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Histoire du Québec

L'histoire du Québec s'étend du premier peuplement jusqu'à nos jours.

Le SĂ©minaire de QuĂ©bec fondĂ© en 1663, plus ancien Ă©tablissement d’enseignement supĂ©rieur francophone en AmĂ©rique.

Le territoire du QuĂ©bec est peuplĂ© depuis environ 10 000 ans, soit la fin de la derniĂšre pĂ©riode glaciaire . Les premiers habitants du territoire sont les PalĂ©oamĂ©ricains, ancĂȘtres des peuples autochtones du QuĂ©bec.

L'Ă©tablissement europĂ©en dĂ©coule principalement d'explorations maritimes aux visĂ©es mercantiles commanditĂ©es par le Royaume de France Ă  partir du XVIe siĂšcle. Le peuplement français du fleuve Saint-Laurent dĂ©bute au XVIIe siĂšcle avec la fondation de QuĂ©bec en 1608, Trois-RiviĂšres en 1634 et MontrĂ©al en 1642. Connue comme la Nouvelle-France Ă  partir de 1668, la colonie s’appuie sur la traite des fourrures. Son expansion territoriale toujours plus en amont du rĂ©seau hydrographique du Saint-Laurent entraĂźne Ă©ventuellement des tensions avec des peuples autochtones, notamment les Mohawks, puis avec d'autres puissances coloniales rivales, principalement la Grande-Bretagne.

Les tensions atteignent leur paroxysme lors de la guerre de Sept Ans, aprĂšs la dĂ©faite de la France, la Nouvelle-France est cĂ©dĂ©e Ă  la Grande-Bretagne par le TraitĂ© de Paris en 1763 et devient la Province de QuĂ©bec. MalgrĂ© la ConquĂȘte, l'Acte de QuĂ©bec reconnaĂźt aux Canadiens français majoritaires le droit de conserver la langue française, leur droit civil et leur religion catholique. La RĂ©volution amĂ©ricaine entraĂźne l'arrivĂ©e de nombreux rĂ©fugiĂ©s loyalistes britanniques. La colonie est dotĂ©e d'institutions parlementaires Ă  partir de 1791 avec la crĂ©ation du Bas-Canada. En 1837-1838, une sĂ©rie d'insurrections sont rĂ©primĂ©es par le pouvoir colonial britannique. En 1841, le Haut-Canada et le Bas-Canada deviennent le Canada-Uni, puis, en 1867, la ConfĂ©dĂ©ration canadienne entraĂźne la crĂ©ation de la province de QuĂ©bec actuelle.

L'industrialisation, qui dĂ©bute au cours du XIXe siĂšcle, entraĂźne un exode rural et l'urbanisation rapide de QuĂ©bec et de MontrĂ©al. L’exploitation forestiĂšre et miniĂšre extensive mĂšne Ă  la colonisation des Cantons-de-l'Est, de l'Outaouais, des Laurentides, du Saguenay-Lac-Saint-Jean, de l'Abitibi et de la CĂŽte-Nord. Dans le contexte du contrĂŽle de l'Ă©conomie par une petite Ă©lite principalement anglophone, l'Ă©mergence d'une petite-bourgeoisie et d'une intelligentsia francophone jette les bases du nationalisme quĂ©bĂ©cois au dĂ©but du XXe siĂšcle. L'Église catholique exerce une grande influence sur la sociĂ©tĂ© jusqu'Ă  la seconde moitiĂ© du XXe siĂšcle; notamment par la prise en charge des Ă©coles, pensionnats, collĂšges et hĂŽpitaux et autres institutions Ă  caractĂšre social par les communautĂ©s religieuses. AprĂšs la Grande dĂ©pression, la modernisation et la motorisation du QuĂ©bec s'accĂ©lĂšre en dĂ©pit du conservatisme social exacerbĂ© par 25 ans de duplessisme.

La RĂ©volution tranquille entraĂźne dans les annĂ©es 1960 la crĂ©ation de diffĂ©rents programmes de sĂ©curitĂ© sociale, la crĂ©ation des CĂ©geps et du rĂ©seau de l'universitĂ© du QuĂ©bec et des investissements majeurs en infrastructures. La force des mouvements syndicaux et souverainistes mĂšne Ă  l'Ă©lection du Parti quĂ©bĂ©cois en 1976 qui fait adopter la Charte de la langue française tient un premier rĂ©fĂ©rendum sur la souverainetĂ© du QuĂ©bec en mai 1980. La rĂ©cession du dĂ©but des annĂ©es 1980 marque le dĂ©but de l'usage de politiques nĂ©olibĂ©rales au sein de l'État quĂ©bĂ©cois et la ratification de l'ALÉNA entraĂźne une forte intĂ©gration du QuĂ©bec Ă  l'Ă©conomie nord-amĂ©ricaine. L'Ă©chec de l'Accord du lac Meech entraĂźne un second rĂ©fĂ©rendum sur la souverainetĂ© du QuĂ©bec en 1995. Les annĂ©es 2000 voient le dĂ©veloppement des industries de l'aĂ©ronautique et du jeu vidĂ©o. En 2011 et 2012, une commission d'enquĂȘte sur la corruption dans le monde municipal et une grĂšve Ă©tudiante majeure marquent la fin du gouvernement Jean Charest. Élu en 2018, le premier gouvernement caquiste adopte la Loi sur la laĂŻcitĂ© de l'État en continuitĂ© avec un dĂ©bat lancĂ© lors d'une Commission de consultation sur les accommodements raisonnables dans les annĂ©es 2000.

Histoire précoloniale

Selon la thĂ©orie du premier peuplement de l'AmĂ©rique, les premiers habitants sont arrivĂ©s en AmĂ©rique Ă  partir de l'Asie il y a environ 32 000 ans en franchissant un isthme, c'est-Ă -dire une Ă©troite bande de terre, qui reliait alors le Nord-Est de l'Asie au Nord-Ouest de l'AmĂ©rique, Ă  l'endroit oĂč se trouve aujourd'hui le dĂ©troit de BĂ©ring (La BĂ©ringie). Cet isthme Ă©tait alors Ă  sec Ă  la suite de la baisse du niveau des ocĂ©ans causĂ©e par l'accumulation d'eau dans les immenses glaciers qui couvraient alors une grande partie de la planĂšte.

Des sites archĂ©ologiques au Sud de la province dĂ©montrent que des groupes de chasseurs palĂ©oindiens pĂ©nĂštrent dans la vallĂ©e du Saint-Laurent au moment oĂč la mer de Champlain se retire, il y a environ 10 000 ans. Ils circulent sur le territoire avec une grande mobilitĂ© dans un environnement fort diffĂ©rent de celui d'aujourd'hui. La proximitĂ© des glaciers apporte un climat rigoureux. Le paysage vĂ©gĂ©tal ressemble beaucoup Ă  celui qu'on trouve en milieu nordique. Il semble qu'ils se dĂ©placent Ă  l'aide d'embarcations et utilisent des tentes en peau. Leurs proies prĂ©fĂ©rĂ©es sont les grands cervidĂ©s, principalement les caribous, bien que les autres mammifĂšres, de mĂȘme que le poisson, complĂštent leur alimentation.

Quelques millĂ©naires plus tard, les Autochtones de l'ArchaĂŻque Ă©tendent peu Ă  peu leurs activitĂ©s Ă  toutes les ressources animales et vĂ©gĂ©tales disponibles et vivent un nomadisme saisonnier adaptĂ© Ă  la chasse, la pĂȘche et la cueillette.

Les outils se diversifient : les Autochtones polissent leurs outils en pierre et martÚlent le cuivre natif provenant de la région du lac Supérieur. La présence de minéraux provenant du Labrador (Ramah), de Pennsylvanie et de cuivre sur des sites du Québec démontre l'étendue des échanges et des communications, qui ne cessera de s'accroßtre jusqu'à l'arrivée des Européens.

À partir de −3 000 ans, la poterie est adoptĂ©e dans la plaine laurentienne. La cueillette prend une place plus importante dans leurs activitĂ©s, la chasse et la pĂȘche n'Ă©tant cependant pas dĂ©laissĂ©es pour autant.

C'est le début de l'expérimentation de la fabrication de la poterie, principalement dans la partie sud du Québec.

C'est à cette époque que certaines populations autochtones provenant des Grands Lacs étendent leur réseau d'échanges à la région laurentienne.

Il y a environ mille ans, les premiers Inuits sont arrivĂ©s sur le territoire du QuĂ©bec et ont remplacĂ© les Tunits, peuple aujourd'hui disparu. L'immigration s'est faite peu Ă  peu, par de petits groupes comportant moins de 30 personnes.

L'agriculture apparaßt en Amérique du Nord de façon expérimentale vers le VIIIe siÚcle mais ce n'est qu'au XIVe siÚcle qu'elle est pleinement maßtrisée dans la vallée du Saint-Laurent. Les Iroquoiens du Saint-Laurent y cultivaient entre autres le maïs, la courge, le tournesol, et le haricot.

Des Vikings se sont installés en Amérique vers l'an 1000[1] et on retrouve des traces de leur présence jusqu'en 1340, principalement à Terre-Neuve.

Au dĂ©but du XVIe siĂšcle, alors que les Français entreprennent l'exploration de l'AmĂ©rique, il y a environ 30 000 Autochtones sur le territoire de ce qui deviendra la province de QuĂ©bec.

Les expĂ©ditions de pĂȘche

Des expĂ©ditions de pĂȘche exploitaient les bancs de Terre-Neuve dĂšs le XVe siĂšcle. La premiĂšre expĂ©dition française avĂ©rĂ©e date de 1508, soit seulement 16 ans aprĂšs le premier voyage de Christophe Colomb. En effet, Thomas Aubert ramĂšne quelques Autochtones en France[2]. Cet Ă©vĂ©nement confirme que dĂšs le dĂ©but du XVIe siĂšcle, des navigateurs français s'aventuraient dans le golfe du fleuve Saint-Laurent.

La prĂ©sence de pĂȘcheurs basques sera aussi attestĂ©e dans le compte-rendu des voyages de Jacques Cartier.

Le voyage de Verrazano (1524)

Ce n'est cependant qu'en 1524 qu'un voyage officiel, commandité par des marchands et par le roi de France, est organisé.

Cherchant un passage plus court vers l'Asie, Verrazano longe minutieusement la cÎte atlantique de l'Amérique du Nord de la Floride jusqu'à Terre-Neuve cherchant le passage tant convoité vers la Chine. Il rentra évidemment bredouille, mais son voyage a servi à préparer les voyages de Jacques Cartier, dix ans plus tard.

Les voyages de Jacques Cartier (1534-1542)

Portrait factice de Jacques Cartier, découvreur de la Nouvelle-France.

Le roi de France, François Ier, veut se joindre aux nations qui ont commencĂ© depuis peu Ă  explorer l'Atlantique pour y trouver un chemin vers la Chine et les Indes. Il finance donc les voyages de Jacques Cartier et le charge de trouver « certaines Ăźles et pays oĂč l'on dit qu'il se doit de trouver de grandes quantitĂ©s d'or, d'Ă©pices ainsi que de soies ». On dit que Jacques Cartier est le dĂ©couvreur du Canada parce qu'il est le premier Ă  explorer le territoire en vue de son exploitation systĂ©matique.

Lors de son premier voyage en 1534, Jacques Cartier explore le golfe du fleuve Saint-Laurent[3] mais croit que le détroit qui sépare l'ßle d'Anticosti de la péninsule de Gaspésie est une baie. Il rate donc la découverte du fleuve Saint-Laurent. Le , il plante une croix de neuf mÚtres de hauteur et revendique la baie de Gaspé au nom de la France.

Visite de Hochelaga et du Mont Royal
Plan La Terra De Hochelaga Nella Nova Francia, avec Ă  gauche, le Monte Real.

Lors de son second voyage en 1535, aprĂšs s'ĂȘtre arrĂȘtĂ© le Ă  QuĂ©bec, Cartier remonte le Saint-Laurent jusqu'Ă  Hochelaga, maintenant la ville de MontrĂ©al. Le , il est accueilli Ă  Hochelaga qu'il visite, puis il monte sur la montagne situĂ©e Ă  proximitĂ©, qu'il nomme Mont Royal.

Vingt et un ans plus tard, en 1556, la RĂ©publique de Venise, qui tout comme la France s'intĂ©ressait aux Indes, reproduit dans le 3e tome Delle Navigationi et Viaggi une illustration de la visite de Jacques Cartier Ă  Hochelaga sur le plan La Terra De Hochelaga Nella Nova Francia. Chose surprenante, une analyse de cette illustration rĂ©vĂšle que les trois collines du Mont Royal, montrĂ©es sur cette illustration, sont fidĂšlement reproduites. La visite de Hochelaga terminĂ©e, Cartier revient Ă  StadaconĂ© qu'il atteint le oĂč il passera l'hiver. Lors de son troisiĂšme voyage en 1541, Jacques Cartier, devenu subalterne de Roberval, fonde la colonie de Charlesbourg-Royal. L'annĂ©e suivante Roberval arrive Ă  Charlesbourg-Royal qu'il renomme France-Roy. Tous deux, ce sĂ©parĂ©ment, reviennent Ă  la bourgade Hochelaga alors dĂ©truite. Ils essaient de passer outre les saults[4] qui avaient jusque-lĂ  bloquĂ© l'avance dans l'intĂ©rieur des Indes occidentales.

Sans cesse attaquĂ©e par les Autochtones de StadaconĂ©, la colonie connaĂźt des moments prĂ©caires. Déçu de n'avoir trouvĂ© ni passage vers l'Asie, ni richesses, ni terres hospitaliĂšres, François Ier ne veut plus investir de sommes importantes dans une aventure d'exploration et de colonisation incertaine. Il commande le retour en France de la colonie. Les pĂȘcheurs français continuent Ă  pĂȘcher dans le golfe du Saint-Laurent et Ă  faire le commerce des fourrures avec les Autochtones mais il faudra attendre plus de 60 ans avant qu'une autre tentative de colonisation ne soit entreprise.

Samuel de Champlain et établissements préliminaires

À la suite des rĂ©sultats dĂ©cevants des voyages de Cartier oĂč l'on n'avait trouvĂ© ni mĂ©taux prĂ©cieux ni passage vers l'Asie, le gouvernement français se dĂ©sintĂ©resse du Canada. Mais certains Français (Basques, Bretons et Normands) continuent de venir dans la rĂ©gion de Terre-Neuve pour la pĂȘche Ă  la morue. Ils viennent Ă©galement pour la chasse Ă  la baleine et aux loups-marins pour l'huile qu'on en tire pour s'Ă©clairer. Contrairement Ă  ceux qui font de la morue verte, ceux qui font sĂ©cher la morue doivent passer un certain temps en AmĂ©rique avant de retourner en Europe ce qui leur permet de procĂ©der Ă  des Ă©changes avec les Autochtones qui convoitent les objets en mĂ©tal des EuropĂ©ens. C'est ainsi que le commerce des fourrures commence. Peu Ă  peu, ces Ă©changes deviennent de plus en plus importants si bien que cela ranime l'intĂ©rĂȘt pour ce coin de l'AmĂ©rique septentrionale. Ce sont les marchands qui en deviennent les principaux promoteurs et Ă  la fin du XVIe siĂšcle, on assiste aux premiĂšres tentatives d'Ă©tablissements permanents en Acadie et dans la vallĂ©e du Saint-Laurent.

Contrairement Ă  la pĂȘche, le commerce des fourrures nĂ©cessite une prĂ©sence continue sur le territoire pour nouer des relations profitables avec les Autochtones qui font l'essentiel du travail dans cette activitĂ© commerciale. Mais des Ă©tablissements permanents coĂ»tent cher. C'est ainsi que l'État français a pris assez tĂŽt l'habitude d'accorder des privilĂšges Ă  des sociĂ©tĂ©s commerciales pour qu'elles financent ces premiĂšres installations. Habituellement, le roi accorde le monopole du commerce Ă  ceux qui s'engagent Ă  dĂ©frayer les coĂ»ts relatifs Ă  de tels Ă©tablissements. Cependant, cela ne fait pas l'unanimitĂ© et certains prĂ©fĂšrent que ce commerce demeure libre.

En 1598, on installe un groupe de colons sur l'Île de Sable au large de la Nouvelle-Écosse actuelle. C'est un Ă©chec lamentable. En 1600, Pierre de Chauvin fonde un poste de traite Ă  Tadoussac, au confluent du fleuve Saint-Laurent et de la riviĂšre Saguenay. Le premier hiver dĂ©cime la presque totalitĂ© de la petite population. C'est pour s'Ă©loigner de ce lieu inhospitalier qu'en 1604, le huguenot Pierre Dugua de Mons, qui obtient le monopole du commerce des fourrures, tente d'Ă©tablir une colonie d'abord Ă  l'embouchure du fleuve Sainte-Croix. Il est accompagnĂ© de Samuel de Champlain et de Jean de Poutrincourt. Cette colonie ne survivra pas en raison de la rudesse de l'hiver et du manque d'eau douce. La moitiĂ© des colons meurt Ă  l'hiver de 1605 et il est dĂ©cidĂ© de relocaliser le groupe Ă  un autre endroit. Cet autre endroit, cette fois situĂ© prĂšs de la Baie de Fundy, sera nommĂ© Port-Royal (aujourd'hui la rĂ©gion d'Annapolis Royal, Nouvelle-Écosse). Cette Ă©tape de la colonisation se traduit par l'Ă©tablissement de la premiĂšre colonie française en Nouvelle-France, qui deviendra l'Acadie et donnera naissance Ă  son peuple, les Acadiens.

Faute de finances, les colons quitteront les lieux en 1607. En 1610, Jean de Poutrincourt, deuxiĂšme gouverneur de l'Acadie, avec son fils de 19 ans, Charles de Biencourt, Claude de Saint-Étienne de la Tour et son fils de 14 ans Charles de Saint-Étienne de la Tour, un prĂȘtre catholique et d'autres colons français se sont rendus Ă  l'habitation.

En 1613, l'habitation a été attaquée par des colons anglais de la Virginie. Plusieurs colons français sont tués et d'autres sont enlevés. Le fort et les marchandises sont détruits. Biencourt, qui était en France pour recueillir des approvisionnements, est retourné à Port-Royal le printemps suivant. Il fut obligé de retourner en France avec les colons survivants. Charles de Biencourt et Charles de la Tour sont restés parmi les Micmacs, s'engageant dans l'industrie de la fourrure. Biencourt est mort en 1623.

Pendant cette période, Samuel de Champlain qui est à l'emploi de De Monts, en profite pour faire plusieurs explorations. Il explore la cÎte atlantique entre l'Acadie et le Cap Cod puis il remonte le Saint-Laurent jusqu'à l'emplacement actuel de Montréal. En remontant le fleuve, il a remarqué un endroit que les Iroquoiens du temps de Jacques Cartier nommaient Stadaconé et que les Montagnais de son temps appelaient «Kébec». Le grand explorateur avait pris bonne note des avantages de ce lieu.

Colonisation française (1608-1763)

La fondation de la ville de Québec (1608)

Champlain, fondateur de la Nouvelle-France, tel qu'on le reprĂ©sente traditionnellement. Cependant, il n'existe pas de vrai portrait de Champlain, cette image serait celle d'un contrĂŽleur des finances peu scrupuleux, Particelli d'Émery.

La colonisation de la Nouvelle-France commence donc vĂ©ritablement par la fondation de la ville de QuĂ©bec par Samuel de Champlain en 1608. Champlain, qui fut d'abord impliquĂ© dans des activitĂ©s de pĂȘche dans le golfe du fleuve Saint-Laurent, comprend vite l'intĂ©rĂȘt du commerce des fourrures. Pour faciliter ce commerce, il rencontre un groupe important d'Innus au poste de traite saisonnier de Tadoussac en 1603 oĂč il scelle une alliance avec cette nation. Il rĂ©alise l'importance de disposer d'un Ă©tablissement permanent. La ville de QuĂ©bec devient donc le premier vĂ©ritable Ă©tablissement français permanent en AmĂ©rique. Ce site qu'il avait remarquĂ© en 1603 comporte selon lui de nombreux avantages. D'abord, il y a abondance de fourrures. Ensuite, cela semble un endroit facile Ă  dĂ©fendre Ă  cause de la hauteur du Cap Diamant. De plus, le fleuve Ă©tant Ă©troit, on peut en contrĂŽler l'accĂšs plus facilement. Enfin, il y a beaucoup de terres fertiles. La colonisation commence donc mais elle progresse Ă  pas de tortue. Il y Ă©rige donc l'Habitation.

La colonisation progresse lentement parce que le systÚme mis en place n'est pas adéquat. Le gouvernement français ne veut pas vraiment investir. Il confie donc le développement de sa colonie à une compagnie de commerce en lui octroyant l'exclusivité de la traite des fourrures. En retour, cette compagnie doit peupler le territoire. Pour une compagnie, il n'est pas trÚs tentant d'utiliser une bonne partie de ses profits pour créer une colonie pour le roi. Pour cette raison, les compagnies qui se sont succédé ont toujours négligé leurs obligations et la Nouvelle-France ne se développait pas. Champlain met beaucoup d'énergie pour faire connaßtre tout le potentiel du nouveau territoire. En 1618, il soumet un mémoire aux autorités françaises dans lequel il fait l'inventaire de toutes les ressources de la colonie. Ses efforts finissent par porter fruit et le Cardinal de Richelieu s'intéresse à la Nouvelle-France. Une nouvelle compagnie voit le jour. C'est la Compagnie des Cent-Associés, la plus sérieuse tentative de développement à prendre place dans cette Nouvelle-France de 1627.

RĂ©gime des compagnies Ă  charte (1627-1662)

En 1627, le cardinal de Richelieu confie Ă  la Compagnie des Cent-AssociĂ©s un monopole sur la traite des fourrures en Ă©change d'un engagement Ă  coloniser la Nouvelle-France. La tentative est importante. Chaque actionnaire investit 3 000 livres ce qui fait un capital de dĂ©part intĂ©ressant de 300 000 livres[5]. La compagnie obtient le monopole pour 15 ans et pendant ces annĂ©es, elle doit amener 4 000 personnes dans la colonie. Le roi de France tente donc encore de coloniser la Nouvelle-France sans y investir d'argent. La nouvelle compagnie semble bien intentionnĂ©e. En effet, dĂšs 1629, elle amĂšne 400 personnes mais la flotte tombe aux mains des Anglais dans le golfe Saint-Laurent. MalgrĂ© ces difficultĂ©s, il convient de saluer le rĂŽle de Louis HĂ©bert (colon) installĂ© dĂšs 1617 Ă  QuĂ©bec ainsi que la colonisation pionniĂšre organisĂ©e par Robert Giffard. ArrivĂ© en 1634 avec un premier groupe de migrants originaires de Mortagne-au-Perche, de Tourouvre et des environs, ce dernier peut ĂȘtre considĂ©rĂ© comme l'initiateur de l'implantation de colons venus du Perche. Quoique peu nombreux, ceux-ci seront parmi les tout premiers Ă  dĂ©fricher et Ă  gĂ©nĂ©rer une activitĂ© agricole rĂ©guliĂšre sur les rives du Saint-Laurent. La ville de Trois-RiviĂšres est fondĂ©e en 1634. La Compagnie des Cent-AssociĂ©s cĂšde son monopole Ă  la Compagnie des Habitants en 1645.

L'expansion territoriale de la Nouvelle-France vers l'Ouest est marquĂ©e par une rĂ©sistance des Iroquois, principalement la nation Mohawk. L'Ă©tablissement de forts toujours plus en amont dans la vallĂ©e du Saint-Laurent au cours des annĂ©es 1640 entraĂźne de nombreuses escarmouches entre Français et Mohawks. La construction en 1642 du Fort Richelieu (aujourd'hui Sorel-Tracy) Ă  l'embouchure de la RiviĂšre Richelieu entrave sĂ©vĂšrement l'accĂšs des Mohawks au territoire[6]. La mĂȘme annĂ©e, Ville-Marie (aujourd'hui MontrĂ©al) est Ă©tabli par Paul de Chomedey, sieur de Maisonneuve et Jeanne Mance pour convertir les peuples autochtones de la rĂ©gion au christianisme.

La colonie reste trĂšs peu peuplĂ©e et, en 1662, 54 ans aprĂšs la fondation de la ville de QuĂ©bec, la colonie ne compte que 3 000 personnes. Les causes de la lenteur de la colonisation sont :

  • l'absence d'une force de rĂ©pulsion en France qui encouragerait certains Français Ă  Ă©migrer ;
  • la faible force d'attraction de la colonie Ă  cause du climat rigoureux du QuĂ©bec ;
  • l'hostilitĂ© iroquoise (Cinq-Nations) ;
  • une Ă©conomie basĂ©e sur une seule ressource, qui ne demande pas beaucoup de main-d'Ɠuvre.
  • l'impossibilitĂ© pour des milliers d'huguenots de s'Ă©tablir sur les terres françaises d'AmĂ©rique, surtout aprĂšs la rĂ©vocation de l'Ă©dit de Nantes alors que ceux traversent l'Atlantique se sont plutĂŽt installĂ©s en Nouvelle-Angleterre, par le biais des Pays-Bas ou de la Grande-Bretagne.

Le Gouvernement royal (1663-1760)

Carte de la Nouvelle-France dédiée à Colbert (XVIIe siÚcle).

En 1663, le roi de France, Louis XIV, constatant l'Ă©chec du systĂšme des compagnies, prend en main le dĂ©veloppement de la Nouvelle-France en faisant une colonie royale. Le roi Soleil, de concert avec son ministre de la Marine Jean-Baptiste Colbert, met en place de nouvelles structures administratives. Il conserve le poste de gouverneur tout en prĂ©cisant son rĂŽle, et introduit une nouvelle fonction, celle de l'intendant. À ce poste, le roi nomme Jean Talon. Enfin, il met sur pied le Conseil souverain aussi appelĂ© le Conseil supĂ©rieur.

MĂȘme si en dĂ©pit de toutes ces mesures, la colonisation progresse, somme toute, assez peu, le visage de la Nouvelle-France est complĂštement modifiĂ© pendant toutes ces annĂ©es. En effet, grĂące aux politiques de Jean Talon, la population commence Ă  augmenter de façon apprĂ©ciable. Évidemment, cela n'a rien Ă  voir avec l'accroissement dĂ©mographique extraordinaire des colonies anglaises du sud qui menacent de plus en plus l'existence de la colonie française. Au recensement de 1666, on dĂ©nombre 3 215 personnes. En 1760, on retrouve environ 70 000 personnes en Nouvelle-France. Pendant toutes ces annĂ©es, la colonie reçoit un peu moins de 10 000 immigrants ce qui veut dire que l'essentiel de l'accroissement dĂ©mographique est dĂ» Ă  la natalitĂ©.

Le commerce des fourrures demeure toujours le moteur de l'activitĂ© Ă©conomique mĂȘme si les intendants s'Ă©vertuent Ă  tenter de diversifier l'Ă©conomie. Cette activitĂ© amĂšne les Canadiens et les Français Ă  explorer le centre de l'AmĂ©rique du Nord jusqu'au golfe du Mexique et Ă  y construire des postes de commerce des fourrures et des places fortifiĂ©es pour dĂ©fendre les postes de commerce des fourrures. À la suite de ces explorations, le territoire de la Nouvelle-France atteint son expansion maximale. Il est de dimension continentale. Il est beaucoup plus vaste que le territoire des colonies britanniques qui sont situĂ©es le long de la cĂŽte Est de l'AmĂ©rique du Nord. Cependant, comme le territoire français est peu peuplĂ©, il est donc trĂšs vulnĂ©rable.

Pendant toutes ces annĂ©es Ă©galement, il y eut quatre conflits entre les colonies anglaises et la colonie française. Ce fut d'abord la guerre de la Ligue d'Augsbourg en Europe ou PremiĂšre Guerre intercoloniale en AmĂ©rique (1689-1697). Ensuite, ce fut la guerre de Succession d'Espagne, la DeuxiĂšme Guerre intercoloniale (1702-1713). À la suite de cette guerre dĂ©sastreuse pour la Nouvelle-France, la France entreprit la construction de la forteresse de Louisbourg sur l'Île Royale. Puis il y eut la guerre de Succession d'Autriche, la TroisiĂšme Guerre intercoloniale (1744-1748). Enfin, ce fut la guerre de Sept Ans (1756-1763), mieux connue au QuĂ©bec comme Ă©tant la guerre de la ConquĂȘte (1754-1760), qui consacre la dĂ©faite dĂ©finitive de la Nouvelle-France.

ConquĂȘte britannique et dĂ©veloppement des institutions politiques (1763-1867)

Le passage Ă  l'empire britannique (1763)

Reddition de Montréal, le .

De nombreux affrontements ont eu lieu entre la Nouvelle-France et les colonies britanniques tout au long de la pĂ©riode de colonisation. À la suite de certains de ces affrontements, la Nouvelle-France doit cĂ©der aux colonies britanniques ou aux colonies espagnoles du Mexique certains de ses territoires.

L'affrontement final se produit au milieu de XVIIIe siĂšcle alors que les colonies britanniques veulent s'Ă©tendre sur l'espace occupĂ© par les colonies françaises et dĂ©sirent se dĂ©barrasser d'un de leurs concurrents dans le Nord de l'AmĂ©rique. À ce moment, la Nouvelle-France compte 60 000 habitants alors que les colonies britanniques en comptent 2 000 000. Les forces en prĂ©sence sont donc trĂšs inĂ©gales ! De plus, la Grande-Bretagne jouit d'une suprĂ©matie navale incontestĂ©e, ce qui lui permet de supporter efficacement ses colonies au besoin. AprĂšs de courts affrontements, les coloniaux britanniques s'emparent de QuĂ©bec en 1759 et de MontrĂ©al en 1760. La colonie française est vaincue.

La défaite était inévitable étant donné la disparité des forces en présence. Le succÚs du peuplement des colonies britanniques s'explique par deux conditions qui ont cruellement fait défaut à la colonie française. D'une part, l'existence d'une force de répulsion dans la métropole : les persécutions religieuses en Grande-Bretagne encouragent certains citoyens britanniques à chercher une vie meilleure en Amérique ; d'autre part, l'attrait de terres cultivables combinées à une température clémente dans les colonies britanniques.

La dĂ©faite française est officialisĂ©e par le traitĂ© de Paris en 1763[7]. À ce moment, la France doit choisir entre sa colonie de Nouvelle-France ou ses colonies des Antilles. La France opte pour les Antilles Ă  cause de la prĂ©sence de ses ressources naturelles facilement exploitables et aussi parce qu'elle sait qu'elle est incapable de dĂ©fendre son immense colonie de Nouvelle-France face aux prospĂšres colonies britanniques.

La Proclamation royale (1763)

AprĂšs la conquĂȘte, l'autoritĂ© britannique veut prendre le contrĂŽle total de la colonie et assimiler les colons franco-catholiques. La Proclamation royale de 1763, qui forme la colonie britannique de la Province of Quebec, met en place les conditions lĂ©gislatives et rĂ©glementaires pour atteindre ces objectifs.

Cette loi britannique vise à donner un visage anglais à la Province de Québec. Ainsi, on décide d'imposer les lois anglaises aussi bien au civil qu'au criminel. Le gouverneur Murray doit aussi exiger le serment du test qui consiste à renier la religion catholique pour tous ceux qui veulent un poste dans l'administration. Cette mesure vise à écarter les anciens sujets français de tout poste officiel. Il doit de plus encourager l'immigration britannique et favoriser la création d'écoles protestantes.

Toutefois, dans les années suivantes, deux conditions viennent contrecarrer les plans des Britanniques :

  • le peu d'attrait qu'exerce la colonie sur les colons britanniques potentiels, prĂ©fĂ©rant s'installer dans les anciennes colonies britanniques oĂč ils retrouvent leur langue et leur culture (et un climat plus clĂ©ment !). Ainsi, dans les annĂ©es qui suivent, la population de cette nouvelle colonie britannique est formĂ©e d'au-delĂ  de 95 % de Canadiens francophones.
  • les turbulences dans les anciennes colonies britanniques causĂ©es par
    • les nouvelles taxes imposĂ©es par la Grande-Bretagne pour payer les dĂ©penses de la guerre de Sept Ans et
    • surtout la façon autoritaire de gouverner de Londres ; les anciennes colonies britanniques ont pris l'habitude de gĂ©rer leur environnement politique par discussion et consultation et acceptent mal la façon unilatĂ©rale de gĂ©rer de Londres.

L'Acte de Québec (1774)

L'Acte de QuĂ©bec d' survient quatre mois aprĂšs le Boston Tea Party de . Il est une rĂ©ponse Ă  l'insurrection qui commence. Il n'y a au QuĂ©bec que 2 000 Britanniques noyĂ©s parmi 90 000 francophones. Pour prĂ©venir un soulĂšvement des francophones et surtout pour que les francophones ne soient pas tentĂ©s de s'allier avec les rebelles amĂ©ricains qui contestent de plus en plus l'autoritĂ© britannique, la Grande-Bretagne vote l'Acte de QuĂ©bec qui[8] :

  • redonne aux Canadiens-français le code civil français, s'appliquant pour des questions de propriĂ©tĂ©s seigneuriales, de testaments et d'hĂ©ritages ;
  • leur garantit le droit de pratiquer leur religion et abolit le serment du test qui excluait les catholiques des postes de dĂ©putĂ©, de juge et de fonctionnaire ;
  • reconnaĂźt un rĂŽle Ă  l'Ă©lite catholique et donne le droit au clergĂ© de percevoir la dĂźme ;
  • agrandit le territoire de la province de QuĂ©bec en lui annexant les rĂ©gions des Grands Lacs, de l'Ohio et du Labrador.

La Grande-Bretagne gagne son pari. Dans les treize colonies, ces mesures attisent la colĂšre des colons, mais, dans la province de QuĂ©bec, le clergĂ© et les seigneurs prennent parti pour la Grande-Bretagne. Lorsque les rebelles envahissent la province de QuĂ©bec en 1775, certains se battent mĂȘme au cĂŽtĂ© de la couronne britannique.

La guerre d'indépendance américaine et la création du Canada anglais

Plusieurs Canadiens-français participent à la victoire américaine en particulier Clément Gosselin et Louis-Philippe de Vaudreuil. Selon Baby, Tashereau et Williams 747 miliciens supportent activement l'armée américaine et quelques-uns participent à la Bataille de Saratoga en 1777 (François Monty, Jacques Monty, André Pépin) et à la Bataille de Yorktown en 1781.

La dĂ©faite britannique devant La Fayette et Washington permet l'indĂ©pendance amĂ©ricaine. Celle-ci amĂšne 50 000 loyalistes au Canada, sur une population de 90 000 francophones. C'est la crĂ©ation du Canada anglais.

L'Acte constitutionnel (1791)

Le Haut et le Bas-Canada en 1791 aprĂšs l'Acte constitutionnel.

AprĂšs la dĂ©faite britannique lors de la guerre d'IndĂ©pendance des États-Unis, environ 7 000 colons fidĂšles Ă  la couronne britannique, on les appelle les loyalistes, se rĂ©fugient au QuĂ©bec. Rapidement ces anglophones se sentent mal Ă  l'aise dans la majoritĂ© francophone et font pression pour que les autoritĂ©s britanniques les favorisent et diminuent les avantages qui ont Ă©tĂ© concĂ©dĂ©s aux francophones par l'Acte de QuĂ©bec de 1774.

En 1791, pour plaire aux loyalistes, les autoritĂ©s britanniques adoptent l'Acte constitutionnel qui scinde le Canada en deux entitĂ©s politiques : le Bas-Canada majoritairement francophone et le Haut-Canada (Ă  l'ouest de la riviĂšre des Outaouais) oĂč les anglophones sont majoritaires. Cette constitution introduit quelques Ă©lĂ©ments de dĂ©mocratie dans la politique de la colonie car certaines fonctions politiques sont maintenant Ă©lectives mais le contrĂŽle final des dĂ©cisions politiques reste aux mains de la mĂ©tropole. Il n'y a donc pas de responsabilitĂ© ministĂ©rielle qui rendrait le gouvernement responsable devant ses Ă©lecteurs.

La rébellion des patriotes (1837-1838)

Louis-Joseph Papineau, le chef du Parti patriote.

AprĂšs un certain temps, les Canadiens-français ne sont pas satisfaits des pouvoirs limitĂ©s qui leur sont confĂ©rĂ©s par l'Acte constitutionnel de 1791. Les Ă©vĂ©nements se prĂ©cipitent Ă  partir de 1834. Le parti patriote, dirigĂ© par Louis-Joseph Papineau, fait voter Ă  l'assemblĂ©e du Bas-Canada les 92 rĂ©solutions, un document qui rĂ©sume tous les griefs accumulĂ©s par les Canadiens-français depuis 1791. Le document est envoyĂ© Ă  Londres en passant par-dessus la tĂȘte des administrateurs britanniques. Londres ne rĂ©pond qu'en 1837 et la rĂ©ponse est non seulement nĂ©gative mais elle contient un renforcement des pouvoirs du gouverneur au dĂ©triment du Parlement.

Un mouvement de contestation prend forme. Le mouvement est loin d'ĂȘtre unanime et plusieurs modĂ©rĂ©s, dont Louis-Joseph Papineau, s'opposent Ă  l'utilisation de la force pour faire avancer la situation. En 1837 et 1838, le mouvement se transforme tout de mĂȘme en une rĂ©bellion armĂ©e appelĂ©e la rĂ©bellion des patriotes. Cette rĂ©bellion est rĂ©primĂ©e violemment par l'armĂ©e britannique. Ce mouvement n'est pas uniquement un mouvement nationaliste canadien-français mais il s'inscrit dans un ensemble plus vaste qui secoue l'Europe depuis la RĂ©volution française et qui rĂ©clame l'autodĂ©termination des peuples et plus de dĂ©mocratie. Des rĂ©voltes semblables ont d'ailleurs lieu, Ă  la mĂȘme Ă©poque, dans la communautĂ© anglophone du Haut-Canada et elles sont aussi rĂ©primĂ©es violemment par l'armĂ©e britannique.

L'Acte d'Union (1840)

En 1840, en rĂ©action Ă  la rĂ©bellion des patriotes et Ă  la suite du rapport Durham qui concluait que les troubles du Bas-Canada Ă©taient principalement dus Ă  la prĂ©sence de deux groupes culturels dans la rĂ©gion, les autoritĂ©s britanniques adoptent l'Acte d'Union qui unit les deux Canadas[9] et instaurent des mesures pour assimiler les Canadiens-français. Tous les dĂ©putĂ©s siĂ©geant Ă  la mĂȘme chambre d'assemblĂ©e, les Canadiens-français sont maintenant minoritaires Ă  la chambre et, encore une fois, les francophones semblent condamnĂ©s Ă  l'assimilation.

Lors des élections de 1841, le leader des Canadiens-français à la chambre, Louis-Hippolyte La Fontaine, fait alliance avec le leader d'un groupe de réformistes anglophones, Robert Baldwin. Les Canadiens-français s'engagent à appuyer les projets de développement économique des réformistes anglophones. En retour, les anglophones soutiendront les Canadiens-français dans leurs efforts pour conserver leurs prérogatives politiques et culturelles. La coalition remporte les élections. Les francophones viennent une autre fois d'assurer leur survie.

En 1848, cette mĂȘme coalition obtient de Londres l'implantation du concept de « gouvernement responsable » qui rend le gouvernement responsable devant ses Ă©lecteurs. La colonie a maintenant plus d'indĂ©pendance vis-Ă -vis de la mĂ©tropole et elle a plus d'outils pour assurer son destin.

Le contexte socio-Ă©conomique

Sous le régime français, les revenus des colons étaient principalement agricoles avec un revenu d'appoint provenant de la traite des fourrures. Sous le régime britannique, cette situation reste stable jusque vers 1830. Vers 1830, la situation économique se dégrade. En effet, les terres manquent dans la vallée du Saint-Laurent à cause de l'augmentation du nombre de familles ; elles sont donc divisées, ce qui diminue d'autant les revenus des colons. De plus, le sol s'épuise, en raison de cultures trop intensives. Enfin, les fourrures commencent à manquer.

La situation économique s'aggrave encore en 1842 et en 1846 lorsque le Royaume-Uni retire les protections tarifaires dont jouissaient respectivement le bois et le blé canadiens pour tendre plutÎt vers le libre-échange.

Cette situation crée un contexte économique trÚs difficile dans la colonie. Les stratégies utilisées pour faire face à cette situation sont :

  • la diversification des cultures ;
  • la colonisation de nouvelles rĂ©gions comme les Cantons de l'Est, l'Outaouais, le Saguenay et la GaspĂ©sie, mais ces terres sont pauvres et Ă©loignĂ©es des grands centres ;
  • le basculement de la traite des fourrures comme revenu d'appoint vers une industrie forestiĂšre, d'autant plus que le Royaume-Uni a besoin du bois canadien pour remplacer le bois qu'elle n'obtient plus de la rĂ©gion de la mer Baltique Ă  la suite du blocus de NapolĂ©on ;
  • la migration temporaire ou permanente vers les États-Unis[10] - [11];
  • l'exode des campagnes vers les villes oĂč l'industrie commence timidement Ă  se dĂ©velopper, en particulier les industries du bois et de la construction navale.
Le Canada et le territoire du Québec.

Confédération et industrialisation (1867-1930)

Dans les années 1860, les Canadiens doivent régler de graves problÚmes :

  • sur le plan politique, l'Acte d'Union de 1840 n'a pas portĂ© les fruits espĂ©rĂ©s :
    • les Canadiens-français ne sont toujours pas assimilĂ©s, ils sont mĂȘme de plus en plus nombreux ;
    • de plus, le systĂšme politique ne produit que des gouvernements minoritaires qui fonctionnent pĂ©niblement au moyen d'alliances qui ne satisfont ni les francophones ni les anglophones ;
  • sur le plan Ă©conomique :
    • le Canada a pris un retard industriel important par rapport aux États-Unis Ă  cause de la politique colonialiste du Royaume-Uni qui favorisait la production de biens manufacturĂ©s dans la mĂ©tropole ;
    • le Canada a perdu son accĂšs privilĂ©giĂ© au marchĂ© britannique avec la suppression des tarifs douaniers prĂ©fĂ©rentiels prĂ©alablement accordĂ©s par le Royaume-Uni aux matiĂšres premiĂšres canadiennes ;
    • le Canada n'est pas assez populeux pour favoriser l'Ă©mergence d'une Ă©conomie efficace dans le contexte nord-amĂ©ricain oĂč les États-Unis jouissent Ă  l'interne d'un marchĂ© trĂšs important.

La solution adoptĂ©e est de scinder le Canada en deux provinces oĂč les anglophones et les francophones sont majoritaires dans leur province respective (l'Ontario et le QuĂ©bec) et de joindre ces deux provinces Ă  deux autres colonies britanniques, le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse. C'est la naissance d'un nouveau Canada qui est officialisĂ©e par l'Acte de l'AmĂ©rique du Nord britannique en 1867. Tout le monde trouve une certaine satisfaction dans cet arrangement :

  • les anglophones obtiennent une majoritĂ© dans leurs provinces et au niveau du Canada ;
  • les francophones obtiennent une majoritĂ© dans leur province avec les outils nĂ©cessaires pour protĂ©ger leur langue et leur culture ;
  • le nouveau Canada crĂ©e un environnement Ă©conomique plus grand oĂč tous pourraient dĂ©velopper leur Ă©conomie ; ce dĂ©veloppement Ă©conomique est d'ailleurs favorisĂ© et accĂ©lĂ©rĂ© par la construction d'un chemin de fer qui relie les provinces d'est en ouest.

AprÚs 1867, le Canada est devenu indépendant mais n'est pas complÚtement souverain au niveau diplomatique. Il contrÎle ses finances, sa politique intérieure, son commerce et son armée mais la gestion des affaires étrangÚres, et par conséquent la diplomatie est encore sous le contrÎle du Royaume-Uni.

La Politique nationale et l'essor industriel du Québec (1879-1896)

La crise économique mondiale de 1873 ébranle fortement les économies canadienne et québécoise. La population se met à douter de l'efficacité du Canada pour assurer son développement économique.

En 1879, pour relancer l'économie et faire taire les critiques, le gouvernement fédéral, dominé par les conservateurs de John A. Macdonald, adopte la Politique nationale. Les principaux aspects de cette politique sont :

  • l'instauration de tarifs douaniers de 30 Ă  35 % sur les produits manufacturiers pour favoriser l'industrialisation du Canada ;
  • l'extension du chemin de fer vers les villes secondaires et vers l'ouest du pays pour faciliter les Ă©changes commerciaux ;
  • le support Ă  l'immigration pour dĂ©velopper l'ouest du pays et augmenter la taille de l'Ă©conomie canadienne.

La Politique nationale a des effets positifs qui se manifestent par :

  • un important dĂ©veloppement industriel au Canada;
  • l'augmentation de la productivitĂ© agricole et l'exode des habitants vers les centres urbains, en particulier MontrĂ©al oĂč se concentrent les industries quĂ©bĂ©coises ;
  • l'apparition d'une bourgeoisie industrielle et de banques canadiennes ;
  • le dĂ©veloppement de mouvements syndicaux visant Ă  amĂ©liorer les conditions des travailleurs qui Ɠuvrent souvent dans des environnements non sĂ©curitaires pour des salaires misĂ©rables.

Honoré Mercier (au pouvoir de 1887 à 1891) est le premier premier ministre du Québec à afficher un nationalisme québécois et à revendiquer que le fédéral ne s'immisce pas dans les champs de juridiction provinciale.

La consolidation industrielle du Québec (1896-1918)

Durant cette période, le Québec commence à exploiter ses abondantes ressources naturelles.

Alors que la période précédente a vu le développement d'une industrie légÚre requérant peu de capitaux et principalement destinée à la consommation nationale, la période 1896-1918 voit se développer des industries requérant beaucoup de capitaux et axées principalement vers l'exportation: hydroélectricité, pùtes et papier, aluminium et produits chimiques.

Comme le Québec ne dispose pas des capitaux nécessaires pour développer ces industries, il doit mettre en place un environnement législatif favorisant les investissements étrangers et il doit accepter que son économie soit partiellement contrÎlée par des étrangers. Les investisseurs qui fournissent les capitaux à l'industrie québécoise sont majoritairement britanniques dans un premier temps, puis américains à partir de 1914.

Carte du Québec en 1912.

Cette période se caractérise par :

  • un fort exode des campagnes vers les villes ;
  • une forte immigration en continuitĂ© avec la direction de la Politique nationale adoptĂ©e en 1879 : l'immigration vient principalement du Royaume-Uni mais aussi d'Italie, de GrĂšce et de Pologne ;
  • l'Ă©migration vers les États-Unis diminue car les gens peuvent maintenant trouver des emplois dans les usines nouvellement installĂ©es ;
  • le mouvement syndical prend de la force grĂące Ă  la bonne santĂ© de l'Ă©conomie mais le mouvement syndical ne s'intĂ©resse encore qu'aux travailleurs spĂ©cialisĂ©s ; les travailleurs non spĂ©cialisĂ©s sont trop faciles Ă  remplacer donc ils n'ont aucun pouvoir de nĂ©gociations ;

Un nationalisme canadien puis canadien-français se développe autour de Henri Bourassa. Dans un premier temps, Henri Bourassa prÎne un nationalisme canadien qui vise l'émancipation du Canada de l'ingérence britannique. Il faut se rappeler que le Canada créé en 1867 n'est pas complÚtement souverain. En particulier, le Royaume-Uni possÚde encore un droit de regard sur la politique étrangÚre canadienne. C'est donc le Royaume-Uni qui décide de l'entrée en guerre du Canada en 1914. C'est contre cette ingérence du Royaume-Uni sur le Canada qu'Henri Bourassa s'insurge.

Durant cette période, Henri Bourassa croit que les Canadiens francophones et anglophones peuvent s'entendre harmonieusement à l'intérieur du Canada. AprÚs certains accrochages politiques entre francophones et anglophones (comme une loi visant à restreindre l'usage du français en Ontario et surtout la conscription durant la PremiÚre Guerre mondiale), Henri Bourassa en vient à prÎner un nationalisme canadien-français et il devient un ardent défenseur des droits des canadiens francophones. Les différences d'opinions des francophones et des anglophones au sujet de la conscription a fait ressortir de façon dramatique les différences d'opinions politiques entre les deux groupes linguistiques canadiens.

Le nationalisme canadien-français d'Henri Bourrassa se transformera en nationalisme québécois au cours des décennies suivantes.

La suite de la consolidation industrielle (1919-1928)

L'exploitation miniĂšre s'ajoute aux secteurs industriels qui sont apparus durant la pĂ©riode prĂ©cĂ©dente. Le Royaume-Uni Ă©tant occupĂ© Ă  sa reconstruction, il ne peut plus financer l'industrialisation du QuĂ©bec. Ce sont maintenant les États-Unis qui fournissent les capitaux nĂ©cessaires Ă  l'industrialisation de la province.

AprĂšs la guerre, le Canada entre en rĂ©cession. Comme l'Ă©conomie des États-Unis est peu touchĂ©e par la rĂ©cession, 130 000 QuĂ©bĂ©cois Ă©migrent vers les États-Unis pour trouver des emplois qui n'existent pas au QuĂ©bec. Cet exode se tarit en 1925-1926 Ă  la faveur d'une amĂ©lioration de l'Ă©conomie quĂ©bĂ©coise.

Sur le plan idéologique, deux tendances s'affrontent :

  • le libĂ©ralisme incarnĂ© par le premier ministre provincial de l'Ă©poque Louis-Alexandre Taschereau; le libĂ©ralisme prĂŽne que le progrĂšs matĂ©riel est bon pour la sociĂ©tĂ© et que le progrĂšs matĂ©riel passe par le dĂ©veloppement Ă©conomique et en particulier le dĂ©veloppement industriel; le Parti libĂ©ral, les industriels et les gens d'affaires dĂ©fendent ce point de vue;
  • le clĂ©rico-nationalisme incarnĂ© par l'abbĂ© Lionel Groulx; le clĂ©rico-nationalisme prĂŽne l'importance de (1) la famille qui distribue les rĂŽles et contrĂŽle l'Ă©ducation, (2) la religion catholique qui dĂ©finit les valeurs et (3) l'agriculture qui doit ĂȘtre le fondement de l'Ă©conomie en opposition Ă  l'industrialisation et l'urbanisation; certains des promoteurs de cette idĂ©ologie, par exemple Olivar Asselin et Édouard Montpetit, reconnaissent tout de mĂȘme une certaine valeur Ă  une industrialisation modĂ©rĂ©e.

La décennie 1920 est caractérisée par l'urbanisation, la prospérité, l'enrichissement et l'augmentation de la consommation de produits manufacturés. Cette période de croissance économique se termine abruptement par la Grande Dépression de 1929.

Grande dépression et duplessisme (1930-1960)

La grande dépression

La Grande Dépression de 1929 se fait cruellement sentir au Québec comme dans toutes les autres régions industrialisées. De 1929 à 1933 (au plus fort de la dépression), le chÎmage passe de 3 % à 25 % et les salaires chutent de 40 %.

En 1931, sans tambour ni trompette, le Canada acquiert sa pleine souverainetĂ© par le statut de Westminster et devient officiellement maĂźtre de sa politique extĂ©rieure qui Ă©tait jusque-lĂ  aux mains du Royaume-Uni (qui, thĂ©oriquement, ne s'interfĂ©rait plus depuis plusieurs annĂ©es puisque le DĂ©partement des Affaires Ă©trangĂšres a Ă©tĂ© crĂ©Ă© en 1909). MalgrĂ© son indĂ©pendance acquise en 1867 et sa pleine souverainetĂ© en 1931, le Canada est tout de mĂȘme lent Ă  s'Ă©manciper des symboles de son passĂ© colonial. Par exemple, aprĂšs 1931, le Canada conserve la citoyennetĂ© et l'hymne national britannique. Ces vestiges du passĂ© colonial ne sont remplacĂ©s par des contreparties canadiennes qu'en 1939 officieusement pour l'hymne national (et officiellement en 1980), et en 1947 pour la citoyennetĂ©. Il va sans dire que les QuĂ©bĂ©cois francophones n'Ă©taient pas Ă  l'aise avec ces vestiges du passĂ© colonial et ce sont eux qui ont initiĂ© les dĂ©bats qui conduisirent le Canada Ă  s'Ă©loigner graduellement des attributs britanniques.

Durant les années 1930, le nationalisme canadien-français qui avait été promu par Henri Bourrassa se transforme graduellement en nationalisme québécois alors que les Québécois constatent l'assimilation des Canadiens-français dans les autres provinces. Ils en tirent la conclusion que seul leur gouvernement provincial peut les protéger de l'assimilation. De plus, le nationalisme québécois est renforcé par la dépression car ils constatent que le gouvernement auquel ils s'identifient le plus, le gouvernement provincial, a trÚs peu de pouvoirs et ne dispose pas des moyens nécessaires pour réagir à la dépression.

La dĂ©pression ne se rĂ©sorbe qu'avec le dĂ©but de la Seconde Guerre mondiale. La guerre gĂ©nĂšre une demande quasi illimitĂ©e pour des vivres, des vĂȘtements, des armes et des munitions. La prospĂ©ritĂ© revient, le chĂŽmage disparaĂźt et les salaires augmentent.

La guerre augmente cependant le clivage entre Canadiens-anglais et les Canadiens-français. Les Canadiens-anglais sont favorables à une participation des soldats canadiens à la guerre en Europe, contrairement aux Canadiens-français. En 1939, pour faire accepter l'entrée du Canada en guerre, le premier ministre fédéral Mackenzie King promet aux Canadiens-français qu'ils ne seraient pas conscrits contre leur gré. Cependant, en 1942, devant le besoin croissant d'effectifs, le gouvernement fédéral reconsidÚre sa promesse et, par un plébiscite, demande à tous les Canadiens de le relever de sa promesse faite aux Canadiens-français. Les Québécois refusent dans une majorité de 71 % (85 % chez les francophones) alors que les Canadiens des autres provinces acceptent dans une proportion de 80 %. Le vote négatif des Québécois est noyé dans le vote positif des Canadiens-anglais. Bien des Québécois en comprennent que leur nombre n'est plus suffisant pour se faire entendre à Ottawa. Le nationalisme québécois augmente d'autant.

Seconde Guerre mondiale

Peu aprĂšs le dĂ©clenchement de la Seconde Guerre mondiale le , le gouvernement fĂ©dĂ©ral canadien va utiliser l’Office national du film comme instrument communicationnel de propagande pour promouvoir la participation des Canadiens. Durant les premiĂšres annĂ©es de la guerre (1939-1941), John Grierson, qui supervise l’ONF, ne voyait « pas d’intĂ©rĂȘt d’adapter ses produits aux diffĂ©rentes sensibilitĂ©s nationales, dans la mesure oĂč, pour lui un film est valable pour tout le Canada sans distinction »[12]. Ceci va faire en sorte que tous les films vont ĂȘtre produits en anglais sauf Un du 22e, qui va ĂȘtre en français. Les synopsis vont prĂ©senter l’enrĂŽlement dans l’armĂ©e comme un amusement Ă  travers le rire et les loisirs. Toutefois, l’identitĂ© d’un Canada uni combattant l’ennemi allemand ne va pas rĂ©sonner avec les francophones puisqu’il existe une diffĂ©rence ethnique et culturelle entre les Canadiens français et les Canadiens anglais notamment Ă  cause de l’hĂ©ritage français des QuĂ©bĂ©cois. À la suite de la Crise de la conscription de 1942, Grierson va constater le besoin d’incorporer le bagage culturel du QuĂ©bec afin d’atteindre le public francophone. Donc, les longs et courts mĂ©trages de l’ONF vont utiliser plusieurs stratĂ©gies pour pousser les QuĂ©bĂ©cois Ă  accepter la conscription : Ă©loges, utilisations de hĂ©ros quĂ©bĂ©cois, etc.[12] En fait, le hĂ©ros quĂ©bĂ©cois va ĂȘtre au centre des films de l’ONF pour expliquer aux Canadiens français du « bienfondĂ© de la participation au conflit mondial et Ă  susciter leur enrĂŽlement »[12] .

Tout comme les films produits par le gouvernement fĂ©dĂ©ral, les affiches de guerre vont avoir  deux objectifs diffĂ©rents, soit informer ou encourager, selon leurs annĂ©es et la stratĂ©gie utilisĂ©e est diffĂ©rente au Canada et au QuĂ©bec. La propagande par utilisation d’affiches utilisĂ©e durant le dĂ©but de la Seconde Guerre mondiale avait comme but d’informer et elle reposait davantage sur les mots que sur les images[13]. Le Bureau de l’information publique, qui s’occupait de la propagande partout au Canada, utilisait beaucoup l’humour pour communiquer leur message[13]. Par contraste, les affiches de guerre utilisĂ©es durant la seconde moitiĂ© de la Seconde Guerre mondiale vont prendre un ton beaucoup plus sombre et agressif. Les panneaux publicitaires de guerre, qui sont axĂ©es sur l’image, « va privilĂ©gier le thĂšme de l’unitĂ© nationale, le dĂ©veloppement d’une Ă©nergie collective, tout en dĂ©nonçant la nature diabolique du fascisme »[13]. Au QuĂ©bec, les affiches publicitaires vont utiliser le thĂšme de l’unitĂ© nationale autrement que dans le reste du Canada. En fait, l’unitĂ© nationale va ĂȘtre utilisĂ©e dans la propagande publicitaire pour encourager les QuĂ©bĂ©cois Ă  partir combattre en France en prĂ©sentant celle-ci, dont le cƓur « saigne », comme Ă©tant de la mĂȘme famille[14]. D’autres pancartes vont faire appel au sentiment patriotique en rappelant des hĂ©ros comme les compagnons de Dollard, les soldats de Montcalm ou les vainqueurs de ChĂąteauguay, qui se sont sacrifiĂ©s pour le bien de la patrie[15].

Un autre outil que le gouvernement fĂ©dĂ©ral a utilisĂ© pour encourager autant les Canadiens que les Canadiens français Ă  soutenir les efforts de guerre est la censure des correspondances de guerre. Le , au moyen du dĂ©cret C.P 2481, le Canada va imposer la censure. GrĂące Ă  ce dĂ©cret, le gouvernement a le pouvoir d’interdire certaines communications destinĂ©es au public afin de protĂ©ger le moral des militaires et de la population[16]. La presse va jouer un rĂŽle clĂ© dans la censure au Canada. Effectivement, il va exister une certaine collaboration entre l’organisation de la censure de la presse et la presse sur les principes que la « presse doit aider le Canada Ă  gagner la guerre tout en conservant sa libertĂ© de parole et que le systĂšme de censure doit ĂȘtre Ă©conomique et fonctionnel »[16]. Certaines presses quĂ©bĂ©coises, dont le journal le Devoir[16], vont s’opposer officieusement Ă  la censure en critiquant des dĂ©cisions du gouvernement du Canada, cependant la grande majoritĂ© des presses vont la respecter autant au QuĂ©bec que dans le reste du Canada[16]. Or, pour projeter une image positive des forces canadiennes pendant guerre totale et pour protĂ©ger le moral de la population, « chaque reportage, chaque Ă©mission devaient ĂȘtre approuvĂ©s par la censure »[16]. Bien Ă©videmment, les actualitĂ©s filmĂ©es et les correspondances de guerre transmises par la presse au Canada vont donner une impression de succĂšs Ă  la population canadienne ce qui va augmenter les efforts de guerre. Un exemple de cette propagande serait le dĂ©sastre monumental du Raid de Dieppe, qui a Ă©tĂ© couvert partout au Canada comme Ă©tant un succĂšs[16].

La Seconde Guerre mondiale à travers la littérature québécoise

Les outils de propagande ont Ă©tĂ© essentiels au succĂšs du Canada dans la Seconde Guerre mondiale, car la population quĂ©bĂ©coise n’a pas toujours Ă©tĂ© intĂ©ressĂ©e aux guerres europĂ©ennes. En effet, Ă  la suite de la PremiĂšre Guerre mondiale, un nouveau « sentiment d’extĂ©rioritĂ© que suscitent les guerres du monde » grandit chez les QuĂ©bĂ©cois[17]. Ce sentiment est bien illustrĂ© dans le poĂšme « Le jeu » de Saint-Denys Garneau. Effectivement, comme expliquĂ© par le vers « Une gravitĂ© de l’autre monde s’attache Ă  la feuille », il existe un certain dĂ©tachement de la sociĂ©tĂ© quĂ©bĂ©coise face aux conflits en Europe par le fait qu’elle est consciente de la gravitĂ© de la situation, mais celle-ci est dĂ©sintĂ©ressĂ©e par les guerres « de l’autre monde » en raison de la distance. Toutefois, malgrĂ© cette distance que sĂ©pare l’Europe de l’AmĂ©rique du Nord, les premiĂšres annĂ©es de la Seconde Guerre mondiale vont grandement toucher les QuĂ©bĂ©cois. Comme dĂ©crit dans les poĂšmes d’Alain Grandbois, les QuĂ©bĂ©cois qui combattent ou ont combattu sur le front vont ĂȘtre grandement marquĂ©s par une crise de valeurs et par un pessimisme gĂ©nĂ©ralisĂ© Ă  l’égard du monde. Les soldats quĂ©bĂ©cois vont, pour des raisons plutĂŽt Ă©videntes, avoir une mauvaise perception de la guerre. Contrairement aux soldats, les QuĂ©bĂ©cois qui vivaient loin du front vont ĂȘtre plus sympathiques aux causes de guerre,  notamment grĂące aux journaux et Ă  la radio. Bien que la crise de la conscription ait crĂ©Ă© une tension entre les Canadiens français et les Canadiens anglais, la guerre a eu comme consĂ©quence une connaissance du monde extĂ©rieur dans les mentalitĂ©s des « gens les moins voyageurs, les moins intellectuels, les moins prĂ©parĂ©s Ă  affronter une telle rencontre »[17], comme illustrĂ© par le livre Bonheur d’occasion. En d’autres mots, racontĂ©e Ă  travers la littĂ©rature quĂ©bĂ©coise, la guerre va couper le dĂ©tachement que la sociĂ©tĂ© quĂ©bĂ©coise avait face au monde extĂ©rieur en Ă©largissant sa conscience pour regarder plus loin que la nation, vers l’universel»[17].

L'aprĂšs-guerre et la Grande noirceur

Le drapeau du Québec, appelé
le Fleurdelisé, fut adopté par le gouvernement du Québec, en 1948, pendant le gouvernement de Maurice Duplessis.

Cette période est marquée par le long rÚgne de Maurice Duplessis comme premier ministre du Québec. Les idées politiques de Duplessis se caractérisent par :

  • un ultra-conservatisme Ă©conomique qui se manifeste par une Ă©troite collaboration avec le patronat et, en particulier, avec les compagnies amĂ©ricaines qui investissent massivement au QuĂ©bec ;
  • un ultra-conservatisme social qui fait peu de place Ă  l'intervention de l'État en Ă©ducation, en santĂ© et en soutien aux dĂ©favorisĂ©s, laissant ces sphĂšres au soins des congrĂ©gations religieuses; le QuĂ©bec accumule d'ailleurs un retard important sur le plan de la scolarisation durant la pĂ©riode ;
  • un patronage important ; le patronage fait partie des mƓurs politiques de l'Ă©poque mais Maurice Duplessis l'a poussĂ© Ă  des sommets jamais Ă©galĂ©s ;
  • une contestation des tendances centralisatrices du gouvernement fĂ©dĂ©ral ; le fĂ©dĂ©ral qui s'est arrogĂ© des pouvoirs de taxation provinciaux durant la guerre dispose de moyens financiers importants (en 1945, le fĂ©dĂ©ral prĂ©lĂšve 83 % des taxes alors que le provincial n'en prĂ©lĂšve que 7 % et le municipal 10 %) ; le gouvernement fĂ©dĂ©ral profite de ses moyens financiers pour s'ingĂ©rer dans des champs de juridiction provinciale ; Maurice Duplessis s'insurge avec vĂ©hĂ©mence contre ces ingĂ©rences ; il canalise et augmente ainsi les sentiments nationalistes et autonomistes des QuĂ©bĂ©cois ; ces sentiments se cristallisent bientĂŽt dans la crĂ©ation d'un parti politique qui prĂŽne l'indĂ©pendance du QuĂ©bec.

Sur le plan économique, c'est une période de trÚs grande prospérité pour le Québec. Les salaires augmentent plus vite que l'inflation et les conditions de travail s'améliorent avec l'apparition de vacances payées et de régimes de retraite. Les Québécois adoptent l'American Way of Life. Les automobiles et les appareils électriques (réfrigérateurs, cuisiniÚres, radios, télévisions et téléphones) se multiplient.

On appelle parfois cette période la Grande Noirceur. Cette formule éminemment négative est trompeuse. Si elle décrit bien l'ultra-conservatisme économique et social du gouvernement de l'Union nationale et en particulier de son chef charismatique, Maurice Duplessis, cette formule occulte les immenses progrÚs économiques réalisés durant la période et l'évolution de la société québécoise qui s'est transformée durant la période pour devenir le terreau fertile dans lequel a pu se faire la Révolution tranquille des années 1960.

La Révolution tranquille et la société québécoise

En 1960, avec l'élection du parti libéral du Québec sous la direction de Jean Lesage, une période de grands changements économiques, politiques et sociaux s'amorce. Cette période est souvent appelée la Révolution tranquille.

Sur le plan Ă©conomique

Le Québec vit une autre période de grande prospérité. Nous sommes encore dans les Trente Glorieuses. Les salaires qui continuent à augmenter plus vite que l'inflation et l'entrée massive des femmes sur le marché du travail accroissent le revenu des ménages. Sous l'influence de séries télévisées américaines largement disponibles au Québec, les Québécois adoptent de plus en plus l'American Way of Life et la consommation augmente rapidement. La croissance des revenus des ménages permet aussi une augmentation de la taxation qui alimente les nombreuses réformes qui sont implantées au cours de la période.

En 1961, le contrĂŽle de l'Ă©conomie quĂ©bĂ©coise Ă©chappe aux francophones. 45 % des entreprises Ă©tablies au QuĂ©bec sont aux mains d'investisseurs Ă©trangers, 47 % appartiennent Ă  des Canadiens-anglais et seulement 7 % se trouvent sous contrĂŽle francophone. Pour augmenter le contrĂŽle quĂ©bĂ©cois de l'Ă©conomie, le gouvernement provincial se lance dans un programme de nationalisations et de crĂ©ations d'entreprises Ă©tatiques. La nationalisation de l'hydroĂ©lectricitĂ© Ă  travers toute la province est la plus retentissante de ces nationalisations. Des fonds d'investissements Ă©tatiques comme la Caisse de dĂ©pĂŽt et placement du QuĂ©bec et la SociĂ©tĂ© gĂ©nĂ©rale de financement (SGF) sont Ă©galement crĂ©Ă©es. Les entreprises Ă©tatiques combinĂ©es Ă  la forte croissance des activitĂ©s de l'État en santĂ© et en Ă©ducation crĂ©ent des postes de direction qui sont occupĂ©s par des francophones, ce qui permet l'apparition d'une classe d'affaires francophone. Mais l'intervention de l'État va Ă©galement se faire sous la forme d'interventions directes (subventions, prĂȘts sans intĂ©rĂȘt, aide Ă  l'exportation, etc.) afin de favoriser l'essor d'une bourgeoisie francophone.

Sur le plan politique

La croissance de l'appareil gouvernemental provincial et son interventionnisme accru engendrent de nombreuses frictions avec le gouvernement fédéral, d'autant plus que le gouvernement fédéral prÎne une philosophie nettement centralisatrice.

Le Canada anglais s'inquiĂšte des changements qui s'opĂšrent dans la sociĂ©tĂ© quĂ©bĂ©coise et des revendications des QuĂ©bĂ©cois. En 1963, le premier ministre fĂ©dĂ©ral Lester B. Pearson pose la cĂ©lĂšbre question What does Quebec want? et il institue la Commission royale d'enquĂȘte sur le bilinguisme et le biculturalisme pour tenter de rĂ©pondre Ă  la question et proposer des mesures pour satisfaire les demandes des QuĂ©bĂ©cois. L'implantation des mesures proposĂ©es ne fait qu'augmenter le clivage entre Canadiens-anglais et les QuĂ©bĂ©cois francophones. Les Canadiens-anglais considĂšrent que les mesures mises en place sont des concessions inacceptables aux francophones alors que les francophones considĂšrent que les mesures ne sont pas suffisantes pour rĂ©pondre Ă  leurs aspirations.

Devant les frictions constantes entre le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial, le mouvement nationaliste québécois se transforme en mouvement indépendantiste. Le Ralliement national, dirigé par Gilles Grégoire, et le Rassemblement pour l'indépendance nationale, dirigé par Pierre Bourgault et Hubert Aquin, sont fondés en 1960 et se transforment rapidement en partis politiques. En 1967, René Lévesque, qui est alors une figure de proue du parti libéral du Québec, quitte le parti libéral et fonde le Mouvement Souveraineté-Association. En 1968, les forces indépendantistes se regroupent en un seul parti, le Parti québécois, sous la gouverne de René Lévesque. Les partis indépendantistes recueillent 8 % des votes populaires en 1966, 23 % en 1970 et 30 % en 1973. Ces résultats sont insuffisants pour permettre la prise du pouvoir mais ils démontrent la nette croissance de l'idéologie indépendantiste au Québec.

Du 23 au 26 juillet 1967, le gĂ©nĂ©ral de Gaulle, lors d'un voyage au Canada, donne une lĂ©gitimitĂ© internationale Ă  l'idĂ©e d'indĂ©pendance du QuĂ©bec en prononçant, Ă  la fin d'un discours d'environ de 7 minutes le 24 juillet vers 19 H 45 Ă  MontrĂ©al , le cĂ©lĂšbre Vive le QuĂ©bec libre devant une foule en dĂ©lire, composĂ©e de plus de 20 000 personnes qui l'attendaient depuis des heures.

Quelques individus choisissent la violence pour manifester leur dĂ©sir de changements politiques. Cependant, ces actions violentes menĂ©es par le Front de libĂ©ration du QuĂ©bec sont rares et non coordonnĂ©es. En , ce groupe terroriste va procĂ©der Ă  l'enlĂšvement d'un diplomate britannique, James Cross, rĂ©clamant la libĂ©ration de 23 prisonniers politiques et le versement d’une rançon de 500 000 dollars. Le gouvernement du QuĂ©bec annonce son refus de nĂ©gocier avec les indĂ©pendantistes, entrainant, peu aprĂšs, l’enlĂšvement du ministre du Travail du QuĂ©bec, Pierre Laporte. Le gouvernement canadien dĂ©ploie alors l’armĂ©e et instaure la loi sur les mesures de guerre. Les libertĂ©s fondamentales sont suspendues et prĂšs de 500 personnes identifiĂ©es comme appartenant Ă  la gauche quĂ©bĂ©coise sont arbitrairement arrĂȘtĂ©es. En rĂ©action, Pierre Laporte est abattu par le FLQ. Cette action, rĂ©prouvĂ©e par la trĂšs grande majoritĂ© de la population, lui fait perdre le soutien d'une partie de ses sympathisants[18]. De plus, les indĂ©pendantistes pourront maintenant compter sur un grand nombre de leaders d'opinion et sur le Parti quĂ©bĂ©cois pour promouvoir leur projet politique. Le mouvement indĂ©pendantiste quĂ©bĂ©cois se manifeste donc trĂšs majoritairement dans un contexte pacifique et dĂ©mocratique.

Sur le plan social

Les valeurs traditionnelles sont remises en question, en particulier au niveau moral et religieux. Toute forme d'autorité est aussi remise en question et les contestations menées par des étudiants et des travailleurs syndiqués sont fréquentes. On note aussi dans la population un sentiment de confiance de plus en plus grand, insufflé par des réussites économiques et sociales.

Le Québec contemporain (1976 à aujourd'hui)

Gouvernement LĂ©vesque

Le premier ministre RenĂ© LĂ©vesque (centre) Ă  l’inauguration de la premiĂšre turbine de LG-2 en octobre 1979.
Évacuateur de crues de la centrale hydroĂ©lectrique Robert-Bourassa.

Le , le Parti québécois remporte les élections générales québécoises de 1976 et forme le premier gouvernement souverainiste de l'histoire du Québec. Cette victoire décisive du parti de René Lévesque, est une surprise pour PQ[19], un désaveu pour le premier ministre sortant Robert Bourassa, défait dans sa propre circonscription, un choc pour le gouvernement canadien, et un désastre pour le ministre du Canada et fédéraliste Pierre Eliott Trudeau[20].

Neuf mois aprĂšs son Ă©lection, le gouvernement LĂ©vesque sanctionne la Charte de la langue française (Loi 101) le . PortĂ©e par le ministre Camille Laurin, elle fait du français la seule langue officielle de l'État quĂ©bĂ©cois et des entreprises qui font des affaires au QuĂ©bec de plus de 50 employĂ©s. La loi encadre aussi l'enseignement en langue anglaise, l'affichage commercial et la langue de la lĂ©gislation et de la justice[21]. En , le ministre de la justice Marc-AndrĂ© BĂ©dard fait adopter des modifications Ă  la Charte des droits et libertĂ©s pour interdire la discrimination fondĂ©e sur l’orientation sexuelle[22] - [23]. Parmi les autres lois sanctionnĂ©es par le gouvernement LĂ©vesque l'annĂ©e suivante on compte notamment la crĂ©ation du rĂ©gime public d'assurance automobile du QuĂ©bec, la SociĂ©tĂ© de l'assurance automobile du QuĂ©bec, la Loi sur le financement des partis politiques, la Loi sur la protection de la jeunesse et la Loi sur la protection du territoire et des activitĂ©s agricoles[24].

Le gouvernement du Québec organise le un référendum sur le projet de souveraineté-association. Cette consultation populaire, une promesse électorale du Parti québécois, se solde par un refus de la proposition dans une proportion de prÚs de 60 %[25]. Toutefois un an plus tard, le , le Parti québécois est reporté au pouvoir lors des élections générales québécoises de 1981. L'ingérence du Canada lors du référendum de 1980 aurait contribué à la réélection du Parti québécois[26]. Le 4 novembre 1981, le gouvernement canadien négocie la Loi constitutionnelle de 1982, sans la présence du Québec, et éventuellement rapatrie la Constitution du Canada.

Le Canada, à l'instar de plusieurs pays, connaßt une forte récession économique de à [27]. Les effets de cette crise entraßne des hausses soutenues l'inflation qui, à 11% au Québec, atteindra son plus haut niveau en 32 ans et provoque une augmentation substantielle du taux de chÎmage[28]. En 1983, le gouvernement du Québec impose par décret une baisse salariale de 20 % à ses employés durant 3 mois, augmente les tùches dans le secteur de l'enseignement et de la santé et supprime le droit de grÚve[29]. Ces mesures sont perçues comme un affront contre la base électorale du Parti québécois largement constituée d'une clientÚle populaire et syndiquée[30]. La grÚve générale, décrétée par les trois grandes centrales syndicale québécoises (FTQ, CSN et CEQ) en janvier 1983, est écrasée en février par la loi spéciale 111[30].

Le premier ministre du Canada Brian Mulroney (Ă  droite) au cĂŽtĂ© du prĂ©sident des États-Unis Ronald Reagan, bĂ©nĂ©ficie d'un fort appui au QuĂ©bec aux Ă©lections de 1984 et 1988.

Le gouvernement Lévesque, dans ce qu'il qualifie de « Beau risque », donne son appui aux parti progressiste-conservateur du Canada de Brian Mulroney lors de l'élection fédérale de 1984 pour réformer le fédéralisme canadien. Ce soutien explicite à un parti fédéral entraßne des déchirements au sein du Parti québécois[31], et éventuellement, le , René Lévesque annonce sa démission comme premier ministre et comme chef du PQ. Son retrait prend effet aprÚs la course à la chefferie du Parti québécois. Pierre Marc Johnson est élu chef du Parti québécois le .

DeuxiĂšme gouvernement Bourassa

Le , le Parti libéral du Québec, dirigé par Robert Bourassa, remporte les élections générales québécoises de 1985. Le nouveau gouvernement libéral détient une majorité de 99 des 122 siÚges de l'Assemblée nationale.

En 1994, le Canada signe un important accord de libre-Ă©change avec les États-Unis, l'Accord de libre-Ă©change nord-amĂ©ricain (l'ALENA). Les discussions entourant la nĂ©gociation de cet accord montrent encore une fois les diffĂ©rences d'opinion entre les Canadiens-anglais et les Canadiens-français. Les premiers sont gĂ©nĂ©ralement opposĂ©s Ă  l'accord alors que les seconds l'appuient. GrĂące Ă  la dĂ©termination du premier ministre fĂ©dĂ©ral, Brian Mulroney, qui est quĂ©bĂ©cois, l'accord est conclu et il sera bĂ©nĂ©fique aux Ă©conomies canadienne et quĂ©bĂ©coise.

L'Ă©conomie quĂ©bĂ©coise qui est encore assez dĂ©pendante des secteurs traditionnels comme le meuble et le textile s'ajuste avec succĂšs au libre-Ă©change et Ă  la mondialisation comme l'indique le taux d'occupation de la main d'Ɠuvre (le pourcentage des gens ayant un emploi) et le taux de chĂŽmage (le pourcentage des gens voulant un emploi qui n'en ont pas) qui sont, en 2006, parmi les meilleurs de l'histoire du QuĂ©bec. Cependant, cet ajustement s'est fait au prix d'une transformation du marchĂ© du travail qui a gĂ©nĂ©rĂ© une insĂ©curitĂ© certaine. Plusieurs emplois sont prĂ©caires et le pouvoir d'achat de plusieurs groupes de travailleurs stagne lorsqu'il ne diminue pas.

La puissance grandissante des multinationales et la mondialisation sapent la capacité de l'état québécois d'intervenir dans l'économie. L'état québécois, qui était trÚs interventionniste durant les années 1960 et 1970, intervient de moins en moins dans l'économie et laisse à l'entreprise privée et à la libre concurrence la tùche de créer des emplois et de la richesse. L'entreprise privée et la libre concurrence sont efficaces à créer la richesse mais elles le sont moins à distribuer cette richesse équitablement.

Gouvernements Parizeau et Bouchard

Le , le Parti québécois, dirigé par Jacques Parizeau, est élu avec un gouvernement majoritaire lors de l'élection générale québécoise de 1994.

Le , le Parti québécois, dirigé par Lucien Bouchard, est reporté au pouvoir lors des élections générales québécoises de 1981.

Gouvernements Charest, Marois et Couillard

Le , le Parti libéral du Québec, dirigé par Jean Charest, remporte les élections générales québécoises de 2003. Le nouveau gouvernement libéral détient une majorité de 76 des 125 siÚges de l'Assemblée nationale.

Le , le Parti libéral du Québec et le premier ministre Jean Charest remportent l'élection générale québécoise de 2007 et forme un gouvernement minoritaire, le premier au Québec depuis 1878.

Le , 20 mois aprÚs les élections de 2007, le premier ministre du Québec Jean Charest demande au lieutenant-gouverneur Pierre Duchesne de dissoudre le parlement et de convoquer des élections générales. Le , le Parti libéral du Québec et le premier ministre Jean Charest remportent l'élection générale québécoise de 2008 et forme un gouvernement majoritaire.

Gouvernement Legault

Le , la Coalition Avenir Québec, dirigé par François Legault, remporte les élections générales québécoises de 2018. Le nouveau gouvernement caquiste détient une majorité de 74 des 125 siÚges de l'Assemblée nationale. Il s'agit de la premiÚre fois depuis 1970 qu'un parti politique autre que le Parti libéral du Québec ou le Parti québécois détient une majorité de siÚges à l'Assemblée nationale.

Sommaire des transformations politiques du Québec

Notes et références

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Annexes

Articles connexes

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