AccueilđŸ‡«đŸ‡·Chercher

Barbaricum

Barbaricum (du grec ΒαρÎČαρÎčÎșόΜ, « Ă©tranger », « barbare ») est un terme gĂ©ographique utilisĂ© par les historiens et les archĂ©ologues pour se rĂ©fĂ©rer Ă  l’immense territoire situĂ©, au temps des Romains, au-delĂ  du limes[N 1] dans le nord, le centre et le sud-est de l’Europe[1], « territoires situĂ©s au-delĂ  du contrĂŽle administratif de Rome, mais nĂ©anmoins considĂ©rĂ©s comme faisant partie de l’empire »[2]. Au cours de l’AntiquitĂ© tardive, divers Ă©crivains comme Ammianus Marcellin[3] et Eutrope [4] l’utilisĂšrent pour dĂ©crire les territoires habitĂ©s par diverses tribus au-delĂ  du Rhin et du Danube, Ă  l’exception de la Perse. La premiĂšre mention que l’on ait conservĂ©e de ce terme remonte au IIIe siĂšcle [5].

Les provinces romaines (en rose) et le territoire "Barbaricum" (en vert).

Dans la littĂ©rature scientifique, on emploie souvent de façon interchangeable les termes Germanie (traduction de Germania Magna) et Barbaricum ; toutefois, ces deux termes diffĂšrent lĂ©gĂšrement tant sur le plan chronologique que gĂ©ographique[6]. À partir de la pĂ©riode des grandes migrations[N 2] et jusqu’à l’AntiquitĂ© tardive, le territoire hors des frontiĂšres du limes dĂ©crit comme « Barbaricum » n’était pas seulement habitĂ© par des tribus germaniques, mĂȘme si celles-ci reprĂ©sentaient la majoritĂ© de la population. Au cours des grandes migrations, Alains et Huns progressĂšrent sur ce territoire suivis, Ă  partir du VIe siĂšcle, des tribus slaves qui peuplĂšrent la rĂ©gion Ă  l’est de l’Elbe (Albis), rĂ©gion que les Germains avaient en bonne partie abandonnĂ©e[7].

Il est important de souligner l’importance des contacts culturels, sociaux et Ă©conomiques qui se sont dĂ©veloppĂ©s entre le Barbaricum germanique et l’Empire romain depuis le dĂ©but de la pĂ©riode impĂ©riale. Aux pĂ©riodes d’invasion barbares sporadiques au-delĂ  du limes et de campagnes pour les repousser, comme les guerres de Valentinien Ier contre les Quades et les Sarmates en 375, succĂ©daient des pĂ©riodes de paix issues de traitĂ©s comme celui conclu par Valens avec Athanaric, leader de la confĂ©dĂ©ration des Goths du Danube, rĂ©gularisant les Ă©changes commerciaux et prĂ©voyant des postes-frontiĂšres par oĂč les marchandises pouvaient transiter[8]. L’archĂ©ologie nous offre de nombreux artefacts romains trouvĂ©s sur le territoire du Barbaricum[9]. Par ailleurs, nombreux furent les « barbares » qui purent faire carriĂšre dans l’armĂ©e romaine que ce soit celle d’Orient ou d’Occident ou occuper des postes importants dans son administration. Ainsi, Mallobaud dans la seconde moitiĂ© du IVe siĂšcle, Ă©tait Ă  la fois un roi franc et un important gĂ©nĂ©ral de l’armĂ©e romaine (comes domesticorum) qui, Ă  ce titre, avait souvent combattu les Alamans au sein de l'armĂ©e romaine[10] Enfin, tant leur commune opposition Ă  Rome que les efforts de christianisation de celle-ci, forcĂšrent diverses tribus barbares, indĂ©pendantes les unes des autres, Ă  se rapprocher et Ă  crĂ©er des alliances comme la « ConfĂ©dĂ©ration des Goths du Danube » au IVe siĂšcle[11].

Notes et références

Notes

  1. FrontiĂšre, naturelle dans le cas prĂ©sent, garni d’un rĂ©seau de fortifications pour dĂ©fendre l’empire
  2. Les Allemands utilisent le terme « Völkerwanderung » (littĂ©ralement : migration des peuples), lĂ  oĂč les francophones utilisent celui d’ « Invasions barbares ».

Références

  1. Thomas Grane 2007, p. 5.
  2. Thomas Burns 2003, p. 35. Notre traduction.
  3. Ammianus 18,2,14 : « in barbarico ».
  4. Eutrope 7,9 : « trans Albim fluvius [
] qui in Barbarico longe ultra Rhenum est ».
  5. Sarnowski (1991) p. 143.
  6. Les recherches polonaises archĂ©ologiques par exemple utilisent le terme « Barbaricum » pour dĂ©signer un territoire allant beaucoup plus Ă  l’est que celui habitĂ© par les Germains. Voir : Rosemarie MĂŒller. Reaktionen auf die Gleichung germanisch-deutsch im östlichen Mitteleuropa (dans) Heinrich Beck (Ă©d.): Zur Geschichte der Gleichung "germanisch-deutsch". Berlin, 2004, pp. 265 et suivantes, ici p. 269. Voir aussi Ulla Lund Hansen. Römische Kaiserzeit (dans) Reallexikon der Germanischen Altertumskunde. Vol. 25 (2003), pp. 90 et suivantes, ici p. 90.
  7. Pour cette période, voir le survol historique de Guy Halsall en bibliographie.
  8. Herwig Wolfram 2005, p. 64.
  9. Voir Hans JĂŒrgen Eggers. « Der römische Import im freien Germanien”. Atlas Urgesch. 1, Hamburg, 1951; Siegmar von Schnurbein. “Vom Einfluß Roms auf die Germanen”. AcadĂ©mie des Sciences de RhĂ©nanie du Nord-Westphalie. ConfĂ©rences G 331. Opladen 1995; Siegmar von Schnurbein, M. Erdrich. « Das Projekt: Römische Funde im MitteleuropĂ€ischen Barbaricum, dargestellt am Beispiel Niedersachsen”. Rapport No. 73 de la Commission romano-germanique, 1992, pp. 5-27.
  10. Herwig Wolfram 2005, p. 66.
  11. Herwig Wolfram 2005, p. 69-79.

Bibliographie

Sources primaires

  • (en) Ammianus Marcellinus. Rerum gestarum libri XXXI. Ed. Wolfgang Syfarth, vol. 1 et 2. Leipzig, 1978. English translation: J.C. Rolfe. 3 vols. Loeb Classical Library, 1935-1940.
  • Augustin, Saint. La CitĂ© de Dieu. Tr. Raoul de Presles, Olivier Bertrand (Ă©d), Paris, Champion, 2013 : I, 1, livre I-III; 2015 : I, 2, livre IV-V.
  • Jules CĂ©sar (trad. DĂ©sirĂ© Nisard), La Guerre des Gaules, Didot, Paris, 1865 (lire en ligne) https://fr.wikisource.org/wiki/La_Guerre_des_Gaules.
  • (en) Cassius Dio. Historia Romana. Ed. by U.P. Boisevain, 2nd ed. Berlin, 1969. Trans. E.Cary, 9 vols. Loeb Classical Library 1961=1969.
  • (en) Eutropius. Breviarium ab urbe condita. Ed. by Hermann Droysen. MGH Auctores antiquissimi 2:8 ff. 1879. Trans. H.W. Bird. The breviarium ab urbe condita of Eutropius, Liverpool, 1993.
  • (en) GrĂ©goire de Tours. Historia Francorum. Ed. Bruno Krusch and Wilhelm Levison, MGH Scrpitores rerum Merovingicarum I.1. 2nd ed. 1951. Trans. by Lewis Thorpe, The History of the Frnaks, London, 1974.
  • (en) Tacitus. Annalium libri XVI. Ed. by Henry Furneaux, Oxford, 1965. --- Germania. Ed. By Michael Winterbottom. Oxford, 1975.
  • (en) Zozime. Histoire nouvelle. Paris, Les Belles Lettres, 1971-1979.

Sources secondaires

  • (en) Thomas Burns, Rome and the Barbarians, 100 B.C.-A.D. 400, Baltimore, Johns Hopkins University Press, coll. « Ancient society and history », , 461 p. (ISBN 978-0-8018-7306-5, lire en ligne).
  • Werner Eck, La romanisation de la Germanie, Paris, Éd. Errance, , 102 p. (ISBN 978-2-87772-366-4)
  • (en)Eugippius. La vie de saint SĂ©verin. Trad. anglaise. URL : http://www.ccel.org/ccel/pearse/morefathers/files/severinus_02_text.htm#C1
  • (de) Fehr, Hubert & Philipp von Rummel. Die Völkerwanderung. Theiss Wissen Kompact, Stuttgart, 2011.
  • Thomas Grane, Beyond the Roman frontier : Roman influences on the Northern Barbaricum, Rome, Quasar, coll. « Analecta romana instituti danici. Supplementum » (no 39), , 167 p. (ISBN 978-88-7140-346-5).
  • (en) Guy Halsall, Barbarian migrations and the Roman West, 376-568, Cambridge, Cambridge University Press, , 591 p. (ISBN 978-0-511-80239-3).
  • (de) Sarnowski, Tadeusz. “Barbaricum und ein bellum Bosporanum in einer Inschrift aus Preslav”, (dans) Zeitschrift fĂŒr Papyrologie und Epigraphik 87, 1991, pp. 137-144.
  • (en) Malcolm Todd, The early Germans, Malden, MA, Blackwell Pub, coll. « The peoples of Europe », , 2e Ă©d., 266 p. (ISBN 978-1-4051-1714-2).
  • (en) Herwig Wolfram (trad. de l'allemand par Thomas Dunlap), The Roman Empire and its Germanic peoples [« Das Reich und die Germanen »], Berkeley, Calif. London, University of California Press, , 361 p. (ISBN 978-0-520-24490-0, lire en ligne).

Liens internes

Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplĂ©mentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimĂ©dias.