Moravie
La Moravie (/mɔʁavi/[1] ; en tchèque : Morava, /ˈmɔrava/[2] ; en allemand : Mähren /ˈmɛːʁən/[3] ) est une région historique d’Europe centrale, ayant jadis englobé l'actuelle Tchéquie et un large territoire autour, mais formant aujourd’hui le tiers oriental de la Tchéquie. Ses villes principales sont Brno et Olomouc. Depuis le premier tiers du XIe siècle, le margraviat de Moravie (ou « duché de Méranie », francisation de la prononciation allemande, en usage jusqu’au XXe siècle) forme, avec la Bohême, la région historique de Bohême-Moravie.
Histoire
Pendant l'Antiquité, la Moravie est peuplée par les Celtes et notamment les Volques, puis elle sera occupée par différents peuples germaniques : Quades, Ruges et Hérules.
Durant l'Antiquité, la région est traversée du nord au sud par une route de l'ambre : celle qui relie la mer Baltique à la péninsule italienne (Aquilée, Venise, Rome), par Wrocław (Vratislavie, Breslau), Olomouc (Olomuntium, Olmütz), Brno (Eburodunum, Bruna, Brünn, Brin), Bratislava (Prešporok, Prešpurk, Pressburg), Sopron (Scarbantia, Suprún, Ödenbourg) et Ljubljana (Alluviana, Laibach).
Des années 250-260 sont datées des sépultures héritées des Lombards sur une partie des territoires actuels de la Tchéquie orientale (région de Zlín), de la Slovaquie et de la Hongrie. Au VIe siècle, des Slaves nommés « Moraves » s’y installent : d’après les indices archéologiques, les premiers établissements slaves apparaissent en Moravie du Sud après 556 après J.C.[4]. Partis du royaume de Samo au VIIe siècle, ils subissent l’influence des Avars à l’Est et des Francs à l’Ouest. Ce sont les ancêtres des futurs Tchèques et Slovaques, mais à l’époque la distinction n’a pas encore lieu d’être. En 822, les annales franques signalent la présence d’ambassadeurs moraves auprès de la diète de Francfort.
Le knèze Mojmír Ier s’empare, en 833, de la principauté voisine de Nitra. Cette date est retenue pour la fondation de la Grande-Moravie, qui correspond aux territoires actuels de la Moravie, de la Slovaquie, du nord de l’Autriche et de la Hongrie, de l’ouest de l’Ukraine et, plus tard, de la Bohême (889-894) et du sud-est de la Silésie. À partir de 863, les Moraves passent de la mythologie slave au christianisme sous l’influence des deux missionnaires Cyrille et Méthode. Le terme de « Grande-Moravie » est connu grâce aux écrits de Constantin VII Porphyrogénète. On ignore cependant si les Moraves eux-mêmes appelaient alors ainsi leur principauté.
Par la suite, la Moravie a fait partie, successivement :
- du duché, puis du royaume de Bohême et, avec celui-ci, du Saint-Empire romain germanique ;
- de la monarchie des Habsbourg et, parmi les composantes de celle-ci, du Saint-Empire romain germanique ;
- de l’empire d'Autriche et, parmi les composantes de celui-ci, de la Confédération germanique ;
- de l’Autriche-Hongrie et, parmi les deux puis trois composantes de celle-ci, de la partie autrichienne ou « Cisleithanie » ;
- de la Tchécoslovaquie et, parmi les territoires composant celle-ci, du territoire de langue et de culture tchèque ;
- de l’Allemagne nazie en tant que partie orientale du protectorat de Bohême-Moravie (partie centrale de la Moravie) et du territoire des Sudètes (directement annexé par le Reich : partie périphérique de la Moravie) ;
- de la Tchéquie dont elle est la partie orientale.
Chronologie
- 846 : la Grande-Moravie passe aux mains de Louis le Germanique, à la suite du décès de Mojmír Ier.
- 862 : Rastislav, fils de Mojmír Ier reprend le contrôle du pays.
- 870 : Svatopluk, neveu de Rastislav, fait alliance avec Carloman de Bavière pour se débarrasser de son oncle, et Carloman reçoit en échange la Moravie occidentale, soit l'actuelle Bohême (Svatopluk règne sur la partie est de la Grande-Moravie, actuelles Moravie et Slovaquie). Plus tard, Svatopluk, se retourne contre son allié d'hier, et reprend la Moravie occidentale (Bohême et Silésie). Son règne marque l'extension maximale du royaume.
- 894 : mort de Svatopluk et lutte successorale entre ses fils : les Slaves de Bohême font alliance avec Arnulf de Carinthie pour reprendre leur indépendance.
- 901 : face au péril hongrois, les Moraves à nouveau réunis tentent une alliance avec les Francs mais sans succès.
- 902 : défaite des troupes moraves de Mojmir II face aux troupes franques et leurs alliés hongrois.
- , à Bratislava, les Hongrois mettent en déroute les Bavarois et les Carentanes. La présence des Moraves à cette bataille n'est pas mentionnée dans les chroniques franques de l'époque mais il est probable que la Moravie a été vaincue en même temps que les Bavarois et les Carentanes, car la Grande-Moravie s'effondre et les Hongrois prennent la Slovaquie, alors partie centrale du royaume, qui devient pour eux la « Haute-Hongrie »[5]. L'ethnogenèse des Moraves occidentaux en Bohême et Moravie a donné naissance au peuple tchèque tandis que celle des Moraves orientaux, dans le territoire devenu durant neuf siècles la « Haute-Hongrie », a donné naissance au peuple slovaque.
Union avec la Bohême
Après 907 les Moraves sont divisés en plusieurs principautés vassales de leurs voisins plus puissants, les Hongrois et les Francs. À l'ouest, les Přemyslides de Bohême émergent progressivement, au cours du Xe siècle, comme suzerains sur ces terres slaves, et prennent définitivement — en 1019 ou 1029 (la date est incertaine) — le contrôle de la Moravie. Trois duchés sont constitués pour les fils cadets des ducs de Bohême à Brno, Olomouc et Znojmo. Lors de la séparation des Églises d'Orient et d'Occident, les Moraves choisissent l’obédience de l’Église catholique. La Moravie devient un margraviat en 1182, et partagera désormais l’histoire de la Bohême à laquelle elle est couplée, sous le Saint-Empire romain germanique puis à l’époque de l’empire d’Autriche, et enfin, après la Première Guerre mondiale, au sein de la république de Tchécoslovaquie.
Liste des princes, ducs et margraves de Moravie
Héraldique
Les margraves de Moravie portaient : d’azur, à l’aigle échiquetée d’argent et de gueules, becquée, languée, membrée et couronnée d’or.
Géographie
La Moravie est aujourd’hui entourée par la Bohême à l’ouest, l’Autriche au sud, la Slovaquie à l’est, la Silésie et la Pologne au nord.
La Porte de Moravie est la ligne de partage des eaux séparant le bassin hydrographique de l’Oder de celui de la Morava.
Linguistique et régionalisme
Le tchèque parlé en Moravie présente plusieurs variétés dialectales. Une caractéristique commune des dialectes moraves est l’utilisation plus fréquente de la première personne des verbes en -u : jsu en Moravie et jsem en Bohême, chcu en Moravie et chci en Bohême.
Politique
Un parti politique, le Parti démocratique morave, défend son autonomie au sein de la Tchéquie.
Régions ethniques
- Hanatsie (pays des Hanáci) ;
- Laquie (pays des Laši) ;
- Slovaquie morave (zones frontalières où le slovaque est aussi parlé) ;
- Valaquie morave (zone frontalière avec la Slovaquie, où un dialecte roman était jadis parlé).
Découpage administratif actuel
Personnalités nées en Moravie
Né au XVIe siècle
- Jan Amos Komenský (Comenius), pédagogue, humaniste et philosophe.
Nés au XIXe siècle
- Richard Belcredi, ministre-président d’Autriche (1865-1867).
- Tomáš Baťa, entrepreneur, fondateur de la société des Chaussures Bata.
- Otakar Borůvka, mathématicien et algorithmicien
- Sigmund Freud, père de la psychanalyse.
- Leoš Janáček, compositeur.
- Tomáš Garrigue Masaryk, premier président de la Tchécoslovaquie.
- Edmund Husserl, fondateur de la phénoménologie transcendantale.
- Eliška Junková, pilote automobile.
- Gregor Mendel, père de la génétique.
- Alfons Mucha, peintre.
- František Palacký, historien et homme politique, « Père de la nation ».
- Joseph Aloïs Schumpeter, économiste.
- Ernst Mach, physicien, psychologue et philosophe.
- Erich Wolfgang Korngold, compositeur, créateur du style symphonique « hollywoodien ».
- Gustav Mahler, compositeur, chef d'orchestre et pianiste.
Nés au XXe siècle
- Alfred Brendel, pianiste, poète et essayiste.
- Rudolf Firkušný, pianiste.
- Kurt Gödel, mathématicien.
- Vojtěch Jasný, cinéaste.
- Karel Reisz, cinéaste.
- Josef Koudelka, photographe.
- Milan Kundera, écrivain.
- George Mráz (né Jiří Mráz), musicien
- Ivan Theimer, sculpteur.
- Miroslav Tichý, photographe.
- Oskar Schindler, industriel et homme d’affaires du parti nazi ayant sauvé plus de 1 000 juifs de l’extermination allemande.
- Emil Zátopek, coureur de fond.
Notes et références
- Prononciation en français de France retranscrite selon la norme API.
- Prononciation en tchèque retranscrite selon la norme API.
- Prononciation en allemand standard (haut allemand) retranscrite selon la norme API.
- (en) Jiří Macháček et al., Runes from Lány (Czech Republic) - The oldest inscription among Slavs. A new standard for multidisciplinary analysis of runic bones, Journal of Archaeological Science, Volume 127, mars 2021, doi.org/10.1016/j.jas.2021.105333
- Voir Relations entre la Hongrie et la Slovaquie et Slovaquisation.
- Modèle:Citace elektronické monografie
- Zbyšek Svoboda, Pavel Fojtík, Petr Exner et Jaroslav Martykán « Odborné vexilologické stanovisko k moravské vlajce » () (lire en ligne)
— « (ibid.) », dans Vexilologie. Zpravodaj České vexilologické společnosti, o.s. č. 169, Brno, p. 3319, 3320 - František Pícha « Znaky a prapory v kronice Ottokara Štýrského » () (lire en ligne)
— « (ibid.) », dans Vexilologie. Zpravodaj České vexilologické společnosti, o.s. č. 169, Brno, p. 3320-3324
Articles connexes
Liens externes
- Ressource relative à la bande dessinée :
- (en) Comic Vine
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :