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Feu de forĂȘt

Un feu de forĂȘt est un incendie qui se propage sur une Ă©tendue boisĂ©e. Il peut ĂȘtre d'origine naturelle (dĂ» Ă  la foudre ou Ă  une Ă©ruption volcanique) ou humaine (intentionnel et criminel ou involontaire et accidentel Ă  partir de feux agricoles ou allumĂ©s pour « l'entretien » de layons ou des zones ouvertes pour la chasse par exemple).

Rim Fire (en) est l'un des plus grands incendies connus en Californie, et le plus important pour la Sierra Nevada ; il dĂ©truisit 1 041,31 km2 de forĂȘt prĂšs du parc national de Yosemite en 2013[1] - [2]

Par souci écologique ou de réduction du risque de grands feux, quand le milieu, le contexte et la législation le permettent, on peut localement utiliser des « feux contrÎlés ».

L'étude des microcharbons préhistoriques montre que l'humain a joué un rÎle dans de nombreux incendies, volontaires ou non, depuis la Préhistoire[3]. Aujourd'hui encore, la plupart des feux sont volontaires (déboisement à fin de mise en culture), voire criminels. Ils ont souvent pour origine une imprudence (barbecue, mégot de cigarette, feu d'écobuage)[4] et pas seulement dans les pays secs.

Les grands feux de forĂȘt tuent un grand nombre d'organismes vivants, et leur rĂ©pĂ©tition peut durablement compromettre l'Ă©cosystĂšme forestier[5]. Ils gĂ©nĂšrent localement et Ă  distance une pollution de l'air, des eaux et des sols et affectent la santĂ© des pompiers (et audelĂ  la santĂ© publique car leur fumĂ©e expose les yeux et les poumons Ă  des concentrations nocives de divers polluants).

Les feux sont Ă  la fois une cause et une consĂ©quence du rĂ©chauffement climatique. Selon les estimations satellites de l'Agence spatiale europĂ©enne, les feux de forĂȘts produisent entre 25% et 35% des Ă©missions de gaz Ă  effet de serre[6].

L'attention mĂ©diatique se porte souvent sur l'Amazonie[7] ou BornĂ©o, mais les feux touchent surtout l'Afrique : 70% des surfaces forestiĂšres brulĂ©es sont africaines[6] - [8] - [9] - [10] - [11] - [12], gĂ©nĂ©ralement pour l'agriculture sur brĂ»lis, pratiquĂ©e depuis prĂšs de 12 000 ans[13].

En 2010, 6 000 communes de France mĂ©tropolitaine Ă©taient classĂ©es Ă  risques[14] et selon le PNACC-2 la moitiĂ© de la France sera soumise Ă  ce risque en 2050 en raison du rĂ©chauffement climatique.

Histoire

Les Ă©clairs et les volcans sont des source d'incendies de forĂȘt, dont on trouve des preuves palĂ©ontologiques (via les fossiles de plantes rhyniophytoĂŻdes conservĂ©s dans les couches de charbon, par exemple dans les Marches galloises) datent au moins du Silurien (−420 millions d'annĂ©es environ). Des feux de surface couvants et produisant du charbon de bois sont connus avant le dĂ©but du DĂ©vonien (−405 millions d'annĂ©es environ) ; Ă  cette Ă©poque la teneur de l'air en oxygĂšne Ă©tait plus basse, et moins propice aux feux (on voit une diminution de l'abondance du charbon de bois)[15] - [16]. Des charbons de bois fossilisĂ©s suggĂšrent que les incendies se sont poursuivis pendant tout le carbonifĂšre. Plus tard, avec l'accroissement global du taux d'oxygĂšne de l'air (passĂ© de 13% au DĂ©vonien tardif Ă  30-31% au Permien supĂ©rieur s'est accompagnĂ©e d'une rĂ©partition plus Ă©tendue des incendies de forĂȘt et probablement d'une frĂ©quence accrue[17]. Plus tard, une diminution des dĂ©pĂŽts de charbon de bois liĂ©s aux incendies de forĂȘt du permien supĂ©rieur au trias est expliquĂ©e par une diminution des niveaux d'oxygĂšne[18].

Au PalĂ©ozoĂŻque et au MĂ©sozoĂŻque les incendies ont diminuĂ©, pour ĂȘtre probablement comparables Ă  ce qu'ils Ă©taient au dĂ©but de l'AnthropocĂšne, en lien notamment avec les saisons sĂšches et humides, par exemple dans les forĂȘts de progymnospermes du DĂ©vonien et du CarbonifĂšre. Les archives fossiles des palĂ©opaysages dominĂ©s par le Lepidodendron de la pĂ©riode carbonifĂšre prĂ©sentent des pics calcinĂ©s. Les archives fossiles des forĂȘts de gymnospermes du Jurassique tĂ©moignent aussi d'incendies frĂ©quents mais lĂ©gers[18].
Une augmentation des incendies se manifeste à la fin du Tertiaire[19] ; elle est probablement due à la dispersion sur une partie de la planÚte d'un nouveau type de graminées (dite en C4), trÚs inflammables, qui ont probablement formé des prairies ou savannes brûlant périodiquement sur des terres antérieurement boisées[20]. Certains habitats propices aux incendies ont sans doute coévolué avec des arbres et autres espÚces dites pyrophytes, c'est-à-dire relativement résilients aux incendies (par exemple pour les arbres, des genres Eucalyptus, Pinus et Sequoia, dotés d'une écorce épaisse et peu combustible permettant à ces arbres d'utiliser la sérotinie[21].

Dans la pĂ©riode rĂ©cente, notamment aprĂšs la maĂźtrise du feu par les premiers humains, les incendies de forĂȘts ont parfois Ă©tĂ© trĂšs importants, Ă  Ă©chelle continentale comme en Australie. Des preuves archĂ©ologiques, et des tĂ©moignages Ă©crits historiques le montrent, y compris pour des pĂ©riodes rĂ©centes dans le nord de la France, par exemple en forĂȘt de Raismes-Saint-Amand-Wallers[22]. Des historiens ont spĂ©cifiquement Ă©tudiĂ© cette question, dont en France Henri Amouric[23]. Les archives montrent un risque relativement cyclique (des dĂ©cennies relativement calmes succĂ©dant Ă  d'autres plus propices aux feux).

Chronologie des feux de forĂȘt en France

Si l'on en croit les chroniqueurs et les archives, mĂȘme si les grands incendies Ă©taient autrefois moins frĂ©quents qu'aujourd'hui, les forĂȘts ont toujours brĂ»lĂ©[24]. Bien entendu, les zones sĂšches y sont plus sensibles ; les exemples des massifs des Maures et de l'Esterel sont parlants :

  • en 1271, un feu de mauvaises herbes, mal surveillĂ©, s'Ă©tend Ă  la forĂȘt et incendie tous les bĂątiments de la Chartreuse de la Verne ;
  • au XVIe siĂšcle, la forĂȘt des Maures est incendiĂ©e lors des combats qui opposent les armĂ©es de Charles Quint et de François Ier ;
  • du 4 au 9 aoĂ»t 1854, 4 000 hectares ;
  • du 1er au 5 septembre 1877, 10 000 hectares ;
  • du 20 au 29 juillet 1918, 10 000 hectares de Saint-RaphaĂ«l Ă  Mandelieu (et deux morts) ;
  • du 26 au 30 juillet 1921, 10 000 hectares ;
  • le 19 aoĂ»t 1923, huit morts ;
  • le 15 aoĂ»t 1927, 10 000 hectares ;
  • le 7 juillet 1943, 13 000 hectares ;
  • le 19 aoĂ»t 1949, l'incendie de la forĂȘt des Landes (Gascogne), 52 000 hectares est le plus meurtrier qu'ait connu la France. Il a fait 82 victimes (des fonctionnaires des Eaux et ForĂȘts - alors chargĂ©s de la prĂ©vention et de la lutte contre les incendies - encadrant des militaires venus prĂȘter main-forte) ;
  • le 3 octobre 1970, un feu dĂ©vaste la forĂȘt d'Auribeau-sur-Siagne (dans lequel meurent l'Ă©pouse et les 4 enfants de Martin Gray) ;
MĂ©morial aux pompiers morts lors de l'incendie de Cabasson (Bormes-les-Mimosas, Var) en 1990.
  • l'Ă©tĂ© 1976 : plus de 80 000 hectares, dont 1 000 ha dans la forĂȘt de la Palmyre[25] ;
  • l'Ă©tĂ© 1990, 10 000 hectares dĂ©truits Ă  CollobriĂšres ;
  • l'Ă©tĂ© 2003, 387 dĂ©parts de feu dans le dĂ©partement du Var, 7 d'entre eux ont dĂ©truit 18 437 hectares sur les 21 000 hectares brĂ»lĂ©s au total. Les grands feux progressaient Ă  des vitesses de 4, voire 5 ou 6 km/h ; avec des flammes de 20 mĂštres de haut. Le feu pouvait sauter sur des distances de 400 Ă  500 mĂštres, voire plus[26]. Pourtant 5 000 hectares de cet Ă©cosystĂšme, sur les communes de Les Mayons, de Gonfaron, Le Cannet-des-Maures, de La Garde-Freinet, de Vidauban avaient Ă©tĂ© classĂ©es Zone naturelle d'intĂ©rĂȘt Ă©cologique, faunistique et floristique (avec la Tortue d'Hermann qui y a son fief) ;
  • en avril 2004, 600 hectares dans le dĂ©partement du Var Ă  proximitĂ© de Brignoles ;
  • fin aoĂ»t 2010, Ă  l'est du Pic Saint-Loup (HĂ©rault) entre Saint-Mathieu-de-TrĂšviers et Castries, des centaines d'hectares ont mobilisĂ© les moyens de 3 dĂ©partements. Le feu est probablement d'origine criminelle mais l'enquĂȘte a conclu Ă  un classement sans suite.
  • en aoĂ»t 2021, dans le Var. Voir : Feux de forĂȘt de 2021 en France.
  • en juillet 2022, en Gironde et dans d'autres dĂ©partements français[27]. Voir Feux de forĂȘt de 2022 en Gironde.

La liste complÚte des incendies de ces massifs serait trop longue. De nombreux sapeurs-pompiers ont péri en luttant contre ces feux.

En Europe

Voir : CatĂ©gorie:Feu de forĂȘt en Europe

LĂ©gislation

En France, l'ordonnance de 1669 sur les Eaux et ForĂȘts prĂ©cise qu'il « est fait dĂ©fenses Ă  toutes personnes de porter et allumer le feu, en quelques saisons que ce soit, dans les forĂȘts, landes et bruyĂšres, Ă  peine de punitions corporelle et d'amende arbitraire, outre la rĂ©paration des dommages que l'incendie pourrait avoir causĂ©s »[28]. En 1706, la Chambre des eaux et forĂȘts du parlement de Provence arrĂȘte : « Il est dĂ©fendu Ă  tous les gardiens de troupeaux de mettre le feu aux bois, sous peine de punition corporelle ». Le Conseil gĂ©nĂ©ral du Var et les prĂ©fets continuent la lutte, aidĂ©s par le Code pĂ©nal (article 458) et par le Code forestier (1827), lequel en son article 148, maintient la prohibition de l'ordonnance de 1669 et l'Ă©tend Ă  une zone de deux cents mĂštres de large Ă  partir de la lisiĂšre de la forĂȘt[24].

Dans certaines forĂȘts Ă  risque, les feux peuvent ĂȘtre interdits toute ou une partie de l'annĂ©e, de mĂȘme que les feux d'artifice dans le boisement et Ă  ses abords :

  • dans les forĂȘts de guerre et autres zones contenant des munitions non explosĂ©es, les feux sont gĂ©nĂ©ralement interdits toute l'annĂ©e (par exemple dans la forĂȘt de Verdun en France) ;
  • de nombreux pays ont une lĂ©gislation interdisant ou rĂšglementant le brĂ»lage des dĂ©chets Ă  l'air libre (y compris agricoles et forestiers dans certains cas), autant parce que certains de ces brĂ»lages ont Ă©tĂ© Ă  l'origine de pollutions graves et persistantes (dioxines, PCB, furanes, mĂ©taux lourds, etc.), que pour protĂ©ger les milieux ;
  • dans certains milieux naturels protĂ©gĂ©s et gĂ©rĂ©s pour la biodiversitĂ©, un rĂšglement peut imposer le brĂ»lage des vĂ©gĂ©taux coupĂ©s sur tĂŽle avant exportation hors du site (pour que les cendres n'enrichissent pas le sol en y favorisant une eutrophisation ou dystrophisation dĂ©favorable Ă  la diversitĂ© Ă©cologique.

DĂ©gĂąts physiques

Les feux n'affectent pas que les pays chauds, ils sont fréquents en été dans les zones circumpolaires (ici : Sisjön Göteborg, en SuÚde).
Effet de l'incendie. Phase de vide, puis reprise de la strate herbacée, des buissons puis retour de la strate arborée, avec leur flore, faune et fonge spécifiques.

Moyennes annuelles

Chaque annĂ©e, plus de 60 000 feux de forĂȘt se dĂ©clarent en Europe et 8 000 au Canada. Dans le monde 350 millions d'hectares sont touchĂ©s par an (six fois la taille de la France ; deux fois plus que trente ans plus tĂŽt, malgrĂ© des moyens accrus de lutte). La forĂȘt amazonienne est particuliĂšrement touchĂ©e : lors des pires annĂ©es de sĂšcheresse (2005, 2007 et 2010), la surface parcourue par les feux de sous-bois a mĂȘme supplantĂ© la dĂ©forestation directe par l'humain. En dix ans, 85 500 km2 ont Ă©tĂ© ainsi dĂ©truits, soit presque 3 % du « poumon » amazonien. Le 20 aoĂ»t 2019, Ă  la suite des nombreux incendies ravageant l'Amazonie, l'INPE a signalĂ© la dĂ©tection de « 39 194 incendies dans la plus grande forĂȘt tropicale du monde » depuis janvier[29]. Cela reprĂ©sente une augmentation de 77 % du nombre d'incendies par rapport Ă  la mĂȘme pĂ©riode en 2018.

Surfaces brĂ»lĂ©es chaque annĂ©e (environ ; NB : 1 kmÂČ = 100 ha) :

  • IsraĂ«l : 35 km2, soit 0,17 % du territoire
  • États-Unis : 17 400 km2, soit 0,18 % du territoire
  • France : 300 km2, soit 0,05 % du territoire et 0,16 % de la forĂȘt
  • GrĂšce : 271 km2, soit 0,20 % du territoire total.
  • Espagne : 1 570 km2, soit 0,31 % du territoire
  • Portugal : 426 km2, soit 0,46 % du territoire (Ă©tude menĂ©e sur la pĂ©riode 1956-1996 par la FAO)
  • Italie : 940 km2, soit 0,31 % du territoire, avec 8 300 feux par an en moyenne (Ă©tude menĂ©e sur la pĂ©riode 1962–1996 par la FAO)
  • Maroc : 30 km2, d'aprĂšs les statistiques du service des incendies de forĂȘts
  • SibĂ©rie : 10 000 km2 en moyenne, mais plus de 30 000 km2 en juin-juillet 2019[30]
Surface forestiÚre détruite annuellement au Canada par provinces et territoires ; les statistiques montrent de grandes variations régionales dans le risque d'incendie.

Feux exceptionnels

Les feux sont de plus en plus fréquents et importants en Australie et dans le monde, en dépit de moyens de lutte de plus en plus conséquents.
  • 1987 :
    • Chine : un incendie dĂ©truit 13 000 km2 de forĂȘt d'un seul tenant en un mois[31]. « Il a entraĂźnĂ© une prise de conscience gĂ©nĂ©rale qui s'est traduite par des lois sur la protection des forĂȘts et une politique de prĂ©vention et de lutte. Les surfaces brĂ»lĂ©es ont depuis Ă©tĂ© divisĂ©es par dix[31] ».
  • 1991 :
    • Portugal : 1 820 km2, soit 2 % du territoire
  • 1993 :
    • Italie : 2 300 km2, soit 0,76 % du territoire
  • 1997 :
    • IndonĂ©sie : de septembre Ă  novembre, de grands incendies ravagent pendant deux mois les forĂȘts indonĂ©siennes, rejetant suffisamment de fumĂ©e dans l'atmosphĂšre pour recouvrir toutes les rĂ©gions d'un brouillard qui a atteint le sud de la ThaĂŻlande et les Philippines au nord, la Malaisie et Singapour Ă©tant particuliĂšrement touchĂ©s. Une superficie Ă©quivalente Ă  celle du Costa Rica (51 100 km2) a Ă©tĂ© entiĂšrement rasĂ©e. « Les experts s'accordent Ă  reconnaĂźtre que les grands incendies de forĂȘt de 1997 et 1998 en IndonĂ©sie ont Ă©tĂ© une catastrophe Ă©cologique mondiale »[32] - [33].
  • 2003 :
    • Portugal : 4 249 km2, soit 4,6 % du territoire ; 20 morts ;
    • France : 740 km2 ; 10 morts ;
  • 2005 :
  • 2007 :
  • 2010 :
  • 2019 :

DĂ©gĂąts Ă©cologiques

Les rayons UV Ă©mis par le soleil (ici voilĂ© par la fumĂ©e d'un feu de forĂȘt au Portugal) interagissent avec les aĂ©rosols et gaz de combustion pour former une pollution photochimique.
Les fumées modifient la nébulosité et peuvent « créer » des cumulus artificiels dits « Pyrocumulus », ici observé par la NASA au-dessus de la Floride en aval d'un feu.

Des incendies Ă©pisodiques dĂ©clenchĂ©s par la foudre sont - dans une certaine mesure - normaux en forĂȘt ; ils tuent de nombreux organismes fixĂ©s ou incapables de fuir. Les Ă©cosystĂšmes y sont adaptĂ©s, mais des feux anormalement frĂ©quents et/ou violents ou rĂ©pĂ©tĂ©s freinent la rĂ©gĂ©nĂ©ration des sols et affectent la capacitĂ© de rĂ©silience Ă©cologique de l'Ă©cosystĂšme. Ainsi en Asie du Sud-Est, en Afrique et localement en AmĂ©rique du Sud, de nombreux feux volontaires contribuent Ă  la dĂ©forestation et parfois Ă  la dĂ©sertification et/ou Ă  des phĂ©nomĂšnes graves d'Ă©rosion (Ă  Madagascar par exemple).

Les feux de forĂȘt sont aussi d'importantes sources de pollutions[37], qui varient selon le type de forĂȘt, d'incendie et l'humiditĂ© des vĂ©gĂ©taux.

Effets sur le sol

AprĂšs un incendie, le sol est plus vulnĂ©rable Ă  l'Ă©rosion par exemple Ă  la suite de la disparition de l'humus, Ă  la formation d'une croĂ»te de « cuisson » du sol, au dĂ©pĂŽt d'une couche hydrophobe de cendres qui diminuent la permĂ©abilitĂ© du sol[38] - [39], en l'absence de vĂ©gĂ©tation. 500 Ă  2 000 tonnes de terres peuvent ainsi ĂȘtre emportĂ©es par km2/an, pour un site perdant 10 Ă  30 tonnes/an en temps normal. L'Ă©rosion Ă©olienne du sol brĂ»lĂ© et du tapis de cendres et particules rĂ©siduelles deviennent pour plusieurs mois ou annĂ©es une nouvelle source d'aĂ©rosols source de pollution de l'air ou de l'eau (en plus de ceux formĂ©s par le feu lui-mĂȘme)[40]. En cas de pluies intenses, les risques de coulĂ©es de boues ou d'inondation augmentent[31]. Le puits et le stock de carbone sont dĂ©gradĂ©s pour plusieurs mois ou annĂ©es : une grande quantitĂ© de carbone et de nutriments sont perdus vers les cours d'eau ou emportĂ©s par le vent ; ainsi Gimeno-Garcia et al. (2000) ont mesurĂ© une Ă©rosion fortement aggravĂ©e 4 mois aprĂšs des feux expĂ©rimentaux en maquis mĂ©diterranĂ©en et les zones exposĂ©es aux feux les plus intenses perdaient alors encore un peu plus de 4 tonnes de sol par hectare (contre 3,3 environ dans les zones modĂ©rĂ©ment brĂ»lĂ©es)[41].

Un autre impact concerne la capacitĂ© de rĂ©gĂ©nĂ©ration du sol, et donc de la forĂȘt, aprĂšs des feux rĂ©pĂ©tĂ©s sur de courts intervalles de temps. C'est ce qu'ont dĂ©montrĂ© les scientifiques dans le cadre du programme IRISE[42] (2003-2007). Ils ont montrĂ© qu'une forĂȘt peut se rĂ©gĂ©nĂ©rer si les feux interviennent tous les 25 ans. En revanche ce n'est plus le cas pour deux incendies trĂšs rapprochĂ©s dans le temps (Ă  moins de 10 ans d'intervalle) ou pour un seuil de quatre feux sur 50 ans. « À ce seuil, on constate la rarĂ©faction d'espĂšces et de communautĂ©s essentielles au fonctionnement de l'Ă©cosystĂšme (microfaune et vers de terre), ainsi que la diminution du stock de matiĂšre organique et de sa qualitĂ© »[43].

Effets sur l'eau

Ils varient selon le contexte écopaysager, et selon l'intensité et la durée du feu.

  • De maniĂšre gĂ©nĂ©rale, un premier effet de court terme se manifeste dĂšs les premiĂšres fortes pluies : il s'agit d'une brusque accĂ©lĂ©ration des flux des cours d'eau drainant la partie brulĂ©e du bassin versant. Cet effet est d'autant plus marquĂ©e que la pente, la pluviomĂ©trie ou l'impermĂ©abilitĂ© du substrat sont fortes. En effet, une forte chaleur au niveau du sol peut le rendre fortement hydrophobique et exacerber l'Ă©rosion ou le ruissellement[44].
    Ainsi Gottfried et al. (2003) ont notĂ© des dĂ©bits de pointe historiquement Ă©levĂ©s aprĂšs deux incendies de forĂȘt diffĂ©rents. AprĂšs l'incendie de Rodeo-Chediski dans le bassin-versant de Stermer Ridge, un dĂ©bit de pointe (6,6 m3/s) a Ă©tĂ© 2350 fois plus Ă©levĂ© que le dĂ©bit de pointe historique avant incendie. L'incendie des forĂȘts de Coon Creek, autre cas d'Ă©tude, dans la Sierra Ancha (Arizona), et a provoquĂ© un dĂ©bit de pointe post-dans ce cas plus de sept fois supĂ©rieur au record historique.
    Belillas et Roda dans une autre étude (1993) faite dans les landes du nord-est de l'Espagne a montré que dans ce contexte, le débit annuel moyen des cours d'eau avait augmenté de 36% (moyenne pour les ans ayant suivi l'incendie)[45].
    Elliott et Parker notent (en 2001) des inondations gĂ©nĂ©rĂ©es par la dĂ©vĂ©gĂ©talisation induite par un grave incendie de forĂȘt du centre du Colorado, alors que les pluies n'avaient induit qu'un ruissellement mineur dans les zones pĂ©riphĂ©riques non-brĂ»lĂ©es[46]. Minshall et al. rapportent en 2001 des rĂ©sultats comparables au centre de l'Idaho[47].
    Si l'incendie n'a gĂ©nĂ©rĂ© que peu de chaleur (en cas de litiĂšre humide et peu combustible au moment du feu par exemple) alors un effet contraire est parfois relevĂ©, comme par Kutiel et Inbar[48] qui en 1993 ont constatĂ© une diminution du ruissellement aprĂšs l'incendie « modĂ©rĂ© » d'une forĂȘt de pins en IsraĂ«l, cette diminution inattendue peut ĂȘtre liĂ©e Ă  un mĂ©lange de cendre qui Ă©ponge des pluies trop faibles pour induire un lessivage et Ă  un incendie modĂ©rĂ© qui n'a fait que brĂ»ler la surface de la litiĂšre, en conservant la structure du sol, alors qu'une partie des arbres ont conservĂ© leur canopĂ©e (qui intercepte les prĂ©cipitations et/ou en rĂ©duit l'intensitĂ© au sol selon DeBano (1999)[49].
    AprĂšs les grands feux de forĂȘt qui brĂ»lent indistinctement des vĂ©gĂ©taux, animaux et champignons, la litiĂšre organique et qui cuisent une partie du sol superficiel, les tapis de cendres sont parfois massivement lessivĂ©s ou dissĂ©minĂ©s par les eaux pluviales et le ruissellement (notamment en cas d'orages et de tempĂȘte (Lewis, W.M. Jr. 1974, Wondzell and King 2003) et/ou de forte pente par exemple).
    Ces cendres peuvent alors polluer les cours d'eau récepteurs, voire les eaux de nappe phréatique (en contexte karstique notamment) éventuellement utilisées pour produire de l'eau potable[50].
    Le bois brĂ»lĂ© peut ĂȘtre source de mĂ©taux lourds, de dioxines et d'autres organochlorĂ©s. Les effets varient selon le contexte Ă©copaysager, pĂ©dologique et gĂ©ologique (porositĂ© du sol, pH...), et selon que l'on considĂšre les eaux de surfaces ou les eaux de nappes.
    Une Ă©tude amĂ©ricaine a comparĂ© des analyses d'eau potables faite avant et aprĂšs un grand incendie dans deux bassin-versants source d'eau potable pour de grandes collectivitĂ©s. Des effets Ă  court terme ont Ă©tĂ© une augmentation des teneurs en nutriments (carbone organique, phosphates, nitrates), en ions divers (chlore, sels mĂ©talliques...) et en particules (aprĂšs des tempĂȘtes ultĂ©rieures au feu)[50]. Dans un cas aprĂšs un feu dirigĂ© prescrit en Caroline du Sud, aprĂšs le passage du feu, Lewis (1974) a montrĂ© que la pluie a lessivĂ© de trĂšs hautes quantitĂ© de nitrates et de phosphates : le taux de nitrate du cours d'eau drainant ce bassin versant est ainsi passĂ© (aprĂšs les premiĂšres pluies) de 5,300mg-N/L Ă  un taux record de 14,000mg-N/L (quasi-triplement), alors que le taux de phosphates passait lui de 0,077mg-P/L Ă  1,033mg-P/L (multipliĂ© par 13).
    Les teneurs de l'eau en éléments traces métalliques ont également augmenté, mais dans ces deux cas seul le sélénium a dépassé le teneurs maximales imposées par l'EPA (Agence américaine de protection de l'environnement).
  • À long terme d'autres effets, retardĂ©s, proviennent d'une mobilisation d'Ă©ventuels sels ou polluants prĂ©sents dans la fraction particulaire qui a sĂ©dimentĂ© dans les fonds de fossĂ©s, ruisseaux, riviĂšres, fleuves ou lacs[50]. Des polluants organiques, organomĂ©talliques ou mĂ©talliques peuvent alors ĂȘtre dissous dans l'eau et diffusĂ©s dans les eaux potables.
    La matiĂšre organique servira en partie de source d'Ă©nergie Ă  divers microorganismes pouvant ĂȘtre source d'eutrophisation et/ou source de problĂšmes de goĂ»t et d'odeur l'eau du robinet[50] - [51]. Des mĂ©taux comme l'arsenic et le sĂ©lĂ©nium ont Ă©tĂ© dĂ©tectĂ©s dans ces Ă©tudes[50].
    Dans certains cas aprĂšs un incendie Ă©tudiĂ© en Asie du Sud-Est (Malmer 2004) les taux de nitrates, d'azote total et d'ammoniac Ă©tait respectivement augmentĂ©s de 2 970 %, 217 % et 670 %. Les taux de nitrates et d'azote total sont redevenus normaux environ 12 mois aprĂšs l'incendie, mais le taux d'ammoniac, s'il a diminuĂ© aussi, restait nĂ©anmoins un an aprĂšs le feu environ deux fois supĂ©rieur Ă  celui mesurĂ© avant le feu[52].

Pollution de l'air

L'imagerie satellitale montrent les panaches d'aĂ©rosols denses qui causent une pollution ponctuelle ou chronique parfois jusqu'Ă  plusieurs milliers de kilomĂštres de leur origine (par exemple dans le cas du Dixie Fire de l'Ă©tĂ© 2021 en Californie)[53]. Avec le dĂ©rĂšglement climatique, ces feux « augmentent en frĂ©quence, en taille et en intensitĂ© dans le monde, et les saisons de fumĂ©e s'allongent »[53]. Selon Sam Heft-Neal (Ă©conomiste de l'environnement Ă  l'UniversitĂ© de Stanford, Ă©tudiant les risques des incendies de forĂȘt pour la santĂ©) le annĂ©es 2015-2020 ne sont pas comparables aux 10 Ă  15 ans prĂ©cĂ©dents « c'est comme un rĂ©gime de feu totalement diffĂ©rent »[53] ; ainsi la fumĂ©e des incendies de l'Ă©tĂ© noir australien a nuit Ă  des millions de personnes Ă  la fois (80 % de la population a Ă©tĂ© concernĂ©e), causant plusieurs milliers d'hospitalisations et des centaines de dĂ©cĂšs supplĂ©mentaires[54] - [55]. Des effets nĂ©gatifs sur la santĂ© mentale des australiens ont aussi Ă©tĂ© constatĂ©s[56].

La pollution de l'air gĂ©nĂ©rĂ©e par les feux de forĂȘt est un problĂšmes de santĂ© publique : les fumĂ©es exposent des populations Ă  des taux nocifs de monoxyde de carbone, de formaldĂ©hyde, d'acrolĂ©ine, d'hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) et autres composĂ©s organiques volatils (COV), des goudrons et des suies cancĂ©rigĂšnes, et ce d'autant plus que le bois Ă©tait humide. On suspecte[57] que prĂšs des mers (ou aprĂšs les largages d'eau de mer par des avions bombardiers d'eau), le chlore issus du sel marin produit au contact de la matiĂšre organique en feu des organochlorĂ©s toxiques tels que dioxines et furanes. L'INERIS a analysĂ© en 2003 les fumĂ©es de quelques feux correspondant Ă  une surface dĂ©broussaillĂ©e de m2, dans une chambre de combustion de 80 m3 surmontĂ©e d'une hotte d'extraction des fumĂ©es : les Ă©missions de dioxines et furanes Ă©taient en moyenne de 10,5 ng I.TEQ/kg de biomasse brĂ»lĂ©e (de 1,0 Ă  25,9). Dans cette expĂ©rience, ce n'est pas la combustion des vĂ©gĂ©taux collectĂ©s prĂšs de la mer, mais celle de ceux qui Ă©taient les plus humides qui a produit le plus de polluants (CO, NOx et COVT) et d'organochlorĂ©s. Par contre les vĂ©gĂ©taux trĂšs secs s'ils Ă©mettaient bien moins de CO et COVT en brĂ»lant, produisaient beaucoup plus de NOx. Mais il ne s'agissait pas dans ce cas d'arbres vivants, et les tempĂ©ratures n'atteignaient pas celles des grands incendies[58]. Les taux de PM2.5 sont parfois plus de 15 fois supĂ©rieurs Ă  la norme maximale d'exposition sur 24 heures Ă©tablie par l'EPA (35 microgrammes par mĂštre cube d'air) [53].

Ces fumĂ©es affectent d'abord les yeux et les voies respiratoires. Leur inhalation augmente la production de cortisol, induit un pic de glycĂ©mie, qui ensemble dĂ©rĂšglent le rythme cardiaque et rendent le sang plus coagulable. Les muqueuses pulmonaires sont enflammĂ©es, rendant la respiration plus difficile. Prunicki a rĂ©cemment (2019) montrĂ© que chez les enfants - mĂȘme Ă  plus de 100 km du feu de forĂȘt - la fumĂ©e inhalĂ©e induit d'importants changements dans les biomarqueurs de dysfonctionnement immunitaire et cardiovasculaire[59].

Ces fumĂ©es causent chaque annĂ©e des dizaines Ă  des centaines de milliers de dĂ©cĂšs prĂ©maturĂ©s de par le monde[60] - [53], via des effets Ă  court termes (toux, maux de tĂȘte, vertiges, nausĂ©es) et Ă  long terme (altĂ©ration des fonctions respiratoires et cardiaques, risque accru de certains cancers).
La fumée peut aggraver l'état d'asthmatiques[61] et prédisposer des gens en bonne santé ou fragiles à certaines maladies infectieuses (respiratoires notamment) et/ou exacerber les symptÎmes inflammatoires aggravant ces maladies (ex : COVID-19, grippe). Une étude statistique récente (2021)[62] a conclu que le taux accru de PM2.5 lié aux incendies de 2020 à Washington et en Californie ou en Oregon était corrélé à environ 19 700 cas supplémentaires de COVID-19 et 750 morts. Des chercheurs ont montré que les particules émises par le bois qui brûle altÚrent, dans les cellules épithéliales nasales humaines infectées par le SRAS-CoV-2, l'expression des gÚnes qui codent la réponse immunitaire contre le virus[63].

Dans certains cas, le port de masque filtreur est fortement conseillé pour limiter l'inhalation de poussiÚres, de particules fines et de gaz toxiques.

Métaux lourds et radioactivité

La combustion d'arbres ayant bio-accumulĂ© des mĂ©taux lourds ou des radionuclĂ©ides (par exemple aprĂšs les essais nuclĂ©aires dans l'atmosphĂšre ou aprĂšs le passage du nuage radioactif Ă©mis lors de la catastrophe de Tchernobyl, Ă  la suite des essais nuclĂ©aires dans l'atmosphĂšre ou ayant poussĂ© sur des sols naturellement radioactifs) est source de pollutions mĂ©talliques. Le plomb (rĂ©pandu en forĂȘt Ă  la suite de son usage dans les munitions de chasse et de guerre), ainsi que le mercure sont particuliĂšrement volatils Ă  des tempĂ©ratures trĂšs infĂ©rieures Ă  celles atteintes par les feux de forĂȘt.

Pollution photochimique

Les gaz Ă©mis interagissent avec les rayons solaires ultraviolets pour produire une pollution dite photochimique.

Gaz Ă  effet de serre

Les incendies de forĂȘt rejettent de grandes quantitĂ©s de gaz carbonique, puissant gaz Ă  effet de serre. Selon Greenpeace, les Ă©missions mondiales ont Ă©tĂ© de 7,7 Gt par an en moyenne entre 1997 et 2017, soit 1,45 fois les Ă©missions des États-Unis[64].

En dĂ©cembre 2020, une Ă©tude en ligne[65] du Service Copernicus pour la surveillance de l'atmosphĂšre (CAMS), branche du programme europĂ©en Copernicus, rĂ©vĂšle que, malgrĂ© les incendies dĂ©vastateurs survenus en 2020, comme ceux qui ont ravagĂ© d'immenses territoires du continent australien, 2020 se solde mĂȘme par « une nouvelle diminution » des Ă©missions de CO2 liĂ©e Ă  ces dĂ©sastres Ă©cologiques. L'annĂ©e 2020 a Ă©tĂ© « l'une des plus calmes pour les incendies actifs Ă  l'Ă©chelle mondiale » : environ 1 690 Mt de carbone ont Ă©tĂ© rejetĂ©es dans l'atmosphĂšre entre le 1er janvier et le 7 dĂ©cembre 2020, contre 1 870 Mt en 2019. Ces rejets se situaient Ă  prĂšs de 3 000 Mt par an en 2003 ; les experts de Copernicus constatent une « diminution progressive des taux d'Ă©mission » qu'ils attribuent « Ă  une meilleure gestion des incendies et Ă  des mesures de mitigation ». Alors que l'activitĂ© du feu dans le Sud de l'Afrique tropicale a Ă©tĂ© trĂšs faible en 2020, elle a notablement augmentĂ© en SibĂ©rie, dans le Colorado, la Californie, dans le sud du BrĂ©sil (rĂ©gion du Pantanal), en AmĂ©rique centrale et surtout en Australie (plus de 400 Mt)[66].

De plus, l'incendie favorise le lessivage de la matiĂšre organique des sols qui Ă©taient une partie du puits de carbone forestier. Cependant, si la combustion a Ă©tĂ© lente (en zone humide et pluvieuse), les charbons de bois, incorporĂ©s au sol contribueront provisoirement Ă  adsorber et stabiliser certains toxiques, le temps qu'ils soient dĂ©gradĂ©s par les microbes et champignons du sol, ce qui favorise la restauration du substrat. Ce charbon de bois pourraient ainsi avoir jouĂ© un rĂŽle dans certains sols tropicaux pauvres oĂč l'apparition d'un sol anormalement riche et productif, la terra preta leur semble pour partie liĂ©e.

En France, mĂȘme si la plupart des incendies sont anthropiques, en 2018 ces polluants — hormis parfois le CO2 en tant que gaz Ă  effet de serre — ne sont toujours pas comptabilisĂ©s dans les cadastres et inventaires nationaux. Pourtant, rien qu'en mĂ©tropole française, de 1980 Ă  2000, ce sont 5 218 feux de forĂȘt par an et 30 738 hectares brĂ»lĂ©s par an[67] qui ont Ă©tĂ© sources d'une pollution de l'air non mesurĂ©e ni Ă©valuĂ©e.

MĂ©canisme

Lorsque les réserves d'eau du sol sont entre 100 et 30 %, l'évaporation de l'eau des plantes est compensée par l'eau puisée dans la réserve du sol et un peu par le phénomÚne de rosée. En dessous de ce seuil, la plante ne peut plus s'hydrater, et chez certaines espÚces ce sont les essences de la plante qui s'évaporent. En cas de sÚcheresse prolongée, on a donc d'une part une atmosphÚre contenant des essences inflammables, et d'autre part des plantes trÚs sÚches donc trÚs inflammables.

Les plantes poussant sur des sols siliceux (comme le maquis) sont à ce titre moins exposées que les plantes poussant sur sol calcaire (comme la garrigue).

La fragmentation des forĂȘts par des routes peut diminuer la captation d'eau par les sols et augmenter (presque doublement en montagne) le dĂ©bit maximum de crue[68] des cours d'eau forestier[69]. En forĂȘt tropicale l'analyse de 14 ans d'imagerie satellite pour de l'est de l'Amazonie a montrĂ© que plus la fragmentation anthropique des forĂȘts est importante, plus le risque d'incendie augmente[70].

Propagation caractĂ©ristique d'un feu de forĂȘt en forme d'ellipse.

Une fois déclaré, le feu peut progresser :

  • par le bas, en « rampant » (propagation par les broussailles, les dĂ©bris organiques sur le sol) ;
  • par les cimes ;
  • par Ă©lĂ©ments enflammĂ©s emportĂ©s par le vent ; il peut ainsi « sauter » une zone incombustible comme une route, voire une autoroute.

Sur un terrain plat et avec une végétation homogÚne, il se propage en forme d'ellipse, dans l'axe du vent. Dans le Sud-Est de la France, on estime qu'il progresse à environ 3 à 8 % de la vitesse du vent selon les terrains (pente, densité et nature de la végétation).

Bien que l'on soit en plein air, il peut se produire dans certains cas un embrasement gĂ©nĂ©ralisĂ© Ă©clair (EGE, ou flashover), dĂ» Ă  l'accumulation d'une poche de gaz de pyrolyse ; on peut ainsi voir plus de 50 000 m2 s'embraser instantanĂ©ment (dĂ©tails dans l'article sur l'EGE). La variation des tempĂ©ratures autour du brasier peut Ă©galement mener au dĂ©veloppement de tourbillons de feu.

En Australie et au Canada, lorsque de gigantesques incendies se dĂ©clarent, on peut observer des phĂ©nomĂšnes de « sautes de feux ». Des particules enflammĂ©es (Ă©corce, feuilles, brindilles, cĂŽnes de pins
) sont emportĂ©es par des colonnes de convection en avant du front de flammes sur de grandes distances. Elles peuvent alors dĂ©clencher un nouveau dĂ©part de feu quelques centaines de mĂštres plus loin. En Europe, les incendies de forĂȘts sont moins puissants et ce phĂ©nomĂšne Ă©tait peu connu, jusqu'Ă  ce que le programme europĂ©en Saltus en rĂ©vĂšle aussi l'existence, avec un maximum de saute de feu Ă  2,4 km observĂ© en Espagne[71].

Causes

Les services forestiers amĂ©ricains et canadiens ont, les premiers, expĂ©rimentĂ© une mĂ©thode d'analyse des causes d'incendies de forĂȘt dans les annĂ©es 1950. Ils ont Ă©tĂ© suivis en Europe, par le Portugal en 1989, puis par l'Espagne en 1991[72]. Les mĂ©thodes de recherche utilisĂ©es en Espagne, au Portugal et aux États-Unis ont Ă©tĂ© adaptĂ©es en 2008 au contexte français et mises Ă  disposition des diffĂ©rents acteurs intervenant dans la recherche des causes de dĂ©part de feu sous la forme d'un guide de rĂ©fĂ©rence[4].

Une Ă©tude rĂ©alisĂ©e par Irstea Ă  partir des donnĂ©es fournies par PromĂ©thĂ©e (une base de donnĂ©es sur les incendies de forĂȘts dans les 15 dĂ©partements mĂ©diterranĂ©ens français) entre 1996 et 2006, a permis d'Ă©tablir des statistiques sur les causes de dĂ©parts de feux[73] :

  • causes inconnues : plus de 30 %
  • causes naturelles (la foudre par exemple) : 8 % des causes connues. Cette proportion est beaucoup plus Ă©levĂ©e dans d'autres pays oĂč la forĂȘt recouvre un grand territoire, jusqu'Ă  30 % au QuĂ©bec[74], avec de grandes surfaces concernĂ©es.
  • causes humaines :
    • involontaires liĂ©es Ă  des actes d'imprudence (jets de mĂ©gots) ou Ă  des accidents (circulation en forĂȘt ou en pĂ©riphĂ©rie, lignes Ă©lectriques, dĂ©pĂŽts d'ordures, brĂ»lage de rĂ©manents
) : plus de 50 % des causes connues ;
    • volontaires, comme des actes de pyromanie, de vengeance ou de stratĂ©gie politique ou administrative : 39 % des causes connues.

DiffĂ©rentes bases de donnĂ©es rĂ©pertorient en France et en Europe les donnĂ©es sur les feux dĂ©clarĂ©s dans les espaces naturels et les forĂȘts, quelle que soit leur surface[75]. "GrĂące aux informations collectĂ©es sur les feux, les bases de donnĂ©es permettent l'analyse spatio-temporelle du nombre des feux, de la surface brĂ»lĂ©e ou des causes de dĂ©part de feux. Une meilleure prĂ©vention des dĂ©parts de feu est alors possible"[76]. Compte tenu de l'hĂ©tĂ©rogĂ©nĂ©itĂ© des donnĂ©es liĂ©es aux causes de dĂ©part de feux, un travail d'harmonisation a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ© 2009, Ă  la demande de l'Union europĂ©enne (coordination Irstea et financement JRC). Ces donnĂ©es normalisĂ©es sont dĂ©sormais consultables sur la plateforme EFFIS (European Forest Fire Information System)[77]. Au QuĂ©bec, des donnĂ©es statistiques de feux de forĂȘts classĂ©s par cause sont disponibles sur le site de la SOPFEU[74].

Le rĂ©chauffement climatique exacerbe le risque de feux : les donnĂ©es du satellite Aqua (NASA) montrent une augmentation des nuits chaudes (qui empĂȘchent la formation de rosĂ©e), une baisse du taux d'humiditĂ© nocturne de la forĂȘt qui se traduisent par un assĂšchement des sols[78].

Gestion des feux de forĂȘt

Plusieurs difficultés sont fréquentes :

  • approche difficile du foyer sur terrains accidentĂ©s, isolĂ©s ou Ă©loignĂ©s ;
  • foyers Ă©tendus ou multiples ;
  • incendies criminels, moins prĂ©visibles ;
  • progression rapide du feu, qui peut encercler les secours ;
  • contextes de sĂ©cheresses oĂč l'eau peut manquer pour les secours.

PrĂ©vention, information et recommandations concernant les feux de forĂȘt

Affiche amĂ©ricaine de prĂ©vention des feux de forĂȘt destinĂ©e Ă  notamment sensibiliser les scouts.

Il est généralement préconisé de :

  • respecter la rĂšglementation sur le feu en forĂȘt. En France par exemple, en Ă©tĂ©, dans les zones soumises Ă  des rĂšglementations spĂ©cifiques, l'usage du feu en zone forestiĂšre et Ă  moins de 200 m d'une zone de forĂȘt est interdit : feux de camp et Ă©cobuages sont prohibĂ©s. De mĂȘme, il est interdit de fumer en forĂȘt lors des pĂ©riodes de sĂšcheresse ;
  • se renseigner (Ă  la mairie) sur les pĂ©riodes autorisĂ©es ;
  • ne pas bloquer ni emprunter les pistes rĂ©servĂ©es aux services de secours. Il est souvent interdit de pratiquer des activitĂ©s de type motocross, quad et engins motorisĂ©s dans des zones forestiĂšres non appropriĂ©es ; les dĂ©gradations des sols peuvent en effet limiter les capacitĂ©s d'intervention des vĂ©hicules de secours et de DFCI. De surcroĂźt, ces activitĂ©s sont nuisibles Ă  l'environnement.

Mesures courantes de prévention

  • L'interdiction de faire des feux, assortie de mesures de sensibilisation, d'information et de rĂ©pression (surveillance policiĂšre) ; la plupart des dĂ©parts de feux Ă©tant d'origine humaine ;
  • La mise en place de vigie en pĂ©riode critique, avec prĂ©positionnement de moyens (tours de surveillance, rĂ©servoirs d'eau gonflables, guet aĂ©rien armĂ© d'avions bombardiers d'eau
) ; la surveillance peut aussi s'effectuer avec des sortes de ballons dirigeables (projet Hellion), et certaines entreprises proposent maintenant des drones capables d'observer dans l'infra-rouge ;
  • Des annĂ©es 1970 aux annĂ©es 2000, les autoritĂ©s ont souvent encouragĂ© ou rendu obligatoire un entretien dirigĂ© des massifs boisĂ©s avec obligation de dĂ©broussaillement et crĂ©ation d'allĂ©es pare-feux (ou « coupe-feux »), qui, Ă  dĂ©faut d'empĂȘcher la progression du feu, permettent la progression des engins et assurent des zones de repli. En 2022, un rapport sĂ©natorial français constate l'utilitĂ© de la mesure et reccomande d'encourager l'application de la lĂ©gislation en matiĂšre de dĂ©broussaillage[79] ;
    hors de la saison sĂšche (essentiellement en hiver en Europe), on pratique localement des brĂ»lages dirigĂ©s comme alternative aux coupes : ce sont des feux maĂźtrisĂ©s destinĂ©s Ă  faire des « coupures » moins inflammables dans la forĂȘt ;
  • La cartographie des risques, permise notamment par les donnĂ©es satellitaires (spectrographie, Lidar, radar...)[80]. L'analyse des donnĂ©es spatiales Ă  trĂšs haute rĂ©solution permet aussi de cartographier et suivre le dĂ©broussaillement dans les zones Ă  risques[81].
  • L'Ă©tablissement de plans d'intervention et d'engagement de moyens. Leur ampleur et les difficultĂ©s de mise en Ɠuvre varient fortement selon les contextes. En France, la forĂȘt des Landes de Gascogne (10 000 km2) n'exige pas les mĂȘmes moyens que le massif des Maures (335 km2) ; ce dernier, bien que plus petit, est en effet plus exposĂ© et sujet Ă  des ravages bien plus importants. De plus, dans la premiĂšre forĂȘt, les exigences d'entretien correspondent aux intĂ©rĂȘts Ă©conomiques (exploitation d'une forĂȘt artificielle de pins des Landes). Dans le second cas, l'entretien se heurte Ă  des intĂ©rĂȘts plus conflictuels : lobby des chasseurs qui s'oppose au dĂ©broussaillement (les sous-bois abritant des sangliers), les maires qui autorisent les constructions d'habitations isolĂ©es pour attirer des capitaux, l'abandon du chĂȘne-liĂšge au profit du pin, plus rentable mais rĂ©putĂ© plus facilement inflammable
 En zone sub-sahĂ©lienne, le moment oĂč il faudrait entretenir les pare-feux est celui oĂč les agriculteurs et villageois sont le plus occupĂ©s aux champs.
  • La prĂ©vision mĂ©tĂ©orologique : les organismes de surveillance mĂ©tĂ©orologique (par exemple MĂ©tĂ©o-France) jouent un rĂŽle capital en signalant les moments oĂč les risques sont maximaux (temps sec et venteux). En 1976, le Canada a dĂ©veloppĂ© un modĂšle empirique de calcul de risque ; la France s'en est inspirĂ©e pour le calcul de l'indice forĂȘt mĂ©tĂ©o (IFM) qui quantifie le risque. DiffĂ©rents modĂšles informatiques existent pour l'aide Ă  la gestion du risque d'incendie.
  • La modĂ©lisation et l'anticipation des incendies, avec par exemple des Ă©tudes menĂ©es sur de vastes territoires comme en Amazonie[82]. En France, l'UniversitĂ© de Corse a une Ă©quipe de ModĂ©lisation du comportement et impacts du feu[83].
  • Le recours Ă  l'intelligence artificielle[84] ; ainsi l'ONG Hand (Hackers Against Natural Disasters), aprĂšs avoir travaillĂ© sur les tsunamis aux Antilles a Ă©laborĂ© en 2018 des codes open source utiles Ă  la modĂ©lisation des feux de forĂȘt dans le sud de la France.
  • Analyser : tempĂ©rature, taux d'humiditĂ© de l'air, vent, Ă©tat des sols et de la vĂ©gĂ©tation : ces donnĂ©es sont collectĂ©es et centralisĂ©es Ă  Bordeaux pour le sud-ouest, et Ă  Valabre pour le sud-est.
    Le Winchester Mountain Fire Lookout, une tour de guet de surveillance des incendies de forĂȘt, dans l'État de Washington (États-Unis).
  • Surveiller : sur les zones Ă  risque, pompiers et camions sont postĂ©s Ă  titre prĂ©ventif pour rĂ©duire les dĂ©tails d'intervention. Les avions bombardiers d'eau opĂšrent aussi une veille, les soutes pleines d'eau.
  • AmĂ©nager et dĂ©broussailler : dans les forĂȘts, on crĂ©e des percĂ©es pour ralentir le feu. En France, dĂ©broussailler est obligatoire sur cinquante mĂštres autour des maisons particuliĂšres et autres Ă©difices.
  • Informer : 23 % des mises Ă  feu dont l'origine est connue rĂ©sultent d'imprudences. D'oĂč l'importance des messages de prĂ©vention.
  • Depuis 2015, le site feuxdeforet.fr[85] signale, Ă  l'aide d'une communautĂ© de 100 000 personnes, tous les dĂ©parts de feu en France.

Aménagement du territoire

En France, les plans locaux d'urbanisme, les plans de prĂ©vention des risques naturels... peuvent contribuer Ă  rĂ©duire le risque en limitant l'habitat isolĂ© en forĂȘt et en imposant des rĂšgles d'entretien entre la forĂȘt et la ville.

D'autres politiques sont quant à elles favorables à la prévention du risque incendies. C'est le cas par exemple des politiques favorisant le maintien ou la réactivation de l'agriculture (qui permet de fragmenter les grands espaces forestiers) ou encore l'exploitation et la valorisation forestiÚre pour le bois[31].

Exemple de cartographie des interfaces habitats-forĂȘts : le code couleur correspond aux diffĂ©rents types d'interfaces.

Un autre volet important de la prĂ©vention concerne la surveillance des interfaces habitats-forĂȘts, matĂ©rialisĂ©es par les zones de contact entre les surfaces naturelles et les milieux urbanisĂ©s, car ce sont des zones privilĂ©giĂ©es de dĂ©part de feux. Or, dans un contexte de pression urbaine croissante et d'accumulation de biomasse combustible consĂ©quente Ă  l'abandon de terres agricoles et Ă  la sous-exploitation forestiĂšre, ces interfaces se multiplient et deviennent une vĂ©ritable prĂ©occupation pour la gestion du risque d'incendie de forĂȘt.

Depuis 2010, la connaissance de ces interfaces s'est considĂ©rablement renforcĂ©e[86], notamment en France avec la mise Ă  disposition des acteurs de l'amĂ©nagement des territoires de diffĂ©rents outils pour les cartographier. C'est le cas d'un logiciel de calcul des interfaces habitat-forĂȘt, dont la premiĂšre version française WUImap a Ă©tĂ© transmise dĂšs 2010 Ă  toutes les DREAL, puis adaptĂ©e Ă  l'Ă©chelle europĂ©enne[87]. La version Ă©largie du logiciel permet de prĂ©senter trois types de cartes allant de l'Ă©chelle locale Ă  l'Ă©chelle d'un dĂ©partement voire d'une rĂ©gion. Les cartes produites permettent par exemple d'Ă©valuer la vulnĂ©rabilitĂ© d'un bĂąti, la faisabilitĂ© de nouveaux projets (implantation d'un nouveau centre commercial, extension d'une Ă©cole, etc.) ou encore de contrĂŽler le dĂ©broussaillement.

En 2016, des prĂ©conisations de vĂ©gĂ©taux ornementaux pour les interfaces habitats-forĂȘts ont Ă©tĂ© rĂ©unies dans un guide en accĂšs libre[88]. AprĂšs les incendies de l'Ă©tĂ© 2017 du sud-est de la France, les experts d'Irstea, y prĂ©conisent une rĂšglementation sur les vĂ©gĂ©taux ornementaux, Ă  l'instar de l'obligation de dĂ©broussailler arrĂȘtĂ©e dans les annĂ©es 1990[89].

Approches préventives nouvelles

Depuis la fin du XXe siĂšcle, malgrĂ© les mesures de lutte et de surveillance, les feux de forĂȘt touchant de vastes surfaces (plus de 1 000 hectares) augmentent en frĂ©quence et en gravitĂ©. Le facteur climatique ne semblant pas ĂȘtre le seul en jeu, des Ă©tudes ont cherchĂ© Ă  lister les facteurs (biotiques ou abiotiques) favorisant ou aggravant ces grands incendies. On Ă©tudie aussi les facteurs ayant permis Ă  certains Ăźlots forestiers de ne pas brĂ»ler au sein de ces grandes surfaces. L'Ă©tude[90] des zones Ă©pargnĂ©es par un vaste incendie (de 1998) dans le nord-est de l'Espagne a mis en Ă©vidence l'importance de divers facteurs microclimatiques, ainsi que de la qualitĂ© de la couverture vĂ©gĂ©tale du sol, de la pente et de son exposition, de la structure du peuplement. Cette Ă©tude a montrĂ© l'importance dĂ©terminante de la qualitĂ© de la couverture vĂ©gĂ©tale du sol : les Ăźlots Ă©pargnĂ©s par le feu sont plus frĂ©quents lĂ  oĂč la forĂȘt est la moins fragmentĂ©e. Une des conclusions de ce travail est que contrairement Ă  une idĂ©e rĂ©pandue, les coupe-feux peuvent faciliter ou accĂ©lĂ©rer la propagation du feu, de mĂȘme que des lisiĂšres linĂ©aires et artificielles, et qu'il faudrait dĂ©fragmenter les forĂȘts et restaurer l'intĂ©gritĂ© Ă©cologique de ces milieux[90].

Une étude de 2009 montre qu'en zone boréale, la régénération post-incendie se fait mieux, et avec plus de biodiversité, quand il n'y a pas eu de coupes rases avant l'incendie[91].

Des scientifiques invitent Ă  adapter les forĂȘts au risque incendie par des choix d'espĂšces adaptĂ©es au feu et Ă  la sĂšcheresse, des modes de gestion limitant les dĂ©pĂ©rissements et les maladies en prĂ©fĂ©rant, par exemple, les forĂȘts mĂ©langĂ©es Ă  pin et chĂȘnes aux pinĂšdes pures[92]. À la suite des feux de forĂȘt de 2022 en Gironde, Thomas Brail, fondateur du Groupe national de surveillance des arbres, enjoint de cesser les plantations de rĂ©sineux, plus lucratives mais trĂšs inflammables[93].

Depuis 2014, en France, un site internet recense les dĂ©parts de feu et assure un suivi un temps rĂ©el. En 2017, l'application mobile "Feux de forĂȘt" a Ă©tĂ© lancĂ©e sur iOS et Android. D'aprĂšs l'Ă©diteur, la mĂȘme annĂ©e, les alertes envoyĂ©es par l'application mobile ont Ă©tĂ© lues plus de 4,5 millions de fois.

Lutte contre l'incendie

La lutte contre les feux de forĂȘt fait appel Ă  trois types d'intervenants[94] :

  • L'imagerie satellitaire permet de mieux suivre les incendies (ici aux États-Unis) et lutter contre eux.
    L'imagerie satellitaire permet de mieux suivre les incendies (ici aux États-Unis) et lutter contre eux.
  • Des scientifiques ont Ă©quipĂ© un site de capteurs pour y Ă©tudier le feu afin d'en comprendre les processus pour mieux les maĂźtriser.
    Des scientifiques ont équipé un site de capteurs pour y étudier le feu afin d'en comprendre les processus pour mieux les maßtriser.
  • Un pompier Ă  la lutte contre un incendie de forĂȘt vers Aston Bay en Afrique du Sud. Mars 2017.
    Un pompier Ă  la lutte contre un incendie de forĂȘt vers Aston Bay en Afrique du Sud. Mars 2017.

Il est impossible de directement Ă©teindre un feu de forĂȘt avec les moyens hydrauliques. Les Ă©quipes au sol et/ou des avions ou hĂ©licoptĂšres bombardiers d'eau attaquent gĂ©nĂ©ralement les fronts gauche et droit pour resserrer la tĂȘte et canaliser la propagation. Le largage aĂ©rien d'eau ne peut se faire au-dessus du personnel ; une dizaine de tonnes d'eau pouvant causer de graves blessures. La coordination radio est donc indispensable entre les Ă©quipes au sol et les Ă©quipes aĂ©riennes. quand l'Ă©quipe au sol entend un moteur, elle lĂšve la lance pour signaler sa prĂ©sence aux pilotes et Ă©viter les accidents.

L'eau est larguée seule ou avec des additifs ; des « retardants » largués sur la végétation voisine du feu évitent l'extension du sinistre (retardant dit « à long terme »). Il s'agit de polyphosphate d'ammonium additionné d'oxyde de fer qui lui donne une couleur rouge, il inhibe les réactions d'oxydation : la combustion dégage moins d'énergie, donc elle se propage moins vite. On utilise également fréquemment un tensioactif ou « agent mouillant » : en diminuant la tension superficielle de l'eau, celle-ci peut passer la couche grasse qui recouvre la végétation (le tensioactif agit à l'instar d'un savon), et par ailleurs, l'eau forme une pellicule plus fine, mais plus étendue, sur la végétation.

ManƓuvre de « dĂ©fense des points sensibles » (DPS) : les populations sont Ă©vacuĂ©es et/ou invitĂ©es Ă  protĂ©ger les habitations, en :

  • rentrant les vĂ©hicules au garage, ou les mettant contre la façade opposĂ©e au sens du vent ;
  • fermant les volets et les fenĂȘtres ;
  • arrosant les habitations pour limiter l'Ă©chauffement par radiation ;
  • Ă©tablissent quand c'est possible un « front d'eau » face au feu pour que celui-ci contourne l'habitation.

DĂ©fendre une habitation unique nĂ©cessite typiquement quatre vĂ©hicules. Les habitations isolĂ©es en forĂȘt posent donc de gros problĂšmes. Certaines entreprises proposent des arroseurs fixes Ă  poser sur les maisons, de type gicleur.

Certains pays, comme les États-Unis, pratiquent souvent des contre-feux : en brĂ»lant une partie de la vĂ©gĂ©tation de maniĂšre contrĂŽlĂ©e, on prive le feu de carburant quand il arrive. Mais, outre que le feu peut « sauter » la zone, le contre-feu peut Ă©chapper au contrĂŽle et devenir un nouveau foyer. Parfois des zones coupe-feu sont pratiquĂ©es en urgence, au bulldozer dans le mĂȘme but.

Maitrise d'un incendie

On dit qu'un incendie est[95] :

  1. contenu, quand sa progression est stoppée, au moins temporairement[96] ;
  2. fixé, lorsque sa propagation est stoppée[97] ;
  3. maitrisé, quand il n'y a plus de hautes flammes ;
  4. circonscrit, quand des mesures sont prises sur l'ensemble de la périphérie pour éviter toute reprise[98] ;
  5. noyé, quand il n'y a plus aucun point incandescent (braise ou fumerole) ;
  6. Ă©teint, quand il n'y plus de points chauds.

Par souci écologique, quand le milieu, le contexte et la législation le permettent, on peut localement utiliser des « feux contrÎlés » pour :

  • brĂ»ler une zone Ă  haut risque d'incendie avant qu'elle ne soit trop sĂšche ;
  • entretenir certains habitats nĂ©cessaires Ă  certaines espĂšces qui nĂ©cessitent des feux (quelques rares espĂšces dites pyrophiles, insectes (ex : Melanophila cuspidata (pt) et Melanophila acuminata (en)) et champignons (ex, en France mĂ©tropolitaine : Geopyxis carbonaria (en), Ascobolus carbonarius (en), Peziza petersii (en) ou Pyronema omphalodes (es)) dĂ©pendent du bois brĂ»lĂ©) ;
  • restaurer la diversitĂ© Ă©copaysagĂšre de certains milieux devenus trĂšs homogĂšnes afin d'y restaurer un habitat pour les espĂšces pionniĂšres.


Feux de forĂȘt en France

Évolution des surfaces forestiĂšres incendiĂ©es et du nombre de feux survenus dans le sud est de la France de 1973 Ă  2014 (donnĂ©es issues de la base PromĂ©thĂ©e)

La forĂȘt en France mĂ©tropolitaine reprĂ©sente 31 % du territoire avec 16 900 000 ha[99]. Depuis 1973, plus de 1,1 million d'hectares ont brĂ»lĂ© en France, dont prĂšs du tiers en Corse. Entre 1980 et 2018, 4663 feux de forĂȘts sont enregistrĂ©s en moyenne chaque annĂ©e en France. Les deux tiers de la surface annuelle dĂ©truites se trouvent en zone mĂ©diterranĂ©enne, soit 10 000 des 15 000 hectares dĂ©truits en 2019[100].

À partir de 1992 et Ă  la suite des grands incendies dans le sud-est de la France, une nouvelle politique et stratĂ©gie de prĂ©vention et de lutte a Ă©tĂ© mise en place, prĂŽnant notamment une attaque massive des feux naissants. Une Ă©tude menĂ©e en 2017 a montrĂ© l'efficacitĂ© de cette approche avec une rĂ©duction de 25 % des dĂ©parts de feu et de 60 % des surfaces brĂ»lĂ©es entre deux pĂ©riodes de 20 ans (1975-1994 par rapport Ă  1995-2014), alors que les conditions favorables au dĂ©part d'incendies Ă©taient en hausse. Ces rĂ©sultats sont cependant Ă  nuancer dans un contexte de mĂ©tĂ©orologie avec des Ă©pisodes chauds et secs qui engendre une "nouvelle gĂ©nĂ©ration d'incendies", comme l'ont dĂ©montrĂ© les feux trĂšs intenses de 2003, 2016 et 2017[101]. Parmi les autres effets attendus des changements globaux (liĂ©s au climat, Ă  l'occupation du sol, l'urbanisation...), on observe une remontĂ©e des dĂ©parts de feux en altitude et dans l'arriĂšre-pays ainsi qu'une extension de la saison Ă  risque.

D'ici Ă  2050, 50% des forĂȘts mĂ©tropolitaines seront soumises Ă  un risque Ă©levĂ© d'incendie[102] et les mĂ©ga-feux (un feu qui ravage plus de 10 000 hectares) pourraient augmenter de 31% dans le monde[103].

Prévention

90 % des feux de forĂȘts ont une origine humaine et 50 % sont la consĂ©quence d'une imprudence[100]. La DĂ©fense des forĂȘts contre les incendies a permis une diminution de 80 % de la superficie dĂ©truite entre 1978 et 2017[104]. La lutte contre les feux mobilisent 35 000 personnes dans le pays Ă  ces diffĂ©rentes Ă©tapes.

RĂŽle des forestiers

L'ONF définit quatre missions principales pour les forestiers : prévenir (patrouilles mobiles, piste d'accÚs aux massifs, débroussaillement), intervenir (assistance aux pompiers), sécuriser les lieux et accompagner la reconstruction écologique[104].

Personnels et matériels
Coordonnées DFCI dans le Massif de l'Esterel.

On utilise le terme DĂ©fense de la forĂȘt contre les incendies (DFCI) ; on parle de « coordonnĂ©es DFCI »[105] pour localiser les massifs forestiers, de « chemins DFCI » pour l'accĂšs Ă  ces massifs


En période estivale, 300 personnels sont chargés de la lutte contre les incendies, y compris à leur prévention. Leur rÎle en amont est de diminuer la végétation combustible, d'entretenir les pistes d'accÚs des secours et de créer des discontinuités dans le couvert végétable afin de réduire la propagation des incendies[106].

Camion-citerne feux de forĂȘts IVECO 2 000 litres (moyen) des Auxiliaires de PrĂ©vention de la ForĂȘt MĂ©diterranĂ©enne, Office national des forĂȘts du Var, 2011.

Outre les sapeurs-pompiers, l'État emploie des ouvriers forestiers spĂ©cialisĂ©s dans la DFCI (ouvriers forestiers rapatriĂ©s d'Afrique du Nord et auxiliaires de protection de la forĂȘt mĂ©diterranĂ©enne) encadrĂ©s par des sous-officiers de l'Office national des forĂȘts (ONF), avec des vĂ©hicules porteurs d'eau jaunes jonquille, des vĂ©hicules d'encadrement et de verbalisation, des tours de guet en points hauts et des Ă©quipes spĂ©cialisĂ©es.

Les forestiers entretiennent et dĂ©veloppent les moyens de DĂ©fense des forĂȘts contre l'incendie. En plus des diagnostics du dessĂšchement du couvert vĂ©gĂ©tal afin d'Ă©viter des dĂ©parts de feu, les forestiers mĂšnent des patrouilles et peuvent intervenir sur des dĂ©parts de feu. Ils participent Ă©galement au respect du dĂ©broussaillement[107].

DiffĂ©rentes prestations sont fournies par les fonctionnaires de l'ONF selon les dĂ©partements Ă  la demande des services forestiers de l'État des directions dĂ©partementales de l'agriculture et de la forĂȘt (DDAF) : Cellule forestiĂšre d'appui sur grand incendie (cartographie informatique en direct des feux et aide Ă  la prĂ©vision), Équipes de guidage des moyens et de reconnaissance, Équipe Pluridisciplinaire d'Investigation sur l'Origine des Incendies de ForĂȘts (Ă©quipe d'enquĂȘte mixte forestiers - gendarmes), Ă©quipe de feux tactiques, etc. Les collectivitĂ©s territoriales emploient aussi des agents territoriaux appelĂ©s forestiers-sapeurs (vĂ©hicules jaunes jonquille) formĂ©s par l'ONF Ă  l'origine, mais repris par les dĂ©partements Ă  la suite du dĂ©sengagement de l'État, ainsi que des bĂ©nĂ©voles regroupĂ©s dans des ComitĂ©s communaux de feux de forĂȘt (CCFF, vĂ©hicules orange)[108].

Les vĂ©hicules terrestres spĂ©cifiques Ă  la lutte contre les feux de forĂȘt sont :

Les sapeurs-pompiers disposent d'un « lot de repli » qui leur permet de se protĂ©ger un minimum s'ils sont piĂ©gĂ©s hors du vĂ©hicule. Il se compose d'une cagoule avec une cartouche filtrante (type masque Ă  gaz) — les feux de forĂȘt s'attaquent sans appareil respiratoire isolant — et d'un « poncho » mĂ©tallisĂ© qui permet de se protĂ©ger de la chaleur rayonnĂ©e.

En période estivale, les unités de sapeurs-pompiers des départements à risques (départements boisés du Sud de la France) ou des marins pompiers de Marseille, sont renforcés par des pompiers d'autres départements, des militaires des Unités d'instruction et d'intervention de la sécurité civile ou des marins pompiers réservistes.

  • Les groupes d'intervention de feu de forĂȘt (GIFF) : il s'agit de colonnes de vĂ©hicules. Outre des CCF, les GIFF comprennent des vĂ©hicules pour assurer la logistique — en gĂ©nĂ©ral deux ou trois vĂ©hicules toute-utilitĂ© (VTU) : matĂ©riel de rechange, mĂ©canique, nourriture et boisson — et dans l'idĂ©al un VSAV armĂ© d'un infirmier pompier, Ă©ventuellement un vĂ©hicule radio-mĂ©dicalisĂ© (VRM) avec un mĂ©decin sapeur-pompier (MP), et un poste de commandement mobile (PCM).

Tous les avions de lutte contre le feu du midi de la France sont placĂ©s sous l'autoritĂ© du COZ (Centre opĂ©rationnel de zone), auparavant installĂ© Ă  Valabre dans les Bouches-du-RhĂŽne lors de sa crĂ©ation en 1979 et Ă  Marseille Saint-Loup,depuis 2016. Ce centre prĂ©vient, Ă©value les risques, met en Ɠuvre et coordonne les forces aĂ©riennes et terrestres. Il se met Ă  la disposition du prĂ©fet de la zone sud (Provence-Alpes-CĂŽte d'Azur/Occitanie/Corse).

RĂ©partition des causes connues de feu de forĂȘt en France entre 1996 et 2006 (donnĂ©es de la base PromĂ©thĂ©e)[73] :

  • 39 % : malveillance (chasse, pyromanie, pastoralisme, conflit d'occupation du sol) ;
  • 23 % : loisirs (feux d'artifice, barbecues, rĂ©chaud, mĂ©gots de promeneur ou jetĂ©s d'un vĂ©hicule) ;
  • 21 % : travaux forestiers ou agricoles ;
  • 9 % : cause accidentelle (dĂ©pĂŽt d'ordures, lignes Ă©lectriques, incendie de vĂ©hicules...) ;
  • 8 % : origine naturelle (foudre).

Feux de forĂȘt au QuĂ©bec

Au Canada, la province est responsable de la protection de ses forĂȘts. Au QuĂ©bec la SOPFEU est chargĂ© de la prĂ©vention, la dĂ©tection et l'extinction des feux de forĂȘt. L'organisation est similaire Ă  celle de la France.

Par exemple la région du Nord Est de l'Alberta est touchée par un feu important qui brûle prÚs de 3000 hectare de forets .

Feux de forĂȘt en IndonĂ©sie

Depuis les annĂ©es 1980, les incendies de vĂ©gĂ©tation deviennent un grave problĂšme en IndonĂ©sie ; ainsi environ 3,6 millions d'hectares de forĂȘts de province de Kalimantan oriental on brĂ»lĂ©, fait sans prĂ©cĂ©dent historique, et d'autres feux sont rĂ©guliĂšrement signalĂ©s dont l'un des plus importants fut celui de 1997 perdurant jusqu'en 1998 sur plus de 400 000 hectares[109], causĂ© par la sĂšcheresse sĂ©vissant Ă  cette pĂ©riode en Asie du Sud-Est, elle-mĂȘme provoquĂ©e par une oscillation d'un courant de l'ocĂ©an Pacifique dĂ©nommĂ©e « El Niño ». Cette anomalie climatique forme une Ă©norme masse d'air chaude produisant des dĂ©rĂšglements Ă  grande Ă©chelle, et dans ce cas-ci, des extrĂȘmes sĂšcheresses[110]. Alors que l'impact des incendies de vĂ©gĂ©tation de 1982-1983, 1987, 1991 et 1994 s'Ă©tait limitĂ© Ă  des Ă©chelles locales, ceux de 1997 ont affectĂ© une rĂ©gion trĂšs vaste » (FAO, 2001, p. 295). La pollution (fumĂ©es et brumes sĂšches) a touchĂ© les pays voisins[111],avec d'importants dommages sanitaires, environnementaux et pour l'agriculture, notamment pour la biodiversitĂ© et le rĂ©chauffement climatique[112]. Les provinces de Sumatra du Sud et de Kalimantan central ont Ă©tĂ© les plus gravement touchĂ©es, notamment par les feux de tourbe des marais ainsi que par les feux de houille, qui ont libĂ©rĂ© de l'oxyde de soufre et de l'oxyde nitreux, affectant sĂ©rieusement la santĂ© humaine, mais plus de vingt millions de personnes d'Asie du Sud-Est ont souffert d'affections respiratoires, d'asthme et d'irritations des yeux[112].

Plus de 90 000 hectares de forĂȘt ont brĂ»lĂ© dans dix-neuf zones de conservation, dont des rĂ©serves appartenant au patrimoine mondial et parmi les plus riches du monde en matiĂšre de biodiversitĂ©. Une grande diversitĂ© d'animaux sauvages, d'espĂšces vĂ©gĂ©tales et d'Ă©cosystĂšmes forestiers uniques, protĂ©gĂ©s par la lĂ©gislation nationale, voire internationale, a pĂ©ri dans le feu.

La fumée a notablement réduit l'activité photosynthétique, et plus d'un milliard de tonnes de dioxyde de carbone ont été relùchés dans l'atmosphÚre à cause des incendies. DÚs lors, ce phénomÚne néfaste contribue au réchauffement de la planÚte[113].

L'une des pires consĂ©quences Ă©cologiques du feu est la forte probabilitĂ© que surviennent de nouveaux incendies dans les annĂ©es suivantes, Ă  mesure que les arbres morts tombent, causant alors des trouĂ©es dans la forĂȘt Ă  travers lesquelles la lumiĂšre du soleil peut s'infiltrer et dĂšs lors, dessĂ©cher la vĂ©gĂ©tation, et oĂč les combustibles s'accumulent. En effet, « les feux rĂ©pĂ©tĂ©s sont destructifs car ils reprĂ©sentent un facteur clĂ© dans l'appauvrissement de la diversitĂ© biologique des Ă©cosystĂšmes de forĂȘt ombrophile »[114]. NĂ©anmoins, la « suppression » des incendies, qu'ils soient naturels ou d'origine humaine, n'est pas une solution envisageable Ă  long terme car cela pourrait provoquer des consĂ©quences encore plus nĂ©fastes, notamment par l'accumulation de combustibles qui, lorsqu'ils s'enflammeront inĂ©vitablement, causeront des incendies d'une grande intensitĂ©[111].

En conclusion, il y a une importance à diminuer la fragilité croissante des écosystÚmes et des populations humaines vis-à-vis des incendies incontrÎlés, ainsi que l'usage inadéquat et abusif du feu pour modifier le couvert végétal. Afin de formuler des politiques éclairées, il faudrait définir les soucis posés par les incendies au sein des régions, les synthétiser au niveau mondial, et comprendre le rÎle que les impacts des incendies jouent dans les processus de changement mondiaux[111].

Feux de forĂȘt en Espagne

L'Ă©tĂ© 2003, caractĂ©risĂ© par des tempĂ©ratures caniculaires, a Ă©tĂ© la proie d'incendies de forĂȘt extrĂȘmement ravageurs. Cette annĂ©e-lĂ , l'Espagne Ă©tait le deuxiĂšme pays le plus touchĂ© du Sud-ouest de l'Europe. NĂ©anmoins, la situation n'Ă©tait pas exceptionnelle. En effet, entre 1993 et 1994, le bilan Ă©tait encore plus dramatique[115]. Les incendies d'octobre 2017 sur la pĂ©ninsule ibĂ©rique ont touchĂ© une grande partie des rĂ©gions espagnoles de Galice, d'Asturies et de Castille-et-LeĂłn, et la quasi-totalitĂ© du nord et du centre du Portugal. Entre le vendredi 13 octobre et le dimanche 18, 156 incendies affectĂšrent l'Espagne et 523 au Portugal.

Dans la rĂ©gion mĂ©diterranĂ©enne, 92 Ă  98 %[116] des feux de forĂȘt sont d'origine anthropique, par nĂ©gligence ou malveillance. Ce dernier est le plus dangereux et porte en lui des enjeux Ă©conomiques et des conflits pour le contrĂŽle de l'espace. Les autres origines sont climatiques et biologiques[117]. Les alĂ©as mĂ©tĂ©orologiques (coup de chaleur, vent violent
) peuvent entraĂźner la propagation du feu[115]. Selon les projections effectuĂ©es par le GIEC concernant l'impact du rĂ©chauffement climatique sur les feux de forĂȘt, l'Espagne, et au-delĂ  dans les pays du pourtour mĂ©diterranĂ©en, doit s'attendre Ă  une augmentation de frĂ©quence et de gravitĂ© des incendies[117]. De plus, les feux de forĂȘt contribuent eux-mĂȘmes Ă  accentuer le rĂ©chauffement car ils augmentent la concentration en dioxyde de carbone dans l'atmosphĂšre[118].

La forĂȘt mĂ©diterranĂ©enne est dotĂ©e d'une vĂ©gĂ©tation vigoureuse, caractĂ©risĂ©e par des essences pyroclimaciques[119] (dĂ©pendant de la prĂ©sence du feu durant son cycle de reproduction), adaptĂ©e aux incendies rĂ©currents[115]. Les incendies rĂ©pĂ©titifs ont dĂ©truit et Ă©liminĂ© les individus les plus faibles. Les espĂšces mĂ©diterranĂ©ennes sont donc caractĂ©risĂ©es par une stabilitĂ© et une adaptabilitĂ© Ă  ce type de perturbations[120].

Les feux de forĂȘt causent des dĂ©gĂąts importants au niveau environnemental et social. Au premier niveau, les principaux impacts sont la destruction de la faune et de la flore,la combustion de la biomasse, la dĂ©tĂ©rioration des sols, le rĂ©chauffement de l'eau et l'accroissement de la sĂ©dimentation[121]. Cependant, des Ă©tudes ont permis de dĂ©couvrir le faible impact des incendies sur les sols et la vĂ©gĂ©tation. L'impact sur le sol varie en fonction du rĂ©gime des incendies et la vĂ©gĂ©tation n'est modifiĂ©e que durant un court moment, sous rĂ©serve que les feux interviennent Ă  des intervalles de temps d'environ 25 ans, et en dehors d'un climat de sĂšcheresse sĂ©vĂšre[5]. AprĂšs cette perturbation, les Ă©cosystĂšmes reprennent presque leur aspect d'antan[120].

Au second niveau, les incendies de forĂȘt apparaissent comme une menace Ă  la santĂ© publique. En effet, la fumĂ©e produite peut exposer des populations Ă  de nocives concentrations de polluants (monoxyde de carbone, formaldĂ©hyde, acrolĂ©ine) ce qui peut provoquer des problĂšmes de santĂ© pouvant affecter les yeux et les voies respiratoires. De plus, des maux de tĂȘte, des vertiges et des nausĂ©es peuvent se manifester. À long terme, celle-ci peut entraĂźner une altĂ©ration des fonctions respiratoires et une augmentation du risque de cancer[122]. Soulignons que les forĂȘts servent de plus en plus de cadre naturel Ă  des rĂ©sidences, des lieux de loisir et de dĂ©tente. En prĂ©sence d'un incendie de forĂȘt, ces infrastructures peuvent ĂȘtre prisonniĂšres des flammes et menacer des vies[123] - [124].

Les incendies provoquent des perturbations majeures[124]. La rĂ©duction des sinistres est donc primordiale. Il s'agit dĂšs lors de prĂ©venir les mises Ă  feu en reconnaissant les causes qu'elles soient accidentelles ou fortuites et de rendre les forĂȘts moins sensibles Ă  l'incendie[123].

Feux de forĂȘt en Australie

Sapeurs forestiers du DĂ©partement de l'Environnement et de la Conservation d'Australie-Occidentale procĂ©dant au noyage de la lisiĂšre d'une ligne de confinement ouverte par un engin de gĂ©nie forestier pour empĂȘcher toute saute du cĂŽtĂ© non-brĂ»lĂ©. Topanup Block, Tone State Forest, mars 2015.

CommunĂ©ment appelĂ©s « feux de brousse », les incendies de vĂ©gĂ©tation australiens sont rĂ©guliers dans le pays, oĂč la saison des feux s'Ă©tend de juillet Ă  octobre au nord et de janvier Ă  mars au sud. Entre 2000 et 2012, l'Australie a eu Ă  faire face non seulement Ă  de petits incendies de forĂȘt quasi quotidiens mais Ă©galement Ă  des mĂ©ga-feux tels que les « Victorian Alpine Fires » et les « Capital Territory Fires » en 2003, le « Wangary Fire » en 2005 ou encore les « Victorian Great Divide Fires » de 2007. Cependant, les plus marquants et les plus lourds de consĂ©quences restent sans doute les « Black Saturday Fires » qui, durant le caniculaire Ă©tĂ© de 2009, dĂ©truisaient 430 000 hectares de forĂȘts du sud-est australien, rejetaient 8,5 millions de tonnes de dioxyde de carbone et faisaient 173 morts, le plus accablant tribut civil jamais portĂ© par la population australienne en temps de paix[125]. Les feux de brousse de 2019-2020 figurent parmi les plus importants de l'histoire du pays.

L'incendie de sous-sol (tourbe ou charbon)

Il arrive qu'un feu de forĂȘt puisse enflammer le sous-sol composĂ© de tourbe ou de charbon. L'incendie souterrain peut alors couver plusieurs semaines voire plus d'un an et jusqu'Ă  cinq mĂštres de profondeur dans les rĂ©gions tropicales ; certains feux ont ainsi pu couver durant la saison des pluies en IndonĂ©sie[126].

Des produits chimiques (systĂšme Coalex : coal extinguishment, pour « extinction des feux de houille ou de charbon ») existent, rĂ©putĂ©s amĂ©liorer de 5 Ă  7 fois les performances de l'eau. Le sol peut ĂȘtre dynamitĂ©, et la tourbe ainsi mise Ă  jour enterrĂ©e sous du sable mouillĂ©, si possible, en pleine saison des pluies[127]. Un terril boisĂ© contenant du charbon peut aussi entrer en combustion interne et tuer les arbres qui ont poussĂ© dessus, en gĂ©nĂ©ral sans produire de flammes.

Masca, ßle de Tenerife, ßles Canaries. Les palmiers dattiers, agaves et cactus ont résisté aux incendies de juillet-août 2007. Ils font l'objet depuis lors d'une vaste opération de nettoyage et de reconstitution du paysage.

Québec et régions riches en conifÚres

Les feux de sous-sol au QuĂ©bec sont assez frĂ©quents. Ce sont principalement des feux de racines, les conifĂšres et surtout le cĂšdre ayant des racines trĂšs combustibles tout prĂšs de la surface, entourĂ©es d'humus inflammable lorsque sec. C'est pourquoi il y est recommandĂ© de ne pas creuser de fosse pour installer un feu de camp, le creusage exposant les racines et causant ainsi souvent des feux de sous-sol. Les feux de camp les plus sĂ©curitaires ont une couche de sable et de roches entre le sol et le rond de feu, ou sont construits sur une fosse beaucoup plus large que le feu et bien remplie de roches et sable. Les feux de racine sont aussi presque toujours prĂ©sents au QuĂ©bec aprĂšs qu'un feu de forĂȘt ait Ă©tĂ© Ă©teint en surface. On peut parfois les dĂ©celer par l'odeur de fumĂ©e ou par la chaleur du sol au toucher.

Sylviculture, reboisement, Ă©cologie

Les feux de forĂȘt font partie d'une dynamique naturelle dans les forĂȘts mĂ©diterranĂ©ennes : de nombreuses plantes s'y sont adaptĂ©es, certaines ont mĂȘme besoin du feu pour vivre. Ces feux causent cependant des dommages Ă©conomiques et Ă©cologiques importants et prĂ©sentent un danger pour l'ĂȘtre humain. Leur trop grande rĂ©pĂ©tition appauvrit les sols et modifie de façon irrĂ©versible l'Ă©tat biologique caractĂ©ristique de ces forĂȘts[5].

Auparavant, les feux d'origine anthropique étaient moins fréquents. Les habitats de la faune et de la flore n'étaient pas fractionnés par l'implantation humaine et participaient à la recolonisation des espaces adjacents touchés par le feu. Cette régénération naturelle est freinée et appauvrie par le fractionnement des habitats. La recolonisation par les espÚces est alors partielle : la biodiversité des zones diminue avec le risque d'extinction de certaines espÚces comme la tortue d'Hermann.

Ce fractionnement des habitats prend plusieurs formes (autoroutes, nouvelles habitations
), mais les causes en sont presque toujours les mĂȘmes, l'Ă©talement urbain (autour de Toulon par exemple) : le dĂ©veloppement des rĂ©sidences secondaires et du tourisme nĂ©cessite infrastructures et terrains, donc il y a artificialisation des terres, fractionnement de l'habitat et multiplication des zones sensibles aux feux[128].

Les causes des incendies sont diverses, elles vont des systĂšmes de freinage des trains au mĂ©gots jetĂ©s nĂ©gligemment de la fenĂȘtre d'une voiture en passant par les barbecues sauvages et surtout les incendiaires.

Mais une autre cause semble se dessiner : ce sont les modifications climatiques qui entraĂźnent une baisse des prĂ©cipitations sur ces forĂȘts et donc une augmentation des incendies.

Essences impliquées dans les incendies

Elles varient selon les pays, les saisons, le sol et le pourcentage de ligneux hauts.

Certaines essences brûlant facilement et diffusant les feux sont dites pyrophiles. Ce sont souvent des essences à croissance rapide telles que le pin sylvestre et l'eucalyptus, mais aussi la bruyÚre, ou le ciste de Montpellier en zone tempérée et/ou méditerranéenne. Ils ont une faible capacité à capter l'eau profonde, et des caractéristiques physiologiques (résine, essences inflammables).

Il existe inversement des essences rĂ©sistant mieux aux incendies, dites pyrorĂ©sistantes. Ce sont par exemple la bruyĂšre arborescente, le pin d'Alep, le chĂȘne vert, le chĂątaignier ou le chĂȘne-liĂšge.

La responsabilitĂ© comparĂ©e des feuillus et rĂ©sineux est discutĂ©e, car si en laboratoire les bois rĂ©sineux semblent moins propager le feu que le chĂȘne par exemple, ceci ne semble pas toujours se vĂ©rifier dans la nature. Divers facteurs externes Ă  l'arbre et Ă  l'essence sont Ă  considĂ©rer ;

En zone mĂ©diterranĂ©enne, l'olivier qui brĂ»le mal est rĂ©putĂ© faire un bon coupe-feu et freiner les incendies. Les coupures agricoles, dont vignes, vergers, prairies et cultures sont rĂ©putĂ©s pouvoir bloquer ou freiner les feux de forĂȘt, mais leurs impacts diffĂ©rĂ©s dans l'espace et Ă  long terme via le drainage et de l'appel d'eau pour leur irrigation sont encore mal mesurĂ©s. Il semble que le bocage brĂ»lait et brĂ»le rarement, mĂȘme quand il s'agit d'arbres plantĂ©s sur talus, peut-ĂȘtre parce qu'il favorise une meilleure rĂ©tention de l'eau sur la parcelle lors des pluies.

La gĂ©nĂ©ralisation de monocultures Ă©quiennes (d'une mĂȘme classe d'Ăąge) d'Eucalyptus ou de rĂ©sineux semble avoir favorisĂ© les feux de forĂȘt, surtout sur des sols pauvres et en pente, sur des substrats drainants (sable) et/ou prĂ©alablement drainĂ©s (exemple : Landes en France).

Une biodiversitĂ© naturellement Ă©levĂ©e semble amĂ©liorer la capacitĂ© des sols et de l'Ă©cosystĂšme forestier Ă  utiliser l'eau et Ă  l'exploiter Ă  diffĂ©rentes profondeur, y compris sous forme de rosĂ©e ou condensats de brume, comme Ă  l'ouest du PĂ©rou oĂč il ne pleut parfois jamais durant l'annĂ©e, mais oĂč la brume prĂ©sente presque chaque matin ruisselle sur les troncs, au point que les premiers explorateurs espagnols ont nommĂ© certains arbres « arbres Ă  pluie ». Dans les zones oĂč la brume est frĂ©quente, bien des essences (et leurs Ă©piphytes) captent efficacement « la pluie horizontale » ; ou plus exactement, elles condensent sur leurs feuilles, branches et troncs la vapeur d'eau apportĂ©e de la mer, ou par les brumes. Jusqu'Ă  1 000 mm/an dans la forĂȘt pluvieuse de lauriers du parc de Garajonay de l'Ăźle de La Gomera aux Ăźles Canaries). Cette eau qui ruisselle le long des troncs ne crĂ©e pas d'Ă©rosion au sol, et elle favorise la crĂ©ation d'un humus riche et capable de la stocker.

Sur la ceinture Ă©quatoriale, zone qui reçoit le plus de rayonnement solaire, de BornĂ©o Ă  l'Amazonie, il semble que les milliards de spores et certaines molĂ©cules Ă©mises par les arbres tropicaux et leurs Ă©piphytes (mousses, fougĂšres, lichens notamment
) contribuent aussi Ă  nuclĂ©er, condenser et alourdir les gouttes d'eau qui forment alors des gouttes de rosĂ©e, pluie ou ruissellement de condensation, permettant de rĂ©cupĂ©rer une part importante de l'eau Ă©vapotranspirĂ©e par les arbres.

Les forĂȘts tempĂ©rĂ©es biodiversifiĂ©es non exploitĂ©es produisent Ă©galement un humus plus riche et Ă©pais que celui des forĂȘts cultivĂ©es, plus riche en mycĂ©liums et en une microfaune plus diversifiĂ©e. Les essences s'y complĂštent les unes les autres pour une prospection amĂ©liorĂ©e de l'eau dans tous les compartiments de l'Ă©cosystĂšme et Ă  tous les niveaux du sous sol accessible aux racines, grĂące notamment Ă  leurs champignons symbiotes et mycorhisateurs. La biodiversitĂ© semble aussi permettre une meilleure rĂ©silience Ă©cologique, limitant le risque de retour rapide d'incendie. Des animaux dĂ©foliateurs (chenilles dĂ©foliatrices, criquet pĂšlerin, etc. voire des insectes affaiblissant puis tuant les arbres affaiblis par le stress hydrique (ex. : scolyte) pourraient aussi en pĂ©riode de longue ou grave sĂšcheresse jouer un rĂŽle en freinant ou bloquant l'Ă©vapotranspiration des arbres, et donc en protĂ©geant la ressource en eau du sol.

La diversitĂ© des essences forestiĂšres diminue naturellement et drastiquement dans les milieux extrĂȘmes (circumpolaires, forĂȘts d'altitudes et subsahariennes, c'est alors la diversitĂ© gĂ©nĂ©tique au sein des populations d'arbres qui pourrait alors avoir une certaine importance, de mĂȘme que leurs interactions avec d'autres espĂšces influant sur le contrĂŽle de l'eau).

Lorsque le milieu est sec et qu'un incendie est lancĂ©, il ne semble pas y avoir d'essences ou de variĂ©tĂ©s gĂ©nĂ©tiquement plus adaptĂ©es qui puisse attĂ©nuer la puissance du feu. Ce sont alors la nature et la structure (horizontale et verticale) de la forĂȘt et de ses lisiĂšres, et la nature des coupures qu'il faut considĂ©rer pour leur rĂŽle majeur. Certaines coupures ont un rĂŽle vĂ©ritable de coupe-feu, mais peuvent paradoxalement si elles sont mal conçues ou mal positionnĂ©es avoir un impact dĂ©shydratant ou dans certains cas attiser les flammes par un effet de conduction du vent.

RĂ©gĂ©nĂ©ration de la forĂȘt

Pour restaurer la biodiversitĂ© dans les forĂȘts incendiĂ©es, des essais de plantation et de semis sous le couvert de pins et d'arbustes sont mis en Ɠuvre dans la forĂȘt de Saint-Mitre-les-Remparts (13). Entre 2007 et 2009, 1600 plants de feuillus (frĂȘnes, caroubiers, arbousiers, sorbiers et pistachiers) ont Ă©tĂ© introduits et 4000 glands (chĂȘnes verts et blancs) semĂ©s. Les rĂ©sultats acquis par les chercheurs d'Irstea sont encourageants[129].

En zone tropicale humide et en zone tempĂ©rĂ©e, face Ă  des feux naturels et peu frĂ©quents la forĂȘt dispose de capacitĂ©s de rĂ©silience Ă©cologique suffisante pour reconstituer un couvert vĂ©gĂ©tal protĂ©geant le sol en quelques semaines Ă  quelques mois et l'ambiance forestiĂšre est gĂ©nĂ©ralement rĂ©tablie en une quinzaine d'annĂ©es. Il faut cependant quelques dĂ©cennies Ă  plusieurs siĂšcles si l'incendie Ă©tait trĂšs important ou si les feux se succĂšdent trop vite. La forĂȘt peut mĂȘme disparaĂźtre en cĂ©dant la place Ă  une savane ou au dĂ©sert.

En zone mĂ©diterranĂ©enne, les incendies ont par endroits supprimĂ© la forĂȘt, alors remplacĂ©e par des arbustes, le maquis voire par des herbacĂ©es. Il faudrait des siĂšcles pour que la forĂȘt et sa diversitĂ© se reconstituent entiĂšrement naturellement. Actuellement, seuls le pin d'Alep et le chĂȘne-liĂšge repoussent sur les terrains incendiĂ©s. Cependant l'action conjuguĂ©e des feux et des sĂšcheresses pourraient nuire aux peuplements de ces deux espĂšces emblĂ©matiques[130] - [131]. Des Ă©tudes scientifiques[132] et des essais expĂ©rimentaux, notamment Ă  Saint-Mitre-les-Remparts (13), sont menĂ©s afin de dĂ©terminer les conditions d'intĂ©gration de plants de feuillus pour rĂ©gĂ©nĂ©rer de la biodiversitĂ© et rendre la forĂȘt mĂ©diterranĂ©enne plus rĂ©siliente[133].

La diversitĂ© biologique antĂ©rieure et pĂ©riphĂ©rique semble ĂȘtre un Ă©lĂ©ment important de cette rĂ©silience. Par exemple, les colĂ©optĂšres saproxylophages et en particulier le longicorne noir au Canada contribuent Ă  la rĂ©gĂ©nĂ©ration des forĂȘts rĂ©sineuses qui ont brĂ»lĂ©, grĂące Ă  ses dĂ©jections qui rĂ©approvisionnent le sol en nutriments utiles Ă  l'activitĂ© microbienne et fongique, lesquelles dopent la rĂ©gĂ©nĂ©ration naturelle. Supprimer le bois-mort des forĂȘts en pensant que cela limite les incendies pourrait donc ne pas ĂȘtre une bonne solution. Tyler Cobb (UniversitĂ© d'Alberta recommande mĂȘme d'en laisser volontairement dans les forĂȘts pour nourrir les invertĂ©brĂ©s qui entretiennent les sols forestiers en les rendant capables de mieux conserver l'eau, et les rendent plus rĂ©silients face aux incendies.

Quelques types d'habitats dĂ©pendent d'incendies pour se maintenir et conserver leur biodiversitĂ© : c'est le cas notamment des forĂȘts de pin des marais du Sud-Est des États-Unis, qui ne se rĂ©gĂ©nĂšrent pleinement qu'en prĂ©sence de feux de forĂȘt assez rĂ©guliers, sans lesquels des feuillus peu rĂ©sistants aux incendies mais trĂšs bons compĂ©titeurs prennent le dessus. Des feux de forĂȘt rĂ©guliers et contrĂŽlĂ©s y sont allumĂ©s, dans des conditions particuliĂšres de tempĂ©rature, vent et humiditĂ©, afin de pouvoir les maĂźtriser et de ne pas indisposer ou mettre en danger les habitations alentour.

Dans le cas de régions trÚs habituées aux incendies telles que l'Australie, des végétaux ont développé des capacités de résistance élevées aux feux, voire une dépendance aux feux, qui permettent la reproduction de certaines espÚces végétales dites pyrophytes ou pyrophiles. C'est par exemple le cas de l'Eucalyptus qui favorise les départs de feu en produisant des vapeurs inflammables[134] - [135].

Prospective

ModĂ©lisation du risque d'exposition aux fumĂ©es de feux de forĂȘt dans l'Ouest des États-Unis. Évolution prĂ©vue des temps d'exposition moyens en nombre de jour par an, et de la durĂ©e moyenne de la "saison des feux") entre le dĂ©but et le milieu du XXIe siĂšcle. Les moyens de combattre les feux s'amĂ©liorent mais le risque (et sans doute les coĂ»ts de lutte contre le feu) augmenteront trĂšs probablement, ainsi que les problĂšmes de santĂ© et de pollution induits par les fumĂ©es durant le XXIe siĂšcle

L'ONU et la FAO estiment que le risque d'incendie ira croissant, dans un contexte de rĂ©chauffement climatique aggravĂ© par le drainage et l'artificialisation des forĂȘts et tourbiĂšres. La FAO invite en particulier les États Ă  dĂ©velopper de nouvelles stratĂ©gies de gestion pour prĂ©venir et lutter contre les « mĂ©ga-incendies de forĂȘt. "Parmi tous les feux de forĂȘt, les mĂ©ga-incendies sont les plus coĂ»teux, les plus destructifs, et les plus prĂ©judiciables" » et ils « remettent en question l'efficacitĂ© des stratĂ©gies conventionnelles de protection de la forĂȘt »[136]. L'incendie australien du « Samedi noir » a en 2009 tuĂ© 173 personnes et rasĂ© plusieurs villes. En Russie en 2010 32 000 foyers d'incendies ont Ă©tĂ© dĂ©tectĂ©s et le feu a tuĂ© 62 personnes et dĂ©truit 2,3 millions d'hectares[137]. En zone tropicale les mĂ©ga-feux proviennent souvent du dĂ©frichage de terres Ă  des fins agricoles, or en 2011, les perspectives dĂ©mographiques de nombreux pays tropicaux pour 2030, 2050 et 2100 ont Ă©tĂ© revues Ă  la hausse par l'ONU. Ces « mĂ©ga-feux, pour la plupart imputables Ă  l'homme, seraient exacerbĂ©s par le changement climatique, mais nous soupçonnons dĂ©sormais qu'ils puissent constituer aussi un cercle vicieux qui accĂ©lĂšre le rĂ©chauffement de la planĂšte ». Plus largement, l'ONU invite tous les pays Ă  mieux se prĂ©parer Ă  toutes les catastrophes naturelles[137].

AprĂšs le livre vert de la Commission europĂ©enne sur l'impact du changement climatique, en 2011, le Parlement europĂ©en a recommandĂ© la mise en place d'une rĂšglementation europĂ©enne pour amĂ©liorer la prĂ©vention et gestion des feux de forĂȘts[14]. Le 1er mars 2010, la Commission EuropĂ©enne a aussi adoptĂ© un livre vert « Protection des forĂȘts et information en Europe : prĂ©parer les forĂȘts au changement climatique »[138].

En France, les scĂ©narios climatiques annoncent tous une remontĂ©e vers le nord des zones Ă  risques ; ainsi dĂšs 2040, le Poitou-Charentes, les Pays de la Loire, le Centre, la Bretagne et le Nord de la rĂ©gion Midi-PyrĂ©nĂ©es seront probablement touchĂ©s par des feux de forĂȘt. D'environ 5,5 millions d'ha Ă  risque en 1989-2008, la France mĂ©tropolitaine pourrait passer Ă  7 millions d'ha avant 2040[14].

Des forĂȘts brĂ»lent alors qu'elles sont ou Ă©taient des puits de carbone et protĂ©geaient aussi contre d'autres catastrophes (Ă©rosion, coulĂ©es de boues...)[139]. Dans une boucle de rĂ©troaction positive, ces feux contribuent probablement Ă  entretenir le rĂ©chauffement qui lui-mĂȘme aggrave le risque "Incendie de forĂȘt".

Dans les forĂȘts borĂ©ales, telles que celles qui sont prĂ©sentes au Canada, on estime que les changements climatiques vont accentuer la vulnĂ©rabilitĂ© des forĂȘts aux incendies[140]. En effet, on estime que les Ă©missions de gaz Ă  effet de serre qui proviennent de tous les incendies au Canada augmentent d'environ 162 Tg d'Ă©quivalent CO2 par an[141].

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Voir aussi

Filmographie

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Articles connexes

Liens externes

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