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Avars

Les Avars, ou Avares étaient une alliance de plusieurs groupes de nomades eurasiens, parfois qualifiés de « turco-mongols »[1], et issus de la confédération des Ruanruan qui menaçait la Chine au IIIe siÚcle. Ils se sont ensuite installés en Europe centrale sous l'impulsion de leur khagan, Bayan Ier et ont dominé une partie de l'Europe orientale entre les années 560 et 800.

Khaganat avar

vers 560 – 805

Description de cette image, également commentée ci-aprÚs
Les Balkans vers 680.
Informations générales
Statut Khaganat
Capitale Ring des Avars
Religion Tengrisme
Histoire et événements
555 PremiĂšre mention des Avars en Europe
Années 570 Les Avars contrÎlent le bassin des Carpates et les rives nord de la mer Noire
626 L'Empire byzantin est assiégé conjointement avec les Sassanides
632 Abandon des rives de la mer d'Azov aux Bulgares
791 DĂ©but des guerres des Francs contre les Avars
805 La partie occidentale constitue une marche de l'Empire carolingien
Khagans
(1er) 565-602 Bayan
(Der) 805 Abraham

Entités précédentes :

Entités suivantes :

Ethnonyme

Comme pour toutes les confédérations multiethniques qui sont passées par la steppe pontique en pratiquant un large métissage basé sur le rapt et l'esclavage, les exonymes, peu documentés, renvoient à de multiples réinterprétations en différentes langues. Ainsi en turc ancien, les Avars sont les « vagabonds », avaral-i[2].

Ils sont appelés Obres dans la Chronique des temps passés du moine Nestor rédigée à Kiev vers 1115[3].

Les Avars rĂ©fugiĂ©s dans le Caucase ont constituĂ© un État appelĂ© aux XVIIe et XVIIIe siĂšcles par les Ottomans Avaristan[2]. Leur endonyme Ă©tait et demeure Khounzaq' [4], transcrit en anglais Khunzak et en allemand Khundzia. Ils le tirent du nom de leur capitale, Khounzakh, Ă  moins que ce ne soit l'inverse.

Histoire

Origine

L'Asie centrale vers 500, montrant les territoires d'origine possible des Avars d'Europe.
Steppe pontique vers 650.

Ils sont probablement originaires de Mongolie, connus par les Chinois sous le nom de Ruanruan (Jouan). Au Ve siĂšcle, leur khan Chö-louen fonde un empire nomade de la CorĂ©e Ă  l’Irtych[5]. Les textes byzantins conviennent que leur mouvement vers l'Europe a Ă©tĂ© dĂ©clenchĂ© par la montĂ©e du premier khaganat turc dans les annĂ©es 550, centrĂ© dans ce qui est aujourd'hui la Mongolie, lorsque les Turcs ont dĂ©truit un empire appelĂ© ruanruan par leurs voisins chinois. Cependant, les textes ne s'accordent pas sur qui Ă©taient les Avars, ni d'oĂč ils venaient exactement[6]. Les Ă©lĂ©ments transmis par la tradition historique sont les suivants:

En 546, leurs vassaux Tölech se rĂ©voltent. Bumin, chef des Tujue (GöktĂŒrks), rĂ©prime la rĂ©bellion et rĂ©clame en rĂ©compense la main d’une princesse ruanruan, ce qui lui est refusĂ©. VexĂ©, il se dĂ©cide Ă  la rĂ©volte, et envoie une ambassade en Chine auprĂšs des Wei. Il s'allie avec eux, et en 551 Ă©pouse une princesse tabghach. En 552, le dernier khan ruanruan, encerclĂ©, se donne la mort. L'Empire avar s'effondre, il est remplacĂ© en Mongolie par celui des GöktĂŒrks ; les survivants se rĂ©fugient Ă  la frontiĂšre de la Chine, oĂč les Qi du Nord, successeurs des Wei, les Ă©tablissent comme fĂ©dĂ©rĂ©s[5].

L’historien byzantin ThĂ©ophylacte Simocatta relate la migration des Avars de la Haute-Asie vers la Russie mĂ©ridionale. Il distingue les vrais Avars des Pseudo-Avars (Pseudavaroi). Les premiers seraient les Ruanruan proprement-dits, les autres : des peuples rencontrĂ©s en chemin, et que les historiens modernes supposent ĂȘtre scythiques (iraniens), hunniques et/ou turcs. Selon Simocatta, les Avars connus en Europe auraient usurpĂ© ce nom prestigieux. Ils seraient selon lui formĂ©s de deux hordes unies, celle des Ouar (ou War), qui a donnĂ© Avar, et celle des Kounni ou Khouni, qui semble d'origine hunnique, les ÎŸÏ…Î±ÏÏ‡ÎżÎœÎźÏ„Î±Îč (Ouarkhonites) des Byzantins. Certains orientalistes, d'aprĂšs les sources byzantines qui qualifient les Ouarkhonitai d'Ogor, pensent qu'ils pourraient ĂȘtre d'origine ouĂŻghoure, donc turque. Albert Herrmann, qui insistait sur leur origine mongole, suggĂšre que si les Avars qui Ă©migrent en Europe dans la seconde moitiĂ© du VIe siĂšcle ne sont plus des Ruanruan, ils pourraient ĂȘtre des Huns hephtalites, vaincus vers 565 et chassĂ©s de Transoxiane et de Bactriane par les Sassanides et les GöktĂŒrks[5].

Arrivée en Europe

Ceux qui se dirigent vers l'Europe sont connus sous le nom d'Avars (grec : ΑÎČÎŹÏÎżÎč : Abaroi, latin : Avari, Avares) et migrent vers l'ouest, tout en poussant devant eux d'autres peuplades turco-mongoles : « les Hunnougour et Sabir et d’autres hordes hunniques » selon ThĂ©ophylacte Simocatta[5] ; ce nom d’Hunnougour, transcrit par Onogoures, est, par confusion ultĂ©rieure avec les Magyars, Ă  l'origine du nom latin d’Unguri, les Hongrois. Les Avars sont mentionnĂ©s pour la premiĂšre fois au nord du Caucase en 555 par des sources syriennes (le pseudo Zacharie le rhĂ©teur)[7]. InstallĂ©s sur la Volga, ils envoient une ambassade menĂ©e par Kandikh au gĂ©nĂ©ral byzantin Justin en Lazique en 557, par l'intermĂ©diaire du roi des Alains du Caucase, Saros. L'empereur Justinien invite cette ambassade Ă  Constantinople, oĂč elle arrive en janvier 558[8]. Avec l'autorisation du SĂ©nat, selon MĂ©nandre le Protecteur, l'empereur charge les Avars de soumettre les nomades de la steppe pontique (aujourd'hui ukrainienne) tels que les Koutrigoures, Outigours, Antes, Sabires, Zales et autres, contre un paiement, et des terres sur le bas-Danube[9].

Vers 560 les Avars vassalisent les Outigours et les Koutrigours[10], qui nomadisaient au nord-ouest de la mer d'Azov et Ă  l’embouchure du Don. Ils atteignent le bas-Danube en 562[11], et envoient une nouvelle ambassade Ă  Justinien pour demander des terres au sud du fleuve (MĂ©sie) ; l'empereur leur propose d'occuper le territoire des HĂ©rules, en Pannonie seconde, mais ils ne se montrent pas intĂ©ressĂ©s[12] et lancent alors des campagnes au nord-ouest, contre les tribus slaves (Antes, SlovĂšnes et Wendes), Ă  l’ouest (oĂč ils entrent en Germanie, mais sont mis en dĂ©route en Thuringe par le roi franc d’Austrasie Sigebert en 562) et vers la mer Noire (oĂč ils ravagent la Scythie mineure, ce qui les fait entrer en conflit avec l'Empire byzantin, dont c'est une province)[5]. Une autre expĂ©dition de pillage, jusqu'aux rives de l'Elbe en 566–567, voit la dĂ©faite de Sigebert qui est fait prisonnier, puis libĂ©rĂ© contre rançon[13].

AprĂšs la mort de Justinien, une ambassade avare est Ă  nouveau reçue par l'empereur byzantin Justin II en 565. L'envoyĂ© des Avars, TargitĂšs, rĂ©clame Sirmium et le paiement auparavant versĂ© aux Outigours et Koutrigours, dĂ©sormais vassaux des Avars. Justin refuse[12]. Durant l'hiver 566–567, les Turcs occidentaux traversent la Volga gelĂ©e, dans l'intention d'Ă©craser les Avars[13]. Le KhĂągan (« khĂąn des khĂąns ») avar Bayan, menacĂ© Ă  l'est, conclut une alliance Ă  l'ouest avec les Lombards de Pannonie contre les GĂ©pides, qu'ils chassent de Dacie en 567. Les Avars contrĂŽlent alors la steppe de la Volga au Danube et les populations locales, comme les Slaves, les Valaques et les Bulgares. Ils exploitent la population rurale sĂ©dentaire. Les Slaves participent parfois Ă  leurs expĂ©ditions, notamment sur Constantinople[14].

AprĂšs le dĂ©part des Lombards vers l'Italie, au printemps 568, Bayan occupe la partie ouest du bassin des Carpates et toute la rĂ©gion du moyen-Danube[15]. Les Avars avancent jusqu’en BaviĂšre et multiplient les raids de pillage dans le monde germanique, souvent en tant que mercenaires des souverains d’Europe occidentale et mĂ©ridionale.

En 569, ils réclament à nouveau à l'Empire byzantin la possession de Sirmium, en Pannonie, et un tribut. Devant le refus des Byzantins, ils envoient leurs alliés koutrigours ravager la Dalmatie, par la Save[12], et obtiennent en 571 un traité qui leur laisse les terres des Gépides, sauf Sirmium[16].

Le premier Empire avar (580-670)

Carte montrant la localisation du Khaganat avar en Europe, vers 600.

Durant l'Ă©tĂ© 582, Bayan s'empare de Sirmium. L'empereur byzantin TibĂšre II lui paie un Ă©norme tribut pour sauvegarder le reste des Balkans, et obtient une paix de deux ans. Bayan, accompagnĂ© de Slaves, repasse le Danube en 585, mais est battu durant l'Ă©tĂ© aprĂšs s'ĂȘtre avancĂ© jusqu'au Long mur de Thrace. Il assiĂšge Thessalonique ( ou 587)[11], mais est vaincu en 587 par les Byzantins prĂšs d’Andrinople. Il revient en 592, prend Anchialos (aujourd'hui Pomorje (en) en Bulgarie) et ravage la Thrace, mais se heurte au gĂ©nĂ©ral byzantin Priscus, qui franchit le Danube, l’attaque en Pannonie et le bat complĂštement sur les bords de la Tissia, tuant quatre de ses fils en 601. Bayan meurt peu aprĂšs, en 602[5].

À partir de 610, son successeur se tourne vers l'ouest et attaque l'Italie. Cividale, capitale du duchĂ© lombard du Frioul, est prise. Le duc Gisulf II meurt au combat, et sa femme Romilda passe Ă  l'ennemi. Les Avars mettent le Frioul Ă  feu et Ă  sang et combattent le roi lombard Agilolf. En 619, lors d'une entrevue Ă  HĂ©raclĂ©e de Thrace, le Khagan tente de s'emparer de la personne de l’empereur HĂ©raclius, puis attaque vainement Constantinople. Il s'allie aux Perses sassanides, en guerre contre les Byzantins, pour assiĂ©ger conjointement Constantinople en juin–juillet 626 avec « 80 000 cavaliers et fantassins » (chiffre certainement exagĂ©rĂ© par les chroniqueurs de l'Ă©poque), comportant, en plus des Avars, des contingents slaves, asiatiques et germaniques ; mais la flotte byzantine parvient Ă  empĂȘcher les Avars et les Perses de coordonner leur action, et les Avars sont repoussĂ©s avec de trĂšs lourdes pertes ()[5]. Cette dĂ©faite est le signal de la rĂ©volte pour les tribus slaves, et des populations valaques soumises par les Avars. À la mort du Khagan vaincu (630), les Proto-Bulgares, jusqu'alors fidĂšles alliĂ©s des Avars, demandent que la dignitĂ© de Khagan soit attribuĂ©e Ă  leur khan Koubrat[5]. Les Avars rĂ©priment cette rĂ©volte, mais doivent abandonner aux Proto-Bulgares la rĂ©gion au nord de la mer Noire, dite Grande Bulgarie (632). À l'ouest, le Franc Samo prend la tĂȘte de la rĂ©volte slave et s’affirme comme chef des territoires libĂ©rĂ©s, la Moravie, la BohĂȘme, la Basse-Autriche et la Serbie blanche (631). Dans le bassin du bas-Danube et les Balkans, les envahisseurs slaves forment des « sklavinies », petites principautĂ©s indĂ©pendantes les unes des autres, qui s'intercalent entre les « valachies » et Ă©chappent plus ou moins complĂštement au pouvoir de l’empereur byzantin. Les Slaves occupent ainsi la rĂ©gion entre Danube et Save, qui Ă©chappe aux Avars. AprĂšs la mort de Samo en 658, son domaine se dĂ©sagrĂšge. Les Avars rĂ©tablissent leur domination sur la frontiĂšre du Danube, mais ils sont dĂ©jĂ  entrĂ©s en dĂ©cadence.

L'Empire avar tardif (680-804)

Zone de peuplement avar vers 600-800
Disque de joaillerie d'un guerrier avar (VIIIe siÚcle apr. J.-C.) de Drasendorf (district de Mistelbach). Asparn an der Zaya (Basse-Autriche). Musée de la Préhistoire et de la Protohistoire

L'Empire avar se replie sur les territoires de l’actuelle Hongrie, l'ancienne Pannonie, en y accueillant les fragments d’autres peuples venus des steppes (turco-bulgares ou finno-ougriens ?). Une pĂ©riode plus paisible commence, qui dĂ©veloppe un artisanat raffinĂ© (objets ciselĂ©s ornĂ©s « de griffes et de rinceaux »).

À partir de l'an 791, les Francs de Charlemagne et de son fils PĂ©pin d'Italie, dĂ©cidĂ©s Ă  en finir avec ces paĂŻens, les combattent violemment et sans relĂąche avec leurs troupes franques, bavaroises et lombardes. Leur camp retranchĂ©, le Ring des Avars, est pris en 796, avec un trĂ©sor considĂ©rable, fruit de plusieurs siĂšcles de pillages. AprĂšs les derniĂšres rĂ©voltes contre les Francs en 799/805, Charlemagne ne conserve que la partie occidentale de leur empire, situĂ©e entre le Danube et l'Inn, et en fait sous le nom d'Avarie (en) une marche de l'empire des Francs. Le reste est occupĂ© par les Slaves et des Bulgares.

Les Avars sont exterminĂ©s ; ceux qui se soumettent sont convertis au christianisme de grĂ© ou, bien souvent, de force, les derniers rebelles seront vaincus en 805. Une loi franque ordonne de ne vendre aucune arme aux Avars, et leur existence en tant que peuple distinct s'arrĂȘte lĂ . Une toute derniĂšre expĂ©dition, en 811, dĂ©truit les derniers rĂ©sistants. Certains, peu nombreux, se rĂ©fugient dans les montagnes de Transylvanie, au milieu des Valaques et des Slavons ; les Sicules transylvains sont parfois considĂ©rĂ©s comme leurs descendants, mais ils ont adoptĂ© la langue hongroise, avec quelques particularismes et archaĂŻsmes. Ceux restĂ©s en Pannonie sont harcelĂ©s et totalement dispersĂ©s par les Proto-Bulgares, autrefois persĂ©cutĂ©s par ces mĂȘmes Avars. On n'entendra plus parler d'eux Ă  partir des annĂ©es 822.

Selon Constantin VII PorphyrogĂ©nĂšte, on trouvait encore au Xe siĂšcle en Croatie un certain nombre de leurs descendants, que l’on appelait encore Avars[17].

Tactiques militaires et technologie

Arc réflexe du cimetiÚre avar de Gyenesdiås, Comté de Zala, Hongrie, VIIe siÚcle

Les Avars, peuple des steppes, utilisaient des tactiques analogues Ă  celles des Mongols et des Sarmates. La charge de cavalerie et le « hit and run » — consistant Ă  tirer des flĂšches Ă  cheval tout en refusant le corps Ă  corps — Ă©taient souvent employĂ©es. On sait de sources sĂ»res qu’ils se servaient de la cavalerie lourde pour le combat. Le cheval et l’homme sont couverts de la cuirasse de fer d’origine probablement scythique (retrouvĂ©es dans une tombe avare). Ces peuplades remportaient des victoires contre des peuples employant majoritairement l’infanterie : les peuples Francs, GĂ©pides, Slaves et Lombards. L’Empire byzantin, lui, s’était dotĂ© d’une cavalerie dĂšs le Ve siĂšcle, et pouvait donc rivaliser avec eux, tout comme les Kökturks, dominant les steppes orientales.

Leur technologie est plus Ă©voluĂ©e que celle des Huns. Outre l’arc Ă  double courbure, qui a remportĂ© des succĂšs au Ve siĂšcle, les Avars amenĂšrent l’étrier en Europe. Cette innovation permettait au cavalier de se dresser sur sa monture, et de tirer Ă  l’arc avec prĂ©cision en se retournant aussi vite.

Nous connaissons l’ordre de bataille suivant : les Avars employaient leurs esclaves (GĂ©pides puis Slavons) comme fantassins, envoyĂ©s les premiers au combat. Si ceux-ci l’emportaient, les Avars pillaient le camp ennemi ; dans le cas contraire, les cavaliers Ă©taient engagĂ©s. Lors d’une dĂ©faite face aux Byzantins, sur 21 000 prisonniers, les Byzantins ont recensĂ© plus de 18 000 individus des diffĂ©rents peuples soumis, et Ă  peine 3 000 Avars.

Structure politique

Les Avars au départ étaient dirigés par un chef de guerre appelé Khagan. Le terme khagan signifie Grand Khan ou Khan des Khans, impliquant que les Avars se considéraient comme un Empire à part entiÚre.

Le Khagan accédait au pouvoir par élection au Qurultay : un conseil de « nobles » qui élisait le khagan parmi les différents membres de la famille du Khagan. Ce mode de désignation se retrouve chez les autres peuplades turco-mongoles).

La RoyautĂ© semble s’ĂȘtre divisĂ©e en deux, avec toujours le Khagan au sens politique, et plus tardivement le iuggur ; un chef militaire et religieux. Une chronique indique que Charlemagne reçut la reddition du Khagan et iuggur. On sait que les Avars s’appuyaient sur de petits Khan locaux (comme les tudun (en), les tarkhans, etc.). Les Avars Ă©taient donc rigoureusement organisĂ©s.

Le Khagan pouvait désigner un chef parmi les différents clans, appelé Walluc. On connaßt ce terme par les chroniques de Sigebert. Un chef bulgare chassé par les Avars du nom de Alzeco devint chef des Wendes sous ce titre.

Dans la culture

Les Avars ont Ă©tĂ© Ă©clipsĂ©s dans notre culture car ils ont exercĂ© une trĂšs faible influence en France. Dans les cultures slaves anciennement soumises, tout comme les Huns pour les Germains, ils sont la dĂ©finition de la terreur. L’auteur de la Chronique de Nestor de 1113 les condamne notamment (avec excĂšs) trois siĂšcles aprĂšs leur disparition.

Ils sont souvent mis en retrait, car ils Ă©taient surtout affiliĂ©s aux Huns, qui sont disparus un siĂšcle plus tĂŽt. Les chroniques relatent le combat de Sigebert face au roi des « Huns ». L’apparition des Magyars, plus entreprenants et plus vivaces, est une autre raison de l’oubli des Avars en Occident. L'aura de terreur de leurs prĂ©dĂ©cesseurs et celle de leurs successeurs sont restĂ©es supĂ©rieures Ă  la leur. De maniĂšre gĂ©nĂ©rale, la plupart des peuples qui se trouvaient sur le Danube semblent partager un sentiment de brutalitĂ© commune durant l'AntiquitĂ© et le haut Moyen Âge (Thraces, Proto-Bulgares, Huns, Avares, Goths, Slaves).

Galerie

Génétique

Vase en forme de tĂȘte de taureau. TrĂ©sor de NagyszentmiklĂłs

Comme le rapportaient les auteurs anciens, une partie de la sociĂ©tĂ© avar Ă©tait probablement d'origine asiatique, mais la raretĂ© des donnĂ©es historiques et archĂ©ologiques entrave la localisation de leur pays d'origine. Une Ă©tude gĂ©nĂ©tique moderne (2019) a portĂ© sur la variabilitĂ© du STR du mitogĂ©nome et du STR chromosomique Y de 26 individus, certains d'entre eux reprĂ©sentant un groupe d'Ă©lite bien caractĂ©risĂ© enseveli au centre du bassin des Carpates plus d'un siĂšcle aprĂšs la conquĂȘte avar. L'Ă©tude montre que le groupe Ă©tudiĂ© a des affinitĂ©s gĂ©nĂ©tiques maternelles et paternelles avec plusieurs populations anciennes et modernes d'Asie centrale et orientale. La majoritĂ© de la variabilitĂ© de l'ADN mitochondrial reprĂ©sente des haplogroupes asiatiques (C, D, F, M, R, Y et Z). La variabilitĂ© Y-STR des mĂąles d'Ă©lite analysĂ©s n'appartient qu'Ă  cinq lignĂ©es, trois N-Tat avec des parallĂšles principalement asiatiques et deux haplotypes Q. L'homogĂ©nĂ©itĂ© des chromosomes Y rĂ©vĂšle que la parentĂ© paternelle est une force de cohĂ©sion dans l’organisation des couches de l'Ă©lite avare, tant au niveau social que territorial. Les rĂ©sultats indiquent que l'Ă©lite des Avars est arrivĂ©e dans le bassin des Carpates en tant que groupe de familles et est restĂ©e essentiellement endogame pendant plusieurs gĂ©nĂ©rations aprĂšs la conquĂȘte[18].

Les analyses des marqueurs phĂ©notypiques montrent que tous les Avars Ă©tudiĂ©s avaient les yeux et les cheveux sombres Ă  l'exception d'un seul individu. La tolĂ©rance au lactose est dĂ©tectĂ©e chez seulement 2 Avars sur 14. Leurs gĂšnes sont proches des populations de SibĂ©rie. Dans l'Ă©tude NeparĂĄczki et al. (2019), les auteurs concluent que la prĂ©valence imprĂ©vue de l'haplogroupe N1a Hg-s sibĂ©rien jette un nouvel Ă©clairage sur leur prĂ©histoire. Accepter leur origine prĂ©sumĂ©e de Ruanruan impliquerait une classe dirigeante d'ascendance sibĂ©rienne en Asie intĂ©rieure avant la prise de pouvoir par les Turcs. La frĂ©quence Ă©tonnamment Ă©levĂ©e de N1a1a1a1a3 Hg rĂ©vĂšle que les ancĂȘtres des SibĂ©riens et des Bouriates de l'Ă©poque contemporaine auraient pu donner une part considĂ©rable Ă  l'Ă©lite des Ruanruan et des Avars[19].

Deux nouvelles études (2022) confirment une migration transeurasienne rapide et de longue distance des élites de la période avare et suggÚrent que le « noyau d'immigrants » des Avars est originaire de la Mongolie actuelle, leur origine remontant aux Xiongnu. Ces individus portent une ascendance nord-asiatique correspondant au profil des populations précédentes des steppes mongoles, en particulier un génome disponible à partir de la période ruanruan[6]. Selon Zoltån Maróti et al., la composante majoritaire de leur génome correspond à la population nganassane de Sibérie[20]. Dans l'étude Gnecchi-Ruscone et al., tous les individus du début de la période avar, sauf deux exceptions, forment un groupe serré avec un haut niveau d'ascendance ANA (« anciens Asiatiques du nord-est »). Ils sont situés entre les populations mongoles actuelles (les Bouriates et les Khamnigans) et les populations de langues toungouses / nivkhe (par exemple, les Néguidales, les Nanaï, les Ulchi et les Nivkhes) ainsi que du seul génome ancien disponible de la Mongolie de la période ruanruane[6]. Certains des derniers individus d'élite étudiés portaient une composante d'ascendance non locale supplémentaire correspondant largement au profil génétique des populations de la steppe, ce qui pourrait indiquer une migration ultérieure ou refléter une plus grande diversité génétique au sein de la population migrante initiale[6].

Notes et références

  1. (en) Alexander Vovin, « A Sketch of the Earliest Mongolic Language: the BrāhmÄ« Bugut and KhĂŒis Tolgoi Inscriptions », International Journal of Eurasian Linguistics, vol. 1, no 1,‎ , p. 162–197 (ISSN 2589-8825, lire en ligne, consultĂ© le )
  2. R. Catarini, Dictionnaire des nationalités et minorités en U.R.S.S., p. 39, Larousse, Paris, 1990 (ISBN 2-03-740067-5).
  3. Chronique de Nestor, p. 8 et dans l'Index p. 273.
  4. R. Catarini, Dictionnaire des nationalités et minorités en U.R.S.S., p. 38, Larousse, Paris, 1990 (ISBN 2-03-740067-5).
  5. René Grousset (1885-1952), « L'empire des steppes, Attila, Gengis-Khan, Tamerlan » [PDF], Payot, Paris, quatriÚme édition : 1965, premiÚre édition : 1938.
  6. (en) Guido Alberto Gnecchi-Ruscone, Anna Szécsényi-Nagy, Istvån Koncz et al., Ancient genomes reveal origin and rapid trans-Eurasian migration of 7th century Avar elites, cell.com, 1er avril 2022, doi.org/10.1016/j.cell.2022.03.007
  7. (en) Glen Warren Bowersock, Peter Robert Lamont Brown, Oleg Grabar, Late antiquity : a guide to the postclassical world, Cambridge (Mass.), Harvard University Press, , 780 p. (ISBN 0-674-51173-5, lire en ligne).
  8. Ernst Stein, Histoire du Bas-Empire : De la disparition de l'Empire d'Occident Ă  la mort de Justinien (476-565), A. M. Hakkert, (lire en ligne).
  9. Robert Folz, De l'antiquité au monde médiéval, Volume 5, Presses universitaires de France, (lire en ligne).
  10. Dimitrina Aslanian, Histoire de la Bulgarie, de l'antiquité à nos jours, Versailles, Trimontium, , 510 p. (ISBN 2-9519946-1-3, lire en ligne).
  11. Vladislav Popovic, La descente des Koutrigours, des Slaves et des Avars vers la mer ÉgĂ©e : le tĂ©moignage de l'archĂ©ologie, Comptes-rendus des sĂ©ances de l'AcadĂ©mie des inscriptions et belles-lettres, Volume 12, pp. 596-648, (lire en ligne).
  12. Eduard von Muralt, Essai de chronographie byzantine : Pour servir Ă  l'examen des annales du bas-empire et particuliĂšrement des chronographes slavons de 395 Ă  1057, St. Petersbourg, Eggers, (lire en ligne).
  13. L'Or des Avars dans le bassin des Carpates VIe – VIIIe siĂšcle : Pavillon des arts, 12 fĂ©vrier-30 mars 1986, Association française d'action artistique, (lire en ligne).
  14. ÄœubomĂ­r LiptĂĄk et Sabine Bollack, Petite histoire de la Slovaquie, Paris, Institut d'Ă©tudes slaves, , 127 p. (ISBN 2-7204-0317-2, lire en ligne).
  15. (en) Denis Sinor, The Cambridge history of early Inner Asia, Volume 1, Cambridge/New York/Melbourne, Cambridge University Press, , 518 p. (ISBN 0-521-24304-1, lire en ligne).
  16. Louis Bréhier, Vie et mort de Byzance, Paris, Albin Michel, , 596 p. (lire en ligne).
  17. Constantin VII PorphyrogénÚte, De Administrando Imperio, Chap. XXX-XXII, 30. Le thÚme de Dalmatie, c. 950.
  18. (en) Veronika CsĂĄky, DĂĄniel Gerber, IstvĂĄn Koncz et al., Genetic insights into the social organisation of the Avar period elite in the 7th century AD Carpathian Basin, Scientific Reports, 10, 948, 22 janvier 2020, doi.org/10.1038/s41598-019-57378-8
  19. (en) Endre Neparaczki et al., Y-chromosome haplogroups from Hun, Avar and conquering Hungarian period nomadic people of the Carpathian Basin, Scientific Reports, volume 9, Article numéro: 16569, novembre 2019
  20. (en) ZoltĂĄn MarĂłti et al., Whole genome analysis sheds light on the genetic origin of Huns, Avars and conquering Hungarians, biorxiv.org, 20 janvier 2022, doi.org/10.1101/2022.01.19.476915

Voir aussi

Bibliographie

Articles connexes

Liens externes


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