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Droit de vote des femmes au Québec

Au Bas-Canada, entre 1791 et 1849, les femmes, comme les hommes, propriétaires terriens, pouvaient voter. Au Québec, le droit de vote des femmes a été accordé par le gouvernement d'Adélard Godbout le 18 avril 1940. Bien que les Québécoises possédaient déjà le droit de vote au niveau fédéral depuis 1918, c'est à partir de cette date qu'elles pouvaient désormais s'exprimer lors des élections québécoises[Note 1].

Idola Saint-Jean en photo avec des suffragettes au Québec en 1922.

L'obtention de ce droit pour les femmes du Québec fut le résultat d'un combat de longue haleine mené par différentes générations de féministes depuis la fin du XIXe siÚcle[1].

Historique

Le droit de vote des femmes au Bas-Canada (1791-1849)

Débats sur les langues lors de la premiÚre Assemblée législative du Bas-Canada le 21 janvier 1793 (par Charles Huot).

En 1791, le territoire de la province de QuĂ©bec est sĂ©parĂ© en deux colonies : le Haut-Canada et le Bas-Canada. Dans ce contexte de rĂ©forme des institutions politiques, un nouveau rĂ©gime parlementaire est mis en place. Le Bas-Canada est ainsi dotĂ© de son propre parlement, formĂ© de reprĂ©sentants Ă©lus. Toutefois, l’Acte constitutionnel ne prĂ©cise pas que le droit de vote doit ĂȘtre rĂ©servĂ© uniquement aux hommes. Les femmes obtiennent donc, par le fait mĂȘme, le droit d’élire des dĂ©putĂ©s.

À partir de 1827, le suffrage fĂ©minin commence Ă  semer la controverse au Bas-Canada. Graduellement, un mouvement d’opposition s’installe. En 1849, le droit de vote est dĂ©finitivement retirĂ© aux femmes, Ă  la suite d’un projet de refonte de la loi Ă©lectorale par le Parti rĂ©formiste[2].

Le suffrage féminin au Bas-Canada

Suivant la crĂ©ation de l’AssemblĂ©e du Bas-Canada, certains habitants obtiennent le droit de vote afin d’élire des dĂ©putĂ©s. Pour avoir ce droit, une personne doit remplir trois conditions :

  1. Être un adulte ĂągĂ© de plus de 21 ans
  2. Être un sujet britannique
  3. Être propriĂ©taire d’une maison ou d’une terre, ou ĂȘtre locataire et avoir payĂ© un minimum de 10 livres sterling de loyer sur un an

Puisqu'il n’est pas nĂ©cessaire d’ĂȘtre un sujet masculin afin d’avoir le droit de vote, les femmes qui rĂ©pondent aux trois conditions prĂ©alables peuvent ainsi voter et Ă©lire des dĂ©putĂ©s de la mĂȘme maniĂšre que leurs concitoyens masculins[3].

Selon l’historienne Denyse Baillargeon, la majoritĂ© des femmes qui rĂ©pondent Ă  ces critĂšres s’inscrivent dans l’un des profils suivants :

  1. Les femmes célibataires de plus de 21 ans
  2. Les veuves
  3. Les femmes mariées vivant en séparation de biens, ou vivant séparées de leurs maris[4].

À la diffĂ©rence des femmes du Haut-Canada qui possĂšdent le mĂȘme droit de suffrage, les femmes du Bas-Canada sont plus nombreuses Ă  exercer leur droit de vote. Cette tendance s’explique par le fait que la coutume de Paris (le Code civil appliquĂ© au Bas-Canada) est plus gĂ©nĂ©reuse Ă  l’égard des droits de propriĂ©tĂ© des femmes que la common law (le Code civil appliquĂ© dans le Haut-Canada)[5].

Selon les donnĂ©es de l’historienne Nathalie Picard, 857 femmes exercent leur droit de vote entre 1791 et 1849. Parmi celles-ci, 74 % sont veuves ou cĂ©libataires. Environ 60 % d’entre elles sont francophones et votent majoritairement pour le Parti canadien, puis pour le Parti patriote[6]. L’enquĂȘte de Picard rĂ©vĂšle aussi que 32 femmes autochtones, majoritairement des femmes veuves mohawks vivant Ă  Sault Saint-Louis (Kahnawake), ont votĂ© Ă  l’élection de 1824, et que ces derniĂšres avaient Ă©galement une prĂ©fĂ©rence pour le Parti canadien[7].

L’opposition au suffrage fĂ©minin et l’abolition du droit de vote des femmes

À partir de 1827, le suffrage fĂ©minin commence Ă  susciter la controverse au Bas-Canada[8]. Lors des Ă©lections qui ont lieu cette annĂ©e-lĂ , presque aucune femme ne se prĂ©sente au bureau de vote du comtĂ© de MontrĂ©al-Est, et les deux seules qui s’y prĂ©sentent font face Ă  un fort mouvement d’opposition des candidats. En 1828, des Ă©lecteurs de la Haute-Ville de QuĂ©bec lancent une pĂ©tition adressĂ©e Ă  la Chambre d’assemblĂ©e, dans laquelle ils dĂ©noncent le fait que le vote d’une veuve ait Ă©tĂ© rejetĂ© parce qu’elle est une femme. La mĂȘme annĂ©e, une autre pĂ©tition est lancĂ©e afin de contester le rĂ©sultat de l’élection dans la circonscription de William-Henry (Sorel)[9]. Les pĂ©titionnaires y soutiennent que des veuves, femmes mariĂ©es et filles auraient votĂ© illĂ©galement pour Wolfred Nelson, et que le vote de ces derniĂšres aurait Ă©tĂ© instrumentalisĂ© par le parti politique.

En 1832, l’élection partielle de MontrĂ©al-Ouest se dĂ©roule dans un climat particuliĂšrement agitĂ©. Selon l’historienne Bettina Bradbury, il existe un lien de causalitĂ© entre le dĂ©roulement de cette Ă©lection et la mise en place d’une premiĂšre loi retirant le droit de vote aux femmes deux ans plus tard.

Dans un article publiĂ© dans les pages du Quebec Mercury en aoĂ»t 1827, un journaliste exprime que les femmes ne devraient pas possĂ©der le droit de vote. Plusieurs arguments soutiennent son propos, dont l’idĂ©e que cette responsabilitĂ© qui s’accompagne forcĂ©ment d’une prĂ©occupation pour les affaires publiques induit forcĂ©ment les femmes Ă  dĂ©laisser une partie de leurs responsabilitĂ©s domestiques. De plus, ce mĂȘme journaliste soutient que le suffrage fĂ©minin va forcĂ©ment emmener les femmes Ă  s’impliquer en politique, et que ce phĂ©nomĂšne nuirait au bon fonctionnement de la chambre d’assemblĂ©e en raison, notamment, des grossesses et de l’inĂ©vitable attirance sexuelle qui s’installerait entre les dĂ©putĂ©s. Somme toute, cet article soutient qu’il existe une profonde incohĂ©rence entre les attributs fĂ©minins et les responsabilitĂ©s qui accompagnent l’exercice des droits citoyen[10].

Au dĂ©but des annĂ©es 1830, le dĂ©bat s’envenime encore plus, et le droit de vote des femmes commence Ă  ĂȘtre sĂ©rieusement remis en question sur la place publique. L’un des arguments majeurs des opposants au suffrage fĂ©minin soutient que les Ă©lectrices sont inĂ©vitablement manipulables, et leur droit de vote ne s'exerce pas en toute connaissance de cause. Les femmes sont identifiĂ©es comme des personnes vulnĂ©rables qu’il faut protĂ©ger de l’agression[11]. De plus, selon l’historienne Denyse Baillargeon, « l’appui des femmes devient un argument supplĂ©mentaire pour dĂ©nigrer le candidat du parti adverse en prĂ©tendant que celui-ci est si dĂ©sespĂ©rĂ© qu’il doit compter sur le vote fĂ©minin[12]. »

En 1834, une loi contre le droit de vote des femmes est adoptĂ©e Ă  l’unanimitĂ© par la Chambre d’assemblĂ©e du Bas-Canada. Cette loi mentionne que : « [
] depuis et aprĂšs la passation de cet Acte, aucune fille, femme ou veuve ne pourra voter Ă  aucune Ă©lection dans aucun comtĂ©, CitĂ© ou Bourg de cette province[13] ».

En 1836, pour des raisons qui ne concernent pas la question du suffrage fĂ©minin, cette loi est abrogĂ©e. Cependant, bien que les femmes aient lĂ©galement eu le droit de voter entre 1836 et 1849, il est estimĂ© que seule une douzaine de femmes ont rĂ©ellement exercĂ© leur droit de vote lors de cette pĂ©riode[14]. En 1849, le Parti rĂ©formiste procĂšde Ă  un projet de refonte de la loi Ă©lectorale, et le droit de vote des femmes est dĂ©finitivement retirĂ©[15]. Si l’adoption de cette loi se fait simplement et sans rĂ©elles controverses, selon l’historienne Denyse Baillargeon, les femmes elles-mĂȘmes ne se sont pas prononcĂ©es sur cette loi « ni collectivement ni individuellement[16] ».

Le mouvement des femmes (1880-1910)

Entre 1880 et 1910, les villes du QuĂ©bec sont marquĂ©es par l’expansion rapide du capitalisme industriel[17]. L’industrialisation et l’urbanisation des grands centres entraĂźnent de profondes modifications au sein des rapports sociaux, et un large pan de la population s’appauvrit de maniĂšre significative. Devant cette accentuation des inĂ©galitĂ©s sociales, plusieurs femmes issues de la bourgeoisie mettent sur pied des associations caritatives vouĂ©es Ă  lutter contre la misĂšre urbaine et les maux qui en dĂ©coulent (mortalitĂ© infantile, insalubritĂ© des logements, exploitation des ouvriĂšres, etc.). Ainsi, cette pĂ©riode connait un rĂ©el « mouvement de fondation d’organismes de charitĂ©[18] ». Cependant, ce mouvement caritatif s’accompagne d’une nouvelle conception de l’action sociale : les femmes bourgeoises ont maintenant l’ambition de lutter contre la misĂšre de maniĂšre systĂ©mique, et non plus de maniĂšre ponctuelle et individuelle. Parce qu’elles visent Ă  mettre sur pied des rĂ©formes et des mesures applicables Ă  l’ensemble de la sociĂ©tĂ©, elles ont besoin de travailler de concert avec le corps politique. Rapidement, elles prennent conscience des limites qui leur sont imposĂ©es aux niveaux politique, social et juridique. C’est ainsi qu’en 1880, une toute premiĂšre association fĂ©minine revendique le droit de vote, soit la Women’s Christian Temperance Union de MontrĂ©al, une association fĂ©minine chrĂ©tienne vouĂ©e Ă  la lutte contre l’alcoolisme. D’autres associations fĂ©minines appuient le suffrage fĂ©minin durant cette pĂ©riode, telles que le Montreal Local Council of Women et la FĂ©dĂ©ration nationale Saint-Jean-Baptiste. Toutefois, l’omniprĂ©sence d’une idĂ©ologie bien ancrĂ©e dans les mƓurs et coutumes de l’époque empĂȘche la mobilisation pour le suffrage fĂ©minin de gagner en ampleur, soit l’idĂ©ologie des sphĂšres sĂ©parĂ©es.

Le militantisme politique des femmes bourgeoises

Vers la fin du XIXe siĂšcle et au dĂ©but du XXe siĂšcle, les villes du QuĂ©bec Ă©voluent au rythme du capitalisme industriel. Un large pan de la population vit dans la pauvretĂ© et l’exclusion sociale. Plusieurs associations caritatives sont donc mises en place par des femmes bourgeoises afin de lutter contre cette nouvelle « misĂšre urbaine ». Sur cette photographie, une maison situĂ©e dans le quartier Griffintown, Ă  MontrĂ©al, en 1903.

La pĂ©riode allant de 1880 Ă  1910 se caractĂ©rise par l’omniprĂ©sence et l’engagement social des femmes bourgeoises dans l’espace public[19]. Lors des deux derniĂšres dĂ©cennies du XIXe siĂšcle, le nombre d’associations fĂ©minines montrĂ©alaises double. Au dĂ©but du XXe siĂšcle, on en dĂ©nombre quelques centaines – la grande majoritĂ© de ces associations Ă©tant alors orientĂ©es vers l’objectif de faire Ɠuvre caritative[20].

L’engagement des femmes de l’élite dans des Ɠuvres charitables n’est pas un phĂ©nomĂšne unique Ă  cette pĂ©riode. En effet, les femmes issues de la bourgeoisie et des classes moyennes Ă©taient dĂ©jĂ  engagĂ©es, depuis le dĂ©but du XIXe siĂšcle, dans bon nombre d’activitĂ©s philanthropiques. Selon l’historienne Denyse Baillargeon, faire Ɠuvre de charitĂ© Ă©tait alors perçu comme une responsabilitĂ© sociale que l’élite se devait d’honorer, en plus d’ĂȘtre vue comme une preuve concrĂšte de la foi. Au sein de l’élite bourgeoise, l’action philanthropique est principalement prise en charge par les femmes.

La grande majoritĂ© des associations caritatives fondĂ©es durant cette pĂ©riode ont l’objectif commun de lutter contre la pauvretĂ© et l’exclusion sociale. En effet, les grandes villes du QuĂ©bec vivent alors au rythme du capitalisme industriel, ce qui entraĂźne d’importantes transformations au niveau des rapports sociaux, en plus d’appauvrir une grande partie de la population. Parmi les nouveaux maux et problĂšmes sociaux qui Ă©mergent dans les centres urbains et industriels, les problĂšmes de santĂ© publique occupent une place significative. Cette nouvelle « misĂšre urbaine » attire donc l’attention des philanthropes fĂ©minines qui, influencĂ©es par le mouvement de rĂ©forme urbaine, dĂ©veloppent une toute nouvelle conception de l’action sociale[21].

De plus, l'approche individualiste (plutĂŽt que collective) de l’action charitable des femmes bourgeoises entraĂźne une certaine « politisation des dĂ©bats ». Les associations fĂ©minines ont dorĂ©navant besoin du soutien de l’État pour rĂ©aliser leurs projets, qui nĂ©cessitent bien souvent la mise en place de rĂ©formes et de mesures gouvernementales[22]. DĂšs lors, ces nouvelles ambitions portĂ©es par les associations fĂ©minines s’accompagnent rapidement par la prise de conscience des limites juridiques, sociales et politiques imposĂ©es aux femmes[23].

Les premiĂšres associations Ă  revendiquer le droit de vote des femmes

Comme mentionnĂ© prĂ©cĂ©demment, les ambitions sociales et philanthropiques des associations fĂ©minines de la fin du XIXe et du dĂ©but du XXe siĂšcle ne se limitent plus seulement qu’à des « actions ponctuelles et individuelles[1] ». DorĂ©navant, les associations fĂ©minines cherchent Ă  travailler de concert avec le corps politique afin de concrĂ©tiser leurs ambitions. C’est ainsi que, lors des annĂ©es 1880, la question des droits civiques et politiques des femmes commence tranquillement Ă  se discuter au sein des associations fĂ©minines.

Vers 1880, la Women’s Christian Temperance Union de MontrĂ©al commence Ă  militer en faveur du droit de vote.

Vers 1880, la Women’s Christian Temperance Union de MontrĂ©al commence Ă  militer en faveur du droit de vote. Cette association fĂ©minine chrĂ©tienne vouĂ©e Ă  la promotion de la tempĂ©rance est la toute premiĂšre organisation Ă  militer en faveur du suffrage fĂ©minin au QuĂ©bec. Selon les membres de cette association, les femmes doivent avoir le droit de suffrage afin de pouvoir participer pleinement Ă  la mise en place de mesures gouvernementales visant Ă  contrer l’alcoolisme[1].

En 1893, le Montreal Local Council of Women (Conseil local des femmes de MontrĂ©al) est fondĂ©. Cette organisation non confessionnelle, dĂ©coulant du National Council of Women (Conseil national des femmes du Canada) et de l’International Council of Women (Conseil international des femmes), est principalement investi par des femmes anglophones protestantes. Toutefois, certaines femmes francophones, catholiques et issues de la bourgeoisie militent aux cĂŽtĂ©s des femmes anglophones, dont Marie GĂ©rin-Lajoie, Caroline Dessaulles-BĂ©ique, Marie Lamothe-Thibeaudeau et JosĂ©phine Marchand-Dandurand. La premiĂšre prĂ©sidente du Conseil local des femmes de MontrĂ©al (CLFM) est Grace Julia Parker Drummond. Celle-ci vise Ă  faire valoir l’action sociale des femmes montrĂ©alaises, Ă  lutter contre les injustices sociales et Ă  faire la promotion du bien commun. Selon les membres de cette association, les femmes doivent faire partie du corps politique, avoir accĂšs Ă  l’éducation supĂ©rieure et aux professions, et vivre dans l’égalitĂ© juridique. Selon l’historienne Denyse Baillargeon, les membres du CLFM s’approprient le statut de « citoyenne » avant mĂȘme de rĂ©clamer le droit de vote[24]. En 1909, le CLFM rĂ©clame officiellement le suffrage fĂ©minin[25].

Toutefois, bien que quelques femmes catholiques francophones militent aux cĂŽtĂ©s des femmes anglophones au sein du CLFM, celles-ci doivent le faire Ă  titre individuel, car le clergĂ© catholique canadien-français n’approuve pas que des associations fĂ©minines francophones investissent cette fĂ©dĂ©ration[1]. Dans ce contexte, aprĂšs plus d’une dĂ©cennie Ă  militer aux cĂŽtĂ©s des femmes anglophones , Caroline Dessaulles-BĂ©ique et Marie GĂ©rin-Lajoie fondent, en 1907, la FĂ©dĂ©ration nationale Saint-Jean-Baptiste (FNSJB). Selon l’historienne Yolande Cohen, cette nouvelle fĂ©dĂ©ration se construit sur le modĂšle du Montreal Local Council of Women, mis Ă  part pour son aumĂŽnerie et son idĂ©al nationaliste[26]. Les premiĂšres annĂ©es de la FNSJB sont marquĂ©es par la revendication pour le suffrage fĂ©minin, et les membres de la fĂ©dĂ©ration dĂ©veloppent rapidement un argumentaire maternaliste en faveur du droit de vote. Le mouvement portĂ© par la FNSJB fait Ă©galement la promotion de l’égalitĂ© homme-femme, mais n’appuie pas du tout les idĂ©es portĂ©es par les mouvements fĂ©ministes socialistes et libertaires. Selon l’historienne Marie Lavigne, le fĂ©minisme dĂ©fendu par la FĂ©dĂ©ration nationale Saint-Jean-Baptiste correspond plutĂŽt Ă  un fĂ©minisme dit « chrĂ©tien[27] » .

En somme, la question du droit de vote figure parmi les revendications des associations fĂ©minines, dont la Women’s Christian Temperance Union de MontrĂ©al, le Montreal Local Council of Women et la FĂ©dĂ©ration nationale Saint-Jean-Baptiste. Lors de cette pĂ©riode, les luttes se concentrent surtout au niveau des Ă©lections municipales et scolaires. Certaines de leurs revendications portent fruit, notamment lorsque le Code municipal est modifiĂ© en 1888 par le gouvernement du QuĂ©bec afin d’accorder le droit de vote aux femmes propriĂ©taires et cĂ©libataires. Ce principe est ensuite Ă©largi en 1892, lorsque le droit de vote au niveau municipal est donnĂ© aux veuves et aux femmes cĂ©libataires locataires. Les suffragistes connaissent Ă©galement une belle victoire en 1902, lorsque le conseil municipal de MontrĂ©al tente de retirer le droit de vote aux femmes locataires, et qu’elles rĂ©ussissent Ă  faire Ă©chouer le projet. Marie GĂ©rin-Lajoie, qui militait alors au sein du Montreal Local Council of Women, Ă©tait trĂšs impliquĂ©e dans cette lutte[28].

L’idĂ©ologie des sphĂšres sĂ©parĂ©es

En 1907, la Fédération nationale Saint-Jean-Baptiste est fondée. La toute premiÚre présidente est Caroline Dessaulles-Béique, et Marie Lacoste-Gérin-Lajoie en est la premiÚre secrétaire.

Dans la pensĂ©e rĂ©publicaine occidentale du 19e siĂšcle, les hommes ont la responsabilitĂ© d’exercer leurs devoirs citoyens et de participer Ă  la vie politique (sphĂšre publique), alors que les femmes trouvent plutĂŽt leur allĂ©geance naturelle dans la famille (sphĂšre privĂ©e). Suivant cette logique, les hommes et les femmes sont complĂ©mentaires, et l’exercice de leurs devoirs naturels dĂ©pend de l’engagement de l’autre dans sa sphĂšre respective. Ainsi, pour que les hommes puissent avoir la libertĂ© de travailler au bien commun, il est nĂ©cessaire que ces derniers soient dĂ©tachĂ©s de la sphĂšre privĂ©e. Selon ce raisonnement, l’implication politique de l’homme est donc dĂ©pendante de l’implication de la femme dans la famille[29].

Suivant ce mĂȘme raisonnement, l’implication de la femme dans les activitĂ©s politiques est perçue comme une menace importante Ă  l’ordre public et au bon fonctionnement de la rĂ©publique. Parce que les femmes sont alors identifiĂ©es comme Ă©tant naturellement attachĂ©es Ă  la sphĂšre privĂ©e, leur implication dans la sphĂšre publique est perçue comme Ă©tant d’une profonde indĂ©cence, qui bouscule les mƓurs culturelles et politiques, en plus de remettre leur respectabilitĂ© en question.

Lorsque certaines associations commencent Ă  revendiquer le droit de vote des femmes dans les annĂ©es 1880, l’idĂ©ologie des sphĂšres sĂ©parĂ©es est bien ancrĂ©e au QuĂ©bec. L’omniprĂ©sence de cette conception explique le courant d’opposition u principe du suffrage fĂ©minin. Par exemple, pour plusieurs femmes, l’action de voter n’est tout simplement pas un geste considĂ©rĂ© comme fĂ©minin. Pour cette raison, la lutte pour le droit de vote rencontre un important mouvement d’opposition qui s’affirmera au cours des prochaines dĂ©cennies[30].

La lutte pour le droit de vote des femmes au Québec (1910-1940)

La lutte en faveur du suffrage fĂ©minin dĂ©bute officiellement en 1913, Ă  l’occasion de la fondation de la toute premiĂšre association fĂ©minine vouĂ©e principalement Ă  la promotion du droit de vote des femmes : la Montreal Suffrage Association[31]. Pendant la dĂ©cennie 1910, les efforts sont majoritairement concentrĂ©s sur le droit de vote au niveau fĂ©dĂ©ral – droit que les femmes canadiennes, Ă  l’exception des autochtones et de membres de certains groupes ethniques, obtiennent en 1918[32]. Les QuĂ©bĂ©coises se rendent donc aux urnes pour une premiĂšre fois en 1921 afin de voter pour les Ă©lections fĂ©dĂ©rales. AprĂšs 1922, elles vivent dans la seule province canadienne Ă  refuser le suffrage Ă  ses citoyennes[Note 2].

C’est dans ce contexte que Marie-Lacoste GĂ©rin-Lajoie et Anna Lyman fondent le ComitĂ© provincial pour le suffrage fĂ©minin en 1922. Toutefois, les luttes conduites en faveur du suffrage fĂ©minin se heurtent Ă  une importante rĂ©sistance au QuĂ©bec : un important pan de la population quĂ©bĂ©coise est d’avis que le vote des femmes reprĂ©sente un risque majeur pour le maintien de l’ordre social et la conservation des traditions de la nation canadienne-française. MalgrĂ© tout, le mouvement fĂ©ministe persiste, et connait un nouveau souffle lorsque Idola Saint-Jean fonde l’Alliance canadienne pour le vote des femmes du QuĂ©bec en 1927, et lorsque ThĂ©rĂšse Casgrain inaugure la Ligue des droits de la femme en 1929[33]. Au cours des annĂ©es 1930, l’Alliance et la Ligue travaillent de concert afin de faire avancer le mouvement en faveur du suffrage fĂ©minin, mais le mouvement d’opposition persiste et continue de rejoindre plusieurs femmes, membres du corps politique et clercs. Somme toute, entre 1910 et 1940, le QuĂ©bec demeure divisĂ© sur la question du droit de vote des femmes.

La Montreal Suffrage Association et le droit de vote aux élections fédérales

En 1913, la toute premiĂšre association fĂ©minine Ă  faire du suffrage fĂ©minin son objectif principal est crĂ©Ă©e, soit la Montreal Suffrage Association, une organisation majoritairement composĂ©e de femmes anglophones[31]. Cette organisation, qui est en quelque sorte une crĂ©ation du Conseil local des femmes de MontrĂ©al, organise des confĂ©rences portant sur la question du droit de vote, vend des ouvrages et distribue des dĂ©pliants un peu partout sur le territoire quĂ©bĂ©cois[34]. Bien que la MSA prenne position en faveur du droit de vote des femmes mariĂ©es au niveau municipal Ă  l’automne 1913 , c’est principalement au niveau fĂ©dĂ©ral qu’elle concentre ses efforts.

Entre 1914 et 1917, la mobilisation pour l’obtention du droit de vote des femmes est fortement ralentie par la PremiĂšre Guerre mondiale. Toutefois, en 1917, le gouvernement du Canada prĂ©sente un projet de loi qui accorde le droit de vote aux mĂšres de soldats, ainsi qu’aux infirmiĂšres militaires[35]. Bien que la Montreal Suffrage Association ne soit pas satisfaite par ce projet qui n’inclut pas systĂ©matiquement toutes les femmes canadiennes, les membres de l’association reconnaissent qu’il s’agit d’une importante avancĂ©e pour les droits des femmes. L’assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale de l’organisation Ă©crit donc un texte demandant que le droit de vote au niveau fĂ©dĂ©ral soit Ă©largi Ă  toutes les Canadiennes. L’annĂ©e suivante, le gouvernement fĂ©dĂ©ral accorde finalement ce droit de vote. Lors des Ă©lections fĂ©dĂ©rales de 1921, l’ensemble des Canadiennes peuvent se rendre aux urnes pour la premiĂšre fois[36].

À partir de ce moment, le QuĂ©bec enregistre bel et bien un dĂ©calage vis-Ă -vis les autres provinces en matiĂšre de droits civiques des femmes. Les QuĂ©bĂ©coises restent les seules femmes canadiennes Ă  ne pas possĂ©der le droit de suffrage au niveau provincial. Les derniĂšres provinces Ă  avoir accordĂ© le droit de suffrage aux femmes l’ont fait entre 1916 et 1917[37].

Marie Lacoste-Gérin-Lajoie et le Comité provincial pour le suffrage féminin

Marie Lacoste-GĂ©rin-Lajoie en 1920.

À la suite des Ă©lections fĂ©dĂ©rales de dĂ©cembre 1921, une nouvelle instance vouĂ©e Ă  la promotion du suffrage fĂ©minin au QuĂ©bec, est crĂ©Ă©e en 1922. Cette nouvelle organisation bilingue, le ComitĂ© provincial pour le suffrage fĂ©minin (Provincial Franchise Committee), est fondĂ©e par Marie Lacoste-GĂ©rin-Lajoie et Anna Lyman. Idola Saint-Jean en est la premiĂšre secrĂ©taire[38].

Cette nouvelle organisation initiĂ©e par la FĂ©dĂ©ration nationale Saint-Jean-Baptiste commence ses activitĂ©s dĂšs le dĂ©but de 1922, en organisant Ă  MontrĂ©al une importante assemblĂ©e publique. Le 9 fĂ©vrier 1922, une dĂ©lĂ©gation d’environ quatre Ă  cinq cents femmes se rendent au parlement de QuĂ©bec afin de revendiquer le droit de vote auprĂšs des Ă©lus. Cette dĂ©lĂ©gation compte plusieurs femmes anglophones et francophones, mais aussi plusieurs femmes juives membres de la National Council of Jewish Women, une association fĂ©minine fondĂ©e en 1918 et faisant Ă©galement la promotion du suffrage fĂ©minin[39].

Devant les parlementaires, plusieurs militantes prennent la parole, dont Marie Lacoste-GĂ©rin-Lajoie, mais Ă©galement deux jeunes femmes francophones issues de la nouvelle gĂ©nĂ©ration : ThĂ©rĂšse Casgrain et Idola Saint-Jean . À la diffĂ©rence de leurs aĂźnĂ©es, Casgrain et Saint-Jean sont plus radicales, et n’hĂ©sitent pas Ă  rĂ©futer fermement certains des arguments les plus utilisĂ©s par les rĂ©fractaires du suffrage fĂ©minin[40].

Bien sĂ»r, ce pĂšlerinage vers QuĂ©bec provoque une vague de rĂ©actions de la part des hommes politiques, mais Ă©galement du clergĂ©, des journalistes et de certaines femmes qui s’opposent au suffrage fĂ©minin. D’ailleurs, en rĂ©ponse Ă  cet Ă©vĂšnement, le premier ministre Taschereau dĂ©clare que si l’homme souhaite exclure la femme de la politique, c’est bien parce qu’elle « a un ministĂšre d’amour et de charitĂ© Ă  remplir, auquel l’homme est absolument impropre[41] ».

Un mois plus tard, soit le 9 mars 1922, le dĂ©putĂ© Henry Miles prĂ©sente un projet de loi dont l’objectif est d’accorder le droit de vote aux QuĂ©bĂ©coises. Cependant, le premier ministre Taschereau lui rĂ©pond par une pĂ©tition signĂ©e par 23 000 femmes qui s’opposent au droit de vote. Dans ce contexte, le projet de loi de Miles est ajournĂ©[42].

MalgrĂ© ce revers, Marie Lacoste-GĂ©rin-Lajoie se rend ensuite Ă  Rome pour rencontrer le pape et tenter d’obtenir l’appui de l’Église catholique Ă  sa cause. Pour elle, un appui officiel des Ă©vĂȘques quĂ©bĂ©cois servirait de catalyseur Ă  la mobilisation pour le suffrage fĂ©minin[43]. Toutefois, son sĂ©jour Ă  Rome ne se dĂ©roule pas comme elle l’aurait espĂ©rĂ©. À son retour au QuĂ©bec, en novembre 1922, elle dĂ©missionne de son poste et cĂšde la coprĂ©sidence du ComitĂ© provincial pour le suffrage fĂ©minin Ă  ThĂ©rĂšse Casgrain[44]. Ce dĂ©part affecte le comitĂ© (qui ne tiendra que deux rĂ©unions en trois ans), mais aussi la FĂ©dĂ©ration nationale Saint-Jean-Baptiste, qui finit par se retirer de la lutte en 1922[45].

Dans l'ensemble, la mobilisation fĂ©ministe en faveur du suffrage fĂ©minin durant les annĂ©es 1920 connaĂźt que des rĂ©sultats assez modestes. Cependant, lors de cette dĂ©cennie, le rĂŽle des femmes se modifie tranquillement, mais significativement. C’est permettant aux femmes de jouer un plus grand rĂŽle dans la vie sociale et Ă©conomique du QuĂ©bec[46].

L’Alliance canadienne pour le vote des femmes du QuĂ©bec (1927) et la Ligue des droits de la femme (1929)

Idola Saint-Jean, Fondatrice de l’Alliance canadienne pour le vote des femmes du QuĂ©bec.

En 1927, Idola Saint-Jean fonde l’Alliance canadienne pour le vote des femmes du QuĂ©bec. Jugeant que le ComitĂ© provincial pour le suffrage fĂ©minin manque de combativitĂ© et qu’il s’éloigne trop des femmes de la classe ouvriĂšre, Idola Saint-Jean cherche Ă  rapprocher le mouvement pour le suffrage fĂ©minin du mouvement ouvrier[47]. Ce rapprochement constitue alors un dĂ©fi considĂ©rable. Jusque-lĂ , le mouvement pour le suffrage avait Ă©tĂ© principalement portĂ© par des femmes bourgeoises, alors que le mouvement ouvrier avait Ă©tĂ© principalement portĂ© par des hommes de la classe ouvriĂšre. Le mouvement fĂ©ministe de cette Ă©poque avait surtout considĂ©rĂ© les femmes ouvriĂšres « comme les bĂ©nĂ©ficiaires potentielles de son action bienveillante plutĂŽt que comme des alliĂ©es dans la lutte[48] ».

En fĂ©vrier 1927, le ComitĂ© et l’Alliance envoient deux dĂ©lĂ©gations Ă  QuĂ©bec afin de rencontrer le premier ministre Louis-Alexandre Taschereau et revendiquer le droit de vote des femmes . Bien que ces deux groupes partagent le mĂȘme objectif, leurs messages sont bien diffĂ©rents, en raison des deux publics qu’ils reprĂ©sentent. Ainsi, l’Alliance canadienne pour le vote des femmes au QuĂ©bec souhaite reprĂ©senter surtout les femmes ouvriĂšres des grands centres urbains , en proposant un discours qui leur soit propre et, par ailleurs, bien moins centrĂ© sur la question de la maternitĂ©[48].

SecouĂ©e par la vivacitĂ© de la nouvelle Alliance, en 1929, ThĂ©rĂšse Casgrain transforme le ComitĂ© provincial pour le suffrage fĂ©minin pour fonder la Ligue des droits de la femme. Cette Ligue travaille de concert avec l’Alliance pour faire avancer la question du suffrage fĂ©minin au QuĂ©bec. Ensemble, elles feront parvenir, en 1935, une pĂ©tition au roi George V, dans laquelle figurent 10 000 signatures de personnes en faveur du droit de vote des femmes au QuĂ©bec[49].

Les principaux groupes et figures d’opposition au principe du suffrage fĂ©minin

Premier ministre du QuĂ©bec entre 1920 et 1936, Louis-Alexandre Taschereau s’oppose fermement au principe du suffrage fĂ©minin.

Dans un sondage menĂ© en 1912 auprĂšs des lecteurs du Montreal Star, seuls 11,8 % des participants se disent favorables au droit de vote des femmes au QuĂ©bec. Selon l’écrivain Jad Adams, le retard de l’adoption du droit de vote chez les femmes s’explique par « le conservatisme social, la peur chez les tenants de la gauche que les femmes votent majoritairement Ă  droite, la religion ainsi que la misogynie[50] ». Au QuĂ©bec, Ă  cette Ă©poque, le mouvement d’opposition au suffrage fĂ©minin est majoritairement portĂ© par des membres du clergĂ© et des tenants du nationalisme canadien-français.

Au dĂ©but des annĂ©es 1920, le clergĂ© est divisĂ© au sujet de la question du suffrage fĂ©minin . En effet, alors que certains membres plus libĂ©raux n’y voient pas de problĂšmes (tel que l’abbĂ© Perrin, par exemple), d’autres membres plus conservateurs s’y opposent vivement et publiquement (ex. : les abbĂ©s Éli-J. Auclair et Arthur Curotte). Somme toute, le clergĂ© adopte dans l’ensemble une position plutĂŽt opposĂ©e au suffrage fĂ©minin. Selon les religieux opposĂ©s au suffrage fĂ©minin, les femmes elles-mĂȘmes ne voudraient pas du droit de vote, et, Ă©tant « soumises, de droit divin, Ă  l’autoritĂ© de leur mari », les traditions entourant le rĂŽle des femmes reprĂ©sentent une certaine sĂ©curitĂ© vis-Ă -vis les bouleversements socio-Ă©conomiques redĂ©finissant l’hĂ©ritage canadien-français de l’époque[51].

Henri Bourassa est le fondateur du journal Le Devoir. Au dĂ©but des annĂ©es vingt, le journal est proche des milieux clĂ©ricaux conservateurs et nationalistes, et mĂšne une lutte contre le suffrage fĂ©minin. Henri Bourassa, qui est lui-mĂȘme en dĂ©faveur du droit de vote des femmes au QuĂ©bec, signe plusieurs textes Ă©ditoriaux Ă  ce sujet.

Mis Ă  part le clergĂ©, plusieurs journalistes et hommes politiques s’opposent au suffrage fĂ©minin. Par exemple, selon le premier ministre Louis-Alexandre Taschereau, la question du droit de vote est un trait identitaire qui distingue les francophones des anglophones, de la mĂȘme maniĂšre que la question de la conscription le fut Ă©galement, lors de la PremiĂšre Guerre mondiale[52]. De son cĂŽtĂ©, Henri Bourassa soutient que les politiciens fĂ©dĂ©raux instrumentaliseront les femmes afin d’obtenir plus de votes : « le vote des femmes ne pourra que conduire Ă  une compĂ©tition malsaine entre les deux sexes puisque les femmes, possĂ©dant dĂ©sormais les mĂȘmes droits que les hommes, se poseront en rivales plutĂŽt que de demeurer leurs fidĂšles compagnes, provoquant la destruction de la famille et donc de la sociĂ©tĂ© et de la nation canadienne-française[53] ». Cette vision, selon l’historienne Denyse Baillargeon, est partagĂ©e par plusieurs acteurs de cette Ă©poque.

Enfin, au sein mĂȘme des QuĂ©bĂ©coises, la question du suffrage fĂ©minin ne fait pas consensus. Si certaines Canadiennes anglaises s’opposent au droit de vote des femmes, chez les Canadiennes françaises, un nombre important de femmes ont Ă©galement signĂ© des pĂ©titions au premier ministre Taschereau pour lui demander de ne pas accorder ce droit aux femmes[54]; notamment, une pĂ©tition provenant de la section des jeunes filles du Syndicat ouvrier catholique de Hull, et une autre venant de la FĂ©dĂ©ration des femmes canadiennes-françaises de Hull. Selon l’historienne Denyse Baillargeon, « ces interventions antisuffragistes sont manifestement tĂ©lĂ©guidĂ©es par les autoritĂ©s ecclĂ©siastiques dont l’objectif est de prouver que les femmes elles-mĂȘmes ne veulent pas du vote[55] ». D'autres associations fĂ©minines, notamment des Cercles des fermiĂšres, guidĂ©es par un idĂ©al fĂ©minin diffĂ©rent de celui des militantes des centres urbains, ne se reconnaissent pas non plus dans la lutte pour ce droit[56].

L’adoption de la loi accordant le droit de vote aux femmes (1940)

La Ligue des droits de la femme en 1935.
ThérÚse Forget Casgrain en 1942.

À la suite de l’élection du gouvernement de l’Union nationale de Maurice Duplessis en 1936, le Parti libĂ©ral dĂ©cide de changer de position sur la question du droit de vote des femmes. En 1938, le parti tient un congrĂšs afin de se doter d'une nouvelle plateforme Ă©lectorale. Lors de ce congrĂšs, ThĂ©rĂšse Casgrain, devenue vice-prĂ©sidente des Femmes libĂ©rales du Canada et « connaĂź[ssan]t Ă  peu prĂšs tout le monde » dans le milieu de la politique quĂ©bĂ©coise, participe aux dĂ©libĂ©rations en compagnie d'une quarantaine de femmes[57]. GrĂące Ă  son action, elle rĂ©ussit Ă  convaincre les libĂ©raux d'adopter Ă  l’unanimitĂ© une rĂ©solution en faveur du vote des femmes.

En 1939, Maurice Duplessis dĂ©clenche de nouvelles Ă©lections au QuĂ©bec. Le Parti libĂ©ral dirigĂ© par AdĂ©lard Godbout, fort de sa nouvelle plateforme Ă©lectorale, reçoit l'appui de la Ligue et de l’Alliance. À l'issue du scrutin, le Parti libĂ©ral est portĂ© au pouvoir. Respectant son engagement, le nouveau premier ministre Godbout prĂ©sente un projet de loi pour accorder le droit de vote aux femmes lors de la session parlementaire de 1940.

Cependant, l’Église publie rapidement un communiquĂ© signĂ© par le cardinal Rodrigue Villeneuve dans lequel les arguments justifiant son opposition au suffrage fĂ©minin sont Ă©noncĂ©s. Ce communiquĂ©, comme le relĂšve l’historienne Marie Lavigne, est la synthĂšse de tout « l’argumentaire dĂ©ployĂ© depuis des dĂ©cennies par les opposants au suffrage des femmes[58] » :

Nous ne sommes pas favorables au suffrage politique féminin :

  1. parce qu’il va Ă  l’encontre de l’unitĂ© et de la hiĂ©rarchie familiale.
  2. parce que son exercice expose la femme Ă  toutes les passions et les aventures de l’électoralisme.
  3. parce que, en fait, il nous apparaßt que la trÚs grande majorité des femmes de la province ne le désire pas.
  4. parce que les rĂ©formes sociales, Ă©conomiques, hygiĂ©niques, etc., que l’on avance pour prĂ©coniser le droit de suffrage chez les femmes, peuvent ĂȘtre aussi bien obtenues grĂące Ă  l’influence des organisations fĂ©minines, en marge de la politique. Nous croyons exprimer ici le sentiment commun des Ă©vĂȘques de la province. [signĂ©] J.-M. Rodrigue cardinal Villeneuve, O.M.I., ArchevĂȘque de QuĂ©bec[59].

MalgrĂ© l’opposition de l’Église, le projet de loi est adoptĂ© Ă  67 voix contre 9, le 18 avril 1940. Le 25 avril suivant, le Conseil lĂ©gislatif adopte officiellement le projet de loi. Avec cette refonte de la loi Ă©lectorale, le nombre d’électeurs inscrits passe de 753 310 personnes en 1939, Ă  1 865 396 en 1944. En termes numĂ©riques, cette modification de la loi Ă©lectorale aura Ă©tĂ©, jusqu’à prĂ©sent, la plus importante de l’histoire du QuĂ©bec[60].

Ainsi, en aoĂ»t 1944, les femmes quĂ©bĂ©coises se rendent aux urnes afin de voter pour la toute premiĂšre fois. Toutefois, comme cela faisait dĂ©jĂ  25 ans qu’elles votaient au palier fĂ©dĂ©ral, cette expĂ©rience n’avait rien de trĂšs inhabituel pour elles. En effet, il appert mĂȘme que les femmes avaient, jusqu’alors, enregistrĂ© un taux de participation Ă©lectoral plus Ă©levĂ© que les hommes au niveau fĂ©dĂ©ral[61].

HĂ©ritage

Élue le 14 dĂ©cembre 1961, Marie-Claire Kirkland-Casgrain est la toute premiĂšre femme Ă  intĂ©grer l’AssemblĂ©e lĂ©gislative du QuĂ©bec.
Élue le 4 septembre 2012, Pauline Marois est la toute premiĂšre femme Ă  devenir premiĂšre ministre du QuĂ©bec.

Au QuĂ©bec, l’obtention du droit de vote s’accompagne de l’obtention du droit d’éligibilitĂ© en politique. Ainsi, dĂšs le 25 avril 1940, les femmes ont lĂ©galement le droit « de se prĂ©senter comme candidate, d’ĂȘtre membre du parlement, et devenir un jour ministre, voire premiĂšre ministre[62] ». C’est un droit qu’exercent les onze femmes qui se sont prĂ©sentĂ©es comme candidate entre 1940 et 1960, mais aucune d’entre elles n’est Ă©lue.

En 1946, ThérÚse Casgrain adhÚre à la Fédération du Commonwealth coopératif (FCC). Elle sera cheffe de ce parti de 1951 à 1957. Par cet engagement, Casgrain est la toute premiÚre femme à diriger un parti politique au Canada[63].

En 1961, Marie-Claire Kirkland-Casgrain remporte une Ă©lection partielle dans l’ancienne circonscription de son dĂ©funt pĂšre, et devient donc, par la mĂȘme occasion, la toute premiĂšre femme Ă  occuper la fonction de dĂ©putĂ©e au QuĂ©bec. Le 5 dĂ©cembre 1962, elle est assermentĂ©e ministre sans portefeuille dans le cabinet de Jean Lesage. En 1976, lorsque le Parti quĂ©bĂ©cois remporte les Ă©lections, cinq femmes intĂšgrent l’AssemblĂ©e nationale.

Lors des Ă©lections de 2012, Pauline Marois, cheffe du Parti quĂ©bĂ©cois, est portĂ©e au pouvoir. Soixante-douze-ans aprĂšs l’obtention par les femmes du droit de vote et de l’éligibilitĂ©, elle devient la toute premiĂšre femme Ă  exercer la fonction de premiĂšre ministre du QuĂ©bec.

Chronologie partielle

  • 1791 : L’Acte constitutionnel donne le droit de vote aux sujets britanniques, propriĂ©taires ou locataires, ĂągĂ©s de 21 ans et plus. Il n’y a pas de spĂ©cifications quant au sexe dans le texte de loi : les femmes peuvent voter si elles rĂ©pondent Ă  ces critĂšres .
  • 1834 : Adoption Ă  l’unanimitĂ© d’une loi qui retire le droit de vote aux filles, femmes et veuves .
  • 1836 : Abrogation de la loi de 1834 : les femmes obtiennent de nouveau le droit de suffrage .
  • 1849 : Le parlement du Canada-Uni retire dĂ©finitivement le droit de vote aux femmes .
  • 1876 : Les femmes cĂ©libataires, majeures et propriĂ©taires obtiennent le droit de vote au niveau municipal, dans la ville de QuĂ©bec
  • 1887 : Les femmes cĂ©libataires, majeures et propriĂ©taires obtiennent le droit de vote au niveau municipal, dans la ville de MontrĂ©al
  • 1888 : Le Code municipal est modifiĂ© par le gouvernement provincial, ce qui donne le droit aux femmes majeures, cĂ©libataires et propriĂ©taires de voter au niveau municipal partout dans la province.
  • 1892 : Le droit de vote au niveau municipal est Ă©largi aux veuves et aux femmes cĂ©libataires locataires
  • 1899 : La ville de MontrĂ©al donne le droit de vote municipal aux MontrĂ©alaises locataires qui paient des taxes
  • 1902 : Marie Lacoste-GĂ©rin-Lajoie publie son TraitĂ© de droit usuel
  • 1907 : Marie Lacoste-GĂ©rin-Lajoie et Caroline Dessaulles-BĂ©ique fondent la FĂ©dĂ©ration nationale Saint-Jean-Baptiste
  • 1909 : Le Conseil local des femmes de MontrĂ©al entĂ©rine le principe du suffrage fĂ©minin
  • 1913 : Fondation de la Montreal Suffrage Association
  • 1918 : En mai, les femmes canadiennes obtiennent le droit de vote au niveau fĂ©dĂ©ral
  • 1922 : Marie Lacoste-GĂ©rin-Lajoie et Anna Marks Lyman fondent le ComitĂ© provincial pour le suffrage fĂ©minin (Provincial Franchise Committee). En fĂ©vrier, une dĂ©lĂ©gation de prĂšs de 500 femmes se prĂ©sente Ă  QuĂ©bec et rencontre les parlementaires et le premier ministre Taschereau
  • 1927 : Idola Saint-Jean fonde l’Alliance canadienne pour le vote des femmes du QuĂ©bec
  • 1929 : ThĂ©rĂšse Casgrain fonde la Ligue des droits de la femme
  • 1930 : Idola Saint-Jean se prĂ©sente comme candidate libĂ©rale indĂ©pendante lors des Ă©lections fĂ©dĂ©rales. Elle obtient 3 000 votes.
  • 1935 : Idola Saint-Jean fait parvenir, au Roi George V, une pĂ©tition de 10 000 signataires en faveur du suffrage fĂ©minin au QuĂ©bec.
  • 1938 : ThĂ©rĂšse Casgrain et une quarantaine de dĂ©lĂ©guĂ©es rĂ©ussissent Ă  faire inscrire la question du droit de vote des femmes dans la plateforme du Parti libĂ©ral du QuĂ©bec. L’accord du droit de vote des femmes devient l’une des promesses Ă©lectorales du Parti libĂ©ral
  • 1939 : Le 25 octobre, le Parti libĂ©ral d’AdĂ©lard Godbout est portĂ© au pouvoir
  • 1940 : Le 25 avril, la loi accordant le droit de vote et d’éligibilitĂ© aux femmes (projet de loi 18) est sanctionnĂ©e. Les femmes quĂ©bĂ©coises obtiennent officiellement le droit de vote et l’éligibilitĂ©. Ce droit entre en vigueur le 1er janvier 1941
  • 1944 : Le 8 aoĂ»t, les femmes quĂ©bĂ©coises votent pour la premiĂšre fois aux Ă©lections provinciales
  • 1961 : Marie-Claire Kirkland-Casgrain devient la premiĂšre femme Ă  occuper la fonction de dĂ©putĂ©e au QuĂ©bec
  • 1962 : Marie-Claire Kirkland-Casgrain est assermentĂ©e ministre sans portefeuille
  • 2012 : Pauline Marois devient la premiĂšre femme Ă  exercer la fonction de premiĂšre ministre du QuĂ©bec

Annexes

Ouvrages de référence

  • Yolande Cohen, « FĂ©dĂ©ration nationale Saint-Jean-Baptiste », EncyclopĂ©die canadienne, 8 novembre 2017 (lire en ligne)

StĂ©phanie Lanthier, « Idola Saint-Jean », EncyclopĂ©die canadienne, 23 fĂ©vrier 2009 (mis Ă  jour le 21 fĂ©vrier 2017) (lire en ligne)

  • Margaret E. McCallum, « Marie GĂ©rin-Lajoie », EncyclopĂ©die canadienne, 9 mai 2014 (mis Ă  jour le 30 mars 2022) (lire en ligne)
  • AndrĂ© Munro, « Pauline Marois », Encyclopedia Britannica, 25 mars 2022 (lire en ligne)
  • UniversitĂ© de Sherbrooke, « Marie-Claire Kirkland-Casgrain (1924-2016) Femme politique », Bilan du siĂšcle — Site encyclopĂ©dique sur l’histoire du QuĂ©bec depuis 1900, consultĂ© le 25 aoĂ»t 2022 (lire en ligne)
  • UniversitĂ© de Sherbrooke, « Marie Lacoste-GĂ©rin-Lajoie (1867-1945) Activiste, fĂ©ministe », Bilan du siĂšcle — Site encyclopĂ©dique sur l’histoire du QuĂ©bec depuis 1900, consultĂ© le 15 septembre 2022, RepĂ©rĂ© Ă  https://bilan.usherbrooke.ca/bilan/pages/biographies/323.html
  • UniversitĂ© de Sherbrooke, « Sanction de la Loi accordant le droit de vote aux femmes lors des Ă©lections provinciales », Bilan du siĂšcle — Site encyclopĂ©dique sur l’histoire du QuĂ©bec depuis 1900, consultĂ© le 16 septembre 2022, RepĂ©rĂ© Ă  https://bilan.usherbrooke.ca/bilan/pages/evenements/631.html
  • Veronica Strong-Boag et Diane Macdonald, « Conseil national des femmes du Canada », EncyclopĂ©die canadienne, 7 fĂ©vrier 2006 (mis Ă  jour le 2 aoĂ»t 2016) (lire en ligne)

Ouvrages

  • Denyse Baillargeon, BrĂšve histoire des femmes au QuĂ©bec, MontrĂ©al, BorĂ©al, 2012, 278 p. (ISBN 978-2-7646-2205-6)
  • Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L’histoire du suffrage fĂ©minin au QuĂ©bec, MontrĂ©al, Éditions du remue-mĂ©nage, 2019, 235 p. (ISBN 978-289091-651-7)
  • Collectif Clio, (Micheline Dumont, MichĂšle Jean, Marie Lavigne et Jennifer Stoddart) L’histoire des femmes au QuĂ©bec depuis quatre siĂšcles, MontrĂ©al, Le Jour Ă©diteur, 1992, 646 p. (ISBN 2-8904-4440-6)
  • Paul-AndrĂ© Linteau, RenĂ© Durocher et Jean-Claude Robert, Histoire du QuĂ©bec contemporain — Tome I : De la ConfĂ©dĂ©ration Ă  la crise (1867-1929), MontrĂ©al, BorĂ©al, 1989, 758 p. (ISBN 2-89052-297-0)
  • Paul-AndrĂ© Linteau, RenĂ© Durocher, Jean-Claude Robert et François Ricard, Histoire du QuĂ©bec contemporain — Tome II : Le QuĂ©bec depuis 1930, MontrĂ©al, BorĂ©al, 1989 (ISBN 978-2-89052-298-5)

Chapitre d’ouvrage collectif

  • Marie Lavigne, « 18 avril 1940 : L’adoption du droit de vote des femmes : le rĂ©sultat d’un long combat », dans Pierre Graveline (dir.), Dix journĂ©es qui ont fait le QuĂ©bec, MontrĂ©al : Éditions Typo, 2020, p. 247-281.

Articles scientifiques

  • Centre d’histoire des rĂ©gulations sociales (CHRS), « Entretien avec Denyse Baillargeon », Dossier spĂ©cial : Vieillesse, santĂ©, et travail des femmes, 8 juin 2020 (lire en ligne)
  • Yolande Cohen, « Retours sur le droit de vote des femmes au QuĂ©bec avant 1940 Le rĂŽle du parti libĂ©ral », Bulletin d’histoire politique, 2012 (lire en ligne)
  • Alexandre Dumas, « Le droit de vote des femmes Ă  l’AssemblĂ©e lĂ©gislative du QuĂ©bec (1922-1940) », Bulletin d’histoire politique, volume 24, numĂ©ro 3, printemps 2016, p. 137–157 (lire en ligne)
  • Karine HĂ©bert, « Une organisation maternaliste au QuĂ©bec la FĂ©dĂ©ration nationale Saint-Jean-Baptiste et la bataille pour le vote des femmes », Revue d’histoire de l’AmĂ©rique française, volume 52, numĂ©ro 3, hiver 1999, p. 315–344 (lire en ligne)
  • Marie Lavigne, « Le 18 avril 1940 — L’adoption du droit de vote des femmes : le rĂ©sultat d’un long combat », Fondation Lionel-Groulx : Dix journĂ©es qui ont fait le QuĂ©bec, 3 avril 2013 (lire en ligne [PDF])

Articles de presse

  • « Il y a 80 ans, le QuĂ©bec accordait le droit de vote aux femmes », Radio-Canada, 24 avril 2020 (lire en ligne)

Articles connexes

Notes et références

Notes

  1. « Depuis hier soir, le suffrage féminin est devenu loi dans la province de Québec », Le Devoir, 26 avril 1940, p. 6. Adopté à l'Assemblée législative le 18 avril 1940, le projet de loi sur le droit de vote des femmes a été ratifié par le Conseil législatif le 25 avril suivant. Ce droit de vote est devenu valable à compter du 1er janvier 1941. Ainsi, les premiÚres Québécoises à pouvoir voter furent les électrices des circonscriptions de Saint-Jean et d'Huntingdon, lors des élections partielles du 6 octobre 1941. Par la suite, toutes les femmes du Québec purent s'exprimer pour la premiÚre fois lors des élections générales de 1944.
  2. À l’exception de  Terre-Neuve (qui n’est pas encore une province canadienne) et des Territoires du Nord-Ouest qui accordent le suffrage fĂ©minin respectivement en 1925 et 1951.

Références

  1. Marie Lavigne, « 18 avril 1940 : L’adoption du droit de vote des femmes : le rĂ©sultat d’un long combat », dans Dix journĂ©es qui ont fait le QuĂ©bec, MontrĂ©al, Typo, , p. 275.
  2. MĂ©moire.qc.ca : Des origines Ă  1840, MontrĂ©al, CheneliĂšre Éducation, , p. 223-224.
  3. MĂ©moire.qc.ca : Des origines Ă  1840, MontrĂ©al, CheneliĂšre Éducation, , p. 225.
  4. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, , p. 26-27.
  5. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, , p. 27.
  6. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, , p. 28.
  7. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, , p. 29.
  8. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, , p. 30-31.
  9. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, , p. 32.
  10. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, , p. 33.
  11. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, , p. 34-35.
  12. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, , p. 35.
  13. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, , p. 39.
  14. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, , p. 40.
  15. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, , p. 40-41.
  16. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, , p. 41.
  17. Denyse Baillargeon, BrÚve histoire des femmes au Québec, , p. 91.
  18. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, , p. 54.
  19. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, , p. 54-55.
  20. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, , p. 55.
  21. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, , p. 56.
  22. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, , p. 57.
  23. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, , p. 58.
  24. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, , p. 58-60.
  25. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, , p. 80.
  26. Fédération nationale Saint-Jean-Baptiste | l'Encyclopédie Canadienne
  27. Marie Lavigne, « Le 18 avril 1940 — L’adoption du droit de vote des femmes : le rĂ©sultat d’un long combat », Fondation Lionel-Groulx : Dix journĂ©es qui ont fait le QuĂ©bec, 3 avril 2013, p. 13.
  28. Marie Lavigne, « L’adoption du droit de vote des femmes : le rĂ©sultat d’un long combat », Fondation Lionel-Groulx : Dix journĂ©es qui ont fait le QuĂ©bec, 3 avril 2013, p. 12.
  29. Denyse Baillargeon, BrÚve histoire des femmes au Québec, 2012, p. 56.
  30. CHRS, « Entretien avec Denyse Baillargeon », sur Centre d'histoire des rĂ©gulations sociales, 8 juin 2020.
  31. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, 2019, p. 90.
  32. Paul-André Linteau, René Durocher, Jean-Claude Robert et François Ricard, Histoire du Québec contemporain, 1989, p. 659.
  33. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, 2019, p. 126, 131.
  34. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, 2019, p. 96.
  35. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, 2019, p. 97.
  36. Paul-André Linteau, René Durocher, Jean-Claude Robert et François Ricard, Histoire du Québec contemporain, 1989, p. 596.
  37. Paul-André Linteau, René Durocher, Jean-Claude Robert et François Ricard, Histoire du Québec contemporain, 1989, p. 595.
  38. Collectif Clio [Micheline Dumont, MichÚle Jean, Marie Lavigne et Jennifer Stoddart], L'Histoire des femmes au Québec depuis quatre siÚcles, Le Jour, 1992, p. 360.
  39. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, 2019, p. 108, 111.
  40. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, 2019, p. 114.
  41. Citation de Louis-Alexandre Taschereau dans Collectif Clio [Micheline Dumont, MichÚle Jean, Marie Lavigne et Jennifer Stoddart], L'Histoire des femmes au Québec depuis quatre siÚcles, Le Jour, 1992, p. 362.
  42. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, 2019, p. 118.
  43. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, 2019, p. 120.
  44. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, 2019, p. 121-122.
  45. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, 2019, p. 126.
  46. Paul-André Linteau, René Durocher, Jean-Claude Robert et François Ricard, Histoire du Québec contemporain, 1989, p. 598.
  47. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, 2019, p. 137.
  48. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, 2019, p. 131.
  49. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, 2019, p. 145.
  50. Alexandre Dumas, « Le droit de vote des femmes Ă  l'AssemblĂ©e lĂ©gislative du QuĂ©bec (1922-1940) », Bulletin d'histoire politique, vol. 24, n°3, 2016, p. 137-138.
  51. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, 2019, p. 102-103, 116.
  52. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, 2019, p. 100.
  53. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, 2019, p. 102-103.
  54. Denyse Baillargeon, Repenser la nation : L'histoire du suffrage féminin au Québec, 2019, p. 102.
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  57. Marie Lavigne, « 18 avril 1940 : L'adoption du droit de vote des femmes : le résultat d'un long combat » dans Pierre Graveline (dir.), Dix journées qui ont fait le Québec, Montréal, Typo, 2020, p. 274.
  58. Marie Lavigne, « 18 avril 1940 : L'adoption du droit de vote des femmes : le résultat d'un long combat » dans Pierre Graveline (dir.), Dix journées qui ont fait le Québec, Montréal, Typo, 2020, p. 275.
  59. Extrait du communiqué du cardinal Villeneuve dans Marie Lavigne, « 18 avril 1940 : L'adoption du droit de vote des femmes : le résultat d'un long combat » dans Pierre Graveline (dir.), Dix journées qui ont fait le Québec, Montréal, Typo, 2020, p. 275.
  60. Marie Lavigne, « 18 avril 1940 : L'adoption du droit de vote des femmes : le résultat d'un long combat » dans Pierre Graveline (dir.), Dix journées qui ont fait le Québec, Montréal, Typo, 2020, p. 278.
  61. Marie Lavigne, « 18 avril 1940 : L'adoption du droit de vote des femmes : le résultat d'un long combat » dans Pierre Graveline (dir.), Dix journées qui ont fait le Québec, Montréal, Typo, 2020, p. 279.
  62. Marie Lavigne, « 18 avril 1940 : L'adoption du droit de vote des femmes : le résultat d'un long combat » dans Pierre Graveline (dir.), Dix journées qui ont fait le Québec, Montréal, Typo, 2020, p. 280.
  63. Jennifer Stoddart, « ThérÚse Casgrain », Encyclopédie canadienne, 24 mars 2008 (mis à jour le 17 avril 2015). https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/therese-casgrain.

Annexes

Bibliographie

Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article : document utilisĂ© comme source pour la rĂ©daction de cet article.

  • Denyse Baillargeon, BrĂšve histoire des femmes au QuĂ©bec, MontrĂ©al, Les Éditions du BorĂ©al, , 281 p. (ISBN 978-2-7646-2205-6) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • Denyse Baillargeon, Repenser la nation : l'histoire du suffrage fĂ©minin au QuĂ©bec, MontrĂ©al, les Ă©ditions du remue-mĂ©nage, , 235 p. (ISBN 978-2-89091-651-7) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • Collectif Clio ( Dumont, Micheline. Jean, MichĂšle. Lavigne, Marie. Stoddart, Jennifer.), L'histoire des femmes au QuĂ©bec depuis quatre siĂšcles, MontrĂ©al, Les Quinze, , 521 p. (ISBN 2-89026-309-6) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • Alexandre Dumas, « Le droit de vote des femmes Ă  l'AssemblĂ©e lĂ©gislative du QuĂ©bec (1922-1940) », Bulletin d'histoire politique,‎ , p. 137-157 Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • Diane Lamoureux, Citoyennes? : femmes, droit de vote et dĂ©mocratie, MontrĂ©al, Les Éditions du Remue-mĂ©nage, , 195 p. (ISBN 2-89091-086-5) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • Marie Lavigne, « Le 18 avril 1940 — L’adoption du droit de vote des femmes : le rĂ©sultat d’un long combat », dans Pierre Graveline (dir.), Dix journĂ©es qui ont fait le QuĂ©bec, MontrĂ©al, VLB Ă©diteur, , 263 p. (ISBN 978-2-89649-455-2, lire en ligne), p. 161-185 Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • Ève LĂ©ger-BĂ©langer, « L’obtention du droit de vote des femmes au QuĂ©bec en 1940: Le silence fĂ©minin dans les journaux », Cap-aux-Diamants,‎ , p. 14-16 (ISSN 0829-7983)Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article

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