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Gestion des déchets radioactifs en France

La gestion des déchets radioactifs en France est du ressort de l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA). Elle est régie par la loi relative aux recherches sur la gestion des déchets radioactifs de 1991, modifiée en 2006 par la loi de programme relative à la gestion durable des matières et déchets radioactifs.

Selon cette loi, un déchet radioactif est une substance qui contient des radionucléides, naturels ou artificiels, dont l'activité ou la concentration justifie un contrôle de radioprotection, et pour laquelle aucune utilisation ultérieure n'est prévue ou envisagée. En France, le propriétaire des déchets en reste responsable et assure sa gestion, conformément à la loi.

Le volume total de ces dĂ©chets est Ă©valuĂ© par l'ANDRA Ă  environ 1 540 000 m3 fin 2016, dont seulement 3 650 m3 de dĂ©chets de haute activitĂ© et Ă  vie longue, les plus dangereux. Ce volume total pourrait atteindre, selon les scĂ©narios prospectifs de l'ANDRA, entre 4 372 000 et 5 048 000 m3 (dont 10 000 Ă  32 500 m3 de haute activitĂ©) d'ici la fin du dĂ©mantèlement des installations autorisĂ©es Ă  fin 2016.

Plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs

Selon la loi de programme relative à la gestion durable des matières et déchets radioactifs de 2006, un déchet radioactif est une substance qui contient des radionucléides, naturels ou artificiels, dont l'activité ou la concentration justifie un contrôle de radioprotection, et pour laquelle aucune utilisation ultérieure n'est prévue ou envisagée[2].

En France, le propriĂ©taire des dĂ©chets en reste responsable et assure sa gestion, conformĂ©ment Ă  la loi[3]. La gestion des dĂ©chets radioactifs est planifiĂ©e dans un « Plan national de gestion des matières et des dĂ©chets radioactifs » (PNGMDR[4])[5], mis Ă  jour tous les trois ans. Ce plan prĂ©voit une gestion diffĂ©rentiĂ©e des dĂ©chets, adaptĂ©e Ă  leur dangerositĂ© et « durĂ©e de vie radioactive Â», en cinq catĂ©gories de dĂ©chets : haute activitĂ© (0,2 % du volume total en 2009), moyenne activitĂ© Ă  vie longue (3,6 % en 2009), faible activitĂ© Ă  vie longue (7,2 % en 2009), faible et moyenne activitĂ© Ă  vie courte (68,8 % en 2009), très faible activitĂ© (20,1 % en 2009, avec une forte augmentation attendue en raison des futurs dĂ©mantèlements d'installations[6], avec des projets d'intĂ©grer dans la rĂ©glementation « la possibilitĂ© de libĂ©ration[7] des matĂ©riaux faiblement radioactifs. Cela coĂŻncide avec la publication par l’AIEA et la Commission EuropĂ©enne de nouvelles normes de base en radioprotection (BSS) en 1996[8] - [9], qui prĂ©cisent cette notion »[6]). La seconde version du PNGMDR date de 2010.

Ce plan associe deux axes stratégiques : le traitement du combustible usé, et le stockage des « déchets ultimes ». La notion de déchet ultime et non revalorisables n'est pas spécifique à l'industrie nucléaire, mais courante dans le droit de la gestion des déchets en général. La « Loi Bataille » du distingue les « déchets radioactifs » ultimes, des matières radioactives valorisables (uranium appauvri, combustible irradié, uranium dit "de traitement" (ou de retraitement), plutonium réutilisable dans un combustible MOX, MOX , etc.). Les rejets d'effluents radioactifs liquides et gazeux ne sont pas traités par ce plan, mais régis par des autorisations spécifiques, de même que les résidus miniers actuellement encadrés par des normes de radioprotection relevant du Droit minier (en cours de révision).

Le troisième plan PNGMDR, pour la période 2013-2015, a été adressé au Parlement par le Gouvernement le [5], préparé depuis 2007 sous l’égide de l’Autorité de sûreté nucléaire et du ministère chargé de l’énergie. Il a donné lieu à un décret le [10]. Ce plan intègre les exigences de la directive européenne du établissant un cadre communautaire pour la gestion responsable et sûre du combustible usé et des déchets radioactifs. Le plan il insiste sur la nécessité de développer des schémas industriels globaux de gestion et de développer des modes de gestion pour les déchets de haute activité et de moyenne activité à vie longue.

Le plan 2016-2018[11], ouvre de nouveaux axes notamment sur la nocivité à long terme des déchets radioactifs dans une perspective environnementale globale, les perspectives de valorisation de long terme de certaines matières radioactives ou encore les stratégies d’entreposage mises en œuvre par les exploitants dans l’attente de la mise en place de solutions de gestion définitive.

Le plan 2019-2021 fait, pour la première fois, l'objet d'un débat public organisé par la Commission nationale du débat public. Ce débat public sur la cinquième édition du PNGMDR se déroule[12] du au .

Histoire

Les premiers déchets radioactifs proviennent de l'utilisation industrielle du radium, de la recherche et de la médecine, puis des usages militaires et énergétiques. La production et la dangerosité de ces déchets a fortement augmenté des années 1940 à nos jours.

On distingue souvent deux types de déchets

  • en amont ; les dĂ©chets des mines et carrières d'uranium ou d'autres produits radioactifs (stĂ©riles minières, boues radioactives, radon) liĂ©s Ă  l'extraction de l'uranium ou d'autres substances radioactives (cobalt, etc.). Ce sont souvent des produits peu radioactifs, mais accumulĂ©s en volumes importants et pour certains (uranium) Ă  très longue durĂ©e de vie.
  • en aval ; les dĂ©chets des filières nuclĂ©aires militaires et civiles ; souvent moins volumineux, mais parfois hautement radioactifs et chimiquement très toxiques.

La France ayant donné priorité au développement de l'arme nucléaire et de l'énergie nucléaire se trouve confrontée à d'importants tonnages de déchets à courte, moyenne et longue durée de demi-vie radioactive. S'y ajoute un nombre croissant de sources radioactives scellées usagées (problème devant être étudié à partir de 2013 par un groupe de travail dédié[13] - [14] - [15].
La gestion de ces déchets a d'abord relevé, d'une manière peu transparente, du CEA et d'organismes militaires. Puis face à une forte augmentation du volume et de la dangerosité de ces déchets, et en réponse à une demande de transparence formulée par la société civile, de nouveaux organismes ont été créés, dont l'ANDRA concernant les déchets. Des rapports publics ont été produits, dont celui de Pierre Desgraupes en 1991 sur les déchets, suivis de ceux du député Christian Bataille, à l'origine de la loi Bataille de 1991 sur le nucléaire, sur la gestion, le stockage (éventuellement souterrain), la surveillance ou la réutilisation de ces déchets, modifiée en 2006.

Fin 2014, face Ă  la perspective d'une augmentation des tonnages de dĂ©chets Ă  traiter, l'ANDRA lance avec l’Agence nationale de la recherche (ANR) un appel Ă  projets de recherche innovants sur la gestion des dĂ©chets radioactifs. Pour vingt-neuf projets dĂ©posĂ©s, douze ont Ă©tĂ© retenus en [16]. Ils bĂ©nĂ©ficieront de 40 millions d'euros sur 4 ans. Un second AAP est attendu fin 2015 visant plus spĂ©cifiquement Ă  tenter de limiter les dĂ©chets issus du dĂ©mantèlement des installations nuclĂ©aires (qui sont en tonnage principalement des dĂ©chets très faiblement radioactifs (TFA), aujourd’hui envoyĂ©s au centre de stockage de Morvilliers (Aube), qui ne pourra tous les accueillir selon Bruno Cahen[17] puisque selon le « dernier inventaire national sur les dĂ©chets radioactifs » le dĂ©mantèlement des installations existantes produira environ deux millions de mètres cubes de dĂ©chets TFA (trois fois la capacitĂ© du centre de Morvilliers 650 000 m3[16]. Les dĂ©chets très faiblement radioactifs pourraient ĂŞtre stockĂ©s sur les sites nuclĂ©aires mĂŞme, afin de limiter les transports massifs[16].

Classification

Critères retenus pour la classification des déchets radioactifs en France, et par suite pour leur gestion

La classification se fait en croisant deux paramètres : le niveau de radioactivité et la demi-vie radioactive du déchet (liée à la période radioactive de tous les radionucléides présents dans le déchet).

Selon la loi française, un déchet radioactif est dit[18] :

  • de très faible activitĂ© si son niveau d'activitĂ© est comprise entre un et cent becquerels par gramme (1 Ă  100 Bq/g).
  • de faible activitĂ© si ce niveau est compris entre quelques dizaines de becquerels par gramme et quelques centaines de milliers de becquerels par gramme (100 Bq/g Ă  1MBq/g);
  • de moyenne activitĂ© si ce niveau est d'environ un million Ă  un milliard de becquerels par gramme (1MBq/g Ă  1GBq/g) ;
  • de haute activitĂ© si ce niveau est de l'ordre de plusieurs milliards de becquerels par gramme (GBq/g, niveau pour lesquels la puissance spĂ©cifique est de l'ordre du watt par kilogramme, d'oĂą la dĂ©signation de dĂ©chets « chauds ») ;

...et, sur la base de sa période radioactive :

Schéma de classification de déchets et de leur gestion selon la durée de vie radioactive et l'intensité de radioactivité
  • Ă  vie très courte si sa pĂ©riode est infĂ©rieure Ă  100 jours (ce qui permet de les gĂ©rer par dĂ©croissance radioactive pour les traiter après quelques annĂ©es comme des dĂ©chets industriels normaux) ;
  • Ă  vie courte si sa radioactivitĂ© provient essentiellement de radionuclĂ©ides qui ont une pĂ©riode de moins de 31 ans (ce qui assure leur disparition Ă  une Ă©chelle historique de quelques siècles) ;
  • Ă  vie longue s'il contient une importante quantitĂ© de radionuclĂ©ides dont la pĂ©riode dĂ©passe 31 ans (ce qui impose une gestion du confinement et de la dilution compatible avec des Ă©chelles de temps gĂ©ologiques).

Le gestionnaire des déchets doit en outre tenir compte de ses caractéristiques physiques (gaz, liquide, solide pulvérulent ou non, etc.) et de son éventuelle toxicité chimique ainsi que de son âge et de sa réactivité[13] - [19].

Vie très courte (VTC)
période radioactive <100 jours
Vie courte (VC)
période radioactive ≤ 31 ans
Vie longue (VL)
période radioactive > 31 ans
Très.Faible.Activité..(TFA)
TFA < 100 Bq/g
DĂ©chets VTC
Gérés sur place par décroissance radioactive. Ils sont ensuite gérés comme des déchets classiques.
DĂ©chets TFA
Stockés en surface au Centre de stockage TFA de l’Aube.
Faible.Activité(FA)
1 MBq/g> FA >100 Bq/g
DĂ©chets FMA-VC
Stockés en surface[20] au Centre de stockage FMA de l’Aube qui a succédé au Centre de stockage de la Manche, aujourd’hui fermé et sous surveillance.
DĂ©chets FA-VL
Centre de stockage Ă  faible profondeur (entre 15 et 200 mètres) Ă  l’étude. Mise en service prĂ©vue en 2019.
Moyenne.Activité(MA)
1 GBq/g > MA > 1 MBq/g
DĂ©chets MA-VL
Centre de stockage profond (Ă  500 mètres) Ă  l’étude. CigĂ©o. Mise en service Ă©ventuelle Ă  partir de 2025.
Haute.Activité(HA)
HA > 1 GBq/g
DĂ©chets HA
Centre de stockage profond (Ă  500 mètres) Ă  l’étude. CigĂ©o. Mise en service Ă©ventuelle Ă  partir de 2035[21].

Déchets de haute et moyenne activité à vie longue

Les dĂ©chets de haute activitĂ© sous forme chimique solide et stable (gĂ©nĂ©ralement des oxydes) doivent ĂŞtre stabilisĂ©s dans une « matrice » vitreuse. Ils dĂ©gagent de la chaleur et sont donc entreposĂ©s dans l'eau de Piscines de dĂ©sactivation ou dans des installations ventilĂ©es. En France, l'usine de retraitement de la Hague et le site nuclĂ©aire de Marcoule accueillent ces dĂ©chets. Un processus de « sĂ©paration sĂ©lective » est effectuĂ© dans l'usine de la Hague. Puis la vitrification des dĂ©chets non rĂ©utilisables de haute activitĂ© (produits de fission, actinides mineurs) produit un volume de « colis de dĂ©chets hautement radioactifs » d'environ 125 m3 par an[22], avec une rĂ©duction d'un facteur de 5 au moins par rapport aux concepts Ă  l'Ă©tude dans le cas du stockage direct des combustibles usĂ©s. La vitrification de dĂ©chets de haute activitĂ© produits depuis plus de 10 ans est encore Ă  l'Ă©tude : par exemple pour 228 m3 de solutions molybdiques de produits de fission (usine de la Hague), reliquat des solutions d'effluents HA des cuves (de Fontenay-aux-Roses), etc.

Gestion de long terme pour les déchets à haute activité et à vie longue.

La loi Bataille () a jusqu'en 2006, encadré trois axes de recherche :

  1. Transmutation et/ou séparation chimique : cet axe de recherche a été confié par le législateur, via la loi Bataille au CEA ;
  2. Stockage des déchets radioactifs en couche géologique profonde (définitif ou réversible) ;
  3. Entreposage nucléaire en surface ou subsurface ; cet axe de recherche a été confié par le législateur, via la loi Bataille, au CEA, puis la responsabilité des études sur l'entreposage nucléaire a été transférée à l'ANDRA en 2006[23].

La loi de programme relative à la gestion durable des matières et déchets radioactifs du confie à l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA) l'étude de l'option de stockage géologique profond et plus précisément celle de la possibilité de mise en service industrielle vers 2025 d'un stockage « réversible » en couche géologique des déchets radioactifs de haute activité et à durée de vie longue (projet Cigéo).

En , le Parlement vote la loi fixant le cadre du projet d'enfouissement des déchets radioactifs français dans le Centre industriel de stockage géologique (Cigéo) : le décret d'autorisation est prévu vers 2025, suivi d'une phase pilote de cinq ans ; le centre entrerait donc en exploitation vers 2030[24].

Le 8 juillet 2022 est publiée par décret la déclaration d'utilité publique (DUP) du projet Cigéo. L'Andra doit ensuite déposer sa demande d'autorisation de création du site à l'Autorité de sûreté nucléaire, dont l'instruction prendra entre trois et cinq ans[25].

Déchets de faible et moyenne activité (FMA)

Ils sont en France destinés à être stockés en surface après avoir été solidifiés pour éviter la dispersion de la radioactivité, puis enrobés de béton, de résine ou de bitume pour éviter toute possibilité de réaction chimique et bloquer le déchet dans son conteneur. Ils sont finalement placés dans des conteneurs métalliques ou en béton, de bonne résistance mécanique et manipulables sans dispositions particulières de radioprotection.

Ces conteneurs sont principalement stockés en surface dans deux sites de l'Andra[26], aménagés pour cela :

  • le centre de stockage de la Manche situĂ© sur la commune de Beaumont-Hague, qui a accueilli les colis de dĂ©chets Ă  partir de 1969, et est rempli depuis 1994. Il est aujourd’hui en phase de surveillance ;
  • le centre de stockage de l'Aube situĂ© sur la commune de Soulaines-Dhuys, qui accueille depuis 1992 les dĂ©chets français pour environ 40 ans. Sa capacitĂ© de stockage est d'un million de mètres cubes, les fĂ»ts Ă©tant Ă©crasĂ©s pour diminuer les volumes. Il est aujourd'hui en phase d'exploitation.

D'autres sites nucléaires français contiennent des déchets radioactifs de cette catégorie : Cadarache, Pierrelatte, etc.

Déchets de très faible activité

Enlèvement de déchets TFA

Dans le cas des installations nucléaires, les notions de déchets à très faible activité (TFA) et de zonage déchets sont issues de l'arrêté interministériel du [27].

Les déchets TFA, principalement issus du démantèlement, sont compactés et conditionnés en big-bags ou en caissons métalliques. Ils sont rangés dans des alvéoles creusés dans l'argile, dont le fond est aménagé pour recueillir d'éventuelles eaux infiltrées pendant toute la durée du stockage.

Depuis , certains colis de déchets TFA sont stockés en surface dans le centre de stockage de Morvilliers.

D'autres sites nucléaires détiennent ces déchets, notamment les centrales arrêtées de Brennilis et Superphénix. Ces différents sites de stockage TFA ne sont pas des installations nucléaires de base, mais des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE)[28].

DĂ©chets faiblement radioactifs et Ă  vie longue

Ce sont notamment des déchets radifères et déchets de graphites, ou encore des « effluents bitumés, des substances contenant du radium, de l’uranium et du thorium de faible activité massique, ainsi que certaines sources radioactives scellées usagées à vie longue de faible activité »[13].

Les déchets graphites : Ils sont essentiellement des déchets (non produits à l'heure présente) qui proviendront du démantèlement des premières centrales CEA et EDF (filière uranium naturel-graphite-gaz dite UNGG). Ces déchets sont faiblement radioactifs mais à vie longue.

Les déchets radifères : ils sont émetteurs de radon. Ceci implique des contraintes d'exploitation (ventilation notamment) au cours de leur traitement.

L'étude du conditionnement des déchets radifères et graphites est en cours par l'ANDRA qui a proposé en 2015 des scénarios (stockage en site sous couverture intacte ou remaniée) à ce sujet[15]. Il est envisagé de les stocker en subsurface (quelques mètres de profondeur sous le niveau naturel, implanté dans une formation argileuse de très faible perméabilité) ou en profondeur (ancien puits de mine par exemple).
En attendant, ils sont entreposés sur place, notamment dans les réacteurs arrêtés de type Uranium Naturel Graphite Gaz de Chinon, Marcoule, Saint-Laurent et Bugey.

Selon le groupe SĂ©chĂ© Environnement qui a crĂ©Ă© le une filiale spĂ©cialisĂ©e dans ce type de dĂ©chet, il y aurait en 2015 environ 35 000 m3 de tels dĂ©chets produits annuellement en France et Ă  traiter[29].

Production et gestion des déchets radioactifs en France

Producteurs et détenteurs de déchets radioactifs en France

La production de déchets radioactifs est majoritairement le fait de l'industrie électro-nucléaire, devant la recherche, l'armée et les industries non nucléaires : irradiation médicale, extraction minière, centrales à charbon, production et diffusion d'engrais phosphatés (laissant des phosphogypses), industrie agro-alimentaire, etc. Les déchets de haute activité à vie longue sont essentiellement produits par l'industrie électro-nucléaire.

En France : plus de 1000 sites sont répertoriés comme détenteurs de déchets radioactifs (incluant toutes les catégories décrites ci-avant). Ces déchets sont répartis sur les sites suivants :

  • Les dĂ©pĂ´ts : centres de stockage ANDRA, entreposages de l'industrie nuclĂ©aire ou de l'armĂ©e ;
  • les installations nuclĂ©aires en exploitation : centres d'Ă©tudes, centrales nuclĂ©aires, usines du cycle du combustible ;
  • les installations nuclĂ©aires qui ne sont plus en activitĂ© ;
  • les Ă©tablissements de la DĂ©fense nationale : centres d'Ă©tudes, de production ou d'expĂ©rimentation de la force de dissuasion ;
  • les Ă©tablissements utilisant des radionuclĂ©ides : domaines mĂ©dical, industriel et recherche ;
  • les Ă©tablissements industriels manipulant ou ayant manipulĂ© des matières radioactives Ă  des fins de stĂ©rilisation.

Principe de gestion des déchets radioactifs en France

La France n'a pas encore défini de mode de gestion pour tous les déchets. La loi Bataille du organisait les recherches jusqu'en 2006, année au cours de laquelle une nouvelle loi () affirme la complémentarité de l'entreposage et du stockage en couche géologique profonde.

En application du principe pollueur-payeur, la gestion des déchets est de la responsabilité du producteur. En application de la circulaire DGS/SD 7 D/DHOS/E 4 no 2001-323 du , les déchets radioactifs font l'objet d'une demande d'enlèvement à l'IRSN (Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire). Pour permettre leur prise en charge, les demandes des producteurs de déchets sont accompagnées d'une description détaillée des caractéristiques du déchet lui-même et de son conditionnement.

L’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) conçoit et exploite les filières de stockage adaptées à chaque catégorie de déchets radioactifs. Cela se traduit par la collecte, le conditionnement, le stockage et la surveillance des déchets. Depuis la loi du , l'Andra a également la charge de l'entreposage de longue durée. La gestion des déchets et des matières radioactives fait l'objet d'un plan national revu tous les trois ans : le plan national de gestion des matières et déchets radioactifs (PNGMDR).

La loi n° 2016-1015 du « prĂ©cisant les modalitĂ©s de crĂ©ation d'une installation de stockage rĂ©versible en couche gĂ©ologique profonde des dĂ©chets radioactifs de haute et moyenne activitĂ© Ă  vie longue Â» dispose que l'autorisation d'exploitation de ce stockage ne pourra ĂŞtre dĂ©livrĂ©e par l'AutoritĂ© de sĂ»retĂ© nuclĂ©aire qu'Ă  la condition que la rĂ©versibilitĂ© du stockage soit assurĂ©e pour une durĂ©e qui ne peut ĂŞtre infĂ©rieure Ă  cent ans[30].

Aspects économiques de la gestion des déchets radioactifs en France

En France, l'ANDRA gère les dĂ©chets TFA et FMA-VC en centres de stockage de surface. Les coĂ»ts de construction, d’exploitation et de fermeture de ces centres sont Ă©valuĂ©s par l’Andra, puis rapportĂ©s Ă  la quantitĂ© de dĂ©chets stockĂ©s. Ces coĂ»ts sont rĂ©-Ă©valuĂ©s pĂ©riodiquement et analysĂ©s par la Cour des comptes. Pour les dĂ©chets de très faible activitĂ© stockĂ©s dans le centre de stockage de Morvilliers, le coĂ»t s’élevait en 2005 Ă  270 euros par tonne[31]. Selon la Cour des Comptes, ce tarif pourrait s’élever dans le cas de la prise en charge de dĂ©chets de nature plus complexe. Les dĂ©chets de faible et moyenne activitĂ© Ă  vie courte sont pris en charge dans les centres de la Manche jusqu’en 1994 et de l’Aube depuis. Les coĂ»ts de stockage Ă©taient en 2002 de 2 529 euros par mètre cube; les charges fixes reprĂ©sentent environ 80 % du coĂ»t total.

C'est le producteur du déchet qui paye l’Andra au moment de la livraison du colis mais en vertu du principe pollueur-payeur, l’Andra ne devient pas propriétaire du déchet. Au terme du contrat pluri-annuel, la ré-évaluation du coût du stockage conduit à une révision du coût au colis et si nécessaire à des paiements complémentaires pour les colis déjà transférés.

Le financement de la gestion des déchets à vie longue est réalisé à travers la constitution de provisions dédiées au sein des comptes des producteurs de déchets et l'affectation, à titre exclusif, des actifs nécessaires à la couverture de ces provisions[32]. Ce mode de financement permet de respecter le principe pollueur-payeur, mais faisait reposer la garantie du financement sur les producteurs de déchets. Jusqu'en 2006, la vérification de l’adéquation entre le montant et la nature des provisions et le coût du stockage était réalisée par la Cour des Comptes, dont le rapport de 2005 relevait d'importantes insuffisances.

La loi du 28 juin 2006 sur la gestion durable des matières et déchets radioactifs précise les modalités d'évaluation du coût du stockage, du montant des provisions à constituer par les producteurs de déchets ainsi que les moyens de contrôle. La réévaluation des provisions est réalisée tous les trois ans, avec une mise à jour annuelle si nécessaire. Le coût du stockage est évalué par l'Andra qui fournit une estimation au Ministre. La conversion de ce coût en provisions à passer au bilan des producteurs de déchets est réalisée par leurs commissaires aux comptes. Une Commission nationale d’évaluation du financement des charges de démantèlement des installations nucléaires de base et de gestion des combustibles usés et des déchets radioactifs est instituée par la loi du avec la responsabilité d'assurer le contrôle des provisions des producteurs de déchets. La constitution du panel d'actifs affecté à la couverture des charges de démantèlement et de gestion des déchets radioactifs devait être réalisée dans un délai de 5 ans après la promulgation de la loi.

Au , les montants provisionnés relatifs aux obligations nucléaires de long terme, principalement pour la déconstruction des centrales nucléaires, les derniers cœurs et la gestion à long terme des déchets radioactifs (dont le projet de stockage Cigéo), s'élèvent à 25,9 milliards d'euros pour une valeur des actifs dédiés à 28,1 milliards d'euros, soit un taux de couverture de 108,5 %[33].

Le ministère de l’Énergie a dû départager les exploitants et l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra), dont les prévisions de coût du projet de centre de stockage profond des déchets radioactifs, Cigéo, différaient en 2015 dans un rapport de un à deux ; en retenant le haut de la fourchette, cela pouvait conduire à une hausse des provisions d’EDF de l’ordre de deux à trois milliards d’euros[34] - [35]. Finalement, un arrêté publié au Journal officiel du modifie le calcul du taux d'actualisation utilisé pour fixer le montant des provisions pour le démantèlement des installations nucléaires et le stockage des déchets radioactifs : ce taux sera ramené progressivement à la moyenne sur les quatre dernières années (contre dix années auparavant) du rendement des bonds du Trésor à 30 ans, majorée de 100 points de base. L'impact de cette mesure pourrait atteindre plusieurs milliards d'euros si les taux d'intérêt restent bas[35].

Le , la Cour des comptes publie un rapport sur « l'aval du cycle du combustible nuclĂ©aire Â»[36], saluant le dĂ©bat public organisĂ© pour la première fois en vue de l’adoption du plan national de gestion des matières et dĂ©chets radioactifs (PNGMDR). Elle estime qu'"afin d'Ă©clairer de manière complète et objective les dĂ©cisions de politique publique, la comparaison Ă©conomique et environnementale des alternatives est nĂ©cessaire mais les donnĂ©es et Ă©tudes manquent sur ce sujet". Elle demande donc Ă  la France d'Ă©tudier exhaustivement toutes les options et scĂ©narios et de mieux anticiper ses capacitĂ©s de stockage « en fonction des quantitĂ©s de matières attendues » (58 rĂ©acteurs vieillissants seront Ă  dĂ©manteler ou rĂ©nover via des "investissements importants") de 2020 Ă  2030 ; de mĂŞme pour les sites d'entreposage (provisoires ou non) de matières et dĂ©chets[37]. Des dĂ©chets dĂ©jĂ  anciens seront Ă  reconditionner. "Les dĂ©cisions qui sont prises aujourd'hui dans le domaine du nuclĂ©aire emportent ainsi des consĂ©quences pour de nombreuses gĂ©nĂ©rations Ă  venir"[36]. L'uranium de retraitement (URT) et les combustibles MOX usĂ©s sont considĂ©rĂ©s comme des matières destinĂ©es Ă  ĂŞtre recyclĂ©es, mais les prĂ©visions actuelles de recyclage sont grevĂ©es d'incertitudes importants, ce qui pourrait justifier leur requalification partielle en dĂ©chets et la constitution de provisions (dĂ©jĂ  constituĂ©es par EDF pour le MOX)[36]. Les opĂ©rations d’aval du cycle nuclĂ©aire reprĂ©sentent environ 10 % du coĂ»t de production de l’électricitĂ© nuclĂ©aire, et il va bientĂ´t falloir renouveler les installations de retraitement des combustibles usĂ©s de La Hague[36]. Les dĂ©penses futures, estimĂ©es fin 2017 Ă  69 milliards d'euros ; les exploitants (EDF, Orano et le CEA) sont tenus de constituer des provisions comptables pour ĂŞtre en mesure de faire face Ă  leurs charges futures ; ces provisions atteignent environ 15 milliards d'euros ; la Cour estime que « les contrĂ´les de l’autoritĂ© publique sont Ă  approfondir ». La cour demande au ministère de la transition Ă©cologique et solidaire de renforcer ses capacitĂ©s Ă  analyser les questions techniques, Ă©conomiques, financières et environnementales relatives aux dĂ©chets radioactifs[36].

Déchets radioactifs engendrés par la production d'électricité d'origine nucléaire en France

On distingue trois grands groupes de déchets engendrés par la production d'électricité d'origine nucléaire en France :

  • les dĂ©chets rĂ©sultants directement du procĂ©dĂ© de fission de l'atome proprement dit (dits aussi dĂ©chets de type C) ;
  • les dĂ©chets technologiques liĂ©s au procĂ©dĂ© de fission de l'atome (dits aussi dĂ©chets de type B) ;
  • les autres dĂ©chets d'origine diverses (dits aussi dĂ©chets de type A).

Les masses et volumes produits annuellement sont détaillés dans l'article détaillé relatif aux déchets radioactifs générés par la production d'électricité d'origine nucléaire en France

Plan national de gestion des matières et déchets radioactifs

Le Plan national de gestion des matières et déchets radioactifs (PNGMDR) fait l'objet d'une révision périodique ; pour l'élaboration de sa 5ème version, un débat public est organisé en 2019 par la Commission nationale du débat public[38].

Le principal sujet en dĂ©bat est celui du recyclage des matĂ©riaux très faiblement radioactifs. Un site de stockage, Ă  Morvilliers (Aube), accueille ces dĂ©chets, mais il pourrait ĂŞtre saturĂ© entre 2025 et 2028. Le dossier prĂ©paratoire au dĂ©bat rĂ©digĂ© par l'État suggère qu'« une manière d'optimiser les capacitĂ©s de stockage des dĂ©chets très faiblement radioactifs serait d'en valoriser une partie ». Les industriels de la filière souhaitent en particulier recycler les mĂ©taux issus de la dĂ©construction des gĂ©nĂ©rateurs de vapeur des centrales d'EDF ainsi que les 140 000 tonnes de mĂ©taux de l'ancienne usine d'enrichissement d'uranium Georges Besse 1 d'Orano (ex-Areva), Ă  Tricastin (DrĂ´me), mise Ă  l'arrĂŞt en 2012. Au total, les producteurs Ă©valuent sur la pĂ©riode 2015-2070 Ă  plus de 900 000 tonnes la masse de dĂ©chets mĂ©talliques TFA [très faible activitĂ©] potentiellement valorisables. En 2016, EDF a acquis une entreprise suĂ©doise, Studsvik, qui utilise un procĂ©dĂ© de traitement par fusion pour concentrer la radioactivitĂ© dans les rĂ©sidus et reconditionner les mĂ©taux en lingots qui sont ensuite rĂ©utilisĂ©s dans tous types d'industries[39].

Inventaire des matières radioactives et volume de déchets

En France, le scénario privilégié en 2006 par EDF est le retraitement de l’ensemble des matières valorisables, à court terme sous la forme de MOX et d’URE (Uranium de REtraitement), à plus long terme dans des réacteurs nucléaires avancés soumis à R&D.

L’édition 2018 de l’Inventaire national des matières et déchets radioactifs publié par l'Andra fournit les données de 2016[40] :

Volume de déchets radioactifs à fin 2016 en m³ déjà stockés ou destinés à être pris en charge par l'Andra[40]
Type de déchet Volume total sur sites
des producteurs
ou détenteurs
stockés dans
les centres
de l'Andra
Capacité
des stockages
existants
HA-VL 3 650 3 650
MA-VL 45 000 45 000
FA-VL 90 500 90 500
FMA-VC 917 000 74 100 843 000 1 530 000
TFA 482 000 154 000 328 000 650 000
Sans catĂ©gorie 1 800 1 800
Total 1 540 000 369 050 1 171 000 2 180 000

À cet inventaire s'ajoutent les résidus de traitement de conversion de l'uranium (RTCU) produits par l'usine Comurhex de Malvési[40] :

Catégorie Volume (m3) à fin 2016
RTCU 726 400

Selon les scĂ©narios prospectifs de l'Andra, le volume total des dĂ©chets radioactifs produits et Ă  produire par les installations autorisĂ©es Ă  fin 2016 pourrait atteindre entre 4 372 000 et 5 048 000 m3 d'ici la fin du dĂ©mantèlement de ces installations[40].

Ces estimations ne prennent pas en compte les stériles et résidus de traitement des mines d'uranium françaises, principalement situées autour du Massif central en particulier dans le Limousin[41].

L’Andra évalue par ailleurs l'ensemble des stocks de matières radioactives présentes sur le territoire français, en cours d'utilisation ou pour lesquelles une utilisation ultérieure est prévue ou envisagée :

Volume de matières radioactives valorisables à fin 2016 (en tonnes de métal lourd)[40]
Type de matière Volume
Uranium naturel extrait de la mine 29 900 t
Uranium naturel enrichi 3 860 t
Uranium appauvri issu des usines d’enrichissement 310 000 t
Uranium issu du retraitement 29 600 t
Combustible avant utilisation dans les centrales 448 t
Combustible en utilisation dans les centrales EDF (tous types), en tonnes de mĂ©tal lourd 4 500 t
Combustibles usĂ©s Ă  l’oxyde d’uranium EDF en attente de traitement, en tonnes de mĂ©tal lourd 12 000 t
Mixtes Uranium - Plutonium (MOX) 2 695 t
Plutonium non irradiĂ©, d’origine Ă©lectronuclĂ©aire ou recherche (part française) 54 t
Combustibles des rĂ©acteurs de recherche 60 t
Combustibles de la DĂ©fense 177 t
Thorium 8 570 t
Matières en suspension t
Autres matières 70 t

Selon l'industrie nucléaire française, la production française de déchets radioactifs est d'environ kg par an et par habitant[42]. Selon le Réseau Sortir du Nucléaire, il faudrait multiplier par 50, 100 ou plus la quantité annoncée pour approcher de l'ordre de grandeur réel. Cette estimation s'appuie sur une autre définition du déchet radioactif, incluant des matières qui ne sont pas classées comme déchet au regard de la loi française : matières nucléaires "valorisables", rejets radioactifs liquides et gazeux et résidus des mines d'uranium. Selon l'ex-ministre de l'Environnement Corinne Lepage, « EDF retraite 850 tonnes de combustible, et pas la totalité des 1 200 tonnes que ses centrales produisent chaque année[43]. »

L'article 7 du projet de décret du 3e plan de gestion (PNGMDR) reconnaît « l'existence de stockages historiques de déchets qui n'auraient pas été mentionnés lors des déclarations à l’Andra pour l’Inventaire des matières et déchets radioactifs, en prescrivant une étude à remettre par les exploitants nucléaires afin de présenter un bilan de leurs investigations et de présenter leurs stratégies de gestion »[13] - [15]. Le recensement des lieux de réutilisation des stériles miniers doit se poursuivre, et il a été demandé à AREVA en 2013 d’en étudier l’impact[13] - [15].

La notion de sous-produit valorisable est relative et peut évoluer. Si la filière MOX disparaît ou si la production d'électricité par fission nucléaire était remplacée par la fusion ou par des énergies renouvelables disponibles, certains déchets aujourd’hui recyclables par la filière (plutonium intégré dans la Mox par exemple) changeraient de statut : en 2013, les industriels concernés devront probablement « remettre un bilan des études sur les procédés de valorisation, et des études sur les filières possibles de gestion dans le cas où ces matières seraient à l’avenir qualifiées de déchets »[13] - [44].

DĂ©chets militaires

L'Agence nationale pour la gestion des dĂ©chets radioactifs (Andra) Ă©value les dĂ©chets nuclĂ©aires issus de la bombe atomique Ă  9 % du stock global. Ils reprĂ©sentent 148 630 m3, sur les 1 670 000 m3 des dĂ©chets nuclĂ©aires français recensĂ©s en 2021[45]. Ces dĂ©chets rĂ©sultent de la politique de dissuasion nuclĂ©aire qui repose sur le dĂ©veloppement, la fabrication, les essais, le dĂ©ploiement et le dĂ©mantèlement des armes nuclĂ©aires, des bâtiments Ă  propulsion nuclĂ©aire ainsi que des installations affĂ©rentes. Leur augmentation va se poursuivre avec la modernisation et le renouvellement prĂ©vu des bombes atomiques ainsi que des sous-marins et porte-avions Ă  propulsion nuclĂ©aire.

L'Andra ne comptabilise pas les dĂ©chets rĂ©sultant des essais nuclĂ©aires français en AlgĂ©rie et pour partie enfouis volontairement dans le Sahara entre 1960 et 1967[46] - [47]. De mĂŞme, elle ne donne aucune indication du volume des dĂ©chets crĂ©Ă©s par les essais souterrains dans les atolls de Moruroa et de Fangataufa[48]. En outre, la France a jetĂ© près de 15 000 tonnes de dĂ©chets en Atlantique Nord-Est dans les annĂ©es 1960[49].

ICAN France (Campagne internationale pour abolir les armes nucléaires, Prix Nobel de la Paix 2017) et l'Observatoire des armements recommandent notamment que l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques réalise un rapport d'information spécifique sur les déchets nucléaires militaires qui examine la question à l'aune des engagements de désarmement adoptés par la France dans le cadre du Traité de non-prolifération (TNP) et dans le cadre du nouveau contexte international avec l'entrée en vigueur le du Traité sur l'interdiction des armes nucléaires (TIAN) adopté par une large majorité d'États à l'ONU.


Sites de gestion des déchets radioactifs en France

En France, d'autres sites abritent des déchets radioactifs en attente ou en cours de traitement, en particulier sur les sites où ont été produits ces déchets, mais ce ne sont pas des sites de stockage définitif (voir l'inventaire de l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs).

Le laboratoire de recherche souterrain de Meuse/Haute-Marne consacré à la caractérisation de l'argile comme roche hôte pour le stockage des déchets radioactifs en couche géologique profonde ne contient aucun matériau radioactif.

Controverse de l'exportation d’uranium appauvri

En 1984 Greenpeace prétend qu’AREVA et EDF exportent des déchets d’uranium appauvri en Russie. À partir de là, un débat oppose les écologistes à l'industrie nucléaire sur la nature exacte de ces produits (déchets ou matière énergétique), Greenpeace soutient que le transport de déchets radioactif vers la Russie est contraire à la loi russe sur la protection de l’environnement (1989) et à la directive européenne de 2006 relative à la surveillance et au contrôle des transferts de déchets radioactifs et de combustible nucléaire usé[50]. EDF affirme de son côté qu'il s'agit d'uranium appauvri recyclable, ce qui est contesté par Greenpeace[51] et Les Verts qui parlent de déchets ultimes. « "Nous n'avons pas la technologie pour réenrichir et chimiquement retransformer l'uranium de retraitement" actuellement en France, a fait valoir un porte-parole d'Areva, ce qui oblige à envoyer cet uranium appauvri en Russie[51]. » Selon un documentaire d’Éric Guéret et de la journaliste de Libération Laure Noualhat, intitulé « Déchets, le cauchemar du nucléaire », l'uranium de retraitement est effectivement réenrichi en Russie, « ce qui produit 10 % de matières réutilisables par EDF, et 90 % d’uranium très appauvri - que l’on appelle les queues d'uranium - qui deviennent la propriété de l’entreprise russe Tenex. C’est cet uranium qui est stocké sur de grands parkings à ciel ouvert ». EDF affirme que cet uranium appauvri sera exploitable lorsque les réacteurs de quatrième génération seront mis au point, vers 2040[52].

La diffusion de ce documentaire avait suscité une question du député vert Yves Cochet au gouvernement[53], et, en retour, la saisine du Haut comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire par le ministre Jean-Louis Borloo ainsi que par l’Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques, qui a interrogé les principaux acteurs industriels concernés sur le déroulement de ces exportations.

En , AREVA arrĂŞte les exportations en Russie[50].

En , le HCTISN conclut que « En matière d’information du public, le Haut comité a constaté que l'information sur ce sujet n'avait pas de caractère secret, y compris en ce qui concerne l’envoi d’uranium de retraitement en Russie pour fabriquer de l’uranium enrichi » mais que « l’importance de ces mouvements et les quantités précises des diverses matières mises en jeu n’étaient pas accessibles avant ce rapport du Haut comité ». Il recommande plus de transparence sur le sujet[54].

Risques

L'uranium appauvri entreposé en Russie à ciel ouvert, dans les plaines de Sibérie, « en l'état n'est guère dangereux... sauf si un avion venait à se crasher dessus », car cela « disperserait les matières radioactives dans l'environnement », note Libération[55]. Stéphane Lhomme, alors porte-parole du Réseau Sortir du nucléaire, dénonce cependant ces pratiques d'Areva et EDF : « les déchets nucléaires français abandonnés en Russie sont stockés à l'air libre, à la merci d'un accident ou d'un attentat. Il est utile de savoir que cette situation n'est hélas pas exceptionnelle : au Niger, où Areva extrait l'uranium « français », de véritables montagnes de stériles et autres résidus d'extraction sont abandonnées à ciel ouvert. C'est injustifiable même si la radioactivité de ces matières est modérée : le vent dissémine des particules sur des centaines de kilomètres »[56].

De plus, le transport de ces rĂ©sidus radioactifs par bateau sur 8 000 km pose des problèmes de sĂ©curitĂ©. Greenpeace rappelle que "dès 1984, le cargo Mont-Louis coulait au large de Zeebruge (Belgique), avec Ă  son bord une cargaison d'uranium français issu du retraitement Ă  destination de Riga (Russie)"[56].

Références

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  14. Décret sur le Plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs sur https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000028409031&dateTexte=20160823
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Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

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