Gouvernement Maurice Duplessis (2)
Le mandat du deuxième gouvernement de Maurice Duplessis, redevenu premier ministre du Québec à la suite de la victoire de l'Union nationale aux élections générales du 8 août 1944, s'étendit du au , date de sa mort. Il avait auparavant obtenu un premier mandat, de 1936 à 1939.
Gouvernement Godbout (2e) | Gouvernement Duplessis (2e) | Gouv. Sauvé | |||||||||||||||||||||||||||||||
21e législature | 22e législature | 23e législature | 24e législature | 25e législature | |||||||||||||||||||||||||||||
1943 | 1944 | 1945 | 1946 | 1947 | 1948 | 1949 | 1950 | 1951 | 1952 | 1953 | 1954 | 1955 | 1956 | 1957 | 1958 | 1959 |
Caractéristiques
La période duplessiste, que certains ont surnommée la grande noirceur, est caractérisée par une forte croissance économique mais aussi par le profond conservatisme affiché par le gouvernement. Comme avant lui les gouvernements Taschereau et Gouin, il s'appuie sur l'entreprise privée et le grand capital américain pour développer le Québec en misant surtout sur l'exploitation des ressources naturelles. Il met de côté les orientations nouvelles de l'État-providence préconisées en Europe et défend plutôt les valeurs et les pratiques conformes à la tradition. Il n'hésite pas à légiférer contre les groupes qu'il considère comme subversifs : les syndicats, les Témoins de Jéhovah, les journalistes et les réformistes qu'il assimile facilement aux communistes.
En 1944, l'Union nationale a fait campagne sur le thème de l'autonomie provinciale grâce auquel il a pu obtenir le vote de plusieurs nationalistes déçus du gouvernement Godbout. Son nationalisme traditionaliste met l'accent sur la défense de la langue, de la foi catholique et des valeurs conservatrices. Ses luttes contre le gouvernement fédéral visent plus à défendre les compétences et les pouvoirs conférés aux provinces par l'Acte sur l'Amérique du Nord Britannique (AANB) et menacés par le fédéral que d'obtenir de nouveaux pouvoirs conformes aux besoins d'un Québec moderne.
À partir de 1956, les opposants au régime dénoncent de plus en plus la partisanerie, le patronage et le népotisme du gouvernement. En 1958, le Devoir rend public le scandale du gaz naturel dans lequel sont impliqués plusieurs ministres ayant réalisé un coup boursier illégal de 20 millions de dollars, lors de la privatisation du réseau public de gaz naturel. Le régime paraît alors sérieusement ébranlé, mais Duplessis meurt avant que des élections générales n'aient pu le démontrer.
Chronologie
- 1944
- : assermentation du cabinet Duplessis devant le lieutenant-gouverneur Eugène Fiset.
- : Mackenzie King dépose sa loi sur la conscription. Le gouvernement Duplessis proteste mais déclare que le Québec la respectera.
- 1945
- : première session de la 22e législature. L'Office de l'électrification rurale est créé.
- : un Office de la Radio de Québec est chargé d'établir une radio d'État qui devrait prendre le nom de Radio-Québec. Ce projet ne verra finalement jamais le jour.
- : une loi sur les mines crée des baux de 20 ans afin de favoriser l'exploitation minière dans le Nouveau-Québec.
- : John Bourque devient le ministre du nouveau ministère des Ressources hydrauliques.
- : lors d'une conférence fédérale-provinciale, Ottawa annonce son intention de garder le contrôle exclusif des impôts sur le revenu, les corporations et les successions que lui avaient abandonné les provinces durant la guerre.
- 1946
- : deuxième session de la 22e législature. Création du ministère du Bien-être social et de la Jeunesse; Paul Sauvé en est le titulaire.
- : la compagnie minière Hollinger loue pour 97 ans un territoire de 6 240 km2 dans le Nouveau-Québec.
- : l'unioniste Daniel Johnson remporte l'Ă©lection partielle de Bagot.
- 1947
- : le gouvernement amorce une lutte contre les Témoins de Jéhovah en déposant une loi permettant aux municipalités de réglementer la distribution des tracts. Duplessis les accuse de distribuer une propagande malsaine et séditieuse.
- : adoption de la loi créant une école vétérinaire à Saint-Hyacinthe.
- 1948
- : le Fleurdelisé devient le drapeau officiel du Québec.
- : Duplessis met sous la garde de son gouvernement les trésors polonais confiés aux Hospitalières de Québec en 1939, à la veille de l'invasion allemande, et qu'il refuse de redonner à la Pologne sous prétexte qu'elle est devenue communiste.
- : l'Union nationale écrase le Parti libéral lors des élections générales. Sur un total de 90 sièges en élections, 82 candidats unionistes sont élus contre 8 libéraux. Le chef libéral Adélard Godbout est défait dans son propre comté.
- : plusieurs artistes signent le Refus global, manifeste réclamant plus de liberté aux arts et à la culture.
- : Louis St-Laurent succède à Mackenzie King comme premier ministre du Canada.
- 1949
- 1949 : grève de l'amiante à Asbestos. Les ouvriers demandent une hausse substantielle de leurs salaires et de meilleures conditions de travail. Le gouvernement Duplessis envoie plusieurs policiers de la Sûreté du Québec à Asbestos. Plusieurs échauffourées ont lieu. Une émeute éclate lorsque les grévistes tentent d'empêcher les briseurs de grève d'entrer dans l'usine. Les policiers lancent des bombes lacrymogènes. L'acte d'émeute est lu. Il y a 125 arrestations.
- : la Commission Massey, mise en place par Ottawa, commence ses audiences. Son but est d'enquêter sur l'avancement des arts, des lettres et des sciences au Canada. Québec met en doute sa constitutionnalité, la culture étant de compétence provinciale.
- 1950
- : Georges-Émile Lapalme succède à Adélard Godbout comme chef du Parti libéral du Québec.
- 25- : la conférence fédérale-provinciale à Québec discute d'un éventuel rapatriement de la Constitution de Londres.
- 1951
- : le pont Duplessis de Trois-Rivières s'écroule, faisant 4 morts. Duplessis parle de sabotage de la part des communistes.
- : entente fédérale-provinciale sur les pensions de vieillesse qui seront octroyées par Ottawa.
- : le rapport de la Commission Massey recommande la création d'un Conseil canadien des arts et des lettres, une aide fédérale aux universités et un système étendu de bourses d'études et de recherches.
- Été 1951 : Lapalme accuse Duplessis de vendre le fer un sou la tonne aux compagnies américaines.
- : le trésorier provincial prend le nom de ministre des Finances.
- La MTC (tramway de Montréal) est « nationalisée » (au municipal selon une loi provinciale), et s'appelle alors CTM, aujourd'hui STM (Société de transport de Montréal). Au même moment commence la transition des tramways vers les autobus (qui s'est terminée en 1959).
- 1952
- 1952 : grève du textile à Louiseville. Les 800 ouvriers de l'Associated Textile, qui travaillent à 67 cents l'heure, demandent une augmentation de 20 cents alors que l'employeur offre 8,5 cents. En décembre, après dix mois de grève, les grévistes dynamitent un autobus. Après lecture de l'acte d'émeute, la police disperse une foule de 300 personnes et expulse les grévistes du local du syndicat où ils s'étaient rassemblés. Il y a six blessés dont un dans un état grave, atteint d'une balle à la tête.
- : élection générale : l'Union nationale obtient 68 sièges et les libéraux 23.
- : le gouvernement de la province crée un comité d'enquête pour la protection des agriculteurs et des consommateurs (Commission Héon).
- 1953
- : fin de la grève de Louiseville, les ouvriers ayant finalement obtenu une augmentation de 12 cents l'heure.
- 1954
- : adoption de lois anti-ouvrières. La loi 19 refuse la certification aux syndicats qui acceptent des communistes dans leurs rangs ; la loi 20 l'enlève à ceux qui favorisent le recours à la grève.
- : Onésime Gagnon dépose un projet de loi créant un impôt provincial sur le revenu.
- : adoption d'une loi restreignant le droit de culte aux TĂ©moins de JĂ©hovah.
- : la loi 52 crée l'université de Sherbrooke.
- : loi qui autorise les orphelinats à se convertir en asiles psychiatriques. Beaucoup d'orphelins et de faux-orphelins (enfants illégitimes de parents encore vivants) seront alors déclarés fous pour de fausses raisons, confondant manques de connaissances avec retard mental puis retard mental avec trouble psychiatrique, cela afin d'obtenir de plus grandes subventions, alors que les orphelinats manquent d'argent. Plus tard, les victimes de cette fraude seront appelés Orphelins de Duplessis[1].
- 1955
- : la conférence fédérale-provinciale porte sur une éventuelle création d'un programme d'assurance-santé refusé par Duplessis.
- 1956
- : le rapport de la Commission Tremblay sur les problèmes constitutionnels énonce que le fédéral devrait se limiter aux taxes indirectes alors que les taxes directes seraient prélevées par les provinces ; celles-ci devraient également assumer la responsabilité des mesures de sécurité sociale.
- : Duplessis remporte sa dernière élection générale avec 72 candidats unionistes élus contre 19 libéraux et un indépendant.
- : les abbés Gérard Dion et Louis O'Neill lancent un manifeste dénonçant la corruption généralisée et institutionnalisée dans la politique provinciale.
- : loi sur la mise en marché des produits agricoles, alimentaires et de la pêche. Cette loi établit les règles permettant d’organiser de façon ordonnée la production et la mise en marché des produits agricoles et alimentaires afin d'établir un équilibre dans les rapports commerciaux entre les producteurs et les acheteurs.
- 1957
- : la loi du cadenas est déclarée illégale par la Cour Suprême.
- : Duplessis annonce la constitution de l’Office de l’autoroute Montréal-Laurentides, un projet de 40 000 000 $. L'Autoroute des Laurentides mise en service en 1958, fut la première autoroute québécoise.
- : le conservateur John Diefenbaker remporte les élections fédérales.
- 1957 : Grève des mineurs de Murdochville qui demandent la légalisation de leur syndicat. De nouveau, Duplessis envoie la police provinciale rétablir l'ordre. Après 5 mois de grève, les grévistes doivent retourner au travail sans avoir obtenu satisfaction.
- 1958
- : Jean Lesage succède à Georges-Émile Lapalme comme chef du Parti libéral du Québec.
- : le scandale du gaz naturel est mis au jour par le Devoir. Des fonctionnaires de l'Hydro-Québec auraient reçu des faveurs pour faciliter la vente du réseau de gaz à une compagnie privée dont certains actionnaires seraient des ministres du gouvernement. Parmi les ministres impliqués, se trouvent John Bourque, Antonio Barrette, Paul Dozois et Daniel Johnson.
- 1959
- : Maurice Duplessis est terrassé par une hémorragie cérébrale lors d'une visite aux chantiers de Schefferville. Il meurt le 7 septembre. Paul Sauvé est désigné pour lui succéder.
Composition
1944 Ă 1950
- Formation le
- Maurice Duplessis : premier ministre, procureur général
- Onésime Gagnon : trésorier provincial
- Omer Côté : secrétaire provincial
- Laurent Barré : ministre de l'Agriculture
- Joseph-Damase BĂ©gin : ministre de la Colonisation
- Camille Pouliot : ministre de la Chasse et des PĂŞcheries
- Jonathan Robinson : ministre des Mines
- Roméo Lorrain : ministre des Travaux publics
- Antonio Barrette : ministre du Travail
- John Samuel Bourque : ministre des Terres et ForĂŞts
- Antonio Talbot : ministre de la Voirie
- Bona Dussault : ministre des Affaires municipales
- Paul Beaulieu : ministre de l'Industrie et du Commerce
- Albiny Paquette : ministre de la Santé
- Thomas Chapais : ministre sans portefeuille
- Antonio Élie : ministre sans portefeuille
- Tancrède Labbé : ministre sans portefeuille
- Marc Trudel : ministre sans portefeuille
- Patrice Tardif : ministre sans portefeuille
- Joseph-Théophile Larochelle : ministre sans portefeuille
- Joseph-Hormisdas Delisle : ministre sans portefeuille
- Remaniement en 1945
- John Samuel Bourque : ministre des Terres et ForĂŞts, ministre des Ressources hydrauliques.
- Remaniement en 1946
- Paul Sauvé : ministre de la Jeunesse et du Bien-Être social.
- Remaniement en 1948
- Charles Daniel French : ministre des Mines.
- Remaniement le
- Antoine Rivard : solliciteur général
1950 Ă 1958
- Maurice Duplessis : premier ministre, procureur général.
- Onésime Gagnon : trésorier provincial.
- Omer Côté : secrétaire provincial.
- Antoine Rivard : solliciteur général.
- Laurent Barré : ministre de l'Agriculture.
- Joseph-Damase BĂ©gin : ministre de la Colonisation.
- Camille Pouliot : ministre de la Chasse et des PĂŞcheries.
- Charles Daniel French : ministre des Mines.
- John Samuel Bourque : ministre des Terres et ForĂŞts, ministre des Ressources hydrauliques.
- Antonio Talbot : ministre de la Voirie.
- Roméo Lorrain : ministre des Travaux publics.
- Antonio Barrette : ministre du Travail.
- Bona Dussault : ministre des Affaires municipales.
- Paul Beaulieu : ministre de l'Industrie et du Commerce.
- Albiny Paquette : ministre de la Santé.
- Paul Sauvé : ministre de la Jeunesse et du Bien-Être social.
En 1951, Onésime Gagnon prend le titre de ministre des Finances.
En 1952, Jacques Miquelon est nommé ministre d'État.
- Remaniement en 1953
- Yves Prévost : ministre des Affaires municipales.
- Antoine Rivard : solliciteur général, ministre des Transports et des Communications.
- William Cottingham : ministre des Mines.
- Remaniement en 1956
- Yves Prévost : secrétaire provincial.
- Paul Dozois : ministre des Affaires municipales.
1958 Ă 1959
- Maurice Duplessis : premier ministre, procureur général.
- John Bourque : ministre des Finances.
- Yves Prévost : secrétaire provincial.
- Antoine Rivard : solliciteur général, ministre des Transports et des Communications.
- Laurent Barré : ministre de l'Agriculture.
- Joseph-Damase BĂ©gin : ministre de la Colonisation.
- Camille Pouliot : ministre de la Chasse et des PĂŞcheries.
- William Cottingham : ministre des Mines.
- Jean-Jacques Bertrand : ministre des Terres et ForĂŞts.
- Daniel Johnson : ministre des Ressources hydrauliques.
- Antonio Talbot : ministre de la Voirie.
- Roméo Lorrain : ministre des Travaux publics.
- Antonio Barrette : ministre du Travail.
- Paul Dozois : ministre des Affaires municipales.
- Paul Beaulieu : ministre de l'Industrie et du Commerce.
- Arthur Leclerc : ministre de la Santé.
- Paul Sauvé : ministre de la Jeunesse et du Bien-Être social.
Notes et références
- Voir la série télévisée du même nom, ainsi que la série Enquête, épisode S09E08 à 13 min.
- Une photographie des membres du gouvernement le 24 novembre 1954 peut être consultée à Bibliothèque et Archives nationales du Québec et peut être reproduite à des fins non commerciales.
Annexes
Articles connexes
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Sources bibliographiques
- Jacques Lacoursière, Histoire populaire du Québec. Tome IV, Septentrion, .
- Paul-André Linteau, René Durocher, Jean-Claude Robert et François Ricard, Histoire du Québec contemporain. Tome II, Boréal Express, .
- Conrad Black, Duplessis. Tome II, Éditions de l'Homme, .
- « Informations historiques », sur www.assnat.qc.ca, Assemblée nationale du Québec, (consulté le )