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Norodom Sihanouk

Norodom Sihanouk (en khmer : នរោត្តម សឞហនុ, NĂŽroĆ­tdĂĄm SeihănĆ­, /nɔroːtɗɑm səjhanuʔ/), nĂ© le 31 octobre 1922 Ă  Phnom Penh et mort le 15 octobre 2012 Ă  PĂ©kin, est un homme d'État cambodgien, figure dominante de la vie politique de son pays dans la seconde moitiĂ© du XXe siĂšcle. Il a Ă©tĂ© tour Ă  tour et parfois simultanĂ©ment roi, Premier ministre, « chef d'État » du royaume, chef de plusieurs gouvernements en exil, puis Ă  nouveau roi.

Norodom Sihanouk
នរោត្តម សឞហនុ
Illustration.
Norodom Sihanouk en 1983.
Titre
Roi du Cambodge
(2e rĂšgne)
–
(11 ans, 3 mois et 23 jours)
Premier ministre Hun Sen
Norodom Ranariddh
Ung Huot
Hun Sen
PrĂ©dĂ©cesseur Chea Sim (prĂ©sident du Conseil d'État)
Successeur Norodom Sihamoni
Chef d'État du Cambodge
–
(11 mois et 16 jours)
Premier ministre Penn Nouth
PrĂ©dĂ©cesseur Sak Sutsakhan (en) (ComitĂ© suprĂȘme, RĂ©publique khmĂšre)
Successeur Khieu Samphùn (Président du Praesidium)
–
(9 ans, 8 mois et 26 jours)
Premier ministre Pho Proeung
Penn Nouth
Lui-mĂȘme
Nhiek Tioulong
Chau Sen Cocsal Chum
Norodom Kanthoul
Lon Nol
Son Sann
Penn Nouth
Lon Nol
Prédécesseur Norodom Suramarit
Successeur Cheng Heng (intérim)
Premier ministre du Cambodge
–
(2 mois et 27 jours)
Chef de l'État Lui-mĂȘme
Prédécesseur Penn Nouth
Successeur Nhiek Tioulong
–
(9 mois et 9 jours)
RĂ©gent Sisowath Monireth
Sisowath Kosamak
Prédécesseur Sim Var
Successeur Pho Proeung
–
(3 mois et 8 jours)
Monarque Norodom Suramarit
Prédécesseur Sam Yun
Successeur Sim Var
–
(1 mois)
Monarque Norodom Suramarit
Prédécesseur Khim Tit
Successeur Sam Yun
–
(24 jours)
Monarque Norodom Suramarit
Prédécesseur Oum Cheang Sun
Successeur Khim Tit
–
(3 mois et 2 jours)
Monarque Norodom Suramarit
Prédécesseur Leng Ngeth
Successeur Oum Cheang Sun
–
(11 jours)
Monarque Lui-mĂȘme
Prédécesseur Chan Nak
Successeur Penn Nouth
–
(7 mois et 8 jours)
Monarque Lui-mĂȘme
Prédécesseur Huy Kanthoul
Successeur Penn Nouth
–
(1 mois et 2 jours)
Monarque Lui-mĂȘme
Prédécesseur Yem Sambaur
Successeur Sisowath Monipong
–
(4 mois et 26 jours)
Monarque Lui-mĂȘme
Prédécesseur Poste créé
Successeur Son Ngoc Thanh
Roi du Cambodge
(1er rĂšgne)
–
(13 ans, 11 mois et 5 jours)
Couronnement
Premier ministre Lui-mĂȘme
Son Ngoc Thanh
Sisowath Monireth
Sisowath Youtevong
Sisowath Vatchayavong
Chean Vam
Penn Nouth
Yem Sambaur
Ieu Koeus
Yem Sambaur
Lui-mĂȘme
Sisowath Monipong
Oum Cheang Sun
Huy Kanthoul
Lui-mĂȘme
Penn Nouth
Chan Nak
Lui-mĂȘme
Penn Nouth
Leng Ngeth
Prédécesseur Sisowath Monivong
Successeur Norodom Suramarit
Biographie
Dynastie Norodom
Nom de naissance Norodom Sihanouk
Date de naissance
Lieu de naissance Phnom Penh (Cambodge, Indochine française)
Date de décÚs [1]
Lieu de décÚs Pékin (Chine)
Parti politique Sans Ă©tiquette (1945-1955)
Sangkum (1955-1970)
Funcinpec (1981-1991)
PĂšre Norodom Suramarit
MĂšre Sisowath Kossamak
Conjoint voir famille
Enfants 14 enfants dont
Norodom Bopha Devi
Norodom Ranariddh
Norodom Sihamoni

Signature de Norodom Sihanouk នរោត្តម សឞហនុ

Norodom Sihanouk Norodom Sihanouk
Monarques du Cambodge
Premiers ministres du Cambodge

NommĂ© le 24 avril 1941, Ă  l'Ăąge de 18 ans, roi du Cambodge alors sous protectorat français il fait accĂ©der son pays Ă  l’indĂ©pendance le 17 octobre 1953 avant d’abdiquer, le 3 mars 1955 au profit de son pĂšre pour remplir un rĂŽle politique que la constitution refuse Ă  sa fonction royale. Ayant fondĂ© son propre parti politique, le Sangkum Reastr Niyum, Sihanouk dirige sans partage le royaume du Cambodge, d'abord comme Premier ministre, puis, aprĂšs la mort de son pĂšre, en tant que « chef d'État ». Il fait, pendant la guerre froide, le choix du neutralisme, mais son hostilitĂ© envers l'ingĂ©rence amĂ©ricaine en Asie du Sud-Est le pousse Ă  se rapprocher de l'URSS et de la Chine, tout en rĂ©primant les communistes cambodgiens. Dirigeant autocratique, il est chassĂ© du pouvoir le 18 mars 1970 par l’aile droite de son mouvement et forme alors un front de rĂ©sistance avec ses anciens adversaires communistes, les Khmers rouges. Ces derniers prennent le pouvoir le 17 avril 1975 ; Sihanouk, officiellement chef de l’État, est cantonnĂ© dans un rĂŽle de pure figuration. Il dĂ©missionne le 2 avril 1976 et est alors assignĂ© Ă  rĂ©sidence tandis que les Khmers rouges massacrent une partie de la population du pays. Le Cambodge est envahi le 25 dĂ©cembre 1978 par l'armĂ©e vietnamienne. Sihanouk, rĂ©fugiĂ© Ă  l'Ă©tranger, prend le 22 juin 1982 la tĂȘte d'une coalition contre l'occupation vietnamienne, qui continue Ă  inclure les Khmers rouges. AprĂšs des accords de paix, il rentre au Cambodge et partage alors le pouvoir avec les anciens communistes pro-vietnamiens, tandis que les Khmers rouges sont exclus de la transition politique. Redevenu roi le 24 septembre 1993, il abdique le 7 octobre 2004.

QualifiĂ© de « fou gĂ©nial » par un ancien responsable militaire de l’Indochine française[2] - [note 1], ses dĂ©tracteurs lui reprochent son instabilitĂ©[4] alors que ses sympathisants louent sa capacitĂ© Ă  retourner des situations qui paraissaient compromises[5].

Quand il était vénéré comme un dieu-roi, il se faisait appeler Samdech Euv (« Monseigneur Papa »)[6], mais aprÚs son abdication, en 2004, il prit le titre officiel de Preah Karuna Preah Moha Virak Ksatr Preah Vorakreach Beida Cheat en khmer, traduit par « roi-pÚre » dans les langues occidentales[7].

Considéré comme l'un des pÚres fondateurs de la francophonie, avec le Sénégalais Léopold Sédar Senghor et le Nigérien Hamani Diori[8], Norodom Sihanouk était également, à ses heures, réalisateur de films.

Étymologie

Le nom dynastique « Norodom » dérive du sanskrit « Narottama » : « le meilleur (uttama) des hommes (nara) », épithÚte de Vishnou.

Le prénom Sihanouk est issu du pùli « Sihahanu » : « à la mùchoire (hanu, cf. Hanuman) de lion (siha) », qui est une épithÚte du Bouddha et le nom du grand-pÚre paternel de celui-ci.

Famille

Ang Duong
Norodom du Cambodge
Pen
Norodom Sutharot
Bossaba Yem
Norodom Suramarit
Ang Duong
Norodom du Cambodge
Pen
Norodom Phangangam
Lothia Sa
Kama Sujati Puspa Nuari
Norodom Sihanouk
Ang Duong
Sisowath du Cambodge
Neang Pou
Sisowath Monivong
Van
Sisowath Kossamak
Norodom du Cambodge
Norodom Hassakan
Norodom Kanviman
Sao
Sao Sambhat
Yura Varman

Norodom Sihanouk est le fils de la princesse Sisowath Kossamak Nearirath Serey Vatthana, fille du roi Sisowath Monivong et de Norodom Suramarit, lui-mĂȘme petit-fils du roi Norodom Ier[9]. Il est de ce fait un descendant des deux branches rivales, les Norodom (par son pĂšre) et les Sisowath (par sa mĂšre), qui se disputent depuis le protectorat français l’accĂšs au trĂŽne et sont aujourd’hui encore les seules Ă  pouvoir fournir des prĂ©tendants Ă  l’intronisation[10].

 Photo de la reine mĂšre lors des obsĂšques de Norodom Sihanouk
La derniĂšre Ă©pouse, Paule-Monique Izzi.

Si comme ses prĂ©dĂ©cesseurs, il a pratiquĂ© dans sa jeunesse la polygamie, il semble avoir renoncĂ© Ă  cette pratique peu aprĂšs s’ĂȘtre mis en mĂ©nage avec sa derniĂšre compagne qui est restĂ©e Ă  ses cĂŽtĂ©s la majeure partie de sa vie. Il a eu sept Ă©pouses et quatorze enfants[11] :

  1. en 1942, il épouse Neak Moneang Phat Kanhol (1920-1969), danseuse étoile du ballet royal ; elle lui donnera deux enfants (avant de le quitter en 1945, de se remarier et d'avoir d'autres enfants, dont Chap Nhalyvoud qui sera gouverneur de Siem Reap au début des années 2000[12] - [13]) :
    1. la princesse Norodom Bopha Devi (1943-2019)
    2. le prince Norodom Ranariddh (1944-2021)
  2. également en 1942, il épouse la princesse Sisowath Pongsanmoni (1929-1974), fille du roi Monivong et de Khun Nath, une de ses concubines ; la princesse était ainsi la demi-tante de son époux. Ils auront sept enfants, avant de se séparer en 1951[14] - [15] :
    1. le prince Norodom Yuvaneath (1943-2021)
    2. le prince Norodom Rachvivong (1944-1973)
    3. le prince Norodom Chakrapong (né en 1945)
    4. la princesse Norodom Sorya Roeungsy (1947-1976)
    5. la princesse Norodom Kantha Buppha (1948-1952)
    6. le prince Norodom Khemanourak (1949-1975)
    7. la princesse Norodom Botoum Buppha (1951-1976)
  3. en 1943, il épouse Anak Munang Thach, une des derniÚres favorites du roi Monivong avec qui il n'aura aucun enfant. Leur liaison ne sera révélée par Norodom Sihanouk qu'une soixantaine d'années plus tard[16].
  4. en 1944, il Ă©pouse la princesse Sisowath Naralaksha Munikesara (1929-1946), une autre fille du roi Monivong, et donc demi-sƓur de Pongsanmoni et de la mĂšre de Sihanouk. Ils ont un fils adoptif :
    1. le prince Norodom Naradipo (1946-1976)[17] - [18].
  5. en 1946, et de maniĂšre officielle le 4 mars 1955, il se marie avec la princesse Devisa Naralakshmi (1927-2017), qui prendra le nom de Norodom Thaveth Norleak ; ils n'auront aucun enfant et ils divorceront Ă  une date inconnue[19] - [20].
  6. en 1949, il Ă©pouse Mam Manivan Phanivong (en) (1934-1975), fille d’un dignitaire laotien ; il aura avec elle deux enfants :
    1. la princesse Norodom Sucheathvatea (1953-1975)[note 2]
    2. la princesse Norodom Arunrasmy (née en 1955)[22].
  7. en 1952, il se marie avec Paule-Monique Izzi, fille de Jean-François Izzi, un Français d'origine italienne, directeur du CrĂ©dit foncier de l'Indochine et proche de Norodom Suramarit, pĂšre de Sihanouk. La mĂšre de celle qui allait devenir la princesse Monique puis la reine Monineath, Pomme Peang, entretenait pour sa part des relations d’amitiĂ© avec Khun Nath, la mĂšre de Pongsanmoni. Monique restera aux cĂŽtĂ©s de Sihanouk jusqu’à la mort du souverain[23] - [24]. Ils auront deux enfants :
    1. le prince Norodom Sihamoni (né en 1953), roi du Cambodge depuis 2004
    2. le prince Norodom Narindrapong (1954-2003)

Jeunesse

L’astrologue du palais royal ayant prĂ©dit au futur monarque un grand destin Ă  la condition qu’il soit trĂšs tĂŽt sĂ©parĂ© de ses parents, il fut Ă©levĂ© d’abord par une arriĂšre-grand-mĂšre maternelle avant, Ă  la mort de cette derniĂšre en 1929, d’ĂȘtre confiĂ© Ă  ses grands-parents paternels[25].

Enfant unique de parents sĂ©parĂ©s, Norodom Sihanouk estime avoir eu une enfance solitaire et introvertie[26], alors que d’autres se rappellent un prince turbulent[27]. Quand son pĂšre, prince royal, n’était pas pris par le protocole, il passait son temps dans des activitĂ©s sociales[28].

AprĂšs un dĂ©but de scolaritĂ© dans un Ă©tablissement francophone, l’École primaire François Baudouin de Phnom Penh, il effectua sa sixiĂšme au lycĂ©e Sisowath, toujours dans la capitale cambodgienne, puis intĂ©gra le prestigieux lycĂ©e Chasseloup-Laubat de SaĂŻgon afin d’y prĂ©parer un baccalaurĂ©at de philosophie[29].

Une partie importante du programme Ă©tait consacrĂ©e Ă  l’histoire et Ă  la culture française. ÉlĂšve d’un bon niveau mais peu studieux, il excellait dans les matiĂšres artistiques, goĂ»t qu’il conservera toute sa vie. Son statut royal empĂȘchant les autres Cambodgiens d’avoir trop de contact avec lui, il se lia d’amitiĂ© avec plusieurs Ă©tudiants français[30].

NĂ©anmoins, il ne put terminer ses Ă©tudes et dut retourner Ă  18 ans au Cambodge pour une mission Ă  laquelle il allait consacrer le reste de sa vie[31].

CarriĂšre politique

Celui dont Gilles Cayatte a vantĂ© la capacitĂ© Ă  rebondir et Ă  qui il attribuait neuf vies[32], peut se targuer d’un nombre impressionnants de titres, qu’il porta parfois de maniĂšre simultanĂ©e, tels que roi (deux fois), chef de l'État (deux fois Ă©galement), prĂ©sident, Premier ministre (neuf fois), chef de front ou de gouvernement en exil et enfin Roi-PĂšre.

Le jeune roi (24 avril 1941)

Norodom Sihanouk lors de son couronnement.

Les dĂ©buts d’un roi (1941-1944)

Le Palais Royal de Phnom Penh, oĂč s'installa le jeune Roi, Norodom Sihanouk, en 1941.

La carriĂšre politique de Norodom Sihanouk dĂ©butait en 1941, lorsque Ă  la mort de son grand-pĂšre le roi Sisowath Monivong, il a Ă©tĂ© appelĂ© Ă  lui succĂ©der sur le trĂŽne. Ce sera aussi l’occasion de la premiĂšre des nombreuses controverses qui alimenteront sa vie. Alors que sa biographie se contente de dĂ©clarer laconiquement qu’il « est Ă©lu Roi du Cambodge par le Conseil de la Couronne, Ă  Phnom Penh »[33], il Ă©crira dans ses mĂ©moires qu’il a Ă©tĂ© choisi par l’amiral Decoux, alors gouverneur gĂ©nĂ©ral de l’Indochine au dĂ©triment de Sisowath Monireth, fils du roi dĂ©funt car la France pensait que le jeune roi serait plus facile Ă  manƓuvrer que son oncle[34]. L’amiral Decoux donne cependant dans ses mĂ©moires une version tout opposĂ©e et prĂ©tend qu’alors que les autoritĂ©s coloniales avaient manifestĂ© leur prĂ©fĂ©rence pour Monireth qui Ă©tait allĂ© suivre une formation militaire en France, elles avaient dĂ» s’incliner devant l’ancĂȘtre du Conseil du TrĂŽne[note 3] qui choisissait Ă  l’unanimitĂ© le jeune Norodom Sihanouk[36]. On notera quand mĂȘme que la premiĂšre version fait quasiment l’unanimitĂ©[37] - [38] - [39].

Les quatre premiĂšres annĂ©es de son rĂšgne, Norodom Sihanouk fut un monarque accommodant et un Ă©lĂšve volontaire. Ses activitĂ©s Ă©taient fermement contrĂŽlĂ©es par l’administration française qui le laissait entreprendre quelques rĂ©formes lĂ©gislatives et protocolaires mesurĂ©es et l’encourageait Ă  effectuer des visites dans les campagnes, une coutume Ă  laquelle il prendra goĂ»t et qu’il affectionnera durant le reste de sa carriĂšre[40].

Fin de l’hĂ©gĂ©monie française (1945)

En mars 1945, l'empire du Japon prenait le contrĂŽle de l'Indochine, dĂ©truisant l'administration coloniale française. PressĂ© par les Japonais, Norodom Sihanouk proclama l'indĂ©pendance du Cambodge, mais sans trop s'avancer dans la collaboration avec le nouvel occupant[41]. Il fut de ce fait trĂšs vite mis sous la tutelle de Son Ngoc Thanh, dirigeant nationaliste jusque-lĂ  en exil Ă  Tokyo qui, par sa francophobie, offrait de meilleures garanties de soutien aux autoritĂ©s nippones. Son Ngoc Thanh, se proclama chef du gouvernement dans la nuit du 8 au 9 aoĂ»t[42]. Cette premiĂšre indĂ©pendance, toute relative, sera de courte durĂ©e et prendra fin en octobre de la mĂȘme annĂ©e, quand les Français revenant aux affaires, emprisonnaient Son Ngoc Thanh en mĂ©tropole et le remplaçaient sur place par Sisowath Monireth[43].

Toutefois, la situation au Cambodge n’était plus celle d’avant-guerre et le nouveau chef de gouvernement rĂ©clamait une certaine autonomie pour son pays ; il obtenait la crĂ©ation d’une assemblĂ©e au rĂŽle consultatif et la rĂ©daction d’une constitution. Le jeune roi tint alors Ă  sortir de son rĂŽle de figuration et demanda deux amendements importants : alors qu’il Ă©tait prĂ©vu d’élire l’assemblĂ©e au suffrage censitaire et d’ainsi favoriser les Ă©lites locales, Norodom Sihanouk insista pour qu’il lui soit substituĂ© le suffrage universel. Il demandait aussi que la rĂ©daction de cette constitution qui devait ĂȘtre l’Ɠuvre d’un comitĂ© soit en fait dĂ©volue Ă  l’assemblĂ©e Ă©lue[44].

Premiers pas vers l’autonomie (1946-1949)

Les Ă©lections eurent lieu en septembre 1946 et virent la victoire du Parti dĂ©mocrate proche des milieux indĂ©pendantistes. À cette occasion, le roi entravera les manƓuvres d’intimidation du pouvoir colonial et de Monireth qui pour des raisons diverses voulaient Ă©viter cette victoire. Il devra ensuite insister auprĂšs de son oncle pour qu’il accepte de laisser la place au Prince Sisowath Youtevong, dirigeant du parti vainqueur[45].

Les dĂ©mocrates, dĂ©sireux de faire accĂ©der le Cambodge Ă  l’indĂ©pendance tentĂšrent de rĂ©Ă©crire la constitution et Youtevong fit des sĂ©jours frĂ©quents au Palais pour prĂ©senter des amendements. Norodom Sihanouk fit alors preuve d’une « ardeur juvĂ©nile » pour ces rĂ©formes, mais pas d’une forte assiduitĂ©. Cette passivitĂ© peut paraĂźtre surprenante, si on se rappelle que plus tard il n’hĂ©sitera pas Ă  prĂ©senter la constitution comme un cadeau qu’il avait fait au peuple cambodgien[46]. Les dĂ©mocrates firent alors une erreur de jugement concernant le jeune monarque, mettant, Ă  tort, sa timiditĂ© et sa complaisance sur le compte d’un engouement pour les rĂ©formes dĂ©mocratiques et par la mĂȘme, pour une limitation de ses pouvoirs et privilĂšges[47].

Le pouvoir colonial dĂ©cidait dans le mĂȘme temps de parfaire la formation du monarque et l’envoyait en 1946 et 1948 Ă  l’école d'application de l'arme blindĂ©e et de la cavalerie de Saumur[48]. Il s’agissait pour lui du premier voyage hors des limites de l’Indochine française et outre le sĂ©jour en mĂ©tropole, il profitera du trajet pour Ă©galement visiter Singapour, la Birmanie, les Indes britanniques, Ceylan, l’Arabie saoudite et l’Égypte. Il s’agissait alors d’un avant-goĂ»t des nombreuses tournĂ©es Ă  l’étranger qui rythmeront sa longue carriĂšre[49].

Penn Nouth — ici en 1947 — sera sept fois Premier ministre entre 1948 et 1976

Sur le plan politique, le Parti démocrate cambodgien, malgré sa situation de mouvement majoritaire, perdit rapidement de sa cohérence. Sisowath Youtevong mourut dÚs juillet 1947, compromettant l'unité du parti, auquel la victoire aux élections de novembre ne suffisait pas à apporter la sérénité. Les Français étaient en outre inquiets des liens de certains membres du Parti avec les rebelles indépendantistes Khmers Issarak. La chambre étant dominée par les démocrates divisés, le Cambodge souffrait d'instabilité ministérielle. Norodom Sihanouk, profitant des dissensions au sein du parti majoritaire, décidait finalement de dissoudre l'assemblée le . Prétextant l'insécurité régnant dans certaines régions, il s'abstint d'organiser de nouvelles élections[50].

Cela lui permettait de diriger le pays par dĂ©cret. Dans le mĂȘme temps, Jean de Raymond, le nouveau commissaire de la RĂ©publique française, louait l’apolitisme et la bonne intelligence qui rĂ©gnait dans le nouveau gouvernement. En plusieurs autres occasions, le commissaire mentionnait le contraste entre le patriotisme de Norodom Sihanouk et l’« immaturitĂ© » des Ă©lus cambodgiens. FlattĂ© par ce jugement, il n’allait pas tarder Ă  partager ce point de vue[51].

La position de Sihanouk Ă©tait encore renforcĂ©e par la dĂ©fection de Dap Chhuon, l'un des chefs Khmers Issarak, qui annonçait, le 1er octobre, un ralliement au gouvernement royal avec ses 400 hommes, ralliement confirmĂ© lors d’une cĂ©rĂ©monie grandiose dans le parc d’Angkor Thom[52]. Chhuon devint le commandant du Corps franc khmer et contrĂŽlait le nord de la province de Siem Reap. Il y fit cependant preuve d'une indĂ©pendance et d'une indiscipline totales, faisant Ă  l'occasion double jeu avec les Issarak qu'il ravitaillait de temps Ă  autre et menaçait de rallier en cas d'atteinte Ă  sa libertĂ© d'action[53].

Sihanouk nĂ©gocia aussi avec les Français pour faire Ă©voluer le statut de son pays, et, le 8 novembre 1949, il signait avec la puissance coloniale un traitĂ© franco-khmer, qui abolissait formellement le protectorat et reconnaissait l’autonomie du Cambodge dans le cadre de l'Union française[54]. Sihanouk prĂ©tendra plus tard qu’il s’agissait d’une « indĂ©pendance Ă  50 % ». La France gardait la mainmise sur l’économie et la dĂ©fense mais faisait quelques concessions en matiĂšre de relations extĂ©rieures. Le royaume khmer pouvait recevoir des lĂ©gations diplomatiques, prĂ©alablement accrĂ©ditĂ©es par le pouvoir colonial et envoyer des reprĂ©sentants Ă  l’étranger. Les États-Unis et le Royaume-Uni reconnurent aussitĂŽt les nouveaux Ă©tats du Cambodge, Laos et ViĂȘt Nam ; l’aide Ă©conomique et militaire amĂ©ricaines ne tardĂšrent pas Ă  affluer. La demande pour ĂȘtre membre de l’Organisation des Nations unies essuya par contre un veto de l’URSS, mais le royaume put quand mĂȘme rejoindre certains organismes internationaux tels l’Organisation mondiale de la santĂ© ou l’UNESCO[55].

Sentant que le temps travaillait pour leur pays, Sihanouk et son nouveau Premier ministre, Yem Sambaur, maintenaient la pression sur les autoritĂ©s françaises. Comme beaucoup de leurs compatriotes, ils Ă©taient circonspects quant au maintien d’une Indochine au sein de l’Union française qui serait dominĂ©e par les Vietnamiens. Ils espĂ©raient Ă©galement pouvoir obtenir de l’ancienne puissance coloniale la reconnaissance de ce qu’ils estimaient ĂȘtre les droits inaliĂ©nables du Cambodge sur la Cochinchine. De ce fait, ils refusaient de signer un accord sur la frontiĂšre khmĂ©ro-vietnamienne qui aurait constituĂ© de facto un renoncement Ă  leurs prĂ©tentions. Les Français trouvaient cette position totalement utopique. Partageant le mĂȘme point de vue, un diplomate britannique Ă©crivait dans une note retrouvĂ©e par David Chandler, que les Cambodgiens « perdaient le sens des rĂ©alitĂ©s et qu’ils Ă©taient un cas classique de peuple qui essayait de courir avant de savoir marcher »[56].

PremiĂšres frictions avec l’assemblĂ©e (1950-1951)

Au dĂ©but de 1950, Norodom Sihanouk tentait des rĂ©formes constitutionnelles qui pouvaient restreindre le pouvoir de l’assemblĂ©e, mais il n’était soutenu ni par les dĂ©mocrates ni par les libĂ©raux qui voulaient de nouvelles Ă©lections. Les petits partis, qui n’avaient pas de reprĂ©sentants, militaient eux pour un renforcement du pouvoir royal, rejoints par le commissaire de Raymond et le roi qui se considĂ©rait comme le « pĂšre de la nation et le premier citoyen cambodgien », une vision qu’il maintiendra pendant le reste de sa carriĂšre. Alors que les partis en place soutenaient l’idĂ©e d’un gouvernement d’union nationale dont serait exclu Yem Sambaur, le monarque affirmait qu’il dĂ©sirait continuer Ă  travailler avec lui[57]. Toutefois Ă  la fin avril Yem Sambaur dĂ©missionnait et Sihanouk retrouvait un poste de Premier ministre qu’il avait briĂšvement tenu lors de l’occupation japonaise de 1945, mais le cĂ©dait moins d’un mois plus tard Ă  son oncle le prince Sisowath Monipong[58].

La prĂ©paration de nouvelles Ă©lections voyait une confrontation entre d’une part Norodom Sihanouk, le pouvoir colonial ainsi que les conservateurs cambodgiens et dans l’autre camp le Parti dĂ©mocrate alliĂ© de fait avec les rebelles indĂ©pendantistes. Afin d’assurer les bases de nouveaux votes, le Premier ministre Sisowath Monipong proposait une nouvelle loi Ă©lectorale mais les libĂ©raux et les dĂ©mocrates exigeaient de reconduire l’AssemblĂ©e Ă©lue en 1947 alors que les petits partis qui n’avaient gagnĂ© aucun siĂšge en 1947 voulaient la tenue de nouvelles Ă©lections. Sihanouk demandait aux leaders des diffĂ©rentes formations de trouver un compromis. Impuissant Ă  sortir de la crise, Monipong prĂ©sentait la dĂ©mission de son gouvernement Ă  la fin de fĂ©vrier 1951. Un nouveau cabinet apolitique dirigĂ© par Oum Cheang Sun fut mis en place dĂšs le 3 mars 1951, mais les dĂ©mocrates refusaient de s’associer Ă  ce nouveau gouvernement[59].

Peu aprĂšs, Norodom Sihanouk confiait Ă  Donald R. Heath (en), ministre amĂ©ricain aux États associĂ©s, que le peuple « rĂ©clamait une assemblĂ©e et le maintien de la constitution ». Quelques jours plus tard, il affirma au haut-commissaire de Raymond que de nouvelles Ă©lections n’étaient pas envisageables. En fait, il essayait de tenir Ă  chaque interlocuteur le discours que ce dernier voudrait entendre, inaugurant un procĂ©dĂ© qu’il utilisera toute sa vie. Il semble qu’en rĂ©alitĂ© il voulait de nouvelles Ă©lections afin de laisser penser qu’il faisait respecter la constitution, mais il espĂ©rait aussi une dĂ©faite des dĂ©mocrates[60].

MalgrĂ© les tentatives pour promouvoir d’autres partis, les Ă©lections du 9 septembre 1951 virent une nouvelle victoire des dĂ©mocrates. Norodom Sihanouk et les dirigeants des petits partis qui n’avaient pu gagner le moindre siĂšge, vĂ©curent ce nouveau scrutin comme un camouflet, et envisageaient de prendre ou de garder le pouvoir par des moyens moins conventionnels[61].

Depuis plusieurs annĂ©es, Norodom Sihanouk, influencĂ© par son pĂšre et des proches de celui-ci, demandait au pouvoir colonial de rĂ©duire la peine de Son Ngoc Thanh alors en rĂ©sidence surveillĂ©e dans le Poitou, et de lui permettre de revenir au Cambodge. Le roi aurait espĂ©rĂ© que ce retour pouvait diviser le Parti dĂ©mocrate. D’autre part, d’aprĂšs un proche de Thanh, Sihanouk lui aurait aussi Ă©tĂ© reconnaissant d’avoir, en 1945, intercĂ©dĂ© en sa faveur auprĂšs des autoritĂ©s japonaises qui voulaient le remplacer par un membre de la famille royale moins francophile. Les Français, de leur cĂŽtĂ© ne considĂ©raient plus Thanh comme un danger et accepteront de le laisser rentrer[62].

L’avion de Thanh arrivait Ă  Phnom Penh l’aprĂšs-midi du 29 octobre 1951 et fut accueilli par des dirigeants du Parti dĂ©mocrate. Le trajet de sept kilomĂštres qui sĂ©pare l’aĂ©roport du centre-ville prit une heure dans une voiture dĂ©capotable au milieu d’une foule enthousiaste estimĂ©e Ă  100 000 personnes. Sihanouk se serait senti vexĂ© et aurait mis un point d’honneur, deux ans plus tard, Ă  parcourir le mĂȘme trajet pour clore une tournĂ©e Ă  Siem Reap et Ă  se faire acclamer par une affluence encore plus importante[63].

Dissensions avec les démocrates (1952)

Mais ce retour Ă  la vie publique sera de courte durĂ©e et dĂšs le 9 mars 1952, Son Ngoc Thanh rejoignait les maquis de la forĂȘt de Siem Reap, oĂč Ă  nouveau il exprimait le souhait d’une indĂ©pendance immĂ©diate et l’établissement d’un gouvernement rĂ©publicain au Cambodge[64]. À Phnom Penh, la dĂ©cision des dĂ©mocrates de ne pas envoyer Ă  Siem Reap des forces de sĂ©curitĂ© contre Thanh semble avoir marquĂ© un point de non-retour dans leurs relations, dĂ©jĂ  orageuses, avec Norodom Sihanouk. Le dĂ©part de Son Ngoc Thanh servit de prĂ©texte Ă  Norodom Sihanouk pour fustiger les dĂ©mocrates et ce que le monarque appelait la « politique d’insĂ©curitĂ© et de trahison » de leur parti. La crise atteignit son paroxysme en mai et juin 1952. À Battambang, des Ă©tudiants manifestaient pour une indĂ©pendance immĂ©diate alors que d’autres Ă  Kampong Cham arboraient des slogans rĂ©solument hostiles au roi. Les protestations s’étendirent et dĂ©gĂ©nĂ©rĂšrent en Ă©meutes ; Ă  Battambang, la police tira sur la foule. Alors que les dĂ©mocrates jugeaient que ces Ă©vĂ©nements jouaient en leur faveur, Norodom Sihanouk y voyait le dĂ©but du chaos[65].

DĂ©but juin, rĂ©unis en congrĂšs Ă  Phnom Penh, et aprĂšs avoir tĂ©moignĂ© de leur loyautĂ© envers le roi qui « a toujours daignĂ© conduire la nation 
 sur le chemin de l’indĂ©pendance », les dĂ©mocrates nommaient un Ă©conomiste rĂ©putĂ©, Son Sann, prĂ©sident du parti. La formation se montrait prĂȘte Ă  coopĂ©rer avec Norodom Sihanouk, mais le monarque semblait rĂ©ticent Ă  rendre la pareille. Deux jours aprĂšs le congrĂšs, lors du discours d’ouverture de la session parlementaire, oĂč le parti dĂ©mocrate Ă©tait largement majoritaire, le roi mettait en garde contre les risques de dictature rĂ©sultant d’un parti unique. Le ministĂšre de l’information mit dix jours Ă  publier la traduction en français de la remarque royale. Cela provoqua la colĂšre de Sihanouk et, Ă  partir du 7 juin, des tracts circulĂšrent demandant la dissolution de l’assemblĂ©e et le renvoi du Premier ministre Huy Kanthoul. Les partis minoritaires poussaient eux aussi dans cette voie anticonstitutionnelle[66].

Les dĂ©mocrates rĂ©agirent en envoyant la police aux domiciles des dirigeants de petits partis, notamment Sam Nhean, Lon Nol et Yem Sambaur qui furent placĂ©s en dĂ©tention quelques heures. D’aprĂšs Huy Kanthoul, l’arrestation de Yem Sambaur aurait fait suite Ă  des soupçons d’implication dans l’attentat qui, deux annĂ©es auparavant, avait coĂ»tĂ© la vie Ă  Ieu Koeus, ancien Premier ministre, dirigeant du parti dĂ©mocrate. Une caisse de grenades fut dĂ©couverte Ă  sa rĂ©sidence et trois fusils mitrailleurs furent saisis chez Lon Nol[67]. Le 14 juin les autoritĂ©s coloniales envoyaient Ă  Phnom Penh un bataillon d’infanterie marocain et un escadron armĂ© « pour une dizaine de jours », officiellement afin de prĂ©venir des troubles[68]. Jean Risterucci, le nouveau Commissaire de la RĂ©publique française au Cambodge, prĂ©tendra plus tard que la dĂ©cision d’envoyer des troupes n’avait pas de lien avec les Ă©vĂ©nements qui allaient suivre. Il semble en fait que Sihanouk et ses parents aient Ă©tĂ© offusquĂ©s par l’arrestation d’Yem Sambaur ; toujours est-il que l’arrivĂ©e de troupes coloniales et le fait que les astrologues du Palais royal avaient prĂ©dit qu’une tentative de mise Ă  l’écart des dĂ©mocrates serait couronnĂ©e de succĂšs poussait Sihanouk Ă  passer Ă  l’action. Le soutien des Français Ă  une telle action n’était pas une surprise, mais les dĂ©mocrates semblent avoir Ă©tĂ© Ă©tonnĂ©s par ce qui allait suivre[69]. Le dimanche 15 juin, alors que les troupes marocaines se dĂ©ployaient en divers points de Phnom Penh, Norodom Sihanouk utilisait une des prĂ©rogatives que lui offrait la constitution pour dĂ©mettre brusquement l’ensemble du gouvernement de Huy Kanthoul et prendre la tĂȘte d’un nouveau cabinet dans lequel il nommait son cousin Sisowath Sirik Matak Ă  la dĂ©fense et Sim Var, un vieil ami de son pĂšre comme ministre de l’information. Le roi promettait d’éradiquer la corruption pour 1954 et d’arracher aux Français l’indĂ©pendance totale avant 1955. Dans le mĂȘme temps, les troupes coloniales encerclaient l’AssemblĂ©e et les tanks sillonnaient les principales artĂšres de Phnom Penh. Deux jours plus tard elles retournaient Ă  Saigon et un dĂ©cret royal Ă©tait promulguĂ©, interdisant les rĂ©unions politiques et la propagande. La croisade royale pour l’indĂ©pendance – une carte blanche politique que Sihanouk s’était octroyĂ©e – Ă©tait en marche[70]. Sihanouk convoquait Thomas Gardiner Corcoran, le chargĂ© d’affaires amĂ©ricain et son homologue thaĂŻ pour les informer des raisons de son action. Sihanouk justifiait le renvoi de Kanthoul par le support du parti dĂ©mocrate Ă  Son Ngoc Thanh et par sa « politique dictatoriale envers les minoritĂ©s »[71].

Sihanouk restait au Palais royal pour quelques jours. James Guillion, le chargĂ© d’affaires amĂ©ricain Ă  SaĂŻgon lui rendit visite Ă  ce moment et le trouvait « excitĂ© ». Il reconnaissait qu’il avait besoin des Français pour soutenir l’économie cambodgienne et pour lutter contre la rĂ©bellion, mais il voulait aussi Ă©laborer une stratĂ©gie personnelle. Les autoritĂ©s coloniales devaient penser qu’aprĂšs l’avoir aidĂ© Ă  Ă©carter les dĂ©mocrates, Norodom Sihanouk accepterait d’abandonner ses vues indĂ©pendantistes ; l’avenir montrera combien ils se trompaient[72] !

En France, les Ă©tudiants s’étaient rangĂ©s du cĂŽtĂ© des dĂ©mocrates. Un numĂ©ro spĂ©cial de leur magazine Khemarak NisƓt (« l’Étudiant Khmer »), est consacrĂ© au renvoi d’Huy Kanthoul. Outre Keng Vannsak (en) et Hou Yuon, Saloth SĂąr, sous le pseudonyme de Khmer Daeum (Khmer de base), attaquait Ă©nergiquement la royautĂ©. Le ton de l’article Ă©tait plus proche du parti dĂ©mocrate et de Son Ngoc Thanh que de l’idĂ©ologie marxiste, mais la mise sous l’éteignoir de la formation d’Huy Kanthoul aurait amenĂ© plusieurs Ă©tudiants cambodgiens Ă  embrasser les thĂšses du communisme[73].

Dans les mois qui suivaient, Sihanouk s’impatientait devant les retards des Français Ă  mettre en Ɠuvre les rĂ©formes promises. Il faisait remarquer qu’il portait sur ses Ă©paules « le poids Ă©crasant de 16 siĂšcles de royautĂ© qui ont amenĂ© la grandeur du pays et la paix Ă  son peuple ». Il omettait juste de prĂ©ciser que depuis le XVIIe siĂšcle la plupart des rois cambodgiens Ă©taient faibles, impopulaires et dominĂ©s par des puissances Ă©trangĂšres. Si tel n’avait pas Ă©tĂ© le cas, la France aurait eu beaucoup plus de mal Ă  instaurer le protectorat qu’avait demandĂ© dĂšs 1853 Ang Duong pour se libĂ©rer de la tutelle siamoise. Par la suite, il allait souvent faire rĂ©fĂ©rence Ă  la pĂ©riode angkorienne pour lĂ©gitimer son pouvoir
 et passer sous silence celle qui a suivi[74].

Comme le roi Chulalongkorn avant lui au Siam, Sihanouk peut ĂȘtre considĂ©rĂ© comme un hĂ©ritier des despotes Ă©clairĂ©s, utilisant les techniques contemporaines pour asseoir un absolutisme jusque-lĂ  cĂ©rĂ©moniel, dĂ©crĂ©pit et considĂ©rĂ© comme acquis. Les rĂ©gimes qui suivront intensifieront cette omnipotence et rejetteront toute forme de pluralisme susceptible de contester leur lĂ©gitimitĂ© Ă  exercer seuls le pouvoir. Toutefois, contrairement Ă  ces successeurs, il pouvait compter sur une forte popularitĂ© auprĂšs des populations rurales cambodgiennes qui lui attribuaient des pouvoirs surnaturels et la capacitĂ© Ă  assurer la prospĂ©ritĂ© de leur pays[75].

La croisade pour l’indĂ©pendance (1953)

En janvier 1953, alors que la nouvelle session parlementaire s’ouvrait, les dĂ©mocrates Ă©taient prĂȘts Ă  en dĂ©coudre avec le roi. Ils estimaient que leur victoire aux Ă©lections leur donnait le droit de diriger le pays, mĂȘme si leur gouvernement avait Ă©tĂ© dissout. Le 11, Sihanouk s’adressait au parlement et demandait qu’on lui accorde des pouvoirs spĂ©ciaux car la patrie aurait Ă©tĂ© en danger, prĂ©textant des grĂšves dans des lycĂ©es de Phnom Penh et Kampong Cham, ainsi que l’assassinat d’un gouverneur de province par le Việt Minh[76]. Il attribuait la responsabilitĂ© des troubles Ă  Son Ngoc Thanh et reprochait aux dĂ©mocrates de supporter le leader indĂ©pendantiste. Sihanouk espĂ©rait que ces derniers allaient dĂ©missionner ou refuseraient sa demande et qu’il pourrait alors les Ă©carter. Ils choisirent la seconde option et le roi fit encercler l’assemblĂ©e par la troupe, la fit dissoudre et abrogea une sĂ©rie de droits civiques[77]. Il annonçait en outre une sĂ©rie de rĂ©formes, et l'Ă©volution vers une indĂ©pendance « pleine et entiĂšre »[78].

Le Cambodge Ă©tait-il rĂ©ellement en danger ou Sihanouk essayait-il d’accroitre son pouvoir ? Dans ses mĂ©moires, Sisowath Monireth indique que certains dĂ©mocrates, blessĂ©s par la conduite de Sihanouk l’annĂ©e prĂ©cĂ©dente, dĂ©siraient profiter de l’ouverture de la nouvelle session parlementaire pour demander l’instauration d’une rĂ©publique. La tentative serait venue aux oreilles de la princesse Kossamak, mĂšre de Sihanouk, grĂące Ă  l’épouse dĂ©laissĂ©e d’un dĂ©putĂ©. Furieuse, elle aurait ordonnĂ© Ă  l’imprimerie royale de prĂ©parer un dĂ©cret demandant la dissolution de l’AssemblĂ©e qu’elle ferait signer Ă  son fils. Si la thĂšse parait crĂ©dible, il semble toutefois que le « conjuration » en soit restĂ©e au stade de discussions entre personnes déçues par des annĂ©es d’humiliation[79]. Toujours est-il que fort de ces pouvoirs spĂ©ciaux Sihanouk fit emprisonner dix-sept dĂ©mocrates, dont neuf anciens dĂ©putĂ©s, pour « complot contre l’État ». Ils furent dĂ©tenus huit mois sans qu'ils passent jamais en jugement. Un Ă©ditorialiste tempĂ©rait peu aprĂšs la portĂ©e de l’évĂšnement, rappelant que les Cambodgiens ont l’habitude depuis des siĂšcles de vivre dans une sociĂ©tĂ© « paternaliste et autoritaire » et que l’absence de rĂ©action Ă  l’incarcĂ©ration des responsables dĂ©mocrates prouvait l’assentiment populaire pour la mesure[80]. En fĂ©vrier 1953, Sihanouk partait pour la France, officiellement pour des vacances, en rĂ©alitĂ© pour tenter d’arracher plus de concessions au pouvoir colonial[66].

Personne n’attendait quoi que ce soit d’important du sĂ©jour en France de Norodom Sihanouk. Les autoritĂ©s coloniales au Cambodge approuvaient l’action du Prince qui avait dĂ©mantelĂ© le gouvernement issu des Ă©lections lĂ©gislatives et espĂ©raient qu’il exercerait un pouvoir absolu mais prĂ©serverait leurs intĂ©rĂȘts militaires et financiers. La francophilie du roi semblait les prĂ©munir contre des demandes inconsidĂ©rĂ©es[81].

Norodom Sihanouk Ă©tait en train de devenir un puissant dirigeant politique. Il estimait que le pouvoir des Français en Indochine touchait Ă  sa fin. En outre, l’opposition politique venait de disparaĂźtre. Les dĂ©mocrates avaient Ă©tĂ© les seuls Ă  avoir militĂ© pour une indĂ©pendance dans un cadre constitutionnel. Maintenant, Sihanouk allait faire sienne leur cause sans pour autant les en crĂ©diter d’aucune paternitĂ©. Comme il allait plus tard le montrer Ă  maintes reprises, sous des dehors hautains, il cachait en fait un sens insoupçonnĂ© de la stratĂ©gie[82].

Entre fĂ©vrier et novembre 1953, le roi menait une campagne pour redonner l’indĂ©pendance au Cambodge. La croisade allait devenir son heure de gloire, mĂȘme si son implication tardive et sa francophilie faisaient au dĂ©part douter ses interlocuteurs de sa sincĂ©ritĂ©. Les Français Ă©taient Ă©tonnĂ©s que les vacances du monarque se transforment ainsi en visite d’État et surpris par la lettre qu’il adressait au prĂ©sident Vincent Auriol dans laquelle il affirmait que la population cambodgienne « unanime espĂ©rait rĂ©solument l’indĂ©pendance »[83].

Jean Letourneau, le Ministre des Relations avec les États associĂ©s, fit savoir Ă  Sihanouk que ses initiatives paraissaient dĂ©placĂ©es[84]. N’ayant obtenu aucune concession, le monarque dĂ©cidait d’abrĂ©ger son sĂ©jour et de rentrer en passant par le Canada, les États-Unis et le Japon. À Washington, il fut mis en garde par John Foster Dulles, le SecrĂ©taire d'État amĂ©ricain, contre une indĂ©pendance prĂ©maturĂ©e du Cambodge qui lui semblait dĂ©raisonnable. Sans la protection des Français, il pensait que le royaume khmer ne serait pas long Ă  tomber aux mains des communistes[85]. « ProfondĂ©ment dĂ©sabusĂ© » par cet entretien, il accordait une interview au New York Times qui d’aprĂšs Sihanouk fit l’effet d’une bombe sur l’opinion amĂ©ricaine et mondiale. Il demandait que les Français accordent aux diffĂ©rentes composantes de l’Indochine française un statut Ă©quivalent Ă  celui des pays du Commonwealth et affirmait que si l’indĂ©pendance Ă©tait reportĂ©e, les Cambodgiens pourraient « se rĂ©volter contre le rĂ©gime actuel et rejoindre le Việt Minh »[86]. L’interview eut au moins un des effets dĂ©sirĂ©s : peu aprĂšs sa publication, les Français faisaient savoir qu’ils acceptaient de rouvrir des pourparlers avec les nĂ©gociateurs de Sihanouk restĂ©s Ă  Paris. À la fin avril 1953, le roi se rendait au Japon quand il aurait reçu un message de Dulles le poussant Ă  coopĂ©rer avec les Français[87].

De son voyage aux États-Unis, Sihanouk avait acquis la conviction que les AmĂ©ricains et leur politique Ă©taient mĂ©prisants Ă  son Ă©gard. Il trouvait choquants les sermons de Dulles et Ă©tait déçu que le PrĂ©sident Eisenhower ait refusĂ© de l’inviter Ă  un dĂźner officiel[88]. Par opposition, Ă  partir de 1955 et surtout dans les annĂ©es 1980, la rĂ©publique populaire de Chine et la France, ses principaux supports, prenaient garde Ă  toujours le traiter avec dĂ©fĂ©rence et d’en faire l’interlocuteur principal de toute discussion concernant son pays. Sa dĂ©fiance envers les États-Unis aura des consĂ©quences non nĂ©gligeables sur l’histoire contemporaine du Cambodge[89].

Pendant ce temps Ă  Paris, les Français comme promis entamaient des nĂ©gociations sur les demandes de Sihanouk. Ils n’étaient toujours pas dĂ©sireux de cĂ©der le contrĂŽle militaire des zones prĂšs de la frontiĂšre vietnamienne sous domination Việt Minh et dĂ©coupler les exportations cambodgiennes avec celles de la Cochinchine, oĂč leurs intĂ©rĂȘts s’accroissaient. Le roi Ă©tait contrariĂ© mais allait ĂȘtre rĂ©confortĂ© par les soutiens quasi unanimes qu’il trouva Ă  son retour au Cambodge en mai 1953[90].

Pour se soustraire aux conseillers coloniaux, Sihanouk dĂ©plaçait son quartier gĂ©nĂ©ral Ă  Siem Reap prĂšs des temples d’Angkor. Il bombardait les Français de demandes et accueillait les Khmers issarak qui rejoignaient sa cause[91]. Le gĂ©nĂ©ral de Langlade, le commandant militaire français au Cambodge, Ă©crivait Ă  ses supĂ©rieurs que la situation dans le royaume khmer Ă©tait dĂ©sespĂ©rĂ©e. Il affirmait qu’une victoire militaire nĂ©cessiterait quinze bataillons coloniaux supplĂ©mentaires, alors qu’abandonner le pays le conduirait Ă  l’anarchie. Peut-ĂȘtre pensait-il qu’accorder l’indĂ©pendance serait un moindre mal. AprĂšs tout, le roi ne prĂ©tendait-il pas que si on lui accordait une totale autonomie, il veillerait Ă  ce que le pays reste proche de la France pour quatre-vingt-dix nouvelles annĂ©es. Le gĂ©nĂ©ral concluait sa lettre en prĂ©tendant que « les Cambodgiens » — il devait penser Ă  Sihanouk — « Ă©taient vaniteux, susceptibles, idiots et trĂšs tĂȘtus ». Il trouvait vain de vouloir les attaquer de front, alors qu’au contraire, si on savait prendre ses habitants, on pouvait s’attacher le pays pour de nombreuses annĂ©es[92].

Sihanouk, dans le mĂȘme temps restait Ă  Angkor, isolĂ© des missions diplomatiques et de la presse Ă©trangĂšre. Sa croisade Ă©tait immobilisĂ©e. À la mi-juin, il dĂ©cidait d’aller Ă  Bangkok pour sensibiliser le public Ă  sa croisade. Quand il arriva dans la capitale thaĂŻlandaise, ses porte-paroles abreuvĂšrent les missions diplomatiques et les agences de presse locales de notices explicatives, rĂ©affirmant les revendications indĂ©pendantistes cambodgiennes. Les ThaĂŻs le remerciĂšrent de sa confiance mais ne lui fournirent aucune aide. LassĂ© au bout de quelques jours par l’inactivitĂ©, Sihanouk retourne de mauvaise humeur Ă  Siem Reap. Son escapade convainquit toutefois les Français du caractĂšre instable du monarque et leur fit penser qu’il Ă©tait sous l’influence au moins partielle des milieux francophobes et du Việt Minh[93].

Fin juin, Joseph Montllor, chargĂ© d'affaires amĂ©ricain Ă  Phnom Penh rencontrait Jean Risterucci, le commissaire français au Cambodge. Celui-ci lui confiait qu’il craignait que le roi ait excitĂ© le peuple avec une force telle que la situation risquait d’échapper Ă  tout contrĂŽle. Quelques jours plus tard, d’aprĂšs David Chandler (en), Risterucci s’était ravisĂ© et dans un autre entretien dĂ©clarait que l’histoire en marche Ă©tait du cĂŽtĂ© des Cambodgiens. D’autres sources confirmaient que l’opinion khmĂšre se rangeait largement derriĂšre la croisade royale. Pour la plupart, il Ă©tait temps que les Français s’en aillent. Les renseignements coloniaux abondaient dans ce sens en dĂ©clarant que « pour le roi, l’indĂ©pendance immĂ©diate Ă©tait une fin en soi, peu importe que le pays soit localement instable Ă  cause d’une politique dĂ©magogique »[94].

Dans le mĂȘme temps, en France, le gouvernement Laniel cherchait un moyen honorable de mettre un terme Ă  la « sale guerre » en Indochine. Les nĂ©gociations avec le Cambodge rĂ©pondaient aux initiatives gouvernementales et permettaient d’envoyer les forces armĂ©es sur d’autres thĂ©Ăątres d’opĂ©rations. Sihanouk Ă©tait pour sa part rĂ©ticent Ă  partager le crĂ©dit des Ă©vĂ©nements ou Ă  lier le destin du Cambodge Ă  celui du Laos ou du ViĂȘt Nam. Il vit que les Français Ă©taient prĂȘts Ă  accĂ©der Ă  ses demandes et Ă  nĂ©gocier directement avec lui de la seule question cambodgienne. Afin de renforcer sa position, il mobilisait des forces populaires pour « dĂ©fendre le pays contre l’insĂ©curitĂ©, le Việt Minh et Ă©ventuellement toute agression Ă©trangĂšre » ; la derniĂšre allusion visait de maniĂšre peu dĂ©tournĂ©e les Français. À la fin aoĂ»t, les forces armĂ©es comprenaient quelque 130 000 personnes, mal armĂ©es mais enthousiastes. Une demande Ă©tait faite aux autoritĂ©s coloniales pour les Ă©quiper, mais elle restera sans rĂ©ponse[95].

Les nĂ©gociations aboutissaient, le 17 octobre, Ă  la signature d’une convention qui transfĂ©rait aux autoritĂ©s cambodgiennes le contrĂŽle de la police, de l’appareil judiciaire et d’une grande partie des forces armĂ©es. Le pouvoir colonial conservait la direction des opĂ©rations militaires Ă  l’est du MĂ©kong. À part cette restriction, le Cambodge prĂ©sentait tous les signes de l’indĂ©pendance, ce qui ne signifiait pas pour autant qu’il fĂ»t sĂ»r. Peut-ĂȘtre prĂšs d’un district sur six Ă©tait sous le contrĂŽle de la guĂ©rilla et plus de la moitiĂ© du pays subissait la nuit des attaques des Khmers Issarak ou du Việt Minh[96].

Une fois l’indĂ©pendance acquise, Sihanouk fit le voyage de Siem Reap Ă  Phnom Penh, acclamĂ© par des milliers de sujets enthousiastes. Ce retour, qui intervenait deux ans jour pour jour aprĂšs celui de Son Ngoc Thanh, Ă©tait encore plus triomphal que le prĂ©cĂ©dent. Le 7 novembre, un corps composĂ© de parlementaires de l’assemblĂ©e dissoute 11 mois plus tĂŽt, Ă©levait Sihanouk au rang de hĂ©ros national. Deux jours plus tard, le 9 novembre 1953, l’indĂ©pendance du Cambodge Ă©tait officiellement proclamĂ©e[97].

AprĂšs cette victoire, une nouvelle partie commençait pour Sihanouk. Il n’avait alors pas de plan pour gouverner le Cambodge. Sa tournĂ©e avant sa croisade ne lui avait pas permis d’élaborer le dĂ©but d’une politique Ă©trangĂšre ; il n’avait pas dĂ©fini de modĂšle Ă©conomique et encore moins des prioritĂ©s. Cependant, il avait dirigĂ© son pays et l’avait amenĂ© Ă  l’indĂ©pendance. Il avait rĂ©ussi lĂ  oĂč ses adversaires avaient Ă©chouĂ©[98].

Les Accords de GenĂšve (1954)

Dans les six mois qui suivirent, la France et le Việt Minh, poussĂ©s par les grandes puissances, engageaient des discussions Ă  GenĂšve. Dans le mĂȘme temps, Sihanouk voulait montrer que le Cambodge Ă©tait capable de s’assumer militairement. Il dirigeait, lors de l’opĂ©ration Samaki (solidaritĂ©), une unitĂ© de l’armĂ©e cambodgienne dans une zone du nord-ouest du pays aux mains des rebelles. L’intervention de dix jours qui mobilisa un peu plus de 6 000 personnes permit de faire six prisonniers et de rĂ©cupĂ©rer une trentaine de grenades[99]. D’aprĂšs Ben Kiernan, le Việt Minh espĂ©rait crĂ©er une zone de regroupement dans la rĂ©gion avant que ne dĂ©butent les nĂ©gociations Ă  GenĂšve, mais l’opĂ©ration en empĂȘchera la rĂ©alisation[100].

En juin 1954, lors d’une conversation avec le gĂ©nĂ©ral Paul Ély, commandant militaire français de l’Indochine, il affirmait que « ceux qui favorisent la dĂ©mocratie au Cambodge sont des bourgeois ou des princes 
 Le peuple cambodgien est un enfant. Ils (les Cambodgiens) ne connaissent rien Ă  la politique et ne s’en soucient guĂšre »[101]. Ces vues Ă©taient partagĂ©es par les partisans de Sihanouk et ses conseillers français qui s’étaient succĂ©dĂ© depuis 1947. Le monarque ne renoncera jamais Ă  cette idĂ©e hĂ©ritĂ©e du pouvoir colonial qui voudrait que les Cambodgiens soient restĂ©s des enfants Ă  qui seul un gouvernement autoritaire et paternaliste pouvait ĂȘtre appliquĂ©. Sihanouk, de ce fait, ne voyait pas l’intĂ©rĂȘt de modifier un tant soit peu sa maniĂšre de gouverner ; il maintenait des liens culturels Ă©troits avec la France qui partageait son point de vue[102].

La conférence qui aboutira aux accords de GenÚve

Dans le mĂȘme temps, Ă  la confĂ©rence qui venait de s’ouvrir Ă  GenĂšve, alors que les affaires du royaume khmer ne devaient occuper qu’une place limitĂ©e dans l’agenda, la dĂ©lĂ©gation cambodgienne emmenĂ©e par Tep Phan, le ministre des Affaires Ă©trangĂšres de Sihanouk, et le gĂ©nĂ©ral Nhiek Tioulong fit preuve d’une pugnacitĂ© inattendue pour dĂ©fendre les acquis obtenus 8 mois plus tĂŽt. Ils obtinrent, contrairement au Laos, qu’aucune partie du pays ne soit administrĂ©e par les alliĂ©s Khmers Issarak du Việt Minh, arguant que ceux-ci n’avait pas pris part au processus qui amena Ă  l’indĂ©pendance. En outre, les Accords de GenĂšve, signĂ©s le 20 juillet 1954, reconnurent Ă©galement au Cambodge, et contrairement lĂ  aussi au Laos et au ViĂȘt Nam, le droit, en cas de besoin de faire stationner des forces Ă©trangĂšres sur son territoire. Norodom Sihanouk attribuait Ă  sa croisade – niant le rĂŽle prĂ©paratoire qu’avait pu jouer les diffĂ©rentes guĂ©rillas – ce rĂ©sultat qui renforçait son royaume sur le plan international[103].

AprĂšs avoir en septembre 1954 tentĂ©, sans succĂšs, de rejoindre le gouvernement, Son Ngoc Thanh se rĂ©fugiait prĂšs de la frontiĂšre thaĂŻlandaise oĂč avec le soutien de Bangkok, il regroupa quelque 2 000 Khmers Serei (Khmers libres) dans un camp paramilitaire. On peut aujourd’hui penser que le consentement amĂ©ricain accordĂ© aux supports sud-vietnamien et thaĂŻlandais Ă  Thanh ainsi qu’aux divers complots qui se succĂ©deront lors des annĂ©es 1950 a contribuĂ© Ă  altĂ©rer la confiance que Sihanouk aurait dĂ» avoir envers Washington[104]. Son oncle, Monireth, rĂ©putĂ© pro-occidental, Ă©crivait dans ses mĂ©moires que les officiels amĂ©ricains pratiquaient vis-Ă -vis du Cambodge une politique naĂŻve et envahissante. D’aprĂšs lui, aprĂšs les accords de GenĂšve, les États-Unis bĂ©nĂ©ficiaient de nombreux atouts, notamment avec l’anticommunisme viscĂ©ral des Ă©lites de Phnom Penh, mais les perdirent l’un aprĂšs l’autre en quelques annĂ©es Ă  cause de leurs maladresses[105].

Dans le mĂȘme temps et en prĂ©vision des Ă©lections prĂ©vues en 1955 par les accords de GenĂšve, Yem Sambaur, Sam Nhean, Nhiek Tioulong et Lon Nol, les responsables des petits partis n’ayant aucun siĂšge dans l’assemblĂ©e prĂ©cĂ©dente, s’associaient au sein de Sahapak (le Parti UnifiĂ©). Ils cherchaient une stratĂ©gie pour laisser les dĂ©mocrates hors-jeu et gouverner le pays. Ces dirigeants ayant Ă©tĂ© parmi ses plus proches collaborateurs, Sihanouk, ne fut pas long Ă  leur accorder son soutien. Le roi comptait sur leur capacitĂ© d’organisation alors qu’en contrepartie ils espĂ©raient bĂ©nĂ©ficier de la popularitĂ© du monarque. Cette alliance perdurera jusqu’à la dĂ©position de Norodom Sihanouk en 1970[106].

La réforme constitutionnelle avortée (1955)

Au dĂ©but de 1955, Sihanouk dĂ©cidait d’organiser un rĂ©fĂ©rendum afin de soumettre les rĂ©sultats de sa croisade Ă  l’assentiment populaire. PrĂšs d’un million de votants participaient Ă  la consultation. Un membre canadien de la Commission internationale de contrĂŽle et de supervision issue des accords de GenĂšve, affirmait que le scrutin se dĂ©roulait dans l’ordre mais n’était pas du tout secret. Les rĂ©sultats publiĂ©s donnaient 925 667 bulletins en faveur du roi et 1 834 contre[107].

Une fois les rĂ©sultats connus, Sihanouk ordonna l’arrestation de plusieurs responsables de journaux qui remettaient en cause le fait qu’il Ă©tait le seul artisan de l’indĂ©pendance du pays et datait celle-ci des accords de GenĂšve, minimisant la portĂ©e du traitĂ© de novembre 1953. L’opposition ainsi muselĂ©e, les conseillers du souverain rĂ©Ă©crivaient la constitution. Le droit de vote Ă©tait accordĂ© aux femmes ; les pouvoirs du roi Ă©tait Ă©tendus et les Ă©lecteurs pouvaient rĂ©voquer des reprĂ©sentants « qui ne donnaient pas satisfaction ». La lĂ©gation britannique notait que ces propositions Ă©taient bien intentionnĂ©es et plus conforme aux rĂ©alitĂ©s cambodgiennes que la constitution de 1947. Toutefois, rajoutait le rapport, les idĂ©es pro-occidentales propres Ă  instaurer une dĂ©mocratie libĂ©rale avaient Ă©tĂ© retirĂ©es et la nouvelle rĂ©glementation semblait faite pour protĂ©ger les intĂ©rĂȘts du roi. Les observateurs du Royaume-Uni s’opposaient Ă  cette nouvelle constitution, car elle semblait destinĂ©e Ă  remettre en cause la tenue d’élections nationales[108]. Sihanouk rechignait Ă  faire approuver ces nouveaux textes par l’assemblĂ©e – qu’il avait dissoute trois annĂ©es auparavant – arguant que la constitution ayant Ă©tĂ© attribuĂ©e par lui, il pouvait la modifier comme bon lui semblait. Cette opinion semblait influencĂ©e par un ensemble de facteurs comprenant la haine persistante qu’il nourrissait Ă  l’égard des dĂ©mocrates, l’idĂ©e qu’il se faisait du « petit peuple cambodgien » et les conseils de quelques personnalitĂ©s opposĂ©es au parlement tels Lon Nol, Sam Sary ou Sim Var, qui lui recommandaient de « dĂ©politiser la politique cambodgienne ». Le 27 fĂ©vrier 1955, Ă  la surprise gĂ©nĂ©rale et déçu par les rĂ©serves suscitĂ©es par ces nouveaux textes, Sihanouk dĂ©cidait de les faire retirer. Mais l’étonnement sera Ă  son comble quand, quatre jours plus tard, le monarque lancera ce qu’il appellera plus tard dans ses mĂ©moires sa « bombe atomique »[109].

Création du Sangkum et victoire aux élections (1955)

Le 3 mars 1955, prĂ©textant vouloir plus s’impliquer dans la politique de son pays et « se rapprocher de son peuple », Sihanouk dĂ©cidait d’abandonner le rĂŽle cĂ©rĂ©moniel que lui donnait depuis quatorze ans son trĂŽne et abdiquait au profit de son pĂšre, Norodom Suramarit[110].

Statue de cire du roi Suramarit, qui succéda à son fils le 3 mars 1955.

La dĂ©cision surprenait tout le monde et, mĂȘme dans ses mĂ©moires, Sihanouk n’en donne pas de motivation. Un rapport amĂ©ricain de l’époque prĂ©tend qu’il aurait dĂ©couvert que les dĂ©monstrations populaires en faveur de ses rĂ©formes Ă©taient en fait orchestrĂ©es par ses conseillers et ses partisans. AttristĂ© que sa popularitĂ© puisse n’ĂȘtre que de façade, il aurait craint de devenir l’instrument d’un des partis dans les futures Ă©lections qui se profilaient. Quoi qu’il en soit, l’abdication modifiait la donne politique. Les Ă©lections furent repoussĂ©es Ă  septembre 1955 et Sihanouk prit le titre de Samdech upayuvareach (le prince qui avait abandonnĂ© son trĂŽne). Peu aprĂšs, dans un discours il donnait un aperçu de son futur programme en fustigeant « les politiciens, les riches, les gens Ă©duquĂ©s qui ont l’habitude d’utiliser leur savoir pour duper les autres et joncher d’innombrables obstacles la voie que je dois suivre pour diriger mon peuple »[111].

Pendant quelque temps, Sihanouk et ses conseillers pensaient former un gouvernement d’union nationale dirigĂ© par lui-mĂȘme et qui se serait placĂ© au-dessus des partis. Le systĂšme multipartiste inspirĂ© des modĂšles occidentaux dĂ©faillait un peu partout en Asie du Sud-Est et un penchant pour le parti unique fleurissait dans les anciennes colonies au fur et Ă  mesure qu’elles accĂ©daient Ă  leur indĂ©pendance[112].

DĂ©but avril, avant de s’envoler pour la confĂ©rence de Bandung qui doit rĂ©unir en IndonĂ©sie les pays africains et asiatiques, Sihanouk annonçait la crĂ©ation d’un mouvement - il insistait pour qu'on ne l’appelle pas « parti » – national politique, le Sangkum Reastr Niyum, que l’on peut traduire par communautĂ© socialiste populaire[113]. Les statuts du mouvement dĂ©claraient que « notre association doit rĂ©pondre aux aspirations du petit peuple, le vrai peuple du Royaume du Cambodge que nous aimons. Notre communautĂ©... veut lutter contre l’injustice, la corruption, les exactions, l’oppression et la trahison contre notre peuple et notre pays ». Tout membre du Sangkum devait s’engager Ă  ne pas faire partie d’une formation politique[114].

À Bandung, Sihanouk s’affirmait sur la scĂšne internationale. Il savourait cette nouvelle stature et profitait de l’occasion pour rabaisser les dĂ©mocrates et le Pracheachon, prenant Ă  son compte leur neutralisme et leur antiamĂ©ricanisme. CourtisĂ© par Nehru, Zhou Enlai ou encore Soekarno, il Ă©tait convaincu que son point de vue sur les problĂšmes internationaux comptait pour ses dirigeants. Il en dĂ©duisait que sa mĂ©fiance vis-Ă -vis des États-Unis Ă©tait largement partagĂ©e et justifiĂ©e. Zhou Enlai lui conseillait mĂȘme de garder une mission d’aide militaire française et de rejeter l’assistance amĂ©ricaine qu’il allait pourtant accepter[115].

En effet, dĂšs son retour, en mai, le gouvernement intĂ©rimaire de Sihanouk signait un accord d’aide militaire avec les États-Unis, ce qui eut le don d’exaspĂ©rer les dĂ©fenseurs du parlement qui estimaient qu’une telle dĂ©cision nĂ©cessitait l’aval de l'assemblĂ©e nationale. Lorsque le prince Norodom Phurissara (en), le secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral du parti dĂ©mocrate, protesta contre cet accord, le gouvernement menaça de le faire arrĂȘter. Avec cette alliance, l’impopularitĂ© de Sihanouk Ă©tait Ă  son paroxysme auprĂšs des plus radicaux de ses sujets[116].

La dĂ©cision d’accepter l’aide amĂ©ricaine semblait toutefois logique, mais aura de lourdes consĂ©quences pour l’armĂ©e cambodgienne qui bien que correctement Ă©quipĂ©e par Washington, ne sera jamais entraĂźnĂ©e au combat. La manƓuvre semblait adroite ; tout en menant une politique antiamĂ©ricaine, le Cambodge bĂ©nĂ©ficiait de l’assistance militaire des États-Unis. Cette derniĂšre lui apportait un nombre important de soutien internationaux alors que son non-alignement lui attirait une certaine sympathie au sein de l’intelligentsia cambodgienne. Mais Sihanouk et ses conseillers voyaient d’un mauvais Ɠil la dĂ©position Ă  Saigon de BáșŁo ĐáșĄi et la mise en place dans la seconde partie de l’annĂ©e 1955, de la RĂ©publique du ViĂȘt Nam par NgĂŽ ĐÏnh Diệm. Dans le mĂȘme temps, Ă  Bangkok, le gouvernement de Plaek Pibulsonggram poursuivait son soutien Ă  Son Ngoc Thanh. La dĂ©cision de se distancier de ces deux rĂ©gimes proches alliĂ©s des États-Unis allait dans le sens de l’opinion publique locale et semblait en adĂ©quation avec l’intĂ©rĂȘt du royaume. En outre, le courant pro-amĂ©ricain Ă©tait alors trĂšs faible au Cambodge et dans le cas d’une confrontation dans le Sud-Est asiatique impliquant les Forces armĂ©es des États-Unis, l’aide que le royaume khmer pourrait apporter semblait fragile[117].

En consĂ©quence, la position neutraliste de Sihanouk encouragea les services secrets amĂ©ricains, dont la CIA, Ă  soutenir tout mouvement khmer se rĂ©clamant de l’anticommunisme. Comme les Français avant eux, les AmĂ©ricains trouvaient dur d’accepter que le Cambodge puisse dĂ©fendre des intĂ©rĂȘts propres, diffĂ©rents de ceux du « monde libre ». Ainsi, l’ambassadeur amĂ©ricain Ă  Phnom Penh mettait la mĂ©fiance du monarque Ă  l’égard de son pays sur le compte de son « besoin permanent de se justifier » plutĂŽt que sur celui de craintes pas forcĂ©ment infondĂ©es. Les radicaux cambodgiens de leur cĂŽtĂ© trouvaient le ralliement du prince Ă  des positions plus neutres tardif et feint ; pour eux, le problĂšme restait l’aide militaire amĂ©ricaine qui pouvait faire de l’armĂ©e de leur pays une force anticommuniste. Leurs arguments avaient toutefois Ă©tĂ© une nouvelle fois escamotĂ©s par Sihanouk qui tout en faisant sienne leur thĂšse avait obtenu, grĂące Ă  l’assistance des États-Unis, que le budget de la dĂ©fense nationale soit pris en charge par Washington pour les huit prochaines annĂ©es[118].

Alors que les Ă©lections se profilaient, Sihanouk tentait de soustraire la politique cambodgienne Ă  l’influence des partis. Mais encore en avril, beaucoup d’observateurs pensaient que le parti dĂ©mocrate remporterait le scrutin. Cependant, la police et la milice aux ordres de Dap Chhuon multipliaient les brutalitĂ©s et autres mesures d’intimidation. Plusieurs journaux indĂ©pendants furent fermĂ©s et leurs propriĂ©taires emprisonnĂ©s. En province, de nombreux communistes et dĂ©mocrates furent incarcĂ©rĂ©s puis libĂ©rĂ©s aprĂšs le scrutin, sans avoir Ă©tĂ© jugĂ©s. Ailleurs, des villageois Ă©taient rassemblĂ©s Ă  la pagode oĂč ils devaient jurer devant des moines de voter pour le Sangkum. Dans certains districts, les candidats royalistes subissaient une forte pression pour garantir Ă  leur mouvement au moins 80 % des suffrages. Les bruits quant aux actes de violence qui se rĂ©pandaient Ă  travers le pays par le bouche-Ă -oreille suffisaient dans la plupart des cas Ă  contenir les vellĂ©itĂ©s de contestation[119].

Le mĂ©lange de terreur, de favoritisme, de propagande et de mĂ©pris pour les Ă©lites qui sĂ©vissait alors allait devenir monnaie courante dans les annĂ©es qui suivront. AprĂšs 1955, la contestation allait ĂȘtre Ă©touffĂ©e et les dissidents emprisonnĂ©s. MalgrĂ© tout, la campagne continuait et les dĂ©mocrates, poursuivaient leurs discours oĂč ils fustigeaient l’absolutisme et le sous-dĂ©veloppement endĂ©mique. Pour contrer ces arguments, la presse proche du Sangkum dĂ©veloppait une approche originale du malaise social, prĂ©textant que les indigents devaient leur pauvretĂ© Ă  leurs mĂ©faits commis dans leurs vies prĂ©cĂ©dentes alors que les plus aisĂ©s jouissaient du fruit des bonnes actions de leurs existences passĂ©es. Cette affirmation allait par la suite devenir un des piliers du « socialisme bouddhiste » prĂŽnĂ© par le Sangkum[120].

Quand la date du scrutin arriva, le rĂ©sultat ne faisait aucun doute. Mais le score des candidats du Sangkum — crĂ©ditĂ© de 82 % des voix et la totalitĂ© des siĂšges — avait surpris la plupart des observateurs. Les dĂ©mocrates, qui n’avaient rĂ©uni que 12 % des votes, se plaignaient que dans les circonscriptions oĂč le mouvement royaliste avait perdu, les urnes aient Ă©tĂ© dĂ©truites et les candidats du Sangkum avaient Ă©tĂ© dĂ©crĂ©tĂ©s vainqueurs sans autre forme de procĂšs[121].

Il n’est pas possible de savoir quel score la formation sihanoukiste aurait obtenu sans les manƓuvres d’intimidation citĂ©e plus haut, mais il semble probable que le Sangkum aurait quand mĂȘme atteint une majoritĂ© confortable. Toutefois, le prince aurait dĂ» affronter une partie de l’assemblĂ©e rĂ©solument hostile. L’idĂ©e d’une telle opposition, mĂȘme stĂ©rile lui aurait Ă©tĂ© intolĂ©rable et il aurait voulu en exclure toute possibilitĂ©[122]. GrisĂ© par sa victoire, Sihanouk rĂ©unissait un congrĂšs du Sangkum Ă  Phnom Penh. Plusieurs milliers de membres votaient alors Ă  main levĂ©e la rĂ©forme constitutionnelle que le prince avait tentĂ© de faire accepter en dĂ©but d’annĂ©e. Ce vote Ă©vitait de devoir discuter ou modifier la rĂ©forme devant l’assemblĂ©e. Pour Sihanouk, le congrĂšs suivait le mode de fonctionnement de la dĂ©mocratie dans la GrĂšce antique et ces rĂ©unions allaient devenir banales dans les annĂ©es Ă  venir[123].

La plupart des Cambodgiens Ă©taient alors prĂȘts Ă  accepter que leur monarque, ĂągĂ© de trente-trois ans modifie un rĂ©gime parlementaire dont ils n’avaient pu percevoir les avantages pendant les neuf derniĂšres annĂ©es[124].

Le socialisme khmer (1956)

ConfortĂ© sur le plan intĂ©rieur, Sihanouk amorce, tout en prĂ©servant l’aide militaire amĂ©ricaine, un rapprochement avec les pays du camp communiste, moins exigeants que ceux du camp occidental au moment de fournir une assistance. Il entreprend ainsi durant l’annĂ©e 1956 des visites officielles en Chine et en Europe de l’Est[125].

Il affectionne tout particuliĂšrement ces tournĂ©es. Le premier dĂ©placement de l’annĂ©e sera toutefois pour les Philippines, oĂč le gouvernement et les mĂ©dias tentĂšrent en vain de lui forcer la main pour le faire adhĂ©rer Ă  l’OTASE. À son retour, il expliquera qu’il avait Ă©tĂ© facile de dĂ©jouer les plans des Philippins qui Ă©taient citoyens d’« une nation qui Ă©tait tombĂ©e sous la domination d’une puissance Ă©trangĂšre ». Il espĂ©rait alors recevoir plus de soutien et d’appuis de la part de PĂ©kin, Ă©tape suivante de son pĂ©riple, que des Philippines et de leurs alliĂ©s pro-amĂ©ricains[126].

L'accueil chaleureux qu'il reçoit à Pékin marquera pour longtemps Norodom Sihanouk.
Mao Zedong, Peng Zhen, Norodom Sihanouk et Liu Shaoqi.

Le voyage en Chine fut plus gratifiant. Le prince louait ses hĂŽtes qui avaient su, contrairement au rĂ©gime de Manille, « rester sur leurs propres pieds ». Il fut impressionnĂ© par le sens du devoir des habitants ainsi que l’absence apparente de hiĂ©rarchie et de corruption. Il retrouvait Zhou Enlai et se liait d’amitiĂ© avec Mao Zedong. On lui servit des plats somptueux et on sut le flatter. Les Chinois promirent une aide Ă©conomique de 40 millions de dollars qui contrairement Ă  celle des AmĂ©ricains Ă©tait sans contrepartie. Plus tard dans l’annĂ©e, Sihanouk reçut le mĂȘme traitement lors de ses visites en TchĂ©coslovaquie et en Pologne[127].

À son retour de PĂ©kin, Sihanouk dut subir l’animositĂ© des gouvernements thaĂŻlandais et sud-vietnamien dont les journaux l’accusaient d’ĂȘtre un prince rouge qui avait fait alliance avec le diable et dont le pays devenait une base avancĂ©e du communisme. Le gouvernement de Diệm Ă  SaĂŻgon imposait mĂȘme un blocus temporaire. Paradoxalement, ces mesures de rĂ©tention n’eurent pas l’effet escomptĂ© mais confortĂšrent plutĂŽt Sihanouk dans ses convictions sur la justesse de ses choix[128].

Au mĂȘme moment, Robert McClintock, premier ambassadeur amĂ©ricain Ă  Phnom Penh, jugeait Sihanouk maladroit, dogmatique et cassant. Le diplomate de son cĂŽtĂ© avait la rĂ©putation de manquer de subtilitĂ©. Ses avertissements Ă  Sihanouk sur les dangers du communisme agaçaient ce dernier et lui rappelaient trop les leçons sur la dĂ©mocratie parlementaire que lui servaient les dĂ©mocrates quelques annĂ©es auparavant. En revanche, Pierre Gorce, l’ambassadeur de France, estimait que les relations diplomatiques avec le Cambodge dĂ©pendaient du maintien de liens cordiaux avec le prince[129].

En mars 1956, Sihanouk se lançait dans un programme de « socialisme khmer ». Alors que des Ea Sichau, Thiounn Mumm ou autre Youtevong s’étaient convertis au socialisme aprĂšs avoir lu de nombreux ouvrages, le prince semble avoir Ă©tĂ© sĂ©duit par le terme lui-mĂȘme et parce que de nombreux dirigeants tels ses nouveaux amis Nehru, Zhou Enlai ou Soekarno en Ă©pousaient les thĂšses. Devenir socialiste Ă©tait alors dans l’air du temps. Plus tard, le socialisme khmer se transforma en socialisme bouddhiste, affirmant chercher le consensus entre les dirigeants et les dirigĂ©s qui aurait permis aux rĂ©gimes angkoriens de progresser. Sihanouk prĂ©tendait prendre dans le communisme ce qu’il y avait de meilleurs, laissant de cĂŽtĂ© le marxisme et la lutte des classes, ceci afin, toujours d’aprĂšs le monarque d’« empĂȘcher le triomphe du communisme au Cambodge »[130].

Le prince souhaitait en rĂ©alitĂ© une sociĂ©tĂ© mobilisĂ©e pour perpĂ©tuer les traditions. Le socialisme khmer, puis bouddhiste, reposait sur une vision idĂ©aliste des relations sociales cambodgiennes. Pour le mettre en place, Sihanouk tablait sur la dĂ©fĂ©rence des plus modestes et sur la bonne volontĂ© des Ă©lites. Ce systĂšme impliquait une intervention de l’État dans beaucoup de domaines de la vie courante, alors que l’agriculture et le commerce restait dans la sphĂšre privĂ©e. Sihanouk espĂ©rait que le socialisme permettrait de maintenir le statu quo tout en dĂ©veloppant l’éducation des masses[131].

Pour apprĂ©hender le contexte politique khmer de l’époque, il faut prendre en compte l’environnement social qui prĂ©dominait. L’optimisme de Sihanouk sur le potentiel du Cambodge Ă©tait largement partagĂ©. Jusqu’en 1963, et peut ĂȘtre mĂȘme 1966, la plupart des promesses allaient ĂȘtre tenues et l’affection du peuple khmer pour son monarque Ă©tait bien rĂ©elle. La volontĂ© des opposants de l’évincer restait marginale. Les sujets formaient une masse souriante, silencieuse et dĂ©fĂ©rente envers le prince. Quand ils pensaient politique, ils acceptaient leur statut et laissaient Sihanouk prĂ©sider Ă  leurs destinĂ©es. GrĂące ou Ă  cause de cette timiditĂ©, il pouvait compter sur des sujets pour la plupart loyaux et chaleureux Ă  son Ă©gard[132].

Sihanouk Ă©tait trĂšs certainement le monarque le plus proche de ses sujets que le Cambodge ait jamais connu. Inlassablement, il sillonnait son royaume, inaugurant des Ă©coles, des hĂŽpitaux, des usines, des parcs ou des barrages. Parfois, il semble qu’il Ă©tait mĂȘme prĂȘt Ă  inaugurer d’anciens bĂątiments qui n’avaient eu qu’une couche de peinture fraiche[133]. Dans ces circonstances, il se livrait Ă  des discours de plusieurs heures devant des foules de notables locaux, de moines, d’écoliers et de ceux que l’on appelait le petit peuple, immobiles en plein soleil. Durant ces allocutions, il admonestait ses opposants, plaisantait sur sa vie privĂ©e, fustigeait les Ă©trangers, fĂ©licitait ses auditeurs de l’écouter et louait la gloire d’Angkor. Il demandait Ă  tous de travailler dur pour la nation et Ă©voquait le prestige du Cambodge. Les discours Ă©taient retransmis plusieurs fois, mais les rĂ©sumĂ©s qui paraissaient dans la presse française faisaient l’impasse sur les passages les plus polĂ©miques. En d’autres termes, Sihanouk faisait un discours en cambodgien pour ses « enfants » et un autre pour la postĂ©ritĂ©. Malheureusement pour lui si le but avait Ă©tĂ© d’édulcorer ses propos devant les mĂ©dias internationaux, les discours Ă©taient aussi enregistrĂ©s et traduits par la presse locale en chinois, la BBC, l’ambassade des États-Unis et le service information du dĂ©partement d'État des États-Unis[134]. En une occasion, en 1962, alors que Sihanouk avait fustigĂ© de maniĂšre peu amĂšne l’administration de Washington, il avait tenu Ă  rajouter qu’il « nierait avoir tenu de tels propos si d’aventure on venait Ă  le lui demander », provoquant l’hilaritĂ© de la foule et du prĂ©posĂ© de l’ambassade amĂ©ricaine chargĂ© de retranscrire l’allocution[135].

Avant 1960, Sihanouk avait atteint son apogĂ©e. Son pouvoir n’était pas encore absolu. Jusqu’à la mort de son pĂšre, ses parents ainsi que certains de ses proches avaient une influence, certes rĂ©duite, sur ses dĂ©cisions, mais l’opposition Ă  son leadership Ă©tait dĂ©sorganisĂ©e et muselĂ©e. Le Cambodge Ă©tait alors dans une position beaucoup plus favorable qu’elle ne le sera Ă  partir de 1965, quand les combats commenceront Ă  faire rage au ViĂȘt Nam voisin. Quasiment tout le monde mangeait Ă  sa faim et la plupart des paysans possĂ©daient le sol qu’ils exploitaient. De nombreuses terres cultivables Ă©taient disponibles et les villes regorgeaient d’opportunitĂ©s d’embauche. Des centaines de milliers d’enfants frĂ©quentaient les Ă©coles nouvellement construites grĂące Ă  l’aide internationale. Les dĂ©penses militaires Ă©taient prises en charge par les États-Unis[136]. Pour la premiĂšre fois le Cambodge vivait en paix. ComparĂ© avec les pĂ©riodes qui allaient suivre et celles qui les avaient prĂ©cĂ©dĂ©es, les annĂ©es de 1955 Ă  1965 sont considĂ©rĂ©es par la plupart de ceux qui les ont vĂ©cues comme un Ăąge d’or. Une majoritĂ© de Cambodgiens estimaient qu’ils devaient cette embellie Ă  leur dirigeant[137].

Toutefois, mĂȘme si Ă  l’époque il semble avoir Ă©tĂ© probe, il ne fit rien pour dĂ©courager la corruption. Bien qu’il sĂ»t se montrer trĂšs rancunier envers ceux qui avaient osĂ© le dĂ©fier et mĂȘme cruel envers ses opposants, il refusait de punir ses subordonnĂ©s ou les membres de sa famille accusĂ©s de corruption ou d’incompĂ©tence. Il considĂ©rait les Cambodgiens comme ses enfants et attendait d’eux avant tout qu’ils soient loyaux Ă  son Ă©gard. De ce fait, si on excepte quelques vieux politiciens en qui il avait toute confiance tels Son Sann et Penn Nouth ou des conseillers Ă©trangers comme Charles Meyer et Donald Lancaster, son entourage Ă©tait composĂ© de sa famille, de courtisans et d’obligĂ©s[138].

Si en mars 1956, les journaux proches des dĂ©mocrates furent autorisĂ©s Ă  paraitre Ă  nouveau, on refusa toujours au parti d’organiser des manifestations mĂȘme de soutien Ă  la politique neutraliste du Prince. DĂšs cette Ă©poque, Norodom Sihanouk faisait un distinguo entre les rĂ©gimes communistes alliĂ©s et les membres des partis politiques « gauchistes » accusĂ©s de subversion[139].

Au mĂȘme moment, inspirĂ© par ce qu’il avait vu en Chine, Sihanouk entreprenait des rĂ©formes, mais celles-ci restaient modestes, le prince n’étant pas dĂ©sireux de mettre en place des mesures qui pourraient remettre en cause sa position dominante. Il Ă©tait encouragĂ© dans cette voie par l’image qu’il avait de la plupart des chefs d’État avec qui il avait les accointances les plus fortes tels Nicolae Ceaușescu, Kim Il-sung ou Tito qui comme lui Ă©taient connus pour ĂȘtre autoritaires et apprĂ©ciaient le pouvoir, ainsi que par les plus humbles de ses sujets qui de tout temps considĂ©raient les monarques du Cambodge comme des gĂ©nies tutĂ©laires du royaume khmer[140].

La fin des démocrates (1957)

MalgrĂ© (ou Ă  cause de) la victoire Ă©crasante aux Ă©lections, les dĂ©putĂ©s ne tardĂšrent pas Ă  braver les diffĂ©rents gouvernements. Certains parlementaires, qui avaient visitĂ© la France Ă©taient rentrĂ©s envieux du pouvoir qu’avaient leurs homologues du Palais Bourbon, alors qu’eux-mĂȘmes Ă©taient soumis au bon vouloir du prince qui pouvait dissoudre l’AssemblĂ©e Ă  sa guise. Cette menace planait telle une Ă©pĂ©e de DamoclĂšs, au-dessus de la tĂȘte de personnes qui Ă©taient devenues pleines de ressentiment, dĂ©plorant que les membres des gouvernements ne participent pas aux dĂ©bats parlementaires et que la plupart d’entre eux n’étaient pas issus des rangs de l’assemblĂ©e[141]. La succession des diffĂ©rentes crises amena Norodom Sihanouk Ă  prĂ©senter sa dĂ©mission du poste de Premier ministre qu’il occupait par intermittence, mais le roi Norodom Suramarit la rejeta six fois, avant de finalement l’accepter en juillet 1957. Mais au lieu de prendre du repos, le prince dĂ©cidait de rester Ă  Phnom Penh et de prĂ©sider le congrĂšs bisannuel du Sangkum ; un certain Phlek Phoeun, choisi par Sihanouk pour lui succĂ©der profita du congrĂšs pour nĂ©gocier la constitution de son gouvernement, ce qui eut le don d’irriter le monarque et l’amena dĂšs lors Ă  saborder la candidature de son successeur dĂ©signĂ© et fit adopter une motion de dĂ©fiance Ă  son Ă©gard. AprĂšs le congrĂšs, le prince se retira dans un monastĂšre prĂšs d’Angkor pour se reposer et le roi nomma Sim Var comme Premier ministre[142].

La maniĂšre dont le prince avait conduit le congrĂšs tĂ©moignait de sa grande lassitude. MĂȘme s’il Ă©tait et restera un bourreau de travail, habituĂ© Ă  passer dix-huit heures d’affilĂ©e sur les dossiers qu’on lui prĂ©sentait, la gestion de tous ces ministĂšres l’avait extĂ©nuĂ©. Avant son dĂ©part vers Siem Reap, il diffusa une lettre ouverte dans laquelle il se plaignait d’essuyer des critiques qui le condamnaient sans rĂ©pit. Les dĂ©mocrates Ă©taient la cible privilĂ©giĂ©e de ces attaques et lors du congrĂšs il avait prĂ©tendu que s’il venait Ă  mourir, ils ne seraient pas longs Ă  reprendre le pouvoir[143].

À partir de ce moment, Sihanouk mit au point une tactique qu’il affectionnera Ă  l’avenir, consistant Ă  cĂ©der les rĂȘnes du pays Ă  ses opposants et Ă  organiser des manifestations demandant Ă  la nouvelle administration de changer sa politique. Ces protestations lui permettaient alors de revenir aux affaires tel un sauveur, mais accentuaient d’autant sa fatigue. Il savait alors jouer du rĂŽle de pĂšre de la nation qu’il s’était arrogĂ©, reprochant alors Ă  ses « enfants » leur ingratitude et leur manque de respect filial[144].

Les personnes qui se gaussaient des Ă©lucubrations du prince le faisaient Ă  leurs risques et pĂ©rils. Outre que Sihanouk abhorrait l’idĂ©e de ne pas ĂȘtre pris au sĂ©rieux, les attaques qu’il lançait en rĂ©ponse aux critiques n’étaient pas dĂ©nuĂ©es de quelques fondements. Les accusations d’aide amĂ©ricaine aux dĂ©mocrates s’appuyaient sur le fait avĂ©rĂ© que tout au long des annĂ©es 1950, l’ambassade des États-Unis, sur instruction de Washington, tenta de trouver des forces et des personnalitĂ©s qui pourraient contrecarrer la politique du monarque jugĂ©e trop procommuniste. Une directive confidentielle du DĂ©partement d'État des États-Unis datĂ©e d’avril 1958, prĂ©cisait mĂȘme qu’« afin de maintenir l’indĂ©pendance cambodgienne et de contrecarrer le basculement vers une neutralitĂ© procommuniste, le gouvernement amĂ©ricain doit encourager les individus et les groupes qui refusent de traiter avec le bloc communiste et pourraient servir Ă  Ă©largir la base politique du Cambodge ». En procurant une aide secrĂšte Ă  des personnes suffisamment intrĂ©pides pour oser dĂ©fier un dirigeant autoritaire, irritable mais populaire, les États-Unis se mettaient dans une position qui allait s’avĂ©rer bien dĂ©licate[145].

De Siem Reap, Sihanouk annonçait qu’il se retirait de la politique et renonçait Ă  ses fonctions au sein du Sangkum. Deux semaines plus tard, il rentrait quand mĂȘme Ă  Phnom Penh, revenant sur sa dĂ©mission et reprenant ses attaques contre les dĂ©mocrates, les invitant Ă  dĂ©battre avec lui des problĂšmes cambodgiens. Les leaders du parti demandĂšrent une audience privĂ©e mais le prince dĂ©sirait un dĂ©bat public avec les principaux responsables religieux, la presse et une assistance nombreuse. La police visita le domicile des principaux dirigeants du parti, insinuant qu’une absence de rĂ©ponse Ă  l’offre princiĂšre serait considĂ©rĂ©e comme un acte de trahison. Cinq d’entre eux se rĂ©signĂšrent Ă  participer au dĂ©bat[146].

La discussion eu lieu le 11 aoĂ»t 1957 devant le palais royal. Il Ă©tait retransmis et des milliers de personnes s’étaient amassĂ©es Ă  l’extĂ©rieur de l’enceinte pour Ă©couter la discussion diffusĂ©e par haut-parleurs. Sihanouk accaparait la quasi-totalitĂ© du temps de parole. Il demandait aux dĂ©mocrates de fournir des preuves factuelles des malversations dont ils accusaient le rĂ©gime. ContrariĂ©s par le contexte et par l’agressivitĂ© de Sihanouk, ils marmonnĂšrent qu’ils avaient besoin de temps pour rĂ©unir de telles preuves, mais qu’ils lui Ă©taient loyaux et qu’ils n’avaient jamais eu l’intention de lui causer du tort. Le prince leur rĂ©pondait qu’il les trouvait hypocrites et leur demandait de joindre sur le champ le Sangkum. Leurs hĂ©sitations, entendues par des milliers de personnes Ă©taient assimilĂ©es Ă  une fĂ©lonie. Au bout de prĂšs de trois heures, Sihanouk leva la sĂ©ance et souhaita un « bon appĂ©tit » Ă  ses interlocuteurs[147].

Alors qu’ils quittaient le palais, les dĂ©mocrates furent tirĂ©s de leurs vĂ©hicules et molestĂ©s par des militaires et des gardes. Dans les trois jours qui suivirent, on recensa une trentaine d’actes de violence perpĂ©trĂ©s par des hommes en uniforme Ă  l’encontre de personnes suspectĂ©es d’appartenir au parti dĂ©mocrate. S’il est difficile de dĂ©terminer si ces actes avaient Ă©tĂ© ordonnĂ©s par le prince lui-mĂȘme, par Lon Nol alors responsable de l’armĂ©e ou Ă©taient spontanĂ©s, ils ne furent jamais condamnĂ©s par quiconque et aucun de ceux qui les avaient commis ne fut inquiĂ©tĂ©. AprĂšs ces Ă©vĂšnements, Sihanouk dĂ©cidait de partir en France pour des vacances[148].

Le dĂ©bat et son Ă©pilogue sonnĂšrent le glas du parti dĂ©mocrate. L’opposition des Ă©lites cambodgiennes Ă  Sihanouk passa dans la clandestinitĂ© et ne rĂ©apparaitra qu’une dizaine d’annĂ©es plus tard par le biais de ses ailes les plus radicales. De plus, le discours vĂ©hĂ©ment du prince devant une foule abondante, l’humiliation publique d’adversaires impuissants puis les violences physiques Ă  peine voilĂ©es n’étaient que les prĂ©mices du traitement qui allait attendre ceux qui oseraient s’opposer Ă  l’avenir au rĂ©gime[149].

Nouvelle dissolution de l’AssemblĂ©e (1958)

Sihanouk parti pour la France, Sim Var, dirigeait le gouvernement qui se contentait de « suivre la voie tracĂ©e par le prince ». Les parlementaires ne furent pas longs Ă  reprendre leurs vieilles habitudes de monnayer leur influence en se prĂ©sentant par exemple comme des associĂ©s incontournables dans des commerces avec des importateurs et des hommes d’affaires. Ces agissements s’étaient intensifiĂ©s depuis l’échec de plusieurs campagnes anti-corruption en 1956. Les dĂ©putĂ©s furent toutefois irritĂ©s par la rĂ©serve du nouveau Premier ministre Ă  leur Ă©gard et par son autoritarisme. Des lettres anonymes furent envoyĂ©es en France au monarque, dĂ©nonçant ces dĂ©rives. Le roi Norodom Suramarit ayant refusĂ© d’intervenir, le pouvoir se dĂ©lita et Sim Var, par le biais d’un Ă©ditorial dans un journal acquis Ă  sa cause demandait instamment le retour du prince, affirmant son intention de dĂ©missionner dĂšs que l’avion de Sihanouk se poserait Ă  Pochentong[150]. Quand Sihanouk revint de France, il ne voulait pas reprendre la tĂȘte du gouvernement et pensait que la crise allait se rĂ©sorber d’elle-mĂȘme. Toutefois, Sim Var Ă©tait plus que jamais rĂ©solu Ă  cĂ©der la place et ses ennemis Ă  le faire partir. Le Premier ministre suggĂ©ra alors de dissoudre l’assemblĂ©e, ce que Sihanouk hĂ©sitait Ă  faire et dĂ©cida de soumettre la question lors d’un prochain congrĂšs du Sangkum qui fut convoquĂ© pour janvier 1958. Il espĂ©rait qu’un dĂ©bat allait rĂ©gler le problĂšme, mais les dissensions entre Sim Var et le parlement Ă©taient trop profondes pour ĂȘtre aplanies. AprĂšs deux jours de discussions, le gouvernement demandait au roi de dissoudre l’assemblĂ©e. Le dĂ©cret fut publiĂ© et les dĂ©putĂ©s Ă©lus en 1955 furent renvoyĂ©s Ă  leurs foyers. Sihanouk Ă©tait finalement ravi de pouvoir changer un parlement moins docile que prĂ©vu et de choisir des candidats du Sangkum qui devaient ĂȘtre Ă©lus sans opposition[151].

La sĂ©lection de ces personnes permettait d’asseoir le pouvoir politique du prince qui, dans le mĂȘme temps, avait acceptĂ© de reprendre une nouvelle fois les rĂȘnes du gouvernement. En fĂ©vrier, aidĂ© de Chau Seng, un intellectuel de gauche fraichement revenu de France, et quelques conseillers, il devait traiter quelque 700 candidatures d’hommes et de femmes tous dĂ©sireux d’occuper les bancs de la nouvelle assemblĂ©e[152].

Pour faire ses choix, Sihanouk n’avait pas voulu tenir compte de l’avis des caciques du Sangkum et la campagne sera animĂ©e par de nouvelles composantes du parti, telles les jeunesses socialistes royales khmĂšres (JSRK) plutĂŽt que par son comitĂ© central. Le monarque s’agaçait de plus en plus Ă  l’encontre de son mouvement et des personnes qu’il avait choisies pour le diriger. Deux de ses secrĂ©taires gĂ©nĂ©raux furent mĂȘme renvoyĂ©s en 1957. Au dĂ©but de 1958, la formation passait de plus en plus entre les mains de l’entourage du prince. Avec le temps, le terme Sangkum, qui venait d’un mot pali qui signifierait « venir ensemble », allait ĂȘtre synonyme de la politique que Sihanouk voulait mener. Quand il s’exprimait Ă  l’étranger, il appelait le systĂšme qu’il mettait en place « la sociĂ©tĂ© du Sangkum »[153].

Toutefois, bien que les visites officielles en Europe de l’Est et en Chine Ă©taient des succĂšs et malgrĂ© la faiblesse de l’opposition de gauche, Norodom Sihanouk focalisait la campagne pour les Ă©lections de 1958 sur un programme anticommuniste. Au congrĂšs national du Sangkum en janvier, il accusait le Pracheachon, vitrine officielle des communistes cambodgiens, d’engendrer une rancƓur Ă  son encontre au sein du « peuple ordinaire »[154]. Juste avant les Ă©lections, le prince publiait trois articles sur le communisme au Cambodge oĂč il retraçait l’histoire du mouvement telle qu’il la voyait et s’appesantissait sur leur dĂ©pendance au ViĂȘt Nam. Sihanouk visita Ă©galement les districts oĂč se prĂ©sentait le Pracheachon et par ses attaques virulentes obtint que seul Keo Meas maintienne sa candidature Ă  Phnom Penh[155].

Les Ă©lections se conclurent par une victoire Ă©crasante du Sangkum (sur les 1,6 million de voix, seules 409 lui Ă©chapperont) mais virent une faible participation. Il semblait que les Ă©lecteurs n’aient pas daignĂ© se dĂ©placer pour un scrutin dont le rĂ©sultat Ă©tait connu d’avance et pour choisir des dĂ©putĂ©s dont ils avaient du mal Ă  voir en quoi ils pouvaient avoir une incidence sur leur vie de tous les jours[156].

Devant la nouvelle assemblĂ©e, Sihanouk affirmait son intention de pouvoir conseiller ce nouveau parlement, spĂ©cifiant qu’il ne pourrait tenir un tel rĂŽle en Ă©tant Premier ministre et Ă©tayant ses dires par une de ces formules dont il avait le secret : « Au thĂ©Ăątre, on ne peut pas ĂȘtre en mĂȘme temps acteur, metteur en scĂšne et spectateur ». Il rejetait par avance l’offre de diriger Ă  nouveau le gouvernement, prĂ©cisant que ce n’était pas lui, mais « le Sangkum qui est Ă  la base de tout » et concluait en affirmant que si les dĂ©putĂ©s ne l’aidaient pas, « le Cambodge connaitrait comme d’autres pays, sa rĂ©volution ». Sim Var Ă©tait donc reconduit comme Premier ministre, mais trĂšs vite des diffĂ©rends avec le parlement apparurent sur les questions Ă©conomiques et il fut contraint Ă  la dĂ©mission. AprĂšs des manifestations dans tout le pays rĂ©clamant son retour, Norodom Sihanouk acceptait de prendre la tĂȘte d’un nouveau gouvernement dans lequel figurait Hu Nim et Hou Yuon[157].

Dans le mĂȘme temps, les relations avec la ThaĂŻlande et le Sud-ViĂȘt Nam se ternissaient. Des troupes vietnamiennes Ă©taient accusĂ©es de franchir la frontiĂšre par bataillons entiers, Ă  la poursuite d’opposants qui cherchaient refuge au Cambodge. Sihanouk se plaignit de ces incursions rĂ©pĂ©tĂ©es auprĂšs de l’ambassade amĂ©ricaine, avertissant qu’il dĂ©sirait porter l’affaire devant le conseil de sĂ©curitĂ© des Nations unies. L’ambassadeur Carl Strom menaça de suspendre l’aide militaire si les armes et munitions fournies par les États-Unis Ă©taient utilisĂ©es contre une puissance alliĂ©e[158]. Le prince rĂ©pondit Ă  cette intimidation en reconnaissant diplomatiquement la rĂ©publique populaire de Chine. Cette lĂ©gitimation n’était pas du goĂ»t des ambassades occidentales, mais le coup devait ĂȘtre prĂ©vu depuis quelque temps dĂ©jĂ . Cela sema le dĂ©sarroi au sein des voisins de l’OTASE et incita les AmĂ©ricains Ă  chercher des solutions alternatives viables au rĂ©gime Sihanoukien[159].

Norodom Sihanouk, en compagnie de V. K. Krishna Menon, ministre indien de la défense et Andreï Gromyko, ministre soviétique des affaires étrangÚres, lors de la 13e session de l'assemblée générale des Nations unies.

La dĂ©cision de Sihanouk de reconnaitre le gouvernement de PĂ©kin avait sĂ»rement Ă©tĂ© motivĂ©e par une dĂ©convenue survenue quelques mois plus tĂŽt, quand l’armĂ©e thaĂŻlandaise avait investi le temple de Preah Vihear, un sanctuaire du IXe siĂšcle situĂ© au sommet d’une falaise qui empiĂ©tait sur la frontiĂšre. Cette occupation menaçait de dĂ©gĂ©nĂ©rer en conflit ouvert. En 1959, le prince porta l’affaire devant la Cour internationale de justice de la Haye. Trois ans plus tard, au grand dam des autoritĂ©s de Bangkok, le tribunal donna raison au Cambodge[160]. En 1963, Sihanouk annoncera que le Cambodge accordait aux ressortissants thaĂŻlandais des facilitĂ©s d’accĂšs au temple et renonçait Ă  user du droit de demander la restitution des antiquitĂ©s volĂ©es que le tribunal lui avait accordĂ©. Mais loin de calmer la rancƓur de Bangkok, cette dĂ©claration fut ressentie comme une marque de condescendance Ă  leur Ă©gard concernant un bien que malgrĂ© le jugement ils continuent encore de nos jours Ă  considĂ©rer comme leur revenant[161].

Cependant, en 1958, Sihanouk n’était pas encore prĂȘt Ă  affronter les États-Unis ou Ă  s’opposer Ă  leur assistance. En octobre, il fit une nouvelle visite Ă  Washington, la premiĂšre depuis l’indĂ©pendance. Eisenhower et Dulles lui firent Ă  nouveau la leçon, mais de maniĂšre moins doctrinale qu’en 1953[162].

PremiĂšres tensions avec Washington (1959)

À son retour au Cambodge, le prince eut Ă  subir la premiĂšre vĂ©ritable opposition Ă  laquelle il avait Ă  faire face depuis 1952. Il s’agissait de deux conjurations, rapidement dĂ©jouĂ©es, mais qui montraient soit l’implication soit les soutiens des États-Unis, de la ThaĂŻlande et du Sud ViĂȘt Nam. Il parait surtout certain que ces deux machinations n’auraient jamais pu voir le jour si Ă  partir de 1958, l’administration amĂ©ricaine n’avait pas favorisĂ© les opposants. Elles jetĂšrent un froid dans les rapports du Cambodge avec ses voisins pro-occidentaux, irritĂšrent Sihanouk et dĂ©tĂ©riorĂšrent pour longtemps les relations amĂ©ricano-cambodgiennes[163].

Norodom Sihanouk en 1959, avec le président Dwight D. Eisenhower.

Tout d’abord, le 13 janvier 1959, dans un discours prononcĂ© Ă  Kampong Cham, Norodom Sihanouk rĂ©vĂ©lait qu’il avait eu connaissance de ce qu’il appelait « le complot de Bangkok », une conjuration visant Ă  le dĂ©poser, mise en place par le Premier ministre thaĂŻlandais Sarit Thanarat avec la complicitĂ© des services amĂ©ricains. MĂȘme si les preuves qu’il ait Ă©tĂ© nommĂ©ment dĂ©signĂ© restent faibles, Sam Sary, un ancien fidĂšle qui reprochait le virage Ă  gauche du gouvernement et qui craignait d’ĂȘtre arrĂȘtĂ©, s’enfuyait au Vietnam une semaine plus tard[164].

Ce fut ensuite Dap Chhuon qui fut accusĂ© d’avoir fomentĂ© un autre complot, financĂ© par la CIA, et qui aurait souhaitĂ© l'Ă©tablissement d'un État « libre » incluant les provinces de Siem Reap et Kampong Thum ainsi que les rĂ©gions du sud du Laos qui Ă©taient contrĂŽlĂ©s par le prince laotien de droite Boun Oum. Chhuon prit le maquis dans son fief du Phnom Kulen oĂč il passa quelque temps avant d’ĂȘtre capturĂ© et tuĂ©[165].

Sihanouk tenta de normaliser ses relations avec le Sud ViĂȘt Nam en rendant visite Ă  SaĂŻgon au prĂ©sident NgĂŽ ĐÏnh Diệm, mais le un attentat eut lieu au palais royal qui tua trois personnes dont le prince Vakravan, directeur du protocole[166] - [167]. Parmi les commanditaires possibles, on Ă©voquera les noms de Son Ngoc Thanh et Sam Sary[168] alors que d’autres y verront la main des services secrets de Saigon, habituels bailleurs de fonds des deux premiers nommĂ©s[169]. Sihanouk enfin, affirmera des annĂ©es plus tard que les colis provenaient « d’une base amĂ©ricaine au Sud-ViĂȘtnam »[170].

Les rapports avec les alliĂ©s des États-Unis ne s'en remirent pas : les relations diplomatiques avec la ThaĂŻlande seront rompues en 1961, et celles avec le Sud ViĂȘt Nam en 1963[171]. Les AmĂ©ricains, de leur cĂŽtĂ©, aprĂšs ces trois fiascos, semblent avoir mis moins d’intensitĂ© dans la recherche d’un alliĂ© non-communiste au Cambodge, mais Sihanouk n’allait plus se dĂ©fier d’une suspicion Ă  leur Ă©gard[172].

Cette mĂ©fiance profitait au Việt Minh, plus que jamais dĂ©sireux de mettre Ă  bas le rĂ©gime de Diệm. Bien que conscient que des milliers de combattants communistes vietnamiens stationnaient de maniĂšre quasi systĂ©matique dans les zones frontaliĂšres Ă  Kampong Cham, Prey Veng et Svay Rieng il ne dĂ©sirait pas les attaquer, surtout depuis les Ă©vĂšnements de 1959 qui n’avait fait que ranimer sa rĂ©ticence Ă  l’égard du gouvernement de Saigon. Au lieu de cela, il allait de plus en plus se dĂ©fier des États-Unis, principal soutien du Sud ViĂȘt Nam[173].

Une opposition muselée (1960-1962)

Le 3 avril 1960, le roi Suramarit mourut « des suites d’une longue maladie »[174]. Tout de suite aprĂšs ce dĂ©cĂšs, sachant que la succession ne se rĂšglera pas rapidement, Sihanouk persuadait son oncle, le Prince Monireth de diriger un conseil de rĂ©gence en attendant la dĂ©signation d’un nouveau monarque. En fait, le fils du roi disparu n’était pas dĂ©sireux de remonter sur le trĂŽne et ne voyait personne en qui il pouvait avoir suffisamment confiance pour le laisser prendre la couronne. Ranariddh, son fils aĂźnĂ© n’avait que 16 ans, et s’il avait Ă©tĂ© nommĂ© roi, une partie du pouvoir risquait de tomber entre les mains d’un rĂ©gent et, Ă  sa majoritĂ©, il aurait pu devenir un soutien pour l’opposition. Une autre possibilitĂ©, appuyĂ©e par Monireth, Ă©tait de choisir Sisowath Kossamak, veuve du roi dĂ©funt et accessoirement la sƓur du premier nommĂ©. Elle n’avait alors que 53 ans, Ă©tait en bonne santĂ© et avait un sens aiguisĂ© de la politique. Toutefois, il aurait fallu modifier la constitution pour permettre Ă  une femme de rĂ©gner[note 4] - [176] et Sihanouk Ă©tait rĂ©ticent Ă  laisser la couronne Ă  sa mĂšre. Outre que l’opposition de la reine Ă  la liaison de longue date de son fils avec Monique Izzi n’était un secret pour personne, le prince semblait vouloir Ă©chapper Ă  l'influence de sa mĂšre, ou au moins la limiter, plutĂŽt que de la renforcer en la laissant rĂ©gner[177].

Statue de cire de la reine Sisowath Kossamak, gardienne, de 1960 Ă  1970, des traditions monarchiques d'un royaume sans roi.

Monireth, qui aprĂšs 1941, avait Ă  nouveau fait un moment office de prĂ©tendant, devait, non sans amertume, renoncer Ă  toute ambition monarchique, mais Sihanouk doutait de sa rĂ©signation. À vrai dire, il semble que les relations entre les deux hommes ne furent jamais chaleureuses. NĂ©anmoins, le neveu n’avait pas hĂ©sitĂ© Ă  faire appel Ă  son oncle durant cette crise mais avait placĂ© certains de ses fidĂšles au conseil de rĂ©gence afin de limiter le pouvoir du premier nommĂ©. Quand Monireth tenta de rĂ©former l’armĂ©e cambodgienne, en utilisant le conseil comme tribune, il Ă©choua[178]. Sihanouk, quant Ă  lui, refusait de redevenir Premier ministre. Il proposait donc successivement cinq noms (dont Lon Nol et Nhiek Tioulong) qui tous dĂ©clinĂšrent l’offre. Le prince dĂ©cidait alors de choisir Chuop Hell (en), le prĂ©sident de l’AssemblĂ©e nationale, qui acceptait de remplir temporairement les fonctions de chef de l'État. Sihanouk, qui voulait exercer les pouvoirs constitutionnels d’un monarque sans avoir Ă  en assumer le cĂ©rĂ©monial, menait campagne pour que ses vues soient approuvĂ©es par un rĂ©fĂ©rendum. Une telle consultation n’était pas sans risque pour la monarchie implantĂ©e depuis plus d’un millĂ©naire au Cambodge et cela ne fit qu’envenimer les relations de Monireth avec son neveu Ă  qui il reprochait cette nouvelle frasque. L’opinion de la reine Kossamak sur le sujet Ă©tait difficile Ă  cerner, mais, d’aprĂšs David Chandler, il semble qu’en fin de compte elle se soit ralliĂ©e aux vues de son fils[179].

Comme pour les Ă©lections prĂ©cĂ©dentes, la rĂ©gularitĂ© du rĂ©fĂ©rendum est sujette Ă  caution. Les Ă©lecteurs devaient choisir entre un bulletin avec la photo de Sihanouk, un autre avec celle de Son Ngoc Thanh, pourtant condamnĂ© Ă  mort auparavant par contumace, un bulletin rouge pour soutenir le communisme et enfin un dernier marquĂ© d’un point d’interrogation pour signifier une abstention. Dans plusieurs bureaux, pour ne pas dire la plupart, les votants devaient rendre aux prĂ©posĂ©s, tous membres du Sangkum, les bulletins qu’ils n’allaient pas dĂ©poser dans l’urne. Ceux qui ne voulaient pas choisir Sihanouk devaient donc le faire au vu et au su de tout le monde, ce qui pouvait leur valoir un sĂ©jour en prison. Sans surprise, seuls 133 Ă©lecteurs ne portĂšrent pas leur dĂ©volu sur Sihanouk alors que de son cĂŽtĂ©, il recueillait plus de deux millions de voix[180]. La constitution fut modifiĂ©e et un article (122) fut ajoutĂ©, autorisant l’assemblĂ©e Ă  « confĂ©rer les pouvoirs et prĂ©rogatives de chef de l’État Ă  une personnalitĂ© incontestĂ©e par le suffrage gĂ©nĂ©ral de la nation ». GrĂące Ă  cette victoire Ă©crasante, Sihanouk Ă©tait confortĂ© et pouvait gouverner sans craindre un rival potentiel sur le trĂŽne, des conseillers trop pressants ou une opposition trop puissante. Il semble acquis que mĂȘme sans les diverses manipulations qui avaient Ă©maillĂ© le scrutin, le rĂ©sultat n’aurait pas Ă©tĂ© sensiblement modifiĂ©. Pour beaucoup d’observateurs sur place, ce rĂ©fĂ©rendum ne faisait que confirmer un Ă©tat de fait que personne n’osait remettre en question[181].

La reine Sisowath Kossamak restait au palais royal et avait pour mission d’incarner l'institution monarchique. Elle demeurait avec les regalia, les astrologues, le corps de ballet[182]. Des proches de Sihanouk trouvĂšrent qu’en se dĂ©marquant de ce cĂ©rĂ©monial il devenait plus libre de ses mouvements, mais aussi qu’il se laissait de plus en plus influencer par Monique Izzi et sa famille. Certains y virent un mauvais prĂ©sage et pensĂšrent que cela affaiblirait la couronne. Quoi qu’il en soit, il semble qu’à partir de 1960, le prince prĂȘtait moins d’attention qu’avant Ă  l’étiquette royale et aux conseils politiques de sa mĂšre[183].

Ces changements prĂ©ludaient un accroissement des mesures rĂ©pressives Ă  l’encontre de l’opposition de gauche. À la fin aoĂ»t, plusieurs journaux sont fermĂ©s Ă  Phnom Penh et une quinzaine de personnes soupçonnĂ©es d’ĂȘtre communistes, dont Khieu SamphĂąn, directeur de l’hebdomadaire l'Observateur, furent arrĂȘtĂ©s[184]. Cela n’incitait guĂšre les opposants Ă  se montrer. Certains Ă  gauche, comme Hou Yuon, Hu Nim et mĂȘme Khieu SamphĂąn intĂ©graient finalement le Sangkum alors que d’autres, tels Tou Samouth, Saloth SĂąr, Ieng Sary ou Nuon Chea restaient dans la clandestinitĂ©. D’anciens dĂ©mocrates, comme Thonn Ouk ou Chean Vam ne dĂ©siraient pas revenir en politique, alors que les partisans de Son Ngoc Thanh avaient trouvĂ© refuge et soutien financier Ă  l’étranger[185].

Jusqu’à la fin 1963, aucune crise ne vint perturber le gouvernement de Sihanouk et les institutions du Sangkum rĂ©pondaient aux attentes des Cambodgiens. Cela comprenait les congrĂšs nationaux qui se rĂ©unissaient deux fois par an devant le Palais royal, les jeunesses socialistes royales khmĂšres oĂč des fonctionnaires consacraient deux semaines par an Ă  des travaux publics et les visites du nouveau chef de l’État Ă  la campagne, qui, depuis son hĂ©licoptĂšre ou une voiture, lançait des cadeaux[186].

 le prĂ©sident amĂ©ricain dĂ©passe d'une tĂȘte le prince
Rencontre entre Norodom Sihanouk et John Fitzgerald Kennedy Ă  l'hĂŽtel Carlyle de New York en septembre 1961

En fait, plusieurs difficultĂ©s prirent quand mĂȘme naissance au dĂ©but de ces annĂ©es 1960. Elles restĂšrent longtemps latentes mais allaient ĂȘtre le ferment de perturbations futures. On pourra citer la prĂ©sence quasi permanente de Lon Nol Ă  la tĂȘte des armĂ©es cambodgiennes, les dĂ©rives financiĂšres d’une partie des Ă©lites ainsi que la corruption et la mauvaise gestion qui Ă©manaient de toutes les strates de l’administration. Sihanouk prĂȘtait quant Ă  lui peu d’attention aux problĂšmes de planification Ă©conomique Ă  long terme, Ă  l’endettement des campagnes et Ă  l’accroissement d’une main d’Ɠuvre Ă©duquĂ©e. Un autre problĂšme alors ignorĂ© par la plupart des observateurs Ă  l’époque, Ă©tait la monopolisation de l’information et de l’opinion publique entre les mains du nouveau chef de l’État et de ses proches[187].

En fait, un des aspects les plus regrettables du rĂ©gime Ă©tait l’absence de contestation. Le parlement ne jouait aucun rĂŽle significatif, et les congrĂšs nationaux dont les ordres du jour Ă©taient Ă©pluchĂ©s par Sihanouk, cessa rapidement de s’occuper de problĂšmes tels que les malversations ou la pauvretĂ©. Alors qu’une campagne anti-corruption avait Ă©tĂ© lancĂ©e en 1961, un journal de gauche qui avait publiĂ© un Ă©ditorial oĂč il souhaitait sa rĂ©ussite avait Ă©tĂ© fermĂ© et son directeur arrĂȘtĂ©[188].

De ce fait, les emphases des discours de Sihanouk n’étaient jamais contestĂ©es. En janvier 1962, par exemple, il prĂ©tendait que le Cambodge avait atteint un niveau de « dĂ©mocratisation 
 jamais atteint par aucun autre pays ». En contrepartie, moins d’un mois plus tĂŽt, il avait demandĂ© aux fonctionnaires de ne plus l’aborder en position accroupie. D’aprĂšs lui, ces signes ostensibles de respect pouvaient ĂȘtre mal interprĂ©tĂ©s par les observateurs Ă©trangers. Toutes ces informations, erronĂ©es ou contradictoires, Ă©taient intĂ©gralement couvertes par les mĂ©dias locaux qu’il contrĂŽlait[189]. Certains observateurs Ă©taient subjuguĂ©s par le charme qui Ă©manait de Norodom Sihanouk. Ceux qui exprimaient des rĂ©serves concernant le nouveau chef de l’État Ă©taient taxĂ©s d’ingratitude alors que ceux qui dĂ©crivaient le Cambodge comme un paradis ou comparaient le prince aux grands dirigeants de l’Empire khmer tels Jayavarman VII ou Suryavarman II, Ă©taient louĂ©s pour leurs contributions. Sim Var, qui s’était fĂąchĂ© avec le monarque Ă  la fin des annĂ©es 1960, affirma que son jugement avait Ă©tĂ© altĂ©rĂ© par les louanges de certains Ă©crivains francophones qui partageaient son antiamĂ©ricanisme et apprĂ©ciaient sa francophilie[190].

Bien que Sihanouk prĂŽnĂąt le consensus au sein de la sociĂ©tĂ© cambodgienne, son impulsivitĂ© le poussait Ă  lutter contre des ennemis rĂ©els ou supposĂ©s, si possible sans dĂ©fense. À partir de 1961, alors que les Ă©lections de l’annĂ©e suivante se profilaient et aprĂšs la disparition du parti dĂ©mocrate, l’assaut se concentrait sur l’opposition de gauche. AprĂšs une campagne musclĂ©e ponctuĂ©e d’arrestations, d’accusations de complot « pour le compte d’une puissance Ă©trangĂšre » et d’autre mesures d’intimidation, le Pracheachon dĂ©cidait de ne finalement pas prĂ©senter de candidat et de mettre fin Ă  son existence lĂ©gale. Cette dĂ©cision, par un effet pernicieux, renforçait le courant du Parti ouvrier du KampuchĂ©a qui prĂŽnait l’action clandestine et qui allait petit Ă  petit s’imposer jusqu’à diriger, une douzaine d’annĂ©es plus tard le pays tout entier[191].

Dégradation des relations américano-cambodgiennes (1963)

À partir de 1963, la capacitĂ© de Sihanouk Ă  influer sur la politique de son pays diminuait indiciblement, sans qu’il soit possible de savoir si c’était une cause ou un effet de la baisse de sa popularitĂ© auprĂšs des Ă©lites. D’aprĂšs David Chandler, il se peut aussi que cela Ă©tait dĂ» Ă  sa vision de moins en moins optimiste de l’avenir du pays, au fur et Ă  mesure que la guerre s’intensifiait au ViĂȘt Nam voisin, ou qu’il ait pris conscience de certaines des mutations qui s’engageaient au Cambodge et qu’il ne pouvait plus influencer. Le premier changement Ă©tait dĂ©mographique, avec une population estimĂ©e Ă  3,8 millions en 1941 quand il avait accĂ©dĂ© au trĂŽne et qui sera d’environ 7 millions en 1970, quand il devra quitter le pouvoir[192]. Les autres modifications sont moins Ă©videntes, mais on peut citer l’impact du conflit vietnamien sur l’économie du royaume khmer et la recrudescence des activitĂ©s de guĂ©rilla menĂ©es par ses opposants Ă  gauche comme Ă  droite. Jusqu’en 1966, plus du quart des rĂ©coltes de riz cambodgiennes Ă©tait vendu frauduleusement aux rebelles vietnamiens. Sachant que les taxes d’exportation sur le riz constituaient une part importante des recettes du gouvernement, ce nĂ©goce ne pouvait qu’avoir des effets nĂ©fastes sur le budget national[193]. Au mĂȘme moment, des idĂ©es radicales se propageaient au sein des Ă©tudiants cambodgiens et de leurs professeurs dont une partie importante partageait un antiamĂ©ricanisme viscĂ©ral doublĂ© d’une fascination pour la rĂ©volution culturelle chinoise qui semblait pour eux un modĂšle Ă  mĂȘme de lutter contre les injustices et la corruption qu’ils voyaient tous les jours[194]. La croissance impressionnante du systĂšme Ă©ducatif (en 1969, plus de 1 000 Ă©tudiants suivront des cours dans une universitĂ© cambodgienne et au moins 4 millions d’élĂšves frĂ©quenteront les Ă©coles primaires et secondaires du pays) permettait Ă  la jeunesse une ascension sociale, mais procurait aussi un sentiment de frustration devant la faiblesse des dĂ©bouchĂ©s. Ces deux cas auraient Ă©tĂ© difficilement imaginables quelques dĂ©cennies plus tĂŽt. Des problĂšmes apparurent car, alors que des pans de la sociĂ©tĂ© cambodgienne s’éveillaient au modernisme, Sihanouk continuait Ă  user des mĂ©thodes autoritaires auprĂšs de ceux qu’il appelait « ses enfants » pour se maintenir au pouvoir. Ces concitoyens devenaient mieux Ă©duquĂ©s et plus informĂ©s, mais il ne leur accordait pas pour autant la libertĂ© dont ils auraient souhaitĂ© bĂ©nĂ©ficier[195].

Son entourage Ă©tait alors dans la configuration d’une cour qui se complaisait en des concours de flatteries Ă  son Ă©gard afin de bĂ©nĂ©ficier de quelque avantage plutĂŽt que de prodiguer des conseils avisĂ©s qui aurait pu le froisser. Cela ne pouvait que le conforter dans ses choix. Les journalistes, pour leur part, qui voulaient ĂȘtre autorisĂ©s Ă  rester au Cambodge Ă©crivaient des histoires qui devaient le sĂ©duire. Ceux qui incluaient dans leurs rĂ©cits des rĂ©fĂ©rences aux villas coloniales assoupies entourĂ©es de pelouses irrĂ©prochables, au charisme de Sihanouk, Ă  l’ülot de paix, aux ruines enfouies au fond de la jungle, au prince sur la corde raide, etc. voyaient leurs visas renouvelĂ©s. Ceux qui au contraire faisaient Ă©tat de rĂ©pression envers les opposants ou du pouvoir personnel du chef de l’État, ainsi que ceux qui signalaient que les rendements des riziĂšres cambodgiennes restaient durant l’ensemble des annĂ©es 1960 parmi les plus faibles de toute l’Asie du Sud-est Ă©taient souvent empĂȘchĂ©s de revenir. Il n’y avait pas de place pour les mauvaises nouvelles[196].

Il y a Ă©galement des problĂšmes de sources primaires concernant cette pĂ©riode. Alors que la plupart des journaux en langue khmĂšre des annĂ©es 1960 ont disparu, seuls ceux plus ou moins officiels en langues anglaise et française, influencĂ©s par les autoritĂ©s de Phnom Penh ont pu ĂȘtre conservĂ©s. Cela signifie que ceux qui auraient pu rapporter des indices de la baisse de popularitĂ© du monarque ne sont pas parvenus jusqu’à nous alors que ceux qui Ă©taient laudatifs Ă  son Ă©gard ont survĂ©cu Ă  son Ă©viction du pouvoir. Il est ainsi assez malaisĂ© d’avoir une idĂ©e prĂ©cise du contexte de l’époque, des Ă©vĂšnements locaux, des politiques officielles et des centres d’intĂ©rĂȘt de la population[197]. Un autre problĂšme Ă©tait dĂ» au fait que Norodom Sihanouk adaptait ses discours, entretiens et Ă©crits, qui couvraient un large Ă©ventail de sujets, en fonction de son auditoire, manifestant des sentiments qui pouvaient aller d’une animositĂ© profonde, parfois exempte de cohĂ©rence, jusqu’à une irrĂ©sistible volontĂ© de plaire associĂ©e Ă  une charmante candeur. Comme beaucoup de visiteurs obtenaient des interviews « exclusives », peu cherchaient des indices pouvant confirmer ou infirmer les « confidences » qu’ils avaient eu le privilĂšge de recueillir ; il Ă©tait alors trĂšs difficile de relater, quel qu'en soit le domaine, un Ă©vĂšnement qui s’était dĂ©roulĂ© au Cambodge sans employer une citation du chef de l’État[198].

En fait, les critiques sur le Cambodge publiĂ©es durant les annĂ©es 1960 Ă©taient rares. L’emprise de Norodom Sihanouk sur la presse n’y Ă©tait sĂ»rement pas Ă©trangĂšre mais les signes prĂ©curseurs des calamitĂ©s qui allaient s’abattre bientĂŽt sur le pays n’étaient de toute façon pas discernables par beaucoup d’observateurs. Les expatriĂ©s qui travaillaient lĂ -bas (en 1964, il y avait Ă  peu prĂšs 6 000 Français au Cambodge, soit deux fois plus qu’avant l’indĂ©pendance) ne semblaient pas croire que la situation du pays puisse se dĂ©grader. Peu d’études polĂ©miques sur la sociĂ©tĂ© locale Ă©taient alors rĂ©alisĂ©es depuis l’étranger tandis que les professeurs d’universitĂ© et leurs Ă©tudiants, conscients des risques d’afficher de maniĂšre trop ostensible des opinions critiques se sentaient de plus en plus entravĂ©s dans leurs mouvements[199].

Vers la fin de fĂ©vrier 1963, alors que Sihanouk Ă©tait en visite en Chine, une crise qui couvait depuis des mois, Ă©clatait Ă  Siem Reap. Alors que des manifestants accusaient un policier de brutalitĂ© et de corruption, la rĂ©plique des forces de l’ordre fit un mort. Quand les autoritĂ©s refusĂšrent d’enquĂȘter sur les circonstances du dĂ©cĂšs, la situation dĂ©gĂ©nĂ©ra. Plus d’un millier d’étudiants attaqua le commissariat central ; en riposte, les policiers battirent les Ă©meutiers Ă  coup de crosses de fusil. Dans la lutte, un portrait de Sihanouk fut dĂ©chirĂ© et des tracts apparurent, dĂ©nonçant l’injustice et la corruption du Sangkum. Les affrontements firent plusieurs morts et blessĂ©s parmi les Ă©tudiants et certains enseignants sympathisants ; la police dĂ» faire appel Ă  l’armĂ©e pour rĂ©tablir l’ordre. Alors que des manifestations de soutien Ă©taient organisĂ©es Ă  Phnom Penh et Battambang, le gouvernement, assumant la responsabilitĂ© des troubles, dĂ©missionnait[200]. Depuis PĂ©kin, quand il prit connaissance des Ă©vĂšnements, Sihanouk dĂ©clara que pour sa part il n’avait par contre jamais songĂ© Ă  quitter son poste de chef de l’État. MĂȘme si les incidents avaient pris le gouvernement par surprise, Lon Nol avait pu fournir Ă  Sihanouk, dĂšs son retour, des dossiers accusant « certains Ă©lĂ©ments » parmi les Ă©tudiants, soupçonnĂ©s d’ĂȘtre associĂ©s Ă  Son Ngoc Thanh. L’ambassade amĂ©ricaine, quant Ă  elle, pensait plutĂŽt que c’était les communistes qui Ă©taient derriĂšre ces Ă©vĂšnements[201].

AprĂšs l’accueil chaleureux qui lui avait Ă©tĂ© rĂ©servĂ© en Chine, Sihanouk ne pouvait pas nommĂ©ment attribuer la responsabilitĂ© des troubles au parti communiste local et dĂ©cidait de porter ses coups contre Keng Vannsak, son vieil adversaire du Parti dĂ©mocrate. Ce dernier s’était retirĂ© de la politique et enseignait Ă  l’Institut PĂ©dagogique National. Il avait donnĂ© une confĂ©rence Ă  Siem Reap au dĂ©but de l’annĂ©e, mais rien ne prouvait en fait son implication dans les Ă©meutes[202]. Peu aprĂšs, Sihanouk annonçait les noms de « 34 Ă©lĂ©ments subversifs », accusĂ©s de s’ĂȘtre associĂ©s pour tenter de renverser le gouvernement. La liste, outre Keng Vannsak, comportait Ieng Sary, Saloth SĂąr et Son Sen ; en fait les trois « intellectuels » du comitĂ© central du parti communiste, mais aucun autre de ses membres[203]. Les dossiers avaient Ă©tĂ© fournis par Lon Nol et Ă©taient le fruit de la surveillance exercĂ©e sur les personnes soupçonnĂ©es de gauchisme, dont en premier lieu les professeurs des Ă©coles privĂ©es et les journalistes. L’anonymat voulu par Ieng Sary et Saloth SĂąr volait en Ă©clats, mĂȘme s’il ne semble pas que les services de Sihanouk aient pris conscience de leurs vĂ©ritables rĂŽles au sein du parti clandestin[204]. En signe de dĂ©fi, le monarque « invitait » les personnes dont le nom figurait sur la liste Ă  former un gouvernement et Ă  diriger le pays. La plupart avaient dĂ©jĂ  eu affaire Ă  la police de Sihanouk et imaginait le sort qui les attendait ; en consĂ©quence, ils refusĂšrent poliment l’offre. Le chef de l’État n’en restait pas lĂ  et conviait 32 des 34 personnes Ă  sa rĂ©sidence oĂč il leur proposait l’ensemble des ministĂšres, Ă  l’exception de celui de la dĂ©fense et du poste de Premier ministre. Ils dĂ©clinĂšrent Ă  nouveau la demande, affirmant que seul leur prince Ă©tait Ă  mĂȘme de conduire un gouvernement. Sihanouk dĂ©cidait alors de lever la sĂ©ance et contrairement Ă  l’entrevue de 1957 avec les dĂ©mocrates, aucun de ses interlocuteurs ne fut inquiĂ©tĂ©. À la fin de l’annĂ©e, la plupart avaient mĂȘme conservĂ© l’emploi qu’ils occupaient en mars[205].

Au mĂȘme moment, un Ă©vĂšnement qui aura son importance par la suite, passe inaperçu. Saloth SĂąr, Ieng Sary et Son Sen, les trois anciens Ă©tudiants parisiens membres du comitĂ© central du Parti ouvrier du KampuchĂ©a, quittaient Phnom Penh pour les forĂȘts de l’est cambodgien[206]. Khieu SamphĂąn et Hou Yuon, les deux ministres de gauche, abandonnaient de leur cĂŽtĂ© leur fonction ministĂ©rielle. Pour remplacer le premier nommĂ©, Sihanouk nommait Nin Nirom, un dĂ©putĂ© qui alors qu’il avait critiquĂ© son prĂ©dĂ©cesseur, avait imprudemment laissĂ© entendre qu’il n’aurait aucun mal Ă  le remplacer. Nirom n’avait aucune compĂ©tence en matiĂšre de gestion et fut rapidement impliquĂ© dans un scandale financier. Il dĂ©missionna un mois aprĂšs sa prise de fonction. Peu aprĂšs, les derniers titres de la presse de gauche furent mis sous contrĂŽle et rĂ©guliĂšrement fermĂ©s. Les professeurs et les Ă©tudiants Ă©taient eux aussi surveillĂ©s. Cette rĂ©pression dĂ©veloppait animositĂ© et crainte chez les Ă©tudiants et ajoutĂ©e Ă  la disparition de toute possibilitĂ© de dĂ©bat, elle entraina de nombreux jeunes vers le Parti des ouvriers du KampuchĂ©a[207].

Une nouvelle crise, qui couvait depuis dĂ©jĂ  longtemps, Ă©clatait Ă  la fin de 1963 entre Norodom Sihanouk et les États-Unis. Cela commença par la suspension de l’aide militaire et Ă©conomique amĂ©ricaine et le refroidissement des relations diplomatiques. Le diffĂ©rend aura des consĂ©quences que ni les AmĂ©ricains sur place ni le monarque ne pouvait alors imaginer. Le comportement des premiers nommĂ©s en Asie du Sud-Est et leur ingĂ©rence dans les affaires cambodgiennes irritaient Sihanouk depuis dĂ©jĂ  un certain temps, mais plusieurs Ă©vĂšnements survenus en novembre 1963 le convainquirent de prendre ses distances[208]. Il y eut tout d’abord l’assassinat des frĂšres NgĂŽ ĐÏnh Diệm et NgĂŽ ÐÏnh Nhu, dirigeants de la RĂ©publique du ViĂȘt Nam, Ă  la suite d'un coup d’état accompli avec la bienveillance des États-Unis. MĂȘme si les relations avec les dirigeants de SaĂŻgon avaient toujours Ă©tĂ© orageuses, leur mort confortait Sihanouk dans l’idĂ©e que le soutien des AmĂ©ricains envers leurs alliĂ©s serait toujours limitĂ©[209].

Un autre Ă©lĂ©ment qui a dĂ» influencer Sihanouk Ă©tait liĂ© aux problĂšmes Ă©conomiques du royaume khmer. MĂȘme si les produits agricoles continuaient Ă  bien se vendre Ă  l'Ă©tranger, les rendements Ă  l’hectare restaient faibles, l’industrialisation avait du mal Ă  dĂ©coller, les taxes rentraient difficilement et le commerce extĂ©rieur Ă©tait aux mains d’un nombre restreint d’individus qui voyaient d’un mauvais Ɠil les rĂ©formes socialisantes du chef de l’État. Pour ce dernier, cette classe fortunĂ©e Ă©tait devenue dĂ©pendante aux produits de luxe importĂ©s par le biais du programme d’assistance des États-Unis. Les recettes dĂ©gagĂ©es par ces ventes couvraient une partie des frais de fonctionnement de l’aide amĂ©ricaine qui elle atteignait 15 millions de dollars par an. De 1960 Ă  1962, cette aide correspondait Ă  14 % du budget de l’état, ce qui risquait de crĂ©er une sujĂ©tion dangereuse. Les Ă©lites commerçantes chinoises et sino-khmĂšres, de leur cĂŽtĂ©, apprĂ©ciaient les liens et connexions qu’elles avaient pu tisser avec leurs homologues de Bangkok et SaĂŻgon, ce qui n’était pas du goĂ»t du prince. Celui-ci pensait qu’en nationalisant le commerce extĂ©rieur et les banques privĂ©es, le pays apparaĂźtrait plus attractif Ă  certains donateurs potentiels susceptibles de fournir une aide Ă©conomique « sans contrepartie ». Enfin, Sihanouk espĂ©rait qu’une attitude rĂ©solument antiamĂ©ricaine lui permettrait de se rapprocher de la France du gĂ©nĂ©ral de Gaulle qui militait contre la subordination aux deux grandes puissances du moment[210].

Le chef de l'État avait donc prĂ©vu ce refroidissement depuis quelque temps dĂ©jĂ , mais les choses s’accĂ©lĂ©rĂšrent Ă  partir de novembre 1963. À ce moment, les deux seuls AmĂ©ricains en qui Sihanouk avait eu confiance – l’ambassadeur William Trimble et le gĂ©nĂ©ral Edward Scherer, chef de la mission d’assistance militaire Ă  Phnom Penh – avaient quittĂ© le Cambodge. Ils avaient tous deux su traiter le prince avec respect ; ils avaient aussi tentĂ© de convaincre leurs collĂšgues du caractĂšre anticommuniste du rĂ©gime et demander aux missions de Bangkok et SaĂŻgon de protester contre le soutien des gouvernements sud-vietnamiens et thaĂŻlandais aux Khmers Serei. Si le gĂ©nĂ©ral Robert Taber n’avait pas succĂ©dĂ© Ă  Scherer depuis suffisamment longtemps pour que son action puisse ĂȘtre jugĂ©e, il n’en Ă©tait pas de mĂȘme de Phillip Sprouse qui avait remplacĂ© Trimble et n’avait pas Ă©tĂ© long Ă  s’attirer les foudres de Sihanouk. Il faut dire que son dĂ©but de carriĂšre diplomatique prolongĂ© en Chine lui avait valu quelques dĂ©mĂȘlĂ©s pendant le maccarthysme et qu’il semblait depuis soucieux d’étaler son anticommunisme au grand jour. De plus, la montĂ©e des intĂ©rĂȘts amĂ©ricains aux ViĂȘt Nam faisait passer tout autre problĂšme politique dans la rĂ©gion au second plan. Les bonnes relations entre le prince et l’ambassade amĂ©ricaine, patiemment tissĂ©es par Scherer et Trimble se dĂ©litĂšrent rapidement. Sihanouk pour sa part devenait Ă©galement sujet Ă  des dĂ©pressions aprĂšs des mois passĂ©s Ă  tenter de gĂ©rer seul les affaires de son pays, alors que l’ambassade, de son cĂŽtĂ©, essayait de faire passer sur ces crises ce qu’elle qualifiait d’incohĂ©rence de la politique Ă©trangĂšre cambodgienne. Les AmĂ©ricains ne pouvaient alors concevoir que la voie neutraliste voulue par Sihanouk puisse ĂȘtre moins dangereuse pour eux et pour le royaume khmer qu’une soumission totale Ă  la ligne qu’ils voulaient imposer[211].

MĂȘme si l’assassinat des frĂšres NgĂŽ ĐÏnh Diệm et NgĂŽ ĐÏnh Nhu l’avait rendu perplexe, le prince n’avait plus Ă  craindre leur fureur et il pouvait dĂ©fier les Khmers Serei qui avaient bĂ©nĂ©ficiĂ© de leur protection. Sihanouk dĂ©clarait donc, dans un discours prononcĂ© le 5 novembre, que s’ils ne cessaient pas leurs Ă©missions depuis la ThaĂŻlande et le Sud ViĂȘt Nam d’ici Ă  la fin de l’annĂ©e, il « se dispenserait de l’aide Ă©conomique et militaire du monde libre ». Dans la mesure oĂč il considĂ©rait les gouvernements de Bangkok et de SaĂŻgon comme des marionnettes des États-Unis, il jugeait ces derniers responsables de ces Ă©missions et estimait qu’ils n’auraient aucun mal Ă  faire fermer les radios[212]. L’avertissement fut ignorĂ© par les officiels amĂ©ricains, plus prĂ©occupĂ©s par les troubles en cours Ă  SaĂŻgon. Sihanouk faisait monter la pression d’un cran en incluant Son Ngoc Thanh et Sam Sary dans sa liste des Ă©lĂ©ments subversifs ; les souvenirs du complot de Bangkok et de la bombe de septembre 1959 avaient resurgi[213]. Lors de la cĂ©lĂ©bration de l’anniversaire de l’indĂ©pendance quelques jours plus tard, le chef de l'État annonçait des rĂ©formes Ă©conomiques de grande envergure, notamment la privatisation des banques, des agences d’import-export, des distilleries, le contrĂŽle des importations de produits de luxe et l’abandon de l’aide amĂ©ricaine. Ces mesures devaient permettre au Cambodge de devenir maĂźtre de son destin, mais en fait, l’administration des entreprises visĂ©es allait ĂȘtre confiĂ©e Ă  des personnes plus choisies pour leur proximitĂ© avec le prince que pour leurs compĂ©tences en matiĂšre de gestion, rendant l’entourage de Sihanouk plus prospĂšre que jamais[214]. Pour beaucoup de tĂ©moins, ces mesures paraissaient inappropriĂ©es et irrĂ©flĂ©chies alors que le prince les avait prĂ©vues de longue date. La rĂ©serve d’or du Cambodge avait par exemple Ă©tĂ© transfĂ©rĂ©e des États-Unis vers la France dĂšs le dĂ©but du mois de novembre, c’est-Ă -dire bien avant que les lois soient annoncĂ©es[215]. Pour Sihanouk, ces prĂ©ceptes devaient servir les intĂ©rĂȘts du Cambodge. La baisse de l’influence amĂ©ricaine et la limitation d’une classe capitaliste naissante faisaient les affaires du Nord-Vietnam, de la Chine et de la France qui dĂ©siraient une « dĂ©amĂ©ricanisation » du Sud-est asiatique. AprĂšs la chute du rĂ©gime de Diệm, certains militaires sud vietnamiens partageaient la vision du gĂ©nĂ©ral de Gaulle qui voulait une neutralisation de l’ancienne Indochine française dans laquelle Sihanouk aurait un rĂŽle plus important Ă  jouer. Ce dernier pensait pour sa part que la Chine et la France pourraient augmenter leur aide et compenser la perte de celle qui venait de Washington alors que ces puissances estimaient qu’elles pouvaient prĂ©server Ă  moindre coĂ»t la loyautĂ© du prince Ă  leur Ă©gard[216]. En demandant de faire brutalement cesser les Ă©missions des Khmers Serei, Sihanouk mettaient les AmĂ©ricains dans une situation intenable. Quand bien mĂȘme la requĂȘte viendrait de leur mentor, il semblait clair que les gouvernements thaĂŻlandais et sud-vietnamien utiliseraient des manƓuvres dilatoires plutĂŽt que de s’exĂ©cuter. Pour le prince, l’impossibilitĂ© de rĂ©pondre Ă  sa demande tĂ©moignait moins de leur impossibilitĂ© Ă  manier leurs « vassaux » que de leur complicitĂ© dans les manigances des puissants voisins du royaume khmer[217].

Le 19 novembre, durant un CongrĂšs national extraordinaire, le chef de l’État annonçait l’arrestation de deux membres des Khmers Serei, Saing San et Preap In, qui avaient pĂ©nĂ©trĂ© au Cambodge grĂące Ă  un laissez-passer du Premier ministre, le prince Norodom Kanthoul et de In Tam, gouverneur de la province de Takeo et dont Preap In Ă©tait le neveu. MĂȘme si leur mouvement ne prĂ©sentait pas une menace sĂ©rieuse vis-Ă -vis de son rĂ©gime, Sihanouk Ă©tait agacĂ© par les Ă©missions de leur radio qui le vilipendaient, lui et la famille royale. Ils auraient Ă©tĂ© envoyĂ©s au Cambodge pour nĂ©gocier avec Sihanouk, et, aprĂšs plusieurs conversations avec des officiels de Takeo, ils furent arrĂȘtĂ©s et envoyĂ©s sous bonne garde Ă  Phnom Penh oĂč ils furent exposĂ©s dans des cages durant le CongrĂšs. Le prince, dĂ©mentait avoir conclu un arrangement avec eux et le rassemblement s’improvisa en tribunal pour juger les accusĂ©s. Sihanouk leur demanda d’avouer que les AmĂ©ricains aidaient Son Ngoc Thanh et fournissaient les Ă©metteurs radio des Khmers Serei. Saing San s’exĂ©cuta et fut immĂ©diatement libĂ©rĂ©, mais Preap In, certainement en Ă©tat de choc, resta silencieux. Il fut dĂ©fĂ©rĂ© devant un tribunal militaire, condamnĂ© Ă  mort le 25 novembre et fusillĂ© au dĂ©but de 1964. Si trĂšs peu de tĂ©moignages du procĂšs furent publiĂ©s, un film d’une quinzaine de minutes sur son exĂ©cution fut rĂ©alisĂ© Ă  la demande du prince et diffusĂ© pendant un mois dans tous les cinĂ©mas du Cambodge. Des affiches sur le mĂȘme sujet furent Ă©galement envoyĂ©es dans toutes les Ă©coles. La rĂ©fĂ©rence Ă  ces dĂ©cisions lugubres rĂ©apparut plus tard dans la propagande anti Sihanouk et des Ă©tudes firent de l’évĂšnement le marqueur du dĂ©but du dĂ©clin du prince[218].

Le congrĂšs avait Ă©galement approuvĂ© la dĂ©cision de renoncer Ă  l’aide amĂ©ricaine. En fait, cette dĂ©cision semblait avoir l'assentiment d’une grande majoritĂ© de la population. Les attaques du prince, invoquant un « ogre » prĂȘt Ă  tourmenter le Cambodge, assez rĂ©pandu dans les lĂ©gendes traditionnelles, ne pouvait que rencontrer un Ă©cho favorable. Il en Ă©tait de mĂȘme des dĂ©nigrements des « capitalistes » locaux dans la description desquels beaucoup reconnaissaient les Chinois et les Sino-Khmers qui exerçaient une rĂ©elle prĂ©potence sur le commerce du royaume[219]. Le 20 novembre, John Fitzgerald Kennedy provoqua une rĂ©union Ă  la Maison-Blanche avec des membres du DĂ©partement d'État et ses conseillers afin de s’informer sur les causes de la crise cambodgienne. Il avait du mal Ă  croire que Sihanouk voulait se priver de l’aide Ă©conomique Ă  cause de Khmers Serei dont lui-mĂȘme ignorait jusqu’à l’existence. Le SecrĂ©taire adjoint Roger Hilsman (en) avoua Ă  son prĂ©sident que ces dissidents avaient Ă©tĂ© secrĂštement soutenus pendant la pĂ©riode Eisenhower et que de fortes sommes avaient Ă©tĂ© engagĂ©es ; il suggĂ©rait d’apaiser la situation par le biais d’une dĂ©claration dans laquelle Kennedy dĂ©mentirait la poursuite de cette aide. Ce dernier acquiesça et envisagea, afin de calmer Sihanouk, d’envoyer Ă  Phnom Penh Dean Acheson, qui avait dĂ©fendu le Cambodge devant la Cour internationale de justice dans le conflit qui l’opposa Ă  la ThaĂŻlande Ă  propos du Temple de Preah Vihear. Il fut dĂ©cidĂ© d’attendre quelques jours et le retour d’un voyage que le prĂ©sident devait faire au Texas pour prendre une dĂ©cision. Malheureusement, deux jours plus tard, le 22 novembre 1963, Ă  12H30 locales, Kennedy Ă©tait assassinĂ© Ă  Dallas[220].

Le prince Norodom Kanthoul, qui s’était rendu aux funĂ©railles de John F. Kennedy, eut un entretien avec Lyndon B. Johnson au cours duquel le successeur du prĂ©sident assassinĂ© restait Ă©vasif quant Ă  l’implication amĂ©ricaine dans le mouvement des Khmers Serei. Le Premier ministre cambodgien rencontra Ă©galement le sous-secrĂ©taire d’État William Averell Harriman qui, afin de calmer le jeu proclama : « Nous n’avons aucun contact direct ou indirect avec les Khmers Serei, ni avec aucun groupe qui tenterait d’affecter la souverainetĂ© et l’indĂ©pendance du Cambodge. » Cette dĂ©claration reconnaissait nĂ©anmoins Ă  demi-mot que les États-Unis Ă©taient au courant des activitĂ©s des Khmers Serei et du soutien dont ils bĂ©nĂ©ficiaient de la part de leurs alliĂ©s. Sihanouk ne pouvait se satisfaire de la dĂ©claration de Harriman[221].

Pendant ce temps, le prince cherchait des soutiens pour organiser une confĂ©rence devant garantir la neutralitĂ© du Cambodge et pour laquelle il escomptait rĂ©unir une quinzaine de pays. Il pensait ainsi occuper une position centrale sur le thĂ©Ăątre d’opĂ©rations du Sud-est asiatique alors qu’aux États-Unis, une partie du dĂ©partement d’État tentait de convaincre le nouveau prĂ©sident d’adopter une attitude plus agressive au ViĂȘt Nam. La proposition de Norodom Sihanouk venait contrarier les projets de ces personnes[222]. Si, l’ambassadeur Sprouse et certains cercles de Washington accueillaient favorablement l’initiative du prince, elle Ă©tait rejetĂ©e par Henry Cabot Lodge, Jr., l’ambassadeur amĂ©ricain Ă  Saigon, les gouvernements thaĂŻlandais et de la rĂ©publique du ViĂȘt Nam ainsi qu’une partie des conseillers proches du prĂ©sident Johnson. En fait, ils semblaient craindre que la confĂ©rence dĂ©bouche sur des pourparlers plus larges qui pourraient notamment inclure une neutralisation du sud du ViĂȘt Nam[223].

Dans le mĂȘme temps, les dirigeants cambodgiens et amĂ©ricains entamaient des pourparlers afin de tenter d’aplanir leurs diffĂ©rends. Les trois thĂšmes Ă©voquĂ©s Ă©taient la fin de l’aide Ă©conomique, la proposition de confĂ©rence de Sihanouk et l’interruption des Ă©missions des Khmers Serei. Les conversations n’eurent aucun rĂ©sultat concret. L’ambassadeur Sprouse, dans son rapport, affirmait que les actions du chef de l’État n’étaient pas comprises ni admises par les classes Ă©duquĂ©es et les forces armĂ©es qui allaient ĂȘtre les premiĂšres victimes des mesures prises par Sihanouk. Il prĂ©disait que les changements qui allaient en rĂ©sulter risquaient de provoquer des bouleversements « sans prĂ©cĂ©dent » et imprĂ©visibles au niveau de la politique interne[224]. Les personnes auxquelles faisaient allusion Sprouse comprenaient ses contacts pro-occidentaux qui pensaient que Sihanouk se trompait en voulant combattre seul le communisme. Il se peut qu’ils aient induit en erreur l’ambassadeur qui surestimait l’influence des opposants au prince[225].

Le 8 dĂ©cembre, le marĂ©chal Sarit Thanarat, Premier ministre thaĂŻlandais, meurt Ă  Bangkok. Ses relations avec Norodom Sihanouk avaient toujours Ă©tĂ© orageuses. Sarit conduisait une politique viscĂ©ralement anti khmĂšre, souhaitait ouvertement la chute du prince et soutenait les partisans de Son Ngoc Thanh, leur offrant toute facilitĂ© pour les laisser dĂ©verser leur fiel Ă  l’encontre du dirigeant cambodgien Ă  travers leurs Ă©missions radio[226]. DĂšs le lendemain, le prince faisait franchir un degrĂ© supplĂ©mentaire dans la dĂ©gradation des relations entre les États-Unis et le Cambodge. Dans un discours en khmer, Sihanouk dĂ©clarait qu’en un mois, ses principaux ennemis avaient disparu. Ce fut tout d’abord celui de l’est (Diệm), ensuite leur grand patron (Kennedy) et maintenant celui de l’ouest (Sarit). D’aprĂšs lui, tous les trois avaient essayĂ© d’attenter Ă  la neutralitĂ© du Cambodge et au bien-ĂȘtre de ses habitants et allaient pouvoir maintenant construire toutes les bases de l’OTASE qu’ils voudraient en enfer[227]. La traduction officielle du discours fut Ă©dulcorĂ©e et omettait par exemple bien Ă  propos les rĂ©fĂ©rences au « grand patron », mais le ministĂšre de l’information avait diffusĂ© le discours original qui avait Ă©tĂ© captĂ© et enregistrĂ© par les officiels amĂ©ricains en poste Ă  Bangkok. Le dĂ©partement d’état envoyait un cĂąble Ă  l’ambassadeur Sprouse, lui demandant d’émettre une protestation auprĂšs du gouvernement cambodgien et de rentrer Ă  Washington « pour consultation » jusqu’à ce que Sihanouk retire officiellement ces dĂ©clarations. Charles Woodruff Yost (en), l’ambassadeur amĂ©ricain auprĂšs des Nations unies rencontrait Ă©galement Nong Kimny, son homologue cambodgien aux États-Unis et qualifiait de « barbares » les propos tenus par le prince. En rĂ©ponse Ă  ces « insultes mĂ©prisantes et gratuites », l’ensemble de la mission diplomatique du royaume khmer Ă©tait rappelĂ© Ă  Phnom Penh[228].

Pendant ce temps, les rĂ©formes Ă©conomiques produisaient leurs premiers effets nĂ©gatifs. La nationalisation des banques privĂ©es entraĂźna, fin dĂ©cembre, la fermeture de la plus importante d’entre elles, la Banque de Phnom Penh. Son directeur, un sino-thaĂŻ du nom de Songsakd Kitchpanich s’enfuit le 22 dĂ©cembre Ă  Saigon Ă  bord de son avion personnel ; il aurait emmenĂ© avec lui 4 millions de dollars d’actifs et demanda l’asile politique Ă  la RĂ©publique du ViĂȘt Nam. Il utilisa une partie de sa fortune – venant au moins en partie de l’argent dĂ©tournĂ© – pour financer les Khmers Serei, dont il sera d'ailleurs briĂšvement chargĂ© de leurs relations extĂ©rieures en 1964[229].

Le congrĂšs national qui s’ouvrait peu aprĂšs Ă©tait consacrĂ© aux derniers Ă©vĂ©nements. Les membres les plus prĂ©pondĂ©rants des Ă©lites se bousculĂšrent pour dĂ©mentir avoir jamais eu de liens avec Songsakd. Certains interlocuteurs, dont les allocutions dĂ©plaisaient Ă  Sihanouk Ă©taient interrompus durant leurs interventions, tel Douc Rasy. Ce dernier, dĂ©putĂ© conservateur Ă©lu en 1962 et titulaire d’une formation juridique, Ă©mettait des critiques argumentĂ©es concernant les mesures Ă©conomique rĂ©cemment prises et la suspension de l’aide amĂ©ricaine. Il objectait d’autre part que la fuite de Songsakd relevait plus d’un dĂ©lit de droit commun que d’une atteinte Ă  la sĂ»retĂ© de l’État. Sihanouk ne voulait pas de son cĂŽtĂ© remettre en cause les officiels, sa famille et ses fidĂšles qui pour la plupart avaient placĂ© de fortes sommes Ă  la Banque de Phnom Penh et prĂ©fĂ©ra affirmer que Songsakd Ă©tait Ă  la solde des États-Unis. Il proposait Ă©galement d’ouvrir une enquĂȘte, mais la commission qui allait s’en charger ne se rĂ©unit qu’une seule fois et ne publia jamais de conclusions[230]. Sihanouk espĂ©rait que ses rĂ©formes contrarieraient les Ă©lites conservatrices, mais ne voulait pas pour autant instaurer un Ă©tat communiste. L’administration des entreprises nationalisĂ©es Ă©tait octroyĂ©e Ă  des personnes plus connues pour ĂȘtre proches du chef de l’État que pour leurs capacitĂ©s de gestionnaires. Le prince voulait Ă©galement rĂ©duire l’influence des Ă©lites prooccidentales qui pour la plupart avaient des liens avec les communautĂ©s chinoise et sino-khmĂšre, ce qui ne manquait pas de dĂ©plaire au monarque. En fait, il venait de s’en faire des ennemis qui allaient plus tard basculer dans le camp rĂ©publicain[231].

Au dĂ©but des annĂ©es 1960, les mĂ©thodes originales de Sihanouk n’étaient pas remises en cause par la majoritĂ© des Cambodgiens dans les campagnes, empĂȘtrĂ©s dans la pauvretĂ©, le travail harassant et les conditions sanitaires prĂ©caires. Pour eux, ceux qui s’étaient enrichi Ă©taient assimilĂ©s Ă  des corrompus. AprĂšs 1975, lors du rĂ©gime khmer rouge, Pol Pot et d’autres dirigeants affirmeront que la rĂ©volution avait pu se dĂ©velopper grĂące Ă  la haine viscĂ©rale des ruraux Ă  l’encontre des urbains. MĂȘme si cette acrimonie devint plus importante Ă  partir de 1970, elle devait dĂ©jĂ  exister Ă  ce moment-lĂ , mais en dehors de quelques cercles d’intellectuels, Sihanouk n’était pas concernĂ© par ce rejet. Les paysans Ă©taient mĂȘme touchĂ©s par les visites du monarque qui conversait avec eux de problĂšmes qu’ils avaient du mal Ă  comprendre. Concernant l’aide amĂ©ricaine, il connaissait la question mieux qu’eux et comme pour eux il Ă©tait toujours le roi, ils se devaient de croire ce qu’il leur disait[232]. Cette nouvelle politique prĂ©sentait Ă©galement quelques avantages. Le premier fut que Sihanouk n’eut plus Ă  subir les « conseils » condescendants des officiels amĂ©ricains qui agaçaient tant l'intĂ©ressĂ©. Le second fut la fin – certes temporaire – de l’achat de produits de luxe dont les recettes Ă©taient destinĂ©es Ă  financer les frais de fonctionnement du programme d’aide amĂ©ricaine mais reprĂ©sentaient une importante fuite de capitaux. Enfin, et plus important, le fait que les forces armĂ©es nord-vietnamienne et du FNL pouvaient stationner pacifiquement sur la frontiĂšre est du Cambodge Ă  l’abri des regards amĂ©ricains les rendaient moins enclines Ă  gĂ©nĂ©rer des dĂ©sordres avec les autoritĂ©s du royaume khmer[233]. En fait, Sihanouk pensait qu’en se brouillant avec les États-Unis et en utilisant une phrasĂ©ologie de gauche dans ses discours, il pourrait conserver l’appui des puissances communistes tout en muselant son opposition de gauche. En 1965, lors d’un entretien Ă  la BBC au cours duquel on lui demandait les raisons de son revirement il affirmait que de nombreux agents communistes proches de la Chine et du ViĂȘt Nam rĂ©sidaient au Cambodge et pourraient facilement crĂ©er des troubles s’il se rapprochait des États-Unis. Il concluait qu’il n’avait rien Ă  gagner Ă  rĂ©tablir des liens trop Ă©troits avec Washington[234].

La guerre au ViĂȘt Nam (1964)

DĂ©but 1964, un accord secret aurait Ă©tĂ© conclu, qui permettait Ă  l’armĂ©e cambodgienne de prĂ©lever 10 % de l’aide militaire chinoise destinĂ©e aux maquis vietnamiens et qui transitait par le port de Sihanoukville. Une ponction supplĂ©mentaire Ă©tait opĂ©rĂ©e sur le transport Ă  la frontiĂšre de nourriture et autres biens dans des camions de l’armĂ©e ou d'entreprises privĂ©es. Bien que cet accommodement, dont se plaignaient les États-Unis mais que Sihanouk niait officiellement, eĂ»t enrichi les officiers cambodgiens, il n’allait pas pour autant assurer au prince leur soutien. La plupart d’entre eux rejoindront en 1970 Lon Nol et Sirik Matak et renverront leurs anciens clients au Sud ViĂȘt Nam[235]. Toutefois, l’abandon de l’aide des États-Unis ne comportait pas que des avantages. D’abord, comme l’avait fait remarquer certains de ses opposants de droite, Sihanouk n’avait quasiment plus de soutien pour modĂ©rer d’éventuelles exigences du camp communiste. D’autre part, l’équipement militaire amĂ©ricain de l’armĂ©e cambodgienne ne pouvait plus ĂȘtre entretenu et se dĂ©gradait. Le matĂ©riel fourni par l’URSS, la TchĂ©coslovaquie et la Chine n’était pas interchangeable et ne prĂ©sentait qu’un intĂ©rĂȘt limitĂ© en dehors des dĂ©filĂ©s. Une autre consĂ©quence des nouvelles rĂ©formes Ă©conomiques du prince fut qu’il s’aliĂ©na les Ă©lites commerçantes sino-khmĂšres. En fait, Sihanouk avait prĂ©fĂ©rĂ© orienter sa politique plus Ă  gauche, espĂ©rant avoir plus de prise sur les intellectuels et amĂ©liorer sa popularitĂ© auprĂšs de ses alliĂ©s, notamment la Chine et la France plutĂŽt que de tenter d'influencer l'action du gouvernement de Washington au ViĂȘt Nam[236].

À partir de 1964, l’intervention amĂ©ricaine au ViĂȘt Nam semblait confirmer la crainte et la mĂ©fiance que Sihanouk avait nourries Ă  l’encontre des États-Unis et le poussait Ă  chercher des soutiens internationaux pour protĂ©ger son rĂ©gime de la tourmente. Cela incita Ă©galement la gauche cambodgienne Ă  encourager le prince Ă  se rapprocher du FNL et du Nord Vietnam tout en renforçant ses liens avec la Chine[237]. Dans le mĂȘme temps, la popularitĂ© de ce changement dans la politique Ă©trangĂšre n’était pas sans poser des problĂšmes aux opposants de tous bords. Les Ă©lites pro occidentales se retrouvaient de plus en plus isolĂ©es de par leur dĂ©fiance vis-Ă -vis des rĂ©formes Ă©conomiques et du soutien apportĂ© par les rĂ©gimes communistes. Ce sentiment fut renforcĂ© Ă  partir de la fin de 1965, quand le nĂ©goce avec les opposants au rĂ©gime de SaĂŻgon devint profitable. Toutefois, ce commerce montra rapidement ses limites. Outre qu’il n’apportait aucune rentrĂ©e fiscale, il sapait Ă©galement l’autoritĂ© de Sihanouk au profit des Vietnamiens qui bientĂŽt contrĂŽleront des parties importantes du nord et de l’est du pays[238]. Les rĂ©formes mettaient Ă©galement le parti des travailleurs du KampuchĂ©a devant un dilemme : devait-il encourager la guĂ©rilla ou attendre son heure ? Les Vietnamiens, espĂ©rant utiliser le territoire cambodgien afin de reconstituer et approvisionner leurs forces, poussaient pour la seconde solution. Saloth SĂąr et ses compagnons durent obtempĂ©rer, mais cela les conforta dans leur certitude d’ĂȘtre sacrifiĂ©s aux intĂ©rĂȘts vietnamiens. D’autres, dont la plupart seront plus tard victimes des purges khmĂšres rouges, prĂ©fĂ©raient collaborer plutĂŽt que de suivre une politique xĂ©nophobe et indĂ©pendante qui risquait de les mener Ă  leur perte. Les cellules phnompenhoises du parti ne pouvaient quant Ă  elles s’exprimer du fait de la rĂ©pression menĂ©e par la police et l’armĂ©e. En rĂ©sumĂ©, neutralisĂ© par Sihanouk dans les villes et par les Vietnamiens dans les campagnes, le parti traversa une importante crise existentielle[239].

En mĂȘme temps, Ă  Phnom Penh, les jeunes Khmers Ă©taient sĂ©duits par la nouvelle politique antiamĂ©ricaine et anticapitaliste. En mars 1964, des manifestations Ă©taient organisĂ©es devant les ambassades des États-Unis et du Royaume-Uni. Le cortĂšge Ă©tait composĂ© de soldats en civil, d’ouvriers et d’étudiants Ă  qui on avait donnĂ© leur journĂ©e pour l’occasion. Ils avaient Ă©tĂ© amenĂ©s dans la capitale dans des camions du gouvernement et Ă©taient guidĂ©s par des haut-parleurs fournis par le ministĂšre de l’information. Ils critiquaient le soutien amĂ©ricain apportĂ© aux Khmers Serei et la rĂ©ticence des deux nations anglo-saxonnes Ă  appuyer la demande de Sihanouk de rĂ©unir une confĂ©rence de 14 pays sur le ViĂȘt Nam. Les Ă©vĂ©nements durĂšrent plusieurs heures et malgrĂ© de nombreux dĂ©gĂąts matĂ©riels dans les ambassades, on ne dĂ©plora aucun blessĂ©. Sihanouk vit dans ces dĂ©monstrations une marque de sa popularitĂ© auprĂšs de son peuple et se sentit confortĂ© dans son aversion vis-Ă -vis des États-Unis[240]. Surpris par l’ampleur et la virulence de la manifestation, Lon Nol rencontra peu aprĂšs les leaders Ă©tudiants au LycĂ©e Sisowath et les mis en garde contre toute vellĂ©itĂ© de manƓuvre politique autonome. Sihanouk avait, de son cĂŽtĂ©, probablement espĂ©rĂ©, en laissant ses fidĂšles exprimer leur rancƓur, convaincre ses compatriotes de la justesse de ses actes et intimider ses adversaires pour qu’ils acceptent de prendre en compte son point de vue[241].

S’il ne semble pas s’ĂȘtre trompĂ© sur le premier point, il n’en fut pas du mĂȘme du second. La politique amĂ©ricaine au Sud-est asiatique basculait de plus en plus vers une volontĂ© de faire la guerre au communisme et dans ce contexte, le rapprochement avec la Chine et le ViĂȘt Nam du Nord Ă©tait considĂ©rĂ© comme un vĂ©ritable casus belli[242]. Les nouvelles intentions amĂ©ricaines apparaissent plus clairement Ă  la fin de mars 1964, quand des unitĂ©s sud-vietnamiennes attaquĂšrent un village cambodgien. Des conseillers amĂ©ricains furent tĂ©moins des faits qui firent 17 morts et une vingtaine de blessĂ©s parmi les civils khmers. L’ambassade des États-Unis Ă  SaĂŻgon regrettait l’incident, invoquant une « frontiĂšre pauvrement dĂ©limitĂ©e » avec le Cambodge et proposait de dĂ©dommager les victimes et leurs familles, mais refusait d’accĂ©der Ă  la demande de Phnom Penh de prĂ©senter des excuses plus formelles. Pour beaucoup d’AmĂ©ricains au Sud-Vietnam, le Cambodge, en acceptant de donner refuge aux communistes, avait renoncĂ© Ă  sa neutralitĂ©. En aoĂ»t 1964, les États-Unis proposĂšrent de nommer un nouvel ambassadeur, Randolph Kidder, Ă  Phnom Penh. Le ministĂšre cambodgien des affaires Ă©trangĂšres accepta la demande et Kidder s’envola pour la capitale khmĂšre, mais Sihanouk atermoyait avant d’annoncer officiellement la nomination ; dans le mĂȘme temps les incidents de frontiĂšres se dĂ©veloppaient Ă  l’est du pays. Le prince utilisa ce prĂ©texte pour renvoyer l’ancien nouvel ambassadeur sans lui laisser le temps d’avoir pu prĂ©senter ses lettres de crĂ©ance[243].

Les relations avec la Chine Ă©taient plus calmes. En septembre 1964, de retour d’une visite Ă  PĂ©kin, Sihanouk annonçait qu’il avait obtenu une importante aide sans condition et l’assurance d’un soutien Ă  sa politique. Dans le mĂȘme discours, il opposait la gĂ©nĂ©rositĂ© chinoise Ă  la froideur nord-vietnamienne et affirmait avoir mĂȘme refusĂ© une offre d’assistance du Premier ministre PháșĄm Văn Đồng[244]. Concernant les États-Unis, la prĂ©sence de troupes du FNL et du Vietnam du Nord les agaçait au plus haut point, notamment les bases de l’autre cĂŽtĂ© de la frontiĂšre qu’ils repĂ©raient lors de leurs reconnaissances aĂ©riennes mais que les lois internationales les empĂȘchaient de dĂ©truire. L’armĂ©e du royaume khmer de son cĂŽtĂ© n’était pas assez puissante pour expulser les Vietnamiens et ne fit rien dans ce sens, sauf quand des soldats cambodgiens furent tuĂ©s. Le haut commandement militaire fournissait aux journalistes des rapports sur les incursions amĂ©ricaines et sud-vietnamiennes au Cambodge et dans son espace aĂ©rien, mais ne mentionnait pas la prĂ©sence des troupes communistes[245]. Un ou deux jours avant que les journalistes ou les membres de la Commission internationale de ContrĂŽle (en) (CIC), issue des accords de GenĂšve de 1954, Ă©taient autorisĂ©s Ă  visiter les lieux, les unitĂ©s disparaissaient et toutes traces de leur passage Ă©taient effacĂ©es par l’armĂ©e et les riverains. En niant la prĂ©sence vietnamienne au Cambodge, Sihanouk pouvait dĂ©peindre les AmĂ©ricains et les Sud-vietnamiens comme des envahisseurs qui franchissaient les frontiĂšres pour tuer et blesser d’innocents civils. Dans le mĂȘme temps, le fait que les enquĂȘtes aboutissaient constamment Ă  ne reconnaĂźtre que les violations des troupes du camp pro amĂ©ricain ne pouvaient qu’attiser la frustration de ces derniĂšres[246].

Les relations avec Washington continuaient Ă  se dĂ©grader. Une confĂ©rence entre les deux protagonistes eut lieu en dĂ©cembre 1964, mais se solda par un Ă©chec. Le Cambodge exigeait, avant d’entamer toute discussion, que les États-Unis cessent, et donc reconnaissent, leur agression contre le ViĂȘt Nam et qu’ils arrĂȘtent de prĂ©tendre, soi-disant faussement, que le royaume khmer abritait des bases Việt Minh. En fait, chaque partie campait sur des positions qu’elles savaient erronĂ©es, mais qu’elles ne pouvaient remettre en cause sans perdre la face[247].

Émergence d’une Ă©lite pro-occidentale (1965 – 1966)

Avec la livraison du matĂ©riel militaire chinois depuis Sihanoukville, la coopĂ©ration entre les communistes vietnamiens et le gouvernement cambodgien se dĂ©veloppait. Si ces transactions, comme dĂ©jĂ  Ă©voquĂ© prĂ©cĂ©demment, permirent un enrichissement rapide des intermĂ©diaires, l’apport Ă  l’économie nationale Ă©tait mitigĂ©. La vente en contrebande de riz, de bĂ©tail et autre produits alimentaires aux troupes du FNL permirent aux fermiers d’amasser un peu d’argent et aux commerçants chinois et sino-khmers des sommes considĂ©rables. Ceux qui transportaient le matĂ©riel, ainsi que les officiers de l’armĂ©e qui les protĂ©geaient purent eux aussi amĂ©liorer leurs revenus. À l’est du pays, un vĂ©ritable trafic s’était dĂ©veloppĂ© entre les paysans et les rebelles, prĂȘts Ă  payer les produits agricoles Ă  des prix sur lesquels les commerçants locaux et le gouvernement ne pouvaient s’aligner. AprĂšs 1966-1967, les exportations de riz chutaient, ce qui grevait un budget national dĂ©jĂ  mis Ă  mal par les projets de prestige de Sihanouk, tels la construction d’un stade olympique ou des hĂŽtels de luxe[248]. En attendant que les effets nĂ©gatifs se fassent sentir, Sihanouk rĂ©coltait les bĂ©nĂ©fices de sa politique antiamĂ©ricaine. En fĂ©vrier – mars 1965, il rĂ©unissait une confĂ©rence des peuples indochinois Ă  Phnom Penh qui condamnait l’intervention des États-Unis en Asie du Sud-est et qui proposait la mise en place d’un congrĂšs plus important qui serait aussi ouvert Ă  des pays hors d’Indochine. En dehors des membres du Sangkum, seuls participaient des reprĂ©sentants des diffĂ©rentes guĂ©rillas communistes et des minoritĂ©s ethniques du Sud ViĂȘt Nam proches d’eux, les dirigeants de Bangkok, Washington et SaĂŻgon ayant refusĂ© d'y participer au prĂ©texte que l’idĂ©e Ă©tait soutenue par le Nord-Vietnam et le FNL. Toutefois, la motion de cessez-le-feu que proposait le prince fut rejetĂ©e et aucune dĂ©cision concrĂšte ne fut suivie d’effet, notamment Ă  cause du refus des autres nations de participer Ă  une confĂ©rence Ă©largie[249].

Le 3 mai 1965, Sihanouk prĂ©textait une attaque amĂ©ricaine qui avait eu lieu le 28 avril sur deux villages cambodgiens du district de Memot (province de Kampong Cham) et qui avait fait un mort et trois blessĂ©s cambodgiens, pour rompre officiellement les relations diplomatiques avec les États-Unis ; elles le resteront pendant quatre annĂ©es. Le prince proposait toutefois de maintenir une reprĂ©sentation consulaire, mais Washington refusa ; l’ambassade ferma ses portes et c’est Ă  l’Australie qu’échut le rĂŽle de reprĂ©senter les intĂ©rĂȘts amĂ©ricains au Cambodge[250]. La Chine, le ViĂȘt Nam du Nord et les proches conseillers du monarque semblent avoir jouĂ© un rĂŽle dans cette rupture, mais elle Ă©tait de toute façon populaire Ă  l’époque chez la plupart des Cambodgiens. Les États-Unis de leur cĂŽtĂ© s’y attendaient depuis longtemps et ne firent rien pour l’empĂȘcher[251]. Le prince par contre restait sur ses gardes avec la gauche khmĂšre. Avant le congrĂšs national de juillet 1965, un Ă©tudiant du lycĂ©e Kambujaboth eu l’imprudence d’envoyer une lettre au chef de l’État oĂč il exprimait son inquiĂ©tude devant le manque de progrĂšs dans l’instruction de l’affaire Kitchpanich. Le lycĂ©en fut conduit devant le prince qui le sermonna et proposa ironiquement de le nommer Premier ministre. Le jeune homme rĂ©pliqua que la seule chose qui lui importait Ă©tait de permettre au Cambodge de progresser. Sihanouk le menaça de cinq Ă  vingt ans de prison pour son insolence et le fit reconduire. Lors du congrĂšs, il se rĂ©fĂ©ra Ă  cette lettre et demanda Ă  l’assistance si cette lettre Ă©tait un argument suffisant pour que le « Sangkum soit dissous ». Comme prĂ©vu, une marĂ©e de mains levĂ©es s’opposa Ă  cette motion[252].

À la fin de 1965, le prince entreprit une tournĂ©e qui aprĂšs la Chine puis la CorĂ©e du Nord, devait le mener en URSS et dans plusieurs pays d’Europe de l’Est. Il quitta Phnom Penh le 2 septembre pour la France oĂč il fit quelques examens mĂ©dicaux, avant de s’envoler pour la Chine oĂč il arriva le 22 septembre. Il se rendit ensuite Ă  Pyongyang oĂč l’ambassadeur soviĂ©tique lui demanda le 8 octobre d’annuler la visite prĂ©vue Ă  Moscou, les dirigeants de son pays Ă©tant « trĂšs occupĂ©s » et ne pouvant « le recevoir comme prĂ©vu en octobre ». Il dĂ©cidait donc de suspendre sa tournĂ©e et de rentrer le 17 octobre Ă  Phnom Penh. Il attribuera cette annulation Ă  sa politique de rapprochement avec PĂ©kin et, s’il ne pouvait se permettre une rupture des relations diplomatiques avec Moscou six mois aprĂšs celles avec Washington, il en retirera quand mĂȘme une mĂ©fiance accrue vis-Ă -vis du rĂ©gime soviĂ©tique[253].

Au dĂ©but de 1966, la tension grandissait aux frontiĂšres orientale et occidentale. À l’ouest, elle provenait surtout d’irruptions de rebelles Khmers Serei et de militaires thaĂŻlandais alors qu’à l’est, il s’agissait de ripostes des soldats sud-vietnamiens et amĂ©ricains aux incursions de troupes du Việt Cộng en RĂ©publique du ViĂȘt Nam depuis le Cambodge ; ces rĂ©pliques faisaient malheureusement de plus en plus de victimes dans la population civile cambodgienne. Ces derniers actes Ă©taient rĂ©guliĂšrement signalĂ©s Ă  la Commission Internationale de ContrĂŽle, mais celle-ci devait se contenter de consigner les faits. En plusieurs occasions, l’armĂ©e amĂ©ricaine ressortit l’argument de « la frontiĂšre mal dĂ©finie », ce qui ne pouvait qu’attiser la colĂšre du prince[254].

Afin d’obtenir des soutiens Ă  mĂȘme de l’aider Ă  lutter contre ces problĂšmes, Sihanouk s’attacha durant toute l’annĂ©e 1966 Ă  faire reconnaĂźtre les frontiĂšres et la neutralitĂ© du Cambodge Ă  l’étranger. Il dĂ©marra cette campagne aprĂšs que son projet de confĂ©rence internationale sur le conflit indochinois eut Ă©chouĂ©. La France, qui avait tracĂ© ces frontiĂšres ne pouvait que les approuver, ce que firent Ă©galement de nombreux pays qui n’avaient pas de limites communes avec le Cambodge et rien Ă  perdre ou Ă  gagner avec une telle dĂ©claration. Toutes ces reconnaissances Ă©taient relayĂ©es et prĂ©sentĂ©es comme des victoires par la presse cambodgienne aux ordres de Sihanouk. Les Ă©tats riverains, par contre, Ă©taient moins enclins Ă  adhĂ©rer aux vues du prince quant Ă  leurs frontiĂšres communes. Les États-Unis, pour leur part, se dĂ©robĂšrent ; outre qu’elle aurait invalidĂ© Ă  l’avenir l’argument de la « frontiĂšre mal dĂ©finie », une acceptation des limites que leurs plus proches alliĂ©s de l’Asie du Sud-est Ă©taient rĂ©ticents Ă  reconnaĂźtre pouvait ĂȘtre interprĂ©tĂ©e comme un dĂ©saveu Ă  l’égard de ces derniers. Ce nouveau mĂ©pris pour les intĂ©rĂȘts cambodgiens allait une fois de plus ĂȘtre exploitĂ© par Sihanouk[255].

Dans le mĂȘme temps, afin de faire taire les critiques mettant en doute la neutralitĂ© du Cambodge, Sihanouk proposait de renforcer les capacitĂ©s d’investigation de la CIC, mais demandait aux grandes puissances de financer cet effort, l’économie du royaume khmer ne permettant pas d’y subvenir. Si les États-Unis en acceptĂšrent le principe, la proposition essuyait un refus de la RĂ©publique DĂ©mocratique du ViĂȘt Nam, qui n’avait aucun intĂ©rĂȘt Ă  ce que les incursions du Việt Cộng en territoire cambodgien soient rĂ©vĂ©lĂ©es au grand jour et de la Chine qui affirma qu’une telle mesure irait Ă  l’encontre de la « lutte antiamĂ©ricaine menĂ©e en commun par les peuples d’Indochine »[256].

Beaucoup de Cambodgiens interrogĂ©s Ă  partir des annĂ©es 1980 confirment qu’à partir de 1966-1967, le monarque semblait se dĂ©sintĂ©resser de la vie politique et prĂ©fĂ©rait se consacrer Ă  quelques-unes de ses passions telles le cinĂ©ma ou l’écriture de ses mĂ©moires et passer plus de temps avec son entourage. Certains tĂ©moins mettent ce changement sur le compte de la perte d’influence de la reine Kossamak au profit de sa derniĂšre Ă©pouse Monique Izzi, d’autres Ă  son impuissance Ă  rĂ©gler les problĂšmes Ă©conomiques et politiques chaque jour plus nombreux. D’anciens fidĂšles se rappelaient que le prince se plaignait rĂ©guliĂšrement d’ĂȘtre Ă©puisĂ© et qu’il voulait abandonner le pouvoir. MĂȘme si ces sautes d’humeurs semblent rĂ©elles, il est peu probable qu’en fait il ait laissĂ© quiconque gouverner Ă  sa place[257]. Il continuait donc ses attaques contre les Khmers Serei et les communistes locaux. D’aprĂšs lui, des documents du Parti ouvrier du KampuchĂ©a avaient Ă©tĂ© saisis, qui l’accusait d’ĂȘtre un agent des AmĂ©ricains. MĂȘme si l’information Ă©tait authentique, ce qui n’a pu ĂȘtre dĂ©montrĂ©, elle prouverait que le parti adoptait une ligne anti-sihanoukiste. Le prince faisait quant Ă  lui remarquer que Hou Yuon avait supportĂ© Son Ngoc Thanh au dĂ©but des annĂ©es 1950, du temps oĂč tous deux Ă©tait Ă  Paris et en dĂ©duisait qu’en fait, les militants khmers rouges Ă©taient des partisans du leader nationaliste. S’ils avaient Ă©tĂ© de « vĂ©ritables communistes », ajoutait-il, ils soutiendraient comme l’avait fait les pays de cette obĂ©dience, une nation qui avait rompu ses liens avec les États-Unis[258]. En butte Ă  des problĂšmes Ă©conomiques, le prince lança une politique d’austĂ©ritĂ©, mais sans grande conviction. Il fit abolir le titre d’altesse royale dont on devait l’affubler et mis un terme au cĂ©rĂ©monial consistant Ă  ĂȘtre accompagnĂ© lors de ses sorties d’un page qui devait constamment tenir un parasol. Il ne fit rien en revanche pour rĂ©duire son train de vie qu’il estimait ĂȘtre celui dĂ©volu Ă  un chef d’État. Il voyait dans ces changements des signes de dĂ©mocratie et annonçait en mai 1966 qu’il allait consacrer l’annĂ©e Ă  faire franchir au pays un nouveau pas vers le socialisme. Trois semaines plus tard il publiait un dĂ©cret par lequel il annonçait que le magazine Preng Preng – qu’il possĂ©dait – allait dorĂ©navant augmenter son tirage de 5 000 exemplaires supplĂ©mentaires, le tout au frais du gouvernement[259].

En juillet 1966, de nouveaux contacts furent pris avec des reprĂ©sentants amĂ©ricains. Il fut mĂȘme un temps envisagĂ© d’accueillir Ă  Phnom Penh Averell Harriman, l’ambassadeur itinĂ©rant du prĂ©sident Johnson. Mais Ă  la suite du bombardement d’un village frontalier de la province de Kampong Cham les 31 juillet et 2 aoĂ»t par l’US Air Force, Sihanouk demandait d’annuler la visite[260].

En aoĂ»t, Sihanouk se dĂ©sintĂ©ressait des Ă©lections qui se profilaient, trop occupĂ© Ă  prĂ©parer la visite de 4 jours que Charles de Gaulle devait faire au Cambodge Ă  la fin du mois. Depuis longtemps, il admirait le GĂ©nĂ©ral Ă  qui il avait rendu visite en 1946, quand celui-ci avait quittĂ© le pouvoir et, aprĂšs 1970, il aimait Ă  se comparer Ă  lui, attribuant Ă  Lon Nol le rĂŽle du marĂ©chal PĂ©tain et aux AmĂ©ricains celui de l’armĂ©e nazie[261]. En termes de faste et d’organisation, cette visite fut l’apogĂ©e du premier rĂšgne de Sihanouk et le dernier coup d’éclat d’un siĂšcle de relations privilĂ©giĂ©es entre la France et le Cambodge. Elle fut aussi, pour le chef de l’État l’occasion d’obtenir la reconnaissance Ă  laquelle il aspirait tant et l’espoir que son neutralisme serait approuvĂ© par de grandes puissances. Le discours de Phnom Penh prononcĂ© par Charles de Gaulle soutenait sans rĂ©serve la politique du prince et condamnait l’escalade du conflit vietnamien. Le prĂ©sident français Ă©tait alors la meilleure arme que Sihanouk pouvait utiliser pour promouvoir son point de vue, mais les AmĂ©ricains, premiers visĂ©s par l'allocution, ne tĂ©moignĂšrent qu’un lĂ©ger agacement, mais ne modifiĂšrent en rien leur position sur la guerre au ViĂȘt Nam[262].

Les Ă©lections se dĂ©roulĂšrent le 11 septembre. Contrairement aux scrutins prĂ©cĂ©dents, les candidats ne devaient plus obtenir l’investiture du prince pour se prĂ©senter, ce qui fit que dans 75 des 82 circonscriptions, plusieurs postulants se rĂ©clamant du Sangkum – toujours seul parti en lice – se manifestĂšrent. Le choix qui s’offrait aux Ă©lecteurs se fit donc sur les questions locales et, d’aprĂšs Charles Meyer, conseiller de Sihanouk, Ă  ce petit jeu, ceux qui se dĂ©clarĂšrent trop proches du prince furent dĂ©savantagĂ©s[263]. L’autre enseignement de ces Ă©lections fut le recul de l’aile gauche du Sangkum, dont beaucoup de dĂ©putĂ©s ne s’étaient pas reprĂ©sentĂ©s, au profit de la droite qui fit Ă©lire des candidats qui n’avaient plus participĂ© aux scrutins depuis 1958, voire 1951[264].

La principale consĂ©quence de ces Ă©vĂ©nements fut que Sihanouk n’avait pu empĂȘcher ses adversaires d’investir l’AssemblĂ©e. En 1972, alors en exil Ă  PĂ©kin, il confia Ă  Jean Lacouture que le parlement Ă©lu en 1966 – et qui l’avait entretemps dĂ©posĂ© – avait Ă©tĂ© « le plus rĂ©actionnaire et corrompu » qu’il ait connu[265]. Au moment de l’annonce des rĂ©sultats, Sihanouk extĂ©nuĂ© par la visite de Charles de Gaulle trois semaines plus tĂŽt fit preuve d’une quiĂ©tude dont ses proches avaient peu l’habitude. Peu aprĂšs, il dut ĂȘtre hospitalisĂ© pour surmenage, provoquant l’ajournement de la session inaugurale de la nouvelle assemblĂ©e. Lorsque enfin le parlement put se rĂ©unir, il commença la sĂ©ance en dĂ©signant un Premier ministre. AprĂšs avoir rejetĂ© les candidatures de Sim Var et Norodom Kanthoul, il porta son dĂ©volu sur le gĂ©nĂ©ral Lon Nol[266].

Sihanouk avalisa le choix de la chambre et accepta que Lon Nol occupe le poste. En permettant la formation d’un gouvernement composĂ© de personnes proches des sensibilitĂ©s du nouveau Premier ministre, le prince laissait Ă  quelqu’un pourvu d’ambition personnelle et possĂ©dant son propre rĂ©seau clientĂ©liste le soin d’exercer le pouvoir sans Ă  ce moment en mesurer le danger[267]. Le choix de Lon Nol ne semblait en effet pas trĂšs risquĂ©. Jusque-lĂ , il semblait respecter Sihanouk et bien que, en 1965, le prince Monireth Ă©crira dans ses mĂ©moires qu’il avait une ambition dĂ©mesurĂ©e le monarque semblait sous-estimer cet aspect de son nouveau Premier ministre et interprĂ©tait ses silences pour des marques de dĂ©fĂ©rence. En 1988, le monarque affirmera toutefois qu’il l’avait depuis longtemps considĂ©rĂ© comme « capable un jour de diriger le gouvernement et l’armĂ©e », ajoutant que sa popularitĂ© au sein des militaires et de la jeunesse non-communiste ainsi que son « manque de flamboyance » en faisait un bon candidat Ă  un poste Ă  responsabilitĂ©[268].

Mais le prince regrettait que le gouvernement soit composĂ© de beaucoup de personnes qui ne lui Ă©taient pas dĂ©vouĂ©es et dĂ©cidait de former un contre-gouvernement[269]. Cet organisme, qui regroupait ses partisans et des membres de l’aile gauche du Sangkum hostile Ă  Lon Nol devait, d’aprĂšs le monarque, montrer Ă  l’étranger que « le Cambodge n’était pas une dictature ». Sihanouk ajoutait que ce contre-gouvernement se contenterait d’un bulletin quotidien qui ne contiendrait pas que des critiques du gouvernement, mais Ă©galement des propositions voire Ă©ventuellement approuverait les mesures qu’il estimerait justifiĂ©es et que ses pouvoirs seraient limitĂ©s Ă  « ceux reconnus par la Constitution Ă  nos journalistes »[270].Le but non avouĂ© de cette manƓuvre semble avoir Ă©tĂ© de permettre au monarque de reprendre la maĂźtrise des Ă©vĂ©nements. Pour lĂ©gitimer sa dĂ©cision, le prince affirmait que la crĂ©ation de ce contre-gouvernement faisait suite Ă  des demandes de jeunes militants, ce qu’il est difficile encore de nos jours d’étayer. En fait, il semble qu’il tentait de gĂ©rer l’opposition au Premier ministre qu’il venait de nommer, ceci afin de mieux le contrĂŽler et, si celui-ci venait Ă  trĂ©bucher, de s’en attirer les mĂ©rites[271].

Afin de se faciliter les choses, Sihanouk plaçait fin octobre Nhiek Tioulong – un de ses fidĂšles – Ă  la tĂȘte de l’armĂ©e en remplacement de Lon Nol. Le contre-gouvernement, quant Ă  lui, favorisa la renaissance des factions politiques, ce qui Ă©tait vu par le nouveau cabinet comme une tentative du prince de diviser pour mieux limiter l’influence de chacun. L’un des antagonismes les plus prompts Ă  refaire surface fut celui qui opposa Sim Var, qui avait rompu avec la politique du monarque et Chau Seng qui approuvait les vues de Sihanouk surtout en matiĂšre de relations extĂ©rieures. Afin de contrer l’influence du quotidien pro-gouvernemental La DĂ©pĂȘche qui venait de passer sous le contrĂŽle de Sim Var, le prince encouragea Chau Seng Ă  crĂ©er un nouveau titre appelĂ© La Nouvelle DĂ©pĂȘche, proche du contre-gouvernement. Les deux quotidiens s’engagĂšrent dans une bataille d’éditoriaux qui ne put que mettre en lumiĂšre le clivage qui se formait entre les conservateurs au pouvoir et ceux qui avaient de la sympathie pour les idĂ©es communistes. Peu aprĂšs les Ă©lections, des manifestations Ă©tudiantes et pro-Sihanouk Ă©clataient Ă  Phnom Penh. Le prince fut prompt Ă  les prĂ©senter comme une crise politique qui prouvait le bien-fondĂ© de sa mĂ©fiance envers le gouvernement de Lon Nol et contre ses adversaires de gauche. Il constatait que jour aprĂšs jour, son pouvoir partait entre les mains de personnes qu’il ne pouvait pas contrĂŽler. Le parlement n’était pas rĂ©uni depuis plus d’un mois qu’une rumeur enflait, prĂ©tendant que Sihanouk s’interrogeait sur l’opportunitĂ© de renvoyer un Premier ministre choisi par l’assemblĂ©e. Il Ă©tait alors malaisĂ© de juger de l’avenir de Sihanouk et de la politique cambodgienne Ă  l’aune des Ă©lections. Les consĂ©quences des Ă©lections n’étaient alors pas perceptibles et Sihanouk continuait de diviser les factions politiques pour mieux pouvoir les contrĂŽler et les rendre redevables Ă  son Ă©gard[272].

À la fin de l’annĂ©e 1966, le monarque avait repris l’initiative et le contrĂŽle des Ă©vĂ©nements. La presse Ă©tait toujours Ă  ses ordres et il dĂ©jouait les manƓuvres de ses adversaires. Dans le domaine des relations internationales, il Ă©tait trĂšs populaire et grĂące Ă  une habile diplomatie, il avait pu garder le Cambodge en dehors de la guerre du ViĂȘt Nam dont peu de ses concitoyens figuraient parmi les victimes[273].

En laissant Lon Nol Ă  la tĂȘte du gouvernement, Sihanouk espĂ©rait peut-ĂȘtre apaiser l’élite cambodgienne pro-occidentale. Il pouvait penser qu’il Ă©tait temps pour l’armĂ©e de prendre les commandes et intimider les opposants de gauche. Si le Premier ministre venait Ă  flĂ©chir ou devenait trop impatient, d’autres membres, loyaux au prince tels Nhiek Tioulong, Penn Nouth ou Son Sann pouvaient le remplacer. Le contre-gouvernement et le pouvoir de dissoudre l’assemblĂ©e Ă©taient deux autres armes entre les mains de Sihanouk. En fait, le choix de Lon Nol prĂ©sentait alors peu de risques perceptibles[274].

La révolte de Samlaut (1967)

À la mi-janvier 1967, le prince se rendit pour un mois et demi en France afin de suivre un traitement mĂ©dical[275]. Alors qu’il Ă©tait parti, le Phnom Penh Presse publia une sĂ©rie d’articles sur le dĂ©clin de Soekarno en IndonĂ©sie au profit du gĂ©nĂ©ral Soeharto. Le remplacement d’un pĂšre de l’indĂ©pendance capricieux par un militaire plus proche des rĂ©alitĂ©s ne pouvait qu’intĂ©resser un journal qui ne partageait pas toutes les vues de Sihanouk. Le parallĂšle, pas toujours judicieux, Ă©tait toutefois flagrant avec le chef de l’État, les Ă©lites cambodgiennes, les officiers et Lon Nol[276].

Au mĂȘme moment, les massacres commis en 1965-1966 Ă  Bali et Java par la foule et des Ă©lĂ©ments de l’armĂ©e indonĂ©sienne Ă  l’encontre de plus de 500 000 personnes suspectĂ©es d’ĂȘtre communistes, encourageaient le parti communiste du KampuchĂ©a Ă  abandonner toute idĂ©e de coopĂ©ration avec Sihanouk. Pour eux, le prince Ă©tait comme Soekarno, qui n’avait Ă©tĂ© d’aucun secours aux communistes indonĂ©siens. Les Ă©vĂšnements de Djakarta incitaient certains membres de la gauche cambodgienne Ă  la prudence alors que d’autres choisissaient la lutte armĂ©e prĂ©ventive contre le gouvernement[277].

Dans le mĂȘme temps, alors que Sihanouk Ă©tait toujours en France, des agents du gouvernement Ă©taient dĂ©ployĂ©s dans les campagnes afin d’expliquer aux agriculteurs la nouvelle politique d’achat de riz directement au producteur. La mesure faisait partie d’un plan de nationalisation des exportations entamĂ©e en 1963, mais montrait surtout l’inquiĂ©tude du gouvernement quant Ă  la perte de revenu engendrĂ©e par les marchĂ©s parallĂšles. La nouvelle politique rizicole Ă©tait difficile Ă  accepter pour des producteurs Ă  qui on offrait de vendre leurs rĂ©coltes Ă  des tarifs bien moindres que ceux qu’ils pouvaient en tirer au marchĂ© noir, mais il semble aussi que la visite de Lon Nol Ă  Battambang ait encouragĂ© les militaires chargĂ©s de rĂ©cupĂ©rer les rĂ©coltes « Ă  la pointe du fusil » Ă  faire preuve de plus de cupiditĂ© avec la population. En fĂ©vrier et mars, des opposants Ă  cette politique commencĂšrent la distribution de tracts antigouvernementaux Ă  travers tout le pays. Peu aprĂšs Ă©clatĂšrent dans cette rĂ©gion des incidents, qui n’avaient alors rien de rĂ©volutionnaire[278].

À l’arrivĂ©e du prince, le 11 mars, des Ă©tudiants de gauche manifestaient dans la capitale contre Lon Nol. Leurs banderoles et tracts rĂ©clamaient la dissolution du gouvernement, des nouvelles Ă©lections lĂ©gislatives, la baisse des prix et le retrait des troupes opĂ©rant prĂšs de Pailin[279]. MĂȘme s’il avait dĂ©clarĂ© que le Cambodge devait Ă©voluer vers la gauche, que s’il n’était pas nĂ© prince, il aurait certainement Ă©tĂ© de gauche et que s’il avait dĂ» choisir lui-mĂȘme le gouvernement il aurait nommĂ© une tout autre Ă©quipe, Sihanouk trouvait impossible de donner satisfaction Ă  de telles demandes. Pour calmer les manifestants, il demandait Ă  ce qu’on plaça leurs revendications Ă  l’ordre du jour d’un futur congrĂšs national et les invitaient Ă  venir y dĂ©fendre eux-mĂȘmes leur cause, espĂ©rant ainsi qu’intimidĂ©s par la police, ils dĂ©clineraient l’offre. Les vƓux du monarque furent exaucĂ©s. Un congrĂšs spĂ©cial votait une rĂ©solution pour maintenir en place l’AssemblĂ©e nationale Ă©lue une annĂ©e auparavant[280].

Khieu SamphĂąn profita toutefois de l’occasion pour se plaindre que certains de ses Ă©lecteurs de S’aang avaient Ă©tĂ© incorporĂ©s de force dans des milices Ɠuvrant prĂšs de la frontiĂšre vietnamienne, et ce malgrĂ© les pots-de-vin qu’ils avaient versĂ©s Ă  des dirigeants locaux. DĂ©noncer la corruption Ă©tait alors souvent considĂ©rĂ© comme une attaque contre la politique du prince ; c’est en tout cas ainsi qu’il le perçut. Sa rĂ©ponse fut de proposer d’aller dans les jours qui suivaient sur place pour vĂ©rifier la teneur des allĂ©gations. À S’aang, Sihanouk ne s’attaqua pas directement Ă  SamphĂąn, mais prit Ă  partie Hu Nim, un autre parlementaire de gauche, l’accusant d’ĂȘtre un « Rouge ». Il offrit Ă©galement un million de riels de l’époque (environ 18 000 dollars US) pour rĂ©parer une route, prĂ©sentant cette faveur comme « un cadeau de la banque nationale ». Il refusa par contre d’armer les milices locales, sous prĂ©texte que le gouvernement Ă©tait incapable de rĂ©unir les crĂ©dits nĂ©cessaires et parce qu’il ne voulait pas « crĂ©er de troubles avec les 2 millions de soldats et miliciens – sud-vietnamiens, amĂ©ricains, insurgĂ©s, thaĂŻs – qui stationnaient autour du Cambodge ». Il affirma aussi qu’il Ă©tait le principal ennemi des militants khmers rouges. Enfin, le prince dut remarquer que dans le discours d’introduction, SamphĂąn se mit face Ă  lui, soutint son regard et n’hĂ©sita pas Ă  Ă©lever la voix, des attitudes Ă  l’opposĂ© des marques de dĂ©fĂ©rence auxquelles le monarque Ă©tait habituĂ©[281].

Entre mars et mai 1967, les troubles s’étaient muĂ©s en soulĂšvement antigouvernemental dans la localitĂ© de Samlaut, Ă  l’ouest de Battambang, puis, de lĂ , Ă©tait en train de se transformer en une vĂ©ritable guerre civile dans plusieurs rĂ©gions du pays[282].

Dans un message Ă  la nation, Sihanouk attribuait les troubles Ă  un harcĂšlement d’élĂ©ments de gauche contre Lon Nol et au rejet par les radicaux locaux des paysans sans terre du sud-ouest cambodgien et des rĂ©fugiĂ©s khmers Krom nouvellement installĂ©s sur place. Dans ses rĂ©criminations, il s’en prenait aux « Khmers Việt Minh », qui d’aprĂšs lui faisaient allĂ©geance comme des captifs Ă  un grand chef inconnu dont on ne savait s’il Ă©tait cambodgien ou Ă©tranger. Comme pour les khmers Serei, Sihanouk voyait les Ă©meutes de Samlaut avant tout comme une offense personnelle. En guise de reprĂ©sailles, il avait demandĂ© que les villages des insurgĂ©s soient rasĂ©s et renommĂ©s. Le nombre de victimes ne sera jamais publiĂ©, mais des sources font Ă©tat de plusieurs centaines[283].

Le 7 avril, le prince faisait une nouvelle dĂ©claration dans laquelle il affirmait qu’il « traiterait les Khmers rouges comme il avait traitĂ© les Khmers Serei »[284]. Il ne faisait pas rĂ©fĂ©rence Ă  la rĂ©pression Ă  Battambang, sur laquelle il avait peu d’informations, mais Ă  la possibilitĂ© de faire exĂ©cuter certaines personnalitĂ©s de gauche. Pour ne laisser planer aucun doute, un film sur l’exĂ©cution publique d’agents Khmers Serei rĂ©cemment arrĂȘtĂ©s fut diffusĂ© dans l’ensemble du pays. Charles Meyer affirme dans une interview qu’il accorda en 1987 Ă  David Porter Chandler avoir conseillĂ© Ă  Sihanouk d’attendre la fin d’une enquĂȘte sur les raisons des Ă©meutes avant de commencer la rĂ©pression, mais le prince prĂ©fĂ©ra passer outre[285]. En 1971, interrogĂ© par Jean Lacouture sur le nombre de victimes, le monarque affirmera « avoir lu quelque part » qu’il y avait eu dix mille morts[286] ; en 1983, ses estimations furent revues Ă  la baisse et il parlait de moins de mille morts[287].

Sihanouk menaça Ă©galement de faire convoquer Hou Yuon et Khieu SamphĂąn devant des tribunaux militaires afin de leur « poser quelques questions ». Craignant pour leurs vies, les deux intĂ©ressĂ©s quittĂšrent prĂ©cipitamment la ville[288]. Quand on dĂ©couvrit leur disparition, beaucoup Ă  Phnom Penh pensĂšrent qu’ils avaient Ă©tĂ© tuĂ©s. Cette rumeur fut mĂȘme Ă©tayĂ©e par une Ă©mission de Radio-PĂ©kin qui affirmait que les deux dĂ©putĂ©s avaient Ă©tĂ© exĂ©cutĂ©s et enterrĂ©s dans la rĂ©gion de Kirirom[289].

Alors que se dĂ©roulaient ces Ă©vĂ©nements, Lon Nol dĂ©missionnait de son poste de Premier ministre. Il invoquait des raisons de santĂ© et se rendit en France pour suivre un traitement mĂ©dical pendant six mois. Sihanouk lui succĂ©da Ă  la tĂȘte de ce qu’il appela un gouvernement d’exception[290]. En fait, cela revenait Ă  dissoudre le cabinet issu des Ă©lections de 1966 et Ă  le remplacer par un gouvernement ne comportant aucun parlementaire, mais plusieurs fidĂšles du monarque et quelques spĂ©cialistes apolitiques de domaines particuliers – nous dirions de nos jours « venant de la sociĂ©tĂ© civile » – tel Kol Touch qui rejoignait le ministĂšre ĂŽ combien sensible de l’agriculture. Sihanouk s’était assignĂ© trois objectifs principaux, Ă  savoir mettre un terme Ă  la crise politique et Ă  la rĂ©bellion Ă  Battambang, rĂ©soudre les dysfonctionnements de l’administration et enfin trouver une solution au problĂšme de dĂ©ficit budgĂ©taire[291].

Quand les troubles se calmĂšrent, Ă  la fin mai, Sihanouk fit une visite Ă  Samlaut durant laquelle, lors d’un discours, il stigmatisait les partisans khmers rouges et annonçait un programme d’aide gouvernementale massive de rĂ©habilitation de la rĂ©gion et de relogement. Alors qu’il prononçait son allocution, la rĂ©pression se poursuivait contre de supposĂ©s rebelles, certainement, pour la plupart, des villageois qui avaient simplement fui les combats et s’étaient rĂ©fugiĂ©s dans la forĂȘt[292].

Avec le dĂ©part de Lon Nol, les Ă©lites pro-occidentales n’avaient plus de raison de modĂ©rer leur pression sur Sihanouk. Toutefois, de par la composition du nouveau gouvernement, leur champ d’action se trouvait pour un temps limitĂ©, ce qui permit au prince de se focaliser contre les citadins de gauche et plus particuliĂšrement les Ă©lĂ©ments radicaux des Ă©coles et des universitĂ©s. Dans la province de Kandal, plus de quinze mille Ă©tudiants se seraient rĂ©unis dans diffĂ©rents monastĂšres pour commĂ©morer ce qu’ils appelaient le martyre de Hou Yuon et Khieu SamphĂąn. Des manifestations similaires Ă©taient signalĂ©es Ă  Kampong Cham. AgacĂ© par cette contestation, Sihanouk demanda aux directeurs de Kambujaboth et Chamroeun Vichea, les deux Ă©coles de Phnom Penh connues pour hĂ©berger des enseignants « de gauche », de lui indiquer quelques « excellences rouges » qui pourraient former un gouvernement. De plus, sous la pression du prince, Hu Nim dut soutenir devant un congrĂšs national qu’il Ă©tait loyal envers son monarque et que les tracts anti-Sangkum dĂ©couverts Ă  Samlaut et dans ses environs devaient ĂȘtre l’Ɠuvre d’agents aux ordres de Lon Nol. Peu convaincu par les explications, Sihanouk humilia Hu Nim en lui faisant des remontrances publiques devant un millier de participants acquis Ă  la cause du souverain[293].

Alors que le prince poursuivait localement ses diatribes anticommunistes, son nouveau Premier ministre, Son Sann, entreprenait des nĂ©gociations secrĂštes avec les reprĂ©sentants de la RĂ©publique dĂ©mocratique du ViĂȘt Nam et de leurs alliĂ©s sud-vietnamiens du FNL. Depuis plusieurs mois dĂ©jĂ , Sihanouk pressait le Việt Minh et le Việt Cộng, comme il les nommait, de lĂ©gitimer publiquement et officiellement les frontiĂšres existantes du Cambodge en Ă©change d’une reconnaissance formelle du droit de leurs troupes Ă  stationner et trouver refuge au Cambodge et celui de faire transiter des fournitures militaires par le port de Sihanoukville. En fait, la partie cambodgienne ne faisait aucune concession, vu que la guĂ©rilla communiste jouissait dĂ©jĂ  de ces droits depuis au moins trois ans sans que le royaume khmer ait jamais exercĂ© aucune sanction et que Sihanouk faisait de cette acceptation des frontiĂšres cambodgiennes un quid pro quo. Les dĂ©lĂ©guĂ©s vietnamiens pour leur part ne dĂ©siraient pas s’engager sur les frontiĂšres, probablement parce qu’ils avaient compris que le prince risquait de les obliger Ă  respecter leurs promesses en les publiant, une fois la guerre finie[294]. En mai 1967, toutefois, les nĂ©gociateurs vietnamiens durent se montrer moins intransigeants, aprĂšs que l’opĂ©ration amĂ©ricano-sud-vietnamienne Cedar Falls eut obligĂ© au dĂ©mantĂšlement du quartier gĂ©nĂ©ral du parti communiste vietnamien dans le sud[295].

Le FNL, finalement se plia aux exigences cambodgiennes, s’apercevant des gains qu’il pouvait en escompter; en effet, un tel document valait une quasi reconnaissance diplomatique de son existence ce qui Ă©tait positif pour son image et tendait Ă  promouvoir l’idĂ©e d’indĂ©pendance par rapport Ă  la RĂ©publique dĂ©mocratique du ViĂȘt Nam qu’il essayait de faire admettre un peu partout. Peu aprĂšs, le ViĂȘt Nam du Nord et l’Union soviĂ©tique signĂšrent une dĂ©claration similaire sur les frontiĂšres du Cambodge, suivis par la Chine[296].

En acceptant de tels arrangements, le prince s'aliĂ©nait un peu plus les Ă©lites pro-occidentales, mais peut-ĂȘtre pressentait-il une victoire communiste au ViĂȘt Nam et espĂ©rait-il qu’aprĂšs les accommodements faits, une fois la victoire acquise, les nouveaux voisins de l'est sauraient se montrer conciliants avec lui et faire preuve de gratitude. Il souhaitait Ă©galement qu'Ă  la suite de cet accord, les Vietnamiens fassent pression sur les insurgĂ©s de Samlaut – que le monarque pensait contrĂŽlĂ©s depuis HanoĂŻ – pour qu’ils cessent la lutte armĂ©e[297].

Alors qu’il savourait ce qu’il considĂ©rait comme une victoire diplomatique, Sihanouk dut faire face Ă  de nouvelles querelles entre factions rivales Ă  Phnom Penh. Les derniers intellectuels de gauche Ă  n’avoir pas pris le maquis se rassemblaient autour de Chau Seng – Ă  nouveau ministre – et investirent La Nouvelle DĂ©pĂȘche. Alors qu’ils avaient jusque-lĂ  dominĂ© la presse francophone, ils se trouvaient critiquĂ©s par Sim Var qui au sein de son journal Khmer Ækreatch (Khmer indĂ©pendant) adoptait une ligne rĂ©solument anticommuniste. Comptant sur le soutien du prince, la gauche dĂ©cida de contre-attaquer[298].

Hu Nim ouvrit le bal par un article dans La Nouvelle DĂ©pĂȘche oĂč il affirmait que Sihanouk dirigeait un « Front national qui rĂ©pondait exactement aux aspirations du peuple ». AprĂšs les rĂ©ponses acerbes parues dans Khmer Ækreatch, des centaines de jeunes prirent d’assaut le siĂšge de ce journal et dĂ©truisirent son imprimerie. Les dĂ©gĂąts Ă©taient importants, mais il n’y eut ni blessĂ©s ni arrestations. Parmi les graffitis sur les murs on trouvait « Sim Var est un chien amĂ©ricain » ou, Ă©crit en chinois, « Longue vie Ă  Monseigneur Papa ». D’aprĂšs plusieurs comptes rendus de l’époque, beaucoup de manifestants semblaient d’origine chinoise, certainement excĂ©dĂ©s par les propos de Sim Var qui les accusait d’ĂȘtre au service du prĂ©sident Mao. Ces actes de violence servaient les desseins de Sihanouk et l’enquĂȘte qui en dĂ©coula ne dĂ©boucha sur aucune condamnation[299].

NĂ©anmoins, ces Ă©meutes d’élĂ©ments sino-khmers fascinĂ©s par la rĂ©volution culturelle et qui se dĂ©claraient loyaux Ă  Mao ne pouvait qu’inquiĂ©ter le prince bien qu’il fĂźt de son alliance personnelle avec la Chine un des piliers de sa politique Ă©trangĂšre. Il Ă©tait rendu inquiet par le soutien que la gauche cambodgienne accordait ouvertement Ă  l’association d’amitiĂ© khmĂ©ro-chinoise (en) qui faisait la promotion du prĂ©sident Mao dans les Ă©coles en langue chinoise du pays. Il Ă©tait surtout irritĂ© que des journaux chinois puissent annoncer Ă  leurs lecteurs que « tous les travailleurs cambodgiens » Ă©taient derriĂšre le grand timonier. Recourant Ă  une tactique dĂ©jĂ  Ă©prouvĂ©e, le monarque menaça de remettre le gouvernement Ă  des « Rouges prochinois »[300]. Comme prĂ©vu, personne ne soutint la demande du monarque et peu aprĂšs, celui-ci envoya son ministre des Affaires Ă©trangĂšres, le prince Norodom Phurissara Ă  PĂ©kin pour sonder l’attitude du gouvernement chinois. Zhou Enlai fit des remarques Ă  mĂȘme d’apaiser le dĂ©saccord, mais recommandait que les Chinois puissent « avoir le droit d’exprimer leur fiertĂ© envers la rĂ©volution culturelle et leur amour pour le prĂ©sident Mao »[301].

Norodom Sihanouk pour sa part continuait Ă  nier la prĂ©sence des troupes du Việt Cộng sur le territoire khmer. Le 27 aoĂ»t 1967, alors qu’il recevait les lettres de crĂ©ance de Nguyễn ThÆ°á»Łng, nommĂ© ambassadeur de la rĂ©publique dĂ©mocratique du ViĂȘt Nam, il affirmait que l’aide apportĂ©e Ă  la guĂ©rilla Ă©tait « essentiellement morale, diplomatique et politique comme nous l’imposent notre politique de neutralitĂ© et l’extrĂȘme faiblesse de nos moyens matĂ©riels »[302].

Dans la seconde moitiĂ© de 1967, Sihanouk intensifia ses attaques contre les radicaux urbains en tentant de dĂ©tourner de leur influence tout rebelle potentiel des campagnes grĂące Ă  des projets d’aide. Il fit financer par l’État des travaux publics dans la circonscription de Khieu SamphĂąn ainsi que des routes et des logements Ă  Samlaut. Il promit une prime de 10 000 riels (environ 200 dollars US) Ă  tout rebelle du nord-ouest qui se rallierait Ă  lui. En aoĂ»t, 200 de ces personnes Ă©taient ramenĂ©es de Samlaut Ă  Phnom Penh, visitaient Sihanoukville et Angkor puis Ă©taient reconduites dans leurs foyers, le tout aux frais du prince. Toutefois, il notera plus tard qu’à peine rentrĂ©s, ils Ă©taient retournĂ©s grossir les rangs de la guĂ©rilla[303].

Le 1er septembre 1967, Sihanouk annonçait la dissolution de toutes les associations d’amitiĂ© khmĂ©ro-Ă©trangĂšres. La mesure s’adressait essentiellement Ă  l’association d’amitiĂ© khmĂ©ro-chinoise, qui d’aprĂšs le prince Ă©tait « devenue un vĂ©ritable instrument de subversion portant prĂ©judice Ă  l’amitiĂ© qu’elle prĂ©tendait promouvoir ». Le lendemain, le palais royal annonçait que ces associations allaient ĂȘtre remplacĂ©es par des « comitĂ©s nationaux d’amitiĂ© » composĂ©s chacun de trois membres « connus pour leur loyautĂ© » et choisis directement par Norodom Sihanouk[304]. Quand Chau Seng reproduisait quelques jours plus tard dans La Nouvelle DĂ©pĂȘche un tĂ©lĂ©gramme de PĂ©kin faisant mine d'ignorer cette fermeture et prĂ©sentant Ă  l’association dissoute ses vƓux pour son anniversaire et la fĂ©licitant pour sa lutte contre les rĂ©actionnaires, Sihanouk affirma que c’était lĂ  la premiĂšre attaque venant de Chine et dĂ©cida de fermer les journaux Ă  capitaux privĂ©s. La mesure concernait les pĂ©riodiques en langue chinoise, mais Ă©galement ceux en khmer. Cela laissait le champ libre Ă  quatre journaux propriĂ©tĂ© du monarque et aux dĂ©pĂȘches de l’Agence KhmĂšre de Presse. Il suggĂ©rait d’organiser un rĂ©fĂ©rendum sur la question au dĂ©but de 1968, « quand le peuple ne sera plus occupĂ© Ă  ses cultures », pour lĂ©gitimer son action. Le rĂ©fĂ©rendum n’aura pas lieu, mais les journaux rouvriront Ă  la fin de l’annĂ©e[305].

Dans un discours prononcĂ© au mĂȘme moment, il montrait sa rĂ©serve quant au dĂ©roulement de la rĂ©volution culturelle en Chine et justifiait la rĂ©pression contre la gauche cambodgienne Ă  qui il ne reprochait pas tant ses idĂ©es communistes, mais plutĂŽt le fait que d’aprĂšs lui elle Ă©tait dirigĂ©e par une puissance Ă©trangĂšre[306]. Un autre sujet d’inquiĂ©tude pour Sihanouk Ă©tait Hu Nim qui restait Ă  l’assemblĂ©e. Lorsque Nim soumit une pĂ©tition au parlement demandant la rĂ©habilitation de l’association d’amitiĂ© khmĂ©ro-chinoise, le prince, accompagnĂ© de Kou Roun, le chef de la police politique, se rendirent Ă  Kampong Cham, dans la circonscription du dĂ©putĂ© pour une sĂ©vĂšre rĂ©primande. Le monarque menaça de poursuivre Hu Nim devant un tribunal militaire et de le dĂ©choir de sa nationalitĂ© cambodgienne qu’il n’était plus digne de porter[307]. Quelques jours plus tard, l’intĂ©ressĂ© s’enfuyait vers une base du PCK de la chaĂźne des Cardamomes. D’autres intellectuels se sentant menacĂ©s par Sihanouk quittĂšrent eux aussi les villes en 1966-1967[308].

Jacqueline Bouvier Kennedy, accompagnée de la reine Sisowath Kossamak et de Norodom Sihanouk, lors de sa visite au Cambodge en 1967.

CoupĂ©s des communistes qui avaient plutĂŽt soutenu sa politique Ă©trangĂšre que ses vues sur les problĂšmes intĂ©rieurs, le prince se retrouvait isolĂ© pour contrer ses Ă©lites pro-occidentales. Cet antagonisme-lĂ  datait des beaux jours du parti dĂ©mocrate et ne s’était jamais estompĂ©. Alors que le monarque Ă©tait trop fier pour leur formuler de quelconques excuses, les Ă©lites n’eurent elles non plus aucun geste conciliant qui aurait Ă©tĂ© de nature Ă  calmer le jeu[309]. Les troubles en cours en Chine et l’utilisation du territoire cambodgien par les troupes du Việt Minh et du Việt Cộng faisait que le prince, dĂ©jĂ  coincĂ© entre les rĂ©gimes pro-occidentaux de Bangkok et de SaĂŻgon se sentait Ă©galement entourĂ© par les communistes. Toutes ses tentatives pour capter une quelconque gratitude semblaient s’ĂȘtre soldĂ©es par des Ă©checs, mais il ne se sentait pas pour autant proche de ceux qui voulaient prendre leurs distances avec les communistes et rĂ©tablir les relations avec les États-Unis. Pour prendre ces derniers de vitesse, il dĂ©cidait de conduire lui-mĂȘme, Ă  ses propres conditions, un rapprochement avec Washington[310].

Cette nouvelle orientation se traduisait par l’accueil, en octobre 1967, de Jacqueline Bouvier Kennedy en voyage non officiel. Malheureusement pour le prince, en marge de cette visite, trois reporters, un de l’agence United Press International et deux d’Associated Press, profitant que les forces de sĂ©curitĂ© khmĂšres Ă©taient largement occupĂ©es Ă  assurer la protection de l’ancienne first lady, se rendirent dans le sud-est du pays, prĂšs de Memot oĂč ils trouvĂšrent ce qui ressemblait Ă  un camp du Việt Cộng fraĂźchement abandonnĂ©. MalgrĂ© les protestations de Sihanouk qui criait Ă  la machination, les informations qui mettaient Ă  mal les assertions du monarque concernant la neutralitĂ© du Cambodge furent largement diffusĂ©es dans la presse occidentale[311].

Ouverture vers les États-Unis (1968)

Le mois de janvier 1968, outre la dĂ©cision du PCK de promouvoir la lutte armĂ©e contre le rĂ©gime de Sihanouk dont peu Ă  Phnom Penh Ă©taient au courant allait surtout ĂȘtre marquĂ© par la visite de Chester Bowles, ambassadeur amĂ©ricain Ă  New Delhi et plus haut responsable amĂ©ricain Ă  rencontrer le prince depuis de nombreuses annĂ©es[312]. La visite de Bowles ouvrait la voie Ă  une reprise des relations entre le Cambodge et les États-Unis. Pour Phnom Penh, la visite Ă©tait apprĂ©ciable, car on espĂ©rait pouvoir limiter l’amplification des sanctuaires vietnamiens au Cambodge, sanctuaires qui, pour l’opinion khmĂšre, s’apparentaient Ă  une nouvelle annexion de territoire comme celle pratiquĂ©e au dĂ©but du XIXe siĂšcle par l’empereur Minh MáșĄng[note 5] - [314].

Sihanouk avait alors en tĂȘte depuis un certain temps de redynamiser la commission internationale de contrĂŽle et de supervision crĂ©e en 1954 par les accords de GenĂšve, mais dont depuis, le champ d’action avait Ă©tĂ© rĂ©duit Ă  la portion congrue. Il espĂ©rait que les inspections des membres indiens, canadiens et polonais de la commission allaient rĂ©duire les incursions amĂ©ricaines et sud-vietnamiennes ainsi que leurs bombardements. Les États-Unis soutenaient ce projet car ils escomptaient que les visites allaient publiquement confirmer la prĂ©sence de bases ViĂȘt Cộng sur le territoire cambodgien dĂ©jĂ  repĂ©rĂ©es par des reconnaissances aĂ©riennes amĂ©ricaines ainsi que par des observateurs sur le terrain[note 6] ; Ă  partir de la fin de 1967, ils avaient transmis, par l’intermĂ©diaire de Noel Saint-Clair Deschamps, ambassadeur australien Ă  Phnom Penh[note 7], des copies de ces photos aĂ©riennes au prince. Par cette opĂ©ration nommĂ©e VĂ©suve, les dirigeants militaires amĂ©ricains espĂ©raient maĂźtriser la frontiĂšre sud-ouest de la RĂ©publique du ViĂȘt Nam. Pour discuter de cette option, aprĂšs la bonne impression laissĂ©e par la visite de Jacqueline Kennedy, Chester Bowles vint Ă  son tour au Cambodge pour quatre jours, en janvier 1968[317].

La mission dĂ©buta par des conversations sĂ©parĂ©es que Bowles eut avec le Premier ministre Son Sann et avec le gĂ©nĂ©ral Nhiek Tioulong. Sihanouk Ă©tait alors en province et Son Sann ne voulait pas devancer les annonces que le prince devait faire Ă  son retour ; Nhiek Tioulong refusait pour sa part d’admettre la prĂ©sence de sanctuaires ViĂȘt Cộng au Cambodge. Quelques jours plus tard, la dĂ©lĂ©gation fut reçue par le prince. Ils le trouvĂšrent intrĂ©pide et difficile Ă  Ă©mouvoir, soutenant un renforcement des pouvoirs de la commission internationale de contrĂŽle et de supervision, jusqu’à indiquer, d’aprĂšs certaines sources amĂ©ricaines, qu’il n’avait pas d'objection Ă  ce que les États-Unis engageassent des poursuites dans des zones inhabitĂ©es. Il ne pouvait pas le confirmer publiquement, mais si les troupes amĂ©ricaines se hasardaient dans cette voie, cela l’aiderait Ă  rĂ©soudre un de ses problĂšmes. Bien sĂ»r, si les États-Unis affrontaient les troupes du ViĂȘt Cộng et l’armĂ©e nord-vietnamienne sur le sol cambodgien, les deux parties seraient coupables de violer le territoire du royaume khmer, mais le Nord ViĂȘt Nam et le ViĂȘt Cộng « seraient plus coupables ». Si ces poursuites se faisaient dans des zones oĂč la population locale ne serait pas affectĂ©e, le prince voulait bien « fermer les yeux ». Rien de tout cela n’apparaissait dans le communiquĂ© publiĂ© par Son Sann et Bowles Ă  la fin de la visite, mais les B-52 amĂ©ricains lancĂšrent au dĂ©but de 1969 l’opĂ©ration Menu, un bombardement massif des zones frontaliĂšres. Les documents officiels n’éclairent pas sur ce que Sihanouk avait admis de laisser les États-Unis faire. Pour le prince, le problĂšme des ripostes Ă©tait moins important que de regagner les bonnes grĂąces de Washington, mais rien ne prouve que cela inclĂ»t l’approbation d’un programme de bombardements Ă  grande Ă©chelle. S’attacher la fidĂ©litĂ© des plus humbles de ses sujets passait alors pour le monarque avant celui d’adhĂ©rer aux grands desseins des États-Unis. Son Sann avait insistĂ© afin que Bowles plaide Ă  Washington pour le rĂ©tablissement de relations diplomatiques et pour que le gouvernement amĂ©ricain reconnaisse les frontiĂšres du Cambodge, mais cette reconnaissance Ă©tait bloquĂ©e depuis plus d’un an par le peu d’empressement des gouvernements de Bangkok et de SaĂŻgon Ă  l’approuver et la rĂ©ticence de Washington Ă  dĂ©plaire Ă  ses deux fidĂšles alliĂ©s[318].

La visite de Bowles avait coĂŻncidĂ© avec une recrudescence des activitĂ©s des communistes vietnamiens au Cambodge, dans le cadre de la prĂ©paration de l’offensive du Táșżt et des rapports de la police politique du prince lui indiquaient de surcroit que de nouveaux troubles Ă©clataient dans la rĂ©gion de Samlaut et qu’une agitation devenait perceptible au sein des minoritĂ©s ethniques du nord-est, deux zones oĂč le PCK, qui inaugurait sa politique de lutte armĂ©e, Ă©tait connu pour ĂȘtre actif[319]. Peu aprĂšs le dĂ©part de Bowles, mais avant le dĂ©clenchement de l’offensive du TĂȘt, Sihanouk annonçait que plusieurs jeunes communistes avaient Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©s Ă  Phnom Penh, distribuant des tracts contre le MarĂ©chal Tito, dirigeant yougoslave qui devait venir faire une visite d’état d’ici peu. Il Ă©tait alors notoire que l’indĂ©pendance de Tito par rapport aux mouvements communistes irritait la Chine. Il est possible, mais peu probable, que les Chinois aient envisagĂ© de le faire assassiner durant sa visite. Il est plus plausible que la police du prince ait inventĂ© une conspiration pour intimider les Ă©tudiants prochinois qui en manifestant contre Tito auraient mis Sihanouk dans l’embarras. Le prince fit rĂ©fĂ©rence Ă  une « poignĂ©e d’individus, exclus de la communautĂ©, sabotant l’indĂ©pendance nationale 
 distribuant des caisses de grenades pour assassiner Tito et moi-mĂȘme ». Il menaçait ceux qui avaient distribuĂ© les tracts de la peine capitale. La visite du dirigeant yougoslave se passa finalement sans histoire, mais les accusĂ©s avaient dĂ©jĂ  Ă©tĂ© exĂ©cutĂ©s et aucune preuve de leur culpabilitĂ© n’a jamais Ă©tĂ© publiĂ©e[320].

Par contre, d’inquiĂ©tants rapports de sa police arrivĂšrent sur le bureau du prince au dĂ©but de 1968, indiquant des accrochages entre des rebelles et l’armĂ©e dans plusieurs rĂ©gions. Les combats Ă©taient particuliĂšrement violents autour de Battambang. À la fin de fĂ©vrier, ignorant - pour peu qu’elle ait vraiment Ă©tĂ© prise - la dĂ©cision du PCK, le prince prĂ©sentait ces combats comme une guerre civile. Ces troubles causaient un tracas particulier Ă  Sihanouk, peut-ĂȘtre parce qu’il avait du mal Ă  discerner le rĂŽle rĂ©el des Vietnamiens dans ce soulĂšvement. Si dans un discours au dĂ©but de 1968 il loua tout d’abord l’efficacitĂ© de la rĂ©bellion, il s’engagea Ă©galement Ă  amĂ©liorer celle de son armĂ©e face Ă  ce genre de conflit, affirmant que les Forces armĂ©es royales khmĂšres n’étaient pas prĂ©parĂ©es Ă  lutter contre une guĂ©rilla et que l’expĂ©rience de Battambang avait montrĂ© la nĂ©cessitĂ© de combler cette lacune au plus vite. À la fin de 1968, de vastes zones du nord-est et de l’ouest allaient Ă©chapper au contrĂŽle du gouvernement[321].

Changeant d’adversaires, le prince attribuait Ă©galement la responsabilitĂ© de l’agitation continue Ă  des journalistes occidentaux tels ceux du quotidien français Le Monde. Sihanouk, dans un discours, demandait aux journalistes « prochinois » d’ĂȘtre « honnĂȘtes intellectuellement » et d’éviter de porter contre le Sangkum des accusations qui s’avĂ©raient infondĂ©es. Le monarque voulait dĂ©montrer que la guerre civile avait pour origine des causes Ă©trangĂšres au Cambodge. Il parlait d’une collusion entre les AmĂ©ricains, les Khmers Serei, les ThaĂŻs, les Sud-Vietnamiens, le ViĂȘt Cộng et le PCK visant Ă  prendre le pouvoir[note 8] et sĂ©parer le Cambodge en deux zones d’influence. Dans le mĂȘme temps, il approuvait une intensification de la rĂ©pression[323].

La virulence du discours de Sihanouk encourageait les milices Ă  plus de brutalitĂ©s et les dignitaires de province Ă  des excĂšs de zĂšle pour prouver leur fidĂ©litĂ© au prince. En mars 1968, Ă  Kampong Cham, des manifestants en armes se dĂ©claraient prĂȘt Ă  en dĂ©coudre pour chasser les Khmers Việt Minh et autres Khmers rouges du Cambodge. Dans la province voisine de Kratie, un autre dĂ©filĂ© composĂ© d’hommes munis d’armes en tout genre marchĂšrent jusqu’au palais du gouverneur oĂč l’un d’entre eux lut une dĂ©claration soutenant le rĂ©gime socialiste bouddhique de « Samdech Euw » (littĂ©ralement Monseigneur Papa) et condamnant les Khmers bleus et rouges. Dans le mĂȘme temps, Sihanouk procĂ©dait Ă  de frĂ©quents remaniements ministĂ©riels, mutait les gouverneurs dans d’autres provinces et visitait les zones oĂč des troubles avaient Ă©clatĂ©, attribuant la responsabilitĂ© de la rĂ©surgence de ces agitations aux Ă©trangers et aux intellectuels. À la fin de mars, il dĂ©clarait que l’insurrection avait Ă©tĂ© matĂ©e alors que les combats se poursuivaient Ă  Battambang et dans le nord-est. Durant cette pĂ©riode, l’armĂ©e cambodgienne Ă©tait en pleine contradiction, ce qui n’allait pas sans poser des problĂšmes aux combattants de base. En effet, alors que des camions militaires poursuivaient l’acheminement de fournitures aux camps du Việt Cộng le long de la frontiĂšre, permettant aux officiers de s’enrichir au passage, les paysans cambodgiens, de leur cĂŽtĂ©, continuaient, quand ils le pouvaient, Ă  vendre leurs rĂ©coltes aux agents vietnamiens. Sihanouk, pour sa part, maintenait son soutien Ă  la lutte du Nord-ViĂȘt Nam et du FNL contre l’impĂ©rialisme et tolĂ©rait – tout en officiellement la niant – la prĂ©sence de camps au Cambodge, mais dans le mĂȘme temps ordonnait la rĂ©pression de leurs partisans et se rapprochait des États-Unis[324].

Mais les relations amĂ©ricano-khmĂšres allaient s'assombrir quand, en avril, HanoĂŻ fit part de son dĂ©sir d’entamer des pourparlers avec Washington et proposait de rencontrer des Ă©missaires en terrain neutre Ă  Phnom Penh. Sihanouk ne put que soutenir un projet qui pouvait amĂ©liorer la notoriĂ©tĂ© de son pays Ă  l’étranger et affirmer la neutralitĂ© qu’il tentait de promouvoir depuis des annĂ©es. Malheureusement pour lui, si les États-Unis acceptaient le principe de discussions, ils rejetaient le choix de la capitale cambodgienne, affirmant que le royaume khmer n’avait pas la capacitĂ© nĂ©cessaire en termes d’hĂ©bergement et de communications pour organiser un tel Ă©vĂ©nement. Une telle dĂ©claration ne pouvait que heurter la fiertĂ© du prince qui y vit un affront personnel. Quand les nĂ©gociations s’ouvriront finalement Ă  Paris le 13 mai, il se sentira contraint de dĂ©clarer que les dĂ©cisions prises lĂ -bas concernant le Cambodge seraient nulles et non avenues tant qu’elles n’auraient pas Ă©tĂ© approuvĂ©es par un reprĂ©sentant du royaume khmer[325].

Mais le monarque paraissait toutefois percevoir de plus en plus les mutins des campagnes comme une menace sĂ©rieuse et le retour en mai de Lon Nol, l’ennemi jurĂ© des communistes, comme ministre de la dĂ©fense semble accrĂ©diter cette thĂšse[326].

MĂȘme si beaucoup aprĂšs coup ont prĂ©tendu que la dĂ©position du prince en 1970 Ă©tait prĂ©visible dĂšs 1968, rien ne permettait de la supposer Ă  l’époque. Il n’en reste pas moins que les dĂ©cisions que le monarque prit lors de ces derniers mois montrent une perte de confiance en son aura. Que ce soit l’émergence de la rĂ©bellion de gauche ou l’assurance que prenaient les conservateurs, tout laissait Ă  penser que Sihanouk ne voulait ou ne pouvait plus exercer sa mainmise sur la politique cambodgienne. Toutefois, mĂȘme si la rĂ©volution Ă©tait en marche, elle n’en Ă©tait qu’à ses balbutiements et n’était pas prĂȘte Ă  soutenir une guerre civile Ă  travers tout le pays. Elle se contentait de quelques escarmouches et espĂ©rait acquĂ©rir une expĂ©rience qui pourrait s’avĂ©rer utile le moment venu[327].

Il semble clair que les annĂ©es 1969-1970 correspondent Ă  une perte de pouvoir de Sihanouk au profit de ses opposants. NĂ©anmoins, si sa popularitĂ© s’estompait auprĂšs des jeunes, elle restait nĂ©anmoins importante. MalgrĂ© cela, tous les efforts du prince pour la conserver Ă  un haut niveau s’avĂ©raient vains. Dans le mĂȘme temps, alors qu’Il avait gardĂ© l’habitude d’éluder les problĂšmes importants comme ceux touchant les finances, il prit conscience, au milieu de 1969, qu’ils devenaient insolubles. Sa seule rĂ©ponse fut de nommer Lon Nol Ă  la tĂȘte d’un « gouvernement de sauvetage » qui succĂ©dait Ă  un « gouvernement de la derniĂšre chance »[328].

S’il pourrait paraĂźtre tentant de dĂ©tecter une crise Ă©conomique Ă  l’origine des bouleversements politique et militaire qui allaient conduire Ă  la dĂ©position de Norodom Sihanouk, il convient cependant de relativiser ces difficultĂ©s. En fait, le Cambodge souffrait des mĂȘmes problĂšmes que la plupart des pays en voie de dĂ©veloppement. Mais contrairement Ă  beaucoup d’entre eux, l’endettement restait faible et quand bien mĂȘme certains milieux financiers l’auraient voulu, les services qui gĂ©raient les exportations n’auraient pas eu de mal Ă  emprunter Ă  l’étranger. Par contre, si l’administration Ă©tait suffisamment structurĂ©e pour rĂ©pondre aux besoins du monde des affaires, la politique Ă©conomique dĂ©pendait du bon vouloir de Norodom Sihanouk qui, Ă  part pour l’éducation privilĂ©giait les projets grandiloquents Ă  court terme. Autrement dit, si le prince avait Ă  ce moment utilisĂ© les moyens Ă  sa disposition pour rĂ©gler les problĂšmes Ă©conomiques, le mĂ©contentement des Ă©lites aurait Ă©tĂ© moindre et sa dĂ©position aurait certainement attendu quelques annĂ©es de plus. Toutefois, le manque de devises fortes se faisait quand mĂȘme sentir lors de l’achat de biens importĂ©s et le secteur privĂ© s’impatientait de profiter du boom qui touchait dĂ©jĂ  certains pays de l’Asie du Nord-Est, la ThaĂŻlande et le Sud ViĂȘt Nam[329].

En 1969, Sihanouk, en s’adressant Ă  la presse occidentale, estimera que 95 % des Cambodgiens soutenaient le « Bouddhisme socialiste » et que la seule opposition Ă©tait constituĂ©e de groupuscules adulateurs de la RĂ©volution culturelle ou de l’American way of life. Ses dĂ©tracteurs reprochaient pour leur part sa mainmise sur tous les aspects de la vie quotidienne et sa politique intĂ©rieure. NĂ©anmoins, le fait de garder son pays hors de la guerre du ViĂȘt Nam reste Ă  mettre Ă  son crĂ©dit. Alors que le conflit dĂ©gĂ©nĂ©rait en 1968 et 1969, le Cambodge restait le seul pays de l’ancienne Indochine française Ă  ĂȘtre Ă©pargnĂ© par les bombardements aĂ©riens quotidiens et les combats de grande ampleur. Il le devait pour une grande part aux choix que fit le monarque et qui, s’ils s’avĂ©reront nĂ©fastes sur le long terme, semblaient Ă  l’époque les plus Ă  mĂȘme d’assurer la tranquillitĂ© du royaume khmer. Dans le mĂȘme temps, les dĂ©cisions amĂ©ricaines concernant le ViĂȘt Nam paraissaient rarement faire cas des populations locales et si Sihanouk avait refusĂ© au Việt Cộng l’installation de ses bases, il est fort probable que ces derniers seraient passĂ©s outre, occasionnant des pertes importantes auprĂšs de ceux qui sur le terrain se seraient opposĂ©s Ă  leur projet. Si le Cambodge s’était ouvertement engagĂ© dans le camp d’un des belligĂ©rants, il y’a fort Ă  parier que l’autre l’aurait attaquĂ©. En 1969, le prince pensait sincĂšrement que la meilleure option Ă©tait de se rapprocher des États-Unis tout en prĂ©servant ses relations avec la RĂ©publique dĂ©mocratique du ViĂȘt Nam. Si cette politique de non-alignement semblait la plus sage, c’est pour l’avoir oubliĂ© que les adversaires du prince qui le dĂ©posĂšrent en 1970 prĂ©cipitĂšrent leur pays dans l’abĂźme quand ils choisirent le conflit ouvert avec le ViĂȘt Nam[330].

Pour comprendre la pĂ©riode qui correspond au premier rĂšgne de Sihanouk ou vouloir porter un jugement, il ne faut pas nĂ©gliger d’un cĂŽtĂ© son talent diplomatique, sa capacitĂ© Ă  travailler de longues heures, son patriotisme, ni de l’autre sa vanitĂ©, son indulgence pour la corruption, son mĂ©pris pour les intellectuels, son agacement pour les conseils, son dĂ©sir de tout approuver, sa rancune ou son goĂ»t pour le faste[331]. À partir de 1968, beaucoup de Cambodgiens Ă©duquĂ©s pensaient que les dĂ©fauts du monarque dĂ©passaient ses qualitĂ©s. PlutĂŽt que de lutter contre la corruption dont bĂ©nĂ©ficiaient ses proches, il prĂ©fĂ©rait leur attribuer des postes Ă  responsabilitĂ© oĂč ils pouvaient intensifier leurs dĂ©prĂ©dations[332]. Dans le mĂȘme temps, sa police politique, dirigĂ©e par Kou Roun et Oum Manorine, le demi-frĂšre de sa femme, appuyait la virulence de ses discours par une rĂ©pression plus agressive, notamment Ă  l’encontre des Sino-Khmers et des Ă©tudiants[333].

Les Ă©lites Ă  Phnom Penh se sentaient alors opprimĂ©es. Les violences pro gouvernementales Ă©taient rarement rĂ©primĂ©es et les intellectuels avaient l’impression de vivre sous une Ă©pĂ©e de DamoclĂšs constamment suspendue au-dessus de leurs tĂȘtes. Les emprisonnements sans jugements et les disparitions se multipliaient. Mais les sĂ©vices ne se limitaient pas Ă  la capitale. En 1969, Ă  KĂąmpĂŽt, par exemple, de prĂ©sumĂ©s rebelles furent prĂ©cipitĂ©s du haut d’une falaise avant que leurs tĂȘtes ne soient exposĂ©es pour l’exemple sur le marchĂ© de la ville. Sihanouk ne fit rien pour empĂȘcher ces actes commis en son nom. Au contraire, Lon Nol, Ă  la tĂȘte de la police et de l’armĂ©e, gagnait en influence[334].

En septembre de la mĂȘme annĂ©e, un nouvel officiel amĂ©ricain venait Ă  Phnom Penh. Il s’agissait d’Eugene R. Black, Sr. (en), ancien prĂ©sident de la banque mondiale et conseiller du prĂ©sident Johnson aux affaires Ă©conomiques pour l’Asie du Sud-Est et d’une dĂ©lĂ©gation d’une dizaine de personnes. Ils eurent une sĂ©rie d’entretiens avec le Premier ministre Penn Nouth et des membres de l’état-major des forces armĂ©es royales khmĂšres. Si rien ne semble avoir transpirĂ© quant Ă  la teneur exacte de ces conversations, qui officiellement portaient sur le dĂ©veloppement du bassin du MĂ©kong, et sans que l’on sache s’il y avait une relation de cause Ă  effet, peu aprĂšs le dĂ©part de la dĂ©lĂ©gation, Sihanouk dĂ©nonçait pour la premiĂšre fois publiquement la prĂ©sence de « Vietnamiens armĂ©s » sur le sol cambodgien[335].

En octobre, Cheng Heng, un dĂ©putĂ© apolitique Ă©tait nommĂ© prĂ©sident de l’AssemblĂ©e nationale. Personne alors ne pouvait se douter qu’il remplacerait Sihanouk dans 18 mois[336]. À mesure que son aptitude Ă  peser sur les cours des Ă©vĂšnements faiblissait, le prince se montrait moins intĂ©ressĂ© par la direction du pays, prĂ©fĂ©rant se livrer Ă  des visites en province, faire des films et passer du temps avec ses proches[337].

L’éclipse (1969)

Le dĂ©but de l’annĂ©e 1969 dĂ©bute par la dĂ©fection d’environ 200 Khmers Serei dans la province d'Otdar Mean Cheay, qui sera largement mĂ©diatisĂ©e. Le 21 janvier, lors d’une confĂ©rence de presse, plusieurs dizaines de ces combattants affirmaient que leur dĂ©cision avait Ă©tĂ© prise aprĂšs qu’ils eurent eu connaissance d’un accord secret entre Bangkok et Son Ngoc Thanh qui aurait acceptĂ©, une fois la victoire acquise et en Ă©change d’un soutien du gouvernement de Thanom Kittikachorn, de cĂ©der Ă  la ThaĂŻlande, les provinces que cette derniĂšre avait dĂ©jĂ  annexĂ©es pendant la seconde guerre mondiale. Bien que de telles assertions restent encore de nos jours sujettes Ă  caution, elles ne pouvaient qu’exacerber la rancƓur anti-thaĂŻlandaise de la population cambodgienne et la conforter dans la vision de la situation que Sihanouk lui prĂ©sentait depuis des annĂ©es. En contrepartie, cette attaque contre un des plus proches alliĂ©s des États-Unis dans la rĂ©gion ne pouvait que mettre un frein, qui sera cependant de courte durĂ©e, aux tentatives de rĂ©conciliation avec Washington[338].

En fĂ©vrier 1969, peu aprĂšs la prise de fonctions de Richard Nixon Ă  la prĂ©sidence des États-Unis, le gĂ©nĂ©ral Creighton Williams Abrams, commandant en chef des forces amĂ©ricaines Ă  SaĂŻgon, demandait Ă  la nouvelle administration mise en place Ă  la Maison-Blanche, la permission d’utiliser les B-52 contre le quartier gĂ©nĂ©ral Việt Cộng en territoire cambodgien. La demande sera acceptĂ©e en mars, mais les interventions seront entourĂ©es du plus grand secret, mĂȘme plusieurs annĂ©es aprĂšs. Les bombardements prirent le nom de code d’opĂ©ration petit-dĂ©jeuner (breakfast) et dĂ©butaient le 18 mars. Dans les 14 mois qui suivirent, plus de 3 500 sorties seront « secrĂštement » effectuĂ©es au-dessus du Cambodge pour, prĂ©tendument, dĂ©truire un quartier gĂ©nĂ©ral qui ne sera finalement jamais localisĂ©. En novembre 1969, l’état-major amĂ©ricain au Sud-ViĂȘt Nam reconnaissait que le seul rĂ©sultat obtenu avait Ă©tĂ© de disperser les unitĂ©s Việt Minh dans des zones plus densĂ©ment peuplĂ©es du Cambodge[339]. En rĂ©ponse Ă  ces bombardements, Sihanouk Ă©levait la mission du Front national de libĂ©ration du Sud ViĂȘt Nam de Phnom Penh au rang d’ambassade, mais, dans le mĂȘme temps multipliait les ouvertures diplomatiques en direction des États-Unis. Il espĂ©rait alors toujours pouvoir prĂ©server le royaume khmer de la guerre. Toutefois, en avril, alors que l'opĂ©ration petit-dĂ©jeuner avait dĂ©butĂ©, le prince annonçait en guise d’avertissement qu’il n’envisageait pas de modifier sa ligne de conduite envers la RĂ©publique dĂ©mocratique du ViĂȘt Nam, sauf si l’influence communiste devenait trop importante, auquel cas, il prĂ©tendait envisager d’abandonner son poste de chef de l’État Ă  Lon Nol[340].

Dans le mĂȘme temps, la situation Ă©conomique se dĂ©gradait. Depuis 1968, la croissance n’était plus au rendez-vous. La production agricole stagnait, en partie Ă  cause des rĂ©voltes paysannes et d’une annĂ©e de sĂ©cheresse. Les exportations chutaient et le dĂ©ficit budgĂ©taire se creusait pour atteindre 1/8 des recettes de l’État. Des conseillers de Sihanouk suggĂ©raient de freiner les dĂ©penses, notamment celles liĂ©es aux programmes de prestige, mais le monarque fit la sourde oreille. Le prince prĂ©fĂ©rait prĂ©server sa popularitĂ© en maintenant le mode de vie que les Cambodgiens avaient l’habitude de le voir mener[341]. Vu les importantes sommes englouties dans les jeux plus ou moins lĂ©gaux Ă  travers l’ensemble du pays, il voulait plutĂŽt que le gouvernement ouvre ses propres casinos Ă  Phnom Penh et Ă  Sihanoukville, tout en fermant les cercles de jeux qui, avec la connivence de la police tournaient depuis des annĂ©es mais allaient maintenant faire ombrage au nouveau projet princier. Cette mesure semblait rĂ©pondre au manque de devises fortes nĂ©cessaires Ă  tout emprunt Ă  l’étranger. De plus, certains de ses proches et de la famille royale tels Sisowath Sirik Matak ou Norodom Chantarainsey (en) semblent avoir profitĂ© de cette nouvelle source de revenus[342]. Les Ă©tablissements ouvrirent au dĂ©but de 1969 et pour cette premiĂšre annĂ©e la recette du seul casino de Phnom Penh s’élevait Ă  700 millions de riels (10 millions de dollars) et contribuaient pour 9% au budget de l’État. Il Ă©tait ouvert 24 heures sur 24, causant la ruine de nombreux parieurs et plusieurs suicides. Il sera finalement fermĂ© par Sisowath Sirik Matak en janvier 1970, alors que Sihanouk et Lon Nol Ă©taient en France[343].

Sihanouk devait alors aussi composer avec la guĂ©rilla. Bien qu’elle ne comptĂąt qu’un millier de membres, ses escarmouches se multipliaient sur l’ensemble du pays, nĂ©cessitant un dĂ©ploiement toujours plus important de forces de l’ordre. Qu’ils soient Cambodgiens irritait le prince qui ne comprenait pas pourquoi, en contrepartie de l’aide qu’il leur fournissait, les Vietnamiens ne pouvaient pas mieux les contrĂŽler[344]. Sa politique Ă©tait alors sur tous les fronts, avec la poursuite des efforts pour se rapprocher des États-Unis dont les relations furent rĂ©tablies en juin 1969, aprĂšs que Washington eut officiellement reconnu les frontiĂšres du Cambodge. Malheureusement pour les conservateurs et le gouvernement de Lon Nol, cet accord ne dĂ©boucha pas sur la reprise de l’aide amĂ©ricaine massive qu’ils escomptaient[345].

Les principaux combats de la guĂ©rilla se dĂ©roulaient au nord-est. Un nouveau quartier gĂ©nĂ©ral dirigĂ© par Nhiek Tioulong fut installĂ© Ă  Stoeng Treng dont, d’aprĂšs une remarque de Sihanouk en fin 1968, les Vietnamiens occupaient le tiers de la province. Malheureusement, placer des troupes sur les principales routes d’approvisionnement des maquis ne pouvait qu’amener des frictions. Un document vietnamien saisi Ă  la fin de 1969 faisait rĂ©fĂ©rence Ă  une recrudescence des accrochages avec les forces gouvernementales dans la zone, ces derniĂšres ayant subi des pertes que le document estimait Ă  environ un millier de morts et de blessĂ©s[346].

Mais dans le mĂȘme temps, Huỳnh Táș„n PhĂĄt, le prĂ©sident du Gouvernement provisoire rĂ©volutionnaire du Sud-ViĂȘt Nam, effectua un voyage Ă  Phnom Penh Ă  la tĂȘte d’une dĂ©lĂ©gation de 16 personnes. La visite fut organisĂ©e personnellement par Sihanouk qui accompagna les reprĂ©sentants durant toute leur visite. Un but non avouĂ© de ces marques de bienveillance Ă©tait certainement d’obtenir une promesse formelle que les troupes vietnamiennes Ă©vacueraient le Cambodge une fois la guerre finie. La tournĂ©e se conclut par un accord sur les frais d’acheminement des fournitures aux maquis qui devraient dorĂ©navant ĂȘtre directement rĂ©glĂ©s au gouvernement cambodgien, plutĂŽt qu’à des particuliers[347].

À ce moment, le prince avait plusieurs problĂšmes Ă  rĂ©gler. Ce fut d’abord la crise Ă©conomique qui s’aggravait, la demande de plus en plus pressante des Ă©lites de libĂ©raliser les finances, mais aussi l’insurrection qui, bien que toujours restreinte Ă  quelques groupes limitĂ©s, faisait croĂźtre l’insĂ©curitĂ© dans les campagnes, et enfin la prĂ©sence de plus en plus criante du Việt Cộng dans les zones proches de la frontiĂšre vietnamienne. En juillet 1969, lors d’un congrĂšs du Sangkum, le prince proposait d’abandonner la fonction de chef de l’État et de faire composer un gouvernement de sauvetage par un congrĂšs spĂ©cial qui comporterait des membres des deux chambres du parlement, du contre-gouvernement, des reprĂ©sentants des mouvements de jeunesse et des propriĂ©taires de journaux locaux. Ce congrĂšs s’ouvrit le 4 aoĂ»t et Sihanouk y attribuait l’échec du gouvernement prĂ©cĂ©dent au manque de volontĂ© des Ă©lites cambodgiennes Ă  prendre des mesures impopulaires qu'il aurait prises Ă  leur place. En clair, il fixait une ligne directrice au nouveau gouvernement[348]. Le rassemblement sera le dernier triomphe de Sihanouk. Le congrĂšs dĂ©cida de confier Ă  Lon Nol la direction d’un nouveau gouvernement, poste qu’il assurait dĂ©jĂ  par intĂ©rim, Ă  la suite des problĂšmes de santĂ© de Penn Nouth. Au nombre de votes en sa faveur, le prince Sisowath Sirik Matak arrivait juste derriĂšre Lon Nol ; il sera dĂ©signĂ© quelques jours plus tard vice-Premier ministre et deviendra rapidement l’homme fort du rĂ©gime. Ce nouveau cabinet, par sa volontĂ© de se soustraire au contrĂŽle du chef de l’État, n’allait pas tarder Ă  s’opposer au prince[349].

Le retour de Lon Nol au poste de Premier ministre peut poser des questions sur les capacitĂ©s de jugement dont pouvait faire preuve Sihanouk Ă  cette Ă©poque. Dans RĂ©alitĂ©s cambodgiennes, un hebdomadaire proche du souverain, le gĂ©nĂ©ral Ă©tait dĂ©crit comme fiable, sĂ©rieux, dotĂ© d’un bon sens commun et prĂ©fĂ©rant l’action aux discours. Sihanouk connaissait l’aversion de la gauche pour Lon Nol et peut-ĂȘtre espĂ©rait-il aussi que le nouveau Premier ministre pourrait le dĂ©barrasser des activistes, Ă  moins qu’il ne comptĂąt exacerber les rancƓurs pour ensuite apparaĂźtre comme le seul sauveur Ă  mĂȘme de mettre un terme Ă  la crise qui en aurait dĂ©coulĂ©. Toujours est-il que cette nomination comportait une certaine dose d’impuissance et que Lon Nol semblait le choix le moins risquĂ© ; le prince devait sĂ»rement estimer que sa loyautĂ© et sa docilitĂ© compensait ses dĂ©fauts[350].

Les 16 membres du nouveau ministĂšre furent choisis par Lon Nol et approuvĂ©s par l’assemblĂ©e nationale. 9 d’entre eux Ă©taient dĂ©jĂ  dans le cabinet prĂ©cĂ©dent, mais seuls 4 Ă©taient sihanoukistes[note 9]. Sur le moment, le prince ne fit aucune remarque, mais Jean-Claude Pomonti et Serge Thion citent dans leur ouvrage un tĂ©moin prĂ©tendant que quelques jours plus tard, il aurait affirmĂ© qu’il s’agissait d’une rĂ©volution en douceur, oĂč la bourgeoisie avait pris le pouvoir sans violence ni discussion[352].

Lors du deuxiĂšme semestre de 1969, Sihanouk se mit en retrait de la vie politique locale. Il semble que chaque camp attendait la suite des Ă©vĂ©nements[353]. En septembre, le prince se fit remarquer en Ă©tant le seul chef d’État Ă  se rendre Ă  HanoĂŻ aux funĂ©railles de HĂŽ Chi Minh. À cette occasion, il eut des entretiens avec les dirigeants vietnamiens, mais le contenu de ces discussions diffĂšre suivant la source. Bernard Hamel se base sur un document publiĂ© par la rĂ©publique khmĂšre pour soutenir que les conversations portaient sur un accord commercial avec les responsables du FNL concernant l’approvisionnement des maquis en rĂ©publique du ViĂȘt Nam[354]. Le monarque, quant Ă  lui, affirma qu’il dĂ©sirait demander une rĂ©duction des effectifs du Việt Cộng stationnĂ©s au Cambodge, mais PháșĄm Văn Đồng ne lui en aurait pas laissĂ© le temps et lui aurait demandĂ© des comptes sur une cargaison de riz pour laquelle Lon Nol aurait Ă©tĂ© fortement rĂ©tribuĂ© par la Chine, mais dont la livraison se faisait attendre. À son retour Ă  Phnom Penh, quand le monarque posa la question Ă  son nouveau Premier ministre, celui-ci serait restĂ© Ă©vasif. À la fin du mois, quand le gĂ©nĂ©ral se rendit PĂ©kin et qu’il rencontra Ă  son tour son homologue nord-vietnamien, il aurait refusĂ© de garantir la livraison ou de restituer l’argent[355].

Au Cambodge, Sihanouk s’était insensiblement mis hors course de la direction d’un pays qui devenait de plus en plus instable et compliquĂ© Ă  administrer pour un homme seul. Le mĂ©lange de confiance, de fatalisme, de laisser-faire et de douceur de vivre qui avait jusque-lĂ  caractĂ©risĂ© son rĂšgne s’était envolĂ©[356]. Le prince s’en Ă©tait sĂ»rement mieux aperçu que la plupart de ses contemporains, mais prĂ©fĂ©rait ignorer ces problĂšmes et se contentait d’accueillir somptueusement les visiteurs Ă©trangers tels la princesse Margaret du Royaume-Uni ou Hamani Diori, prĂ©sident du Niger et s’abandonnait dans la rĂ©alisation de ses films[357].

À la fin octobre, Lon Nol quittait le Cambodge pour aller suivre un traitement dans une clinique de Neuilly-sur-Seine. Peu aprĂšs, Sihanouk s’en prenait Ă  l’AssemblĂ©e nationale, lui reprochant de ne pas reprĂ©senter le peuple mais une faction dĂ©loyale envers lui. Cette attaque semble avoir Ă©tĂ© motivĂ©e par la dĂ©cision de Sirik Matak, alors Premier ministre par intĂ©rim, de ne transmettre qu’une partie des documents officiels Ă  son cousin et d’avoir incitĂ© les ambassadeurs Ă  lui adresser directement leurs correspondances[358]. Sirik Matak rejetait les dolĂ©ances de Sihanouk et, dans les semaines qui suivirent, prit une sĂ©rie de mesures Ă  l’opposĂ© de la politique menĂ©e depuis des annĂ©es et qui allaient Ă  l’encontre des intĂ©rĂȘts des proches du monarque. Il autorisa la rĂ©ouverture des banques Ă  capitaux privĂ©s au Cambodge, dĂ©valua le riel de prĂšs de 70 % et privatisa certains monopoles de l’État. Le but Ă©tait de rassurer les marchĂ©s financiers internationaux, encourager les investissements Ă©trangers et dynamiser les exportations, des initiatives que Sihanouk avait toujours diffĂ©rĂ©es, doutant de leur utilitĂ©[359].

Le 28e congrĂšs national, convoquĂ© en novembre et dĂ©cembre 1969 s’avĂ©rera la derniĂšre manifestation publique Ă  laquelle participa Norodom Sihanouk avant sa dĂ©position. Durant les dĂ©bats, il tenta de dĂ©nigrer les mesures Ă©conomiques prises par Sirik Matak et obtint un vote demandant l’abrogation du dĂ©cret autorisant les banques Ă©trangĂšres Ă  revenir s’implanter au Cambodge. Pour montrer leur solidaritĂ©, les quatre ministres sihanoukistes du gouvernement dĂ©missionnĂšrent de leur poste. Mais le coup eu l’effet inverse de ce qu’ils escomptaient. Sirik Matak nomma des personnes proches de lui Ă  leur place et Sihanouk se retrouvait privĂ© de tout soutien au sein du gouvernement[360]. Le prince demanda nĂ©anmoins aux reprĂ©sentants du parlement le vote d’une motion de confiance Ă  son Ă©gard. Seul Douc Rasy, adversaire rĂ©solu du prince, osa voter contre, mais l’amour-propre du monarque sortait entamĂ© de cette Ă©preuve, surtout aprĂšs que l'AssemblĂ©e nationale rĂ©cusa le vote du congrĂšs et confirmĂ© l’autorisation faites aux banques privĂ©es de rouvrir[361].

Pour la premiĂšre fois depuis le dĂ©but des annĂ©es 1950, Sihanouk avait Ă  faire face Ă  une opposition structurĂ©e. Il n’impressionnait pas Sirik Matak, de 9 ans son aĂźnĂ©, et l’AssemblĂ©e Ă©lue en 1966 prenait goĂ»t Ă  son influence grandissante. Le monarque ne pouvait se prĂ©valoir d’aucune responsabilitĂ© dans les mesures Ă©conomiques prises rĂ©cemment et qui commençaient Ă  porter leurs premiers fruits. L’affrontement avec le souverain souhaitĂ© par ceux qui semblaient avoir gagnĂ© la partie ne pouvait par contre rĂ©gler aucun des problĂšmes auxquels le Cambodge Ă©tait confrontĂ©. La menace militaire vietnamienne ainsi que celle de la guĂ©rilla restait toujours aussi importante. Plus inquiĂ©tant, les intentions amĂ©ricaines concernant le royaume khmer demeuraient floues. Le rĂ©tablissement des relations diplomatiques n’avait amenĂ© ni le boom Ă©conomique que certains espĂ©raient, ni le retour de l’aide militaire massive. En fait, les membres de la petite mission Ă  Phnom Penh – dont quelques-uns Ă©taient des agents de la CIA – s’étaient contentĂ© de renouer quelques contacts avec les dirigeants proches d’eux au premier rang desquels figurait Sirik Matak[362].

La chute (1970)

Le 2 janvier 1970, le prince fatiguĂ© par ses efforts, dĂ©moralisĂ© par l’affront que l’AssemblĂ©e lui avait fait subir et souffrant de surmenage, se faisait admettre Ă  l’hĂŽpital Calmette (en). Le 6 du mĂȘme mois, le palais royal annonçait son dĂ©part le soir mĂȘme pour la France oĂč il devait poursuivre son traitement mĂ©dical. L’embarquement se faisait sans le cĂ©rĂ©monial habituel et des proches remarquĂšrent que ses bagages Ă©taient plus volumineux qu’à l’accoutumĂ©e[363]. Peut-ĂȘtre espĂ©rait-il renverser la situation vis-Ă -vis de Sirik Matak en profitant de son sĂ©jour Ă  l’étranger pour demander Ă  la Chine et Ă  l’URSS, qu’il projetait de visiter avant de rentrer, de faire pression sur leur alliĂ© vietnamien et l’obliger Ă  rĂ©duire son implantation au Cambodge[364]. Peut-ĂȘtre espĂ©rait-il aussi que des tensions allaient apparaĂźtre entre Lon Nol et Sirik Matak et qu’il serait rappelĂ© tel un sauveur. Si un tel raisonnement s’était avĂ©rĂ© efficace par le passĂ©, ce ne sera pas le cas cette fois[365].

Toujours est-il qu’avec les absences conjuguĂ©es de Lon Nol et de Norodom Sihanouk, Sirik Matak et ses partisans avaient une occasion unique de mettre en place les mesures libĂ©rales qu’ils souhaitaient depuis longtemps et de s’opposer plus fermement Ă  l’occupation vietnamienne des zones frontaliĂšres. Le gouvernement Ă©tait alors prĂȘt Ă  mettre Ă  bas les fondements de la politique suivie jusque-lĂ  par le monarque et Ă  rĂ©organiser l’armĂ©e en une vĂ©ritable force de combat. Il espĂ©rait par ces mesures pouvoir redynamiser les entrepreneurs du pays. Malheureusement pour lui, une telle politique nĂ©cessitait le soutien des États-Unis dont Sirik Matak se considĂ©rait proche, mais les AmĂ©ricains Ă©taient engagĂ©s dans un retrait de l’Asie du Sud-est[366].

En janvier, le bureau d’aide mutuelle mis en place quelques annĂ©es auparavant par Sihanouk pour fournir diverses assistances fut fermĂ©. Ses recettes provenaient de celles des films du monarque, des droits d’entrĂ©e au casino et de « contributions volontaires » de hauts fonctionnaires. Les fonds ainsi collectĂ©s servaient Ă  dĂ©dommager les victimes des bombardements et de la guĂ©rilla ainsi qu'Ă  acheter des cadeaux de toutes sortes. Si la raison invoquĂ©e Ă©tait un dĂ©ficit chronique, il semble bien qu’en fait le gouvernement voulait surtout limiter l’influence de Sihanouk[367].

À la mi-fĂ©vrier, Lon Nol Ă©tait de retour. Avant de rentrer, il avait eu un entretien avec Sihanouk, oĂč, d’aprĂšs certaines rumeurs, une stratĂ©gie antivietnamienne aurait Ă©tĂ© Ă©laborĂ©e, mais rien ne permet de confirmer cette thĂšse[368]. D’aprĂšs le journaliste Pierre Max, le gĂ©nĂ©ral aurait aussi tentĂ© de convaincre le prince de revenir rapidement, mais en vain[369].

SitĂŽt arrivĂ©, le gĂ©nĂ©ral adoptait une sĂ©rie de mesures antivietnamiennes et prenait contact avec Son Ngoc Thanh, le vieux leader nationaliste rĂ©fugiĂ© depuis des annĂ©es Ă  SaĂŻgon oĂč il vivait des subsides de la rĂ©publique du ViĂȘt Nam et de la CIA en Ă©change du recrutement de volontaires au sein de la communautĂ© khmĂšre Krom. Plusieurs centaines de ces combattants avaient dĂ©jĂ  dĂ©sertĂ© dans les derniers mois pour rejoindre Sihanouk qui les accueillit Ă  bras ouverts dans l’armĂ©e. Ces fantassins, bien Ă©quipĂ©s et entraĂźnĂ©s permettaient de mettre la pression sur les troupes vietnamiennes stationnĂ©es au Cambodge. Le monarque n’y voyait pas de risque, pensant que l’antagonisme entre Son Ngoc Thanh et Lon Nol le prĂ©munissait contre une alliance Ă  son encontre[370]. Ces contacts servaient les intĂ©rĂȘts du commandement militaire amĂ©ricain de SaĂŻgon, mais inquiĂ©taient la petite mission diplomatique de Phnom Penh, et certains cercles de Washington qui craignaient les consĂ©quences d’une extension du conflit. Toutefois, le temps passant, le prĂ©sident Nixon se rangeait de plus en plus derriĂšre les vues des premiers nommĂ©s, estimant que le maintien des refuges de l’autre cĂŽtĂ© de la frontiĂšre pouvait retarder le retrait des forces amĂ©ricaines du ViĂȘt Nam[371].

L’escalade se poursuivait et, le 11 mars, des manifestations se dĂ©roulaient devant les ambassades de la RĂ©publique dĂ©mocratique du ViĂȘt Nam et du Front national de libĂ©ration du Sud ViĂȘt Nam. Les Ă©meutiers entrĂšrent dans les bĂątiments et les mirent Ă  sac. Les diplomates prĂ©sents eurent juste le temps de prendre leurs jambes Ă  leur cou. La police, aux ordres d’Oum Manorine, le beau-frĂšre de Sihanouk, ne fit rien pour rĂ©primer ces actes de violence. Durant la nuit, des bandes dispersĂ©es investirent les quartiers vietnamiens de la capitale, mirent Ă  sac les Ă©glises catholiques [note 10], pillĂšrent les commerces et agressĂšrent les passants[373].

Depuis Paris, Sihanouk affirmait que ces manifestations dĂ©coulaient d’un complot visant Ă  « jeter notre pays dans les bras d’une puissance impĂ©rialiste capitaliste ». Il promit de rentrer dans les plus brefs dĂ©lais et demander « Ă  la nation et Ă  l’armĂ©e » de choisir entre lui et les « personnalitĂ©s » Ă  l’origine de ces troubles, ajoutant « Si elles choisissent de suivre ces personnalitĂ©s dans la voie qui fera du Cambodge un second Laos, qu’elles me permettent de dĂ©missionner »[374]. InterrogĂ© par le New York Times, il rĂ©pondit que les communistes devaient maintenant choisir entre respecter la neutralitĂ© du Cambodge ou voir un gouvernement pro amĂ©ricain s’installer Ă  Phnom Penh[375].

Peu aprĂšs, il changea ses plans. PlutĂŽt que de rentrer directement, il dĂ©cidait de passer par Moscou et PĂ©kin, comme initialement prĂ©vu. Dans la nuit qui prĂ©cĂ©dait son dĂ©part, il eut une conversation Ă  l’ambassade du Cambodge au cours de laquelle il menaçait de faire exĂ©cuter le gouvernement de sauvetage. Cet entretien fut enregistrĂ© Ă  l’insu du prince et envoyĂ© Ă  Phnom Penh ; il y suscita un Ă©moi qui allait prĂ©cipiter la chute du monarque[376]. Jusqu’au dernier moment, les projets de Sihanouk demeuraient confus. Le 16 mars encore, il Ă©tait espĂ©rĂ© pour le 20. Le 9, il avait dĂźnĂ© Ă  la Tour d'Argent avec Pierre Marx qui affirma que le prince l’aurait assurĂ© qu’il ne nĂ©gligeait pas la menace vietnamienne, mais qu’il ne pouvait lutter seul contre eux. Il pensait que sa seule chance Ă©tait d’utiliser ses bonnes relations avec les dirigeants soviĂ©tiques et chinois pour obtenir qu’ils fassent pression sur leur alliĂ© et qu’ils l'amĂšnent Ă  quitter ses sanctuaires[377].

À Phnom Penh, les attaques personnelles contre le prince et son entourage se multipliaient Ă  l'assemblĂ©e. Toutefois, ces critiques Ă©taient loin de faire l’unanimitĂ© et beaucoup continuaient Ă  considĂ©rer Sihanouk comme incontournable et espĂ©raient toujours le voir revenir rapidement. La route menant de l’aĂ©roport au Palais royal avait Ă©tĂ© refaite et se prĂ©parait Ă  ĂȘtre pavoisĂ©e. Le parlement, de son cĂŽtĂ©, avait dĂ©cidĂ© d’envoyer Yem Sambaur et Norodom Kanthoul Ă  Moscou pour mettre le monarque au courant de la situation et lui demander de hĂąter son retour, mais il fit savoir qu’il refuserait de les recevoir. Il resta plus longtemps que prĂ©vu Ă  Moscou et retarda son retour d’une semaine[378]. Plus tard il justifiera ces atermoiements par des craintes pour sa sĂ©curitĂ©, dĂ©fiance confortĂ©e par un message qu’il reçut de la reine Kossamak. Toujours est-il que ces retards allaient lui coĂ»ter son poste de chef de l’État[379].

Quand Sihanouk arriva Ă  Moscou, NikolaĂŻ Podgorny lui conseilla de rejoindre Phnom Penh sur le champ afin que le Cambodge ne bascule pas dans le camp proamĂ©ricain, mais le monarque prĂ©fĂ©ra passer outre. Il aurait affirmĂ© au prĂ©sident du PrĂŠsidium du Soviet suprĂȘme qu’avant de prendre une dĂ©cision, celle-ci devait ĂȘtre mĂ»rement rĂ©flĂ©chie et dans le cas prĂ©sent, beaucoup d’élĂ©ments devaient ĂȘtre pris en compte[380].

La mise en place de l’alliance (1970)

Les dirigeants soviĂ©tiques, de leur cĂŽtĂ©, pour peu qu’ils en aient eu la possibilitĂ©, ne semblaient pas enclins Ă  faire pression sur les Vietnamiens[381]. Par contre, d’aprĂšs Sihanouk, ils se dĂ©clarĂšrent prĂȘts, au cas oĂč il aurait dĂ©cidĂ© de combattre l’extrĂȘme droite, Ă  lui fournir des armes et des vĂ©hicules sous six Ă  sept mois alors que le monarque avait besoin d’une aide immĂ©diate pour avoir une chance de gagner la partie[382]. Les assertions du prince sont toutefois sujettes Ă  caution. Outre qu’il soit difficile de dĂ©terminer si le terme extrĂȘme droite recouvrait les partisans de Lon Nol et Sirik Matak ou au contraire les troupes amĂ©ricano-sud-vietnamiennes, l’aide militaire soviĂ©tique serait apparue malvenue. Le 18 mars, dans la limousine qui le conduisait Ă  l’aĂ©roport, Kossyguine avertit le prince que l’assemblĂ©e nationale cambodgienne venait de le dĂ©mettre de ses fonctions de chef de l’État. Bien plus tard, Sihanouk affirmera qu’il aurait alors fait part de son intention de combattre l’impĂ©rialisme de toutes ses forces. À l’aĂ©roport, il confia qu’il allait sĂ»rement devoir mettre en place un gouvernement en exil. Les cĂ©rĂ©monies officielles continuĂšrent cependant comme initialement prĂ©vu et le monarque nouvellement dĂ©chu prit l’avion pour PĂ©kin[380].

Lors de l’escale Ă  Irkoutsk, le prince fut accueilli avec les honneurs et conviĂ© Ă  un banquet. MalgrĂ© les Ă©vĂ©nements, il fut, d’aprĂšs Alain Daniel, son secrĂ©taire, d’une exquise courtoisie avec ses hĂŽtes[383]. MĂȘme si plus tard, il Ă©crira qu’il passa le vol Ă  prĂ©parer un appel aux armes[384], une de ces premiĂšres dĂ©cisions, une fois arrivĂ© Ă  PĂ©kin, sera de contacter Étienne Manac'h, l’ambassadeur de France, pour demander l’asile politique dans son pays[385].

À son arrivĂ©e Ă  PĂ©kin, Sihanouk fut accueilli par Zhou Enlai et une garde d’honneur. Il se rendit Ă  l’ambassade du Cambodge oĂč on lui remit une lettre de Cheng Heng, le nouveau chef de l’État, et qui lui signifiait sa dĂ©position. AprĂšs avoir rencontrĂ© Étienne Manac'h pour discuter, comme Ă©voquĂ© ci-dessus, les modalitĂ©s d’un asile politique en France qui sera d’ailleurs acceptĂ©, il eut une entrevue avec les dirigeants chinois[386], mais la teneur des conversations diffĂšrent suivant le tĂ©moignage du prince que l’on prend en compte. En 1971, il affirma que Zhou Enlai, tout en le mettant en garde contre l’ardeur de la tĂąche, lui promit un soutien total de son pays s’il dĂ©cidait d’engager le combat contre l’impĂ©rialisme et lui accordait un dĂ©lai de 24 heures pour rĂ©flĂ©chir Ă  sa proposition[387]. Onze ans plus tard, le monarque affirma par contre que le message venait du prĂ©sident Mao Zedong et reconnaissait qu’en le soutenant ainsi, ils offraient Ă  leurs alliĂ©s khmers rouges une opportunitĂ© sans prĂ©cĂ©dent de « communiser » le Cambodge[388]. Si une telle pensĂ©e avait pu effleurer le prince en 1970, sa motivation Ă©tait essentiellement basĂ©e sur sa soif de revanche, surtout aprĂšs les attaques contre sa personne et celle de sa femme qui fleurissaient Ă  Phnom Penh. Il est toutefois sĂ»r qu’aprĂšs sa dĂ©position et son installation Ă  PĂ©kin, sa rancƓur et son statut servaient les intĂ©rĂȘts chinois, vietnamiens et ceux du Parti communiste du KampuchĂ©a jusqu’alors balbutiant[389].

Vingt-quatre heures aprĂšs l’arrivĂ©e du prince, les dirigeants chinois firent venir PháșĄm Văn Đồng Ă  PĂ©kin[387]. D’aprĂšs Sihanouk, Đồng vint le voir le 22 mars au petit matin. Ils prirent ensemble le petit dĂ©jeuner puis eurent une rĂ©union de travail au cours de laquelle, toujours d’aprĂšs l’ancien souverain, ils conclurent une alliance qui avalisait l’acheminement de l’aide chinoise Ă  la rĂ©sistance khmĂšre, la convocation d’une « confĂ©rence des peuples indochinois » et l’entrainement au ViĂȘt Nam des troupes de cette nouvelle coalition[390]. Cet accord rĂ©pondait aux attentes de toutes les parties. Sihanouk, Ă  la tĂȘte d’un front de rĂ©sistance sauvait la face, permettant aux forces du PCK de croĂźtre dans des proportions qu’ils n’auraient jamais pu espĂ©rer ; ces troupes enfin, par leurs actions, permettaient de relĂącher la pression que l’armĂ©e cambodgienne faisait peser sur les unitĂ©s vietnamiennes stationnĂ©es en territoire khmer[389].

Les discussions de PĂ©kin dĂ©bouchĂšrent sur une allocution radiodiffusĂ©e de Sihanouk le 23 mars. Tout d’abord il remit en question la lĂ©galitĂ© de sa dĂ©position : « il n’y a dans notre constitution, mĂȘme dans les plus rĂ©cents amendements d’avant le coup d’État anticonstitutionnel de ce mois de mars 1970, perpĂ©trĂ© Ă  Phnom Penh par l’extrĂȘme droite, aucune disposition qui permette au parlement et au gouvernement de dĂ©poser le chef de l’État. » Pour lui, seul « un rĂ©fĂ©rendum national, dont la rĂ©gularitĂ© ne serait pas contestable » aurait Ă©tĂ© Ă  mĂȘme de mettre fin Ă  ses fonctions. Mettant en doute la lĂ©gitimitĂ© du nouveau rĂ©gime, il contestait par avance le rĂ©sultat de toute consultation qu’il organiserait et demandait aux gouvernements Ă©trangers de ne pas le reconnaĂźtre. Enfin, il faisait part de son intention, une fois le rĂ©gime de Lon Nol renversĂ©, de ne plus solliciter de responsabilitĂ©s au sommet du nouvel Ă©tat[391]. Dans une autre dĂ©claration faite Ă  l’AFP, il annonçait la formation d’un Front uni national, d’un gouvernement d’union nationale, la constitution d’une assemblĂ©e consultative et d’une armĂ©e nationale de libĂ©ration. Enfin, il appelait ses « enfants » Ă  ne pas se soumettre aux lois de Phnom Penh et Ă  se rĂ©fugier dans la jungle pour combattre l’ennemi[392].

Les forces armées du front, appelé FUNK seront placées sous l'autorité du Gouvernement royal d'union nationale du Kampuchéa (GRUNK). L'« appel du 23 mars » de Sihanouk aurait été, à son insu, légÚrement retouché par Pol Pot. Zhou Enlai prévoyait une rencontre entre Sihanouk et Pol Pot mais, le 26 mars, ce dernier se contentait de faire transmettre au prince un message de soutien prétendument signé par Khieu Samphùn, Hou Yuon et Hu Nim, les chefs officiels du mouvement khmer rouge, et censément envoyé depuis une base de résistance située au Cambodge[393].

Le GRUNK avait pour siĂšge le Youyi binguan (HĂŽtel de l'amitiĂ©), un complexe de bureaux et de logements situĂ© au Nord-Ouest de PĂ©kin, construit dans les annĂ©es 1950 pour hĂ©berger les conseillers soviĂ©tiques. Le prince, quant Ă  lui, se fit attribuer l’ancienne lĂ©gation française, prĂšs de la Place Tian'anmen. La demeure, dĂ©truite en 1976 par un tremblement de terre, sera reconstruite et restera Ă  la disposition du monarque cambodgien jusqu’à son dĂ©cĂšs[394].

À Phnom Penh, les manifestations contre Sihanouk se multipliaient, l’accusant d’avoir vendu le territoire Ă  l’ennemi hĂ©rĂ©ditaire vietnamien et d’en avoir cachĂ© la recette dans des comptes Ă  l’étranger au nom de sa femme ; cette derniĂšre n’était pas non plus Ă©pargnĂ©e, accusĂ©e d’avoir usĂ© de son influence pour enrichir sa famille. Des photomontages de femmes nues oĂč le visage de la princesse Monique avait Ă©tĂ© ajoutĂ© circulaient dans la capitale Ă  cĂŽtĂ© de caricatures de son mari le reprĂ©sentant dans des attitudes dĂ©gradantes. Toutes ces humiliations avaient blessĂ© au plus profond l’orgueil du monarque dĂ©chu et rĂ©duisaient Ă  nĂ©ant les espoirs de le voir revenir rapidement aux affaires et pardonner Ă  ceux qui avaient osĂ© le dĂ©poser[395].

Les 24 et 25 avril, sous les auspices de Zhou Enlai se tenait Ă  Canton une confĂ©rence Ă  laquelle, outre Sihanouk, participaient Ă©galement le Premier ministre nord-vietnamien PháșĄm Văn Đồng, le nouveau prĂ©sident du Front national de libĂ©ration du Sud ViĂȘt Nam Nguyen Huu Tho et le prĂ©sident Souphanouvong du Neo Lao Haksat. L’ancien monarque cambodgien dĂ©clarait prendre la tĂȘte de la « lutte des peuples indochinois contre l'impĂ©rialisme amĂ©ricain ». Le 5 mai, Ă  l'incitation des Chinois, le GRUNK Ă©tait officiellement constituĂ©[396].

Au sein du gouvernement d'union nationale, Sihanouk occupait le poste de « chef d'État », et Penn Nouth, l'un de ses fidĂšles, six fois Premier ministre du Royaume du Cambodge, celui de chef du gouvernement. Le GRUNK comptait vingt-deux ministres et vice-ministres, parmi lesquels se mĂȘlaient sihanoukistes et dirigeants khmers rouges. À la demande de la Chine, la moitiĂ© des membres du cabinet Ă©tait basĂ©e au Cambodge, ce qui permettait de rejeter l’appellation de gouvernement en exil[397].

GrĂące au soutien de Norodom Sihanouk, les rangs khmers rouges grossissaient rapidement de 6 000 combattants au dĂ©but de 1970 Ă  environ 50 000. La plupart de ces nouvelles recrues Ă©taient des paysans qui soutenaient le roi et n’avaient qu’une vue trĂšs sommaire, quand pas de vue du tout, de la politique et quasiment aucune du communisme. Plus tard (en 1979), le prince affirmera que la monarchie ayant Ă©tĂ© abolie, il luttait pour l’indĂ©pendance de son pays, « quand bien mĂȘme il aurait Ă©tĂ© communiste »[398].

En avril 1970, Thiounn Mumm, qui sĂ©journait en France depuis 1955, rejoignait Sihanouk Ă  PĂ©kin. Dans les quatre annĂ©es qui allaient suivre, Mumm et son frĂšre Prasith donneront une caution intellectuelle au monarque et lui attireront le soutien de membres des classes Ă©duquĂ©es cambodgiennes Ă  l’étranger[399].

Durant l'Ă©tĂ©, Sihanouk fut jugĂ© par contumace Ă  Phnom Penh par un tribunal militaire. Le prince fut convaincu d’avoir « incitĂ© les communistes Ă  commettre une agression » et d’avoir « incitĂ© les soldats cambodgiens Ă  rejoindre l’ennemi »[400]. Ces accusations portaient sur des faits postĂ©rieurs Ă  sa dĂ©position et ne concernaient pas les pĂ©riodes oĂč il Ă©tait chef de l’État et, de par la constitution, oĂč il ne pouvait pas ĂȘtre inquiĂ©tĂ©. Il fut dĂ©mis de sa citoyennetĂ© et condamnĂ© Ă  mort. La peine capitale fut aussi requise contre 17 autres membres du front uni national du KampuchĂ©a, dont la princesse Monique, considĂ©rĂ©e comme l’ñme de la conspiration[401].

De par ses contacts Ă  l’étranger, le prince allait ĂȘtre un porte-drapeau bien utile, mais ses discours et ses occupations Ă©taient Ă©troitement contrĂŽlĂ©s. Il partait de temps en temps pour des voyages diplomatiques financĂ©s par le gouvernement chinois[402]. En 1972, il avait avouĂ© que dĂšs septembre 1970, c’était les dirigeants khmers rouges qui dĂ©tenaient la rĂ©alitĂ© du pouvoir[403]. En fait s’il se dĂ©clarait marxiste et faisait rĂ©guliĂšrement rĂ©fĂ©rence Ă  « ses communistes », ceux qui conduisaient la guerre en son nom n’avaient que mĂ©pris pour lui et la vie luxueuse qu’il menait Ă  PĂ©kin[404].

Une cohabitation difficile (1971-1973)

Durant toute la guerre civile cambodgienne Sihanouk et son Ă©quipe demeuraient en fait isolĂ©s de la rĂ©alitĂ© du terrain. Le « chef de l'État » ne recevait que des rares messages, signĂ©s par Khieu SamphĂąn au nom de la « faction intĂ©rieure »[405]. En 1971, Ieng Sary arrivait Ă  PĂ©kin comme « reprĂ©sentant spĂ©cial de l'IntĂ©rieur », officiellement pour assurer un lien avec les Chinois et les Nord-vietnamiens. Les relations entre lui et Sihanouk seront rapidement dĂ©testables : le prince, qui estimait que le reprĂ©sentant khmer rouge Ă©tait lĂ  pour le surveiller, prenait plaisir Ă  l'humilier[406].

Durant l’annĂ©e 1971, le parti communiste du KampuchĂ©a tenta d’affaiblir la position de Sihanouk dans les campagnes cambodgiennes. Un document affirmait qu’il n’était pas nĂ©cessaire d’afficher les portraits du prince et que, sans dĂ©nier son faible apport Ă  la rĂ©volution, il fallait subtilement expliquer au peuple que toutes les rĂ©alisations rĂ©centes devaient plus Ă  la lutte armĂ©e qu'Ă  l’action du monarque dĂ©chu[407].

 le prince, sur le tarmac, serre des mains dans la foule sous le regard de son Ă©pouse Monique et des Ă©poux Ceaușescu
Norodom Sihanouk en visite officielle en Roumanie, en 1972

Au dĂ©but de l’annĂ©e 1973, avec la signature le 23 janvier des accords de paix de Paris, le Cambodge restait le seul pays de l’ancienne Indochine française encore officiellement en guerre. Des rumeurs de tractations entre les grandes puissances afin de rĂ©gler la question khmĂšre se firent jour. Craignant, Ă  tort ou Ă  raison qu’on profite de la visite que devait faire Henry Kissinger Ă  PĂ©kin du 15 au 19 fĂ©vrier pour le presser d’accepter une solution « Ă  la corĂ©enne », c’est-Ă -dire la partition du pays en zone d’influence, Sihanouk dĂ©cida de s’absenter de la capitale chinoise pendant la durĂ©e du sĂ©jour du secrĂ©taire d’État amĂ©ricain[408].

À la mĂȘme Ă©poque, et malgrĂ© des demandes rĂ©pĂ©tĂ©es, Sihanouk n’avait toujours pas Ă©tĂ© autorisĂ© Ă  se rendre dans les maquis. Il menaça alors de ne pas se rendre Ă  la confĂ©rence des non-alignĂ©s qui devait se tenir en septembre Ă  Alger, soutenant qu’il ne pouvait continuer Ă  reprĂ©senter un pays dont on lui refusait l’accĂšs. Finalement, aprĂšs moult tractations, Norodom Sihanouk, Ieng Sary et la princesse Monique quittaient la Chine Ă  la fin fĂ©vrier pour parcourir les zones « libĂ©rĂ©es » du Cambodge[409]. Le pĂ©riple de 3 000 kilomĂštres via la piste HĂŽ Chi Minh avait Ă©tĂ© encouragĂ© par les Vietnamiens et les Chinois qui voulaient donner au prince plus de lĂ©gitimitĂ© que ce que lui offrait le PCK. Le voyage avait donnĂ© lieu Ă  un film de propagande tournĂ© au moment des faits et sorti peu aprĂšs en Chine[410].

Durant ces pĂ©rĂ©grinations, Sihanouk fit avec le zĂšle qui le caractĂ©risait ce que l’on attendait de lui. Il ne changea pas pour autant la vision que les cadres du PCK pouvaient avoir de lui et il est probable qu’il vĂ©cut son pĂ©riple avec la crainte de pouvoir ĂȘtre exĂ©cutĂ© Ă  tout moment. Sa femme, dans son journal Ă©ditĂ© en 1978, relatait les attentions qu’avaient prises leurs alliĂ©s pour que tout se passe de maniĂšre agrĂ©able pour elle et son Ă©poux. Pendant huit jours, ils seront transportĂ©s sur la piste HĂŽ Chi Minh dans des vĂ©hicules tout-terrain soviĂ©tiques et hĂ©bergĂ©s chaque nuit dans de « trĂšs jolis petits chalets » avec eau courante construits pour la circonstance. Chaque jour, on servait au couple royal des repas français avec du pain et des lĂ©gumes frais[411].

À la frontiĂšre cambodgienne, ils furent accueillis par Son Sen et Hu Nim. Deux jours plus tard, Khieu SamphĂąn et Saloth SĂąr, alors prĂ©sentĂ© comme le « chef de l’armĂ©e », se joignirent au groupe avant que peu aprĂšs Hou Yuon et Khieu Ponnary ne viennent complĂ©ter l’arĂ©opage. AprĂšs 15 jours de voyage, l’équipĂ©e atteint Phnom Kulen, au nord d’Angkor Wat. Ils trouvĂšrent une demeure que la princesse Monique appela « notre Maison Blanche en zone libĂ©rĂ©e ». Toujours d’aprĂšs elle, l’habitation Ă©tait bien dĂ©corĂ©e et ils furent traitĂ©s avec tant d’égard qu’elle espĂ©rait pouvoir y rester avec son mari jusqu’à la fin de la guerre. Les jours suivants, Sihanouk et Monique participĂšrent Ă  des cĂ©rĂ©monies en leur honneur et prĂ©sidĂšrent les commĂ©morations du troisiĂšme anniversaire du FUNK. Ils visitĂšrent aussi des temples d’Angkor dans des uniformes flambant neufs avant de repartir pour la Chine. Ils atteignirent HanoĂŻ le 5 avril, puis, Ă  la fin du mois, PĂ©kin, oĂč la princesse Monique avoua Ă  l’ambassadeur de France Étienne Manac'h qu’elle avait perdu 5 kilos dans l’aventure[412].

Peu aprĂšs son retour, le prince effectua une tournĂ©e dans une dizaine de pays[note 11] afin de s’assurer de leur soutien diplomatique. Comme Ă  son habitude, il donnait son avis dĂšs qu’il le pouvait et dĂ©nonçait les coalitions qui se formaient contre lui. Il ne cachait pas sa perplexitĂ© envers ses alliĂ©s khmers rouges et l’incertitude quant Ă  son avenir. En mai, dans une interview accordĂ©e Ă  la journaliste Oriana Fallaci, Sihanouk affirma qu’il Ă©tait « Ă  100 % » derriĂšre le PCK Ă  qui il pensait ĂȘtre utile en leur apportant le soutien de la paysannerie sans qui aucune rĂ©volution n’était possible. Il soulignait aussi toute l’aversion que lui inspirait Ieng Sary, tout en rappelant qu’elle passait aprĂšs leur lutte contre leurs ennemis communs[414].

Alors qu’une nouvelle visite d’Henry Kissinger se profilait Ă  PĂ©kin pour la fin juillet 1973, Sihanouk fit savoir qu’il ne dĂ©sirait pas le rencontrer et organisa un voyage en CorĂ©e du Nord du 20 juillet au 15 aoĂ»t pour s’assurer que ses dĂ©sirs soient pris en compte. Avant de rentrer de Pyongyang, il diffusa un nouvel appel au peuple cambodgien dans lequel il fermait la porte Ă  toute tentative de nĂ©gociation, demandant Ă  chacun de choisir son camp. Il renouvellera la manƓuvre lorsque Georges Pompidou se rendra Ă  son tour en Chine du 11 au 17 septembre 1973. Alors Ă  Alger pour la 4e confĂ©rence des pays non-alignĂ©s, il choisira de prolonger son sĂ©jour jusqu’au 19 septembre, reprochant Ă  la France de ne pas avoir fermĂ© son ambassade Ă  Phnom Penh et de continuer Ă  se compromettre avec Lon Nol[415].

La fin de la république khmÚre (1974-1975)

Norodom Sihanouk avec sa femme et les Ă©poux Ceaușescu, lors d'une nouvelle visite en Roumanie en 1974

En juillet 1974, alors que les perspectives d'une victoire rĂ©publicaine s'estompaient, Lon Nol, sous la pression des AmĂ©ricains, offrait d’ouvrir des nĂ©gociations Ă  ses adversaires, mais la demande fut rejetĂ©e par Sihanouk qui, sentant la victoire Ă  portĂ©e de main, rĂ©clamait une capitulation sans condition[416]. Les affaires de la rĂ©publique khmĂšre ne firent qu'empirer et, au dĂ©but de 1975, John Gunther Dean (en), le nouvel ambassadeur amĂ©ricain, faisait remarquer Ă  Washington qu’un nouveau Cambodge pro communiste Ă©tait en train de surgir et qu’il fallait favoriser des responsables proches de PĂ©kin comme Sihanouk semblait l’ĂȘtre, plutĂŽt que d’abandonner le pays Ă  des gouvernants pro vietnamiens tels les HanoĂŻ leaning Khmers rouges (« Khmers rouges appuyĂ©s par HanoĂŻ »). Les forces khmĂšres rouges s’enthousiasmaient, quant Ă  elles Ă  l’idĂ©e de prendre Phnom Penh et mettre en place ce que Dean appelait an uncontrolled solution (« une solution incontrĂŽlĂ©e ») qui n’était pas sans inquiĂ©ter les AmĂ©ricains. Tout Ă  coup, Sihanouk apparaissait comme un interlocuteur valable, capable de sauvegarder le peu d’intĂ©rĂȘts amĂ©ricains qui pouvaient encore l’ĂȘtre[417].

À la fin mars, Norodom Sihanouk envoyait une lettre au prĂ©sident GĂ©rald Ford, lui demandant si l’ambassade amĂ©ricaine Ă  Phnom Penh pouvaient rechercher des copies de ses films des annĂ©es 1960. Il affirmait que s’ils avaient Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©s dans un style trĂšs personnel, ils renfermaient aussi des images et des sons du Cambodge traditionnel[418]. MĂȘme s’il est difficile de se prononcer sur un Ă©ventuel sens cachĂ© dans la missive, George Bush Senior, l'envoyĂ© des États-Unis en rĂ©publique populaire de Chine, offrit de rencontrer le prince directement ou indirectement, alors qu’il Ă©tait demandĂ© Ă  Dean de rechercher lesdits films. Mais Sihanouk rejeta la demande de Bush et s’opposa Ă  un projet amĂ©ricain visant Ă  le ramener au Cambodge oĂč il aurait pu s’interposer entre les belligĂ©rants et faire cesser les combats. Les consĂ©quences de la lettre du prince fut qu’il put rĂ©cupĂ©rer certains de ses films et que plus tard, Henry Kissinger pourra prĂ©tendre Ă  tort qu’il avait militĂ© all along (« depuis le dĂ©but ») pour un retour de Sihanouk au pouvoir[419].

Le président du Kampuchéa démocratique (17 avril 1975)

Au dĂ©but de l’annĂ©e 1975, les forces armĂ©es du FUNK, dont la composante khmĂšre rouge Ă©tait largement majoritaire, gagnaient du terrain face Ă  celles de la RĂ©publique khmĂšre et, le , Phnom Penh Ă©tait prise. Dans les premiers mois de leur pouvoir, les responsables khmers rouges ne formĂšrent pas de vĂ©ritable gouvernement. Officiellement, le GRUNK dirigeait toujours le Cambodge, mais Norodom Sihanouk et Penn Nouth se trouvaient toujours Ă  PĂ©kin : l'Ă©quipe gouvernementale existait essentiellement sur le papier. Vorn Vet (Ă©conomie), Ieng Sary (affaires Ă©trangĂšres) et Son Sen (dĂ©fense) avaient Ă©tĂ© nommĂ©s vice-premiers ministres, mais le processus de composition du gouvernement s'enlisait, du fait de l'incertitude sur le statut de Sihanouk[420].

Au dĂ©part, il semble clair que vu la popularitĂ© que le monarque conservait dans les campagnes, les nouveaux maĂźtres de Phnom Penh Ă©taient peu enclins Ă  le faire revenir. Ils auraient mĂȘme envisagĂ© de le faire supprimer mais en furent dissuadĂ©s par les dirigeants chinois qui exigĂšrent qu’ils prĂ©servent Sihanouk et sa famille[note 12]. Finalement, ils se rendirent Ă  l’évidence que le prince leur Ă©tait plus utile prĂšs d’eux qu’à l’étranger oĂč il risquait de cristalliser sur son nom l’opposition au nouveau rĂ©gime. Mao Zedong et Zhou Enlai militaient de leur cĂŽtĂ© pour que l’union entre l’ancien monarque et leurs alliĂ©s khmers rouges perdure[422]. Dans le mĂȘme temps, Sihanouk devait rĂ©pondre aux premiĂšres interrogations des journalistes quant Ă  des tĂ©moignages rapportant la duretĂ© du nouveau rĂ©gime et notamment l’évacuation des villes ; il attribuait ces rumeurs Ă  des manƓuvres de dĂ©sinformation de la propagande pro occidentale, puis, lorsqu’il parut difficile de nier qu’une chape de plomb s’était abattue sur le pays, pour couper court Ă  toutes ces questions mais aussi pour se soustraire Ă  la pression chaque jour plus forte qu’exerçaient les dirigeants chinois afin qu’il aplanisse ses diffĂ©rends avec les nouveaux maĂźtres de Phnom Penh, il choisit de se retirer en CorĂ©e du Nord[423].

Khieu SamphĂąn fut dĂ©pĂȘchĂ© Ă  Pyongyang pour tenter de le convaincre de revenir Ă  Phnom Penh. Outre la promesse d’un poste de chef de l’État Ă  vie[424], il lui annonça que son administration Ă  PĂ©kin allait ĂȘtre dĂ©mantelĂ©e car elle n’avait plus de raison de demeurer Ă  l’étranger. Finalement, Sihanouk sera accueilli avec les honneurs quand il arriva Ă  l’aĂ©roport de Pochentong, le 9 septembre avec la princesse Monique. Pendant les quelques semaines qui sĂ©paraient son arrivĂ©e de son dĂ©part pour une tournĂ©e internationale, il affirmera avoir Ă©tĂ© traitĂ© avec dĂ©fĂ©rence et s’étonnera mĂȘme de voir les gardes khmers rouges utiliser le langage royal pour s’adresser Ă  lui[425]. Au mois d’octobre, comme prĂ©vu, Sihanouk quittait le Cambodge pour un pĂ©riple qui dĂ©butait par la Chine et la CorĂ©e du Nord, avant de se rendre Ă  la tribune de l'ONU pour un discours oĂč il fustigeait l’impĂ©rialisme amĂ©ricain et sa propagande qui tentait de discrĂ©diter le nouveau rĂ©gime mis en place Ă  Phnom Penh. Le pĂ©riple diplomatique se poursuivait ensuite par la Roumanie, la Yougoslavie, l’Albanie, l’Irak, la Syrie, le Soudan, la Tanzanie, Paris, oĂč il rencontra des Ă©tudiants khmers et enfin la Chine avant de regagner Phnom Penh le 31 dĂ©cembre. Toutefois, avant de rentrer, il prenait soin d’autoriser ses proches, s’ils le dĂ©siraient, Ă  ne pas le suivre et Ă  s’exiler vers d’autres pays, ce que beaucoup feront[426].

En novembre, alors que ce pĂ©riple se poursuivait, les ambassadeurs du GRUNK – dont l’adjectif « royal » Ă©tait de plus en plus souvent omis – avaient Ă©tĂ© envoyĂ©s Ă  Phnom Penh, « pour une session d’information et de formation ». La plupart disparaissaient ensuite au cours des purges khmĂšres rouges. En fait, les relations s’étaient tendues bien avant[427]. Le 9 octobre, par exemple, un dĂ©but d'Ă©quipe gouvernementale avait Ă©tĂ© constituĂ©, avec Khieu SamphĂąn Ă  sa tĂȘte, sans que Sihanouk, pourtant chef de l’État, en soit informĂ©[428].

Le 31 dĂ©cembre, quand Sihanouk revint au Cambodge, le comitĂ© d’accueil enthousiaste de septembre avait fait place Ă  une foule lugubre Ăąnonnant des slogans de l’Angkar. Il regrettera qu’on ne lui laisse avoir aucun contact avec les plus humbles de ses compatriotes qu’il apercevait lors de ses rares sorties hors du palais royal. PrivĂ© de tout pouvoir, virtuellement prisonnier, il prĂ©sidait le 5 janvier 1976 le conseil des ministres qui promulgua officiellement la constitution du nouveau rĂ©gime, le KampuchĂ©a dĂ©mocratique[429].

Dans le mĂȘme temps, Ă  PĂ©kin, Zhou Enlai Ă©tait dĂ©cĂ©dĂ© le 8 janvier, alors que Mao, qui avait toujours militĂ© pour un rapprochement entre les dirigeants khmers rouges et leur ancien monarque, Ă©tait affaibli par la maladie et allait s’éteindre Ă  son tour le 9 septembre. PrivĂ© de ses plus fidĂšles soutiens, rĂ©ticent Ă  poursuivre un rĂŽle de figuration et de devoir cautionner une politique sur laquelle il n’avait aucune prise, l’idĂ©e de se retirer des affaires se faisait chaque jour plus pressante dans l’esprit de Sihanouk. La nomination par Ieng Sary de nouveaux ambassadeurs Ă  PĂ©kin, Pyongyang, Vientiane et HanoĂŻ sans que le chef de l’État soit ne fĂ»t-ce que consultĂ© offrit un prĂ©texte tout trouvĂ©. Le 10 mars, le prince faisait part de sa volontĂ© de dĂ©missionner. Les responsables du KampuchĂ©a dĂ©mocratique, tentĂšrent d’abord de l'en dissuader, mais le monarque resta inflexible. Finalement, la dĂ©cision sera acceptĂ©e et rendue publique le 2 avril 1976[430]. Le 6 avril, Penn Nouth remettait Ă  son tour sa dĂ©mission, mettant un terme Ă  l'existence du GRUNK[431].

La mise Ă  l’écart (1976-1977)

Sihanouk, qui espĂ©rait mener l’existence d’un gentleman-farmer Ă  la retraite, Ă©ventuellement s’occuper des relations publiques de son pays ou s’adonner Ă  la rĂ©alisation de films, allait vite dĂ©chanter. En fait, il passera les quelques annĂ©es qui suivent comme un otage des Khmers rouges[432].

Peu aprĂšs sa dĂ©mission, les derniers membres de la famille royale encore Ă  Phnom Penh furent envoyĂ©s dans des coopĂ©ratives en province. D’autre part, Sihamoni et Narindrapong, les deux fils que Sihanouk avait eu avec Monique et qui poursuivaient leurs Ă©tudes Ă  Pyongyang et Ă  Moscou, furent invitĂ©s Ă  venir participer aux cĂ©rĂ©monies devant cĂ©lĂ©brer le premier anniversaire de la chute de Phnom Penh, le 17 avril 1976 ; en fait, ils ne seront pas autorisĂ©s Ă  repartir. Reclus dans une cage dorĂ©e, l’ancien monarque devait se contenter de l’écoute clandestine de radios Ă©trangĂšres telles la BBC, Voice of America ou Radio France internationale et s’adonner Ă  la lecture des ouvrages en français et en anglais de la bibliothĂšque du palais royal[433].

Sur le plan extĂ©rieur, tout Ă©tait fait pour que Sihanouk disparaisse de la scĂšne internationale. En aoĂ»t, c’est Khieu SamphĂąn, le nouveau chef de l’État, qui partit reprĂ©senter le Cambodge au sommet des pays non alignĂ©s Ă  Colombo[434]. Le 9 septembre 1976, Ă  l’occasion du dĂ©cĂšs de Mao Zedong, il rĂ©digeait une longue lettre Ă  sa veuve Jiang Qing, mais la missive ne sera jamais transmise Ă  sa destinataire. Il demandait Ă©galement Ă  se rendre Ă  l’ambassade de Chine pour y signer le registre des condolĂ©ances, mais les dirigeants de Phnom Penh ne donnaient pas suite Ă  la requĂȘte[435]. Plus personne n’ayant de nouvelles de l’ancien roi, le MarĂ©chal Tito demanda, par le biais de son ambassadeur au Cambodge, de confirmer qu’il Ă©tait toujours en vie et n’avait pas Ă©tĂ© exĂ©cutĂ© comme le furent la plupart de ses partisans. Une voiture officielle vint chercher le diplomate yougoslave, l’amena devant le palais royal oĂč il put voir le prince dans les jardins et fut aussitĂŽt ramenĂ© Ă  son ambassade sans avoir pu s’arrĂȘter ni lui parler[436].

À la fin de l’annĂ©e 1977, les tĂ©moignages sur la situation intĂ©rieure au Cambodge se multipliaient depuis les camps de rĂ©fugiĂ©s. Dans le mĂȘme temps, des accrochages sporadiques Ă  la frontiĂšre vietnamienne se faisaient plus frĂ©quents et la version officielle d’actions incontrĂŽlĂ©es de cadres locaux devenait de moins en moins crĂ©dible. Tous ces faits altĂ©raient les sympathies dont avaient jusque-lĂ  bĂ©nĂ©ficiĂ© le rĂ©gime khmer rouge, et, d’aprĂšs Sihanouk, ses conditions d’isolement s’amĂ©lioraient imperceptiblement. On lui demandait de rĂ©diger une lettre dans laquelle il louait les grandes rĂ©alisations du rĂ©gime et qui sera amplement diffusĂ©e. Il affirmera plus tard y avoir Ă©tĂ© contraint et craignait en cas de refus des reprĂ©sailles envers les membres de sa famille qui avaient Ă©tĂ© envoyĂ©s dans les coopĂ©ratives en province et dont il Ă©tait sans nouvelles depuis plus d’un an et demi[note 13] - [438].

Incidents à l’est (1978)

Au dĂ©but de 1978, Madame Deng Yingchao, veuve de Zhou Enlai et membre influente du Politburo du Parti communiste chinois, Ă©tait envoyĂ©e Ă  Phnom Penh pour rĂ©affirmer le soutien de la Chine au rĂ©gime de Phnom Penh et mettre en garde le ViĂȘt Nam contre toute vellĂ©itĂ© d’action militaire contre l’alliĂ© de PĂ©kin. Elle demanda Ă©galement Ă  rencontrer Sihanouk, mais les responsables khmers rouges affirmaient que celui-ci Ă©tait occupĂ© par un dĂ©placement en province. En fait, d’aprĂšs le monarque, le « dĂ©placement » en question n’avait durĂ© qu’une demi-journĂ©e et, sur le chemin du retour, devant l’insistance de l’envoyĂ©e chinoise, les dirigeants le firent passer en voiture devant elle sans s’arrĂȘter, mais en apportant la preuve que le prince, sa derniĂšre femme et leurs deux enfants Ă©taient toujours en vie[439].

La mise en garde chinoise, loin de calmer le jeu, allait au contraire amorcer une escalade. En janvier 1978, Harold Brown, le secrĂ©taire d’État Ă  la DĂ©fense amĂ©ricain, se rendait Ă  PĂ©kin pour initier ce qui deviendra de fait une alliance contre l’URSS. Le ViĂȘt Nam, de son cĂŽtĂ©, tentait de parer la menace en se rapprochant de Moscou et adhĂ©rait au Comecon. Zbigniew BrzeziƄski, le conseiller Ă  la dĂ©fense du prĂ©sident Jimmy Carter, sera le premier Ă  Ă©voquer une guerre par procuration qui se prĂ©parait entre les deux puissances communistes[440].

Dans le mĂȘme temps, Ă  l’est du pays, de nombreux Cambodgiens profitaient des incursions vietnamiennes pour fuir de l’autre cĂŽtĂ© de la frontiĂšre. Parmi eux, des Ă©lĂ©ments de l’armĂ©e khmĂšre rouge qui voulaient Ă©chapper aux purges allaient fonder, avec le patronage de HanoĂŻ, le Front uni national pour le salut du KampuchĂ©a (FUNSK) dont les buts avouĂ©s Ă©taient de renverser le rĂ©gime de Pol Pot et de rĂ©tablir un Cambodge tel qu’il Ă©tait « du temps de Sihanouk ». En fait, bien que toujours privĂ© de tout pouvoir, l’aura de l’ancien souverain grossissait au grĂ© des Ă©vĂ©nements. Les dirigeants khmers rouges multipliaient ses voyages en province afin de lui montrer les rĂ©alisations du rĂ©gime, tout en prenant soin de ne pas le laisser se mĂȘler aux populations locales[441].

Dans le courant de l’annĂ©e 1978, le prince fut invitĂ© Ă  quitter « provisoirement » le palais royal pour une villa proche, officiellement pour permettre des travaux de rĂ©novation. En fait, il semble que ce dĂ©mĂ©nagement Ă©tait motivĂ© par l’interception d’un commando vietnamien qui dĂ©sirait enlever Sihanouk et le ramener de l’autre cĂŽtĂ© de la frontiĂšre oĂč il aurait pu apporter son soutien au FUNSK. La nouvelle rĂ©sidence, avec ses Ă©pais murs d’enceinte et sa lourde porte en fer Ă©tait en fait plus facile Ă  garder[442].

Toujours dans le but d’amĂ©liorer l’image du rĂ©gime Ă  l’extĂ©rieur, Sihanouk et sa femme Ă©taient invitĂ©s le 28 septembre Ă  un diner officiel avec la plupart des dirigeants du KampuchĂ©a dĂ©mocratique et auquel Ă©tait Ă©galement conviĂ© Penn Nouth et son Ă©pouse. Les hĂŽtes se montrĂšrent plein d’attentions pour leur ancien souverain, regrettant que de par l’éloignement de leurs coopĂ©ratives, les autres membres de la famille royale n’aient pu se joindre au banquet ; en fait, ils Ă©taient tous dĂ©jĂ  morts depuis plus de deux ans. Un tableau pour le moins optimiste de la situation du pays fut dressĂ© Ă  l’intention des convives et Sihanouk fut priĂ© d’indiquer les provinces qu’il dĂ©sirait visiter pour qu’on lui prĂ©pare ses dĂ©placements. Des photos furent prises et envoyĂ©es Ă  la presse occidentale, afin de faire croire que l’alliance nĂ©e du FUNK Ă©tait toujours d’actualitĂ©[443]. En cette fin d’annĂ©e 1978, l’invasion vietnamienne semblait par contre inĂ©luctable. La Chine de son cĂŽtĂ© rĂ©affirmait son soutien au rĂ©gime de Phnom Penh et Deng Xiaoping entreprenait une tournĂ©e des pays de l’ASEAN afin de se trouver des alliĂ©s pour dĂ©noncer l’expansionnisme vietnamien. La mesure la plus marquante fut certainement l’annonce faite Ă  Bangkok de faire cesser l’aide chinoise Ă  la guĂ©rilla communiste thaĂŻlandaise en Ă©change de l’appui du gouvernement du gĂ©nĂ©ral Kriangsak au rĂ©gime khmer rouge. HanoĂŻ, pour sa part, obtenait une aide militaire et logistique massive de Moscou[444]. Sihanouk, tenu au courant des Ă©vĂšnements qui se prĂ©paraient par l’écoute clandestine des radios Ă©trangĂšres, notait non sans ironie que plus la situation militaire empirait, plus le contenu de son rĂ©frigĂ©rateur s’amĂ©liorait. L’offensive Ă©tait finalement lancĂ©e le 25 dĂ©cembre[445].

Le 1er janvier 1979, alors que les Vietnamiens Ă©taient Ă  Kampong Cham, ordre fut donnĂ© de convoyer Penn Nouth et l’ancien monarque dans l’ouest du pays et de les faire passer en ThaĂŻlande au moindre danger. Le 2, un nouveau commando chargĂ© d’enlever Sihanouk Ă©tait interceptĂ©. Le 3, Khieu SamphĂąn rejoignait le prince et son ancien Premier ministre Ă  Sisophon ; il les informait que la situation s’amĂ©liorait et qu’ils pourraient revenir dans la capitale dĂšs le lendemain, mais pour repartir aussitĂŽt Ă  l’étranger, dĂ©fendre la cause du KampuchĂ©a dĂ©mocratique, Sihanouk Ă  la tribune de l’O.N.U., Penn Nouth dans une tournĂ©e auprĂšs des « pays amis ». L’ancien et futur monarque affirmera par la suite avoir hĂ©sitĂ© sur la conduite Ă  tenir. En acceptant la mission, il allait apporter son soutien Ă  ses bourreaux; en refusant, il avalisait l’occupation du Cambodge par l’ennemi hĂ©rĂ©ditaire vietnamien. Dans le premier cas, il aurait Ă  subir des critiques de la communautĂ© internationale ; dans le second, il devrait essuyer les reproches de ses compatriotes[446].

De retour Ă  Phnom Penh le 5, il fut conviĂ© le jour mĂȘme Ă  un entretien, avec Pol Pot. Celui-ci lui confirmait la mission qu'on dĂ©sirait lui confier et lui dressait un nouveau tableau optimiste de la situation militaire, affirmant notamment que l’avance fulgurante des BĂŽ DĂŽi Ă©tait due Ă  un repli stratĂ©gique destinĂ© ensuite Ă  prendre l'adversaire en tenaille. Enfin, il fut confirmĂ© Ă  Sihanouk qu’il allait partir le lendemain avec son entourage pour PĂ©kin, d’oĂč il pourrait rallier le siĂšge de l'ONU. Le 6 janvier, comme prĂ©vu, l’ancien monarque quittait le Cambodge oĂč il Ă©tait assignĂ© Ă  rĂ©sidence depuis plus de deux ans, pour un nouvel exil d'une dĂ©cennie. Il sera logĂ© provisoirement Ă  la citĂ© des invitĂ©s de marque, l’ancienne lĂ©gation française qui lui avait Ă©tĂ© allouĂ©e Ă©tant en reconstruction Ă  la suite d'un tremblement de terre[447].

Le 7 janvier 1979, les premiers blindĂ©s vietnamiens pĂ©nĂ©traient dans Phnom Penh dĂ©sertĂ©e par ses dĂ©fenseurs. Quatre jours plus tard, le rĂ©gime pro-vietnamien de la RĂ©publique populaire du KampuchĂ©a Ă©tait proclamĂ©, avec Heng Samrin comme prĂ©sident[448]. Le 8, une confĂ©rence de presse Ă©tait organisĂ©e Ă  PĂ©kin devant un parterre de journalistes occidentaux et chinois. Si le but Ă©tait de dĂ©noncer l’invasion vietnamienne, trĂšs vite les questions s’orientaient sur la nature du rĂ©gime khmer rouge dont Sihanouk se retrouvait de facto le reprĂ©sentant et devait rĂ©pondre aux nombreuses questions restĂ©es sans rĂ©ponses depuis trois ans. La rĂ©union prĂ©vue pour durer deux heures, s’éternisera six heures et le prince en sortit trĂšs Ă©prouvĂ©[449]. Le 11 janvier, Sihanouk se rendait Ă  New York oĂč il prononça un discours condamnant l’intervention vietnamienne. Le 13, le rĂ©gime khmer rouge Ă©tait confirmĂ© comme seul reprĂ©sentant valide du Cambodge et le conseil de sĂ©curitĂ© adoptait une rĂ©solution exigeant le retrait immĂ©diat de toute troupe Ă©trangĂšre du sol khmer[450].

Dans le mĂȘme temps, Norodom Sihanouk Ă©chappait Ă  la surveillance de ses gardes du corps et disparaissait. En fait, il avait demandĂ© l’asile politique aux États-Unis et Ă  la France ; les autoritĂ©s amĂ©ricaines refusaient alors que celles de Paris posaient des exigences draconiennes, demandant notamment Ă  l’ancien monarque de s’abstenir de toute activitĂ© politique. Finalement, il dĂ©cidait de rentrer en Chine et d’honorer l’invitation de Deng Xiaoping qui, dĂšs son arrivĂ©e de Phnom Penh, avait offert de l’hĂ©berger sans conditions[451].

La retraite provisoire (7 janvier 1979)

De nos jours encore, il est difficile de dĂ©terminer quel pouvaient ĂȘtre les intentions de Norodom Sihanouk Ă  cet instant. D’aprĂšs Jean-Marie CambacĂ©rĂšs, il pensait qu'Ă  la suite de la rĂ©solution onusienne, l’intervention vietnamienne serait de courte durĂ©e. Croyait-il alors que le retour au pouvoir des partisans de Pol Pot rendus impopulaires par leurs nombreux crimes serait lui aussi Ă©phĂ©mĂšre et qu’alors il aurait sa carte Ă  jouer ? Si tant est que le prince ait pu le supposer, les faits allaient rapidement le dĂ©mentir. Sur place, au moins au dĂ©but, les BĂŽ DĂŽi Ă©taient plutĂŽt accueillis comme des libĂ©rateurs que comme des envahisseurs. De plus, au fur et Ă  mesure que le pays se libĂ©rait du contrĂŽle khmer rouge, la plupart des rumeurs concernant l’ampleur des exactions commises pendant le KampuchĂ©a dĂ©mocratique s’avĂ©raient en dessous de la vĂ©ritĂ©[452]. Dans ce contexte, les gouvernements occidentaux avaient de plus en plus de mal Ă  justifier auprĂšs de leurs opinions le soutien qu’ils accordaient aux responsables de massacres de masse au nom du respect de l’intĂ©gritĂ© territoriale d'un pays que beaucoup auraient eu du mal Ă  situer sur une carte[453].

De son cĂŽtĂ©, depuis sa rĂ©sidence de PĂ©kin, Norodom Sihanouk multipliait les rĂ©ceptions de diplomates et de journalistes Ă©trangers. Lors de ces entrevues, il ne se gĂȘnait pas pour faire part de sa satisfaction de voir le rĂ©gime khmer rouge dĂ©fait, tout en restant fermement opposĂ© au gouvernement de la RĂ©publique populaire du KampuchĂ©a mis en place par les autoritĂ©s de HanoĂŻ[454].

Les dirigeants chinois, peut-ĂȘtre inquiets que l’émergence d’une troisiĂšme force puisse conduire Ă  la mise hors jeu de leurs poulains khmers rouges, tentĂšrent de rĂ©concilier Sihanouk avec ces derniers et de recrĂ©er l’alliance du FUNK avec le prince Ă  sa tĂȘte. Celui-ci refusa et, pour couper court Ă  toute nouvelle tractation, dĂ©cidait de partir Ă  Pyongyang, oĂč il sĂ©journera de mai Ă  septembre[455].

La situation de la rĂ©sistance anti-vietnamienne Ă©volua quelque peu Ă  la fin de 1979. C’est d’abord en aoĂ»t Kong Sileah, un ancien capitaine de la marine de la RĂ©publique khmĂšre qui crĂ©ait le Mouvement pour la libĂ©ration nationale du KampuchĂ©a (MOLINAKA), un rassemblement de combattants qui se dĂ©claraient sihanoukistes et demandaient l’aide de l’ancien monarque qui, de par sa position en retrait ne pouvait compter sur le soutien d’aucune grande puissance[456]. Les responsables khmers rouges quant Ă  eux, sur l’insistance de leurs protecteurs chinois, rĂ©organisaient leur mouvement pour le rendre plus prĂ©sentable. En septembre, Khieu SamphĂąn, qu’on tenta de prĂ©senter comme un modĂ©rĂ©, prenait la tĂȘte d'un nouvel organisme tenant lieu de gouvernement en exil, le Front de la grande union nationale dĂ©mocratique patriotique du KampuchĂ©a (FGUNDPK) ; Pol Pot se contentait pour sa part du rĂŽle plus discret de commandant des forces armĂ©es et ne faisait plus aucune apparition publique Ă  partir de 1980[457].

En octobre, c’était au tour de Son Sann, un ancien Premier ministre du Sangkum, de fonder le Front national de libĂ©ration du peuple khmer (FLNPK), une autre force de rĂ©sistance contre la RĂ©publique populaire du KampuchĂ©a, par contre ouvertement anti-communiste, ce qui lui valut le soutien rapide des États-Unis et d’anciens rĂ©publicains khmers rĂ©fugiĂ©s Ă  l'Ă©tranger[458].

La Chine et les diffĂ©rents pays de l’ASEAN, inquiets de voir la rĂ©sistance qu’ils soutenaient se diviser, reprirent contact avec Sihanouk afin de le persuader de prendre la tĂȘte d’une coalition de ces diverses composantes. Il a Ă©galement Ă©tĂ© affirmĂ© que les États-Unis auraient eux-mĂȘmes appuyĂ© en sous-main l’initiative[459]. Deng Xiaoping fit toutefois remarquer au prince qu’une telle alliance ne pouvait se faire sans les reprĂ©sentants du KampuchĂ©a dĂ©mocratique, seule instance reconnue par les Nations unies. Finalement, Sihanouk se laissa convaincre et accepta le principe de tractations avec les reprĂ©sentants khmers rouges[460].

Toutefois, il y avait encore loin de la coupe aux lĂšvres. Les discussions s’éternisaient entre des parties qui n’avaient aucune affinitĂ© mais devaient faire mine de coopĂ©rer pour ne pas froisser leurs commanditaires. Ce poker menteur oĂč chacun espĂ©rait un faux pas de l’autre qui aurait donnĂ© une occasion de rompre les nĂ©gociations se poursuivit pendant toute l’annĂ©e 1980[461]. AprĂšs plusieurs demandes chinoises, Sihanouk se rĂ©solvait Ă  rencontrer Khieu SamphĂąn Ă  Pyongyang le 8 fĂ©vrier 1981 en vue de discuter des modalitĂ©s d’un ralliement. Mais en mars, au lieu d’affirmer sa volontĂ© d’entrer dans une coalition, le prince crĂ©ait sa propre formation, le Front uni national pour un Cambodge indĂ©pendant, neutre, pacifique et coopĂ©ratif (FUNCINPEC)[462].

Le 3 aoĂ»t 1981, alors qu’il passait l’étĂ© en France, il reçut la visite de Son Sann dans sa villa de Mougins. Ils y discutĂšrent des modalitĂ©s d’une alliance entre leurs deux formations. Peu aprĂšs, le 4 septembre, ils se retrouvaient Ă  Singapour avec Khieu SamphĂąn et agrĂ©Ăšrent la crĂ©ation d’un gouvernement de coalition contre le rĂ©gime mis en place Ă  Phnom Penh[463].

Les tractations (1982-1986)

D’ñpres nĂ©gociations s’engageaient alors, concernant les postes Ă  pourvoir et la politique Ă  mener. Sihanouk et Sonn San se laissĂšrent convaincre d'adoucir leurs positions par une promesse chinoise d’aide militaire Ă  leurs deux formations ; Khieu SamphĂąn acceptait de son cĂŽtĂ© le principe du multipartisme pour le Cambodge d’aprĂšs-guerre mais refusait celui de dĂ©sarmer l’armĂ©e khmĂšre rouge une fois la victoire acquise[464]. Finalement, le Gouvernement de Coalition du KampuchĂ©a dĂ©mocratique (en) (GCKD) voyait officiellement le jour le 22 juin 1982, lors de la rĂ©union des trois composantes de la rĂ©sistance Ă  Kuala Lumpur. Norodom Sihanouk en Ă©tait le chef de l’État, Sonn San le Premier ministre et Khieu SamphĂąn le vice-Premier ministre chargĂ© des affaires Ă©trangĂšres[465]. En fait, sur le terrain, les forces des anciens dirigeants du KampuchĂ©a dĂ©mocratique restaient les mieux armĂ©es et les mieux prĂ©parĂ©es alors que l’importance des deux autres factions Ă©tait surĂ©valuĂ©e et servait surtout de caution Ă  ceux qui condamnaient l’intervention vietnamienne mais ne voulaient pas apparaĂźtre comme des soutiens Ă  Pol Pot[466].

Le prince Norodom Sihanouk et son fils, le prince Ranariddh, en visite dans un camp de l'armée nationale sihanoukiste.

Les annĂ©es qui suivront seront marquĂ©es par des batailles diplomatiques entre Sihanouk et le jeune ministre des Affaires Ă©trangĂšres de la rĂ©publique populaire du KampuchĂ©a, un certain Hun Sen, en vue de rallier des gouvernements Ă©trangers Ă  leurs causes et d’obtenir leur soutien auprĂšs de l’ONU[467]. À cette Ă©poque, dans une interview qu’il accorda Ă  William Shawcross, Sihanouk tenta de justifier son alliance avec ses anciens bourreaux, qui, « en dĂ©pit de ses violations des droits humains, est le seul gouvernement authentique du Cambodge. Il est nĂ© de la rĂ©sistance populaire aux États-Unis et Ă  Lon Nol. Si je luttais contre lui, je serai un traĂźtre. (
) Pour l’avenir, nous verrons. Si nous ne trouvons pas rapidement une solution, les Vietnamiens s’installeront pour toujours au Cambodge »[468].

En 1985, alors que sur le terrain aucun des deux camps n’était en mesure de l’emporter sur l’autre, plusieurs Ă©vĂ©nements allaient se rĂ©vĂ©ler des signes, alors imperceptibles mais avant-coureurs, favorables Ă  un compromis. Le plus important sera l’accession au pouvoir Ă  Moscou de MikhaĂŻl Gorbatchev qui devant l’état de l’économie soviĂ©tique, se verra contraint de rĂ©duire l’aide accordĂ©e aux pays Ă©trangers et par ricochet, celle du ViĂȘt Nam Ă  Phnom Penh[469]. Au mĂȘme moment, la nomination de Hun Sen au poste de Premier ministre semblait dĂ©couler d’un changement d’attitude Ă  HanoĂŻ qui dĂ©cidait de promouvoir une nouvelle gĂ©nĂ©ration de dirigeants qui leur seraient moins soumis mais plus Ă  mĂȘme de gouverner seul le pays tout en s’opposant Ă  un retour du rĂ©gime khmer rouge aux affaires et sans contribuer Ă  crĂ©er des troubles au sud du ViĂȘt Nam[470]. Du cĂŽtĂ© khmer rouge, Pol Pot dĂ©missionnait de son poste de chef des armĂ©es au profit de Son Sen. Ce changement Ă©tait prĂ©sentĂ© comme une volontĂ© de se conformer Ă  une des conditions posĂ©e par le pouvoir de Phnom Penh pour ouvrir des pourparlers. Toutefois, peu d’observateurs seront dupes du stratagĂšme ; en fait il semble que ce changement Ă©tait surtout dictĂ© par les problĂšmes de santĂ© de l’ancien Premier ministre du KampuchĂ©a dĂ©mocratique qui se fera hospitaliser pendant un an Ă  PĂ©kin[471]. En mars 1986, les pays de l’ASEAN Ă©voquaient quant Ă  eux pour la premiĂšre fois leur volontĂ© d’inclure la rĂ©publique populaire du KampuchĂ©a dans des pourparlers[472].

Les accords en vue (1987-1991)

Pendant ce temps, Sihanouk recevait Ă©galement une aide financiĂšre et militaire limitĂ©e des États-Unis, dans le cadre de la doctrine Reagan, consistant Ă  contrer les influences des pays prosoviĂ©tiques Ă  l’étranger. Michael Johns, un des principaux dĂ©fenseurs de cette doctrine, visita les forces sihanoukistes Ă  la frontiĂšre thaĂŻe en 1987 et, de retour Ă  Washington, demandait d’accroitre l’aide aux partisans de Sihanouk et de Son Sann[473].

 le prince, en costume bleu, serre les mains du président américain, à gauche et en costume noir
Norodom Sihanouk reçu par Ronald Reagan à la Maison-Blanche en 1988.

Le 7 mai 1987, afin de reprendre une certaine libertĂ© vis-Ă -vis des autres composantes de la rĂ©sistance, Sihanouk dĂ©missionnait de ses fonctions au sein du GCKD. En aoĂ»t, le gouvernement de Phnom Penh proposait d’inclure les membres de la rĂ©sistance « Ă  l’exception de la faction khmĂšre rouge » dans un gouvernement d’union nationale. La voie vers des nĂ©gociations Ă©tait ouverte et le 3 dĂ©cembre, une rencontre entre Hun Sen et l’ancien monarque eu lieu en France, Ă  FĂšre-en-Tardenois, puis une seconde Ă  Saint-Germain-en-Laye les 20 et 21 janvier 1988. Si ces entrevues ne dĂ©bouchĂšrent sur aucun rĂ©sultat probant, elles permirent nĂ©anmoins aux deux protagonistes de se rencontrer et d’échanger leurs points de vue. Peu aprĂšs, de nouvelles conversations Ă©taient organisĂ©es Ă  l’initiative des pays de l’Association des nations de l'Asie du Sud-Est ; il s’agira des Jakarta Informal Meetings (« RĂ©unions informelles de Jakarta ») (JIM) qui eurent lieu prĂšs de la capitale indonĂ©sienne[note 14] en juillet 1988 et fĂ©vrier 1989 et qui rĂ©unirent des reprĂ©sentants des autoritĂ©s de Phnom Penh et des trois mouvements de rĂ©sistance. Si lĂ  aussi, les conversations ne dĂ©bouchĂšrent sur aucun accord, elles dĂ©montrĂšrent qu’une solution nĂ©gociĂ©e Ă©tait possible[475].

En juin 1989, Ali Alatas (en), le ministre indonĂ©sien des affaires Ă©trangĂšres indonĂ©sien est reçu Ă  Paris par son homologue français, Roland Dumas. La question cambodgienne fut naturellement Ă©voquĂ©e durant les entretiens et les deux interlocuteurs convenaient de coordonner leurs actions respectives et d’organiser conjointement une confĂ©rence de paix qu’ils espĂ©raient tenir Ă  Paris le 30 juillet[476]. Une entrevue prĂ©paratoire se tenait Ă  la Celle-Saint-Cloud le 24 juillet entre Hun Sen et Sihanouk, mais elle se solda par un Ă©chec. Le Premier ministre de la rĂ©publique populaire du KampuchĂ©a reprochait Ă  l’ancien monarque de s'abriter derriĂšre le gouvernement de coalition pour revenir sur ses engagements alors que ce dernier, dans le style imagĂ© qui le caractĂ©risait, dĂ©clarait aux journalistes qu’ils ne s’étaient entendus sur rien, « sauf sur la qualitĂ© de la cuisine sino-cambodgienne ». Le lendemain, les deux autres formations cambodgiennes se joignaient aux discussions mais ne permettaient pas de rĂ©gler les diffĂ©rends apparus la veille[477]. La confĂ©rence se tenait nĂ©anmoins comme prĂ©vu une semaine plus tard avec les reprĂ©sentants de 19 pays et organisations[note 15] dont James Baker, Edouard Chevardnadze, Geoffrey Howe, Qian Qichen ou Javier PĂ©rez de CuĂ©llar. Comme les discussions prĂ©liminaires l’avaient laissĂ© prĂ©sager, aucun accord ne fut trouvĂ©, mais la voie d’un rĂšglement Ă©tait plus que jamais tracĂ©e[478].

Afin de faciliter les nĂ©gociations de paix, le ViĂȘt Nam annonçait, le 26 mai 1988, que toutes ses forces auront quittĂ© le Cambodge en mars 1990. En aoĂ»t de la mĂȘme annĂ©e, la Chine approuvait un plan de Sihanouk qui proposait d'installer au Cambodge, aprĂšs le cessez-le-feu, une force internationale ; PĂ©kin acceptait de ne plus soutenir la rĂ©sistance cambodgienne en Ă©change d'un calendrier de retrait prĂ©cis. Le ViĂȘt Nam concĂ©dait en contrepartie de se retirer dĂšs septembre 1989 : le 5 avril 1989, le retrait unilatĂ©ral et sans conditions de l'armĂ©e vietnamienne Ă©tait confirmĂ©[note 16]. La RĂ©publique populaire du KampuchĂ©a, dont la lĂ©gitimitĂ© en tant qu'interlocuteur avait Ă©tĂ© reconnue par toutes les parties en prĂ©sence, procĂ©dait Ă  la fin du mois d'avril Ă  une rĂ©vision constitutionnelle dans le but de sĂ©duire les sihanoukistes : le rĂ©gime adoptait pour le pays le nouveau nom officiel d'État du Cambodge, modifiait son drapeau et son hymne national, et se proclamait « neutre, pacifique et non alignĂ© ». Le bouddhisme theravāda Ă©tait dĂ©clarĂ© religion nationale et la constitution incluait des garanties quant Ă  la propriĂ©tĂ© privĂ©e et aux droits de l'homme[480].

Peu aprĂšs, en novembre, la chute du mur de Berlin marquait aussi la fin du communisme Ă  la soviĂ©tique et de l’aide au ViĂȘt Nam. Le camp occidental se trouvait paradoxalement privĂ© de sa raison principale de soutenir la guĂ©rilla et la Chine avait moins d’intĂ©rĂȘt Ă  aider des alliĂ©s khmers rouges encombrants et difficiles Ă  gĂ©rer[481].

Sur le terrain, les accrochages entre les diffĂ©rentes factions se multipliaient ; chacun tentait de renforcer sa position avant des accords qui n’avaient jamais semblĂ© aussi proches[482]. Il faudra attendre prĂšs d’une annĂ©e pour qu’à l’occasion d’un troisiĂšme JIM, les 9 et 10 septembre 1990, soit Ă©laborĂ© le projet d’un Conseil National SuprĂȘme (CNS) qui deviendrait le reprĂ©sentant officiel du Cambodge Ă  l’international ; il Ă©tait composĂ© de 2 membres de chaque faction de la rĂ©sistance et de 6 reprĂ©sentant du gouvernement de Phnom Penh. Le projet est approuvĂ© le 26 novembre 1990 par les cinq membres permanents du Conseil de sĂ©curitĂ©[483]. Les quatre parties se retrouvaient les 24 et 25 juin 1991 Ă  Pattaya en ThaĂŻlande et acceptaient la mise sous tutelle internationale du Cambodge jusqu’à la tenue d’élections organisĂ©es sous l’égide d’une autoritĂ© provisoire des Nations unies qui sera l’APRONUC[484]. Le 17 juillet 1991, Ă  PĂ©kin, l’ensemble des factions se mettaient d’accord pour choisir Sihanouk comme prĂ©sident du CNS[485].

Une réconciliation toujours difficile (1991-1992)

Une nouvelle rĂ©union eut lieu Ă  New York en septembre en prĂ©sence des membres permanents du Conseil de sĂ©curitĂ© des Nations unies pour rĂ©gler les derniers dĂ©tails et il fut convenu de se retrouver Ă  Paris le 23 octobre pour la signature des accords[486]. Les 17 et 18 octobre, au cours d’un congrĂšs extraordinaire, le Parti rĂ©volutionnaire du peuple du KampuchĂ©a, la formation du pouvoir de Phnom Penh, opĂ©rait les changements nĂ©cessaires pour participer Ă  des Ă©lections ; il abandonnait toute rĂ©fĂ©rence au marxisme-lĂ©ninisme, adoptait le multipartisme et l’économie de marchĂ©. Enfin, il prenait le nom de Pracheachon, traduit en français par Parti du peuple cambodgien qu’utilisait dĂ©jĂ  la vitrine officielle du parti communiste du KampuchĂ©a dans les annĂ©es 1950 et 1960[487].

Les quatre factions se rĂ©unissaient finalement Ă  Paris comme prĂ©vu du 21 au 23 octobre, au centre de confĂ©rences de l’avenue KlĂ©ber avec les reprĂ©sentants des pays et organisations dĂ©jĂ  prĂ©sents le 30 juillet 1989. Les accords de Paris sur le Cambodge signĂ©s comportaient quatre textes et une annexe et Ă©taient censĂ©s mettre un terme Ă  prĂšs de vingt ans de crise au Cambodge[488].

Le 14 novembre 1991, Sihanouk put enfin rentrer au Cambodge. La rĂ©ception triomphale qui l’attendait avait peu Ă  voir avec son dĂ©part de 1979 dans le dernier avion chinois quittant Phnom Penh en catimini. Une foule immense s’était amassĂ©e le long du trajet entre l’aĂ©roport et le palais royal fraĂźchement rĂ©novĂ©. L’accueil n’était pas sans rappeler les heures de gloire du Sangkum et il ne faisait de doute pour beaucoup que ce retour signifiait Ă©galement celui de cette pĂ©riode qui Ă  cause des Ă©preuves subies depuis, avait Ă©tĂ© idĂ©alisĂ©e[489].

 La photo en noir et blanc a été prise en intérieur; Norodom Sihanouk à droite semble donner des explications à son interlocuteur.
Norodom Sihanouk avec le français Edouard Wattez (en) directeur du bureau des Nations unies à Phnom Penh.

Au Cambodge, l’application des accords de Paris dĂ©butait. Une mission prĂ©paratoire des Nations unies (la MIPRENUC) avait Ă©tĂ© crĂ©Ă©e dĂšs le 16 octobre pour faciliter la mise en place de l’APRONUC, qui ne verra le jour que le 28 fĂ©vrier 1992 et dont le dĂ©ploiement dĂ©butera le 15 mars avec les arrivĂ©es dans la capitale du Japonais Yasushi Akashi, reprĂ©sentant spĂ©cial du secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral des Nations unies, du lieutenant-gĂ©nĂ©ral australien John Sanderson, commandant en chef des forces armĂ©es et du premier contingent[490].

TrĂšs vite, des dissensions apparaissaient entre les factions qui avaient chacune leur interprĂ©tation de textes restĂ©s volontairement vagues pour arriver Ă  un consensus. Le FLNPK (Son Sann) et le FUNCINPEC (Norodom Ranariddh) attendaient ainsi que soit limitĂ©e l’influence du PPC (Hun Sen) et des partisans de Khieu SamphĂąn qui Ă©taient de fait les deux principales forces sur place ; le parti de Hun Sen espĂ©rait pour sa part la dissolution de l’armĂ©e khmĂšre rouge alors que cette derniĂšre comptait bien assister au dĂ©mantĂšlement de l’administration hĂ©ritĂ©e de la rĂ©publique populaire du KampuchĂ©a[491]. Les Nations unies, de leur cĂŽtĂ©, et vue les sommes engagĂ©es, ne pouvaient se permettre un Ă©chec[492] ; trĂšs vite ses responsables se contentĂšrent de minimiser la portĂ©e des embĂ»ches auxquelles Ă©tait confrontĂ© leur personnel sur le terrain[493].

Le manquement le plus grave sera provoquĂ© par le camp khmer rouge qui dĂšs le dĂ©part refusera, au besoin par les armes, l’accĂšs des zones sous son contrĂŽle Ă  la MIPRENUC puis Ă  l’APRONUC[494].

Au milieu de tout cela, Norodom Sihanouk, en tant que prĂ©sident du CNS, se devait de gĂ©rer les situations inextricables issues de ces ambiguĂŻtĂ©s, mais Ă  partir de septembre 1992, il fit des sĂ©jours de plus en plus frĂ©quents Ă  PĂ©kin, officiellement pour y suivre un traitement mĂ©dical[495]. Afin de ne pas compromettre la mission onusienne, Yasushi Akashi, le responsable de l'autoritĂ© des Nations unies, organisait, avec l’accord du prince, des sessions de travail Ă  Phnom Penh auxquelles participaient les quatre factions cambodgiennes, mais il n’avait pas le charisme de l’ancien monarque pour faire valider les dĂ©cisions qui s’imposaient[496].

Le 20 décembre 1992, afin de satisfaire à la volonté de Norodom Sihanouk de se présenter « au-dessus des partis », le CNS acceptait d'accueillir un treiziÚme membre, à savoir Sam Rainsy comme représentant supplémentaire du FUNCINPEC[497].

Le long chemin vers la constitution (1993)

Le 4 janvier 1993, invoquant la recrudescence des actes de violence contre les bureaux et le personnel de partis politiques, essentiellement le FUNCINPEC (royalistes) et le FLNPK (Son Sann), et qui Ă©tait principalement l'Ɠuvre de membres des administrations locales proches du Parti du peuple cambodgien, le prince annonçait au reprĂ©sentant spĂ©cial qu’il ne pouvait plus coopĂ©rer avec l’APRONUC et le gouvernement du Cambodge[498]. Yasushi Akashi prenait alors des mesures afin de renforcer le pouvoir des troupes internationales dans la lutte contre les crimes aussi bien politiques qu'ethniques et les prĂ©sentait Ă  l'ancien monarque. Sihanouk s’était Ă©galement ravisĂ© et profita d’une rĂ©union du CNS, le 28 janvier Ă  PĂ©kin pour exprimer publiquement son soutien Ă  l’APRONUC et au respect des accords de Paris. Lors de cette rĂ©union, le prince publia en son nom et en celui des membres du conseil appartenant au FUNCINPEC, au FLNPK de Son Sann et au Parti du peuple cambodgien, un communiquĂ© condamnant la violence contre les Cambodgiens et les personnes Ă©trangĂšres[499].

En mars 1993, alors que la situation s’était Ă  nouveau enlisĂ©e et que l'APRONUC ne semblait pas en mesure de rĂ©gler la crise, l’ancien (et futur) monarque dĂ©cida de convoquer une confĂ©rence des quatre parties cambodgiennes en vue de former un « gouvernement provisoire de rĂ©conciliation nationale ». Devant le manque d’enthousiasme de « certaines puissances occidentales et certains groupes khmers », il renoncera (pour un temps) Ă  aller plus avant dans cette dĂ©marche[500].

De son cĂŽtĂ©, le Parti du KampuchĂ©a dĂ©mocratique (PKD), nom qu’avait pris la formation khmĂšre rouge, aprĂšs une sĂ©rie de manƓuvres dilatoires, annonçait officiellement au CNS le 4 avril 1993 sa dĂ©cision de ne pas participer aux Ă©lections qui devaient se tenir en mai. Le 13 du mĂȘme mois, Khieu SamphĂąn Ă©crira au prince Sihanouk que son parti ne participerait plus Ă©galement aux rĂ©unions du CNS Ă  Phnom Penh et quittait temporairement la ville[501].

Durant sa visite au Cambodge, Boutros Boutros-Ghali lança le 7 avril, un appel urgent pour que cesse la violence, notamment contre les forces internationales[502]. Norodom Sihanouk, de son cĂŽtĂ©, recevait le secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral des Nations unies en audience et lui confirmait son intention de continuer Ă  diriger le CNS jusqu’à la mise en place d’une nouvelle constitution et qu’il souhaitait coopĂ©rer avec l’APRONUC « avant, pendant et aprĂšs les Ă©lections ». Il proposait Ă©galement de mettre Ă  la disposition de Boutros Boutros-Ghali le palais royal pour une confĂ©rence de presse[503]. Enfin il lança une proclamation dans laquelle il exhortait ses compatriotes Ă  refrĂ©ner leurs actes de violence Ă  l’encontre du personnel onusien. Sa dĂ©claration fut approuvĂ©e par le gouvernement de Phnom Penh, le FLNK et le FUNCINPEC (royalistes) alors que le PKD, principale formation visĂ©e par les accusations, restait silencieux[504].

La campagne Ă©lectorale dĂ©butait peu aprĂšs le dĂ©part de Boutros Boutros-Ghali. Rapidement deux partis se dĂ©tachaient, Ă  savoir le FUNCINPEC (Norodom Ranariddh) qui bĂ©nĂ©ficiait de l’aura de Sihanouk mais souffrait du manque d’implantation de ses cadres sur le terrain et le PPC (Hun Sen) qui au contraire pouvait compter sur l’appui des administrations locales acquises Ă  sa cause, mais qui avait du mal Ă  faire oublier qu’il avait Ă©tĂ© mis au pouvoir par l’armĂ©e vietnamienne[505].

Aux Ă©lections de mai, et ce en dĂ©pit des menaces khmĂšres rouges de perturber le scrutin, plus de 4 millions de Cambodgiens, soit environ 90 % des personnes susceptibles de voter, se rendaient aux urnes pour choisir parmi les vingt partis en lice[note 17] - [507]. Le FUNCINPEC du Prince Norodom Ranariddh, profitant notamment du souvenir qu’avait laissĂ© la pĂ©riode oĂč Sihanouk dirigeait les destinĂ©es du pays, arrivait en tĂȘte devant le Parti du peuple cambodgien du Premier ministre sortant Hun Sen ; le Parti libĂ©ral dĂ©mocratique bouddhiste de Son Sann se trouvait pour sa part largement distancĂ©[508].

SitĂŽt connu les rĂ©sultats, Norodom Ranariddh fait part, depuis la ThaĂŻlande, de son intention, en tant que chef du parti arrivĂ© en tĂȘte, de former lui-mĂȘme un gouvernement et de dĂ©finir l’orientation de la constitution qui restait Ă  Ă©crire[509]. Peu aprĂšs, au dĂ©but du mois de juin, des fonctionnaires de l’État du Cambodge, emmenĂ©s par le prince Chakrapong (en), dĂ©clarĂšrent la sĂ©cession des six provinces orientales de Kampong Cham, Prey Veng, Mondol Kiri, Rotanah Kiri, Stoeng Treng et Svay Rieng oĂč le PPC Ă©tait arrivĂ© en tĂȘte[510]. La tension s’accroissait dans ces provinces et se caractĂ©risait par des attaques contre le personnel et les propriĂ©tĂ©s de l’APRONUC[511].

Avec cette nouvelle crise, Norodom Sihanouk paraissait plus que jamais le seul Ă  mĂȘme de faire entendre raison aux protagonistes[512]. Le 15 juin, il suggĂ©rait de donner une place d’égale importance au FUNCINPEC de Norodom Ranariddh, vainqueur des Ă©lections et au PPC (Hun Sen) qui contrĂŽlait toujours l’administration dans presque tout le pays ; il proposait Ă©galement la formation d’un gouvernement national provisoire cambodgien (GNPC) coprĂ©sidĂ© par le prince Ranariddh et Hun Sen[513]. Un temps rĂ©ticentes devant une solution qui dĂ©rogeait aux principes de la dĂ©mocratie Ă  l’occidentale, mais n’ayant aucune alternative viable Ă  offrir, les instances internationales finissaient par soutenir les propositions du prince[514].

L’assemblĂ©e constituante avait pour sa part commencĂ© ses travaux le 14 juin 1993. Lors de la session inaugurale, une rĂ©solution fut adoptĂ©e qui replaçait le prince Sihanouk comme chef de l’État, rĂ©troactivement Ă  1970, rendant sa dĂ©position du 18 mars 1970 nulle et non avenue[note 18] - [517].

Une des premiĂšres questions concernant la constitution Ă  Ă©crire Ă©tait la place qu’occuperait Sihanouk dans le nouveau Cambodge. Serait-il un chef d’État aux pouvoirs Ă©tendus comme un prĂ©sident de la Ve rĂ©publique française ou un monarque constitutionnel comme Élisabeth II au Royaume-Uni ou Rama IX en ThaĂŻlande ? TrĂšs vite, les dĂ©putĂ©s, peu dĂ©sireux de voir leur rĂŽle limitĂ© Ă  de la figuration, optaient pour la seconde solution, oĂč le roi « rĂšgne mais ne gouverne pas »[518]. Le 21 septembre 1993, le parlement adoptait la nouvelle constitution par 113 voix pour, 5 contre et 2 abstentions. Elle Ă©tait le fruit d’un compromis entre les deux partis dominants et Ă©tablissait une dĂ©mocratie libĂ©rale Ă  partis multiples[519].

La constitution fut officiellement promulguĂ©e le 24 septembre 1993 et, le jour mĂȘme, le conseil du TrĂŽne Ă©lisait sans surprise le prince Sihanouk roi du Cambodge, prĂšs de 40 ans aprĂšs son abdication de 1955[520].

Les dĂ©buts d’un monarque constitutionnel (1993-1995)

En conformitĂ© avec les accords de Paris et cette nouvelle constitution, l’assemblĂ©e constituante devint lĂ©gislative. Le nouveau roi nomma son fils, le prince Norodom Ranariddh, chef du FUNCINPEC (royalistes), premier Premier ministre du nouveau gouvernement et Hun Sen, dirigeant du PPC, second Premier ministre[521].

Le nouveau royaume du Cambodge, dĂšs sa crĂ©ation avait Ă  relever de nombreux dĂ©fis. Le premier d’entre eux concernait la cohabitation entre les deux partis au pouvoir qui se dĂ©testaient. La formule retenue, Ă  l’initiative de Sihanouk, avait Ă©tĂ© de doubler l’ensemble des postes en mettant deux personnes Ă  la tĂȘte de chaque ministĂšre majeurs et un vice-ministre d’obĂ©dience opposĂ©e Ă  celle du ministre dans les autres. Si cette solution permettait aux deux formations au pouvoir de coopĂ©rer, la recherche du consensus Ă  laquelle elle les obligeait allait mener Ă  des situations de blocage en cas de dĂ©saccord. Toutefois, qu’il l’ait sciemment recherchĂ© au dĂ©part ou pas, le roi allait pouvoir montrer dans ces crises, au moins au dĂ©but de ce nouveau rĂšgne, son talent de mĂ©diateur[522].

Le second problĂšme Ă  rĂ©gler fut la question khmĂšre rouge. Les partisans de Khieu SamphĂąn refusaient toujours l’accĂšs des zones qu’ils contrĂŽlaient Ă  l’armĂ©e du nouveau gouvernement bicĂ©phale. Alors que Sihanouk multipliait les efforts pour garder le contact avec eux et tentait de les persuader de rejoindre une coalition pour diriger le pays, les partis des deux premiers ministres, d’accord pour ne pas partager leur autoritĂ© avec un adversaire qui de toute façon en perdant le soutien de son mentor chinois semblait s'ĂȘtre privĂ© d’une grande part de son pouvoir de nuisance, le dĂ©claraient hors la loi le 6 juillet 1994[523] et demandaient, le 21 juin 1997, l’aide des Nations unies pour mettre en place un tribunal chargĂ© de juger ses plus hauts responsables[524]. Toutefois, les deux dĂ©crets officialisant ces dĂ©cisions ne seront pas signĂ©s par Sihanouk, mais par Chea Sim, le prĂ©sident de l’AssemblĂ©e nationale, en tant que chef de l’État par intĂ©rim, en l’absence du roi, retenu Ă  PĂ©kin « pour raisons de santĂ© »[525].

Une autre crise que Sihanouk avait Ă  quelque part contribuĂ© un temps Ă  alimenter et Ă  laquelle il allait tenter de mettre un terme concernait le conflit qui opposait le Thammayut au Mohanikay, soit les deux principaux ordres monastiques du Cambodge. Le diffĂ©rend datait du renversement du rĂ©gime khmer rouge, quand les pagodes furent rouvertes. Les survivants Thammayut, proches de la famille royale, Ă©taient alors pour la plupart rĂ©fugiĂ©s Ă  l’étranger et leur exil allait encore durer une dĂ©cennie. La renaissance des Sangha (communautĂ©s bouddhistes) allait de ce fait ĂȘtre l’Ɠuvre quasi exclusive de dignitaires Mohanikay dont la congrĂ©gation avait toujours Ă©tĂ© largement majoritaire et qui allaient mĂȘme investir des pagodes anciennement tenues par des moines Thammayut. De plus, en septembre 1981, un responsable Mohanikay proche du pouvoir, le vĂ©nĂ©rable Tep Vong (en), fut Ă©lu Ă  la tĂȘte d’une communautĂ© « unifiĂ©e » oĂč la division entre les deux ordres avait Ă©tĂ© officiellement abolie[note 19]. La situation restera figĂ©e jusqu’au retour de Sihanouk en 1991. Peu avant, le monarque avait tenu Ă  ressusciter la congrĂ©gation Thammayut et avait officiellement nommĂ© Ă  sa tĂȘte le vĂ©nĂ©rable Bour Kry qui l’accompagnait Ă  son arrivĂ©e Ă  Phnom Penh et qui durant son exil avait dĂ©veloppĂ© les communautĂ©s bouddhistes au sein de la diaspora cambodgienne en France[527]. Bour Kry demandait Ă  reprendre possession de la pagode Wat Botum, siĂšge de l’ordre Thammayut jusqu’à la mise en place du KampuchĂ©a dĂ©mocratique, mais occupĂ© depuis 1979 par la hiĂ©rarchie Mohanikay. D’ñpres nĂ©gociations s’engageaient alors et dĂ©bouchĂšrent sur un compromis : une partie du terrain de la pagode fut cĂ©dĂ©e Ă  Bour Kry pour qu’il puisse y construire un bĂątiment Ă  cĂŽtĂ© de l’existant dont Tep Vong gardait la jouissance[528].

Ne pouvant jouer le rĂŽle politique qu'il avait espĂ©rĂ© tenir[note 20], Norodom Sihanouk consacrait une partie importante de son temps Ă  restaurer le prestige de la royautĂ© dont on lui demandait d’ĂȘtre le dĂ©positaire. Il allait ainsi remettre au goĂ»t du jour certaines festivitĂ©s supprimĂ©es depuis 1970, telles Chrat Preah Nongkal (« fĂȘte du sillon sacrĂ© ») et commander des copies de symboles de la royautĂ© qui avaient disparu, comme l’épĂ©e sacrĂ©e que se transmettaient les monarques khmers depuis des temps immĂ©moriaux[529]. Une de ses premiĂšres tĂąches, une fois Ă  Phnom Penh fut de rĂ©tablir l’ordre des bakous. Ces vĂ©ritables prĂȘtres du palais, qui se transmettaient leurs charges de pĂšre en fils, participaient Ă  la plupart des cĂ©rĂ©monies mais avaient Ă©tĂ© rendus Ă  la vie civile par Lon Nol. Paradoxalement, cela leur sauva probablement la vie lorsque les troupes khmĂšres rouges investirent Phnom Penh en 1975 et envoyĂšrent Ă  la mort la plupart des occupants du Palais royal. Des recherches avaient Ă©tĂ© menĂ©es et quelques-uns de ces derniers bakous avaient Ă©tĂ© retrouvĂ©s ce qui avait permis par la suite d’identifier leurs descendants et ceux de certains de leurs collĂšgues, puis de pouvoir restaurer l’ordre dĂšs la fin de 1993[530].

Une autre tĂąche Ă  laquelle s’attela le monarque fut de faciliter la rĂ©installation de l’École française d'ExtrĂȘme-Orient qui avait dĂ» quitter le pays au dĂ©but de 1975. MĂȘme si de premiers contacts eurent lieu dĂšs 1983 avec les autoritĂ©s de la rĂ©publique populaire du KampuchĂ©a et que des chercheurs s’étaient rendus au Cambodge, il faudra attendre la restauration de la monarchie pour que l’école revienne officiellement au Cambodge. Afin de montrer son attachement Ă  ce retour, le monarque fit hĂ©berger l’école dans l’enceinte du Palais royal[531]. Il tenta Ă©galement de l’assister dans les deux missions qui lui avaient Ă©tĂ© confiĂ©es. En effet, outre la restauration de certains temples d’Angkor, dont le rĂ©sultat le plus notable sera celle du BaphĂ»on, l’école s’était vue attribuĂ©e la recherche des textes sacrĂ©s qui avaient pu Ă©chapper aux tourmentes des derniĂšres dĂ©cennies. La plupart, Ă©crits sur des feuilles de latanier reliĂ©es entre elles par des cordelettes, avaient Ă©galement souffert de l'Ă©preuve du temps et durent ĂȘtre restaurĂ©s avant d’ĂȘtre conservĂ©s dans une salle spĂ©cialement amĂ©nagĂ©e du Wat Saravan alors que des copies sur microfilms sont Ă©galement conservĂ©es au Wat Ounalom[532].

Une autre mission pour laquelle Sihanouk montra de l’intĂ©rĂȘt fut la restauration du ballet royal. Sa fille aĂźnĂ©e, la princesse Norodom Bopha Devi, ancienne danseuse Ă©toile de la troupe qui venait d’ĂȘtre nommĂ©e ministre de la culture s’attela Ă  la tĂąche. De jeunes danseuses furent recrutĂ©es et commencĂšrent l’entrainement. Une dizaine d’annĂ©es plus tard, elles commençaient des tournĂ©es Ă  l’étranger, avant, reconnaissance suprĂȘme, que le ballet ne soit proclamĂ© le 7 novembre 2003 au patrimoine culturel immatĂ©riel de l’humanitĂ© par l’UNESCO[533].

Crise gouvernementale et redditions khmĂšres rouges (1996-1998)

Kenneth M. Quinn (en), ambassadeur des États-Unis, prĂ©sente ses lettres de crĂ©ances Ă  Norodom Sihanouk.

Moins d’un an aprĂšs les Ă©lections, les relations entre les deux partis au pouvoir avaient dĂ©jĂ  tournĂ© Ă  l’aigre et chaque camp cherchait Ă  Ă©vincer l’autre. Les accrochages « sporadiques » se multipliaient entre les troupes des deux factions ; dans le mĂȘme temps, chacun tentait en secret de nĂ©gocier avec les derniers bastions khmers rouges afin de rallier leurs forces aux leurs[534]. À ce petit jeu, c’est Hun Sen qui gagna. Le 8 aoĂ»t 1996, Ieng Sary rompit avec Pol Pot et s’alliait au second Premier ministre[535]. Il obtint de surcroĂźt une amnistie que lui octroyait Norodom Sihanouk malgrĂ© l’inimitĂ© notoire que le monarque nourrissait Ă  son Ă©gard[536].

En 1997, la crise dĂ©gĂ©nĂ©rait en conflit armĂ© sans que l’on sache prĂ©cisĂ©ment qui avait ouvert les hostilitĂ©s. Les combats tournaient rapidement Ă  l’avantage du PPC. Plusieurs responsables du FUNCINPEC (Norodom Ranariddh) furent arrĂȘtĂ©s, dont certains, tels le chef de la police Ho Sok, Ă©taient torturĂ©s et exĂ©cutĂ©s[537]. La communautĂ© internationale dĂ©nonça Hun Sen comme fauteur de troubles, les États-Unis suspendirent leur aide au Cambodge et les investissements Ă©trangers dans le pays s'effondrĂšrent. Hun Sen, pour sa part, nia avoir menĂ© un coup d'État et donna une apparence de lĂ©galitĂ© Ă  son coup de force en demeurant au poste de « Second Premier ministre », tandis qu'Ung Huot, prĂ©cĂ©demment ministre des affaires Ă©trangĂšres, prenait la place de Ranariddh. Les Ă©lections demeuraient prĂ©vues pour 1998 mais plusieurs pays rĂ©clamaient le retour au Cambodge de Norodom Ranariddh et des autres dirigeants exilĂ©s comme prĂ©alable Ă  leur reconnaissance. Hun Sen exigeait au contraire que Ranariddh soit jugĂ© pour atteinte Ă  la sĂ©curitĂ© de l'État, quitte Ă  ce que son pĂšre Norodom Sihanouk le gracie ensuite. Le 4 mars puis le 17 mars 1998, Ranariddh Ă©tait condamnĂ© deux fois par contumace, Ă  cinq et trente ans de prison. Le 21 mars, Sihanouk accordait l'amnistie Ă  son fils et ce dernier rentrait au Cambodge le 30. Les Ă©lections pouvaient finalement se tenir le 26 juillet et les cadres du FUNCINPEC revenaient au Cambodge[538].

Le PPC (Hun Sen) sortait vainqueur de ces Ă©lections et remportait 64 des 122 siĂšges en lice ; le FUNCINPEC (Norodom Ranariddh), affaibli notamment par les Ă©vĂ©nements de l’annĂ©e prĂ©cĂ©dente, devait se contenter de 43 siĂšges et les 15 fauteuils restant allaient Ă  une nouvelle formation qui allait bientĂŽt refaire parler d'elle, le Parti de Sam Rainsy. MalgrĂ© les contestations pour fraude dĂ©posĂ©e par ce dernier mouvement, la communautĂ© internationale validait les rĂ©sultats. Toutefois, si le parti de Hun Sen avait obtenu la majoritĂ© absolue des siĂšges, conformĂ©ment Ă  l’article 90 de la constitution, il avait besoin de l’aval d’au moins deux tiers des dĂ©putĂ©s pour former le nouveau gouvernement[539].

Ranariddh et Sam Rainsy, qui n’avaient aucune envie de collaborer avec le second Premier ministre bloquĂšrent le processus. Le gouvernement prĂ©cĂ©dent restait au pouvoir pour rĂ©gler les affaires courantes alors que la plupart des projets de reconstruction se trouvaient bloquĂ©s dans l’attente de voir quelle serait l’issue de la crise. Chaque camp en appelait au roi pour sortir du marasme, mais personne n’était disposĂ© Ă  faire des concessions[540]. Sihanouk proposait d’instituer une chambre haute qui aurait limitĂ© le pouvoir de l’AssemblĂ©e nationale mais permettait aussi de crĂ©er des postes Ă  responsabilitĂ© Ă  mĂȘme de calmer certaines susceptibilitĂ©s, mais rien n’y fit. Le roi annonçait de son cĂŽtĂ© qu’il irait comme il l’avait prĂ©vu de longue date Ă  PĂ©kin pour suivre un traitement et que son dĂ©part aurait lieu « quoi qu’il arrive » le . Ranariddh, qui avait le plus Ă  perdre dans ce jeu de dupes, finit par accepter un accord qui sera entĂ©rinĂ© le [541]. Le gouvernement, dont Hun Sen devenait seul chef, accueillait Ă  nouveau des ministres du FUNCINPEC (royalistes), tandis que Norodom Ranariddh hĂ©ritait de la prĂ©sidence de l'AssemblĂ©e nationale et Chea Sim de celle d’un SĂ©nat qui restait Ă  crĂ©er[542].

Un charisme en baisse (1999-2004)

Le 30 avril 1999, le Cambodge rejoignait l’ASEAN, mais depuis PĂ©kin, le roi fit part de ses rĂ©serves devant ce qui pour lui avait des relents d’OTASE et allait Ă  l’encontre de la politique de neutralitĂ© qu’il avait toujours voulu promouvoir[543].

Les annĂ©es qui suivent furent, comparĂ©es aux prĂ©cĂ©dentes, relativement calmes. La fin de la guĂ©rilla khmĂšre rouge et la formation du gouvernement permirent aux programmes de reconstructions de prendre leur essor. Sihanouk, qui partageait son temps entre le Cambodge, PĂ©kin et Pyongyang, se consacrait Ă  des projets humanitaires dans les campagnes, distribuant ou faisant distribuer nourriture et vĂȘtements ou finançant des travaux d’infrastructure locaux[544].

Le 8 mars 2003, il avança pour la premiĂšre fois sĂ©rieusement l’éventualitĂ© d’une nouvelle abdication. Il avait dĂ©jĂ  abordĂ© le sujet par le passĂ©, mais il s’agissait plus de menaces pour dĂ©bloquer des crises et appeler chaque camp Ă  faire des concessions. Cette fois, il demandait mĂȘme de prĂ©ciser les modalitĂ©s de fonctionnement du conseil du TrĂŽne en cas d’abdication du souverain. Mais comme le monarque n’évoquait plus le sujet dans les semaines qui suivront, sa demande sera vite oubliĂ©e[545].

Le 6 juin 2003, aprĂšs de longues tractations qui avaient durĂ© plusieurs annĂ©es, le gouvernement cambodgien et l’ONU signaient un accord pour la mise en place des chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens chargĂ©es de juger les derniers dignitaires khmers rouges encore en vie. NĂ©anmoins, sur le terrain, la situation avait changĂ© avec le dĂ©cĂšs de Pol Pot et les diverses redditions de nombreux autres responsables du mouvement. Norodom Sihanouk fit une nouvelle fois part de son dĂ©saccord et de ses craintes qu’un tel tribunal ne vienne raviver de vieilles blessures pas encore totalement cicatrisĂ©es. D’autre part, pour que cette procĂ©dure puisse avoir une certaine crĂ©dibilitĂ©, il Ă©tait difficile de ne pas revenir sur les amnisties qu’il avait accordĂ©es Ă  des hauts responsables comme Khieu SamphĂąn, Nuon Chea ou Ieng Sary et de se contenter de juger leurs subordonnĂ©s[546].

Ces dĂ©clarations furent toutefois Ă©clipsĂ©es par la campagne en vue des Ă©lections qui allaient se tenir Ă  la fin juillet. Le PPC allait Ă  nouveau sortir vainqueur avec 73 des 121 dĂ©putĂ©s de la nouvelle assemblĂ©e ; le FUNCINPEC reculait et n’avait plus que 26 siĂšges, talonnĂ©s par le PSR qui en avait 24[508]. NĂ©anmoins, l’article 90 de la constitution obligeait toujours le gouvernement Ă  ĂȘtre entĂ©rinĂ© par les deux tiers du parlement. Hun Sen reprit donc contact avec Ranariddh, mais la formation de ce dernier Ă©tait alors divisĂ©e entre ceux qui voulait reformer une coalition gouvernementale et d’autres qui prĂ©conisaient de se rapprocher de Sam Rainsy quitte Ă  bloquer les institutions. Au dĂ©part, c’est cette deuxiĂšme tendance qui semblait l’emporter[547].

Alors que le marasme perdurait depuis maintenant prĂšs de trois mois, Norodom Sihanouk eu la douleur de perdre son fils Narindrapong (en), victime d’une crise cardiaque le 8 octobre 2003 Ă  Paris. Il Ă©tait le frĂšre de Sihamoni et avait vĂ©cu avec eux la pĂ©riode du sĂ©jour en rĂ©sidence surveillĂ©e au palais royal du temps du KampuchĂ©a dĂ©mocratique. MĂȘme si pendant l’essentiel de sa vie il avait affichĂ© son soutien aux doctrines khmĂšres rouges et une opposition Ă  son pĂšre, il avait entrepris un rapprochement avec lui depuis la fin des annĂ©es 1990[548].

À l’approche de l’hiver, la crise politique, quant Ă  elle, restait dans l’impasse. Norodom Sihanouk jugea qu’il Ă©tait de son devoir d’y mettre un terme et engagea des discussions avec les protagonistes. Le 5 novembre, il rĂ©unissait les reprĂ©sentants des partis ayant des dĂ©putĂ©s et leur faisait signer une proclamation entĂ©rinant la crĂ©ation d’un gouvernement tripartite. Mais dĂšs le lendemain, le PSR revenait sur la dĂ©claration et invitait le FUNCINPEC Ă  en faire autant. Ranariddh, de son cĂŽtĂ©, partait pour la France, rendant difficile toute poursuite des nĂ©gociations. Sihanouk, pour qui ces rebuffades Ă©taient un camouflet, dĂ©cidait Ă  son tour de quitter le pays et se rendait au dĂ©but de l’annĂ©e 2004 Ă  PĂ©kin, puis Ă  Pyongyang, dĂ©crĂ©tant qu’il n’avait plus l’intention de revenir au Cambodge[549].

Le 25 juin 2004, alors que la crise durait depuis prĂšs d’un an, Ranariddh dĂ©cidait brusquement de rompre avec le PSR et d’accepter de former avec le PPC un nouveau gouvernement ; s’il retrouvait son siĂšge de prĂ©sident de l’AssemblĂ©e nationale, son parti sortait affaibli de l’épreuve et n’allait pas tarder Ă  se dĂ©chirer en factions rivales qui allaient finalement grossir les rangs des deux autres partis reprĂ©sentĂ©s au parlement[550].

En juillet, depuis Pyongyang, Sihanouk fit Ă  nouveau part de son intention de dĂ©missionner. Il quittait la capitale nord-corĂ©enne pour PĂ©kin oĂč il reçut la visite de Tep Vong, vĂ©nĂ©rable de l’ordre Mohanikay qui tenta de le faire revenir sur sa dĂ©cision, mais sans succĂšs[551].

Le roi-PĂšre (7 octobre 2004)

Le 7 octobre 2004, toujours depuis PĂ©kin, Norodom Sihanouk annonçait son abdication. Elle semble avoir Ă©tĂ© motivĂ©e par deux raisons principales. La premiĂšre avait Ă©tĂ© l’impuissance qu’il avait ressentie un an auparavant lorsqu’il essaya d’imposer une solution Ă  la crise nĂ©e des Ă©lections. La seconde Ă©tait l’émergence d’un courant antimonarchique au sein de la sociĂ©tĂ© cambodgienne qui lui faisait craindre que la royautĂ© ne puisse lui survivre s’il ne rĂ©glait pas sa succession de son vivant[552]. MalgrĂ© les demandes rĂ©pĂ©tĂ©es du monarque dĂ©missionnaire, rien n’avait Ă©tĂ© fait jusqu’alors pour dĂ©finir avec prĂ©cision le fonctionnement du Conseil du trĂŽne ; Ă  la suite de l’annonce, l’AssemblĂ©e dut y remĂ©dier dans l’urgence[553].

Pour le choix du nouveau roi, Norodom Sihanouk avait depuis longtemps militĂ© en faveur de Sihamoni, un des deux fils qu’il avait eu avec la reine Monique et qui avait partagĂ© avec lui sa mise en rĂ©sidence surveillĂ©e au Palais royal entre 1976 et 1978. FĂ©ru d’art, il avait en outre l’avantage de ne pas s’ĂȘtre impliquĂ© dans un parti politique comme l’étaient certains de ses demi-frĂšres. Hun Sen se rangea assez vite derriĂšre ce choix pour un des membres les moins turbulents de la famille royale, imitĂ© dans la foulĂ©e par Ranariddh qui avait depuis peu perdu espoir de succĂ©der Ă  son pĂšre[554].

Le 15 octobre, le conseil du trĂŽne adoptait Ă  l’unanimitĂ© la proposition de Sihanouk et nommait Norodom Sihamoni nouveau roi du Cambodge. Le couronnement eu lieu le 29 du mĂȘme mois[555]. MalgrĂ© ce nouveau retrait, celui qu’il fallait maintenant appeler le « roi-pĂšre » continuait Ă  suivre l’actualitĂ© et les articles de presse le concernant, n’hĂ©sitant pas au besoin Ă  rĂ©agir par des communiquĂ©s quand les propos ne lui convenaient pas[556].

Il reparut sur le devant de la scĂšne au dĂ©but de 2005, lorsque des pourparlers s’engageaient pour rediscuter du traitĂ© conclu en 1985 avec le ViĂȘt Nam au sujet de la dĂ©limitation de leur frontiĂšre commune. Cette convention avait Ă©tĂ© rendue caduque par le fait que l’un des deux signataires, la RĂ©publique populaire du KampuchĂ©a, n’était pas reconnu par la communautĂ© internationale et que l’armĂ©e du second occupait le Cambodge. Une nouvelle tentative de dĂ©marcation des frontiĂšres avait Ă©tĂ© orchestrĂ©e au dĂ©but des annĂ©es 1990 par l’AutoritĂ© provisoire des Nations unies mais s’était heurtĂ©e Ă  un refus thaĂŻlandais[557]. Le roi pĂšre demandait aux autoritĂ©s françaises de lui faire parvenir les documents cartographiques datant du protectorat et proposait de prĂ©sider une commission de sages chargĂ©s d’aller sur le terrain procĂ©der Ă  la dĂ©limitation. Un dĂ©cret en ce sens fut signĂ© par le nouveau roi le 10 mai, mais devant les difficultĂ©s qui s’amoncelaient, Norodom Sihanouk prĂ©fĂ©ra dĂ©missionner en aoĂ»t de la mĂȘme annĂ©e de son poste de prĂ©sident du Conseil national supĂ©rieur chargĂ© des frontiĂšres[558]. Le travail se poursuivit nĂ©anmoins laborieusement et prit fin avec la pose, le 12 juin 2012, de la derniĂšre borne[559].

Le 26 mai 2006, le roi pĂšre et la reine mĂšre Ă©taient de retour Ă  Phnom Penh. Les activitĂ©s de Sihanouk se limitaient Ă  une aide aux plus dĂ©munis, sa participation Ă  des Ă©vĂ©nements culturels, quelques entrevues avec des visiteurs Ă©trangers, la relance de ses activitĂ©s cinĂ©matographiques et toujours la rĂ©daction de communiquĂ©s en rĂ©ponse Ă  des articles de la presse internationale ou d’ouvrages le concernant. Mais le rythme des rĂ©ceptions officielles l'Ă©puisait et il se retirait en aoĂ»t Ă  Siem Reap, puis, Ă  la fin de l'annĂ©e, Ă  PĂ©kin oĂč il subira des examens mĂ©dicaux[560].

Peu aprĂšs, il se voyait contraint de prendre position contre son neveu Sisowath Thomico, qui fut aussi son secrĂ©taire particulier. Ce dernier avait dĂ©cidĂ© de se lancer en politique et avait crĂ©Ă© son propre parti qu’il avait nommĂ© Sangkum Cheat Niyum, d’essence monarchiste. Sihanouk demanda Ă  son neveu afin d’éviter toute confusion, d’utiliser un nom qui ne contienne pas le terme Sangkum et cru bon de dĂ©clarer officiellement qu’il n’était aucunement mĂȘlĂ©, de prĂšs ou de loin, Ă  cette nouvelle formation, ce qui fit avorter dans l’Ɠuf l’initiative de Thomico[561].

À l’étĂ© 2008, Sihanouk tenta un ultime retour sur le devant de la scĂšne. L’inscription le 7 juillet du temple de Preah Vihear Ă  la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO avait dĂ©clenchĂ© une crise avec la ThaĂŻlande qui revendiquait une partie du site classĂ©. Le roi pĂšre faisait une dĂ©claration appelant au respect de l’intĂ©gritĂ© territoriale cambodgienne et fournissait divers Ă©lĂ©ments de ses archives personnelles concernant le jugement rendu en 1962 par la cour internationale de justice de la Haye et qui attribuait le temple au royaume khmer. Au mĂȘme moment, depuis l’hĂŽpital militaire de PĂ©kin oĂč il Ă©tait soignĂ© pour un cancer de l’estomac, il suggĂ©rait Ă©galement de mieux dĂ©finir le statut de la famille royale et proposait une solution proche de celle en vigueur en ThaĂŻlande, au Royaume-Uni et ailleurs, Ă  savoir d’un engagement des princes Ă  ne plus s’impliquer dans le politique en Ă©change d’une « liste civile » provenant du budget de l’État. Il espĂ©rait ainsi accroĂźtre leur autoritĂ© morale sur l’ensemble des dirigeants et de la population. Toutefois, le projet ne suscita pas l’enthousiasme escomptĂ©, notamment auprĂšs des membres de la famille royale qui menaient encore une activitĂ© politique. AprĂšs son impuissance Ă  rĂ©gler la crise politique en 2003, ce nouveau revers fit encore plus prendre conscience Ă  Sihanouk que l’époque oĂč il pouvait peser de son autoritĂ© pour influencer certaines dĂ©cisions politiques Ă©tait rĂ©volue[562].

En juin 2009, il publiait un communiquĂ© annonçant que son cancer avait Ă©tĂ© soignĂ© et que ses mĂ©decins chinois l’autorisaient Ă  retourner au Cambodge oĂč il passera tout l’étĂ©[563]. En octobre de la mĂȘme annĂ©e, il participa Ă  PĂ©kin aux festivitĂ©s du 60e anniversaire de la rĂ©publique populaire de Chine en tant qu’invitĂ© d’honneur. Il avouera Ă  Jean-Marie CambacĂ©rĂšs qu’il n’avait pu Ă  l’occasion s’empĂȘcher de faire un parallĂšle entre ces attentions et son impuissance Ă  influencer la politique de son pays ces derniers temps[564].

En juin 2010, il se rendait au ViĂȘt Nam. Le PSR lui demandait de transmettre ses dolĂ©ances concernant la frontiĂšre commune, mais Norodom Sihanouk refusa, affirmant que le voyage n’avait qu’un caractĂšre privĂ©. En fait, il semblait surtout que par cette visite effectuĂ©e au crĂ©puscule de sa vie, l’ancien monarque voulut clore le chapitre des annĂ©es 1980 oĂč il s’était opposĂ© au rĂ©gime de HanoĂŻ[565].

L’annĂ©e 2011 se passa entre Phnom Penh et PĂ©kin, mais les apparitions officielles se faisaient plus rares, de mĂȘme que les audiences oĂč il Ă©tait parfois remplacĂ© par la reine mĂšre. Le 19 janvier 2012, le roi pĂšre quittait Ă  nouveau le Cambodge pour aller se faire soigner Ă  PĂ©kin. Peu alors imaginaient qu’il s’agissait d’un dĂ©part sans retour[566].

La cérémonie religieuse sur l'esplanade du Palais Royal.

Le 15 octobre 2012, Ă  quelques jours de son 90e anniversaire, il dĂ©cĂ©dait d’une crise cardiaque Ă  l’hĂŽpital de PĂ©kin[567].

Son corps fut rapatriĂ© au Cambodge oĂč une semaine de deuil national avait Ă©tĂ© dĂ©crĂ©tĂ©e. Plusieurs dizaines de milliers de personnes se massĂšrent sur le passage de sa dĂ©pouille entre l’aĂ©roport et le palais royal oĂč son cercueil sera exposĂ© pendant cent jours pour recevoir les hommages des principaux dignitaires du royaume, des reprĂ©sentants des pays Ă©trangers et des simples citoyens. Une cĂ©rĂ©monie religieuse avec 10 000 bonzes eu lieu sur l’esplanade devant le Palais royal[568]. Le 1er fĂ©vrier dĂ©butaient les cĂ©rĂ©monies en vue de la crĂ©mation qui se dĂ©roula le 4 devant le musĂ©e national[569]. Le 7, les cendres furent rĂ©parties dans quatre urnes. L’une ira dans le stupa dit « de Kantha Bopha »[note 21] dans l’enceinte du palais royal, une autre fut dĂ©posĂ©e dans le « pavillon des reliques augustes » de la salle du trĂŽne, toujours au palais royal, une troisiĂšme allait rejoindre la nĂ©cropole royale d’Oudong et le contenu de la derniĂšre fut dispersĂ© Ă  Phnom Penh, au lieu-dit des quatre bras, lĂ  oĂč le Bassac le TonlĂ© Sap et le MĂ©kong se rejoignent[571].

Activité de cinéaste

Son goût pour les matiÚres artistiques est avéré depuis son passage au lycée Chasseloup-Laubat de Saïgon[572].

Dans les annĂ©es 1940 et 1950, il produisit de petits films en 16 mm tels que Double meurtre sur la ligne Maginot et Tarzan parmi les Kuy, jamais sortis et tous disparus aux Ă©poques de la rĂ©publique khmĂšre et du KampuchĂ©a dĂ©mocratique[573].

Au milieu des annĂ©es 1960, Sihanouk renouait avec ce hobby. Il a dĂ» ĂȘtre incitĂ© Ă  y revenir par le film amĂ©ricain Lord Jim, tournĂ© en 1964 Ă  Angkor ou Marcel Camus, qui rĂ©alisa en 1962 L’Oiseau de paradis au Cambodge[574]. Il opta pour le 35 mm et le premier film dont on a gardĂ© une trace, Apsara, date de 1965. Sa fille aĂźnĂ©e, Bopha Devi, y tient le rĂŽle principal, mais on peut aussi y voir le prince, sa femme et Nhiek Tioulong, un de ses ministres, qui interprĂ©tait un coureur de jupons[573]. Jusqu'en 1969, le prince Ă©crivit, produisit, dirigea et joua dans une dizaine de films, dont il composait Ă©galement la musique. Les acteurs Ă©taient bĂ©nĂ©voles et une partie des frais Ă©taient couverts en « invitant » les fonctionnaires Ă  payer pour venir voir les films qui dĂ©peignaient les idĂ©es de Sihanouk sur le Cambodge et son histoire. Les deux derniers, La joie de vivre et CrĂ©puscule sortirent en 1969. On ne sait pas si cette envie Ă©tait une cause ou une consĂ©quence des pĂ©riodes oĂč il se dĂ©sintĂ©ressait de la politique, mais il avait toujours manifestĂ© une certaine attirance pour le 7e art[575].

Le monarque n’avait suivi aucune formation cinĂ©matographique et n’était pas disposĂ© Ă  Ă©couter les conseils et les remontrances. De fait, ses films subirent rĂ©guliĂšrement le feu des critiques occidentales qui lui reprochĂšrent leur amateurisme et le parfum de propagande qu’ils dĂ©gageaient. En 1973, il dĂ©clarera Ă  la journaliste Oriana Fallaci qu’il en avait conscience mais qu’il ne s’en souciait guĂšre, affirmant que ses films avaient surtout pour but « d’éduquer le peuple »[358]. Ils dĂ©crivaient le quotidien des fidĂšles du monarque plutĂŽt que celui des gens ordinaires. En outre, pour les besoins de la production, il n’était pas rare de rĂ©quisitionner les vĂ©hicules officiels, les organisations de la jeunesse, l’armĂ©e, les avions, les bĂątiments de la marine, les gĂ©nĂ©raux, les ministres et autres hauts fonctionnaires que comptait le pays[576].

L’apogĂ©e de la carriĂšre cinĂ©matographique de Sihanouk fut atteint en novembre 1969, lors d’un festival international organisĂ© Ă  Phnom Penh. Son film, CrĂ©puscule y gagna le grand prix, une statuette de deux kilos d’or financĂ©e par la banque nationale. Le film avait Ă©tĂ© prĂ©sentĂ© hors compĂ©tition et la statuette Ă©tait considĂ©rĂ©e comme un prix spĂ©cial qui lui fut remis par l’écrivaine Han Suyin, admiratrice de longue date du prince. Une douzaine de statuettes plus petites et une cinquantaine d’autres rĂ©compenses furent attribuĂ©es Ă  des laurĂ©ats de « pays amis » - prĂ©sentĂ©s comme de gauche par le New York Times. Lors de la cĂ©rĂ©monie de clĂŽture, le corps du ballet royal lança des pĂ©tales de rose dans l’assistance et Sihanouk promis de reconduire le festival l’annĂ©e suivante[577].

Sa dĂ©position en 1970, allait toutefois interrompre sa carriĂšre cinĂ©matographique pendant une vingtaine d’annĂ©es. Peu avant la chute de la RĂ©publique khmĂšre en 1975, il avait annoncĂ© Ă  un visiteur venu le voir dans son exil Ă  PĂ©kin, qu’il espĂ©rait Ă  son retour Ă  Phnom Penh pouvoir faire des films, mais les dirigeants khmers rouges en dĂ©cideront autrement. Il lui faudra en fait attendre 1988, quand le processus de paix sera rĂ©ellement engagĂ©, pour qu’il assouvisse Ă  nouveau sa passion depuis la CorĂ©e du Nord avec des films comme La citĂ© mystĂ©rieuse, La comtesse de Nokorom, ou, en 1991, alors qu'au dernier moment le processus de paix semblait s'enliser, Je ne te reverrai plus, ĂŽ mon bien-aimĂ© Kampuchea![578].

À son retour, il n’avait pas perdu espoir de renouer avec des tournages au Cambodge mĂȘme. En 1992, il se rendit Ă  Angkor, mais dut renoncer Ă  mener Ă  bien son projet pour des raisons de sĂ©curitĂ©. Finalement, il faudra attendre 1993 pour que sorte Revoir Angkor... et mourir puis d’autres nouveaux films, mais contrairement aux romances des annĂ©es 1960, les productions de cette pĂ©riode Ă©voquent des situations sombres qui tĂ©moignent du dĂ©senchantement que leur auteur subissait[579]. Enfin, en 2000, il abandonne le 35 mm pour se consacrer Ă  des courts-mĂ©trages au format DVD[573].

InterrogĂ© vers la fin de sa vie par des journalistes sur son Ɠuvre cinĂ©matographique, il la dĂ©crira comme avant tout des tĂ©moignages sur son pays, ajoutant « le hĂ©ros de mes films n'est jamais un acteur, c'est toujours le Cambodge »[580].

Notes et références

Notes

  1. En fait, le propos aurait Ă©tĂ© tenu par le gĂ©nĂ©ral de Langlade, commandant des forces terrestres de l’Union française au Cambodge, Ă  qui quelqu’un ayant traitĂ© Norodom Sihanouk de « roi fou », rĂ©pondait « C’est peut-ĂȘtre un roi fou, mais c’est un fou gĂ©nial. »[3]
  2. Les princesses Mam Manivan Phanivong et Norodom Socheatha Sujata ainsi que le mari et la fille de cette derniĂšre faisaient partie des Cambodgiens qui, en 1975, Ă  la prise de Phnom Penh par les troupes khmĂšres rouges s'Ă©taient rĂ©fugiĂ©s Ă  l'ambassade de France avant d'en ĂȘtre refoulĂ©s et livrĂ©s aux partisans de Pol Pot[21].
  3. Alors composé du Premier ministre, des chefs des deux ordres religieux, Thammayut et Mohanikay et du chef des bakous, les brahmanes du palais[35].
  4. Des femmes avaient déjà régné sur le Cambodge, dont la derniÚre avait été Ang Mey, placée sur le trÎne en 1834 par les autorités annamites[175].
  5. À partir du milieu du XVIIe siĂšcle, alors que l'empire angkorien est en plein dĂ©litement, des colonies vietnamiennes de plus en plus nombreuses s'installent dans le delta du MĂ©kong, Ă  l’époque territoire khmer, jusqu'Ă  ce qu’en 1834 l’empereur Minh MáșĄng annexe purement et simplement la rĂ©gion oĂč ses sujets Ă©taient devenus majoritaires et envoie des fonctionnaires de HuĂ© pour l'administrer[313].
  6. Ces reconnaissances, bien que leur confidentialitĂ© relevĂąt du secret de Polichinelle, Ă©taient faites dans un pays qui n’était normalement pas en guerre avec les États-Unis ; rendre public leurs rĂ©sultats aurait Ă©quivalu Ă  implicitement admettre une violation de la neutralitĂ© du Cambodge, ce qui Ă  l’époque ne pouvait se faire sans l’aval du CongrĂšs[315].
  7. L’Australie gĂ©rait alors officiellement les intĂ©rĂȘts des États-Unis au Cambodge depuis la fermeture de l’ambassade amĂ©ricaine[316].
  8. Ces prétendues conjurations ne sont pas sans rappeler les fameux complots du KGB et de la CIA que les soi-disant traßtres du Kampuchéa démocratique devaient avouer sous la torture[322].
  9. Il s’agissait d’Ung Hong Soth, second vice-Premier ministre, Chuon Saodi, ministre de l’agriculture, Srey Pong, secrĂ©taire d’État Ă  l’industrie et Tep Chhieu Kheng, secrĂ©taire d’État Ă  l’information[351].
  10. L'Église catholique cambodgienne comptait et compte toujours une forte proportion de fidùles d'origine vietnamienne[372].
  11. Sénégal, Guinée, Mali, Congo-Brazzaville, Zambie, Maroc, Mauritanie, Albanie, Yougoslavie, Roumanie[413].
  12. Malgré tout, une de ses 7 femmes, cinq de ses 14 enfants et quatorze de ses petits-enfants disparaßtront dans la tourmente du Kampuchéa démocratique[421].
  13. En fait, ils avaient déjà tous été tués[437].
  14. Contrairement Ă  ce que leur nom pourrait laisser supposer, les JIM n’eurent pas lieu dans la capitale indonĂ©sienne mĂȘme, mais Ă  Bogor Ă  60 km au sud[474].
  15. Australie, Brunei, Canada, Chine populaire, États-Unis, France, Inde, IndonĂ©sie, Japon, Laos, Malaisie, Mouvement des non alignĂ©s, Nations Unies, Philippines, Royaume uni, Singapour, ThaĂŻlande, Union soviĂ©tique, ViĂȘt Nam.
  16. Si l’on en croit Jean-Claude Pomonti, correspondant du Monde Ă  Bangkok, il semble toutefois que le gouvernement de HanoĂŻ ait conservĂ© jusqu’en juillet 1991, un effectif d’environ 4 000 hommes chargĂ©s d’apporter une assistance discrĂšte Ă  l’armĂ©e de la RĂ©publique populaire du KampuchĂ©a alors en lutte contre les troupes khmĂšres rouges[479].
  17. Le 28 aoĂ»t, dernier jour des Ă©lections, des cadres khmers rouges du Phnom Malay (en) (province de Banteay Mean Chey) sont mĂȘme descendus Ă  Poipet pour aller voter[506].
  18. La dĂ©position n'a pas Ă©tĂ© annulĂ©e par tout le monde et, au dĂ©but des annĂ©es 2010, le gouvernement amĂ©ricain exigeait toujours que Phnom Penh lui rembourse un prĂȘt de 276 millions de dollars contractĂ© par la rĂ©publique khmĂšre et dont le remboursement, avec les intĂ©rĂȘts se montait Ă  plus de 400 millions de dollars[515] - [516].
  19. Les fidĂšles Thammayut pour leur part Ă©voquĂšrent, concernant cette nomination, une tentative de dissolution de leur obĂ©dience plutĂŽt qu’une unification[526].
  20. En avril 1996, lors d’un voyage en France, il se plaindra d’ĂȘtre un roi « enfermĂ© dans une cage constitutionnelle »[421].
  21. Le stupa fut Ă©rigĂ© pour accueillir les cendres de Kantha Bopha, une des filles de Sihanouk, dont le dĂ©cĂšs d’une leucĂ©mie en 1952 Ă  l'Ăąge de 4 ans avait grandement affectĂ© le monarque[570].

Références

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Voir aussi

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Principaux ouvrages publiés

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Articles connexes

Liens externes

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