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Grec moderne

Le grec moderne (en grec : (νεο)ελληνική γλώσσα / (neo)ellinikí glóssa « langue grecque (moderne) », ou simplement (νέα) ελληνικά / (néa) elliniká) est la langue maternelle de 15 millions de locuteurs, dont 10,7 millions en Grèce où il est langue officielle, comme à Chypre. Il existe aussi des minorités de langue grecque en Albanie et en Turquie.

Grec moderne
(Νέα) Ελληνικά
Pays Grèce, Chypre, Albanie, Italie, Turquie et divers autres pays
Nombre de locuteurs 15 millions dont 10,7 en Grèce
Typologie SVO, flexionnelle, accusative, à accent d'intensité
Classification par famille
Statut officiel
Langue officielle Drapeau de la Grèce Grèce
Drapeau de Chypre Chypre
Drapeau de l’Union européenne Union européenne
Codes de langue
IETF el
ISO 639-1 el
ISO 639-2 ell, gre
ISO 639-3 ell
Étendue langue individuelle
Type langue vivante
Linguasphere 56-AAA-a
WALS grk
Glottolog mode1248
Échantillon
Article premier de la Déclaration universelle des droits de l'homme (voir le texte en français)

Άρθρο 1

Όλοι οι άνθρωποι γεννιούνται ελεύθεροι και ίσοι στην αξιοπρέπεια και τα δικαιώματα. Είναι προικισμένοι με λογική και συνείδηση, και οφείλουν να συμπεριφέρονται μεταξύ τους με πνεύμα αδελφοσύνης.
Carte
Image illustrative de l’article Grec moderne
Groupes de dialectes du grec moderne avant et depuis 1923-1974. Les couleurs plus pâles indiquent des aires de distribution disparues[2].

Le grec moderne est également appelé romaïque (Ρωμαίικα) ou roméique. Cette appellation, en vigueur jusqu’au XIXe siècle, tend à disparaître.

Il fait partie de la branche hellénique des langues indo-européennes.

Histoire

Le grec moderne dérive de la koinè, elle-même héritière directe du grec ancien. La koinè alexandrine, langue de communication utilisée par Alexandre le Grand et ses successeurs dans les colonies qu'ils fondèrent, subit des évolutions qui peuvent être classées en quatre grandes périodes[3] :

  • une période macédonienne et romaine (de la mort d'Alexandre en 323 av. J.-C. à 642 apr. J.-C.) : le grec commun se simplifie en perdant le duel et en négligeant le mode optatif mais sans trop différer de l'attique ;
  • une période mal documentée (du VIe au XIe siècle) au cours de laquelle le vocabulaire grec est influencé par le latin vulgaire ; la langue subit la loi de l'analogie dans la première déclinaison et simplifie la conjugaison des verbes. Henri Tonnet date de cette époque la naissance du grec moderne et note sa remarquable proximité avec la langue grecque des origines : « À la fin de cette période, le grec moderne est déjà formé. Un Grec d'aujourd'hui comprend la langue populaire du milieu du XIIe siècle, alors qu'un Français sans culture n'entend pas la Chanson de Roland (XIIe siècle)[4]. » ;
  • la période du grec médiéval (du XIIe siècle à la chute de Constantinople en 1453) : le grec ancien cesse d'être utilisé à l'écrit, le vocabulaire s'enrichit et le processus de réfection analogique modifie sensiblement la conjugaison des verbes ;
  • la période de l'occupation turque (du XVe siècle à 1821) : cent ans après la chute de Constantinople, le grec parlé en Grèce ottomane et en Asie mineure se caractérise par une multitude de dialectes, un très petit nombre d'emprunts aux langues des occupants (italien ou turc)[5] et de nombreuses créations néo-helléniques. Au XVIIIe siècle coexistent trois formes du grec : le grec archaïque des ecclésiastiques et des lettrés, des koinès régionales à Constantinople, Smyrne, dans le Pont, le Péloponnèse et l'Heptanèse, et des dialectes limités à certains territoires comme le griko ou le tsakonien[6]. Cependant, tous ces parlers grecs se caractérisent par une unité, permettant l'intercompréhension des locuteurs. En 1821, les emprunts à la langue ottomane et au vénitien abondent[7]. C'est à cette époque que se pose la question de la langue et la recherche d'une langue authentiquement nationale par plusieurs réformateurs lettrés comme Dimitrios Photiadis ou Katardzis, ainsi qu'Iosipos Misiodax, Grigorios Konstantas et Adamantios Koraïs[8].

Au cours de sa longue histoire, la langue grecque a subi un grand nombre de transformations phonétiques (comme l'iotacisme, la psilose, la disparition des oppositions de quantité vocalique, la spirantisation des anciennes aspirées, le passage d'un accent de hauteur à un accent d'intensité ou encore l'amuïssement de certains phonèmes, comme [n], en finale), ainsi que des transformations lexicales (nombreux emprunts aux langues modernes) et grammaticales (simplification de la flexion nominale, de la conjugaison). Le grec moderne aurait également développé certaines caractéristiques partagées avec les langues environnantes, qui découlent de sa situation dans l'union linguistique balkanique.

On peut illustrer cette évolution par un court extrait du Nouveau Testament (Jean 1-1 et 1-2) en grec moderne et en grec ancien (koinè). La prononciation est indiquée de manière phonologique. En dépit de l'anachronisme que cela constitue, on a transcrit le grec ancien tel qu'il aurait pu être prononcé en attique classique et non tel qu'il l'était à l'époque de rédaction du texte, pour montrer les différences entre langues moderne et classique :

FrançaisGrec ancienGrec moderne
Au commencement était la parole et la parole était avec Dieu et Dieu était la parole.Ἐν ἀρχῇ ἦν ὁ Λόγος, καὶ ὁ Λόγος ἦν πρὸς τὸν Θεόν, καὶ Θεὸς ἦν ὁ Λόγος.
[en arˈkʰɛːjˌ ˈɛːˌn ho ˈloɡos, ˌkai ho ˈloɡos ˈɛːˌn ˌpros ˌton tʰeˈon, ˌkai tʰeˌos ˈɛːˌn ho ˈloɡos]
Στην αρχή ήταν ο Λόγος, και ο Λόγος ήταν μαζί με τον Θεό, και ο Λόγος ήταν Θεός.
[stin aɾˈçi ˈitan ɔ ˈlɔɣɔs, cɛ ɔ ˈlɔɣɔs ˈitan maˈzi mɛ tɔn θɛˈɔ, cɛ ɔ ˈlɔɣɔs ˈitan θɛˈɔs]
Il était au commencement avec Dieu.Οὗτος ἦν ἐν ἀρχῇ πρὸς τὸν Θεόν.
[ˈhoːˌtos ˈɛːˌn en arˈkʰɛːjˌ ˌpros ˌton tʰeˈon]
Αυτός ήταν στην αρχή μαζί με τον Θεό.
[afˈtɔs ˈitan stin aɾˈçi maˈzi mɛ tɔn θɛˈɔ]

La langue actuelle est une variante dite « grec mixte » ou « μεικτή δημοτική » ; il s'agit en fait de la langue populaire, c'est le sens de « démotique », enrichie de quelques emprunts lexicaux et grammaticaux à la katharévousa, la langue dite « purifiée ». Celle-ci fut créée d'une part sur le modèle de l'attique pour renouer avec le prestigieux passé de la Grèce antique : on souhaitait en effacer les stigmates, c'est-à-dire la masse des emprunts issus des diverses langues, notamment le turc et l'italien, des nouveaux maîtres de l'écoumène grecque depuis la chute de Constantinople ; d'autre part, la katharévousa avait pour but de dire la modernité, ce que le grec démotique, langue de paysans et de pêcheurs, ne savait pas faire ; elle fut langue officielle depuis la proclamation du jeune État, tout juste délivré du joug ottoman, la τουρκοκρατία, jusqu'en 1975. La katharévousa s'avéra finalement être le matériau nécessaire pour faire de la langue populaire une langue moderne, riche des différents sédiments lexicaux que chaque époque (Antiquité, Empire byzantin ou Empire romain d'Orient, Empire ottoman et républiques maritimes italiennes, Venise et Gênes surtout) laissa en héritage. Depuis 1982, la langue officielle ne connaît plus que le système monotonique.

Zone géographique

Cette langue est parlée en Grèce, à Chypre, et au sud de l'Albanie. En Turquie, la question est sensible pour des raisons politiques et en raison du fort nationalisme : des Turcs, dont le nombre est impossible à évaluer, seraient bilingues grec/turc : il s'agit le plus souvent de Micrasiates convertis à l'islam au moment de la « grande Catastrophe » de 1923 pour échapper aux échanges de populations obligatoires entre la Grèce et la Turquie et pouvoir rester dans leurs foyers. Les derniers chiffres des statistiques remontent à 1965, où le recensement mentionnait 100 000 Grecs ou locuteurs du grec. On en rencontre encore le long des côtes de la Turquie, ainsi qu'à Istanbul et dans les îles Imbros et Ténédos où l'« ethnie » grecque est évaluée à 5 000 personnes, mais le nombre de locuteurs du grec dans la sphère privée est probablement bien supérieur. De même, en Grèce continentale, un grand nombre de Grecs savent parler le turc, mais il n'y a pas de statistiques, et le sujet semble aussi tabou qu'en Turquie. Hors du patriarcat de Constantinople, l'alphabet grec moderne est interdit en Turquie, où le grec peut toutefois s'écrire avec l'alphabet latin, dans un cadre cultuel et culturel à caractère privé et non officiel, ni politique ou revendicatif, car l'État turc laïc n'admet officiellement que la langue turque et l'alphabet latin.

Historiquement, les deux langues se sont côtoyées durant plus de cinq siècles et bien avant la chute de Constantinople en 1453 : une partie du vocabulaire et des mots de la langue turque (par exemple dans le domaine maritime et dans celui de la halieutique) sont issus du grec médiéval : une partie de ce vocabulaire passé en turc n'est plus utilisée en grec moderne (comme dans le cas du « chinchard », en turc istavrit du grec médiéval σταύριδος / staúridos « à petites croix », mais τράχουρος / tráchouros en grec moderne). La situation est symétrique pour le turc dont une partie du lexique est passée en grec moderne, même si depuis le XIXe siècle l'académie fait des efforts notoires de « ré-hellénisation » de la langue (par exemple, en remplaçant χάνιον / chánion, du turc han, on« auberge », par πανδοχείο / pandocheío « pandochée », et aussi tous les noms de lieux hérités de la Grèce ottomane par leurs noms antiques, comme au Pirée où les ports de Türkliman et de Paşaliman sont redevenus respectivement Mounychie ou Microlimano et Zéa).

La langue grecque est également présente en Cyrénaïque, dans l'est de la Libye, où une partie des descendants de Grecs convertis à l'Islam (localement appelés Gritlis), toujours présents dans la région à la fin du XIXe siècle, la pratiquent encore[9] dans un cadre strictement familial (jusqu'en 2011, le régime Kadhafi interdisait l'utilisation et l'apprentissage des langues autres que l'arabe).

En Syrie et au Liban aussi, où jadis une partie de la population parlait grec, surtout parmi les chrétiens orthodoxes (avant 1960), la langue a pratiquement disparu car les systèmes éducatifs des deux pays, très centralisés, mirent l'accent sur la langue arabe, facteur identitaire après la fin du mandat français en Syrie et au Liban, en 1943, et avec les vagues de nationalisme arabe des années 1950 et 1960. L'héritage grec survit uniquement dans la religion orthodoxe, elle-même en voie de diminution par l'émigration, à la suite des crises, violences et guerres du XXe et du XXIe siècle. En Égypte, avant 1956 (crise du canal de Suez), il y avait à Alexandrie un important groupe de locuteurs du grec qui, dans cette ville, était encore la cinquième langue après l'arabe, le français, l'anglais et l'italien. De nos jours, les quelques centaines de Grecs qui y vivent sont le plus souvent des commerçants ou des hommes d'affaires récemment installés, sans liens avec la très ancienne diaspora grecque d'avant 1956, entre-temps émigrée.

Enfin, on trouve d'importantes diasporas de quelques centaines de milliers de Grecs à New York, Chicago, San Francisco, Melbourne, en France, en Allemagne et au Royaume-Uni : les Grecs dits « micrasiates » chassés des pays musulmans sont nombreux parmi ces émigrés[10] et, à Londres, les Grecs chypriotes en représentent une bonne part. Avec la disparition des anciennes générations, les descendants des diasporas s'intègrent aux populations locales, abandonnent le grec (mais gardent sur plusieurs générations l'appartenance à l'orthodoxie) et passent aux langues locales. Cependant, depuis la crise économique en Grèce, surtout après 2010, de nouveaux migrants grecs viennent s'ajouter aux anciens.

Écriture et prononciation

Le grec moderne s’écrit avec un alphabet de vingt-quatre lettres, hérité du début de la période archaïque (VIIIe siècle av. J.-C.). Chaque lettre correspondait à l’origine à un son différent (bien qu'avec des ambiguïtés concernant principalement les voyelles), mais en grec moderne, la prononciation a largement évolué, et plusieurs lettres ou groupes de lettres se prononcent de la même manière. Ainsi, entendre un mot n’est souvent pas suffisant pour pouvoir l’écrire : par exemple, il existe six graphèmes pour le phonème /i/ en raison du iotacisme survenu entre le Ve et IIIe siècles av. J.-C. Le tableau ci-dessous donne la prononciation des lettres. L’accent aigu sur une lettre marque l’accent tonique du mot.

Le grec moderne suit des règles de sandhi internes et externes, qui consistent en assimilations progressives et régressives. Par exemple, un /n/ final voit son point d'articulation s'adapter à la consonne initiale du mot qui suit (il passe à [m] devant une consonne labiale et [ŋ] devant une vélaire ; à la fin de certains mots-outils, comme την / tin, τον / ton, δεν / den, il s'amuït devant une consonne continue ; il voise une consonne occlusive sourde qui le suit (τον πατέρα / ton patéra [tɔm ba.ˈtɛ.ɾa]) et peut empêcher une sonore de se spirantiser.

Lettres simples

Lettre Nom Prononciation
Α α άλφα (álfa) [a] antérieur comme dans patte
Β β βήτα (ta) [v] comme vie
Γ γ γάμμα (mma, c'est-à-dire /ɣa.ma/) devant les sons /a/, /ɔ/ et /u/, [ɣ] proche du r français de rien mais vélaire et non uvulaire ; devant les sons /i/ et /ɛ/, [ʝ] proche du y de yoyo. Donc, la lettre Γ elle-même se dit à peu de chose près comme un francophone dirait rama, mais avec accent sur la première syllabe.
Δ δ δέλτα (délta) [ð] th anglais sonore de this
Ε ε έψιλον (épsilon) [ɛ] comme mère
Ζ ζ ζήτα (ta) [z] comme zoo, apico-alvéolaire
Η η ήτα (íta) [i] comme fini
Θ θ θήτα (thíta) [θ] th anglais sourd de think
Ι ι ιώτα (ta) [i] comme fini
Κ κ κάππα (ppa) [k] comme kangourou; [c] devant [i], [ɛ] ou [t]
Λ λ λάμδα (lámda) [l] comme lettre
Μ μ μι (mi) [m] comme moi
Ν ν νι (ni) [n] comme nous
Ξ ξ ξι (ksi) [ks] comme le x d’axe (en général : ξέρω /ˈksɛɾɔ/ « je sais ») ou [gz] comme le x d’exemple (derrière ν : δεν ξέρω = /ðɛŋ ˈgzɛɾɔ/ pouvant aller jusqu’à /ðɛg-/ = « je ne sais pas »)
Ο ο όμικρον (ómicron) [ɔ] d’aperture intermédiaire entre hotte et hôte
Π π πι (pi) [p] comme patte
Ρ ρ ρω (ro) [ɾ] battu (espagnol pero)
Σ σ/ς σίγμα (gma) [s] comme dans rosse, apico-alvéolaire (jamais [z] comme dans rose sauf devant un consonne sonore : σβέλτος, σμάλτο /sv-, sm-/ « svelte, émail »)
Τ τ ταυ (tav) [t] comme tête
Υ υ ύψιλον (ípsilon) [i] comme dans fini ; dans le digramme ου qui note [u] comme dans coucou
Φ φ φι (fi) [f] comme dans faire
Χ χ χι (chi) [ç] : ch allemand de ich devant les sons /i/ et /ɛ/ ([ʝ] sourd) ; [x] : ch allemand de ach devant les sons /a/, /ɔ/ et /u/ ([ɣ] sourd)
Ψ ψ ψι (psi) [ps] comme dans psychologie
Ω ω ωμέγα (oga) [ɔ] d’aperture intermédiaire entre hotte et hôte

Digrammes

LettresPrononciation
αιdigraphe prononcé comme ε : [ɛ]
γγ, γκdigraphe prononcé [g] à l’initiale comme dans gare et [ɟ] devant [i] ou [ɛ] ; [ŋg] au milieu du mot et [ŋɟ] devant [i] ou [ɛ]
ει, οι, υιdigraphe prononcé comme η, ι, υ : [i]
μπdigraphe prononcé [b] à l'initiale, comme dans bar (qui en grec moderne s’écrit μπαρ) et [mb] au milieu du mot
ντdigraphe prononcé [d] à l'initiale, comme dans demain, et [nd] au milieu du mot
ουdigraphe prononcé [u] comme dans coucou
τσ[t͡s] (affriquée apico-alvéolaire sourde)
τζ[d͡z] (affriquée apico-alvéolaire voisée)
λιdigraphe représentant la consonne [ʎ], habituellement comme dans l'italien figlio
νιdigraphe représentant habituellement la consonne [ɲ], comme dans baignade
αυdigraphe prononcé [af] (devant les consonnes sourdes κ, π, τ, χ, φ, θ, σ, ξ, ψ) et [av], devant les consonnes sonores β, γ, δ, ζ, λ, μ, ν, ρ et les voyelles
ευdigraphe prononcé [ɛf] (devant les consonnes sourdes κ, π, τ, χ, φ, θ, σ, ξ, ψ), [ɛv], devant les consonnes sonores β, γ, δ, ζ, λ, μ, ν, ρ et les voyelles

Exemples

MotTranscriptionSignification
αίμαémasang
καλοριφέρkalorirradiateur
είναιíneil/elle est ou ils/elles sont
μπάρμπαςrbastonton
εμπρόςembrósdevant
εντάξειendáksid’accord
ευρώeveuro
μπύραbýrabière

Dans la langue orale courante, il est fréquent d'omettre la consonne nasale présente dans les digrammes γγ, γκ, μπ, ντ situés en milieu de mot. C'est ainsi qu'εντάξει est souvent prononcé eksi, ou εμπρός sonne comme ebrós.

Grammaire

Le grec moderne est une langue à déclinaisons (comme le latin, par exemple) : la terminaison des mots change suivant la fonction du mot dans la phrase. Il existe quatre cas dans la langue moderne (voir l'exemple ci-dessous) : nominatif, accusatif, génitif et vocatif ; le datif ne subsiste qu'à l'état de traces dans les expressions figées. Les noms propres se déclinent également :

  • Ο Φίλιππος έφυγε (O Fílippos éfyge) : « Philippe est parti » ;
  • Βλέπω τον Φίλιππο (Vlépo ton Fílippo) : « Je vois Philippe » ;
  • Είναι το σπίτι του Φιλίππου (Íne to spíti tou Filíppou) : « C’est la maison de Philippe » ;
  • Φίλιππε, έλα εδώ! (Filíppe, éla edó) : « Philippe, viens ici ! ».

Le grec distingue deux aspects pour chaque verbe, marqués chacun par une forme distincte : une forme continue (calquée sur le présent) et une forme instantanée (calquée sur le passé, appelé « aoriste »). Cette différence est très vivante et se retrouve au futur et au subjonctif. Un Grec ne confondra pas θα τον δώ (tha ton dó) et θα τον βλέπω (tha ton vlépo) : les deux signifient « je le verrai », mais le premier sous-entend « une fois », le second sous-entendant « continuellement ».

À cause de l'absence du cas datif, le grec utilise les pronoms au génitif pour exprimer le complément d'attribution.

  • Του δίνω τα κλειδιά. (Tou díno ta klidiá) : « Je lui donne les clés (à lui) » ;
  • Της δίνω τα κλειδιά. (Tis díno ta klidiá) : « Je lui donne les clés (à elle) » ;
  • Σου δίνει τα κλειδιά. (Sou díni ta klidiá) : « Il te donne les clés (à toi) ».

Ne possédant pas de déterminants possessifs (mon, ton, son, ...), le grec utilise également les pronoms au génitif pour transposer cette notion, qu'il postpose aux noms possédés.

  • Τα κλειδιά του (Ta klidiá tou) : « Ses clés (à lui) » ;
  • Τα κλειδιά της (Ta klidiá tis) : « Ses clés (à elle) » ;
  • Τα κλειδιά σου (Ta klidiá sou) : « Tes clés ».

Parmi les autres spécificités du grec, il est à noter l'existence d'un pronom relatif που / pou qualifié d'« universel ». Il peut en effet correspondre aux pronoms relatifs français « qui », « que », « dont », etc.

  • Ο άντρας που βλέπει τη θάλασσα. (O ándras pou vlépi ti thálassa) : « L'homme qui voit la mer » ;
  • Η θάλασσα που βλέπει ο άνδρας. (I thálassa pou vlépi o ándras) : « La mer que l'homme voit » ;
  • Η θάλασσα, που το χρώμα της είναι γαλάζιο, είναι κοντά. (I thálassa, pou to chróma tis íne galázio, íne konda) : « La mer, dont la couleur est cyan, est proche ».

La proposition relative de la dernière phrase est littéralement « que sa couleur est cyan ».

De manière plus soutenue, les relatifs ο οποίος, η οποία, το οποίο permettent de remplacer που / pou, et se déclinent avec l'article défini. Voici la proposition ci-mentionnée déclinée au génitif féminin.

  • Η θάλασσα, της οποίας το χρώμα είναι γαλάζιο, είναι κοντά. (I thálassa, tis opías to chróma íne galázio, íne konda) : « La mer, dont la couleur est cyan, est proche ».

Lexique

Le lexique du grec moderne, ou démotique, comprend des éléments d'origines diverses qui reflètent l'histoire plurimillénaire de l'hellénisme et de ses contacts avec d'autres civilisations et donc d'autres langues.

Le lexique issu du grec ancien reste, de loin, numériquement le plus important, ce qui fait du grec une des rares langues au vocabulaire relativement homogène et stable depuis ses premières occurrences connues. Il faut toutefois noter que par grec ancien, il faut entendre non seulement le lexique des différents dialectes qui constituaient le grec dans l'Antiquité mais aussi divers emprunts à d'autres langues, indo-européennes ou non, déjà assimilés à la période classique. On trouve par exemple dans l’Anabase de Xénophon[11] un mot d'origine étrangère, le terme de « parasange » (παρασάγγης), issu du persan, qui désigne une mesure itinéraire d'environ km. Bon nombre de mots grecs ont traversé les siècles sans subir la moindre altération sauf pour la phonologie comme ο ουρανός (le ciel) ou το κρέας (la viande). D'autres ont été créés au XIXe siècle pour exprimer des notions abstraites comme πολιτισμός / politismós, « civilisation » ou des réalités de la vie moderne comme μυθιστορία / mythistoría, « roman », les deux inventés en 1804 par Adamántios Koraïs[12].

Notes et références

  1. Pour éviter toute interprétation réductrice, il faut préciser que ce type de carte n’implique ni que le grec était la « seule » langue parlée dans ces territoires, ni qu’il n’était présent « que là ».
  2. Pour éviter toute interprétation réductrice, il faut préciser que ce type de carte n’implique ni que le grec était la « seule » langue parlée dans ces territoires, ni qu’il n’était présent « que là ».
  3. Henri Tonnet 2011, p. 42 à 45.
  4. Henri Tonnet 2011, p. 43.
  5. Henri Tonnet 2011, p. 165 et 188.
  6. Henri Tonnet 2011, p. 207.
  7. Henri Tonnet 2011, p. 206.
  8. Henri Tonnet 2011, p. 224.
  9. Adam Benkato, « The Arabic Dialect of Benghazi, Libya: Historical and Comparative Notes », Journal of Arabic Linguistics, vol. 59 (2014), p. 61.
  10. Site Bibliomonde.
  11. Xénophon, Anabase, 1, 10, 1 ; Hérodote, Histoires [détail des éditions] [lire en ligne], II, 6 et V, 53.
  12. Henri Tonnet 2011, p. 237-238.

Voir aussi

Bibliographie

  • André Mirambel, Grammaire du grec moderne, PUF, coll. « Que sais-je ? » (no 1343), , 124 p. (OCLC 902054097).
  • Henri Tonnet, Histoire du grec moderne : La formation d'une langue, Paris, L'Asiathèque, , 3e éd., 294 p. (ISBN 978-236057-0140). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article.
  • (el) Maria Mandala (dir.), Ελληνικό λεξικό : ορθογραφικό, ερμηνευτικό, ετυμολογικό, συνωνύμων, αντίθετων, κυριών ονομάτων, Athènes, Τεγόπουλος-Φυτράκης, , XV-967 p. (ISBN 9789607598004 et 9789607598080, OCLC 952173683).
  • Sophie Vassilaki, « Le grec moderne », dans Emilio Bonvini, Joëlle Busuttil, Alain Peyraube, Dictionnaire des langues, Paris, PUF, coll. « Dictionnaires Quadrige », , XXV-1705 p., 14,5 × 20 cm (ISBN 978-2-13-056914-5, OCLC 868289175), p. 498–510.

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