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Maurice Duplessis

Maurice Le Noblet Duplessis, généralement appelé Maurice Duplessis, est un avocat et homme politique québécois, né le à Trois-Rivières et mort, en fonction, le à Schefferville. Il est premier ministre du Québec et procureur général de la province de 1936 à 1939 puis de 1944 à 1959. Conservateur, nationaliste, anticommuniste et chrétien catholique, il domine avec son parti, l'Union nationale, la scène politique québécoise des années 1930 aux années 1950.

Maurice Duplessis
Illustration.
Maurice Duplessis en 1947.
Fonctions
Premier ministre du Québec
–
(15 ans et 8 jours)
Lieutenant-gouverneur Eugène Fiset
Gaspard Fauteux
Onésime Gagnon
LĂ©gislature 22e, 23e, 24e, 25e
Prédécesseur Adélard Godbout
Successeur Paul Sauvé
–
(3 ans, 2 mois et 13 jours)
Lieutenant-gouverneur Ésioff-Léon Patenaude
LĂ©gislature 20e
Prédécesseur Adélard Godbout
Successeur Adélard Godbout
Procureur général du Québec
–
(15 ans et 8 jours)
Prédécesseur Léon Casgrain
Successeur Antoine Rivard
–
(3 ans, 2 mois et 13 jours)
Prédécesseur Charles-Auguste Bertrand
Successeur Wilfrid Girouard
Chef de l'opposition officielle
–
(4 ans, 9 mois et 22 jours)
Lieutenant-gouverneur Ésioff-Léon Patenaude
LĂ©gislature 21e
Prédécesseur Télesphore-Damien Bouchard
Successeur Adélard Godbout
–
(3 ans, 9 mois et 19 jours)
Lieutenant-gouverneur Henry George Carroll
Ésioff-Léon Patenaude
LĂ©gislature 18e, 19e
Prédécesseur Charles Ernest Gault
Successeur TĂ©lesphore-Damien Bouchard
Ministre de la Voirie du Québec
–
(4 mois et 23 jours)
Prédécesseur François Leduc
Successeur Anatole Carignan
Ministre des Terres et Forêts du Québec
–
(1 an, 5 mois et 4 jours)
Prédécesseur Oscar Drouin
Successeur John Samuel Bourque
Chef de l'Union nationale
–
(23 ans, 2 mois et 18 jours)
Prédécesseur Premier titulaire
Successeur Paul Sauvé
Chef du Parti conservateur du Québec
–
(2 ans, 8 mois et 16 jours)
Prédécesseur Camilien Houde
Successeur Dernier titulaire
Député à l'Assemblée législative du Québec
–
(32 ans, 3 mois et 22 jours)
Circonscription Trois-Rivières
LĂ©gislature 17e, 18e, 19e, 20e, 21e, 22e, 23e, 24e, 25e
Prédécesseur Louis-Philippe Mercier
Successeur Yves Gabias
70e bâtonnier du Québec
Bâtonnier de Trois-Rivières (1937-1938)
Biographie
Nom de naissance Joseph Maurice Stanislas Le Noblet Duplessis
Surnom Le Chef (ou « Le Cheuf »)[note 1] - [1]
Date de naissance
Lieu de naissance Trois-Rivières (Québec, Canada)
Date de dĂ©cès (Ă  69 ans)
Lieu de décès Schefferville (Québec, Canada)
Nature du décès Hémorragie cérébrale
Sépulture Cimetière Saint-Louis de Trois-Rivières
Nationalité Canadienne
Parti politique Parti conservateur (1927-1935)
Union nationale (1935-1959)
Père Nérée Le Noblet Duplessis
Diplômé de Université Laval de Montréal
Profession Avocat
Distinctions Conseiller du roi
Religion Chrétien catholique

Signature de Maurice Duplessis

Maurice Duplessis
Premiers ministres du Québec

Fils de Nérée Duplessis, conseiller juridique pour l'évêché de Trois-Rivières, juge de la Cour supérieure, député conservateur de Saint-Maurice et maire de Trois-Rivières, Maurice Duplessis étudie le droit à Université Laval à Montréal et devient avocat au Barreau du Québec en 1913. Il rentre dans sa ville natale de Trois-Rivières pour exercer le droit et gagne en notoriété.

Candidat du Parti conservateur du Québec (PCQ) dans la « forteresse libérale » de Trois-Rivières aux élections provinciales de 1923, il est élu aux élections de 1927 et de 1931. Habile orateur et homme politique, il succède à Camillien Houde comme Chef de l'opposition officielle à l'Assemblée législative du Québec en 1933. Duplessis forme une coalition électorale avec l'Action libérale nationale (ALN) aux élections de 1935 pour tenter de défaire le libéral Louis-Alexandre Taschereau, solidement installé au pouvoir depuis 1920. C'est toutefois en grande partie grâce au Comité des comptes publics que Duplessis entraîne, en 1936, la chute du gouvernement Taschereau, accusé de corruption.

Initialement en concurrence avec Paul Gouin, dirigeant de l'Action libérale nationale, Maurice Duplessis devient rapidement la figure prééminente de la coalition PCQ-ALN. De ce fait, le Parti conservateur se dissout et la plupart des députés de l'ANL rejoignent celui que l'on surnommera le « Chef ». Un nouveau parti, l'Union nationale, est alors formé pour l'élection de 1936 : les unionistes y triomphent et Maurice Duplessis devient premier ministre du Québec pour la première fois. Son premier mandat est notamment marqué par l'antisyndicalisme et la lutte contre le communisme. Il devient aussi bâtonnier du Québec, c’est-à-dire le président de l’Ordre des avocats du Québec, de 1937 à 1938. Le mandat de Duplessis à la tête de l’État québécois est toutefois de courte durée puisqu’il est défait par le libéral Adélard Godbout en 1939, lors d'élections anticipées se déroulant dans le contexte de l'entrée du Canada dans la Seconde Guerre mondiale.

En 1944, l'opposition généralisée à la conscription et le plébiscite de 1942 au Québec entraînent le retour au pouvoir de l'Union nationale. Le second mandat de Maurice Duplessis dure quinze ans et quatre législatures, durant lesquelles son gouvernement fait de la défense du champ de compétences provinciales, le maintien du rôle de l'Église catholique dans les domaines de l'éducation et la santé et l'obstruction aux réformes keynésiennes mises de l'avant par le gouvernement du Canada ses priorités. Le second gouvernement Duplessis est aussi connu pour son conservatisme, son autoritarisme, son système clientéliste de grande ampleur, son antisyndicalisme et sa lutte contre le communisme ainsi que contre les Témoins de Jéhovah. Partisan du libéralisme économique et opposant de l'État-providence, Maurice Duplessis préside à une période de forte croissance économique, notamment grâce au développement de la Côte-Nord. Ses adversaires lui reprochent toutefois un capitalisme sauvage s'appuyant sur le clientélisme et les capitaux étrangers ainsi qu'une opposition à la mise en place de programmes sociaux.

Maurice Duplessis meurt en fonction le , à l’âge de 69 ans, des suites d'une hémorragie cérébrale, alors qu'il visitait la ville minière de Schefferville. Moins d'un an après sa mort, les libéraux de Jean Lesage remportent les élections de 1960 et ouvrent la voie à l’avènement de la Révolution tranquille. Cette période aurait mis fin à la « Grande Noirceur » qui aurait caractérisé le long règne de Maurice Duplessis à la tête du Québec. Bien qu'encore courante, cette interprétation est aujourd'hui remise en question par d'autres perspectives historiographiques, laissant place à un portrait plus nuancé des années du duplessisme.

Biographie

Un foyer « modeste, sobre et pieux »

Photographie de groupe en noir et blanc de 4 filles en robes blanches et d'un garçon en costume.
Maurice Duplessis et ses sœurs Marguerite, Jeanne, Étiennette et Joséphine-Gabrielle, 1897.

Maurice Le Noblet Duplessis naît à Trois-Rivières le . Il est le fils de Nérée Le Noblet Duplessis, avocat, juge de la Cour supérieure, député conservateur à l'Assemblée législative et maire de Trois-Rivières de juillet 1904 à avril 1905, et de Berthe Genest[note 2] - [2] - [3]. Son père provient d’une famille de cultivateurs de Yamachiche, village du comté de Saint-Maurice[3]. La mère de Maurice Duplessis est la fille de Laurent-Ubald Genest, greffier de Trois-Rivières, et de Emma MacCallum[note 3] de Montréal, aux ascendances écossaise et irlandaise[3]. Ces origines anglo-saxonnes feront en sorte que le futur premier ministre du Québec sera toujours « bien disposé envers les anglophones »[3]. Il dira même, à la blague, qu'il est en partie « un des leurs »[3].

À la fin du XIXe siècle, les Duplessis de Trois-Rivières sont des habitués des milieux politiques et religieux de la région. Plus particulièrement, on les retrouve dans les cercles des sympathisants conservateurs et ultramontains. Des assemblées politiques sont régulièrement tenues à leur domicile et on y débat des différentes affaires publiques du moment. Parmi les invités, on retrouve de nombreuses figures influentes de l'époque, notamment Louis-Olivier Taillon, Edmund James Flynn, Joseph-Mathias Tellier, Louis-Philippe Pelletier et Thomas Chapais. Le père, Nérée Duplessis, un homme très croyant, est un collaborateur de longue date de l’évêque de Trois-Rivières, Mgr Louis-François Laflèche, agissant à titre de conseiller juridique pour l'évêché[3]. Les liens qui unissent les hommes sont très étroits, et lorsque Nérée Duplessis décide de se présenter comme candidat conservateur dans Saint-Maurice en 1886, Mgr Laflèche lui donne son appui avec enthousiasme. Il le désigne comme son « homme de confiance à l’Assemblée législative »[4]. C'est au cours d'un discours tenu devant une assemblée de partisans, pendant la campagne électorale de 1890 que Nérée Duplessis apprend la naissance de son fils, mis au monde par le docteur Éphrem Panneton, un ami de la famille. L'enfant est baptisé quelques mois plus tard par Mgr Laflèche en personne, et il sera appelé Maurice – prénom choisi par le père, en l’honneur de sa circonscription électorale de Saint-Maurice[5].

Carte postale représentant l'immeuble d'une institution scolaire.
Carte postale représentant le Collège Notre-Dame à Montréal, c. 1910.

Maurice Duplessis grandit dans le quartier Sainte-Cécile à Trois-Rivières (où il fera plusieurs de ses discours électoraux, entre autres à l'aréna Laviolette) dans un foyer modeste, sobre et pieux. Seul garçon de la famille, il est le deuxième de cinq enfants. Son père est un chef de famille bienveillant mais distant, « attitude qui, en ces temps et lieux, était considérée propre aux affaires de l'Église, de l'État, de la famille et des corporations »[3]. Les quatre filles issues du couple Duplessis-Genest sont Marguerite, Jeanne, Étiennette et Joséphine-Gabrielle[6].

En 1898, il quitte sa ville natale pour aller étudier à Montréal, au collège Notre-Dame, alors tenu par les religieux de Sainte-Croix. Le jeune garçon y fait la connaissance du frère André, portier du collège, qui en retour se prend d’affection pour lui[7] - [note 4]. Il confie notamment au jeune garçon la responsabilité d'aller chercher les étudiants qui désirent s'adresser au recteur[7]. C’est à son contact que Duplessis développe son culte de saint Joseph – une dévotion personnelle qu’il conservera toute sa vie et qui influencera parfois même ses choix politiques. Excellent élève et vif d’esprit, il remporte régulièrement des prix et des distinctions en français, en histoire, en latin et en philosophie. Pourtant, malgré ses brillants résultats et son caractère studieux, il n’en est pas moins taquin et espiègle. En effet, il joue volontiers des tours à ses camarades, pour la plupart des fils de cultivateurs, mais aussi à ses sœurs, cachant leurs vêtements, leurs oreillers, attachant des lits de manière à les faire s'écrouler dès qu'on s'y couche, lançant des seaux d'eau, des tartes, des petits pains et d'autres projectiles[8] - [9].

La politique dans le sang

En 1902, à l'âge de douze ans, Maurice Duplessis est transféré au Séminaire de Trois-Rivières pour y suivre son cours classique. Son intérêt pour la politique se manifeste très tôt, apprenant par cœur des dates, des résultats et des faits de la politique québécoise et canadienne[note 5]. Alors qu'il fréquente le cercle oratoire et la Société Saint-Thomas-d'Aquin du collège, il se démarque dans les débats de classes et en rhétorique[10]. Il ne s'intéresse que très peu au sport[11]. Il n'en pratiquera d'ailleurs aucun durant sa vie, à l'exception du croquet[11]. À sa première année au séminaire de Trois-Rivières, Duplessis se classe douzième sur quarante-huit élèves[10]. Il passe à la vitesse supérieure lors de ses deux dernières années, terminant premier de sa cohorte et méritant des prix en histoire, en théologie, en latin et en grec, en rhétorique ainsi qu'en composition française et anglaise[10]. Très tôt, au sein d'envolées que son biographe Conrad Black qualifie « d'apologies aussi extravagantes que peu convaincantes des fondateurs du Canada français », il exprime tout l'attachement et l'admiration qu'il voue à ses racines et à sa foi catholique[10] :

« Combien beau et méritoire était l'acte qui avait pour but l'établissement du catholicisme sur des terres inexplorées au sein de nations barbares plongées dans les forêts ténébreuses de l'idolâtrie ! Ah ! La mer, mesdames et messieurs, n'a pas toujours été cette étendue limpide d'eau dans laquelle se reflètent les rayons lumineux d'un soleil resplendissant ; ces vagues n'ont pas toujours été onduleuses et d'aspect symétrique sur lesquelles voguaient en une douce tranquillité d'antiques et fragiles vaisseaux. Que d'audace il a fallu pour s'aventurer vers ces immensités pélagiques en légère caravelle...À la lumières de ses actions glorieuses, osez me dire que Louis Hébert n'était pas un grand chrétien, qu'il n'était pas un amant dévoué et passionné du fleurdelisé. »

Cette admiration pour Louis Hébert, l'un des premiers colons de la Nouvelle-France, laisse déjà entrevoir un « sentiment de vénération pour la vie rurale » chez le jeune Maurice Duplessis[9] : « Louis Hébert avait compris qu'avec l'honnête et bonne fortune de posséder la santé de l'âme et du corps, la vie aux champs apportait le vrai bonheur […] Malheureusement, de nos jours […] la campagne se voit délaissée par des légions de jeunes hommes forts et vigoureux qui la quittent pour aller encombrer les bureaux de grandes villes. » Duplessis n'oublie pas ses racines paysannes, lui qui passe ses vacances d'été sur la ferme de son grand-père, à Yamachiche[9].

Pendant son adolescence et jusqu'au début de la vingtaine, Maurice Duplessis se prépare à la vie publique en aidant à l'organisation politique auprès de J.A. Barrette, député conservateur de Berthier[11]. Il suit aussi son père dans ses campagnes électorales et dans ses assemblées un peu partout à travers la région. Alors qu'il avait à peine dix ans, il s'était déjà exprimé lors d'assemblées publiques et avait été au contact des électeurs[10]. Le jeune Duplessis manifeste alors un intérêt pour les aspects plus pratiques et moins théoriques de la politique[11]. Toutefois, même si la vie publique était attrayante, l'influence du frère André se fait sentir puisqu'il est également attiré par l'Église. Mais les rigueurs de la soutane lui paraissaient trop contraignantes, et il avouera de lui-même à sa secrétaire quelques années plus tard : « le sacerdoce, c'est trop pour moi »[12]. Conrad Black dresse le portrait d'un jeune Maurice Duplessis déterminé[11] :

« Sa vie sociale était orientée en fonction de la vocation qu'il s'était choisie. Ses lectures, beaucoup plus nombreuses qu'il ne voulait l'admettre plus tard lorsqu'il s'adressait à des ouvriers et à des gens de la campagne, étaient plutôt de nature à le renseigner sur la vie publique qu'à le distraire. Il n'avait pas de passe-temps et en dehors de la politique, ses seules distractions de jeunesse furent le baseball professionnel (il aimait en mémoriser les statistiques presque autant que celles se rapportant à la politique) et, de temps à autre, l'opéra. »

Au dĂ©but du XXe siècle, un engouement nationaliste traverse le QuĂ©bec et la popularitĂ© de figures politiques telles qu'Henri Bourassa et Wilfrid Laurier se fait ressentir partout. Trois-Rivières et Duplessis n'y sont pas insensibles. Fortement influencĂ© par sa famille et cette vague d'effervescence politique, Maurice Duplessis suit les traces de son père et s'engage vers le droit. Il n'est pas intĂ©ressĂ© par les affaires, peut-ĂŞtre, estime Conrad Black, « parce qu'il savait que les Anglais y Ă©taient fortement avantagĂ©s »[11]. Ă€ l’automne 1910, il s’inscrit donc Ă  la facultĂ© de droit de l’UniversitĂ© Laval Ă  MontrĂ©al (l'actuelle UniversitĂ© de MontrĂ©al). Cette voie, Ă  l'Ă©poque, Ă©tait le tremplin traditionnel vers la politique mais aussi vers les affaires[11]. Pendant ses Ă©tudes, il se dĂ©marque par sa vivacitĂ©, son sens de la rĂ©partie, son franc-parler et son entregent[13] - [14]. SiĂ©geant dans l'opposition, il est alors une vedette du « Parlement modèle » organisĂ© par l'universitĂ©[12]. Maurice Duplessis fait son stage en droit chez Rodolphe Monty et Alfred Duranleau, deux conservateurs nationalistes et amis de la famille auprès desquels son père le rĂ©fère[15].

Débuts professionnels et entrée en politique

Photographie d'un jeune homme de vingt-et-un ans en habit cravate.
Maurice Duplessis en 1911.

Un jeune avocat bien en vue

Duplessis est reçu avocat au Barreau du Québec le [16]. Il retourne ensuite dans sa ville natale pour pratiquer le droit au sein du Barreau de Trois-Rivières, duquel il restera membre toute sa vie[17]. Il s’associe alors à son père pendant peu de temps, jusqu'à ce que celui-ci soit nommé juge le . Il ouvre ensuite son propre bureau sur la rue Hart, derrière la demeure paternelle, avec son associé Édouard Langlois, un ancien camarade du Séminaire devenu le mari de sa sœur Gabrielle[18]. Léon Lamothe, un autre avocat de Trois-Rivières, se joint au groupe et ils forment ensemble le cabinet Duplessis, Langlois & Lamothe, Avocats et Procureurs[16] - [19]. Le partenariat entre les trois hommes se maintient au moins jusqu'à tard dans les années trente[19].

Plus occupé par les affaires de droit civil que de droit criminel, Duplessis développe sa clientèle parmi les petites gens. Rapidement, il se fait une réputation d'avocat compétent, préparant ses causes consciencieusement, attirant une large clientèle grâce à ses plaidoyers efficaces. Sociable et dynamique, parcourant la ville à bord de sa voiture de luxe de marque Winton (achetée à crédit, au grand désarroi de son père), il devient vite une figure populaire à Trois-Rivières[20]. Le jeune avocat s'implique dans les activités sociales de son milieu (notamment en s'occupant d'une équipe de baseball locale) et devient un habitué des tavernes à la mode. Son succès professionnel est toutefois obscurci par le décès de sa mère, Berthe Genest, en 1921[21].

Un siège à l'Assemblée législative

Photographie noir et blanc d'un homme en habit cravate.
Arthur Sauvé, chef du Parti conservateur du Québec de 1916 à 1929 et père de Paul Sauvé, successeur de Maurice Duplessis et 17e premier ministre du Québec.

Malgré un début de carrière prometteur dans le domaine du droit, Maurice Duplessis ne perd pas de vue ses ambitions politiques. Il se présente une première fois comme candidat conservateur dans Trois-Rivières à l'élection québécoise de 1923, alors qu'il tente de déloger le libéral Louis-Philippe Mercier, récemment élu deux ans auparavant[22]. Mercier mène une campagne féroce, jouissant d'une organisation libérale bien rodée, dirigée par son mentor, l'ancien maire de Trois-Rivières, Jacques Bureau[22]. Maurice Duplessis compte plutôt sur les contacts de son père (notamment Louis-Olivier Taillon), la solidarité de ses confrères avocats et l'admiration de ses clients[22]. Sa campagne est basée sur la critique d'un « mépris de l'autonomie provinciale » qu'il impute au premier ministre Louis-Alexandre Taschereau[23]. Duplessis dénonce également une mauvaise gestion de la justice et discute des enjeux des boissons alcoolisées[23]. Il fait venir des orateurs des quatre coins du Québec afin qu'ils se prononcent en sa faveur[24]. Il invite même le chef de son parti, Arthur Sauvé, mais ce dernier, malade, ne peut se rendre à Trois-Rivières[24]. Ne se faisant pas d'illusions, le jeune Duplessis sait qu'il ne risque pas de remporter la circonscription : il espère toutefois faire bonne figure afin de devenir le meneur de l'opposition dans la région[22].

Les deux candidats offrent finalement une course assez serrĂ©e, mais Mercier est Ă©lu par 1 612 voix contre 1 328 pour Duplessis[25]. Ă€ l'Ă©chelle du QuĂ©bec, les conservateurs essuient une nouvelle dĂ©faite alors que les libĂ©raux de Taschereau forment un nouveau gouvernement majoritaire. Pour couronner le tout, le suivant, Étiennette Duplessis, la sĹ“ur de Maurice, Ă©pouse Édouard Bureau, le fils de Jacques. Le , NĂ©rĂ©e Le Noblet Duplessis, qui est affectĂ© par le diabète depuis le dĂ©but des annĂ©es 1920, meurt Ă  l'HĂ´tel-Dieu de MontrĂ©al[21]. Les alliĂ©s comme les adversaires de cette Ă©minente figure de Trois-Rivières viennent alors lui rendre hommage[21]. Maurice Duplessis est très affectĂ© par la mort de son père, qu'il admirait grandement et dont il espĂ©rait pouvoir venger les revers politiques de son vivant[21]. Lors de l'Ă©lection de 1927, il est prĂŞt Ă  se battre Ă  nouveau. Cette fois, il a tout prĂ©parĂ© et ne laisse rien au hasard. Son organisateur est Robert RenĂ©, un marchand de chaussures « auquel on reconnaĂ®t du jugement et mĂŞme de la psychologie »[26]. AidĂ© par sa mĂ©moire exceptionnelle des noms et des visages, Maurice Duplessis visite bon nombre de familles et contredit son opposant sans relâche lors d'assemblĂ©es publiques. Après une campagne serrĂ©e lui permettant de recueillir des appuis dans de nombreuses familles ouvrières et bourgeoises, il est finalement Ă©lu Ă  2 622 voix contre 2 496 pour son adversaire libĂ©ral Mercier. Sa majoritĂ© est faible – 126 voix – mais il s'agit de la première fois en 27 ans qu'un candidat conservateur rĂ©ussit Ă  remporter la victoire dans cette circonscription, considĂ©rĂ©e jusqu'alors comme une « forteresse libĂ©rale »[27]. Debout sur le toit d'une voiture, face Ă  ses partisans venus le fĂ©liciter pour sa victoire, Maurice Duplessis dĂ©clare prophĂ©tiquement : « Vous avez devant vous un futur premier ministre du QuĂ©bec[28] ». Il restait toutefois encore beaucoup de travail Ă  faire car, malgrĂ© sa victoire Ă  Trois-Rivières, Maurice Duplessis doit faire face Ă  une nouvelle majoritĂ© libĂ©rale Ă  l'AssemblĂ©e lĂ©gislative[29].

Le Salon bleu de l'Assemblée nationale du Québec. En 1927, 85 députés siègent au parlement québécois. Trois-Rivières est la plus vieille circonscription québécoise et existe électoralement depuis 1792[30].

Lorsque la session parlementaire s'ouvre, le , Maurice Duplessis siège donc dans l'opposition. À l'époque, l'Assemblée nationale ne siège que deux mois par année, ce qui permet aux candidats de passer plus de temps dans leur circonscription[31]. Ce mode de fonctionnement est loin de déplaire à Duplessis, qui résume ainsi ses priorités : « Les Trois-Rivières d'abord ; les Trois-Rivières ensuite ; les Trois-Rivières toujours »[31]. Durant son premier mandat, il demande un inventaire de l'industrie forestière (on soupçonne à l'époque que les forêts sont surexploitées), un arrêt de l'augmentation des taxes, la réorganisation de la police provinciale ou encore la mise en place de lois visant à préserver le caractère religieux du dimanche[32]. Duplessis réclame également que l'aménagement des routes tienne mieux compte des besoins des agriculteurs et des commerçants[32].

Brillant orateur usant de ses connaissances en droit pour éplucher les textes de loi, Maurice Duplessis devient rapidement une figure incontournable de l'opposition[33]. Au caucus conservateur des et , alors qu'Arthur Sauvé démissionne de son poste de chef, on espère même que le jeune avocat brigue la chefferie du parti[33]. Ce dernier considère toutefois que son heure n'est pas encore arrivée[33]. C'est finalement Camillien Houde, le maire de Montréal, qui prend la tête du Parti conservateur du Québec[34]. Cumulant désormais les fonctions de chef de l'opposition et de maire, il doit souvent s'absenter de l'Assemblée législative, ce qui permet à Duplessis d'exercer un important leadership au sein de l'hôtel du Parlement[35].

Dans son discours de départ, Arthur Sauvé, le chef sortant, donne une idée de l'état de sa formation politique à l'époque : « Je souhaite à mon successeur de rétablir l'ordre dans nos rangs ravagés »[34]. Bien que la relation entre Houde et Duplessis soit cordiale, ce dernier n'a pas beaucoup confiance en ce nouveau chef, que Conrad Black qualifie d'« impétueux, prolixe et fanfaron »[37]. Duplessis confie ses pensées à un certain Antonio Barrette, qui est à l'époque un jeune délégué de Joliette : « Vous allez voir Houde monter jusqu'au sommet de la colline, mais rendu là, il va redescendre sur l'autre pente[37] ». Black met en lumière l'attitude de Duplessis vis-à-vis de Camillien Houde, nous offrant du même coup un aperçu de l'univers idéologique du député trifluvien[37] :

« Maurice Duplessis était à bien des points de vue fondamentalement conservateur ; il se méfiait de ce qui flamboyait et doutait de ce qui était improbable. La famille était importante pour lui. Il aimait aussi qu'un homme sache respecter la procédure. Pour lui, Camillien Houde était un homme désorganisé qui avait fait faillite à maintes reprises, qui n'appartenait à aucun milieu, n'avait ni famille ni profession, qui, sauf en ce qui concernait son éloquence de carrefour, était inexpérimenté en tout, indiscipliné et superficiel. Il était certain que Houde, gros homme bruyant et inefficace, ne serait pas de taille à se mesurer au rusé, magistral et minutieux Taschereau. »

La suite des choses semble donner raison Ă  Maurice Duplessis puisque l'Ă©lection gĂ©nĂ©rale de 1931 est une nouvelle dĂ©bâcle pour le Parti conservateur du QuĂ©bec : les libĂ©raux de Taschereau sont Ă  nouveau reconduits au pouvoir au sein d'un gouvernement majoritaire (79 sièges contre 11 pour les conservateurs). Camillien Houde perd dans sa propre circonscription (Sainte-Marie), Ă  MontrĂ©al. Ă€ Trois-Rivières, Maurice Duplessis sera quant Ă  lui rĂ©Ă©lu de justesse Ă  3 812 voix contre 3 771 pour son adversaire libĂ©ral Louis-Philippe BiguĂ© – une majoritĂ© de seulement 41 voix[38]. Cette nouvelle dĂ©faite Ă©lectorale du Parti conservateur lui fait envisager plus sĂ©rieusement d'en briguer la chefferie[39].

Duplessis Ă  la tĂŞte de l'opposition

En 1931, Camillien Houde perd les élections municipales montréalaises et doit céder son poste de maire à Fernand Rinfret. Il n'est donc plus élu, ni au niveau municipal, ni au niveau provincial[40]. Lorsque le premier ministre Taschereau apprend la nouvelle, il annonce que « ce résultat signifie la fin du houdisme »[40]. Après avoir tenté de contester le résultat des élections provinciales, les conservateurs dénonçant une panoplie d'irrégularités, Houde démissionne de son poste de chef du Parti conservateur du Québec le [41]. À sa demande, c'est le député Charles Ernest Gault qui assure l'intérim. Il s'agit là d'un véritable affront pour Maurice Duplessis[41]. Ce dernier ne tarde toutefois pas à prendre les rênes du parti, alors qu'il ravit l'intérim à Gault et entre en Chambre comme chef de l'opposition dès [42]. Entre-temps, Duplessis est créé Conseiller du roi le , un titre honorifique décerné à certains juristes éminents du Commonwealth[16].

Photographie noir et blanc d'un homme en habit cravate.
Maurice Duplessis, député de Trois-Rivières, 1927.

C'est en octobre 1933 que Maurice Duplessis convoque un congrès, à Sherbrooke, pour élire un nouveau chef[43]. En pleine Grande Dépression, le caucus conservateur le choisit comme successeur de Houde, alors que le trifluvien défait Onésime Gagnon, député de Dorchester, à 332 voix contre 214[43] - [44]. Sept des dix députés conservateurs élus à l'Assemblée ainsi que tous les ministres fédéraux du Québec, à l'exception de Maurice Dupré, partenaire professionnel de Gagnon, ont alors donné leur appui à Maurice Duplessis, qui monte en puissance[43].

Le nouveau chef du Parti conservateur du Québec est accueilli en héros à Trois-Rivières et Québec[44]. Dans la capitale nationale, Duplessis rencontre le cardinal Jean-Marie-Rodrigue Villeneuve, l'évêque anglican Williams, le lieutenant-gouverneur du Québec Henry George Carroll ainsi que le maire de la ville, Henri-Edgar Lavigueur[44]. Il n'a toutefois pas que des sympathisants. Le chef sortant, Camillien Houde, déclare, à l'intention des duplessistes : « Je périrai ou ils périront »[44]. Dans la presse, il surenchérit : « M. Gagnon a tort de se rallier. Quant à moi, je me considère libre d'adhérer à tout mouvement sérieux qui pourrait être tenté pour nous débarrasser, dans Québec, des deux partis politiques qui perpétuent l'idée que la force prime le droit[44]. » Cette déclaration quelque peu prophétique est révélatrice de l'animosité entre Maurice Duplessis et Camillien Houde. Les deux hommes deviennent des ennemis politiques et ne se réconcilient qu'une dizaine d'années plus tard[45] - [46].

Maurice Duplessis ne perd pas de temps à se mettre au travail. Dans sa réplique au discours du Trône de Louis-Alexandre Taschereau, il passe à l'offensive, condamnant sans relâche les politiques du premier ministre libéral[47]. Plus précisément, il critique la surcapitalisation, un désordre dans l'industrialisation et l'exploitation des ressources, une iniquité vis-à-vis des municipalités, des affrontements inutiles avec le fédéral ainsi qu'un manque de considération pour les traditions[47]. De manière plus générale, pour reprendre les termes de Conrad Black, Duplessis veut mettre en lumière la « lassitude et l'immobilité caractéristiques d'un gouvernement au pouvoir depuis trop longtemps »[47].

Maurice Duplessis et ses conservateurs ne sont pas les seuls insatisfaits du rĂ©gime de Taschereau. En effet, mĂŞme dans les rangs du premier ministre, une opposition commence Ă  pointer le bout du nez. Certains libĂ©raux nationalistes sont déçus de la manière dont leur chef gère la crise Ă©conomique des annĂ©es 1930. MenĂ©s par Paul Gouin, ces dissidents finissent par claquer la porte du Parti libĂ©ral et fondent l'Action libĂ©rale nationale (ALN) en 1934. Ce nouveau parti politique compte notamment dans ses rangs Philippe Hamel, Joseph-Ernest GrĂ©goire et Oscar Drouin. Le , il fait paraĂ®tre son programme dans les journaux francophones. L'ALN prĂ©conise la colonisation, l'exploitation rurale et le corporatisme[48]. Dans le contexte de la Grande DĂ©pression, on insiste sur l'importance du dĂ©veloppement agricole : « ...l'Ĺ“uvre de restauration Ă©conomique se ramène principalement Ă  une Ĺ“uvre de restauration rurale, basĂ©e sur l'agriculture familiale et la coopĂ©ration. C'est pourquoi nous plaçons, Ă  la base mĂŞme de notre plan d'action, les rĂ©formes agraires[49]. » L'ALN critique Ă©galement les trusts, notamment dans le domaine de l'Ă©nergie, et propose de nationaliser les compagnies hydroĂ©lectriques[50].

Initialement, Maurice Duplessis Ă©tait dĂ©favorable Ă  la crĂ©ation d'une tierce formation politique[48]. Le chef conservateur est sans Ă©quivoque quant aux nombre de partis au QuĂ©bec : « Deux suffisent, un bon et un mauvais »[48] . Duplessis est alors concentrĂ© sur les Ă©lections provinciales de 1935, qui arrivent Ă  grands pas. Il commence sa tournĂ©e provinciale le , dans la circonscription d'Antonio Élie, un dĂ©putĂ© conservateur du comtĂ© de Yamaska et Ă©leveur de renards ayant remportĂ© le trophĂ©e du MĂ©rite agricole[48]. C'est chez ce champion du monde rural que Maurice Duplessis donne un discours qui laisse entrevoir tout l'attachement qu'il voue Ă  la tradition et toute la mĂ©fiance qu'il cultive vis-Ă -vis de la modernitĂ©, comme le souligne Conrad Black[48] :

« Duplessis accusa Taschereau de tous les crimes inhérents à une industrialisation désordonnée. On avait accordé la priorité à des projets d'exploitation hydro-électrique plutôt qu'à l'industrie agricole. La colonisation était presque mise en rancart dans la ruée vers l'urbanisation. On avait négligé le fermier pendant qu'on accordait toujours plus de privilèges aux industriels étrangers et corrompus, on n'avait offert aucune compensation aux éleveurs de renards (comme Élie ; le marché des fourrures avait pratiquement disparu au début des années 1930), pas plus qu'on n'avait offert de crédit agricole ou de programme d'électrification rurale et l'assistance offerte aux vieilles paroisses, qui formaient l'armature morale et sociale du Québec, était bien insuffisante. La terre, l'Église et la culture — tout ce qui était patriotique, divin et traditionnel — était jeté par-dessus bord pour faire place à l'urbanisation, à la spéculation et au matérialisme déshumanisant. Et parmi les masses grouillantes des villes, la prudence, la pratique religieuse et la foi, tout ce qui était honnête et digne était balayé par la frivolité, le libertinage, le désordre, l'alcoolisme et le manque de respect envers Dieu et l'État. »

Durant cette tournĂ©e prĂ©-Ă©lectorale, Duplessis s'attaque frontalement aux intĂ©rĂŞts Ă©conomiques Ă©trangers dans la province. Il reproche Ă  Taschereau d'avoir favorisĂ© des chaĂ®nes de supermarchĂ©s en leur accordant des crĂ©dits de taxe tandis que des Ă©piciers indĂ©pendants sont acculĂ©s Ă  la faillite[51]. Il dresse le mĂŞme bilan en ce qui concerne les ressources naturelles, qu'il considère comme Ă©tant souvent utilisĂ©es au dĂ©triment des QuĂ©bĂ©cois car elles sont monopolisĂ©es par des compagnies Ă©trangères[51]. Le chef conservateur n'est pas le seul Ă  dresser un tel bilan de la gestion Ă©conomique du QuĂ©bec. L'Action libĂ©rale nationale, dont le programme s'inspire de l'École sociale populaire des JĂ©suites, tire les mĂŞmes conclusions[49]. Deux semaines avant l'Ă©lection provinciale de 1935, le Parti conservateur du QuĂ©bec de Duplessis et l'ALN de Paul Gouin s'entendent pour former une coalition : c'est l'« Alliance Gouin-Duplessis », aussi dĂ©signĂ©e sous le nom d'« Union nationale ». Les deux partis se partagent alors les circonscriptions afin d'Ă©viter que leurs candidats ne s'affrontent[52].

Photographie noir et blanc de l'intérieur d'une assemblée politique avec les députés à leur siège.
L'Assemblée législative du Québec, en date du . Assis à la première rangée à droite, troisième à partir du fond, Duplessis fait directement face à Taschereau.
Photographie noir et blanc de deux hommes avec chapeaux avec une femme au centre.
Maurice Duplessis, chef du Parti conservateur, et Paul Gouin, chef de l'Action libérale nationale lors d'une réunion politique à Québec en 1935.

En , la coalition entre les conservateurs et l'ALN semble avoir le vent dans les voiles. Le gouvernement libĂ©ral s'essouffle, attaquĂ© de toutes parts par une opposition qui lui reproche toujours une complaisance vis-Ă -vis des trusts et des compagnies Ă©trangères et embarrassĂ© par des soupçons de corruption. Lorsque l'Union nationale organise une assemblĂ©e au marchĂ© Saint-Jacques le , la seule mention de Louis-Alexandre Taschereau suffit Ă  provoquer des cris d'indignation[53]. Le premier ministre a d'ailleurs de la difficultĂ© Ă  aller au bout de ses discours, alors que les assemblĂ©es libĂ©rales sont chahutĂ©es par des manifestants en colère[53]. Alors que Le Devoir et L'Action catholique soutiennent l'« Union nationale », libĂ©raux et unionistes luttent pour s'assurer le soutien du clergĂ©[54]. Le Haut clergĂ© semble toutefois avoir choisi de botter en touche, voire de soutenir le pouvoir, alors qu'il interdit parfois Ă  des prĂŞtres de se prononcer en faveur de l'opposition[54].

La coalition formĂ©e par les conservateurs et l'ALN ne sera pas suffisante pour dĂ©loger Louis-Alexandre Taschereau. Ce dernier est rĂ©Ă©lu Ă  la tĂŞte d'un gouvernement tout juste majoritaire, raflant 48 des 90 sièges disponibles[55]. Le pouvoir des libĂ©raux est toutefois Ă©branlĂ© puisque le Parti libĂ©ral a 20 sièges de moins qu'en 1931[55]. Le Parti conservateur fait Ă©lire 16 dĂ©putĂ©s et l'ALN en fait Ă©lire 26[55]. Quant Ă  Maurice Duplessis, il est rĂ©Ă©lu dans sa circonscription, qu'il remporte par une majoritĂ© de 1 200 voix (sur environ 8 500 votes)[55]. Le chef conservateur, par sa fougue qui contraste avec le modĂ©ration de Paul Gouin, exerce une forte influence sur la dĂ©putation de l'Action libĂ©rale nationale[56]. Après les Ă©lections, la majoritĂ© des dĂ©putĂ©s de l'ALN rejoignent les conservateurs pour fonder l'Union nationale (UN), un nouveau parti politique qui n'allait pas tarder Ă  faire sa marque sur le QuĂ©bec[45].

L'Union nationale à la conquête de l'État

Couverture d'un livre intitulé Le catéchisme des électeurs.
Le catéchisme des électeurs (texte complet), publié chez J.-B. Thivierge & fils en 1935, puis réédité en 1936. Le catéchisme des électeurs est largement inspiré du Catéchisme politique publié en 1851 par Antoine Gérin-Lajoie[57] - [58].

Maurice Duplessis passe Ă  l'offensive lorsque s'ouvre la nouvelle session parlementaire. Au printemps 1936, le ComitĂ© des comptes publics dĂ©clenche une commission d'enquĂŞte visant Ă  Ă©tudier la gestion des fonds publics par le gouvernement Taschereau[59]. Plusieurs irrĂ©gularitĂ©s sont alors mises en lumière, alors que des ministres et des fonctionnaires reconnaissent avoir utilisĂ© l'argent des contribuables pour des dĂ©penses personnelles. Antoine Taschereau, frère du premier ministre et comptable de l'AssemblĂ©e lĂ©gislative, est notamment forcĂ© de dĂ©missionner après avoir admis empocher des intĂ©rĂŞts sur des dĂ©pĂ´ts bancaires publics[60]. Plusieurs autres scandales Ă©clatent Ă  la suite des rĂ©vĂ©lations du ComitĂ© des comptes publics. Le plus notable est probablement celui des « culottes Ă  Vautrin », alors qu'IrĂ©nĂ©e Vautrin ex-ministre de la Colonisation, admet avoir achetĂ© un pantalon aux frais du ministère[61]. Bien que l'incident puisse sembler anodin, Maurice Duplessis, appelĂ© Ă  interroger le gouvernement lors de l'enquĂŞte, en fait un vĂ©ritable symbole de « la corruption du gouvernement Taschereau »[61]. Il use de son excellente mĂ©moire pour retenir les informations qu'on lui prĂ©sente et met les libĂ©raux dos au mur[59]. Alors que les journaux rapportent les moindres dĂ©tails de l'enquĂŞte et que les lecteurs s'en dĂ©lectent, le ComitĂ© des comptes publics est un vĂ©ritable tremplin politique pour le chef de l'opposition[60].

Le , Louis-Alexandre Taschereau prĂ©side son dernier conseil des ministres et prĂ©sente sa dĂ©mission au lieutenant-gouverneur du QuĂ©bec[62]. C'est AdĂ©lard Godbout qui prend la tĂŞte du gouvernement[62]. Ce dernier fixe de nouvelles Ă©lections au [63]. L'Union nationale a le vent dans les voiles mais la coalition entre les conservateurs et les dĂ©putĂ©s de l'Action libĂ©rale nationale est fragile. Paul Gouin et Maurice Duplessis ne s'entendent pas sur la sĂ©paration des circonscriptions Ă©lectorales (une clause accordait alors de 25 Ă  30 circonscriptions aux conservateurs et une soixantaine Ă  l'ALN)[64]. En effet, Duplessis, qui exerce une forte influence sur la dĂ©putation de l'ALN, exige le deux tiers des circonscriptions aux conservateurs[64]. Il l'obtient[64]. Cette dĂ©cision provoque une rupture entre les deux chefs : le , Paul Gouin publie un manifeste pour annoncer qu'il combattra Ă  la fois les libĂ©raux de Godbout et les conservateurs de Duplessis[64].

Quoi qu'il en soit, la campagne Ă©lectorale de l'Union nationale est lancĂ©e en dĂ©but juillet, et c'est Ă  Baie-du-Febvre, dans sa Mauricie natale, que Maurice Duplessis dĂ©cide de l'officialiser[65]. Les unionistes ont alors pour objectif d'associer AdĂ©lard Godbout Ă  l'hĂ©ritage de Louis-Alexandre Taschereau, son prĂ©dĂ©cesseur[66]. Ils disent alors vouloir « abattre le rĂ©gime Taschereau-Godbout »[66]. Cette manĹ“uvre politique fonctionne, alors que l'Union nationale mine sĂ©rieusement la popularitĂ© du gouvernement libĂ©ral. Aux quatre coins de la province, les orateurs unionistes discrĂ©ditent le pouvoir[66]. Ils distribuent Ă  coup de milliers d'exemplaire un pamphlet, Le CatĂ©chisme des Ă©lecteurs[66]. Cette brochure aux allures de pamphlet, d’abord de 43 pages en 1935 puis de 122 pages en 1936, prĂ©sentĂ©e sous forme de questions-rĂ©ponses, s'attaque aux enjeux politiques du moment[67]. On reproche encore aux libĂ©raux d'avoir vendu le QuĂ©bec aux intĂ©rĂŞts Ă©trangers, notamment dans le domaine de l'Ă©lectricitĂ©[66]. L'Union nationale ne manque pas non plus de rappeler les nombreux scandales concernant la gestion des fonds publics[66]. Peu avant l'Ă©lection, Paul Gouin annonce qu'il ne prĂ©sente pas de candidats et qu'il quitte temporairement la politique : Duplessis est seul Ă  la tĂŞte des unionistes[68]. Quelques jours avant les Ă©lections, il rĂ©ussit Ă  rĂ©unir des dizaines de milliers de partisans au stade de MontrĂ©al[69]. MalgrĂ© des difficultĂ©s financières, l'Union nationale va au bout de sa campagne et triomphe[69]. Le , les unionistes Ă©crasent les libĂ©raux, alors qu'ils obtiennent 76 des 90 sièges et forment un gouvernement majoritaire : Maurice Duplessis est premier ministre du QuĂ©bec. Sa victoire met fin Ă  39 annĂ©es consĂ©cutives de règne libĂ©ral[69].

Le goût du pouvoir

Le premier mandat de Maurice Duplessis Ă  la tĂŞte du QuĂ©bec s'amorce avec la formation de son cabinet ministĂ©riel. La tâche est dĂ©licate car l'Union nationale, fruit d'une coalition entre des tendances parfois divergentes, est loin d'ĂŞtre un bloc monolithique[70]. OnĂ©sime Gagnon, rival de Duplessis lors de la course au leadership conservateur en 1933, obtient le ministère des Mines, de la Chasse et des ForĂŞts[70]. Le premier ministre dĂ©cide toutefois de ne pas offrir de portefeuille ministĂ©riel Ă  Philippe Hamel, figure de proue de l'ALN et de la lutte pour la nationalisation de l'hydroĂ©lectricitĂ©[71]. De ce fait, il n'arrive pas Ă  convaincre les libĂ©raux Ernest GrĂ©goire et Ernest Ouellet d'accĂ©der Ă  un ministère, ces derniers refusant de faire partie d'un cabinet ministĂ©riel qui n'inclut pas Hamel[71]. Le cabinet est finalement composĂ© de 14 ministres[71]. Il compte une majoritĂ© d'anciens conservateurs et cinq libĂ©raux[71]. Aux lendemains de l'Ă©lection de Maurice Duplessis, Camillien Houde, son ancien rival du Parti conservateur, annonce Ă  la surprise gĂ©nĂ©rale qu'il dĂ©missionne du poste de maire de MontrĂ©al, notamment parce que ses relations avec le nouveau premier ministre sont « loin d'ĂŞtre cordiales »[72]. Une dĂ©cision somme toute impulsive car, trois mois plus tard, il tentera de reconquĂ©rir la mairie de MontrĂ©al. Houde est toutefois battu par AdhĂ©mar Raynault, dĂ©putĂ© ministĂ©riel soutenu par l'Union nationale[72]. Lors de son premier discours du trĂ´ne, Maurice Duplessis rĂ©sume en une phrase les prioritĂ©s de son premier mandat : « la primautĂ© du capital humain sur le capital argent »[72]. Pour ce faire, il annonce quatre premières mesures lĂ©gislatives : la mise en place d'un crĂ©dit agricole provincial, l'abolition de la loi Dillon (une loi adoptĂ©e par les libĂ©raux pour limiter les contestations judiciaires en matière Ă©lectorale), la modification de la loi des pensions de vieillesse et de la loi des accidents de travail ainsi que l'interdiction aux ministres de faire partie de conseils d'administration[73]. Maurice Duplessis installe Ă©galement, dans un geste hautement symbolique, un crucifix au-dessus du fauteuil de l'Orateur de l'AssemblĂ©e lĂ©gislative[74]. Bien qu'il estime que ce geste fut peut-ĂŞtre un clin d'Ĺ“il Ă  l'ultramontanisme de son père, l'historien Jonathan Livernois y voit surtout une continuitĂ© avec les politiques de Taschereau, rappelant que les libĂ©raux avaient mis en place des crucifix dans les palais de justice et instaurĂ© la prière « universelle » en 1922[75].

Le crĂ©dit agricole est une mesure très populaire dans les campagnes, ce qui donne Ă  l'Union nationale le soutien des milieux ruraux. Fidèle Ă  ses idĂ©aux de jeunesse, Maurice Duplessis considère alors que « l'industrie clĂ© est toujours l'agriculture[73] ». Les unionistes ne manqueront pas de rappeler inlassablement, lors des Ă©lections suivantes, que le crĂ©dit agricole est nĂ© de leurs mains[73]. Autre Ă©lĂ©ment de continuitĂ©, mais cette fois avec ces prĂ©dĂ©cesseurs : Maurice Duplessis n'hĂ©site pas Ă  ouvrir la porte aux capitaux Ă©trangers. C'est notamment le cas lorsqu'il permet au colonel Robert McCormick, un magnat amĂ©ricain des journaux connu pour son opposition au New Deal, d'installer une usine de papier Ă  Baie-Comeau[78]. Ă€ son tour, Maurice Duplessis est accusĂ© par des nationalistes de « vendre le QuĂ©bec aux Ă©trangers »[79]. Ă€ ce propos, Bernard Saint-Aubin, l'un des biographes du chef unioniste, souligne le « rĂ©alisme » de Duplessis (ses adversaires parlent plutĂ´t d'« hypocrisie »)[79] :

La 20e législature du Québec en Chambre, à l'Assemblée législative du Québec. C'est aussi le qu'un crucifix est accroché au-dessus du fauteuil de l'Orateur de l'Assemblée législative. Il sera retiré le à la suite d'une motion adoptée à l'unanimité par les députés québécois le précédent[80].

« Il a de l'admiration pour les Anglais, les Américains, qui manifestent du dynamisme en affaires. Il sait que la province a besoin des géants de la finance - dont la plupart ne sont pas francophones - pour la mettre en valeur et créer des emplois pour les Québécois. En période de prospérité, on ne renverse pas les gouvernements. Il le sait également. L'Union nationale, quand elle était dans l'Opposition, avait promis de détruire la puissance des capitalistes étrangers sur l'économie du Québec, mais elle est désormais au pouvoir. Duplessis, qui est un réaliste, renoue avec la politique de son prédécesseur. Duplessis continue Taschereau comme Taschereau avait continué Gouin. Le premier ministre ne fait que poursuivre la politique traditionnelle des chefs de gouvernement du Québec qui, depuis la fin du XIXe siècle, ont fait appel à la finance étrangère pour développer la province. »

Outre le fait de lui attirer les foudres de divers nationalistes, ce « rĂ©alisme » duplessiste provoque des troubles Ă  l'intĂ©rieur mĂŞme de l'Union nationale. En effet, certains libĂ©raux menĂ©s par Philippe Hamel ne digèrent pas le refus du premier ministre Ă  s'engager dans un processus de nationalisation de l'hydroĂ©lectricitĂ©. Hamel et quatre autres dĂ©putĂ©s, Oscar Drouin, Ernest GrĂ©goire, RenĂ© Chaloult et Adolphe Marcoux, finissent par claquer la porte de l'Union nationale et fondent le Parti national, qui ne fera pas long feu[78]. Maurice Duplessis qualifie alors Hamel d'« hydromaniaque »[78]. Le premier ministre entre Ă©galement en conflit avec son ministre de la Voirie, François J. Leduc[81]. Après que ce dernier ait refusĂ© de dĂ©missionner, Duplessis l'Ă©jecte en prĂ©sentant au lieutenant-gouverneur la dĂ©mission de l'entièretĂ© du cabinet ministĂ©riel[82]. Lors d'une cĂ©rĂ©monie tenue dans le plus grand secret, il forme alors un nouveau cabinet constituĂ© des mĂŞmes ministres, Ă  l'exception de Leduc[82]. C'est la première fois depuis la ConfĂ©dĂ©ration de 1867 qu'un premier ministre provincial use d'une telle manĹ“uvre pour renvoyer un ministre[82]. Dans une lettre publiĂ©e par Le Devoir et mise en lumière par l'historien Jonathan Livernois dans son ouvrage La rĂ©volution dans l'ordre : une histoire du Duplessisme (BorĂ©al, 2018), Leduc donne sa version des faits, accusant le rĂ©gime duplessiste d'ĂŞtre enchaĂ®nĂ© par les intĂ©rĂŞts privĂ©s de quelques « amis du parti[83] » :

« C'est parce que j'ai voulu conformer ma conduite administrative aux principes énoncés par le premier ministre dans son communiqué aux journaux que je ne suis plus ministre de la Voirie. J'ai cru qu'il était de mon devoir d'administrer la chose publique avec toute l'honnêteté et toute l'efficacité que l'on rencontre dans toute organisation bien menée, même si, pour atteindre ce but, il a fallu sacrifier quelques amis du parti, plus intéressés à leur avancement personnel qu'au progrès de la province, et même s'il a fallu, suprême sacrifice, me séparer de celui qui, pendant bien longtemps, a été mon chef. Je n'ai pas voulu dans la confection des routes, laisser s'établir une dictature contrôlée par deux ou trois entrepreneurs de vos amis qui auraient imposé leurs volontés au gouvernement plutôt qu'en exécuter les ordres. »

Duplessis prĂ©tend quant Ă  lui que l'ex-ministre Leduc fut coupable d'« abus »[84]. L'historien Robert Rumilly, biographe et sympathisant duplessiste, soutient la version du premier ministre en affirmant que Leduc Ă©tait « partenaire silencieux » d'une entreprise engagĂ©e par son ministère[84]. Quoi qu'il en soit, une chose est sĂ»re parmi les spĂ©cialistes : le favoritisme et le clientĂ©lisme sont des caractĂ©ristiques indiscutables du rĂ©gime de l'Union nationale sous Maurice Duplessis. Ce dernier ne s'en cache d'ailleurs pas, lui qui avait l'habitude de dire, dans les circonscriptions qui ne sont pas encore acquises aux unionistes : « Si vous voulez une Ă©cole (un hĂ´pital, un pont et le reste), montrez-le moi le jour de l'Ă©lection »[85]. MĂŞme si Duplessis ne s'enrichit pas personnellement par le biais du système de favoritisme, l'Union nationale n'hĂ©sitera jamais Ă  renflouer ses coffres avec l'argent d'entrepreneurs qu'elle remercie gĂ©nĂ©reusement une fois au pouvoir[86]. Ce système est en grande partie responsable des impressionnantes campagnes de financement Ă©lectoral de la machine unioniste[86].

Le premier mandat des unionistes Ă  la tĂŞte du QuĂ©bec est Ă©galement l'occasion de dĂ©couvrir une autre caractĂ©ristique incontournable du duplessisme : un viscĂ©ral anticommunisme. Le chef de l'Union nationale est clair Ă  ce sujet, lui qui soutient que le « communisme doit ĂŞtre considĂ©rĂ© l'ennemi public numĂ©ro un, mĂ©prisĂ© et mĂ©prisable ». En ce sens, Maurice Duplessis fait adopter la Loi protĂ©geant la province contre la propagande communiste, plus communĂ©ment appelĂ©e « Loi du cadenas ». Cette loi spĂ©ciale vise Ă  mettre un terme aux activitĂ©s communistes en rendant « illĂ©gal pour toute personne qui possède ou occupe une maison dans la province de l'utiliser ou de permettre Ă  une personne d'en faire usage pour propager le communisme ou le bolchevisme par quelque moyen que ce soit ». Elle interdit Ă©galement « d'imprimer, de publier de quelque façon que ce soit ou de distribuer dans la province un journal, une revue, un pamphlet, une circulaire, un document ou un Ă©crit quelconque propageant ou tendant Ă  propager le communisme ou le bolchevisme ». Les rĂ©calcitrants se voient fermer leurs locaux (Ă  l'aide de cadenas, d'oĂą le titre de la loi) et sont passibles d'un emprisonnement d'une durĂ©e de trois Ă  douze mois. Le journal ClartĂ© est le premier Ă  ĂŞtre ciblĂ© par la nouvelle lĂ©gislation, alors que ses locaux sont fermĂ©s en 1937. La Loi du cadenas sera abrogĂ©e en 1957, après que la Cour suprĂŞme du Canada l'ait dĂ©clarĂ©e anticonstitutionnelle. Jonathan Livernois rappelle toutefois que la « chasse aux communistes » n'Ă©tait pas le monopole des unionistes Ă  l'Ă©poque, puisque les libĂ©raux comme les conservateurs s'inquiètent de la « menace rouge »[87]. Le Parti libĂ©ral du QuĂ©bec vote d'ailleurs en faveur de cette loi (qu'il n'abroge pas lorsqu'il reprend le pouvoir en 1939) et les rĂ©actions chez la population francophone comme dans la presse semblent gĂ©nĂ©ralement positives[88]. Dans un contexte de Guerre froide, cette situation n'est pas sans rappeler l'ère du maccarthysme aux États-Unis.

Du côté du droit québécois, en mai 1937, un fait plutôt rare se produit au Barreau du Québec lorsque les membres du barreau élisent Maurice Duplessis à titre de bâtonnier du Québec pour le bâtonnat de 1937-1938, et ce alors qu’il occupe la fonction de premier ministre du Québec[89]. Auparavant, Maurice Duplessis venait également d'être élu bâtonnier du Barreau de Trois-Rivières, l'un des trois barreaux de section fondateurs du Barreau du Québec[17] - [90]. Le poste de bâtonnier du Québec est hautement convoité par les avocats québécois et apporte son lot de prestige, tout en assurant au bâtonnier une influence non négligeable sur la direction à donner au Barreau du Québec ainsi qu'un droit de surveillance sur les affaires de cet ordre professionnel[91] . En 1937 et en 1938, donc, Maurice Duplessis réalise un exploit inégalé dans l'histoire du Québec : il est non seulement le premier ministre actif en plus d'être le procureur général actif, il est aussi le bâtonnier de son barreau de section et bâtonnier du Québec, ce qui lui donne une influence considérable au niveau de l'orientation du droit québécois que nulle autre personne n'est à ce jour allé chercher.

L'Ă©tĂ© 1937 donne lieu Ă  la première intervention directe de Maurice Duplessis dans une grève[92][./Maurice_Duplessis#c_n-Saint-Aubin1979131-92 [88]]. Le premier ministre intervient dans un conflit de travail Ă  la Dominion Textile, alors que 9 de ses usines tombent en grève sous la bannière de la FĂ©dĂ©ration nationale catholique[92]. La FĂ©dĂ©ration veut alors nĂ©gocier une convention collective et essuie un refus catĂ©gorique de la Dominion Textile[92]. Le , le premier ministre s'assoit Ă  la table des nĂ©gociations avec les reprĂ©sentants syndicaux et patronaux[93]. Ces derniers finissent par s'entendre sur la mise en place d'un contrat collectif de travail[93]. Durant son mandat, Maurice Duplessis fait d'ailleurs adopter la Loi sur les salaires raisonnables, qui vise Ă  amĂ©liorer les conditions de travail des petits salariĂ©s non-syndiquĂ©s[81]. Elle empĂŞche notamment les patrons de renvoyer un employĂ© pour le rĂ©embaucher Ă  un salaire moindre et prĂ©voit des sanctions contre les rĂ©calcitrants[81]. En ce qui concerne les « salaires raisonnables », l'historien Jacques Rouillard souligne que la loi est Ă  double tranchant puisqu'elle peut ĂŞtre instrumentalisĂ©e par les employeurs afin d'Ă©viter de nĂ©gocier avec les travailleurs et enjamber les syndicats[94] :

Photographie en noir et blanc d'une trentaine de personnes posées dans un escalier.
Photographie montrant Maurice Duplessis en compagnie du roi du Royaume-Uni, George VI, de la reine Elizabeth Bowes-Lyon, du premier ministre du Canada, du lieutenant-gouverneur du Québec ainsi que d'autres dignitaires, 1939.

« La loi comporte une disposition prévoyant son application lorsque les parties syndicale ou patronale ne réussissent pas à s'entendre selon la loi d'extension juridique (alors appelée Loi relative aux salaires des ouvriers). Cette disposition donne un bon argument aux employeurs pour refuser de négocier avec les syndicats en attendant que l'Office des salaires raisonnables détermine lui-même des salaires minimums. Cette stratégie est adoptée par la partie patronale lors de la fameuse grève des syndicats du textile affiliés à la CTCC en 1937, et cette avenue est suggérée par le gouvernement au syndicat catholique de la métallurgie en grève à Sorel la même année. »

Alors que la crise économique fait de l'hygiène publique un enjeu d'avant-plan, l'Union nationale crée le ministère de la Santé en 1936 et en confie les clés à Joseph-Henri Albiny-Paquette, médecin et député de Labelle[95]. Maurice Duplessis finance également le médecin Armand Frappier, qui crée l'Institut de microbiologie et d'hygiène de Montréal en 1938[95]. Cette institution, similaire à l'Institut Pasteur (Paris), permet au Québec de développer la production de produits biologiques et pharmaceutiques comme les vaccins et assure donc l'autonomie du Québec en la matière[95]. En 1939, le Canada de William Lyon Mackenzie King est en état d'alerte alors qu'éclate la Seconde Guerre mondiale. Le spectre d'une potentielle conscription plane sur la province alors que les Québécois ont encore en tête la crise de 1917[96]. C'est dans ce contexte que le gouvernement de l'Union nationale accueille, non sans crainte d'incidents, le roi George VI et la reine Elizabeth. Le discours que donne Maurice Duplessis au Conseil législatif, en présence des souverains britanniques, donne une idée des perspectives du premier ministre quant à la place du Québec dans le Canada et le Commonwealth[97] :

« Notre province a toujours été fidèle à la Couronne britannique ; elle a également été fidèle aux traditions héritées de ses ancêtres, au pacte de la Confédération de 1867 et à cette mission de rester français que des hommes d'État britanniques nous ont confiée en 1791. Nous chérissons ce passé, et nous ne cesserons jamais de considérer le Trône comme le boulevard de nos institutions démocratiques et de nos libertés constitutionnelles. Nous désirons ardemment imiter les autres provinces en contribuant à faire du Canada que nous aimons un pays paisible et puissant, toujours plus digne de vos très gracieuses et excellentes Majestés que la Providence, dans sa bonté, nous a donnés pour Souverains. »

Sous les conseils d'une partie de son entourage (notamment d'Arthur SauvĂ©), Duplessis dĂ©cide toutefois de profiter du contexte de mĂ©fiance vis-Ă -vis des politiques de guerre fĂ©dĂ©rales pour dĂ©clencher des Ă©lections. Alors que certains unionistes expriment leur inquiĂ©tude, le premier ministre baisse la tĂŞte et fonce[98]. Bien qu'il ne soit pas souverainiste, lui qui a dĂ©clarĂ© en 1938 que « le gouvernement de la province du QuĂ©bec ne tolèrera aucun esprit de sĂ©paratisme[79] », il compte renouveler son mandat en misant sur ses prises de position autonomistes, alors qu'il reproche au gouvernement fĂ©dĂ©ral d'empiĂ©ter sur les pouvoirs des provinces[98].

Photographie noir et blanc de deux hommes debout sur un quai avec un train derrière.
Le premier ministre du Canada William Lyon Mackenzie King (à gauche) sur un quai de gare à Montréal (1939).

Le dĂ©clenchement des Ă©lections s'avère finalement une très mauvaise dĂ©cision pour l'Union nationale. Son vieux rival Camillien Houde, qui a reconquis la mairie de MontrĂ©al l'annĂ©e prĂ©cĂ©dente, souligne qu'il est « très dangereux d'avoir des Ă©lections dans les circonstances actuelles »[99]. Maurice Duplessis est Ă©galement lâchĂ© par une partie de son entourage. Le dĂ©putĂ© sortant de Champlain, Wilbrod Rousseau, dĂ©sapprouve publiquement la dĂ©cision de son chef et conseille mĂŞme aux Ă©lecteurs de voter pour le Parti libĂ©ral[99]. Il en va de mĂŞme pour AdhĂ©mar Raynault, dĂ©putĂ© de L'Assomption et maire sortant de MontrĂ©al, qui annonce qu'il ne sera pas candidat car il veut « garder l'estime de ses compatriotes »[99]. Au niveau fĂ©dĂ©ral, Maxime Raymond, dĂ©putĂ© libĂ©ral de Beauharnois-Laprairie, pourtant nationaliste, exprime publiquement son opposition Ă  la manĹ“uvre de Duplessis[99].

Au niveau provincial, AdĂ©lard Godbout, chef de l'opposition libĂ©rale, annonce qu'il est Ă©galement opposĂ© Ă  la conscription : « Je m'engage sur l'honneur, en pesant chacun de mes mots, Ă  quitter mon parti et mĂŞme Ă  combattre si un seul Canadien français, d'ici la fin des hostilitĂ©s, est mobilisĂ© contre son grĂ© sous un rĂ©gime libĂ©ral, ou mĂŞme sous un rĂ©gime provisoire auquel participeraient nos ministres actuels dans le cabinet de M. King[100]. » Ă€ Ottawa, le premier ministre Mackenzie King coupe Ă©galement l'herbe sous le pied de Duplessis en promettant qu'il n'y aurait pas de conscription (elle sera tout de mĂŞme mise en place après le plĂ©biscite de 1942). L'Action libĂ©rale nationale est mĂŞme ressuscitĂ©e par Paul Gouin, qui prĂ©sente des candidats dans une cinquantaine de circonscriptions[100]. La tombe de l'Union nationale Ă©tait creusĂ©e. Le jour de l'Ă©lection, le , Maurice Duplessis perd non seulement le pouvoir, mais le concède Ă  un Parti libĂ©ral qui forme un gouvernement majoritaire[101]. Dans la dĂ©bandade, les unionistes n'arrivent Ă  faire Ă©lire que 14 candidats. Les libĂ©raux en obtiennent quant Ă  eux 64[101]. Le chef de l'Union nationale est tout de mĂŞme rĂ©Ă©lu Ă  Trois-Rivières[101]. Camillien Houde, qui se prĂ©sente comme indĂ©pendant dans Sainte-Marie, est Ă©galement Ă©lu[101].

Un bref retour dans l'opposition

La défaite de l'Union nationale met à mal le leadership de son chef[101]. Certains unionistes lui reprochent alors d'avoir déclenché des élections au mauvais moment[102]. On pense même le remplacer, alors que Jos.-D. Bégin désire la tenue d'un congrès de leadership et qu'on envisage les candidatures d'Onésime Gagnon ou encore d'Hormisdas Langlais[102]. Habile politicien, Maurice Duplessis réussit toutefois à amadouer les insatisfaits[102]. L'Union nationale passe près d'imploser mais survit finalement à ces temps troubles.

Adélard Godbout forme son gouvernement le [103]. Agronome de formation, diplômé de l'Université Amherst, Godbout est un remarquable orateur[104]. La plus importante réforme de son mandat est sans doute l'adoption du suffrage féminin en 1940[104]. Alors que les Québécoises peuvent voter depuis 1917 au niveau fédéral, elles en étaient toujours privées au provincial puisque les gouvernements précédents ont toujours refusé d'aller en ce sens, notamment par crainte de s'aliéner le clergé[104]. À l'approche du vote du projet de loi, l'Église ne tarde d'ailleurs pas à signifier son opposition. Le cardinal Villeneuve, archevêque de Québec, publie un communiqué étayant les positions de l'épiscopat[105] :

« Nous ne sommes pas favorables au suffrage politique féminin : 1) parce qu'il va à l'encontre de l'unité et de la hiérarchie familiale ; 2) parce que son exercice expose la femme à toutes les passions et à toutes les aventures de l'électoralisme ; 3) parce que, en fait, il nous apparaît que la très grande majorité des femmes de la province ne le désire pas ; 4) parce que les réformes sociales, économiques, hygiéniques, etc., que l'on avance préconiser pour le droit de suffrage chez les femmes, peuvent être aussi bien obtenues grâce à l'influence des organisations féminines en marge de la politique. Nous croyons exprimer ici le sentiment commun des évêques de la province. »

L'Union nationale, issue d'une coalition entre libéraux et conservateurs, est quant à elle divisée sur la question[105]. Alors que Maurice Duplessis tente en vain d'empêcher l'adoption du projet de loi, deux unionistes, Onésime Gagnon et Hormisdas Langlais, votent avec la majorité libérale[105]. Le , le suffrage féminin est adopté par 67 voix contre 9[105]. Au Conseil législatif, chambre haute du parlement québécois ayant siégé de 1867 à 1968, on confirme le vote par 13 voix contre 5[105]. L'unioniste Martin Fisher vote en faveur de la proposition libérale[105]. Les libéraux ne s'arrêtent pas là en matière de droits des femmes puisqu'en 1942, le procureur général, Wilfrid Girouard, permet à ces dernières d'accéder au Barreau[105].

En 1942, après avoir subi une opĂ©ration pour une hernie Ă©tranglĂ©e, Maurice Duplessis voit son leadership Ă  nouveau contestĂ©[102]. On lui reproche notamment de trop boire, lui qui a l'habitude de partager un verre de champagne avec ses ministres après les sĂ©ances Ă  l'AssemblĂ©e[102]. C'est Ă  cette Ă©poque que Duplessis dĂ©cide de renoncer complètement Ă  l'alcool[103]. Il est d'ailleurs encouragĂ© en ce sens par le premier ministre Godbout qui, lorsqu'il passe le voir Ă  l'hĂ´pital en 1942, lui conseille d'arrĂŞter de boire car son « vice allait le perdre »[103].

Photographie noir et blanc d'une vue aérienne sur un cours d'eau avec un barrage..
La centrale de Lachine en 1929. Elle est alors propriété de la Montreal Light, Heat and Power.

En 1943, les libĂ©raux investissent le domaine de l'Ă©ducation alors qu'ils votent la Loi sur la frĂ©quentation scolaire obligatoire[105] - [106]. Cette mesure fait suite Ă  une recommandation de Victor DorĂ©, surintendant Ă  l'Instruction publique, qui souligne Ă  l'Ă©poque une « progression dĂ©croissante de l'instruction scolaire Ă  partir de la quatrième annĂ©e du cours primaire »[107]. Dès lors, les Ă©tudes primaires sont gratuites et la scolaritĂ© est obligatoire[107]. Les parents rĂ©calcitrants risquent des amendes[107]. Plusieurs Ă©vĂŞques catholiques s'opposent Ă  cette mesure, notamment Mgr Desranleau (Sherbrooke), Mgr Comtois (Trois-Rivières), Mgr Douville (Saint-Hyacinthe) et Mgr Courchesne (Rimouski)[107]. L'archevĂŞque de MontrĂ©al, Mgr Charbonneau, se prononce quant Ă  lui en faveur de l'instruction obligatoire dès 1942[107]. Le , la loi est adoptĂ©e Ă  40 voix contre 12[108] - [106]. L'Union nationale s'y oppose : seul Camille Pouliot vote avec la majoritĂ© libĂ©rale[108]. L'instruction obligatoire ne sera d'ailleurs que très peu appliquĂ©e durant les quinze annĂ©es de règne duplessiste qui suivront[108].

Les libéraux d'Adélard Godbout poursuivent les réformes majeures en 1944[108]. Ils chamboulent cette fois le paysage économique alors qu'ils nationalisent deux compagnies hydroélectriques, la Montreal Light, Heat and Power et la Beauharnois Power[108]. C'est ce qui mène à la création, la même année, de la Commission hydroélectrique de Québec : Hydro-Québec est née[108]. Ces acquisitions ont l'effet d'une bombe dans les milieux financiers montréalais[108]. Le Montreal Star et la Montreal Gazette, les deux principaux journaux anglophones de Montréal, s'opposent à la nationalisation[109]. L'essentiel de la presse francophone soutient l'initiative libérale. Alors qu'Adélard Godbout annonce des élections générales prévues pour le , Maurice Duplessis qualifie la manœuvre de mesure électorale[109].

Reprise du pouvoir : le « Chef » seul au sommet

Photographie noir et blanc de deux hommes et d'une femme Ă  droite.
Réconciliation publique de Camillien Houde et Maurice Duplessis lors d'une grande assemblée populaire tenue au marché Saint-Jacques (). À leurs côtés, Georgianna Falardeau, épouse de Camillien Houde.

La reconquĂŞte

Les élections de 1944 donnent lieu à l'entrée en scène d'un nouveau parti sur l'échiquier politiquer québécois : le Bloc populaire canadien[110]. Ce parti est fondé par Maxime Raymond, député libéral fédéral de Beauharnois-Laprairie, qui en dirige l'aile fédérale[110]. Au niveau provincial, c'est le journaliste, romancier et dramaturge André Laurendeau qui est aux commandes[110]. Le parti, nationaliste et conservateur, est l'initiative d'éminentes figures publiques québécoises comme le chanoine Lionel Groulx et George Pelletier, le directeur du Devoir (Henri Bourassa soutient d'ailleurs le parti)[110]. Le Bloc populaire est issu du contexte de la Seconde Guerre mondiale puisque la formation politique naît notamment de l'opposition contre une potentielle conscription du gouvernement fédéral[110]. La formation politique milite pour l'autonomie du Québec[111]. Au niveau socioéconomique, elle s'inspire de la doctrine sociale de l'Église catholique, soutient le corporatisme et le syndicalisme, et se prononce en faveur de la nationalisation de l'hydroélectricité[111].

Le premier ministre AdĂ©lard Godbout fait campagne sur le bilan de son mandat au pouvoir[109]. Il demande aux Ă©lecteurs de faire fi des politiques de guerre de Mackenzie King, sur lesquelles ils auront l'occasion de se prononcer aux prochaines Ă©lections fĂ©dĂ©rales[109]. Pour ce qui est des deux principaux partis d'opposition, il prĂ©vient que leur montĂ©e au pouvoir sonnerait l'avènement de « l'Ă©troitesse d'esprit, de l'opportunisme et du fanatisme »[109]. De son cĂ´tĂ©, l'Union nationale fait campagne sur la dĂ©centralisation, Ă©ternel cheval de bataille de Maurice Duplessis[110]. Ce dernier reproche Ă  Godbout la nationalisation de la Montreal Light, Heat and Power[110]. Il considère qu'une telle mesure coĂ»tera trop cher pour les finances publiques, entraĂ®nant une augmentation des taxes et de nouveaux emprunts[110]. Duplessis souligne que l'Union nationale priorise l'entreprise privĂ©e, n'envisageant les nationalisations que si nĂ©cessaire[110]. Aux Ă©lections gĂ©nĂ©rales du , les unionistes reprennent le pouvoir. L'Union nationale est majoritaire, alors qu'elle rafle 48 sièges[110]. Les libĂ©raux en obtiennent 37 et le Bloc populaire fait Ă©lire ses 4 premiers dĂ©putĂ©s (AndrĂ© Laurendeau, Édouard Lacroix, Albert Lemieux et Ovila Bergeron)[110]. David CĂ´tĂ©, candidat de la FĂ©dĂ©ration du Commonwealth coopĂ©ratif (FCC), un parti socialiste ancĂŞtre du NPD, remporte quant Ă  lui la circonscription de Rouyn-Noranda[112].

Maurice Duplessis redevient donc premier ministre du QuĂ©bec en 1944. C'est le dĂ©but de quinze annĂ©es de règne unioniste sans partage. Au sein de son parti, celui que l'on appelle « le Chef », ou encore « le Cheuf », est au fait de tous les dossiers et au centre de toutes les dĂ©cisions. Conrad Black peint le portrait de cette impressionnante autoritĂ© sur le pouvoir exĂ©cutif[113] :

« Sous Maurice Duplessis, les arrêtés ministériels étaient plus qu'une simple formalité. Les députés se rassemblaient tous les mercredis matin dans la salle du cabinet avant l'arrivée de Duplessis. Ils n'étaient jamais en retard et rarement absents. Quand Duplessis entrait, ils se levaient prestement pendant que le premier ministre traversait lentement la pièce et prenait place au bout de la table. Ensuite les ministres, procédant par ordre d'ancienneté et tels des écoliers récitant une leçon, présentaient les projets de loi qu'ils désiraient faire adopter. Duplessis accomplissait ce genre de travail avec une facilité étonnante. Il lui suffisait de jeter un coup d'œil sur chaque document pour en saisir l'essentiel; il apposait ensuite ses initiales aux projets qu'il approuvait. Ce rituel fut répété tous les mercredis matin pendant quinze ans sauf durant les campagnes électorales et Duplessis eut toujours une connaissance approfondie des rouages de chaque ministère. Il avait acquis cette connaissance au début des années trente alors qu'il était virtuellement l'unique porte-parole de l'Opposition. Sa mémoire phénoménale et sa curiosité naturelle aidant, il maintint cette connaissance pendant toute sa vie. »

Photo d'un drapeau québécois.
Drapeau du Québec tel qu'il a été hissé pour la première fois au sommet de la tour du Parlement le à trois heures de l'après-midi. Il s'agit alors d'une version non-officielle du fleurdelisé, comme en témoigne la position des lys.

Du cĂ´tĂ© libĂ©ral, on s'inquiète peu de la dĂ©faite de 1944, estimant que l'Union nationale ne ferait qu'un bref passage au pouvoir du fait de sa faible majoritĂ©[112]. De plus, le Parti libĂ©ral est majoritaire au Conseil lĂ©gislatif et dispose donc de moyens pour bloquer les projets de loi des unionistes[112]. Ce sera le cas dès 1945, lorsque les libĂ©raux empĂŞchent l'Union nationale d'adopter une « taxe de luxe » sur divers objets de consommation[112]. La manĹ“uvre rend finalement service Ă  Maurice Duplessis, qui se rend compte, en cours de route, que le projet de loi est impopulaire auprès de l'Ă©lectorat[112]. L'Union nationale se penche ensuite sur le dossier de l'Ă©ducation, alors qu'on crĂ©e un ministère de la Jeunesse dont le titulaire est Paul SauvĂ©, fils d'Arthur SauvĂ©[114]. Les unionistes doivent faire face aux inquiĂ©tudes du clergĂ©, qui craint de voir la nouvelle institution empiĂ©ter sur le pouvoir du Conseil de l'Instruction publique, dominĂ© par les Ă©vĂŞques[114]. Le , Maurice Duplessis se veut rassurant avec l'Ă©piscopat, leurs assurant que « les droits du Conseil de l'Instruction publique seront sauvegardĂ©s »[114].

Le , le député René Chaloult dépose une motion qui mène à l'une des mesures les plus marquantes du règne de Maurice Duplessis : l'adoption d'un drapeau national québécois. Chaloult se dit alors déçu de l'incapacité du Canada à se doter d'un drapeau distinctif de la Grande-Bretagne[115] :

« ATTENDU que l’Assemblée législative de Québec a adopté à l’unanimité une motion priant le comité parlementaire fédéral de choisir « un drapeau véritablement canadien », c’est à-dire un drapeau qui exclut tout signe de servage, de colonialisme et que peut arborer fièrement tout Canadien sans distinction d’origine : QUE cette Chambre invite le gouvernement de Québec à arborer sans délai, sur la tour centrale de son hôtel, un drapeau nettement canadien et qui symbolise les aspirations du peuple de cette province. »

Maurice Duplessis, « effrayé par la teneur de la proposition », est d'abord hésitant[115]. René Chaloult, déterminé, ne lâche toutefois pas l'affaire. Il consulte alors le chanoine Lionel Groulx qui soupçonne que Duplessis veut s'approprier le mérite de l'adoption d'un drapeau national[115]. Groulx recommande donc de modifier le fleurdelisé en relevant les lys pour les faire pointer vers le haut : le fleurdelisé «version Carillon» a désormais sa « version Duplessis »[115]. Le , le premier ministre réunit son cabinet et désigne Paul Beaulieu, ministre du Commerce et de l'Industrie et enthousiaste partisan du fleurdelisé, pour proposer l'adoption du drapeau. Ce dernier dépose un arrêté ministériel[114] :

« Que le drapeau généralement connu sous le nom de drapeau fleurdelisé, c'est-à-dire à croix blanche sur champ d'azur et avec lis, soit adopté comme drapeau officiel de la province de Québec et arboré sur la tour centrale des édifices parlementaires, à Québec, et cela avec la modification ci-après, à savoir : Que les lys qui figurent sur le drapeau soient placés en position verticale. »

Les milieux nationalistes jubilent. Lionel Groulx dira de cette initiative qu'elle fut « la plus solennelle affirmation du fait français au Canada »[116]. Jusqu'Ă  sa mort en 1959, Maurice Duplessis ne manquera pas de galvaniser les sentiments de fiertĂ© nationale, lui qui compte sur l'appui des nationalistes et des conservateurs pour se maintenir au pouvoir[116].

Une domination sans partage du paysage politique québécois

Photographie noir et blanc de six policiers, plusieurs d'entre eux matraque Ă  la main, et d'un homme en habit cravate.
Intervention des forces policières dans le contexte de la grève de l'amiante, en 1949.

Le , Maurice Duplessis annonce que des Ă©lections se tiendront le [116]. Alors que les unionistes viennent de remporter cinq Ă©lections partielles (Charlevoix, Beauce, Compton, Huntingdon, Bagot), le premier ministre veut profiter de cet Ă©lan favorable[116]. De plus, il vient de se rĂ©concilier avec le populaire maire de MontrĂ©al, Camillien Houde, et veut s'appuyer sur cet important soutien au sein des quartiers ouvriers de la mĂ©tropole[117]. Les deux hommes sont chaleureusement accueillis partout oĂą ils passent[117]. L'Union nationale peut Ă©galement compter sur le soutien du Bloc populaire alors que le nouveau parti s'est sĂ©vèrement effritĂ© depuis les dernières Ă©lections. Maxime Raymond, fondateur de l'aile fĂ©dĂ©rale de la formation politique, conseille mĂŞme de voter pour les unionistes[117]. « Les libĂ©raux donnent aux Ă©trangers ; Duplessis donne Ă  sa province », tel est le slogan de l'Union nationale pour la campagne de 1948[117].

L'Union nationale est Ă©galement en bonne santĂ© financière, alors que la caisse centrale dispose de tous les fonds nĂ©cessaires pour alimenter la machine Ă©lectorale[117]. Le parti a le vent dans les voiles et ses reprĂ©sentants parcourent les quatre coins de la province pour vanter le bilan de leur chef, l'homme qui a « donnĂ© un drapeau Ă  sa province » et crĂ©Ă© le crĂ©dit agricole ainsi que le ministère de la Jeunesse[117] - [118]. L'Union nationale brandit aussi le spectre du communisme et de la centralisation fĂ©dĂ©rale[119]. La propagande unioniste tire Ă  boulets rouges sur AdĂ©lard Godbout, Ă  qui on reproche d'ĂŞtre faible car il aurait lĂ©guĂ© Ă  Ottawa les pouvoirs du QuĂ©bec durant la guerre[120]. On prĂ©sente le premier ministre du QuĂ©bec comme un partisan de la conscription, de la centralisation et de l'alliance avec les Russes[119]. L'Ă©pouvantail de la « menace rouge » n'est d'ailleurs jamais bien loin et Maurice Duplessis n'hĂ©site pas Ă  user de manĹ“uvres quelque peu douteuses pour y associer ses adversaires[121] :

« À Saint-Jean, le , Duplessis fit enfin connaître la nature de la correspondance des libéraux avec les communistes, après avoir tourmenté Godbout à ce sujet pendant deux semaines. Il ne s'agissait que d'un accusé de réception qu'avait écrit Valmore Bienvenue au fait que le secrétaire de Godbout, Alexandre Larue, avait envoyé la copie d'un discours qu'on lui demandait. En soi cela n'était pas matière à scandale mais Duplessis avait forcé Godbout à se mettre sur la défensive et l'avait bouleversé pendant les deux dernières semaines de la campagne. Et à la fin, Duplessis avait brandi ces quelques lettres, anodines sans aucun doute, mais qui, à des oreilles partisanes et crédules, donnaient un air de vérité aux accusations de Duplessis. Ainsi, c'était vrai, pensait-on, que le bureau de Godbout avait correspondu avec les communistes. »

De son cĂ´tĂ©, AdĂ©lard Godbout met en garde les QuĂ©bĂ©cois, non sans exagĂ©ration, contre ce qu'il considère ĂŞtre un danger pour la dĂ©mocratie : « Si l'Union nationale est reportĂ©e au pouvoir pour quatre ou cinq ans Ă  venir, nous aurons alors une dictature du mĂŞme calibre que celle qui existait en Allemagne avec Hitler et qui existe prĂ©sentement en Russie avec Staline »[122]. Il accuse Ă©galement Duplessis d'instrumentaliser les enjeux d'autonomie provinciale pour dĂ©tourner l'attention du peu d'intĂ©rĂŞt des unionistes quant aux questions sociales[122]. En ce qui a trait Ă  la « menace rouge », Godbout estime que Duplessis en est le principal artisan car il aide indirectement les communistes en maltraitant les travailleurs qui rĂ©clament leurs droits[123]. Rien n'y fait, le , les libĂ©raux sont Ă©crasĂ©s alors qu'ils n'obtiennent que 8 sièges[120]. L'Union nationale en dĂ©croche quant Ă  elle 82[120]. Maurice Duplessis est Ă©lu avec une majoritĂ© sans prĂ©cĂ©dent Ă  Trois-Rivières (12 261 voix) alors qu'AdĂ©lard Godbout perd dans son comtĂ© de L'Islet[120].

Cette dĂ©faite a raison du chef du Parti libĂ©ral, qui laisse sa place Ă  la tĂŞte de l'opposition et part siĂ©ger au SĂ©nat[124]. Le , Ă  l'ouverture de la session parlementaire, c'est George Marler qui fait office de chef de l'opposition par intĂ©rim[120]. La mĂŞme annĂ©e, c'est finalement l'avocat George-Émile Lapalme, dĂ©putĂ© fĂ©dĂ©ral de Joliette-L'Assomption-Montcalm, qui remplace Godbout Ă  la tĂŞte des libĂ©raux[124]. Dans son discours du trĂ´ne du , Maurice Duplessis rĂ©affirme la prioritĂ© qu'il donne au secteur agricole, soulignant que « parmi les entreprises privĂ©es, aucune n'est plus importante que l'agriculture Ă  laquelle revient une place prĂ©pondĂ©rante dans notre Ă©conomie[124][125] ». Dans les faits, Maurice Duplessis est Ă©galement concentrĂ© sur le dĂ©veloppement industriel, notamment dans l'exploitation des ressources minières de l'Ungava[124].

Ă€ l'Ă©poque, une Ă©tude rĂ©vèle que le sous-sol de la rĂ©gion pourrait contenir jusqu'Ă  300 millions de tonnes de fer de qualitĂ© supĂ©rieure[124]. Duplessis reprend oĂą s'est arrĂŞtĂ© Godbout et maintient le permis d'exploitation de la sociĂ©tĂ© Hollinger, une entreprise ontarienne[124]. Alors que les unionistes n'arrivent pas Ă  convaincre des investisseurs locaux d'injecter des mises de fonds dans l'entreprise, ils se tournent vers le capital amĂ©ricain[126]. Hollinger s'associe donc Ă  la sociĂ©tĂ© Hanna, une entreprise clevelendaise spĂ©cialisĂ©e dans l'exploitation du fer[126]. Les deux groupes forment alors la Iron Ore Company of Canada, dans laquelle s'investissent cinq autres compagnies amĂ©ricaines[126]. Outre les redevances et l'impĂ´t, le QuĂ©bec en retire surtout des avantages indirects : la crĂ©ation de plusieurs milliers d'emplois, la fondation de Schefferville et Gagnonville et le dĂ©veloppement de Sept-ĂŽles[126]. Les libĂ©raux jugent ces redevances trop faibles[126]. Les milieux nationalistes reprochent quant Ă  eux Ă  Duplessis, dans une formule qu'il connaĂ®t bien, de « vendre la province aux Ă©trangers »[126]. Vingt ans plus tard, RenĂ© LĂ©vesque, figure de proue des nĂ©onationalistes quĂ©bĂ©cois, offrira quant Ă  lui une perspective beaucoup plus clĂ©mente : « Admettons qu'on lui doit une fière chandelle au vieux « Chef », d'avoir bulldozĂ© l'ouverture de la CĂ´te-Nord pendant que c'Ă©tait chaud [...] [ainsi] quelques dizaines de milliers de QuĂ©bĂ©cois en vivent-ils fort dĂ©cemment et la CĂ´te-Nord est-elle prĂ©sentement notre seule rĂ©gion qui ne donne pas l'image de la stagnation »[127].

Photographie noir et blanc d'un homme parlant dans un micro.
Maurice Duplessis, Ă©lections de 1952.

Le retour au pouvoir de Maurice Duplessis n'est pas un long fleuve tranquille. Le , Ă  Asbestos (aujourd'hui Val-des-Sources, Estrie), l'une des grèves les plus marquantes dans l'imaginaire collectif quĂ©bĂ©cois Ă©clate : la grève de l'amiante. Ă€ midi, en coordination avec des mineurs de Thetford Mines, les mineurs d'Asbestos, majoritairement francophones, cessent de travailler en guise de protestation contre les conditions de travail offertes par la Canadian John-Manville Company, leur employeur canado-amĂ©ricain. Les ouvriers, reprĂ©sentĂ©s par la ConfĂ©dĂ©ration des travailleurs catholiques du Canada (CTCC), rĂ©clament notamment de meilleurs salaires, un respect du droit syndical et des mesures de protection contre les risques sanitaires liĂ©s Ă  l'exploitation de l'amiante. Si l'Ă©piscopat soutient en grande majoritĂ© les revendications des travailleurs, qu'il juge lĂ©gitime, le gouvernement de Maurice Duplessis appuie quant Ă  lui les positions patronales et considère la grève comme illĂ©gale[128]. Alors que les ouvriers refusent un arbitrage extĂ©rieur (ils estiment que le patronat serait favorisĂ©) et que l'employeur engage des briseurs de grève pour tenter de mettre fin au mouvement, la grève d'Asbestos est marquĂ© par des centaines d'arrestations, des affrontements avec les forces de l'ordre et des violences policières. Selon l'historien Jacques Rouillard, la grève de l'amiante est considĂ©rĂ©e comme « une Ă©tape importante dans l'histoire du syndicalisme quĂ©bĂ©cois qui illustre l'antisyndicalisme du gouvernement Duplessis et son parti-pris patronal ». Rouillard rappelle toutefois qu'elle n'a rien de rĂ©volutionnaire ni d'inĂ©dit et que sa mĂ©moire fut instrumentalisĂ©e par les opposants de Duplessis et les artisans de la RĂ©volution tranquille[129]. Il conteste Ă©galement les interprĂ©tations selon lesquelles la grève d'Asbestos est un symbole de « l'entrĂ©e du QuĂ©bec dans le monde moderne » ou une victoire des syndicats, notamment parce que le dĂ©nouement du conflit est largement imputable Ă  l'intervention du clergĂ© et qu'une bonne partie des revendications syndicales furent ignorĂ©es[129].

Quoi qu'il en soit, l'Ă©lectorat semble gĂ©nĂ©ralement satisfait des politiques de Maurice Duplessis puisque l'Union nationale est reconduite au pouvoir lors des Ă©lections gĂ©nĂ©rales de [130]. Les unionistes voient leur nombre de dĂ©putĂ©s rĂ©duit mais ils restent tout de mĂŞme majoritaires, alors qu'ils obtiennent 68 sièges contre 23 pour les libĂ©raux[130]. Ces derniers n'arrivent pas Ă  sortir la tĂŞte de l'eau et les critiques de George-Émile Lapalme Ă  l'endroit des projets d'exploitation minière dans l'Ungava n'y changent rien[131]. Maurice Duplessis bat Joseph-Alfred Mongrain, maire de Trois-Rivières, par plus de 5 400 voix[130]. Lapalme est quant Ă  lui dĂ©fait par moins de 3 000 voix dans son Joliette[130]. Il est battu par Antonio Barrette, ministre du Travail. Le leadership de George-Émile Lapalme Ă  la tĂŞte du Parti libĂ©ral n'est toutefois pas remis en cause[130].

Six mois plus tard, en , l'Union nationale adopte la Loi modifiant la loi Ă©lectorale du QuĂ©bec[130]. Aussi appelĂ© le Bill 34, ce texte de loi exclut le reprĂ©sentant de l'opposition des Ă©numĂ©rateurs Ă©lectoraux : seul le parti au pouvoir aura un droit de regard sur le processus Ă©lectoral[130]. Lapalme dira qu'il s'agit de la « mainmise du gouvernement sur l'ensemble du mĂ©canisme Ă©lectoral[130] ». GĂ©rard Filion, directeur du Devoir, ne cache pas son opposition: « Quand la loi favorise le vol, il faut crier halte-lĂ [132]. »

Maurice Duplessis ne rompt pas avec ses convictions autonomistes lors de ce troisième mandat à la tête du Québec. En 1954, l'Union nationale crée un impôt sur les particuliers de 15 %, qu'il veut faire déduire de l'impôt fédéral[132]. Ottawa finit par s'entendre avec le gouvernement unioniste et accepte une déduction à hauteur de 10 %[132]. Durant la même période, Maurice Duplessis s'engage dans un autre bras de fer avec Ottawa, alors qu'il s'attaque aux subventions fédérales dans les universités québécoises. Duplessis soutient que le fédéral empiète sur les champs de compétence provinciaux en s'ingérant dans l'éducation[133]. Au nom de l'autonomie, il interdit aux institutions québécoises de recevoir des millions de dollars de financement[133]. Cette démarche trouvera certains appuis même chez ses adversaires, alors que Pierre Eliott Trudeau affirme également que le gouvernement fédéral ne respecte pas la division des pouvoirs fixée par la constitution canadienne[133].

Au printemps 1956, Maurice Duplessis entame la dernière campagne Ă©lectorale de sa carrière[133]. Dans sa propagande, l'Union nationale se focalise sur les accomplissements de ses mandats Ă  la tĂŞte du QuĂ©bec[133]. RenĂ© Chaloult, ex-unioniste devenu indĂ©pendant, accuse le parti d'avoir trahi les nationalistes[133]. Les Ă©changes sont assez virulents durant la campagne Ă©lectorale[133]. RenĂ© Hamel, candidat libĂ©ral dans Saint-Maurice, accuse le rĂ©gime duplessiste de s'approprier les revenus de l'État : « Notre province est comparable Ă  une caverne de voleurs, oĂą nos taxes n'ont pour but que d'engraisser les rats de l'Union nationale[133]. » De son cĂ´tĂ©, Maurice Duplessis n'hĂ©site pas Ă  avoir recours aux attaques personnelles et Ă  brandir le spectre du communisme : « Je ne dis pas que Lapalme est un communiste. Mais M. Lapalme est un faible. Il y avait en Hongrie un homme qui, comme Lapalme n'Ă©tait pas un communiste, mais un faible. Il n'a pas su se tenir debout. Et vous savez ce qui est arrivĂ©. La Hongrie est tombĂ©e sous la botte des rouges. On n'y voit plus de religieux dans les Ă©coles, on y a dĂ©crochĂ© les crucifix des murs. C'est le sort qui pourrait vous attendre demain si vous alliez vous tromper le jour du scrutin[133]. »

L'Union nationale finit par remporter les élections et forme son quatrième gouvernement majoritaire consécutif. Les unionistes obtiennent 70 sièges à l'Assemblée législative contre seulement 20 pour les libéraux de George-Émile Lapalme. Le dernier mandat de Maurice Duplessis est notamment marqué, en 1957, par le scandale du gaz naturel. Symbole pour certains de la corruption de l'Union nationale, cette affaire sera l'une des causes de la chute des unionistes aux élections de 1960[134].

Mort de Duplessis : funérailles d'État et deuil national

C'est Ă  la suite de l'invitation de la Quebec Iron, une filiale d'une corporation minière canado-amĂ©ricaine plus large appelĂ©e Iron Ore Company of Canada, que Maurice Duplessis se rend Ă  Schefferville en [135] - [136] - [137]. Il ignore au passage les avertissements d'AurĂ©a Cloutier, sa secrĂ©taire, quant Ă  son fragile Ă©tat de santĂ©[138]. Le mandat de la compagnie minière consiste alors en l'exploitation d'un gisement de fer dĂ©couvert en 1949[139] - [136]. La mise en Ĺ“uvre du chantier a notamment nĂ©cessitĂ© la construction d'un chemin de fer, le Chemin de fer de la CĂ´te-Nord et du Labrador, qui relie les villes de Schefferville et Labrador City Ă  la ville portuaire de Sept-ĂŽles[136] - [139]. Le dĂ©veloppement du nord quĂ©bĂ©cois, privilĂ©giĂ© par Duplessis, s'effectue notamment « dans des conditions avantageuses pour les investisseurs » Ă©trangers[140]. Les sources hĂ©sitent entre rĂ©alitĂ© ou fiction en ce qui concerne l'histoire selon laquelle, sur la longue route menant jusqu'aux mines de Schefferville, Maurice Duplessis se serait arrĂŞtĂ© en chemin et, les pieds plantĂ©s au QuĂ©bec, aurait urinĂ© de l'autre cĂ´tĂ© de la frontière entre le QuĂ©bec et le Labrador[141] - [142]. Duplessis aurait commis ce geste dans le but de dĂ©noncer l'annexion du Labrador Ă  ce qui Ă©tait alors la colonie britannique du Dominion de Terre-Neuve[143] - [144].

C'est le que tout bascule pour Maurice Duplessis[145]. Selon Jean-Claude Dupras, pendant l'après-midi, un cigare en bouche, « alors qu’il est seul dans le salon du chalet avec Maurice Custeau, debout, parlant Ă  ce dernier, il ressent soudainement un malaise, sa voix ralentit, son visage grimace, il porte la main droite vers sa tĂŞte, pivote sur lui-mĂŞme et s’effondre lourdement au sol, presque dans les bras de Custeau »[137]. Avant qu'il ne s'effondre et perde connaissance pour de bon, Maurice Duplessis conversait avec Custeau, et les mots suivants se sont avĂ©rĂ©s ĂŞtre les derniers prononcĂ©s par « le Chef » : « Dites au Père Champagne que j'irai le voir après la messe du matin »[146] - [147]. Cette rĂ©plique Ă©tait en rĂ©ponse Ă  une demande d'entretien que le curĂ© de Schefferville avait fait parvenir au premier ministre quĂ©bĂ©cois[147]. En arrivant sur les lieux, le mĂ©decin constate que le premier ministre quĂ©bĂ©cois est victime d'une hĂ©morragie cĂ©rĂ©brale, une hĂ©morragie qui le fera osciller entre la vie et la mort pendant quatre jours[135] - [137]. Ă€ son chevet sont les docteurs Larue, Rouleau et Rosmus, quelques conseillers et sa sĹ“ur, Étiennette Bureau[146] - [148]. SĂ©vèrement paralysĂ© du cĂ´tĂ© droit, le premier ministre reprend conscience Ă  quelques reprises mais est incapable de la moindre parole[149]. C'est le RĂ©vĂ©rend Père Marcel Champagne, curĂ© de Schefferville, qui souhaitait justement s'entretenir avec le premier ministre, qui administre les derniers sacrements au moribond le [149] - [147]. Après une sĂ©rie d'hĂ©morragies cĂ©rĂ©brales et quatre-vingts heures d'agonie, Maurice Duplessis rend l'âme Ă  minuit et une minute, dans la nuit du au , jour de la FĂŞte du Travail ; il avait 69 ans[150] - [151] - [152] - [153]. Le dĂ©funt premier ministre Ă©tait logĂ© Ă  l'auberge Guest House, un hĂ´tel privĂ© appartenant Ă  la Iron Ore Company situĂ© sur les abords du Lac Knob[149] - [154] - [155].

Des images d'archives de Radio-Canada montrent comment le cercueil contenant la dĂ©pouille de Maurice Duplessis, drapĂ© d'un drapeau quĂ©bĂ©cois, a Ă©tĂ© laborieusement montĂ© Ă  bord d'un avion[149] - [150]. L'appareil, un Douglas DC-3 propriĂ©tĂ© du Ministère des Transports du QuĂ©bec, dĂ©colle ensuite de l'AĂ©roport de Schefferville Ă  deux heures du matin et se rend Ă  QuĂ©bec, oĂą il atterrit Ă  l'aĂ©roport de L'Ancienne-Lorette, aujourd'hui l'AĂ©roport international Jean-Lesage de QuĂ©bec, Ă  6h10 du matin[149] - [150] - [156]. Dans la capitale quĂ©bĂ©coise, le corps est d'abord pris en charge par la police provinciale, puis confiĂ© Ă  un entrepreneur de pompes funèbres qui procède Ă  l'embaumement de Maurice Duplessis[137]. Par la suite, il est transfĂ©rĂ© Ă  l'HĂ´tel du Parlement du QuĂ©bec et exposĂ© en chapelle ardente dans l'enceinte du Salon rouge de l'AssemblĂ©e lĂ©gislative, oĂą il avait reprĂ©sentĂ© sans interruption les intĂ©rĂŞts des citoyens de la circonscription de Trois-Rivières pendant 32 ans, 3 mois et 22 jours[137] - [150]. Les QuĂ©bĂ©cois reçoivent la nouvelle de la mort du premier ministre avec consternation et Ă©motion, alors qu'ils constatent « la fin d'un homme dont le prestige et le pouvoir avaient Ă©tĂ© exceptionnels »[137] - [150]. Ils affluent en grand nombre pour lui rendre hommage[137]. En une seule journĂ©e, ce sont des dizaines de milliers, voire plus de 100 000 personnes qui se dĂ©placent pour venir faire leurs adieux au dĂ©funt chef d'État quĂ©bĂ©cois, second premier ministre Ă  mourir en fonction[137] - [note 6].

La mort de Maurice Duplessis se vit comme un deuil national. Dans l'après-midi du , un Libera Me est célébré à la basilique Notre-Dame de Québec en son honneur[157]. Un imposant cortège se forme lorsque la dépouille est transportée de Québec vers sa ville natale de Trois-Rivières en vue des préparatifs pour les funérailles, prévues pour le [137]. La foule, débordant des trottoirs de la Grande Allée, observe le défilé de voitures accompagné par le son d'une marche funèbre entonnée par le Royal 22e Régiment en tenue de deuil[158] - [159]. Arrivé à Trois-Rivières, le corps du défunt est à nouveau exposé, cette fois au Palais de justice de Trois-Rivières, où Maurice Duplessis avait plaidé maintes fois au début de sa carrière d'avocat et où nombre de personnes tiennent à venir lui rendre un dernier hommage, forçant l'établissement à repousser ses heures de fermeture[137].

Le Ă  10 h 21 du matin, un nouveau cortège funèbre se forme pour accompagner la dĂ©pouille de Maurice Duplessis du Palais de justice jusqu'Ă  la cathĂ©drale de l'Assomption de Trois-Rivières, oĂą une dernière messe l'attend[160] - [161]. 50 000 personnes affluent autour de l'Ă©glise pour rendre un dernier hommage Ă  la première personne Ă  recevoir des funĂ©railles d'État en vertu du protocole cĂ©rĂ©moniale quĂ©bĂ©cois rĂ©cemment adoptĂ©[160] - [162] - [163] - [164]. Tout le gratin des hommes politiques conservateurs du QuĂ©bec et du Canada assistent aux funĂ©railles cĂ©lĂ©brĂ©es par le cardinal Paul-Émile LĂ©ger et l'Ă©vĂŞque Georges-LĂ©on Pelletier, dont le premier ministre du Canada John Diefenbaker, le premier ministre de l'Ontario Leslie Frost, le premier ministre du Nouveau-Brunswick Hugh John Flemming, le premier ministre du Manitoba Dufferin Roblin, tous les quatre Ă  la tĂŞte d'une dĂ©lĂ©gation de leur gouvernement respectif, en plus de l'opposition libĂ©rale de QuĂ©bec, de nombreux membres du Conseil lĂ©gislatif du QuĂ©bec, le maire de MontrĂ©al Sarto Fournier ainsi que l'entièretĂ© du cabinet unioniste[137] - [161] - [165]. Quelques autres prĂ©lats influents, y compris Maurice Roy, archevĂŞque de QuĂ©bec, Charles-Eugène Parent, archevĂŞque de Rimouski, les Ă©vĂŞques de Valleyfield, GaspĂ© et Joliette, et enfin Lionel Scheffer, vicaire apostolique du diocèse de Labrador-Schefferville en l'honneur de qui Maurice Duplessis a nommĂ© la ville de Schefferville, sont aux cĂ´tĂ©s de l'archevĂŞque de MontrĂ©al et de l'Ă©vĂŞque de Trois-Rivières pour prendre part Ă  la messe[165] - [161]. La cĂ©rĂ©monie terminĂ©e, le cortège reprend forme et la procession se dirige vers le cimetière Saint-Louis, oĂą une foule d'environ 1 200 personnes s'est dĂ©jĂ  entassĂ©e pour assister Ă  l'inhumation[137] - [165]. Huit policiers transportent le cercueil, recouvert du drapeau du QuĂ©bec[161] - [165]. Ils retirent le fleurdelisĂ© en le pliant soigneusement puis procèdent Ă  la descente du cercueil, fait de bronze et pesant près de 1 800 livres placĂ© dans un coffre d'acier recouvert de cuivre, au fond de la fosse[137] - [158] - [161] - [165]. L'inhumation a eu lieu Ă  une heure de l'après-midi[161]. Le drapeau, conservĂ© par AurĂ©a Cloutier, secrĂ©taire de Maurice Duplessis, sera remis Ă  l'abbĂ© Pierre Gravel en 1971[137].

La mort de Maurice Duplessis met fin Ă  près de vingt ans de domination du paysage politique quĂ©bĂ©cois par l'Union nationale. Au total, le « Chef » a Ă©tĂ© dĂ©putĂ© pendant neuf mandats d'affilĂ©e, chef d'un parti politique quĂ©bĂ©cois pendant sept lĂ©gislatures successives et premier ministre durant cinq mandats, les quatre derniers Ă©tant consĂ©cutifs. Après lui, il s'est Ă©coulĂ© près d'un demi-siècle avant qu'un parti politique ne rĂ©ussisse Ă  remporter trois mandats de suite lors d'Ă©lections provinciales quĂ©bĂ©coises, soit les libĂ©raux sous Jean Charest[note 7] - [note 8] - [166]. Dans l'annĂ©e suivant son dĂ©cès, la rĂ©gion de Duplessis (CĂ´te-Nord) voit le jour ainsi qu'une circonscription Ă©lectorale provinciale nord-cĂ´tière nommĂ©e en son honneur : la circonscription de Duplessis[167] - [168].

Le jour des funérailles de Maurice Duplessis, l'Union nationale annonce que c'est Paul Sauvé qui lui succédera à titre de chef de l'Union nationale et premier ministre du Québec. Ce dernier est ministre de la Jeunesse et ministre du Bien-être social depuis le [169]. Paul Sauvé, fils d'Arthur Sauvé, l'ancien chef du Parti conservateur du Québec, ne reste pas premier ministre bien longtemps puisqu'il meurt subitement à Saint-Eustache le , moins de quatre mois après avoir été assermenté en tant que dix-septième premier ministre du Québec[170]. Paul Sauvé devient ainsi le troisième premier ministre québécois à mourir en fonction et il s’agit là de la seule fois de l’histoire du Québec où deux chefs de gouvernements québécois meurent successivement en fonction. Plus encore, trois des cinq premiers ministres québécois que l'Union nationale ait connue sont morts en fonction, Daniel Johnson étant décédé lors d'une visite au chantier du barrage Manic 5, en 1968[171]. Le successeur de Sauvé, Antonio Barrette, ministre du Travail depuis le , se retrouve contre toute attente à la tête du Québec, et ce pour les six mois à venir. Le dix-huitième premier ministre du Québec est cependant incapable de mener l'Union nationale à la victoire lors des élections générales québécoises de 1960, tenues le , qui voient les libéraux de Jean Lesage former un gouvernement majoritaire[172] - [173]. C'est, selon l'historiographie québécoise, la fin de la Grande Noirceur et le début officiel de la Révolution tranquille[174].

Idéologie et style politique

L'autonomie comme cheval de bataille

Bien qu'il considère le souverainisme comme un extrĂ©misme Ă  Ă©carter, la dĂ©fense et la promotion de l'autonomie provinciale fut sans doute le principal cheval de bataille de Maurice Duplessis. Ă€ ce propos, il dĂ©clare en 1939 : « Tant que j'aurai un souffle de vie, personne ne touchera Ă  l'autonomie de la province de QuĂ©bec »[175]. La question de l'« empiètement du fĂ©dĂ©ral » constitue son « pain et son beurre », pour reprendre les termes de l'historien Jonathan Livernois[176]. Cette critique de l'« empiètement du fĂ©dĂ©ral » Ă©merge dans un contexte bien particulier, celui de l'entre-deux-guerres, de la Grande dĂ©pression et de la Seconde Guerre mondiale. Ă€ une Ă©poque marquĂ©e par les crises, les luttes de pouvoir sont exacerbĂ©es par la nĂ©cessitĂ© de mettre en place des mesures d'urgence. Lors de la Première Guerre mondiale, le gouvernement fĂ©dĂ©ral s'immisce par exemple dans le domaine de la taxation en Ă©tablissant un impĂ´t sur les revenus des particuliers et des sociĂ©tĂ©s afin d'alimenter l'effort de guerre. L'Union nationale critique sans cesse ces intrusions fĂ©dĂ©rales. Alors que la Seconde Guerre mondiale vient d'Ă©clater, le communiquĂ© annonçant aux journalistes les Ă©lections gĂ©nĂ©rales de 1939 en offre un bon exemple[98] :

« Les Chambres provinciales ont été dissoutes hier et une élection générale a été ordonnée [...] La votation aura lieu le mercredi [...] L'Union nationale considère que l'autonomie provinciale [...] est essentielle aux meilleurs intérêts de la province [...] Invoquant le prétexte de la guerre, déclarée par le gouvernement fédéral, une campagne d'assimilation et de centralisation, manifeste depuis plusieurs années, s'accentue de façon intolérable. Des arrêtés ministériels ont été passés par Ottawa en vertu du « War Measures Act » (Loi des mesures de guerre), avec le désir et l'effet de centraliser à Ottawa, pour fins de guerre, toute la finance des particuliers, des municipalités, des provinces du pays. »

Pour Bernard Saint-Aubin, l'autonomisme de Maurice Duplessis est dans le sillage des politiques de Taschereau et, dans un contexte oĂą le gouvernement fĂ©dĂ©ral veut mettre en place des rĂ©formes keynĂ©siennes (notamment l'assurance-chĂ´mage durant la Grande DĂ©pression), est surtout rĂ©vĂ©lateur d'un « profond conservatisme social »[177] :

Photographie noir et blanc d'un homme en habit avec un manteau de fourrure.
Honoré Mercier, 9e premier ministre du Québec de 1887 à 1891, partisan de l'autonomisme québécois et figure d'inspiration pour Maurice Duplessis.

« En matière sociale, le gouvernement central s'est toujours montré plus progressiste que ceux de Duplessis et de Taschereau. Le premier, en s'opposant aux allocations familiales, et le second, aux pensions de vieillesse de 1927 à 1936, sous le couvert de l'autonomie provinciale, ne faisaient que le jeu des milieux d'affaires, leurs bailleurs de fonds électoraux. Est-on certain que le Québec aurait bénéficié de ces mesures sociales si Ottawa n'en avait pris l'initiative? Il y a lieu d'en douter. »

En ce qui concerne les milieux d'affaires, certains soulignent Ă©galement le paradoxe entre la promotion de l'autonomisme dans l'arène politique et le fait de s'« incliner devant les investisseurs Ă©trangers qui asservissaient le Canada français sur le plan Ă©conomique »[177]. Les fĂ©dĂ©ralistes lui reprochent quant Ă  eux d'ĂŞtre systĂ©matiquement en dĂ©saccord avec Ottawa. Cet « autonomisme nĂ©gatif » est aussi critiquĂ© par certains nationalistes, notamment l'abbĂ© Lionel Groulx : « Le pseudo-nationalisme du chef de l'Union nationale - nationalisme qui se rĂ©duit, du reste, Ă  une dĂ©fense nĂ©gative de l'autonomie provinciale - dĂ©prĂ©cie rapidement toutes les valeurs qui constituent le vĂ©ritable fond de la doctrine »[177]. MĂŞme son de cloche chez George-Émile Lapalme, chef de l'opposition durant les annĂ©es du duplessisme[178] :

« Admettons en toute objectivité, d'abord et avant tout, que Maurice Duplessis a réellement inventé l'autonomie provinciale, même si avant lui on l'avait invoquée. (...) Autonomie électorale, autonomie négative, autonomie verbale, autonomie saugrenue, autonomie de remplissage, autonomie du néant. Oui, je sais. Mais y a-t-il eu quelqu'un qui l'ait mieux dorée que lui ? »

Il faut toutefois dire que Maurice Duplessis n'a pas qu'un autonomisme rĂ©actionnaire et que ses aspirations autonomistes ne se cantonnent pas aux temps de crise. Les quinze ans de domination de l'Union nationale durant les annĂ©es 1940 et 1950 furent Ă©galement caractĂ©risĂ©es par de frĂ©quents affrontements avec Ottawa, notamment sur des questions de fiscalitĂ© et de financement (le dossier des universitĂ©s fut sans doute la plus marquante de ces querelles). Dans ce contexte, Duplessis ne se contente pas d'un « autonomisme nĂ©gatif » et prend parfois des initiatives. C'est notamment le cas en 1953, alors qu'il met en place la Commission royale d'enquĂŞte sur les problèmes constitutionnels (mieux connue sous le nom de Commission Tremblay), dont les recommandations mènent Ă  la crĂ©ation d'un impĂ´t provincial sur le revenu des particuliers en 1954[177].

Pour Conrad Black, biographe de Maurice Duplessis et sympathisant de l'Union nationale, le « Chef » est « le plus important leader de toute l'histoire de la politique provinciale du QuĂ©bec »[179]. Bien qu'il admette que son rĂ©gime fut marquĂ© par le patronage et les « tractations politiques douteuses », Black voit en Duplessis « celui qui a dotĂ© le QuĂ©bec d'un État national »[179] :

« Sous Duplessis, l'État est devenu infiniment plus important qu’il ne l'avait été auparavant en particulier dans ses rapports avec l’Église, le gouvernement fédéral et les compagnies. Il a mis fin à cette époque où le premier ministre de la province de Québec s'asseyait au conseil d'administration de grosses compagnies pour parler affaires avec les industriels qui le considéraient comme le chef d'une moyenne entreprise appelée la province de Québec. Duplessis a élevé le gouvernement au-dessus de tout cela pour en faire un gouvernement autonome et national. »

Conservatisme, rapport au clergé et anticommunisme

MalgrĂ© ses apparences traditionalistes, Maurice Duplessis n'Ă©tait pas complètement opposĂ© Ă  la notion de « progrès », du moins en matière Ă©conomique. Il mit en place plusieurs mesures visant la modernisation de l'Ă©conomie quĂ©bĂ©coise. Dans cette veine, les pratiques Ă©conomiques prĂ´nĂ©es par Duplessis se rapprochent du libĂ©ralisme Ă©conomique[180]. AttachĂ© au patrimoine agricole, Duplessis fit de l'Ă©lectrification des campagnes l'une de ses prioritĂ©s[181]. Ainsi, entre 1945 et 1960, l'Office de l'Ă©lectrification rurale fit passer de 20 % Ă  98 % la proportion de fermes ayant accès Ă  l'Ă©lectricitĂ© au QuĂ©bec[181]. Cela permit de moderniser les techniques agricoles et d'augmenter la productivitĂ© des fermes, ce qui fit en sorte de rĂ©duire la quantitĂ© de main-d'Ĺ“uvre nĂ©cessaire en agriculture et de la rĂ©orienter vers les industries modernes des villes[181]. MalgrĂ© le manque de services publics, certains font Ă©galement valoir qu'il est responsable d'une longue pĂ©riode de croissance Ă©conomique en plus d'avoir dĂ©posĂ© 15 surplus budgĂ©taires consĂ©cutifs. Avec Hydro-QuĂ©bec, le gouvernement encourage le dĂ©veloppement et la colonisation de plusieurs rĂ©gions nordiques et prĂ©conise la formation de scientifiques, techniciens et ingĂ©nieurs canadiens français[182]. Selon l'historien StĂ©phane Savard, ces progrès permettent de nuancer le mythe de la « Grande noirceur »[183] :

« L'étude du rôle accordé à Hydro-Québec et au développement hydroélectrique par l'administration de l'Union nationale permet donc de corriger certaines interprétations courantes sur le régime duplessiste, dont celle d'un gouvernement qui s'appuie uniquement sur l'entreprise privée afin de développer les nouvelles régions. Elle démontre également une continuité, à l'égard d'Hydro-Québec, entre les interventions du gouvernement Duplessis et celles entreprises par les gouvernements subséquents, notamment ceux de Jean Lesage, Daniel Johnson, Robert Bourrassa et René Lévesque [...] nuançant le mythe d'un changement radical. »

Bien que partisan du progrès Ă©conomique, Maurice Duplessis fut Ă  la tĂŞte d'un rĂ©gime aux tendances rĂ©solument conservatrices dans les sphères sociales et culturelles. De ce fait, il fut très proche du clergĂ© catholique et des milieux religieux, allant mĂŞme jusqu'Ă  affirmer « les Ă©vĂŞques mangent dans ma main ». Les principaux biographes de Duplessis, Robert Rumilly et Conrad Black, s'entendent sur cette conclusion[184]. Toutefois, Rumilly souligne qu'il fut un ardent dĂ©fenseur de la tradition canadienne française alors que Black affirme plutĂ´t qu'il fut Ă  l'origine de la chute de l'influence du clergĂ©, en rĂ©duisant les prĂŞtres Ă  un rĂ´le de dĂ©pendance[184]. Une chose est sĂ»re, Duplessis ne se laissait pas dicter de dĂ©cision par l'Église, bien qu'il laissât sous-entendre que ses actions Ă©taient guidĂ©es par la religion, voire par les Ă©vĂŞques eux-mĂŞmes[185].

Soulignant les biais idĂ©ologiques de Rumilly et Black, l'historien Alexandre Dumas brosse quant Ă  lui un portrait un peu plus nuancĂ© des relations entre l'Église et l'État sous Duplessis[184]. Dumas ne nie pas la nature clientĂ©liste des relations entre les instances religieuses et le premier ministre, qui finance les Ĺ“uvres du clergĂ© en Ă©change d'un important rĂ©seau d'influence qui lui servit notamment en contexte Ă©lectoral[186]. Il rappelle que Duplessis tissait mĂŞme des relations très personnelles avec les Ă©vĂŞques, leur offrant des cadeaux en tout genre et leur Ă©crivant mĂŞme personnellement pour souligner leurs anniversaires[185]. Toutefois, ce dernier explique que, malgrĂ© les relations Ă©troites entre les grandes figures du clergĂ© et le gouvernement, le bas-clergĂ© formait un bloc beaucoup moins monolithique que l'on pense[186]. Critiquant les gĂ©nĂ©ralisations des principaux biographes de Duplessis, il donne des exemples d'opposition au clientĂ©lisme unioniste. Dumas relate notamment un article intitulĂ© « Lendemains d'Ă©lections », publiĂ© par les abbĂ©s GĂ©rard Dion et Louis O'Neill dans Le Devoir en 1956, et critiquant les « mĹ“urs Ă©lectorales des Canadiens français »[187]. Dion et O'Neill dĂ©noncent Ă©galement l'attitude du clergĂ© envers l'Union nationale, qu'ils jugent nuisible Ă  la rĂ©putation de l'Église[187]. Bien que les abbĂ©s ne citèrent pas de nom, leur texte fut largement perçu comme une attaque contre l'Union nationale et reçut le soutien, en privĂ©, de plusieurs Ă©vĂŞques[187].

Les gouvernements de Duplessis furent caractĂ©risĂ©s par l'usage gĂ©nĂ©ralisĂ© du trafic d'influence, la lutte anticommuniste et l'emploi de la rĂ©pression contre les syndicats. L'acharnement de Duplessis contre l'influence communiste au QuĂ©bec rappelle Ă  plusieurs Ă©gards la paranoĂŻa maccarthyste aux États-Unis. Son initiative anticommuniste la plus cĂ©lèbre fut la Loi protĂ©geant la province contre la propagande communiste[188], surnommĂ©e « la Loi du cadenas ». Cette loi de 1937 permet au Procureur gĂ©nĂ©ral du QuĂ©bec, poste tenu par Maurice Duplessis lui-mĂŞme, d'ordonner la fermeture de toute organisation ou Ă©tablissement soupçonnĂ© de « communisme » ou de « bolchĂ©visme »[189]. Le Parti libĂ©ral du QuĂ©bec vote en faveur de cette loi et les rĂ©actions chez la population francophone comme dans la presse semblent gĂ©nĂ©ralement positives[88].

Le sociologue Marcel Fournier affirme que la Loi du cadenas rĂ©pond non seulement aux demandes des « Ă©lĂ©ments conservateurs » du clergĂ© mais permet Ă©galement au gouvernement de freiner les actions de syndicalisation et d'empĂŞcher l'union des forces progressistes quĂ©bĂ©coises en un front commun (elle force d'ailleurs de nombreuses organisations Ă  Ĺ“uvrer dans la clandestinitĂ©)[189]. En 1957, soit vingt ans après son adoption, la Cour suprĂŞme canadienne juge inconstitutionnelle la majeure partie de cette lĂ©gislation[190].

Propagande et censure

Trois hommes en habits cravates examinant des revues et des journaux dans un bureau.
Trois hommes en civils examinent le contenu de revues, collis et journaux d'allégeance communiste, en vertu de la Loi du cadenas, .
Une pile d'objets amassée comme un butin
Une pile d'objets confisqués comprenant des éditions des journaux Clarté, La Revue de Moscou et Soviet Russia Today, ainsi qu'une affiche de propagande de la Canadian Civil Liberties Union, .
PDF complet d'un texte de propagande.
L'ABC de l'Électeur (texte complet), un dérivé du Catéchisme des électeurs paru en 1944 à l'occasion des élections générales québécoises de 1944[191].

Un contrĂ´le Ă©troit de la presse Ă©crite caractĂ©rise le règne de Maurice Duplessis Ă  la tĂŞte du QuĂ©bec[192]. Au moment oĂą l'Union nationale prend le pouvoir, on constate une dĂ©politisation des journaux qui, souvent la propriĂ©tĂ© d'hommes d'affaires proches du Parti libĂ©ral, tentent de s'attirer la sympathie des Unionistes[192]. Les journaux craignent Ă©galement que le gouvernement ne s'attaque Ă  leurs activitĂ©s par le biais de Maurice Duplessis, qui a la capacitĂ© d'intervenir dans la fabrication et la vente du papier journal[192]. Cette situation crĂ©e donc une « sympathique neutralitĂ© Ă  l'Ă©gard du gouvernement », quand il ne s'agit pas tout bonnement d'une participation Ă  la propagande unioniste[192]. Duplessis tisse des liens Ă©troits avec les propriĂ©taires de journaux (notamment le puissant Jacob Nicol) et s'assure de la complaisance de grandes institutions comme La Presse, La Patrie, Le Soleil, The Montreal Star, la Gazette ou encore la station radiophonique CKAC[192]. Notons l'exception notable du Devoir qui, après avoir supportĂ© l'Union nationale lors de son Ă©lection en 1936, est devenu l'un des plus farouches opposants du parti après la grève d'Asbestos (1949) et l'arrivĂ©e de GĂ©rard Fillion Ă  la tĂŞte du journal (1947)[193]. Le Devoir, par le biais de son Ă©minent journaliste Pierre Laporte, participera d'ailleurs Ă  la chute de l'Union nationale en rĂ©vĂ©lant la corruption du gouvernement durant le « Scandale du gaz naturel », Ă  la fin des annĂ©es 1950. La propagande communiste Ă©tant lĂ©galement interdite au QuĂ©bec (Loi protĂ©geant la province contre la propagande communiste, 1937), Duplessis tentera de faire taire le journal en le qualifiant de « journal bolchĂ©vique » en 1954[194].

Ayant exercé le pouvoir à une époque où de nouveaux modes de communications médiatiques s'imposent, notamment le cinéma, Maurice Duplessis s'est assuré d'exercer une importante influence sur la sphère culturelle. En ce qui concerne le cinéma, c'est surtout à travers Maurice Proulx, prêtre-agronome, pionnier du documentaire québécois et l'un des seuls cinéastes connus du Québec de l'époque, que s'incarne la propagande cinématographique des unionistes[195]. L'Union nationale le place à la tête du Service de ciné-photographie provincial (SCP), créé en 1941, et lui commande de nombreux films qu'il réalise en partenariat avec divers ministères[195]. Ces œuvres traitent de sujets en phase avec le programme politique du parti au pouvoir : l'éloge du monde rural (Jeunesse rurale, 1952), l'importance de l'agriculture (Le lin du Canada, 1947 et Le tabac jaune du Québec, 1952) ou encore la construction de routes et de ponts (Les routes de Québec, 1951 et Par-dessus nos rivières, 1957)[196].

L'historien et critique de cinĂ©ma Yves Lever considère qu'on doit Ă  Duplessis « la pĂ©riode la plus noire de la censure du cinĂ©ma »[197]. Imitant ses prĂ©dĂ©cesseurs au poste de premier ministre, Maurice Duplessis se rĂ©serve le ministère du Procureur gĂ©nĂ©ral[198] : il est donc directement responsable du contrĂ´le de l'industrie cinĂ©matographique[199]. Au cours de son premier mandat, entre 1936 et 1939, il interdit de nombreux films jugĂ©s « immoraux », notamment des Ĺ“uvres des Français Jean Renoir et Marcel CarnĂ©[199]. Cette censure touchait d'ailleurs particulièrement le cinĂ©ma français : le public quĂ©bĂ©cois n'avait accès qu'Ă  99 des 185 minutes du film Le rouge et le noir de Claude Autant-Lara (1954) et n'a pu visionner Et Dieu crĂ©a la femme de Roger Vadim (1956) que de nombreuses annĂ©es après sa sortie[197].

Outre les films jugĂ©s « immoraux », la censure de l'Union nationale vise Ă©galement Ă  limiter l'autre hantise des unionistes : le communisme. Cette bataille s'incarne notamment dans l'opposition Ă  l'Office national du film, organe fĂ©dĂ©ral accusĂ© d'encourager la « centralisation fĂ©dĂ©rale » et la propagande communiste[200]. Radio-Canada subit le mĂŞme sort, puisque l'Union nationale, par le biais d'amendements lĂ©gislatifs, s'offre un droit de regard sur les programmes et censure ainsi les films diffusĂ©s Ă  la tĂ©lĂ©vision[201]. La façon de consommer le cinĂ©ma est Ă©galement contrĂ´lĂ©e. On interdit notamment les cinĂ©s-parcs, lieux très prisĂ©s par les adolescents mais considĂ©rĂ©s comme des sin pits (« antres de pĂŞchĂ©s ») par les autoritĂ©s conservatrices[202].

Des campagnes à l'américaine au Québec

Photographie noir et blanc d'un homme en habit cravate.
Oscar Drouin, Ministre des Terres et ForĂŞts et organisateur en chef de l'Union nationale de 1936 Ă  1937[203].

Maurice Duplessis a changé la manière de percevoir le marketing politique au Québec. Un peu à la manière de Dwight D. Eisenhower aux États-Unis, l’Union nationale utilisait des « campagnes à l’américaine » pour faire élire Maurice Duplessis. Les campagnes à l’américaine se caractérisent en cinq volets que Duplessis appliquait : des méthodes de communication fortement personnalisées, le recours à des professionnels de la communication, des décisions stratégiques précédées d’études de marché, un recours aux médias de masse ainsi qu’aux techniques publicitaires réputées les plus performantes puis finalement, des moyens financiers de plus en plus considérables[204]. D’abord, entre 1930 et 1960, l’image de Duplessis était partout au Québec. En fait, le personnage était plus grand que son parti. Non seulement Duplessis était au-devant du parti qu’il représentait sur les affiches ou les publicités, mais aussi dans ses discours. Autrement dit, les gens n’étaient pas invités à voter pour l’Union nationale, mais plutôt pour Maurice Duplessis. Dès 1939, sur les affiches électorales, il n’était pas inscrit « Union nationale », mais « Duplessis »[205]. Le parti pensait que le nom du chef frappait plus fort que le nom du parti[206].

Dans le marketing politique, les stratégies employées nécessitent plusieurs personnes qui ont comme travail d’étudier l’électorat, d’influencer les masses et projeter une bonne image d’un candidat. C’est au tournant des années 1940 que Maurice Duplessis a construit sa garde rapprochée et s’est entouré de trois personnes qui ont été déterminantes pour sa carrière ; Joseph-Damase Bégin, qui s’occupait de l’organisation centrale de la campagne, Paul Bouchard, qui agissait à titre de directeur de la propagande et Bruno Lafleur, qui était à la fois publiciste, documentaliste et rédacteur. Ensemble, ils ont mis de l’avant une propagande « aussi massive et dynamique, aussi simple et aussi complète, aussi efficace que moderne »[207]. De plus, il y avait une trentaine de personnes qui travaillaient sur les publicités du chef. Maurice Duplessis et son équipe n’utilisaient pas les sondages. Ce qui a aidé l’équipe de Duplessis à avoir le dessus sur ses adversaires en matière d’étude de marché, en 1956 par exemple, est que Bruno Lafleur a eu accès aux données portant sur tous les foyers de tous les comtés, le pourcentage d’entre eux qui avaient la télévision et ceux qui captaient la station CFCM-TV[206]. De plus, Duplessis organisait des rassemblements pour rencontrer les gens, mais aussi parce que ça lui permettait de constater l’appui qu’il avait et de quoi avait l’air son électorat. Plusieurs auteurs, comme Lavigne et Melançon par exemple, s’entendent pour dire que Duplessis a remporté ses élections à cause de l’organisation et des stratégies que son équipe mettait en œuvre[208].

Photographie noir et blanc d'un homme en habit cravate.
Joseph-Damase BĂ©gin, ministre de la Colonisation et organisateur en chef des campagnes Ă©lectorales de l'Union nationale de 1940 jusqu'en 1960[209] - [210].

L’une des principales stratĂ©gies de Duplessis dĂ©peinte par les experts Ă©tait son utilisation des mĂ©dias de masse. Dès 1936, 15 000 CatĂ©chismes des Ă©lecteurs[211] ont Ă©tĂ© distribuĂ©s lors des Ă©vĂ©nements organisĂ©s par le parti et dans ces petits carnets, le programme et les qualitĂ©s de l’Union nationale Ă©taient mis de l’avant et le Parti libĂ©ral du QuĂ©bec Ă©tait fortement critiquĂ©. Outre la distribution du CatĂ©chisme, les publicitĂ©s du parti Ă  la radio ont grandement contribuĂ© Ă  la victoire de Duplessis. En fait, cette omniprĂ©sence et cette propagande radiophonique, qui Ă©tait un message narratif professionnel dictĂ© par des artistes populaires a permis de « percer le mur du silence »[212] solidifiĂ© par la presse qui avait un parti pris pour les libĂ©raux. En 1939, puisque les quotidiens prĂ©fĂ©raient appuyer le Parti libĂ©ral, les unionistes ont agi de manière autonome et c’est dans ce contexte que les premières brochures Ă©lectorales de l’Union nationale ont vu le jour. Ces brochures sont devenues le Message aux Ă©lecteurs, qui informaient le public des idĂ©es et des convictions de Duplessis[212].

En 1940, l’Union nationale a conçu son propre hebdomadaire, Le Temps, ce qui a permis au parti d’adresser ses idĂ©es Ă  l’électorat par un canal que seul lui contrĂ´lait. Le parti parvenait Ă  distribuer entre 500 000 et 600 000 exemplaires du journal Le Temps[213]. Le vent a tournĂ© en 1944 alors qu’en plus de continuer Ă  produire des brochures, l’équipe de Duplessis s’est associĂ©e Ă  plusieurs quotidiens comme Le Devoir, Le MontrĂ©al-Matin, L’Action catholique et Le Nouvelliste[214].

En 1948, chaque comté avait une brochure personnalisée, tout dépendant des besoins spécifiques de la région et c’est cette même année que l’équipe de Duplessis a commencé la production de films de propagande qui étaient présentés dans différents cinémas. En 1952, l’Union nationale a innové en mettant le visage de Duplessis et les slogans du parti sur des panneaux-réclames placés sur le bord des routes. Le parti est aussi parvenu à avoir trois pages de publicité dans tous les quotidiens montréalais. Puis, lors de sa dernière campagne en 1956, la publicité de Duplessis a traversé les frontières et s’est retrouvée sur 28 pages du New York Times[215]. De plus, Duplessis est sur la première édition de l’Almanach Éclair. La publicité par l’objet a aussi commencé à se développer. Duplessis se retrouvait donc sur des drapeaux, des insignes, des crayons et des autocollants. Lors de cette campagne, l’Union nationale a acheté de la publicité dans 231 émissions de radio montréalaises, 76 à Québec et quelques-unes à Jonquière et Rimouski pour présenter des clips publicitaires[216]. Au départ, Duplessis n’était pas en faveur de la publicité, mais son organisateur de campagne, Joseph-Damase Bégin, l’a vite convaincu que les campagnes électorales se gagnaient dorénavant dans les médias. Tout au long de sa carrière, l’équipe de Duplessis a vendu le chef du parti comme une véritable marque commerciale. De plus, au cours de sa carrière, pour marquer les esprits, attirer l’attention et améliorer sa propagande populiste, Duplessis a utilisé plusieurs slogans notables : « Redevenons justes et honnête » (1936), « Soyons maîtres chez nous » (1939), qui a inspiré le célèbre « Maitres chez nous » des libéraux de Jean Lesage en 1962, « Ne prenez pas de chance ! Votez pour l’Union nationale et ses candidats » (1944), « Les libéraux donnent aux étrangers ; Duplessis donne à sa province » (1948), « Laissons Duplessis continuer son œuvre » (1952) et « Avec Duplessis, c’est le progrès » (1956)[217].

Finalement, pour l’équipe de Duplessis, l’argent n’a jamais Ă©tĂ© un problème, parce qu’elle avait un grand budget. Selon les statistiques mises en avant par le texte de Lavigne et Cantin, le parti de Duplessis a dĂ©pensĂ© trois millions de dollars lors de la campagne de 1948, cinq millions en 1952 et neuf millions en 1956. Selon le journaliste Pierre Laporte, lors de cette dernière campagne, l’Union nationale aurait dĂ©pensĂ© 2 016 500 dollars en publicitĂ©, faisant une moyenne d’argent dĂ©pensĂ© par candidat unioniste de 23 000 dollars, comparativement Ă  4 000 dollars par candidat pour le Parti libĂ©ral du QuĂ©bec[206].

Photographie noir et blanc de trois hommes en habit cravate entourés de nombreux soldats en uniforme.
(Habillés en noir) Ésioff-Léon Patenaude et Maurice Duplessis, cérémonie du Jour du souvenir, 1938.
Photographie noir et blanc de dix hommes en habit cravate.
Rencontre entre William Lyon Mackenzie King (centre) et les premiers ministres des provinces canadiennes, 1945. Duplessis est le septième à partir de la gauche.
Photographie noir et blanc d'un homme souriant Ă  un autre homme.
Maurice Duplessis (droite) souriant à un inconnu, c. 1935. Duplessis avait la réputation de posséder une mémoire exceptionnelle des noms et des visages.

Visibilité et populisme

Le politologue Frédéric Boily est le principal auteur s'étant intéressé aux penchants populistes du style politique de Maurice Duplessis. Boily souligne l'esprit de la posture populiste[218] :

« Le populisme est une façon d'ĂŞtre en politique, c'est-Ă -dire qu'il se prĂ©sente comme un mode authentique de reprĂ©sentation d'un peuple qui ne serait pas adĂ©quatement reprĂ©sentĂ©. Le populiste veut attirer Ă  lui le vote des Ă©lecteurs en misant sur l'idĂ©e d'une reprĂ©sentation plus vraie et honnĂŞte, le peuple n'Ă©tant pas seulement mal gouvernĂ© mais aussi la victime d'une caste qui profite d'un système qu'elle a mis en place et qui agit Ă  l'encontre du bien populaire. C'est pourquoi les populistes vont se prĂ©tendre au-delĂ  des lignes partisanes habituelles, notamment de la droite et de la gauche. Au lieu de cette traditionnelle dichotomie de l'univers politique, ils chercheront plutĂ´t Ă  prĂ©senter la scène politique comme Ă©tant tranchĂ©e entre le camp des « petits » contre celui des « gros ». »

Dans cette perspective, pour l'Ă©quipe de Duplessis, la relation et la proximitĂ© qu’il entretenait avec ses Ă©lecteurs Ă©taient très importantes. Il n’était pas rare qu’il assiste Ă  des baptĂŞmes, des naissances ou des mariages. Duplessis arborait « l’image de l’homme commun »[219]. Très discret sur sa vie privĂ©e, Duplessis se disait « mariĂ© Ă  sa province »[220]. Il se prĂ©sente comme le meneur du peuple contre une caste politique corrompue[221]. Au mĂŞme titre que les chefs populistes de l'Ouest canadien, il valorise le caractère agricole du QuĂ©bec, plaidant parfois mĂŞme pour un « retour Ă  la terre »[221].

Bien qu'il ne remette pas complètement en cause les institutions dĂ©mocratiques, le système des partis ou le cadre parlementaire, il se prĂ©sente souvent comme au-dessus de la mĂŞlĂ©e et non-partisan afin de rallier des Ă©lecteurs issus de toutes les traditions politiques[221]. Peu avant l'Ă©lection de 1936, Duplessis illustra parfaitement cette posture en dĂ©clarant : « Je ne suis pas bleu, je ne suis pas rouge, je ne suis pas tory, je suis national »[222]. Duplessis n'affiche pas seulement une mĂ©fiance envers la caste politique et les institutions dĂ©mocratiques ; dans une posture typique du populisme, il est aussi très critique des milieux intellectuels et des lettrĂ©s qu'il aurait dĂ©crit Ă  maintes reprises, selon Pierre Laporte, comme des gens qui « vivent dans la lune »[223].

L'impression de proximitĂ© avec le peuple fut assurĂ©e par la propagande unioniste. Tout au long de sa carrière politique, l’équipe de Duplessis s’est assurĂ©e qu’il conserve une image omniprĂ©sente au sein du public. Par exemple, des photographies ou des dessins reprĂ©sentant le chef de l’Union nationale se retrouvaient sur les bouteilles de lait, les verres, les casse-tĂŞtes et les boĂ®tes de cigarettes[224]. Duplessis a aussi fait distribuer dans les Ă©coles 250 000 casse-tĂŞtes Ă  son effigie en 1956[225].

Boily rappelle que le populisme de Duplessis ne fait pas figure d'exception dans le paysage politique canadien. Alors que l'Ouest du pays cultive une « vigoureuse tradition de populisme agraire »[226], le duplessisme serait aussi Ă  l'origine d'une tendance Ă  long terme au QuĂ©bec[227] :

« En effet, avec Maurice Duplessis et Camillien Houde, on peut parler des débuts d'une tradition populiste canadienne-française et, plus tard, québécoise qui, de Réal Caouette à Mario Dumont — sans oublier Camil Samson —, montre que la politique québécoise n'est pas laissée pour compte. Le Québec, comme d'autres provinces canadiennes, a connu ses épisodes populistes. On constate en effet une tradition québécoise débutant avec Camillien Houde et Maurice Duplessis et se poursuivant dans les années 1960 et 1970 avec le Crédit social et, plus récemment, avec l'Action démocratique. »

Postérité et historiographie

L'incarnation de la « Grande Noirceur »

Photographie noir et blanc de sept hommes avec manteaux et chapeaux presque tous identiques.
Inspection officielle par le Premier ministre, Maurice Duplessis, des travaux effectués sur le pont de Québec et au nouveau pont de la Chaudière, 1950.

Les annĂ©es 1960, berceau de la RĂ©volution tranquille, ne furent pas tendres Ă  l'Ă©gard de Maurice Duplessis[228]. Le « Cheuf », qui a dominĂ© la politique quĂ©bĂ©coise pendant deux dĂ©cennies, est alors l'incarnation de la « Grande Noirceur », une pĂ©riode sombre et rĂ©actionnaire qu'Ă©voquent les intellectuels et les adversaires politiques du duplessisme[228]. Ă€ l'Ă©poque, le sociologue Fernand Dumont est l'un des principaux critiques du bilan de Maurice Duplessis[228]. Alors que le QuĂ©bec du XXe s'industrialise et s'urbanise, il voit dans la politique du chef unioniste une idĂ©ologie dĂ©passĂ©e qui n'a pas su s'adapter Ă  la rĂ©alitĂ© quĂ©bĂ©coise[228]. Dumont considère mĂŞme que cette politique rĂ©actionnaire a mis un frein Ă  la modernisation du QuĂ©bec en bloquant la « première RĂ©volution tranquille » des annĂ©es 1930[228]. AndrĂ© Laurendeau abonde dans le mĂŞme sens, qualifiant le rĂ©gime duplessiste de « plutĂ´t retardateur que retardataire »[228]. MĂŞme son de cloche chez l'Ă©crivain et syndicaliste Pierre VadeboncĹ“ur, qui fait remonter la Grande Noirceur jusqu'Ă  la ConquĂŞte de 1760 et Ă©rige Maurice Duplessis en hĂ©ritier de l'Ă©chec des rĂ©bellions de 1837[229]. VadeboncĹ“ur voit dans le duplessisme ce qu'il considère ĂŞtre les caractĂ©ristiques du QuĂ©bec de la fin du XIXe siècle, Ă  savoir la « rĂ©sistance nĂ©gative », l'« inaction » et l'« intĂ©grisme »[229]. Pierre Laporte, journaliste, homme politique libĂ©ral et opposant notoire du duplessisme, publie quant Ă  lui Le vrai visage de Duplessis en . Le livre, publiĂ© aux Éditions de l'Homme, est un best-seller vendu Ă  plus de 22 000 copies[230].

On lui reproche alors son autoritarisme, ses politiques sociales rĂ©actionnaires (opposition au suffrage fĂ©minin, Ă  l'instruction obligatoire, au système de santĂ© public, etc.), son capitalisme sauvage (antisyndicalisme, proximitĂ© avec la haute finance et les capitaux Ă©trangers, etc.), son conservatisme (attachement dĂ©mesurĂ© au monde agricole, omniprĂ©sence du clergĂ©, etc.) et une instrumentalisation opportuniste et Ă©lectoraliste du nationalisme[231]. Les critiques des intellectuels quĂ©bĂ©cois des annĂ©es 1960 se reflètent Ă©galement dans l'arène politique et l'espace public, notamment Ă  travers la tĂ©lĂ©vision, la littĂ©rature ou encore la revue CitĂ© libre. Symbole de la place de Duplessis dans l'imaginaire collectif quĂ©bĂ©cois, une statue Ă  son effigie commandĂ©e par Paul SauvĂ© disparaĂ®t de la circulation en 1961, avant mĂŞme d'ĂŞtre installĂ©e. Selon l'historien Pierre Berthelot, les gouvernements qui succèdent Ă  l'Union nationale considèrent alors que « le public n'Ă©tait pas prĂŞt Ă  accepter un tel monument »[232].

Les biographes du « Chef » : appropriation et rĂ©interprĂ©tation

Audio externe
Débat entre les historiens Conrad Black et Léandre Bergeron sur le thème de l'héritage de Maurice Duplessis (CBC, , 22 minutes).
https://www.cbc.ca/archives/entry/duplessis-battle-of-the-historians

Bien que la littĂ©rature sur Maurice Duplessis et son rĂ©gime soit dĂ©jĂ  abondante durant les annĂ©es 1960, il faudra attendre la dĂ©cennie suivante pour que soient publiĂ©es les deux principales biographies du chef unioniste : Maurice Duplessis et son temps (1977, 2 volumes) de Robert Rumilly et Duplessis (1977, 2 volumes) de Conrad Black. Ces deux historiens conservateurs très proches de l'Union nationale (ils participent parfois mĂŞme Ă  des campagnes Ă©lectorales), qui correspondent et collaborent par ailleurs, peignent un portrait beaucoup plus complaisant et positif du duplessisme. L'historien Jonathan Livernois, bien qu'il reconnaisse la « grande importance » des recherches de Rumilly, qualifie son ouvrage d'« orientĂ© politiquement et idĂ©ologiquement »[233]. Il souligne notamment son mĂ©pris pour les intellectuels, une posture que Rumilly et Duplessis partagent[233]. Dans sa biographie, Rumilly qualifie les intellectuels d'« incohĂ©rents », d'individus « farcis de thĂ©orie » et « dĂ©bordants de pĂ©dantisme » qui « aspirent Ă  dominer la vie publique » alors qu'ils sont « ignorants des rĂ©alitĂ©s Ă©conomiques »[233]. Rumilly rĂ©sume donc ainsi l'attitude de Maurice Duplessis Ă  leur Ă©gard : « Duplessis, en un mot, aime les gens naturels, et les intellectuels ne le sont pas. Donc, Duplessis n'aime pas les intellectuels »[233].

Photographie noir et blanc d'un homme en habit cravate.
Robert Rumilly, biographe de Maurice Duplessis.

Pierre Berthelot considère Ă©galement que Rumilly offre un portrait complaisant du rĂ©gime duplessiste, notamment en ce qui concerne ses politiques sociales et Ă©conomiques, et qu'il « prend parti pour son gouvernement et dĂ©fend son bilan »[232]. C'est notamment le cas lorsqu'il prĂ©sente la Loi des salaires raisonnables comme une mesure permettant d'amĂ©liorer le sort des travailleurs mais ne soulève pas que la mesure permet un contrĂ´le plus Ă©troit de l'État sur l'action syndicale et le droit de grève[234]. Pour Berthelot, cette complaisance est d'autant plus Ă©vidente Ă  partir du deuxième tome, estimant que c'est « sans doute car il s'agit d'une pĂ©riode oĂą il fut lui-mĂŞme mĂŞlĂ© activement aux Ă©vènements qu'il dĂ©crit »[235]. Toujours selon Berthelot, Rumilly aurait fait de Duplessis « le roi du QuĂ©bec ». Dans cette perspective, mĂŞme son autoritarisme se rĂ©vèle ĂŞtre « la manifestation d'un bon roi qui veille sur son bon peuple en le protĂ©geant contre tout ce qui peut nuire Ă  son unitĂ© »[235]. Berthelot rĂ©sume en ces termes son interprĂ©tation de l'ouvrage de Robert Rumilly[236] :

« Dans l'ensemble, Maurice Duplessis et son temps est un véritable monument à la mémoire de l'ancien premier ministre. En l'inscrivant dans la lignée des Honoré Mercier et Mgr Laflèche, Rumilly fait de Maurice Duplessis un être chez qui on retrouve une idée transcendante du Québec. Peut-être que ce livre doit moins être vu comme une biographie que comme un témoignage de ce qu'a été, au fond, l'idéal politique d'une certaine élite, à une certaine époque, à laquelle Rumilly s'est toujours identifié. Peut-être qu'il ne faut pas y voir une volonté de réhabiliter seulement Duplessis, mais toute sa conception de la société. Pour Rumilly, le règne de Maurice Duplessis a été le point culminant de l'aventure québécoise. »

Photographie couleur d'un homme en habit avec nœud papillon.
Conrad Black, biographe de Maurice Duplessis.

Pour ce qui est de Conrad Black, Jonathan Livernois considère que son premier volume est plus « modĂ©rĂ© » que le second, au sein duquel Black laisse davantage paraĂ®tre ses partis pris conservateurs[237]. C'est notamment le cas dans la sphère Ă©conomique, alors qu'il justifie le système de favoritisme de Maurice Duplessis car il « revenait moins cher au contribuable qu'un système d'assurance sociale et ceux-ci en profitaient largement quoique de manière sĂ©lective »[237]. Berthelot considère quant Ă  lui que Conrad Black peint le portrait d'une « adorable canaille », un homme admirable de par sa ruse, qui a notamment permis de mettre au pas ses collègues et les hommes d'affaires, manipuler le clergĂ© et Ă©conomiser le budget de l'État[238]. Berthelot perçoit aussi une volontĂ© chez Black de « remettre en question la part novatrice et ''rĂ©volutionnaire'' de la RĂ©volution tranquille et de raviver l'intĂ©rĂŞt pour l'Union nationale »[239]. Bien que critique Ă  l'Ă©gard des ouvrages de Rumilly et Black, Jonathan Livernois rappelle tout de mĂŞme leur importance historiographique :

« Malgré toutes les réserves qu'on peut avoir à l'égard de ces deux biographies, on ne saurait faire l'impasse sur elles, tant la somme documentaire balise bien l'histoire du duplessisme. Conclusion : on doit vivre avec elles, et tenter de départager le bon grain de l'ivraie. Il faut les citer avec des pincettes, disons. D'autant que les historiens n'ont jamais osé, par la suite, s'aventurer dans l'écriture d'une biographie de Maurice Duplessis. Un peu comme si Rumilly et Black avaient brûlé le terrain. »

Le legs de Maurice Duplessis : une mémoire à caractère polémique

MalgrĂ© leur complaisance Ă  l'Ă©gard de Maurice Duplessis, les biographies de Robert Rumilly et Conrad Black ne rĂ©ussissent pas Ă  rĂ©habiliter son image dans l'imaginaire collectif : le Duplessis de la Grande Noirceur est persistant[240]. En 1978, Denys Arcand fait dĂ©couvrir au grand public un cĂ´tĂ© un peu plus humain du « Chef » dans sa tĂ©lĂ©sĂ©rie Duplessis[240]. Les annĂ©es 1970 donnent Ă©galement lieu Ă  la publication des mĂ©moires de plusieurs personnalitĂ©s politiques contemporaines au chef unioniste (Antonio Barrette, Georges-Émile Lapalme, RenĂ© Chaloult, etc.)[240]. Ces mĂ©moires offrent un portrait Ă©parpillĂ© et anecdotique de Duplessis, alors que ses alliĂ©s vantent son leadership et sa gĂ©nĂ©rositĂ© et que ses adversaires dĂ©noncent son autoritarisme et son hypocrisie[240]. Bien que ces tĂ©moignages offrent un portrait plus intime des annĂ©es du duplessisme, elles ne parviennent pas Ă  « offrir un portrait plus clair d'un homme aussi complexe » selon Pierre Berthelot[241].

Affiche de propagande.
Duplessis donne à sa province, page couverture d'un pamphlet distribué par l'Union nationale à l'occasion des Élections générales québécoises de 1948.

Le spectre du duplessisme plane aussi sur le monde politique durant les années 1970. Le , le premier ministre René Lévesque décide d'installer la statue de Maurice Duplessis sur le parterre de l'Assemblée nationale[241]. Cette initiative controversée d'un homme qui a pourtant combattu le duplessisme fait couler beaucoup d'encre et provoque des débats passionnés entre députés[242]. Au moment du dévoilement, René Lévesque rend hommage aux accomplissements de Duplessis tout en soulignant les aspects réactionnaires de ses politiques[242] :

« Nous aujourd'hui nous pouvons regarder celui-là ensemble sans qu'il soit nécessaire de préciser que le gouvernement du Québec n'a pas l'intention de placer des cadenas nulle part, de relancer des opérations à Asbestos, ou de confisquer quelque trésor polonais que ce soit. On nous permettra en revanche de ne pas blâmer ce lointain premier ministre d'avoir par exemple aidé et de tout son cœur la classe agricole, d'avoir travaillé et selon ses lumières à accélérer le développement économique du Québec, d'avoir réussi à force de poignet politique à faire baisser de quelque pour cent la taxation fédérale alors exorbitante au Québec, ou d'avoir déclaré dans un discours de : la Confédération a consacré le principe d'autonomie provinciale parce que chacune des provinces possédait sa mentalité et son autonomie propre. »

L'initiative pĂ©quiste crĂ©e la controverse. Certains y voient de l'opportunisme politique et reprochent Ă  LĂ©vesque de vouloir rĂ©cupĂ©rer les « vieux bleus » afin de les rallier au projet souverainiste[242]. GĂ©rard Pelletier, farouche opposant au duplessisme, y voit quant Ă  lui une « insulte »[243]. Maurice Duplessis lui-mĂŞme fait d'ailleurs figure d'insulte Ă  l'Ă©poque, alors que des politiciens de tout le spectre politique se voient comparĂ©s au « Chef » par leurs adversaires : RenĂ© LĂ©vesque, lorsque les fĂ©dĂ©ralistes lui reprochent de s'accrocher au pouvoir et de s'opposer systĂ©matiquement Ă  Ottawa, Pierre Elliott Trudeau, Ă  qui les souverainistes reprochent de les traiter comme les communistes sous Duplessis et mĂŞme Robert Bourassa, dont on critique un « nationalisme superficiel », des « liens troubles avec le favoritisme » et une complaisance avec les compagnies Ă©trangères[244]. Ces frĂ©quentes rĂ©fĂ©rences Ă  la Grande Noirceur sont comparables au phĂ©nomène du point Godwin selon Pierre Berthelot[245].

Photographie d'une statue d'un homme placé sur un socle.
Le Monument Maurice-Duplessis, Ă  cĂ´tĂ© de l'HĂ´tel du Parlement, Ă  QuĂ©bec. L'Ĺ“uvre, commandĂ©e Ă  Émile Brunet par Paul SauvĂ©, le successeur de Duplessis, fut livrĂ©e en 1960 au gouvernement libĂ©ral de Jean Lesage et demeura entreposĂ©e durant près de 20 ans, avant d'ĂŞtre dĂ©voilĂ©e en 1977 par le gouvernement pĂ©quiste de RenĂ© LĂ©vesque[246] - [247].

Les hommages au « Cheuf » se faisant discrets Ă  l'Ă©poque, on constate donc toute l'aversion que cultive une bonne partie de la sociĂ©tĂ© quĂ©bĂ©coise Ă  l'Ă©gard du règne duplessiste. L'image d'un lugubre Maurice Duplessis est Ă©galement parfois dĂ©peinte dans la culture populaire. C'est notamment le cas de la pièce Charbonneau et le Chef et la comĂ©die musicale rock Maurice. Sur le plan historiographique, Bernard Saint-Aubin publie Duplessis et son Ă©poque en 1979, Ă  l'occasion du 20e anniversaire de sa mort[248]. L'ouvrage, basĂ© essentiellement sur les biographies de Rumilly et Black, est un rĂ©sumĂ© qui n'« apporte rien de très nouveau » selon Pierre Berthelot[248].

Dans les annĂ©es 1980 et 1990, le paradigme de la Grande Noirceur continue d'alimenter les Ĺ“uvres de fiction. Maurice Duplessis y fait figure de « père autoritaire, violent et mesquin »[232]. On retrouve ces reprĂ©sentations dans Au nom du père, du fils et de Duplessis, un recueil fĂ©ministe d'AndrĂ©e Yanacopoulo ou encore la sĂ©rie tĂ©lĂ©visĂ©e Asbestos[232]. Pierre Berthelot souligne que la « simple mention de son nom, bourrĂ© de connotations, suffit Ă  crĂ©er une prĂ©sence invisible et oppressante, coinçant encore plus les personnages dans leur situation difficile, aux prises avec des forces ou des figures d'autoritĂ© abusant de leur pouvoir »[232].

Du cĂ´tĂ© politique, malgrĂ© une montĂ©e du conservatisme sur la scène occidentale durant les annĂ©es 1980, le QuĂ©bec ne voit pas de regain d'intĂ©rĂŞt pour l'Union nationale. Au contraire, le parti, dont le nouveau chef Roch La Salle se distance de l'hĂ©ritage duplessiste, s'essouffle et se voit complètement Ă©jectĂ© de la carte Ă©lectorale lors des Ă©lections de 1981 : il ne s'en relèvera pas et l'Union nationale disparaĂ®t le [249]. Les annĂ©es 1990, marquĂ©es par le nĂ©olibĂ©ralisme et l'apparition de l'Action dĂ©mocratique du QuĂ©bec (ADQ), une coalition qui rappelle Ă  certains observateurs l'Union nationale, ravivent l'image du duplessisme. Lucien Bouchard se voit Ă  son tour comparĂ© Ă  Maurice Duplessis lorsqu'il s'engage dans une sĂ©rie de compressions budgĂ©taires[245]. Les admirateurs du duplessisme, notamment Conrad Black, se manifestent quant Ă  eux Ă  l'occasion du 40e anniversaire de sa mort, en 1999[250]. Dans le contexte du « dĂ©ficit zĂ©ro », ces derniers veulent mettre de l'avant les rĂ©ussites du « Chef »[250].

Dans l'espace public, le traitement rĂ©servĂ© Ă  des milliers d'enfants faussement diagnostiquĂ©s pour ĂŞtre envoyĂ©s dans des Ă©tablissements psychiatriques, entre les annĂ©es 1930 et 1960, est mis en lumière par des groupes de victimes et la tĂ©lĂ©sĂ©rie Les Orphelins de Duplessis (1997)[251] Cet Ă©pisode cimente, dans l'imaginaire collectif, les perceptions nĂ©gatives Ă  l'Ă©gard du règne de Maurice Duplessis et du rĂ´le qu'a pu y jouer l'Église[252]. Dans la culture populaire, ces perspectives sont observables jusqu'Ă  tout rĂ©cemment, alors qu'une bière noire de la microbrasserie Dieu du ciel ! porte le nom de « Grande Noirceur » (sur l'Ă©tiquette, on peut voir un Duplessis aux allures diaboliques) et que des Ă©tudiants ont scandĂ©, lors du Printemps Ă©rable de 2012, « on recule, on recule, on recule jusqu'Ă  Duplessis ! » ou encore, en s'adressant aux policiers anti-Ă©meutes, « Duplessis ! Reviens ! T'as oubliĂ© tes chiens ! »[253] - [254] - [255] - [256]. Jonathan Livernois, mĂŞme s'il Ă©met des rĂ©serves quant Ă  un rĂ©visionnisme qui ferait de Maurice Duplessis un prĂ©curseur de la RĂ©volution tranquille, considère que ce dernier est devenu un Ă©pouvantail que l'on agite, instrumentalise, rĂ©habilite et caricature de toutes parts, un « Bonhomme Sept Heures », un « mal mort » que l'on n'arrive pas Ă  relĂ©guer Ă  sa place : le passĂ©[257].

Vie privée

Photographie noir et blanc d'un homme d'un homme souriant avec un cigare aux lèvres.
Maurice Duplessis, circa 1950.

Duplessis ne s'est jamais marié et n'a pas eu d'enfants. Toutefois, il n'est pas resté insensible aux femmes de son entourage, notamment durant ses années étudiantes. Il aurait même envisagé de se marier, comme le rapporte Conrad Black dans sa biographie :

« Pendant la première Guerre mondiale, Duplessis fit une cour assidue à Augustine Delisle, fille d'un marchand de charbon prospère. Il est probable qu'ils auraient fini par se marier, n'eût été de la famille Duplessis, y compris les tantes, qui désapprouvaient un mariage l'unissant à une famille de commerçants. Finalement, et non sans amertume, Duplessis déféra aux souhaits de sa famille. Mais par la suite, à chaque fois qu'il mentionnait certains de ses parents, il le faisait d'une façon sarcastique et mordante qui laissait poindre son ressentiment. À compter de ce jour, il sembla avoir pris la décision de ne jamais se marier. Personne n'a souvenance et rien n'indique que, parmi ses nombreuses relations féminines, il y eut jamais la moindre possibilité d'un mariage[258]. »

Il est toutefois resté un homme de famille et fut très proche de ses sœurs, beaux-frères, neveux et nièces. Le , le quotidien Progrès du Saguenay annonce que Maurice Duplessis est devenu le parrain de la fille d'Antonio Talbot, ministre de la Voirie dans le gouvernement Duplessis[259].

Maurice Duplessis eut divers problèmes de santé au cours de sa vie, notamment le diabète. Bien qu'il ne fut pas le seul homme public de son temps à en souffrir, il eut aussi des problèmes d'alcoolisme pendant une bonne partie de sa vie. C'est en 1943 qu'il cessa définitivement de boire de l'alcool. En ce qui a trait à ses loisirs, Duplessis aimait particulièrement les sports. Il assistait régulièrement aux parties des Canadiens et écoutait à la radio les parties de baseball des Yankees de New York durant les séries mondiales. Peu actif physiquement, il aimait toutefois jouer au croquet et entraînait même une équipe de baseball à Trois-Rivières. Selon Conrad Black, Duplessis était atteint d'hypospadias[260].

Malgré l'image populiste qu'il arborait en public et certaines rumeurs qui ont longtemps persisté, même après sa mort, Duplessis était aussi un amateur d'opéra et de lecture. S'il aimait en particulier les ouvrages sur l'histoire et la politique, il lisait aussi les grands auteurs classiques de la littérature française et anglaise dont Rudyard Kipling, Tennyson et Shakespeare[261]. Enfin, plus tard dans sa vie, il développa un goût pour la peinture et deviendra un collectionneur de tableaux. À son décès, sa sœur Jeanne-L. Balcer-Duplessis hérite de la collection du premier ministre. Elle cède au gouvernement provincial plusieurs œuvres d'art contre la remise des droits de succession et aussi pour rendre hommage à son frère. C'est le musée du Québec qui hérite d'une grande partie de sa collection de peintures. On y retrouve des œuvres de Clarence Gagnon, Cornelius Krieghoff, Joseph Mallord William Turner, Auguste Renoir, Charles Jacque, Cornelis Springer, Johan Barthold Jongkind, etc[262].

Hommages et distinctions

Photographie couleur d'une statue apposée sur une base en pierre blanche.
Le Monument de Maurice L. Duplessis Ă  Trois-Rivières, dans les jardins du manoir Boucher-De Niverville, inaugurĂ© en 1964. Ă€ la base du monument est inscrit « CoopĂ©ration toujours - Assimilation jamais Â»[263].
Photographie couleur d'une maison en hiver.
La maison Maurice-Duplessis, à Trois-Rivières. Elle est incluse depuis 1973 dans l'aire de protection du manoir Boucher-De Niverville[264].
Photographie couleur d'une autoroute avec quelques voitures.
Autoroute Duplessis à Québec, inaugurée en 1958, nommée en 1961[265].
Vue aérienne de la ville québécoise de Sept-Îles
Sept-Îles, ville où se trouve le bureau de circonscription du député de Duplessis.
Pierre avec une inscription Ă©crite dessus.
Pierre placée lors de l'inauguration de l’Hôpital Reine Elizabeth par Maurice Duplessis, [267].

Maurice Duplessis a été honoré à maintes reprises et son nom, bien que polémique, a aussi été retenu pour décorer le paysage toponymique du Québec[268]. Plusieurs fonds d'archives portant sur Maurice Duplessis sont disséminés un peu partout sur le territoire québécois, notamment à la Bibliothèque et Archives nationales du Québec[269].

Ordres

Titre honorifique

Titres de civilité

Doctorats honorifiques

Monuments

Toponymie

Dans la culture populaire

Série de télévision

Théâtre

Musique

Maurice Duplessis est mentionné dans les chansons suivantes, avec l'album entre parenthèses ainsi que l'année de publication, suivi de l'artiste ou du groupe de musique :

Liste des discours du trĂ´ne de Maurice Duplessis

photographie d'un long bâtiment au bord d'un fleuve.
Le discours du trône est une pratique héritée de la tradition du parlementarisme britannique[304]. Ci-haut, le Palais de Westminster, à Londres, à l'intérieur duquel se trouve le Parlement du Royaume-Uni[305].

Maurice Duplessis a prononcé un total de dix-huit discours du trône à l'Assemblée Législative du Québec[306]. Dans le discours du , Maurice Duplessis affirme qu'il considère Honoré Mercier comme son grand-père spirituel (il s'inspire de son autonomisme) et Lomer Gouin comme son oncle spirituel, l'Union nationale étant née d'une fusion entre le Parti conservateur du Québec et l'Action libérale nationale dirigée par Paul Gouin (fils de Lomer)[307].

Généalogie

RĂ©sultats Ă©lectoraux

RĂ©sultats Ă©lectoraux de Maurice Duplessis

Élection générale québécoise de 1923 dans Trois-Rivières [317] ↑
Nom Parti Nombre
de voix
% Maj.
Louis-Philippe Mercier LibĂ©ral 1 612 54,8 % 284
Maurice Duplessis Conservateur 1 328 45,2 % -
Total 2 940 100 %
Élection générale québécoise de 1927 dans Trois-Rivières [318] ↑
Nom Parti Nombre
de voix
% Maj.
Maurice Duplessis Conservateur 2 622 51,2 % 126
Louis-Philippe Mercier LibĂ©ral 2 496 48,8 % -
Total 5 118 100 %
Élection générale québécoise de 1931 dans Trois-Rivières [319] ↑
Nom Parti Nombre
de voix
% Maj.
Maurice Duplessis Conservateur 3 812 50,3 % 41
Philippe BiguĂ© LibĂ©ral 3 771 49,7 % -
Total 7 583 100 %
Élection générale québécoise de 1935 dans Trois-Rivières [320] ↑
Nom Parti Nombre
de voix
% Maj.
Maurice Duplessis Conservateur 4 873 57 % 1 202
LĂ©on Lajoie LibĂ©ral 3 671 43 % -
Total 8 544 100 %
Élection générale québécoise de 1936 dans Trois-Rivières [321] ↑
Nom Parti Nombre
de voix
% Maj.
Maurice Duplessis Union nationale 5 628 69,3 % 3 136
Philippe BiguĂ© LibĂ©ral 2 492 30,7 % -
Total 8 120 100 %
Élection générale québécoise de 1939 dans Trois-Rivières [322] ↑
Nom Parti Nombre
de voix
% Maj.
Maurice Duplessis Union nationale 5 278 59,7 % 1 713
Atchez Pitt LibĂ©ral 3 565 40,3 % -
Total 8 843 100 %
Élection générale québécoise de 1944 dans Trois-Rivières [323] ↑
Nom Parti Nombre
de voix
% Maj.
Maurice Duplessis Union nationale 12 576 66,7 % 7 258
LĂ©opold Pinsonnault LibĂ©ral 5 318 28,2 % -
Lucien Richard Bloc populaire 950 5 % -
Total 18 844 100 %
Élection générale québécoise de 1948 dans Trois-Rivières [324] ↑
Nom Parti Nombre
de voix
% Maj.
Maurice Duplessis Union nationale 16 097 76,9 % 12 261
Alexandre-Marcel Lajoie LibĂ©ral 3 836 18,3 % -
Paul-Henri Poliquin Union des Ă©lecteurs 997 4,8 % -
Total 20 930 100 %
Élection générale québécoise de 1952 dans Trois-Rivières [325] ↑
Nom Parti Nombre
de voix
% Maj.
Maurice Duplessis Union nationale 15 493 60,6 % 5 435
Joseph-Alfred Mongrain LibĂ©ral 10 058 39,4 % -
Total 25 551 100 %
Élection générale québécoise de 1956 dans Trois-Rivières [326] ↑
Nom Parti Nombre
de voix
% Maj.
Maurice Duplessis Union nationale 16 263 61,7 % 6 327
Lorne Berlinguet LibĂ©ral 9 936 37,7 % -
Henri-Georges Grenier Capital familial 93 0,4 % -
Wilfrid-Édouard Terreault Ouvrier progressiste 52 0,2 % -
Total 26 344 100 %

Résultats électoraux du Parti conservateur du Québec sous Duplessis

élections précédentes • Résultats des élections générales de 1935 [327] • élections suivantes
Partis Chef Candidats Sièges Voix
1931 Élus Nb % +/-
LibĂ©ral Louis-Alexandre Taschereau 90 79 47 251 127 46,8 % -8,06 %
ALN Paul Gouin 52
-
26 161 239 30,1 % +30,06 %[328]
Conservateur Maurice Duplessis 34 11 16 98 435 18,4 % -25,19 %
LibĂ©ral indĂ©pendant 19 0 1 21 578 4 % +3,80 %
Ouvrier 2
-
-
2 238 0,4 % -0,02 %
Libéral ouvrier 1
-
-
998 0,2 % -
Conservateur indépendant 1
-
-
37 0 % -0,25 %
Indépendant 4
-
-
709 0,1 % -0,53 %
Total 203 90 90 536 361 100 %
Le taux de participation lors de l'Ă©lection Ă©tait de 76,2 % et 15 232 bulletins ont Ă©tĂ© rejetĂ©s.
Il y avait 739 300 personnes inscrites sur la liste Ă©lectorale pour l'Ă©lection,
toutefois seules 724 260 personnes avaient plus d'un candidat dans leur district.

RĂ©sultats Ă©lectoraux de l'Union nationale sous Duplessis

élections précédentes • Résultats des élections générales de 1936 • élections suivantes
Partis Chef Candidats Sièges Voix
1935 Élus Nb % +/-
Union nationale[329] Maurice Duplessis 90 42 76 323 812 56,9 % +8,47 %
LibĂ©ral AdĂ©lard Godbout 89 48 14 227 860 40 % -6,80 %
Libéral indépendant 11
-
-
9 746 1,7 % -2,31 %
Union nationale indépendant 4
-
-
2 522 0,4 % -
Communiste 4
-
-
1 849 0,3 % -
Commonwealth coopératif 1
-
-
1 469 0,3 % -
Conservateur opposition 2
-
-
1 066 0,2 % -
Candidat du peuple 1
-
-
470 0,1 % -
Ouvrier 1
-
-
79 0 % -0,41 %
Indépendant 2
-
-
452 0,1 % -0,05 %
Total 205 90 90 569 325 100 %
Le taux de participation lors de l'Ă©lection Ă©tait de 78,2 % et 4 930 bulletins ont Ă©tĂ© rejetĂ©s.
Il y avait 734 025 personnes inscrites sur la liste Ă©lectorale pour l'Ă©lection.
élections précédentes • Résultats des élections générales de 1939 • élections suivantes
Partis Chef Candidats Sièges Voix
1936 Élus Nb % +/-
LibĂ©ral AdĂ©lard Godbout 85 14 69 301 382 53,5 % +14,07 %
Union nationale Maurice Duplessis 85 76 15 220 402 39,1 % -17,75 %
Libéral indépendant[330] 4
-
1 3 862 0,7 % -
ALN 56
-
-
25 295 4,5 % +0,19 %
Commonwealth coopératif 1
-
-
2 513 0,4 % -
Conservateur 3
-
-
1 679 0,3 % -
ALN indépendant 1
-
-
617 0,1 % -
Union nationale indépendant 3
-
-
469 0,1 % -0,36 %
Ouvrier 3
-
-
410 0,1 % -0,06 %
ALN ouvrier 1
-
-
228 0 % -
Communiste 1
-
-
159 0 % -0,29 %
Indépendant 5
-
1 6 281 1,1 % +1,04 %
Total 248 90 86 563 297 100 %
Le taux de participation lors de l'Ă©lection Ă©tait de 77 % et 7 334 bulletins ont Ă©tĂ© rejetĂ©s.
Il y avait 753 310 personnes inscrites sur la liste Ă©lectorale pour l'Ă©lection,
toutefois seules 741 131 personnes avaient plus d'un candidat dans leur district.
élections précédentes • Résultats des élections générales de 1944 • élections suivantes
Partis Chef Candidats Sièges Voix
1939 Élus Nb % +/-
Union nationale Maurice Duplessis 91 15 48 505 661 38 % %
LibĂ©ral AdĂ©lard Godbout 90 70 37 523 316 39,3 % %
Bloc populaire André Laurendeau 80
-
4 191 564 14,4 % %
Commonwealth coopératif Romuald-Joseph Lamoureux 24
-
1 33 986 2,6 % %
Union des Ă©lecteurs 12
-
-
16 542 1,2 % -
Libéral indépendant 7
-
-
8 656 0,7 % -
Ouvrier indépendant 2
-
-
8 355 0,6 % -
Ouvrier progressiste 3
-
-
7 873 0,6 % -
Union nationale indépendant 3
-
-
6 775 0,5 % -
FCC indépendant 1
-
-
3 015 0,2 % -
Candidat du peuple 1
-
-
2 583 0,2 % -
Nationaliste indépendant[331] 1
-
-
2 124 0,2 % -
Bloc populaire indépendant 1
-
-
156 0 % -
IndĂ©pendant[332] 17 1 1 19 353 1,5 % -
Total 333 86 91 1 329 959 100 %
Le taux de participation lors de l'Ă©lection Ă©tait de 72,1 % et 15 591 bulletins ont Ă©tĂ© rejetĂ©s.
Il y avait 1 865 396 personnes inscrites sur la liste Ă©lectorale pour l'Ă©lection.
élections précédentes • Résultats des élections générales de 1948 [333] • élections suivantes
Partis Chef Candidats Sièges Voix
1944 Élus Nb % +/-
Union nationale Maurice Duplessis 91 48 82 775 747 51,2 % -
LibĂ©ral AdĂ©lard Godbout 92 37 8 547 478 36,2 % -
Union des Ă©lecteurs RĂ©al Caouette 92
-
-
140 050 9,3 % -
Commonwealth coopératif 7
-
-
9 016 0,6 % -
Union nationale indépendant 8
-
-
8 649 0,6 % -
Ouvrier progressiste 1
-
-
4 899 0,3 % -
Libéral indépendant 7
-
-
2 968 0,2 % -
Ouvrier 1
-
-
1 098 0,1 % -
FCC indépendant 1
-
-
110 0 % -
IndĂ©pendant 4 0 2 23 956 1,6 % -
Total 304 85 92 1 513 971 100 %
Le taux de participation lors de l'Ă©lection Ă©tait de 75,2 % et 17 928 bulletins ont Ă©tĂ© rejetĂ©s.
Il y avait 2 036 576 personnes inscrites sur la liste Ă©lectorale pour l'Ă©lection.
élections précédentes • Résultats des élections générales de 1952 [334] • élections suivantes
Partis Chef Candidats Sièges Voix
1948 Élus Nb % +/-
Union nationale Maurice Duplessis 91 82 68 847 983 50,5 % -
LibĂ©ral Georges-Émile Lapalme 92 8 23 768 539 45,8 % -
Social démocratique Thérèse Casgrain 23
-
-
16 039 1 % -
Union nationale indépendant 10
-
-
13 197 0,8 % -
Parti national 1
-
-
9 734 0,6 % -
Libéral indépendant 8
-
-
4 966 0,3 % -
Ouvrier progressiste 4
-
-
3 932 0,2 % -
Ouvrier 3
-
-
1 027 0,1 % -
IndĂ©pendant 4 2 1 13 846 0,8 % -
Total 236 92 92 1 679 263 100 %
Le taux de participation lors de l'Ă©lection Ă©tait de 75,9 % et 25 648 bulletins ont Ă©tĂ© rejetĂ©s.
Il y avait 2 246 998 personnes inscrites sur la liste Ă©lectorale pour l'Ă©lection.
élections précédentes • Résultats des élections générales de 1956 [335] • élections suivantes
Partis Chef Candidats Sièges Voix
1952 Élus Nb % +/-
Union nationale Maurice Duplessis 93 68 72 956 082 51,8 % -
LibĂ©ral Georges-Émile Lapalme 92 23 20 828 264 44,9 % -
Social démocratique Thérèse Casgrain 26
-
-
11 232 0,6 % -
Ouvrier progressiste 32
-
-
6 517 0,4 % -
Libéral indépendant 7
-
-
4 438 0,2 % -
Union nationale indépendant 10
-
-
4 108 0,2 % -
Ouvrier 3
-
-
1 274 0,1 % -
Union nationale ouvrier 1
-
-
516 0 % -
Capital familial 1
-
-
93 0 % -
IndĂ©pendant 7 1 1 33 205 1,8 % -
Total 272 92 93 1 845 729 100 %
Le taux de participation lors de l'Ă©lection Ă©tait de 78,3 % et 28 781 bulletins ont Ă©tĂ© rejetĂ©s.
Il y avait 2 393 360 personnes inscrites sur la liste Ă©lectorale pour l'Ă©lection.

Notes et références

Notes

  1. La graphie Cheuf avec un « u » est souvent utilisée pour marquer sa prononciation singulière en français québécois.
  2. Son nom complet est Marie Catherine Camille Berthe Genest.
  3. Son nom complet est Marie Esther Charlotte Emma MacCallum.
  4. Dans les années 1950, alors qu'il est premier ministre, Maurice Duplessis est à l'avant-plan du mouvement visant à canoniser le Frère André.
  5. Il connaît notamment par cœur la liste des comtés du Québec ainsi que leur allégeance politique.
  6. Félix-Gabriel Marchand est le premier premier ministre du Québec à mourir en fonction, le .
  7. Lomer Gouin et Louis-Alexandre Taschereau ont tous les deux été au pouvoir pendant quatre mandats consécutifs, tandis que Jean Charest l'a été pendant trois mandats.
  8. De 1905 à 1959, soit pendant près de 55 ans, seulement quatre hommes ont occupé la fonction de premier ministre du Québec (Gouin, Taschereau, Godbout, Duplessis).

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  329. Les comparaisons dans les résultats de l'Union nationale sont faites par rapport aux résultats de l'Action libérale nationale et le Parti conservateur du Québec lors des dernières élections.
  330. Certaines sources indiquent toutefois que René Chaloult dans Lotbinière a été élu sous la bannière du Parti libéral.
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Annexes

Bibliographie

Photographie noir et blanc d'une lettre adressée au roi d'Angleterre signée par le premier ministre du Québec.
Lettre élogieuse de Maurice Duplessis adressée au roi George VI, 1939.

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