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Coumans

Les Coumans[1], Kipchaks ou Polovtses[2] (appelés aussi Cumans, Comans, Kaptchaks, Quiptchaques ou Koumans, Kumanlar en turc, kunok en hongrois, Cumani en roumain, Половці en ukrainien, Половцы en russe, Кумани en bulgare, Қыпшақ (Qīpshaq) en kazakh) sont un peuple Turcophone nomade, initialement de religion tengriste, qui occupa du XIe siècle au XIIIe siècle un vaste territoire s'étendant de l'Irtych à la mer Noire. Formant originellement deux groupes de tribus distinctes, Kipchaks et Coumans finirent par former un même grand ensemble[3].

Coumans
(vieux turc) Kiptchaks

IXe siècle – 1241

Description de cette image, également commentée ci-après
Territoire couman vers 1200 (« Kipchak (Cuman) Khanates »).
Informations générales
Statut Khanat
Histoire et événements
IXe siècle Établissement des Coumans entre la Volga et l'Oural
XIe siècle Installation dans la steppe pontique, territoire des Petchenègues
1241 Défaite face aux Mongols et intégration à leur empire

Entités précédentes :

Entités suivantes :

En 888, les Coumans, alors établis entre les fleuves Oural (Iaïk) et Volga, avaient chassé les Petchénègues de ces territoires. Au XIe siècle, ils migrèrent vers l'ouest sur la steppe pontique à travers l'actuelle Ukraine méridionale, dans les bassins du bas-Don, du bas-Dniepr, du bas-Dniestr et du bas-Danube, entre la mer Noire et la Rus' de Kiev qu'ils affrontent au XIIe siècle. Au XIe siècle, les Coumans se répandent dans les territoires peuplés de Valaques et de Magyars, qui formeront plus tard la Moldavie, la Valachie et la Transylvanie. De là, ils mènent des campagnes de pillage dans l'Empire byzantin, dans le royaume de Hongrie, en Serbie et dans le royaume bulgaro-valaque. Lorsqu'ils sont vaincus, ils s'engagent comme mercenaires et passent au christianisme. Parmi les Bulgares, les Valaques et les Magyars, ils s'intègrent à l'aristocratie des voïvodes, des boyards, des joupans et des ispán : c'est ainsi qu'en Hongrie ils s'établirent dans la région appelée depuis Coumanie tandis qu'en Valachie ils auraient pu être, selon certains auteurs, à l'origine de la dynastie des Basarab[4]. Un esclave kiptchak qui sera connu sous le nom de Baybars deviendra sultan d'Égypte.

Étymologie

Les Coumans étaient probablement alliés aux Alains (peuple iranien) et tiraient leur nom du mot turc kum, le « sable », également à l'origine du mot « koumyk » (peuple qui affirme descendre des Coumans).

Histoire

Origines

La confédération des Kiptchaks-Coumans en Eurasie vers 1200.
Masque de combat couman.

Les Coumans sont originaires des confins de la Sibérie orientale près de l'actuelle frontière chinoise. Ils auraient ensuite migrés dans l'ouest de la Sibérie au IXe siècle, pour continuer ensuite encore plus à l'ouest dans la région de la basse-Volga.. Les Coumans auraient habité ainsi à l'origine, la steppe eurasienne avant d'entrer dans la steppe pontique, en Europe de l'Est, au XIe siècle.

Essor

Originellement liés aux kimeks, ils se séparent vers le milieu du XIe siècle. Ils s'étendent alors vers l'ouest, chassent les petchénègues et s'établissent de l'Irtych jusqu'à la mer Noire, leur territoire étant délimité au sud par le lac Balkach, le Syr-Daria, la mer d'Aral, la mer Caspienne et le Kouban. Ils ne forment cependant pas un Khaganat à proprement parler, mais un ensemble de tribus dirigées chacune par un Khan indépendant. Ils s'allient de 1087 à 1091 à l'Empire byzantin pour combattre les petchénègues, qui s'étaient attaqués aux byzantins après avoir étés chassés.

À la fin du XIe et du début du XIIe siècle, ils entrent successivement en conflit avec le Kwarezm, les Karakhanides, la Rus' de Kiev, les Magyars. Au contact des deux premiers, nombre d'entre eux se convertissent à l'Islam[3].

L'histoire des Kipchaks orientaux est mal connue, cependant, les Kipchaks occidentaux sont mieux connus, notamment grâce aux écrits des byzantins et des slaves. 1089, ils furent vaincus par le roi Ladislas Ier de Hongrie puis de nouveau, par la Rus' de Kiev de Vladimir II Monomaque, qui réussit à repousser les Coumans au-delà du fleuve Don. Sous leur khan Kontchak, ils interférèrent dans les guerres féodales russes et ils affrontèrent Igor, le prince de Novhorod-Siverskyï en 1185. Alliés du prince Rurik Rostislavitch, chassé du pouvoir par un autre prince russe et appuyé sur des Polovtses pour remonter sur le trône, ils s'emparèrent de Kiev en 1203. Les Coumans et les Russes s'allièrent cependant face à l'invasion mongole de 1223, mais ils furent écrasés par les Mongols en 1241.

Postérité

Les Coumans se dispersèrent après la conquête de leur territoire par les Mongols de Batu, et se mêlèrent à de nombreux autres peuples, comme les Tatars de Crimée, les Nogaïs du Caucase, les Bachkirs et les Kazakhs d'Asie centrale, peut-être les Gagaouzes d'Europe orientale.

Ils donnèrent leur nom au khanat mongol de la Horde d'or, aussi appelé khanat de Kiptchak, sur lequel régnèrent aux XIIIe et XIVe siècles les descendants de Djötchi, fils aîné de Gengis Khan, et qui, outre leur domaine d'origine, englobait une bonne partie de l'actuel Kazakhstan et du Sud-Ouest de la Sibérie où la steppe était jusqu'en 1920 appelée « steppe des Kiptchaks ».

Les Coumans restés à l'est et au sud des Carpates s'établirent dans un pays nommé par les Magyars Grande-Coumanie (Nagy-Kunorszag), dans une zone où ils contribuèrent à la fondation des principautés roumaines de Moldavie et Valachie. Ils s'établirent aussi dans le comté transylvain de Bârsa où ils furent combattus par l'Ordre Teutonique envoyés par le roi André II de Hongrie.

Les trouvailles archéologiques facilement attribuables à la civilisation coumane sont rares, car les Coumans étaient peu nombreux et s'assimilèrent aux populations environnantes. Les Coumans établis dans le bassin du bas-Danube donneront quatre dynasties au royaume bulgaro-valaque : les Assénides, les Terterides (en), les Chichmanides (dont le fondateur fut un boyard bulgare d'origine coumane nommé Shishman) et les Basarab (du couman Basar-Ata : « puissant père ») qui fondèrent plus tard la principauté de Valachie[5].

Description

Sculpture du XIIe siècle représentant un Couman (Louhansk, Ukraine).
Les Coumans dans la Chronique des Radziwiłł.
Le roi Ladislas Ier de Hongrie (à gauche) poursuivant les Coumans[6] (peinture murale de l'église de Kraskovo, Slovaquie, vers 1300).

Les Coumans furent décrits comme des guerriers nomades, vivant dans des tentes de feutre, et qui se nourrissaient surtout de lait, de fromage et de viande. Ils étaient vêtus de peaux de mouton et étaient armés d'arcs composites. Leurs chevaux avaient un sac pour l'alimentation attaché à la bride et selon la légende, en un jour et une nuit, ils pouvaient parcourir l'équivalent de sept jours de marche (soit environ 150 km). Ils partaient en campagne sans aucun bagage, et quand ils revenaient ils prenaient tout ce qu'ils pouvaient transporter. Une caractéristique typique des Coumans était le port de la moustache. Leur costume traditionnel se composait d'un pantalon et d'un caftan, chacun attaché par une ceinture. Les hommes étaient rasés au sommet de leur tête, tandis que le reste de la chevelure était tressée en plusieurs nattes. Cette tenue a été portée par les cosaques jusqu'au XVIIIe siècle. Les Coumans portaient couramment des chapeaux pointus en feutre. Une autre caractéristique des Coumans était leurs masques raffinés dont ils se servaient dans la bataille et qui protégeaient et masquaient leur visage.

Selon les descriptions de l'époque, les Coumans étaient « beaux, blonds aux yeux bleus »[7] et se distinguaient physiquement de leurs voisins petchénègues, décrits comme des gens « trapus, laids, au teint olivâtre et aux longs cheveux noirs »[8].

Langue

Une page du Codex cumanicus, manuel linguistique du Moyen Âge destiné à la communication avec les Coumans, ou Polovtses.

La langue kiptchak constitua longtemps une lingua franca, une sorte de turc « moyen », dans les relations avec les marchands génois et vénitiens installés dans les comptoirs de Crimée. Un document d'un intérêt tout particulier, le Codex cumanicus écrit au XIIIe siècle et conservé à la Biblioteca Marciana de Venise, donne des lexiques dans cette langue.

Leur influence laissa un certain nombre de toponymes ou de noms de famille dans les pays de l'Est. Ainsi, par exemple, en hongrois, Kun signifie Couman et, en roumain, il existe des noms de famille assez répandus, Coman, Comaniciu, Nadia Comăneci|Comăneci, ainsi que des noms de localités : Comana, Comăna de Jos, Comăna de Sus, Comăneşti, ainsi de suite.

Les derniers locuteurs du kiptchak disparurent seulement au début du XXe siècle : il ne s'agissait pas de populations turques mais d'Arméniens et de Juifs qui avaient fui l'Anatolie durant les invasions turques du XIe siècle et étaient arrivés en Pologne-Lituanie au XIVe siècle. Durant leur périple, ils avaient emprunté la langue vernaculaire des Coumans et parlaient l'arméno-kiptchak et le judéo-kiptchak. En 1930, à Cracovie, on trouvait encore de vieux Arméniens polonisés sachant chanter de vieilles comptines kiptchaques. En Hongrie, le dernier locuteur connu de la langue coumane, István Varró, est mort en 1770.

Religion

Dans le Caucase, les Coumans se convertirent au christianisme vers le XIe siècle à la suggestion des Géorgiens, lorsqu'ils furent leurs alliés dans leurs luttes contre les musulmans. Un grand nombre furent baptisés du temps du roi David IV de Géorgie. À partir de 1120, il y eut même une église chrétienne kipchaque et un clergé important. Au XIIIe siècle, en Hongrie, les Coumans occidentaux de la Petite-Coumanie (Kis-Kun) adoptèrent le catholicisme (mais devinrent calvinistes plus tard). Les Coumans de Hongrie composaient aussi une partie de l'archidiocèse d'Esztergom. Le diocèse catholique de la Grande-Coumanie (Nagy-Kun) fut fondé à Milcov en 1227 et comprenait les régions de Valachie et Moldavie, aujourd'hui en Roumanie et république de Moldavie. Ce diocèse dura jusqu'en 1523. Puis, aux XIIe et XIIIe siècles, l'islam se propagea à son tour parmi les Coumans, mais en 1241, leur conversion aux religions monothéistes était inachevée, comme en témoignent les funérailles d'un chef mercenaire couman du nom de Jonas, au service de Baudouin II de Courtenay, qui furent accompagnées de sacrifices d'hommes et de chevaux[9].

Musique

En musique, ils sont associés aux célèbres Danses polovtsiennes de l'opéra Le Prince Igor d'Alexandre Borodine. L'œuvre a visiblement été inspirée par Le Dit de la campagne d'Igor.

Notes et références

Cet article comprend des extraits du Dictionnaire Bouillet. Il est possible de supprimer cette indication, si le texte reflète le savoir actuel sur ce thème, si les sources sont citées, s'il satisfait aux exigences linguistiques actuelles et s'il ne contient pas de propos qui vont à l'encontre des règles de neutralité de Wikipédia. Les informations données sont peut-être désormais erronées ou incorrectes : vous pouvez partager vos connaissances en améliorant ou en modifiant cet article.
  1. Anciennement appelés Com(m)ans ou Com(m)ains par certains chroniqueurs et historiens français.
  2. Signifiant en russe « de couleur fauve ».
  3. Iaroslav Lebedynsky, Les Nomades, Les peuples nomades de la steppe des origines aux invasions mongoles (IXe siècle av. J.-C. - XIIIe siècle après J.-C.), troisième édition., éditions errance, , 305 p., p. 256-260
  4. László Rásonyi, Contributions à l’histoire des premières cristallisations d’état des Roumains : L’origine des Basarab dans „Archivum Europae Centro Orientalis”, I, Budapest, 1935 (pp. 240, 242, 253) : Basarab pourrait venir du couman Basar-Ata : « puissant père »).
  5. Rásonyi László, Op. cit. Budapest, 1935 (pp. 240, 242, 253).
  6. Reconnaissables à leurs longs cheveux blonds et à leurs chapeaux pointus.
  7. Robert Lee Wolff, Studies in the Latin Empire of Constantinople, Variorum, 1976, p. 199.
  8. Ian Heath, Armies of Feudal Europe 1066-1300, Lulu.com, 2016, p. 219.
  9. Geoffroy de Ville-Hardouin (trad. du Cange), « Mémoires de Geoffroy de Ville-Hardouin », in : Décadence de l’Empire latin, pp. 499–500.

Voir aussi

Bibliographie

  • Robert de Clari, La Conquête de Constantinople, Bibliothèque de la Pléiade, « Historiens et Chroniqueurs du Moyen Age », Gallimard, Paris, 1952.
  • Chronique des Radziwiłł.
  • (en) István Vásáry, Cumans and Tatars : Oriental Military in the Pre-Ottoman Balkans, 1185–1365, Cambridge University Press, 2005, (ISBN 1139444085).
  • (en) Victor Spinei, The Romanians and the Turkic Nomads North of the Danube Delta from the Tenth to the Mid-Thirteenth Century, BRILL, 2009, (ISBN 9004175369).
  • (en) Peter B. Golden, Nomads and their Neighbours in the Russian Steppe : Turks, Khazars and Quipchaqs. Ashgate, 2003, (ISBN 0-86078-885-7).
  • Michel Balard, Alain Ducellier, Migrations et diasporas méditerranéennes (Xe -XVIe siècles), Actes du Colloque de Conques (), Publications de la Sorbonne, 2002.
  • (en) András Pálóczi-Horváth, Pechenegs, Cumans, Iasians : steppe peoples in medieval Hungary, Corvina, 1989.
  • Bernard Le Calloc'h, Des asiatiques en Hongrie : Khazars, Kabars et Alains, L'Harmattan, 2013, (ISBN 2343001901).

Articles connexes

Liens externes

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