Valaques
Valaques est un terme polysémique qui peut désigner en français :
- une appartenance géographique ;
- un ensemble historique, culturel et ethnographique de populations ;
- un ensemble juridique de lois, coutumes et franchises.
Roumanie | 21 000 000 |
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Moldavie | 2 750 000 |
Balkans, Grèce |
estimés à 150 000 |
Population totale | 23 900 000[1] |
Régions d’origine | Dacie, Mésie, romanisation des Daces et Thraces |
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Langues | Roumain (nommé « moldave » en Moldavie), Aroumain, Méglénite et Istrien |
Religions | Christianisme orthodoxe (majoritaire), Christianisme catholique grec |
Ethnies liées | Langues romanes |
Géographiquement, « Valaques » désigne les habitants de la Valachie (région méridionale de la Roumanie) et, dans la péninsule des Balkans, les populations de langue romane soit les Aroumains, les Mégléno-Roumains et les Istro-Roumains (certains linguistes y incluaient jadis les Dalmates). Il est parfois employé en Serbie et en Bulgarie pour désigner aussi les Roumains locaux.
Historiquement, avant le milieu du XIXe siècle, « Valaques » était l'exonyme qui désignait les populations locutrices des langues romanes orientales issues de la romanisation des langues paléo-balkaniques (Daces, Gètes, Thraces, Illyres, Dalmates...) du Ier au VIe siècle dans les Balkans et le bassin du bas-Danube[3]. Il est encore employé dans ce sens par les historiens et notamment dans de nombreux atlas historiques[4]. Les historiens roumains préfèrent employer le terme de « Proto-roumains » (jusqu'au XIe siècle) et de « Roumains » (depuis le XIIe siècle), d'une part parce qu'à l'instar des autres populations romanophones issues de la désagrégation de l'Empire romain, les « Valaques » se désignaient eux-mêmes par des endonymes comme romani, români, rumâni, rumâri, armâni ou arumâni[N 1], d'autre part parce que « Valaques » pouvait aussi être localement employé (notamment dans l'espace ex-yougoslave) pour désigner des montagnards, des bergers ou des fidèles de l'Église orthodoxe non romanophones, ou qui ont cessé de l'être depuis des générations.
D'autres historiens et linguistes préfèrent les termes, plus neutres et plus précis, de « Thraco-Romains » (du Ier au VIe siècle), de « Romans orientaux » (VIe au XIIIe siècle) et de « Roumains » ou « Aroumains » et autres (à partir du XIIIe siècle)[5] - [6] - [7] - [8] - [9] - [10]. Mais, en règle générale, l'existence passée de ces populations avant le XIVe siècle est largement ignorée, très rarement figurée sur les cartes historiques d'Europe sud-orientale et des Balkans, et lorsqu'elle l'est, leur répartition est souvent réduite à un tout petit territoire placé tantôt au sud du Danube[11], tantôt au centre de l'actuelle région roumaine de Valachie[12], tantôt en Transylvanie[13].
Juridiquement, « Valaques » s'applique en relation avec l'usage du « droit valaque » dans les communautés de ce nom des Balkans et de la Hongrie médiévale[14].
Étymologie
Selon Adolphe Bloch[15], l'origine de Valaque est Walh, nom par lequel les Germains (et notamment les Goths lorsqu'ils sont entrés en contact avec le monde romain) désignaient les locuteurs celtiques, puis latins et romans (dans le Norique par exemple). Walh lui-même, toujours selon A. Bloch vient, semble-t-il, des Volques, peuple celtique avec lequel les Germains furent en contact sur leurs marges méridionales, et signifiait en germanique « étranger ». Il est possible que Walh et Volques soient reliés, à travers les langues indo-européennes à वल / vala signifiant personne en sanskrit.
Selon R. Rohlfs[16], Walh- a également donné Galles (pour Wales) et Gaule (Walha) en français d'oïl, car dans cette langue l'élément wa- initial et l'élément -alh aboutissent respectivement ga- (*wardan > garder, *waidanjan > gagner) et -aule (salha > saule): Gaule n'est donc pas issu du latin savant Gallia qui en français courant aurait donné *Geaille, Jaille (car les latins ga- initial et li devant voyelle donnent en langue d'oïl respectivement ja- ou gea- comme dans galbinum > jaune, gaiium > geai ou gabatam > jatte, et -ill comme dans alium > ail ou filiam > fille). Ce mot a également donné les mots Wallon et Wallonie dont la région fut l'une des zones frontières entre les anciens territoires celtes et germaniques (voir l'Histoire du terme Wallon).
Usages, paranymes et synonymes
Le mot « Valaques » désigne en français les habitants de :
- ce que les historiens nomment des « Romanies populaires » : des communautés latinophones restées sans couverture politique romaine après le retrait des légions face aux Germains: il y en eut de nombreuses entre la mer du Nord (île de Walcheren aux Pays-Bas) et la mer Noire (pays « valaques », c'est-à-dire roumanophones) en passant par les Ardennes (Wallons), les Vosges et le Jura suisse (Welsches), les Alpes (Walchenthal, Walchengau, Walchensee), les Carpates (Valaquie morave en Moravie tchèque, Vlachfölds en Hongrie), les monts Dinariques (Romanija Planina, Vlašina, Vlašić en Bosnie) et les Balkans (Stari Vlah, Vlahina, Vlashina, Vlachoklissoura)[17]. Au sens restreint, une « Valachie » ne regroupe que des romans orientaux et est gouvernée selon le jus valachicum (vlach jog ou « droit valaque ») permettant à leurs joupans de rendre la justice, tolérant la foi orthodoxe et garantissant les droits de pâturage[18] - [N 2]. Les habitants de ces Valachies se nommaient eux-mêmes « Romans » (Armâni ou Rumâni, termes francisés en « Aroumains » et « Roumains », qui ont remplacé le terme antérieur « Valaques » devenu trop polysémique et parfois péjoratif).
- la Valachie blanche - en Mésie le long du bas-Danube du Ve siècle au VIIe siècle.
- la Valachie noire (« Morlaques », ou Mavro-valaques) - en Dalmatie au VIIIe siècle.
- la Grande Valachie (Megali Valacheia) - dans Macédoine-Occidentale et en Thessalie au IXe siècle.
- le royaume bulgaro-valaque (dit « deuxième État bulgare » dans l'historiographie moderne) aux XIIe et XIIIe siècles.
- la principauté de Transylvanie ou « Valachie intérieure » au XIIe siècle, issue de la réorganisation des Vlachfölds roumains de Hongrie, qui a fusionné avec le Royaume de Hongrie en 1867 avant de devenir roumaine en 1918.
- la principauté de Valachie ou « Hongro-Valachie » au XIVe siècle, issue de l'émigration des chefs des Vlachfölds de Hongrie vers le Danube, qui a fusionné avec la principauté de Moldavie pour former la Roumanie en 1859.
- la principauté de Moldavie ou « Bogdano-Valachie » au XIVe siècle, qui a fusionné avec la principauté de Valachie pour former la Roumanie en 1859.
- la région de Valachie en Roumanie actuelle, (en roumain : Țara Românească), composée de l'Olténie et de la Munténie.
- Les Valaques en Europe en 850, d'après Anne Le Fur.
- Le Rex Bulgarorum et Blachorum en 1250, d'après Anne Le Fur.
- Les chemins traditionnels de transhumance des Valaques.
Traduit depuis les anciennes sources historiques, le mot Valaques peut aussi, en français, désigner les Valaques romanophones au sens large, plus spécifiquement les Roumains (populations de langue romane du bassin danubien) et les Aroumains (populations de langue romane des Balkans). Les historiens A. Xenopol, N. Iorga, T. Capidan et E. Petrović utilisaient le nom commun « valachies » pour désigner les « Romanies populaires » par opposition aux « Esclavonies », autre terme historique désignant des communautés à majorité slave. C. Giurescu et A. Niculescu, eux, soulignent que beaucoup de ces comtés ou cantons (canésats, joupanats et voïvodats selon la terminologie slave) antérieurs au XIVe siècle, pouvaient aussi être slavo-roumains, iasso-roumains ou albano-aroumains[18].
Au Moyen Âge, leurs voisins magyars nommaient les Valaques : Oláh, tandis qu'ils nommaient les Italiens : Olász. Aujourd'hui les auteurs hongrois distinguent Oláh (mot ancien et devenu péjoratif pour les roumanophones de Hongrie) de Vlach (mot savant pour les Romans orientaux au sens large et leur pastoralisme). Anciennement le mot Vlah était utilisé par les Croates catholiques pour désigner leurs voisins orthodoxes quelles que soient leurs langues. À l'époque les Grecs utilisaient le mot vlahos avec un sens péjoratif et il n'est pas rare d'entendre aujourd'hui en Grèce des histoires où le personnage du Vlahos joue le rôle du simplet. Toutefois, en Grèce, c'est aussi un nom de famille répandu. Vlahos est utilisé également par les Grecs pour désigner les Aroumains. Dans les Balkans, témoin du pastoralisme traditionnel des Valaques, ce nom a pu changer de sens et signifier simplement « berger », et d'autant qu'au fil du temps beaucoup de Valaques ont adopté des langues slaves méridionales, tout en restant éleveurs. En Albanie, le sens du mot s'est complètement inversé et c'est çoban (« berger » en turc et en roumain) qui signifie « valaque » tandis que vlah signifie « berger »[20].
On retrouve le terme « valaques » dans les langues européennes : Vlachs, Walach, Wallach, Wallachians (angl.), Volokh (russe), Walachen, Aromunen (all.), Oláh (hongr.), Vlah, Vlas, Vlax, Vlachos, Iflak (langues balkaniques), Valacchi (ital.), Blacos, Velacos (esp.), Ulahs, Blaques, Koutso-Vlaques, Tsintsares, Zinzares. Méconnues, ces dénominations mènent souvent à des erreurs d'identification et de traduction ; la seule traduction scientifique est « Romans orientaux »[21]. Le terme « valaques » est en effet polysémique et peut avoir les sens suivants selon les contextes et les langues :
- « italien » et/ou « roumain » en polonais (respectivement Włoch et/ou Wołoch), tchèque, slovène et hongrois (respectivement Olász et Oláh),
- « berger » ou « cheval hongre » en slovaque moderne,
- « habitant de la Valachie morave » ou de la « Valachie roumaine » en tchèque et slovaque modernes,
- « italien » en ancien slovaque et en ancien tchèque,
- « aroumain » en grec, bulgare, serbe, croate, bosniaque,
- « roumain ancien » en allemand, ukrainien, russe moderne,
- « romanophone » (tous romanophones confondus) en russe ancien,
- « rom, tsigane » en serbe et bulgare,
- « habitant de l'ancienne principauté de Valachie »
- « immigré », « métèque », « chrétien orthodoxe » ou « serbe » (péjoratif) chez les Croates et les Slovènes,
- « non musulman », « mécréant » ou « serbe » (péjoratif) chez les Bosniaques,
- « aroumain », « berger » en bulgare et en macédonien,
- « aroumain » en grec,
- « langue roumaine parlée dans la Krajina de l'est de la Serbie » (Portes de Fer),
- valacchi, Velacia désignent en italien ancien les « aroumains » les « habitants de Valachie » les « pays roumanophones ».
Ce sont probablement les Valaques d'Istrie qui ont laissé leur nom à la ville istrienne de Volosca (ro) mais ils sont aussi appelés Ćići ou Ćiribirci en croate et slovène, Ciócci en italien istriote et Tschitschen en allemand (tandis qu'eux-mêmes se désignent comme vlåš ou žejånci).
En revanche, les Saracatsanes hellénophones ne sont pas ou plus des Valaques, bien que Theodor Capidan et Take Papahagi aient supposé que ces bergers nomades des Balkans puissent être d'origine initialement aroumaine.
En anglais, les historiens et les géographes distinguent les Wallachians (habitants de la région roumaine de Valachie et plus largement les roumanophones) des Vlachs (Aroumains et plus largement les romanophones sud-danubiens), tandis que l'allemand fait la même distinction en appelant Walachen les roumanophones et Aromunen ou Zinzaren les Aroumains et les Mégléno-Roumains.
- Le trophée de Trajan sur le site de la bataille d'Adamclisi.
- La Table de Trajan.
- Les Portes de Fer.
- Famille valaque descendant au marché, par Miklós Barabás, 1844.
- Valaques, dessinés par Charles Girardet, 1846.
- Un cocher valaque dessiné par Dieudonné Lancelot en 1860.
- Une jeune paysanne valaque dessinée par Dieudonné Lancelot en 1860.
- Groupe valaque dans le Harper's magazine, 1876.
- Un Valaque de Moravie, par Brumova, 1787.
- Un Valaque d'Istrie (Tschitsche en allemand) vers la fin du XIXe siècle.
- Un Valaque de Grèce en 1900, dans les archives des frères Manákis.
- Le révolutionnaire macédonien Pitu Guli, un aroumain de Crușova, tombé dans la lutte anti-ottomane et considéré comme un héros tant par les bulgares, que par les grecs, les macédoniens et les valaques.
- Famille valaque de Meria en Transylvanie austro-hongroise, 1911.
Enfin, beaucoup de textes anciens confondent les Valaques avec les peuples auxquels ils étaient mêlés comme les Coumans : Cumani nigri en latin, Mavrokoumanoi en grec, Blakumen sur la pierre runique n° G134 du cimetière de Sjonheim (Gotland, Suède, XIe siècle)[22]. Les termes de Maurovlahkoi (grec), Maurolaci (latin), Morvlasi, Karavlasi (Sud-slave BCMS) ou Morlaques (francisé) désigne en Dalmatie des populations de bergers et de pêcheurs qui pouvaient aussi bien être romanophones (Dalmates ou romanes orientales) que slavophones[23].
Aire de répartition
En ethnographie moderne, le terme Valaques est parfois encore utilisé pour désigner :
Au Nord du Danube
« Valaques » est parfois encore utilisé pour désigner les romanophones vivant, d'une part, le long du Danube et de part et d'autre des Carpates et du Prut, appelés Roumains ou Moldaves[N 3] et locuteurs de la langue daco-roumaine.
Aux bouches du Danube
Autour des bouches de ce fleuve, diverses sources, notamment ottomanes, mentionnent des Valaques Diciens, roumanophones autochtones de Dobrogée, dont le parler, appelé dicien, fait partie de la langue daco-roumaine[24] - [25] des rives du bas-Danube et de la mer Noire, des bouches du Danube, autour de Chilia et de Tulcea, et du massif du Măcin, à l'époque plus boisé qu'aujourd'hui, où une population roumanophone a vécu, parfois isolée aux époques des invasions (notamment tatares) et des guerres ottomanes. Selon George Vâlsan[26] le nom de ce parler est en relation avec la cité médiévale de Vicina qui a donné à la Valachie son premier évêque métropolitain, Hyacinthe, en 1359, et a laissé des traces dans les patronymes locaux comme Dicianu[27]. Les études régionales toponymiques, étymologiques et onomastiques indiquent une forte influence grecque médiévale et ottomane sur ce parler local. Des noms d'outils, de végétaux ou d'animaux indiquent qu'à son tour, le roumain dicien a influencé le parler russe des Lipovènes venus s'installer dans la région au XVIIe siècle. Au XVIIIe siècle la population dicienne s'est maintenue en partie grâce à l'immigration peu nombreuse, mais continue de roumanophones moldaves du Boudjak fuyant les persécutions des Tatars. Au XIXe siècle elle a été absorbée par les roumanophones du reste de la Roumanie.
Les archéologues discutent la position de l'ancienne Vicina, qu'ils supposent pouvoir se trouver sous l'actuelle Tulcea, sous l'actuelle Isaccea, sous l'actuelle Măcin ou ailleurs (beaucoup de localités regorgent de ruines antiques et médiévales)[28].
Au Sud du Danube
Dans les Balkans, « Valaques » désigne principalement :
- les Aroumains locuteurs de la langue aroumaine (également connus sous les noms de Cincari, Tsintsars ou Zinzares) ;
- historiquement en ex-Yougoslavie, les « Mavro-Vlaques », « Morlaques » ou « Valaques noirs » (Karavlasi) du Monténégro, de Dalmatie et Bosnie-Herzégovine (terme qui désigne encore de manière péjorative les orthodoxes en Bosnie-Herzégovine).
- les Istriens ou Istro-roumains d'Istrie, en Croatie ;
- les Méglénites ou Mégléno-Roumains en Macédoine du Nord et en Grèce (dans la périphérie (Grèce) de Macédoine-Occidentale) ;
- les Valaques (Vlasi) de Serbie.
- les Valaques d'Herzégovine (« morlaques » ou caravlasi), progressivement slavisés.
Dans la Yougoslavie moderne, seuls les Vlasi vivant en Serbie centrale et le long de la frontière bulgare, ainsi que les Roumains de Voïvodine, étaient reconnus et comptés comme minorités nationales (séparément), et figuraient sur les cartes linguistiques. Les roumanophones de la Krajina orientale (aux Portes de Fer et autour de Negotin), majoritaires dans 156 communes et présents dans 48 autres, plus nombreux que les Vlasi et que les Roumains de Voïvodine réunis, n'ont été officiellement reconnus que le . En 2002, sur 284 112 habitants de cette région, la Timočka Krajina, 243 148 (85,58 %) étaient déclarés Serbes, 23 604 (8,31 %) étaient déclarés Valaques et 2 723 (0,96 %) étaient déclarés Roms[30], mais en 2009, il semble que près de 141 000 Serbes de la Timočka Krajina soit 58 % d'entre eux, seraient usuellement roumanophones[31]. Dans cette communauté, de langue daco-roumaine, comme celle de Voïvodine, deux tendances identitaires coexistent : l'une, « roumaniste », s'identifie au peuple roumain et se considère comme une minorité roumaine en Serbie ; l'autre, « valaquiste » (en roumain vlahistă), s'en distingue au contraire et se considère comme une communauté est-romane de Serbie, roumanophone mais non roumaine. On retrouve ici le même débat qu'en Moldavie, en Macédoine du Nord ou au Monténégro entre droit du sang et droit du sol : selon le premier, l'identité se fonde sur la langue et l'origine commune ; selon le second, elle se fonde sur le territoire et l'habitat (ou la citoyenneté) communes[32].
Histoire
Origines
Depuis l'Antiquité, les langues romanes orientales se sont formées dans les Balkans en trois étapes : du Ier siècle au VIe siècle, par romanisation d'une partie des autochtones au nord de la ligne Jireček, apparition des Thraco-Romains parlant le roman oriental ; du VIe siècle au XIe siècle, arrivée des Slaves et des Magyars, multiplication des Valachies et des Sklavinies (petits comtés de langue romane ou slave sous souveraineté des États plus puissants comme le khanat des Avars, le premier Empire bulgare, l'Empire byzantin ou le royaume de Hongrie) et dispersion en « îlots linguistiques » des Romans orientaux parlant le proto-roumain[N 4] ; enfin depuis le XIIe siècle, séparation des Romans orientaux et de leurs langues entre le Nord-Est (actuelles Roumanie et Moldavie), le Nord-Ouest (Valaquie morave), l'Ouest (Istrie) et le Sud (Aroumains et Megleno-roumains des Balkans). Aujourd'hui, les Roumains (au sens linguistique, soit 23 millions de locuteurs) ont construit deux États modernes, tandis que les Istriens, les Aroumains et les Méglénites perpétuent leur culture et leur langue, mais, minoritaires dans les pays où ils vivent (les estimations les plus hautes ne dépassent pas quelques centaines pour les Istriens, 300.000 pour les Aroumains et quelques milliers pour les Méglénites), ne revendiquent pas d'État.
La première mention des populations de langue romane des Balkans est faite en 579 par Théophane le Confesseur et Théophylacte Simocatta dans la chronique d'une bataille contre les tribus des Avars, les romanophones combattant dans les rangs de l'armée romaine d'orient dite « byzantine ». À cette époque, les chroniqueurs byzantins appelaient Ῥωμαίοι - Rhômaíoi ou Romées, soit « Romains » en grec tous les citoyens de la Βασιλεία των Ῥωμαίων - Basileía tôn Rhômaíôn : « empire des Romains » en grec), et, pour distinguer parmi eux les populations romanophones des Balkans, ils utilisaient le nom de Besses (une ancienne tribu thrace : ainsi, en 570, le pèlerin Antonin de Plaisance en visite au monastère Sainte-Catherine du Sinaï décrit les langues les plus parlées par les moines byzantins : « grec, latin, syriaque, copte et besse »). Au IXe siècle le nom de Valaques commence à supplanter celui de Besses : dans son Strategikon[33], Kékauménos précise au XIe siècle que les romanophones de Thessalie descendent des anciens Thraces et Daces et qu'on les appelle Besses ou Valaques[34].
Sous la forme Volokhs ou Volochovènes, le terme a été aussi utilisé par les peuples slaves pour désigner les populations situées au sud de leurs frontières, lors de leur arrivée dans la région.
Les étymologistes et linguistes, pour leur part, pensent que l'endonyme Rumâni/Armãni par lequel se désignent les Valaques, remonte à Ῥωμανία (« Romania » : l'Empire romain d'Orient, que l'historiographie postérieure au XVIe siècle nomme « byzantin »).
Moyen Âge
Lors de la fondation du premier Empire bulgare, la plupart des Valaques, ainsi que les Slaves des Balkans orientaux et les Grecs des côtes de la Mer Noire, se retrouvent au sein de ce nouvel état, qui adopte leur religion (chrétienne orthodoxe) en 864. Le chroniqueur byzantin Kedrenos est le premier à employer le terme de Valaques quand il raconte l'assassinat par ceux-ci du frère du tsar bulgare Samuel, en 976. Auparavant, les Byzantins n'utilisaient pas de terme spécifique pour les désigner, mais les incluaient dans le terme générique de Ῥωμαίοι (« Romains ») donné à tous les habitants aborigènes de l'ancienne Ῥωμανία (l'Empire), y compris hellénophones ou albanophones[35].
En 1018, au terme d'une guerre longue et sanglante, l'empereur byzantin Basile II parvient à reconquérir la péninsule des Balkans en anéantissant la Bulgarie. Cela provoque de grands déplacements de populations, et notamment d'une partie des Valaques de Bulgarie qui se dispersent : une partie d'entre eux migre vers la Transylvanie où ils grossissent les rangs de ceux qui s'y trouvaient déjà[36], mais un grand nombre s'installe en Thessalie qui est alors appelée la Grande Valachie (Μεγάλη Βλαχία) par les auteurs byzantins[37] ; des groupes moins importants s'installent en Acarnanie alors appelée par les mêmes chroniqueurs et par Apokaukos Petite Valachie (Μικρή Βλαχία) et dans le Péloponnèse, dans le pays de Scurta (« courte, étroite ») à cheval sur les éparchie de Gortyne et de Mantinée, avec des localités comme Andritsana, Dimitsana, Caritena, Lala, Langadia, Maguliana, Stemnitsa, Vlachos, Vlacho Raphti sur l'Alphée et Vlacho-Kerasia aux sources de l'Eurote[38].
Avant la Roumanie moderne, la seule formation politique d'envergure montrant une participation des Valaques, est le royaume des Bulgares et des Valaques (1186-1280)[39], issu de leur révolte contre l'Empire byzantin en 1180-1186[N 5].
Contrairement à ceux de Valachie, Moldavie et Transylvanie (les Roumains), les Valaques des Balkans (les Aroumains) n'ont plus d'histoire politique après 1280 : ils vivront en bergers, cultivateurs et commerçants au sein des états grecs, serbes ou bulgares, puis de l'Empire ottoman. Une petite partie d'entre eux, quelques villages de Mégléniotes, s'est d'ailleurs convertie à l'islam. Les communautés valaques disparues de Bosnie, d'Herzégovine, de Dalmatie et du Monténégro ont laissé des stèles ou des sarcophages en pierre appelés localement stecci[40] - [41] ; des pigments révèlent qu'ils étaient initialement polychromes à la manière des stèles en bois plus récentes, comme celles de Sapântsa[42]. Quelques-uns de ces stecci ont été amenés de leur site d'origine dans le jardin du Musée national de Bosnie-Herzégovine à Sarajevo, où, conformément à l'historiographie bosniaque officielle, ils sont présentés comme des « tombes patarines slaves »[43]. Dans l'historiographie bosniaque, le mot « valaque » désigne « des envahisseurs venus de l'Est », ancêtres orthodoxes des Serbes de Bosnie[23] - [44].
Période moderne
Les Istro-roumains ne sont plus que quelques dizaines, en Istrie, à l'ouest de Rijeka. Les Karavlasi ou Morlaques ont disparu au XVIIIe siècle, assimilés aux Vénitiens ou aux Croates. Ces deux populations, catholiques, sont, selon la plupart des historiens, issues des Valachies du centre de l'ancienne Yougoslavie, désignées encore aujourd'hui par des toponymes tels que Vlasić, Stari Vlah, Romanija Planina ou Durmitor : vers 1530, deux seigneurs croates, les comtes Zrinski et Frankopan, accordèrent des franchises à ces populations[45] qui finirent par adopter la langue serbo-croate en se mêlant aux réfugiés fuyant la répression de l'Empire ottoman dans les plaines (Serbes de Rascie et Albanais du Kosovo à l'époque encore chrétiens orthodoxes sous obédience de l'Église orthodoxe serbe). Environ 200 000 Serbes et Albanais rejoignirent dans ces confins les Valaques entre 1690 et 1694 : le statut de ces réfugiés fidèles à l'Église orthodoxe serbe est alors plus enviable que celui des serfs croates (donc catholiques). Cela qui provoque une fuite de la population croate vers les confins militaires de l'empire d'Autriche (suzerain des seigneurs croates) ainsi que son adhésion à l'Église serbe dans le but d'avoir les mêmes avantages que les réfugiés.
La fuite de leurs serfs provoque la colère des nobles croates, d'autant que lorsque les confins militaires autrichiens furent en majorité peuplés d'orthodoxes, vers 1559, l'empereur et le conseil militaire de Vienne retirèrent aux nobles croates toute autorité sur la région en raison des statuta valachorum promulgués en 1630. Les pandoures et les fermiers orthodoxes des confins militaires, qu'ils fussent Serbes ou Roumains[46] adoptèrent aussi la langue serbo-croate tandis que le valaque et l'albanais disparaissent[47], non sans laisser des traces dans le lexique local ; dès lors, le terme de Valaque n'y désigne plus des populations latinophones, mais devient chez les Croates un terme péjoratif pour les bergers transhumants des Balkans et plus généralement pour les orthodoxes, Slaves ou Valaques[48].
Lors de l'éveil des nationalismes au XIXe siècle, les Valaques Aroumains des Balkans ne revendiquent aucun territoire, et la majorité d'entre eux choisira de se déclarer membres de l’Elleniki ethniki koinonia (communauté nationale hellénique) mais de langue aroumaine. Une autre partie de la communauté a émigré en Roumanie (pays qui avait financé leur système scolaire de 1866 à 1940, mais en tentant de substituer la langue roumaine à l'aroumain) avant et après la Première Guerre mondiale, pour peupler notamment la Dobroudja du Sud que la Roumanie avait enlevée à la Bulgarie en 1913.
Pendant les deux guerres mondiales, Italie et Roumanie tentèrent, vainement, d’instrumentaliser les Valaques à travers le projet, qui ne se concrétisa pas, d’une « principauté du Pinde », qualifiée par les intéressés de « sinistre pantalonnade » (cela aurait été un État fantoche à cheval sur l’Épire orientale, la Macédoine-Occidentale et quelques arrondissements voisins du nord-ouest de la Thessalie)[49]. Plus grave, alors que la Roumanie était devenue fasciste, le réseau scolaire roumain a parfois servi à véhiculer les idées de la Garde de fer, ce qui a abouti à constituer la « légion Diamandi (en)-Matoussis », une troupe de quelques dizaines d’hommes qui sillonna les montagnes pour tenter de rallier les Valaques à ce projet. Ceux-ci ne répondirent pas à ces avances, et nombreux furent ceux qui s’engagèrent dans le mouvement de résistance EAM ; ils ne se laissèrent pas davantage séduire pendant la guerre civile grecque (1946-49) par les émissaires roumains du Kominform qui leur promettaient une région autonome sur le modèle soviétique[50]. La Roumanie cessa de financer les écoles aroumaines en 1945.
Aujourd'hui les Aroumains ne revendiquent aucune structure territoriale ou politique au sein des pays où ils vivent, mais ont une vie culturelle intense, cultivent leur langue et maintiennent leurs liens d'un pays à l'autre.
Légendes anciennes
Dans leur culture populaire, les Valaques ont plusieurs mythes de leurs origines, certains anciens, d'autres plus récents.
Au nord du Danube, l'un de ces anciens mythes agraires, plugușorul (« la petite charrue »), gardait le souvenir de « Trajan, venu il y a bien des ans », fondateur et bâtisseur[51].
Au sud du Danube, deux anciennes légendes rapportent, l'une que les Valaques auraient jadis vécu au nord de l'actuelle Serbie « dans la vaste plaine de Sermion » d'où ils auraient fui devant les invasions vers le couchant (Stari Vlah et Romanija Planina où ils auraient laissé les sarcophages nommés stećci, Istrie), le levant (Banat, montagnes transylvaines) et le midi (Pinde, Thessalie), l'autre qu'ils descendraient des « caravaniers des Romains » chargés de construire, défendre et entretenir la Via Egnatia (reliant Dyrrhachium, aujourd'hui Durrës en Albanie, à Constantinople), les ports du Danube et les castrae du limes danubien, ainsi que les mines d'or et de sel des Carpates[52]. Ces deux mythes se comprennent en relation avec les anciennes routes de transhumance et de commerce des Valaques, reliant les sites en question. Des légendes populaires plus récentes (XIXe siècle) les font descendre du général romain fictif « Blaccus » qui aurait commandé la légion V « des alouettes » cantonnée en Mésie[53].
Controverses nationalistes modernes
La polysémie du nom « Valaques » induit des confusions dans son utilisation en français. Danns la majorité des sources secondaires il désigne indistinctement les Roumains et les Aroumains antérieurement à l'émergence de la Roumanie, sans préciser qu'il s'agit de Roumains et d'Aroumains, ce qui laisse penser au lecteur non averti qu'il s'agit, peut-être, d'une tribu slave ou turcophone (c'est notamment le cas de l'un des Atlas historiques les plus largement diffusés en Europe, le DTV, qui, page 106 les place parmi les Slaves, et page 201 en fait des « immigrants vassaux des Mongols »[54]). Des auteurs tels Jacques Bertin prennent le parti d'utiliser « Moldo-Valaques », ce qui en exclut les Transylvains. Ne connaissant pas le mot français « Valaques », ou souhaitant le réserver pour désigner les habitants actuels de la région géographique roumaine de Valachie, certains historiens roumains et grecs utilisent pour les Aroumains des formes telles que Vlachs (forme anglaise), « Vlaques », « Aromounes » (forme allemande Aromunen) ou « Macédo-Roumains » (dénomination roumaine).
Confrontés au XIXe siècle aux revendications de la renaissance culturelle roumaine, les Empires austro-hongrois et russe se sont efforcés, par la méthode hypercritique, de réfuter les arguments des historiens roumains à propos de l’origine des roumanophones pour nier leur ancienneté dans les territoires dont ils revendiquaient l’autonomie ou l’union en un seul État : c’est le cas, entre autres, d’Eduard-Robert Rössler[55] reprenant et développant les études de Johann Christian von Engel (en), qui, dans ses Histoires de la Moldavie et de la Valachie, présente les « Valaques » comme un peuple primitif et fruste, et leurs anciens voïvodes comme des fourbes et des monstres assoiffés de sang (ce qu’Ármin Vámbéry, professeur à l’université de Budapest, transmettra à Bram Stoker qui le cite dans son roman Dracula en tant qu’Arminius Vambery). Selon ce point de vue, il n'existait aucun locuteur des langues romanes orientales au nord du Danube durant l’antiquité tardive et le Haut Moyen-Âge, et les valachies, équivalent romanophone des Sklavinies slaves, ne sont pour les historiens de ces Empires (et de leurs États-successeurs) rien d'autre que des exemptions de taxes accordées au XIVe siècle par les rois de Hongrie ou de Galicie-Volhynie à leurs nobles pour défricher des terres royales avec des ouvriers agricoles valaques importés des Balkans[56].
La résurgence des nationalismes au début du XXIe siècle ravive les controverses et les postulats protochronistes d'auteurs balkaniques, hongrois ou roumains, qui débattent en reprenant des positions héritées du XIXe siècle :
- La thèse austro-hongroise, et plus tard allemande, hongroise et russe[57], affirme au contraire la disparition des latinophones en Dacie après les 170 ans de présence romaine, et leur retour après mille ans d'absence, à l'appel des rois de Hongrie, depuis la région géographique de Macédoine. Selon cette thèse, ce sont les Roumains qui descendent des Aroumains. Cette thèse dite « rösslerienne »[58] est en cohérence avec l'histoire hongroise de la Transylvanie, qui affirme que les populations magyares y ont précédé les populations roumaines, et aussi avec les thèses grecques affirmant que les Aroumains ne descendent pas des Roumains, mais de populations hellénophones latinisées (la synthèse des thèses grecques et « rössleriennes » ferait donc descendre tous les Roumains de « Grecs latinisés »). Dans ce point de vue, le « droit valaque » n'est rien d'autre qu'une exemption de taxes octroyée par la couronne hongroise aux aristocrates magyars désireux de faire défricher des terres royales vierges par des ouvriers agricoles valaques, sans aucune autonomie pour ces derniers, et donc la notion de « valachie » ou « romanie populaire » n'est qu'une pure invention[59] des historiens roumains nationalistes[60].
- De son côté, l'historiographie bulgaro-yougoslave et roumaine[61] postule que les Valaques locuteurs des langues romanes orientales sont apparus exclusivement au nord du Danube et ne sont venus dans les Balkans que tardivement après les Slaves et en très petit nombre, pour donner les Aroumains, les Mégléno-Roumains et les Istro-Roumains. Cette thèse est en cohérence avec la position de la majorité des linguistes roumains qui considèrent l'istro-roumain, l'aroumain et le mégléno-roumain comme des dialectes du roumain, et avec les historiographies bulgare et yougoslave qui affirment que les Slaves ont trouvé dans les pays qui sont aujourd'hui les leurs, des populations Thraces et Illyres non-romanisées, le Royaume des Bulgares et des Valaques n'ayant qu'une « composante valaque négligeable » et étant un État bulgare au sens actuel national du terme : le « Second Empire bulgare »[62].
L'incompatibilité de ces deux thèses largement diffusées crée dans les sources secondaires[63] l'illusion d'une disparition totale des langues romanes orientales durant mille ans, pendant l'antiquité tardive et le Haut Moyen-Âge, suivie d'une réapparition inexpliquée tardive, au XIIIe siècle[64]. Dans cette perspective, les territoires où l'on parlait ces langues apparaissent sur les cartes historiques comme de simples parties des États voisins, ne figurant, même en pointillé, ni les romanophones, ni les principautés autonomes de Moldavie, Transylvanie et Valachie. Des historiens roumains comme Gheorghe I. Brătianu ont rebondi sur ce paradoxe pour qualifier les Roumains d'« énigme et miracle historique »[65].
Entre ces deux écoles contradictoires qui interprètent toutes deux l'archéologie et la toponymie de manière à valider leurs a priori, toute synthèse est impossible et leur large diffusion marginalise les rares chercheurs[66] qui, s'appuyant sur la linguistique comparée et la toponymie, pensent que les locuteurs du roman oriental ont pratiqué la transhumance pastorale aussi bien au nord qu'au sud des Carpates, du Danube et des Balkans, sans considérer ces reliefs et ce fleuve comme d'infranchissables frontières, avant d'évoluer linguistiquement à partir du Xe siècle en Daco-Roumains au nord, et en Istro-roumains, Aroumains et Mégléno-roumains au sud, dans un processus similaire à la séparation des romanophones d’oïl et des occitanophones d’oc dans l'espace gallo-romain : au nord de la ligne Jireček[N 6], les Daco-roumains se sont développés dans le bassin du bas-Danube par osmose entre romanophones et slavophones, tandis que les Aroumains et les Mégléno-roumains, qui ont évolué en milieu hellénisé au sud de la Dacie aurélienne, ont subi beaucoup moins d'influences slaves et ont ensuite diffusé vers la région géographique de Macédoine et la Thessalie[67] ; les Istro-roumains pour leur part descendent peut-être des anciennes populations romanes de l'ancienne Illyrie (les « Mavro-Valaques », « Morlaques » ou « Karavlaques »), chassées vers l'ouest par les Slaves et/ou les Turcs. Selon ces recherches, les romanophones (ponctuellement sédentarisés en « valachies »[68] - [69]), les slavophones (ponctuellement sédentarisés en « sklavinies ») et les autres (albanophones, hellénophones, magyarophones…) ont simultanément vécu sur un territoire multilingue plus vaste que les états actuels, à la population majoritairement mais non exclusivement slave à partir du VIIe siècle, allant de l'Adriatique à la mer Noire et de l'actuelle Ukraine au centre de l'actuelle Grèce, sans qu'aucun groupe linguistique n'occupe seul tel ou tel territoire[70] - [71].
La méthode hypercritique des auteurs « exclusivistes » décrédibilise et marginalise ces études, aboutissant dans les sources secondaires à ignorer toute présence romanophone entre l'an 270 et le XIIIe siècle dans le bassin du bas-Danube et les Balkans, ce qui a fait dire à l'historien Neagu Djuvara, dans une interview de 2008, que « les arguments des thèses antagonistes peuvent tous être contestés, mais ils ont le mérite d'exister, tandis qu'aucun fait archéologique et aucune source écrite n'étaye l'hypothèse d'une disparition pure et simple des romanophones pendant mille ans, de 276 à 1276, qu'ils se soient envolés avec les hirondelles pour migrer en Afrique, ou qu'ils soient allés hiberner avec les ours dans les grottes des Carpates ou des Balkans »[72]. Quoi qu'il en soit, même s'il n'existait aucune preuve archéologique, toponymique ou linguistique et aucune mention écrite, la simple présence des langues romanes orientales suffit à prouver que les Thraco-Romains, locuteurs romanophones, ont survécu à l'arrivée des Slaves et des Proto-Bulgares dans la région, et que les Valaques ne sont pas apparus par « génération spontanée » au XIIIe siècle[N 7].
Notes et références
Notes
- Le refus de l'historiographie russe et occidentale d'utiliser l'adjectif « roumains » pour les États et les populations roumanophones d'avant 1859 (au motif que ce serait un néologisme du XIXe siècle) est historiquement infondé pour deux raisons :
- l'historiographie russe et occidentale n'hésite pas, pour désigner les populations des futures Allemagne, Italie ou Russie, à employer les termes « Allemands », « Italiens » ou « Russes » pour des périodes très antérieures à la constitution de ces états modernes : il n'y a donc pas de logique à refuser d'employer le terme « Roumains » pour désigner les populations de la future Roumanie avant sa constitution comme état moderne ;
- « Roumains » est attesté comme endonyme dès le XVIe siècle lorsque des humanistes italiens et autres commencent à décrire leurs voyages dans les zones habitées par des « Valaques ». Maria Holban (dir.) in Călători străini despre Țările Române (Editura Științifică, Bucarest 1968, vol. 2 à 6, Bucarest 1976) cite :
- Tranquillo Andronico écrit en 1534 que les Roumains (Valachi) « s’appellent eux-mêmes romains » (« nunc se Romanos vocant » in : A. Verress, Acta et Epistolae, I, p. 243).
- En 1532, Francesco della Valle accompagnant le gouverneur Aloisio Gritti note que les roumains ont préservé leur nom de romains et qu'« ils s’appellent eux-mêmes roumains (Romei) dans leur langue ». Il cite même une phrase : Sti rominest ? (« sais-tu roumain ? », roum. : « știi românește ? »): …si dimandano in lingua loro Romei … se alcuno dimanda se sano parlare in la lingua valacca, dicono a questo in questo modo: Sti Rominest ? Che vol dire: Sai tu Romano ? (in : Cl. Isopescu, « Notizie intorno ai romeni nella letteratura geografica italiana del Cinquecento », in Bulletin de la Section historique, XVI, 1929, p. 1- 90).
- Ferrante Capeci écrit vers 1575 que les habitants des « provinces valaques de Transsylvanie, Moldavie, Hongro-valaquie et Mésie » s’appellent eux-mêmes roumains (romanesci) « Anzi essi si chiamano romanesci, e vogliono molti che erano mandati quì quei che erano dannati a cavar metalli... » (Maria Holban, Călători străini despre Țările Române, vol. II, p. 158 – 161).
- Pierre Lescalopier remarque en 1574 que « Tout ce pays la Wallachie et Moldavie et la plupart de la Transilvanie a esté peuplé des colonies romaines du temps de Trajan l’empereur… Ceux du pays se disent vrais successeurs des Romains et nomment leur parler romanechte, c'est-à-dire romain… » (« Voyage fait par moy, Pierre Lescalopier l’an 1574 de Venise a Constantinople », folio 48 in Paul Cernovodeanu, Studii și materiale de istorie medievală, IV, 1960, p. 444).
- Le Saxon transylvain Johann Lebel note en 1542 que les Valaques se désignent eux-mêmes sous le nom de Romuini : Ex Vlachi Valachi, Romanenses Italiani,/Quorum reliquae Romanensi lingua utuntur…/Solo Romanos nomine, sine re, repraesentantes. Ideirco vulgariter Romuini sunt appelanti in : Ioannes Lebelius, De opido Thalmus, Carmen Istoricum, Cibinii, 1779, p. 11 – 12).
- Le polonais Stanislaw Orzechowski (Orichovius) observe en 1554 qu'« en leur langue ils s’appellent « romin » d’après les Romains, et « valaques » en polonais d’après les Italiens » (qui eorum lingua « Romini » ab Romanis, nostra « Walachi », ab Italis appellantur in : « Annales polonici ab excessu Sigismundi », in I. Dlugosz (Dlugossus), Historiae polonicae libri XII, col. 1555).
- Le dalmate Antonio Veranzio (ou Anton Verancić) remarque vers 1570 : …Valacchi, qui se Romanos nominant… et …gens quae ear terras Transsylvaniam, Moldaviam et Transalpinam nostra aetate incolit, Valacchi sunt, eaque a Romania ducit originem, tametsi nomine longe alieno… soit « les gens vivant en Transylvanie, Moldavie et Valachie se nomment eux-mêmes Romains » (« De situ Transsylvaniae, Moldaviae et Transaplinae », in Monumenta Hungariae Historica, Scriptores, t. II, Budapest 1857, p. 120).
- Le hongrois transylvain Martin Szent-Ivany cite en 1699 les expressions : Sie noi sentem Rumeni (« nous aussi, nous sommes roumains », pour le roum. : « Și noi suntem români ») in : Dissertatio Paralimpomenica rerum memorabilium Hungariae, Tyrnaviae, 1699, p. 39.
- À la même époque, Grigore Ureche (Letopisețul Țării Moldovei, p. 133-134) écrit : În Țara Ardealului nu lăcuiesc numai unguri, ce și sași peste seamă de mulți și români peste tot locul (« En Transylvanie n'habitent pas seulement des Hongrois mais aussi d'innombrables Saxons et partout des Roumains »).
- Dans son testament littéraire, Ienăchiță Văcărescu écrit : Urmașilor mei Văcărești!/Las vouă moștenire:/Creșterea limbei românești/Ș-a patriei cinstire (« A mes descendants Vacaresques/je laisse en héritage/la croissance de la langue roumanesque/et la patrie en hommage »).
- Enfin dans une Istoria faptelor lui Mavroghene-Vodă și a răzmeriței din timpul lui pe la 1790 le poète Hristache Pitar versifie : Încep după-a mea ideie/Cu vreo câteva condeie/Povestea mavroghenească/Dela Țara Românească (« Je commence selon mon idée/avec quelques plumiers/l'histoire Mavroghénie/de la Valachie »).
- Il ne faut pas confondre les ϐλαχίες - valachies avec les ϐαλαχάδες - valachades, beaucoup plus tardives, qui sont des communautés hellénophones musulmanes dont l'étymologie remonte au nom Allah et que cite F. W. Hasluck dans son ouvrage Christianity and Islam under the Sultans, Oxford 1929.
- Pour des raisons politiques, les Roumains sont appelés « Roumains » en Roumanie (y compris ceux de Moldavie, qu'il s'agisse de la province roumaine de Moldavie ou de la république indépendante de Moldavie), mais « Moldaves » en République de Moldavie (sans qu'il y ait accord pour savoir si ce nom concerne uniquement les Moldaves de la république indépendante, ou bien également ceux de la Moldavie roumaine).
- Même si on n'y parle plus de langues romanes depuis des siècles, ces « îlots linguistiques » ont laissé de nombreux toponymes dont les bases sont Alba, Alta, Apa, Casa, Cliava, Codru, Lunga, Mandra, Monte, Negra, Petra, Romania, Vlahina, Vlaho, Vlasina, Vlahitsa, Vlaska...
- Le terme de Rex Bulgarorum et Blachorum est officiellement utilisé par les papes Innocent III en 1205 et Grégoire IX en 1232 dans leur correspondance avec le roi Caloian (1197-1207) à qui était attribué le titre rex Bulgarorum et Blachorum (« roi des Bulgares et des Valaques ») et avec Ioan Asan II (1218-1241), ainsi que dans les armoriaux de l'époque (par exemple le Wijnbergen cité par Nicolae Serban Tanasoca, « La signification historique du blason du Regnum Valachorum et Bulgarorum dans l'armoirial Wijnbergen », Annales de l'Inst. d'hist. et d'archéol. A.D. Xenopol, vol. 24, Iași 1987. Selon les récits d'Anne Comnène, Nicétas Choniatès et Jean Skylitzès dans (en) Averil Cameron, The Byzantines, Blackwell Publishing, , 296 p. (ISBN 978-1-4051-9833-2 et 1405198338, OCLC 429601392, LCCN 2010291662, présentation en ligne), p. 170, après avoir conquis la Bulgarie, le basileus byzantin Basile II permit à la noblesse bulgare et valaque de conserver ses privilèges et à l’archevêché d'Ohrid d’être autonome. Selon Anne Comnène, lorsque les Coumans attaquent l’Empire byzantin en 1094, le valaque Pudilă vint à Constantinople avertir l’empereur que les barbares étaient en train de passer les Monts Haemus et en 1166, le basileus, Manuel Comnène recruta ces mêmes valaques pour arrêter une invasion hongroise. Mais ultérieurement, sous le règne d’Isaac II Ange, l’accroissement des impôts, des corvées et de la conscription provoqua, selon Anne Comnène, Nicétas Choniatès et Jean Skylitzès, plusieurs révoltes des Valaques des Balkans, menées successivement par Drăgaș, par Niculiță Delfinul (Νικουλιτζάς Δελφινάς dans les sources) puis, en 1185, par trois frères valaques : Asan, Ioaniţă Caloian et Petru Deleanu (Επανάσταση του Πέτρου Δελεάνου dans les sources). C'est de ces soulèvements valaques que naît le Regnum Bulgarorum et Valachorum. Outre Anne Comnène, Choniatès et Skylitzès, Geoffroi de Villehardouin et son contemporain Robert de Clari citent aussi « Joanisse, roi de Blaquie et de Bougrie », « Johans rois de Blaquie » (Villehardouin : chapitres 78 et 79) ou encore « Jehans li Blakis ». Les révoltes valaques sont appelées „Révoltes bulgares contre l’Empire byzantin (1040-1041)” par l’historiographie moderne bulgare et, à sa suite, internationale (comme on peut le lire dans « Istoriya na Balgariya », tome 3, Sofia, 1973, p. 140 à 272). Les historiens roumains ou bulgares protochronistes l'appellent respectivement « Empire roumano-bulgare » ou « Second Empire bulgare », chaque « camp » s'évertuant à nier ou relativiser le caractère composite et multiculturel de cet état. Côté bulgare, les protochronistes slavisent systématiquement tous les noms de lieux ou de personnes, engagement militant qui s'explique par le fait que l'Empire ottoman et la Roumanie ont jadis occupé des territoires bulgares, susceptibles d'être encore revendiqués par les ultra-nationalistes de ces pays voisins.
- La ligne Jireček du nom de l'épigraphiste et historien Konstantin Jireček, va de l'Adriatique à la mer Noire en longeant le Grand Balkan : au sud dominent les inscriptions grecques, au nord les inscriptions latines ; en Scythie mineure les deux coexistent.
- Concernant l'histoire des Valaques, la préférence donnée aux sources secondaires reproduites sans distance critique, revient à diffuser leurs nombreuses omissions et erreurs qui dessinent le mythe d'une « mystérieuse disparition » suivie d'une « miraculeuse réapparition » mille ans plus tard. Ce point de vue serait alors le seul admissible, alors que la mention ou citation des ouvrages de spécialité considérés comme « sources primaires » serait au mieux « du travail inédit ou de la recherche originale », au pire de la « désinformation » ou même du « vandalisme ». Quant à l'enrichissement ou la correction de cartes ou schémas existants mais incomplets ou erronés, en accord avec ces ouvrages de spécialité ou même avec des sources secondaires plus complètes (comme les grands Atlas historiques), elle contrevient à l'interdiction de les modifier (normalement réservé aux cartes patrimoniales anciennes pour en préserver l'authenticité) pour peu qu'un autre contributeur conteste la pertinence de la modification. Voilà pourquoi :
- la présence des langues romanes orientales n'est tout simplement pas mentionnée par les sources secondaires avant le XIIIe siècle au plus tôt (et souvent, pas avant l'émergence de la Roumanie en 1859), comme si ces langues avaient pu subitement apparaître un millénaire après la fin de l'empire romain le long du bas-Danube, en dépit des témoignages de Théophane le Confesseur, de Théophylacte Simocatta ou de Jean Skylitzès. Dans les cartes roumaines, l'ethnogenèse des Valaques est montrée, mais souvent de manière très chargée et confuse car une seule carte peut couvrir une période de plusieurs siècles. Il existe aussi des cartes, souvent inspirées des atlas scolaires russes, serbes ou bulgares, qui montrent de tout petits noyaux Valaques sur des aires uniques et extrêmement restreintes, soit dans le sud de la Transylvanie (cartes serbes), soit dans les actuels județe d'Olt et Teleorman (cartes bulgares), soit encore autour de Sofia en Bulgarie ou de Nish en Serbie (cartes russes). Si ces cartes étaient exactes, nous devrions rester abasourdis par l'extraordinaire et soudaine prolificité démographique et linguistique de ces noyaux valaques, qui, d'une aire initiale grande comme un ou deux départements français, finissent par s'étendre et par diffuser leurs langues du nord de la Grèce jusqu'au nord de la Hongrie et jusqu'à l'Ukraine, en recouvrant au passage le territoire des actuelles Roumanie et Moldavie ;
- entre la Rus' de Kiev et le Danube, dans les ouvrages et les cartes concernant les traditions religieuses (par exemple toutes les cartes des croisades) la Transylvanie est montrée comme intégralement catholique, les futures Moldavie et Valachie comme païennes, occultant ainsi la présence des orthodoxes (peu importe qu'ils aient été slaves ou valaques ou les deux), comme s'il n'y avait que des Magyars et des Allemands (catholiques) en Transylvanie, et comme s'il n'y avait que des Petchénègues et des Coumans (païens - en fait tengristes) dans les futures Moldavie et Valachie ;
- la présence des romanies populaires n'est absolument pas mentionnée dans les ouvrages non-roumains, tandis que dans les roumains, une période allant du VIIIe siècle au XIVe siècle est couverte, mêlant confusément des "valachies" (nom commun pour les romanies populaires) d'âges différents, certaines fictives ou très incertaines, mais citées par la Gesta Hungarorum (qui est une chanson de geste plutôt qu'un récit historique), à d'autres comme Seneslau ou Bârlad dont l'existence réelle est admise par les historiens universitaires ;
- concernant les trois principautés de Transylvanie, Valachie et Moldavie, là aussi la majorité des sources "grand public" non roumaines ne les mentionnent pas, mais figurent leurs territoires comme de simples parties et provinces des états voisins (Hongrie, Pologne, Empire ottoman) alors qu'elles en ont été vassales ou tributaires, mais non des provinces, et qu'elles ont même combattu leurs "suzerains" par les armes ;
- à ces erreurs s'ajoute une tendance générale à occulter ou minimiser la présence des Valaques dans l'espace balkanique, soit par ignorance (une ignorance bien sourcée, si on ne connaît et cite que des sources qui nient ou minimisent leur présence), soit par commode routine (recopier des sources secondaires est plus facile et moins sujet à polémiques), soit par nationalisme (par exemple en utilisant la polysémie du terme « valaque » pour nier à ces populations tout caractère ou origine romanophone) ;
- enfin le puissant mouvement protochroniste fait fi de toute déontologie et méthodologie scientifique pour véhiculer sur internet et dans les livres scolaires, des thèses fantaisistes qui font de la population majoritaire actuelle de chaque état, un isolat génétique ou linguistique soit intégralement autochtone et remontant directement aux populations locales les plus anciennes : par exemple, pour l'école protochroniste roumaine, les Daces seraient issus d'une très ancienne invasion « Aryenne », antérieure aux Latins et aux Grecs antiques qui n'auraient fait qu'imiter de manière bien pâle sa formidable avance spirituelle (avec religion monothéiste avant les Hébreux, et invention de l'écriture avant les Sumériens et les Égyptiens) voir Lucian Boia, (ro) Istorie și mit în conștiința românească (« Histoire et mythe dans la conscience roumaine »), éd. Humanitas, Bucarest 1997.
Références
- (en) « Romanian », sur ethnologue.com.
- Gheorghe D. Iscru, (ro) « Steagul Revoluției din 1821 », in Revista Arhivelor no 2/1981, p. 211
- Les populations valaques ou « Valachies » sont mentionnées dans des chroniques byzantines telles celles de Théophane le Confesseur, Théophylacte Simocatta, Constantin VII, Anne Comnène, Jean Skylitzès, Georges Cédrène ou Cécaumène, arabes comme celes d'Aboulféda ou de Rashid al-Din, occidentales comme Geoffroi de Villehardouin ou Robert de Clari, hongroises comme la Gesta Hungarorum ou les diplômes du roi Béla IV. Il ne faut pas confondre ces ϐλαχίες = valachies, avec les ϐαλαχάδες = valachades, beaucoup plus tardives, qui sont des communautés hellénophones musulmanes dont l'étymologie remonte au nom Allah et qu'évoque F. W. Hasluck dans son ouvrage Christianity and Islam under the Sultans, Oxford 1929.
- Westermann Grosser Atlas zur Weltgeschichte, 1985, (ISBN 3-14-100919-8) ; DTV Atlas zur Weltgeschichte, 1987 traduit chez Perrin, (ISBN 2-7242-3596-7) ; Putzger historischer Weltatlas Cornelsen, 1990, (ISBN 3-464-00176-8) ; Atlas historique Georges Duby chez Larousse 1987, (ISBN 2-03-503009-9) ; Série des « Atlas des Peuples » d'André et Jean Sellier à La Découverte : Europe occidentale : 1995, (ISBN 2-7071-2505-9), Europe centrale : 1992, (ISBN 2-7071-2032-4), Orient : 1993, (ISBN 2-7071-2222-X) ; Történelmi atlasz a középiskolák számára (« Atlas historique pour les collèges ») de Kartográfiai Vállalat Szerkesztőbizottsága, Budapest 1991, (ISBN 963-351-422-3).
- Gilles De Rapper, Pierre Sintès et Kira Kaurinkoski, Nommer et classer dans les Balkans : les Valaques, EFA [www.efa.gr] École française d'Athènes, Athènes, 2008, et De Boccard, Paris, (ISBN 978-2-86958-202-6)
- Dejan Dimitrijević : Les Valaques et la serbité CNRS-IDEMEC, Aix-en-Provence, 2003
- Jean-François Gossiaux : Valaques et/ou Aroumains en Bulgarie, CNRS-IDEMEC, Aix, 2003
- K. Sanfeld : Linguistique balkanique Klincksieck, Paris, 1930
- Nicolas Trifon : Les Aroumains, un peuple qui s'en va, Paris, (ISBN 2-909899-26-8)
- Tom Winnifruth : Romanized Illyrians & Thracians, ancestors of the modern Vlachs, Badlands-Borderland, 2006 (ISBN 0-7156-3201-9).
- Exemple: Карта расселения славян и их соседей на конец VIII века. Границы некоторых государств показаны начиная с VII в (« Carte des Slaves au VIIe siècle », par l'historien Youri Korjakov sur ), jusqu'à la modification du .
- Exemple : Euratlas historique, « carte de l'Europe en 1100 », sur .
- Exemple : Školski istorijski atlas, Zavod za izdavanje udžbenika SR Srbije (« Atlas historique », Belgrade 1970).
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- Dictionnaire étymologique PUF, Paris, 1950
- Également dans le Dictionnaire étymologique PUF, Paris, 1950
- Stelian Brezeanu, (en) Palaiovlachoi - Stari Vlah - A medieval Balkan history and toponymy, Istituto Romeno’s Publications, ed. GeoCities 2006 sur « https://www.webcitation.org/query?url=http://www.geocities.com/serban_marin/brezeanu2000.html »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?).
- Alexandru Avram, Mircea Babeş, Lucian Badea, Mircea Petrescu-Dîmboviţa et Alexandru Vulpe (dir.), Istoria românilor : moştenirea timpurilor îndepărtate (« Histoire des Roumains : l'héritage des temps anciens ») vol. 1, éd. Enciclopedică, Bucarest 2001, (ISBN 973-45-0382-0).
- Les « valachies », sont des régions ou des formations (canesats) pastorales habitées par des Valaques (țări, oláhszegek, wlachenländer) et gouvernées selon le vlach jog : cf. János Mihályi de l’université de Budapest : Máramarosi diplomák a XIV és XV századbol (Chartes de Marmatie des XIVe et XVe siècles), Sighet, 1900, p. 619 et suiv.; Alexandru Filipașcu de l’université de Cluj : L’ancienneté des Roumains de Marmatie (en français), éd. du Centre d’études et de recherches transylvaines de l'université Ferdinand-Ier de Sibiu, Bibliotheca rerum Transsilvaniae, 1945, p. 8 à 33.
- Jacques Bourcard, Les peuples des Balkans dans « La Géographie » no 4, Paris 1921.
- Gilles de Rapper & Pierre Sintès (dir.), Nommer et classer dans les Balkans, École française d'Athènes 2008
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- Les Valaques de la Krajina des Portes de Fer figuraient sur tous les Atlas avant Tito, comme Edgar Lehmann, Meyers Handatlas, 6a, Leipzig 1935 ; cf. aussi Comunitatea Românilor din Serbia, Raport de activitate, Vršac, 28.02.2009.
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- Raport de activitate 2009, Comunitatea Românilor din Serbia, Vršac, 28.02.2009.
- Păun S. Durlić : forum des Vlasi : .
- Paul Lemerle, Prolégomènes à une édition critique et commentée des « Conseils et Récits » de Kékauménos
- (ro) Ion Barnea et Ștefan Ștefănescu, Byzantins, roumains et bulgares sur le Bas-Danube (résumé en français de l'article en roumain), vol. 3, Bucarest, Editura Academiei Republicii Socialiste România, coll. « Bibliotheca historica Romaniae / Etudes » (no 9), , 439 p. (OCLC 1113905).
- Cornelia Bodea, Ștefan Pascu, Liviu Constantinescu : România : Atlas Istorico-geografic, Académie roumaine 1996, (ISBN 973-27-0500-0), chap. II, "Repères".
- Selon le chroniqueur byzantin Ioannis Skylitzès, in : Petre Ș. Năsturel : Études d'Histoire médiévale, Inst. d'Histoire "Nicolae Iorga", vol. XVI, 1998, et aussi d'après T.J. Winnifruth : Badlands-Borderland, 2003, page 44, Romanized Illyrians & Thracians, ancestors of the modern Vlachs, (ISBN 0-7156-3201-9), un échange de populations aurait eu lieu en 976 entre l'Empire byzantin et le royaume slave de Grande-Moravie : une partie des Serbes de la Serbie blanche, dont les descendants actuels sont les Sorabes de l'Allemagne orientale, seraient alors venus s'installer dans le bassin d'un affluent du Danube, le Margos, qu'ils nommèrent Morava, tandis que les Valaques de cette région, ayant résisté à la conquête byzantine de l'empereur Basile II qui avait confisqué leurs terres, seraient partis s'installer dans les pays tchèques, en Moravie septentrionale, où ils auraient formé la Valachie morave. Mais sur place, en Moravie, il n'y a ni mention écrite, ni preuve archéologique d'une telle immigration à cette date, et surtout, sur le plan linguistique, le dialecte aujourd'hui slave des Valaques de Moravie, mélange des langues slovaque et tchèque, comprend un lexique latin d'origine daco-roumaine lié au pastoralisme, avec des mots roumains comme bača (roum. „baci” : berger), brynza (roum. „brânză”: fromage, mot passé aussi en slovaque et en tchèque), cap (roum. „țap” : bouc), domikát (roum. „dumicat” : produit laitier), galeta/geleta (roum. „găleată” : baratte), pirt’a (roum. „pârtie”, chemin de transhumance), kurnota (roum. „cornută” : cornue) ou murgaňa/murgaša (roum. „murgașă”: brebis noire). C'est pourquoi les spécialistes tchèques comme Jan Pavelka, Jiří Trezner (dir.) : Příroda Valašska, Vsetín 2001, (ISBN 80-238-7892-1), pensent que les Valaques chassés de la vallée de la Margos comme le rapporte Skylitzès, ont plus probablement rejoint leurs congénères du Banat, de la Crișana et de Transylvanie, d'autant que les chroniques du moine russe Nestor y font allusion : Jean-Pierre Arrignon, Chronique de Nestor, Naissance des mondes russes, ed. Anacharsis, 2008, (ISBN 2-914777-19-1), cite :
« Depuis longtemps, les Slaves s'étaient installés sur les rives du Danube où vivent aujourd'hui les Bulgares et les Hongrois. [...] Venant de l'est, ils [les Magyars] traversèrent difficilement les grandes montagnes et commencèrent à affronter les Valaques voisins et les Slaves, car les Slaves s'y étaient installés les premiers mais les Valaques s'étaient emparés du territoire des Slaves »
; voir aussi Alexandru Madgearu dans The Romanians in the Anonymous Gesta Hungarorum: truth and fiction, Romanian Cultural Institute, Center for Transylvanian Studies, 2005, (ISBN 973-7784-01-4), Victor Spinei dans The Great Migrations in the East and South East of Europe from the Ninth to the Thirteenth Century, 2003, (ISBN 973-85894-5-2), p. 52 et The Romanians and the Turkic Nomads North of the Danube Delta from the Tenth to the Mid-Thirteenth century, Koninklijke Brill NV, 2009, (ISBN 978-90-04-17536-5), p. 73. Selon ces spécialistes, c'est bien plus tard, du XVe au XVIIe siècle, que les groupes de bergers roumains seraient partis du Banat et de la Crișana pour s'installer en Moravie orientale. - Théophane le Confesseur et Cédrène, in : Nicolae Iorga, Teodor Capidan, Constantin Giurescu : Histoire des Roumains, ed. de l'Académie Roumaine
- Asterios Koukoudis, The Vlachs : Metropolis and Diaspora, éd. Zitros, Thessaloniki 2003, (ISBN 9789607760869) ; le pays de Skourta et ses villages valaques figurent encore au XIXe siècle sur la carte , mais y sont considérés par erreur comme Slaves.
- (en)Jean W. Sedlar, East Central Europe in the Middle Ages, 1000–1500 [« L’Europe Centrale et de l’Est au Moyen Âge »], University of Washington Press, 2011 (ISBN 0-295-97291-2), p. 404.
- Marian Wenzel, Bosnian and Herzegovinian Tombstobes-Who Made Them and Why?" Sudost-Forschungen 21(1962): 102-143
- Ante Milošević, Stećci i Vlasi: Stećci i vlaške migracije 14. i 15. stoljeća u Dalmaciji i jugozapadnoj Bosni « Les Stećci et les migrations des Valaques aux XIV et XV-e siècles en Dalmatie et Bosnie du Sud-Ouest » (en Croate), 1991
- John V. A. Fine, John Van Antwerp Fine, The Late Medieval Balkans: A Critical Survey from the Late Twelfth Century, University of Michigan Press, 1994, p. 19.
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- "Hronicon a toată Țara Românească (care apoi s-u împărțit în Moldova, Munteniască și Ardealul)…", D. Cantemir, Hronicul vechimei româno-moldo-vlahilor, in Operele Principelui Dimitrie Cantemir, Academia Română, Bucarest, 1901
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- Atlas historique publié en français par Stock, Perrin et France-loisirs, (ISBN 2-7242-3596-7) ; la vassalité envers les Mongols et Tatars est en fait attestée pour les Roms, voir Stéphane Zweguintzow, article Les Roma de l'ex-URSS dans « Échos de Russie et de l'Est », éd. B. de Saisset, 1994 et Régis Blanchet, Un peuple-mémoire, les Roms, éd. du Prieuré, (ISBN 2-9096-7281-6), mais la confusion entre Roumains et Roms est fréquente dans les sources secondaires et certains politiciens la propagent sciemment, tel Vladimir Jirinovski qui considère que « les Roumains sont un mélange de colons italiens venus sur les nefs génoises et de Tziganes danubiens, qui a envahi des terres appartenant légitimement à la Bulgarie, à la Hongrie et à la Russie », cité sur : et sur : .
- Eduard-Robert Rössler (1836-1874) développe, dans (de) Romänische Studien : untersuchungen zur älteren Geschichte Rumäniens, Leipzig 1871, les théories de Franz-Josef Sulzer et de Josef-Karl Eder, intégralement adoptées en France par le Dictionnaire historique de Michel Mourre (dir.), qui, dans son article sur l'histoire ancienne des Roumains, qualifie les thèses roumaines, sans plus d’analyse, de « nationalistes et infondées ».
- Béla Köpeczi (dir.), (hu) Erdély rövid története, plusieurs fois réédité chez Akadémiai Kiadó (ISBN 963 05 5901 3) (abrégé (fr) ici Histoire de la Transylvanie, Budapest, Akademiai Kiadó, 1992.
- Développée par Edouard Robert Rössler qui s'appuie sur les récits d'Eutrope.
- Du nom de l'historien autrichien Eduard Robert Rössler (1836-1874) qui la popularisa au XIXe siècle.
- Béla Köpeczi (dir.) dans (hu) Erdély rövid története, rééditions successives Akadémiai Kiadó, (ISBN 963 05 5901 3)
- Ovid Sachelarie, Nicolae Stoicescu (coord.), (ro) Instituţii feudale din ţările române, éd. de l'Académie roumaine, Bucarest 1988.
- Ovid Densușianu, Sextil Pușcariu, Alexandru Rosetti, Theodor Capidan, A.D. Xenopol, Gustav Weigand (en)
- Roumen Daskalov, Alexander Vezenkov, (en) « Entangled Histories of the Balkans - Shared Pasts, Disputed Legacies » Vol. III in Balkan Studies Library, Brill 2015, (ISBN 9004290362), pp. 289-316.
- A une seule exception près : André et Jean Sellier : Atlas des peuples d'Europe centrale, La Découverte, (ISBN 2-7071-2032-4), carte de l'expansion des Slaves, p. 12, par Anne Le Fur
- C'est entre autres le cas dans le Dictionnaire historique français de Michel Mourre (dir.) qui, dans son article sur les origines des Roumains, adopte intégralement le point de vue des auteurs austro-hongrois et qualifie les thèses roumaines, sans plus d'analyse, de « nationalistes et infondées ».
- Gheorghe I. Brătianu, (ro) O enigmă și un miracol istoric: poporul român, ed. Fundația Academia Civică, Bucarest 2019, (ISBN 9786068924069)).
- Catherine Asdracha, G. Giuglea, Alexandru Graur, Ion Coteanu, Alexandru Niculescu, Karl Sanfeld, Pierre Sintès.
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- Fr. Miklosich, (de) Über die Wanderungen der Rumänen (« Sur les migrations des Roumains »), Vienne 1879.
- Selon les historiens Nicolae Iorga, Teodor Capidan, Constantin Giurescu : Histoire des Roumains, ed. de l'Académie Roumaine ; Petre Ș. Năsturel : Études d'Histoire médiévale, Inst. d'Histoire "Nicolae Iorga", vol. XVI, 1998, une « romanie populaire » n'est pas un État, mais une communauté rurale autonome qui peut être slavo-roumaine durant une période de son évolution, et se trouver dans l'obédience d'un État plus structuré comme, par exemple, la principauté de Galicie-Volhynie.
- Kristian Sandfeld-Jensen : Linguistique balkanique : problèmes et résultats, Klincksieck et Champion, coll. de la Société linguistique de Paris, 1930
- (en) J. Lindstedt, « Linguistic Balkanization : contact-induced change by mutual reinforcement », dans D. G. Gilbers, Languages in Contact, Amsterdam & Atlanta (Georgia), 2000, (ISBN 90-420-1322-2), chap. 28, p. 231–246.
- Neagu Djuvara sur .
Voir aussi
Articles connexes
- Valachie
- Thraco-Romains
- Daco-Roumains
- Aroumains
- Mégléno-Roumains
- Istro-Roumains
- Rex Bulgarorum et Blachorum
- Valaques de Bulgarie
- Roumanophones de Serbie
- Liste de personnalités d'origine aroumaine
- Chapeau à la valaque
- Volochovènes
- Le Courrier des Balkans, journal d'informations sur les pays d'Europe du Sud-Est.
Liens externes
- Les Aroumains, by Université Laval Montreal
- Mavro-Valaques (pag.124)
- Wallachians, Walloons, Welschen, etc.
- Studies on the Vlachs by Asterios Koukoudis
- Trâ Armânami.org Association des Français aroumains, Paris
- Association de Valaques, Veria
- Les Aroumains en Grèce
- Jean-François Gossiaux (EHESS, Paris): Les Valaques (séminaire de recherche organisé en 2005 et diffusé en ligne sur les Archives Audiovisuelles de la Recherche)
- (étymologie)
- Studies on the Vlachs' religion
Bibliographie
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- Dejan Dimitrijevic, Les Valaques et la serbité, Aix-en-Provence, CNRS-IDEMEC, .
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- Nicolae Iorga : Histoire des (A)roumains de la péninsule des Balkans. Université de Bucarest, 1919.
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- Jules Michelet : Légendes démocratiques du nord. PUF. Paris, 1968.
- Adrian Rădulescu et Ion Bitoleanu, Histoire de la Dobrogée, Constanța, Editura Ex Ponto, , 534 p. (ISBN 973-9385-32-X)résumé français
- François Pouqueville, Mémoire sur les colonies valaques établies dans les montagnes de la Grèce depuis Fienne jusque dans la Morée, Ernest Desplaces, Paris 1834, dans « Biographie Universelle », Louis Gabriel Michaud, vol. 34, sur .
- Alexandru Rosetti, Histoire de la langue roumaine des origines à nos jours, Mouton, Paris, 1973.
- Kristian Sandfeld-Jensen : Linguistique balkanique. Klincksieck, Paris, 1930.
- (de) Albert Schott, Arthur Schott, Walachische Maehrchen, Stuttgart, Tübingen, 1845 (Google Books)
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- George Vâlsan, Graiul românesc, I, 1927, nr. 7, p. 142 et Œuvres posthumes, Bucarest, 1936, p. 49
- Tom Winnifruth : Romanized Illyrians & Thracians, ancestors of the modern Vlachs. Badlands-Borderland, 2006 (ISBN 0-7156-3201-9).
- Charles Lemercier de Longpré, baron d'Haussez, Alpes et Danube ou voyages en Suisse, Styrie, Hongrie et Transylvanie, Volume 2, cf. commentaires sur les Valaques pp. 209-210 (lire en ligne), p. 219 (lire en ligne) & pp. 315-318 (lire en ligne), Paris, Ambroise Dupont, 1837.
- Auguste de Gérando, La Transylvanie et ses habitants, Volume I, cf. commentaires sur les Valaques pp. 309-349 (lire en ligne), Paris, Imprimeurs-Unis, 1845.
- Jânos Boldényi, La Hongrie ancienne et moderne: histoire, arts, littérature, monuments, cf. commentaires sur les Valaques, partie II, pp. 59-71 (lire en ligne), Paris, H. Lebrun, 1851.