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Valeur absolue

En mathématiques, la valeur absolue (parfois appelée module, c'est-à-dire mesure) d'un nombre réel est sa valeur numérique considérée sans tenir compte de son signe. On peut la comprendre comme sa distance à zéro ; ou comme sa valeur quantitative, à laquelle le signe ajoute une idée de polarité ou de sens (comme le sens d'un vecteur). Par exemple, la valeur absolue de –4 est 4, et celle de +4 est 4. La valeur absolue se note par des barres verticales : ainsi, on écrit : |–4| = |+4| = 4. En programmation informatique, l'identificateur utilisé pour désigner la valeur absolue est usuellement abs.

Il existe de nombreuses généralisations de la valeur absolue dans des espaces plus abstraits (nombres complexes, espaces vectoriels, corps commutatifs voire corps gauches : voir par exemple l’article « Norme »). Cette notion est proche de celles de distance et de magnitude dans de nombreuses branches de la physique et des mathématiques.

Historique

Il y a eu quatre étapes dans l'évolution de la notion de valeur absolue. Durant la première, sa définition était le « nombre sans son signe » ou la « distance à partir de zéro ». Cette définition était implicite, car il n'y avait pas eu de définition formelle.

Dans la deuxième étape, la valeur absolue était devenue une fonction, souvent utilisée dans le calcul d'erreurs. Un sens plus exact des applications de la valeur absolue à cette époque était « prendre positivement » un nombre ou « faire abstraction des signes ».

La troisième étape a découlé de la compréhension du nombre en tant que concept abstrait. La valeur absolue devint un concept spécifique défini pour chaque nombre, en plus de la méthode pour mesurer des nombres complexes. En 1821, Cauchy popularise son utilisation dans l'analyse formelle. À ce moment, il manquait une notation.

La quatrième et dernière étape découle de sa propre formalisation. Ceci était nécessaire pour l'évolution de l'analyse complexe.

Napier aurait utilisé les valeurs absolues dans l'élaboration des tables logarithmiques, alors que Descartes et Newton les auraient utilisées pour une théorie générale des équations polynomiales. Lagrange et Gauss utilisaient la valeur absolue dans la théorie des nombres pour résoudre des équations de calcul d'erreurs. Argand et Cauchy l'utilisaient pour mesurer la distance entre nombres complexes, et Cauchy l'a souvent utilisée dans l'analyse.

Valeur absolue d'un nombre réel

Première approche

Un nombre réel est constitué de deux parties : un signe + ou – et une valeur absolue. Par exemple :

  • +7 est constitué du signe + et de la valeur absolue 7 ;
  • –5 est constitué du signe – et de la valeur absolue 5.

Ainsi, la valeur absolue de +7 est 7, et la valeur absolue de –5 est 5.

Il est fréquent de ne pas écrire le signe + ; on obtient alors :

  • la valeur absolue de 7 est 7 ;
  • la valeur absolue de –5 est 5, c'est-à-dire l'opposé de –5.

D'où la définition ci-dessous.

Définition

Pour tout nombre réel , la valeur absolue de x (notée |x|) est définie par :

Nous remarquons que .

Propriétés

La valeur absolue possède les propriétés suivantes, pour tous réels a et b :

  • (inégalité triangulaire)
  • (deuxième inégalité triangulaire[1], découle de la première)
  • (inégalité triangulaire généralisée à une famille finie )
  • (c'est l'idempotence, la valeur absolue de la valeur absolue vaut la valeur absolue).

Ces dernières propriétés sont souvent utilisées dans la résolution des inéquations ; par exemple, pour x réel :

Enfin, si est continue sur , alors

Valeur absolue et distance

Il est utile d'interpréter l'expression |x – y| comme la distance entre les deux nombres x et y sur la droite réelle.

En munissant l'ensemble des nombres réels de la distance valeur absolue, il devient un espace métrique.

Une inéquation telle que |x – 3| ≤ 9 se résout alors simplement à l'aide de la notion de distance. La solution est l'ensemble des réels dont la distance au réel 3 est inférieure ou égale à 9. C'est l'intervalle de centre 3 et de rayon 9. C'est l'intervalle [3 – 9 , 3 + 9] = [–6 , 12].

Extension aux nombres complexes

La même notation s'emploie pour le module d'un nombre complexe. Ce choix est légitime parce que les deux notions coïncident pour les complexes dont la partie imaginaire est nulle. En outre, le module |z2 – z1| de la différence de deux nombres complexes z1 = x1 + i y1 et z2 = x2 + i y2 est la distance euclidienne des deux points (x1 , y1) et (x2 , y2).

  • .
  • Si b est nul, module de a = √a2, soit la valeur absolue de a.
  • En représentation exponentielle, si alors .

La fonction valeur absolue

Représentation de la fonction valeur absolue, y = |x|.

Cette fonction fait correspondre à tout x, x si celui-ci est positif ou –x si celui-ci est négatif. La fonction valeur absolue est à valeurs positives, paire.

La fonction valeur absolue f définie par f (x) = |x| est continue sur mais n'est dérivable qu'en tout point de .

Si f est une fonction :

  • la fonction g définie par est une fonction paire coïncidant avec f pour tout x de ;
  • la fonction h définie par est une fonction coïncidant avec f pour tout x tel que et coïncidant avec pour tout x tel que .

Valeur absolue sur un corps

Une valeur absolue[2] sur un corps K est une application qui à tout élément x de K fait correspondre un nombre réel positif noté |x| de telle sorte que, pour tous x et y de K :

  • (axiome de séparation) ;
  • (inégalité triangulaire) ;

Une telle application vérifie (pour tous a et b dans K) :

  1. Si (donc ) alors (en particulier, la valeur absolue du neutre multiplicatif de K* est égale à 1) ;
  2. Si et ont même puissance n-ième pour un certain entier n > 0, alors ils ont même valeur absolue. En particulier (cas n = 2) |–a| = |a| ;
  3. L'application (x, y) ↦ |y – x| est une distance sur K, qui munit K d'une structure de corps topologique ;
  4. si et seulement si est topologiquement nilpotent, c'est-à-dire si an → 0 (pour la topologie associée à cette distance).

Deux valeurs absolues et sur K sont dites équivalentes si les distances associées sont topologiquement équivalentes (ou, ce qui revient évidemment au même : uniformément équivalentes). On peut démontrer[3] qu'il existe même alors une constante telle que .

Une valeur absolue est dite ultramétrique si, pour tous x et y de K,

.

C'est le cas si et seulement si cette valeur absolue est induite par une valuation à valeurs réelles[4].

Exemples

Notes et références

  1. Pierre Guillot, Cours de Mathématiques L1, TheBookEdition, , 405 p. (ISBN 978-2-7466-6411-1, lire en ligne), p. 41-42 (p. 31-32 du fichier pdf sous licence Creative Commons).
  2. N. Bourbaki, Éléments de mathématique, livre III : Topologie générale [détail des éditions], chap. III, § 3.
  3. (en) Henri Cohen, Number Theory, vol. I : Tools and Diophantine Equations, coll. « GTM » (no 239), (lire en ligne), p. 184.
  4. Jean-Pierre Serre, Corps locaux [détail des éditions], première page du chapitre II.

Voir aussi

Articles connexes

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