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Chrat Preah Nongkal

La fĂȘte du sillon sacrĂ© (Chrat Preah Nongkal, ច្រត់ព្រះនង្គ័ល) en Khmer, le nom complet Ă©tant ព្រះរាជពិធឞបុណ្យច្រត់ព្រះនង្គ័ល (Preah Reach Pithi Chrot Preah Neangkol) et la fĂȘte des eaux (Om Touk) sont des fĂȘtes cambodgiennes pendant lesquelles les habitants se livrent Ă  des rituels traditionnels permettant de donner des prophĂ©ties sur l'avenir, le temps, les Ă©pidĂ©mies et les rĂ©coltes. Ces prĂ©dictions, portant sur l'annĂ©e suivante, sont prises au sĂ©rieux par la population cambodgienne qui se protĂšge ainsi des calamitĂ©s et s’assure de bonnes rĂ©coltes. Cette mĂ©thode ancestrale perdure malgrĂ© les moyens scientifiques disponibles pour dĂ©terminer le temps et les rĂ©coltes.

Le roi Norodom Sihamoni Ă  la fĂȘte du sillon sacrĂ© en 2008

Une tradition pré-Ramayanienne

Dans les diffĂ©rentes versions du Ramayana, SÄ«tā, l’hĂ©roĂŻne, jaillit bĂ©bĂ© de la terre retournĂ©e quand Janaka, le roi de Videha, laboure le champ lors de la cĂ©rĂ©monie royale. Il s'agit de la plus ancienne Ă©vocation historique de ce rituel agricole.

DĂ©roulement

La fĂȘte se dĂ©roule Ă  Phnom Penh sur l’esplanade Veal Preahmein, en face de l’enceinte nord du palais royal. Deux bƓufs sacrĂ©s sont attelĂ©s Ă  une charrue en bois et le roi, ou un de ses reprĂ©sentants, trace les trois sillons d’une riviĂšre sacrĂ©e dans laquelle les brahmanes du palais (bakous) plantent des graines de riz. Autrefois, une riziĂšre existait sur cette esplanade.

Le choix des bƓufs dĂ©coule d’une sĂ©lection trĂšs rigoureuse. Il faut que la queue soit longue et large en son extrĂ©mitĂ©, que les testicules aient la mĂȘme taille et soient bien pendants alors que les oreilles doivent ĂȘtre de taille moyenne ; enfin, les cornes sont hautes et lĂ©gĂšrement penchĂ©es vers l’avant.

À la fin du labour, les bƓufs sont dĂ©lestĂ©s de leurs harnais et dirigĂ©s vers sept plateaux d’or contenant du riz, du maĂŻs, des graines de sĂ©same, des haricots verts, de l’herbe fraichement coupĂ©e, de l’eau et de l’alcool de riz.

En fonction de ce qu’ils choisissent de manger ou de boire, des devins prĂ©disent une sĂ©rie d’évĂšnements tels que les Ă©pizooties, les bonnes rĂ©coltes ou les intempĂ©ries.

Par exemple, si les bƓufs choisissent l’herbe, des Ă©pidĂ©mies sont Ă  craindre. Par contre, s’ils jettent leur dĂ©volu sur le riz ou le sĂ©same, l’annĂ©e sera bonne pour les rĂ©coltes. Enfin, si l’eau est signe de crues, l’alcool, lui, est annonciateur des pires catastrophes.

Tous les ans, les fermiers attendent impatiemment la fin du rituel et les prĂ©dictions qu’ils Ă©coutent religieusement. La plupart des Cambodgiens, encore aujourd’hui, consultent les manuels traditionnels avant de prendre toute dĂ©cision importante concernant les affaires, des rencontres.

Le sillon sacrĂ© est cĂ©lĂ©brĂ© depuis des siĂšcles, Ă  l’initiative d’un des premiers rois khmers qui se souciait des ressources de ses sujets. Traditionnellement, la fĂȘte ouvre la saison des pluies et des travaux agricoles. Elle avait Ă©tĂ© quasiment abandonnĂ©e lors du rĂšgne d’Ang Duong (1845-1859) mais a Ă©tĂ© remise au goĂ»t du jour par Norodom Sihanouk en 1960 avant d’ĂȘtre Ă  nouveau interrompue de 1970 Ă  1994.

Elle est aussi cĂ©lĂ©brĂ©e en ThaĂŻlande oĂč elle porte le nom de Phraraj Pithi Jarod Phranangkal Reak Na Kwan et date du temps des rois de SukhothaĂŻ (1238-1438). Elle Ă©tait tombĂ©e en quasi dĂ©suĂ©tude Ă  l’époque du roi Rama VII dans les annĂ©es 1920 mais a Ă©tĂ© rĂ©tablie en 1960 par Rama IX.

Au Cambodge, la fĂȘte a lieu au quatriĂšme jour de la lune dĂ©croissante de fin avril ou dĂ©but mai alors qu’en ThaĂŻlande le jour est fixĂ© par des oracles. Il en rĂ©sulte de petites variations de date d’un pays Ă  l’autre.

Ces derniĂšres annĂ©es, en ThaĂŻlande, le prince royal Maha Vajiralongkorn a conduit la cĂ©rĂ©monie qui s’est dĂ©roulĂ©e Ă  Sanam Luang Ă  Bangkok. Les graines de riz sont semĂ©es sur le terrain du palais de Chitralda, demeure du roi, puis la foule rĂ©cupĂšre les graines qui sont rĂ©putĂ©es ĂȘtre de bon augure. Ensuite, les fermiers les mĂ©langent Ă  leurs propres graines, ou les conservent telles quelles comme porte-bonheur.

Au Cambodge, aussi bien le roi Norodom Sihamoni que le Premier ministre Hun Sen observent ce rituel.

La plupart des habitants des deux pays croient en ces mĂ©thodes pour dire l’avenir et assurent de leur efficacitĂ©. Cela les conforte dans la certitude que des esprits continuent de veiller sur leurs pays.

Sources

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