Acarnanie
LâAcarnanie (en grec ancien : áŒÎșαÏÎœÎ±ÎœÎŻÎ± / AkarnanĂa ; en latin classique : AcarnÄnÇa, -ae) est une rĂ©gion traditionnelle de la GrĂšce occidentale, dĂ©limitĂ©e au nord par le golfe Ambracique, Ă lâouest et au sud-ouest par la mer Ionienne. Ă lâest, le fleuve AchĂ©loos la sĂ©pare de lâĂtolie.
Histoire
Mythologie
DâaprĂšs le tĂ©moignage de Pline l'Ancien[1], au sein de la GrĂšce antique lâAcarnanie se serait dâabord appelĂ©e CurĂ©tide (CĆ©rÄtis, -Çdis).
Selon la mythologie grecque, elle aurait Ă©tĂ© fondĂ©e par Acarnan, fils dâAlcmĂ©on.
Ses premiers habitants sont :
- Les CurĂštes (ÎÎżÏ ÏáżÏΔÏ) ;
- Les TĂ©lĂ©boens (΀ηλΔÎČÏαÎč ; TÄlÄbÇae, -Ärum), venus des Ăźles TĂ©lĂ©boĂŻdes (TÄlÄbÇides insÇlae) ou Taphies (TaphÇae) et qui colonisĂšrent l'Ăźle de CaprĂ©e, en face de Sorrente ;
- Les LĂ©lĂšges (ÎÎÎ»Î”ÎłÎ”Ï ; LÄlÄges, -um) de Locride, Carie et Thessalie.
PĂ©riodes archaĂŻque et classique
Elle est composĂ©e de pĂłleis, colonies fondĂ©es, entre autres, par les Corinthiens â Leucade dans lâĂźle Ă©ponyme, Anactorion et Solion â au VIIe siĂšcle av. J.-C. ainsi que dâĂ©thnÄ (clans).
ĂloignĂ©e de la GrĂšce des citĂ©s, lâAcarnanie passe aux yeux des autres Grecs pour une contrĂ©e semi-barbare. Thucydide indique quâelle vit, Ă lâinstar de la Locride ozolienne et de lâĂtolie, « Ă la maniĂšre ancienne » (I, V, 3), câest-Ă -dire de pastoralisme, de piraterie et de brigandage. Elle Ă©merge au Ve siĂšcle comme enjeu de bataille entre Sparte et AthĂšnes, pendant la guerre du PĂ©loponnĂšse.
LâAcarnanie est une alliĂ©e dâAthĂšnes durant la guerre du PĂ©loponnĂšse. Elle se rapproche de Sparte en -388 mais adhĂšre, en -375, Ă la deuxiĂšme alliance maritime athĂ©nienne : Ă ChĂ©ronĂ©e, en -338, deux mille hoplites acarnaniens combattent au cĂŽtĂ© des AthĂ©niens contre Philippe II de MacĂ©doine.
PĂ©riode Ă©pirote
Vers -281, Pyrrhos Ier dâĂpire semble exercer lâhegemon sur lâAcarnanie. La domination Ă©pirote se prolonge jusquâĂ la Guerre chrĂ©monidĂ©enne (-267 - -262) : Alexandre II dâĂpire cherche refuge en Acarnanie aprĂšs son Ă©chec face aux MacĂ©doniens, et ses alliĂ©s acarnaniens et Ă©toliens lâaident Ă recouvrer son royaume.
Vers -263 ou -262, une alliance assortie dâune isopolitie unit Ătoliens et Acarnaniens. Mais, dix ans plus tard (-253 ou -252), lâAcarnanie est partagĂ©e entre l'Ăpire et les Ătoliens, puis elle est soumise par les MacĂ©doniens en -225.
PĂ©riode romaine
Alliés de Philippe V de Macédoine dans la DeuxiÚme Guerre macédonienne, les Acarnaniens entrent dans la clientÚle de Rome aprÚs -197.
Ses principales cités sont Stratos et Leucade.
En -27, lâAcarnanie est incorporĂ©e Ă lâAchaĂŻe, province romaine comprenant la GrĂšce proprement dite, y compris lâĂpire mĂ©ridionale et la Thessalie, ainsi que les Ăźles de la mer ĂgĂ©e : lâarchipel des Sporades et une partie de celui des Cyclades, et de la mer Ionienne.
Dans lâEmpire romain d'Orient, lâAcarnanie fait partie de lâĂpire ancienne (Epirus vetus), province comprenant, en outre, lâĂpire antique et les Ăźles de Corcyre et dâIthaque, et relevant du diocĂšse de MacĂ©doine et de la prĂ©fecture dâIllyrie, dont le vicaire et le prĂ©fet rĂ©sident Ă Thessalonique.
PĂ©riode byzantine
« Empire byzantin » est le nom moderne Ă lâEmpire romain dâOrient depuis Hieronymus Wolf (XVIe siĂšcle). Vers 886, sous le rĂšgne de lâempereur LĂ©on VI le Sage, lâAcarnanie fait partie du thĂšme de Nicopolis, ayant Naupacte pour chef-lieu. Elle accueille, au XIe siĂšcle, de nombreux Valaques venus de MĂ©sie, fuyant les ravages de la guerre bulgaro-byzantine menĂ©e par lâempereur Basile II : le chroniqueur Jean Apokaukos nomme alors lâAcarnanie Petite Valachie (ÎÎčÎșÏÎź ÎλαÏία) par diffĂ©rence avec la Thessalie, oĂč ils Ă©taient encore plus nombreux et que ThĂ©ophane le Confesseur et Georges CĂ©drĂšne nomment Grande Valachie (ÎΔγΏλη ÎλαÏία)[2]. Progressivement, ces valaques romanophones sâhellĂ©nisent.
LorsquâĂ partir de 1204, la QuatriĂšme croisade provoque la fragmentation lâEmpire byzantin en Ă©tats grecs et latins, lâAcarnanie Ă©choit dâabord Ă un Ă©tat grec, le Despotat d'Ăpire de la dynastie Doukas, puis au duchĂ© latin de la famille Orsini. Elle tombe entre les mains des Ottomans au XVe siĂšcle et fait partie de la GrĂšce indĂ©pendante depuis le XIXe siĂšcle.
PĂ©riode ottomane
Le duc latin Carlo Ier Tocco partage ses possessions entre ses fils et son neveu. LâAcarnanie est partagĂ©e entre Memnon, Turnus et Ercole, lâĂtolie revenant Ă son neveu Carlo II Tocco, fils de son frĂšre LĂ©onard. Memnon, Turnus et Ercole se disputent entre eux lâhĂ©ritage paternel jusquâĂ ce que Memnon appelle le sultan turc Mourad Ă son secours. Ce dernier feint dâĂ©couter sa demande et envoie une partie de son armĂ©e sous les ordres de Kharadja Pacha en Acarnanie. En 1480, lâAcarnanie est conquise par lâEmpire ottoman. Elle fait partie du sandjak de CarlĂ©lie (Karl-ili soit « province de Carlo ») qui relĂšve de lâeyalet des Ăźles et de la mer MĂ©diterranĂ©e (en turc : Cezayir-i Bahr-i Sefid Eyaleti ou Cezayir-i Bahr-i Sefid BeylerbeyliÄi), administrĂ© par le capitan pacha (Kaptan PaĆa ou Kaptan-ı derya), puis de lâeyalet de MorĂ©e (Mora Eyaleti ou Mora Eyaleti).
Par le protocole du , la ConfĂ©rence de Londres attribue lâAcarnanie et lâĂtolie Ă la GrĂšce, moyennant le versement dâune compensation financiĂšre Ă la « Sublime Porte »[3]. Lâattribution est confirmĂ©e par le traitĂ© de Londres du [4].
Seconde guerre mondiale
Pendant lâOccupation, lâAcarnanie est d'abord occupĂ©e par lâItalie fasciste, puis, Ă partir dâoctobre 1943, par la Wehrmacht du TroisiĂšme Reich, qui se heurte Ă la RĂ©sistance grecque, laquelle finit par libĂ©rer le pays Ă lâautomne 1944.
Aujourdâhui
LâAcarnanie forme, avec lâĂtolie, le district rĂ©gional dâĂtolie-Acarnanie qui relĂšve de la pĂ©riphĂ©rie (ÏΔÏÎčÏÎÏΔÎčα / perifĂ©ria) de GrĂšce-Occidentale (en grec : ÎÏ ÏÎčÎșÎź ÎλλΏΎα).
Notes et références
- Pline l'Ancien, Histoire naturelle, IV, 5.
- Asterios Koukoudis, The Vlachs : Metropolis and Diaspora, Ă©d. Zitros, Thessaloniki 2003, (ISBN 9789607760869).
- Protocole du 26 septembre 1831 : « LâĂtolie et lâAcarnanie sont des pays arides et pauvres, dont la population, peu nombreuse mais guerriĂšre, ne sâest, dans aucun temps, entiĂšrement soumise Ă lâautoritĂ© de la Porte. La possession de ces deux districts, loin dâassurer Ă lâEmpire ottoman un accroissement de revenu ou de puissance, nâest donc pour lui quâune source dâinquiĂ©tude et de trouble, tandis quâelle donnerait au Gouvernement grec une bonne frontiĂšre, une sĂ©curitĂ© complĂšte et les moyens dâentretenir avec la Turquie des relations de bon voisinage, mutuellement indispensables. Ces motifs sembleraient devoir porter le Gouvernement turc Ă accepter lâĂ©quivalent qui lui sera proposĂ© ».
- Traité de Londres du 7 mai 1832, article 5 : « Les limites définitives du territoire Grec seront telles qu'elles résulteront des négociations que les Cours de France, de la Grande-Bretagne et de Russie viennent d'ouvrir avec la Porte Ottomane, en exécution du Protocole du 26 septembre 1831 ».