Richard Belcredi
Le comte Richard Belcredi (né le à Ingrowitz, en margraviat de Moravie ; décédé le à Gmunden, Autriche-Hongrie) est un juriste et homme d’État autrichien. Partisan d'une solution fédérale pour la monarchie autrichienne après la défaite de 1866, il fut en butte à l'obstination des parlementaires hongrois et dut démissionner en 1867.
Richard Belcredi | |
Le comte Richard Belcredi. | |
Fonctions | |
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Ministre-président d'Autriche | |
– (1 an, 6 mois et 11 jours) |
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Monarque | François-Joseph Ier |
Prédécesseur | Alexandre de Mensdorff-Pouilly |
Successeur | Friedrich Ferdinand von Beust |
Biographie | |
Date de naissance | |
Lieu de naissance | Ingrowitz (Margraviat de Moravie) |
Date de décès | |
Lieu de décès | Gmunden (Autriche-Hongrie) |
Nationalité | autrichienne |
Diplômé de | Université de Prague et de Vienne |
Profession | Fonctionnaire |
Religion | Catholicisme |
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Ministres-présidents d'Autriche | |
Biographie
Belcredi étudia le droit à Prague et à Vienne, entra dans l'administration impériale en 1854 comme chef du district de Znaïm, fut élu en 1860 au conseil régional de Moravie avant d'être porté au Reichstag par l'assemblée locale. En 1862 il était promu administrateur de la Région de Moravie-Silésie, puis finalement en 1864 conseiller privé de la Couronne et administrateur général de Bohême.
Le « ministère des trois comtes »
En 1865, l'empereur François-Joseph, déçu des libéraux emmenés par le ministre-président Anton von Schmerling et inquiet des turbulences que leur réformes avaient entraînées (cf. Histoire de l'Autriche), trouva en la personne du comte Richard Belcredi un conservateur déclaré : il le nomma ministre d'État et ministre-président d'Autriche.
Richard Belcredi regarda la rumeur de sa nomination à la tête du pays en tant que ministre-président d'Autriche comme un sacrifice personnel, qu'il n'accepta que par le sens du devoir du haut fonctionnaire qu'il était. C'est ainsi qu'il écrivit à sa femme :
"L’empereur me réclame et il a dit qu'en cette triste et dangereuse période, il ne trouvait qu'en moi seul l’homme d'honneur sur lequel il pouvait se reposer. Je voudrais me montrer digne de la situation et n'être pas seulement son dernier espoir"[1].
Belcredi présenta son programme politique le et entra en fonction le . Le nouveau ministre-président, dont on désigna le cabinet ministériel comme le « ministère des trois comtes » (Dreigrafenministerium, bien qu'il comptât en réalité quatre comtes, à savoir Belcredi lui-même, Mensdorff aux Affaires Étrangères, Johann Larisch von Moennich (1821–1884) aux Finances, et Esterhazy comme ministre sans portefeuille et représentant de Hongrie), déclara que la question hongroise constituait « le problème crucial pour l’empire d'Autriche » (das eigentliche Crux des österreichischen Reichsproblems) et lui assigna une priorité absolue. La passation des « accords de février » lui parut un préalable nécessaire aux négociations en vue d'une constitution pour l'empire, car sans ces concessions, les pays de langue hongroise ne l'accepteraient pas (c'est pourquoi les historiens surnomment ce gouvernement le « ministère transigeant », Sistierungsministerium). Par la loi du , la loi fondamentale sur la représentation gouvernementale, par laquelle en 1861 le Reichsrat était devenu une instance élue, fut suspendue.
Compromis avec la Hongrie
En 1866, à la suite de la signature du traité de Prague (1866), l'Autriche devait se retirer de la Confédération allemande (cf. Guerre austro-prussienne), et après accord sur la Hongrie, devait renoncer à toute prise de position sur la question allemande. Belcredi et le comte Mensdorff, jusqu'alors ministre des Affaires Étrangères, prirent la tête des chrétiens conservateurs fédéralistes : ils s'opposèrent au projet de compromis avec la Hongrie, parce qu'il aurait facilité l’accession au pouvoir des libéraux rhénans. C'est pourquoi l'empereur choisit un nouveau ministre des Affaires Étrangères en la personne du comte Friedrich Ferdinand von Beust.
Belcredi s'opposa à de nouvelles limitations des prérogatives communes de la Couronne et s'efforça désormais de trouver un terrain d'entente avec les minorités slaves sur une solution fédérale au problème des nationalités. Pour beaucoup, Belcredi apparut désormais comme « trop peu allemand ». Il projetait de réorganiser l'Autriche-Hongrie en cinq régions historiques (1. Autriche germanophone, 2. Bohême-Moravie et Silésie, 3. Hongrie, 4. Pologne-Ruthénie, 5. Illyrie, c'est-à -dire les Slaves du Sud) dotées chacune d'un parlement. Un parlement fédéral aurait repris les compétences du Reichsrat. Ce projet échoua devant l'opposition acharnée de la Hongrie, qui ne voulait pas démordre de sa position sur la parité entre les deux royaumes (Autriche et Hongrie) au sein de la monarchie. C'est finalement cette question de la parité, contre laquelle le comte Belcredi avait à l'origine accepté d'entrer en politique, qui mit un terme à sa carrière de ministre-président.
Entre Belcredi et von Beust il n'y avait plus de dialogue possible, comme le montra clairement la déclaration préliminaire du conseil des ministres du . Von Beust était d'avis qu'il était impossible de satisfaire les attentes de tous. Il était par conséquent du devoir du gouvernement « de s'appuyer sur ceux qui jouissent de la plus grande vitalité (Lebenskraft), à savoir les éléments allemand et hongrois ». Belcredi constata que la décision était désormais faite et rédigea le jour même sa lettre de démission. Le , il était démis de ses fonctions et remplacé en tant que ministre-président d'Autriche par von Beust. La constitution bicéphale rédigée par von Beust avec les représentants hongrois fut présentée au Reichstag, convoqué une dernière fois, comme une quasi-nécessité ; les parlementaires saisirent pourtant l'occasion de soumettre au chef du gouvernement une contre-proposition (projet de loi des députés du ), la loi constitutionnelle de .
Rétrospectivement, le compromis voulu par von Beust apparaît comme une solution pragmatique à courte vue, aux conséquences fatales, car c'est avec cet accord que s'amorce le divorce entre les nations slaves et la monarchie des Habsbourg, qui se poursuivra jusqu’à la chute de l'Autriche-Hongrie en 1918. Belcredi au contraire avait à cœur la représentation des minorités au sein de la monarchie. La vigueur avec laquelle il combattit l’« ardeur nationaliste » se reflète dans une déclaration en conseil des ministres, où il prend parti pour un enseignement en allemand et en tchèque dans les écoles primaires et les collèges de Bohême car, dit-il, « on ne peut remédier aux tendances nationalistes extrémistes que par des mesures concrètes[2]. »
En 1881, Richard Belcredi se retira de la carrière politique ; il fut nommé pair à vie (donc membre perpétuel de la Haute Chambre, le Reichsrat d'Autriche) et exerça jusqu'en 1895 les fonctions de président du tribunal administratif impérial et royal d'Autriche-Hongrie.
Notes et références
- Texte original : Der Kaiser ist auf mich versessen und sagte, dass er in dieser traurigen, gefahrvollen Zeit in mir allein den ehrlichen Mann sehe, auf den er sich unbedingt verlassen könne. Ich möge seine Lage würdigen und nicht seine einzige Hoffnung zurückweisen
- Texte original : National extreme Richtungen können nur durch praktische Erfahrungen geheilt werden.
Sources
- (de) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en allemand intitulé « Richard Belcredi » (voir la liste des auteurs).
- Österreichisches Biographisches Lexikon, vol. 1, Vienne, Verlag der Österreichischen Akademie der Wissenschaften, , « Belcredi Richard Graf », p. 66
- Karl Otmar Freiherr von Aretin, Neue Deutsche Biographie (NDB), vol. 2, Berlin, Duncker & Humblot, , « Belcredi, Richard Graf von », p. 26-28
- Ludwig Graf Belcredi, Fragmente aus dem Nachlasse des ehemaligen Staatsministers Grafen Richard Belcredi, in: Die Kultur. Vierteljahresschrift fĂĽr Wissenschaft, Literatur und Kunst 7 (1906)
- Ministre d'État contre son gré (éd.: Correspondence parlementaire, Vienne, 2001)