit au point une tactique quâil affectionnera Ă lâavenir, consistant Ă cĂ©der les rĂȘnes du pays Ă ses opposants et Ă organiser des manifestations demandant Ă la nouvelle administration de changer sa politique. Ces protestations lui permettaient alors de revenir aux affaires tel un sauveur, mais accentuaient dâautant sa fatigue. Il savait alors jouer du rĂŽle de pĂšre de la nation quâil sâĂ©tait arrogĂ©, reprochant alors Ă ses « enfants » leur ingratitude et leur manque de respect filial[144].
Les personnes qui se gaussaient des Ă©lucubrations du prince le faisaient Ă leurs risques et pĂ©rils. Outre que Sihanouk abhorrait lâidĂ©e de ne pas ĂȘtre pris au sĂ©rieux, les attaques quâil lançait en rĂ©ponse aux critiques nâĂ©taient pas dĂ©nuĂ©es de quelques fondements. Les accusations dâaide amĂ©ricaine aux dĂ©mocrates sâappuyaient sur le fait avĂ©rĂ© que tout au long des annĂ©es 1950, lâambassade des Ătats-Unis, sur instruction de Washington, tenta de trouver des forces et des personnalitĂ©s qui pourraient contrecarrer la politique du monarque jugĂ©e trop procommuniste. Une directive confidentielle du DĂ©partement d'Ătat des Ătats-Unis datĂ©e dâavril 1958, prĂ©cisait mĂȘme quâ« afin de maintenir lâindĂ©pendance cambodgienne et de contrecarrer le basculement vers une neutralitĂ© procommuniste, le gouvernement amĂ©ricain doit encourager les individus et les groupes qui refusent de traiter avec le bloc communiste et pourraient servir Ă Ă©largir la base politique du Cambodge ». En procurant une aide secrĂšte Ă des personnes suffisamment intrĂ©pides pour oser dĂ©fier un dirigeant autoritaire, irritable mais populaire, les Ătats-Unis se mettaient dans une position qui allait sâavĂ©rer bien dĂ©licate[145].
De Siem Reap, Sihanouk annonçait quâil se retirait de la politique et renonçait Ă ses fonctions au sein du Sangkum. Deux semaines plus tard, il rentrait quand mĂȘme Ă Phnom Penh, revenant sur sa dĂ©mission et reprenant ses attaques contre les dĂ©mocrates, les invitant Ă dĂ©battre avec lui des problĂšmes cambodgiens. Les leaders du parti demandĂšrent une audience privĂ©e mais le prince dĂ©sirait un dĂ©bat public avec les principaux responsables religieux, la presse et une assistance nombreuse. La police visita le domicile des principaux dirigeants du parti, insinuant quâune absence de rĂ©ponse Ă lâoffre princiĂšre serait considĂ©rĂ©e comme un acte de trahison. Cinq dâentre eux se rĂ©signĂšrent Ă participer au dĂ©bat[146].
La discussion eu lieu le 11 aoĂ»t 1957 devant le palais royal. Il Ă©tait retransmis et des milliers de personnes sâĂ©taient amassĂ©es Ă lâextĂ©rieur de lâenceinte pour Ă©couter la discussion diffusĂ©e par haut-parleurs. Sihanouk accaparait la quasi-totalitĂ© du temps de parole. Il demandait aux dĂ©mocrates de fournir des preuves factuelles des malversations dont ils accusaient le rĂ©gime. ContrariĂ©s par le contexte et par lâagressivitĂ© de Sihanouk, ils marmonnĂšrent quâils avaient besoin de temps pour rĂ©unir de telles preuves, mais quâils lui Ă©taient loyaux et quâils nâavaient jamais eu lâintention de lui causer du tort. Le prince leur rĂ©pondait quâil les trouvait hypocrites et leur demandait de joindre sur le champ le Sangkum. Leurs hĂ©sitations, entendues par des milliers de personnes Ă©taient assimilĂ©es Ă une fĂ©lonie. Au bout de prĂšs de trois heures, Sihanouk leva la sĂ©ance et souhaita un « bon appĂ©tit » Ă ses interlocuteurs[147].
Alors quâils quittaient le palais, les dĂ©mocrates furent tirĂ©s de leurs vĂ©hicules et molestĂ©s par des militaires et des gardes. Dans les trois jours qui suivirent, on recensa une trentaine dâactes de violence perpĂ©trĂ©s par des hommes en uniforme Ă lâencontre de personnes suspectĂ©es dâappartenir au parti dĂ©mocrate. Sâil est difficile de dĂ©terminer si ces actes avaient Ă©tĂ© ordonnĂ©s par le prince lui-mĂȘme, par Lon Nol alors responsable de lâarmĂ©e ou Ă©taient spontanĂ©s, ils ne furent jamais condamnĂ©s par quiconque et aucun de ceux qui les avaient commis ne fut inquiĂ©tĂ©. AprĂšs ces Ă©vĂšnements, Sihanouk dĂ©cidait de partir en France pour des vacances[148].
Le dĂ©bat et son Ă©pilogue sonnĂšrent le glas du parti dĂ©mocrate. Lâopposition des Ă©lites cambodgiennes Ă Sihanouk passa dans la clandestinitĂ© et ne rĂ©apparaitra quâune dizaine dâannĂ©es plus tard par le biais de ses ailes les plus radicales. De plus, le discours vĂ©hĂ©ment du prince devant une foule abondante, lâhumiliation publique dâadversaires impuissants puis les violences physiques Ă peine voilĂ©es nâĂ©taient que les prĂ©mices du traitement qui allait attendre ceux qui oseraient sâopposer Ă lâavenir au rĂ©gime[149].
Nouvelle dissolution de lâAssemblĂ©e (1958)
Sihanouk parti pour la France, Sim Var, dirigeait le gouvernement qui se contentait de « suivre la voie tracĂ©e par le prince ». Les parlementaires ne furent pas longs Ă reprendre leurs vieilles habitudes de monnayer leur influence en se prĂ©sentant par exemple comme des associĂ©s incontournables dans des commerces avec des importateurs et des hommes dâaffaires. Ces agissements sâĂ©taient intensifiĂ©s depuis lâĂ©chec de plusieurs campagnes anti-corruption en 1956. Les dĂ©putĂ©s furent toutefois irritĂ©s par la rĂ©serve du nouveau Premier ministre Ă leur Ă©gard et par son autoritarisme. Des lettres anonymes furent envoyĂ©es en France au monarque, dĂ©nonçant ces dĂ©rives. Le roi Norodom Suramarit ayant refusĂ© dâintervenir, le pouvoir se dĂ©lita et Sim Var, par le biais dâun Ă©ditorial dans un journal acquis Ă sa cause demandait instamment le retour du prince, affirmant son intention de dĂ©missionner dĂšs que lâavion de Sihanouk se poserait Ă Pochentong[150]. Quand Sihanouk revint de France, il ne voulait pas reprendre la tĂȘte du gouvernement et pensait que la crise allait se rĂ©sorber dâelle-mĂȘme. Toutefois, Sim Var Ă©tait plus que jamais rĂ©solu Ă cĂ©der la place et ses ennemis Ă le faire partir. Le Premier ministre suggĂ©ra alors de dissoudre lâassemblĂ©e, ce que Sihanouk hĂ©sitait Ă faire et dĂ©cida de soumettre la question lors dâun prochain congrĂšs du Sangkum qui fut convoquĂ© pour janvier 1958. Il espĂ©rait quâun dĂ©bat allait rĂ©gler le problĂšme, mais les dissensions entre Sim Var et le parlement Ă©taient trop profondes pour ĂȘtre aplanies. AprĂšs deux jours de discussions, le gouvernement demandait au roi de dissoudre lâassemblĂ©e. Le dĂ©cret fut publiĂ© et les dĂ©putĂ©s Ă©lus en 1955 furent renvoyĂ©s Ă leurs foyers. Sihanouk Ă©tait finalement ravi de pouvoir changer un parlement moins docile que prĂ©vu et de choisir des candidats du Sangkum qui devaient ĂȘtre Ă©lus sans opposition[151].
La sĂ©lection de ces personnes permettait dâasseoir le pouvoir politique du prince qui, dans le mĂȘme temps, avait acceptĂ© de reprendre une nouvelle fois les rĂȘnes du gouvernement. En fĂ©vrier, aidĂ© de Chau Seng, un intellectuel de gauche fraichement revenu de France, et quelques conseillers, il devait traiter quelque 700 candidatures dâhommes et de femmes tous dĂ©sireux dâoccuper les bancs de la nouvelle assemblĂ©e[152].
Pour faire ses choix, Sihanouk nâavait pas voulu tenir compte de lâavis des caciques du Sangkum et la campagne sera animĂ©e par de nouvelles composantes du parti, telles les jeunesses socialistes royales khmĂšres (JSRK) plutĂŽt que par son comitĂ© central. Le monarque sâagaçait de plus en plus Ă lâencontre de son mouvement et des personnes quâil avait choisies pour le diriger. Deux de ses secrĂ©taires gĂ©nĂ©raux furent mĂȘme renvoyĂ©s en 1957. Au dĂ©but de 1958, la formation passait de plus en plus entre les mains de lâentourage du prince. Avec le temps, le terme Sangkum, qui venait dâun mot pali qui signifierait « venir ensemble », allait ĂȘtre synonyme de la politique que Sihanouk voulait mener. Quand il sâexprimait Ă lâĂ©tranger, il appelait le systĂšme quâil mettait en place « la sociĂ©tĂ© du Sangkum »[153].
Toutefois, bien que les visites officielles en Europe de lâEst et en Chine Ă©taient des succĂšs et malgrĂ© la faiblesse de lâopposition de gauche, Norodom Sihanouk focalisait la campagne pour les Ă©lections de 1958 sur un programme anticommuniste. Au congrĂšs national du Sangkum en janvier, il accusait le Pracheachon, vitrine officielle des communistes cambodgiens, dâengendrer une rancĆur Ă son encontre au sein du « peuple ordinaire »[154]. Juste avant les Ă©lections, le prince publiait trois articles sur le communisme au Cambodge oĂč il retraçait lâhistoire du mouvement telle quâil la voyait et sâappesantissait sur leur dĂ©pendance au ViĂȘt Nam. Sihanouk visita Ă©galement les districts oĂč se prĂ©sentait le Pracheachon et par ses attaques virulentes obtint que seul Keo Meas maintienne sa candidature Ă Phnom Penh[155].
Les Ă©lections se conclurent par une victoire Ă©crasante du Sangkum (sur les 1,6 million de voix, seules 409 lui Ă©chapperont) mais virent une faible participation. Il semblait que les Ă©lecteurs nâaient pas daignĂ© se dĂ©placer pour un scrutin dont le rĂ©sultat Ă©tait connu dâavance et pour choisir des dĂ©putĂ©s dont ils avaient du mal Ă voir en quoi ils pouvaient avoir une incidence sur leur vie de tous les jours[156].
Devant la nouvelle assemblĂ©e, Sihanouk affirmait son intention de pouvoir conseiller ce nouveau parlement, spĂ©cifiant quâil ne pourrait tenir un tel rĂŽle en Ă©tant Premier ministre et Ă©tayant ses dires par une de ces formules dont il avait le secret : « Au thĂ©Ăątre, on ne peut pas ĂȘtre en mĂȘme temps acteur, metteur en scĂšne et spectateur ». Il rejetait par avance lâoffre de diriger Ă nouveau le gouvernement, prĂ©cisant que ce nâĂ©tait pas lui, mais « le Sangkum qui est Ă la base de tout » et concluait en affirmant que si les dĂ©putĂ©s ne lâaidaient pas, « le Cambodge connaitrait comme dâautres pays, sa rĂ©volution ». Sim Var Ă©tait donc reconduit comme Premier ministre, mais trĂšs vite des diffĂ©rends avec le parlement apparurent sur les questions Ă©conomiques et il fut contraint Ă la dĂ©mission. AprĂšs des manifestations dans tout le pays rĂ©clamant son retour, Norodom Sihanouk acceptait de prendre la tĂȘte dâun nouveau gouvernement dans lequel figurait Hu Nim et Hou Yuon[157].
Dans le mĂȘme temps, les relations avec la ThaĂŻlande et le Sud-ViĂȘt Nam se ternissaient. Des troupes vietnamiennes Ă©taient accusĂ©es de franchir la frontiĂšre par bataillons entiers, Ă la poursuite dâopposants qui cherchaient refuge au Cambodge. Sihanouk se plaignit de ces incursions rĂ©pĂ©tĂ©es auprĂšs de lâambassade amĂ©ricaine, avertissant quâil dĂ©sirait porter lâaffaire devant le conseil de sĂ©curitĂ© des Nations unies. Lâambassadeur Carl Strom menaça de suspendre lâaide militaire si les armes et munitions fournies par les Ătats-Unis Ă©taient utilisĂ©es contre une puissance alliĂ©e[158]. Le prince rĂ©pondit Ă cette intimidation en reconnaissant diplomatiquement la rĂ©publique populaire de Chine. Cette lĂ©gitimation nâĂ©tait pas du goĂ»t des ambassades occidentales, mais le coup devait ĂȘtre prĂ©vu depuis quelque temps dĂ©jĂ . Cela sema le dĂ©sarroi au sein des voisins de lâOTASE et incita les AmĂ©ricains Ă chercher des solutions alternatives viables au rĂ©gime Sihanoukien[159].
La dĂ©cision de Sihanouk de reconnaitre le gouvernement de PĂ©kin avait sĂ»rement Ă©tĂ© motivĂ©e par une dĂ©convenue survenue quelques mois plus tĂŽt, quand lâarmĂ©e thaĂŻlandaise avait investi le temple de Preah Vihear, un sanctuaire du IXe siĂšcle situĂ© au sommet dâune falaise qui empiĂ©tait sur la frontiĂšre. Cette occupation menaçait de dĂ©gĂ©nĂ©rer en conflit ouvert. En 1959, le prince porta lâaffaire devant la Cour internationale de justice de la Haye. Trois ans plus tard, au grand dam des autoritĂ©s de Bangkok, le tribunal donna raison au Cambodge[160]. En 1963, Sihanouk annoncera que le Cambodge accordait aux ressortissants thaĂŻlandais des facilitĂ©s dâaccĂšs au temple et renonçait Ă user du droit de demander la restitution des antiquitĂ©s volĂ©es que le tribunal lui avait accordĂ©. Mais loin de calmer la rancĆur de Bangkok, cette dĂ©claration fut ressentie comme une marque de condescendance Ă leur Ă©gard concernant un bien que malgrĂ© le jugement ils continuent encore de nos jours Ă considĂ©rer comme leur revenant[161].
Cependant, en 1958, Sihanouk nâĂ©tait pas encore prĂȘt Ă affronter les Ătats-Unis ou Ă sâopposer Ă leur assistance. En octobre, il fit une nouvelle visite Ă Washington, la premiĂšre depuis lâindĂ©pendance. Eisenhower et Dulles lui firent Ă nouveau la leçon, mais de maniĂšre moins doctrinale quâen 1953[162].
PremiĂšres tensions avec Washington (1959)
Ă son retour au Cambodge, le prince eut Ă subir la premiĂšre vĂ©ritable opposition Ă laquelle il avait Ă faire face depuis 1952. Il sâagissait de deux conjurations, rapidement dĂ©jouĂ©es, mais qui montraient soit lâimplication soit les soutiens des Ătats-Unis, de la ThaĂŻlande et du Sud ViĂȘt Nam. Il parait surtout certain que ces deux machinations nâauraient jamais pu voir le jour si Ă partir de 1958, lâadministration amĂ©ricaine nâavait pas favorisĂ© les opposants. Elles jetĂšrent un froid dans les rapports du Cambodge avec ses voisins pro-occidentaux, irritĂšrent Sihanouk et dĂ©tĂ©riorĂšrent pour longtemps les relations amĂ©ricano-cambodgiennes[163].
Tout dâabord, le 13 janvier 1959, dans un discours prononcĂ© Ă Kampong Cham, Norodom Sihanouk rĂ©vĂ©lait quâil avait eu connaissance de ce quâil appelait « le complot de Bangkok », une conjuration visant Ă le dĂ©poser, mise en place par le Premier ministre thaĂŻlandais Sarit Thanarat avec la complicitĂ© des services amĂ©ricains. MĂȘme si les preuves quâil ait Ă©tĂ© nommĂ©ment dĂ©signĂ© restent faibles, Sam Sary, un ancien fidĂšle qui reprochait le virage Ă gauche du gouvernement et qui craignait dâĂȘtre arrĂȘtĂ©, sâenfuyait au Vietnam une semaine plus tard[164].
Ce fut ensuite Dap Chhuon qui fut accusĂ© dâavoir fomentĂ© un autre complot, financĂ© par la CIA, et qui aurait souhaitĂ© l'Ă©tablissement d'un Ătat « libre » incluant les provinces de Siem Reap et Kampong Thum ainsi que les rĂ©gions du sud du Laos qui Ă©taient contrĂŽlĂ©s par le prince laotien de droite Boun Oum. Chhuon prit le maquis dans son fief du Phnom Kulen oĂč il passa quelque temps avant dâĂȘtre capturĂ© et tuĂ©[165].
Sihanouk tenta de normaliser ses relations avec le Sud ViĂȘt Nam en rendant visite Ă SaĂŻgon au prĂ©sident NgĂŽ ÄĂŹnh Diá»m, mais le un attentat eut lieu au palais royal qui tua trois personnes dont le prince Vakravan, directeur du protocole[166] - [167]. Parmi les commanditaires possibles, on Ă©voquera les noms de Son Ngoc Thanh et Sam Sary[168] alors que dâautres y verront la main des services secrets de Saigon, habituels bailleurs de fonds des deux premiers nommĂ©s[169]. Sihanouk enfin, affirmera des annĂ©es plus tard que les colis provenaient « dâune base amĂ©ricaine au Sud-ViĂȘtnam »[170].
Les rapports avec les alliĂ©s des Ătats-Unis ne s'en remirent pas : les relations diplomatiques avec la ThaĂŻlande seront rompues en 1961, et celles avec le Sud ViĂȘt Nam en 1963[171]. Les AmĂ©ricains, de leur cĂŽtĂ©, aprĂšs ces trois fiascos, semblent avoir mis moins dâintensitĂ© dans la recherche dâun alliĂ© non-communiste au Cambodge, mais Sihanouk nâallait plus se dĂ©fier dâune suspicion Ă leur Ă©gard[172].
Cette mĂ©fiance profitait au Viá»t Minh, plus que jamais dĂ©sireux de mettre Ă bas le rĂ©gime de Diá»m. Bien que conscient que des milliers de combattants communistes vietnamiens stationnaient de maniĂšre quasi systĂ©matique dans les zones frontaliĂšres Ă Kampong Cham, Prey Veng et Svay Rieng il ne dĂ©sirait pas les attaquer, surtout depuis les Ă©vĂšnements de 1959 qui nâavait fait que ranimer sa rĂ©ticence Ă lâĂ©gard du gouvernement de Saigon. Au lieu de cela, il allait de plus en plus se dĂ©fier des Ătats-Unis, principal soutien du Sud ViĂȘt Nam[173].
Une opposition muselée (1960-1962)
Le 3 avril 1960, le roi Suramarit mourut « des suites dâune longue maladie »[174]. Tout de suite aprĂšs ce dĂ©cĂšs, sachant que la succession ne se rĂšglera pas rapidement, Sihanouk persuadait son oncle, le Prince Monireth de diriger un conseil de rĂ©gence en attendant la dĂ©signation dâun nouveau monarque. En fait, le fils du roi disparu nâĂ©tait pas dĂ©sireux de remonter sur le trĂŽne et ne voyait personne en qui il pouvait avoir suffisamment confiance pour le laisser prendre la couronne. Ranariddh, son fils aĂźnĂ© nâavait que 16 ans, et sâil avait Ă©tĂ© nommĂ© roi, une partie du pouvoir risquait de tomber entre les mains dâun rĂ©gent et, Ă sa majoritĂ©, il aurait pu devenir un soutien pour lâopposition. Une autre possibilitĂ©, appuyĂ©e par Monireth, Ă©tait de choisir Sisowath Kossamak, veuve du roi dĂ©funt et accessoirement la sĆur du premier nommĂ©. Elle nâavait alors que 53 ans, Ă©tait en bonne santĂ© et avait un sens aiguisĂ© de la politique. Toutefois, il aurait fallu modifier la constitution pour permettre Ă une femme de rĂ©gner[note 4] - [176] et Sihanouk Ă©tait rĂ©ticent Ă laisser la couronne Ă sa mĂšre. Outre que lâopposition de la reine Ă la liaison de longue date de son fils avec Monique Izzi nâĂ©tait un secret pour personne, le prince semblait vouloir Ă©chapper Ă l'influence de sa mĂšre, ou au moins la limiter, plutĂŽt que de la renforcer en la laissant rĂ©gner[177].
Monireth, qui aprĂšs 1941, avait Ă nouveau fait un moment office de prĂ©tendant, devait, non sans amertume, renoncer Ă toute ambition monarchique, mais Sihanouk doutait de sa rĂ©signation. Ă vrai dire, il semble que les relations entre les deux hommes ne furent jamais chaleureuses. NĂ©anmoins, le neveu nâavait pas hĂ©sitĂ© Ă faire appel Ă son oncle durant cette crise mais avait placĂ© certains de ses fidĂšles au conseil de rĂ©gence afin de limiter le pouvoir du premier nommĂ©. Quand Monireth tenta de rĂ©former lâarmĂ©e cambodgienne, en utilisant le conseil comme tribune, il Ă©choua[178]. Sihanouk, quant Ă lui, refusait de redevenir Premier ministre. Il proposait donc successivement cinq noms (dont Lon Nol et Nhiek Tioulong) qui tous dĂ©clinĂšrent lâoffre. Le prince dĂ©cidait alors de choisir Chuop Hell (en), le prĂ©sident de lâAssemblĂ©e nationale, qui acceptait de remplir temporairement les fonctions de chef de l'Ătat. Sihanouk, qui voulait exercer les pouvoirs constitutionnels dâun monarque sans avoir Ă en assumer le cĂ©rĂ©monial, menait campagne pour que ses vues soient approuvĂ©es par un rĂ©fĂ©rendum. Une telle consultation nâĂ©tait pas sans risque pour la monarchie implantĂ©e depuis plus dâun millĂ©naire au Cambodge et cela ne fit quâenvenimer les relations de Monireth avec son neveu Ă qui il reprochait cette nouvelle frasque. Lâopinion de la reine Kossamak sur le sujet Ă©tait difficile Ă cerner, mais, dâaprĂšs David Chandler, il semble quâen fin de compte elle se soit ralliĂ©e aux vues de son fils[179].
Comme pour les Ă©lections prĂ©cĂ©dentes, la rĂ©gularitĂ© du rĂ©fĂ©rendum est sujette Ă caution. Les Ă©lecteurs devaient choisir entre un bulletin avec la photo de Sihanouk, un autre avec celle de Son Ngoc Thanh, pourtant condamnĂ© Ă mort auparavant par contumace, un bulletin rouge pour soutenir le communisme et enfin un dernier marquĂ© dâun point dâinterrogation pour signifier une abstention. Dans plusieurs bureaux, pour ne pas dire la plupart, les votants devaient rendre aux prĂ©posĂ©s, tous membres du Sangkum, les bulletins quâils nâallaient pas dĂ©poser dans lâurne. Ceux qui ne voulaient pas choisir Sihanouk devaient donc le faire au vu et au su de tout le monde, ce qui pouvait leur valoir un sĂ©jour en prison. Sans surprise, seuls 133 Ă©lecteurs ne portĂšrent pas leur dĂ©volu sur Sihanouk alors que de son cĂŽtĂ©, il recueillait plus de deux millions de voix[180]. La constitution fut modifiĂ©e et un article (122) fut ajoutĂ©, autorisant lâassemblĂ©e à « confĂ©rer les pouvoirs et prĂ©rogatives de chef de lâĂtat Ă une personnalitĂ© incontestĂ©e par le suffrage gĂ©nĂ©ral de la nation ». GrĂące Ă cette victoire Ă©crasante, Sihanouk Ă©tait confortĂ© et pouvait gouverner sans craindre un rival potentiel sur le trĂŽne, des conseillers trop pressants ou une opposition trop puissante. Il semble acquis que mĂȘme sans les diverses manipulations qui avaient Ă©maillĂ© le scrutin, le rĂ©sultat nâaurait pas Ă©tĂ© sensiblement modifiĂ©. Pour beaucoup dâobservateurs sur place, ce rĂ©fĂ©rendum ne faisait que confirmer un Ă©tat de fait que personne nâosait remettre en question[181].
La reine Sisowath Kossamak restait au palais royal et avait pour mission dâincarner l'institution monarchique. Elle demeurait avec les regalia, les astrologues, le corps de ballet[182]. Des proches de Sihanouk trouvĂšrent quâen se dĂ©marquant de ce cĂ©rĂ©monial il devenait plus libre de ses mouvements, mais aussi quâil se laissait de plus en plus influencer par Monique Izzi et sa famille. Certains y virent un mauvais prĂ©sage et pensĂšrent que cela affaiblirait la couronne. Quoi quâil en soit, il semble quâĂ partir de 1960, le prince prĂȘtait moins dâattention quâavant Ă lâĂ©tiquette royale et aux conseils politiques de sa mĂšre[183].
Ces changements prĂ©ludaient un accroissement des mesures rĂ©pressives Ă lâencontre de lâopposition de gauche. Ă la fin aoĂ»t, plusieurs journaux sont fermĂ©s Ă Phnom Penh et une quinzaine de personnes soupçonnĂ©es dâĂȘtre communistes, dont Khieu SamphĂąn, directeur de lâhebdomadaire l'Observateur, furent arrĂȘtĂ©s[184]. Cela nâincitait guĂšre les opposants Ă se montrer. Certains Ă gauche, comme Hou Yuon, Hu Nim et mĂȘme Khieu SamphĂąn intĂ©graient finalement le Sangkum alors que dâautres, tels Tou Samouth, Saloth SĂąr, Ieng Sary ou Nuon Chea restaient dans la clandestinitĂ©. Dâanciens dĂ©mocrates, comme Thonn Ouk ou Chean Vam ne dĂ©siraient pas revenir en politique, alors que les partisans de Son Ngoc Thanh avaient trouvĂ© refuge et soutien financier Ă lâĂ©tranger[185].
JusquâĂ la fin 1963, aucune crise ne vint perturber le gouvernement de Sihanouk et les institutions du Sangkum rĂ©pondaient aux attentes des Cambodgiens. Cela comprenait les congrĂšs nationaux qui se rĂ©unissaient deux fois par an devant le Palais royal, les jeunesses socialistes royales khmĂšres oĂč des fonctionnaires consacraient deux semaines par an Ă des travaux publics et les visites du nouveau chef de lâĂtat Ă la campagne, qui, depuis son hĂ©licoptĂšre ou une voiture, lançait des cadeaux[186].
En fait, plusieurs difficultĂ©s prirent quand mĂȘme naissance au dĂ©but de ces annĂ©es 1960. Elles restĂšrent longtemps latentes mais allaient ĂȘtre le ferment de perturbations futures. On pourra citer la prĂ©sence quasi permanente de Lon Nol Ă la tĂȘte des armĂ©es cambodgiennes, les dĂ©rives financiĂšres dâune partie des Ă©lites ainsi que la corruption et la mauvaise gestion qui Ă©manaient de toutes les strates de lâadministration. Sihanouk prĂȘtait quant Ă lui peu dâattention aux problĂšmes de planification Ă©conomique Ă long terme, Ă lâendettement des campagnes et Ă lâaccroissement dâune main dâĆuvre Ă©duquĂ©e. Un autre problĂšme alors ignorĂ© par la plupart des observateurs Ă lâĂ©poque, Ă©tait la monopolisation de lâinformation et de lâopinion publique entre les mains du nouveau chef de lâĂtat et de ses proches[187].
En fait, un des aspects les plus regrettables du rĂ©gime Ă©tait lâabsence de contestation. Le parlement ne jouait aucun rĂŽle significatif, et les congrĂšs nationaux dont les ordres du jour Ă©taient Ă©pluchĂ©s par Sihanouk, cessa rapidement de sâoccuper de problĂšmes tels que les malversations ou la pauvretĂ©. Alors quâune campagne anti-corruption avait Ă©tĂ© lancĂ©e en 1961, un journal de gauche qui avait publiĂ© un Ă©ditorial oĂč il souhaitait sa rĂ©ussite avait Ă©tĂ© fermĂ© et son directeur arrĂȘtĂ©[188].
De ce fait, les emphases des discours de Sihanouk nâĂ©taient jamais contestĂ©es. En janvier 1962, par exemple, il prĂ©tendait que le Cambodge avait atteint un niveau de « dĂ©mocratisation ⊠jamais atteint par aucun autre pays ». En contrepartie, moins dâun mois plus tĂŽt, il avait demandĂ© aux fonctionnaires de ne plus lâaborder en position accroupie. DâaprĂšs lui, ces signes ostensibles de respect pouvaient ĂȘtre mal interprĂ©tĂ©s par les observateurs Ă©trangers. Toutes ces informations, erronĂ©es ou contradictoires, Ă©taient intĂ©gralement couvertes par les mĂ©dias locaux quâil contrĂŽlait[189]. Certains observateurs Ă©taient subjuguĂ©s par le charme qui Ă©manait de Norodom Sihanouk. Ceux qui exprimaient des rĂ©serves concernant le nouveau chef de lâĂtat Ă©taient taxĂ©s dâingratitude alors que ceux qui dĂ©crivaient le Cambodge comme un paradis ou comparaient le prince aux grands dirigeants de lâEmpire khmer tels Jayavarman VII ou Suryavarman II, Ă©taient louĂ©s pour leurs contributions. Sim Var, qui sâĂ©tait fĂąchĂ© avec le monarque Ă la fin des annĂ©es 1960, affirma que son jugement avait Ă©tĂ© altĂ©rĂ© par les louanges de certains Ă©crivains francophones qui partageaient son antiamĂ©ricanisme et apprĂ©ciaient sa francophilie[190].
Bien que Sihanouk prĂŽnĂąt le consensus au sein de la sociĂ©tĂ© cambodgienne, son impulsivitĂ© le poussait Ă lutter contre des ennemis rĂ©els ou supposĂ©s, si possible sans dĂ©fense. Ă partir de 1961, alors que les Ă©lections de lâannĂ©e suivante se profilaient et aprĂšs la disparition du parti dĂ©mocrate, lâassaut se concentrait sur lâopposition de gauche. AprĂšs une campagne musclĂ©e ponctuĂ©e dâarrestations, dâaccusations de complot « pour le compte dâune puissance Ă©trangĂšre » et dâautre mesures dâintimidation, le Pracheachon dĂ©cidait de ne finalement pas prĂ©senter de candidat et de mettre fin Ă son existence lĂ©gale. Cette dĂ©cision, par un effet pernicieux, renforçait le courant du Parti ouvrier du KampuchĂ©a qui prĂŽnait lâaction clandestine et qui allait petit Ă petit sâimposer jusquâĂ diriger, une douzaine dâannĂ©es plus tard le pays tout entier[191].
Dégradation des relations américano-cambodgiennes (1963)
Ă partir de 1963, la capacitĂ© de Sihanouk Ă influer sur la politique de son pays diminuait indiciblement, sans quâil soit possible de savoir si câĂ©tait une cause ou un effet de la baisse de sa popularitĂ© auprĂšs des Ă©lites. DâaprĂšs David Chandler, il se peut aussi que cela Ă©tait dĂ» Ă sa vision de moins en moins optimiste de lâavenir du pays, au fur et Ă mesure que la guerre sâintensifiait au ViĂȘt Nam voisin, ou quâil ait pris conscience de certaines des mutations qui sâengageaient au Cambodge et quâil ne pouvait plus influencer. Le premier changement Ă©tait dĂ©mographique, avec une population estimĂ©e Ă 3,8 millions en 1941 quand il avait accĂ©dĂ© au trĂŽne et qui sera dâenviron 7 millions en 1970, quand il devra quitter le pouvoir[192]. Les autres modifications sont moins Ă©videntes, mais on peut citer lâimpact du conflit vietnamien sur lâĂ©conomie du royaume khmer et la recrudescence des activitĂ©s de guĂ©rilla menĂ©es par ses opposants Ă gauche comme Ă droite. Jusquâen 1966, plus du quart des rĂ©coltes de riz cambodgiennes Ă©tait vendu frauduleusement aux rebelles vietnamiens. Sachant que les taxes dâexportation sur le riz constituaient une part importante des recettes du gouvernement, ce nĂ©goce ne pouvait quâavoir des effets nĂ©fastes sur le budget national[193]. Au mĂȘme moment, des idĂ©es radicales se propageaient au sein des Ă©tudiants cambodgiens et de leurs professeurs dont une partie importante partageait un antiamĂ©ricanisme viscĂ©ral doublĂ© dâune fascination pour la rĂ©volution culturelle chinoise qui semblait pour eux un modĂšle Ă mĂȘme de lutter contre les injustices et la corruption quâils voyaient tous les jours[194]. La croissance impressionnante du systĂšme Ă©ducatif (en 1969, plus de 1 000 Ă©tudiants suivront des cours dans une universitĂ© cambodgienne et au moins 4 millions dâĂ©lĂšves frĂ©quenteront les Ă©coles primaires et secondaires du pays) permettait Ă la jeunesse une ascension sociale, mais procurait aussi un sentiment de frustration devant la faiblesse des dĂ©bouchĂ©s. Ces deux cas auraient Ă©tĂ© difficilement imaginables quelques dĂ©cennies plus tĂŽt. Des problĂšmes apparurent car, alors que des pans de la sociĂ©tĂ© cambodgienne sâĂ©veillaient au modernisme, Sihanouk continuait Ă user des mĂ©thodes autoritaires auprĂšs de ceux quâil appelait « ses enfants » pour se maintenir au pouvoir. Ces concitoyens devenaient mieux Ă©duquĂ©s et plus informĂ©s, mais il ne leur accordait pas pour autant la libertĂ© dont ils auraient souhaitĂ© bĂ©nĂ©ficier[195].
Son entourage Ă©tait alors dans la configuration dâune cour qui se complaisait en des concours de flatteries Ă son Ă©gard afin de bĂ©nĂ©ficier de quelque avantage plutĂŽt que de prodiguer des conseils avisĂ©s qui aurait pu le froisser. Cela ne pouvait que le conforter dans ses choix. Les journalistes, pour leur part, qui voulaient ĂȘtre autorisĂ©s Ă rester au Cambodge Ă©crivaient des histoires qui devaient le sĂ©duire. Ceux qui incluaient dans leurs rĂ©cits des rĂ©fĂ©rences aux villas coloniales assoupies entourĂ©es de pelouses irrĂ©prochables, au charisme de Sihanouk, Ă lâĂźlot de paix, aux ruines enfouies au fond de la jungle, au prince sur la corde raide, etc. voyaient leurs visas renouvelĂ©s. Ceux qui au contraire faisaient Ă©tat de rĂ©pression envers les opposants ou du pouvoir personnel du chef de lâĂtat, ainsi que ceux qui signalaient que les rendements des riziĂšres cambodgiennes restaient durant lâensemble des annĂ©es 1960 parmi les plus faibles de toute lâAsie du Sud-est Ă©taient souvent empĂȘchĂ©s de revenir. Il nây avait pas de place pour les mauvaises nouvelles[196].
Il y a Ă©galement des problĂšmes de sources primaires concernant cette pĂ©riode. Alors que la plupart des journaux en langue khmĂšre des annĂ©es 1960 ont disparu, seuls ceux plus ou moins officiels en langues anglaise et française, influencĂ©s par les autoritĂ©s de Phnom Penh ont pu ĂȘtre conservĂ©s. Cela signifie que ceux qui auraient pu rapporter des indices de la baisse de popularitĂ© du monarque ne sont pas parvenus jusquâĂ nous alors que ceux qui Ă©taient laudatifs Ă son Ă©gard ont survĂ©cu Ă son Ă©viction du pouvoir. Il est ainsi assez malaisĂ© dâavoir une idĂ©e prĂ©cise du contexte de lâĂ©poque, des Ă©vĂšnements locaux, des politiques officielles et des centres dâintĂ©rĂȘt de la population[197]. Un autre problĂšme Ă©tait dĂ» au fait que Norodom Sihanouk adaptait ses discours, entretiens et Ă©crits, qui couvraient un large Ă©ventail de sujets, en fonction de son auditoire, manifestant des sentiments qui pouvaient aller dâune animositĂ© profonde, parfois exempte de cohĂ©rence, jusquâĂ une irrĂ©sistible volontĂ© de plaire associĂ©e Ă une charmante candeur. Comme beaucoup de visiteurs obtenaient des interviews « exclusives », peu cherchaient des indices pouvant confirmer ou infirmer les « confidences » quâils avaient eu le privilĂšge de recueillir ; il Ă©tait alors trĂšs difficile de relater, quel qu'en soit le domaine, un Ă©vĂšnement qui sâĂ©tait dĂ©roulĂ© au Cambodge sans employer une citation du chef de lâĂtat[198].
En fait, les critiques sur le Cambodge publiĂ©es durant les annĂ©es 1960 Ă©taient rares. Lâemprise de Norodom Sihanouk sur la presse nây Ă©tait sĂ»rement pas Ă©trangĂšre mais les signes prĂ©curseurs des calamitĂ©s qui allaient sâabattre bientĂŽt sur le pays nâĂ©taient de toute façon pas discernables par beaucoup dâobservateurs. Les expatriĂ©s qui travaillaient lĂ -bas (en 1964, il y avait Ă peu prĂšs 6 000 Français au Cambodge, soit deux fois plus quâavant lâindĂ©pendance) ne semblaient pas croire que la situation du pays puisse se dĂ©grader. Peu dâĂ©tudes polĂ©miques sur la sociĂ©tĂ© locale Ă©taient alors rĂ©alisĂ©es depuis lâĂ©tranger tandis que les professeurs dâuniversitĂ© et leurs Ă©tudiants, conscients des risques dâafficher de maniĂšre trop ostensible des opinions critiques se sentaient de plus en plus entravĂ©s dans leurs mouvements[199].
Vers la fin de fĂ©vrier 1963, alors que Sihanouk Ă©tait en visite en Chine, une crise qui couvait depuis des mois, Ă©clatait Ă Siem Reap. Alors que des manifestants accusaient un policier de brutalitĂ© et de corruption, la rĂ©plique des forces de lâordre fit un mort. Quand les autoritĂ©s refusĂšrent dâenquĂȘter sur les circonstances du dĂ©cĂšs, la situation dĂ©gĂ©nĂ©ra. Plus dâun millier dâĂ©tudiants attaqua le commissariat central ; en riposte, les policiers battirent les Ă©meutiers Ă coup de crosses de fusil. Dans la lutte, un portrait de Sihanouk fut dĂ©chirĂ© et des tracts apparurent, dĂ©nonçant lâinjustice et la corruption du Sangkum. Les affrontements firent plusieurs morts et blessĂ©s parmi les Ă©tudiants et certains enseignants sympathisants ; la police dĂ» faire appel Ă lâarmĂ©e pour rĂ©tablir lâordre. Alors que des manifestations de soutien Ă©taient organisĂ©es Ă Phnom Penh et Battambang, le gouvernement, assumant la responsabilitĂ© des troubles, dĂ©missionnait[200]. Depuis PĂ©kin, quand il prit connaissance des Ă©vĂšnements, Sihanouk dĂ©clara que pour sa part il nâavait par contre jamais songĂ© Ă quitter son poste de chef de lâĂtat. MĂȘme si les incidents avaient pris le gouvernement par surprise, Lon Nol avait pu fournir Ă Sihanouk, dĂšs son retour, des dossiers accusant « certains Ă©lĂ©ments » parmi les Ă©tudiants, soupçonnĂ©s dâĂȘtre associĂ©s Ă Son Ngoc Thanh. Lâambassade amĂ©ricaine, quant Ă elle, pensait plutĂŽt que câĂ©tait les communistes qui Ă©taient derriĂšre ces Ă©vĂšnements[201].
AprĂšs lâaccueil chaleureux qui lui avait Ă©tĂ© rĂ©servĂ© en Chine, Sihanouk ne pouvait pas nommĂ©ment attribuer la responsabilitĂ© des troubles au parti communiste local et dĂ©cidait de porter ses coups contre Keng Vannsak, son vieil adversaire du Parti dĂ©mocrate. Ce dernier sâĂ©tait retirĂ© de la politique et enseignait Ă lâInstitut PĂ©dagogique National. Il avait donnĂ© une confĂ©rence Ă Siem Reap au dĂ©but de lâannĂ©e, mais rien ne prouvait en fait son implication dans les Ă©meutes[202]. Peu aprĂšs, Sihanouk annonçait les noms de « 34 Ă©lĂ©ments subversifs », accusĂ©s de sâĂȘtre associĂ©s pour tenter de renverser le gouvernement. La liste, outre Keng Vannsak, comportait Ieng Sary, Saloth SĂąr et Son Sen ; en fait les trois « intellectuels » du comitĂ© central du parti communiste, mais aucun autre de ses membres[203]. Les dossiers avaient Ă©tĂ© fournis par Lon Nol et Ă©taient le fruit de la surveillance exercĂ©e sur les personnes soupçonnĂ©es de gauchisme, dont en premier lieu les professeurs des Ă©coles privĂ©es et les journalistes. Lâanonymat voulu par Ieng Sary et Saloth SĂąr volait en Ă©clats, mĂȘme sâil ne semble pas que les services de Sihanouk aient pris conscience de leurs vĂ©ritables rĂŽles au sein du parti clandestin[204]. En signe de dĂ©fi, le monarque « invitait » les personnes dont le nom figurait sur la liste Ă former un gouvernement et Ă diriger le pays. La plupart avaient dĂ©jĂ eu affaire Ă la police de Sihanouk et imaginait le sort qui les attendait ; en consĂ©quence, ils refusĂšrent poliment lâoffre. Le chef de lâĂtat nâen restait pas lĂ et conviait 32 des 34 personnes Ă sa rĂ©sidence oĂč il leur proposait lâensemble des ministĂšres, Ă lâexception de celui de la dĂ©fense et du poste de Premier ministre. Ils dĂ©clinĂšrent Ă nouveau la demande, affirmant que seul leur prince Ă©tait Ă mĂȘme de conduire un gouvernement. Sihanouk dĂ©cidait alors de lever la sĂ©ance et contrairement Ă lâentrevue de 1957 avec les dĂ©mocrates, aucun de ses interlocuteurs ne fut inquiĂ©tĂ©. Ă la fin de lâannĂ©e, la plupart avaient mĂȘme conservĂ© lâemploi quâils occupaient en mars[205].
Au mĂȘme moment, un Ă©vĂšnement qui aura son importance par la suite, passe inaperçu. Saloth SĂąr, Ieng Sary et Son Sen, les trois anciens Ă©tudiants parisiens membres du comitĂ© central du Parti ouvrier du KampuchĂ©a, quittaient Phnom Penh pour les forĂȘts de lâest cambodgien[206]. Khieu SamphĂąn et Hou Yuon, les deux ministres de gauche, abandonnaient de leur cĂŽtĂ© leur fonction ministĂ©rielle. Pour remplacer le premier nommĂ©, Sihanouk nommait Nin Nirom, un dĂ©putĂ© qui alors quâil avait critiquĂ© son prĂ©dĂ©cesseur, avait imprudemment laissĂ© entendre quâil nâaurait aucun mal Ă le remplacer. Nirom nâavait aucune compĂ©tence en matiĂšre de gestion et fut rapidement impliquĂ© dans un scandale financier. Il dĂ©missionna un mois aprĂšs sa prise de fonction. Peu aprĂšs, les derniers titres de la presse de gauche furent mis sous contrĂŽle et rĂ©guliĂšrement fermĂ©s. Les professeurs et les Ă©tudiants Ă©taient eux aussi surveillĂ©s. Cette rĂ©pression dĂ©veloppait animositĂ© et crainte chez les Ă©tudiants et ajoutĂ©e Ă la disparition de toute possibilitĂ© de dĂ©bat, elle entraina de nombreux jeunes vers le Parti des ouvriers du KampuchĂ©a[207].
Une nouvelle crise, qui couvait depuis dĂ©jĂ longtemps, Ă©clatait Ă la fin de 1963 entre Norodom Sihanouk et les Ătats-Unis. Cela commença par la suspension de lâaide militaire et Ă©conomique amĂ©ricaine et le refroidissement des relations diplomatiques. Le diffĂ©rend aura des consĂ©quences que ni les AmĂ©ricains sur place ni le monarque ne pouvait alors imaginer. Le comportement des premiers nommĂ©s en Asie du Sud-Est et leur ingĂ©rence dans les affaires cambodgiennes irritaient Sihanouk depuis dĂ©jĂ un certain temps, mais plusieurs Ă©vĂšnements survenus en novembre 1963 le convainquirent de prendre ses distances[208]. Il y eut tout dâabord lâassassinat des frĂšres NgĂŽ ÄĂŹnh Diá»m et NgĂŽ ĂĂŹnh Nhu, dirigeants de la RĂ©publique du ViĂȘt Nam, Ă la suite d'un coup dâĂ©tat accompli avec la bienveillance des Ătats-Unis. MĂȘme si les relations avec les dirigeants de SaĂŻgon avaient toujours Ă©tĂ© orageuses, leur mort confortait Sihanouk dans lâidĂ©e que le soutien des AmĂ©ricains envers leurs alliĂ©s serait toujours limitĂ©[209].
Un autre Ă©lĂ©ment qui a dĂ» influencer Sihanouk Ă©tait liĂ© aux problĂšmes Ă©conomiques du royaume khmer. MĂȘme si les produits agricoles continuaient Ă bien se vendre Ă l'Ă©tranger, les rendements Ă lâhectare restaient faibles, lâindustrialisation avait du mal Ă dĂ©coller, les taxes rentraient difficilement et le commerce extĂ©rieur Ă©tait aux mains dâun nombre restreint dâindividus qui voyaient dâun mauvais Ćil les rĂ©formes socialisantes du chef de lâĂtat. Pour ce dernier, cette classe fortunĂ©e Ă©tait devenue dĂ©pendante aux produits de luxe importĂ©s par le biais du programme dâassistance des Ătats-Unis. Les recettes dĂ©gagĂ©es par ces ventes couvraient une partie des frais de fonctionnement de lâaide amĂ©ricaine qui elle atteignait 15 millions de dollars par an. De 1960 Ă 1962, cette aide correspondait Ă 14 % du budget de lâĂ©tat, ce qui risquait de crĂ©er une sujĂ©tion dangereuse. Les Ă©lites commerçantes chinoises et sino-khmĂšres, de leur cĂŽtĂ©, apprĂ©ciaient les liens et connexions quâelles avaient pu tisser avec leurs homologues de Bangkok et SaĂŻgon, ce qui nâĂ©tait pas du goĂ»t du prince. Celui-ci pensait quâen nationalisant le commerce extĂ©rieur et les banques privĂ©es, le pays apparaĂźtrait plus attractif Ă certains donateurs potentiels susceptibles de fournir une aide Ă©conomique « sans contrepartie ». Enfin, Sihanouk espĂ©rait quâune attitude rĂ©solument antiamĂ©ricaine lui permettrait de se rapprocher de la France du gĂ©nĂ©ral de Gaulle qui militait contre la subordination aux deux grandes puissances du moment[210].
Le chef de l'Ătat avait donc prĂ©vu ce refroidissement depuis quelque temps dĂ©jĂ , mais les choses sâaccĂ©lĂ©rĂšrent Ă partir de novembre 1963. Ă ce moment, les deux seuls AmĂ©ricains en qui Sihanouk avait eu confiance â lâambassadeur William Trimble et le gĂ©nĂ©ral Edward Scherer, chef de la mission dâassistance militaire Ă Phnom Penh â avaient quittĂ© le Cambodge. Ils avaient tous deux su traiter le prince avec respect ; ils avaient aussi tentĂ© de convaincre leurs collĂšgues du caractĂšre anticommuniste du rĂ©gime et demander aux missions de Bangkok et SaĂŻgon de protester contre le soutien des gouvernements sud-vietnamiens et thaĂŻlandais aux Khmers Serei. Si le gĂ©nĂ©ral Robert Taber nâavait pas succĂ©dĂ© Ă Scherer depuis suffisamment longtemps pour que son action puisse ĂȘtre jugĂ©e, il nâen Ă©tait pas de mĂȘme de Phillip Sprouse qui avait remplacĂ© Trimble et nâavait pas Ă©tĂ© long Ă sâattirer les foudres de Sihanouk. Il faut dire que son dĂ©but de carriĂšre diplomatique prolongĂ© en Chine lui avait valu quelques dĂ©mĂȘlĂ©s pendant le maccarthysme et quâil semblait depuis soucieux dâĂ©taler son anticommunisme au grand jour. De plus, la montĂ©e des intĂ©rĂȘts amĂ©ricains aux ViĂȘt Nam faisait passer tout autre problĂšme politique dans la rĂ©gion au second plan. Les bonnes relations entre le prince et lâambassade amĂ©ricaine, patiemment tissĂ©es par Scherer et Trimble se dĂ©litĂšrent rapidement. Sihanouk pour sa part devenait Ă©galement sujet Ă des dĂ©pressions aprĂšs des mois passĂ©s Ă tenter de gĂ©rer seul les affaires de son pays, alors que lâambassade, de son cĂŽtĂ©, essayait de faire passer sur ces crises ce quâelle qualifiait dâincohĂ©rence de la politique Ă©trangĂšre cambodgienne. Les AmĂ©ricains ne pouvaient alors concevoir que la voie neutraliste voulue par Sihanouk puisse ĂȘtre moins dangereuse pour eux et pour le royaume khmer quâune soumission totale Ă la ligne quâils voulaient imposer[211].
MĂȘme si lâassassinat des frĂšres NgĂŽ ÄĂŹnh Diá»m et NgĂŽ ÄĂŹnh Nhu lâavait rendu perplexe, le prince nâavait plus Ă craindre leur fureur et il pouvait dĂ©fier les Khmers Serei qui avaient bĂ©nĂ©ficiĂ© de leur protection. Sihanouk dĂ©clarait donc, dans un discours prononcĂ© le 5 novembre, que sâils ne cessaient pas leurs Ă©missions depuis la ThaĂŻlande et le Sud ViĂȘt Nam dâici Ă la fin de lâannĂ©e, il « se dispenserait de lâaide Ă©conomique et militaire du monde libre ». Dans la mesure oĂč il considĂ©rait les gouvernements de Bangkok et de SaĂŻgon comme des marionnettes des Ătats-Unis, il jugeait ces derniers responsables de ces Ă©missions et estimait quâils nâauraient aucun mal Ă faire fermer les radios[212]. Lâavertissement fut ignorĂ© par les officiels amĂ©ricains, plus prĂ©occupĂ©s par les troubles en cours Ă SaĂŻgon. Sihanouk faisait monter la pression dâun cran en incluant Son Ngoc Thanh et Sam Sary dans sa liste des Ă©lĂ©ments subversifs ; les souvenirs du complot de Bangkok et de la bombe de septembre 1959 avaient resurgi[213]. Lors de la cĂ©lĂ©bration de lâanniversaire de lâindĂ©pendance quelques jours plus tard, le chef de l'Ătat annonçait des rĂ©formes Ă©conomiques de grande envergure, notamment la privatisation des banques, des agences dâimport-export, des distilleries, le contrĂŽle des importations de produits de luxe et lâabandon de lâaide amĂ©ricaine. Ces mesures devaient permettre au Cambodge de devenir maĂźtre de son destin, mais en fait, lâadministration des entreprises visĂ©es allait ĂȘtre confiĂ©e Ă des personnes plus choisies pour leur proximitĂ© avec le prince que pour leurs compĂ©tences en matiĂšre de gestion, rendant lâentourage de Sihanouk plus prospĂšre que jamais[214]. Pour beaucoup de tĂ©moins, ces mesures paraissaient inappropriĂ©es et irrĂ©flĂ©chies alors que le prince les avait prĂ©vues de longue date. La rĂ©serve dâor du Cambodge avait par exemple Ă©tĂ© transfĂ©rĂ©e des Ătats-Unis vers la France dĂšs le dĂ©but du mois de novembre, câest-Ă -dire bien avant que les lois soient annoncĂ©es[215]. Pour Sihanouk, ces prĂ©ceptes devaient servir les intĂ©rĂȘts du Cambodge. La baisse de lâinfluence amĂ©ricaine et la limitation dâune classe capitaliste naissante faisaient les affaires du Nord-Vietnam, de la Chine et de la France qui dĂ©siraient une « dĂ©amĂ©ricanisation » du Sud-est asiatique. AprĂšs la chute du rĂ©gime de Diá»m, certains militaires sud vietnamiens partageaient la vision du gĂ©nĂ©ral de Gaulle qui voulait une neutralisation de lâancienne Indochine française dans laquelle Sihanouk aurait un rĂŽle plus important Ă jouer. Ce dernier pensait pour sa part que la Chine et la France pourraient augmenter leur aide et compenser la perte de celle qui venait de Washington alors que ces puissances estimaient quâelles pouvaient prĂ©server Ă moindre coĂ»t la loyautĂ© du prince Ă leur Ă©gard[216]. En demandant de faire brutalement cesser les Ă©missions des Khmers Serei, Sihanouk mettaient les AmĂ©ricains dans une situation intenable. Quand bien mĂȘme la requĂȘte viendrait de leur mentor, il semblait clair que les gouvernements thaĂŻlandais et sud-vietnamien utiliseraient des manĆuvres dilatoires plutĂŽt que de sâexĂ©cuter. Pour le prince, lâimpossibilitĂ© de rĂ©pondre Ă sa demande tĂ©moignait moins de leur impossibilitĂ© Ă manier leurs « vassaux » que de leur complicitĂ© dans les manigances des puissants voisins du royaume khmer[217].
Le 19 novembre, durant un CongrĂšs national extraordinaire, le chef de lâĂtat annonçait lâarrestation de deux membres des Khmers Serei, Saing San et Preap In, qui avaient pĂ©nĂ©trĂ© au Cambodge grĂące Ă un laissez-passer du Premier ministre, le prince Norodom Kanthoul et de In Tam, gouverneur de la province de Takeo et dont Preap In Ă©tait le neveu. MĂȘme si leur mouvement ne prĂ©sentait pas une menace sĂ©rieuse vis-Ă -vis de son rĂ©gime, Sihanouk Ă©tait agacĂ© par les Ă©missions de leur radio qui le vilipendaient, lui et la famille royale. Ils auraient Ă©tĂ© envoyĂ©s au Cambodge pour nĂ©gocier avec Sihanouk, et, aprĂšs plusieurs conversations avec des officiels de Takeo, ils furent arrĂȘtĂ©s et envoyĂ©s sous bonne garde Ă Phnom Penh oĂč ils furent exposĂ©s dans des cages durant le CongrĂšs. Le prince, dĂ©mentait avoir conclu un arrangement avec eux et le rassemblement sâimprovisa en tribunal pour juger les accusĂ©s. Sihanouk leur demanda dâavouer que les AmĂ©ricains aidaient Son Ngoc Thanh et fournissaient les Ă©metteurs radio des Khmers Serei. Saing San sâexĂ©cuta et fut immĂ©diatement libĂ©rĂ©, mais Preap In, certainement en Ă©tat de choc, resta silencieux. Il fut dĂ©fĂ©rĂ© devant un tribunal militaire, condamnĂ© Ă mort le 25 novembre et fusillĂ© au dĂ©but de 1964. Si trĂšs peu de tĂ©moignages du procĂšs furent publiĂ©s, un film dâune quinzaine de minutes sur son exĂ©cution fut rĂ©alisĂ© Ă la demande du prince et diffusĂ© pendant un mois dans tous les cinĂ©mas du Cambodge. Des affiches sur le mĂȘme sujet furent Ă©galement envoyĂ©es dans toutes les Ă©coles. La rĂ©fĂ©rence Ă ces dĂ©cisions lugubres rĂ©apparut plus tard dans la propagande anti Sihanouk et des Ă©tudes firent de lâĂ©vĂšnement le marqueur du dĂ©but du dĂ©clin du prince[218].
Le congrĂšs avait Ă©galement approuvĂ© la dĂ©cision de renoncer Ă lâaide amĂ©ricaine. En fait, cette dĂ©cision semblait avoir l'assentiment dâune grande majoritĂ© de la population. Les attaques du prince, invoquant un « ogre » prĂȘt Ă tourmenter le Cambodge, assez rĂ©pandu dans les lĂ©gendes traditionnelles, ne pouvait que rencontrer un Ă©cho favorable. Il en Ă©tait de mĂȘme des dĂ©nigrements des « capitalistes » locaux dans la description desquels beaucoup reconnaissaient les Chinois et les Sino-Khmers qui exerçaient une rĂ©elle prĂ©potence sur le commerce du royaume[219]. Le 20 novembre, John Fitzgerald Kennedy provoqua une rĂ©union Ă la Maison-Blanche avec des membres du DĂ©partement d'Ătat et ses conseillers afin de sâinformer sur les causes de la crise cambodgienne. Il avait du mal Ă croire que Sihanouk voulait se priver de lâaide Ă©conomique Ă cause de Khmers Serei dont lui-mĂȘme ignorait jusquâĂ lâexistence. Le SecrĂ©taire adjoint Roger Hilsman (en) avoua Ă son prĂ©sident que ces dissidents avaient Ă©tĂ© secrĂštement soutenus pendant la pĂ©riode Eisenhower et que de fortes sommes avaient Ă©tĂ© engagĂ©es ; il suggĂ©rait dâapaiser la situation par le biais dâune dĂ©claration dans laquelle Kennedy dĂ©mentirait la poursuite de cette aide. Ce dernier acquiesça et envisagea, afin de calmer Sihanouk, dâenvoyer Ă Phnom Penh Dean Acheson, qui avait dĂ©fendu le Cambodge devant la Cour internationale de justice dans le conflit qui lâopposa Ă la ThaĂŻlande Ă propos du Temple de Preah Vihear. Il fut dĂ©cidĂ© dâattendre quelques jours et le retour dâun voyage que le prĂ©sident devait faire au Texas pour prendre une dĂ©cision. Malheureusement, deux jours plus tard, le 22 novembre 1963, Ă 12H30 locales, Kennedy Ă©tait assassinĂ© Ă Dallas[220].
Le prince Norodom Kanthoul, qui sâĂ©tait rendu aux funĂ©railles de John F. Kennedy, eut un entretien avec Lyndon B. Johnson au cours duquel le successeur du prĂ©sident assassinĂ© restait Ă©vasif quant Ă lâimplication amĂ©ricaine dans le mouvement des Khmers Serei. Le Premier ministre cambodgien rencontra Ă©galement le sous-secrĂ©taire dâĂtat William Averell Harriman qui, afin de calmer le jeu proclama : « Nous nâavons aucun contact direct ou indirect avec les Khmers Serei, ni avec aucun groupe qui tenterait dâaffecter la souverainetĂ© et lâindĂ©pendance du Cambodge. » Cette dĂ©claration reconnaissait nĂ©anmoins Ă demi-mot que les Ătats-Unis Ă©taient au courant des activitĂ©s des Khmers Serei et du soutien dont ils bĂ©nĂ©ficiaient de la part de leurs alliĂ©s. Sihanouk ne pouvait se satisfaire de la dĂ©claration de Harriman[221].
Pendant ce temps, le prince cherchait des soutiens pour organiser une confĂ©rence devant garantir la neutralitĂ© du Cambodge et pour laquelle il escomptait rĂ©unir une quinzaine de pays. Il pensait ainsi occuper une position centrale sur le thĂ©Ăątre dâopĂ©rations du Sud-est asiatique alors quâaux Ătats-Unis, une partie du dĂ©partement dâĂtat tentait de convaincre le nouveau prĂ©sident dâadopter une attitude plus agressive au ViĂȘt Nam. La proposition de Norodom Sihanouk venait contrarier les projets de ces personnes[222]. Si, lâambassadeur Sprouse et certains cercles de Washington accueillaient favorablement lâinitiative du prince, elle Ă©tait rejetĂ©e par Henry Cabot Lodge, Jr., lâambassadeur amĂ©ricain Ă Saigon, les gouvernements thaĂŻlandais et de la rĂ©publique du ViĂȘt Nam ainsi quâune partie des conseillers proches du prĂ©sident Johnson. En fait, ils semblaient craindre que la confĂ©rence dĂ©bouche sur des pourparlers plus larges qui pourraient notamment inclure une neutralisation du sud du ViĂȘt Nam[223].
Dans le mĂȘme temps, les dirigeants cambodgiens et amĂ©ricains entamaient des pourparlers afin de tenter dâaplanir leurs diffĂ©rends. Les trois thĂšmes Ă©voquĂ©s Ă©taient la fin de lâaide Ă©conomique, la proposition de confĂ©rence de Sihanouk et lâinterruption des Ă©missions des Khmers Serei. Les conversations nâeurent aucun rĂ©sultat concret. Lâambassadeur Sprouse, dans son rapport, affirmait que les actions du chef de lâĂtat nâĂ©taient pas comprises ni admises par les classes Ă©duquĂ©es et les forces armĂ©es qui allaient ĂȘtre les premiĂšres victimes des mesures prises par Sihanouk. Il prĂ©disait que les changements qui allaient en rĂ©sulter risquaient de provoquer des bouleversements « sans prĂ©cĂ©dent » et imprĂ©visibles au niveau de la politique interne[224]. Les personnes auxquelles faisaient allusion Sprouse comprenaient ses contacts pro-occidentaux qui pensaient que Sihanouk se trompait en voulant combattre seul le communisme. Il se peut quâils aient induit en erreur lâambassadeur qui surestimait lâinfluence des opposants au prince[225].
Le 8 dĂ©cembre, le marĂ©chal Sarit Thanarat, Premier ministre thaĂŻlandais, meurt Ă Bangkok. Ses relations avec Norodom Sihanouk avaient toujours Ă©tĂ© orageuses. Sarit conduisait une politique viscĂ©ralement anti khmĂšre, souhaitait ouvertement la chute du prince et soutenait les partisans de Son Ngoc Thanh, leur offrant toute facilitĂ© pour les laisser dĂ©verser leur fiel Ă lâencontre du dirigeant cambodgien Ă travers leurs Ă©missions radio[226]. DĂšs le lendemain, le prince faisait franchir un degrĂ© supplĂ©mentaire dans la dĂ©gradation des relations entre les Ătats-Unis et le Cambodge. Dans un discours en khmer, Sihanouk dĂ©clarait quâen un mois, ses principaux ennemis avaient disparu. Ce fut tout dâabord celui de lâest (Diá»m), ensuite leur grand patron (Kennedy) et maintenant celui de lâouest (Sarit). DâaprĂšs lui, tous les trois avaient essayĂ© dâattenter Ă la neutralitĂ© du Cambodge et au bien-ĂȘtre de ses habitants et allaient pouvoir maintenant construire toutes les bases de lâOTASE quâils voudraient en enfer[227]. La traduction officielle du discours fut Ă©dulcorĂ©e et omettait par exemple bien Ă propos les rĂ©fĂ©rences au « grand patron », mais le ministĂšre de lâinformation avait diffusĂ© le discours original qui avait Ă©tĂ© captĂ© et enregistrĂ© par les officiels amĂ©ricains en poste Ă Bangkok. Le dĂ©partement dâĂ©tat envoyait un cĂąble Ă lâambassadeur Sprouse, lui demandant dâĂ©mettre une protestation auprĂšs du gouvernement cambodgien et de rentrer Ă Washington « pour consultation » jusquâĂ ce que Sihanouk retire officiellement ces dĂ©clarations. Charles Woodruff Yost (en), lâambassadeur amĂ©ricain auprĂšs des Nations unies rencontrait Ă©galement Nong Kimny, son homologue cambodgien aux Ătats-Unis et qualifiait de « barbares » les propos tenus par le prince. En rĂ©ponse Ă ces « insultes mĂ©prisantes et gratuites », lâensemble de la mission diplomatique du royaume khmer Ă©tait rappelĂ© Ă Phnom Penh[228].
Pendant ce temps, les rĂ©formes Ă©conomiques produisaient leurs premiers effets nĂ©gatifs. La nationalisation des banques privĂ©es entraĂźna, fin dĂ©cembre, la fermeture de la plus importante dâentre elles, la Banque de Phnom Penh. Son directeur, un sino-thaĂŻ du nom de Songsakd Kitchpanich sâenfuit le 22 dĂ©cembre Ă Saigon Ă bord de son avion personnel ; il aurait emmenĂ© avec lui 4 millions de dollars dâactifs et demanda lâasile politique Ă la RĂ©publique du ViĂȘt Nam. Il utilisa une partie de sa fortune â venant au moins en partie de lâargent dĂ©tournĂ© â pour financer les Khmers Serei, dont il sera d'ailleurs briĂšvement chargĂ© de leurs relations extĂ©rieures en 1964[229].
Le congrĂšs national qui sâouvrait peu aprĂšs Ă©tait consacrĂ© aux derniers Ă©vĂ©nements. Les membres les plus prĂ©pondĂ©rants des Ă©lites se bousculĂšrent pour dĂ©mentir avoir jamais eu de liens avec Songsakd. Certains interlocuteurs, dont les allocutions dĂ©plaisaient Ă Sihanouk Ă©taient interrompus durant leurs interventions, tel Douc Rasy. Ce dernier, dĂ©putĂ© conservateur Ă©lu en 1962 et titulaire dâune formation juridique, Ă©mettait des critiques argumentĂ©es concernant les mesures Ă©conomique rĂ©cemment prises et la suspension de lâaide amĂ©ricaine. Il objectait dâautre part que la fuite de Songsakd relevait plus dâun dĂ©lit de droit commun que dâune atteinte Ă la sĂ»retĂ© de lâĂtat. Sihanouk ne voulait pas de son cĂŽtĂ© remettre en cause les officiels, sa famille et ses fidĂšles qui pour la plupart avaient placĂ© de fortes sommes Ă la Banque de Phnom Penh et prĂ©fĂ©ra affirmer que Songsakd Ă©tait Ă la solde des Ătats-Unis. Il proposait Ă©galement dâouvrir une enquĂȘte, mais la commission qui allait sâen charger ne se rĂ©unit quâune seule fois et ne publia jamais de conclusions[230]. Sihanouk espĂ©rait que ses rĂ©formes contrarieraient les Ă©lites conservatrices, mais ne voulait pas pour autant instaurer un Ă©tat communiste. Lâadministration des entreprises nationalisĂ©es Ă©tait octroyĂ©e Ă des personnes plus connues pour ĂȘtre proches du chef de lâĂtat que pour leurs capacitĂ©s de gestionnaires. Le prince voulait Ă©galement rĂ©duire lâinfluence des Ă©lites prooccidentales qui pour la plupart avaient des liens avec les communautĂ©s chinoise et sino-khmĂšre, ce qui ne manquait pas de dĂ©plaire au monarque. En fait, il venait de sâen faire des ennemis qui allaient plus tard basculer dans le camp rĂ©publicain[231].
Au dĂ©but des annĂ©es 1960, les mĂ©thodes originales de Sihanouk nâĂ©taient pas remises en cause par la majoritĂ© des Cambodgiens dans les campagnes, empĂȘtrĂ©s dans la pauvretĂ©, le travail harassant et les conditions sanitaires prĂ©caires. Pour eux, ceux qui sâĂ©taient enrichi Ă©taient assimilĂ©s Ă des corrompus. AprĂšs 1975, lors du rĂ©gime khmer rouge, Pol Pot et dâautres dirigeants affirmeront que la rĂ©volution avait pu se dĂ©velopper grĂące Ă la haine viscĂ©rale des ruraux Ă lâencontre des urbains. MĂȘme si cette acrimonie devint plus importante Ă partir de 1970, elle devait dĂ©jĂ exister Ă ce moment-lĂ , mais en dehors de quelques cercles dâintellectuels, Sihanouk nâĂ©tait pas concernĂ© par ce rejet. Les paysans Ă©taient mĂȘme touchĂ©s par les visites du monarque qui conversait avec eux de problĂšmes quâils avaient du mal Ă comprendre. Concernant lâaide amĂ©ricaine, il connaissait la question mieux quâeux et comme pour eux il Ă©tait toujours le roi, ils se devaient de croire ce quâil leur disait[232]. Cette nouvelle politique prĂ©sentait Ă©galement quelques avantages. Le premier fut que Sihanouk nâeut plus Ă subir les « conseils » condescendants des officiels amĂ©ricains qui agaçaient tant l'intĂ©ressĂ©. Le second fut la fin â certes temporaire â de lâachat de produits de luxe dont les recettes Ă©taient destinĂ©es Ă financer les frais de fonctionnement du programme dâaide amĂ©ricaine mais reprĂ©sentaient une importante fuite de capitaux. Enfin, et plus important, le fait que les forces armĂ©es nord-vietnamienne et du FNL pouvaient stationner pacifiquement sur la frontiĂšre est du Cambodge Ă lâabri des regards amĂ©ricains les rendaient moins enclines Ă gĂ©nĂ©rer des dĂ©sordres avec les autoritĂ©s du royaume khmer[233]. En fait, Sihanouk pensait quâen se brouillant avec les Ătats-Unis et en utilisant une phrasĂ©ologie de gauche dans ses discours, il pourrait conserver lâappui des puissances communistes tout en muselant son opposition de gauche. En 1965, lors dâun entretien Ă la BBC au cours duquel on lui demandait les raisons de son revirement il affirmait que de nombreux agents communistes proches de la Chine et du ViĂȘt Nam rĂ©sidaient au Cambodge et pourraient facilement crĂ©er des troubles sâil se rapprochait des Ătats-Unis. Il concluait quâil nâavait rien Ă gagner Ă rĂ©tablir des liens trop Ă©troits avec Washington[234].
La guerre au ViĂȘt Nam (1964)
DĂ©but 1964, un accord secret aurait Ă©tĂ© conclu, qui permettait Ă lâarmĂ©e cambodgienne de prĂ©lever 10 % de lâaide militaire chinoise destinĂ©e aux maquis vietnamiens et qui transitait par le port de Sihanoukville. Une ponction supplĂ©mentaire Ă©tait opĂ©rĂ©e sur le transport Ă la frontiĂšre de nourriture et autres biens dans des camions de lâarmĂ©e ou d'entreprises privĂ©es. Bien que cet accommodement, dont se plaignaient les Ătats-Unis mais que Sihanouk niait officiellement, eĂ»t enrichi les officiers cambodgiens, il nâallait pas pour autant assurer au prince leur soutien. La plupart dâentre eux rejoindront en 1970 Lon Nol et Sirik Matak et renverront leurs anciens clients au Sud ViĂȘt Nam[235]. Toutefois, lâabandon de lâaide des Ătats-Unis ne comportait pas que des avantages. Dâabord, comme lâavait fait remarquer certains de ses opposants de droite, Sihanouk nâavait quasiment plus de soutien pour modĂ©rer dâĂ©ventuelles exigences du camp communiste. Dâautre part, lâĂ©quipement militaire amĂ©ricain de lâarmĂ©e cambodgienne ne pouvait plus ĂȘtre entretenu et se dĂ©gradait. Le matĂ©riel fourni par lâURSS, la TchĂ©coslovaquie et la Chine nâĂ©tait pas interchangeable et ne prĂ©sentait quâun intĂ©rĂȘt limitĂ© en dehors des dĂ©filĂ©s. Une autre consĂ©quence des nouvelles rĂ©formes Ă©conomiques du prince fut quâil sâaliĂ©na les Ă©lites commerçantes sino-khmĂšres. En fait, Sihanouk avait prĂ©fĂ©rĂ© orienter sa politique plus Ă gauche, espĂ©rant avoir plus de prise sur les intellectuels et amĂ©liorer sa popularitĂ© auprĂšs de ses alliĂ©s, notamment la Chine et la France plutĂŽt que de tenter d'influencer l'action du gouvernement de Washington au ViĂȘt Nam[236].
Ă partir de 1964, lâintervention amĂ©ricaine au ViĂȘt Nam semblait confirmer la crainte et la mĂ©fiance que Sihanouk avait nourries Ă lâencontre des Ătats-Unis et le poussait Ă chercher des soutiens internationaux pour protĂ©ger son rĂ©gime de la tourmente. Cela incita Ă©galement la gauche cambodgienne Ă encourager le prince Ă se rapprocher du FNL et du Nord Vietnam tout en renforçant ses liens avec la Chine[237]. Dans le mĂȘme temps, la popularitĂ© de ce changement dans la politique Ă©trangĂšre nâĂ©tait pas sans poser des problĂšmes aux opposants de tous bords. Les Ă©lites pro occidentales se retrouvaient de plus en plus isolĂ©es de par leur dĂ©fiance vis-Ă -vis des rĂ©formes Ă©conomiques et du soutien apportĂ© par les rĂ©gimes communistes. Ce sentiment fut renforcĂ© Ă partir de la fin de 1965, quand le nĂ©goce avec les opposants au rĂ©gime de SaĂŻgon devint profitable. Toutefois, ce commerce montra rapidement ses limites. Outre quâil nâapportait aucune rentrĂ©e fiscale, il sapait Ă©galement lâautoritĂ© de Sihanouk au profit des Vietnamiens qui bientĂŽt contrĂŽleront des parties importantes du nord et de lâest du pays[238]. Les rĂ©formes mettaient Ă©galement le parti des travailleurs du KampuchĂ©a devant un dilemme : devait-il encourager la guĂ©rilla ou attendre son heure ? Les Vietnamiens, espĂ©rant utiliser le territoire cambodgien afin de reconstituer et approvisionner leurs forces, poussaient pour la seconde solution. Saloth SĂąr et ses compagnons durent obtempĂ©rer, mais cela les conforta dans leur certitude dâĂȘtre sacrifiĂ©s aux intĂ©rĂȘts vietnamiens. Dâautres, dont la plupart seront plus tard victimes des purges khmĂšres rouges, prĂ©fĂ©raient collaborer plutĂŽt que de suivre une politique xĂ©nophobe et indĂ©pendante qui risquait de les mener Ă leur perte. Les cellules phnompenhoises du parti ne pouvaient quant Ă elles sâexprimer du fait de la rĂ©pression menĂ©e par la police et lâarmĂ©e. En rĂ©sumĂ©, neutralisĂ© par Sihanouk dans les villes et par les Vietnamiens dans les campagnes, le parti traversa une importante crise existentielle[239].
En mĂȘme temps, Ă Phnom Penh, les jeunes Khmers Ă©taient sĂ©duits par la nouvelle politique antiamĂ©ricaine et anticapitaliste. En mars 1964, des manifestations Ă©taient organisĂ©es devant les ambassades des Ătats-Unis et du Royaume-Uni. Le cortĂšge Ă©tait composĂ© de soldats en civil, dâouvriers et dâĂ©tudiants Ă qui on avait donnĂ© leur journĂ©e pour lâoccasion. Ils avaient Ă©tĂ© amenĂ©s dans la capitale dans des camions du gouvernement et Ă©taient guidĂ©s par des haut-parleurs fournis par le ministĂšre de lâinformation. Ils critiquaient le soutien amĂ©ricain apportĂ© aux Khmers Serei et la rĂ©ticence des deux nations anglo-saxonnes Ă appuyer la demande de Sihanouk de rĂ©unir une confĂ©rence de 14 pays sur le ViĂȘt Nam. Les Ă©vĂ©nements durĂšrent plusieurs heures et malgrĂ© de nombreux dĂ©gĂąts matĂ©riels dans les ambassades, on ne dĂ©plora aucun blessĂ©. Sihanouk vit dans ces dĂ©monstrations une marque de sa popularitĂ© auprĂšs de son peuple et se sentit confortĂ© dans son aversion vis-Ă -vis des Ătats-Unis[240]. Surpris par lâampleur et la virulence de la manifestation, Lon Nol rencontra peu aprĂšs les leaders Ă©tudiants au LycĂ©e Sisowath et les mis en garde contre toute vellĂ©itĂ© de manĆuvre politique autonome. Sihanouk avait, de son cĂŽtĂ©, probablement espĂ©rĂ©, en laissant ses fidĂšles exprimer leur rancĆur, convaincre ses compatriotes de la justesse de ses actes et intimider ses adversaires pour quâils acceptent de prendre en compte son point de vue[241].
Sâil ne semble pas sâĂȘtre trompĂ© sur le premier point, il nâen fut pas du mĂȘme du second. La politique amĂ©ricaine au Sud-est asiatique basculait de plus en plus vers une volontĂ© de faire la guerre au communisme et dans ce contexte, le rapprochement avec la Chine et le ViĂȘt Nam du Nord Ă©tait considĂ©rĂ© comme un vĂ©ritable casus belli[242]. Les nouvelles intentions amĂ©ricaines apparaissent plus clairement Ă la fin de mars 1964, quand des unitĂ©s sud-vietnamiennes attaquĂšrent un village cambodgien. Des conseillers amĂ©ricains furent tĂ©moins des faits qui firent 17 morts et une vingtaine de blessĂ©s parmi les civils khmers. Lâambassade des Ătats-Unis Ă SaĂŻgon regrettait lâincident, invoquant une « frontiĂšre pauvrement dĂ©limitĂ©e » avec le Cambodge et proposait de dĂ©dommager les victimes et leurs familles, mais refusait dâaccĂ©der Ă la demande de Phnom Penh de prĂ©senter des excuses plus formelles. Pour beaucoup dâAmĂ©ricains au Sud-Vietnam, le Cambodge, en acceptant de donner refuge aux communistes, avait renoncĂ© Ă sa neutralitĂ©. En aoĂ»t 1964, les Ătats-Unis proposĂšrent de nommer un nouvel ambassadeur, Randolph Kidder, Ă Phnom Penh. Le ministĂšre cambodgien des affaires Ă©trangĂšres accepta la demande et Kidder sâenvola pour la capitale khmĂšre, mais Sihanouk atermoyait avant dâannoncer officiellement la nomination ; dans le mĂȘme temps les incidents de frontiĂšres se dĂ©veloppaient Ă lâest du pays. Le prince utilisa ce prĂ©texte pour renvoyer lâancien nouvel ambassadeur sans lui laisser le temps dâavoir pu prĂ©senter ses lettres de crĂ©ance[243].
Les relations avec la Chine Ă©taient plus calmes. En septembre 1964, de retour dâune visite Ă PĂ©kin, Sihanouk annonçait quâil avait obtenu une importante aide sans condition et lâassurance dâun soutien Ă sa politique. Dans le mĂȘme discours, il opposait la gĂ©nĂ©rositĂ© chinoise Ă la froideur nord-vietnamienne et affirmait avoir mĂȘme refusĂ© une offre dâassistance du Premier ministre PháșĄm VÄn Äá»ng[244]. Concernant les Ătats-Unis, la prĂ©sence de troupes du FNL et du Vietnam du Nord les agaçait au plus haut point, notamment les bases de lâautre cĂŽtĂ© de la frontiĂšre quâils repĂ©raient lors de leurs reconnaissances aĂ©riennes mais que les lois internationales les empĂȘchaient de dĂ©truire. LâarmĂ©e du royaume khmer de son cĂŽtĂ© nâĂ©tait pas assez puissante pour expulser les Vietnamiens et ne fit rien dans ce sens, sauf quand des soldats cambodgiens furent tuĂ©s. Le haut commandement militaire fournissait aux journalistes des rapports sur les incursions amĂ©ricaines et sud-vietnamiennes au Cambodge et dans son espace aĂ©rien, mais ne mentionnait pas la prĂ©sence des troupes communistes[245]. Un ou deux jours avant que les journalistes ou les membres de la Commission internationale de ContrĂŽle (en) (CIC), issue des accords de GenĂšve de 1954, Ă©taient autorisĂ©s Ă visiter les lieux, les unitĂ©s disparaissaient et toutes traces de leur passage Ă©taient effacĂ©es par lâarmĂ©e et les riverains. En niant la prĂ©sence vietnamienne au Cambodge, Sihanouk pouvait dĂ©peindre les AmĂ©ricains et les Sud-vietnamiens comme des envahisseurs qui franchissaient les frontiĂšres pour tuer et blesser dâinnocents civils. Dans le mĂȘme temps, le fait que les enquĂȘtes aboutissaient constamment Ă ne reconnaĂźtre que les violations des troupes du camp pro amĂ©ricain ne pouvaient quâattiser la frustration de ces derniĂšres[246].
Les relations avec Washington continuaient Ă se dĂ©grader. Une confĂ©rence entre les deux protagonistes eut lieu en dĂ©cembre 1964, mais se solda par un Ă©chec. Le Cambodge exigeait, avant dâentamer toute discussion, que les Ătats-Unis cessent, et donc reconnaissent, leur agression contre le ViĂȘt Nam et quâils arrĂȘtent de prĂ©tendre, soi-disant faussement, que le royaume khmer abritait des bases Viá»t Minh. En fait, chaque partie campait sur des positions quâelles savaient erronĂ©es, mais quâelles ne pouvaient remettre en cause sans perdre la face[247].
Ămergence dâune Ă©lite pro-occidentale (1965 â 1966)
Avec la livraison du matĂ©riel militaire chinois depuis Sihanoukville, la coopĂ©ration entre les communistes vietnamiens et le gouvernement cambodgien se dĂ©veloppait. Si ces transactions, comme dĂ©jĂ Ă©voquĂ© prĂ©cĂ©demment, permirent un enrichissement rapide des intermĂ©diaires, lâapport Ă lâĂ©conomie nationale Ă©tait mitigĂ©. La vente en contrebande de riz, de bĂ©tail et autre produits alimentaires aux troupes du FNL permirent aux fermiers dâamasser un peu dâargent et aux commerçants chinois et sino-khmers des sommes considĂ©rables. Ceux qui transportaient le matĂ©riel, ainsi que les officiers de lâarmĂ©e qui les protĂ©geaient purent eux aussi amĂ©liorer leurs revenus. Ă lâest du pays, un vĂ©ritable trafic sâĂ©tait dĂ©veloppĂ© entre les paysans et les rebelles, prĂȘts Ă payer les produits agricoles Ă des prix sur lesquels les commerçants locaux et le gouvernement ne pouvaient sâaligner. AprĂšs 1966-1967, les exportations de riz chutaient, ce qui grevait un budget national dĂ©jĂ mis Ă mal par les projets de prestige de Sihanouk, tels la construction dâun stade olympique ou des hĂŽtels de luxe[248]. En attendant que les effets nĂ©gatifs se fassent sentir, Sihanouk rĂ©coltait les bĂ©nĂ©fices de sa politique antiamĂ©ricaine. En fĂ©vrier â mars 1965, il rĂ©unissait une confĂ©rence des peuples indochinois Ă Phnom Penh qui condamnait lâintervention des Ătats-Unis en Asie du Sud-est et qui proposait la mise en place dâun congrĂšs plus important qui serait aussi ouvert Ă des pays hors dâIndochine. En dehors des membres du Sangkum, seuls participaient des reprĂ©sentants des diffĂ©rentes guĂ©rillas communistes et des minoritĂ©s ethniques du Sud ViĂȘt Nam proches dâeux, les dirigeants de Bangkok, Washington et SaĂŻgon ayant refusĂ© d'y participer au prĂ©texte que lâidĂ©e Ă©tait soutenue par le Nord-Vietnam et le FNL. Toutefois, la motion de cessez-le-feu que proposait le prince fut rejetĂ©e et aucune dĂ©cision concrĂšte ne fut suivie dâeffet, notamment Ă cause du refus des autres nations de participer Ă une confĂ©rence Ă©largie[249].
Le 3 mai 1965, Sihanouk prĂ©textait une attaque amĂ©ricaine qui avait eu lieu le 28 avril sur deux villages cambodgiens du district de Memot (province de Kampong Cham) et qui avait fait un mort et trois blessĂ©s cambodgiens, pour rompre officiellement les relations diplomatiques avec les Ătats-Unis ; elles le resteront pendant quatre annĂ©es. Le prince proposait toutefois de maintenir une reprĂ©sentation consulaire, mais Washington refusa ; lâambassade ferma ses portes et câest Ă lâAustralie quâĂ©chut le rĂŽle de reprĂ©senter les intĂ©rĂȘts amĂ©ricains au Cambodge[250]. La Chine, le ViĂȘt Nam du Nord et les proches conseillers du monarque semblent avoir jouĂ© un rĂŽle dans cette rupture, mais elle Ă©tait de toute façon populaire Ă lâĂ©poque chez la plupart des Cambodgiens. Les Ătats-Unis de leur cĂŽtĂ© sây attendaient depuis longtemps et ne firent rien pour lâempĂȘcher[251]. Le prince par contre restait sur ses gardes avec la gauche khmĂšre. Avant le congrĂšs national de juillet 1965, un Ă©tudiant du lycĂ©e Kambujaboth eu lâimprudence dâenvoyer une lettre au chef de lâĂtat oĂč il exprimait son inquiĂ©tude devant le manque de progrĂšs dans lâinstruction de lâaffaire Kitchpanich. Le lycĂ©en fut conduit devant le prince qui le sermonna et proposa ironiquement de le nommer Premier ministre. Le jeune homme rĂ©pliqua que la seule chose qui lui importait Ă©tait de permettre au Cambodge de progresser. Sihanouk le menaça de cinq Ă vingt ans de prison pour son insolence et le fit reconduire. Lors du congrĂšs, il se rĂ©fĂ©ra Ă cette lettre et demanda Ă lâassistance si cette lettre Ă©tait un argument suffisant pour que le « Sangkum soit dissous ». Comme prĂ©vu, une marĂ©e de mains levĂ©es sâopposa Ă cette motion[252].
Ă la fin de 1965, le prince entreprit une tournĂ©e qui aprĂšs la Chine puis la CorĂ©e du Nord, devait le mener en URSS et dans plusieurs pays dâEurope de lâEst. Il quitta Phnom Penh le 2 septembre pour la France oĂč il fit quelques examens mĂ©dicaux, avant de sâenvoler pour la Chine oĂč il arriva le 22 septembre. Il se rendit ensuite Ă Pyongyang oĂč lâambassadeur soviĂ©tique lui demanda le 8 octobre dâannuler la visite prĂ©vue Ă Moscou, les dirigeants de son pays Ă©tant « trĂšs occupĂ©s » et ne pouvant « le recevoir comme prĂ©vu en octobre ». Il dĂ©cidait donc de suspendre sa tournĂ©e et de rentrer le 17 octobre Ă Phnom Penh. Il attribuera cette annulation Ă sa politique de rapprochement avec PĂ©kin et, sâil ne pouvait se permettre une rupture des relations diplomatiques avec Moscou six mois aprĂšs celles avec Washington, il en retirera quand mĂȘme une mĂ©fiance accrue vis-Ă -vis du rĂ©gime soviĂ©tique[253].
Au dĂ©but de 1966, la tension grandissait aux frontiĂšres orientale et occidentale. Ă lâouest, elle provenait surtout dâirruptions de rebelles Khmers Serei et de militaires thaĂŻlandais alors quâĂ lâest, il sâagissait de ripostes des soldats sud-vietnamiens et amĂ©ricains aux incursions de troupes du Viá»t Cá»ng en RĂ©publique du ViĂȘt Nam depuis le Cambodge ; ces rĂ©pliques faisaient malheureusement de plus en plus de victimes dans la population civile cambodgienne. Ces derniers actes Ă©taient rĂ©guliĂšrement signalĂ©s Ă la Commission Internationale de ContrĂŽle, mais celle-ci devait se contenter de consigner les faits. En plusieurs occasions, lâarmĂ©e amĂ©ricaine ressortit lâargument de « la frontiĂšre mal dĂ©finie », ce qui ne pouvait quâattiser la colĂšre du prince[254].
Afin dâobtenir des soutiens Ă mĂȘme de lâaider Ă lutter contre ces problĂšmes, Sihanouk sâattacha durant toute lâannĂ©e 1966 Ă faire reconnaĂźtre les frontiĂšres et la neutralitĂ© du Cambodge Ă lâĂ©tranger. Il dĂ©marra cette campagne aprĂšs que son projet de confĂ©rence internationale sur le conflit indochinois eut Ă©chouĂ©. La France, qui avait tracĂ© ces frontiĂšres ne pouvait que les approuver, ce que firent Ă©galement de nombreux pays qui nâavaient pas de limites communes avec le Cambodge et rien Ă perdre ou Ă gagner avec une telle dĂ©claration. Toutes ces reconnaissances Ă©taient relayĂ©es et prĂ©sentĂ©es comme des victoires par la presse cambodgienne aux ordres de Sihanouk. Les Ă©tats riverains, par contre, Ă©taient moins enclins Ă adhĂ©rer aux vues du prince quant Ă leurs frontiĂšres communes. Les Ătats-Unis, pour leur part, se dĂ©robĂšrent ; outre quâelle aurait invalidĂ© Ă lâavenir lâargument de la « frontiĂšre mal dĂ©finie », une acceptation des limites que leurs plus proches alliĂ©s de lâAsie du Sud-est Ă©taient rĂ©ticents Ă reconnaĂźtre pouvait ĂȘtre interprĂ©tĂ©e comme un dĂ©saveu Ă lâĂ©gard de ces derniers. Ce nouveau mĂ©pris pour les intĂ©rĂȘts cambodgiens allait une fois de plus ĂȘtre exploitĂ© par Sihanouk[255].
Dans le mĂȘme temps, afin de faire taire les critiques mettant en doute la neutralitĂ© du Cambodge, Sihanouk proposait de renforcer les capacitĂ©s dâinvestigation de la CIC, mais demandait aux grandes puissances de financer cet effort, lâĂ©conomie du royaume khmer ne permettant pas dây subvenir. Si les Ătats-Unis en acceptĂšrent le principe, la proposition essuyait un refus de la RĂ©publique DĂ©mocratique du ViĂȘt Nam, qui nâavait aucun intĂ©rĂȘt Ă ce que les incursions du Viá»t Cá»ng en territoire cambodgien soient rĂ©vĂ©lĂ©es au grand jour et de la Chine qui affirma quâune telle mesure irait Ă lâencontre de la « lutte antiamĂ©ricaine menĂ©e en commun par les peuples dâIndochine »[256].
Beaucoup de Cambodgiens interrogĂ©s Ă partir des annĂ©es 1980 confirment quâĂ partir de 1966-1967, le monarque semblait se dĂ©sintĂ©resser de la vie politique et prĂ©fĂ©rait se consacrer Ă quelques-unes de ses passions telles le cinĂ©ma ou lâĂ©criture de ses mĂ©moires et passer plus de temps avec son entourage. Certains tĂ©moins mettent ce changement sur le compte de la perte dâinfluence de la reine Kossamak au profit de sa derniĂšre Ă©pouse Monique Izzi, dâautres Ă son impuissance Ă rĂ©gler les problĂšmes Ă©conomiques et politiques chaque jour plus nombreux. Dâanciens fidĂšles se rappelaient que le prince se plaignait rĂ©guliĂšrement dâĂȘtre Ă©puisĂ© et quâil voulait abandonner le pouvoir. MĂȘme si ces sautes dâhumeurs semblent rĂ©elles, il est peu probable quâen fait il ait laissĂ© quiconque gouverner Ă sa place[257]. Il continuait donc ses attaques contre les Khmers Serei et les communistes locaux. DâaprĂšs lui, des documents du Parti ouvrier du KampuchĂ©a avaient Ă©tĂ© saisis, qui lâaccusait dâĂȘtre un agent des AmĂ©ricains. MĂȘme si lâinformation Ă©tait authentique, ce qui nâa pu ĂȘtre dĂ©montrĂ©, elle prouverait que le parti adoptait une ligne anti-sihanoukiste. Le prince faisait quant Ă lui remarquer que Hou Yuon avait supportĂ© Son Ngoc Thanh au dĂ©but des annĂ©es 1950, du temps oĂč tous deux Ă©tait Ă Paris et en dĂ©duisait quâen fait, les militants khmers rouges Ă©taient des partisans du leader nationaliste. Sâils avaient Ă©tĂ© de « vĂ©ritables communistes », ajoutait-il, ils soutiendraient comme lâavait fait les pays de cette obĂ©dience, une nation qui avait rompu ses liens avec les Ătats-Unis[258]. En butte Ă des problĂšmes Ă©conomiques, le prince lança une politique dâaustĂ©ritĂ©, mais sans grande conviction. Il fit abolir le titre dâaltesse royale dont on devait lâaffubler et mis un terme au cĂ©rĂ©monial consistant Ă ĂȘtre accompagnĂ© lors de ses sorties dâun page qui devait constamment tenir un parasol. Il ne fit rien en revanche pour rĂ©duire son train de vie quâil estimait ĂȘtre celui dĂ©volu Ă un chef dâĂtat. Il voyait dans ces changements des signes de dĂ©mocratie et annonçait en mai 1966 quâil allait consacrer lâannĂ©e Ă faire franchir au pays un nouveau pas vers le socialisme. Trois semaines plus tard il publiait un dĂ©cret par lequel il annonçait que le magazine Preng Preng â quâil possĂ©dait â allait dorĂ©navant augmenter son tirage de 5 000 exemplaires supplĂ©mentaires, le tout au frais du gouvernement[259].
En juillet 1966, de nouveaux contacts furent pris avec des reprĂ©sentants amĂ©ricains. Il fut mĂȘme un temps envisagĂ© dâaccueillir Ă Phnom Penh Averell Harriman, lâambassadeur itinĂ©rant du prĂ©sident Johnson. Mais Ă la suite du bombardement dâun village frontalier de la province de Kampong Cham les 31 juillet et 2 aoĂ»t par lâUS Air Force, Sihanouk demandait dâannuler la visite[260].
En aoĂ»t, Sihanouk se dĂ©sintĂ©ressait des Ă©lections qui se profilaient, trop occupĂ© Ă prĂ©parer la visite de 4 jours que Charles de Gaulle devait faire au Cambodge Ă la fin du mois. Depuis longtemps, il admirait le GĂ©nĂ©ral Ă qui il avait rendu visite en 1946, quand celui-ci avait quittĂ© le pouvoir et, aprĂšs 1970, il aimait Ă se comparer Ă lui, attribuant Ă Lon Nol le rĂŽle du marĂ©chal PĂ©tain et aux AmĂ©ricains celui de lâarmĂ©e nazie[261]. En termes de faste et dâorganisation, cette visite fut lâapogĂ©e du premier rĂšgne de Sihanouk et le dernier coup dâĂ©clat dâun siĂšcle de relations privilĂ©giĂ©es entre la France et le Cambodge. Elle fut aussi, pour le chef de lâĂtat lâoccasion dâobtenir la reconnaissance Ă laquelle il aspirait tant et lâespoir que son neutralisme serait approuvĂ© par de grandes puissances. Le discours de Phnom Penh prononcĂ© par Charles de Gaulle soutenait sans rĂ©serve la politique du prince et condamnait lâescalade du conflit vietnamien. Le prĂ©sident français Ă©tait alors la meilleure arme que Sihanouk pouvait utiliser pour promouvoir son point de vue, mais les AmĂ©ricains, premiers visĂ©s par l'allocution, ne tĂ©moignĂšrent quâun lĂ©ger agacement, mais ne modifiĂšrent en rien leur position sur la guerre au ViĂȘt Nam[262].
Les Ă©lections se dĂ©roulĂšrent le 11 septembre. Contrairement aux scrutins prĂ©cĂ©dents, les candidats ne devaient plus obtenir lâinvestiture du prince pour se prĂ©senter, ce qui fit que dans 75 des 82 circonscriptions, plusieurs postulants se rĂ©clamant du Sangkum â toujours seul parti en lice â se manifestĂšrent. Le choix qui sâoffrait aux Ă©lecteurs se fit donc sur les questions locales et, dâaprĂšs Charles Meyer, conseiller de Sihanouk, Ă ce petit jeu, ceux qui se dĂ©clarĂšrent trop proches du prince furent dĂ©savantagĂ©s[263]. Lâautre enseignement de ces Ă©lections fut le recul de lâaile gauche du Sangkum, dont beaucoup de dĂ©putĂ©s ne sâĂ©taient pas reprĂ©sentĂ©s, au profit de la droite qui fit Ă©lire des candidats qui nâavaient plus participĂ© aux scrutins depuis 1958, voire 1951[264].
La principale consĂ©quence de ces Ă©vĂ©nements fut que Sihanouk nâavait pu empĂȘcher ses adversaires dâinvestir lâAssemblĂ©e. En 1972, alors en exil Ă PĂ©kin, il confia Ă Jean Lacouture que le parlement Ă©lu en 1966 â et qui lâavait entretemps dĂ©posĂ© â avait Ă©tĂ© « le plus rĂ©actionnaire et corrompu » quâil ait connu[265]. Au moment de lâannonce des rĂ©sultats, Sihanouk extĂ©nuĂ© par la visite de Charles de Gaulle trois semaines plus tĂŽt fit preuve dâune quiĂ©tude dont ses proches avaient peu lâhabitude. Peu aprĂšs, il dut ĂȘtre hospitalisĂ© pour surmenage, provoquant lâajournement de la session inaugurale de la nouvelle assemblĂ©e. Lorsque enfin le parlement put se rĂ©unir, il commença la sĂ©ance en dĂ©signant un Premier ministre. AprĂšs avoir rejetĂ© les candidatures de Sim Var et Norodom Kanthoul, il porta son dĂ©volu sur le gĂ©nĂ©ral Lon Nol[266].
Sihanouk avalisa le choix de la chambre et accepta que Lon Nol occupe le poste. En permettant la formation dâun gouvernement composĂ© de personnes proches des sensibilitĂ©s du nouveau Premier ministre, le prince laissait Ă quelquâun pourvu dâambition personnelle et possĂ©dant son propre rĂ©seau clientĂ©liste le soin dâexercer le pouvoir sans Ă ce moment en mesurer le danger[267]. Le choix de Lon Nol ne semblait en effet pas trĂšs risquĂ©. Jusque-lĂ , il semblait respecter Sihanouk et bien que, en 1965, le prince Monireth Ă©crira dans ses mĂ©moires quâil avait une ambition dĂ©mesurĂ©e le monarque semblait sous-estimer cet aspect de son nouveau Premier ministre et interprĂ©tait ses silences pour des marques de dĂ©fĂ©rence. En 1988, le monarque affirmera toutefois quâil lâavait depuis longtemps considĂ©rĂ© comme « capable un jour de diriger le gouvernement et lâarmĂ©e », ajoutant que sa popularitĂ© au sein des militaires et de la jeunesse non-communiste ainsi que son « manque de flamboyance » en faisait un bon candidat Ă un poste Ă responsabilitĂ©[268].
Mais le prince regrettait que le gouvernement soit composĂ© de beaucoup de personnes qui ne lui Ă©taient pas dĂ©vouĂ©es et dĂ©cidait de former un contre-gouvernement[269]. Cet organisme, qui regroupait ses partisans et des membres de lâaile gauche du Sangkum hostile Ă Lon Nol devait, dâaprĂšs le monarque, montrer Ă lâĂ©tranger que « le Cambodge nâĂ©tait pas une dictature ». Sihanouk ajoutait que ce contre-gouvernement se contenterait dâun bulletin quotidien qui ne contiendrait pas que des critiques du gouvernement, mais Ă©galement des propositions voire Ă©ventuellement approuverait les mesures quâil estimerait justifiĂ©es et que ses pouvoirs seraient limitĂ©s à « ceux reconnus par la Constitution Ă nos journalistes »[270].Le but non avouĂ© de cette manĆuvre semble avoir Ă©tĂ© de permettre au monarque de reprendre la maĂźtrise des Ă©vĂ©nements. Pour lĂ©gitimer sa dĂ©cision, le prince affirmait que la crĂ©ation de ce contre-gouvernement faisait suite Ă des demandes de jeunes militants, ce quâil est difficile encore de nos jours dâĂ©tayer. En fait, il semble quâil tentait de gĂ©rer lâopposition au Premier ministre quâil venait de nommer, ceci afin de mieux le contrĂŽler et, si celui-ci venait Ă trĂ©bucher, de sâen attirer les mĂ©rites[271].
Afin de se faciliter les choses, Sihanouk plaçait fin octobre Nhiek Tioulong â un de ses fidĂšles â Ă la tĂȘte de lâarmĂ©e en remplacement de Lon Nol. Le contre-gouvernement, quant Ă lui, favorisa la renaissance des factions politiques, ce qui Ă©tait vu par le nouveau cabinet comme une tentative du prince de diviser pour mieux limiter lâinfluence de chacun. Lâun des antagonismes les plus prompts Ă refaire surface fut celui qui opposa Sim Var, qui avait rompu avec la politique du monarque et Chau Seng qui approuvait les vues de Sihanouk surtout en matiĂšre de relations extĂ©rieures. Afin de contrer lâinfluence du quotidien pro-gouvernemental La DĂ©pĂȘche qui venait de passer sous le contrĂŽle de Sim Var, le prince encouragea Chau Seng Ă crĂ©er un nouveau titre appelĂ© La Nouvelle DĂ©pĂȘche, proche du contre-gouvernement. Les deux quotidiens sâengagĂšrent dans une bataille dâĂ©ditoriaux qui ne put que mettre en lumiĂšre le clivage qui se formait entre les conservateurs au pouvoir et ceux qui avaient de la sympathie pour les idĂ©es communistes. Peu aprĂšs les Ă©lections, des manifestations Ă©tudiantes et pro-Sihanouk Ă©clataient Ă Phnom Penh. Le prince fut prompt Ă les prĂ©senter comme une crise politique qui prouvait le bien-fondĂ© de sa mĂ©fiance envers le gouvernement de Lon Nol et contre ses adversaires de gauche. Il constatait que jour aprĂšs jour, son pouvoir partait entre les mains de personnes quâil ne pouvait pas contrĂŽler. Le parlement nâĂ©tait pas rĂ©uni depuis plus dâun mois quâune rumeur enflait, prĂ©tendant que Sihanouk sâinterrogeait sur lâopportunitĂ© de renvoyer un Premier ministre choisi par lâassemblĂ©e. Il Ă©tait alors malaisĂ© de juger de lâavenir de Sihanouk et de la politique cambodgienne Ă lâaune des Ă©lections. Les consĂ©quences des Ă©lections nâĂ©taient alors pas perceptibles et Sihanouk continuait de diviser les factions politiques pour mieux pouvoir les contrĂŽler et les rendre redevables Ă son Ă©gard[272].
Ă la fin de lâannĂ©e 1966, le monarque avait repris lâinitiative et le contrĂŽle des Ă©vĂ©nements. La presse Ă©tait toujours Ă ses ordres et il dĂ©jouait les manĆuvres de ses adversaires. Dans le domaine des relations internationales, il Ă©tait trĂšs populaire et grĂące Ă une habile diplomatie, il avait pu garder le Cambodge en dehors de la guerre du ViĂȘt Nam dont peu de ses concitoyens figuraient parmi les victimes[273].
En laissant Lon Nol Ă la tĂȘte du gouvernement, Sihanouk espĂ©rait peut-ĂȘtre apaiser lâĂ©lite cambodgienne pro-occidentale. Il pouvait penser quâil Ă©tait temps pour lâarmĂ©e de prendre les commandes et intimider les opposants de gauche. Si le Premier ministre venait Ă flĂ©chir ou devenait trop impatient, dâautres membres, loyaux au prince tels Nhiek Tioulong, Penn Nouth ou Son Sann pouvaient le remplacer. Le contre-gouvernement et le pouvoir de dissoudre lâassemblĂ©e Ă©taient deux autres armes entre les mains de Sihanouk. En fait, le choix de Lon Nol prĂ©sentait alors peu de risques perceptibles[274].
La révolte de Samlaut (1967)
Ă la mi-janvier 1967, le prince se rendit pour un mois et demi en France afin de suivre un traitement mĂ©dical[275]. Alors quâil Ă©tait parti, le Phnom Penh Presse publia une sĂ©rie dâarticles sur le dĂ©clin de Soekarno en IndonĂ©sie au profit du gĂ©nĂ©ral Soeharto. Le remplacement dâun pĂšre de lâindĂ©pendance capricieux par un militaire plus proche des rĂ©alitĂ©s ne pouvait quâintĂ©resser un journal qui ne partageait pas toutes les vues de Sihanouk. Le parallĂšle, pas toujours judicieux, Ă©tait toutefois flagrant avec le chef de lâĂtat, les Ă©lites cambodgiennes, les officiers et Lon Nol[276].
Au mĂȘme moment, les massacres commis en 1965-1966 Ă Bali et Java par la foule et des Ă©lĂ©ments de lâarmĂ©e indonĂ©sienne Ă lâencontre de plus de 500 000 personnes suspectĂ©es dâĂȘtre communistes, encourageaient le parti communiste du KampuchĂ©a Ă abandonner toute idĂ©e de coopĂ©ration avec Sihanouk. Pour eux, le prince Ă©tait comme Soekarno, qui nâavait Ă©tĂ© dâaucun secours aux communistes indonĂ©siens. Les Ă©vĂšnements de Djakarta incitaient certains membres de la gauche cambodgienne Ă la prudence alors que dâautres choisissaient la lutte armĂ©e prĂ©ventive contre le gouvernement[277].
Dans le mĂȘme temps, alors que Sihanouk Ă©tait toujours en France, des agents du gouvernement Ă©taient dĂ©ployĂ©s dans les campagnes afin dâexpliquer aux agriculteurs la nouvelle politique dâachat de riz directement au producteur. La mesure faisait partie dâun plan de nationalisation des exportations entamĂ©e en 1963, mais montrait surtout lâinquiĂ©tude du gouvernement quant Ă la perte de revenu engendrĂ©e par les marchĂ©s parallĂšles. La nouvelle politique rizicole Ă©tait difficile Ă accepter pour des producteurs Ă qui on offrait de vendre leurs rĂ©coltes Ă des tarifs bien moindres que ceux quâils pouvaient en tirer au marchĂ© noir, mais il semble aussi que la visite de Lon Nol Ă Battambang ait encouragĂ© les militaires chargĂ©s de rĂ©cupĂ©rer les rĂ©coltes « Ă la pointe du fusil » Ă faire preuve de plus de cupiditĂ© avec la population. En fĂ©vrier et mars, des opposants Ă cette politique commencĂšrent la distribution de tracts antigouvernementaux Ă travers tout le pays. Peu aprĂšs Ă©clatĂšrent dans cette rĂ©gion des incidents, qui nâavaient alors rien de rĂ©volutionnaire[278].
Ă lâarrivĂ©e du prince, le 11 mars, des Ă©tudiants de gauche manifestaient dans la capitale contre Lon Nol. Leurs banderoles et tracts rĂ©clamaient la dissolution du gouvernement, des nouvelles Ă©lections lĂ©gislatives, la baisse des prix et le retrait des troupes opĂ©rant prĂšs de Pailin[279]. MĂȘme sâil avait dĂ©clarĂ© que le Cambodge devait Ă©voluer vers la gauche, que sâil nâĂ©tait pas nĂ© prince, il aurait certainement Ă©tĂ© de gauche et que sâil avait dĂ» choisir lui-mĂȘme le gouvernement il aurait nommĂ© une tout autre Ă©quipe, Sihanouk trouvait impossible de donner satisfaction Ă de telles demandes. Pour calmer les manifestants, il demandait Ă ce quâon plaça leurs revendications Ă lâordre du jour dâun futur congrĂšs national et les invitaient Ă venir y dĂ©fendre eux-mĂȘmes leur cause, espĂ©rant ainsi quâintimidĂ©s par la police, ils dĂ©clineraient lâoffre. Les vĆux du monarque furent exaucĂ©s. Un congrĂšs spĂ©cial votait une rĂ©solution pour maintenir en place lâAssemblĂ©e nationale Ă©lue une annĂ©e auparavant[280].
Khieu SamphĂąn profita toutefois de lâoccasion pour se plaindre que certains de ses Ă©lecteurs de Sâaang avaient Ă©tĂ© incorporĂ©s de force dans des milices Ćuvrant prĂšs de la frontiĂšre vietnamienne, et ce malgrĂ© les pots-de-vin quâils avaient versĂ©s Ă des dirigeants locaux. DĂ©noncer la corruption Ă©tait alors souvent considĂ©rĂ© comme une attaque contre la politique du prince ; câest en tout cas ainsi quâil le perçut. Sa rĂ©ponse fut de proposer dâaller dans les jours qui suivaient sur place pour vĂ©rifier la teneur des allĂ©gations. Ă Sâaang, Sihanouk ne sâattaqua pas directement Ă SamphĂąn, mais prit Ă partie Hu Nim, un autre parlementaire de gauche, lâaccusant dâĂȘtre un « Rouge ». Il offrit Ă©galement un million de riels de lâĂ©poque (environ 18 000 dollars US) pour rĂ©parer une route, prĂ©sentant cette faveur comme « un cadeau de la banque nationale ». Il refusa par contre dâarmer les milices locales, sous prĂ©texte que le gouvernement Ă©tait incapable de rĂ©unir les crĂ©dits nĂ©cessaires et parce quâil ne voulait pas « crĂ©er de troubles avec les 2 millions de soldats et miliciens â sud-vietnamiens, amĂ©ricains, insurgĂ©s, thaĂŻs â qui stationnaient autour du Cambodge ». Il affirma aussi quâil Ă©tait le principal ennemi des militants khmers rouges. Enfin, le prince dut remarquer que dans le discours dâintroduction, SamphĂąn se mit face Ă lui, soutint son regard et nâhĂ©sita pas Ă Ă©lever la voix, des attitudes Ă lâopposĂ© des marques de dĂ©fĂ©rence auxquelles le monarque Ă©tait habituĂ©[281].
Entre mars et mai 1967, les troubles sâĂ©taient muĂ©s en soulĂšvement antigouvernemental dans la localitĂ© de Samlaut, Ă lâouest de Battambang, puis, de lĂ , Ă©tait en train de se transformer en une vĂ©ritable guerre civile dans plusieurs rĂ©gions du pays[282].
Dans un message Ă la nation, Sihanouk attribuait les troubles Ă un harcĂšlement dâĂ©lĂ©ments de gauche contre Lon Nol et au rejet par les radicaux locaux des paysans sans terre du sud-ouest cambodgien et des rĂ©fugiĂ©s khmers Krom nouvellement installĂ©s sur place. Dans ses rĂ©criminations, il sâen prenait aux « Khmers Viá»t Minh », qui dâaprĂšs lui faisaient allĂ©geance comme des captifs Ă un grand chef inconnu dont on ne savait sâil Ă©tait cambodgien ou Ă©tranger. Comme pour les khmers Serei, Sihanouk voyait les Ă©meutes de Samlaut avant tout comme une offense personnelle. En guise de reprĂ©sailles, il avait demandĂ© que les villages des insurgĂ©s soient rasĂ©s et renommĂ©s. Le nombre de victimes ne sera jamais publiĂ©, mais des sources font Ă©tat de plusieurs centaines[283].
Le 7 avril, le prince faisait une nouvelle dĂ©claration dans laquelle il affirmait quâil « traiterait les Khmers rouges comme il avait traitĂ© les Khmers Serei »[284]. Il ne faisait pas rĂ©fĂ©rence Ă la rĂ©pression Ă Battambang, sur laquelle il avait peu dâinformations, mais Ă la possibilitĂ© de faire exĂ©cuter certaines personnalitĂ©s de gauche. Pour ne laisser planer aucun doute, un film sur lâexĂ©cution publique dâagents Khmers Serei rĂ©cemment arrĂȘtĂ©s fut diffusĂ© dans lâensemble du pays. Charles Meyer affirme dans une interview quâil accorda en 1987 Ă David Porter Chandler avoir conseillĂ© Ă Sihanouk dâattendre la fin dâune enquĂȘte sur les raisons des Ă©meutes avant de commencer la rĂ©pression, mais le prince prĂ©fĂ©ra passer outre[285]. En 1971, interrogĂ© par Jean Lacouture sur le nombre de victimes, le monarque affirmera « avoir lu quelque part » quâil y avait eu dix mille morts[286] ; en 1983, ses estimations furent revues Ă la baisse et il parlait de moins de mille morts[287].
Sihanouk menaça Ă©galement de faire convoquer Hou Yuon et Khieu SamphĂąn devant des tribunaux militaires afin de leur « poser quelques questions ». Craignant pour leurs vies, les deux intĂ©ressĂ©s quittĂšrent prĂ©cipitamment la ville[288]. Quand on dĂ©couvrit leur disparition, beaucoup Ă Phnom Penh pensĂšrent quâils avaient Ă©tĂ© tuĂ©s. Cette rumeur fut mĂȘme Ă©tayĂ©e par une Ă©mission de Radio-PĂ©kin qui affirmait que les deux dĂ©putĂ©s avaient Ă©tĂ© exĂ©cutĂ©s et enterrĂ©s dans la rĂ©gion de Kirirom[289].
Alors que se dĂ©roulaient ces Ă©vĂ©nements, Lon Nol dĂ©missionnait de son poste de Premier ministre. Il invoquait des raisons de santĂ© et se rendit en France pour suivre un traitement mĂ©dical pendant six mois. Sihanouk lui succĂ©da Ă la tĂȘte de ce quâil appela un gouvernement dâexception[290]. En fait, cela revenait Ă dissoudre le cabinet issu des Ă©lections de 1966 et Ă le remplacer par un gouvernement ne comportant aucun parlementaire, mais plusieurs fidĂšles du monarque et quelques spĂ©cialistes apolitiques de domaines particuliers â nous dirions de nos jours « venant de la sociĂ©tĂ© civile » â tel Kol Touch qui rejoignait le ministĂšre ĂŽ combien sensible de lâagriculture. Sihanouk sâĂ©tait assignĂ© trois objectifs principaux, Ă savoir mettre un terme Ă la crise politique et Ă la rĂ©bellion Ă Battambang, rĂ©soudre les dysfonctionnements de lâadministration et enfin trouver une solution au problĂšme de dĂ©ficit budgĂ©taire[291].
Quand les troubles se calmĂšrent, Ă la fin mai, Sihanouk fit une visite Ă Samlaut durant laquelle, lors dâun discours, il stigmatisait les partisans khmers rouges et annonçait un programme dâaide gouvernementale massive de rĂ©habilitation de la rĂ©gion et de relogement. Alors quâil prononçait son allocution, la rĂ©pression se poursuivait contre de supposĂ©s rebelles, certainement, pour la plupart, des villageois qui avaient simplement fui les combats et sâĂ©taient rĂ©fugiĂ©s dans la forĂȘt[292].
Avec le dĂ©part de Lon Nol, les Ă©lites pro-occidentales nâavaient plus de raison de modĂ©rer leur pression sur Sihanouk. Toutefois, de par la composition du nouveau gouvernement, leur champ dâaction se trouvait pour un temps limitĂ©, ce qui permit au prince de se focaliser contre les citadins de gauche et plus particuliĂšrement les Ă©lĂ©ments radicaux des Ă©coles et des universitĂ©s. Dans la province de Kandal, plus de quinze mille Ă©tudiants se seraient rĂ©unis dans diffĂ©rents monastĂšres pour commĂ©morer ce quâils appelaient le martyre de Hou Yuon et Khieu SamphĂąn. Des manifestations similaires Ă©taient signalĂ©es Ă Kampong Cham. AgacĂ© par cette contestation, Sihanouk demanda aux directeurs de Kambujaboth et Chamroeun Vichea, les deux Ă©coles de Phnom Penh connues pour hĂ©berger des enseignants « de gauche », de lui indiquer quelques « excellences rouges » qui pourraient former un gouvernement. De plus, sous la pression du prince, Hu Nim dut soutenir devant un congrĂšs national quâil Ă©tait loyal envers son monarque et que les tracts anti-Sangkum dĂ©couverts Ă Samlaut et dans ses environs devaient ĂȘtre lâĆuvre dâagents aux ordres de Lon Nol. Peu convaincu par les explications, Sihanouk humilia Hu Nim en lui faisant des remontrances publiques devant un millier de participants acquis Ă la cause du souverain[293].
Alors que le prince poursuivait localement ses diatribes anticommunistes, son nouveau Premier ministre, Son Sann, entreprenait des nĂ©gociations secrĂštes avec les reprĂ©sentants de la RĂ©publique dĂ©mocratique du ViĂȘt Nam et de leurs alliĂ©s sud-vietnamiens du FNL. Depuis plusieurs mois dĂ©jĂ , Sihanouk pressait le Viá»t Minh et le Viá»t Cá»ng, comme il les nommait, de lĂ©gitimer publiquement et officiellement les frontiĂšres existantes du Cambodge en Ă©change dâune reconnaissance formelle du droit de leurs troupes Ă stationner et trouver refuge au Cambodge et celui de faire transiter des fournitures militaires par le port de Sihanoukville. En fait, la partie cambodgienne ne faisait aucune concession, vu que la guĂ©rilla communiste jouissait dĂ©jĂ de ces droits depuis au moins trois ans sans que le royaume khmer ait jamais exercĂ© aucune sanction et que Sihanouk faisait de cette acceptation des frontiĂšres cambodgiennes un quid pro quo. Les dĂ©lĂ©guĂ©s vietnamiens pour leur part ne dĂ©siraient pas sâengager sur les frontiĂšres, probablement parce quâils avaient compris que le prince risquait de les obliger Ă respecter leurs promesses en les publiant, une fois la guerre finie[294]. En mai 1967, toutefois, les nĂ©gociateurs vietnamiens durent se montrer moins intransigeants, aprĂšs que lâopĂ©ration amĂ©ricano-sud-vietnamienne Cedar Falls eut obligĂ© au dĂ©mantĂšlement du quartier gĂ©nĂ©ral du parti communiste vietnamien dans le sud[295].
Le FNL, finalement se plia aux exigences cambodgiennes, sâapercevant des gains quâil pouvait en escompter; en effet, un tel document valait une quasi reconnaissance diplomatique de son existence ce qui Ă©tait positif pour son image et tendait Ă promouvoir lâidĂ©e dâindĂ©pendance par rapport Ă la RĂ©publique dĂ©mocratique du ViĂȘt Nam quâil essayait de faire admettre un peu partout. Peu aprĂšs, le ViĂȘt Nam du Nord et lâUnion soviĂ©tique signĂšrent une dĂ©claration similaire sur les frontiĂšres du Cambodge, suivis par la Chine[296].
En acceptant de tels arrangements, le prince s'aliĂ©nait un peu plus les Ă©lites pro-occidentales, mais peut-ĂȘtre pressentait-il une victoire communiste au ViĂȘt Nam et espĂ©rait-il quâaprĂšs les accommodements faits, une fois la victoire acquise, les nouveaux voisins de l'est sauraient se montrer conciliants avec lui et faire preuve de gratitude. Il souhaitait Ă©galement qu'Ă la suite de cet accord, les Vietnamiens fassent pression sur les insurgĂ©s de Samlaut â que le monarque pensait contrĂŽlĂ©s depuis HanoĂŻ â pour quâils cessent la lutte armĂ©e[297].
Alors quâil savourait ce quâil considĂ©rait comme une victoire diplomatique, Sihanouk dut faire face Ă de nouvelles querelles entre factions rivales Ă Phnom Penh. Les derniers intellectuels de gauche Ă nâavoir pas pris le maquis se rassemblaient autour de Chau Seng â Ă nouveau ministre â et investirent La Nouvelle DĂ©pĂȘche. Alors quâils avaient jusque-lĂ dominĂ© la presse francophone, ils se trouvaient critiquĂ©s par Sim Var qui au sein de son journal Khmer Ăkreatch (Khmer indĂ©pendant) adoptait une ligne rĂ©solument anticommuniste. Comptant sur le soutien du prince, la gauche dĂ©cida de contre-attaquer[298].
Hu Nim ouvrit le bal par un article dans La Nouvelle DĂ©pĂȘche oĂč il affirmait que Sihanouk dirigeait un « Front national qui rĂ©pondait exactement aux aspirations du peuple ». AprĂšs les rĂ©ponses acerbes parues dans Khmer Ăkreatch, des centaines de jeunes prirent dâassaut le siĂšge de ce journal et dĂ©truisirent son imprimerie. Les dĂ©gĂąts Ă©taient importants, mais il nây eut ni blessĂ©s ni arrestations. Parmi les graffitis sur les murs on trouvait « Sim Var est un chien amĂ©ricain » ou, Ă©crit en chinois, « Longue vie Ă Monseigneur Papa ». DâaprĂšs plusieurs comptes rendus de lâĂ©poque, beaucoup de manifestants semblaient dâorigine chinoise, certainement excĂ©dĂ©s par les propos de Sim Var qui les accusait dâĂȘtre au service du prĂ©sident Mao. Ces actes de violence servaient les desseins de Sihanouk et lâenquĂȘte qui en dĂ©coula ne dĂ©boucha sur aucune condamnation[299].
NĂ©anmoins, ces Ă©meutes dâĂ©lĂ©ments sino-khmers fascinĂ©s par la rĂ©volution culturelle et qui se dĂ©claraient loyaux Ă Mao ne pouvait quâinquiĂ©ter le prince bien quâil fĂźt de son alliance personnelle avec la Chine un des piliers de sa politique Ă©trangĂšre. Il Ă©tait rendu inquiet par le soutien que la gauche cambodgienne accordait ouvertement Ă lâassociation dâamitiĂ© khmĂ©ro-chinoise (en) qui faisait la promotion du prĂ©sident Mao dans les Ă©coles en langue chinoise du pays. Il Ă©tait surtout irritĂ© que des journaux chinois puissent annoncer Ă leurs lecteurs que « tous les travailleurs cambodgiens » Ă©taient derriĂšre le grand timonier. Recourant Ă une tactique dĂ©jĂ Ă©prouvĂ©e, le monarque menaça de remettre le gouvernement Ă des « Rouges prochinois »[300]. Comme prĂ©vu, personne ne soutint la demande du monarque et peu aprĂšs, celui-ci envoya son ministre des Affaires Ă©trangĂšres, le prince Norodom Phurissara Ă PĂ©kin pour sonder lâattitude du gouvernement chinois. Zhou Enlai fit des remarques Ă mĂȘme dâapaiser le dĂ©saccord, mais recommandait que les Chinois puissent « avoir le droit dâexprimer leur fiertĂ© envers la rĂ©volution culturelle et leur amour pour le prĂ©sident Mao »[301].
Norodom Sihanouk pour sa part continuait Ă nier la prĂ©sence des troupes du Viá»t Cá»ng sur le territoire khmer. Le 27 aoĂ»t 1967, alors quâil recevait les lettres de crĂ©ance de Nguyá» n ThÆ°á»Łng, nommĂ© ambassadeur de la rĂ©publique dĂ©mocratique du ViĂȘt Nam, il affirmait que lâaide apportĂ©e Ă la guĂ©rilla Ă©tait « essentiellement morale, diplomatique et politique comme nous lâimposent notre politique de neutralitĂ© et lâextrĂȘme faiblesse de nos moyens matĂ©riels »[302].
Dans la seconde moitiĂ© de 1967, Sihanouk intensifia ses attaques contre les radicaux urbains en tentant de dĂ©tourner de leur influence tout rebelle potentiel des campagnes grĂące Ă des projets dâaide. Il fit financer par lâĂtat des travaux publics dans la circonscription de Khieu SamphĂąn ainsi que des routes et des logements Ă Samlaut. Il promit une prime de 10 000 riels (environ 200 dollars US) Ă tout rebelle du nord-ouest qui se rallierait Ă lui. En aoĂ»t, 200 de ces personnes Ă©taient ramenĂ©es de Samlaut Ă Phnom Penh, visitaient Sihanoukville et Angkor puis Ă©taient reconduites dans leurs foyers, le tout aux frais du prince. Toutefois, il notera plus tard quâĂ peine rentrĂ©s, ils Ă©taient retournĂ©s grossir les rangs de la guĂ©rilla[303].
Le 1er septembre 1967, Sihanouk annonçait la dissolution de toutes les associations dâamitiĂ© khmĂ©ro-Ă©trangĂšres. La mesure sâadressait essentiellement Ă lâassociation dâamitiĂ© khmĂ©ro-chinoise, qui dâaprĂšs le prince Ă©tait « devenue un vĂ©ritable instrument de subversion portant prĂ©judice Ă lâamitiĂ© quâelle prĂ©tendait promouvoir ». Le lendemain, le palais royal annonçait que ces associations allaient ĂȘtre remplacĂ©es par des « comitĂ©s nationaux dâamitiĂ© » composĂ©s chacun de trois membres « connus pour leur loyautĂ© » et choisis directement par Norodom Sihanouk[304]. Quand Chau Seng reproduisait quelques jours plus tard dans La Nouvelle DĂ©pĂȘche un tĂ©lĂ©gramme de PĂ©kin faisant mine d'ignorer cette fermeture et prĂ©sentant Ă lâassociation dissoute ses vĆux pour son anniversaire et la fĂ©licitant pour sa lutte contre les rĂ©actionnaires, Sihanouk affirma que câĂ©tait lĂ la premiĂšre attaque venant de Chine et dĂ©cida de fermer les journaux Ă capitaux privĂ©s. La mesure concernait les pĂ©riodiques en langue chinoise, mais Ă©galement ceux en khmer. Cela laissait le champ libre Ă quatre journaux propriĂ©tĂ© du monarque et aux dĂ©pĂȘches de lâAgence KhmĂšre de Presse. Il suggĂ©rait dâorganiser un rĂ©fĂ©rendum sur la question au dĂ©but de 1968, « quand le peuple ne sera plus occupĂ© Ă ses cultures », pour lĂ©gitimer son action. Le rĂ©fĂ©rendum nâaura pas lieu, mais les journaux rouvriront Ă la fin de lâannĂ©e[305].
Dans un discours prononcĂ© au mĂȘme moment, il montrait sa rĂ©serve quant au dĂ©roulement de la rĂ©volution culturelle en Chine et justifiait la rĂ©pression contre la gauche cambodgienne Ă qui il ne reprochait pas tant ses idĂ©es communistes, mais plutĂŽt le fait que dâaprĂšs lui elle Ă©tait dirigĂ©e par une puissance Ă©trangĂšre[306]. Un autre sujet dâinquiĂ©tude pour Sihanouk Ă©tait Hu Nim qui restait Ă lâassemblĂ©e. Lorsque Nim soumit une pĂ©tition au parlement demandant la rĂ©habilitation de lâassociation dâamitiĂ© khmĂ©ro-chinoise, le prince, accompagnĂ© de Kou Roun, le chef de la police politique, se rendirent Ă Kampong Cham, dans la circonscription du dĂ©putĂ© pour une sĂ©vĂšre rĂ©primande. Le monarque menaça de poursuivre Hu Nim devant un tribunal militaire et de le dĂ©choir de sa nationalitĂ© cambodgienne quâil nâĂ©tait plus digne de porter[307]. Quelques jours plus tard, lâintĂ©ressĂ© sâenfuyait vers une base du PCK de la chaĂźne des Cardamomes. Dâautres intellectuels se sentant menacĂ©s par Sihanouk quittĂšrent eux aussi les villes en 1966-1967[308].
CoupĂ©s des communistes qui avaient plutĂŽt soutenu sa politique Ă©trangĂšre que ses vues sur les problĂšmes intĂ©rieurs, le prince se retrouvait isolĂ© pour contrer ses Ă©lites pro-occidentales. Cet antagonisme-lĂ datait des beaux jours du parti dĂ©mocrate et ne sâĂ©tait jamais estompĂ©. Alors que le monarque Ă©tait trop fier pour leur formuler de quelconques excuses, les Ă©lites nâeurent elles non plus aucun geste conciliant qui aurait Ă©tĂ© de nature Ă calmer le jeu[309]. Les troubles en cours en Chine et lâutilisation du territoire cambodgien par les troupes du Viá»t Minh et du Viá»t Cá»ng faisait que le prince, dĂ©jĂ coincĂ© entre les rĂ©gimes pro-occidentaux de Bangkok et de SaĂŻgon se sentait Ă©galement entourĂ© par les communistes. Toutes ses tentatives pour capter une quelconque gratitude semblaient sâĂȘtre soldĂ©es par des Ă©checs, mais il ne se sentait pas pour autant proche de ceux qui voulaient prendre leurs distances avec les communistes et rĂ©tablir les relations avec les Ătats-Unis. Pour prendre ces derniers de vitesse, il dĂ©cidait de conduire lui-mĂȘme, Ă ses propres conditions, un rapprochement avec Washington[310].
Cette nouvelle orientation se traduisait par lâaccueil, en octobre 1967, de Jacqueline Bouvier Kennedy en voyage non officiel. Malheureusement pour le prince, en marge de cette visite, trois reporters, un de lâagence United Press International et deux dâAssociated Press, profitant que les forces de sĂ©curitĂ© khmĂšres Ă©taient largement occupĂ©es Ă assurer la protection de lâancienne first lady, se rendirent dans le sud-est du pays, prĂšs de Memot oĂč ils trouvĂšrent ce qui ressemblait Ă un camp du Viá»t Cá»ng fraĂźchement abandonnĂ©. MalgrĂ© les protestations de Sihanouk qui criait Ă la machination, les informations qui mettaient Ă mal les assertions du monarque concernant la neutralitĂ© du Cambodge furent largement diffusĂ©es dans la presse occidentale[311].
Ouverture vers les Ătats-Unis (1968)
Le mois de janvier 1968, outre la dĂ©cision du PCK de promouvoir la lutte armĂ©e contre le rĂ©gime de Sihanouk dont peu Ă Phnom Penh Ă©taient au courant allait surtout ĂȘtre marquĂ© par la visite de Chester Bowles, ambassadeur amĂ©ricain Ă New Delhi et plus haut responsable amĂ©ricain Ă rencontrer le prince depuis de nombreuses annĂ©es[312]. La visite de Bowles ouvrait la voie Ă une reprise des relations entre le Cambodge et les Ătats-Unis. Pour Phnom Penh, la visite Ă©tait apprĂ©ciable, car on espĂ©rait pouvoir limiter lâamplification des sanctuaires vietnamiens au Cambodge, sanctuaires qui, pour lâopinion khmĂšre, sâapparentaient Ă une nouvelle annexion de territoire comme celle pratiquĂ©e au dĂ©but du XIXe siĂšcle par lâempereur Minh MáșĄng[note 5] - [314].
Sihanouk avait alors en tĂȘte depuis un certain temps de redynamiser la commission internationale de contrĂŽle et de supervision crĂ©e en 1954 par les accords de GenĂšve, mais dont depuis, le champ dâaction avait Ă©tĂ© rĂ©duit Ă la portion congrue. Il espĂ©rait que les inspections des membres indiens, canadiens et polonais de la commission allaient rĂ©duire les incursions amĂ©ricaines et sud-vietnamiennes ainsi que leurs bombardements. Les Ătats-Unis soutenaient ce projet car ils escomptaient que les visites allaient publiquement confirmer la prĂ©sence de bases ViĂȘt Cá»ng sur le territoire cambodgien dĂ©jĂ repĂ©rĂ©es par des reconnaissances aĂ©riennes amĂ©ricaines ainsi que par des observateurs sur le terrain[note 6] ; Ă partir de la fin de 1967, ils avaient transmis, par lâintermĂ©diaire de Noel Saint-Clair Deschamps, ambassadeur australien Ă Phnom Penh[note 7], des copies de ces photos aĂ©riennes au prince. Par cette opĂ©ration nommĂ©e VĂ©suve, les dirigeants militaires amĂ©ricains espĂ©raient maĂźtriser la frontiĂšre sud-ouest de la RĂ©publique du ViĂȘt Nam. Pour discuter de cette option, aprĂšs la bonne impression laissĂ©e par la visite de Jacqueline Kennedy, Chester Bowles vint Ă son tour au Cambodge pour quatre jours, en janvier 1968[317].
La mission dĂ©buta par des conversations sĂ©parĂ©es que Bowles eut avec le Premier ministre Son Sann et avec le gĂ©nĂ©ral Nhiek Tioulong. Sihanouk Ă©tait alors en province et Son Sann ne voulait pas devancer les annonces que le prince devait faire Ă son retour ; Nhiek Tioulong refusait pour sa part dâadmettre la prĂ©sence de sanctuaires ViĂȘt Cá»ng au Cambodge. Quelques jours plus tard, la dĂ©lĂ©gation fut reçue par le prince. Ils le trouvĂšrent intrĂ©pide et difficile Ă Ă©mouvoir, soutenant un renforcement des pouvoirs de la commission internationale de contrĂŽle et de supervision, jusquâĂ indiquer, dâaprĂšs certaines sources amĂ©ricaines, quâil nâavait pas d'objection Ă ce que les Ătats-Unis engageassent des poursuites dans des zones inhabitĂ©es. Il ne pouvait pas le confirmer publiquement, mais si les troupes amĂ©ricaines se hasardaient dans cette voie, cela lâaiderait Ă rĂ©soudre un de ses problĂšmes. Bien sĂ»r, si les Ătats-Unis affrontaient les troupes du ViĂȘt Cá»ng et lâarmĂ©e nord-vietnamienne sur le sol cambodgien, les deux parties seraient coupables de violer le territoire du royaume khmer, mais le Nord ViĂȘt Nam et le ViĂȘt Cá»ng « seraient plus coupables ». Si ces poursuites se faisaient dans des zones oĂč la population locale ne serait pas affectĂ©e, le prince voulait bien « fermer les yeux ». Rien de tout cela nâapparaissait dans le communiquĂ© publiĂ© par Son Sann et Bowles Ă la fin de la visite, mais les B-52 amĂ©ricains lancĂšrent au dĂ©but de 1969 lâopĂ©ration Menu, un bombardement massif des zones frontaliĂšres. Les documents officiels nâĂ©clairent pas sur ce que Sihanouk avait admis de laisser les Ătats-Unis faire. Pour le prince, le problĂšme des ripostes Ă©tait moins important que de regagner les bonnes grĂąces de Washington, mais rien ne prouve que cela inclĂ»t lâapprobation dâun programme de bombardements Ă grande Ă©chelle. Sâattacher la fidĂ©litĂ© des plus humbles de ses sujets passait alors pour le monarque avant celui dâadhĂ©rer aux grands desseins des Ătats-Unis. Son Sann avait insistĂ© afin que Bowles plaide Ă Washington pour le rĂ©tablissement de relations diplomatiques et pour que le gouvernement amĂ©ricain reconnaisse les frontiĂšres du Cambodge, mais cette reconnaissance Ă©tait bloquĂ©e depuis plus dâun an par le peu dâempressement des gouvernements de Bangkok et de SaĂŻgon Ă lâapprouver et la rĂ©ticence de Washington Ă dĂ©plaire Ă ses deux fidĂšles alliĂ©s[318].
La visite de Bowles avait coĂŻncidĂ© avec une recrudescence des activitĂ©s des communistes vietnamiens au Cambodge, dans le cadre de la prĂ©paration de lâoffensive du Táșżt et des rapports de la police politique du prince lui indiquaient de surcroit que de nouveaux troubles Ă©clataient dans la rĂ©gion de Samlaut et quâune agitation devenait perceptible au sein des minoritĂ©s ethniques du nord-est, deux zones oĂč le PCK, qui inaugurait sa politique de lutte armĂ©e, Ă©tait connu pour ĂȘtre actif[319]. Peu aprĂšs le dĂ©part de Bowles, mais avant le dĂ©clenchement de lâoffensive du TĂȘt, Sihanouk annonçait que plusieurs jeunes communistes avaient Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©s Ă Phnom Penh, distribuant des tracts contre le MarĂ©chal Tito, dirigeant yougoslave qui devait venir faire une visite dâĂ©tat dâici peu. Il Ă©tait alors notoire que lâindĂ©pendance de Tito par rapport aux mouvements communistes irritait la Chine. Il est possible, mais peu probable, que les Chinois aient envisagĂ© de le faire assassiner durant sa visite. Il est plus plausible que la police du prince ait inventĂ© une conspiration pour intimider les Ă©tudiants prochinois qui en manifestant contre Tito auraient mis Sihanouk dans lâembarras. Le prince fit rĂ©fĂ©rence Ă une « poignĂ©e dâindividus, exclus de la communautĂ©, sabotant lâindĂ©pendance nationale ⊠distribuant des caisses de grenades pour assassiner Tito et moi-mĂȘme ». Il menaçait ceux qui avaient distribuĂ© les tracts de la peine capitale. La visite du dirigeant yougoslave se passa finalement sans histoire, mais les accusĂ©s avaient dĂ©jĂ Ă©tĂ© exĂ©cutĂ©s et aucune preuve de leur culpabilitĂ© nâa jamais Ă©tĂ© publiĂ©e[320].
Par contre, dâinquiĂ©tants rapports de sa police arrivĂšrent sur le bureau du prince au dĂ©but de 1968, indiquant des accrochages entre des rebelles et lâarmĂ©e dans plusieurs rĂ©gions. Les combats Ă©taient particuliĂšrement violents autour de Battambang. Ă la fin de fĂ©vrier, ignorant - pour peu quâelle ait vraiment Ă©tĂ© prise - la dĂ©cision du PCK, le prince prĂ©sentait ces combats comme une guerre civile. Ces troubles causaient un tracas particulier Ă Sihanouk, peut-ĂȘtre parce quâil avait du mal Ă discerner le rĂŽle rĂ©el des Vietnamiens dans ce soulĂšvement. Si dans un discours au dĂ©but de 1968 il loua tout dâabord lâefficacitĂ© de la rĂ©bellion, il sâengagea Ă©galement Ă amĂ©liorer celle de son armĂ©e face Ă ce genre de conflit, affirmant que les Forces armĂ©es royales khmĂšres nâĂ©taient pas prĂ©parĂ©es Ă lutter contre une guĂ©rilla et que lâexpĂ©rience de Battambang avait montrĂ© la nĂ©cessitĂ© de combler cette lacune au plus vite. Ă la fin de 1968, de vastes zones du nord-est et de lâouest allaient Ă©chapper au contrĂŽle du gouvernement[321].
Changeant dâadversaires, le prince attribuait Ă©galement la responsabilitĂ© de lâagitation continue Ă des journalistes occidentaux tels ceux du quotidien français Le Monde. Sihanouk, dans un discours, demandait aux journalistes « prochinois » dâĂȘtre « honnĂȘtes intellectuellement » et dâĂ©viter de porter contre le Sangkum des accusations qui sâavĂ©raient infondĂ©es. Le monarque voulait dĂ©montrer que la guerre civile avait pour origine des causes Ă©trangĂšres au Cambodge. Il parlait dâune collusion entre les AmĂ©ricains, les Khmers Serei, les ThaĂŻs, les Sud-Vietnamiens, le ViĂȘt Cá»ng et le PCK visant Ă prendre le pouvoir[note 8] et sĂ©parer le Cambodge en deux zones dâinfluence. Dans le mĂȘme temps, il approuvait une intensification de la rĂ©pression[323].
La virulence du discours de Sihanouk encourageait les milices Ă plus de brutalitĂ©s et les dignitaires de province Ă des excĂšs de zĂšle pour prouver leur fidĂ©litĂ© au prince. En mars 1968, Ă Kampong Cham, des manifestants en armes se dĂ©claraient prĂȘt Ă en dĂ©coudre pour chasser les Khmers Viá»t Minh et autres Khmers rouges du Cambodge. Dans la province voisine de Kratie, un autre dĂ©filĂ© composĂ© dâhommes munis dâarmes en tout genre marchĂšrent jusquâau palais du gouverneur oĂč lâun dâentre eux lut une dĂ©claration soutenant le rĂ©gime socialiste bouddhique de « Samdech Euw » (littĂ©ralement Monseigneur Papa) et condamnant les Khmers bleus et rouges. Dans le mĂȘme temps, Sihanouk procĂ©dait Ă de frĂ©quents remaniements ministĂ©riels, mutait les gouverneurs dans dâautres provinces et visitait les zones oĂč des troubles avaient Ă©clatĂ©, attribuant la responsabilitĂ© de la rĂ©surgence de ces agitations aux Ă©trangers et aux intellectuels. Ă la fin de mars, il dĂ©clarait que lâinsurrection avait Ă©tĂ© matĂ©e alors que les combats se poursuivaient Ă Battambang et dans le nord-est. Durant cette pĂ©riode, lâarmĂ©e cambodgienne Ă©tait en pleine contradiction, ce qui nâallait pas sans poser des problĂšmes aux combattants de base. En effet, alors que des camions militaires poursuivaient lâacheminement de fournitures aux camps du Viá»t Cá»ng le long de la frontiĂšre, permettant aux officiers de sâenrichir au passage, les paysans cambodgiens, de leur cĂŽtĂ©, continuaient, quand ils le pouvaient, Ă vendre leurs rĂ©coltes aux agents vietnamiens. Sihanouk, pour sa part, maintenait son soutien Ă la lutte du Nord-ViĂȘt Nam et du FNL contre lâimpĂ©rialisme et tolĂ©rait â tout en officiellement la niant â la prĂ©sence de camps au Cambodge, mais dans le mĂȘme temps ordonnait la rĂ©pression de leurs partisans et se rapprochait des Ătats-Unis[324].
Mais les relations amĂ©ricano-khmĂšres allaient s'assombrir quand, en avril, HanoĂŻ fit part de son dĂ©sir dâentamer des pourparlers avec Washington et proposait de rencontrer des Ă©missaires en terrain neutre Ă Phnom Penh. Sihanouk ne put que soutenir un projet qui pouvait amĂ©liorer la notoriĂ©tĂ© de son pays Ă lâĂ©tranger et affirmer la neutralitĂ© quâil tentait de promouvoir depuis des annĂ©es. Malheureusement pour lui, si les Ătats-Unis acceptaient le principe de discussions, ils rejetaient le choix de la capitale cambodgienne, affirmant que le royaume khmer nâavait pas la capacitĂ© nĂ©cessaire en termes dâhĂ©bergement et de communications pour organiser un tel Ă©vĂ©nement. Une telle dĂ©claration ne pouvait que heurter la fiertĂ© du prince qui y vit un affront personnel. Quand les nĂ©gociations sâouvriront finalement Ă Paris le 13 mai, il se sentira contraint de dĂ©clarer que les dĂ©cisions prises lĂ -bas concernant le Cambodge seraient nulles et non avenues tant quâelles nâauraient pas Ă©tĂ© approuvĂ©es par un reprĂ©sentant du royaume khmer[325].
Mais le monarque paraissait toutefois percevoir de plus en plus les mutins des campagnes comme une menace sĂ©rieuse et le retour en mai de Lon Nol, lâennemi jurĂ© des communistes, comme ministre de la dĂ©fense semble accrĂ©diter cette thĂšse[326].
MĂȘme si beaucoup aprĂšs coup ont prĂ©tendu que la dĂ©position du prince en 1970 Ă©tait prĂ©visible dĂšs 1968, rien ne permettait de la supposer Ă lâĂ©poque. Il nâen reste pas moins que les dĂ©cisions que le monarque prit lors de ces derniers mois montrent une perte de confiance en son aura. Que ce soit lâĂ©mergence de la rĂ©bellion de gauche ou lâassurance que prenaient les conservateurs, tout laissait Ă penser que Sihanouk ne voulait ou ne pouvait plus exercer sa mainmise sur la politique cambodgienne. Toutefois, mĂȘme si la rĂ©volution Ă©tait en marche, elle nâen Ă©tait quâĂ ses balbutiements et nâĂ©tait pas prĂȘte Ă soutenir une guerre civile Ă travers tout le pays. Elle se contentait de quelques escarmouches et espĂ©rait acquĂ©rir une expĂ©rience qui pourrait sâavĂ©rer utile le moment venu[327].
Il semble clair que les annĂ©es 1969-1970 correspondent Ă une perte de pouvoir de Sihanouk au profit de ses opposants. NĂ©anmoins, si sa popularitĂ© sâestompait auprĂšs des jeunes, elle restait nĂ©anmoins importante. MalgrĂ© cela, tous les efforts du prince pour la conserver Ă un haut niveau sâavĂ©raient vains. Dans le mĂȘme temps, alors quâIl avait gardĂ© lâhabitude dâĂ©luder les problĂšmes importants comme ceux touchant les finances, il prit conscience, au milieu de 1969, quâils devenaient insolubles. Sa seule rĂ©ponse fut de nommer Lon Nol Ă la tĂȘte dâun « gouvernement de sauvetage » qui succĂ©dait Ă un « gouvernement de la derniĂšre chance »[328].
Sâil pourrait paraĂźtre tentant de dĂ©tecter une crise Ă©conomique Ă lâorigine des bouleversements politique et militaire qui allaient conduire Ă la dĂ©position de Norodom Sihanouk, il convient cependant de relativiser ces difficultĂ©s. En fait, le Cambodge souffrait des mĂȘmes problĂšmes que la plupart des pays en voie de dĂ©veloppement. Mais contrairement Ă beaucoup dâentre eux, lâendettement restait faible et quand bien mĂȘme certains milieux financiers lâauraient voulu, les services qui gĂ©raient les exportations nâauraient pas eu de mal Ă emprunter Ă lâĂ©tranger. Par contre, si lâadministration Ă©tait suffisamment structurĂ©e pour rĂ©pondre aux besoins du monde des affaires, la politique Ă©conomique dĂ©pendait du bon vouloir de Norodom Sihanouk qui, Ă part pour lâĂ©ducation privilĂ©giait les projets grandiloquents Ă court terme. Autrement dit, si le prince avait Ă ce moment utilisĂ© les moyens Ă sa disposition pour rĂ©gler les problĂšmes Ă©conomiques, le mĂ©contentement des Ă©lites aurait Ă©tĂ© moindre et sa dĂ©position aurait certainement attendu quelques annĂ©es de plus. Toutefois, le manque de devises fortes se faisait quand mĂȘme sentir lors de lâachat de biens importĂ©s et le secteur privĂ© sâimpatientait de profiter du boom qui touchait dĂ©jĂ certains pays de lâAsie du Nord-Est, la ThaĂŻlande et le Sud ViĂȘt Nam[329].
En 1969, Sihanouk, en sâadressant Ă la presse occidentale, estimera que 95 % des Cambodgiens soutenaient le « Bouddhisme socialiste » et que la seule opposition Ă©tait constituĂ©e de groupuscules adulateurs de la RĂ©volution culturelle ou de lâAmerican way of life. Ses dĂ©tracteurs reprochaient pour leur part sa mainmise sur tous les aspects de la vie quotidienne et sa politique intĂ©rieure. NĂ©anmoins, le fait de garder son pays hors de la guerre du ViĂȘt Nam reste Ă mettre Ă son crĂ©dit. Alors que le conflit dĂ©gĂ©nĂ©rait en 1968 et 1969, le Cambodge restait le seul pays de lâancienne Indochine française Ă ĂȘtre Ă©pargnĂ© par les bombardements aĂ©riens quotidiens et les combats de grande ampleur. Il le devait pour une grande part aux choix que fit le monarque et qui, sâils sâavĂ©reront nĂ©fastes sur le long terme, semblaient Ă lâĂ©poque les plus Ă mĂȘme dâassurer la tranquillitĂ© du royaume khmer. Dans le mĂȘme temps, les dĂ©cisions amĂ©ricaines concernant le ViĂȘt Nam paraissaient rarement faire cas des populations locales et si Sihanouk avait refusĂ© au Viá»t Cá»ng lâinstallation de ses bases, il est fort probable que ces derniers seraient passĂ©s outre, occasionnant des pertes importantes auprĂšs de ceux qui sur le terrain se seraient opposĂ©s Ă leur projet. Si le Cambodge sâĂ©tait ouvertement engagĂ© dans le camp dâun des belligĂ©rants, il yâa fort Ă parier que lâautre lâaurait attaquĂ©. En 1969, le prince pensait sincĂšrement que la meilleure option Ă©tait de se rapprocher des Ătats-Unis tout en prĂ©servant ses relations avec la RĂ©publique dĂ©mocratique du ViĂȘt Nam. Si cette politique de non-alignement semblait la plus sage, câest pour lâavoir oubliĂ© que les adversaires du prince qui le dĂ©posĂšrent en 1970 prĂ©cipitĂšrent leur pays dans lâabĂźme quand ils choisirent le conflit ouvert avec le ViĂȘt Nam[330].
Pour comprendre la pĂ©riode qui correspond au premier rĂšgne de Sihanouk ou vouloir porter un jugement, il ne faut pas nĂ©gliger dâun cĂŽtĂ© son talent diplomatique, sa capacitĂ© Ă travailler de longues heures, son patriotisme, ni de lâautre sa vanitĂ©, son indulgence pour la corruption, son mĂ©pris pour les intellectuels, son agacement pour les conseils, son dĂ©sir de tout approuver, sa rancune ou son goĂ»t pour le faste[331]. Ă partir de 1968, beaucoup de Cambodgiens Ă©duquĂ©s pensaient que les dĂ©fauts du monarque dĂ©passaient ses qualitĂ©s. PlutĂŽt que de lutter contre la corruption dont bĂ©nĂ©ficiaient ses proches, il prĂ©fĂ©rait leur attribuer des postes Ă responsabilitĂ© oĂč ils pouvaient intensifier leurs dĂ©prĂ©dations[332]. Dans le mĂȘme temps, sa police politique, dirigĂ©e par Kou Roun et Oum Manorine, le demi-frĂšre de sa femme, appuyait la virulence de ses discours par une rĂ©pression plus agressive, notamment Ă lâencontre des Sino-Khmers et des Ă©tudiants[333].
Les Ă©lites Ă Phnom Penh se sentaient alors opprimĂ©es. Les violences pro gouvernementales Ă©taient rarement rĂ©primĂ©es et les intellectuels avaient lâimpression de vivre sous une Ă©pĂ©e de DamoclĂšs constamment suspendue au-dessus de leurs tĂȘtes. Les emprisonnements sans jugements et les disparitions se multipliaient. Mais les sĂ©vices ne se limitaient pas Ă la capitale. En 1969, Ă KĂąmpĂŽt, par exemple, de prĂ©sumĂ©s rebelles furent prĂ©cipitĂ©s du haut dâune falaise avant que leurs tĂȘtes ne soient exposĂ©es pour lâexemple sur le marchĂ© de la ville. Sihanouk ne fit rien pour empĂȘcher ces actes commis en son nom. Au contraire, Lon Nol, Ă la tĂȘte de la police et de lâarmĂ©e, gagnait en influence[334].
En septembre de la mĂȘme annĂ©e, un nouvel officiel amĂ©ricain venait Ă Phnom Penh. Il sâagissait dâEugene R. Black, Sr. (en), ancien prĂ©sident de la banque mondiale et conseiller du prĂ©sident Johnson aux affaires Ă©conomiques pour lâAsie du Sud-Est et dâune dĂ©lĂ©gation dâune dizaine de personnes. Ils eurent une sĂ©rie dâentretiens avec le Premier ministre Penn Nouth et des membres de lâĂ©tat-major des forces armĂ©es royales khmĂšres. Si rien ne semble avoir transpirĂ© quant Ă la teneur exacte de ces conversations, qui officiellement portaient sur le dĂ©veloppement du bassin du MĂ©kong, et sans que lâon sache sâil y avait une relation de cause Ă effet, peu aprĂšs le dĂ©part de la dĂ©lĂ©gation, Sihanouk dĂ©nonçait pour la premiĂšre fois publiquement la prĂ©sence de « Vietnamiens armĂ©s » sur le sol cambodgien[335].
En octobre, Cheng Heng, un dĂ©putĂ© apolitique Ă©tait nommĂ© prĂ©sident de lâAssemblĂ©e nationale. Personne alors ne pouvait se douter quâil remplacerait Sihanouk dans 18 mois[336]. Ă mesure que son aptitude Ă peser sur les cours des Ă©vĂšnements faiblissait, le prince se montrait moins intĂ©ressĂ© par la direction du pays, prĂ©fĂ©rant se livrer Ă des visites en province, faire des films et passer du temps avec ses proches[337].
LâĂ©clipse (1969)
Le dĂ©but de lâannĂ©e 1969 dĂ©bute par la dĂ©fection dâenviron 200 Khmers Serei dans la province d'Otdar Mean Cheay, qui sera largement mĂ©diatisĂ©e. Le 21 janvier, lors dâune confĂ©rence de presse, plusieurs dizaines de ces combattants affirmaient que leur dĂ©cision avait Ă©tĂ© prise aprĂšs quâils eurent eu connaissance dâun accord secret entre Bangkok et Son Ngoc Thanh qui aurait acceptĂ©, une fois la victoire acquise et en Ă©change dâun soutien du gouvernement de Thanom Kittikachorn, de cĂ©der Ă la ThaĂŻlande, les provinces que cette derniĂšre avait dĂ©jĂ annexĂ©es pendant la seconde guerre mondiale. Bien que de telles assertions restent encore de nos jours sujettes Ă caution, elles ne pouvaient quâexacerber la rancĆur anti-thaĂŻlandaise de la population cambodgienne et la conforter dans la vision de la situation que Sihanouk lui prĂ©sentait depuis des annĂ©es. En contrepartie, cette attaque contre un des plus proches alliĂ©s des Ătats-Unis dans la rĂ©gion ne pouvait que mettre un frein, qui sera cependant de courte durĂ©e, aux tentatives de rĂ©conciliation avec Washington[338].
En fĂ©vrier 1969, peu aprĂšs la prise de fonctions de Richard Nixon Ă la prĂ©sidence des Ătats-Unis, le gĂ©nĂ©ral Creighton Williams Abrams, commandant en chef des forces amĂ©ricaines Ă SaĂŻgon, demandait Ă la nouvelle administration mise en place Ă la Maison-Blanche, la permission dâutiliser les B-52 contre le quartier gĂ©nĂ©ral Viá»t Cá»ng en territoire cambodgien. La demande sera acceptĂ©e en mars, mais les interventions seront entourĂ©es du plus grand secret, mĂȘme plusieurs annĂ©es aprĂšs. Les bombardements prirent le nom de code dâopĂ©ration petit-dĂ©jeuner (breakfast) et dĂ©butaient le 18 mars. Dans les 14 mois qui suivirent, plus de 3 500 sorties seront « secrĂštement » effectuĂ©es au-dessus du Cambodge pour, prĂ©tendument, dĂ©truire un quartier gĂ©nĂ©ral qui ne sera finalement jamais localisĂ©. En novembre 1969, lâĂ©tat-major amĂ©ricain au Sud-ViĂȘt Nam reconnaissait que le seul rĂ©sultat obtenu avait Ă©tĂ© de disperser les unitĂ©s Viá»t Minh dans des zones plus densĂ©ment peuplĂ©es du Cambodge[339]. En rĂ©ponse Ă ces bombardements, Sihanouk Ă©levait la mission du Front national de libĂ©ration du Sud ViĂȘt Nam de Phnom Penh au rang dâambassade, mais, dans le mĂȘme temps multipliait les ouvertures diplomatiques en direction des Ătats-Unis. Il espĂ©rait alors toujours pouvoir prĂ©server le royaume khmer de la guerre. Toutefois, en avril, alors que l'opĂ©ration petit-dĂ©jeuner avait dĂ©butĂ©, le prince annonçait en guise dâavertissement quâil nâenvisageait pas de modifier sa ligne de conduite envers la RĂ©publique dĂ©mocratique du ViĂȘt Nam, sauf si lâinfluence communiste devenait trop importante, auquel cas, il prĂ©tendait envisager dâabandonner son poste de chef de lâĂtat Ă Lon Nol[340].
Dans le mĂȘme temps, la situation Ă©conomique se dĂ©gradait. Depuis 1968, la croissance nâĂ©tait plus au rendez-vous. La production agricole stagnait, en partie Ă cause des rĂ©voltes paysannes et dâune annĂ©e de sĂ©cheresse. Les exportations chutaient et le dĂ©ficit budgĂ©taire se creusait pour atteindre 1/8 des recettes de lâĂtat. Des conseillers de Sihanouk suggĂ©raient de freiner les dĂ©penses, notamment celles liĂ©es aux programmes de prestige, mais le monarque fit la sourde oreille. Le prince prĂ©fĂ©rait prĂ©server sa popularitĂ© en maintenant le mode de vie que les Cambodgiens avaient lâhabitude de le voir mener[341]. Vu les importantes sommes englouties dans les jeux plus ou moins lĂ©gaux Ă travers lâensemble du pays, il voulait plutĂŽt que le gouvernement ouvre ses propres casinos Ă Phnom Penh et Ă Sihanoukville, tout en fermant les cercles de jeux qui, avec la connivence de la police tournaient depuis des annĂ©es mais allaient maintenant faire ombrage au nouveau projet princier. Cette mesure semblait rĂ©pondre au manque de devises fortes nĂ©cessaires Ă tout emprunt Ă lâĂ©tranger. De plus, certains de ses proches et de la famille royale tels Sisowath Sirik Matak ou Norodom Chantarainsey (en) semblent avoir profitĂ© de cette nouvelle source de revenus[342]. Les Ă©tablissements ouvrirent au dĂ©but de 1969 et pour cette premiĂšre annĂ©e la recette du seul casino de Phnom Penh sâĂ©levait Ă 700 millions de riels (10 millions de dollars) et contribuaient pour 9% au budget de lâĂtat. Il Ă©tait ouvert 24 heures sur 24, causant la ruine de nombreux parieurs et plusieurs suicides. Il sera finalement fermĂ© par Sisowath Sirik Matak en janvier 1970, alors que Sihanouk et Lon Nol Ă©taient en France[343].
Sihanouk devait alors aussi composer avec la guĂ©rilla. Bien quâelle ne comptĂąt quâun millier de membres, ses escarmouches se multipliaient sur lâensemble du pays, nĂ©cessitant un dĂ©ploiement toujours plus important de forces de lâordre. Quâils soient Cambodgiens irritait le prince qui ne comprenait pas pourquoi, en contrepartie de lâaide quâil leur fournissait, les Vietnamiens ne pouvaient pas mieux les contrĂŽler[344]. Sa politique Ă©tait alors sur tous les fronts, avec la poursuite des efforts pour se rapprocher des Ătats-Unis dont les relations furent rĂ©tablies en juin 1969, aprĂšs que Washington eut officiellement reconnu les frontiĂšres du Cambodge. Malheureusement pour les conservateurs et le gouvernement de Lon Nol, cet accord ne dĂ©boucha pas sur la reprise de lâaide amĂ©ricaine massive quâils escomptaient[345].
Les principaux combats de la guĂ©rilla se dĂ©roulaient au nord-est. Un nouveau quartier gĂ©nĂ©ral dirigĂ© par Nhiek Tioulong fut installĂ© Ă Stoeng Treng dont, dâaprĂšs une remarque de Sihanouk en fin 1968, les Vietnamiens occupaient le tiers de la province. Malheureusement, placer des troupes sur les principales routes dâapprovisionnement des maquis ne pouvait quâamener des frictions. Un document vietnamien saisi Ă la fin de 1969 faisait rĂ©fĂ©rence Ă une recrudescence des accrochages avec les forces gouvernementales dans la zone, ces derniĂšres ayant subi des pertes que le document estimait Ă environ un millier de morts et de blessĂ©s[346].
Mais dans le mĂȘme temps, Huỳnh Táș„n PhĂĄt, le prĂ©sident du Gouvernement provisoire rĂ©volutionnaire du Sud-ViĂȘt Nam, effectua un voyage Ă Phnom Penh Ă la tĂȘte dâune dĂ©lĂ©gation de 16 personnes. La visite fut organisĂ©e personnellement par Sihanouk qui accompagna les reprĂ©sentants durant toute leur visite. Un but non avouĂ© de ces marques de bienveillance Ă©tait certainement dâobtenir une promesse formelle que les troupes vietnamiennes Ă©vacueraient le Cambodge une fois la guerre finie. La tournĂ©e se conclut par un accord sur les frais dâacheminement des fournitures aux maquis qui devraient dorĂ©navant ĂȘtre directement rĂ©glĂ©s au gouvernement cambodgien, plutĂŽt quâĂ des particuliers[347].
Ă ce moment, le prince avait plusieurs problĂšmes Ă rĂ©gler. Ce fut dâabord la crise Ă©conomique qui sâaggravait, la demande de plus en plus pressante des Ă©lites de libĂ©raliser les finances, mais aussi lâinsurrection qui, bien que toujours restreinte Ă quelques groupes limitĂ©s, faisait croĂźtre lâinsĂ©curitĂ© dans les campagnes, et enfin la prĂ©sence de plus en plus criante du Viá»t Cá»ng dans les zones proches de la frontiĂšre vietnamienne. En juillet 1969, lors dâun congrĂšs du Sangkum, le prince proposait dâabandonner la fonction de chef de lâĂtat et de faire composer un gouvernement de sauvetage par un congrĂšs spĂ©cial qui comporterait des membres des deux chambres du parlement, du contre-gouvernement, des reprĂ©sentants des mouvements de jeunesse et des propriĂ©taires de journaux locaux. Ce congrĂšs sâouvrit le 4 aoĂ»t et Sihanouk y attribuait lâĂ©chec du gouvernement prĂ©cĂ©dent au manque de volontĂ© des Ă©lites cambodgiennes Ă prendre des mesures impopulaires qu'il aurait prises Ă leur place. En clair, il fixait une ligne directrice au nouveau gouvernement[348]. Le rassemblement sera le dernier triomphe de Sihanouk. Le congrĂšs dĂ©cida de confier Ă Lon Nol la direction dâun nouveau gouvernement, poste quâil assurait dĂ©jĂ par intĂ©rim, Ă la suite des problĂšmes de santĂ© de Penn Nouth. Au nombre de votes en sa faveur, le prince Sisowath Sirik Matak arrivait juste derriĂšre Lon Nol ; il sera dĂ©signĂ© quelques jours plus tard vice-Premier ministre et deviendra rapidement lâhomme fort du rĂ©gime. Ce nouveau cabinet, par sa volontĂ© de se soustraire au contrĂŽle du chef de lâĂtat, nâallait pas tarder Ă sâopposer au prince[349].
Le retour de Lon Nol au poste de Premier ministre peut poser des questions sur les capacitĂ©s de jugement dont pouvait faire preuve Sihanouk Ă cette Ă©poque. Dans RĂ©alitĂ©s cambodgiennes, un hebdomadaire proche du souverain, le gĂ©nĂ©ral Ă©tait dĂ©crit comme fiable, sĂ©rieux, dotĂ© dâun bon sens commun et prĂ©fĂ©rant lâaction aux discours. Sihanouk connaissait lâaversion de la gauche pour Lon Nol et peut-ĂȘtre espĂ©rait-il aussi que le nouveau Premier ministre pourrait le dĂ©barrasser des activistes, Ă moins quâil ne comptĂąt exacerber les rancĆurs pour ensuite apparaĂźtre comme le seul sauveur Ă mĂȘme de mettre un terme Ă la crise qui en aurait dĂ©coulĂ©. Toujours est-il que cette nomination comportait une certaine dose dâimpuissance et que Lon Nol semblait le choix le moins risquĂ© ; le prince devait sĂ»rement estimer que sa loyautĂ© et sa docilitĂ© compensait ses dĂ©fauts[350].
Les 16 membres du nouveau ministĂšre furent choisis par Lon Nol et approuvĂ©s par lâassemblĂ©e nationale. 9 dâentre eux Ă©taient dĂ©jĂ dans le cabinet prĂ©cĂ©dent, mais seuls 4 Ă©taient sihanoukistes[note 9]. Sur le moment, le prince ne fit aucune remarque, mais Jean-Claude Pomonti et Serge Thion citent dans leur ouvrage un tĂ©moin prĂ©tendant que quelques jours plus tard, il aurait affirmĂ© quâil sâagissait dâune rĂ©volution en douceur, oĂč la bourgeoisie avait pris le pouvoir sans violence ni discussion[352].
Lors du deuxiĂšme semestre de 1969, Sihanouk se mit en retrait de la vie politique locale. Il semble que chaque camp attendait la suite des Ă©vĂ©nements[353]. En septembre, le prince se fit remarquer en Ă©tant le seul chef dâĂtat Ă se rendre Ă HanoĂŻ aux funĂ©railles de HĂŽ Chi Minh. Ă cette occasion, il eut des entretiens avec les dirigeants vietnamiens, mais le contenu de ces discussions diffĂšre suivant la source. Bernard Hamel se base sur un document publiĂ© par la rĂ©publique khmĂšre pour soutenir que les conversations portaient sur un accord commercial avec les responsables du FNL concernant lâapprovisionnement des maquis en rĂ©publique du ViĂȘt Nam[354]. Le monarque, quant Ă lui, affirma quâil dĂ©sirait demander une rĂ©duction des effectifs du Viá»t Cá»ng stationnĂ©s au Cambodge, mais PháșĄm VÄn Äá»ng ne lui en aurait pas laissĂ© le temps et lui aurait demandĂ© des comptes sur une cargaison de riz pour laquelle Lon Nol aurait Ă©tĂ© fortement rĂ©tribuĂ© par la Chine, mais dont la livraison se faisait attendre. Ă son retour Ă Phnom Penh, quand le monarque posa la question Ă son nouveau Premier ministre, celui-ci serait restĂ© Ă©vasif. Ă la fin du mois, quand le gĂ©nĂ©ral se rendit PĂ©kin et quâil rencontra Ă son tour son homologue nord-vietnamien, il aurait refusĂ© de garantir la livraison ou de restituer lâargent[355].
Au Cambodge, Sihanouk sâĂ©tait insensiblement mis hors course de la direction dâun pays qui devenait de plus en plus instable et compliquĂ© Ă administrer pour un homme seul. Le mĂ©lange de confiance, de fatalisme, de laisser-faire et de douceur de vivre qui avait jusque-lĂ caractĂ©risĂ© son rĂšgne sâĂ©tait envolĂ©[356]. Le prince sâen Ă©tait sĂ»rement mieux aperçu que la plupart de ses contemporains, mais prĂ©fĂ©rait ignorer ces problĂšmes et se contentait dâaccueillir somptueusement les visiteurs Ă©trangers tels la princesse Margaret du Royaume-Uni ou Hamani Diori, prĂ©sident du Niger et sâabandonnait dans la rĂ©alisation de ses films[357].
Ă la fin octobre, Lon Nol quittait le Cambodge pour aller suivre un traitement dans une clinique de Neuilly-sur-Seine. Peu aprĂšs, Sihanouk sâen prenait Ă lâAssemblĂ©e nationale, lui reprochant de ne pas reprĂ©senter le peuple mais une faction dĂ©loyale envers lui. Cette attaque semble avoir Ă©tĂ© motivĂ©e par la dĂ©cision de Sirik Matak, alors Premier ministre par intĂ©rim, de ne transmettre quâune partie des documents officiels Ă son cousin et dâavoir incitĂ© les ambassadeurs Ă lui adresser directement leurs correspondances[358]. Sirik Matak rejetait les dolĂ©ances de Sihanouk et, dans les semaines qui suivirent, prit une sĂ©rie de mesures Ă lâopposĂ© de la politique menĂ©e depuis des annĂ©es et qui allaient Ă lâencontre des intĂ©rĂȘts des proches du monarque. Il autorisa la rĂ©ouverture des banques Ă capitaux privĂ©s au Cambodge, dĂ©valua le riel de prĂšs de 70 % et privatisa certains monopoles de lâĂtat. Le but Ă©tait de rassurer les marchĂ©s financiers internationaux, encourager les investissements Ă©trangers et dynamiser les exportations, des initiatives que Sihanouk avait toujours diffĂ©rĂ©es, doutant de leur utilitĂ©[359].
Le 28e congrĂšs national, convoquĂ© en novembre et dĂ©cembre 1969 sâavĂ©rera la derniĂšre manifestation publique Ă laquelle participa Norodom Sihanouk avant sa dĂ©position. Durant les dĂ©bats, il tenta de dĂ©nigrer les mesures Ă©conomiques prises par Sirik Matak et obtint un vote demandant lâabrogation du dĂ©cret autorisant les banques Ă©trangĂšres Ă revenir sâimplanter au Cambodge. Pour montrer leur solidaritĂ©, les quatre ministres sihanoukistes du gouvernement dĂ©missionnĂšrent de leur poste. Mais le coup eu lâeffet inverse de ce quâils escomptaient. Sirik Matak nomma des personnes proches de lui Ă leur place et Sihanouk se retrouvait privĂ© de tout soutien au sein du gouvernement[360]. Le prince demanda nĂ©anmoins aux reprĂ©sentants du parlement le vote dâune motion de confiance Ă son Ă©gard. Seul Douc Rasy, adversaire rĂ©solu du prince, osa voter contre, mais lâamour-propre du monarque sortait entamĂ© de cette Ă©preuve, surtout aprĂšs que l'AssemblĂ©e nationale rĂ©cusa le vote du congrĂšs et confirmĂ© lâautorisation faites aux banques privĂ©es de rouvrir[361].
Pour la premiĂšre fois depuis le dĂ©but des annĂ©es 1950, Sihanouk avait Ă faire face Ă une opposition structurĂ©e. Il nâimpressionnait pas Sirik Matak, de 9 ans son aĂźnĂ©, et lâAssemblĂ©e Ă©lue en 1966 prenait goĂ»t Ă son influence grandissante. Le monarque ne pouvait se prĂ©valoir dâaucune responsabilitĂ© dans les mesures Ă©conomiques prises rĂ©cemment et qui commençaient Ă porter leurs premiers fruits. Lâaffrontement avec le souverain souhaitĂ© par ceux qui semblaient avoir gagnĂ© la partie ne pouvait par contre rĂ©gler aucun des problĂšmes auxquels le Cambodge Ă©tait confrontĂ©. La menace militaire vietnamienne ainsi que celle de la guĂ©rilla restait toujours aussi importante. Plus inquiĂ©tant, les intentions amĂ©ricaines concernant le royaume khmer demeuraient floues. Le rĂ©tablissement des relations diplomatiques nâavait amenĂ© ni le boom Ă©conomique que certains espĂ©raient, ni le retour de lâaide militaire massive. En fait, les membres de la petite mission Ă Phnom Penh â dont quelques-uns Ă©taient des agents de la CIA â sâĂ©taient contentĂ© de renouer quelques contacts avec les dirigeants proches dâeux au premier rang desquels figurait Sirik Matak[362].
La chute (1970)
Le 2 janvier 1970, le prince fatiguĂ© par ses efforts, dĂ©moralisĂ© par lâaffront que lâAssemblĂ©e lui avait fait subir et souffrant de surmenage, se faisait admettre Ă lâhĂŽpital Calmette (en). Le 6 du mĂȘme mois, le palais royal annonçait son dĂ©part le soir mĂȘme pour la France oĂč il devait poursuivre son traitement mĂ©dical. Lâembarquement se faisait sans le cĂ©rĂ©monial habituel et des proches remarquĂšrent que ses bagages Ă©taient plus volumineux quâĂ lâaccoutumĂ©e[363]. Peut-ĂȘtre espĂ©rait-il renverser la situation vis-Ă -vis de Sirik Matak en profitant de son sĂ©jour Ă lâĂ©tranger pour demander Ă la Chine et Ă lâURSS, quâil projetait de visiter avant de rentrer, de faire pression sur leur alliĂ© vietnamien et lâobliger Ă rĂ©duire son implantation au Cambodge[364]. Peut-ĂȘtre espĂ©rait-il aussi que des tensions allaient apparaĂźtre entre Lon Nol et Sirik Matak et quâil serait rappelĂ© tel un sauveur. Si un tel raisonnement sâĂ©tait avĂ©rĂ© efficace par le passĂ©, ce ne sera pas le cas cette fois[365].
Toujours est-il quâavec les absences conjuguĂ©es de Lon Nol et de Norodom Sihanouk, Sirik Matak et ses partisans avaient une occasion unique de mettre en place les mesures libĂ©rales quâils souhaitaient depuis longtemps et de sâopposer plus fermement Ă lâoccupation vietnamienne des zones frontaliĂšres. Le gouvernement Ă©tait alors prĂȘt Ă mettre Ă bas les fondements de la politique suivie jusque-lĂ par le monarque et Ă rĂ©organiser lâarmĂ©e en une vĂ©ritable force de combat. Il espĂ©rait par ces mesures pouvoir redynamiser les entrepreneurs du pays. Malheureusement pour lui, une telle politique nĂ©cessitait le soutien des Ătats-Unis dont Sirik Matak se considĂ©rait proche, mais les AmĂ©ricains Ă©taient engagĂ©s dans un retrait de lâAsie du Sud-est[366].
En janvier, le bureau dâaide mutuelle mis en place quelques annĂ©es auparavant par Sihanouk pour fournir diverses assistances fut fermĂ©. Ses recettes provenaient de celles des films du monarque, des droits dâentrĂ©e au casino et de « contributions volontaires » de hauts fonctionnaires. Les fonds ainsi collectĂ©s servaient Ă dĂ©dommager les victimes des bombardements et de la guĂ©rilla ainsi qu'Ă acheter des cadeaux de toutes sortes. Si la raison invoquĂ©e Ă©tait un dĂ©ficit chronique, il semble bien quâen fait le gouvernement voulait surtout limiter lâinfluence de Sihanouk[367].
Ă la mi-fĂ©vrier, Lon Nol Ă©tait de retour. Avant de rentrer, il avait eu un entretien avec Sihanouk, oĂč, dâaprĂšs certaines rumeurs, une stratĂ©gie antivietnamienne aurait Ă©tĂ© Ă©laborĂ©e, mais rien ne permet de confirmer cette thĂšse[368]. DâaprĂšs le journaliste Pierre Max, le gĂ©nĂ©ral aurait aussi tentĂ© de convaincre le prince de revenir rapidement, mais en vain[369].
SitĂŽt arrivĂ©, le gĂ©nĂ©ral adoptait une sĂ©rie de mesures antivietnamiennes et prenait contact avec Son Ngoc Thanh, le vieux leader nationaliste rĂ©fugiĂ© depuis des annĂ©es Ă SaĂŻgon oĂč il vivait des subsides de la rĂ©publique du ViĂȘt Nam et de la CIA en Ă©change du recrutement de volontaires au sein de la communautĂ© khmĂšre Krom. Plusieurs centaines de ces combattants avaient dĂ©jĂ dĂ©sertĂ© dans les derniers mois pour rejoindre Sihanouk qui les accueillit Ă bras ouverts dans lâarmĂ©e. Ces fantassins, bien Ă©quipĂ©s et entraĂźnĂ©s permettaient de mettre la pression sur les troupes vietnamiennes stationnĂ©es au Cambodge. Le monarque nây voyait pas de risque, pensant que lâantagonisme entre Son Ngoc Thanh et Lon Nol le prĂ©munissait contre une alliance Ă son encontre[370]. Ces contacts servaient les intĂ©rĂȘts du commandement militaire amĂ©ricain de SaĂŻgon, mais inquiĂ©taient la petite mission diplomatique de Phnom Penh, et certains cercles de Washington qui craignaient les consĂ©quences dâune extension du conflit. Toutefois, le temps passant, le prĂ©sident Nixon se rangeait de plus en plus derriĂšre les vues des premiers nommĂ©s, estimant que le maintien des refuges de lâautre cĂŽtĂ© de la frontiĂšre pouvait retarder le retrait des forces amĂ©ricaines du ViĂȘt Nam[371].
Lâescalade se poursuivait et, le 11 mars, des manifestations se dĂ©roulaient devant les ambassades de la RĂ©publique dĂ©mocratique du ViĂȘt Nam et du Front national de libĂ©ration du Sud ViĂȘt Nam. Les Ă©meutiers entrĂšrent dans les bĂątiments et les mirent Ă sac. Les diplomates prĂ©sents eurent juste le temps de prendre leurs jambes Ă leur cou. La police, aux ordres dâOum Manorine, le beau-frĂšre de Sihanouk, ne fit rien pour rĂ©primer ces actes de violence. Durant la nuit, des bandes dispersĂ©es investirent les quartiers vietnamiens de la capitale, mirent Ă sac les Ă©glises catholiques [note 10], pillĂšrent les commerces et agressĂšrent les passants[373].
Depuis Paris, Sihanouk affirmait que ces manifestations dĂ©coulaient dâun complot visant à « jeter notre pays dans les bras dâune puissance impĂ©rialiste capitaliste ». Il promit de rentrer dans les plus brefs dĂ©lais et demander « Ă la nation et Ă lâarmĂ©e » de choisir entre lui et les « personnalitĂ©s » Ă lâorigine de ces troubles, ajoutant « Si elles choisissent de suivre ces personnalitĂ©s dans la voie qui fera du Cambodge un second Laos, quâelles me permettent de dĂ©missionner »[374]. InterrogĂ© par le New York Times, il rĂ©pondit que les communistes devaient maintenant choisir entre respecter la neutralitĂ© du Cambodge ou voir un gouvernement pro amĂ©ricain sâinstaller Ă Phnom Penh[375].
Peu aprĂšs, il changea ses plans. PlutĂŽt que de rentrer directement, il dĂ©cidait de passer par Moscou et PĂ©kin, comme initialement prĂ©vu. Dans la nuit qui prĂ©cĂ©dait son dĂ©part, il eut une conversation Ă lâambassade du Cambodge au cours de laquelle il menaçait de faire exĂ©cuter le gouvernement de sauvetage. Cet entretien fut enregistrĂ© Ă lâinsu du prince et envoyĂ© Ă Phnom Penh ; il y suscita un Ă©moi qui allait prĂ©cipiter la chute du monarque[376]. Jusquâau dernier moment, les projets de Sihanouk demeuraient confus. Le 16 mars encore, il Ă©tait espĂ©rĂ© pour le 20. Le 9, il avait dĂźnĂ© Ă la Tour d'Argent avec Pierre Marx qui affirma que le prince lâaurait assurĂ© quâil ne nĂ©gligeait pas la menace vietnamienne, mais quâil ne pouvait lutter seul contre eux. Il pensait que sa seule chance Ă©tait dâutiliser ses bonnes relations avec les dirigeants soviĂ©tiques et chinois pour obtenir quâils fassent pression sur leur alliĂ© et quâils l'amĂšnent Ă quitter ses sanctuaires[377].
Ă Phnom Penh, les attaques personnelles contre le prince et son entourage se multipliaient Ă l'assemblĂ©e. Toutefois, ces critiques Ă©taient loin de faire lâunanimitĂ© et beaucoup continuaient Ă considĂ©rer Sihanouk comme incontournable et espĂ©raient toujours le voir revenir rapidement. La route menant de lâaĂ©roport au Palais royal avait Ă©tĂ© refaite et se prĂ©parait Ă ĂȘtre pavoisĂ©e. Le parlement, de son cĂŽtĂ©, avait dĂ©cidĂ© dâenvoyer Yem Sambaur et Norodom Kanthoul Ă Moscou pour mettre le monarque au courant de la situation et lui demander de hĂąter son retour, mais il fit savoir quâil refuserait de les recevoir. Il resta plus longtemps que prĂ©vu Ă Moscou et retarda son retour dâune semaine[378]. Plus tard il justifiera ces atermoiements par des craintes pour sa sĂ©curitĂ©, dĂ©fiance confortĂ©e par un message quâil reçut de la reine Kossamak. Toujours est-il que ces retards allaient lui coĂ»ter son poste de chef de lâĂtat[379].
Quand Sihanouk arriva Ă Moscou, NikolaĂŻ Podgorny lui conseilla de rejoindre Phnom Penh sur le champ afin que le Cambodge ne bascule pas dans le camp proamĂ©ricain, mais le monarque prĂ©fĂ©ra passer outre. Il aurait affirmĂ© au prĂ©sident du PrĂŠsidium du Soviet suprĂȘme quâavant de prendre une dĂ©cision, celle-ci devait ĂȘtre mĂ»rement rĂ©flĂ©chie et dans le cas prĂ©sent, beaucoup dâĂ©lĂ©ments devaient ĂȘtre pris en compte[380].
La mise en place de lâalliance (1970)
Les dirigeants soviĂ©tiques, de leur cĂŽtĂ©, pour peu quâils en aient eu la possibilitĂ©, ne semblaient pas enclins Ă faire pression sur les Vietnamiens[381]. Par contre, dâaprĂšs Sihanouk, ils se dĂ©clarĂšrent prĂȘts, au cas oĂč il aurait dĂ©cidĂ© de combattre lâextrĂȘme droite, Ă lui fournir des armes et des vĂ©hicules sous six Ă sept mois alors que le monarque avait besoin dâune aide immĂ©diate pour avoir une chance de gagner la partie[382]. Les assertions du prince sont toutefois sujettes Ă caution. Outre quâil soit difficile de dĂ©terminer si le terme extrĂȘme droite recouvrait les partisans de Lon Nol et Sirik Matak ou au contraire les troupes amĂ©ricano-sud-vietnamiennes, lâaide militaire soviĂ©tique serait apparue malvenue. Le 18 mars, dans la limousine qui le conduisait Ă lâaĂ©roport, Kossyguine avertit le prince que lâassemblĂ©e nationale cambodgienne venait de le dĂ©mettre de ses fonctions de chef de lâĂtat. Bien plus tard, Sihanouk affirmera quâil aurait alors fait part de son intention de combattre lâimpĂ©rialisme de toutes ses forces. Ă lâaĂ©roport, il confia quâil allait sĂ»rement devoir mettre en place un gouvernement en exil. Les cĂ©rĂ©monies officielles continuĂšrent cependant comme initialement prĂ©vu et le monarque nouvellement dĂ©chu prit lâavion pour PĂ©kin[380].
Lors de lâescale Ă Irkoutsk, le prince fut accueilli avec les honneurs et conviĂ© Ă un banquet. MalgrĂ© les Ă©vĂ©nements, il fut, dâaprĂšs Alain Daniel, son secrĂ©taire, dâune exquise courtoisie avec ses hĂŽtes[383]. MĂȘme si plus tard, il Ă©crira quâil passa le vol Ă prĂ©parer un appel aux armes[384], une de ces premiĂšres dĂ©cisions, une fois arrivĂ© Ă PĂ©kin, sera de contacter Ătienne Manac'h, lâambassadeur de France, pour demander lâasile politique dans son pays[385].
Ă son arrivĂ©e Ă PĂ©kin, Sihanouk fut accueilli par Zhou Enlai et une garde dâhonneur. Il se rendit Ă lâambassade du Cambodge oĂč on lui remit une lettre de Cheng Heng, le nouveau chef de lâĂtat, et qui lui signifiait sa dĂ©position. AprĂšs avoir rencontrĂ© Ătienne Manac'h pour discuter, comme Ă©voquĂ© ci-dessus, les modalitĂ©s dâun asile politique en France qui sera dâailleurs acceptĂ©, il eut une entrevue avec les dirigeants chinois[386], mais la teneur des conversations diffĂšrent suivant le tĂ©moignage du prince que lâon prend en compte. En 1971, il affirma que Zhou Enlai, tout en le mettant en garde contre lâardeur de la tĂąche, lui promit un soutien total de son pays sâil dĂ©cidait dâengager le combat contre lâimpĂ©rialisme et lui accordait un dĂ©lai de 24 heures pour rĂ©flĂ©chir Ă sa proposition[387]. Onze ans plus tard, le monarque affirma par contre que le message venait du prĂ©sident Mao Zedong et reconnaissait quâen le soutenant ainsi, ils offraient Ă leurs alliĂ©s khmers rouges une opportunitĂ© sans prĂ©cĂ©dent de « communiser » le Cambodge[388]. Si une telle pensĂ©e avait pu effleurer le prince en 1970, sa motivation Ă©tait essentiellement basĂ©e sur sa soif de revanche, surtout aprĂšs les attaques contre sa personne et celle de sa femme qui fleurissaient Ă Phnom Penh. Il est toutefois sĂ»r quâaprĂšs sa dĂ©position et son installation Ă PĂ©kin, sa rancĆur et son statut servaient les intĂ©rĂȘts chinois, vietnamiens et ceux du Parti communiste du KampuchĂ©a jusquâalors balbutiant[389].
Vingt-quatre heures aprĂšs lâarrivĂ©e du prince, les dirigeants chinois firent venir PháșĄm VÄn Äá»ng Ă PĂ©kin[387]. DâaprĂšs Sihanouk, Äá»ng vint le voir le 22 mars au petit matin. Ils prirent ensemble le petit dĂ©jeuner puis eurent une rĂ©union de travail au cours de laquelle, toujours dâaprĂšs lâancien souverain, ils conclurent une alliance qui avalisait lâacheminement de lâaide chinoise Ă la rĂ©sistance khmĂšre, la convocation dâune « confĂ©rence des peuples indochinois » et lâentrainement au ViĂȘt Nam des troupes de cette nouvelle coalition[390]. Cet accord rĂ©pondait aux attentes de toutes les parties. Sihanouk, Ă la tĂȘte dâun front de rĂ©sistance sauvait la face, permettant aux forces du PCK de croĂźtre dans des proportions quâils nâauraient jamais pu espĂ©rer ; ces troupes enfin, par leurs actions, permettaient de relĂącher la pression que lâarmĂ©e cambodgienne faisait peser sur les unitĂ©s vietnamiennes stationnĂ©es en territoire khmer[389].
Les discussions de PĂ©kin dĂ©bouchĂšrent sur une allocution radiodiffusĂ©e de Sihanouk le 23 mars. Tout dâabord il remit en question la lĂ©galitĂ© de sa dĂ©position : « il nây a dans notre constitution, mĂȘme dans les plus rĂ©cents amendements dâavant le coup dâĂtat anticonstitutionnel de ce mois de mars 1970, perpĂ©trĂ© Ă Phnom Penh par lâextrĂȘme droite, aucune disposition qui permette au parlement et au gouvernement de dĂ©poser le chef de lâĂtat. » Pour lui, seul « un rĂ©fĂ©rendum national, dont la rĂ©gularitĂ© ne serait pas contestable » aurait Ă©tĂ© Ă mĂȘme de mettre fin Ă ses fonctions. Mettant en doute la lĂ©gitimitĂ© du nouveau rĂ©gime, il contestait par avance le rĂ©sultat de toute consultation quâil organiserait et demandait aux gouvernements Ă©trangers de ne pas le reconnaĂźtre. Enfin, il faisait part de son intention, une fois le rĂ©gime de Lon Nol renversĂ©, de ne plus solliciter de responsabilitĂ©s au sommet du nouvel Ă©tat[391]. Dans une autre dĂ©claration faite Ă lâAFP, il annonçait la formation dâun Front uni national, dâun gouvernement dâunion nationale, la constitution dâune assemblĂ©e consultative et dâune armĂ©e nationale de libĂ©ration. Enfin, il appelait ses « enfants » Ă ne pas se soumettre aux lois de Phnom Penh et Ă se rĂ©fugier dans la jungle pour combattre lâennemi[392].
Les forces armées du front, appelé FUNK seront placées sous l'autorité du Gouvernement royal d'union nationale du Kampuchéa (GRUNK). L'« appel du 23 mars » de Sihanouk aurait été, à son insu, légÚrement retouché par Pol Pot. Zhou Enlai prévoyait une rencontre entre Sihanouk et Pol Pot mais, le 26 mars, ce dernier se contentait de faire transmettre au prince un message de soutien prétendument signé par Khieu Samphùn, Hou Yuon et Hu Nim, les chefs officiels du mouvement khmer rouge, et censément envoyé depuis une base de résistance située au Cambodge[393].
Le GRUNK avait pour siĂšge le Youyi binguan (HĂŽtel de l'amitiĂ©), un complexe de bureaux et de logements situĂ© au Nord-Ouest de PĂ©kin, construit dans les annĂ©es 1950 pour hĂ©berger les conseillers soviĂ©tiques. Le prince, quant Ă lui, se fit attribuer lâancienne lĂ©gation française, prĂšs de la Place Tian'anmen. La demeure, dĂ©truite en 1976 par un tremblement de terre, sera reconstruite et restera Ă la disposition du monarque cambodgien jusquâĂ son dĂ©cĂšs[394].
Ă Phnom Penh, les manifestations contre Sihanouk se multipliaient, lâaccusant dâavoir vendu le territoire Ă lâennemi hĂ©rĂ©ditaire vietnamien et dâen avoir cachĂ© la recette dans des comptes Ă lâĂ©tranger au nom de sa femme ; cette derniĂšre nâĂ©tait pas non plus Ă©pargnĂ©e, accusĂ©e dâavoir usĂ© de son influence pour enrichir sa famille. Des photomontages de femmes nues oĂč le visage de la princesse Monique avait Ă©tĂ© ajoutĂ© circulaient dans la capitale Ă cĂŽtĂ© de caricatures de son mari le reprĂ©sentant dans des attitudes dĂ©gradantes. Toutes ces humiliations avaient blessĂ© au plus profond lâorgueil du monarque dĂ©chu et rĂ©duisaient Ă nĂ©ant les espoirs de le voir revenir rapidement aux affaires et pardonner Ă ceux qui avaient osĂ© le dĂ©poser[395].
Les 24 et 25 avril, sous les auspices de Zhou Enlai se tenait Ă Canton une confĂ©rence Ă laquelle, outre Sihanouk, participaient Ă©galement le Premier ministre nord-vietnamien PháșĄm VÄn Äá»ng, le nouveau prĂ©sident du Front national de libĂ©ration du Sud ViĂȘt Nam Nguyen Huu Tho et le prĂ©sident Souphanouvong du Neo Lao Haksat. Lâancien monarque cambodgien dĂ©clarait prendre la tĂȘte de la « lutte des peuples indochinois contre l'impĂ©rialisme amĂ©ricain ». Le 5 mai, Ă l'incitation des Chinois, le GRUNK Ă©tait officiellement constituĂ©[396].
Au sein du gouvernement d'union nationale, Sihanouk occupait le poste de « chef d'Ătat », et Penn Nouth, l'un de ses fidĂšles, six fois Premier ministre du Royaume du Cambodge, celui de chef du gouvernement. Le GRUNK comptait vingt-deux ministres et vice-ministres, parmi lesquels se mĂȘlaient sihanoukistes et dirigeants khmers rouges. Ă la demande de la Chine, la moitiĂ© des membres du cabinet Ă©tait basĂ©e au Cambodge, ce qui permettait de rejeter lâappellation de gouvernement en exil[397].
GrĂące au soutien de Norodom Sihanouk, les rangs khmers rouges grossissaient rapidement de 6 000 combattants au dĂ©but de 1970 Ă environ 50 000. La plupart de ces nouvelles recrues Ă©taient des paysans qui soutenaient le roi et nâavaient quâune vue trĂšs sommaire, quand pas de vue du tout, de la politique et quasiment aucune du communisme. Plus tard (en 1979), le prince affirmera que la monarchie ayant Ă©tĂ© abolie, il luttait pour lâindĂ©pendance de son pays, « quand bien mĂȘme il aurait Ă©tĂ© communiste »[398].
En avril 1970, Thiounn Mumm, qui sĂ©journait en France depuis 1955, rejoignait Sihanouk Ă PĂ©kin. Dans les quatre annĂ©es qui allaient suivre, Mumm et son frĂšre Prasith donneront une caution intellectuelle au monarque et lui attireront le soutien de membres des classes Ă©duquĂ©es cambodgiennes Ă lâĂ©tranger[399].
Durant l'Ă©tĂ©, Sihanouk fut jugĂ© par contumace Ă Phnom Penh par un tribunal militaire. Le prince fut convaincu dâavoir « incitĂ© les communistes Ă commettre une agression » et dâavoir « incitĂ© les soldats cambodgiens Ă rejoindre lâennemi »[400]. Ces accusations portaient sur des faits postĂ©rieurs Ă sa dĂ©position et ne concernaient pas les pĂ©riodes oĂč il Ă©tait chef de lâĂtat et, de par la constitution, oĂč il ne pouvait pas ĂȘtre inquiĂ©tĂ©. Il fut dĂ©mis de sa citoyennetĂ© et condamnĂ© Ă mort. La peine capitale fut aussi requise contre 17 autres membres du front uni national du KampuchĂ©a, dont la princesse Monique, considĂ©rĂ©e comme lâĂąme de la conspiration[401].
De par ses contacts Ă lâĂ©tranger, le prince allait ĂȘtre un porte-drapeau bien utile, mais ses discours et ses occupations Ă©taient Ă©troitement contrĂŽlĂ©s. Il partait de temps en temps pour des voyages diplomatiques financĂ©s par le gouvernement chinois[402]. En 1972, il avait avouĂ© que dĂšs septembre 1970, câĂ©tait les dirigeants khmers rouges qui dĂ©tenaient la rĂ©alitĂ© du pouvoir[403]. En fait sâil se dĂ©clarait marxiste et faisait rĂ©guliĂšrement rĂ©fĂ©rence à « ses communistes », ceux qui conduisaient la guerre en son nom nâavaient que mĂ©pris pour lui et la vie luxueuse quâil menait Ă PĂ©kin[404].
Une cohabitation difficile (1971-1973)
Durant toute la guerre civile cambodgienne Sihanouk et son Ă©quipe demeuraient en fait isolĂ©s de la rĂ©alitĂ© du terrain. Le « chef de l'Ătat » ne recevait que des rares messages, signĂ©s par Khieu SamphĂąn au nom de la « faction intĂ©rieure »[405]. En 1971, Ieng Sary arrivait Ă PĂ©kin comme « reprĂ©sentant spĂ©cial de l'IntĂ©rieur », officiellement pour assurer un lien avec les Chinois et les Nord-vietnamiens. Les relations entre lui et Sihanouk seront rapidement dĂ©testables : le prince, qui estimait que le reprĂ©sentant khmer rouge Ă©tait lĂ pour le surveiller, prenait plaisir Ă l'humilier[406].
Durant lâannĂ©e 1971, le parti communiste du KampuchĂ©a tenta dâaffaiblir la position de Sihanouk dans les campagnes cambodgiennes. Un document affirmait quâil nâĂ©tait pas nĂ©cessaire dâafficher les portraits du prince et que, sans dĂ©nier son faible apport Ă la rĂ©volution, il fallait subtilement expliquer au peuple que toutes les rĂ©alisations rĂ©centes devaient plus Ă la lutte armĂ©e qu'Ă lâaction du monarque dĂ©chu[407].
Au dĂ©but de lâannĂ©e 1973, avec la signature le 23 janvier des accords de paix de Paris, le Cambodge restait le seul pays de lâancienne Indochine française encore officiellement en guerre. Des rumeurs de tractations entre les grandes puissances afin de rĂ©gler la question khmĂšre se firent jour. Craignant, Ă tort ou Ă raison quâon profite de la visite que devait faire Henry Kissinger Ă PĂ©kin du 15 au 19 fĂ©vrier pour le presser dâaccepter une solution « Ă la corĂ©enne », câest-Ă -dire la partition du pays en zone dâinfluence, Sihanouk dĂ©cida de sâabsenter de la capitale chinoise pendant la durĂ©e du sĂ©jour du secrĂ©taire dâĂtat amĂ©ricain[408].
Ă la mĂȘme Ă©poque, et malgrĂ© des demandes rĂ©pĂ©tĂ©es, Sihanouk nâavait toujours pas Ă©tĂ© autorisĂ© Ă se rendre dans les maquis. Il menaça alors de ne pas se rendre Ă la confĂ©rence des non-alignĂ©s qui devait se tenir en septembre Ă Alger, soutenant quâil ne pouvait continuer Ă reprĂ©senter un pays dont on lui refusait lâaccĂšs. Finalement, aprĂšs moult tractations, Norodom Sihanouk, Ieng Sary et la princesse Monique quittaient la Chine Ă la fin fĂ©vrier pour parcourir les zones « libĂ©rĂ©es » du Cambodge[409]. Le pĂ©riple de 3 000 kilomĂštres via la piste HĂŽ Chi Minh avait Ă©tĂ© encouragĂ© par les Vietnamiens et les Chinois qui voulaient donner au prince plus de lĂ©gitimitĂ© que ce que lui offrait le PCK. Le voyage avait donnĂ© lieu Ă un film de propagande tournĂ© au moment des faits et sorti peu aprĂšs en Chine[410].
Durant ces pĂ©rĂ©grinations, Sihanouk fit avec le zĂšle qui le caractĂ©risait ce que lâon attendait de lui. Il ne changea pas pour autant la vision que les cadres du PCK pouvaient avoir de lui et il est probable quâil vĂ©cut son pĂ©riple avec la crainte de pouvoir ĂȘtre exĂ©cutĂ© Ă tout moment. Sa femme, dans son journal Ă©ditĂ© en 1978, relatait les attentions quâavaient prises leurs alliĂ©s pour que tout se passe de maniĂšre agrĂ©able pour elle et son Ă©poux. Pendant huit jours, ils seront transportĂ©s sur la piste HĂŽ Chi Minh dans des vĂ©hicules tout-terrain soviĂ©tiques et hĂ©bergĂ©s chaque nuit dans de « trĂšs jolis petits chalets » avec eau courante construits pour la circonstance. Chaque jour, on servait au couple royal des repas français avec du pain et des lĂ©gumes frais[411].
Ă la frontiĂšre cambodgienne, ils furent accueillis par Son Sen et Hu Nim. Deux jours plus tard, Khieu SamphĂąn et Saloth SĂąr, alors prĂ©sentĂ© comme le « chef de lâarmĂ©e », se joignirent au groupe avant que peu aprĂšs Hou Yuon et Khieu Ponnary ne viennent complĂ©ter lâarĂ©opage. AprĂšs 15 jours de voyage, lâĂ©quipĂ©e atteint Phnom Kulen, au nord dâAngkor Wat. Ils trouvĂšrent une demeure que la princesse Monique appela « notre Maison Blanche en zone libĂ©rĂ©e ». Toujours dâaprĂšs elle, lâhabitation Ă©tait bien dĂ©corĂ©e et ils furent traitĂ©s avec tant dâĂ©gard quâelle espĂ©rait pouvoir y rester avec son mari jusquâĂ la fin de la guerre. Les jours suivants, Sihanouk et Monique participĂšrent Ă des cĂ©rĂ©monies en leur honneur et prĂ©sidĂšrent les commĂ©morations du troisiĂšme anniversaire du FUNK. Ils visitĂšrent aussi des temples dâAngkor dans des uniformes flambant neufs avant de repartir pour la Chine. Ils atteignirent HanoĂŻ le 5 avril, puis, Ă la fin du mois, PĂ©kin, oĂč la princesse Monique avoua Ă lâambassadeur de France Ătienne Manac'h quâelle avait perdu 5 kilos dans lâaventure[412].
Peu aprĂšs son retour, le prince effectua une tournĂ©e dans une dizaine de pays[note 11] afin de sâassurer de leur soutien diplomatique. Comme Ă son habitude, il donnait son avis dĂšs quâil le pouvait et dĂ©nonçait les coalitions qui se formaient contre lui. Il ne cachait pas sa perplexitĂ© envers ses alliĂ©s khmers rouges et lâincertitude quant Ă son avenir. En mai, dans une interview accordĂ©e Ă la journaliste Oriana Fallaci, Sihanouk affirma quâil Ă©tait « Ă 100 % » derriĂšre le PCK Ă qui il pensait ĂȘtre utile en leur apportant le soutien de la paysannerie sans qui aucune rĂ©volution nâĂ©tait possible. Il soulignait aussi toute lâaversion que lui inspirait Ieng Sary, tout en rappelant quâelle passait aprĂšs leur lutte contre leurs ennemis communs[414].
Alors quâune nouvelle visite dâHenry Kissinger se profilait Ă PĂ©kin pour la fin juillet 1973, Sihanouk fit savoir quâil ne dĂ©sirait pas le rencontrer et organisa un voyage en CorĂ©e du Nord du 20 juillet au 15 aoĂ»t pour sâassurer que ses dĂ©sirs soient pris en compte. Avant de rentrer de Pyongyang, il diffusa un nouvel appel au peuple cambodgien dans lequel il fermait la porte Ă toute tentative de nĂ©gociation, demandant Ă chacun de choisir son camp. Il renouvellera la manĆuvre lorsque Georges Pompidou se rendra Ă son tour en Chine du 11 au 17 septembre 1973. Alors Ă Alger pour la 4e confĂ©rence des pays non-alignĂ©s, il choisira de prolonger son sĂ©jour jusquâau 19 septembre, reprochant Ă la France de ne pas avoir fermĂ© son ambassade Ă Phnom Penh et de continuer Ă se compromettre avec Lon Nol[415].
La fin de la république khmÚre (1974-1975)
En juillet 1974, alors que les perspectives d'une victoire rĂ©publicaine s'estompaient, Lon Nol, sous la pression des AmĂ©ricains, offrait dâouvrir des nĂ©gociations Ă ses adversaires, mais la demande fut rejetĂ©e par Sihanouk qui, sentant la victoire Ă portĂ©e de main, rĂ©clamait une capitulation sans condition[416]. Les affaires de la rĂ©publique khmĂšre ne firent qu'empirer et, au dĂ©but de 1975, John Gunther Dean (en), le nouvel ambassadeur amĂ©ricain, faisait remarquer Ă Washington quâun nouveau Cambodge pro communiste Ă©tait en train de surgir et quâil fallait favoriser des responsables proches de PĂ©kin comme Sihanouk semblait lâĂȘtre, plutĂŽt que dâabandonner le pays Ă des gouvernants pro vietnamiens tels les HanoĂŻ leaning Khmers rouges (« Khmers rouges appuyĂ©s par HanoĂŻ »). Les forces khmĂšres rouges sâenthousiasmaient, quant Ă elles Ă lâidĂ©e de prendre Phnom Penh et mettre en place ce que Dean appelait an uncontrolled solution (« une solution incontrĂŽlĂ©e ») qui nâĂ©tait pas sans inquiĂ©ter les AmĂ©ricains. Tout Ă coup, Sihanouk apparaissait comme un interlocuteur valable, capable de sauvegarder le peu dâintĂ©rĂȘts amĂ©ricains qui pouvaient encore lâĂȘtre[417].
Ă la fin mars, Norodom Sihanouk envoyait une lettre au prĂ©sident GĂ©rald Ford, lui demandant si lâambassade amĂ©ricaine Ă Phnom Penh pouvaient rechercher des copies de ses films des annĂ©es 1960. Il affirmait que sâils avaient Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©s dans un style trĂšs personnel, ils renfermaient aussi des images et des sons du Cambodge traditionnel[418]. MĂȘme sâil est difficile de se prononcer sur un Ă©ventuel sens cachĂ© dans la missive, George Bush Senior, l'envoyĂ© des Ătats-Unis en rĂ©publique populaire de Chine, offrit de rencontrer le prince directement ou indirectement, alors quâil Ă©tait demandĂ© Ă Dean de rechercher lesdits films. Mais Sihanouk rejeta la demande de Bush et sâopposa Ă un projet amĂ©ricain visant Ă le ramener au Cambodge oĂč il aurait pu sâinterposer entre les belligĂ©rants et faire cesser les combats. Les consĂ©quences de la lettre du prince fut quâil put rĂ©cupĂ©rer certains de ses films et que plus tard, Henry Kissinger pourra prĂ©tendre Ă tort quâil avait militĂ© all along (« depuis le dĂ©but ») pour un retour de Sihanouk au pouvoir[419].
Le président du Kampuchéa démocratique (17 avril 1975)
Au dĂ©but de lâannĂ©e 1975, les forces armĂ©es du FUNK, dont la composante khmĂšre rouge Ă©tait largement majoritaire, gagnaient du terrain face Ă celles de la RĂ©publique khmĂšre et, le , Phnom Penh Ă©tait prise. Dans les premiers mois de leur pouvoir, les responsables khmers rouges ne formĂšrent pas de vĂ©ritable gouvernement. Officiellement, le GRUNK dirigeait toujours le Cambodge, mais Norodom Sihanouk et Penn Nouth se trouvaient toujours Ă PĂ©kin : l'Ă©quipe gouvernementale existait essentiellement sur le papier. Vorn Vet (Ă©conomie), Ieng Sary (affaires Ă©trangĂšres) et Son Sen (dĂ©fense) avaient Ă©tĂ© nommĂ©s vice-premiers ministres, mais le processus de composition du gouvernement s'enlisait, du fait de l'incertitude sur le statut de Sihanouk[420].
Au dĂ©part, il semble clair que vu la popularitĂ© que le monarque conservait dans les campagnes, les nouveaux maĂźtres de Phnom Penh Ă©taient peu enclins Ă le faire revenir. Ils auraient mĂȘme envisagĂ© de le faire supprimer mais en furent dissuadĂ©s par les dirigeants chinois qui exigĂšrent quâils prĂ©servent Sihanouk et sa famille[note 12]. Finalement, ils se rendirent Ă lâĂ©vidence que le prince leur Ă©tait plus utile prĂšs dâeux quâĂ lâĂ©tranger oĂč il risquait de cristalliser sur son nom lâopposition au nouveau rĂ©gime. Mao Zedong et Zhou Enlai militaient de leur cĂŽtĂ© pour que lâunion entre lâancien monarque et leurs alliĂ©s khmers rouges perdure[422]. Dans le mĂȘme temps, Sihanouk devait rĂ©pondre aux premiĂšres interrogations des journalistes quant Ă des tĂ©moignages rapportant la duretĂ© du nouveau rĂ©gime et notamment lâĂ©vacuation des villes ; il attribuait ces rumeurs Ă des manĆuvres de dĂ©sinformation de la propagande pro occidentale, puis, lorsquâil parut difficile de nier quâune chape de plomb sâĂ©tait abattue sur le pays, pour couper court Ă toutes ces questions mais aussi pour se soustraire Ă la pression chaque jour plus forte quâexerçaient les dirigeants chinois afin quâil aplanisse ses diffĂ©rends avec les nouveaux maĂźtres de Phnom Penh, il choisit de se retirer en CorĂ©e du Nord[423].
Khieu SamphĂąn fut dĂ©pĂȘchĂ© Ă Pyongyang pour tenter de le convaincre de revenir Ă Phnom Penh. Outre la promesse dâun poste de chef de lâĂtat Ă vie[424], il lui annonça que son administration Ă PĂ©kin allait ĂȘtre dĂ©mantelĂ©e car elle nâavait plus de raison de demeurer Ă lâĂ©tranger. Finalement, Sihanouk sera accueilli avec les honneurs quand il arriva Ă lâaĂ©roport de Pochentong, le 9 septembre avec la princesse Monique. Pendant les quelques semaines qui sĂ©paraient son arrivĂ©e de son dĂ©part pour une tournĂ©e internationale, il affirmera avoir Ă©tĂ© traitĂ© avec dĂ©fĂ©rence et sâĂ©tonnera mĂȘme de voir les gardes khmers rouges utiliser le langage royal pour sâadresser Ă lui[425]. Au mois dâoctobre, comme prĂ©vu, Sihanouk quittait le Cambodge pour un pĂ©riple qui dĂ©butait par la Chine et la CorĂ©e du Nord, avant de se rendre Ă la tribune de l'ONU pour un discours oĂč il fustigeait lâimpĂ©rialisme amĂ©ricain et sa propagande qui tentait de discrĂ©diter le nouveau rĂ©gime mis en place Ă Phnom Penh. Le pĂ©riple diplomatique se poursuivait ensuite par la Roumanie, la Yougoslavie, lâAlbanie, lâIrak, la Syrie, le Soudan, la Tanzanie, Paris, oĂč il rencontra des Ă©tudiants khmers et enfin la Chine avant de regagner Phnom Penh le 31 dĂ©cembre. Toutefois, avant de rentrer, il prenait soin dâautoriser ses proches, sâils le dĂ©siraient, Ă ne pas le suivre et Ă sâexiler vers dâautres pays, ce que beaucoup feront[426].
En novembre, alors que ce pĂ©riple se poursuivait, les ambassadeurs du GRUNK â dont lâadjectif « royal » Ă©tait de plus en plus souvent omis â avaient Ă©tĂ© envoyĂ©s Ă Phnom Penh, « pour une session dâinformation et de formation ». La plupart disparaissaient ensuite au cours des purges khmĂšres rouges. En fait, les relations sâĂ©taient tendues bien avant[427]. Le 9 octobre, par exemple, un dĂ©but d'Ă©quipe gouvernementale avait Ă©tĂ© constituĂ©, avec Khieu SamphĂąn Ă sa tĂȘte, sans que Sihanouk, pourtant chef de lâĂtat, en soit informĂ©[428].
Le 31 dĂ©cembre, quand Sihanouk revint au Cambodge, le comitĂ© dâaccueil enthousiaste de septembre avait fait place Ă une foule lugubre Ăąnonnant des slogans de lâAngkar. Il regrettera quâon ne lui laisse avoir aucun contact avec les plus humbles de ses compatriotes quâil apercevait lors de ses rares sorties hors du palais royal. PrivĂ© de tout pouvoir, virtuellement prisonnier, il prĂ©sidait le 5 janvier 1976 le conseil des ministres qui promulgua officiellement la constitution du nouveau rĂ©gime, le KampuchĂ©a dĂ©mocratique[429].
Dans le mĂȘme temps, Ă PĂ©kin, Zhou Enlai Ă©tait dĂ©cĂ©dĂ© le 8 janvier, alors que Mao, qui avait toujours militĂ© pour un rapprochement entre les dirigeants khmers rouges et leur ancien monarque, Ă©tait affaibli par la maladie et allait sâĂ©teindre Ă son tour le 9 septembre. PrivĂ© de ses plus fidĂšles soutiens, rĂ©ticent Ă poursuivre un rĂŽle de figuration et de devoir cautionner une politique sur laquelle il nâavait aucune prise, lâidĂ©e de se retirer des affaires se faisait chaque jour plus pressante dans lâesprit de Sihanouk. La nomination par Ieng Sary de nouveaux ambassadeurs Ă PĂ©kin, Pyongyang, Vientiane et HanoĂŻ sans que le chef de lâĂtat soit ne fĂ»t-ce que consultĂ© offrit un prĂ©texte tout trouvĂ©. Le 10 mars, le prince faisait part de sa volontĂ© de dĂ©missionner. Les responsables du KampuchĂ©a dĂ©mocratique, tentĂšrent dâabord de l'en dissuader, mais le monarque resta inflexible. Finalement, la dĂ©cision sera acceptĂ©e et rendue publique le 2 avril 1976[430]. Le 6 avril, Penn Nouth remettait Ă son tour sa dĂ©mission, mettant un terme Ă l'existence du GRUNK[431].
La mise Ă lâĂ©cart (1976-1977)
Sihanouk, qui espĂ©rait mener lâexistence dâun gentleman-farmer Ă la retraite, Ă©ventuellement sâoccuper des relations publiques de son pays ou sâadonner Ă la rĂ©alisation de films, allait vite dĂ©chanter. En fait, il passera les quelques annĂ©es qui suivent comme un otage des Khmers rouges[432].
Peu aprĂšs sa dĂ©mission, les derniers membres de la famille royale encore Ă Phnom Penh furent envoyĂ©s dans des coopĂ©ratives en province. Dâautre part, Sihamoni et Narindrapong, les deux fils que Sihanouk avait eu avec Monique et qui poursuivaient leurs Ă©tudes Ă Pyongyang et Ă Moscou, furent invitĂ©s Ă venir participer aux cĂ©rĂ©monies devant cĂ©lĂ©brer le premier anniversaire de la chute de Phnom Penh, le 17 avril 1976 ; en fait, ils ne seront pas autorisĂ©s Ă repartir. Reclus dans une cage dorĂ©e, lâancien monarque devait se contenter de lâĂ©coute clandestine de radios Ă©trangĂšres telles la BBC, Voice of America ou Radio France internationale et sâadonner Ă la lecture des ouvrages en français et en anglais de la bibliothĂšque du palais royal[433].
Sur le plan extĂ©rieur, tout Ă©tait fait pour que Sihanouk disparaisse de la scĂšne internationale. En aoĂ»t, câest Khieu SamphĂąn, le nouveau chef de lâĂtat, qui partit reprĂ©senter le Cambodge au sommet des pays non alignĂ©s Ă Colombo[434]. Le 9 septembre 1976, Ă lâoccasion du dĂ©cĂšs de Mao Zedong, il rĂ©digeait une longue lettre Ă sa veuve Jiang Qing, mais la missive ne sera jamais transmise Ă sa destinataire. Il demandait Ă©galement Ă se rendre Ă lâambassade de Chine pour y signer le registre des condolĂ©ances, mais les dirigeants de Phnom Penh ne donnaient pas suite Ă la requĂȘte[435]. Plus personne nâayant de nouvelles de lâancien roi, le MarĂ©chal Tito demanda, par le biais de son ambassadeur au Cambodge, de confirmer quâil Ă©tait toujours en vie et nâavait pas Ă©tĂ© exĂ©cutĂ© comme le furent la plupart de ses partisans. Une voiture officielle vint chercher le diplomate yougoslave, lâamena devant le palais royal oĂč il put voir le prince dans les jardins et fut aussitĂŽt ramenĂ© Ă son ambassade sans avoir pu sâarrĂȘter ni lui parler[436].
Ă la fin de lâannĂ©e 1977, les tĂ©moignages sur la situation intĂ©rieure au Cambodge se multipliaient depuis les camps de rĂ©fugiĂ©s. Dans le mĂȘme temps, des accrochages sporadiques Ă la frontiĂšre vietnamienne se faisaient plus frĂ©quents et la version officielle dâactions incontrĂŽlĂ©es de cadres locaux devenait de moins en moins crĂ©dible. Tous ces faits altĂ©raient les sympathies dont avaient jusque-lĂ bĂ©nĂ©ficiĂ© le rĂ©gime khmer rouge, et, dâaprĂšs Sihanouk, ses conditions dâisolement sâamĂ©lioraient imperceptiblement. On lui demandait de rĂ©diger une lettre dans laquelle il louait les grandes rĂ©alisations du rĂ©gime et qui sera amplement diffusĂ©e. Il affirmera plus tard y avoir Ă©tĂ© contraint et craignait en cas de refus des reprĂ©sailles envers les membres de sa famille qui avaient Ă©tĂ© envoyĂ©s dans les coopĂ©ratives en province et dont il Ă©tait sans nouvelles depuis plus dâun an et demi[note 13] - [438].
Incidents Ă lâest (1978)
Au dĂ©but de 1978, Madame Deng Yingchao, veuve de Zhou Enlai et membre influente du Politburo du Parti communiste chinois, Ă©tait envoyĂ©e Ă Phnom Penh pour rĂ©affirmer le soutien de la Chine au rĂ©gime de Phnom Penh et mettre en garde le ViĂȘt Nam contre toute vellĂ©itĂ© dâaction militaire contre lâalliĂ© de PĂ©kin. Elle demanda Ă©galement Ă rencontrer Sihanouk, mais les responsables khmers rouges affirmaient que celui-ci Ă©tait occupĂ© par un dĂ©placement en province. En fait, dâaprĂšs le monarque, le « dĂ©placement » en question nâavait durĂ© quâune demi-journĂ©e et, sur le chemin du retour, devant lâinsistance de lâenvoyĂ©e chinoise, les dirigeants le firent passer en voiture devant elle sans sâarrĂȘter, mais en apportant la preuve que le prince, sa derniĂšre femme et leurs deux enfants Ă©taient toujours en vie[439].
La mise en garde chinoise, loin de calmer le jeu, allait au contraire amorcer une escalade. En janvier 1978, Harold Brown, le secrĂ©taire dâĂtat Ă la DĂ©fense amĂ©ricain, se rendait Ă PĂ©kin pour initier ce qui deviendra de fait une alliance contre lâURSS. Le ViĂȘt Nam, de son cĂŽtĂ©, tentait de parer la menace en se rapprochant de Moscou et adhĂ©rait au Comecon. Zbigniew BrzeziĆski, le conseiller Ă la dĂ©fense du prĂ©sident Jimmy Carter, sera le premier Ă Ă©voquer une guerre par procuration qui se prĂ©parait entre les deux puissances communistes[440].
Dans le mĂȘme temps, Ă lâest du pays, de nombreux Cambodgiens profitaient des incursions vietnamiennes pour fuir de lâautre cĂŽtĂ© de la frontiĂšre. Parmi eux, des Ă©lĂ©ments de lâarmĂ©e khmĂšre rouge qui voulaient Ă©chapper aux purges allaient fonder, avec le patronage de HanoĂŻ, le Front uni national pour le salut du KampuchĂ©a (FUNSK) dont les buts avouĂ©s Ă©taient de renverser le rĂ©gime de Pol Pot et de rĂ©tablir un Cambodge tel quâil Ă©tait « du temps de Sihanouk ». En fait, bien que toujours privĂ© de tout pouvoir, lâaura de lâancien souverain grossissait au grĂ© des Ă©vĂ©nements. Les dirigeants khmers rouges multipliaient ses voyages en province afin de lui montrer les rĂ©alisations du rĂ©gime, tout en prenant soin de ne pas le laisser se mĂȘler aux populations locales[441].
Dans le courant de lâannĂ©e 1978, le prince fut invitĂ© Ă quitter « provisoirement » le palais royal pour une villa proche, officiellement pour permettre des travaux de rĂ©novation. En fait, il semble que ce dĂ©mĂ©nagement Ă©tait motivĂ© par lâinterception dâun commando vietnamien qui dĂ©sirait enlever Sihanouk et le ramener de lâautre cĂŽtĂ© de la frontiĂšre oĂč il aurait pu apporter son soutien au FUNSK. La nouvelle rĂ©sidence, avec ses Ă©pais murs dâenceinte et sa lourde porte en fer Ă©tait en fait plus facile Ă garder[442].
Toujours dans le but dâamĂ©liorer lâimage du rĂ©gime Ă lâextĂ©rieur, Sihanouk et sa femme Ă©taient invitĂ©s le 28 septembre Ă un diner officiel avec la plupart des dirigeants du KampuchĂ©a dĂ©mocratique et auquel Ă©tait Ă©galement conviĂ© Penn Nouth et son Ă©pouse. Les hĂŽtes se montrĂšrent plein dâattentions pour leur ancien souverain, regrettant que de par lâĂ©loignement de leurs coopĂ©ratives, les autres membres de la famille royale nâaient pu se joindre au banquet ; en fait, ils Ă©taient tous dĂ©jĂ morts depuis plus de deux ans. Un tableau pour le moins optimiste de la situation du pays fut dressĂ© Ă lâintention des convives et Sihanouk fut priĂ© dâindiquer les provinces quâil dĂ©sirait visiter pour quâon lui prĂ©pare ses dĂ©placements. Des photos furent prises et envoyĂ©es Ă la presse occidentale, afin de faire croire que lâalliance nĂ©e du FUNK Ă©tait toujours dâactualitĂ©[443]. En cette fin dâannĂ©e 1978, lâinvasion vietnamienne semblait par contre inĂ©luctable. La Chine de son cĂŽtĂ© rĂ©affirmait son soutien au rĂ©gime de Phnom Penh et Deng Xiaoping entreprenait une tournĂ©e des pays de lâASEAN afin de se trouver des alliĂ©s pour dĂ©noncer lâexpansionnisme vietnamien. La mesure la plus marquante fut certainement lâannonce faite Ă Bangkok de faire cesser lâaide chinoise Ă la guĂ©rilla communiste thaĂŻlandaise en Ă©change de lâappui du gouvernement du gĂ©nĂ©ral Kriangsak au rĂ©gime khmer rouge. HanoĂŻ, pour sa part, obtenait une aide militaire et logistique massive de Moscou[444]. Sihanouk, tenu au courant des Ă©vĂšnements qui se prĂ©paraient par lâĂ©coute clandestine des radios Ă©trangĂšres, notait non sans ironie que plus la situation militaire empirait, plus le contenu de son rĂ©frigĂ©rateur sâamĂ©liorait. Lâoffensive Ă©tait finalement lancĂ©e le 25 dĂ©cembre[445].
Le 1er janvier 1979, alors que les Vietnamiens Ă©taient Ă Kampong Cham, ordre fut donnĂ© de convoyer Penn Nouth et lâancien monarque dans lâouest du pays et de les faire passer en ThaĂŻlande au moindre danger. Le 2, un nouveau commando chargĂ© dâenlever Sihanouk Ă©tait interceptĂ©. Le 3, Khieu SamphĂąn rejoignait le prince et son ancien Premier ministre Ă Sisophon ; il les informait que la situation sâamĂ©liorait et quâils pourraient revenir dans la capitale dĂšs le lendemain, mais pour repartir aussitĂŽt Ă lâĂ©tranger, dĂ©fendre la cause du KampuchĂ©a dĂ©mocratique, Sihanouk Ă la tribune de lâO.N.U., Penn Nouth dans une tournĂ©e auprĂšs des « pays amis ». Lâancien et futur monarque affirmera par la suite avoir hĂ©sitĂ© sur la conduite Ă tenir. En acceptant la mission, il allait apporter son soutien Ă ses bourreaux; en refusant, il avalisait lâoccupation du Cambodge par lâennemi hĂ©rĂ©ditaire vietnamien. Dans le premier cas, il aurait Ă subir des critiques de la communautĂ© internationale ; dans le second, il devrait essuyer les reproches de ses compatriotes[446].
De retour Ă Phnom Penh le 5, il fut conviĂ© le jour mĂȘme Ă un entretien, avec Pol Pot. Celui-ci lui confirmait la mission qu'on dĂ©sirait lui confier et lui dressait un nouveau tableau optimiste de la situation militaire, affirmant notamment que lâavance fulgurante des BĂŽ DĂŽi Ă©tait due Ă un repli stratĂ©gique destinĂ© ensuite Ă prendre l'adversaire en tenaille. Enfin, il fut confirmĂ© Ă Sihanouk quâil allait partir le lendemain avec son entourage pour PĂ©kin, dâoĂč il pourrait rallier le siĂšge de l'ONU. Le 6 janvier, comme prĂ©vu, lâancien monarque quittait le Cambodge oĂč il Ă©tait assignĂ© Ă rĂ©sidence depuis plus de deux ans, pour un nouvel exil d'une dĂ©cennie. Il sera logĂ© provisoirement Ă la citĂ© des invitĂ©s de marque, lâancienne lĂ©gation française qui lui avait Ă©tĂ© allouĂ©e Ă©tant en reconstruction Ă la suite d'un tremblement de terre[447].
Le 7 janvier 1979, les premiers blindĂ©s vietnamiens pĂ©nĂ©traient dans Phnom Penh dĂ©sertĂ©e par ses dĂ©fenseurs. Quatre jours plus tard, le rĂ©gime pro-vietnamien de la RĂ©publique populaire du KampuchĂ©a Ă©tait proclamĂ©, avec Heng Samrin comme prĂ©sident[448]. Le 8, une confĂ©rence de presse Ă©tait organisĂ©e Ă PĂ©kin devant un parterre de journalistes occidentaux et chinois. Si le but Ă©tait de dĂ©noncer lâinvasion vietnamienne, trĂšs vite les questions sâorientaient sur la nature du rĂ©gime khmer rouge dont Sihanouk se retrouvait de facto le reprĂ©sentant et devait rĂ©pondre aux nombreuses questions restĂ©es sans rĂ©ponses depuis trois ans. La rĂ©union prĂ©vue pour durer deux heures, sâĂ©ternisera six heures et le prince en sortit trĂšs Ă©prouvĂ©[449]. Le 11 janvier, Sihanouk se rendait Ă New York oĂč il prononça un discours condamnant lâintervention vietnamienne. Le 13, le rĂ©gime khmer rouge Ă©tait confirmĂ© comme seul reprĂ©sentant valide du Cambodge et le conseil de sĂ©curitĂ© adoptait une rĂ©solution exigeant le retrait immĂ©diat de toute troupe Ă©trangĂšre du sol khmer[450].
Dans le mĂȘme temps, Norodom Sihanouk Ă©chappait Ă la surveillance de ses gardes du corps et disparaissait. En fait, il avait demandĂ© lâasile politique aux Ătats-Unis et Ă la France ; les autoritĂ©s amĂ©ricaines refusaient alors que celles de Paris posaient des exigences draconiennes, demandant notamment Ă lâancien monarque de sâabstenir de toute activitĂ© politique. Finalement, il dĂ©cidait de rentrer en Chine et dâhonorer lâinvitation de Deng Xiaoping qui, dĂšs son arrivĂ©e de Phnom Penh, avait offert de lâhĂ©berger sans conditions[451].
La retraite provisoire (7 janvier 1979)
De nos jours encore, il est difficile de dĂ©terminer quel pouvaient ĂȘtre les intentions de Norodom Sihanouk Ă cet instant. DâaprĂšs Jean-Marie CambacĂ©rĂšs, il pensait qu'Ă la suite de la rĂ©solution onusienne, lâintervention vietnamienne serait de courte durĂ©e. Croyait-il alors que le retour au pouvoir des partisans de Pol Pot rendus impopulaires par leurs nombreux crimes serait lui aussi Ă©phĂ©mĂšre et quâalors il aurait sa carte Ă jouer ? Si tant est que le prince ait pu le supposer, les faits allaient rapidement le dĂ©mentir. Sur place, au moins au dĂ©but, les BĂŽ DĂŽi Ă©taient plutĂŽt accueillis comme des libĂ©rateurs que comme des envahisseurs. De plus, au fur et Ă mesure que le pays se libĂ©rait du contrĂŽle khmer rouge, la plupart des rumeurs concernant lâampleur des exactions commises pendant le KampuchĂ©a dĂ©mocratique sâavĂ©raient en dessous de la vĂ©ritĂ©[452]. Dans ce contexte, les gouvernements occidentaux avaient de plus en plus de mal Ă justifier auprĂšs de leurs opinions le soutien quâils accordaient aux responsables de massacres de masse au nom du respect de lâintĂ©gritĂ© territoriale d'un pays que beaucoup auraient eu du mal Ă situer sur une carte[453].
De son cĂŽtĂ©, depuis sa rĂ©sidence de PĂ©kin, Norodom Sihanouk multipliait les rĂ©ceptions de diplomates et de journalistes Ă©trangers. Lors de ces entrevues, il ne se gĂȘnait pas pour faire part de sa satisfaction de voir le rĂ©gime khmer rouge dĂ©fait, tout en restant fermement opposĂ© au gouvernement de la RĂ©publique populaire du KampuchĂ©a mis en place par les autoritĂ©s de HanoĂŻ[454].
Les dirigeants chinois, peut-ĂȘtre inquiets que lâĂ©mergence dâune troisiĂšme force puisse conduire Ă la mise hors jeu de leurs poulains khmers rouges, tentĂšrent de rĂ©concilier Sihanouk avec ces derniers et de recrĂ©er lâalliance du FUNK avec le prince Ă sa tĂȘte. Celui-ci refusa et, pour couper court Ă toute nouvelle tractation, dĂ©cidait de partir Ă Pyongyang, oĂč il sĂ©journera de mai Ă septembre[455].
La situation de la rĂ©sistance anti-vietnamienne Ă©volua quelque peu Ă la fin de 1979. Câest dâabord en aoĂ»t Kong Sileah, un ancien capitaine de la marine de la RĂ©publique khmĂšre qui crĂ©ait le Mouvement pour la libĂ©ration nationale du KampuchĂ©a (MOLINAKA), un rassemblement de combattants qui se dĂ©claraient sihanoukistes et demandaient lâaide de lâancien monarque qui, de par sa position en retrait ne pouvait compter sur le soutien dâaucune grande puissance[456]. Les responsables khmers rouges quant Ă eux, sur lâinsistance de leurs protecteurs chinois, rĂ©organisaient leur mouvement pour le rendre plus prĂ©sentable. En septembre, Khieu SamphĂąn, quâon tenta de prĂ©senter comme un modĂ©rĂ©, prenait la tĂȘte d'un nouvel organisme tenant lieu de gouvernement en exil, le Front de la grande union nationale dĂ©mocratique patriotique du KampuchĂ©a (FGUNDPK) ; Pol Pot se contentait pour sa part du rĂŽle plus discret de commandant des forces armĂ©es et ne faisait plus aucune apparition publique Ă partir de 1980[457].
En octobre, câĂ©tait au tour de Son Sann, un ancien Premier ministre du Sangkum, de fonder le Front national de libĂ©ration du peuple khmer (FLNPK), une autre force de rĂ©sistance contre la RĂ©publique populaire du KampuchĂ©a, par contre ouvertement anti-communiste, ce qui lui valut le soutien rapide des Ătats-Unis et dâanciens rĂ©publicains khmers rĂ©fugiĂ©s Ă l'Ă©tranger[458].
La Chine et les diffĂ©rents pays de lâASEAN, inquiets de voir la rĂ©sistance quâils soutenaient se diviser, reprirent contact avec Sihanouk afin de le persuader de prendre la tĂȘte dâune coalition de ces diverses composantes. Il a Ă©galement Ă©tĂ© affirmĂ© que les Ătats-Unis auraient eux-mĂȘmes appuyĂ© en sous-main lâinitiative[459]. Deng Xiaoping fit toutefois remarquer au prince quâune telle alliance ne pouvait se faire sans les reprĂ©sentants du KampuchĂ©a dĂ©mocratique, seule instance reconnue par les Nations unies. Finalement, Sihanouk se laissa convaincre et accepta le principe de tractations avec les reprĂ©sentants khmers rouges[460].
Toutefois, il y avait encore loin de la coupe aux lĂšvres. Les discussions sâĂ©ternisaient entre des parties qui nâavaient aucune affinitĂ© mais devaient faire mine de coopĂ©rer pour ne pas froisser leurs commanditaires. Ce poker menteur oĂč chacun espĂ©rait un faux pas de lâautre qui aurait donnĂ© une occasion de rompre les nĂ©gociations se poursuivit pendant toute lâannĂ©e 1980[461]. AprĂšs plusieurs demandes chinoises, Sihanouk se rĂ©solvait Ă rencontrer Khieu SamphĂąn Ă Pyongyang le 8 fĂ©vrier 1981 en vue de discuter des modalitĂ©s dâun ralliement. Mais en mars, au lieu dâaffirmer sa volontĂ© dâentrer dans une coalition, le prince crĂ©ait sa propre formation, le Front uni national pour un Cambodge indĂ©pendant, neutre, pacifique et coopĂ©ratif (FUNCINPEC)[462].
Le 3 aoĂ»t 1981, alors quâil passait lâĂ©tĂ© en France, il reçut la visite de Son Sann dans sa villa de Mougins. Ils y discutĂšrent des modalitĂ©s dâune alliance entre leurs deux formations. Peu aprĂšs, le 4 septembre, ils se retrouvaient Ă Singapour avec Khieu SamphĂąn et agrĂ©Ăšrent la crĂ©ation dâun gouvernement de coalition contre le rĂ©gime mis en place Ă Phnom Penh[463].
Les tractations (1982-1986)
DâĂąpres nĂ©gociations sâengageaient alors, concernant les postes Ă pourvoir et la politique Ă mener. Sihanouk et Sonn San se laissĂšrent convaincre d'adoucir leurs positions par une promesse chinoise dâaide militaire Ă leurs deux formations ; Khieu SamphĂąn acceptait de son cĂŽtĂ© le principe du multipartisme pour le Cambodge dâaprĂšs-guerre mais refusait celui de dĂ©sarmer lâarmĂ©e khmĂšre rouge une fois la victoire acquise[464]. Finalement, le Gouvernement de Coalition du KampuchĂ©a dĂ©mocratique (en) (GCKD) voyait officiellement le jour le 22 juin 1982, lors de la rĂ©union des trois composantes de la rĂ©sistance Ă Kuala Lumpur. Norodom Sihanouk en Ă©tait le chef de lâĂtat, Sonn San le Premier ministre et Khieu SamphĂąn le vice-Premier ministre chargĂ© des affaires Ă©trangĂšres[465]. En fait, sur le terrain, les forces des anciens dirigeants du KampuchĂ©a dĂ©mocratique restaient les mieux armĂ©es et les mieux prĂ©parĂ©es alors que lâimportance des deux autres factions Ă©tait surĂ©valuĂ©e et servait surtout de caution Ă ceux qui condamnaient lâintervention vietnamienne mais ne voulaient pas apparaĂźtre comme des soutiens Ă Pol Pot[466].
Les annĂ©es qui suivront seront marquĂ©es par des batailles diplomatiques entre Sihanouk et le jeune ministre des Affaires Ă©trangĂšres de la rĂ©publique populaire du KampuchĂ©a, un certain Hun Sen, en vue de rallier des gouvernements Ă©trangers Ă leurs causes et dâobtenir leur soutien auprĂšs de lâONU[467]. Ă cette Ă©poque, dans une interview quâil accorda Ă William Shawcross, Sihanouk tenta de justifier son alliance avec ses anciens bourreaux, qui, « en dĂ©pit de ses violations des droits humains, est le seul gouvernement authentique du Cambodge. Il est nĂ© de la rĂ©sistance populaire aux Ătats-Unis et Ă Lon Nol. Si je luttais contre lui, je serai un traĂźtre. (âŠ) Pour lâavenir, nous verrons. Si nous ne trouvons pas rapidement une solution, les Vietnamiens sâinstalleront pour toujours au Cambodge »[468].
En 1985, alors que sur le terrain aucun des deux camps nâĂ©tait en mesure de lâemporter sur lâautre, plusieurs Ă©vĂ©nements allaient se rĂ©vĂ©ler des signes, alors imperceptibles mais avant-coureurs, favorables Ă un compromis. Le plus important sera lâaccession au pouvoir Ă Moscou de MikhaĂŻl Gorbatchev qui devant lâĂ©tat de lâĂ©conomie soviĂ©tique, se verra contraint de rĂ©duire lâaide accordĂ©e aux pays Ă©trangers et par ricochet, celle du ViĂȘt Nam Ă Phnom Penh[469]. Au mĂȘme moment, la nomination de Hun Sen au poste de Premier ministre semblait dĂ©couler dâun changement dâattitude Ă HanoĂŻ qui dĂ©cidait de promouvoir une nouvelle gĂ©nĂ©ration de dirigeants qui leur seraient moins soumis mais plus Ă mĂȘme de gouverner seul le pays tout en sâopposant Ă un retour du rĂ©gime khmer rouge aux affaires et sans contribuer Ă crĂ©er des troubles au sud du ViĂȘt Nam[470]. Du cĂŽtĂ© khmer rouge, Pol Pot dĂ©missionnait de son poste de chef des armĂ©es au profit de Son Sen. Ce changement Ă©tait prĂ©sentĂ© comme une volontĂ© de se conformer Ă une des conditions posĂ©e par le pouvoir de Phnom Penh pour ouvrir des pourparlers. Toutefois, peu dâobservateurs seront dupes du stratagĂšme ; en fait il semble que ce changement Ă©tait surtout dictĂ© par les problĂšmes de santĂ© de lâancien Premier ministre du KampuchĂ©a dĂ©mocratique qui se fera hospitaliser pendant un an Ă PĂ©kin[471]. En mars 1986, les pays de lâASEAN Ă©voquaient quant Ă eux pour la premiĂšre fois leur volontĂ© dâinclure la rĂ©publique populaire du KampuchĂ©a dans des pourparlers[472].
Les accords en vue (1987-1991)
Pendant ce temps, Sihanouk recevait Ă©galement une aide financiĂšre et militaire limitĂ©e des Ătats-Unis, dans le cadre de la doctrine Reagan, consistant Ă contrer les influences des pays prosoviĂ©tiques Ă lâĂ©tranger. Michael Johns, un des principaux dĂ©fenseurs de cette doctrine, visita les forces sihanoukistes Ă la frontiĂšre thaĂŻe en 1987 et, de retour Ă Washington, demandait dâaccroitre lâaide aux partisans de Sihanouk et de Son Sann[473].
Le 7 mai 1987, afin de reprendre une certaine libertĂ© vis-Ă -vis des autres composantes de la rĂ©sistance, Sihanouk dĂ©missionnait de ses fonctions au sein du GCKD. En aoĂ»t, le gouvernement de Phnom Penh proposait dâinclure les membres de la rĂ©sistance « Ă lâexception de la faction khmĂšre rouge » dans un gouvernement dâunion nationale. La voie vers des nĂ©gociations Ă©tait ouverte et le 3 dĂ©cembre, une rencontre entre Hun Sen et lâancien monarque eu lieu en France, Ă FĂšre-en-Tardenois, puis une seconde Ă Saint-Germain-en-Laye les 20 et 21 janvier 1988. Si ces entrevues ne dĂ©bouchĂšrent sur aucun rĂ©sultat probant, elles permirent nĂ©anmoins aux deux protagonistes de se rencontrer et dâĂ©changer leurs points de vue. Peu aprĂšs, de nouvelles conversations Ă©taient organisĂ©es Ă lâinitiative des pays de lâAssociation des nations de l'Asie du Sud-Est ; il sâagira des Jakarta Informal Meetings (« RĂ©unions informelles de Jakarta ») (JIM) qui eurent lieu prĂšs de la capitale indonĂ©sienne[note 14] en juillet 1988 et fĂ©vrier 1989 et qui rĂ©unirent des reprĂ©sentants des autoritĂ©s de Phnom Penh et des trois mouvements de rĂ©sistance. Si lĂ aussi, les conversations ne dĂ©bouchĂšrent sur aucun accord, elles dĂ©montrĂšrent quâune solution nĂ©gociĂ©e Ă©tait possible[475].
En juin 1989, Ali Alatas (en), le ministre indonĂ©sien des affaires Ă©trangĂšres indonĂ©sien est reçu Ă Paris par son homologue français, Roland Dumas. La question cambodgienne fut naturellement Ă©voquĂ©e durant les entretiens et les deux interlocuteurs convenaient de coordonner leurs actions respectives et dâorganiser conjointement une confĂ©rence de paix quâils espĂ©raient tenir Ă Paris le 30 juillet[476]. Une entrevue prĂ©paratoire se tenait Ă la Celle-Saint-Cloud le 24 juillet entre Hun Sen et Sihanouk, mais elle se solda par un Ă©chec. Le Premier ministre de la rĂ©publique populaire du KampuchĂ©a reprochait Ă lâancien monarque de s'abriter derriĂšre le gouvernement de coalition pour revenir sur ses engagements alors que ce dernier, dans le style imagĂ© qui le caractĂ©risait, dĂ©clarait aux journalistes quâils ne sâĂ©taient entendus sur rien, « sauf sur la qualitĂ© de la cuisine sino-cambodgienne ». Le lendemain, les deux autres formations cambodgiennes se joignaient aux discussions mais ne permettaient pas de rĂ©gler les diffĂ©rends apparus la veille[477]. La confĂ©rence se tenait nĂ©anmoins comme prĂ©vu une semaine plus tard avec les reprĂ©sentants de 19 pays et organisations[note 15] dont James Baker, Edouard Chevardnadze, Geoffrey Howe, Qian Qichen ou Javier PĂ©rez de CuĂ©llar. Comme les discussions prĂ©liminaires lâavaient laissĂ© prĂ©sager, aucun accord ne fut trouvĂ©, mais la voie dâun rĂšglement Ă©tait plus que jamais tracĂ©e[478].
Afin de faciliter les nĂ©gociations de paix, le ViĂȘt Nam annonçait, le 26 mai 1988, que toutes ses forces auront quittĂ© le Cambodge en mars 1990. En aoĂ»t de la mĂȘme annĂ©e, la Chine approuvait un plan de Sihanouk qui proposait d'installer au Cambodge, aprĂšs le cessez-le-feu, une force internationale ; PĂ©kin acceptait de ne plus soutenir la rĂ©sistance cambodgienne en Ă©change d'un calendrier de retrait prĂ©cis. Le ViĂȘt Nam concĂ©dait en contrepartie de se retirer dĂšs septembre 1989 : le 5 avril 1989, le retrait unilatĂ©ral et sans conditions de l'armĂ©e vietnamienne Ă©tait confirmĂ©[note 16]. La RĂ©publique populaire du KampuchĂ©a, dont la lĂ©gitimitĂ© en tant qu'interlocuteur avait Ă©tĂ© reconnue par toutes les parties en prĂ©sence, procĂ©dait Ă la fin du mois d'avril Ă une rĂ©vision constitutionnelle dans le but de sĂ©duire les sihanoukistes : le rĂ©gime adoptait pour le pays le nouveau nom officiel d'Ătat du Cambodge, modifiait son drapeau et son hymne national, et se proclamait « neutre, pacifique et non alignĂ© ». Le bouddhisme theravÄda Ă©tait dĂ©clarĂ© religion nationale et la constitution incluait des garanties quant Ă la propriĂ©tĂ© privĂ©e et aux droits de l'homme[480].
Peu aprĂšs, en novembre, la chute du mur de Berlin marquait aussi la fin du communisme Ă la soviĂ©tique et de lâaide au ViĂȘt Nam. Le camp occidental se trouvait paradoxalement privĂ© de sa raison principale de soutenir la guĂ©rilla et la Chine avait moins dâintĂ©rĂȘt Ă aider des alliĂ©s khmers rouges encombrants et difficiles Ă gĂ©rer[481].
Sur le terrain, les accrochages entre les diffĂ©rentes factions se multipliaient ; chacun tentait de renforcer sa position avant des accords qui nâavaient jamais semblĂ© aussi proches[482]. Il faudra attendre prĂšs dâune annĂ©e pour quâĂ lâoccasion dâun troisiĂšme JIM, les 9 et 10 septembre 1990, soit Ă©laborĂ© le projet dâun Conseil National SuprĂȘme (CNS) qui deviendrait le reprĂ©sentant officiel du Cambodge Ă lâinternational ; il Ă©tait composĂ© de 2 membres de chaque faction de la rĂ©sistance et de 6 reprĂ©sentant du gouvernement de Phnom Penh. Le projet est approuvĂ© le 26 novembre 1990 par les cinq membres permanents du Conseil de sĂ©curitĂ©[483]. Les quatre parties se retrouvaient les 24 et 25 juin 1991 Ă Pattaya en ThaĂŻlande et acceptaient la mise sous tutelle internationale du Cambodge jusquâĂ la tenue dâĂ©lections organisĂ©es sous lâĂ©gide dâune autoritĂ© provisoire des Nations unies qui sera lâAPRONUC[484]. Le 17 juillet 1991, Ă PĂ©kin, lâensemble des factions se mettaient dâaccord pour choisir Sihanouk comme prĂ©sident du CNS[485].
Une réconciliation toujours difficile (1991-1992)
Une nouvelle rĂ©union eut lieu Ă New York en septembre en prĂ©sence des membres permanents du Conseil de sĂ©curitĂ© des Nations unies pour rĂ©gler les derniers dĂ©tails et il fut convenu de se retrouver Ă Paris le 23 octobre pour la signature des accords[486]. Les 17 et 18 octobre, au cours dâun congrĂšs extraordinaire, le Parti rĂ©volutionnaire du peuple du KampuchĂ©a, la formation du pouvoir de Phnom Penh, opĂ©rait les changements nĂ©cessaires pour participer Ă des Ă©lections ; il abandonnait toute rĂ©fĂ©rence au marxisme-lĂ©ninisme, adoptait le multipartisme et lâĂ©conomie de marchĂ©. Enfin, il prenait le nom de Pracheachon, traduit en français par Parti du peuple cambodgien quâutilisait dĂ©jĂ la vitrine officielle du parti communiste du KampuchĂ©a dans les annĂ©es 1950 et 1960[487].
Les quatre factions se rĂ©unissaient finalement Ă Paris comme prĂ©vu du 21 au 23 octobre, au centre de confĂ©rences de lâavenue KlĂ©ber avec les reprĂ©sentants des pays et organisations dĂ©jĂ prĂ©sents le 30 juillet 1989. Les accords de Paris sur le Cambodge signĂ©s comportaient quatre textes et une annexe et Ă©taient censĂ©s mettre un terme Ă prĂšs de vingt ans de crise au Cambodge[488].
Le 14 novembre 1991, Sihanouk put enfin rentrer au Cambodge. La rĂ©ception triomphale qui lâattendait avait peu Ă voir avec son dĂ©part de 1979 dans le dernier avion chinois quittant Phnom Penh en catimini. Une foule immense sâĂ©tait amassĂ©e le long du trajet entre lâaĂ©roport et le palais royal fraĂźchement rĂ©novĂ©. Lâaccueil nâĂ©tait pas sans rappeler les heures de gloire du Sangkum et il ne faisait de doute pour beaucoup que ce retour signifiait Ă©galement celui de cette pĂ©riode qui Ă cause des Ă©preuves subies depuis, avait Ă©tĂ© idĂ©alisĂ©e[489].
Au Cambodge, lâapplication des accords de Paris dĂ©butait. Une mission prĂ©paratoire des Nations unies (la MIPRENUC) avait Ă©tĂ© crĂ©Ă©e dĂšs le 16 octobre pour faciliter la mise en place de lâAPRONUC, qui ne verra le jour que le 28 fĂ©vrier 1992 et dont le dĂ©ploiement dĂ©butera le 15 mars avec les arrivĂ©es dans la capitale du Japonais Yasushi Akashi, reprĂ©sentant spĂ©cial du secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral des Nations unies, du lieutenant-gĂ©nĂ©ral australien John Sanderson, commandant en chef des forces armĂ©es et du premier contingent[490].
TrĂšs vite, des dissensions apparaissaient entre les factions qui avaient chacune leur interprĂ©tation de textes restĂ©s volontairement vagues pour arriver Ă un consensus. Le FLNPK (Son Sann) et le FUNCINPEC (Norodom Ranariddh) attendaient ainsi que soit limitĂ©e lâinfluence du PPC (Hun Sen) et des partisans de Khieu SamphĂąn qui Ă©taient de fait les deux principales forces sur place ; le parti de Hun Sen espĂ©rait pour sa part la dissolution de lâarmĂ©e khmĂšre rouge alors que cette derniĂšre comptait bien assister au dĂ©mantĂšlement de lâadministration hĂ©ritĂ©e de la rĂ©publique populaire du KampuchĂ©a[491]. Les Nations unies, de leur cĂŽtĂ©, et vue les sommes engagĂ©es, ne pouvaient se permettre un Ă©chec[492] ; trĂšs vite ses responsables se contentĂšrent de minimiser la portĂ©e des embĂ»ches auxquelles Ă©tait confrontĂ© leur personnel sur le terrain[493].
Le manquement le plus grave sera provoquĂ© par le camp khmer rouge qui dĂšs le dĂ©part refusera, au besoin par les armes, lâaccĂšs des zones sous son contrĂŽle Ă la MIPRENUC puis Ă lâAPRONUC[494].
Au milieu de tout cela, Norodom Sihanouk, en tant que prĂ©sident du CNS, se devait de gĂ©rer les situations inextricables issues de ces ambiguĂŻtĂ©s, mais Ă partir de septembre 1992, il fit des sĂ©jours de plus en plus frĂ©quents Ă PĂ©kin, officiellement pour y suivre un traitement mĂ©dical[495]. Afin de ne pas compromettre la mission onusienne, Yasushi Akashi, le responsable de l'autoritĂ© des Nations unies, organisait, avec lâaccord du prince, des sessions de travail Ă Phnom Penh auxquelles participaient les quatre factions cambodgiennes, mais il nâavait pas le charisme de lâancien monarque pour faire valider les dĂ©cisions qui sâimposaient[496].
Le 20 décembre 1992, afin de satisfaire à la volonté de Norodom Sihanouk de se présenter « au-dessus des partis », le CNS acceptait d'accueillir un treiziÚme membre, à savoir Sam Rainsy comme représentant supplémentaire du FUNCINPEC[497].
Le long chemin vers la constitution (1993)
Le 4 janvier 1993, invoquant la recrudescence des actes de violence contre les bureaux et le personnel de partis politiques, essentiellement le FUNCINPEC (royalistes) et le FLNPK (Son Sann), et qui Ă©tait principalement l'Ćuvre de membres des administrations locales proches du Parti du peuple cambodgien, le prince annonçait au reprĂ©sentant spĂ©cial quâil ne pouvait plus coopĂ©rer avec lâAPRONUC et le gouvernement du Cambodge[498]. Yasushi Akashi prenait alors des mesures afin de renforcer le pouvoir des troupes internationales dans la lutte contre les crimes aussi bien politiques qu'ethniques et les prĂ©sentait Ă l'ancien monarque. Sihanouk sâĂ©tait Ă©galement ravisĂ© et profita dâune rĂ©union du CNS, le 28 janvier Ă PĂ©kin pour exprimer publiquement son soutien Ă lâAPRONUC et au respect des accords de Paris. Lors de cette rĂ©union, le prince publia en son nom et en celui des membres du conseil appartenant au FUNCINPEC, au FLNPK de Son Sann et au Parti du peuple cambodgien, un communiquĂ© condamnant la violence contre les Cambodgiens et les personnes Ă©trangĂšres[499].
En mars 1993, alors que la situation sâĂ©tait Ă nouveau enlisĂ©e et que l'APRONUC ne semblait pas en mesure de rĂ©gler la crise, lâancien (et futur) monarque dĂ©cida de convoquer une confĂ©rence des quatre parties cambodgiennes en vue de former un « gouvernement provisoire de rĂ©conciliation nationale ». Devant le manque dâenthousiasme de « certaines puissances occidentales et certains groupes khmers », il renoncera (pour un temps) Ă aller plus avant dans cette dĂ©marche[500].
De son cĂŽtĂ©, le Parti du KampuchĂ©a dĂ©mocratique (PKD), nom quâavait pris la formation khmĂšre rouge, aprĂšs une sĂ©rie de manĆuvres dilatoires, annonçait officiellement au CNS le 4 avril 1993 sa dĂ©cision de ne pas participer aux Ă©lections qui devaient se tenir en mai. Le 13 du mĂȘme mois, Khieu SamphĂąn Ă©crira au prince Sihanouk que son parti ne participerait plus Ă©galement aux rĂ©unions du CNS Ă Phnom Penh et quittait temporairement la ville[501].
Durant sa visite au Cambodge, Boutros Boutros-Ghali lança le 7 avril, un appel urgent pour que cesse la violence, notamment contre les forces internationales[502]. Norodom Sihanouk, de son cĂŽtĂ©, recevait le secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral des Nations unies en audience et lui confirmait son intention de continuer Ă diriger le CNS jusquâĂ la mise en place dâune nouvelle constitution et quâil souhaitait coopĂ©rer avec lâAPRONUC « avant, pendant et aprĂšs les Ă©lections ». Il proposait Ă©galement de mettre Ă la disposition de Boutros Boutros-Ghali le palais royal pour une confĂ©rence de presse[503]. Enfin il lança une proclamation dans laquelle il exhortait ses compatriotes Ă refrĂ©ner leurs actes de violence Ă lâencontre du personnel onusien. Sa dĂ©claration fut approuvĂ©e par le gouvernement de Phnom Penh, le FLNK et le FUNCINPEC (royalistes) alors que le PKD, principale formation visĂ©e par les accusations, restait silencieux[504].
La campagne Ă©lectorale dĂ©butait peu aprĂšs le dĂ©part de Boutros Boutros-Ghali. Rapidement deux partis se dĂ©tachaient, Ă savoir le FUNCINPEC (Norodom Ranariddh) qui bĂ©nĂ©ficiait de lâaura de Sihanouk mais souffrait du manque dâimplantation de ses cadres sur le terrain et le PPC (Hun Sen) qui au contraire pouvait compter sur lâappui des administrations locales acquises Ă sa cause, mais qui avait du mal Ă faire oublier quâil avait Ă©tĂ© mis au pouvoir par lâarmĂ©e vietnamienne[505].
Aux Ă©lections de mai, et ce en dĂ©pit des menaces khmĂšres rouges de perturber le scrutin, plus de 4 millions de Cambodgiens, soit environ 90 % des personnes susceptibles de voter, se rendaient aux urnes pour choisir parmi les vingt partis en lice[note 17] - [507]. Le FUNCINPEC du Prince Norodom Ranariddh, profitant notamment du souvenir quâavait laissĂ© la pĂ©riode oĂč Sihanouk dirigeait les destinĂ©es du pays, arrivait en tĂȘte devant le Parti du peuple cambodgien du Premier ministre sortant Hun Sen ; le Parti libĂ©ral dĂ©mocratique bouddhiste de Son Sann se trouvait pour sa part largement distancĂ©[508].
SitĂŽt connu les rĂ©sultats, Norodom Ranariddh fait part, depuis la ThaĂŻlande, de son intention, en tant que chef du parti arrivĂ© en tĂȘte, de former lui-mĂȘme un gouvernement et de dĂ©finir lâorientation de la constitution qui restait Ă Ă©crire[509]. Peu aprĂšs, au dĂ©but du mois de juin, des fonctionnaires de lâĂtat du Cambodge, emmenĂ©s par le prince Chakrapong (en), dĂ©clarĂšrent la sĂ©cession des six provinces orientales de Kampong Cham, Prey Veng, Mondol Kiri, Rotanah Kiri, Stoeng Treng et Svay Rieng oĂč le PPC Ă©tait arrivĂ© en tĂȘte[510]. La tension sâaccroissait dans ces provinces et se caractĂ©risait par des attaques contre le personnel et les propriĂ©tĂ©s de lâAPRONUC[511].
Avec cette nouvelle crise, Norodom Sihanouk paraissait plus que jamais le seul Ă mĂȘme de faire entendre raison aux protagonistes[512]. Le 15 juin, il suggĂ©rait de donner une place dâĂ©gale importance au FUNCINPEC de Norodom Ranariddh, vainqueur des Ă©lections et au PPC (Hun Sen) qui contrĂŽlait toujours lâadministration dans presque tout le pays ; il proposait Ă©galement la formation dâun gouvernement national provisoire cambodgien (GNPC) coprĂ©sidĂ© par le prince Ranariddh et Hun Sen[513]. Un temps rĂ©ticentes devant une solution qui dĂ©rogeait aux principes de la dĂ©mocratie Ă lâoccidentale, mais nâayant aucune alternative viable Ă offrir, les instances internationales finissaient par soutenir les propositions du prince[514].
LâassemblĂ©e constituante avait pour sa part commencĂ© ses travaux le 14 juin 1993. Lors de la session inaugurale, une rĂ©solution fut adoptĂ©e qui replaçait le prince Sihanouk comme chef de lâĂtat, rĂ©troactivement Ă 1970, rendant sa dĂ©position du 18 mars 1970 nulle et non avenue[note 18] - [517].
Une des premiĂšres questions concernant la constitution Ă Ă©crire Ă©tait la place quâoccuperait Sihanouk dans le nouveau Cambodge. Serait-il un chef dâĂtat aux pouvoirs Ă©tendus comme un prĂ©sident de la Ve rĂ©publique française ou un monarque constitutionnel comme Ălisabeth II au Royaume-Uni ou Rama IX en ThaĂŻlande ? TrĂšs vite, les dĂ©putĂ©s, peu dĂ©sireux de voir leur rĂŽle limitĂ© Ă de la figuration, optaient pour la seconde solution, oĂč le roi « rĂšgne mais ne gouverne pas »[518]. Le 21 septembre 1993, le parlement adoptait la nouvelle constitution par 113 voix pour, 5 contre et 2 abstentions. Elle Ă©tait le fruit dâun compromis entre les deux partis dominants et Ă©tablissait une dĂ©mocratie libĂ©rale Ă partis multiples[519].
La constitution fut officiellement promulguĂ©e le 24 septembre 1993 et, le jour mĂȘme, le conseil du TrĂŽne Ă©lisait sans surprise le prince Sihanouk roi du Cambodge, prĂšs de 40 ans aprĂšs son abdication de 1955[520].
Les dĂ©buts dâun monarque constitutionnel (1993-1995)
En conformitĂ© avec les accords de Paris et cette nouvelle constitution, lâassemblĂ©e constituante devint lĂ©gislative. Le nouveau roi nomma son fils, le prince Norodom Ranariddh, chef du FUNCINPEC (royalistes), premier Premier ministre du nouveau gouvernement et Hun Sen, dirigeant du PPC, second Premier ministre[521].
Le nouveau royaume du Cambodge, dĂšs sa crĂ©ation avait Ă relever de nombreux dĂ©fis. Le premier dâentre eux concernait la cohabitation entre les deux partis au pouvoir qui se dĂ©testaient. La formule retenue, Ă lâinitiative de Sihanouk, avait Ă©tĂ© de doubler lâensemble des postes en mettant deux personnes Ă la tĂȘte de chaque ministĂšre majeurs et un vice-ministre dâobĂ©dience opposĂ©e Ă celle du ministre dans les autres. Si cette solution permettait aux deux formations au pouvoir de coopĂ©rer, la recherche du consensus Ă laquelle elle les obligeait allait mener Ă des situations de blocage en cas de dĂ©saccord. Toutefois, quâil lâait sciemment recherchĂ© au dĂ©part ou pas, le roi allait pouvoir montrer dans ces crises, au moins au dĂ©but de ce nouveau rĂšgne, son talent de mĂ©diateur[522].
Le second problĂšme Ă rĂ©gler fut la question khmĂšre rouge. Les partisans de Khieu SamphĂąn refusaient toujours lâaccĂšs des zones quâils contrĂŽlaient Ă lâarmĂ©e du nouveau gouvernement bicĂ©phale. Alors que Sihanouk multipliait les efforts pour garder le contact avec eux et tentait de les persuader de rejoindre une coalition pour diriger le pays, les partis des deux premiers ministres, dâaccord pour ne pas partager leur autoritĂ© avec un adversaire qui de toute façon en perdant le soutien de son mentor chinois semblait s'ĂȘtre privĂ© dâune grande part de son pouvoir de nuisance, le dĂ©claraient hors la loi le 6 juillet 1994[523] et demandaient, le 21 juin 1997, lâaide des Nations unies pour mettre en place un tribunal chargĂ© de juger ses plus hauts responsables[524]. Toutefois, les deux dĂ©crets officialisant ces dĂ©cisions ne seront pas signĂ©s par Sihanouk, mais par Chea Sim, le prĂ©sident de lâAssemblĂ©e nationale, en tant que chef de lâĂtat par intĂ©rim, en lâabsence du roi, retenu Ă PĂ©kin « pour raisons de santĂ© »[525].
Une autre crise que Sihanouk avait Ă quelque part contribuĂ© un temps Ă alimenter et Ă laquelle il allait tenter de mettre un terme concernait le conflit qui opposait le Thammayut au Mohanikay, soit les deux principaux ordres monastiques du Cambodge. Le diffĂ©rend datait du renversement du rĂ©gime khmer rouge, quand les pagodes furent rouvertes. Les survivants Thammayut, proches de la famille royale, Ă©taient alors pour la plupart rĂ©fugiĂ©s Ă lâĂ©tranger et leur exil allait encore durer une dĂ©cennie. La renaissance des Sangha (communautĂ©s bouddhistes) allait de ce fait ĂȘtre lâĆuvre quasi exclusive de dignitaires Mohanikay dont la congrĂ©gation avait toujours Ă©tĂ© largement majoritaire et qui allaient mĂȘme investir des pagodes anciennement tenues par des moines Thammayut. De plus, en septembre 1981, un responsable Mohanikay proche du pouvoir, le vĂ©nĂ©rable Tep Vong (en), fut Ă©lu Ă la tĂȘte dâune communautĂ© « unifiĂ©e » oĂč la division entre les deux ordres avait Ă©tĂ© officiellement abolie[note 19]. La situation restera figĂ©e jusquâau retour de Sihanouk en 1991. Peu avant, le monarque avait tenu Ă ressusciter la congrĂ©gation Thammayut et avait officiellement nommĂ© Ă sa tĂȘte le vĂ©nĂ©rable Bour Kry qui lâaccompagnait Ă son arrivĂ©e Ă Phnom Penh et qui durant son exil avait dĂ©veloppĂ© les communautĂ©s bouddhistes au sein de la diaspora cambodgienne en France[527]. Bour Kry demandait Ă reprendre possession de la pagode Wat Botum, siĂšge de lâordre Thammayut jusquâĂ la mise en place du KampuchĂ©a dĂ©mocratique, mais occupĂ© depuis 1979 par la hiĂ©rarchie Mohanikay. DâĂąpres nĂ©gociations sâengageaient alors et dĂ©bouchĂšrent sur un compromis : une partie du terrain de la pagode fut cĂ©dĂ©e Ă Bour Kry pour quâil puisse y construire un bĂątiment Ă cĂŽtĂ© de lâexistant dont Tep Vong gardait la jouissance[528].
Ne pouvant jouer le rĂŽle politique qu'il avait espĂ©rĂ© tenir[note 20], Norodom Sihanouk consacrait une partie importante de son temps Ă restaurer le prestige de la royautĂ© dont on lui demandait dâĂȘtre le dĂ©positaire. Il allait ainsi remettre au goĂ»t du jour certaines festivitĂ©s supprimĂ©es depuis 1970, telles Chrat Preah Nongkal (« fĂȘte du sillon sacrĂ© ») et commander des copies de symboles de la royautĂ© qui avaient disparu, comme lâĂ©pĂ©e sacrĂ©e que se transmettaient les monarques khmers depuis des temps immĂ©moriaux[529]. Une de ses premiĂšres tĂąches, une fois Ă Phnom Penh fut de rĂ©tablir lâordre des bakous. Ces vĂ©ritables prĂȘtres du palais, qui se transmettaient leurs charges de pĂšre en fils, participaient Ă la plupart des cĂ©rĂ©monies mais avaient Ă©tĂ© rendus Ă la vie civile par Lon Nol. Paradoxalement, cela leur sauva probablement la vie lorsque les troupes khmĂšres rouges investirent Phnom Penh en 1975 et envoyĂšrent Ă la mort la plupart des occupants du Palais royal. Des recherches avaient Ă©tĂ© menĂ©es et quelques-uns de ces derniers bakous avaient Ă©tĂ© retrouvĂ©s ce qui avait permis par la suite dâidentifier leurs descendants et ceux de certains de leurs collĂšgues, puis de pouvoir restaurer lâordre dĂšs la fin de 1993[530].
Une autre tĂąche Ă laquelle sâattela le monarque fut de faciliter la rĂ©installation de lâĂcole française d'ExtrĂȘme-Orient qui avait dĂ» quitter le pays au dĂ©but de 1975. MĂȘme si de premiers contacts eurent lieu dĂšs 1983 avec les autoritĂ©s de la rĂ©publique populaire du KampuchĂ©a et que des chercheurs sâĂ©taient rendus au Cambodge, il faudra attendre la restauration de la monarchie pour que lâĂ©cole revienne officiellement au Cambodge. Afin de montrer son attachement Ă ce retour, le monarque fit hĂ©berger lâĂ©cole dans lâenceinte du Palais royal[531]. Il tenta Ă©galement de lâassister dans les deux missions qui lui avaient Ă©tĂ© confiĂ©es. En effet, outre la restauration de certains temples dâAngkor, dont le rĂ©sultat le plus notable sera celle du BaphĂ»on, lâĂ©cole sâĂ©tait vue attribuĂ©e la recherche des textes sacrĂ©s qui avaient pu Ă©chapper aux tourmentes des derniĂšres dĂ©cennies. La plupart, Ă©crits sur des feuilles de latanier reliĂ©es entre elles par des cordelettes, avaient Ă©galement souffert de l'Ă©preuve du temps et durent ĂȘtre restaurĂ©s avant dâĂȘtre conservĂ©s dans une salle spĂ©cialement amĂ©nagĂ©e du Wat Saravan alors que des copies sur microfilms sont Ă©galement conservĂ©es au Wat Ounalom[532].
Une autre mission pour laquelle Sihanouk montra de lâintĂ©rĂȘt fut la restauration du ballet royal. Sa fille aĂźnĂ©e, la princesse Norodom Bopha Devi, ancienne danseuse Ă©toile de la troupe qui venait dâĂȘtre nommĂ©e ministre de la culture sâattela Ă la tĂąche. De jeunes danseuses furent recrutĂ©es et commencĂšrent lâentrainement. Une dizaine dâannĂ©es plus tard, elles commençaient des tournĂ©es Ă lâĂ©tranger, avant, reconnaissance suprĂȘme, que le ballet ne soit proclamĂ© le 7 novembre 2003 au patrimoine culturel immatĂ©riel de lâhumanitĂ© par lâUNESCO[533].
Crise gouvernementale et redditions khmĂšres rouges (1996-1998)
Moins dâun an aprĂšs les Ă©lections, les relations entre les deux partis au pouvoir avaient dĂ©jĂ tournĂ© Ă lâaigre et chaque camp cherchait Ă Ă©vincer lâautre. Les accrochages « sporadiques » se multipliaient entre les troupes des deux factions ; dans le mĂȘme temps, chacun tentait en secret de nĂ©gocier avec les derniers bastions khmers rouges afin de rallier leurs forces aux leurs[534]. Ă ce petit jeu, câest Hun Sen qui gagna. Le 8 aoĂ»t 1996, Ieng Sary rompit avec Pol Pot et sâalliait au second Premier ministre[535]. Il obtint de surcroĂźt une amnistie que lui octroyait Norodom Sihanouk malgrĂ© lâinimitĂ© notoire que le monarque nourrissait Ă son Ă©gard[536].
En 1997, la crise dĂ©gĂ©nĂ©rait en conflit armĂ© sans que lâon sache prĂ©cisĂ©ment qui avait ouvert les hostilitĂ©s. Les combats tournaient rapidement Ă lâavantage du PPC. Plusieurs responsables du FUNCINPEC (Norodom Ranariddh) furent arrĂȘtĂ©s, dont certains, tels le chef de la police Ho Sok, Ă©taient torturĂ©s et exĂ©cutĂ©s[537]. La communautĂ© internationale dĂ©nonça Hun Sen comme fauteur de troubles, les Ătats-Unis suspendirent leur aide au Cambodge et les investissements Ă©trangers dans le pays s'effondrĂšrent. Hun Sen, pour sa part, nia avoir menĂ© un coup d'Ătat et donna une apparence de lĂ©galitĂ© Ă son coup de force en demeurant au poste de « Second Premier ministre », tandis qu'Ung Huot, prĂ©cĂ©demment ministre des affaires Ă©trangĂšres, prenait la place de Ranariddh. Les Ă©lections demeuraient prĂ©vues pour 1998 mais plusieurs pays rĂ©clamaient le retour au Cambodge de Norodom Ranariddh et des autres dirigeants exilĂ©s comme prĂ©alable Ă leur reconnaissance. Hun Sen exigeait au contraire que Ranariddh soit jugĂ© pour atteinte Ă la sĂ©curitĂ© de l'Ătat, quitte Ă ce que son pĂšre Norodom Sihanouk le gracie ensuite. Le 4 mars puis le 17 mars 1998, Ranariddh Ă©tait condamnĂ© deux fois par contumace, Ă cinq et trente ans de prison. Le 21 mars, Sihanouk accordait l'amnistie Ă son fils et ce dernier rentrait au Cambodge le 30. Les Ă©lections pouvaient finalement se tenir le 26 juillet et les cadres du FUNCINPEC revenaient au Cambodge[538].
Le PPC (Hun Sen) sortait vainqueur de ces Ă©lections et remportait 64 des 122 siĂšges en lice ; le FUNCINPEC (Norodom Ranariddh), affaibli notamment par les Ă©vĂ©nements de lâannĂ©e prĂ©cĂ©dente, devait se contenter de 43 siĂšges et les 15 fauteuils restant allaient Ă une nouvelle formation qui allait bientĂŽt refaire parler d'elle, le Parti de Sam Rainsy. MalgrĂ© les contestations pour fraude dĂ©posĂ©e par ce dernier mouvement, la communautĂ© internationale validait les rĂ©sultats. Toutefois, si le parti de Hun Sen avait obtenu la majoritĂ© absolue des siĂšges, conformĂ©ment Ă lâarticle 90 de la constitution, il avait besoin de lâaval dâau moins deux tiers des dĂ©putĂ©s pour former le nouveau gouvernement[539].
Ranariddh et Sam Rainsy, qui nâavaient aucune envie de collaborer avec le second Premier ministre bloquĂšrent le processus. Le gouvernement prĂ©cĂ©dent restait au pouvoir pour rĂ©gler les affaires courantes alors que la plupart des projets de reconstruction se trouvaient bloquĂ©s dans lâattente de voir quelle serait lâissue de la crise. Chaque camp en appelait au roi pour sortir du marasme, mais personne nâĂ©tait disposĂ© Ă faire des concessions[540]. Sihanouk proposait dâinstituer une chambre haute qui aurait limitĂ© le pouvoir de lâAssemblĂ©e nationale mais permettait aussi de crĂ©er des postes Ă responsabilitĂ© Ă mĂȘme de calmer certaines susceptibilitĂ©s, mais rien nây fit. Le roi annonçait de son cĂŽtĂ© quâil irait comme il lâavait prĂ©vu de longue date Ă PĂ©kin pour suivre un traitement et que son dĂ©part aurait lieu « quoi quâil arrive » le . Ranariddh, qui avait le plus Ă perdre dans ce jeu de dupes, finit par accepter un accord qui sera entĂ©rinĂ© le [541]. Le gouvernement, dont Hun Sen devenait seul chef, accueillait Ă nouveau des ministres du FUNCINPEC (royalistes), tandis que Norodom Ranariddh hĂ©ritait de la prĂ©sidence de l'AssemblĂ©e nationale et Chea Sim de celle dâun SĂ©nat qui restait Ă crĂ©er[542].
Un charisme en baisse (1999-2004)
Le 30 avril 1999, le Cambodge rejoignait lâASEAN, mais depuis PĂ©kin, le roi fit part de ses rĂ©serves devant ce qui pour lui avait des relents dâOTASE et allait Ă lâencontre de la politique de neutralitĂ© quâil avait toujours voulu promouvoir[543].
Les annĂ©es qui suivent furent, comparĂ©es aux prĂ©cĂ©dentes, relativement calmes. La fin de la guĂ©rilla khmĂšre rouge et la formation du gouvernement permirent aux programmes de reconstructions de prendre leur essor. Sihanouk, qui partageait son temps entre le Cambodge, PĂ©kin et Pyongyang, se consacrait Ă des projets humanitaires dans les campagnes, distribuant ou faisant distribuer nourriture et vĂȘtements ou finançant des travaux dâinfrastructure locaux[544].
Le 8 mars 2003, il avança pour la premiĂšre fois sĂ©rieusement lâĂ©ventualitĂ© dâune nouvelle abdication. Il avait dĂ©jĂ abordĂ© le sujet par le passĂ©, mais il sâagissait plus de menaces pour dĂ©bloquer des crises et appeler chaque camp Ă faire des concessions. Cette fois, il demandait mĂȘme de prĂ©ciser les modalitĂ©s de fonctionnement du conseil du TrĂŽne en cas dâabdication du souverain. Mais comme le monarque nâĂ©voquait plus le sujet dans les semaines qui suivront, sa demande sera vite oubliĂ©e[545].
Le 6 juin 2003, aprĂšs de longues tractations qui avaient durĂ© plusieurs annĂ©es, le gouvernement cambodgien et lâONU signaient un accord pour la mise en place des chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens chargĂ©es de juger les derniers dignitaires khmers rouges encore en vie. NĂ©anmoins, sur le terrain, la situation avait changĂ© avec le dĂ©cĂšs de Pol Pot et les diverses redditions de nombreux autres responsables du mouvement. Norodom Sihanouk fit une nouvelle fois part de son dĂ©saccord et de ses craintes quâun tel tribunal ne vienne raviver de vieilles blessures pas encore totalement cicatrisĂ©es. Dâautre part, pour que cette procĂ©dure puisse avoir une certaine crĂ©dibilitĂ©, il Ă©tait difficile de ne pas revenir sur les amnisties quâil avait accordĂ©es Ă des hauts responsables comme Khieu SamphĂąn, Nuon Chea ou Ieng Sary et de se contenter de juger leurs subordonnĂ©s[546].
Ces dĂ©clarations furent toutefois Ă©clipsĂ©es par la campagne en vue des Ă©lections qui allaient se tenir Ă la fin juillet. Le PPC allait Ă nouveau sortir vainqueur avec 73 des 121 dĂ©putĂ©s de la nouvelle assemblĂ©e ; le FUNCINPEC reculait et nâavait plus que 26 siĂšges, talonnĂ©s par le PSR qui en avait 24[508]. NĂ©anmoins, lâarticle 90 de la constitution obligeait toujours le gouvernement Ă ĂȘtre entĂ©rinĂ© par les deux tiers du parlement. Hun Sen reprit donc contact avec Ranariddh, mais la formation de ce dernier Ă©tait alors divisĂ©e entre ceux qui voulait reformer une coalition gouvernementale et dâautres qui prĂ©conisaient de se rapprocher de Sam Rainsy quitte Ă bloquer les institutions. Au dĂ©part, câest cette deuxiĂšme tendance qui semblait lâemporter[547].
Alors que le marasme perdurait depuis maintenant prĂšs de trois mois, Norodom Sihanouk eu la douleur de perdre son fils Narindrapong (en), victime dâune crise cardiaque le 8 octobre 2003 Ă Paris. Il Ă©tait le frĂšre de Sihamoni et avait vĂ©cu avec eux la pĂ©riode du sĂ©jour en rĂ©sidence surveillĂ©e au palais royal du temps du KampuchĂ©a dĂ©mocratique. MĂȘme si pendant lâessentiel de sa vie il avait affichĂ© son soutien aux doctrines khmĂšres rouges et une opposition Ă son pĂšre, il avait entrepris un rapprochement avec lui depuis la fin des annĂ©es 1990[548].
Ă lâapproche de lâhiver, la crise politique, quant Ă elle, restait dans lâimpasse. Norodom Sihanouk jugea quâil Ă©tait de son devoir dây mettre un terme et engagea des discussions avec les protagonistes. Le 5 novembre, il rĂ©unissait les reprĂ©sentants des partis ayant des dĂ©putĂ©s et leur faisait signer une proclamation entĂ©rinant la crĂ©ation dâun gouvernement tripartite. Mais dĂšs le lendemain, le PSR revenait sur la dĂ©claration et invitait le FUNCINPEC Ă en faire autant. Ranariddh, de son cĂŽtĂ©, partait pour la France, rendant difficile toute poursuite des nĂ©gociations. Sihanouk, pour qui ces rebuffades Ă©taient un camouflet, dĂ©cidait Ă son tour de quitter le pays et se rendait au dĂ©but de lâannĂ©e 2004 Ă PĂ©kin, puis Ă Pyongyang, dĂ©crĂ©tant quâil nâavait plus lâintention de revenir au Cambodge[549].
Le 25 juin 2004, alors que la crise durait depuis prĂšs dâun an, Ranariddh dĂ©cidait brusquement de rompre avec le PSR et dâaccepter de former avec le PPC un nouveau gouvernement ; sâil retrouvait son siĂšge de prĂ©sident de lâAssemblĂ©e nationale, son parti sortait affaibli de lâĂ©preuve et nâallait pas tarder Ă se dĂ©chirer en factions rivales qui allaient finalement grossir les rangs des deux autres partis reprĂ©sentĂ©s au parlement[550].
En juillet, depuis Pyongyang, Sihanouk fit Ă nouveau part de son intention de dĂ©missionner. Il quittait la capitale nord-corĂ©enne pour PĂ©kin oĂč il reçut la visite de Tep Vong, vĂ©nĂ©rable de lâordre Mohanikay qui tenta de le faire revenir sur sa dĂ©cision, mais sans succĂšs[551].
Le roi-PĂšre (7 octobre 2004)
Le 7 octobre 2004, toujours depuis PĂ©kin, Norodom Sihanouk annonçait son abdication. Elle semble avoir Ă©tĂ© motivĂ©e par deux raisons principales. La premiĂšre avait Ă©tĂ© lâimpuissance quâil avait ressentie un an auparavant lorsquâil essaya dâimposer une solution Ă la crise nĂ©e des Ă©lections. La seconde Ă©tait lâĂ©mergence dâun courant antimonarchique au sein de la sociĂ©tĂ© cambodgienne qui lui faisait craindre que la royautĂ© ne puisse lui survivre sâil ne rĂ©glait pas sa succession de son vivant[552]. MalgrĂ© les demandes rĂ©pĂ©tĂ©es du monarque dĂ©missionnaire, rien nâavait Ă©tĂ© fait jusquâalors pour dĂ©finir avec prĂ©cision le fonctionnement du Conseil du trĂŽne ; Ă la suite de lâannonce, lâAssemblĂ©e dut y remĂ©dier dans lâurgence[553].
Pour le choix du nouveau roi, Norodom Sihanouk avait depuis longtemps militĂ© en faveur de Sihamoni, un des deux fils quâil avait eu avec la reine Monique et qui avait partagĂ© avec lui sa mise en rĂ©sidence surveillĂ©e au Palais royal entre 1976 et 1978. FĂ©ru dâart, il avait en outre lâavantage de ne pas sâĂȘtre impliquĂ© dans un parti politique comme lâĂ©taient certains de ses demi-frĂšres. Hun Sen se rangea assez vite derriĂšre ce choix pour un des membres les moins turbulents de la famille royale, imitĂ© dans la foulĂ©e par Ranariddh qui avait depuis peu perdu espoir de succĂ©der Ă son pĂšre[554].
Le 15 octobre, le conseil du trĂŽne adoptait Ă lâunanimitĂ© la proposition de Sihanouk et nommait Norodom Sihamoni nouveau roi du Cambodge. Le couronnement eu lieu le 29 du mĂȘme mois[555]. MalgrĂ© ce nouveau retrait, celui quâil fallait maintenant appeler le « roi-pĂšre » continuait Ă suivre lâactualitĂ© et les articles de presse le concernant, nâhĂ©sitant pas au besoin Ă rĂ©agir par des communiquĂ©s quand les propos ne lui convenaient pas[556].
Il reparut sur le devant de la scĂšne au dĂ©but de 2005, lorsque des pourparlers sâengageaient pour rediscuter du traitĂ© conclu en 1985 avec le ViĂȘt Nam au sujet de la dĂ©limitation de leur frontiĂšre commune. Cette convention avait Ă©tĂ© rendue caduque par le fait que lâun des deux signataires, la RĂ©publique populaire du KampuchĂ©a, nâĂ©tait pas reconnu par la communautĂ© internationale et que lâarmĂ©e du second occupait le Cambodge. Une nouvelle tentative de dĂ©marcation des frontiĂšres avait Ă©tĂ© orchestrĂ©e au dĂ©but des annĂ©es 1990 par lâAutoritĂ© provisoire des Nations unies mais sâĂ©tait heurtĂ©e Ă un refus thaĂŻlandais[557]. Le roi pĂšre demandait aux autoritĂ©s françaises de lui faire parvenir les documents cartographiques datant du protectorat et proposait de prĂ©sider une commission de sages chargĂ©s dâaller sur le terrain procĂ©der Ă la dĂ©limitation. Un dĂ©cret en ce sens fut signĂ© par le nouveau roi le 10 mai, mais devant les difficultĂ©s qui sâamoncelaient, Norodom Sihanouk prĂ©fĂ©ra dĂ©missionner en aoĂ»t de la mĂȘme annĂ©e de son poste de prĂ©sident du Conseil national supĂ©rieur chargĂ© des frontiĂšres[558]. Le travail se poursuivit nĂ©anmoins laborieusement et prit fin avec la pose, le 12 juin 2012, de la derniĂšre borne[559].
Le 26 mai 2006, le roi pĂšre et la reine mĂšre Ă©taient de retour Ă Phnom Penh. Les activitĂ©s de Sihanouk se limitaient Ă une aide aux plus dĂ©munis, sa participation Ă des Ă©vĂ©nements culturels, quelques entrevues avec des visiteurs Ă©trangers, la relance de ses activitĂ©s cinĂ©matographiques et toujours la rĂ©daction de communiquĂ©s en rĂ©ponse Ă des articles de la presse internationale ou dâouvrages le concernant. Mais le rythme des rĂ©ceptions officielles l'Ă©puisait et il se retirait en aoĂ»t Ă Siem Reap, puis, Ă la fin de l'annĂ©e, Ă PĂ©kin oĂč il subira des examens mĂ©dicaux[560].
Peu aprĂšs, il se voyait contraint de prendre position contre son neveu Sisowath Thomico, qui fut aussi son secrĂ©taire particulier. Ce dernier avait dĂ©cidĂ© de se lancer en politique et avait crĂ©Ă© son propre parti quâil avait nommĂ© Sangkum Cheat Niyum, dâessence monarchiste. Sihanouk demanda Ă son neveu afin dâĂ©viter toute confusion, dâutiliser un nom qui ne contienne pas le terme Sangkum et cru bon de dĂ©clarer officiellement quâil nâĂ©tait aucunement mĂȘlĂ©, de prĂšs ou de loin, Ă cette nouvelle formation, ce qui fit avorter dans lâĆuf lâinitiative de Thomico[561].
Ă lâĂ©tĂ© 2008, Sihanouk tenta un ultime retour sur le devant de la scĂšne. Lâinscription le 7 juillet du temple de Preah Vihear Ă la liste du patrimoine mondial de lâUNESCO avait dĂ©clenchĂ© une crise avec la ThaĂŻlande qui revendiquait une partie du site classĂ©. Le roi pĂšre faisait une dĂ©claration appelant au respect de lâintĂ©gritĂ© territoriale cambodgienne et fournissait divers Ă©lĂ©ments de ses archives personnelles concernant le jugement rendu en 1962 par la cour internationale de justice de la Haye et qui attribuait le temple au royaume khmer. Au mĂȘme moment, depuis lâhĂŽpital militaire de PĂ©kin oĂč il Ă©tait soignĂ© pour un cancer de lâestomac, il suggĂ©rait Ă©galement de mieux dĂ©finir le statut de la famille royale et proposait une solution proche de celle en vigueur en ThaĂŻlande, au Royaume-Uni et ailleurs, Ă savoir dâun engagement des princes Ă ne plus sâimpliquer dans le politique en Ă©change dâune « liste civile » provenant du budget de lâĂtat. Il espĂ©rait ainsi accroĂźtre leur autoritĂ© morale sur lâensemble des dirigeants et de la population. Toutefois, le projet ne suscita pas lâenthousiasme escomptĂ©, notamment auprĂšs des membres de la famille royale qui menaient encore une activitĂ© politique. AprĂšs son impuissance Ă rĂ©gler la crise politique en 2003, ce nouveau revers fit encore plus prendre conscience Ă Sihanouk que lâĂ©poque oĂč il pouvait peser de son autoritĂ© pour influencer certaines dĂ©cisions politiques Ă©tait rĂ©volue[562].
En juin 2009, il publiait un communiquĂ© annonçant que son cancer avait Ă©tĂ© soignĂ© et que ses mĂ©decins chinois lâautorisaient Ă retourner au Cambodge oĂč il passera tout lâĂ©tĂ©[563]. En octobre de la mĂȘme annĂ©e, il participa Ă PĂ©kin aux festivitĂ©s du 60e anniversaire de la rĂ©publique populaire de Chine en tant quâinvitĂ© dâhonneur. Il avouera Ă Jean-Marie CambacĂ©rĂšs quâil nâavait pu Ă lâoccasion sâempĂȘcher de faire un parallĂšle entre ces attentions et son impuissance Ă influencer la politique de son pays ces derniers temps[564].
En juin 2010, il se rendait au ViĂȘt Nam. Le PSR lui demandait de transmettre ses dolĂ©ances concernant la frontiĂšre commune, mais Norodom Sihanouk refusa, affirmant que le voyage nâavait quâun caractĂšre privĂ©. En fait, il semblait surtout que par cette visite effectuĂ©e au crĂ©puscule de sa vie, lâancien monarque voulut clore le chapitre des annĂ©es 1980 oĂč il sâĂ©tait opposĂ© au rĂ©gime de HanoĂŻ[565].
LâannĂ©e 2011 se passa entre Phnom Penh et PĂ©kin, mais les apparitions officielles se faisaient plus rares, de mĂȘme que les audiences oĂč il Ă©tait parfois remplacĂ© par la reine mĂšre. Le 19 janvier 2012, le roi pĂšre quittait Ă nouveau le Cambodge pour aller se faire soigner Ă PĂ©kin. Peu alors imaginaient quâil sâagissait dâun dĂ©part sans retour[566].
Le 15 octobre 2012, Ă quelques jours de son 90e anniversaire, il dĂ©cĂ©dait dâune crise cardiaque Ă lâhĂŽpital de PĂ©kin[567].
Son corps fut rapatriĂ© au Cambodge oĂč une semaine de deuil national avait Ă©tĂ© dĂ©crĂ©tĂ©e. Plusieurs dizaines de milliers de personnes se massĂšrent sur le passage de sa dĂ©pouille entre lâaĂ©roport et le palais royal oĂč son cercueil sera exposĂ© pendant cent jours pour recevoir les hommages des principaux dignitaires du royaume, des reprĂ©sentants des pays Ă©trangers et des simples citoyens. Une cĂ©rĂ©monie religieuse avec 10 000 bonzes eu lieu sur lâesplanade devant le Palais royal[568]. Le 1er fĂ©vrier dĂ©butaient les cĂ©rĂ©monies en vue de la crĂ©mation qui se dĂ©roula le 4 devant le musĂ©e national[569]. Le 7, les cendres furent rĂ©parties dans quatre urnes. Lâune ira dans le stupa dit « de Kantha Bopha »[note 21] dans lâenceinte du palais royal, une autre fut dĂ©posĂ©e dans le « pavillon des reliques augustes » de la salle du trĂŽne, toujours au palais royal, une troisiĂšme allait rejoindre la nĂ©cropole royale dâOudong et le contenu de la derniĂšre fut dispersĂ© Ă Phnom Penh, au lieu-dit des quatre bras, lĂ oĂč le Bassac le TonlĂ© Sap et le MĂ©kong se rejoignent[571].
Activité de cinéaste
Son goût pour les matiÚres artistiques est avéré depuis son passage au lycée Chasseloup-Laubat de Saïgon[572].
Dans les années 1940 et 1950, il produisit de petits films en 16 mm tels que Double meurtre sur la ligne Maginot et Tarzan parmi les Kuy, jamais sortis et tous disparus aux époques de la république khmÚre et du Kampuchéa démocratique[573].
Au milieu des annĂ©es 1960, Sihanouk renouait avec ce hobby. Il a dĂ» ĂȘtre incitĂ© Ă y revenir par le film amĂ©ricain Lord Jim, tournĂ© en 1964 Ă Angkor ou Marcel Camus, qui rĂ©alisa en 1962 LâOiseau de paradis au Cambodge[574]. Il opta pour le 35 mm et le premier film dont on a gardĂ© une trace, Apsara, date de 1965. Sa fille aĂźnĂ©e, Bopha Devi, y tient le rĂŽle principal, mais on peut aussi y voir le prince, sa femme et Nhiek Tioulong, un de ses ministres, qui interprĂ©tait un coureur de jupons[573]. Jusqu'en 1969, le prince Ă©crivit, produisit, dirigea et joua dans une dizaine de films, dont il composait Ă©galement la musique. Les acteurs Ă©taient bĂ©nĂ©voles et une partie des frais Ă©taient couverts en « invitant » les fonctionnaires Ă payer pour venir voir les films qui dĂ©peignaient les idĂ©es de Sihanouk sur le Cambodge et son histoire. Les deux derniers, La joie de vivre et CrĂ©puscule sortirent en 1969. On ne sait pas si cette envie Ă©tait une cause ou une consĂ©quence des pĂ©riodes oĂč il se dĂ©sintĂ©ressait de la politique, mais il avait toujours manifestĂ© une certaine attirance pour le 7e art[575].
Le monarque nâavait suivi aucune formation cinĂ©matographique et nâĂ©tait pas disposĂ© Ă Ă©couter les conseils et les remontrances. De fait, ses films subirent rĂ©guliĂšrement le feu des critiques occidentales qui lui reprochĂšrent leur amateurisme et le parfum de propagande quâils dĂ©gageaient. En 1973, il dĂ©clarera Ă la journaliste Oriana Fallaci quâil en avait conscience mais quâil ne sâen souciait guĂšre, affirmant que ses films avaient surtout pour but « dâĂ©duquer le peuple »[358]. Ils dĂ©crivaient le quotidien des fidĂšles du monarque plutĂŽt que celui des gens ordinaires. En outre, pour les besoins de la production, il nâĂ©tait pas rare de rĂ©quisitionner les vĂ©hicules officiels, les organisations de la jeunesse, lâarmĂ©e, les avions, les bĂątiments de la marine, les gĂ©nĂ©raux, les ministres et autres hauts fonctionnaires que comptait le pays[576].
LâapogĂ©e de la carriĂšre cinĂ©matographique de Sihanouk fut atteint en novembre 1969, lors dâun festival international organisĂ© Ă Phnom Penh. Son film, CrĂ©puscule y gagna le grand prix, une statuette de deux kilos dâor financĂ©e par la banque nationale. Le film avait Ă©tĂ© prĂ©sentĂ© hors compĂ©tition et la statuette Ă©tait considĂ©rĂ©e comme un prix spĂ©cial qui lui fut remis par lâĂ©crivaine Han Suyin, admiratrice de longue date du prince. Une douzaine de statuettes plus petites et une cinquantaine dâautres rĂ©compenses furent attribuĂ©es Ă des laurĂ©ats de « pays amis » - prĂ©sentĂ©s comme de gauche par le New York Times. Lors de la cĂ©rĂ©monie de clĂŽture, le corps du ballet royal lança des pĂ©tales de rose dans lâassistance et Sihanouk promis de reconduire le festival lâannĂ©e suivante[577].
Sa dĂ©position en 1970, allait toutefois interrompre sa carriĂšre cinĂ©matographique pendant une vingtaine dâannĂ©es. Peu avant la chute de la RĂ©publique khmĂšre en 1975, il avait annoncĂ© Ă un visiteur venu le voir dans son exil Ă PĂ©kin, quâil espĂ©rait Ă son retour Ă Phnom Penh pouvoir faire des films, mais les dirigeants khmers rouges en dĂ©cideront autrement. Il lui faudra en fait attendre 1988, quand le processus de paix sera rĂ©ellement engagĂ©, pour quâil assouvisse Ă nouveau sa passion depuis la CorĂ©e du Nord avec des films comme La citĂ© mystĂ©rieuse, La comtesse de Nokorom, ou, en 1991, alors qu'au dernier moment le processus de paix semblait s'enliser, Je ne te reverrai plus, ĂŽ mon bien-aimĂ© Kampuchea![578].
Ă son retour, il nâavait pas perdu espoir de renouer avec des tournages au Cambodge mĂȘme. En 1992, il se rendit Ă Angkor, mais dut renoncer Ă mener Ă bien son projet pour des raisons de sĂ©curitĂ©. Finalement, il faudra attendre 1993 pour que sorte Revoir Angkor... et mourir puis dâautres nouveaux films, mais contrairement aux romances des annĂ©es 1960, les productions de cette pĂ©riode Ă©voquent des situations sombres qui tĂ©moignent du dĂ©senchantement que leur auteur subissait[579]. Enfin, en 2000, il abandonne le 35 mm pour se consacrer Ă des courts-mĂ©trages au format DVD[573].
InterrogĂ© vers la fin de sa vie par des journalistes sur son Ćuvre cinĂ©matographique, il la dĂ©crira comme avant tout des tĂ©moignages sur son pays, ajoutant « le hĂ©ros de mes films n'est jamais un acteur, c'est toujours le Cambodge »[580].
Notes et références
- (en) Cet article est partiellement ou en totalitĂ© issu de lâarticle de WikipĂ©dia en anglais intitulĂ© « Norodom Sihanouk » (voir la liste des auteurs).
- Cet article est partiellement ou en totalité issu de l'article intitulé « Protectorat français du Cambodge » (voir la liste des auteurs).
- Cet article est partiellement ou en totalité issu de l'article intitulé « Royaume du Cambodge (1953-1970) » (voir la liste des auteurs).
- Cet article est partiellement ou en totalité issu de l'article intitulé « République khmÚre » (voir la liste des auteurs).
- Cet article est partiellement ou en totalité issu de l'article intitulé « Khmers rouges » (voir la liste des auteurs).
- Cet article est partiellement ou en totalité issu de l'article intitulé « Parti communiste du Kampuchéa » (voir la liste des auteurs).
- Cet article est partiellement ou en totalité issu de l'article intitulé « Guerre civile cambodgienne (1967-1975) » (voir la liste des auteurs).
- Cet article est partiellement ou en totalité issu de l'article intitulé « Crise cambodgienne de 1997 » (voir la liste des auteurs).
- Cet article est partiellement ou en totalité issu de l'article intitulé « Conflit cambodgien (1978-1999) » (voir la liste des auteurs).
- Cet article est partiellement ou en totalité issu de l'article intitulé « République populaire du Kampuchéa » (voir la liste des auteurs).
Notes
- En fait, le propos aurait Ă©tĂ© tenu par le gĂ©nĂ©ral de Langlade, commandant des forces terrestres de lâUnion française au Cambodge, Ă qui quelquâun ayant traitĂ© Norodom Sihanouk de « roi fou », rĂ©pondait « Câest peut-ĂȘtre un roi fou, mais câest un fou gĂ©nial. »[3]
- Les princesses Mam Manivan Phanivong et Norodom Socheatha Sujata ainsi que le mari et la fille de cette derniĂšre faisaient partie des Cambodgiens qui, en 1975, Ă la prise de Phnom Penh par les troupes khmĂšres rouges s'Ă©taient rĂ©fugiĂ©s Ă l'ambassade de France avant d'en ĂȘtre refoulĂ©s et livrĂ©s aux partisans de Pol Pot[21].
- Alors composé du Premier ministre, des chefs des deux ordres religieux, Thammayut et Mohanikay et du chef des bakous, les brahmanes du palais[35].
- Des femmes avaient déjà régné sur le Cambodge, dont la derniÚre avait été Ang Mey, placée sur le trÎne en 1834 par les autorités annamites[175].
- Ă partir du milieu du XVIIe siĂšcle, alors que l'empire angkorien est en plein dĂ©litement, des colonies vietnamiennes de plus en plus nombreuses s'installent dans le delta du MĂ©kong, Ă lâĂ©poque territoire khmer, jusqu'Ă ce quâen 1834 lâempereur Minh MáșĄng annexe purement et simplement la rĂ©gion oĂč ses sujets Ă©taient devenus majoritaires et envoie des fonctionnaires de HuĂ© pour l'administrer[313].
- Ces reconnaissances, bien que leur confidentialitĂ© relevĂąt du secret de Polichinelle, Ă©taient faites dans un pays qui nâĂ©tait normalement pas en guerre avec les Ătats-Unis ; rendre public leurs rĂ©sultats aurait Ă©quivalu Ă implicitement admettre une violation de la neutralitĂ© du Cambodge, ce qui Ă lâĂ©poque ne pouvait se faire sans lâaval du CongrĂšs[315].
- LâAustralie gĂ©rait alors officiellement les intĂ©rĂȘts des Ătats-Unis au Cambodge depuis la fermeture de lâambassade amĂ©ricaine[316].
- Ces prétendues conjurations ne sont pas sans rappeler les fameux complots du KGB et de la CIA que les soi-disant traßtres du Kampuchéa démocratique devaient avouer sous la torture[322].
- Il sâagissait dâUng Hong Soth, second vice-Premier ministre, Chuon Saodi, ministre de lâagriculture, Srey Pong, secrĂ©taire dâĂtat Ă lâindustrie et Tep Chhieu Kheng, secrĂ©taire dâĂtat Ă lâinformation[351].
- L'Ăglise catholique cambodgienne comptait et compte toujours une forte proportion de fidĂšles d'origine vietnamienne[372].
- Sénégal, Guinée, Mali, Congo-Brazzaville, Zambie, Maroc, Mauritanie, Albanie, Yougoslavie, Roumanie[413].
- Malgré tout, une de ses 7 femmes, cinq de ses 14 enfants et quatorze de ses petits-enfants disparaßtront dans la tourmente du Kampuchéa démocratique[421].
- En fait, ils avaient déjà tous été tués[437].
- Contrairement Ă ce que leur nom pourrait laisser supposer, les JIM nâeurent pas lieu dans la capitale indonĂ©sienne mĂȘme, mais Ă Bogor Ă 60 km au sud[474].
- Australie, Brunei, Canada, Chine populaire, Ătats-Unis, France, Inde, IndonĂ©sie, Japon, Laos, Malaisie, Mouvement des non alignĂ©s, Nations Unies, Philippines, Royaume uni, Singapour, ThaĂŻlande, Union soviĂ©tique, ViĂȘt Nam.
- Si lâon en croit Jean-Claude Pomonti, correspondant du Monde Ă Bangkok, il semble toutefois que le gouvernement de HanoĂŻ ait conservĂ© jusquâen juillet 1991, un effectif dâenviron 4 000 hommes chargĂ©s dâapporter une assistance discrĂšte Ă lâarmĂ©e de la RĂ©publique populaire du KampuchĂ©a alors en lutte contre les troupes khmĂšres rouges[479].
- Le 28 aoĂ»t, dernier jour des Ă©lections, des cadres khmers rouges du Phnom Malay (en) (province de Banteay Mean Chey) sont mĂȘme descendus Ă Poipet pour aller voter[506].
- La dĂ©position n'a pas Ă©tĂ© annulĂ©e par tout le monde et, au dĂ©but des annĂ©es 2010, le gouvernement amĂ©ricain exigeait toujours que Phnom Penh lui rembourse un prĂȘt de 276 millions de dollars contractĂ© par la rĂ©publique khmĂšre et dont le remboursement, avec les intĂ©rĂȘts se montait Ă plus de 400 millions de dollars[515] - [516].
- Les fidĂšles Thammayut pour leur part Ă©voquĂšrent, concernant cette nomination, une tentative de dissolution de leur obĂ©dience plutĂŽt quâune unification[526].
- En avril 1996, lors dâun voyage en France, il se plaindra dâĂȘtre un roi « enfermĂ© dans une cage constitutionnelle »[421].
- Le stupa fut Ă©rigĂ© pour accueillir les cendres de Kantha Bopha, une des filles de Sihanouk, dont le dĂ©cĂšs dâune leucĂ©mie en 1952 Ă l'Ăąge de 4 ans avait grandement affectĂ© le monarque[570].
Références
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Voir aussi
Bibliographie
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
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Principaux ouvrages publiés
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
- Prince Norodom Sihanouk, La monarchie cambodgienne et la croisade royale pour l'indépendance, Phnom Penh, MinistÚre de l'Education Nationale, Direction des Services Pédagogiques, , 154 p.
- Prince Norodom Sihanouk (trad. Nelcya Delanoë), La CIA contre le Cambodge, Maspero, coll. « Cahiers libres », , 246 p.
- Prince Norodom Sihanouk, Souvenirs doux et amers, Hachette, , 413 p. (ISBN 978-2-01-007656-5)
- Prince Norodom Sihanouk et Simonne Lacouture, Prisonnier des Khmers rouges, Hachette, coll. « Histoire / Littérature générale. Récit », , 433 p. (ISBN 978-2-01-012184-5)
Articles connexes
Liens externes
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- « Papiers personnels de Norodom Sihanouk conservés aux Archives nationales sous la cote 665AP », Plan d'orientation général - Archives de personnes, de familles et d'associations - Recherche par le cadre de classement - AP : Personnes et familles, Archives nationales françaises (consulté le )
- (en) Norodom Sihanouk sur lâInternet Movie Database