Ithaque
Ithaque (en grec : ÎΞΏÎșη / IthĂĄki ou ÎÎčÎŹÎșη / ThiĂĄki pour ses habitants ; en grec ancien : áŒžÎžÎŹÎșη / IthĂĄkĂȘ ou ΊΔΏÎșη / PheĂĄkĂȘ) est une Ăźle de la mer Ionienne, Ă l'ouest de la GrĂšce continentale et au nord-est de l'Ăźle de CĂ©phalonie. Elle fait partie de lâarchipel des Ăźles Ioniennes et compte prĂšs de 3 200 habitants pour une superficie de 96 km2[1]. Son chef-lieu est Vathy.
Ithaque ÎΞΏÎșη (el) | |||
Vathy. | |||
GĂ©ographie | |||
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Pays | GrĂšce | ||
Archipel | Ăles Ioniennes | ||
Localisation | Mer Ionienne (Mer Méditerranée) | ||
CoordonnĂ©es | 38° 25âČ N, 20° 40âČ E | ||
Superficie | 96 km2 | ||
CĂŽtes | 101 km | ||
Point culminant | Mont Niritas (784 m) | ||
Administration | |||
PĂ©riphĂ©rie | Ăles Ioniennes | ||
District régional | Ithaque | ||
DĂšme | Ithaque | ||
DĂ©mographie | |||
Population | 3 201 hab. (2001) | ||
Densité | 33,34 hab./km2 | ||
Plus grande ville | Vathy | ||
Autres informations | |||
Fuseau horaire | UTC+02:00 | ||
Site officiel | www.ithaki.gr | ||
GĂ©olocalisation sur la carte : Ăles Ioniennes (pĂ©riphĂ©rie)
GĂ©olocalisation sur la carte : GrĂšce
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Ăle en GrĂšce | |||
Depuis janvier 2011, et le programme Kallikratis, elle forme la partie principale du district rĂ©gional d'Ithaque, au sein de la pĂ©riphĂ©rie des Ăles Ioniennes. Auparavant, elle constituait avec lâĂźle de CĂ©phalonie, le nome de CĂ©phalonie dont elle formait une municipalitĂ© Ă part entiĂšre. Ithaque est sĂ©parĂ©e de CĂ©phalonie par un chenal large de 2 Ă 4 km.
Ătymologie
Son nom provient peut-ĂȘtre du phĂ©nicien Utica signifiant « colonie ». On retrouve ce mot pour dĂ©signer une colonie phĂ©nicienne voisine de Carthage[2].
NommĂ©e Ithaca Ă lâĂ©poque romano-byzantine, lâĂźle apparaĂźt durant le Moyen Ăge (pĂ©riode vĂ©nitienne) sous les noms de Itacha, Thiaki, Dulichia ou Val di Compare[3]. Ă partir des annĂ©es 1830, les lettrĂ©s de lâĂźle utilisent de prĂ©fĂ©rence Ithaki, tandis que pĂȘcheurs et marins continuent Ă utiliser le nom de Thiaki.
Le nom peut provenir Ă©galement du mythe d'Ulysse et de la signification symbolique du parcours initiatique du hĂ©ros qui cherche Ă retourner sur son Ăźle natale. Ithaque provient de la racine *ÎΞ / Ith qui Ă©voque un rapport direct et naturel, la droiture, la franchise et une forme de noblesse. Ainsi ÎΞαγÎÎœÎźÏ, IthagenĂȘs, signifie « dont la naissance est droite, franche, lĂ©gitime, formĂ© naturellement, nĂ© dans le pays mĂȘme »[4].
GĂ©ographie
Hormis les golfes de Brostaetou et de Skinou desservant le port de Vathy, la cĂŽte orientale dâIthaque prĂ©sente des falaises assez abruptes et rudes alors que la cĂŽte occidentale, face Ă CĂ©phalonie, est plus basse et verte. L'Ăźle semble ĂȘtre constituĂ©e de deux presquâĂźles reliĂ©es entre elles par lâisthme de Pissaetou. LâintĂ©rieur dâIthaque est montagneux : le mont Niritas (784 m) au centre, le mont Stefano (648 m) au sud et le mont Roussano (520 m) au nord. Il y pousse des pins et des cyprĂšs. Outre la bourgade portuaire de Vathy (1700 hab.), capitale de lâĂźle, la principale agglomĂ©ration est Stavros, dans le nord (1000 hab.).
Du mythe à la réalité
DâaprĂšs lâOdyssĂ©e dâHomĂšre, Ulysse Ă©tait le roi dâIthaque, Ăźle quâil retrouva aprĂšs avoir longuement errĂ© en mer, aprĂšs avoir subi de multiples Ă©preuves. Câest Ă Ithaque que sa femme PĂ©nĂ©lope lâa attendu malgrĂ© des prĂ©tendants entreprenants, tel Antinoos. LâĂ©tude des interpolations de textes dâĂ©poques et de styles diffĂ©rents semble montrer que lâOdyssĂ©e constituait Ă lâorigine un parcours initiatique symbolique, transformĂ© par HomĂšre en un rĂ©cit de voyage gĂ©ographique rappelant peut-ĂȘtre des courants de navigation antiques entre les PĂ©lasges, les peuples de la mer, les PhĂ©niciens et lâAsie mineure.
Ă part Troie et la Sicile, la localisation gĂ©ographique de la plupart des lieux citĂ©s dans lâOdyssĂ©e fait lâobjet de conjectures. La localisation de lâIthaque dĂ©crite par HomĂšre a Ă©tĂ© elle-mĂȘme sujet Ă caution : certains auteurs ont identifiĂ© Ithaque avec lâactuelle CĂ©phalonie ; lâIthaque actuelle pourrait alors ĂȘtre la « PhĂ©acie » homĂ©rique (souvent identifiĂ©e avec lâactuelle Corfou). Dans ce cas, le nom populaire de Thiaki pourrait venir de ΊΔΏÎșÎčα (PheĂĄkia) : il ne serait alors pas une dĂ©formation dâÎΞΏÎșηâIthaque, mais le nom originel de lâĂźle.
En 1999-2000, lâethnologue et navigateur Jean Cuisenier, a refait, au terme de longues recherches et de nombreuses navigations en MĂ©diterranĂ©e, tout le pĂ©riple dâUlysse : il a acquis la certitude que plusieurs ports et mouillages de lâIthaque homĂ©rique correspondaient « exactement » Ă des ports et mouillages de lâIthaque moderne[5], en accord, la plupart du temps, avec les conclusions de lâhellĂ©niste Victor BĂ©rard, passĂ© en ces lieux un siĂšcle avant lui. Il dresse ainsi la liste de ces localisations :
- le port de Phorkys, ΊÏÏÎșÏ ÎœÎżÏ Î»ÎčÎŒÎźÎœ (OdyssĂ©e, XIII, 96-104) = Dexia, Port de Vathy
- le port de la Ravine ou Rheitron, ῏ΔáżÎžÏÎżÎœ λÎčÎŒÎźÎœ (OdyssĂ©e, I, 186) = FrikĂšs / Kioni
- le port sous le palais d'Ulysse (Odyssée, IV, 778-786) = Port Polis (ou Ormos Sarakinikou)
- les ports jumeaux (Odyssée, IV, 842-847) = Fiskardo, dans le nord-est de Céphalonie
- l'Ăźlot AstĂ©ris (OdyssĂ©e, IV, 846) = lâĂźlot Daskalio, dans le nord-est de CĂ©phalonie
- le mouillage sous la source Aréthuse (Odyssée, XIII, 408-409) = l'anse de Péra Pigadi (sud-est d'Ithaque).
Si ces localisations sont exactes, les PhĂ©aciens dâHomĂšre (ΊΔΏÎșÎżÎč-PheĂĄkoi) ne seraient pas pour autant les habitants de lâactuelle Corfou, mais peut-ĂȘtre ceux du nord dâIthaque, autour de lâactuelle Platithrias, oĂč sâĂ©levait un village du nom de PheĂĄkoi[6].
Des astronomes ont estimĂ© que la date de retour dâUlysse vers Ithaque serait 1178 avant notre Ăšre[7] - [8], bien que cette historicitĂ© reste encore Ă dĂ©montrer et repose sur des postulats encore incertains, tels que lâinclinaison de l'axe de la Terre Ă lâĂ©poque donnĂ©e.
Histoire
Préhistoire
Des traces archĂ©ologiques remontant au IVe millĂ©naire av. J.-C. ont Ă©tĂ© relevĂ©es au nord de lâĂźle, mais le premier habitat attestĂ© ne date que des environs de 1 500 avant notre Ăšre[9].
Antiquité
PrĂšs du hameau de Pelikata, commune de Perachorion, une nĂ©cropole de l'Helladique moyen et du MycĂ©nien a Ă©tĂ© dĂ©couverte, ainsi que des murs cyclopĂ©ens. Dâautres sites archĂ©ologiques ont livrĂ© de la poterie mycĂ©nienne et des objets du GĂ©omĂ©trique (trĂ©pieds votifs). Strabon considĂšre que lâIthaque qui fait partie du royaume dâUlysse est Taphos. Neutre durant les Guerres mĂ©diques, lâĂźle est occupĂ©e par les Romains en l'an 121 avant notre Ăšre. Elle est christianisĂ©e au IVe siĂšcle puis fait partie du thĂšme dâĂpire de lâEmpire byzantin.
Moyen Ăge
AttaquĂ©e Ă plusieurs reprises par les Arabes et les Normands du VIIIe siĂšcle au XIe siĂšcle, Ithaque se dĂ©peuple, il nây reste que quelques bergers et pĂȘcheurs de passage. En 1185, lorsque les Normands de Sicile envahissent la GrĂšce, leur amiral, Marguery de Brindisi sâempare des Ăźles voisines, CĂ©phalonie et Zante. Le titre quâil adopte alors ne mentionne pas Ithaque[3] qui revint nĂ©anmoins bientĂŽt Ă lâEmpire byzantin.
En 1204, aprĂšs la QuatriĂšme croisade, la Partitio Terrarum accorde Corfou, Leucade, CĂ©phalonie et Zante Ă la RĂ©publique de Venise sans mentionner Ithaque, sans doute parce quâelle Ă©tait dĂ©peuplĂ©e et considĂ©rĂ©e comme un simple pĂąturage des CĂ©phaloniens.
En 1209, Matteo Orsini est « comte palatin de CĂ©phalonie » pour le compte de Venise. Mais en 1264, un de ses successeurs, Ricardo Orsini, Ă©tait « Seigneur de CĂ©phalonie, Zante et Ithaque »[10]. De 1204 Ă 1797, Ithaque reste dans lâorbite des Angevins de Naples et de la RĂ©publique de Venise.
En 1324, lorsque Jean de Gravina sâempare, pour les Angevins, de la principautĂ© d'AchaĂŻe, il conquiert aussi le comtĂ© palatin de CĂ©phalonie et Zante sur les Orsini. En 1357, Robert de Tarente donne le comtĂ© en fief Ă LĂ©onardo Tocco, du BĂ©nĂ©vent. Celui-ci ajoute Ithaque Ă sa titulature. Le comtĂ© profita de la protection de Venise pour sa partie maritime, mĂȘme si les territoires conquis en Ăpire ne purent ĂȘtre conservĂ©s[10].
Il semblerait quâun raid ottoman en 1479 ait trouvĂ© Ithaque dĂ©serte. Ce nâest qu'Ă partir de 1504 que lâĂźle se repeuple, les VĂ©nitiens ayant attirĂ© des Grecs du continent qui fuyaient la domination turque, et des citoyens de la SĂ©rĂ©nissime par des exemptions de taxe et des facilitĂ©s dâacquisition de terres[10]. La population augmente petit Ă petit pour atteindre 12 000 habitants dans les annĂ©es 1790. Venise fortifia la ville de Vathy[11].
Ăpoque contemporaine
Ă la fin du XVIIIe siĂšcle, disputĂ©e entre Français, Autrichiens, Russes et Britanniques durant les guerres napolĂ©oniennes, Ithaque Ă©choit au Royaume-Uni en 1809 : elle fait partie de la RĂ©publique heptanĂšse (ou RĂ©publique des Ăles Ioniennes) sous protectorat britannique jusqu'en 1864, lorsquâelle rejoint la GrĂšce avec les autres Ăźles Ioniennes.
OccupĂ©e par une poignĂ©e dâItaliens en mai 1941, lâĂźle est Ă©vacuĂ©e par ceux-ci en octobre 1943 ; des marins allemands les remplacent. La population rĂ©siste ou sâenfuit, les Britanniques dĂ©barquent en octobre 1944, en mĂȘme temps que lâELAS qui leur fait la guerre. Une trĂȘve intervient rapidement, la population revient, et Ithaque est Ă©pargnĂ©e par la Guerre civile grecque.
Une grande partie des bĂątiments de lâĂźle a Ă©tĂ© dĂ©truite par un sĂ©isme en 1953. Les familles qui sont alors parties ne sont pas toutes revenues.
Ăconomie
Lâagriculture repose sur les oliviers et la vigne. En plus, les habitants pratiquent lâĂ©levage ovin et la pĂȘche. Le tourisme, peu dĂ©veloppĂ©, repose en partie sur la lĂ©gende dâUlysse[9], mais aussi sur la navigation de plaisance, attirĂ©e par la beautĂ© naturelle et prĂ©servĂ©e des criques et des baies[12].
Personnalités liées à Ithaque
- Ulysse, roi dâIthaque, et la famille royale de l'Ăźle, sont les personnages principaux de lâOdyssĂ©e d'HomĂšre. PĂ©nĂ©lope, Ă©pouse d'Ulysse et hĂ©roĂŻne de lâOdyssĂ©e d'HomĂšre, qui tient tĂȘte Ă ses prĂ©tendants, par la diplomatie et la ruse, jusqu'au retour de son mari. Leur fils, TĂ©lĂ©maque, aide son pĂšre Ă vaincre les prĂ©tendants. Ă son retour, Ulysse retrouve aussi son vieux pĂšre, LaĂ«rte, et son chien, Argos.
- OdyssĂ©as AndroĂștsos, un des chefs des nationalistes grecs durant la Guerre d'indĂ©pendance grecque.
- IoĂĄnnis MetaxĂĄs, premier ministre grec.
Autres
- Ithaca Chasma, une faille du satellite Téthys a été nommé d'aprÚs Itaque.
Notes et références
- « General Secretariat of the National Statistical Service »(Archive.org ⹠Wikiwix ⹠Archive.is ⹠Google ⹠Que faire ?).
- Alexandre Lézine, Utique, éd. Société tunisienne de diffusion, Tunis, 1970.
- Hetherington, p. 124.
- « Bailly, Dictionnaire Grec Francais », sur archive.org (consulté le ).
- Jean Cuisenier, Le périple d'Ulysse, Paris, Fayard, 2003, p. 73.
- LâOdyssĂ©e, traduite et commentĂ©e par Victor BĂ©rard, prĂ©face par Fernand Robert, Le Livre de Poche, 1982.
- Des scientifiques s'appuient sur l'astronomie pour dater le retour d'Ulysse Ă Ithaque, Le Monde, 24 juin 2008.
- Une date précise pour le retour d'Ulysse à Ithaque, Futura-sciences, 25 juin 2008.
- Corfu & the Ionians., p. 181.
- Hetherington, p. 125.
- Corfu & the Ionians., p. 182.
- « Que faire à Ithaque ? », sur Vivre AthÚnes, (consulté le )
Annexes
Bibliographie
- 1869 : Henry Schliemann, Ithaque, le PéloponnÚse, Troie : recherches archéologiques, Paris, C. Reinwald.
- 1939 : Claude Dervenn, Iles de GrĂšce d'Ithaque Ă Samothrace, Paris, Impr. auxiliaire ; J. de Gigord. (S.M.).
- 2001 : Gilles Le Noan, Ă la recherche d'Ithaque : essai sur la localisation de la patrie d'Ulysse, Quincy-sous-SĂ©nart, Ăd. Tremen.
- 2001 : (en) Paul Hetherington, The Greek Islands. Guide to the Byzantine and Medieval Buildings and their Art, Londres, (ISBN 1-899163-68-9).
- 2002 : (en) Corfu & the Ionians., Guide Lonely Planet, p. 18. (ISBN 1-74059-070-8).
Articles connexes
Liens externes
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- Ressource relative à la géographie :
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :