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Invasions barbares

L'expression « invasions barbares » ou « grandes invasions » regroupe, pour la recherche historique ancienne (XIXe et dĂ©but du XXe siĂšcle), les mouvements migratoires des populations germaniques, hunniques et autres, Ă  partir de l’arrivĂ©e des Huns dans l’Est de l’Europe centrale aux environs de 375 jusqu’à celles des Lombards en Italie en 568 et des Slaves dans l’Empire romain d’Orient en 577. Dans la recherche historique moderne, les diffĂ©rentes langues europĂ©ennes ont renoncĂ© au substantif « invasions » et Ă  l’adjectif « barbares », prĂ©fĂ©rant des expressions comme « migration des peuples » ou « pĂ©riode des migrations » (Völkerwanderung en allemand, Migration Period en anglais). En français, on utilise encore, par conservatisme linguistique (le principe de la « moindre surprise ») l’expression « invasions barbares », non avec une connotation pĂ©jorative mais en rĂ©fĂ©rence au barbaricum, mot par lequel les auteurs romains dĂ©signaient ce qui Ă©tait hors de leur imperium (empire)[1] ; quoi qu'il en soit, les dĂ©coupages historiques sont avant tout des conceptions de l’esprit et reposent sur des conventions[2], avec plus ou moins de connotations idĂ©ologiques.

Spangenhelm du Ve siÚcle, importé des ateliers byzantins.

Ces mouvements migratoires ont eu lieu au cours de l’AntiquitĂ© tardive, et dans certains cas (par exemple l'invasion mongole de l'Europe) se sont reproduits au Moyen Âge. Ils ont pu entraĂźner le dĂ©part des populations romanisĂ©es, leur assimilation ou leur assujettissement, mais inversement ces populations ont aussi pu romaniser et christianiser les royaumes dits « barbares » (comme dans les cas des Wisigoths, des Francs, des Lombards)[3].

Selon les approches transdisciplinaires reliant l’histoire et l’étude des palĂ©oenvironnements, une des causes de ces mouvements pourrait ĂȘtre la sĂ©rie de dĂ©gradations climatiques commençant au IVe siĂšcle de notre Ăšre et s’achevant au Xe siĂšcle avec l’« embellie de l’an mil »[4]. Loin de se rĂ©duire Ă  un Ă©vĂ©nement unique et continu, il s’agit plutĂŽt d’un processus au cours duquel diffĂ©rentes populations, qui se forment et se modifient sous l’emprise de multiples facteurs, dĂ©ferlent en vagues successives sur l’Empire romain, moins affectĂ© au niveau du climat et de la productivitĂ© agricole.

AprĂšs la mort de l’empereur ThĂ©odose Ier en 395, l’Empire romain est de facto sĂ©parĂ© en deux parties, chacune d’elles rĂ©gie par un co-empereur, dont les Ă©dits sont encore censĂ©s s’appliquer dans les deux parties de l’empire (voir Droit au haut Moyen Âge). En 382 et en 418, des accords sont conclus entre les autoritĂ©s de l’empire et les Wisigoths permettant pour la premiĂšre fois aux Goths de s’établir sur le territoire romain. Les Francs se voient octroyer Ă©galement cette autorisation et reçoivent alors, Ă  titre de fƓderati, la mission de protĂ©ger la frontiĂšre nord-est des Gaules. Avec le passage du Rhin en 406, et l’irruption des Vandales et des SuĂšves dans l’empire, l’administration impĂ©riale s'Ă©croule, lentement mais inexorablement, dans la partie occidentale de l'empire, ce qui conduira Ă  la dĂ©position du dernier empereur occidental, alors qu’à l’Est les structures de l’empire rĂ©sistent, bien qu’affaiblies par les guerres menĂ©es contre d’autres envahisseurs, et peuvent ĂȘtre rĂ©formĂ©es par des empereurs Ă©nergiques, permettant leur survie. En Occident, les Ve et VIe siĂšcles voient la crĂ©ation et la croissance de royaumes germaniques (regna), qui marquent de leur empreinte la culture de l’Europe, pour tout le cours du Moyen Âge[5].

Survol général

Terminologie

carte du limes
Le limes sépare pendant longtemps l'empire des Barbares ; Rome tente de le protéger en signant des traités (foedus) avec les peuples qui vivaient prÚs de cette frontiÚre (foederati) afin de la défendre des envahisseurs lointains. Ici une portion du limes germanique.

Les travaux menĂ©s depuis la Seconde Guerre mondiale ont conduit Ă  remettre en question aussi bien le concept d’« invasions barbares » utilisĂ© dans plusieurs langues romanes, que celui de Völkerwanderung (migration des peuples) utilisĂ© dans les langues germaniques[6]. Les historiens allemands et germanophones prĂ©fĂšrent le terme, moins pĂ©joratif, de « migration des peuples », tandis que la plupart des historiens anglo-saxons parlent aujourd'hui de « Migration Period » pour Ă©voquer cette pĂ©riode de l'histoire.

Chacun des deux termes de l’expression « invasions barbares » pose problĂšme. Le mot « invasion » implique un groupe homogĂšne qui fait une entrĂ©e soudaine et violente sur le territoire d’une population autochtone et, par le pillage et la destruction, soumet, chasse ou annihile celle-ci. Divers modĂšles ont Ă©tĂ© Ă©laborĂ©s au cours des derniĂšres annĂ©es, modĂšles qui remettent en cause l'image traditionnelle d’une communautĂ© compacte se mettant collectivement en marche au mĂȘme moment, de mĂȘme qu'elle nuance le caractĂšre systĂ©matique de violence. En dĂ©pit de leur nombre, ces modĂšles peuvent ĂȘtre classĂ©s en deux types, nullement exclusifs. Le premier modĂšle appelĂ© « avancĂ©e par vagues » part du principe que les civilisations agricoles, voyant croĂźtre leur population et par consĂ©quent leurs besoins en nourriture, se sont Ă©tendues progressivement aux dĂ©pens des civilisations de chasseurs-cueilleurs qui les entouraient. Le second modĂšle est celui du « transfert des Ă©lites » oĂč de petits groupes conquiĂšrent un territoire dĂ©jĂ  peuplĂ© dont ils remplacent l’élite dominante tout en laissant en place les structures sociales et Ă©conomiques traditionnelles. On pense ici Ă  la conquĂȘte de l’Angleterre par les Normands : la population locale demeura sur place, mais fut soumise par la force des armes Ă  un groupe Ă©tranger.

Le second problĂšme est liĂ© au mot « barbare ». Les Romains, et les Grecs avant eux, regroupent sous ce terme tous ceux qui ne parlent pas leur langue et ne partagent pas leur modĂšle de civilisation basĂ© sur la citĂ© et l’écriture. Avec l’extension du christianisme apparaĂźt un deuxiĂšme clivage, cette fois entre chrĂ©tiens et paĂŻens, le terme « barbare » Ă©tant alors utilisĂ© pour dĂ©crire des populations non ou faiblement christianisĂ©es, d’oĂč le sens pĂ©joratif de non-civilisĂ©, alors associĂ© Ă  ce terme et par voie de consĂ©quence les prĂ©jugĂ©s de « cruel », « fĂ©roce », « inhumain » que vĂ©hiculent les sources :

« Des nations innombrables et fĂ©roces se sont rendues maĂźtresses de la Gaule. Tout le territoire compris entre les Alpes et les PyrĂ©nĂ©es, l’OcĂ©an et le Rhin a Ă©tĂ© dĂ©vastĂ© par les Quades, les Vandales, les Sarmates, les Alains, les GĂ©pides, les HĂ©rules, les Saxons, les Burgondes, les Alamans, les Pannoniens
 Mayence a Ă©tĂ© prise et dĂ©truite, et des milliers d’hommes Ă©gorgĂ©s dans l’église. Worms est tombĂ© aprĂšs un long siĂšge. Reims
, Arras
, Tournai, Spire, Strasbourg, ont Ă©tĂ© transfĂ©rĂ©es en Germanie ; Aquitaine, Novempopulanie, Lyonnaise, Narbonnaise ont Ă©tĂ© dĂ©vastĂ©es »

— Saint-JĂ©rĂŽme, Lettres, no 123[7]

Dans de nombreux cas, l’arrivĂ©e d’étrangers s’est effectivement accompagnĂ©e d'Ă©pouvantables violences contre les populations existantes : mise Ă  sac des villes avec pillages, incendies et massacres qui ont laissĂ© des contrĂ©es entiĂšres dĂ©peuplĂ©es, les survivants ayant fui. Mais dans d’autres cas, les territoires oĂč arrivent les migrants sont vides d’occupants ; les nouveaux venus s’y installent alors sans brutalitĂ©, mĂȘme sur un territoire appartenant Ă  l’Empire romain. LĂ  oĂč existe une population autochtone, c’est souvent cette derniĂšre qui acculture les nouveaux arrivants, moins nombreux qu’elle, Ă  l'image de ce qui s'est passĂ© dans les parties Ă  majoritĂ© albanaise, grecque ou valaque des Balkans et de Dacie : les Slaves adoptent la langue de la majoritĂ© de la population parmi laquelle ils se sont Ă©tablis et oĂč ils ne forment qu’une minoritĂ©[8] (alors que, dans d'autres parties de ces territoires, c'est le contraire qui se produisit et les autochtones furent slavisĂ©s : voir l'Ă©volution linguistique des Balkans). Le mĂȘme phĂ©nomĂšne semble s’ĂȘtre produit dans le cas des Lombards du VIe siĂšcle, qui perdirent progressivement leurs caractĂšres distinctifs pour adopter les traditions des peuples Ă©tablis sur le moyen Danube, dominĂ© par les GĂ©pides[9].

La notion allemande de Völkerwanderung ou « migration des peuples » pose Ă©galement problĂšme. Elle prĂ©suppose, tout comme l’expression française, la « migration », c’est-Ă -dire le dĂ©placement de toute une population, quittant massivement le territoire ancestral pour faire fortune ailleurs. La rĂ©alitĂ©, comme le dĂ©montre la recherche, est plus complexe. Certes, il y eut des migrations massives, comme celle de dizaines de milliers d'Ostrogoths qui quittĂšrent la Pannonie pour les Balkans en 473[10], groupe qui a pu atteindre ensuite presque cent mille personnes, en raison de l’ajout d'Ostrogoths de Thrace et de rĂ©fugiĂ©s Ruges, lorsqu’il quittera les Balkans pour l’Italie, en 488[11]. Mais dans de nombreux autres cas, il est plus que probable qu’il se soit agi de petits groupes d’individus particuliĂšrement aventureux, qui pour diverses raisons (climatiques, Ă©conomiques, politiques ou par simple recherche de richesse et de gloire), laissaient derriĂšre eux parents et proches pour se lancer dans une aventure. Progressivement, ce groupe est amenĂ© Ă  grossir si l’aventure est couronnĂ©e de succĂšs, mais aussi Ă  disparaĂźtre en cas d’insuccĂšs. Ainsi, de nombreuses scissions se sont produites chez les HĂ©rules, amenant les uns en Scandinavie et les autres Ă  se subordonner aux GĂ©pides ou Ă  l’empire d’Orient[12].

Par ailleurs, ce terme de « migration » fait rĂ©fĂ©rence Ă  un processus que l’on ne conçoit pas de nos jours de la mĂȘme maniĂšre que dans le passĂ©. Le rapport que JordanĂšs fait de la migration des Goths vers la mer Noire a longtemps servi de modĂšle au concept traditionnel :

« Lorsque son peuple se fut beaucoup augmentĂ© en nombre, le roi Filimer, fils de Gadaric [
] prit la dĂ©cision que l’armĂ©e des Goths et leurs familles devraient quitter cette rĂ©gion (prĂšs de la Baltique). Dans leur recherche de lieux habitables et plaisants, ils arrivĂšrent en Scythie, que l’on appelait Oium dans la langue locale. Ils furent enchantĂ©s de la richesse du pays et on dit que lorsque la moitiĂ© de l’armĂ©e eut traversĂ© la riviĂšre, le pont s’écroula de telle sorte que personne ne pouvait plus passer d’une rive Ă  l’autre. [
] Cette partie de l’armĂ©e qui avait traversĂ© la riviĂšre et qui Ă©tait entrĂ©e avec Filimer dans le pays de Oium prit possession de cette terre convoitĂ©e. Elle fit bientĂŽt face Ă  des gens de la race de Spali ; il y eut combat et l’armĂ©e de Filimer fut victorieuse. De lĂ , les vainqueurs se hĂątĂšrent vers les confins du pays scythe qui est prĂšs de la mer Noire »[13]. L’impression que l’on retire de cette description est celle d’un roi unique qui conduit un peuple unifiĂ© vers de nouvelles terres, et fonde un nouveau royaume aprĂšs avoir vaincu (et probablement chassĂ©) les populations autochtones. Ce modĂšle inspirĂ© de l'Ancien Testament, et Ă©tendu Ă  l’ensemble des migrations, ne rend pas compte de la rĂ©alitĂ© des faits, ni des diffĂ©rences existant entre les invasions des IIe / IIIe siĂšcles et celles des IVe / Ve siĂšcles.

Dans le cas prĂ©cis que dĂ©crit JordanĂšs, il est avĂ©rĂ© que non seulement les Goths, mais toute une sĂ©rie de peuplades germaniques prirent part Ă  cette migration. Par ailleurs, celles-ci n’agirent pas comme un groupe unifiĂ© : aucune autre source que JordanĂšs ne fait rĂ©fĂ©rence Ă  un Filimer qui aurait Ă©tĂ© l’unique chef des Goths ; elles mentionnent au contraire divers chefs comme Cniva, Argaith, Guntheric, Respa, Veduc, Thuruar et Cannabaudes. D’autres sources montrent que divers groupes opĂ©rĂšrent de façon diffĂ©rente, les uns par terre, s’alliant parfois Ă  des tribus diffĂ©rentes, les autres par mer, sur un vaste territoire s’étendant de l’embouchure du Danube jusqu’à la CrimĂ©e distante de plus de mille kilomĂštres. Enfin, le rĂ©sultat de cette migration fut, non pas la crĂ©ation d’un seul royaume comme le sous-entend JordanĂšs, mais de plusieurs. Selon Heather, JordanĂšs a simplement plaquĂ© la rĂ©alitĂ© goth du VIe siĂšcle oĂč il a vĂ©cu sur le IVe siĂšcle[14].

De la mĂȘme façon, la notion de « peuple » hĂ©ritĂ©e de l’ùre des nationalitĂ©s reprĂ©sentant des groupes sociaux homogĂšnes fermĂ©s aux Ă©trangers ne peut s’appliquer aux premiers siĂšcles de notre Ăšre. Ne serait-ce qu’en raison des difficultĂ©s de transport, les « peuples », si on se rĂ©fĂšre Ă  une notion gĂ©ographique, se limitaient souvent Ă  ce qui ne serait aujourd’hui qu’un dĂ©partement. En termes de sociĂ©tĂ©, et en dĂ©pit de ce qu’impliquent les termes latins de gentes ou de nationes, le terme de « tribu » ou de « peuplade » serait plus adĂ©quat pour dĂ©crire la rĂ©alitĂ© que celui de « peuple ». Dans de nombreux cas, on voit de petites communautĂ©s s’intĂ©grer Ă  des collectivitĂ©s plus importantes. Ainsi, on pouvait trouver des Ruges ou des HĂ©rules associĂ©s Ă  des communautĂ©s de Goths. Dans ces cas, on doit plutĂŽt parler d’alliances que de peuples et l’identitĂ© ainsi engendrĂ©e serait de nature politique plutĂŽt que culturelle. La recherche contemporaine a ainsi dĂ©montrĂ© que des similitudes de langues, de vĂȘtements ou mĂȘme d’armes ne suffisaient pas Ă  confirmer l’appartenance Ă  une communautĂ© ethnique[15]. Ceci implique que divers groupes pouvaient fusionner tout en restant loyaux Ă  leur communautĂ©[16]. Les Ă©tudes historiques se sont souvent attardĂ©es depuis les annĂ©es 1970 sur ce qu'elles ont dĂ©signĂ© comme un processus d'« ethnogenĂšse », considĂ©rant que les « peuples barbares » se forment progressivement autour d'un noyau limitĂ© en nombre, un clan souverain, porteur d'une tradition spĂ©cifique, Ă  laquelle il agrĂšge peu Ă  peu d'autres composantes, d'origine extĂ©rieure. Un rĂ©cit fondateur lĂ©gendaire est forgĂ© afin de souder ce groupe. Il n'y a donc pas lieu de chercher une cohĂ©sion gĂ©nĂ©tique Ă  ces peuples. De plus cela expliquerait les fluctuations qui ont lieu au grĂ© des succĂšs et Ă©checs militaires, expliquant par exemple la disparition des Huns en tant que peuple aprĂšs 453 par leur dispersion et leur intĂ©gration dans les diffĂ©rents groupes vainqueurs[17]. Ce type de scĂ©nario est critiquable car il y a peu de traits culturels archaĂŻques attribuables Ă  une origine lointaine qui se dĂ©cĂšlent chez les peuples barbares, qui sont souvent romanisĂ©s voire christianisĂ©s dĂšs leur Ă©mergence, sans que cela ne soit une entrave Ă  la constitution de leur identitĂ©[18]. L'archĂ©ologie n'apporte pas de rĂ©ponse Ă©vidente sur leurs origines, la correspondance entre une culture matĂ©rielle (objets, pratiques funĂ©raires) et une identitĂ© ethnique Ă©tant loin d'ĂȘtre systĂ©matique[19]. Il a aussi Ă©tĂ© proposĂ© de localiser l'apparition de ces peuples dans les espaces frontaliers du monde romain, par le contact de ce dernier : « par imitation, par rĂ©action Ă  la pression militaire ou par volontĂ© de profiter d’opportunitĂ©s rĂ©servĂ©es aux peuples constituĂ©s, les populations locales auraient changĂ© d’identitĂ© »[20]. L'entrĂ©e dans l'empire renforce le processus, puisque se rattacher Ă  un peuple constituĂ© permet de profiter des avantages liĂ©s Ă  son statut aux yeux des dirigeants et des populations de l'empire ; aussi une personne ayant Ă  la fois des origines romaines et non-romaines peut choisir l'une ou l'autre selon les opportunitĂ©s qu'elles lui offrent[21].

DĂ©clin de l’Empire romain d’Occident

DĂ©finir le rĂŽle prĂ©cis que les grandes migrations ont jouĂ© dans l’effondrement de l’empire romain d'Occident constitue un exercice difficile. Il est certain que Rome Ă  la fin du IVe siĂšcle et au dĂ©but du Ve siĂšcle ne dispose plus des capacitĂ©s d’empĂȘcher l’arrivĂ©e de nouveaux arrivants et encore moins de les intĂ©grer dans l’empire, comme elle l’avait fait dans le passĂ©. L’établissement de « royaumes » (regna) germaniques aux Ve et VIe siĂšcles dans l’Ouest de l’empire demeure donc un processus complexe et malaisĂ© Ă  cerner, contrairement Ă  ce que l’on a longtemps pensĂ© en dĂ©crivant les choses de façon assez simpliste[22].

Ainsi, dans son livre L’Empire chrĂ©tien publiĂ© en 1947, l'historien AndrĂ© Piganiol dĂ©fend la thĂšse de la destruction de la civilisation romaine par les Germains. Une thĂšse aussi simple ne peut plus ĂȘtre soutenue de nos jours, les Francs sont considĂ©rĂ©s par saint Remi comme les gardiens du pays et les garants du droit (romain)[23]. De la mĂȘme façon, en particulier au cours de la premiĂšre moitiĂ© du XXe siĂšcle, de nombreux historiens aussi bien dans le monde roman qu’anglo-saxon ont avancĂ© des thĂ©ories qui reflĂ©taient davantage les dĂ©mĂȘlĂ©s de leurs gouvernements avec l’État allemand d’alors que la rĂ©alitĂ© historique. En retour, de nombreux historiens nationalistes allemands, principalement au temps du nazisme, ont tentĂ© de prouver le prĂ©tendu « hĂ©ritage allemand » de l’époque des grandes migrations[24]. Les recherches faites depuis les annĂ©es 1970 ont mis l’accent sur le fait que l’AntiquitĂ© tardive (et dĂšs lors l’ùre des grandes migrations) fut une pĂ©riode de transformation culturelle au cours de laquelle les peuples migrateurs ont jouĂ© un rĂŽle vital. Elles reconnaissent en mĂȘme temps que ce fut une pĂ©riode de grande violence et de dĂ©clin Ă©conomique considĂ©rable[25].

invasion des Huns
L'invasion des Huns précipita le déclin de l'Empire romain d'Occident. Illustration de Geiger (1873) : les Huns au combat contre les Alains.

La plupart des historiens s’accordent toutefois pour voir dans l’arrivĂ©e des Huns l’une des causes premiĂšres du dĂ©clin de l’Empire romain d’Occident[26]. Au contraire, l’Empire romain d'Orient, initialement leur premier objectif, rĂ©siste Ă  leurs assauts principalement parce que ces peuplades ne peuvent passer d’Europe vers les riches provinces d’Asie mineure, les murailles de Constantinople se rĂ©vĂ©lant toujours un obstacle infranchissable. Lui-mĂȘme aux prises avec ces envahisseurs, l’empire d’Orient ne peut pas mobiliser des ressources afin d'appuyer efficacement la rĂ©sistance de l’empire d’Occident. Sur le plan culturel, la culture classique de l’AntiquitĂ© n'aurait, suivant une hypothĂšse traditionnelle, plus possĂ©dĂ© la vitalitĂ© nĂ©cessaire pour survivre sur la partie du continent europĂ©en oĂč progressivement, aprĂšs l’installation de ces peuples, s’effectue une fusion des cultures germanique et romaine[27] ; cette idĂ©e d'un dĂ©clin culturel est cependant gĂ©nĂ©ralement rejetĂ©e par les historiens actuels. Tout au long du Ve siĂšcle, la politique romaine consiste la plupart du temps Ă  dresser les diverses tribus barbares les unes contre d’autres ; ainsi, elle oppose les Wisigoths d’Espagne aux Vandales et, plus tard, les Ostrogoths d’Italie contre Odoacre. Dans le cadre de cette politique, les victoires romaines apparaissent le plus souvent partielles, peu solides et porteuses des germes d'un affaiblissement ultĂ©rieur ; en effet, sortis militairement vaincus par Rome, les rois barbares nĂ©gocient leur soumission contre de nouveaux avantages, les renforçant face Ă  une autoritĂ© centrale de plus en plus affaiblie.

Traditionnellement l’on considĂšre la « barbarisation » progressive de l’armĂ©e romaine comme l’une des causes de la « dĂ©cadence » de l’empire, alors que les historiens modernes considĂšrent qu’il s’agit plutĂŽt d’une Ă©volution qui, au travers des « barbares » intĂ©grĂ©s dans l’armĂ©e rĂ©guliĂšre romaine et ainsi romanisĂ©s mais surtout Ă  travers les foederati germaniques, mĂšnera au remplacement par Ă©tapes de l’Empire romain d’Occident par des royaumes germaniques, dont il reste nĂ©anmoins le modĂšle. Sur le plan Ă©conomique, le passage aux mains des peuples germaniques des provinces les plus riches, en particulier de celles d’Afrique du Nord, transfĂšre progressivement les ressources financiĂšres de l’Empire vers ses foederati, enrĂŽlĂ©s en nombre toujours plus considĂ©rable dans les rangs d’une armĂ©e de moins en moins « romaine de souche » (si tant est que ce syntagme ait un sens, Ă©tant donnĂ© que Rome intĂšgre ainsi des peuples tout au long de son histoire). La nouveautĂ©, c’est que les troupes des foederati germaniques Ă©chappent progressivement au contrĂŽle de l’empereur en remplaçant progressivement les troupes rĂ©guliĂšres, Ă©tablissant de facto des royaumes sinon indĂ©pendants, du moins autonomes. Échappant peu Ă  peu Ă  l’autoritĂ© de l’empereur d’Occident, elles continuent Ă  accepter, du moins thĂ©oriquement jusqu’au VIe siĂšcle, le pouvoir nominal de l’empereur romain d’Orient dont elles renforcent la lĂ©gitimitĂ©.

Les guerres de l’empereur Justinien pour restaurer l’Empire en Occident (Italie, Dalmatie, sud-est de l'Hispanie, Ăźles de la MĂ©diterranĂ©e occidentale, Afrique du Nord) montrent Ă  la fois qu’en 550 une intervention impĂ©riale y demeure possible, mais que ses ressources militaires ne sont pas suffisantes pour rĂ©cupĂ©rer aussi la Gaule franque et la totalitĂ© de l’Hispanie wisigothique. La complexitĂ© et la progressivitĂ© des changements ne permettent pas aux contemporains de percevoir une quelconque « chute de l’Empire romain » qui aurait, du jour au lendemain, Ă©tĂ© remplacĂ© par le « rĂšgne des Barbares » : cette vision rĂ©ductrice a Ă©tĂ© forgĂ©e ultĂ©rieurement, aprĂšs que de nombreux souverains succĂ©dant aux royaumes germaniques, de Charlemagne Ă  NapolĂ©on en passant par les « Empereurs des Romains », ont eu comme horizon politique, durant plus de mille ans, la reconstitution de l’Empire Ă  leur profit[28] - [29].

Royaumes romains-germaniques

Un bractĂ©ate en or datant de la pĂ©riode migratoire germanique, montrant un oiseau, un cheval, et un visage stylisĂ© avec un chignon suĂšve, parfois thĂ©orisĂ© comme Ă©tant une reprĂ©sentation du roi germanique Wƍden, et, ce qui sera plus tard dans la mythologie germanique, Sleipnir et Hugin et Munin, plus tard attestĂ© en mythologie nordique. L'inscription runique inclut le terme religieux, alu.

L’administration romaine, par son efficacitĂ©, joue un rĂŽle essentiel dans la crĂ©ation des royaumes (regna) germaniques sur le territoire de l’empire : royaume goth en Italie (occupĂ©, plus tard, par les Lombards) et en Espagne, royaume vandale en Afrique du Nord, Francs et Burgondes en Gaule ; les petits royaumes anglo-saxons de Bretagne jouent Ă  cet Ă©gard un rĂŽle particulier en Ă©tant plus autonomes vis-Ă -vis des anciennes institutions romaines.

Inversement, l'ensemble de ces regna exerce en une influence considĂ©rable sur l’évolution de l’Europe au Moyen Âge. N’eĂ»t Ă©tĂ© le modĂšle empruntĂ© Ă  l’Empire romain de l’AntiquitĂ© tardive, ces petits royaumes, qui continuent Ă  maintenir de nombreux liens avec l’empire, n'eussent pu exister. C’est grĂące Ă  ce modĂšle par exemple que Wisigoths d’Espagne et Ostrogoths d’Italie peuvent assimiler la culture romaine et Ă©ventuellement se servir d’elle Ă  leur propre fin sans la dĂ©truire. Comme l’a Ă©crit le mĂ©diĂ©viste Patrick J. Geary :

« Le monde germanique fut peut-ĂȘtre la plus brillante et la plus durable crĂ©ation du gĂ©nie politique et militaire de Rome[30]. »

Cette intĂ©gration des peuples germaniques reste cependant plus difficile du fait des oppositions doctrinales qui divisent le monde chrĂ©tien. En s’établissant sur le territoire de l’empire, les nouveaux arrivants jusqu’alors paĂŻens, adoptent assez rapidement la foi chrĂ©tienne mais souvent selon la confession arienne, se trouvant ainsi en conflit avec les autoritĂ©s impĂ©riales de mouvance catholique.

NumĂ©riquement, les nouveaux arrivants germains constituent des groupes aux effectifs nettement infĂ©rieurs Ă  ceux des Romains. Bien que seules des estimations soient possibles, il est certain que les auteurs de l’AntiquitĂ© et du Moyen Âge ont une nette propension Ă  l’exagĂ©ration. De 20 000 Ă  30 000 soldats (auxquels il faut ajouter les femmes, les enfants, les vieillards) constituent alors probablement la limite absolue de ces groupes migrants qui en comptent souvent beaucoup moins lorsqu’il s’agit de groupes d’aventuriers conduits par des « seigneurs de la guerre »[31]. Les Germains ne constituent dĂšs lors dans tous les cas qu’une minoritĂ© peu importante au sein des populations romaines dans les provinces oĂč ils s’installent, ce qui les incite souvent Ă  adopter une politique de coopĂ©ration avec les autochtones de sorte que l’on peut effectivement parler de « royaumes romano-germaniques »[32]. De ces divers royaumes, seuls ceux des Francs, des Lombards, des Anglo-saxons et des Wisigoths connaissent une existence durable.

PremiÚre période : les mouvements migratoires germaniques du IIIe siÚcle

invasions du IIe au Ve siĂšcle
Les mouvements migratoires du IIe au Ve siĂšcle.

Les grands mouvements migratoires des populations germaniques commencent bien avant leur arrivĂ©e dans l’empire. En effet, dans la deuxiĂšme moitiĂ© du IIe siĂšcle, les Quades, Marcomans, Lombards et Sarmates apparaissent sur le Danube et envahissent les provinces de RhĂ©tie, Norique, Pannonie et MĂ©sie.

Au dĂ©but du IIIe siĂšcle, les Alamans apparaissent dans les sources latines, constituant une menace pour le « limes de Germanie » Ă  la charniĂšre entre le Rhin et le Danube. En 233, la recrudescence des menaces sur le Danube oblige l’empereur SĂ©vĂšre Alexandre Ă  ramener les Illyriens d’Orient. L’annĂ©e suivante, les Alamans envahissent le secteur rhĂ©tique du « limes » et multiplient les incursions en direction des champs DĂ©cumates[33]. Une dĂ©cennie plus tard, franchissant le « limes », les Alamans parviennent Ă  leur tour en RhĂ©tie. Au dĂ©but de la deuxiĂšme moitiĂ© du IIIe siĂšcle, avec les Francs, ils envahissent la Gaule. RepoussĂ©s outre-Rhin par l’empereur Gallien, les Francs reviennent en Gaule dans les annĂ©es 260 alors que les Alamans font de mĂȘme Ă  partir de la RhĂ©tie. Des groupes se rejoignent alors, et s'aventurent dans le centre et le sud-est de la Gaule. Certains parviennent mĂȘme en Espagne et en MaurĂ©tanie ; d’autres pĂ©nĂštrent en Italie, mais sont battus par Gallien Ă  Milan. En GrĂšce, AthĂšnes est prise en 267-268 par les HĂ©rules qui dĂ©truisent une grande partie de la ville et notamment le forum. AprĂšs le bref rĂšgne de l’empereur Claude, l’empereur AurĂ©lien doit se battre en Pannonie contre les Vandales et les Sarmates, pendant que les Juthunges envahissent l’Italie ; ils sont arrĂȘtĂ©s Ă  Fano et Pavie. En 275, les Francs mĂšnent des raids en Gaule en suivant le cours du Rhin et celui de la Meuse, pendant que les Alamans progressent en suivant les vallĂ©es de la SaĂŽne et du RhĂŽne. Deux annĂ©es plus tard, Probus met un terme Ă  leur invasion en Gaule et, en 278-279, dĂ©livre la RhĂ©tie des Burgondes et des Vandales[34].

Les nombreux mouvements migratoires qui ont lieu au-delĂ  de l’horizon romain ne sont connus que par des rĂ©cits Ă©manant de traditions orales et mis par Ă©crit alors qu’ils prennent une dimension mythique. L’une des plus connues de ces traditions sĂ©culaires est la soi-disant De origine actibusque Getarum, ou Histoire des Goths (aussi connue sous le nom de Getica) de JordanĂšs, qui date du VIe siĂšcle. On sait maintenant que les Goths sont partis de la rĂ©gion de la Vistule au IIe siĂšcle et se sont dirigĂ©s vers la mer Noire, chassant d’abord les Daces de leur territoire, et les forçant Ă  se rĂ©fugier en Transylvanie[35]. Les Goths occasionnent ainsi le premier grand mouvement migratoire, en refoulant les Vandales et les Marcomans vers le sud et les Burgondes vers l’ouest. Ce dĂ©placement de peuples est l’une des causes des guerres avec les Marcomans Ă  l'issue desquelles les Romains ne purent venir Ă  bout des Germains qu’avec difficultĂ©[36]. Au cours des annĂ©es cinquante et soixante du IIIe siĂšcle, profitant de la crise du IIIe siĂšcle, des bandes de Goths s’avancent toujours plus avant sur le territoire de l’empire[37]. En 252-253, ils ravagent les cĂŽtes de l’Asie mineure, ainsi que la rive droite du Rhin, avant d’envahir les Balkans et la GrĂšce par terre et par mer, en 267. Ils sont Ă©crasĂ©s par Claude Ă  NaĂŻssus en 269. En 275, les Goths, alliĂ©s aux Alains pour cette nouvelle incursion, envahissent Ă  nouveau l’Asie Mineure, jusqu’en Cilicie. Trois ans plus tard, Probus lance une campagne contre eux et parvint Ă  nettoyer la rĂ©gion du Danube[34].

Au cours des annĂ©es 290, les Goths se divisent entre Thervingues/Wisigoths et Greuthungues/Ostrogoths. Les Greuthungues ou « Goths de l’Est » s’établissent prĂšs de la mer Noire, lĂ  oĂč se trouve aujourd’hui l’Ukraine. Les Thervingues ou « Goths de l’Ouest » se dirigent d’abord vers la pĂ©ninsule des Balkans, pour s'Ă©tablir en Transylvanie. Les Thervingues parviennent ainsi au contact direct des Romains, cause de nombreux affrontements indĂ©cis. En 332, les Goths vivant prĂšs du Danube obtiennent le statut de foederati, les astreignant par traitĂ© Ă  apporter une assistance militaire aux Romains. La migration des Goths revĂȘt une importance particuliĂšre en raison des Ă©vĂ©nements qu'elle prĂ©cĂšde : l’invasion des Huns en 375 les chasse de leur nouveau territoire, les poussant Ă  se dĂ©placer dans l'Empire romain, menacĂ© par ces migrations.

À peu prĂšs Ă  la mĂȘme pĂ©riode, les Lombards quittent la rĂ©gion situĂ©e entre la mer du Nord et Hambourg sur l’Elbe pour se diriger vers la Moravie et la Pannonie. De petites incursions dans les territoires contrĂŽlĂ©s par Rome sont repoussĂ©es, ou se traduisent par des rectifications mineures de la frontiĂšre. Plus Ă  l’ouest, la confĂ©dĂ©ration des Alamans oblige Rome Ă  abandonner le « limes germano-rhĂ©tique » ; les Alamans exercent alors leur pression de Mayence Ă  Ratisbonne, soit Ă  la fois sur le Palatinat, l’Alsace, la Suisse et la Cisalpine[38]. Plusieurs tribus sont Ă©tablies le long de la frontiĂšre de l’empire, en tant qu'alliĂ©es de l'empire ; Elles servent de tampons contre d'autres tribus, plus hostiles.

Rome tire les leçons des invasions du IIIe siĂšcle et, dĂšs le dĂ©but du IVe siĂšcle, ses dirigeants prennent les mesures appropriĂ©es. Partout, les villes construisent des enceintes fortifiĂ©es, qui sont souvent en retrait par rapport Ă  l'extension qu'avaient les citĂ©s au siĂšcle prĂ©cĂ©dent. Depuis la fondation de l’empire perse des Sassanides, Rome doit se battre sur plusieurs frontiĂšres Ă  la fois. Les combats violents avec les armĂ©es perses monopolisent les forces romaines, ce qui permet les succĂšs des invasions germaniques du IIIe siĂšcle. Face Ă  cette situation, rendre l’armĂ©e romaine plus efficace et plus mobile devient une prioritĂ©. Les empereurs DioclĂ©tien et Constantin Ier, aprĂšs avoir rĂ©parti l’armĂ©e entre comitatenses (armĂ©e de campagne ou d’accompagnement de l'empereur) et limitanei ou armĂ©e de protection des frontiĂšres, mĂšnent leurs troupes Ă  la reconquĂȘte des territoires sur le Rhin et le Danube au nord, y Ă©tablissent des fortifications et renforcent les frontiĂšres du Nord et de l’Est. La bataille de Strasbourg, disputĂ©e en 357 entre l'armĂ©e romaine du CĂ©sar Julien et la confĂ©dĂ©ration tribale alamane conduite par le roi Chnodomar, marque le point culminant de la campagne pour empĂȘcher les incursions barbares en Gaule et rĂ©tablir une ligne dĂ©fensive forte le long du Rhin, ligne gravement endommagĂ©e pendant la guerre civile de 350-353 entre l'usurpateur Magnence et l'empereur Constance II. En dĂ©pit des difficultĂ©s qu’occasionne le regroupement au cours du IIIe siĂšcle de diverses tribus en confĂ©dĂ©rations (Alamans et Francs) ainsi que la guerre qu’elle doit simultanĂ©ment conduire contre les Perses, Rome rĂ©ussit Ă  repousser militairement toutes ces attaques[39] et Ă  reprendre en 378 l’initiative des campagnes.

Toutefois, l’invasion brutale des Huns change radicalement le cours des Ă©vĂ©nements. L’armĂ©e romaine a alors atteint la limite de son efficacitĂ© et ne peut faire montre de plus de flexibilitĂ©. Cet Ă©tat de choses ainsi que les augmentations en taille et en force des tribus migrantes sont les deux principales caractĂ©ristiques qui marquent les mouvements migratoires ultĂ©rieurs, et les distinguent de ceux des siĂšcles prĂ©cĂ©dents[40].

DeuxiÚme période : les grandes invasions des IVe et Ve siÚcles

L’arrivĂ©e des Huns et ses consĂ©quences

« Le peuple des Huns, dont les antĂ©cĂ©dents sont assez mal connus, habite au-delĂ  de la mer d’Azov (alors connue comme paludes Maeoticas) prĂšs de la mer de glace et est d’une nature on ne peut plus sauvage [
] Cette race d’hommes indomptables et habiles au combat ne vit que pour voler les biens des autres ; pillant et assassinant, elle attaqua ses voisins de proche en proche jusqu’à ce qu’elle arrive au pays des Alains, les MassagĂštes d’autrefois. »
Ammien Marcellin, Res Gestae, 31,2,1 : 31,2, 12.
reproduction d'un livre d'Ammien Marcellin
Reproduction datant de 1533 d'un des livres d'Ammien Marcellin dont les mémoires sont une source précieuse d'informations sur les grandes migrations.

Les mĂ©moires de l’historien et ancien officier romain Ammien Marcellin dans son 31e livre constituent la seule vue d’ensemble dĂ©taillĂ©e des invasions hunniques. Ammien, qui rapporte gĂ©nĂ©ralement les faits de façon consciencieuse, n’a cependant pas une connaissance directe des Ă©vĂ©nements qui se produisent en 375 hors des territoires de l’empire, en Ukraine (la chronologie de cette pĂ©riode est incertaine de telle sorte que mĂȘme la date de 375 retenue gĂ©nĂ©ralement comme celle du dĂ©but de l’invasion des Huns est conjecturale)[41]. Il dĂ©peint comment les Huns dĂ©font d’abord les Alains, puis dĂ©truisent le royaume gothique d’Ermanaric en Ukraine, avec l’aide des Alains[42]. On ignore prĂ©cisĂ©ment encore aujourd’hui la rĂ©gion d'origine des Huns. On les a longtemps crus apparentĂ©s aux Xiongnu, citĂ©s dans les sources chinoises. La plupart des chercheurs contemporains ou bien rejettent cette hypothĂšse ou demeurent Ă  tout le moins sceptiques, en raison d'un intervalle trop considĂ©rable entre l’apparition de chacun de ces deux groupes. Quant aux causes qui poussent les Huns Ă  migrer, on ne peut que spĂ©culer[43]. Les sources antiques concordent sur leur cruautĂ© et leur manque de culture ; par la suite, les auteurs occidentaux utilisent gĂ©nĂ©ralement le terme pour dĂ©crire tout groupe originaire des steppes d’Asie centrale (comme on le fait aussi pour le terme « Scythes »). Les auteurs chrĂ©tiens sont prompts Ă  voir une punition de Dieu dans l’émergence subite des Huns dont la brutalitĂ© et la rapiditĂ© d’action sont aussi lĂ©gendaires que l'archerie montĂ©e[44].

Il est Ă©tabli que les Huns, ne disposant pas de commandement unifiĂ©, dĂ©clenchent la fuite dĂ©sordonnĂ©e de nombreuses tribus germaniques et sarmates vers le sud et l’ouest de l’Europe. Ils attaquent d’abord les Alains dont certains rejoignent leurs rangs pour attaquer les Greuthungues. Ces derniers ayant vu leurs chefs, Ermenaric et Vithimer, pĂ©rir dans l’une des nombreuses batailles les opposant aux Huns fuient vers le territoire des Thervingues en compagnie desquels ils se dirigent vers le Danube pour demander Ă  l’empereur Valens, rĂ©gnant sur la partie orientale de l’empire, la permission de se rĂ©fugier dans l’Empire romain et de s'installer en MĂ©sie (la Serbie et la Bulgarie actuelles). L’empereur finit par consentir Ă  leur requĂȘte en 376. Des milliers de Thervingues et autres rĂ©fugiĂ©s se prĂ©sentent ainsi aux frontiĂšres du limes[45]. Sans doute a-t-on sous-estimĂ© du cĂŽtĂ© des Romains le nombre de ces rĂ©fugiĂ©s que l’on nĂ©glige de dĂ©sarmer. Les autoritĂ©s chargĂ©es d'organiser l'accueil des Goths, plus prĂ©occupĂ©es par les possibilitĂ©s de tirer un profit immĂ©diat de la situation que de gĂ©rer la crise au mieux, se montrent vite dĂ©bordĂ©es. L'administration n’est alors pas prĂ©parĂ©e Ă  prendre en charge des populations aussi importantes de telle sorte que les Goths doivent patienter longtemps sur les deux rives du Danube. Le comes de MĂ©sie, Lucipinus, revend Ă  un prix exorbitant les matiĂšres premiĂšres et les ressources alimentaires mises Ă  sa disposition pour la construction de villages, si bien que les Goths, rapidement rĂ©duits Ă  la famine, se rĂ©voltent contre les Romains au dĂ©but de l'annĂ©e 377[46].

De prime abord, ces Ă©vĂ©nements et leurs consĂ©quences ne semblent guĂšre prĂ©senter un grave danger. L’empereur Valens renonce Ă  une campagne contre les Sassanides pour marcher contre les Goths de Thrace. Mais au cours de l’étĂ© 377, les Romains rĂ©alisent la vĂ©ritable nature de leur nouvel adversaire germanique aprĂšs avoir Ă©chouĂ© Ă  vaincre les Goths Ă  la bataille des Saules, et Ă  les contenir au Nord des Balkans. L’empereur se rend lui-mĂȘme en Thrace au printemps de 378 et mute de nombreux officiers supĂ©rieurs. Gratien, neveu de Valens et CĂ©sar d’Occident, ayant promis son aide, ne peut tenir sa promesse en raison d’une attaque des Alamans, ce qui doit amener Gratien Ă  conduire une opĂ©ration outre-Rhin, la derniĂšre qu’y dirige un empereur romain. Le se dĂ©roule Ă  Andrinople une bataille entre les Goths commandĂ©s par Fritigern et l’armĂ©e romaine. Sans qu’il y ait eu nĂ©cessitĂ©, Valens et quelque 30 000 soldats, l’élite de l’armĂ©e de l’Est, se dĂ©ploie en rase campagne[47]. De leur cĂŽtĂ©, les Thervingues ont Ă©galement reçu des renforts sous la forme de la « confĂ©dĂ©ration des trois peuples », formĂ©e de Greuthungues, d’Alains et de quelques Huns dĂ©serteurs, laquelle souhaite se soustraire Ă  la domination des Huns[48]. De plus, les espions romains sous-estiment la force de l’armĂ©e ennemie composĂ©e de quelque 20 000 soldats. Les Romains, extĂ©nuĂ©s par leur longue marche sous un soleil de plomb et sans approvisionnement suffisant, se trouvent dĂ©pourvus devant la cavalerie hautement mobile de leurs ennemis pendant que l’infanterie des Goths les assaille de toutes parts. Seul le tiers des forces romaines peut s’échapper et l’empereur Valens tombe au combat. Avec lui, de nombreuses unitĂ©s d’élite de l’armĂ©e d’Orient sont anĂ©anties de mĂȘme qu’un grand nombre d’officiers supĂ©rieurs dont deux des plus hauts gradĂ©s[49]. Ammien, qui Ă©crit son ouvrage entre 391 et 394, le termine avec la bataille d’Andrinople qu’il compare Ă  la bataille de Cannes oĂč Hannibal remporta une bataille dĂ©cisive sur les lĂ©gions romaines au cours de la deuxiĂšme guerre punique[50].

Le traité de 382 entre Rome et les Goths

conversion de Théodose
ThĂ©odose qui signa le traitĂ© de 382 avec les Goths fut aussi celui qui imposa le christianisme comme religion d'État. Toile de Pierre Subleyras (1745) : Saint Ambroise convertissant ThĂ©odose.

La sĂ©vĂšre dĂ©faite d’Andrinople ne signifie nullement la fin de l’empire. Les Goths ne peuvent exploiter leur victoire[51]. Gratien, dirigeant la partie occidentale de l’empire, se hĂąte de faire dĂ©signer un nouvel empereur en Orient, choisissant Ă  cette fin un militaire originaire d’Espagne, Flavius ThĂ©odose, fils de ThĂ©odose l'Ancien qui s’était dĂ©jĂ  illustrĂ© comme gĂ©nĂ©ral[52].

ThĂ©odose se rĂ©vĂšle d'une autre envergure que Valens. Il Ă©tablit son quartier gĂ©nĂ©ral Ă  Thessalonique en 379 d’oĂč il conduit de nombreuses opĂ©rations contre les Goths. Toutefois, ces offensives romaines souffrent de l’absence d’officiers qualifiĂ©s, si bien que ThĂ©odose doit finalement accepter de composer avec les « barbares ». Il commence par accueillir Ă  Constantinople en 380/381 Athanaric, alors en mauvais termes avec Fritigern, et intĂšgre ses partisans dans ses propres troupes. Gratien, ayant acceptĂ© en 380 de voir une partie de la confĂ©dĂ©ration des trois peuples s’établir en Pannonie et en Thrace, finit par envoyer des officiers qualifiĂ©s en Orient, au nombre desquels Bauto et Arbogast l’Ancien. Mais le commandant en chef Flavius Saturninus doit conclure, en octobre 382, un traitĂ© avec les Goths de Thrace. Le fƓdus du 3 octobre 382 Ă©tabli avec Fritigern autorise les Wisigoths Ă  s’installer entre le Danube et l’HĂ©mus. En tant que nation indĂ©pendante fixĂ©e en terre d’empire, ils demeurent soumis Ă  leurs propres lois et exempts d’impĂŽts mais n’obtiennent pas la permission d'Ă©pouser des citoyens romains, lesquels conservent les seules lois romaines. La terre sur laquelle ils sont Ă©tablis demeure terre d’empire mĂȘme si les Goths y jouissent d’une certaine autonomie. En contrepartie, ils doivent servir comme fĂ©dĂ©rĂ©s mais commandĂ©s par leurs propres chefs lesquels demeurent sous la juridiction d’officiers supĂ©rieurs de l’armĂ©e romaine. Ce traitĂ© met en place un prĂ©cĂ©dent : une nation germanique fĂ©dĂ©rĂ©e peut s’établir Ă  l’intĂ©rieur des frontiĂšres de l’empire tout en maintenant son statut de nation indĂ©pendante et, en thĂ©orie du moins, traiter avec Rome d’égal Ă  Ă©gal[53]. Ce traitĂ© a souvent Ă©tĂ© considĂ©rĂ© dans le passĂ© comme le dĂ©but de la fin de l’empire d’Occident, des barbares n’ayant jamais accĂ©dĂ© auparavant Ă  un tel statut d’autonomie et ne s'Ă©tant installĂ©s si prĂšs de Rome. Toutefois, un certain nombre de chercheurs contemporains soutiennent qu'il ne tranche pas fondamentalement avec les traitĂ©s similaires[40]. Rome continue Ă  revendiquer son autoritĂ© sur l’ensemble de l’empire tout en disposant Ă  la fois d’une nouvelle main-d’Ɠuvre rurale et de nouvelles troupes permanentes alors que les citoyens romains de naissance hĂ©sitent de plus en plus Ă  s’enrĂŽler dans l’armĂ©e mĂȘme si par la suite, on constate que les soldes Ă©levĂ©es consenties aux nouveaux soldats constituent un poids financier important. Ces mĂȘmes chercheurs considĂšrent donc plutĂŽt ce traitĂ© de 382 comme le dĂ©but du processus devant mener Ă  la crĂ©ation de royaumes barbares sur le territoire de l’empire[54].

Les Goths à la fois « fédérés » et ennemis de Rome

Les nouveaux fĂ©dĂ©rĂ©s jouent un rĂŽle important dans la politique militaire de ThĂ©odose. Celui-ci poursuit avec dĂ©termination une politique rĂ©aliste et, contrairement Ă  ce que prĂ©tend JordanĂšs, n'a pas Ă©tĂ© qu’« un ami des Goths »[55] comme en tĂ©moigne le taux Ă©levĂ© de pertes au sein de leurs troupes. Toutefois, la politique d’intĂ©gration menĂ©e par l’empereur ne rĂ©ussit pas Ă  rĂ©concilier tous les Goths. Si certains, comme Fravitta demeurent fidĂšles Ă  Rome, d’autres considĂšrent les concessions du traitĂ© comme insuffisantes. DĂ©jĂ  en 391 certains d’entre eux se sont rĂ©voltĂ©s et ne sont dĂ©faits par le gĂ©nĂ©ral romain Stilicon qu’avec difficultĂ©. En 392, le traitĂ© de 382 est renouvelĂ© ; c’est Ă  cette occasion que l’on voit apparaĂźtre pour la premiĂšre fois dans les sources le nom d’Alaric, descendant de la famille aristocratique des Balthes et chef d’un nouveau peuple Ă©mergeant, les Wisigoths[56].

diptyque de Stilicho
Diptyque montrant le généralissime Stilicon avec son épouse Serena et leur fils Eucherius (vers 395).

En 394, dans la guerre qui l’oppose Ă  l’usurpateur EugĂšne, l’armĂ©e de ThĂ©odose comprend des troupes romaines sous le commandement de Timasius et de Stilicon, des fĂ©dĂ©rĂ©s goths sous celui d’Alaric et de GaĂŻnas et des contingents orientaux (ArmĂ©niens, Arabes et MĂšdes) placĂ©s sous la direction du prince gĂ©orgien Bacurius. Les Goths essuient Ă  cette occasion de lourdes pertes ; il n’est pas impossible que ThĂ©odose ait agi dĂ©libĂ©rĂ©ment pour affaiblir un ennemi potentiel. La mort de ThĂ©odose Ă  Milan en 395 dĂ©gage les parties de leurs obligations ; les Goths reçoivent ainsi la permission de retourner Ă  l’Est mais se rendent alors compte bientĂŽt que les territoires qui leur avaient Ă©tĂ© allouĂ©s ont Ă©tĂ© dĂ©vastĂ©s par les Huns. Amer, Alaric se dirige vers Constantinople pour obtenir de force un nouveau traitĂ©[57]. Les deux annĂ©es suivantes, les alĂ©as de la confrontation entre Rome et les Goths sont nombreux, Stilicon s'opposant aux Wisigoths pendant qu’Alaric multiplie les allers-retours entre l’est et l’ouest. De plus, la partition de 395 entre les deux fils de ThĂ©odose, Honorius (Occident) et Arcadius (Orient), entraĂźne de nouveaux conflits qui s’exacerbent rapidement.

Arcadius doit finalement acheter la paix en nommant Alaric magister militum per Illyricum et en chargeant les Wisigoths d'occuper l'Illyrie que l'empereur d'Occident Honorius contrĂŽle, prĂ©tend-il alors, au mĂ©pris de ses droits. En 397, les Goths occupent la rĂ©gion puis l'abandonnent en 401, probablement en raison du dĂ©veloppement du sentiment anti-Goths en plein essor en Orient et du caractĂšre Ăąpre de la rĂ©gion. Les bandes se mettent en route vers l'Italie toute proche en longeant les rivages de l'Adriatique. Pour sauver l'Italie menacĂ©e, l'Occident rĂ©unit toutes ses forces en un effort suprĂȘme. Stilicon rappelle de Gaule, de Norique, de RhĂ©tie, les lĂ©gions qui dĂ©fendent le passage du Rhin et du Danube. Il dĂ©fait les barbares dans deux grandes batailles, Ă  Pollentia et Ă  VĂ©rone, et les rejette dans le Frioul. MalgrĂ© ces victoires, les finances Ă©puisĂ©es de l'Empire ne lui permettent plus d'entretenir sur les frontiĂšres des armĂ©es solides capables de contenir partout la poussĂ©e des Germains refoulĂ©s par Attila dont les hordes continuent Ă  s'avancer triomphantes vers l'ouest. Stilicon n'avait sauvĂ© l'Italie qu'en laissant sans dĂ©fense toutes les provinces situĂ©es au nord des Alpes[58].

AprĂšs quelques annĂ©es, Stilicon, devenu le vĂ©ritable homme fort de l’Occident, cherche Ă  se servir des Goths Ă  ses propres fins[59]. Il planifie une expĂ©dition pour rĂ©cupĂ©rer l’Illyrie, mais doit renoncer Ă  cette entreprise en 406, lorsque, de façon imprĂ©vue, des bandes de Germains venant de Norique et de RhĂ©tie traversent les Alpes sous la conduite de Radagaise, ravagent la Cisalpine et marchent vers Rome en demandant des terres. Une seconde fois, Stilicon doit rĂ©unir ses troupes en toute hĂąte et rĂ©ussit Ă  dĂ©faire les troupes de Radagaise prĂšs de Florence[60]. Pour sa part, Alaric, sentant monter en Occident une haine antigermanique semblable Ă  celle qui s’est manifestĂ©e quelques annĂ©es plus tĂŽt en Orient, amĂšne ses propres troupes sur la frontiĂšre italienne en 401 et exige du gouvernement impĂ©rial de Ravenne une importante compensation financiĂšre[61]. De plus en plus isolĂ© Ă  la cour de Ravenne, Stilicon n’intervient pas lorsque, en aoĂ»t 408, des soldats de nationalitĂ© romaine massacrent les chefs germaniques prĂ©sents dans l’entourage de l’empereur. AbandonnĂ© par ses alliĂ©s goths, Stilicon est exĂ©cutĂ© le mĂȘme mois.

La conquĂȘte et le sac de Rome en 410

sac de Rome par Alaric
Le sac de Rome par Alaric en 410 d'aprÚs une miniature française du XVe siÚcle.

En novembre 408, les non-catholiques sont exclus du palais ; Ă  travers l’Italie, les familles des soldats goths sont massacrĂ©es. DĂšs la fin de la mĂȘme annĂ©e, Alaric prend acte de ce changement de politique, faisant pression sur l'autoritĂ© romaine : ses armĂ©es, intactes, sont renforcĂ©es par divers contingents goths qui avaient servi dans l’armĂ©e romaine sous Stilicon, dont 12 000 soldats ayant dĂ©sertĂ© les forces de Radagaise. Le faible empereur Honorius refuse de nĂ©gocier, si bien qu’Alaric dĂ©cide de dĂ©noncer le traitĂ© conclu prĂ©cĂ©demment et de marcher sur Rome, ce qu’il fait Ă  trois reprises. Depuis des annĂ©es, Rome n’est plus la capitale de l’empire, mais la ville n'a alors rien perdu de sa valeur symbolique. En octobre 408, la population de Rome, soumise Ă  la famine, peut empĂȘcher la destruction de la ville en versant un fort tribut[62]. MalgrĂ© cela, ni les sĂ©nateurs ni l’évĂȘque de Rome ne parviennent Ă  convaincre l’empereur en sĂ©curitĂ© Ă  Ravenne de nĂ©gocier, de telle sorte qu’Alaric se prĂ©sente Ă  nouveau aux portes de Rome oĂč il fait nommer empereur le sĂ©nateur Priscus Attale. Ce dernier ne rĂ©pond pas toutefois aux attentes d’Alaric et est dĂ©mis quelque deux ans plus tard. En mĂȘme temps s’effondrent les espoirs d’Alaric de pouvoir traverser la mer vers l'Afrique du Nord. À tout le moins, les Goths parviennent-ils Ă  battre le gĂ©nĂ©ral romain Sarus, un ancien concurrent d’Alaric Ă  la tĂȘte des Goths[63]. À court d’options, Alaric ne voit qu’une solution : le , les Goths s’emparent de l’ancienne mĂ©tropole sur le Tibre et la mettent Ă  sac. Alaric, chrĂ©tien comme la plupart des Goths, ordonne simplement d’épargner les Ă©glises[64].

La responsabilitĂ© du sac de Rome, le premier depuis l’invasion des Gaulois en , est due sans nul doute Ă  l’entĂȘtement d’Honorius. Celui-ci a mal Ă©valuĂ© la gravitĂ© de la situation et se trouve privĂ© de conseillers de poids tel Stilicon pour faire face aux Goths. Rome survit Ă  ce pillage. Pendant trois ans, les Goths demeurent en Italie. Passant par la Campanie, Alaric souhaite les conduire en Sicile mais il meurt subitement non loin de Cosenza en 410. Les Wisigoths reconnaissent comme successeur d'Alaric son beau-frĂšre Athaulf. Pour se dĂ©barrasser de lui, Honorius se rĂ©signe Ă  lui donner en mariage sa sƓur Galla Placidia et le charge d'employer ses forces Ă  expulser les Vandales qui occupent encore le sud de la Gaule. C’est lĂ , entre 416 et 418, qu’un accord finit par ĂȘtre conclu qui leur donne des terres fertiles en Aquitaine seconde et voit leur chef reconnu comme interlocuteur officiel de Rome[65]. La politique de Rome Ă  l'Ă©gard des Goths a Ă©voluĂ©, et huit ans aprĂšs le sac de Rome leur Ă©tablissement en Gaule est perçu comme un moyen de stabiliser l’empire.

La prise de Rome et son pillage font courir une onde de choc Ă  travers l’empire. Chez les chrĂ©tiens, on la considĂšre parfois comme prĂ©mices de la fin du monde, alors que les paĂŻens y voient une punition pour un peuple qui s’est dĂ©tournĂ© des dieux ancestraux. Augustin d'Hippone (aujourd’hui Annaba en AlgĂ©rie) y trouve la source d’inspiration pour son Ɠuvre De Civitate Dei contra paganos dans laquelle il relativise l’évĂ©nement, dĂ©liant le sort du christianisme de celui de l'Empire. En revanche, l’historien chrĂ©tien Paul Orose tente dans son Ɠuvre Historiae adversum paganos de dĂ©montrer que la Rome paĂŻenne mĂ©rite un destin encore pire que celui qui lui a Ă©tĂ© rĂ©servĂ©. Les effets de ces discussions entre spĂ©cialistes sont profonds, moins sur le plan politique toutefois que philosophique, et se font ainsi sentir pendant des siĂšcles[66].

La débùcle sur la frontiÚre du Rhin : invasions et usurpations

Le , plusieurs tribus barbares traversent le Rhin gelĂ© Ă  proximitĂ© de Mogontiacum (aujourd’hui Mayence). Les raisons de cette traversĂ©e divisent encore les historiens qui hĂ©sitent entre la fuite devant les Huns ou des expĂ©ditions de pillage[67]. Les Vandales, les SuĂšves et les Alains constituent les trois principaux peuples mĂȘlĂ©s de cette traversĂ©e. Les Vandales, divisĂ©s en deux groupes, les Hasdings et les Sillings, sont Ă©tablis vers l’an 400 dans le sud de ce que sont aujourd’hui la Pologne et la BohĂȘme, quoiqu’une partie d’entre eux ait Ă©tĂ© fixĂ©e par l’empereur Constantin en Pannonie[68]. Pendant l’hiver 401/402, ils attaquent par surprise la province romaine de RhĂ©tie ; une partie d’entre eux se joint Ă  l’expĂ©dition de Radagaise. Il est plus difficile de dĂ©terminer l’origine des SuĂšves. Si ce nom apparaĂźt dans les sources du dĂ©but de l’empire, il disparaĂźt entre 150 et 400 et dĂ©signe probablement certains groupes marcomans et quades, anciens membres de l’ancienne confĂ©dĂ©ration suĂšve qui se sont Ă©tablis, comme les Vandales, dans la rĂ©gion du moyen Danube, Ă  l’ouest des Carpates[69]. Les Alains iraniens ont Ă©tĂ© chassĂ©s de leurs territoires traditionnels par les Huns. Une partie d’entre eux s’est jointe en 405/406 aux forces de Radagaise pour se mĂȘler par la suite aux Vandales. Les SuĂšves finissent par les rejoindre et, de concert, ils s’enfoncent Ă  l’intĂ©rieur de la Gaule. Les Francs fĂ©dĂ©rĂ©s, Ă©tablis sur ces territoires depuis le milieu du IVe siĂšcle, Ă©chouent dans leurs tentatives d'arrĂȘter les assaillants. Les sources ne nous permettent pas de suivre chacune des invasions dans tous ses dĂ©tails. Selon toute apparence, les envahisseurs se dirigent d’abord vers l’ouest et le nord de la Gaule avant de faire demi-tour et de se diriger vers le sud et le sud-ouest[70]. Les sources indiquent clairement les ravages perpĂ©trĂ©s lors de cette invasion sans que les quelques troupes romaines stationnĂ©es sur le Rhin puissent vĂ©ritablement s’y opposer. Toutefois, quelques annĂ©es plus tard, la dĂ©fense du Rhin est, pour quelque temps du moins, renforcĂ©e. Le district militaire de Mayence parvient Ă  ĂȘtre rĂ©tabli Ă  la suite de cette invasion de 406/407.

Le passage du Rhin de 406/407, comparable Ă  la rupture d’une digue, constitue un Ă©vĂ©nement prĂ©visible depuis quelque temps dĂ©jĂ . C’est ainsi que vers 400, le siĂšge de la prĂ©fecture des Gaules, qui avec la prĂ©fecture de l’Italie constitue l’autoritĂ© administrative la plus au nord de l’empire occidental, a Ă©tĂ© transfĂ©rĂ© de TrĂšves Ă  Arles. Le succĂšs des envahisseurs a bĂ©nĂ©ficiĂ© des combats dĂ©crits plus haut entre Stilicon d’une part, Radagaise et les Goths d’autre part, de telle sorte que la Gaule se trouve pratiquement vide de troupes. C’est probablement ce qui explique les tentatives de Stilicon pour gagner les Goths d’Alaric et, avec leur aide, de rĂ©tablir l’ordre. La mort du gĂ©nĂ©ral en 408 avait mis fin Ă  ces plans. L’usurpateur Constantin III, le dernier d’une longue liste d’usurpateurs venant de Bretagne, est passĂ© avec le reste des troupes britanniques en Gaule et y a Ă©tabli sa propre autoritĂ©[71]. Le dĂ©part des troupes romaines de l’üle laisse prĂ©sager Ă  court terme la perte de la Bretagne ; les Pictes et diverses tribus irlandaises s’établissent dans cette province romaine qui acquiert de facto un statut d’autonomie. Ce sur quoi on appelle les Saxons Ă  l’aide en 440, permettant une mainmise germanique dans l'Ăźle, mĂȘme si de petits royaumes romains-britanniques sont en mesure de subsister pendant longtemps dans le pays de Galles et le sud-ouest de l’Angleterre[72].

PiĂšce en or de Constantin III
Solidus de l'usurpateur Constantin III.

ProclamĂ© empereur par ses troupes en 407, Constantin III parvient Ă  conclure des ententes avec certaines tribus germaniques de Gaule, calmant ainsi l’agitation qui y rĂšgne tout en augmentant ses propres forces. AprĂšs avoir Ă©tabli sa rĂ©sidence Ă  Arles dans le sud de la Gaule, il Ă©tend son autoritĂ© sur l’Hispanie. Fin 409, il ne peut cependant arrĂȘter l’invasion des Vandales, des Alains et des SuĂšves, qui s’installent en Espagne ; il finit par ĂȘtre dĂ©fait par le gĂ©nĂ©ral Constantius (futur Constance III) et exĂ©cutĂ© en novembre 411. En dĂ©pit de cette dĂ©faite, l’agitation reprend de plus belle en Gaule lorsque l’aristocratie gauloise proclame empereur l’un des siens, Jovin, avec l’aide des Alains commandĂ©s par Goar et des Burgondes qui avancent sur le Rhin pour crĂ©er bientĂŽt leur propre royaume[73].

L’empereur Honorius semble avoir perdu tout contrĂŽle sur la Gaule. Un nouvel usurpateur, Maxime, qui ne parvient pas Ă  s'imposer durablement, Ă©merge d'Hispanie. Alors conduits par Athaulf, successeur d’Alaric, les Goths, retirĂ©s de Rome, appuient Jovin. Tout comme cela avait Ă©tĂ© le cas pour un autre usurpateur, Attale, cette alliance ne devait guĂšre durer et Athaulf abandonne rapidement Jovin[74]. Athaulf Ă©pouse en 414 Ă  Narbonne la sƓur d’Honorius, Galla Placidia, tombĂ©e aux mains des Goths lors du sac de Rome ; l’annĂ©e suivante toutefois, il meurt assassinĂ©. Athaulf a transformĂ© les Goths en une sorte d’armĂ©e nomade Ă  cheval[75] ; il aurait dĂ©clarĂ© pendant les cĂ©rĂ©monies du mariage qu’il dĂ©sirait remplacer la Romania par une Gothia[76]. Que l’anecdote soit vraie ou fausse, elle montre que les Goths dĂ©sirent s’établir de façon permanente sur un territoire reconnu comme leur par Rome. C’est aussi ce qui explique pourquoi Athaulf dĂ©sirait fortement s’allier par mariage Ă  la dynastie thĂ©odosienne, chose qui lui Ă©tait difficile en tant que Goth et chrĂ©tien professant l’arianisme.

L’établissement des Goths en Aquitaine

Constantius, le gĂ©nĂ©ral en chef d’Honorius, a fait preuve de grand talent militaire au cours de la guerre contre l’usurpateur Constantin III. Il est alors devenu Ă©vident que des ressources humaines supplĂ©mentaires seront nĂ©cessaires si on veut lutter avec succĂšs contre les envahisseurs. Le gouvernement de la partie occidentale de l’empire fait donc Ă  nouveau appel aux Goths. Leur chef depuis la fin de 415 Ă©tait Wallia ; son but principal Ă©tait de poursuivre la guerre contre les Romains afin de pouvoir rejoindre l'Afrique du Nord. DĂšs les premiers mois de 416, il doit toutefois capituler devant Constantius. Gallia Placidia fait un retour sur la scĂšne en Ă©pousant ce dernier le . Constantius apparaĂźt ainsi de plus en plus comme l’hĂ©ritier de Stilicon[77]. Les Goths deviennent des foederati et Constantius les oblige Ă  combattre les Germains et les Alains qui se sont abattus sur l’Hispanie, ce que les Goths font avec un certain succĂšs[78].

En 418, les Wisigoths se voient assigner l’Aquitaine seconde dans le sud-ouest de la Gaule comme foyer permanent. Les clauses des traitĂ©s de 416 ou de 418 ne nous sont pas connues et doivent ĂȘtre dĂ©duites de citations Ă©parses Ă©manant des sources[79]. La recherche contemporaine demeure ainsi divisĂ©e sur des points essentiels. L’assujettissement (deditio) Ă©tait la consĂ©quence logique d’un traitĂ© (fƓdus) : les Wisigoths seraient installĂ©s dans la vallĂ©e de la Garonne de Toulouse Ă  Bordeaux. L’une des grandes questions est de savoir si les Goths, comme il Ă©tait d’usage dans le systĂšme des fĂ©dĂ©rĂ©s romains, devaient ĂȘtre approvisionnĂ©s conformĂ©ment au systĂšme de l’hospitalitas en se voyant assigner des terres ou s’ils recevaient une quote-part des recettes fiscales[80]. Tout autant que les diffĂ©rentes modalitĂ©s du traitĂ©, les consĂ©quences de cette colonisation prĂȘtent encore Ă  controverse. Ainsi, la politique de plus en plus expansionniste que pratiqueront par la suite les Wisigoths, rĂ©sultat de la faiblesse du gouvernement romain, conduira Ă  l’obtention d’un statut d’autonomie de fait ; la crĂ©ation d’un soi-disant royaume des Goths avec Toulouse comme premiĂšre capitale, TolĂšde ensuite, aurait Ă©tĂ© un facteur de stabilitĂ© dans la rĂ©gion[81]. Cette colonisation se serait faite avec l’accord de la haute sociĂ©tĂ© gallo-romaine qui n’y voyait pas de menace puisque les Goths ne constituaient qu’une petite fraction de la population romaine locale, remarque qui vaut de façon gĂ©nĂ©rale pour toutes les gentes qui se mirent en marche durant cette pĂ©riode[82].

Les Vandales en Hispanie et la conquĂȘte de la province d’Afrique

carte des migrations vandales
Carte illustrant l'invasion des Vandales.

Dans l’intervalle, les Vandales, de mĂȘme qu’une large partie des SuĂšves et des Alains, ont quittĂ© la Gaule en 409 pour se diriger vers l’Hispanie[83]. L’une des sources les plus importantes pour les Ă©vĂ©nements qui se produisent dans la pĂ©ninsule ibĂ©rique est les Chroniques de l’évĂȘque Hydace de Chaves. Celui-ci raconte avec Ă©loquence l’épouvante que ressentit la population face Ă  la dĂ©vastation qui suivit l’arrivĂ©e des envahisseurs. En 411, ceux-ci peuvent arracher de haute lutte un traitĂ© au gouvernement de Ravenne dont l’évĂȘque Hydace nous rapporte le contenu : une partie des Vandales et des SuĂšves se voient attribuer le nord-ouest de la pĂ©ninsule ibĂ©rique, les Alains la Lusitanie et la rĂ©gion de CarthagĂšne, les Vandales Silings la BĂ©tique (Ă  peu prĂšs l’actuelle Andalousie)[84]. Lorsqu’en 416 les Wisigoths descendent en Hispanie Ă  titre de peuple fĂ©dĂ©rĂ© pour dĂ©barrasser la pĂ©ninsule des envahisseurs, ils massacrent la majoritĂ© des Silings et des Alains qui s’étaient installĂ©s dans le sud. Les survivants se rĂ©unissent autour du roi vandale GondĂ©ric. Celui-ci se rĂ©vĂšle rassembleur, de telle sorte qu’Alains et Vandales ne forment plus rapidement qu’un groupe homogĂšne. Alors que les SuĂšves demeurent dans le nord-ouest, les Vandales et les Alains se dirigent vers le sud. En 422, ils battent une armĂ©e romaine et conquiĂšrent le principal port de la flotte romaine, CarthagĂšne. TrĂšs rapidement, ils se transforment en audacieux pirates[85].

AprĂšs la mort de GondĂ©ric, son demi-frĂšre GensĂ©ric (ou Geiseric) prend le commandement en 428. Il sera l’un des plus remarquables chefs de toute la pĂ©riode des grandes migrations[86]. JordanĂšs, dans son Histoire des Goths, nous a laissĂ© un portrait dĂ©taillĂ© de GeisĂ©ric bien que l’on puisse se demander si, rĂ©digĂ© bien aprĂšs la mort du roi vandale, il correspondait vraiment Ă  la rĂ©alitĂ©[87]. Nous n’avons malheureusement pas de tĂ©moignage des Vandales eux-mĂȘmes. GeisĂ©ric Ă©tait certainement un chef dĂ©terminĂ© et un homme avide de pouvoir pouvant agir lorsque nĂ©cessaire avec la plus grande brutalitĂ©. Afin d’assurer ce pouvoir, il n’hĂ©site pas du reste Ă  faire assassiner la famille de GondĂ©ric. Il Ă©tait Ă©galement un militaire et un politique habile dont la suite des Ă©vĂ©nements confirmera les capacitĂ©s. En 429, les Vandales et divers groupes qui s’étaient joints Ă  eux, soit environ 80 000 personnes, traversent le dĂ©troit de Gibraltar et s’installent en Afrique du Nord[88]. Leur but est de s’emparer de la province d’Afrique, grenier de l’empire occidental et l’une des rĂ©gions les plus urbanisĂ©es de tout l’empire. Les Wisigoths s’étaient donnĂ© le mĂȘme but aprĂšs le sac de Rome, mais avaient Ă©chouĂ©.

Bijoux vandales en feuille d'or du IIIe ou IVe siĂšcle

Les Vandales partent donc de Ceuta pour franchir quelque 2 000 km en direction de l’est, s’emparant au passage de nombreuses villes romaines. En 430, ils se retrouvent devant Hippone dont l’évĂȘque, cĂ©lĂšbre thĂ©ologien, Augustin d'Hippone (saint Augustin), meurt pendant le siĂšge. Les Vandales prennent ensuite la direction de Carthage, qui Ă  cette Ă©poque Ă©tait l’une des plus grandes villes de l’empire ainsi que l’un de ses ports les plus importants. Bien qu’ils ne rĂ©ussissent pas Ă  s’emparer de la ville[89], les Vandales accomplissent quelques remarquables exploits dont la toile de fond est rapportĂ©e diffĂ©remment par les diverses sources. C’est ainsi que Procope de CĂ©sarĂ©e, Ă©crivain ayant vĂ©cu au VIe siĂšcle, rapporte dans le cadre de ses Histoires (ou Histoires de la guerre) que les Vandales auraient Ă©tĂ© invitĂ©s suivant les rĂšgles par le commandant romain pour l’Afrique, Boniface, parce qu’il avait eu maille Ă  partir avec Ravenne[90]. La recherche contemporaine ne retient gĂ©nĂ©ralement pas cette hypothĂšse[91], car Boniface combattit les Vandales dĂšs que ceux-ci se mirent en marche avec tous les moyens Ă  sa disposition[92]. De plus, la situation entre Ravenne et Boniface s’était dĂ©jĂ  rĂ©gularisĂ©e en 429, ce dont ne parlent pas les sources de l’époque[93].

Quoi qu'il en soit, les moyens dont dispose l’empire d’Occident ne suffisent pas Ă  arrĂȘter les Vandales. Afin de pouvoir se maintenir Ă  Carthage, l’empire d’Occident se rĂ©sout Ă  conclure en 435 un traitĂ© dont les clauses ne nous sont pas connues. Les Vandales se voient concĂ©der la partie de la province dĂ©jĂ  conquise. Pourtant, en 439, GeisĂ©ric profitant de l’occasion tombe sur Carthage oĂč il s’empare de la flotte romaine qui y est stationnĂ©e, coupant ainsi Rome de son approvisionnement traditionnel en cĂ©rĂ©ales. L’empire d’Occident n’a d’autre choix que de reconnaĂźtre sa dĂ©faite dans un nouveau traitĂ© en 442[94]. La plus riche des provinces romaines Ă©tait maintenant officiellement aux mains des Germains qui, de plus, devenaient une puissance maritime non nĂ©gligeable. Sur ce point, les Vandales se distinguent des autres peuples germains, de mĂȘme qu'ils le feront dans le traitement rĂ©servĂ© aux populations locales autochtones.

L’empire des Huns sur le Danube et l’ascension d’Ætius

Les sources nous informent que les Huns franchissent le Don en 375 et qu’ils battent les Alains et les Greuthungues ; elles sont pratiquement inexistantes pour les dĂ©cennies qui suivent. Nous savons seulement que les Huns multiplient les razzias[95]. Pendant longtemps, ils ne semblent pas avoir agi sous un commandement unifiĂ©, ni mĂȘme avoir eu une politique commune[96]. Pourtant, les Huns se montrent capables de coordonner des opĂ©rations militaires, comme le prouve leur invasion de l’empire sassanide et des provinces romaines orientales Ă  l’étĂ© de 395[97]. L’hiver de la mĂȘme annĂ©e, d’importants contingents de Huns se ruent sur les Balkans[98]. Toutefois, on ne peut encore parler Ă  cette Ă©poque d’un empire hunnique, car on ne peut distinguer une forme d’organisation qui rĂ©unisse tous les groupes.

Le premier souverain que l’on puisse concrĂštement identifier Ă  la tĂȘte des Huns (la figure de Balamir ou Balamber n’est aucunement certaine) est un certain Uldin, qui aux environs de 400 rĂšgne sur les Huns au nord du bas-Danube, peut-ĂȘtre dans le territoire qui est aujourd’hui la Roumanie[99]. Au cours de la mĂȘme pĂ©riode, le maĂźtre des milices GaĂŻnas, un Goth, tente de jouer auprĂšs de l’empereur Arcadius, Ă  la cour de Constantinople, un rĂŽle similaire Ă  celui de Stilicon Ă  l’Ouest. Ceci traduit Ă  la fois l’importance du rĂŽle jouĂ© par ce « maĂźtre des milices » (magister militum) qui, en Orient, peut ĂȘtre beaucoup mieux contrĂŽlĂ© au Ve siĂšcle que ce n'est le cas en Occident, et le poids des foederati dans l’empire. AprĂšs l’arrivĂ©e au pouvoir de l’antigermanique AurĂ©lien, devenu prĂ©fet du prĂ©toire, GaĂŻnas entre Ă  Constantinople avec ses barbares, mais la quitte bientĂŽt, ce qui donne le signal d’un massacre de Goths dans la ville. TraquĂ© par le Goth paĂŻen Fravitta, GaĂŻnas passe le Danube, et il est battu par Uldin[100]. Ce dernier, dont le territoire s’étend Ă  l’ouest jusqu’à la Hongrie d’aujourd’hui, conclut un accord avec Stilicon en 406 pour arrĂȘter la progression des Goths de Radagaise. Bien qu'Uldin commande un vaste territoire, Ă  aucun moment il ne peut prĂ©tendre rĂ©gner sur l’ensemble des Huns[99]. En 404/405, Uldin s’est dĂ©jĂ  emparĂ© de territoires appartenant Ă  l’empire d’Orient, exploit qu’il rĂ©pĂšte en 408. Il doit cependant les rendre par la suite, et meurt peu aprĂšs.

Attila envahit l'Italie
Attila et ses hordes envahissant l'Italie d'aprĂšs EugĂšne Delacroix (1798-1863).

Alors que le mouvement vers l’ouest des Huns s'est heurtĂ© ici et lĂ  Ă  une vive rĂ©sistance d’autres groupes barbares[101], on assiste Ă  la lente crĂ©ation d’un centre d’autoritĂ© suprarĂ©gional dans l’est des Carpates. Malheureusement, nous ne disposons que de trĂšs peu d’informations Ă  ce sujet[102]. Les rares sources font toutefois mention Ă  plusieurs reprises de troupes de Huns venant en appui Ă  l’armĂ©e romaine. En 427, les Romains auraient fini par cĂ©der la Pannonie aux Huns, mais le fait est contestĂ©[103]. Divers leaders prĂ©sident aux destinĂ©es des Huns comme Charaton mais nous savons peu de choses Ă  leur sujet. Vers 430, les deux frĂšres Oktar et Ruga sont portĂ©s Ă  la tĂȘte des Huns vivant le long du Danube. AprĂšs la mort d’Oktar en 430, Ruga continue seul Ă  rĂ©gner et semble avoir rĂ©ussi Ă  imposer un pouvoir plus organisĂ© que ce n’avait Ă©tĂ© le cas auparavant. En 433, le gĂ©nĂ©ral Flavius Ætius, nommĂ© magister militum per Gallias, conclut un accord avec Ruga[104]. ÉlevĂ© Ă  la cour impĂ©riale de Ravenne, et plus tard envoyĂ© comme otage Ă  la cour d'Alaric, puis Ă  celle de Ruga, il devient un ami du jeune Attila, neveu de Ruga (et son futur successeur). Pendant des annĂ©es, Ætius se sert de diverses tribus, dont les Huns, pour combattre Wisigoths, Burgondes, Alains, Francs et autres, dĂ©fendant ainsi le trĂŽne de Valentinien III et devenant le vĂ©ritable maĂźtre de l'empire d'Occident[105]. En 436, Ætius bat Ă©galement les Burgondes du roi Gondicaire et les oblige Ă  accepter la paix. L’annĂ©e suivante, il envoie les Huns les dĂ©truire ; 20 000 Burgondes pĂ©rissent alors dans une bataille, base possible Ă  la lĂ©gende des Nibelungen. En 443, il nĂ©gocie la rĂ©installation des Burgondes survivants en Sapaudie (la future Savoie, prĂ©cisĂ©ment les territoires entre Alpes et Jura)[106]. Il relocalise Ă©galement dans la rĂ©gion d’OrlĂ©ans une partie des Alamans demeurĂ©s en Gaule[107]. Dans ses efforts pour maintenir la souverainetĂ© de l’Empire sur la Gaule, il combat les Francs qui s’établissent progressivement sur le Rhin, ainsi que les Bagaudes qui s’agitent en Gaule et en Hispanie.

Ruga meurt en 434. Il n’est pas impossible qu’il ait Ă©tĂ© assassinĂ© sur l’ordre de ses neveux Bleda et Attila qui prennent alors le commandement d’une grande partie des Huns maintenant Ă©tablis en Europe.

Attila, chef des Huns

Bien qu’Attila ait acquis une renommĂ©e considĂ©rable quoique nĂ©gative dans l’histoire de l’Europe, on sait relativement peu de choses sur sa personne et encore moins sur sa jeunesse[108]. AprĂšs sa prise du pouvoir, en association avec son frĂšre Bleda, il se met en devoir de consolider « l’empire des Huns » fondĂ© par son oncle Ruga.

Par le traitĂ© de paix de Margus (actuel OraĆĄje, Ă  l’embouchure de la Morava), dont la date est incertaine, Constantinople accepte de ne plus s’allier aux ennemis « barbares » des Huns et le tribut annuel versĂ© est portĂ© Ă  700 livres d’or (229 kg). De plus, les Romains s’engagent Ă  ouvrir un marchĂ©, dont la sĂ©curitĂ© sera garantie par les deux parties, et Ă  extrader les dĂ©serteurs se rendant chez eux en provenance du territoire des Huns. En dĂ©pit de ce traitĂ©, les deux frĂšres conduisent une expĂ©dition contre l’empire d’Orient en 441 et 442 leur permettant de s’emparer des villes de Singidunum (Belgrade) et de Sirmium (Sremska Mitrovica)[109]. AprĂšs le meurtre de Bleda (probablement en 445), Attila devient le seul chef des Huns du Danube. À aucun moment de sa vie Attila n'a Ă©tĂ© le chef de tous les Huns. Pour consolider son pouvoir sur son empire alors trĂšs lĂąche, Attila entreprend de nombreuses expĂ©ditions dirigĂ©es contre l’empire d’Orient. C’est ainsi qu’en 447, et bien que l’empereur ThĂ©odose II ait relevĂ© le tribut qui leur Ă©tait versĂ©, les Huns s’enfoncent profondĂ©ment dans les Balkans et se rendent jusqu’aux portes de la GrĂšce[110]. Parmi les peuples appartenant Ă  leur armĂ©e se trouvent des GĂ©pides et des Goths sous domination hunnique[111]. BientĂŽt l’empereur est forcĂ© de conclure la paix avec Attila.

Les difficultĂ©s Ă©prouvĂ©es par l’Empire romain d'Orient ne peuvent que rĂ©jouir le faible Valentinien III, empereur d'Occident montĂ© sur le trĂŽne encore enfant. La domination exercĂ©e par les Huns sur bon nombre de tribus germaniques rĂ©duit les risques d’invasion Ă  la condition que la cour de Ravenne entretienne de bonnes relations avec les chefs des Huns[112]. C’est ce Ă  quoi s’emploie Aetius, en excellents contacts avec Ruga et partisan de maintenir cette politique avec Attila dont il a Ă©tĂ© l’ami d’enfance. À Constantinople toutefois on n’entend pas financer Attila indĂ©finiment. En 449, une ambassade est envoyĂ©e par Constantinople auprĂšs d’Attila, dont fait partie Priscus (ou Priskos). Celui-ci fera plus tard le rĂ©cit de cette ambassade dans une chronique dont seuls quelques fragments nous sont parvenus. Il dĂ©crit une ville de tentes autour d’un promontoire oĂč se dresse le palais royal construit en bois et entourĂ© d’une haute palissade garnie de tours[113].

carte de l'empire des Huns
Carte montrant l'empire des Huns sous Attila (vers 450).

Lorsqu’à Constantinople Marcien, le nouvel empereur, s'oppose au versement du tribut traditionnel, Attila se tourne vers l’Ouest. JordanĂšs, qui sĂ©journe Ă  Constantinople en 451, rapporte que Honoria, la sƓur de l’empereur d'Occident, menacĂ©e d’ĂȘtre mariĂ©e de force en raison de son style de vie libertin, aurait demandĂ© Ă  Attila de la libĂ©rer et aurait offert de l’épouser[114]. La recherche contemporaine a jetĂ© des doutes sur cette version des faits[115]. Cependant, il n’est pas impossible qu’Attila ait Ă©tĂ© en contact avec des mouvements d’opposition dans l’entourage de l’empereur d’Occident. Constamment aux aguets des avantages qu’il pouvait retirer de l’Est et de l’Ouest, Attila feint quelque dix ans plus tard de prendre cette proposition au sĂ©rieux et exige comme dot l’Aquitaine. Une telle demande compromet toutefois la position d’Aetius, magister militum per Gallias, le dressant contre son ami d’enfance[116].

En 451, Attila envahit la Gaule Ă  la tĂȘte d’une imposante armĂ©e, comprenant aux cĂŽtĂ©s des Huns un nombre indĂ©terminĂ© de contingents venant de tribus soumises ou versant tribut aux Huns. Toutefois ses efforts diplomatiques pour provoquer l’entrĂ©e en guerre des Vandales n’aboutissent pas[117]. Les Huns se dirigent vers OrlĂ©ans qu’ils assiĂšgent. Aetius rĂ©unit alors ce qui reste des forces rĂ©guliĂšres romaines dans la rĂ©gion, forces composĂ©es de plus en plus de soldats provenant de peuples fĂ©dĂ©rĂ©s comme les Wisigoths, les Francs, les Sarmates et les Alains. La cĂ©lĂšbre bataille des champs Catalauniques, dont on ignore toujours l’emplacement exact dans les environs de Troyes, n'a pas Ă©tĂ© la bataille dĂ©cisive si souvent dĂ©crite, mais Attila a Ă©tĂ© obligĂ© de se replier Ă  l'issue des combats. Il n’est pas impossible qu’Aetius ait laissĂ© submerger les Wisigoths qui formaient l’aile droite de son armĂ©e et dont le chef, ThĂ©odoric Ier, meurt au cours de la bataille, dans le but d’affaiblir un ennemi potentiel. Quoi qu'il en soit, il semble avoir craint que les Goths ne tentent de se libĂ©rer de la domination romaine avant que les Huns ne soient complĂštement vaincus[118]. Les Romains et leurs alliĂ©s, s’ils n’ont pu vaincre dĂ©finitivement les Huns, leur infligent de lourdes pertes dĂ©truisant ainsi le mythe de leur invincibilitĂ©. En 452, Attila est contraint de se retirer en Italie. Il y remporte quelques succĂšs, s’emparant entre autres d’AquilĂ©e. Cette conquĂȘte n'est toutefois pas dĂ©finitive. Affaiblis par la faim et la maladie, Attila et son armĂ©e doivent se replier[119]. Selon la tradition, le pape LĂ©on Ier le Grand rĂ©ussit Ă  convaincre Attila de renoncer Ă  envahir Rome ; en fait, le repli des Huns est plus probablement dĂ» au fait qu’à l’est l’empereur Marcien vient de dĂ©clencher les hostilitĂ©s en vue d’envahir le cƓur de l’empire hunnique[120]. Attila est ainsi forcĂ© de retourner en Pannonie pour prĂ©parer une offensive contre Marcien et protĂ©ger sa frontiĂšre orientale, notamment dans le Caucase. C’est lĂ  qu’il meurt subitement en 453 au cours de la nuit suivant un festin pour cĂ©lĂ©brer son mariage avec une nouvelle Ă©pouse, Ildiko.

La mort soudaine d’Attila entraĂźne le dĂ©membrement de son empire. La plupart des peuples soumis se rĂ©voltent et secouent le joug hunnique. C’est en vain que les fils d’Attila tentent de maintenir l’hĂ©ritage de leur pĂšre. La bataille de la Nedao en 454 oĂč les Ostrogoths combattent aux cĂŽtĂ©s des Huns marque la fin de cet empire[121]. L’empire des Huns s’écroule ainsi plus rapidement encore qu’il n’a Ă©tĂ© Ă©rigĂ©. La tĂȘte de Dengizich, fils d’Attila, est envoyĂ©e Ă  Constantinople pour y ĂȘtre exposĂ©e. Le reste des Huns se disperse ; on en retrouve encore au VIe siĂšcle dans l’armĂ©e romaine d’Orient[122]. Aetius pour sa part ne peut jouir longtemps de sa victoire : il est assassinĂ© en de la main mĂȘme de l’empereur Valentinien III qui craint le pouvoir qu’exerce son gĂ©nĂ©ral. Peu de temps aprĂšs, en , l’empereur doit lui-mĂȘme ĂȘtre assassinĂ©[123].

Les derniÚres années de Rome : les empereurs éphémÚres

La mort d’Aetius constitue un Ă©vĂ©nement lourd de consĂ©quences pour Rome. MĂȘme si le pouvoir impĂ©rial ne s’étend plus jusqu’aux limites de l’empire occidental, il subsiste en Italie et dans une partie des Gaules, conduisant avec succĂšs un certain nombre de guerres. L'ambition du militaire Aetius a certainement Ă©tĂ© une des raisons pour lesquelles le pouvoir impĂ©rial n'a cessĂ© de s’affaiblir. Aussi sa mort et celle de Valentinien III sont interprĂ©tĂ©es par de nombreux fĂ©dĂ©rĂ©s comme l'occasion d'accroĂźtre leur puissance aux dĂ©pens de celle de l'empire. L’empire d’Occident est ainsi gouvernĂ© pendant ses deux derniĂšres dĂ©cennies par des empereurs Ă©phĂ©mĂšres dont plusieurs ne restent que quelques mois au pouvoir et dont aucun ne parvient Ă  stabiliser la situation[124].

De surcroĂźt, les barbares forment maintenant non seulement le noyau des troupes d’élite de l’armĂ©e romaine, mais ils en occupent de plus en plus les Ă©chelons les plus Ă©levĂ©s. On ne peut mettre leur loyautĂ© en doute ; au contraire, plusieurs d’entre eux s’avĂšrent de fidĂšles serviteurs de l’empereur, tels Bauto, Stilicon, Fravitta, lesquels du reste tentent d'adopter le style de vie romain. Mais par la force des choses, plus s’accroĂźt le pouvoir des militaires de haut rang, plus s’amoindrit celui de l’empereur d’Occident, d’autant plus que des gens comme Stilicon, Ă  moitiĂ© Vandale, Aetius et BĂ©lisaire disposent de leurs troupes personnelles (bucellarii). MĂȘme si aucun gĂ©nĂ©ralissime germain ne revĂȘt lui-mĂȘme la pourpre, chose impossible tant en raison de son origine que de son appartenance Ă  l’hĂ©rĂ©sie arienne, ces chefs n’en jouissent pas moins Ă  partir de la fin du IVe siĂšcle d’une influence considĂ©rable. Au contraire, dans l’empire d’Orient, les empereurs rĂ©ussissent davantage Ă  garder le contrĂŽle des commandants de leurs armĂ©es. L’empereur LĂ©on Ier met fin Ă  la derniĂšre tentative vĂ©ritable d’un gĂ©nĂ©ral d’origine barbare, l’Alain Aspar, d’influencer la politique impĂ©riale[125]. Il faut porter au crĂ©dit des empereurs de Constantinople d’avoir au cours du Ve siĂšcle su renforcer les liens avec les maĂźtres du nouvel empire sassanide, traditionnellement ennemi jurĂ© de Byzance, les rendant meilleurs que jamais auparavant. MĂȘme lorsque, Ă  la suite de la mort d’Attila, la guerre Ă©clate dans les Balkans avec les tribus formant maintenant les Ostrogoths, qui souhaitent agrandir leur territoire de Pannonie, nul danger ne menace la stabilitĂ© de l’empire oriental dont les plus riches provinces ne sont guĂšre inquiĂ©tĂ©es[126]. Contrairement Ă  leurs homologues occidentaux, les empereurs d’Orient disposent des ressources financiĂšres nĂ©cessaires pour payer leurs armĂ©es et mĂȘme, Ă  l’occasion, pour fournir Ă  leurs homologues de Ravenne de quoi payer les leurs.

sac de Rome
Le sac de Rome par Genséric en 455. Toile de Karl Briullov (1799-1852).

Au cours du mĂȘme siĂšcle, les troubles de tous ordres se multiplient Ă  l’Ouest[127]. Rome est ainsi conquise et pillĂ©e une deuxiĂšme fois en quarante-cinq ans par les Vandales dont le roi, GensĂ©ric, considĂšre manifestement le traitĂ© conclu en 442 avec Valentinien III caduc Ă  la mort de cet empereur. Petronius Maximus, qui a Ă©pousĂ© la veuve de Valentinien III, Licinia Eudoxia, s’est emparĂ© du pouvoir aprĂšs le meurtre de celui-ci. En mai 455, une flotte vandale qui, l’annĂ©e prĂ©cĂ©dente a dĂ©jĂ  menacĂ© la Sicile, apparaĂźt aux bouches du Tibre. L’empereur, ne disposant pratiquement d’aucun pouvoir et totalement privĂ© de moyens, est assassinĂ© le par des soldats burgondes. Trois jours plus tard, les Vandales investissent la ville qu’ils pillent de façon systĂ©matique – mais non avec ce dĂ©sir de destruction que suggĂšre de nos jours le terme « vandale ». Les Vandales ne partent pas seulement avec un riche butin, mais aussi avec la veuve de Valentinien ainsi qu’avec deux de ses filles et de nombreux personnages importants qu’ils emmĂšnent prisonniers Ă  Carthage[128]. Aux environs de 460, l’une des filles de Valentinien, Eudoxie, Ă©pouse HunĂ©ric, le fils de GensĂ©ric, lui permettant de revendiquer pour lui-mĂȘme la Sicile et l’Italie au titre de l’hĂ©ritage de Valentinien.

Commence alors une pĂ©riode pendant laquelle des empereurs, crĂ©atures de chefs militaires et politiques germaniques, se succĂšdent rapidement. Le premier est Eparchus Avitus, descendant d’une noble famille gauloise et chef des armĂ©es, proclamĂ© empereur avec l’accord des Wisigoths, alors en campagne contre les SuĂšves aspirant Ă  agrandir leur royaume en Hispanie. En 456, le gĂ©nĂ©ral Flavius Ricimer, fils d’un prince suĂšve et d’une princesse goth, fait campagne contre les Vandales en Sicile et en Corse. Ricimer est alors Ă©levĂ© par Avitus au rang de magister militum. Cette victoire lui ayant valu une grande popularitĂ©, Ricimer obtient du SĂ©nat la permission de monter une expĂ©dition contre l’empereur Avitus qu’il dĂ©fait Ă  Plaisance le . Fait prisonnier, Avitus doit accepter la charge d’évĂȘque de Plaisance et meurt peu de temps aprĂšs. Ricimer obtient alors de l’empereur LĂ©on Ier le titre de Patrice des Romains alors que Majorien qui l’avait aidĂ© Ă  dĂ©faire Avitus le remplace comme magister militum.

Sur l’ordre de Ricimer, l’armĂ©e d’Italie acclame Majorien comme nouvel empereur[129]. Celui-ci se rend en Gaule combattre les Germains qui voulaient tirer profit de la confusion rĂ©gnant dans l’empire d’Occident[130]. Le nouveau magister militum nommĂ© par Majorien, Egidius, remporte de nombreux succĂšs contre les Francs sur le Rhin et reconquiert Lyon, pris par les Burgondes[131]. Arles, depuis 407 siĂšge du commandement civil des Gaules et de l’Hispanie, se dĂ©fend contre les Wisigoths qui se considĂšrent dĂ©liĂ©s des engagements contenus dans leur traitĂ© de fĂ©dĂ©rĂ©s et qui dĂ©sirent s’étendre en Hispanie[132]. Majorien rĂ©ussit toutefois Ă  s’entendre avec les Burgondes et les Wisigoths. En 460, l’empereur se rend en Hispanie, premiĂšre visite d'un empereur d'Occident dans la pĂ©ninsule. Diverses sources comme Sidoine Apollinaire nous prĂ©sentent Majorien en empereur Ă©nergique, volontaire et voulant redorer la fonction impĂ©riale en Occident. C’est ainsi qu’en 461, il planifie une expĂ©dition en Afrique contre les Vandales qui bloquent les livraisons de cĂ©rĂ©ales. L’empereur doit toutefois renoncer Ă  son projet, les navires vandales bloquant les Romains en Hispanie et empĂȘchant le dĂ©barquement des troupes[133]. Peu aprĂšs, sur ordre de Ricimer, Majorien est arrĂȘtĂ© et assassinĂ©, non probablement en raison de l’échec de cette tentative, mais plutĂŽt Ă  cause de ses vellĂ©itĂ©s d'indĂ©pendance. Faisant et dĂ©faisant maintenant les empereurs, Ricimer choisit le sĂ©nateur Libius Severus comme nouvel Augustus.

L’assassinat de Majorien entraĂźne la sĂ©cession de la Gaule, notamment celle d'Ægidius, maintenant magister militum en Gaule et ami du dĂ©funt empereur, qui refuse de reconnaĂźtre Libius Severus. Lorsque Ricimer tente de lui retirer son commandement, Ægidius se rebelle, mais une offensive des Wisigoths le force Ă  se retirer dans le nord de la Gaule oĂč, avec une partie du commandement et des alliĂ©s francs, il Ă©rige son propre royaume dans la rĂ©gion de Soissons. La petite enclave gallo-romaine perdure jusqu’à la fin de l’empire d’Occident. AprĂšs la mort d’Egidius (464 ou 465), le pouvoir passe probablement Ă  un officier du nom de Paulus, puis au fils d’AEgidius, Syagrius. En 486 ou 487, l’enclave est conquise par les Francs, Ă  la faveur de l’expansion amorcĂ©e par Clovis Ier[134]. Par ailleurs, Ă  TrĂšves, le comes Arbogast le Jeune, probablement un Franc romanisĂ©, tient la rĂ©gion contre ses anciens compatriotes jusqu’en 475.

Libius Severus ne peut se maintenir longtemps sur le trĂŽne, et finit assassinĂ© en 465. Au cours des six mois suivants, pendant lesquels le roi wisigoth Euric rompt le traitĂ© avec l’empire d’Occident et pĂ©nĂštre dans le Sud de la Gaule et en Hispanie, Ricimer ne fait pas dĂ©signer de nouvel empereur[135]. La fonction impĂ©riale est assumĂ©e en 467 par le gĂ©nĂ©ral et aristocrate AnthĂ©mius, envoyĂ© par Constantinople avec des troupes fraĂźches et un imposant trĂ©sor. Il s’efforce d’endiguer l’influence de Ricimer en nommant un deuxiĂšme magister militum en la personne de Marcellin, assassinĂ© Ă  l'instigation de Ricimer en 468[136]. Pendant que la dĂ©fense contre les Germains en Gaule et en Norique s’émiette pour finalement s’effondrer, AnthĂ©mius planifie avec l’aide de Constantinople une expĂ©dition d’envergure contre Carthage, capitale du royaume vandale dirigĂ© par GensĂ©ric que l’on veut punir pour le sac de Rome tout en rĂ©cupĂ©rant une des plus riches provinces de l’empire. La campagne dĂ©bute en 468, coordonnant une flotte venue d’Orient dirigĂ©e par Basiliscus et les troupes d’Occident. Mais celle-ci se termine en fiasco et la flotte romaine est brĂ»lĂ©e devant Carthage[137]. Cette bataille, assurant la survie du royaume vandale, Ă©branle de façon dĂ©finitive le pouvoir de l’empereur d’Occident. En Gaule, les Wisigoths, les Burgondes et les Francs agrandissent toujours plus leurs territoires aux dĂ©pens de l’empire d’Occident qui ne se maintient qu’en Auvergne et en Provence. Un chef breton (ou britannique) autrement inconnu du nom de Riothamus aurait soutenu les Romains dans leur guerre dĂ©fensive, mais il Ă©choue face aux Wisigoths. AnthĂ©mius s’étant brouillĂ© avec Ricimer, une guerre civile Ă©clate, Ricimer assiĂ©geant AnthĂ©mius dans Rome. En juillet 472, AnthĂ©mius pĂ©rit assassinĂ© par un neveu de Ricimer, le Burgonde Gundobad. Son successeur est Olibrius, peu de temps avant que ne meure Ricimer[138]. Les jugements portĂ©s sur ce chef au cours de l’histoire seront gĂ©nĂ©ralement nĂ©gatifs et beaucoup plus homogĂšnes que ceux portant sur Stilicon et Aetius[139]. Certes, Ricimer a toujours donnĂ© la prioritĂ© Ă  ses propres intĂ©rĂȘts, mais cela ne l’a pas empĂȘchĂ© d’utiliser au mieux les quelques ressources demeurant Ă  la disposition de Rome pour assurer la protection de l’Italie[140]. Toutefois, ces efforts ne seront pas suffisants et, quatre annĂ©es plus tard, le dernier empereur d’Occident sera dĂ©posĂ©.

La chute de Rome

Olibrius, le dernier empereur nommĂ© par Ricimer, meurt au dĂ©but , quelques mois Ă  peine aprĂšs la mort du magister militum suĂšve. Le neveu de ce dernier, Gundobad, dĂ©jĂ  mentionnĂ©, lui succĂšde et choisit le fonctionnaire Glycerius comme empereur. L'empereur d'Orient LĂ©on Ier refuse cette nomination et lui prĂ©fĂšre le magister militum de Dalmatie, Julius Nepos ; mais il meurt. Neveu du comte Marcellin tuĂ© en Sicile en 468, Julius Nepos, ayant succĂ©dĂ© Ă  son oncle, est nommĂ© CĂ©sar en 474 par l'empereur d'Orient ZĂ©non avec mission de renverser GlycĂ©rius. Nepos dĂ©barque Ă  Ravenne, poursuit et capture GlycĂ©rius qu’il fait tonsurer et nommer Ă©vĂȘque. Son armĂ©e le proclame empereur d'Occident le . Il est le dernier empereur romain d’Occident reconnu par l’Empire romain d'Orient. Gundobad, pour sa part, s’enfuit en Gaule et devient roi des Burgondes[141].

En 474, les coempereurs LĂ©on II et ZĂ©non concluent un traitĂ© avec GensĂ©ric en vertu duquel celui-ci verra son royaume reconnu par Constantinople Ă  condition de cesser ses activitĂ©s de brigandage[142]. Julius Nepos se trouve ainsi confrontĂ© Ă  une difficile situation. L’empire a entre-temps complĂštement perdu l’Hispanie aux mains des SuĂšves et des Wisigoths. Ces derniers assiĂšgent Clermont en Gaule dont Sidoine Apollinaire organise la dĂ©fense ; en 471, la derniĂšre grande possession de l’empire est conquise par les Wisigoths. En 473, Arles et Marseille sont prises tandis que les Goths s’enfoncent en Auvergne et dans la vallĂ©e de l’Èbre en Espagne malgrĂ© une farouche rĂ©sistance[143]. L’empereur, qui a dĂ©jĂ  reconnu de facto la perte de l’Auvergne, reconnaĂźt celle-ci de jure dans un traitĂ© de 475 avec le Wisigoth Euric et retire le magister militum Ecdicius de Gaule[144]. Cet abandon Ă©branle la confiance dĂ©jĂ  chancelante de l’aristocratie gallo-romaine envers l’empereur[145]. En 475, Julius Nepos Ă©lĂšve Ă  la dignitĂ© de magister militum et de patrice un ancien haut fonctionnaire d’Attila, Flavius Oreste, qui a dĂ©jĂ  servi Ă  la cour de Constantinople. Cela s’avĂšre une erreur fatale. Le 28 aoĂ»t de la mĂȘme annĂ©e, Oreste Ă  la tĂȘte de fĂ©dĂ©rĂ©s prend le contrĂŽle de Ravenne. Julius Nepos doit s’enfuir en Dalmatie dont il est toujours magister militum et d’oĂč il continue Ă  rĂ©gner jusqu’à ce qu’il soit assassinĂ© en 480. Oreste, pour sa part, porte Ă  la fonction impĂ©riale son jeune fils Romulus ; ce dernier est ĂągĂ© de douze ans, ce qui lui vaut immĂ©diatement le surnom de Romulus Augustule.

Romulus Augustulus et Odoacre
Romulus Augustulus dépose les insignes impériaux devant Odoacre (vue d'artiste, 1880).

Pendant ce temps, les fĂ©dĂ©rĂ©s germaniques, qui constituent maintenant la presque totalitĂ© de l’armĂ©e et qui sont cantonnĂ©s en Italie depuis des annĂ©es, demandent Ă  Oreste de leur donner des terres oĂč ils pourraient s’établir dĂ©finitivement. Oreste refuse. Les fĂ©dĂ©rĂ©s se tournent alors vers l’un des leurs, Odoacre, pour conduire leur rĂ©volte. Fils, croit-on, d’un prince skire, Odoacre vainc Oreste Ă  Plaisance. Les Skires et les HĂ©rules de mĂȘme qu’une partie de l’armĂ©e romaine proclament alors Odoacre « roi d’Italie ». En 476, Odoacre prend Ravenne et force le jeune empereur Ă  abdiquer le 4 septembre. Ému par le jeune Ăąge et la beautĂ© de l’adolescent, Odoacre lui permet de vivre en paix en lui octroyant une confortable rente. Il se dispense de nommer un nouvel empereur et renvoie simplement les insignes impĂ©riaux Ă  Constantinople, tout en s’affirmant sujet de Julius Nepos comme le prouvent les piĂšces de monnaie frappĂ©es en 480 Ă  l’effigie de ce dernier. Toutefois, l’empereur de Constantinople refuse de reconnaĂźtre Odoacre et mobilise contre l’usurpateur les Ruges, qui ont fondĂ© leur propre royaume au nord du Danube sous la conduite de leur chef Flaccitheus en 470. Odoacre se venge en ravageant leur royaume en 487/488[146]. Pour assurer la sĂ©curitĂ© de l’Italie, il demande Ă  son commandant Pierius de transfĂ©rer les populations romaines de la Norique alors menacĂ©e vers l’Italie[147].

On se rĂ©fĂšre souvent Ă  476 comme date de « la chute de Rome ». Ceci appelle de sĂ©rieuses rĂ©serves. D’une part, le dernier empereur, Julius Nepos, continue Ă  rĂ©gner jusqu’en 480 en exil en Dalmatie. D’autre part, il est douteux que les contemporains aient vu cette date comme un « Ă©vĂ©nement historique »[148]. En effet, l’Empire romain continue Ă  exister avec comme seul empereur celui de Constantinople. On retournait ainsi au systĂšme qui avait eu cours jusqu’à ThĂ©odose. Les deux cents ans qui suivront verront de nombreuses tentatives pour reconstituer l’Empire romain en Occident, sans succĂšs[149]. De plus, pendant des dĂ©cennies, les autoritĂ©s germaniques continueront Ă  reconnaĂźtre et Ă  respecter la prĂ©Ă©minence de l’empereur de Constantinople[150]. C'est un chroniqueur oriental, Marcellinus Comes, qui adopte en 520 la date de 476 comme Ă©tant celle de la fin de l’Empire romain d’Occident. Il n’est pas impossible que cette proposition soit aussi apparue dans d’autres sources. Si elle reflĂšte surtout la vision orientale de ces annĂ©es, elle est loin d’avoir Ă©tĂ© adoptĂ©e par l’aristocratie sĂ©natoriale occidentale survivante de la crise. Par contre, Ă  Constantinople, les empereurs se servent ouvertement de cette « fin de l’Empire romain d’Occident » pour mieux asseoir leurs propres revendications sur ces territoires. Les avis des spĂ©cialistes demeurent partagĂ©s sur ce sujet[151]. De mĂȘme, la thĂšse selon laquelle l’invasion des Germains aurait Ă©tĂ© l’unique cause de la chute de l’Empire romain d’Occident est une grossiĂšre simplification rejetĂ©e par la majoritĂ© des spĂ©cialistes contemporains qui prĂ©fĂšrent parler d’un ensemble de causes[152]. À l’inverse, la survie de l’empire oriental au Ve siĂšcle, malgrĂ© les attaques auxquelles il doit faire face, semble montrer que rien ne condamnait le systĂšme romain Ă  imploser. De mĂȘme, la thĂšse dĂ©fendue dans les recherches antĂ©rieures voyant dans la dĂ©position de Romulus Augustulus la fin de l’AntiquitĂ© n’est guĂšre retenue de nos jours.

Il est certain toutefois que le processus de dĂ©cadence de l'empire occidental amorcĂ© au plus tard avec la fin de la dynastie thĂ©odosienne en 455 s’accĂ©lĂšre rapidement Ă  partir de 470. La « barbarisation » de l’armĂ©e romaine constitue un facteur prĂ©pondĂ©rant dans ce processus. Affaiblie par les guerres civiles du IVe siĂšcle, l’armĂ©e n’est plus en mesure au Ve siĂšcle d’assurer la protection des frontiĂšres de façon efficace. Non que la loyautĂ© des troupes ait Ă©tĂ© en cause, mais les caisses de l’État Ă©tant vides, les lĂ©gionnaires ne sont plus payĂ©s. La rĂ©bellion d’Egidius amorce la dĂ©sagrĂ©gation de l’armĂ©e des Gaules. La perte des riches provinces des Gaules a alors des retombĂ©es catastrophiques pour les finances de l’État, mais s’avĂšre moins dramatique que celle de la province d’Afrique du Nord qui, elle, ne peut ĂȘtre compensĂ©e ; bientĂŽt, Ravenne ne dispose plus d'assez d’argent pour rĂ©munĂ©rer et fidĂ©liser les troupes nĂ©cessaires Ă  la dĂ©fense, occasionnant la perte d’autres contrĂ©es. Le territoire sur lequel s’exerce l’autoritĂ© effective des empereurs d’Occident se rĂ©trĂ©cit toujours plus et finit par se rĂ©duire au noyau central de l’Italie et de la rĂ©gion alpine. Le dĂ©clin de l’autoritĂ© impĂ©riale entraĂźne la progression de celle des commandants en chef de l’armĂ©e occidentale. Dans les derniĂšres annĂ©es, les ressources viennent Ă  manquer tant et si bien que la dignitĂ© impĂ©riale devient le jouet de commandants avides de pouvoir qui font et dĂ©font les empereurs Ă  leur guise. AprĂšs que nombre de gĂ©nĂ©raux ont gouvernĂ© par l’entremise d’empereurs-fantĂŽmes, Odoacre ne fait que constater l'inutilitĂ© du maintien de la fonction impĂ©riale en Occident. Lorsque l’empereur ZĂ©non envoie finalement en l’an 488 les Ostrogoths sous la direction de ThĂ©odoric en Italie afin de renverser Odoacre, celui-ci s’appuie sur ses propres forces et tire son autoritĂ© de sa position de patrice de l’empire et de roi des Goths[153].

Les Ostrogoths en Pannonie et en Italie

royaume des Ostrogoths
Le royaume des Ostrogoths à son apogée.

Les Greuthungues (qui deviennent les Ostrogoths) comptent parmi les plus durement touchĂ©s par l’arrivĂ©e des Huns en 375. Franchissant le Don et poussant devant eux les Alains, les Huns dĂ©truisent le royaume des Greuthungues. Certains, sous la direction de leurs chefs Alatheus et Saphrax s’enfuient, mais la majoritĂ© est simplement assujettie aux Huns. Toutefois, les Goths procĂšdent Ă  l’acculturation des Huns et le gotique s’impose dans les annĂ©es qui suivirent comme langue d’usage dans l’empire d’Attila ; de nombreux noms d’origine goth sont utilisĂ©s par les Huns[154]. À la fin du rĂšgne d’Attila, trois frĂšres semblent avec pris le commandement des Greuthungues vivant sous la domination hun : Valamer, ThĂ©odemer et Vidimer de la famille des Amales[155].

On doit Ă  JordanĂšs et Ă  son Histoire des Goths (XIV, 2), laquelle rĂ©sume un texte plus long de Cassiodore, le nom d’Ostrogoths qui, selon une Ă©tymologie, signifierait les « Goths de l’Est », tout comme les Tervingi, dont le nom signifierait les « gens de la forĂȘt », et les Greutingi, les « gens de la grĂšve ». Dans le cas des Ostrogoths toutefois, JordanĂšs lui-mĂȘme propose une autre possibilitĂ© : « Ostrogoth » pourrait Ă©galement avoir Ă©tĂ© le nom de leur premier roi : Ostrogotha. Divers auteurs, qui ne font guĂšre confiance Ă  JordanĂšs, proposent pour leur part : les Goths « brillants » (racine germanique ostr–).

Bijoux d'oreille ostrogoth, Metropolitan Museum of Art, IIIe - VIe de notre Ăšre

AprĂšs la mort d'Attila, les Ostrogoths menĂ©s par ThĂ©odemer (ou Thiudimir) et alliĂ©s Ă  leurs anciens vassaux et rivaux, les GĂ©pides, Ă©crasent les forces hunniques lors de la bataille de la Nedao en 454. AprĂšs s’ĂȘtre dĂ©barrassĂ© de leurs anciens maitres, ils crĂ©ent leur propre royaume en Pannonie[156]. LĂ , ils sont presque immĂ©diatement en conflit avec les troupes romaines et avec diverses autres tribus dĂ©jĂ  installĂ©es dans la rĂ©gion. Le point crucial est constituĂ© par la victoire des Ostrogoths lors de la bataille de Bolia en 469 au cours de laquelle ils dĂ©font une alliance de SuĂšves, GĂ©pides, Skires et Ruges[157]. Le fils de ThĂ©odemer, ThĂ©odoric l'Amale, (surnommĂ© « le Grand »)ayant passĂ© une partie de sa vie Ă  Constantinople en tant qu’otage, est associĂ© au pouvoir de son pĂšre, dĂšs son retour en Pannonie. Ses tentatives de s’élever dans la hiĂ©rarchie goth Ă©chouent, ne serait-ce que parce qu’un autre Ostrogoth, ThĂ©odoric Strabon, le chef des Goths fĂ©dĂ©rĂ©s installĂ©s en Thrace, est nommĂ© par l’empereur LĂ©on Ier magister militum.

Les tentatives du successeur de LĂ©on, ZĂ©non, de se servir de ThĂ©odoric l’Amale comme contrepoids Ă©chouent et ThĂ©odoric Strabon tient bon[158]. Il perd toutefois la vie en 481 des suites d’une chute de cheval. ThĂ©odoric l’Amale peut alors accroĂźtre considĂ©rablement les forces de son armĂ©e. Non seulement est-il nommĂ© magister militum, mais il accĂšde en 484 Ă  la prestigieuse charge de consul. En 487, une nouvelle confrontation se dessine que ZĂ©non rĂ©sout diplomatiquement : il envoie l’Amale mettre fin Ă  la souverainetĂ© d’Odoacre sur l’Italie. À l’, les Ostrogoths de ThĂ©odoric quittent l'empire d'Orient, mais une partie d’entre eux restent en arriĂšre et se rattachent aux Ruges[159]. L’invasion de l’Italie rĂ©ussit en 489. Odoacre est assiĂ©gĂ© Ă  plusieurs reprises et finit par se rĂ©fugier dans Ravenne, puissamment fortifiĂ©e. Odoacre se rend en 498 aprĂšs qu’un compromis ait Ă©tĂ© trouvĂ© en fonction duquel il serait associĂ© au pouvoir goth. Peu de temps aprĂšs, toutefois, ThĂ©odoric assassine Odoacre sous un vague prĂ©texte. ThĂ©odoric se livre par la suite Ă  une purge rapide mais sanglante ayant pour but d’assurer la main mise des Goths sur l’Italie[160].

ThĂ©odoric mĂšne en Italie une politique d’équilibre entre les Goths et les Italiens[161]. À cette fin, il utilise l’appareil administratif bien rodĂ© des anciens Romains et laisse au trĂšs distinguĂ© Romain, Liberius, le soin de s’occuper de l’installation des Goths en Italie. Liberius mĂšne cette tĂąche difficile avec doigtĂ©, sans trop spolier les droits des premiers occupants[162]. ThĂ©odoric a soin de se lier avec de nombreux membres de l’ancienne aristocratie sĂ©natoriale parmi lesquels Cassiodore, afin de s’en faire des alliĂ©s. D’un autre cĂŽtĂ©, ThĂ©odoric mĂšne une politique de stricte sĂ©paration des Goths et des Romains de façon Ă  prĂ©server l’identitĂ© de l’exercitus Gothorum (les unitĂ©s goths de l’armĂ©e, toutefois pas complĂštement homogĂšnes). De plus, le fait que les Goths soient ariens alors que la population de l’Italie Ă©tait catholique, renforce la sĂ©paration entre les deux peuples. ThĂ©odoric souhaite encourager la culture antique dans le royaume des Goths, mĂȘme si c’est sous son rĂšgne que le philosophe BoĂšce est exĂ©cutĂ©, ThĂ©odoric le soupçonnant de complicitĂ© avec Constantinople.

En 498, ThĂ©odoric est nommĂ© par Constantinople « gouverneur » ; mais les relations se tendent rapidement, ThĂ©odoric menant une politique d’alliance avec les royaumes voisins. Toutefois cette politique n'est pas couronnĂ©e de succĂšs, les Francs devant battre sĂ©vĂšrement les Wisigoths et s’emparer de la plus grande partie du royaume wisigoth des Gaules. En rĂ©action les troupes ostrogoths occupent militairement une partie du sud des Gaules et, en 511, ThĂ©odoric est reconnu comme roi des Wisigoths, mais cette union de couronnes ne survit pas Ă  sa mort[163].

La disparition de ThĂ©odoric donne le signal d'une lutte de succession. La rĂ©gente en fonction, Amalasonte, essaie d’amĂ©liorer les relations tendues avec Constantinople. TrĂšs impopulaire auprĂšs des Goths, Amalasonte devenue reine associe son cousin ThĂ©odat (ou Theodahad) au trĂŽne afin d’affermir sa position. ThĂ©odahad encourage alors le mĂ©contentement des Goths contre la rĂ©gente, emprisonnĂ©e sur l’üle de Martana en Toscane et assassinĂ©e en 534 ou 535. Ceci fournit un excellent prĂ©texte Ă  l’empereur Justinien pour attaquer les Ostrogoths. Son gĂ©nĂ©ral, BĂ©lisaire, dĂ©jĂ  victorieux des Vandales en 533/534, s’empare de la Sicile et de l’Italie du Sud, marquant le dĂ©but de plusieurs annĂ©es de guerre (pour lesquelles Procope de CĂ©sarĂ©e est la principale source). Ces guerres conduisent Ă  la dĂ©vastation de vastes territoires en Italie et au dĂ©clin Ă©conomique d’une rĂ©gion jusque-lĂ  prospĂšre. Les Francs saisissent l’occasion pour s’infiltrer en Italie du Nord qu’ils pillent de façon systĂ©matique. Rome, thĂ©Ăątre de fĂ©roces combats, change de mains Ă  plusieurs reprises. La rĂ©sistance opiniĂątre des Goths qui se regroupent Ă  plusieurs reprises est vaincue une premiĂšre fois en 552 bien que des poches de rĂ©sistance rĂ©ussissent Ă  se maintenir quelque temps[164]. Cette conquĂȘte romaine demeure Ă©phĂ©mĂšre, car, en 568, les Lombards commencent leur conquĂȘte de l'Italie pĂ©niblement recouvrĂ©e par les Romains.

Le royaume des Wisigoths

migration des Wisigoths
Carte montrant les migrations des Wisigoths jusqu'Ă  leur Ă©tablissement en Aquitaine en 418.

Par le fƓdus de 418, les Wisigoths prennent possession de l’Aquitaine seconde pour s’y Ă©tablir Ă  titre de fĂ©dĂ©rĂ©s. cette province constitue le premier noyau du royaume des Wisigoths, dĂ©signĂ© durant sa premiĂšre pĂ©riode (418-507) sous le terme de royaume de Toulouse, du nom de leur capitale[165]. Dans les annĂ©es qui suivent, les Wisigoths tentent continuellement d’agrandir leur territoire et, Ă  l’appel d’Aetius, combattent les Huns. Le rĂšgne d’Euric, montĂ© sur le trĂŽne en 466 aprĂšs le meurtre de son frĂšre, marque un tournant dans l’histoire du royaume. En effet, il rompt le fƓdus le liant Ă  l’empire d’Occident et mĂšne une politique d’expansion territoriale : au nord, le royaume s’étend jusqu’à la Loire ; au sud il occupe rapidement la plus grande partie de l’Hispanie sauf, dans le nord-ouest, la partie occupĂ©e par les SuĂšves qui rĂ©ussissent Ă  s’y maintenir jusqu’au VIe siĂšcle[166] ; Ă  l’est, oĂč il a dĂ©jĂ  conquis Arles et Marseille et battu en 471 la derniĂšre armĂ©e romaine intacte dans les Gaules, le traitĂ© de 475 lui donne le contrĂŽle l’Auvergne[135].

La population romaine qui, s’acculturant aux « barbares », les sources mentionnent spĂ©cifiquement que dans les villes gauloises de nombreux hommes se font pousser les cheveux et commencent Ă  porter des braies, adoptant ainsi certains traits distinctifs des barbares, choses que les empereurs d’Occident ont interdites mĂȘme aux esclaves en temps de crise. De nombreux Romains entrent alors au service des Wisigoths et exercent des commandements militaires[167].

Colonne provenant de la Daurade. Toulouse. Royaume des Wisigoths, IVe début Ve siÚcle

Euric meurt en 484 ; son fils, Alaric II, affronte les Francs et meurt alors qu’il les combattait[168]. À la suite de ce dĂ©sastre et des attaques des Ostrogoths sous la conduite de ThĂ©odoric le Grand, la presque-totalitĂ© de la Gaule goth est perdue Ă  l’exception de la rĂ©gion de Narbonne (Septimanie). Ceci modifie complĂštement la situation des Wisigoths en Hispanie oĂč ils choisissent TolĂšde comme nouvelle capitale au VIe siĂšcle, ville d'oĂč est tirĂ© le nom du royaume Goth, le royaume de TolĂšde. Dans sa politique de restauration de l’empire, Justinien Ier qui reprend les royaumes des Vandales et des Ostrogoths, s’empare Ă©galement de territoires dans le sud de la pĂ©ninsule ibĂ©rique, mais ces conquĂȘtes s'avĂšrent sans lendemain, les Romains ne les gardant que jusqu’au dĂ©but du VIIe siĂšcle. Le royaume des Wisigoths devient alors le thĂ©Ăątre d’intenses querelles entre les diffĂ©rentes familles aristocratiques pour savoir qui prendrait le pouvoir alors que les problĂšmes religieux perduraient[169].

ConsidĂ©rĂ© comme le plus grand des rois de l’Espagne wisigothique, LĂ©ovigild promulgue, ou reprend de ses prĂ©dĂ©cesseurs, 324 lois que ses successeurs regroupent dans le Liber judiciorum vers 654. ConsidĂ©rĂ© par les Espagnols comme le premier unificador nacional, il mĂšne une sĂ©rie de campagnes militaires contre les Byzantins installĂ©s en Andalousie et s'empare de Cordoue et de Malaga. Au nord, il combat Vascons et Francs pendant que dans le nord-ouest de la pĂ©ninsule, il lutte Ă  partir de 575 contre les SuĂšves redevenus catholiques ; les ayant vaincus Ă  la bataille de Braga en 585, il dĂ©truit leur royaume de Galice. Arien convaincu, il a fort Ă  faire avec un peuple dont la majoritĂ© Ă©tait profondĂ©ment catholique. L'un de ses fils, le prince HermĂ©nĂ©gild, mariĂ© Ă  une princesse franque catholique, prend la tĂȘte du parti catholique et se rĂ©volte contre son pĂšre, n'hĂ©sitant pas Ă  s'allier aux SuĂšves et aux Byzantins. HermĂ©nĂ©gild soulĂšve l'Andalousie en 579/580. Impitoyable, LĂ©ovigild combat son fils, le fait prisonnier (584) et le fait exĂ©cuter en 585 Ă  Tarragone. Son plus jeune fils et successeur rĂ©solut le conflit. En 587 il se convertit au catholicisme, reconnu comme la foi de tous les Wisigoths lors du troisiĂšme concile de TolĂšde en 589[170]. Les rĂšgnes de LĂ©ovigild et de RĂ©carĂšde sont importants dans l’histoire du royaume qui en sort consolidĂ©[171]. La mort de RĂ©carĂšde en 601 est suivie d’une pĂ©riode de troubles au cours de laquelle diverses familles aristocratiques se disputent le pouvoir. Sur le plan culturel, le royaume vĂ©cut Ă  partir de la fin du VIe siĂšcle une pĂ©riode de prospĂ©ritĂ© dont Isidore de SĂ©ville constitue le reprĂ©sentant le plus cĂ©lĂšbre. Les Ă©coles monastiques rĂ©pandent la culture de l’AntiquitĂ© jusque chez les Francs confĂ©rant ainsi au royaume wisigoth un rayonnement culturel important[172].

La fin du royaume wisigoth survient de façon abrupte. Les Arabes et les BerbĂšres, qui, au dĂ©but du VIIIe siĂšcle, avancent le long de la cĂŽte d’Afrique du Nord traversent le dĂ©troit de Gibraltar et remportent une victoire dĂ©cisive face au roi RodĂ©ric qui perd la vie Ă  la bataille du Guadalete en , scellant le dĂ©clin du royaume wisigoth. Les Goths poursuivent la rĂ©sistance dans le nord-est de la pĂ©ninsule jusqu’aux environs de 719. Les musulmans s’emparent des territoires situĂ©s au nord des PyrĂ©nĂ©es de 719 Ă  725. Vaincus, les Wisigoths se rĂ©concilient avec les envahisseurs et une partie du peuple se convertit Ă  l’islam[173].

Le royaume des Vandales

royaume vandale à son apogée
Carte du royaume vandale à son apogée à la mort de Genséric.

Le royaume vandale (lequel occupait ce qui est aujourd’hui la Tunisie, l'Est de l'AlgĂ©rie et la Tripolitaine, plus les BalĂ©ares, la Corse et la Sardaigne) constitue une exception dans le processus de crĂ©ation des royaumes barbares. D’une part, les Vandales, aprĂšs avoir pris Carthage en 439, disposent d’une flotte importante qui leur permet de contrĂŽler une partie Ă©tendue de la MĂ©diterranĂ©e occidentale et de s’aventurer jusqu’à la GrĂšce. D’autre part, adeptes convaincus de l’arianisme, les nouveaux maĂźtres pratiquent une politique de coercition Ă  l’endroit des notables locaux, majoritairement catholiques. Les rois GensĂ©ric et HunĂ©ric persĂ©cutent en effet les catholiques opposants Ă  leur pouvoir, en bannissent certains, et, pour mettre fin Ă  l'opposition systĂ©matique des Ă©vĂȘques (sacerdotes), placent certains en rĂ©sidence surveillĂ©e dans le Sud tunisien (Gafsa). Il faut toutefois prendre en considĂ©ration le fait que la plupart des sources sont d’origine catholique comme l’évĂȘque Victor de Vita qui devait accompagner ses coreligionnaires Ă  Sicca Veneria et Ă  Lares, puis dans le dĂ©sert du Hodna[174]. En revanche, les BerbĂšres catholiques qui se soumettent Ă  leur pouvoir n'en ont pas Ă©tĂ© victimes dĂšs lors qu'ils paient l'impĂŽt comme au temps de l'administration romaine. Les Vandales conservent une bonne partie des structures politiques et administratives romaines y compris le culte de l’empereur[175]. Sans doute, les rois vandales ne perdent-ils pas tout espoir d’en venir Ă  une entente avec leurs sujets catholiques, mais les discussions entreprises Ă  ce sujet en , n’aboutissent pas[176]. Sans renoncer Ă  convertir ses sujets, le roi Thrasamund met fin Ă  la longue persĂ©cution qui avait commencĂ© sous son oncle HunĂ©ric, permettant Ă©galement d’amĂ©liorer considĂ©rablement les relations du royaume avec l’empire byzantin[177].

AprĂšs l’échec de l’opĂ©ration conjointe entre Rome et Constantinople qui se solde par l’incendie de la flotte romaine devant Carthage en 468, le royaume ne doit plus craindre d’ennemis extĂ©rieurs d’autant plus que son existence mĂȘme finit par ĂȘtre reconnue par Constantinople. Par la suite, il n’a Ă  se prĂ©occuper que de l’hostilitĂ© des « Maures », nom sous lequel il faut entendre diverses tribus berbĂšres qui avaient dĂ©jĂ  crĂ©Ă© leurs propres petites royaumes sur le territoire de la province romaine d’Afrique (parmi lesquels, le royaume de Masties, dans l'AurĂšs) qui coexistaient la plupart du temps pacifiquement avec les populations romaines environnantes[178] - [179]. Les rois vandales, ayant pris le titre de rex Vandalorum et Alanorum (roi des Vandales et des Alains), recrutent des troupes auxiliaires chez les Maures alors que l’équipage de leur flotte est composĂ©e de Romains venus de diverses provinces[180]. Sur les plans Ă©conomique aussi bien que culturel, les Vandales, qui ont expropriĂ© nombre de grands propriĂ©taires catholiques[181] peuvent jouir des avantages de cette riche province romaine qui, sous leur gouverne, loin de pĂ©ricliter, continue Ă  prospĂ©rer. Le commerce continue Ă  se dĂ©velopper et la culture antique Ă  prospĂ©rer parmi l’élite. Les Vandales peuvent jouir du niveau de vie Ă©levĂ© auquel sont habituĂ©s les Romains et apprĂ©cier aussi bien le thĂ©Ăątre que le cirque[182]. La rĂ©putation des Vandales que laissent les sources, reprise par les historiens du passĂ© semble ainsi grandement exagĂ©rĂ©e et, aux yeux des historiens contemporains, passablement dĂ©nuĂ©e de fondement.

La pĂ©rennitĂ© du royaume vandale est remise en cause par l’usurpation de GĂ©limer qui renverse le roi HildĂ©ric, un alliĂ© de Constantinople, en 530. L’empereur Justinien profite de l’occasion pour intervenir. Si l’on en croit Procope, le prĂ©fet du prĂ©toire, Jean de Cappadoce, hostile Ă  cette initiative, la considĂšre trop risquĂ©e[183]. Finalement, en mars une petite expĂ©dition est envoyĂ©e sous le commandement du magister militum BĂ©lisaire avec pour but initial et unique de remettre le roi HildĂ©ric sur le trĂŽne. GĂ©limer ayant fait mettre celui-ci Ă  mort, BĂ©lisaire dĂ©barque avec seulement 15 000 soldats et remporte d’étonnantes victoires lors des batailles de Ad Decimum et TricamĂ©ron Ă  la fin de 533. GĂ©limer s’enfuit, mais, fait prisonnier, il est envoyĂ© Ă  Constantinople oĂč il figure au triomphe de BĂ©lisaire. Il peut toutefois continuer une vie aisĂ©e sur un domaine qui lui avait Ă©tĂ© donnĂ©. Les troupes vandales, intĂ©grĂ©es dans l’armĂ©e impĂ©riale, servent lors des combats de Justinien contre les Perses. Le royaume vandale est alors placĂ© sous la juridiction impĂ©riale et le demeure jusqu’à sa conquĂȘte par les Arabes au milieu du VIIe siĂšcle[184].

Le royaume franc

Les Francs, une confĂ©dĂ©ration de diverses tribus germaniques, ont Ă©tĂ© Ă©tablis par le CĂ©sar Julien en Toxandrie (probablement la rĂ©gion sablonneuse comprise entre l’Escaut et la Meuse)[185]. En 388, ils dĂ©vastent les environs de Cologne mais sont battus par les Romains[186]. Stilicon doit aussi se battre contre les Francs qui, en 407, ont assurĂ© la protection des provinces de Belgique et de Germanie contre les envahisseurs vandales, alains et suĂšves en se ralliant Ă  l'usurpateur Constantin III. Dans les annĂ©es qui suivent, les Francs mettent Ă  profit la situation trouble dans laquelle se trouvent les Gaules pour Ă©tendre leur territoire. DiffĂ©rents groupes tentant de s’installer le long de la Moselle, et le long du Rhin, sont arrĂȘtĂ©s par Aetius qui les incite toutefois Ă  Ă©tablir leur propre royaume dans le nord-est de la Gaule[187]. AprĂšs la mort d’Aetius, les Francs franchissent en masse le « limes » du Rhin et s’emparent de diverses villes dont Mayence. Par la suite, dans le nord de la Gaule les Francs se rĂ©partissent en un grand nombre de petites principautĂ©s pendant que le sud est dominĂ© par les Wisigoths, les Burgondes et finalement les Ostrogoths (en Provence).

phases de l'extension du royaume des Francs
Phases de l'extension du royaume des Francs de 481 Ă  814 ; en jaune, le royaume de Syagrius en 486, en rouge le royaume de Toulouse en 507.

Roi des Francs saliens et gouverneur romain de la province de Belgique seconde, ChildĂ©ric Ier, Ă©tabli Ă  Tournai, et dont la sĂ©pulture magnifiquement dĂ©corĂ©e est dĂ©couverte en 1653, aide vraisemblablement le gĂ©nĂ©ral gallo-romain Egidius, rĂ©voltĂ© contre Ricimer et l’empereur Libius Severus, Ă  repousser les Wisigoths. De la mĂȘme façon, ChildĂ©ric peut-ĂȘtre en collaboration avec le commandant romain Paulus, combat les pilleurs saxons qui ont envahi la Gaule sous la conduite d’un certain Adovacrius. Egidius Ă©tablit son propre domaine dans la rĂ©gion de Soissons ; aprĂšs sa mort, son fils, Syagrius, lui succĂšde. Fils de MĂ©rovĂ©e, ChildĂ©ric, le premier reprĂ©sentant historique de la dynastie des MĂ©rovingiens, prĂ©side avec succĂšs Ă  l’expansion des Francs. Le fils de ChildĂ©ric, Clovis Ier, dĂ©truit les petits royaumes francs de Ragnachar et de Cararic. En 486/487, Clovis envahit le royaume de Syagrius. Les Wisigoths sont vaincus et doivent quitter la Gaule en 507. Clovis entreprend probablement deux guerres contre les Alamans entreprenants aprĂšs l’effondrement de la domination romaine en Gaule;en effet, ils franchissent le Rhin et s'avancent Ă  l’est dans la province de Norique (correspondant Ă  une partie de l’Autriche, de l’Allemagne et de la SlovĂ©nie d’aujourd’hui)[188]. Clovis s'allie avec les Burgondes, Ă©pousant une princesse de ce peuple[189]. PaĂŻen dans ses jeunes annĂ©es, Clovis se convertit au christianisme Ă  un moment non prĂ©cisĂ© qui se situe vraisemblablement vers la fin de son rĂšgne. Contrairement Ă  la plupart des autres chefs francs de confession arienne, Clovis adopte la confession catholique, Ă©vitant ainsi les antagonismes apparus dans les autres royaumes barbares entre souverains ariens et peuples catholiques. La politique habile mais Ă©galement sans scrupule de Clovis assure aux Francs une place dominante en Gaule et jette les bases d’une reconstruction de l’empire d’Occident sous Charlemagne et ses successeurs. En 508, Clovis reçoit de l'empereur d'Orient Anastase Ier le titre de « consul » et est saluĂ© comme « Auguste » au cours d'une cĂ©rĂ©monie Ă  Tours. C’est alors qu’il dĂ©cide de faire de Paris sa rĂ©sidence principale aprĂšs Tournai et Soissons.

ConformĂ©ment Ă  la loi salique adoptĂ©e sous son rĂšgne, le royaume de Clovis est divisĂ© entre ses fils Ă  sa mort en 511. En 531, ils dĂ©truisent le royaume de Thuringe et en 534 ils envahissent le royaume des Burgondes qu’ils annexent au leur[190]. Thibert intervient en Italie du Nord ; pour souligner son indĂ©pendance, il fait frapper des piĂšces de monnaie d’or (solidus) Ă  son nom, privilĂšge exclusif de l’empereur romain[191]. En 560, le royaume franc est unifiĂ© par Clotaire Ier, mais divisĂ© Ă  nouveau une annĂ©e plus tard Ă  sa mort. À l’intĂ©rieur du pays, les Francs s'allient avec la noblesse et les Ă©vĂȘques gallo-romains pour la gestion du territoire et utilisent le systĂšme romain des civitates ayant cours entre autres dans le sud de la Gaule[192]. Ainsi, la domination franque est remarquablement bien acceptĂ©e par la plupart des Gallo-Romains. L’évĂȘque GrĂ©goire de Tours, descendant d’une famille sĂ©natoriale et dont l’Ɠuvre historique constitue une source importante pour cette pĂ©riode, s’efforce d’harmoniser l’histoire des Francs et la tradition romaine. C’est ainsi qu’il prĂ©sente Clovis non comme un envahisseur germain, mais plutĂŽt comme le gouverneur romain des Gaules[193].

Progressivement, les rois mérovingiens perdent leurs pouvoirs et, à partir de la seconde moitié du VIIe siÚcle voient ceux-ci repris par les « maires du palais », ce qui conduit à leur remplacement en 751 par les Carolingiens.

Le royaume des Burgondes

AprĂšs la destruction du royaume des Burgondes du Rhin 436 par Aetius et le transfert des Burgondes en Sapaudie, ceux-ci Ă©difient leur propre royaume fĂ©dĂ©rĂ© sur les bords du lac LĂ©man[107]. La position des Burgondes face au pouvoir romain est alors ambivalente, les souverains veillant constamment sur leur lĂ©gitimitĂ©. Contrairement Ă  de nombreux autres confĂ©dĂ©rĂ©s germaniques, les Burgondes respectent scrupuleusement les obligations imposĂ©es par leur statut de fĂ©dĂ©rĂ©s et luttent Ă  de nombreuses reprises contre les envahisseurs. Des troupes burgondes aux ordres d’Aetius combattent les Huns puis prennent part, par exemple, Ă  l’offensive contre les SuĂšves au milieu de Ve siĂšcle. En 457 aprĂšs la mort d’Aetius, les Burgondes exploitent la situation trouble en Gaule pour envahir la rĂ©gion autour de Lyon. L’annĂ©e suivante, ils assiĂšgent cette ville qui tombe en leur pouvoir en 469 et sert de rĂ©sidence Ă  partir de cette date aux rois des Burgondes. En Auvergne, ils combattent Ă  nouveau aux cĂŽtĂ©s des Romains, contre les Wisigoths. Dans les annĂ©es 470 et 480, ils partent en guerre contre les Alamans[194]. ÉduquĂ© Ă  la cour impĂ©riale de Ravenne et magister militum de la Gaule, Gondebaud est Ă©levĂ© au rang de patrice des Romains en 456 et exerce vĂ©ritablement le pouvoir dans les rĂ©gions qu'il contrĂŽle, de la MĂ©diterranĂ©e au sud au lac de Constance au nord.

le royaume des Burgondes
Le royaume des Burgondes entre 443 et 476.

Avec la crĂ©ation du royaume fĂ©dĂ©rĂ© en Sapaudie, le processus de romanisation des Burgondes s’accĂ©lĂšre. Le roi autorise le conubium, c’est-Ă -dire les mariages entre Burgondes et Romains des provinces. L’étonnante facultĂ© d’adaptation des Burgondes entraĂźne la perte de tout sentiment d’identitĂ© et l'assimilation rapide aux peuples parmi lesquels ils vivaient. L’aristocratie gallo-romaine qui coexistait sans peine avec les Burgondes y vit une garantie de maintien de l’ordre Ă©tabli lui permettant peut-ĂȘtre de reprendre possession de ses terres[195]. À la suite la dĂ©position de l’empereur Romulus Augustule en 476, le roi des Burgondes exerce directement sur son territoire les pouvoirs de l’empereur d’Occident[196]. Toutefois, afin de lĂ©gitimer sa bonne foi romaine, il demande Ă  l’empereur d’Orient de le confirmer dans son rang de magister militum. Un trait marquant de la royautĂ© burgonde est la dĂ©volution d'apanages Ă  des membres de la famille royale sans que la souverainetĂ© soit pour autant divisĂ©e ; aux cĂŽtĂ©s de Lyon, GenĂšve et Vienne deviennent ainsi des rĂ©sidences royales[197]. Cette cohabitation des Ă©lĂ©ments romains et germaniques se concrĂ©tise dans la « loi gombette » ou « Loi des Burgondes ». PromulguĂ©e au dĂ©but du VIe siĂšcle par le roi Gondebaud, puis complĂ©tĂ©e par ses successeurs, elle fixe les usages Ă  respecter par les sujets burgondes du royaume. Une seconde loi ou « Loi romaine des Burgondes » fixe le droit des sujets gallo-romains du royaume. Prises dans leur ensemble ces deux lois dĂ©montrent le degrĂ© de cohabitation entre les libres romains et germaniques.

Dans le domaine religieux, qui dans d’autres royaumes revĂȘt un aspect hautement politique, on n’observe aucune controverse entre ariens et catholiques mĂȘme si les Burgondes sont ariens. La maison royale semble s’ĂȘtre orientĂ©e trĂšs tĂŽt vers le catholicisme. De plus, il n’est pas certain que tous les rois burgondes aient Ă©tĂ© ariens, mĂȘme si les hauts postes de l’Église Ă©taient occupĂ©s dans le royaume par des Ariens[198].

AprĂšs la mort du roi Godomar III, son frĂšre Sigismond est proclamĂ© roi. Les Francs mĂ©rovingiens exploitent l’occasion pour tenter de s’emparer du royaume. AprĂšs avoir perdu la bataille de VĂ©zeronce en 524, les Francs doivent attendre dix ans pour s’emparer du royaume qu’ils divisĂšrent entre eux. MalgrĂ© l'effondrement de la dynastie burgonde et la victoire dĂ©finitive des successeurs de Clovis, la cohĂ©sion entre les deux ethnies burgonde et gallo-romaine, nĂ©e des actions pacificatrices et unificatrices des rois burgondes fait naĂźtre un particularisme qui perdure.

Les Angles, Saxons et Jutes en Bretagne

Carte de Grande-Bretagne situant les peuples bretons (dans l'ouest et le nord) et anglo-saxons (dans l'est et le sud)
La Grande-Bretagne à l'époque de Gildas le Sage, vers le milieu du VIe siÚcle, est partagée entre royaumes anglo-saxons (en rouge, marron et rose) et bretons (en noir).

Avec le dĂ©part des derniĂšres unitĂ©s de l’armĂ©e romaine au dĂ©but du Ve siĂšcle, la province romaine de Bretagne est exposĂ©e aux attaques rĂ©pĂ©tĂ©es des Pictes et des Scots. L’administration romaine s’effondre progressivement et est remplacĂ©e par des autoritĂ©s rĂ©gionales qui se chargent de la dĂ©fense. Le dĂ©part des troupes et de l’aristocratie romaines entraĂźne l'obligation pour les quelques civitates existantes dans cette province moins urbanisĂ©e d'assumer seules les charges de l’administration publique[199]. L’écrivain paĂŻen Zosime qui Ă©crit aux environs de l’an 500 une Nouvelle Histoire, s’appuyant sur les rĂ©cits de son prĂ©dĂ©cesseur Olympiodore de ThĂšbes, affirme que l’empereur Honorius informe les civitates britanniques de son impossibilitĂ© d'en assurer la protection[200]. Quoi qu'il en soit, les autoritĂ©s de Ravenne se dĂ©sintĂ©ressent du sort de l’ile, ne nommant plus de nouveau magistrat. L’évĂȘque Germain d'Auxerre visite la Bretagne en 429 et en 444. Un dernier appel au secours des Romains restĂ©s en Bretagne en l’an 446 et adressĂ© au gĂ©nĂ©ral Aetius nous est rapportĂ© dans l’Ɠuvre de Gildas le Sage intitulĂ©e Le DĂ©clin de la Bretagne, rĂ©digĂ©e au VIe siĂšcle :

« Les barbares nous jetĂšrent Ă  la mer ; la mer nous rejeta sur les barbares ; nous n’avions dĂšs lors d’autre choix que de mourir noyĂ©s ou sous l’épĂ©e »[201].

Les sources manquant pour la pĂ©riode suivante, seuls les principaux faits nous sont connus[202]. Afin de parer au danger des attaques de diverses tribus barbares, les Romains font appel en Bretagne aux fĂ©dĂ©rĂ©s saxons (certains chercheurs situent cet appel un peu plus tĂŽt). Au IIIe siĂšcle, les pirates saxons sont alors source de difficultĂ©s pour les Romains ; ils reviennent maintenant en tant qu’alliĂ©s. TrĂšs rapidement cependant, une nouvelle rupture se produit que des chroniques galloises situent en 440 aprĂšs que des Jutes et des Angles soient venus s’installer Ă  demeure dans l’üle.

Depuis les annĂ©es 1960, une controverse perdure parmi les spĂ©cialistes concernant le rĂŽle jouĂ© par les peuplades germaniques installĂ©es en Grande-Bretagne Ă  la fin du IVe siĂšcle. De nombreux historiens et quelques archĂ©ologues soutiennent que l’« anglo-saxonisation » du pays au cours des Ve et VIe siĂšcles est due Ă  l’arrivĂ©e d’un large contingent d’émigrants en provenance d'Allemagne et des Pays-Bas ou du Danemark d’aujourd’hui. D’autres, surtout parmi les archĂ©ologues, croient plutĂŽt que les immigrants auraient Ă©tĂ© peu nombreux mais que des Bretons romanisĂ©s se seraient joints Ă  eux, et auraient adoptĂ© la langue et le mode de vie des nouveaux-venus conquĂ©rants, selon la thĂ©orie du transfert des Ă©lites[203]. La palĂ©ogĂ©nĂ©tique montre une migration substantielle Ă  grande Ă©chelle Ă  travers la mer du Nord vers la Grande-Bretagne au dĂ©but du Moyen Âge : ainsi, si dans les anciennes populations des Ăźles Britanniques, la proportion d'ascendance venant du continent (Pays-Bas actuels, Allemagne du Nord et Danemark) est quasiment nulle Ă  l'Âge du Fer, elle augmente Ă  environ 15 % pendant la pĂ©riode romaine, pour atteindre 76 % dans l'est de l'Angleterre pendant la pĂ©riode mĂ©diĂ©vale ancienne[204]. Cette migration importante concerne aussi bien les hommes que les femmes. Les chercheurs observent par ailleurs que les individus, notamment chez les femmes, Ă  forte proportion d'ascendance anglo-saxonne ont en gĂ©nĂ©ral un mobilier archĂ©ologique plus riche que ceux Ă  forte proportion d'ascendance locale[204].

D’aprĂšs Gildas, un « arrogant tyran » aurait Ă©tĂ© responsable de l'appel aux Saxons fait par les villes romaines de Bretagne. Selon BĂšde le VĂ©nĂ©rable, qui retrace au VIIIe siĂšcle l’histoire de l’Église, ce serait le « souverain » Vortigern qui aurait engagĂ© comme mercenaires les Saxons, chassĂ©s de leur royaume pour cause de surpopulation, et dĂ©barquĂ©s sur les cĂŽtes de l’üle sous la conduite des frĂšres Hengist et Horsa[205]. Ce genre d’épopĂ©e est Ă©galement rĂ©pandu chez les Goths et les Lombards alors que peu de faits historiques certains concernant la Bretagne sont parvenus jusqu’à nous. Toutefois les quelques sources dont nous disposons attestent qu’il n’y a pas eu d’effondrement de l’ordre Ă©tabli. Bien plus, de petits royaumes bretons (dits Sub-Roman Britain pour la pĂ©riode s’étendant de la fin de la domination romaine Ă  l’arrivĂ©e de la mission grĂ©gorienne en 597) fondĂ©s avant la venue des Saxons, ont continuĂ© Ă  exister par la suite et Ă  s’opposer aux Anglo-Saxons. Les « seigneurs de la guerre » germaniques auraient ainsi combattu les Bretons. C’est dans ce contexte que s’insĂšre l’épisode de la bataille du mont Badon aux environs de l’an 500. Elle est reliĂ©e Ă  la geste du roi Arthur, mais il est difficile de savoir qui en furent les participants (le roi Arthur et un certain Ambrosius Aurelianus sont considĂ©rĂ©s). On peut toutefois tenir pour acquis qu’elle arrĂȘta l'invasion saxonne et permit la reprise de territoires prĂ©cĂ©demment perdus par les Bretons. Toutefois, ces derniers furent finalement repoussĂ©s vers les rĂ©gions pĂ©riphĂ©riques de l’üle, que ce soit vers le nord ou vers le pays de Galles et le Sud-Ouest de l’Angleterre. Une partie de la population se rĂ©fugia sur le continent en Armorique, dans ce qui est aujourd’hui la Bretagne[206]. Les Anglo-Saxons opĂ©raient en petites unitĂ©s, n’avaient pas de commandement unifiĂ© et se faisaient la guerre entre eux. Ce n’est qu’au VIIe siĂšcle qu’ils se regroupĂšrent en royaumes plus importants dont les plus puissants se maintiennent jusqu’à l’arrivĂ©e des Vikings au IXe siĂšcle[207].

La Bretagne qui en raison de son insularitĂ© devait jouer un rĂŽle particulier dans la migration des peuples vĂ©cut alors une vĂ©ritable « barbarisation ». La langue latine se mĂ©tamorphosa. Les derniĂšres inscriptions latines que l’on retrouve au pays de Galles datent du VIe siĂšcle. Selon l’archĂ©ologue Bryan Ward-Perkins, le niveau de vie dans l’üle serait retournĂ© Ă  ce qu’il Ă©tait durant la prĂ©histoire[208]. Le christianisme aurait Ă©galement subi des revers importants mĂȘme si les sources, trĂšs limitĂ©es, prĂȘtent Ă  controverse. D’un cĂŽtĂ©, la mission d’Irlande semble avoir quittĂ© la Bretagne au cours du Ve siĂšcle, d’un autre, le pape GrĂ©goire le Grand dut envoyer des missionnaires dans ce qui est aujourd’hui l’Angleterre (Canterbury) Ă  la fin du VIe siĂšcle. Les grands Ă©lans religieux et culturels semblent ĂȘtre venus avant tout d’Irlande, et c’est grĂące Ă  des missionnaires venus de ce pays que commença vĂ©ritablement la conversion des Anglo-Saxons au VIIe siĂšcle.

Les Lombards en Italie

Cavalier lombard - monture du Grand Bouclier de Stabio, musée d'histoire de Berne

La lĂ©gende des origines des Lombards (ou plus exactement Langobards, ce qui signifie longues-barbes) nous est rapportĂ©e dans l’Origo gentis Langobardorum. Selon cette lĂ©gende le dieu Wotan aurait assurĂ© la victoire des Lombards, originaires de Scandinavie sur les Vandales[209]. De ce fait, il est presque impossible de rĂ©tablir la vĂ©ritĂ© historique. De plus, leur principal historien, Paul Diacre Ă©crit son Historia Langobardorum entre 784 et 799, soit longtemps aprĂšs les Ă©vĂ©nements, sur la base de sources plus anciennes. Selon certaines sources romaines, les Langobards sont Ă©tablis aux Ier et IIe siĂšcles sur les bords de l’Elbe supĂ©rieur oĂč ils affrontent l’empereur TibĂšre. Mais ils sont peu souvent mentionnĂ©s dans les sources et les fouilles archĂ©ologiques ne permettent pas de reconstruire le trajet de leurs migrations[210]. En 488/489, ils profitent de la destruction du royaume des Ruges par Odoacre pour s’installer sur leur territoire. De lĂ , ils commencent Ă  Ă©tendre leur puissance, d'abord en dĂ©faisant les HĂ©rules en 508, et Ă  peu prĂšs Ă  la mĂȘme Ă©poque en chassant le reste des populations suĂšves du moyen Danube. La deuxiĂšme pĂ©riode se situe entre 520 et 540 alors qu’ils occupent l’ancienne province romaine de Pannonie au sud du Danube[211]. C’est alors qu’ils entrent en contact avec l’empire d’Orient. Durant la guerre de Justinien contre les Goths, le roi des Lombards, Aldoin, conquĂ©rant des territoires anciennement dĂ©tenus par les Ostrogoths en Pannonie, conclut un traitĂ© avec l’empereur de Constantinople, servant l’intĂ©rĂȘt des deux parties, les troupes romaines obtenant du renfort pour mettre un terme Ă  la rĂ©sistance des Ostrogoths en Italie, les Lombards obtenant une protection contre l’expansion des GĂ©pides[212]. En 552, NarsĂšs fait campagne en Italie. Quelques milliers de Lombards sous la conduite d’AlboĂŻn, fils d’Aldoin, l’accompagnent dans la campagne. NarsĂšs se voit contraint de renvoyer les Lombards indisciplinĂ©s[213]. Peu aprĂšs, les Lombards triomphent des GĂ©pides[214]. Paul Diacre raconte un Ă©pisode plus lĂ©gendaire qu'historique, selon lequel AlboĂŻn aurait tuĂ© le fils du roi des GĂ©pides, puis, pour restaurer la paix, il se serait rendu au roi gĂ©pide Thorisind[215]. ArrivĂ© au pouvoir aux environs de 560, AlboĂŻn commence Ă  planifier la destruction du royaume gĂ©pide. À cet effet, il conclut un accord avec les Avars, une tribu de cavaliers nomades ayant migrĂ© depuis peu de l’Asie vers le centre de l’Europe et Ă©rigĂ© peu aprĂšs un riche royaume dans la rĂ©gion du Danube d’oĂč il menace l’empire d’Orient[216]. En 567, AlboĂŻn vainc les GĂ©pides sans l'aide des Avars. AlboĂŻn tue alors le roi des GĂ©pides, Kunimund, de sa propre main et se sert de son crĂąne comme d’une coupe Ă  boire. Il Ă©pouse alors la fille du roi, Rosamonde, instigatrice de son meurtre[217].

Carte : royaume des Lombards
En violet, le royaume des Lombards Ă  la mort d'AlboĂŻn (572) : en orange, les territoires relevant de l'Italie byzantine.

L’hypothĂšse qui a longtemps circulĂ© que les Lombards auraient Ă©tĂ© obligĂ©s de fuir devant les Avars est maintenant pratiquement dĂ©laissĂ©e. En 568, AlboĂŻn utilise sa solide position pour partir vers l’Italie en compagnie de groupes appartenant Ă  d’autres gentes de la rĂ©gion des Carpates. En dĂ©pit des ravages causĂ©s par la guerre des Goths, la province centrale de l’ancien empire offre encore la perspective allĂ©chante d’un riche butin. L’affirmation que les Lombards auraient Ă©tĂ© appelĂ©s par NarsĂšs ne semble guĂšre conforme Ă  la rĂ©alitĂ©[218]. La contre-offensive de l’armĂ©e impĂ©riale se rĂ©vĂšle impuissante, principalement en raison du manque de troupes en Italie. DĂšs lors, de nombreuses villes dont Milan se rendent. Au contraire, Pavie n'ouvre ses portes qu’au bout d’un siĂšge de trois ans et devient par la suite la rĂ©sidence principale des rois lombards. Des bandes isolĂ©es poussent vers le sud de l’Italie et les territoires francs. Ravenne, Rome et les villes de la cĂŽte comme GĂȘnes, peuvent leur rĂ©sister. Les sources parlent abondamment de la brutalitĂ© des conquĂ©rants, les uns encore paĂŻens, les autres ariens, De nombreux grands propriĂ©taires terriens doivent fuir devant l’envahisseur. Peu aprĂšs le dĂ©but de l’invasion, AlboĂŻn crĂ©e Ă  Cividale del Friuli un duchĂ© confiĂ© Ă  son neveu, Gisulf Ier et manifestement modelĂ© sur le modĂšle militaire romain. AlboĂŻn combine le systĂšme de dĂ©fense existant et le systĂšme traditionnel lombard des farae (du germanique : bande)[219]. Cette forme de gouvernement, convenant Ă  un peuple prĂ©fĂ©rant la campagne Ă  la ville, assure la survie des Lombards aprĂšs l’assassinat d’AlboĂŻn en 572,et l'Ă©croulement d'un pouvoir central lombard.

FondĂ© en 568, le royaume lombard, le dernier Ă  s’installer sur le territoire de l’empire d’Occident pendant l’AntiquitĂ© tardive, marque dĂšs lors la fin de l’ùre des grandes migrations qui a vu l’éclosion d’une constellation de principautĂ©s en Europe centrale et occidentale. C’est Ă  peu prĂšs Ă  la mĂȘme Ă©poque que les Bavarois (ou Bajuwaren) apparaissent dans les sources[220]. Un peu plus tard, les Slaves exercent des pressions sur de nombreux territoires germaniques de mĂȘme que dans les Balkans sous domination romaine oĂč, Ă  partir de 580, ils commencent Ă  s’installer[221].

AprĂšs la mort d’AlboĂŻn, le royaume lombard d’Italie du Nord, du BĂ©nĂ©vent et de Spoleto, Ă  l’organisation encore trĂšs lĂąche, se divise en nombre de duchĂ©s autonomes, voire indĂ©pendants les uns des autres. Dans les annĂ©es suivantes, ils entrent de plus en plus souvent en conflit avec l’empire d’Orient, longtemps prĂ©sent au centre et dans le sud de l’Italie. En 584, le roi Authari rĂ©tablit la royautĂ© lombarde aprĂšs une pĂ©riode d'anarchie alors que les Lombards affrontent des incursions franques dirigĂ©s par le roi Childebert II. Agilulf lui succĂšde en mai 591, aprĂšs avoir Ă©pousĂ© sa veuve selon la coutume lombarde, la reine catholique ThĂ©odelinde. Sous l’influence de celle-ci, il fait baptiser leur fils Adaloald selon le rite catholique et lui-mĂȘme abandonne l’arianisme en 607. Cette conversion constitue un succĂšs important de la politique du pape GrĂ©goire, intervenu en octobre 598 pour que les Byzantins concĂšdent finalement aux Lombards l'Italie du Nord.

De 712 Ă  744, Liutprand tente vainement d'unifier la pĂ©ninsule italienne sous la domination lombarde, entrant rĂ©guliĂšrement en conflit avec la PapautĂ©. Il doit Ă©galement soumettre les duchĂ©s lombards semi-indĂ©pendants de SpolĂšte et de BĂ©nĂ©vent, et tenter d'expulser dĂ©finitivement les Byzantins d'Italie en assiĂ©geant Ravenne en 734, sans succĂšs[222]. Le royaume des Lombards prend fin sous les attaques des Francs conduits par Charlemagne en 774, intervenu Ă  la demande du pape l’annĂ©e prĂ©cĂ©dente. AprĂšs avoir conquis le reste du royaume, Charlemagne prend le titre de roi des Lombards et force le dernier roi, Didier de Lombardie, Ă  se faire moine. Mais le royaume subsiste du moins virtuellement puisque les empereurs du Saint-Empire romain germanique continuent Ă  ĂȘtre couronnĂ©s avec la Couronne de fer de Lombardie.

Les Slaves dans l'Empire d'orient et la fin des grandes migrations

Origine et expansion des Slaves (Ve et Xe siĂšcles).

Les tribus de langue slave commencent Ă  ĂȘtre connues du monde grĂ©co-romain aux Ve et VIe siĂšcles lorsqu'elles s'Ă©tendent sur les territoires abandonnĂ©s par les GĂ©pides, les Wisigoths, les Ostrogoths et les Lombards partis en direction de l’Empire romain d'Occident pour fuir les Huns et leurs successeurs. Autour du VIe siĂšcle, les Slaves se prĂ©sentent en grand nombre aux frontiĂšres de l'Empire romain d'Orient, dont la partie europĂ©enne, alors peuplĂ©e de Grecs sur les cĂŽtes, est peuplĂ©e dans l'intĂ©rieur des terres de Proto-Albanais et de Thraces latinisĂ©s. À partir du rĂšgne de Justinien (entre 586 et 610) la prĂ©sence des Slaves est mentionnĂ©e par des auteurs comme JordanĂšs, Procope de CĂ©sarĂ©e ou ThĂ©ophylacte Simocatta sous les noms d’Antes ou SklavĂšnes. Procope prĂ©cise en 545 que « Les Antes et les SklavĂšnes ont jadis eu un seul nom, car ils Ă©taient tous appelĂ©s Spori dans les temps anciens ». JordanĂšs prĂ©cise qu'au dĂ©but, les SklavĂšnes s'installent d'abord prĂšs des marĂ©cages et des forĂȘts, qui leur rappellent leur pays d'origine (selon la plupart des auteurs, plus ou moins les actuelles BiĂ©lorussie et Ukraine occidentale[223]). Par la suite, leur nombre croissant, ils occupent progressivement toutes les plaines, tandis que les populations antĂ©rieures hellĂ©nophones, latinophones ou albanophones se replient sur les cĂŽtes ou les piĂ©monts, devenant minoritaires.

Aux VIe et VIIe siĂšcles, une partie des Slaves migre vers le sud contournant les Carpates, arrive dans la plaine pannonienne et en Dacie. Parvenus au Danube, alliĂ©s aux Avars (eux-mĂȘmes arrivĂ©s en 567) les Slaves font irruption au sud du fleuve, atteignant l’Empire romain d'Orient. Ils pĂ©nĂštrent dans les Balkans et atteignent l’Adriatique. Vers 548, ils sont en Illyrie (en Carinthie, en Istrie et en Albanie), provoquant l’abandon du limes oriental. Dans les Balkans, des Slaves s’installent jusqu’au cƓur de la GrĂšce, descendant jusqu'au PĂ©loponnĂšse ; certains groupes passent le Bosphore et sont sĂ©dentarisĂ©s en Asie mineure ; d'autres traversent l'Adriatique et dĂ©barquent en Italie (oĂč ils ont laissĂ© des patronymes comme Schiavenno ou Schiano).

Au VIe siĂšcle Procope et ThĂ©ophylacte Simocatta mentionnent qu'« en 577, une horde de 100 000 Slaves » envahit la Thrace et l'Illyrie : Sirmium (actuelle Sremska Mitrovica, la citĂ© byzantine la plus importante sur le Danube), est perdue en 582. Les dĂ©buts de la prĂ©sence slave dans l’Empire d’Orient sont contemporains de l'arrivĂ©e des Antes aux bouches du Danube, et des SklavĂšnes dans l’Illyrie, la Dalmatie, la MĂ©sie et la Thrace. Auparavant, les Slaves avaient dĂ©jĂ  ravagĂ© ces parties de l'empire byzantin en 545-546 (Thrace), en 548 (Dyrrachium, Illyricum), en 550 (Thrace, Illyricum), 551 (Illyricum), leur donnant une connaissance du terrain, et affaiblissant les dĂ©fenses impĂ©riales. Entre la fin du VIe siĂšcle et le dĂ©but du VIIe siĂšcle, l’irruption des Avars bouleverse cette relative stabilitĂ©, mais il semble que les Slaves aient recommencĂ© leurs mouvements auparavant : les chroniques syriennes datent de 551 mentionnent une seconde vague d’invasion qui atteint la mer ÉgĂ©e. À la fin du VIe siĂšcle, Jean d'ÉphĂšse Ă©crit que « toute la GrĂšce est occupĂ©e par les Slaves ». En tous cas, c’est sans doute Ă  cause de l’invasion des Avars que le limes danubien est franchi Ă  nouveau par les Slaves au dĂ©but du VIIe siĂšcle : en 609, 617 et 619. En 617, les faubourgs mĂȘme de Constantinople sont menacĂ©s[224].

L’expansion des Slaves vers le sud est assez bien documentĂ©e, ayant fait vaciller l'autoritĂ© de l’empire byzantin sur les Balkans, au profit des Avars et des Bulgares. Des chroniqueurs comme Jean d'ÉphĂšse en font le rĂ©cit : « Trois ans aprĂšs la mort de Justin II en 581, le maudit peuple des SclavĂšnes parcourut toute l’Hellade, les provinces de Thessalonique et de Thrace, ravagea quantitĂ© de villes, prit d’assaut de nombreuses forteresses, dĂ©vasta et brĂ»la, rĂ©duisit la population en esclavage et se rendit maĂźtre du pays tout entier ». La tactique des Slaves, dĂ©crite par l'empereur byzantin Maurice, relĂšve de la guĂ©rilla : s'abritant dans les forĂȘts et les marĂ©cages, ils Ă©vitent la bataille rangĂ©e. Un auteur carolingien les qualifie de « grenouilles ». La mĂ©thode s'avĂšre efficace contre des États aux ressources limitĂ©es, qui ne peuvent maintenir leur armĂ©e en campagne pour de longues pĂ©riodes. Les Slaves s'organisent d'abord en « sklavinies » (grec : grec moderne : ÎŁÎșλαÎČÎčÎœÎŻÎ±Îč, latin : Sclaviniae), intercalĂ©es entre les « valachies » du bassin du bas-Danube et dans l'empire byzantin aux VIIe et IXe siĂšcles. Il s'agit de petites communautĂ©s rurales et guerriĂšres appelĂ©es Kniazats (ou Canesats dans les chroniques en latin), et dirigĂ©es par des voĂŻvodes (« ducs » civils et militaires), tantĂŽt indĂ©pendantes, tantĂŽt alliĂ©es, tantĂŽt mercenaires, tantĂŽt adversaires de l'une ou l'autre des puissances environnantes, germanique, avare ou romaine d'orient. L'empire d'orient a accordĂ© Ă  certaines Sklavinies le statut de « fĂ©dĂ©rĂ©es » (foederati), mais concrĂštement, il n'a plus contrĂŽlĂ© que les cĂŽtes de la pĂ©ninsule balkanique, et les slaves deviennent progressivement majoritaires dans l’intĂ©rieur de cette pĂ©ninsule (si l’on excepte l’Albanie, les cĂŽtes grecques et les terroirs montagneux valaques comme la Romania Planina ou le Stari Vlah prĂšs de Sarajevo).

Les Slaves installĂ©s dans l’Empire byzantin sont dĂ©signĂ©s comme « Slaves du Sud » :

  • les plus occidentaux d’entre eux, les Carentanes (qui ont laissĂ© leur nom Ă  la Carinthie actuelle) et les SlovĂšnes (qui donnent leur nom Ă  la SlovĂ©nie actuelle), s’allient aux Avars au VIIe siĂšcle, avant de passer sous la domination de l’aristocratie germanique (bavaroise et carolingienne) dans les duchĂ©s de Carinthie et Carniole ;
  • les Croates, originaires de l’actuelle Pologne (Croates blancs), Ă©tablis au sud de la Save, transforment l’Illyrie et la Dalmatie antiques au VIe siĂšcle en pays Ă  majoritĂ© slave. Ils constituent un État portant leur nom au IXe siĂšcle, plus tard rĂ©uni Ă  la Hongrie ;
  • les Serbes, qui viennent de l’actuelle Allemagne orientale (« Serbie blanche »), se sont ensuite Ă©tablis au centre et Ă  l’est des Balkans sous la conduite du Prince de Serbie blanche, formant en outre des enclaves jusqu’en GrĂšce orientale. Plus tard ils Ă©tablissent un État puissant sous la dynastie des Nemanjić (voir Empire serbe) ;
  • d’autres peuples slavophones, aujourd’hui fondus parmi leurs voisins, se partagĂšrent le reste des anciennes provinces romaines adriatiques : ainsi, les DoukliĂšnes et les Narentanes assimilent petit-Ă -petit les Illyriens romanisĂ©s et les Morlaques en Dalmatie ;
  • les plus orientaux des Slaves du Sud, les Slavons apparaissent d’abord dans le bassin du bas-Danube, en connexion avec la confĂ©dĂ©ration irano-turcophone des Bulgares, dont ils prennent le nom et Ă  laquelle ils donnent leur langue. Les Slavons/Bulgares s’étendent ensuite progressivement vers la Mer ÉgĂ©e, absorbent la plupart des Thraces romanisĂ©s (le restant donne naissance aux minoritĂ©s aroumaines) et se diffĂ©rencient plus tardivement en MacĂ©doslaves et en Bulgares, aux langues encore trĂšs proches.

Tant qu’ils restent paĂŻens (fidĂšles de PĂ©roun, DomovoĂŻ, Korochoun et des autres dieux slaves), les prisonniers slaves alimentent le commerce d’esclaves, nom justement dĂ©rivĂ© de Slaves, pratiquĂ© par les royaumes germaniques christianisĂ©s et par les musulmans : ce commerce amĂšne certains Slaves jusqu’en Espagne musulmane oĂč des esclaves de cour fondent des dynasties : dans le monde arabe mĂ©diĂ©val, le terme de Saqāliba semble bien dĂ©signer des Slaves, en particulier les esclaves et les mercenaires. Les Saqālib sont trĂšs prisĂ©s notamment en raison de leur blondeur, et servent ou sont forcĂ©s de servir d’une multitude de façons : fonctionnaires, filles de harem, eunuques, artisans, soldats, et mĂȘme gardes du calife de Cordoue. Convertis Ă  l’islām, certains Saqālib prennent le pouvoir dans certaines taĂŻfas issues de l’effondrement du califat omeyade.

InitiĂ©e Ă  la fois depuis Byzance au sud, et depuis Rome Ă  l’ouest, l’évangĂ©lisation des Slaves commence avec l’action de Cyrille et MĂ©thode — le premier ayant apportĂ© aux Slaves une Ă©criture dĂ©rivĂ©e du grec : l’alphabet cyrillique — et achĂšve le cycle des « Invasions barbares ».

La situation à la fin de la période des grandes migrations

L’arrivĂ©e des Lombards en Italie et des Slaves dans les Balkans constitue le dernier Ă©pisode des grandes migrations[225]. Cette Ă©poque vit naitre sur le sol de l’empire d’Occident chancelant un nouvel ordre politique qui subsista en grande partie au cours des dĂ©buts du Moyen Âge et d’oĂč Ă©mergĂšrent progressivement les États modernes. Ainsi, le royaume des Francs se divisa Ă  la fin de la dynastie carolingienne, en Francie orientale et Francie occidentale, ancĂȘtres de la France et de l’Allemagne actuelle. Le royaume des Wisigoths permet au cours de la Reconquista la formation d’une identitĂ© espagnole, alors que les Anglo-Saxons sont Ă  l’origine du Royaume-Uni et que le royaume des Lombards prĂ©figure, sous forme embryonnaire, l’État italien. Dans la majoritĂ© de ces royaumes en formation, oĂč se parlait une forme de plus en plus vulgarisĂ©e de latin (sauf peut-ĂȘtre en Grande-Bretagne oĂč il Ă©tait dĂ©jĂ  abandonnĂ©), les envahisseurs germaniques surent trouver un terrain d’entente, qui revĂȘtait des formes diverses selon les endroits, avec les peuples qu’ils avaient conquis. Ceci ne doit toutefois pas faire perdre de vue les changements quelquefois dramatiques qui eurent lieu Ă  la fin de l’AntiquitĂ© tardive, ni la violence qui s’exerça sur les populations concernĂ©es.

Pendant ce temps l’Empire romain se perpĂ©tuait en Orient, mais son intĂ©rĂȘt pour ce qui se passait en Occident diminua fortement aprĂšs la mort de Justinien en 565, malgrĂ© la crĂ©ation de l’exarchat de Ravenne et mĂȘme si la derniĂšre possession byzantine en Italie subsista jusqu’en 1071. Maurice Ier (582-602) fut le dernier empereur Ă  s’impliquer en Occident et Ă  y mener une activitĂ© politique intense. L’empire d’Orient se concentra, Ă  partir du dĂ©but du VIIe siĂšcle, sur le combat dĂ©fensif contre les Perses et les Arabes Ă  l’Est, les Avars et les Slaves au Nord-Ouest, combats qui requĂ©raient toutes ses Ă©nergies. Dans l’intĂ©rieur des Balkans, la multiplication des Sklavinies (duchĂ©s slaves Ă©chappant pour la plupart Ă  l’autoritĂ© impĂ©riale) et l’installation d’États Ă©quivalant les royaumes germaniques d’Occident (tel le Premier Empire bulgare qui fĂ©dĂ©ra les Sklavinies des Slaves et les Valachies des Thraco-Romains) ne laissa Ă  l’empire d’Orient que les cĂŽtes de la pĂ©ninsule, peuplĂ©es de Grecs[226], ce qui contribua, sous HĂ©raclius, Ă  l’effacement du caractĂšre latin de l’Empire, transformĂ© progressivement en un État dĂ©finitivement grec[227].

Le baptĂȘme de Clovis
Le baptĂȘme de Clovis d'aprĂšs une miniature. ConsidĂ©rĂ© comme consul romain par Constantinople et comme roi des Francs saliens par son peuple, Clovis est un excellent exemple du rĂŽle que jouĂšrent les « Barbares » dans les transformations de l'Europe entre l'AntiquitĂ© tardive et le Moyen Âge.

En Occident aussi, dĂšs le Ve siĂšcle, l’armĂ©e et l’administration avaient perdu leur caractĂšre proprement romain, ce qui entraĂźna des changements complexes dans l’organisation politique, Ă©conomique et sociale des sociĂ©tĂ©s concernĂ©es[228]. Si le climat de conflit permanent et la christianisation avaient entrainĂ© la disparition croissante de la culture antique, plusieurs Ă©lĂ©ments de la trame culturelle traditionnelle survĂ©curent nĂ©anmoins dans les royaumes barbares, mĂȘme si niveau d’éducation et production littĂ©raire ont Ă©tĂ© drastiquement rĂ©duits. Face au dĂ©clin de l’État, l’organisation de l’Église se renforça Ă©galement et l’influence des Ă©vĂȘques s’accrut. L’Église devint ainsi dĂ©positaire d’une partie de la culture antique, du moins dans sa tradition chrĂ©tienne : si cette culture ne parvint pas Ă  se maintenir au niveau qu’elle avait dĂ©jĂ  atteint, elle s’enrichit de nouvelles influences et fut appelĂ©e Ă  jouer un rĂŽle de premier plan dans l’architecture de la nouvelle sociĂ©tĂ© qui s’élaborait[229] Les Germains adoptĂšrent le droit romain qui faisait partie du mode de vie qu’ils s’efforçaient d’assimiler. Certains souverains germaniques qui tiraient la lĂ©gitimitĂ© de leur pouvoir de l’armĂ©e et du caractĂšre sacrĂ© de leur royautĂ© adoptĂšrent des noms impĂ©riaux (par exemple, ThĂ©odoric prit celui de Flavius) et eurent recours aux Ă©lites romaines pour les tĂąches administratives. De telle sorte que, souvent, le terme « germain » cessa de s’opposer Ă  celui de « romain » dans une population oĂč ils ne formaient souvent qu’une minoritĂ©.

Au cours des derniĂšres dĂ©cennies, la pĂ©riode qui s’étend du IVe au VIIIe siĂšcle a suscitĂ© un regain d’intĂ©rĂȘt de mĂȘme que la problĂ©matique de la continuitĂ© qui y est reliĂ©e[230]. Les modifications de la structure politique n’entraĂźnĂšrent pas nĂ©cessairement de changements brutaux pour la population. C’est ainsi que dans le royaume des Francs, les citoyens n’étaient plus sujets de l’empereur, mais du roi mĂȘme si on se rĂ©fĂ©ra jusqu’au VIe siĂšcle Ă  l’empereur de Constantinople comme au dominus noster. On « adopta » autant qu’on « adapta » les systĂšmes bureaucratique et politique romains. Pendant longtemps, les institutions de la Rome tardive subsistĂšrent, Ă  tout le moins jusqu’à ce que l’on ne trouve plus le personnel formĂ© nĂ©cessaire Ă  leur maintien. Dans les provinces, les membres des Ă©lites locales optĂšrent souvent pour une carriĂšre ecclĂ©siastique. Par ailleurs, les comites qui avaient dirigĂ© les civitates continuĂšrent Ă  exister jusqu’à ce qu’ils se transforment en comtes. Dans les Gaules, les Francs en rĂ©sistant aux envahisseurs alamans se dotĂšrent d’une personnalitĂ© propre : la Gaule devint la France et de nouveaux personnages firent leur apparition Ă  la cour royale, comme les « maires du palais » sous les MĂ©rovingiens[231]. Le commerce avec l’étranger diminua notablement durant le temps des grandes migrations et la production Ă©conomique des royaumes devint moins spĂ©cialisĂ©e qu’elle n’avait Ă©tĂ© du temps des Romains. Une tendance dĂ©jĂ  observable dans les derniĂšres annĂ©es de l’empire d’Occident vers une consolidation des structures aristocratiques s’accĂ©lĂ©ra, qui se transforma en opposition entre aristocrates et grands propriĂ©taires terriens. La sociĂ©tĂ© se divisa bientĂŽt entre hommes libres (auxquels appartenaient Ă  la fois la noblesse germanique et les Ă©lites romaines), semi-libres et non-libres. En mĂȘme temps, le nombre des esclaves s’éleva bien que de nombreuses questions de dĂ©tail sur leur statut soient encore controversĂ©es. Le dĂ©veloppement se ralentit mais Ă  des degrĂ©s divers selon les royaumes. De façon gĂ©nĂ©rale, de nombreuses thĂ©ories que l’on considĂ©rait comme acquises sont maintenant remises en question par les plus rĂ©cents travaux[232]. On revoit ainsi Ă  la hausse la population totale des villes en Occident. Dans certaines rĂ©gions, comme en Bretagne et dans une partie de la rĂ©gion du Danube, ce qui Ă©tait considĂ©rĂ© comme la culture urbaine antique disparut presque complĂštement. Dans le domaine artistique, de nouvelles formes se firent jour tant dans l'Ă©criture elle-mĂȘme que dans le style de peinture (peinture animaliĂšre). Par ailleurs, reprĂ©sentants traditionnels des civilisations, les rites de funĂ©railles se modifiĂšrent profondĂ©ment. C’est ainsi que progressivement l’« art romain » fut remplacĂ© par l’« art germanique » ou « barbare »[233].

Dates importantes

  • 375 : mort de l’empereur Valentinien Ier. À la mĂȘme Ă©poque (vraisemblablement quelques annĂ©es plus tĂŽt) les Huns soumettent les Alains et les Greuthungues.
  • 376 : fuite des Goths installĂ©s sur le Danube devant les Huns et arrivĂ©e de ceux-ci dans l’empire romain ; peu aprĂšs les Goths se soulĂšvent contre Rome.
  • 378 () : bataille d’Andrinople ; l’empereur Valens meurt au combat ; une grande partie de l’armĂ©e impĂ©riale est anĂ©antie.
  • 380 : sĂ©dentarisation de la « confĂ©dĂ©ration des trois peuples » en Pannonie par l’empereur Gratien.
  • 382 : traitĂ© avec les Goths ; l’empereur ThĂ©odose Ier permet l’établissement de nombreuses communautĂ©s goths en deçà du Danube.
  • 395 : partage de l’empire ; irruptions des Huns dans l’empire des Sassanides et dans les provinces orientales de l’Empire romain.
  • 405 : invasion de Radagaise et d’une armĂ©e imposante dans l’empire occidental ; Stilicon vainc les envahisseurs en aoĂ»t 406.
  • 406/407 : passage du Rhin ; Ă©croulement du limes romain ; Vandales, SuĂšves et Alains pillent la Gaule ; en Bretagne, l’usurpateur Constantin III fait son apparition ; dĂ©part des derniers contingents de l’armĂ©e impĂ©riale de l’ile.
  • 409 : dĂ©part des Vandales, SuĂšves et Alains pour l’Espagne.
  • 410 : sac de Rome par les Wisigoths sous la conduite d’Alaric Ier.
  • 418]: Ă©tablissement des Wisigoths en Aquitaine seconde.
  • 429 : les Vandales dĂ©barquent en Afrique romaine.
  • 436 : anĂ©antissement du royaume des Burgondes sur le Haut-Rhin moyen par le magister militum Aetius qui, en 443, transfĂšre les populations en Sapaudie.
  • 439 prise de Carthage ; reconnaissance par Rome de ses pertes en 442
  • +/- 440 : une partie des Saxons et autres groupes germaniques s’établissent en Grande-Bretagne Ă  titre de fĂ©dĂ©rĂ©s et commencent Ă  prendre possession du pays.
  • 451]: expĂ©dition d’Attila contre l’empire d’Occident ; bataille des champs Catalauniques et retrait d’Attila des Gaules.
  • 452]: invasion de l’Italie par les Huns.
  • 453]: l’empire d’Attila s’écroule peu aprĂšs sa mort.
  • 455 : sac de Rome par les Vandales.
  • 466 : le roi des Wisigoths Euric rompt le traitĂ© avec Rome et commence une politique d’expansion ; la plus grande partie de l’Hispanie et du sud-ouest des Gaules passe aux mains des Wisigoths.
  • 468 : attaque du royaume des Vandales par les troupes impĂ©riales d’Orient et d’Occident.
  • 476 : renvoi du dernier empereur occidental, Romulus Augustule, par Odoacre et fin politique de l’empire d’Occident ; Julius Nepos continue jusqu’à sa mort en 480 Ă  rĂ©gner en exil ; en Gaule, l’enclave gallo-romaine Ă©rigĂ©e par Ægidius se maintient jusqu’en 486.
  • 486/487 : destruction du royaume de Syagrius par les Francs de Clovis Ier ; le royaume des Francs prend forme.
  • 489 : le roi Ostrogoth ThĂ©odoric le Grand envahit l’Italie et s'oppose Ă  Odoacre.
  • 493 : ThĂ©odoric le Grand s'empare de Ravenne qui devient la capitale de son royaume en Italie.
  • 507 : le roi des Wisigoths est vaincu par les Francs ; son royaume se replie au sud-ouest des Gaules.
  • 533/534 : destruction du royaume des Vandales par le gĂ©nĂ©ral byzantin BĂ©lisaire ; le royaume burgonde tombe en 534 aux mains des Francs.
  • 535-552 : Guerre des Goths en Italie ; l’empereur Justinien reprend le contrĂŽle d’une partie de l’ancien empire d’Occident.
  • 545-577 : invasion des Slaves dans l’Empire romain d'Orient.
  • 568 : invasion des Lombards dans l’Italie du Nord. Fin des grandes migrations.
Bataille du LechfeldPremiĂšre expĂ©dition de Charlemagne contre les AvarsExarchat de RavenneBataille de GuadaleteAsparoukhConstantinopleSlavesExarchat de RavenneClovis IerRomulus AugustuleSac de Rome (455)Bataille de la NedaoBataille des champs Catalauniques (451)Royaume vandale d'AfriqueBretagne (province romaine)Sac de Rome (410)MagyarsÉtat croate mĂ©diĂ©valGrande-MoravieRĂšgne de SamoBulgaresOnoghourAvarsEmpire hunniqueÂge des VikingsAl-AndalusRoyaume wisigothVandalesGothsRoyaume lombardExarchat de RavenneCarolingiensMĂ©rovingiensKoubratThĂ©odoric le GrandBĂšde le VĂ©nĂ©rableGrĂ©goire IerAttilaConstantin Ier (empereur romain)CharlemagneValentinien IIITĂ©trarchieGrandes invasions

Voir aussi

Cartographie[234]

Notes et références

  1. Thomas Burns 2003, p. 35.
  2. Comparer : Stefan Krautschick, « Zur Entstehung eines Datums. 375 - Beginn der Völkerwanderung » dans Klio 82, 2000, p. 217-222, de mĂȘme que, du mĂȘme auteur, « “Hunnensturm und Germanenflut: 375 – Beginn der Völkerwanderung? » dans Byzantinische Zeitschrift 92, 1999, p. 10-67.
  3. Matthias Springer, « Völkerwanderung » dans Reallexikon der Germanischen Alterumskunde (RGA), 2e éd. Tome 32, Walter de Gruyter, Berlin/New York, 2006, p. 509-517.
  4. Jean Chaline, Histoire de l'homme et des climats au quaternaire, Doin, Paris, 1985 (ISBN 2-7040-0489-7) et Monica Rotaru, JĂ©rĂŽme Gaillardet, Michel Steinberg, Jean Trichet, Les Climats passĂ©s de la terre, Vuibert, 2007 (ISBN 978-2-7117-5394-9), 195 pp. : les pĂ©jorations climatiques se manifestent en Europe par un Gulf Stream plus intense qui fait du Groenland un pays vert, mais augmente la pluviositĂ© en Scandinavie, compromettant les rĂ©coltes et la pĂȘche, et en Asie centrale par une suite d’étĂ©s torrides, trĂšs secs, et d’hivers trĂšs rudes, qui dĂ©ciment les troupeaux, base Ă©conomique des peuples de la steppe ; pour les pĂ©riodes plus rĂ©centes, voir aussi Emmanuel Le Roy Ladurie, D. Rousseau et A. Vasak, Les Fluctuations du climat de l’an mil Ă  aujourd’hui, Fayard 2011, 332 p.
  5. Voir Mischa Meier, Sie schufen Europa. C.H. Beck, Munich, 2007.
  6. Les paragraphes qui suivent résument le chapitre « The Great Migration Debate » dans Peter Heather, Empires and Barbarians, p. 12-21.
  7. Cf. JérÎme de Stridon (trad. J. Labourt), Correspondance, vol. 7, Paris, éditions Belles-Lettres, coll. « Collection des Universités de France », (réimpr. 2e tirage, 2003), 8 tomes.
  8. Dimitri Obolensky, chap. 2 « Barbarians in the Balkans » dans The Byzantine Commonwealth, Eastern Europe, 500-1453, Londres, Phoenix Press, 1971 (ISBN 1 84212 019 0).
  9. P. Heather (2009), p. 253.
  10. Hans-Erich Stier (dir.), Grosser Atlas zur Weltgeschichte, Westermann, 1985 (ISBN 3-14-100919-8), p. 48-49
  11. N. Heather (2009), p. 254.
  12. Heather (2009), p. 256.
  13. JordanĂšs, Getica, 4, 25-28.
  14. Heather (2009), p. 122-123.
  15. Walter Pohl, « Telling the Difference: Signs of Ethnic Identity » dans Walter Pohl, Helmut Reimitz (éds), Strategies of Distinction: The Construction of Ethnic Communities, 300-800. Leiden u.a. 1998, p. 17 et sq.
  16. Reinhard Wenskus, Stammesbildung und Verfassung. Das Werden de frĂŒhmittelalterlichen gentes, 2e Ă©dition, Cologne/Vienne 1977. Le travail de Wenskus a Ă©tĂ© continuĂ© par Herwig Wolfram et son Ă©lĂšve Walter Pohl. RĂ©sumĂ© accompagnĂ© de matĂ©riel nouveau dans Pohl (2005), p. 13 et sq. Toutefois, l’élan de l’école de Vienne a fait en partie l’objet de critiques concernant Wolfram et Pohl.
  17. Coumert et Dumézil 2020, p. 16-18.
  18. Coumert et Dumézil 2020, p. 18-19.
  19. Coumert et Dumézil 2020, p. 19-20.
  20. Coumert et Dumézil 2020, p. 19.
  21. Coumert et Dumézil 2020, p. 21-22.
  22. Goetz, Jarnut, Pohl (2003) ; Pohl (1997).
  23. Karl Ferdinand Werner et al., BibliothĂšque de l'Ă©cole des chartes. 1996. : Clovis chez les historiens, t. 154, , 271 p., p. 7-45.
  24. Pour la façon souvent tout aussi politique dont ces thĂšses ont Ă©tĂ© reçues, voir l’exposĂ© de Rosen (2003), p. 109-121.
  25. Au cours des derniĂšres annĂ©es, Heather (2005), Heather (2009) et Ward-Perkins (2005) ont mis l’accent sur l’aspect dĂ©vastateur de cette pĂ©riode. Comparer les conclusions opposĂ©es de Goffart (1980) et Goffart (2006) ainsi que les travaux de Peter Brown. Pour un rĂ©sumĂ© d’ensemble, voir la collection Transformation of the Roman World (jusqu’ici en 14 volumes).
  26. Heather (1995) et Heather (2005). À la diffĂ©rence de Halsall (2007).
  27. Springer (2006), p. 514.
  28. Émilienne Demougeot, L’Empire romain et les barbares d’Occident (IVe – VIIe siùcle) : scripta varia, Publications de la Sorbonne, Paris 1988, 420 p.
  29. Georges Duby (dir.) Histoire de la France, Des origines à nos jours, trois volumes, Éditions Larousse 1970, coll. "Bibliothùque historique", (ISBN 978-2035826367) et L'Histoire continue, Odile Jacob 1991, (ISBN 2738110428)
  30. Patrick Geary : Die Merowinger. Munich, 1996, p. 7.
  31. Pohl (2005), p. 31 et sq ; Rosen (2003), p. 99-101.
  32. Voir Springer (2006).
  33. en latin Agri decumates ; ils constituent alors l'extrĂȘme Sud-Ouest de la Germanie, entre Rhin, Main et Danube, correspondant approximativement Ă  l'actuel Bade-Wurtemberg.
  34. Voir « Tableaux chronologiques » dans Roger Rémondon (1970), p. 50 à 57.
  35. Pour une analyse critique de la Getica, voir Arne Soby Christensen, Cassiodorus, Jordanes and the History of the Goths. Studies in a Migration Myth. Copenhague, 2002 ; on pourra aussi consulter Herwig Wolfram, « Einige Überlegungen zur gotischen Origo gentis » dans Henrik Birnbaum u.a. (Ă©ds.) Festchrift Alexander Issatschenko. Lund, 1978, p. 487-499. Le manuel de base concernant les Goths est celui de Wolfram (1979). Également important, Volker Bierbrauer, « ArchĂ€eologie une Geschichte der Goten vom 1.-7. Jahrhunder » dans FrĂŒhmittelatlterliche Studien, vol. 28, 1994, p. 51-171 ainsi que Heather (1991).
  36. Voir Karl Christ, Geschichte der römischen Kaiserzeit, 4e éd. Munich 2002, p. 336 et sq ; pour un résumé, Rosen (2003), p. 43-45.
  37. Wolfram (1979) p. 41 et sq.
  38. RĂ©mondon (1970), p. 99.
  39. Heather (2005), p. 82.
  40. Martin (2001), p. 166.
  41. Stefan Krautschick, « Hunnensturm und Germanenflut : 375 – Beginn der VĂŽlkerwanderung? » dans Byzantinische Zeitschrift 92, 1999, p. 10-67, ici p. 12-14
  42. 31,3. Pour les Huns, voir Maenchen-Helfen (1978). Voir aussi l’article « Hunnen » dans RGA 15 (2000), p. 246-261 ainsi qu'« Attila und die Hunnen », publiĂ© par le musĂ©e d’histoire de Pfalz Speyer, Stuttgart 2007. Concernant le royaume d’Ermanaric, voir Arne Soby Christensen, Cassiodorus, Jordanes and the History of the Goths, Copenhague, 2002, p. 158 et sq., ainsi que Wolfram (1979) p. 98-102. La mort d’Ermanaric est citĂ©e dans plusieurs Ă©popĂ©es du Moyen Âge.
  43. Voir Heater (1995) et Heather (2005), p. 146 et sq. Voir Ă©galement l’article « Hunnen » dans RGA 15 (2000), p. 247
  44. Orose, Historiae adversum paganos, 7.33
  45. La meilleure source Ă  ce sujet est Ă  nouveau Ammien dans le dernier tome (31) de son Histoire. Voir aussi Heather (2009), p. 162-163
  46. Ammianus, 31,5 et sq. ; Heather (1991), p. 142 et sq.
  47. Valens craint peut-ĂȘtre que son neveu Gratien, ayant dĂ©jĂ  fait ses preuves Ă  la guerre, ne voit sa renommĂ©e croĂźtre aux dĂ©pens de celle de son oncle s’il venait Ă  son aide pour dĂ©faire les Goths. Pour la suite des Ă©vĂ©nements, voir Ammien 31,12 et sq. Comparer Ă  Burns 91994) p. 28 et sq., ainsi que Heather (1991) p. 142
  48. Heather (1991), p. 84 et sq.
  49. Burns (1994) p. 33
  50. Ammien 3 1, 13, 19
  51. Wolfram (1979), p. 150 et sq.
  52. Sur ThĂ©odose le Grand, voir Hartmut Leppin, Theodosius der Grosse, Darmstadt 2003 ainsi que sur les consĂ©quences de la bataille d’Andrinople, p. 35 et sq. Comparer avec Burns (1994), p. 23 et sq., et Heather (1991), p. 142 et sq.
  53. Voir Heather (1991), p. 157 et sq ; Remondon (1970), p. 191.
  54. Leppin (2003), p. 45 et sq ; Halsall (2007), p. 184 et sq.
  55. Getica, 29, 146.
  56. Heather (1991) p. 193 et sq ; Wolfram (1979), p. 159 et sq.
  57. Voir Burns (1994), p. 183 et sq. ; Heather (1991), p. 199 et sq. (avec de bonnes cartes) ; Wolfram (1979), p. 164 et sq.
  58. H. Pirenne, Histoire de l'Europe. Des invasions au XVIe siĂšcle (1939), Paris-Bruxelles, p. 3
  59. Stilicon n’était pas le premier gĂ©nĂ©ral Ă  avoir pris une influence considĂ©rable sur la conduite des affaires de l’État. Cette tendance se continua au Ve siĂšcle au cours des rĂšgnes d’empereurs faibles. Alexander Demandt, « Magister Militum » dans Pauly-Wissowa. SupplĂ©ment 13, p. 553 et sq.
  60. Sur la campagne contre Radagaise, voir Heather (2005), p. 194 et sq, de mĂȘme que Wolfram (1979), p. 202-204, lequel met l’accent sur cet Ă©pisode dans l’ethnogenĂšse des Wisigoths.
  61. D’aprĂšs Zosime qui s’appuie sur Olympiodore de ThĂšbes, celle-ci se serait Ă©levĂ©e Ă  4 000 livres d’or. AprĂšs avoir rĂ©sidĂ© pendant une longue pĂ©riode Ă  Milan, le gouvernement impĂ©rial, au vu de la situation toujours davantage plus dĂ©gradĂ©e, dĂ©cidĂ© de s'Ă©tablir Ă  Ravenne, alors considĂ©rĂ©e comme imprenable.
  62. Zosime 5, 39-41.
  63. Wolfram (1979), p. 187 et sq.
  64. Wolfram (1979), p. 188 et sq.
  65. Skizze Mischa Meier, « Alarich und die Eroberung Roms im Jahr 410. Der Beginn der ‘Völkerwanderung’ » dans Meier (2007), p. 45-62, en particulier, p. 52 et H. Pirenne, Histoire de l'Europe. Des invasions au XVIe siĂšcle, 1939, Paris-Bruxelles, p. 4-5.
  66. Sur le sac de Rome en 410 et la façon dont il fut perçu, voir Mischa Meier, Steffen Patzold, August 410 – Ein Kampf um Rom, Stuttgart 2010 ; comparer Ă  Hans Armin, « Der Fall Roms. Literarische Verarbeitung bei Heiden und Christen », dans Johannes Oort, Dietmar Wyrwa (Ă©d.) Heiden und Christen im 5. Jahrhundert. Louvain, 1998, p. 160.
  67. Voir Goffart (2006), p. 73 et sq. ; Heather (2005), p. 194 et sq. ; Peter J. Heather, “Why did the Barbarians Cross the Rhine ? » dans Journal of Late Antiquity (2009), p. 3-29 ; Stein (1928), p. 381 et sq. Voir aussi Michael Kulikowski, “Barbarians in Gaul, Usurpers in Britain” dans Britannia 31 (2000), p. 325-345.
  68. Sur les Vandales, voir Castritus (2007), p. 46 et sq, lequel porte un jugement sĂ©vĂšre sur les sources de mĂȘme que Merrills/Miles (2010). On pourra complĂ©ter avec l’article du RGA, « Wandalen » dans RGA 33 (2006), p. 168.
  69. « Sweben » dans RGA 30 (2005), p. 184 et sq.
  70. Heather (2005), p. 206-209 avec cartes détaillées et analyse des sources.
  71. Heather (2005), p. 209 et sq, 236 et sq ; Stein (1928), p. 383 et sq ; C.E. Stevens, « Marcus Gratian, Constantine », dans Athenaeum 35 (1957), p. 316-347.
  72. Pohl (2005), p. 86 et sq. Plusieurs questions de dĂ©tail demeurent controversĂ©es, ne serait-ce qu’en raison de l’insuffisance des sources.
  73. Concernant ces deux usurpateurs, voir John F. Drinkwater, « The Usurpers Constantine III (407-411) and Jovinus (411-413) » dans Britannia 29 (1998), p. 269-298 ; Kay Ehling, « Zur Geschichte Constantins III. » dans Francia 23 (1996) p. 1-11 ; Ralf Scharf, « Iovinus – Kaiser in Gallien » dans Francia 20 (1993), p. 1-13. Pour les Burgondes voir Kaiser (2004), p. 26 et sq.
  74. Wolfram (1979), p. 192 et sq.
  75. Wolfram (1979), p. 196-202.
  76. Orosius, Historiae adversum paganos, 7,43.
  77. Wolfram (1979) p. 194 et sq. Pour les opérations militaires conduites par Constantius, voir Burns (1994), p. 250 et sq.
  78. Wolfram (1979), p. 204 et sq.
  79. Heather (1991), p. 221 et sq.
  80. Walter Goffart penche pour cette derniĂšre option : Goffart (1980), p. 103 et sq, Goffart (2006), p. 119 et sq. Voir Ă©galement Burns (1994) p. 263 et sq. ; Heather (1991), p. 221 et sq. ; Pohl (2005), p. 58 et sq. ; Pohl (1997), passim ; Wolfram (1979), p. 208 et sq. ; Herwig Wolfram, « Die dauerhafte Ansiedlung der Goten auf römischem Boden. Eine endlose Geschichte » dans Mitteilungen des Instituts fĂŒr Österreichische Geschichtsforschung 112 (2004), p. 11-35.
  81. Burns (1994), p. 263 et sq. ; pour sa part, Ward-Perkins (2005), p. 54 et sq. est plus négatif.
  82. De façon gĂ©nĂ©rale, seule approximativement une personne sur quatre ou cinq Ă©tait en mesure de porter les armes dans chacun de ces peuples. Par la suite, les Vandales en Afrique du Nord devaient s’éloigner graduellement de ce modĂšle de coopĂ©ration.
  83. Voir Castritius (2007), p. 58 et sq.
  84. Hydatius, Chronica 49.
  85. Wolfram (1990), p. 234 et sq.
  86. Castitius (2007), p. 76 et sq. ; Uwe Walter, « Geiserich und das afrikanische Vandalenreich » dans Meier (2007), p. 63-77.
  87. Getica, 33, 168.
  88. Pour le nombre de personnes en cause sur lequel il n’y a pas unanimitĂ© dans les sources ; voir la discussion dans Castritius (2007), p. 78.
  89. Castritius, p. 86 et sq. ; Wolfram (1990), p. 237 et sq .
  90. Procope, Bella 3,3.
  91. Castritius (2007), p. 68 ; voir Ă  l’opposĂ© Alexander Demandt, Die SpĂ€tantike, 2e Ă©d., Munich 2007, p. 184.
  92. Wolfram (1990), p. 238.
  93. Heather (2005), p. 268.
  94. Castritius (2007), p. 93 et sq. ; Walther, « Geiséric » dans Meier (2007), p. 70 et sq. ; Wolfram (1990), p. 239 et sq.
  95. Heather (1995), p. 9.
  96. Voir « Hunnen » dans RGA 15 (2000), p. 249 ; Heather (1995), p. 10 et sq. Comparer Ă  Maenchen-Helfen (1978), p. 22 qui parle d’un certain sentiment d’appartenance commune.
  97. Maenchen-Helfen (1978), p. 38 et sq.
  98. Claudien, In Rufinum, livr. 2, p. 26 et sq.
  99. Maenchen-Helfen (1978), p. 43 et sq.
  100. Dieter Timpe, « Gainas » dans RGA 10 (1998), p. 317-321. La figure de GaĂŻnas sert par la suite d’exemple pour la propagande antigermanique.
  101. Orose, HistoriĂŠ adversum paganos, 7, 37,.3.
  102. « Hunen » dans RGA 15 (2000), p. 250. Voir aussi Maenchen-Helfen (1978), p. 53 et sq., lequel souligne la pauvreté des sources contemporaines de cette période.
  103. Chronique de Marcellin Comes, anno 427.
  104. Maenchen-Helfen (1978), p. 63 et sq.
  105. Demandt (1998), p. 122 et sq. ; Stein (1928), p. 472 et sq.
  106. « Hunnen » dans RGA 15 (2000), p. 250 voir aussi Kaiser (2004), p. 31 et sq. ; Maenchen-Helfen (1978), p. 60 et sq.
  107. Kaiser (2004), p. 38 et sq.
  108. Bruno Bleckmann, « Attila, Aetius und das ‘Ende Roms’. Der Kollaps des Weströmischen Reiches » dans Meier (2007), p. 93-110 ; Heather (2005), p. 300 et sq. ; Maenchen-Helfen (1978), p. 69 et sq. ; Gerhard Wirth, Attila. Das Hunnenreich und Europa. Stuttgart, 1999 [ce dernier faisant une large part Ă  la spĂ©culation].
  109. Chronique de Marcelinus Comes, année 441 ; Priskos, fragment 1b.
  110. Chronique de Marcelinus Comes, année 447 ; Priskos, Fragment 3.
  111. JordanĂšs, Romana, 331.
  112. Voir Bleckmann, « Attila » dans Meier (2007), p. 102.
  113. Priscus, fragment 8.
  114. Jordanes, Getica, 42, 224.
  115. Maenchen-Helfen (1978), p. 98 la repousse ; comparer à Bleckmann, « Attila » dans Meier (2007), p. 102 et sq.
  116. Bleckmann, « Attila » dans Meier (2007), p. 103.
  117. Castritius (2007), p. 104.
  118. Jordanes, Getica, 41, 216.
  119. Maenchen-Helfen (1978), p. 97-106.
  120. Heather (2005), p. 340 et sq.
  121. Walter Pohl « Die Gepiden und die gentes an der mittleren Donau nach dem Zerfall des Attilareiches » dans Herwig Wolfram, Falko Daim (Ă©d.) Die Völker an der mittleren und unteren Donau im fĂŒnften und sechsten Jahrhundert, Vienne, 1980, p. 239-305.
  122. « Hunnen » dans RGA 15 (2000), p. 252 ; Heather (2005), p. 351 et sq. ; Maenchen-Helfen (1978), p. 107 et sq.
  123. Demandt (1998), p. 126 et sq ; Heather (2005), p. 369 et sq. ; Stein (1928), p. 517-519.
  124. Heather (2005), p. 375 et sq.
  125. Brian Croke, « Dynasty and Ethnicity. Emperor Leo I and the Eclipse of Aspar » dans Chiron 35 (2005), p. 147-203.
  126. Au sujet de la guerre avec les Goths et de la formation du royaume des Ostrogoths dans les Balkans, voir Heather (1991), p. 240 et sq. ; Wolfram (1979), p. 307 et sq.
  127. Demandt (1998), p. 141 et sq ; Stein (1928), p. 540 et sq.
  128. Castritius (2007), p. 103 et sq.
  129. Stien (1928), p. 552 et sq.
  130. Pour la situation des Gaules au Ve siĂšcle, voir John Drinkwater, Hugh Elton (Ă©d.), Fifth-Century Gaul : A Crisis of Identity?, Cambridge, 1992.
  131. Kaiser (2004), p. 49.
  132. Wolfram (1979), p. 217 et sq.
  133. Castritius (2007), p. 113 et sq.
  134. GrĂ©goire de Tours, Decem libri historiarum, 2, 11 ; 2, 18 ; 2, 27. Comparer Ă  Halsall (2007), p. 266 et sq et Ă  David Frye, « Aegidius, Childeric, Odovacer and Paul » dans Nottingham Medieval Studies 36 (1992), p. 1 et sq. Concernant la personne d’Egidius, voir Henning (1999), p. 81 et sq.
  135. Wolfram (1979), p. 219 et sq.
  136. Michael Kulikowski, « Marcellin of Dalmatia and the Fall of the Western Empire » dans Byzantion 72 (2002), p. 177-191.
  137. Castritius (2007), p. 118 et sq.
  138. Stein (1928), p. 582 et sq.
  139. Martin (2001), p. 168, 171 et sq.
  140. Demandt (1998), p. 148.
  141. Demandt (1998), p. 145 ; Heather (2005), p. 425 et sq ; Kaiser (2004), p. 52 ; Stein (1928), p. 584.
  142. Martin (2001), p. 45.
  143. Wolfram (1979), p. 222 et sq.
  144. Wolfram (1979), p. 226.
  145. Henning (1999), p. 174 et sq.
  146. Wolfram (1990), p. 264 et sq.
  147. Voir Eugippius, Vita Severini, qui est une source importante Ă  ce sujet. Voir aussi Heather (2005), p. 407 et sq.
  148. Voir Ă  ce sujet, l’essai classique de Brian Croke, « A.D. 476. The manufacture of a Turning Point » dans Chiron 13 (1983), p. 81-119. À l’opposĂ©, voir Bleckmann, « Attila » dans Meier (2007), p. 109 et sq.
  149. Henning Börm, « Das weströmische Kaisertum nach 476 » dans Josef Wiesehöfer et al. (éd.), Monumentum et instrumentum inscriptum, Stuttgart 2008, p. 47-69.
  150. Rosen (2003), p. 79 et sq.
  151. Voir l’état de la recherche dans Martin (2001), p. 168 et sq.
  152. Goffart (2006), p. 23 et sq. ; Wolfram (1990), p. 271 et sq. et le survol de Alexander Demandt, Der Fall Roms, Munich, 1984.
  153. Demandt (1998), p. 149 et sq.
  154. Maechen-Helfen (1978), p. 260 et sq.
  155. JordanĂšs (ou plus exactement Cassiodore qu’il rĂ©sume) donne dans la Getica l’impression que les Amales pouvaient remonter leur arbre gĂ©nĂ©alogique dans la nuit des temps, ce qui n’est qu’une construction. Voir Peter J. Heather , « Cassiodorus and the Rise of the Amals. Genealogy and the Goths under Hun Domination » dans Journal of Roman Studies 79 (1989), p. 103-128.
  156. Heather (1991), p. 240 et sq. ; Pohl (2004), p. 126 et sq. Wolfram (1979), p. 321 et sq.
  157. JordanĂšs, Getica, 54, 277-279.
  158. L’historien Malchus de Philadelphie fait un rĂ©cit dĂ©taillĂ© des Ă©vĂ©nements dans sa chronique qui ne nous est parvenue que sous forme de fragments.
  159. Sur la politique de ZĂ©non Ă  l’endroit des Goths et ses consĂ©quences, voir Heather (1991), p. 272 et sq.
  160. Voir Wolfram (1979), p. 346 et sq. ; Ă©galement, Pohl (2005), p. 137-140.
  161. Pour une introduction Ă  ThĂ©odoric, voir Hans-Ulrich Wiemer, « Theoderich der Große und das ostgotische Italien. Integration durch Separation » dans Meier (2007), p. 156-175 ; Antonio Carile (Ă©d.) Teoderico e i Goti fra Oriente e Occidente. Ravenne, 1995 ; Wilhelm Enßlin, « Theoderich der Große, 2e Ă©d. Munich 1959 (encore le texte le plus complet). Sur la souverainetĂ© des Ostrogoths sur l’Italie, voir Patrick Amory, People and Identity in Ostrogothic Italy, 489-554. Cambridge 1997 dans lequel il expose quelques thĂšses provocantes.
  162. On ne s’entend guĂšre toutefois sur les dĂ©tails de cette politique ; voir Pohl (2005), p. 137-140.
  163. Wolfram (1979), p. 353 et sq.
  164. Survol dans Pohl (2005), p. 147-151 ; plus en détail dans Wolfram (1979), p. 415 et sq.
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  166. Sur le déclin des SuÚves, voir Kampers, Geschichte der Westgoten, p. 180 et sq.
  167. Wolfram (1979), p. 225 ; Sur ces changements voir Bernhard Jussen, “Über ‘Bischofsherrschaften’ und die Proceduren politisch-sozialer Umordnung in Gallien zwischen Antike und Mittelalter » dans Historische Zeitschrift 260 (1995), p. 673-718.
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  169. Giese (2004), p. 140 et sq.
  170. Giese (2004), p. 148 et sq.
  171. Postel (2004), p. 219, affirme : « Le royaume wisigoth devient l’empire espagnol ».
  172. Pour la suite des Ă©vĂšnements, voir Kampers, Geschichte der Westgoten, p. 188 et sq, de mĂȘme que 311 et sq. ; Giese (2004), p. 151 et sq.
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  234. La galerie de cartes est une synthĂšse du Westermann Grosser Atlas zur Weltgeschichte (Hans-Erich Stier, dir.), 1985 (ISBN 3-14-100919-8), du DTV Atlas zur Weltgeschichte, 1987 traduit chez Perrin (ISBN 2-7242-3596-7), du Putzger historischer Weltatlas Cornelsen, 1990 (ISBN 3-464-00176-8), de l’Atlas historique Georges Duby chez Larousse 1987 (ISBN 2-03-503009-9), de la sĂ©rie des Atlas des Peuples d'AndrĂ© et Jean Sellier Ă  La DĂ©couverte : Europe occidentale : 1995 (ISBN 2-7071-2505-9), Europe centrale : 1992 (ISBN 2-7071-2032-4), Orient : 1993 (ISBN 2-7071-2222-X), avec des dĂ©tails pris dans le TörtĂ©nelmi atlasz a közĂ©piskolĂĄk szĂĄmĂĄra (« Atlas historique pour les collĂšges ») de KartogrĂĄfiai VĂĄllalat SzerkesztƑbizottsĂĄga, Budapest 1991 (ISBN 963-351-422-3) et dans l'Atlas istorico-geografic de l'AcadĂ©mie roumaine, 1995 (ISBN 973-27-0500-0), et de l'Atlas des religions, hors-sĂ©rie du Monde, 2007, 194 p.
  235. Gallo vient du germanique Walha (« non-germain ») comme "Gallois", "Wallons" et "Valaques".

Bibliographie

Sources primaires

La plus importante source concernant les invasions hunniques jusqu’en 378 est l’Ɠuvre d’Ammien Marcellin (Ammianus Marcellinus), laquelle fut Ă©galement la derniĂšre Ɠuvre historique latine de l’AntiquitĂ©. Des Ɠuvres majeures d’Olympiodore de ThĂšbes et de Priscus, nous ne possĂ©dons que des fragments qui contiennent cependant des informations importantes. De la mĂȘme façon, nous ne possĂ©dons que des fragments des Ɠuvres de Malchos de Philadelphie et de Jean d'Antioche. Le chroniqueur paĂŻen Zosime Ă©crivit vers les annĂ©es 500 une Nouvelle Histoire, laquelle en dĂ©pit de son recours Ă  des sources fiables, contient de nombreuses erreurs et est partiale. Procope de CĂ©sarĂ©e dĂ©crivit de façon circonstanciĂ©e au VIe siĂšcle les guerres de Justinien contre les Vandales et les Ostrogoths. Agathias le Scholastique et Theophylaktos Simokates dĂ©crivirent Ă©galement les Ă©vĂ©nements qui se sont produits dans l’empire d’Occident, mĂȘme s’ils n’ont pas la mĂȘme valeur que Procope. JordanĂšs, qui s’appuie sur une Histoire des Goths de Cassiodore maintenant perdue, est notre principale source d’information sur l’histoire des Goths (principalement des Ostrogoths), mĂȘme si on peut douter de certaines informations. Pour l’histoire des Francs, on se rapportera Ă  GrĂ©goire de Tours et Ă  son Histoire en dix volumes. Paul Diacre nous renseigne sur l’histoire des Lombards. De plus, de nombreuses Chroniques (par exemple celles de Marcellinus Comes [Chronique des Gaules] ou celles d’Hydace de Chaves) nous apportent d’importantes mais brĂšves informations.

Par ailleurs, diverses Histoires de l’Église et des lettres comme celles de Sidoine Apollinaire contiennent de nombreuses informations dont la qualitĂ© et la crĂ©dibilitĂ© peuvent Ă  l’occasion ĂȘtre remises en question. On trouvera tous les auteurs chrĂ©tiens en ligne dans la version française de Patrologia Latina ou de Patrologia Graeca.

  • Agathias le Scholastique. Historiarum libri quinque (vers 560), Ă©di. par R. Keysdell, coll. « Corpus Fontium Historiae Byzantinae », 2A, De Gruyter, Berlin, 1967.
  • Ammien Marcellin, Histoires (Res Gestae, 395), sous la dir. de Jacques Fontaine, Les Belles Lettres, 1968 ss. T. I : livres XIV-XVI, 1968 ; t. II : livres XVII-XIX ; t. III : livres XX-XXII ; t. IV : livres XXIII-XXV, 1977 ; t. V : livres XXVI-XXVIII ; t. VI : livres XXIX-XXXI (index gĂ©nĂ©ral).
  • Blockley, Roger C. (Ă©d.), The Fragmentary Classicising Historians of the Later Roman Empire (texte et traduction anglaise), Liverpool, 1980 (vol. I), 1983 (vol. II).
  • GrĂ©goire de Tours. Historia Francorum : photographie d'un parchemin du VIIIe/IXe siĂšcle en Ă©criture onciale, le manuscrit latin 17655, folio 13 volume 14, conservĂ© Ă  la BibliothĂšque nationale de France, DĂ©partement des Manuscrits, div. occidentale.
  • Hieronymus (JĂ©rĂŽme), Epistulae, Corpus scr. eccl. lat., t. LIV, 1910 ; t. LV, 1912, t. LVI 1918
  • Iohannis Antiocheni, Fragmenta ex Historia chronica, Ă©d. Umberto Roberto, W. de Gruyter, 2005
  • Jordanes (trad. Charles C. Mierow intr. et comm. de J. Vanderspoel), The Origin and Deeds of the Goths, universitĂ© de Calgary, 1915 (rĂ©impr. 2006)
  • Marcellinus Comes. La Chronique de Marcellin (texte latin et traduction)
  • Paul Diacre. L’Historia Langobardorum, disponible en ligne sur le site de la Bibliotheca Augustana
  • Procope de CĂ©sarĂ©e, Anecdota ou La Vie secrĂšte de Justinien (fr) [lire en ligne]
  • Procope de CĂ©sarĂ©e, De bello gottorum, (la) [lire en ligne]
  • Tables de la Patrologie latine par volume et par ordre alphabĂ©tique
  • Table de la Patrologie grecque
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Articles connexes

Lien externe

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