Artichaut
Cynara cardunculus var. scolymus, Cynara scolymus
Lâartichaut (Cynara cardunculus var. scolymus (L.) Benth.) ou Cynara scolymus L., 1753 est une plante dicotylĂ©done de la famille des AstĂ©racĂ©es (ou ComposĂ©es) appartenant au genre Cynara.
L'artichaut lui-mĂȘme est un chardon domestiquĂ© et cultivĂ©, de l'espĂšce Cynara cardunculus, dont la variĂ©tĂ© sauvage est sans doute Cynara cardunculus var. sylvestris (Lamk., Fiori (en)), ayant donnĂ© naissance Ă deux formes : C. cardunculus f. cardunculus, le cardon, et C. cardunculus f. scolymus, l'artichaut[2]. Ces deux formes ont longtemps Ă©tĂ© considĂ©rĂ©es comme des espĂšces diffĂ©rentes.
On dĂ©signe sous le nom d'artichaut Ă la fois la plante entiĂšre et sa partie comestible, l'inflorescence en capitule, appelĂ©e aussi tĂȘte d'artichaut, ce qui en fait un lĂ©gume-fleur. Le mot, apparu Ă la Renaissance, est empruntĂ© Ă son nom arabe ۧÙۣ۱۶Ù-ŰŽÙÙÙ Ardi-chouki par l'intermĂ©diaire du lombard articiocco.
Ătymologie
Le substantif masculin[3] - [4] - [5] artichaut (prononcĂ© /aÊtiÊo/[4]) est un emprunt[3] - [4], par l'intermĂ©diaire de l'espagnol[3] alcachofa[4] - [6], Ă l'italien dialectal[3] - [5] du nord[3] - [4] articiocco[3] - [4] - [5], notamment en usage en Lombardie et au PiĂ©mont oĂč il a la forme articiocch, attestĂ©e depuis le XVIe siĂšcle[4]. L'espagnol alcachofa est lui-mĂȘme issu, probablement par l'intermĂ©diaire de l'hispano-arabe[4] harĆĄĂ»fa[3] - [4], de l'arabe[3] - [5] áž„ĂĄrĆĄafa[4].
Description
Vivace, la plante est cultivĂ©e surtout comme bisannuelle ou trisannuelle. La reproduction par graine a un caractĂšre plus alĂ©atoire que par Ćilletons.
L'artichaut prĂ©sente une tige dressĂ©e d'une hauteur pouvant aller jusqu'Ă 2 m, Ă©paisse et cannelĂ©e, avec de grandes feuilles, de tailles variables sur un mĂȘme pied : les supĂ©rieures pennatifides, lobĂ©es ou presque entiĂšres, les autres pennatipartites[7].
La partie comestible est un capitule, inflorescence rĂ©coltĂ©e avant que les fleurs ne se dĂ©veloppent[2]. Ce qu'on appelle fond d'artichaut est le rĂ©ceptacle floral de cette inflorescence ; quant aux feuilles, dont on consomme la base, ce sont les bractĂ©es de l'involucre[2]. Lorsqu'on laisse l'artichaut se dĂ©velopper, il se forme Ă son sommet une « fleur » dont la couleur varie du bleu au violet. Comme l'artichaut est une plante composĂ©e, il ne s'agit pas d'« une » fleur, mais d'un ensemble de fleurs (le capitule). Chaque fleur (ou fleuron) se prĂ©sente sous forme d'une touffe de poils appelĂ©e aigrette ayant un minuscule ovaire (futur fruit) Ă sa base. C'est l'ensemble de ces fleurons qui constitue le foin â Ă©galement appelĂ© barbe â des artichauts que l'on consomme.
Les graines se récoltent aprÚs complet dessÚchement de la fleur.
Histoire
Une plante nommĂ©e cynara Ă©tait connue des Grecs et des Romains. Reste Ă savoir Ă quoi elle correspondait exactement. On lui a attribuĂ© des pouvoirs aphrodisiaques. Il semble cependant que l'artichaut que nous connaissons ne soit apparu en Europe qu'Ă la fin du Moyen Ăge, et qu'il s'agisse d'un chardon transformĂ© par sĂ©lection par les horticulteurs (tout comme le cardon).
Il serait originaire d'Afrique du Nord, d'Ăgypte ou d'Ăthiopie. Il est rĂ©guliĂšrement citĂ© par les agronomes arabes ; Ibn Al-'AwwĂąm, agronome andalou du Moyen Ăge, dĂ©crit sa culture et sa reproduction par Ćilletonnage, les Andalous sĂ©lectionnent des variĂ©tĂ©s Ă grosse tĂȘte, Ă©crit-il[8], ce qui montre qu'ils le consomment.
L'artichaut aurait donc Ă©tĂ© introduit par les Arabes en Sicile. Ă partir de 1282 , la Sicile passe sous l'influence de la couronne d'Aragon et en 1492, lâInquisition expulse les Juifs du royaume et notamment de Sicile, lesquels remontent ainsi vers le nord de lâItalie, introduisant la culture de lâartichaut Ă partir du XVe siĂšcle, dans les rĂ©gions oĂč ils peuvent sâinstaller[9] - [10]. A Rome, les Juifs confinĂ©s dans le ghetto prĂ©parent l'artichaut de multiples façons (dont le cĂ©lĂšbre carciofi alla giudia) ; il devient ainsi un « lĂ©gume identitaire »[9].
En 1532, on trouve la premiĂšre mention de l'artichaut Ă Avignon, d'oĂč il est diffusĂ© dans le Comtat et le Languedoc. Cette fleur de chardon amĂ©liorĂ©e par les Arabes, a Ă©tĂ© apportĂ©e de Naples Ă Florence en 1466 par Filippo Strozzi[11]. La tradition[10] veut que son introduction en France soit liĂ©e au personnage de Catherine de MĂ©dicis, qui Ă©tait trĂšs friande de fonds d'artichauts mais ce n'est pas elle qui introduisit rĂ©ellement l'artichaut en France[2](voir mythe italien dans la cuisine française). Louis XIV en Ă©tait lui aussi friand[2]. Les explorateurs français et espagnols l'exportĂšrent en AmĂ©rique.
La culture des artichauts se développe dans les années 1920 en Californie, importée par des immigrants espagnols. Dans la ville de Castroville du comté de Monterey se déroule tous les ans un festival appelé Castroville Artichoke Festival[12].
Principaux cultivars d'artichauts
Actuellement prÚs de 50 cultivars sont inscrits au Catalogue européen des espÚces et variétés et 11 au Catalogue officiel français, dont la variété Gros vert de Laon inscrite sur la liste SVI (pour amateurs)[13]. .
- Les blancs[14] - [15] :
- Le camus ou camus de Bretagne : le plus gros des artichauts (300 Ă 500 g/piĂšce) ; son capitule, vert tendre, a une forme trĂšs arrondie aux bractĂ©es trĂšs serrĂ©es, courtes et larges ; crĂ©Ă© en 1810 par un agronome parisien[16], il est produit de mai Ă novembre dans l'Ouest de la France, notamment en Bretagne ; il se consomme bouilli ou Ă la vapeur, avec une vinaigrette, de la mayonnaise ou de la crĂšme fraĂźche ; les fonds d'artichauts peuvent aussi ĂȘtre farcis.
- Le (gros) vert de Laon, vert d'Italie ou tĂȘte de chat : proche du camus, mais plus rustique et mieux adaptĂ© au froid ; de forme arrondie, avec un capitule plus petit que le camus.
- Le castel : proche du camus, duquel il dérive par croisements ; obtenu dans les années 1980 par l'INRA[15] ; il conserve mieux son aspect et sa couleur en grande distribution.
- Le blanc hyérois : à bractées vertes et assez étroites ; cultivé en Roussillon ; il se consomme surtout cru.
- Le Macau : proche du vert de Laon ; produit principalement en Gironde, prĂšs du village Ă©ponyme.
- Le blanc d'Espagne, Tudela d'Espagne ou blanc de Tudela.
- Le sakis de Turquie.
- Les violets[14] - [15] :Artichauts violets
- Le violet de Provence ou bouquet : assez petit (moins de 100 g/piÚce) et de forme conique, avec des bractées violacées ; il est trÚs cultivé en région méditerranéenne et se récolte de mars à mai, puis de septembre à décembre ; lorsqu'il est gros, il se consomme généralement cuit ; il peut se manger cru quand il est jeune (on l'appelle alors poivrade) ; cru ou cuit, il se déguste notamment en salade, à la vinaigrette, à la barigoule, farci, à la croque-au-sel, en purée, en velouté ou en beignet.
- Le violet de Venise.
- Le violet de Toscane.
- Le violet romanesco.
- Le violet Romagna di Chiogga.
- Le violet catanais.
- L'épineux : de forme fuselée, il doit son nom à l'extrémité épineuse de ses bractées ; il est produit au printemps et en été dans les régions génoise et niçoise, ainsi qu'en Sardaigne (spinoso sardo) et en Sicile (épineux de Palerme) ; il se consomme cru ; il est tendre et craquant sous la dent.
- Le violet de Plainpalais: variété d'artichaut cultivée à GenÚve. Longtemps réputé pour sa finesse et son goût de noisette, il avait presque disparu lorsqu'on le redécouvrit, en 1959. Intégrant alors un programme agronomique de culture in vitro, il fut sauvé de l'oubli et retrouva sa place sur les étals dÚs les années 2000, au cÎté de son cousin le cardon épineux de Plainpalais, au bénéfice, lui, d'une AOC depuis 2003.
Améliorations des variétés
Les principaux caractĂšres Ă amĂ©liorer sont la qualitĂ© du capitule pour les diverses utilisations. Elle est liĂ©e Ă de nombreux facteurs : rĂ©sistance aux maladies telles que le (Bremia lactucae), la vitesse de divergence des bractĂ©es, la durĂ©e de conservation de l'aspect frais, le rendement de la base des bractĂ©es, le rendement du fond et du cĆur[17].
Ces améliorations sont possibles surtout par la sélection sanitaire par culture de méristÚmes et par la création de variétés hybride F1. Cela permet aussi d'améliorer la simultanéité des récoltes mais en contrepartie de créer une gamme de variétés à précocité décalée pour couvrir une longue période de récolte[17].
L'INRA a ainsi mis au point divers nouveaux cultivars d'artichaut. Parmi ces cultivars, on peut citer le Caribou, le Salambo, le Salanquet, le Carlite, le Popvert, le Vertu, le Calico, le Cric, le Cari et le Cardinal[15].
L'artichaut ne rĂ©sistant pas au rigoureux hiver canadien, le ministĂšre de l'agriculture du Canada est parvenu Ă mettre au point un cultivar qui peut ĂȘtre forcĂ© pour produire la premiĂšre annĂ©e.
- Planche de l'artichaut.
- Champ dâartichauts, (Bretagne, France).
- Bouquet d'artichauts à l'entrée d'un restaurant romain.
- AkÚnes de Cardunculus scolymus, « variété blanc de Tudela ».
- Artichaut sur pied Ă Capbreton.
- Artichaut en fleur (Gaillac, France).
- Culture d'artichauts (Bretagne, France).
- Artichauts bouillis.
- Carciofo alla Giudia (artichaut à la juive) une des spécialités culinaires de Rome.
Production
Production mondiale
Depuis l'aprĂšs guerre, l'Italie est restĂ©e de loin le premier producteur mondial d'artichauts, avec un summum de production en 1972 avec 751 000 tonnes. De nos jours, la production mondiale oscille autour des 1,6 million de tonnes par an (dont 451 000 tonnes en Italie)[18]. 75 % de la production d'artichauts des Ătats-Unis est rĂ©alisĂ©e dans le comtĂ© de Monterey en Californie[12].
Production française
En 2017, la production française est de 45 165 tonnes[19]. La surface cultivée est de 7 213 hectares, soit un rendement de 6,3 tonnes à l'hectare. Les principaux départements producteurs sont le FinistÚre, les CÎtes-d'Armor, les Pyrénées-Orientales. Le commerce extérieur est déficitaire : 9 722 tonnes produites sont exportées mais 15 428 tonnes sont importées.
Valeur nutritive
L'artichaut est un légume riche en polyphénols : flavonoïdes et acide-phénols[20].
Artichaut, partie comestible crue (valeur nutritive pour 100 g de matiĂšre fraiche, d'aprĂšs DTU[21]) | |||
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eau : 84,9 g | cendres totales : 1,1 g | fibres : 5,4 g | valeur énergétique : 193 kJ |
protéines : 3,3 g | lipides : 0,2 g | glucides : 10,5 g | sucres simples : 5,1 g |
oligo-éléments | |||
potassium : 404 mg | magnésium : 35,6 mg | phosphore : 72,3 mg | calcium : 60 mg |
sodium : 27,0 mg | fer : 1,1 mg | iode : 0,5 ”g | sélénium : 0 ”g |
vitamines | |||
vitamine C : 11,7 mg | vitamine B1 : 89 ”g | vitamine B2 : 60 ”g | vitamine B3 : 1 050 ”g |
vitamine B5 : 295 ”g | vitamine B6 : 97 ”g | vitamine B9 : 0 ”g | vitamine B12 : 0 ”g |
vitamine A : 0,0 RE | rétinol : 0 ”g | vitamine E : 0 mg | vitamine K : 0 ”g |
Flavones (pour 100 g de matiĂšre sĂšche, d'aprĂšs Phenol-Explorer[22]) | |||
Apigénine 7-O-glucuronide : 7,40 mg | lutéoline : 42,10 mg | lutéoline 7-O-glucuronide : 8,30 mg | lutéoline -7-O-rutinoside : |
Acides chlorogéniques (pour 100 g de ms, d'aprÚs Lattanzio et al.[20]) | |||
acide 1-O-caféylquinique : 38,18 mg | acide 3-O-caféylquinique : 57,22 mg | acide 4-O-caféylquinique : 267,02 mg | acide 5-O-caféylquinique: 1 544,91 mg |
acide 4,5-O-dicaféylquinique : 224,56 mg | acide 3,5-O-dicaféylquinique: 347,05 mg | acide 1,5-O-dicaféylquinique: 837,01 mg | acide 3,4-O-dicaféylquinique: 428,71 mg |
L'artichaut est le légume de France le plus riche en acide chlorogénique (acide 5-O-caféylquinique, 39 % du total des acides chlorogéniques), connu pour ses activités antioxydantes et qui pourrait jouer un rÎle dans la prévention du diabÚte de type II[23]. Viennent ensuite l'acide 1,5 O-dicaféylquinique (21 %) puis l'acide 3,4 O-dicaféylquinique (11 %). Il contient[24] aussi de l'acide 1,3-dicaféylquinique (ou cynarine) mais en trÚs faible quantité (1,5 %), de l'acide malique (0,8 % de la feuille sÚche), de l'acide succinique, lactique, fumarique, et citrique.
Les flavonoĂŻdes de l'artichaut sont des flavones (apigĂ©nine, lutĂ©oline et leurs hĂ©tĂ©rosides) et des anthocyanidols (cyanidine, pĂ©onidine, delphinidine). Les flavones ont Ă©tĂ© dĂ©tectĂ©es dans les feuilles et la tĂȘte (l'inflorescence) alors que les pigments d'anthocyanidols se trouvent seulement dans la tĂȘte qu'ils teintent de couleurs bleus ou pourpres. La lutĂ©oline (ou lutĂ©olol) est un puissant antioxydant jouant un rĂŽle dans la protection contre l'oxydation des lipoprotĂ©ines de basse densitĂ© LDL. Toutefois, ces flavonoĂŻdes sont des constituants mineurs de l'artichaut puisqu'ils ne reprĂ©sentent que 10 % du total des polyphĂ©nols[20].
La feuille contient aussi des lactones sesquiterpéniques, libres (aguerine, grosheimine) ou glucosylées qui lui donnent une grande amertume.
Les fructanes (polymĂšres de fructoses) de l'artichaut ont aussi retenu l'attention des nutritionnistes comme fibres alimentaires. On trouve de l'inuline, un fructane hydrosoluble, prĂ©sent chez les AstĂ©racĂ©es, comme la chicorĂ©e (Cichorium intybus) ou le pissenlit (Taraxacum officinale). L'inuline traverse l'intestin grĂȘle sans ĂȘtre attaquĂ©e par les enzymes et se retrouve intacte dans le cĂŽlon. LĂ , elle est hydrolysĂ©e et subit des fermentations par des bactĂ©ries. Elle favoriserait le dĂ©veloppement des bifidobacterium et aurait donc un effet prĂ©biotique[20].
Points forts de l'artichaut : c'est un légume pauvre en lipide et cholestérol. C'est une bonne source[25] de niacine (vitamine B3), de magnésium, phosphore, potassium et cuivre et une trÚs bonne source de fibres et de vitamine C.
Propriétés pharmacologiques
Activités antioxydantes
D'aprĂšs les donnĂ©es rĂ©centes de U.S. Department of Agriculture (2010), l'activitĂ© antioxydante de l'artichaut, mesurĂ©e par le test ORAC[N 1] est excellente. Mis Ă part les Ă©pices et aromates qui caracolent en tĂȘte du classement par paramĂštre ORAC, les parties comestibles d'artichauts sont classĂ©es devant tous les autres lĂ©gumes et Ă Ă©galitĂ© avec les baies rouges (canneberges, mĂ»res, myrtilles). Le "fond" d'artichaut est le lĂ©gume le plus riche en polyphĂ©nols totaux de notre alimentation[24], devant le persil et le chou de Bruxelles (en moyenne 321 mg·100g de lĂ©gume frais, exprimĂ©s en acide gallique Ă©quivalent).
Activité antioxydante ORAC de diverses plantes, d'aprÚs USDA[26] (2010) | ||
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Partie comestible | Nom scientifique de la plante | ORAC moyen ( ÎŒmol TE/100 g) |
Ăcorce de cannelle en poudre | Cinnamomum verum | 131 420 |
Pruneaux | Prunus domestica | 8 059 |
Artichaut, fond cru | Cynara scolymus | 6 552 |
Mûres, crues | Rubus fruticosus | 5 905 |
Ail, cru | Allium sativum | 5 708 |
Pomme crue, avec sa peau | Malus pumila var. Golden delicious | 2 670 |
Asperge, crue | Asparagus officinalis | 2 252 |
Brocoli, cru | Brassica oleracea var. italica | 1 510 |
L'extrait d'artichaut manifeste une aptitude à retarder l'oxydation des lipoprotéines de basses densité LDL (mauvais cholestérol)[20]. Comme on sait que la lutéoline (et dans une moindre mesure la lutéoline 7-0-glucoside) manifeste aussi cette activité, on est en mesure de supposer que l'activité antioxydante de l'artichaut relÚverait en partie de ses flavonoïdes. Rappelons que l'oxydation du LDL provoque sa précipitation sur les parois vasculaires et la formation de cellules spumeuses qui réduisent le diamÚtre des vaisseaux sanguins.
Activité hépatoprotectrice
L'étude directe des extraits aqueux d'artichaut a montré qu'ils étaient capables de réduire la peroxydation des lipides et de protéger de la toxicité d'un hydroperoxyde (t-BHP) sur les cellules de foie de rat en culture[27]. Ce type d'essai a montré que des composants de l'artichaut comme la cynarine, la lutéoline 7-O-glucoside, ou les acides chlorogéniques pouvaient contribuer au potentiel hépatoprotecteur de l'artichaut. Il conduit donc à favoriser la digestion[28] et lutter contre les constipations chroniques[29].
L'artichaut contient de la silymarine, un mélange de flavanolignanes. Ces molécules stimulent la régénération des tissus hépatiques[30].
Activité cholérétique
SaĂ©nz Rodrigez et al.[31] (2002) ont Ă©tudiĂ© l'effet d'extrait de feuilles d'artichaut (administrĂ© par voie orale) sur la sĂ©crĂ©tion de bile (cholĂ©rĂšse) chez le rat[N 2]. Ils ont observĂ© une augmentation significative du flux de la bile aussi bien aprĂšs une seule forte dose qu'aprĂšs une administration rĂ©guliĂšre durant 7 jours. L'extrait d'artichaut manifeste mĂȘme un effet cholĂ©rĂ©tique semblable Ă celui de la substance pharmaceutique de rĂ©fĂ©rence, l'acide dĂ©hydrocholique.
Il a été aussi montré que l'extrait aqueux de feuilles d'artichaut était, à forte dose, capable d'inhiber la biosynthÚse du cholestérol par des cellules de foie de rat en culture[32] - [33].
Protection cardiovasculaire
Les cellules endothéliales qui tapissent les parois des vaisseaux sanguins libÚrent du monoxyde d'azote NO qui provoque un relùchement de leur tunique et donc une vasodilatation. Il a été montré[34] que l'artichaut sauvage (Cynara cardunculus) était capable d'accroßtre la production du monoxyde d'azote NO, par les cellules endothéliales de l'aorte. L'alimentation de rats ùgés avec de l'artichaut sauvage permet de restaurer une vasomotion[N 3] à un niveau semblable à celui observé chez les jeunes rats. Un extrait de feuilles d'artichaut peut aussi stimuler l'activité d'un promoteur de eNOS (forme endothéliale de la NO synthase) par les cellules endothéliales[35]. Il a été aussi noté que si les flavonoïdes, comme la lutéoline et le cynaroside, accroissaient l'expression des ARNm de l'eNOS, par contre, les acides caféylquiniques (la cynarine et l'acide chlorogénique) étaient sans effet.
Usages
Usages culinaires
Les tĂȘtes d'artichaut sont consommĂ©es soit crues soit cuites. Le petit artichaut violet poivrade est consommĂ© entier, ou pelĂ© et cuit rapidement. Certaines variĂ©tĂ©s de violets italiens se mangent spĂ©cialement crues, tranchĂ©es fin, avec du sel, du jus de citron et de l'huile d'olive. L'artichaut se prĂ©pare entier ou farci, peut ĂȘtre cuit Ă l'eau salĂ©e, Ă la vapeur, au four Ă micro ondes, au four, braisĂ©, etc. Une feuille de laurier parfume la cuisson. Il peut se manger nappĂ© d'une sauce bĂ©chamel ou hollandaise ou cuit Ă la niçoise. On le mange chaud, tiĂšde ou froid, accompagnĂ© d'une vinaigrette ou d'une mayonnaise. Le cĆur, souvent mis en conserve ou marinĂ©, est incorporĂ© aux salades et aux hors-d'Ćuvre ou est employĂ© comme garniture.
Les vraies feuilles, celles qui poussent le long de la tige, qu'on récolte à des fins médicinales, sont également comestibles (blanchies ou cuites).
La feuille est utilisée pour produire diverses boissons apéritives, dont le Cynar, le vin d'artichaut.
Le foin séché est utilisé pour cailler le lait.
Lâartichaut cuit s'oxyde rapidement : son jus de cuisson vire au vert, il noircit (Ă moins dâĂȘtre bien citronnĂ©) et sa saveur sâaltĂšre rapidement ; il faut donc le consommer dans les 24 heures et le conserver au frais en attendant[36]. En revanche l'idĂ©e qu'il s'y dĂ©veloppe des composĂ©s toxiques, rĂ©pandue en France (mais pas en Italie ni en Espagne), n'a pas de bases scientifiques[37].
Usages médicinaux
L'herboristerie traditionnelle utilise l'artichaut en feuilles fraßches ou séchées, en jus (de plante entiÚre ou en divers extraits liquides) ou en extraits solides. En France, la Note Explicative de l'Agence du médicament (1998) admet qu'il est possible d'utiliser la feuille d'artichaut :
- pour faciliter les fonctions d'Ă©limination urinaire et digestive ;
- comme cholérétique ou cholagogue ;
- pour favoriser l'élimination rénale de l'eau[24].
Certains praticiens de para-mĂ©decines vantent des vertus bĂ©nĂ©fiques de l'artichaut sur le foie et la vĂ©sicule biliaire, sans aucune preuve scientifique. Comme le remarque un peu sardoniquement Bruneton : « Pour nombre de pharmacologues, les affections traitĂ©es par cholagogues et les cholĂ©rĂ©tiques auraient pour seule origine des irritations de la muqueuse gastrique : dans ces conditions, l'intĂ©rĂȘt d'accroĂźtre la sĂ©crĂ©tion de bile ou de stimuler la contraction vĂ©siculaire n'apparaĂźt pas trĂšs clairement. »[24]
De nombreuses entreprises (comme France Direct Shop) vendent des gélules d'extrait d'artichaut comme brûle-graisse ou amaigrissant miracle : contrairement aux prétentions, aucun de ces produits n'a jamais fait l'objet d'une évaluation médicale, et il s'agit d'une simple arnaque commerciale[38].
Contre-indications :
- calculs biliaires ou obstruction des voies biliaires parce que l'artichaut stimule la production de bile ;
- allergie aux plantes de la famille des composées (marguerites, asters, camomille, etc.).
Aliment fonctionnel
Pour des chercheurs comme Lattanzio et al., l'artichaut doit ĂȘtre rĂ©Ă©valuĂ© comme aliment fonctionnel, c'est-Ă -dire un aliment capable d'aller au-delĂ d'un apport nutritionnel satisfaisant, en apportant un bĂ©nĂ©fice pour le bien-ĂȘtre et la santĂ© ou de rĂ©duire les risques de maladie[20]. L'artichaut, de ce point de vue, est intĂ©ressant en raison de sa richesse en fructanes et en polyphĂ©nols. Ses fructanes, de type inulines, sont des fibres alimentaires ciblant la microflore du cĂŽlon, capables d'influer positivement sur la physiologie gastro-intestinale, les fonctions immunitaires, la biodisponibilitĂ© des minĂ©raux et le mĂ©tabolisme des lipides. Les polyphĂ©nols ont retenu l'attention des chercheurs en ce qui concerne leur activitĂ© antioxydante.
Culture populaire
Références artistiques
Dans la peinture europĂ©enne de la Renaissance, l'artichaut est reprĂ©sentĂ© dans diverses Ćuvres : L'ortolana de Vincenzo Campi, Cuisine de Floris van Schooten, Nature morte d'asperges, d'artichauts, citrons et cerises de Blas De Ledesma, L'Ă©tĂ© et Vertumnus de Arcimboldo.
Sculpté, il apparait ornant quelques fontaines monumentales situées à Naples, Florence et Madrid.
On trouve aussi des exemples des reprĂ©sentations de lâartichaut dans lâart du XXe siĂšcle :
- Vase Artichaut, 1901, du designer LĂ©on Kann (travaillant pour la Manufacture de SĂšvres), Ćuvre dans le plus pur style Art nouveau exposĂ©e au MusĂ©e des Beaux-arts de Lille.
- MĂ©lancolie dâun aprĂšs-midi, 1913, du peintre italien Giorgio De Chirico (exposĂ©e au Centre Pompidou, Paris), qui prĂ©sente deux Ă©normes artichauts au premier plan, lesquels occupent les deux tiers de la toile. NĂ©anmoins, il ne sâagit pas dâune nature morte, puisquâune partie du tableau est occupĂ©e par une tour de brique et une locomotive lancĂ©e Ă toute vapeur, en arriĂšre-plan. Selon lâessayiste Jean Clair, ces deux artichauts sont comme les fragments brisĂ©s dâun thyrse (lâattribut traditionnel du dieu Bacchus) et ce tableau de 1913 pourrait donc ĂȘtre « lu » comme l'icĂŽne d'une Europe au bord de la catastrophe, parce que coupĂ©e de ses racines grĂ©co-latines.
- Fruits dans un compotier, 1950, de Bernard Buffet : autour du compotier du titre, qui contient deux de ces légumes stylisés, en sont disposés trois autres.
- Casquette artichaut, du photographe contemporain Fulvio Bonavia, proposĂ©e parmi dâautres montages dans son ouvrage A Matter of taste (Hachette Australia, 2008).
Expressions
« Avoir un cĆur d'artichaut » signifie tomber frĂ©quemment amoureux, sans beaucoup de discernement[39].
Dans son sketch « L'Ătudiant » crĂ©Ă© et jouĂ© en 1980, Coluche dit de ce lĂ©gume « Les artichauts, c'est un vrai plat de pauvres. Le seul plat que, quand tâas fini de manger, tâen as plus dans ton assiette que quand tâas commencĂ© ! »[40].
Un proverbe humoristique est attaché à ce légume-fleur : « L'artichaut est le légume le plus malheureux du monde : on lui coupe la queue, on lui tire les oreilles, on lui arrache les poils et on lui bouffe le cul »[41].
Calendrier
Le 12e jour du mois de messidor (des moissons) du calendrier républicain / révolutionnaire français est officiellement dénommé jour de l'artichaut[42], généralement chaque 30 juin du calendrier grégorien.
Notes et références
Notes
- mesure de la capacité de l'échantillon à neutraliser l'effet d'un oxydant, l'AAPH (un radical peroxyl), sur la fluorescine
- la sécrétion de la bile par le foie est mesurée directement au niveau du canal cholédoque par une ouverture abdominale pratiquée sur l'animal anesthésié
- oscillation cyclique du diamÚtre artériel induit par l'activité des muscles lisses
Références
- IPNI. International Plant Names Index. Published on the Internet http://www.ipni.org, The Royal Botanic Gardens, Kew, Harvard University Herbaria & Libraries and Australian National Botanic Gardens., consulté le 28 juillet 2020
- Ăric Birlouez, Petite et grande histoire des lĂ©gumes, QuĂŠ, coll. « Carnets de sciences », , 175 p. (ISBN 978-2-7592-3196-6, prĂ©sentation en ligne), Une fabuleuse diversitĂ©, « Un cĆur d'artichaut », p. 39-43.
- « Artichaut », dans le Dictionnaire de l'Académie française, sur Centre national de ressources textuelles et lexicales (sens 1 [consulté le 12 décembre 2016].
- Informations lexicographiques et étymologiques d'« artichaut » (sens A) dans le Trésor de la langue française informatisé, sur le site du Centre national de ressources textuelles et lexicales [consulté le 12 décembre 2016].
- Entrée « artichaut », sur Dictionnaires de français [en ligne]', Larousse [consulté le 12 décembre 2016].
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Voir aussi
Bibliographie
- Ăliane Thibaut-Comelade, Petit traitĂ© savant de l'artichaut, Ăquinoxe, 2017 (ISBN 2841359336).
Articles connexes
Liens externes
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :
- (en) Référence Catalogue of Life : Cynara scolymus L. (consulté le )
- Saisonnalité, sur le "Calendrier des fruits et légumes"
- François-RĂ©gis Gaudry, « Lâartichaut fait son show ! », sur France Inter, .
- (en) Référence IPNI : Cynara cardunculus var. scolymus
- (fr) Référence INPN : Cynara scolymus L., 1753 (TAXREF) (consulté le )
- Cynara scolymus Encyclopédie en protection des plantes - INRAE