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Format 35 mm

Le format 35 mm est la pellicule la plus utilisĂ©e du cinĂ©ma argentique. ConsidĂ©rĂ©e comme le « format standard », elle mesure 35 millimètres de largeur et est dotĂ©e sur ses bords de perforations rectangulaires pour assurer son entraĂ®nement par les divers mĂ©canismes de prise de vues et de projection.

Film 35 mm tel qu'utilisĂ© en photographie au format 24 Ă— 36 mm (en nĂ©gatif Ă  gauche et positif Ă  droite).

DĂ©veloppĂ© initialement pour le cinĂ©ma, ce format de pellicule a Ă©tĂ© par la suite adoptĂ© par la photographie argentique sous l’appellation « petit format », dans un conditionnement pratique, la cartouche 135. En photographie argentique, la taille de l'image est de 24 Ă— 36 mm ; pour diffĂ©rentes raisons (notamment l'usage des optiques dĂ©veloppĂ©es pour le 24 Ă— 36 mm) la photographie numĂ©rique a conservĂ© ce format (dont l’appellation « 35 mm » n'a alors plus aucun sens, en l'absence de pellicule) pour les capteurs de certains appareils haut-de-gamme (toutes techniques de visĂ©e confondues). Il existe des capteurs plus grands — 33 Ă— 44 mm et 40 Ă— 53,5 mm — pour les boĂ®tiers moyen format).

Histoire et technique

Le format standard des films

En 1888, l’AmĂ©ricain John Carbutt invente le support souple et transparent en nitrate de cellulose que l’industriel amĂ©ricain George Eastman — le futur crĂ©ateur de Kodak — met sur le marchĂ© en 1889, sous la forme d’un ruban lisse de 70 mm de large destinĂ© Ă  l'appareil photographique Kodak, le dernier nĂ© de la gamme. C'est une invention qui va mettre fin aux balbutiements du prĂ©cinĂ©ma car l’industriel et inventeur amĂ©ricain Thomas Edison l’adopte Ă  la place des rubans de papier (non transparents) pour mettre au point avec son ingĂ©nieur Ă©lectricien, le franco-britannique William Kennedy Laurie Dickson, un appareil capable d’enregistrer sur un ruban linĂ©aire une succession de clichĂ©s Ă  très grande cadence de dĂ©filement : le « KinĂ©tographe (en grec, Ă©criture du mouvement) : camĂ©ra de l’AmĂ©ricain Thomas Edison, brevetĂ©e le , employant du film perforĂ© 35 mm et un système d’avance intermittente de la pellicule par « roue Ă  rochet ». Entre 1891 et 1895, Edison rĂ©alise quelque soixante-dix films[1]. » La version initiale de la première camĂ©ra de cinĂ©ma fonctionne avec le ruban Eastman dĂ©coupĂ© en 19 mm de large, au dĂ©filement horizontal, dotĂ© sur un seul bord d’une rangĂ©e de 6 perforations rectangulaires. Les photogrammes sont circulaires, comme les vignettes des jouets optiques, d'un diamètre d'environ 13 mm. Les rĂ©sultats sont encourageants mais manquent de dĂ©finition, surtout dans les cadrages qui montrent des personnages en pied ; aussi, Dickson dĂ©cide-t-il de couper le ruban Eastman de 70 mm par le milieu en deux rubans identiques de 35 mm de large. D’abord muni d’une seule rangĂ©e de perforations, le nouveau support, cette fois Ă  dĂ©filement vertical, reçoit pour parfaire sa fixitĂ© une seconde rangĂ©e de perforations, comportant dorĂ©navant 8 perforations pour chaque photogramme aux dimensions plus larges que hautes. « Edison fit accomplir au cinĂ©ma une Ă©tape dĂ©cisive, en crĂ©ant le film moderne de 35 mm, Ă  quatre paires de perforations par image[2]. »

Edison protège la camĂ©ra KinĂ©tographe et le dessin des rangĂ©es de perforations par des brevets internationaux. C’est pourquoi des industriels avisĂ©s comme les frères Lumière prĂ©fèrent en 1895 adopter un autre format, « maison », le 35 mm Ă  une seule perforation ronde de chaque cĂ´tĂ© du photogramme. LĂ©on Gaumont, arrivĂ© plus tard dans la course, choisit le 58 mm sans perforations (entraĂ®nement par pinces intermittentes) mis au point par Georges DemenĂż. Ces deux formats, moins aboutis que le film Edison, sont abandonnĂ©s en 1906, quand le film Ă  perforations Edison est adoptĂ© comme format standard international[3].

En 1927, la mise au point de l’enregistrement argentique du son directement sur une pellicule 35 mm et de sa reproduction en piste sonore optique Ă  cĂ´tĂ© des photogrammes, entre l’image et l’une des rangĂ©es de perforations, modifie le standard.

Le standard exact mesure en largeur 1,377 pouces (3,498 cm), tel que dĂ©fini dans les annĂ©es 1910 par la Society of Motion Picture and Television Engineers (SMPTE), soit 34,975 mm. La largeur des photogrammes a variĂ© au fil des inventions complĂ©mentaires.Celle du cinĂ©ma muet Ă©tait fixĂ©e Ă  24 mm, la hauteur de 18 mm donnant le rapport harmonieux de 1,33, proche du nombre d’or au ratio de 1,62[4]. La hauteur des images, ajoutĂ©e Ă  celle de la barre noire d’obturation, donnait une hauteur totale de 19 mm, c’est-Ă -dire très exactement 16 images par pied[5], soit environ 52 images par mètre, exactement 27 mètres par minute de vitesse moyenne (1,62 km/h, mais avec une vitesse instantanĂ©e au niveau du faisceau de lumière dans le couloir de prise de vues ou de projection, de 8,6 km/h compte tenu que le dĂ©filement est saccadĂ©, l’escamotage Ă©tant ultrarapide pour privilĂ©gier l’arrĂŞt devant la fenĂŞtre de prises de vues ou de projection).

En 1906, « l'acceptation prĂ©coce du 35 mm comme format standard eut un impact Ă©norme sur le dĂ©veloppement et la propagation du cinĂ©ma. Il permit de montrer les films dans n'importe quel pays du monde. Il fournit un format uniforme, fiable et prĂ©visible pour la production, la distribution et l'exploitation des films, favorisant la propagation rapide et l'acceptation du cinĂ©ma comme un instrument mondial de divertissement et de communication[6]. »

Une grande diversitĂ© de standards de largeur, en gĂ©nĂ©ral brevetĂ©s, a Ă©tĂ© utilisĂ©e pour les nombreux systèmes de prise de vues et de projection, professionnels ou amateurs, inventĂ©s indĂ©pendamment Ă  la fin du XIXe siècle et au dĂ©but du XXe siècle, du mm au 100 mm[7].

Mais le format 35 mm s'est avĂ©rĂ© très adaptable Ă  diverses technologies. En un peu plus d'un siècle, on a pu rendre le support ininflammable (en triacĂ©tate de cellulose), introduire une piste ou deux pistes sonores optiques, changer la composition de son Ă©mulsion pour capter la couleur, adopter un grand nombre de formats de projection larges, incorporer du son numĂ©rique dans presque tous les espaces non occupĂ©s par l'image. Depuis le dĂ©but du XXIe siècle, Eastman Kodak et Fujifilm se partagent le marchĂ© de la fabrication de la pellicule de cinĂ©ma[8]. Ă€ partir des annĂ©es 2000 le cinĂ©ma numĂ©rique se dĂ©veloppe, en 2016 les cinĂ©mas sont pour majeure partie Ă©quipĂ©s en numĂ©rique[9]. Ainsi le format 35 mm est presque devenu musĂ©ologique, mais il bĂ©nĂ©ficie d’une confiance qui fait qu’en France le dĂ©pĂ´t lĂ©gal des films se fait en argentique car il est rĂ©putĂ© plus durable et plus rĂ©sistant que les supports numĂ©riques et constitue donc une option privilĂ©giĂ©e pour l'archivage et la conservation des films, compte tenu qu'au bout d'un siècle d'existence, on connaĂ®t aujourd'hui son mode de dĂ©gradation et les remèdes Ă©ventuels.

  • Pellicule 35 mm Ă  perforations Edison – film muet.
    Pellicule 35 mm Ă  perforations Edison – film muet.
  • Pellicule 35 mm Ă  perforations Lumière.
    Pellicule 35 mm Ă  perforations Lumière.
  • Pellicule 35 mm – film sonore.
    Pellicule 35 mm – film sonore.

L’adoption du 35 mm par la photographie

Le Cent-Vues, appareil photo conçu par Étienne Mollier, médaille d'or du Concours Lépine 1910
Le Cent-Vues, médaille d'or du Concours Lépine 1910.

En 1909, le Français Étienne Mollier conçoit un appareil de photographie petit format, le « Cent-Vues », qui adopte le film perforĂ© 35 mm pour prendre d'affilĂ©e cent vues en 18 Ă— 24 mm. Il le fabrique, obtient la mĂ©daille d'or du concours LĂ©pine et le commercialise aussitĂ´t (1910) Ă  petite Ă©chelle et sans grand succès[10].

Aux États-Unis, le format 35 mm est adoptĂ© en photographie en 1913 avec le « Tourist Multiple »[11] - [12]. Cependant, le petit format ne deviendra populaire qu’avec le Leica, crĂ©Ă© par Oskar Barnack en 1925 et utilisant le film 35 mm en 24 Ă— 36 mm[13].

Leica

L'appareil photo Leica conçu par Oskar Barnack utilisait un film de 35 mm et prouvait qu’un format aussi petit que 24 Ă— 36 mm Ă©tait adaptĂ© Ă  la photographie professionnelle.

Appareil photo Leica

Bien que Barnack ait conçu son prototype d'appareil photo vers 1913, la première production expĂ©rimentale du Ur-Leica (No de sĂ©rie 100 Ă  130) n’a eu lieu qu’en 1923. La production Ă  grande Ă©chelle du Leica ne commença qu’en 1925. Alors qu’à cette Ă©poque, il y avait au moins une douzaine d’autres appareils photo 35 mm disponibles, le Leica Ă©tait un succès, et est venu Ă  ĂŞtre associĂ© au format. Principalement en raison de cette popularitĂ© du 35 mm, ainsi que de l’hĂ©ritage de toute l’entreprise, les premiers appareils photo Leica sont considĂ©rĂ©s comme des articles de collection. Le prototype original de Leica dĂ©tient le record de l'appareil photo le plus cher au monde[14], se vendant Ă  2,16 millions d’euros en 2012.

Notes et références

  1. Laurent Mannoni (célébration du 22 mars 1895, année française de l’invention du cinéma), Lexique (numéro spécial), Paris, SARL Libération, coll. « supplément » (no 4306), , p. 3.
  2. Georges Sadoul, Histoire du cinéma mondial, des origines à nos jours, Paris, Flammarion, , 719 p., p. 11
  3. Marie-France Briselance et Jean-Claude Morin, Grammaire du cinéma, Paris, Nouveau Monde, coll. « Cinéma », , 588 p. (ISBN 978-2-84736-458-3), p. 16
  4. . Le format panoramique — avec réduction en hauteur de la fenêtre, et donc avec une perte volontaire de la surface utile — adopta dans les années 1960 le nombre d’or avec un ratio de 1,66.
  5. (en) Rob Hummel (dir.), American Cinematographer Manual, Hollywood, ASC Press, , 8e Ă©d..
  6. « The early acceptance of 35 mm as a standard had momentous impact on the development and spread of cinema. The standard gauge made it possible for films to be shown in every country of the world… It provided a uniform, reliable and predictable format for production, distribution and exhibition of movies, facilitating the rapid spread and acceptance of the movies as a world-wide device for entertainment and communication. » — Paul C. Spehr, Unaltered to Date: Developing 35 mm Film, in Moving Images: From Edison to the Webcam, ed. John Fullerton and Astrid Söderbergh Widding, pp. 3–28 (p. 4). Sydney, John Libbey & Co., 2000 (ISBN 1-8646-2054-4)
  7. (en) Horak, Jan-Christopher. UCLA Film and Television Archive, Introduction to Film Gauges, consulté le 11 août 2006
  8. Agfa est le troisième acteur du marché du film positif.
  9. https://technology.ihs.com/577835/the-global-digital-conversion-of-cinemas-is-almost-over
  10. Étienne Mollier, MĂ©moires d'un inventeur : De la photographie 35 mm au rĂ©troprojecteur, 1876-1962, Ă©ditions L'Harmattan (Acteurs de la Science), 2009 (ISBN 978-2-2960-8369-1), pp. 77-80
  11. (en) New Ideas (Herbert & Huesgen): Tourist Multiple
  12. (en) Early 35mm Cameras
  13. (en) Theo M. Scheerer, The Leica and the Leica System (3e édition), Umschau Verlag Frankfurt Am Main, 1960), pp. 7–8
  14. (en) « CollectiBlend: Top 100 most valued cameras », sur collectiblend.com (consulté le )

Articles connexes

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