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Place fortifiée de Verdun

La place fortifiée de Verdun est une place forte centrée sur la ville de Verdun, dans l'Est de la France (département de la Meuse). Appelée camp retranché de Verdun à partir de la fin du XIXe siècle, elle prend en le nom de région fortifiée de Verdun, en englobant les forts du rideau des Hauts de Meuse.

Le fort de Douaumont, le fort le plus connu de la place de Verdun, avant que les bombardements massifs de 1916 ne bouleversent les dessus.
Plan de la double ceinture de forts autour de Verdun.

Les premières fortifications sont médiévales, renforcées et complétée par des bastions et une citadelle au XVIIe siècle. À partir de 1874 et jusqu'en 1914, cette place est modernisée en y construisant deux puissantes ceintures de forts, d'ouvrages, de batteries et d'abris entourant l'enceinte urbaine bastionnée et la citadelle : elle devient ainsi une des principales places du système défensif Séré de Rivières, un ensemble de fortifications censé protéger le territoire français d'une invasion.

Utilisées pendant la Première Guerre mondiale, notamment pendant la bataille de Verdun en 1916, ces fortifications ont été déclassées après les combats. Les forts de Douaumont et de Vaux sont désormais des attractions touristiques pour certains, des lieux de souvenir et de commémorations pour d'autres.

Situation

RĂ©seaux de transport

La raison d'être des fortifications de Verdun est d'assurer le contrôle des axes de transport, dans le but d'arrêter ou de freiner une invasion du territoire français. L'axe routier principal est la route assurant la liaison entre Metz et Paris (l'ancienne nationale 3), qui traverse la Champagne par Épernay puis Châlons, franchit l'Argonne entre Sainte-Menehould et Clermont, passe à Verdun avant de rejoindre Metz puis Forbach et Sarrebruck. À Verdun, cette route est-ouest croise des axes nord-sud, tel que la route de Stenay à Saint-Mihiel via Verdun (ancienne nationale 64), la route de Verdun à Saint-Dizier via Bar-le-Duc (l'ancienne nationale 35, surnommée la « Voie sacrée ») et la route de Verdun à Longwy par Étain (ancienne nationale 18).

À partir de 1870, la route est-ouest est doublée par une ligne ferroviaire reliant Reims à Metz, traversant elle aussi l'Argonne entre Sainte-Menehould et Clermont-en-Argonne et franchissant la crête des côtes de Meuse par le tunnel de Tavannes. S'y rajoutent la ligne de Lérouville à Pont-Maugis, qui fait la liaison nord-sud le long de la vallée de la Meuse entre la ligne Paris-Nancy (près de Commercy) et la ligne Valenciennes-Thionville (près de Sedan). S'y rajoutent enfin les voies fluviales, avec la Meuse et surtout le canal de l'Est (creusé entre 1875 et 1887) qui lui est parallèle.

Autres fortifications

Brest
Cherbourg
Lille
Maubeuge
Verdun
Langres
Albertville
Briançon
Nice
Toulon
Les principales places fortifiées françaises entre 1874 et 1918 (système Séré de Rivières).

Cette situation de carrefour a entrainé d'importants travaux de fortifications, dès la période moderne, notamment à la suite de l'arrivée des Français en 1552 (Verdun faisait alors partie du Saint-Empire romain germanique en tant que principauté ecclésiastique autonome) : le roi de France fait occuper les Trois-Évêchés lorrains (Metz, Toul et Verdun) et les fait fortifier. Entre 1567 et 1634[1], d'une part une nouvelle enceinte urbaine est aménagée à la place de la précédente du XIIIe siècle, avec glacis, fossés et bastions ; d'autre part l'abbaye Saint-Vanne, se trouvant hors les murs, est rasée pour laisser place à une citadelle à sept bastions (attribuées aux ingénieurs Conti d'Argencourt et Errard de Bar-le-Duc[2]). À partir de 1687, des renforcements sont ordonnés par Vauban, le trafic sur la Meuse est désormais contrôlé par trois ponts-écluses (seul subsiste le pont-écluse Saint-Amand). Quelques améliorations à l'intérieur des bastions sont encore menées à partir de 1818[3].

Les fortifications bastionnĂ©s ne suffisent pas Ă  empĂŞcher la prise de Verdun lors des sièges prussiens de 1792 et de 1870. Ă€ la suite du traitĂ© de Francfort de 1871, la frontière entre la RĂ©publique française et l'Empire allemand est placĂ©e Ă  seulement 44 kilomètres Ă  l'est de la citadelle de Verdun. De plus, la place forte de Metz Ă©tant devenue allemande, Verdun est dĂ©sormais la principale place frontalière sur la route de Paris. En consĂ©quence, la ville fait partie de la première ligne de fortifications Ă©levĂ©e Ă  partir de 1874 et modernisĂ©e jusqu'en 1917, qui s'Ă©tend le long de la nouvelle frontière franco-allemande. Cette ligne est principalement composĂ©e des places fortes de Verdun, de Toul, d'Épinal et de Belfort.

Au nord, s'étend entre Verdun et le massif ardennais un espace peu fortifié appelée la « trouée de Stenay », avec seulement quelques forts d'arrêt pour contrôler les axes ferroviaires : d'Hirson, de Charlemont et des Ayvelles, auxquels se rajoutent les vieilles citadelles de Montmédy et de Longwy. Au sud, la place de Verdun est reliée à celle de Toul par un rideau défensif (le « rideau des Hauts de Meuse »), composé d'un alignement de forts : de Génicourt, de Troyon, des Paroches, du Camp-des-Romains, de Liouville, de Gironville et de Jouy-sous-les-Côtes.

Construction et modernisations

La construction d'une série de forts autour de la ville de Verdun commence en 1874. Une première ceinture est terminée dès 1877, puis est complété par une seconde ceinture plus vaste jusque dans les années 1880. Cette ceinture extérieure est continuellement complétée et modernisée jusqu'au début de la Première Guerre mondiale. Verdun, la plus au nord des quatre places de l'Est, est en 1914 la plus importante et la mieux équipée des places fortes françaises car elle bloque la route directe allant de Metz à Paris.

1874-1883

Dès que les dernières troupes d'occupation allemandes évacuent Verdun le , les unités françaises sont envoyées occuper les hauteurs entourant la ville. Le , le général Séré de Rivières présente un mémoire proposant la construction de treize forts détachés placés sur ces hauteurs des deux rives ; après le vote des crédits nécessaire par l'Assemblée nationale le , les travaux de terrassement des nouvelles fortifications démarrent[4], en commençant par Tavannes[n 1] dès .

Lors de l'hiver 1874-1875, la crainte d'un nouveau conflit avec l'Allemagne entraîne la construction à partir de de cinq « redoutes de la Panique », non-prévues par le projet de Séré de Rivières, terminées en [5] : ce sont les redoutes de Belleville, Saint-Michel, de Belrupt, de Regret et de La Chaume[6], en arc de cercle sur les premières hauteurs autour de la ville. Ces fortifications (qualifiées plus tard de « forts »), bien que trop proches de la ville (comme le rappelle le rapport d'inspection du duc d'Aumale en 1879), forment la base de la ceinture intérieure de la place (complétée peu après par les forts de Souville et de Tavannes).

Les travaux reprennent Ă  partir de l'Ă©tĂ© 1875 selon le projet initial, permettant l'amĂ©nagement de forts en maçonnerie dont l'artillerie est Ă  l'air libre, tandis que le personnel et les munitions sont abritĂ©s dans des traverses-abris et casemates voĂ»tĂ©es recouvertes de terre. En 1877, les forts de Tavannes, de Dugny[n 2], de Souville et de Marre sont terminĂ©s, complĂ©tĂ©s en 1879 par les forts d'Haudainville et du Rozelier. Le dĂ©but des annĂ©es 1880 voie la mise en chantier d'une sĂ©rie d'ouvrages d'infanterie (qualifiĂ©s Ă  l'origine de « postes », puis de forts), ceux des Sartelles, de Chana, de Choisel et de Belle-Épine, ainsi que de nouveaux forts, ceux de Vaux, de Bois-Bourrus, de Landrecourt, de Moulainville et de Douaumont[7]. Le coĂ»t total des travaux jusqu'en 1885 s'Ă©lève Ă  28 millions de francs[8].

1885-1899

Cartouche de 77 mm allemand, la douille contenant de la nitrocellulose (explosif sous forme de corde) et l'obus des shrapnels (balles de plomb).

Au milieu des années 1880, l'invention des obus fusants (explosant au-dessus de l'objectif, le criblant d'éclats ou de shrapnels) et de nouveaux explosifs (poudre sans fumée, mélinite et cordite) multipliant la puissance perforatrice des projectiles rendent caducs les forts qui viennent à peine d'être achevés : le service de l'artillerie à l'air libre devient suicidaire lors des bombardements, tandis que les terrassements et les voûtes s'effondrent sous les coups.

Comme rĂ©ponse Ă  cette « crise de l'obus-torpille », l'instruction ministĂ©rielle du ordonne que la majoritĂ© des canons soient retirĂ©s des forts et placĂ©s dans 42 batteries d'intervalle (entre les forts, Ă  l'air libre mais de façon dĂ©filĂ©e et dispersĂ©e) ; les munitions et poudres doivent ĂŞtre placĂ©es dans des magasins souterrains (vingt magasins de batterie, sept de secteur et un central Ă  la citadelle) ; la dĂ©fense rapprochĂ©e doit ĂŞtre assurĂ©e par des positions d'infanterie continues (tranchĂ©es et rĂ©seaux de fils de fer barbelĂ©s) amĂ©nagĂ©s lors de l'entrĂ©e en guerre[9]. Pour protĂ©ger les forts (qui servent dĂ©sormais d'observatoires et de position de flanquement), la caserne de onze d'entre eux[n 3] est recouverte d'un mètre de sable surmontĂ© d'une couche allant jusqu'Ă  2,5 mètres de bĂ©ton (expĂ©rimentĂ© Ă  Bourges en 1887 et Ă  Châlons en 1888), les caponnières sont remplacĂ©es par des coffres de contrescarpe. Enfin, des galeries sont amĂ©nagĂ©es sous la citadelle, tandis que quatre abris-cavernes sont creusĂ©s en profondeur près des forts (les abris de Quatre-CheminĂ©es près de Froideterre, de Douaumont, de Souville et de Sartelles-Chana)[10].

Comme la mission des forts passe de celui de grosses batteries d'action lointaine à celui de flanquement des intervalles, la distance entre les forts devient trop importante[11], d'où la construction en 1887-1888 d'« ouvrages intermédiaires » plus petits que les anciens forts, d'abord en maçonnerie recouverte de béton, d'autant que le passage du général Boulanger au ministère de la Guerre en 1886-1887 et l'affaire Schnæbelé en 1887 font craindre une nouvelle guerre avec l'Allemagne : ce sont les ouvrages de Froideterre, de Thiaumont, de La Laufée, de Déramée, de Charny et de Saint-Symphorien[7].

En 1890-1891, une première tourelle Ă  Ă©clipse est installĂ©e dans un bloc bĂ©tonnĂ© Ă  120 mètres Ă  l'ouest du fort de Souville, du modèle Bussière pour deux canons de 155 mm (elle a prĂ©cĂ©demment servi Ă  des essais de rĂ©sistance Ă  Châlons en 1887-1888, puis a Ă©tĂ© rĂ©parĂ©e)[12] ; la mise en batterie ou l'Ă©clipse de la tourelle se faisait grâce Ă  une machine Ă  vapeur. De 1895 Ă  1897 sont menĂ©es Ă  Verdun des expĂ©rimentations d'emploi du bĂ©ton armĂ©[13].

1900-1914

Observatoire cuirassé du fort de Douaumont.

Le est lancĂ© un programme de modernisation de la place forte, prĂ©voyant la construction d'abris dans les intervalles et le renforcement des forts et ouvrages existants en y rajoutant 46 tourelles Ă  Ă©clipse, 23 casemates de flanquement et 47 observatoires cuirassĂ©s[8], le tout sous 1,2 Ă  1,8 mètre de bĂ©ton armĂ©[14]. Dans les intervalles sont construits 24 abris d'infanterie (16 capables d'accueillir une compagnie, 18 pour une demi-compagnie) sous une dalle d'1,7 mètre de bĂ©ton armĂ©. Les noms de ces abris sont composĂ©s de la première lettre des forts ou ouvrages qui les entourent (par exemple le FT 3 est entre Froideterre et Thiaumont)[15].

Les ouvrages de Froideterre, de Thiaumont et de DĂ©ramĂ© sont les premiers Ă  ĂŞtre totalement transformĂ©s en les recouvrant par du bĂ©ton armĂ© en 1902[16] ; la majoritĂ© des autres forts et ouvrages recevront progressivement la mĂŞme protection. Les casemates de flanquement sont testĂ©es au polygone de tir de Bourges en 1899, d'oĂą leur nom de « casemates de Bourges », et sont armĂ©es de deux canons, de 95 mm (de cĂ´te modèle 1888) au fort d'Haudainville, puis de 75 mm (modèle 1897 sur affĂ»t spĂ©cial)[n 4] sur les 22 autres casemates installĂ©s Ă  raison d'une ou deux par forts et ouvrages de la ceinture extĂ©rieure, croisant leurs feux[17].

Trois nouveaux modèles de tourelles en acier sont installées sur les dessus :

Ă€ la suite de l'inspection en 1908 du gĂ©nĂ©ral Henry de Lacroix (vice-prĂ©sident du Conseil supĂ©rieur de la guerre), un programme « complĂ©mentaire » est ordonnĂ© le , prĂ©voyant de rajouter encore des tourelles (sept de 155 mm, treize de 75 mm et six de mitrailleuses) et d'organiser dix « centres de rĂ©sistance » (comprenant un fort entourĂ© d'ouvrages, d'abris et de batteries bĂ©tonnĂ©es), notamment trois aux angles de la ceinture des forts (autour de Douaumont au nord-est, du Rozelier au sud-est et de Bois-Bourrus au nord-ouest). Ce programme est Ă  peine commencĂ© Ă  la dĂ©claration de guerre[8]. Deux nouvelles fortifications sont rĂ©alisĂ©es entièrement en bĂ©ton armĂ© : l'ouvrage de la Falouse (de 1906 Ă  1908) et le fort de Vacherauville (de 1910 Ă  1914, le seul fort vraiment moderne français en 1914)[7]. Deux chantiers sont abandonnĂ©s Ă  la dĂ©claration de guerre : d'une part l'ouvrage de Bras (entre les ouvrages de Charny et de Froideterre) Ă  peine Ă©bauchĂ© sur plan, d'autre part la batterie Ă  l'est de Douaumont prĂ©vue pour deux tourelles (modèle 1908 non Ă©clipsable pour chacune un canon de 155 mm court[18] ; pendant la bataille la fouille de la batterie devient la « carrière 2808 »)[19].

Description

Le canon de Bange de 155 mm, le modèle le plus courant dans les batteries des places fortes françaises.
Canon 12 de culasse modèle 1884

La place de Verdun concentre en 1914 : 28 forts et ouvrages, dont 23 sont plus ou moins modernes (protĂ©gĂ©s par du bĂ©ton), armĂ©s de six tourelles pour canon de 155 mm, de 14 tourelles pour canons de 75 mm (soit 28 canons), de 23 casemates de Bourges (soit 46 canons) et de 29 tourelles de mitrailleuses ; la dĂ©fense des fossĂ©s est assurĂ©e par 211 canons-revolvers, canons de 12 de culasse (de) ou canons de 90 mm et 210 mitrailleuses de rempart, sans compter 86 mortiers Ă  âme lisse[20]. Les fortifications sont complĂ©tĂ©es par 17 petits ouvrages d'infanterie[n 5] amĂ©nagĂ©s en avant des forts, par 23 abris d'infanterie bĂ©tonnĂ©s et surtout par 118 batteries d'artillerie placĂ©s dans les intervalles entre les forts et ouvrages[21], prĂŞts Ă  accueillir les 670 canons (notamment des 120 mm et 155 mm de Bange) destinĂ©s Ă  l'action lointaine[22], ces canons Ă©tant soient dĂ©jĂ  en position, soit stockĂ©s Ă  l'arsenal.

Ces diffĂ©rents organes forment une double ceintures de fortifications autour de la ville : une ceinture extĂ©rieure (« ligne principale ») d'un pĂ©rimètre de 43 km et une ceinture intĂ©rieure (« ligne de soutien ») de 25 km, le tout subdivisĂ© en trois secteurs. Des petits ouvrages d'infanterie forment encore plus en avant une « ligne de surveillance »[23] (augmentant le pĂ©rimètre jusqu'Ă  50 km). Les magasins sont approvisionnĂ©s avec environ 800 coups par pièces, soit un stock thĂ©orique de 611 000 projectiles[22].

« Voici Verdun. La gare est entourée de voies militaires, de hangars, de parcs d'artillerie. La plupart des voyageurs sont des troupiers ; dès les premiers pas on ne rencontre guère que des uniformes […]. La ville est du reste un immense camp dont on juge bien quand on le contemple des hauteurs de Belleville.
L'aspect de cette position est unique […]. Une sorte de cirque immense, formé de pentes raides couvertes de vignobles et de maisons. De distance en distance, des mamelons coupent l'uniformité du tableau ; chacun d'eux est coiffé d'un fort, tous ces forts sont reliés par des batteries et des abris pour l'infanterie ; des voies ferrées les réunissent. Au fond, tout au fond de l'immense hémicycle, Verdun tout petit, dort autour de sa cathédrale, au pied de sa citadelle. Aucun site militaire, pas même les forteresses de montagne comme Grenoble, Briançon ou Besancon, n'est aussi saisissant que celui-là. C'est formidable et effrayant. »

— Victor-Eugène Ardouin-Dumazet, Le voyage en France, 1904[24].

RĂ©duit central

L'enceinte urbaine sert de rĂ©duit central Ă  la place ; dans le cas de la citadelle, son rĂ©seau de galeries souterraines lui permet de servir de magasin central et d'Ă©norme abri Ă  l'Ă©preuve des projectiles, d'oĂą son nom de « citadelle souterraine » (49° 09′ 32″ N, 5° 22′ 27″ E).

  • Plan des fortifications de la ville en 1695, le nord orientĂ© Ă  gauche.
    Plan des fortifications de la ville en 1695, le nord orienté à gauche.
  • La citadelle et l'enceinte urbaine de Verdun, carte d'Ă©tat-major de 1866 montrant les routes et les zones inondables.
    La citadelle et l'enceinte urbaine de Verdun, carte d'Ă©tat-major de 1866 montrant les routes et les zones inondables.
  • EntrĂ©e des souterrains de la citadelle, transformĂ©s partiellement en musĂ©e.
    Entrée des souterrains de la citadelle, transformés partiellement en musée.

S'y rajoutent d'une part sur la rive gauche l'arsenal (« quais d'artillerie », près de la gare) et d'autre part sur la rive droite les deux hangars aux dirigeables (« parc à ballons », au sud du fort de Belleville) et la piste d'aviation (à l'ouest du fort de Belrupt).

Secteur nord-est

Ligne de surveillance (au nord-est de Douaumont)
OuvragesLocalisationsConstructionModernisation
Ouvrage de Lorient[n 6]49° 13′ 00″ N, 5° 27′ 40″ E1913[25]non-modernisĂ©
Ouvrage du Muguet[n 7]49° 13′ 01″ N, 5° 27′ 54″ E1913non modernisĂ©
Ouvrage de JosĂ©mont[n 8]49° 13′ 13″ N, 5° 27′ 50″ E1913non modernisĂ©
Ouvrage de BĂ©zonvaux49° 13′ 42″ N, 5° 28′ 08″ E1889-1891non modernisĂ©
Ouvrage d'Hardaumont49° 12′ 58″ N, 5° 28′ 12″ E1887-1893non modernisĂ©
Position principale (de l'ouest vers l'est)[26]
Forts ou ouvragesLocalisationsConstructionModernisationTourelles de 155Tourelles de 75Cas. de BourgesTour. de mitrai.Observat. cuirassés[27]Prix en francs[27]
Ouvrage de Froideterre49° 11′ 51″ N, 5° 24′ 13″ E1887-18881902-1905-11221 000 000
Ouvrage de Thiaumont49° 12′ 24″ N, 5° 25′ 09″ E1887-18881902-1905--111400 000
Fort de Douaumont49° 13′ 00″ N, 5° 26′ 20″ E1885-18891901-1903, 1907-1909, 1911-1913111246 000 000
Fort de Vaux49° 12′ 01″ N, 5° 28′ 12″ E1881-18841888-1895, 1904-1906, 1910-1912-12-32 800 000
Ouvrage de La LaufĂ©e49° 11′ 21″ N, 5° 28′ 53″ E1887-18881904-1906, 1913-1914-1--1900 000
Position de soutien (de l'ouest vers l'est)[26]
Forts ou ouvragesLocalisationsConstructionModernisationTourelles de 155Prix en francs[27]
Redoute puis fort de Belleville49° 10′ 50″ N, 5° 23′ 02″ E1875-1877non modernisĂ©-450 000
Redoute puis fort Saint-Michel49° 10′ 31″ N, 5° 24′ 52″ E1875-1877non modernisĂ©-450 000
Fort de Souville49° 11′ 17″ N, 5° 26′ 23″ E1876-18771888-189112 650 000
Fort de Tavannes[28]49° 10′ 53″ N, 5° 27′ 47″ E1874-18791889-1890-2 500 000

Secteur sud-est

Ligne de surveillance (du nord vers le sud-ouest)
OuvragesLocalisationsConstructionModernisation
Ouvrage d'Eix49° 10′ 21″ N, 5° 28′ 56″ E1887-1888non modernisĂ©
Ouvrage de Croix-Brandier49° 09′ 12″ N, 5° 28′ 56″ E1883non modernisĂ©
Ouvrage du Manesel49° 09′ 14″ N, 5° 29′ 58″ E1888-1889non modernisĂ©
Ouvrage de Châtillon49° 08′ 28″ N, 5° 30′ 35″ E1888non modernisĂ©
Ouvrage de Maubois49° 08′ 16″ N, 5° 29′ 29″ E1889non modernisĂ©
Ouvrage de Jaulny49° 07′ 38″ N, 5° 30′ 37″ E1889non modernisĂ©
Ouvrage des RĂ©unis ou des Bois-RĂ©unis49° 06′ 58″ N, 5° 28′ 19″ E1878non modernisĂ©
Position principale (du nord vers le sud-ouest)[26]
Forts ou ouvragesLocalisationsConstructionModernisationTourelles de 155Tourelles de 75Cas. de BourgesTour. de mitrai.Observat. cuirassés[27]Prix en francs[27]
Fort de Moulainville49° 10′ 01″ N, 5° 29′ 12″ E1883-18851889-1891, 1905-1909111243 650 000
Ouvrage de DĂ©ramĂ©49° 08′ 38″ N, 5° 28′ 54″ E1887-18881902-1903--2111 000 000
Fort du Rozelier49° 07′ 30″ N, 5° 28′ 49″ E1877-18791890-1902, 1904-19131-2334 500 000
Ouvrage de Saint-Symphorien49° 07′ 05″ N, 5° 27′ 20″ E1888-18891900 puis 1902--1--400 000
Fort de Haudainville49° 06′ 55″ N, 5° 26′ 00″ E1876-18791900-1902--2222 400 000
Position de soutien[26]
Forts ou ouvragesLocalisationsConstructionModernisationPrix en francs[27]
Redoute puis fort de Belrupt49° 08′ 54″ N, 5° 26′ 02″ E1875-1877non modernisĂ©1 600 000

Secteur rive gauche

Ligne de surveillance (du sud-ouest vers le nord)
OuvragesLocalisationsConstructionModernisation
Ouvrage du ChapĂ®tre ou du Bois-du-ChapĂ®tre49° 06′ 55″ N, 5° 18′ 48″ E1888non modernisĂ©
Ouvrage de Baleycourt49° 07′ 29″ N, 5° 18′ 08″ E1888-1890non modernisĂ©
Ouvrage de FromerĂ©ville ou du Bois-des-Sartelles49° 08′ 50″ N, 5° 17′ 18″ E1887-18881900
Ouvrage de Germonville49° 10′ 09″ N, 5° 17′ 15″ E1887-1888non modernisĂ©
Ouvrage des Bruyères49° 11′ 14″ N, 5° 17′ 02″ E1887-1888non modernisĂ©
Position principale (du sud-ouest vers le nord)[26]
Forts ou ouvragesLocalisationsConstructionModernisationTourelles de 155Tourelles de 75Cas. de BourgesTour. de mitrai.Observat. cuirassés[27]Prix en francs[27]
Ouvrage de
La Falouse
49° 07′ 14″ N, 5° 24′ 02″ E1906ouvrage moderne-1-12550 000
Fort de Dugny49° 06′ 45″ N, 5° 22′ 44″ E1875-18771901-1902, 1902-1908-11232 200 000
Fort de Landrecourt49° 06′ 44″ N, 5° 20′ 35″ E1883-18861891, 1904-1906-11232 750 000
Redoute puis fort de Regret49° 08′ 06″ N, 5° 20′ 15″ E1875-18771906-1909-21242 600 000
Poste puis fort des Sartelles49° 09′ 11″ N, 5° 18′ 35″ E1876-18791900-1902--2221 100 000
Poste puis Ouvrage du Chana49° 09′ 52″ N, 5° 18′ 36″ E1883-18841906-1911-12-11 150 000
Poste puis fort de Choisel49° 10′ 42″ N, 5° 18′ 11″ E1883-18851894-1897 puis 1906-1912-12231 300 000
Fort de Bois-Bourrus49° 11′ 30″ N, 5° 17′ 57″ E1881-18871891-1894, 1904-1906, 1913-1914--2322 850 000
Fort de Marre49° 11′ 44″ N, 5° 18′ 52″ E1881-18841894-1897 puis en 1904-1906-1--12 500 000
Poste de Belle-Épine49° 11′ 59″ N, 5° 19′ 51″ E1883-1886non modernisĂ©-----400 000
Fort de Vacherauville49° 12′ 15″ N, 5° 20′ 31″ E1910-1914fort moderne21-142 300 000
Ouvrage de Charny49° 12′ 01″ N, 5° 21′ 13″ E1887-18881902-1904--111900 000
Position de soutien[26]
Forts ou ouvragesLocalisationsConstructionModernisationPrix en francs[27]
Redoute puis fort de La Chaume49° 09′ 23″ N, 5° 19′ 46″ E1875-1877non modernisĂ©1 300 000

Unités en garnison

Le Ville-de-Paris, dirigeable affecté à partir de 1908[29] à la place de Verdun pour la reconnaissance et le réglage de l'artillerie (photo de 1915).

Depuis 1873, la place de Verdun se trouve dans la 6e région militaire, dont le quartier-général est à Châlons-sur-Marne. En temps de paix, l'essentiel de la 42e division d'infanterie du 6e corps d'armée y est caserné (les deux autres grandes unités du corps sont la 12e division à Reims et la 40e division à Saint-Mihiel) : les 151e et 162e régiments d'infanterie, le 19e bataillon de chasseurs à pied et le 61e régiment d'artillerie. Les autres unités de la division sont à proximité : le 94e régiment d'infanterie est à Bar-le-Duc, le 8e bataillon de chasseurs à pied à Étain et le 16e bataillon à Conflans-Labry. Cette division est une unité de manœuvre, elle n'est pas destinée à fournir la garnison des forts.

S'y rajoutent aussi une brigade de la 4e division de cavalerie composée des 2e et 4e régiments de hussards, ainsi que plusieurs unités non-endivisionnées : les 164e, 165e et 166e régiments d'infanterie, le 44e régiment territorial d'infanterie, le 5e régiment d'artillerie à pied et le 9e régiment du génie (6e et 25e bataillons)[30]. Ces quatre régiments d'infanterie, le régiment d'artillerie à pied et le 25e bataillon du génie doivent fournir les garnisons des différents forts, ouvrages et batteries en cas de guerre.

Première Guerre mondiale

Couverture et concentration

Dès le , les ouvrages non gardés en temps de paix reçoivent une garnison (comme prévu en cas de « tension politique ») : par exemple cinq compagnies du 164e régiment d'infanterie sont envoyées dans les ouvrages de Froideterre, de Thiaumont, de Bezonvaux, du Josémont, d'Hardaumont et de La Laufée, ainsi que dans certaines batteries. Les 30 et , les neuf bataillons d'infanterie (des 164e, 165e et 166e régiments), les batteries du 5e régiment d'artillerie à pied et les détachements du génie, avec leurs effectifs d'active, sont en position dans tous les forts et ouvrages, certaines batteries et plusieurs villages (par exemple le 164e envoie des sections en couverture à Ornes, Damloup, Dicourt, Bourvaux, Vaux et Bras)[31]. Dès le , l'infanterie d'active est relevée par des unités de territoriale (les premiers réservistes du 44e RIT arrivent dès le : le 3, six compagnies sont habillées, équipées et armées, les six dernières le 5)[32].

En plus des unités constituées sur place à partir des réservistes et territoriaux locaux mobilisées (une division d'infanterie de réserve pour la « défense mobile de la place », ainsi qu'une division d'infanterie territoriale), la place de Verdun sert de puissant point d'appui à la couverture et à la concentration de l'Armée française. Les deux divisions du 6e corps pré-positionnées dès le temps de paix (40e division à Verdun et 42e division à Saint-Mihiel) se déploient dès le premier jour de la mobilisation pour assurer la couverture de cette dernière. Le , est créée comme prévu par le plan XVII la 3e armée, commandée par le général Ruffey[33], dont les unités des deux autres corps d'armée (en plus du 6e) arrivent par voie ferrée : le 5e corps d'armée, partie des gares d'Orléans, de Paris et de Melun, débarque autour de Saint-Mihiel ; le 4e corps d'armée, partie du Mans, d'Alençon et de Paris, passe par Chartres et Reims pour arriver dans les gares autour de Verdun[n 9].

Au 8e jour de la mobilisation (le ), la garnison de la place forte de Verdun est passée à ses effectifs de guerre, c'est-à-dire qu'elle est passée de neuf à 34 bataillons d'infanterie, de neuf à 35 batteries d'artillerie (dont neuf montées) et de trois à huit compagnies du génie, auxquels se rajoutent deux escadrons de cavalerie et une compagnie d'aérostiers[34]. Dans ce total est comptée la totalité de la 72e division de réserve (c'est-à-dire qu'elle est composée de réservistes), créée lors de la mobilisation et qui doit servir à la « défense mobile de la place », composée des 351e, 362e, 364e, 365e et 366e régiments d'infanterie, ainsi que des 56e et 59e bataillons de chasseurs à pied (les deux commandés par le lieutenant-colonel Driant), de deux escadrons des 2e et 4e régiments de hussards, de trois groupes des 61e, 59e, 11e, 41e et 45e régiments d'artillerie de campagne et des 1re et 21e compagnies du 25e bataillon du génie (9e régiment)[35]. Le gouverneur militaire fait procéder à l'évacuation des civils considérés comme « bouches inutiles »[n 10].

L'annonce de l'invasion allemande du Luxembourg puis de la Belgique entraîne l'application d'une variante du plan XVII, prévoyant un renforcement de l'aile gauche française : la mission de la 3e armée est désormais double, devant faire face au nord comme à l'est[36]. Le , les trois corps d'armée d'active de la 3e armée ont terminé leur concentration dans la Woëvre, formant un arc de cercle protégeant Verdun de Flabas jusqu'à Saint-Baussant. Le , Joffre autorise Ruffey à employer les divisions du 3e groupe de réserve pour remplacer ses troupes d'active sur les hauts de Meuse (à l'est, face à Metz)[37]. Le , le 3e groupe de réserve, renforcée par la 67e division jusque-là en réserve générale, ainsi que les garnisons des places de Toul et de Verdun forment un groupement sous les ordres du général Paul Durand : ce « groupement Durand », dépendant de Ruffey, est chargé de défendre les hauts de Meuse, ce qui permet de redéployer les trois corps de la 3e armée au nord-est de Verdun (à Damvillers, Dieppe-sous-Douaumont et Fresnes-en-Woëvre)[38].

1914-1915, une place isolée

Deux plans différents : le plan XVII contre le plan Schlieffen.
Carte du front Ouest, avec la place de Verdun formant une avancée entre l'Argonne et le saillant de Saint-Mihiel.

Comme les quatre places fortes de Verdun, de Toul, d'Épinal et de Belfort forment d'importantes concentrations d'artillerie et de fortifications, le plan d'opérations allemand (appelé le plan Schlieffen) prévoit d'éviter l'attaque de ces quatre positions en les contournant largement par le nord, à travers la Belgique. Verdun, la place à l'extrémité nord du dispositif français, doit servir de pivot à la vaste manœuvre allemande. À partir de la mi-août, les troupes allemandes, marchant vers le sud, prennent les vieilles fortifications de Longwy (qui se rend le )[39] et de Montmédy (évacuée sans combat) et se déploient au nord et à l'est de Verdun. Fin août et début septembre, la retraite de l'Armée française permet au 13e corps d'armée allemand de s'installer dans le massif de l'Argonne, descendant jusqu'au canal de la Marne au Rhin à Vassincourt. Le combat de Vaux-Marie et surtout la bataille de la Marne (du 6 au ) permettent aux Français de dégager la rive gauche de la Meuse et de fixer le front dans le nord de l'Argonne sur la ligne Servon-Varennes, où les combats se poursuivent durant toute l'année 1915.

Sur la rive droite de la Meuse, au sud-est de Verdun, les Allemands tentent d'isoler la place forte, en essayant de franchir le rideau des hauts de Meuse. Le fort de Troyon est lourdement bombardé du 8 au mais reste dans les mains des Français, tandis qu'une percée réussie un peu plus au sud à partir du (bataille de Flirey) et permet la prise de Saint-Mihiel ainsi que du fort du Camp-des-Romains (le ). Les lignes allemandes ainsi avancées coupent la route nationale, la voie ferrée et le canal qui relient Commercy à Verdun, rendant difficile le ravitaillement de la place. Ce saillant de Saint-Mihiel résiste à une attaque française lors de la première bataille de Woëvre, du au .

En raison de la destruction de plusieurs forts par l'artillerie lourde allemande en 1914 (sièges de Liège, de Namur, d'Anvers, de Maubeuge et du fort de Manonviller) et de l'éloignement du front par rapport aux places, l'ordre est donné en de réduire les garnisons des forts[40], puis en de vider les arsenaux et de désarmer tous les forts et toutes les batteries[n 11] ; seules les tourelles conservent leurs canons (avec une très faible dotation en munitions), les autres pièces étant versées aux régiments d'artillerie lourde et envoyées sur le front (qui en a besoin pour l'offensive de Champagne). Le général Coutanceau, gouverneur de Verdun, ayant protesté contre ce désarmement de la place est remplacé le par le général Herr à la tête de la « région fortifiée de Verdun » (équivalente à une armée) nouvellement créée ; le général Dubail, son supérieur à la tête du groupe d'armées de l'Est, lui déclare que : « la défense du territoire dépend exclusivement des armées en campagne. Le désarmement des places, dont le rôle n'est plus acceptable, peut seul nous procurer sans délai l'artillerie lourde indispensable à nos armées »[41]. Des centres de résistance (tranchées, abris et réseaux barbelés) sont creusés sur le plateau de Sivry-la-Perche et sur la côte du Poivre, en faisant des positions avancées à l'ouest et au nord de Verdun[42].

1916, une place assiégée

Fin 1915, le chef d'Ă©tat-major allemand Erich von Falkenhayn dĂ©cide de mener une bataille d'usure contre l'ArmĂ©e française. Il fait le choix de Verdun (plutĂ´t que Belfort)[41] pour mener cette bataille car la place est plutĂ´t isolĂ©e par rapport au reste du front français, elle est difficile Ă  approvisionner et ses forts ont Ă©tĂ© presque totalement dĂ©sarmĂ©s en 1915 (par exemple le fort de Douaumont a vu sa garnison passer de 751 hommes Ă  seulement 58, sa casemate de Bourges est vide et ses tourelles sont quasiment privĂ©es d'obus)[43]. Pour rompre le front français et dĂ©truire les fortifications, 1 220 pièces d'artillerie sont concentrĂ©es autour du saillant de Verdun, dont 17 obusiers Skoda de 305 mm, trois canons de 380 mm et treize obusiers de 420 mm[44].

  • Plus gros calibres de l'artillerie allemande ayant tirĂ© autour de Verdun
  • Mortier allemand de 420 mm (modèle nommĂ© Dicke Bertha).
    Mortier allemand de 420 mm (modèle nommĂ© Dicke Bertha).
  • Obus et gargousses devant un canon allemand de 380 mm (38 cm SK L/45 1913 Langer Max).
    Obus et gargousses devant un canon allemand de 380 mm (38 cm SK L/45 1913 Langer Max).
  • Mortier d'origine autrichienne de 305 mm (Ĺ koda 305 mm Haubitze 1911, Schlanken Emma).
    Mortier d'origine autrichienne de 305 mm (Ĺ koda 305 mm Haubitze 1911, Schlanken Emma).
  • Mortier allemand de 210 mm (21 cm Mörser 16 ou 1910).
    Mortier allemand de 210 mm (21 cm Mörser 16 ou 1910).
Carte de l'évolution du front : percée allemande en 1916 à travers le secteur nord-est.

L'offensive commence le , enfonçant les lignes françaises tenues par le 30e corps (72e, 51e et 14e divisions) au nord-est de la place. Les troupes d'assaut allemandes abordent la ceinture de forts de la place, s'emparent du fort de Douaumont (sans combat, le ), du fort de Vaux (combats du 1er au ) puis de l'ouvrage de Thiaumont (pris et repris plusieurs fois : allemand le , français le 28, allemand le 29, etc.), mais Ă©chouent Ă  prendre l'ouvrage de Froideterre le et le fort de Souville le . Les tourelles participent Ă  plusieurs occasions aux combats, notamment celle de mitrailleuses et celle de 75 mm de l'ouvrage de Froideterre le . Au fort de Moulainville, la tourelle de 155 mm tire 5 833 obus de fĂ©vrier Ă  septembre, tandis que celle de 75 mm tire 11 800 obus sur la mĂŞme pĂ©riode[45]. La reprise des forts par les Français se fait durant l'automne (Thiaumont et Douaumont le ; Vaux le ).

  • Effets du pilonnage sur les fortifications françaises
  • Morceaux de la tourelle de 75 mm du fort de Vaux, dĂ©truite par l'explosion des charges de dĂ©molition Ă  la suite d'un coup au but d'un obus allemand.
    Morceaux de la tourelle de 75 mm du fort de Vaux, dĂ©truite par l'explosion des charges de dĂ©molition Ă  la suite d'un coup au but d'un obus allemand.
  • Couches de bĂ©ton sur les dessus du fort de Douaumont, fracturĂ©es par les coups de l'artillerie.
    Couches de béton sur les dessus du fort de Douaumont, fracturées par les coups de l'artillerie.
  • Marques laissĂ©es par les obus sur l'observatoire de la tourelle de 155 de Douaumont.
    Marques laissées par les obus sur l'observatoire de la tourelle de 155 de Douaumont.
  • Une des voĂ»tes de la caserne de Douaumont, effondrĂ©e après un coup au but d'un obus français de 400 mm.
    Une des voĂ»tes de la caserne de Douaumont, effondrĂ©e après un coup au but d'un obus français de 400 mm.
  • Restes disloquĂ©s de la tourelle de mitrailleuses de l'ouvrage de Thiaumont.
    Restes disloqués de la tourelle de mitrailleuses de l'ouvrage de Thiaumont.
  • Le terrain bouleversĂ© des dessus de l'ouvrage de Thiaumont presque un siècle après la bataille.
    Le terrain bouleversé des dessus de l'ouvrage de Thiaumont presque un siècle après la bataille.
  • Abri d'intervalle pour l'infanterie FT3 (entre Froideterre et Thiaumont), tellement pilonnĂ© que les fers du bĂ©ton armĂ© sont Ă  nu.
    Abri d'intervalle pour l'infanterie FT3 (entre Froideterre et Thiaumont), tellement pilonné que les fers du béton armé sont à nu.
  • ClichĂ© aĂ©rien du fort de Vaux en 1916.
    Cliché aérien du fort de Vaux en 1916.

Les forts et ouvrages du secteur nord-est de la place subissent un bombardement intensif, de la part de l'artillerie allemande mais aussi de la française (sur les fortifications aux mains des Allemands). Pour exemple, le bombardement prĂ©paratoire allemand des 21 et (Trommelfeuer : feu roulant) utilise deux millions d'obus ; la consommation de l'artillerie française pendant les sept premiers mois de la bataille a Ă©tĂ© de 23 millions de coups, dont 16 millions d'obus de 75 mm, soit environ 100 000 projectiles par jour[46]. Le fort de Moulainville a ainsi reçu du au environ 330 obus de 420 mm, 770 de 305 mm, 280 mm ou 210 mm allongĂ©s, 4 700 obus de 210 mm courts, 150 mm ou 130 mm, 2 600 obus de 105 mm et 1 100 obus de 77 mm[45], soit un obus par trois m²[47], ce qui a bouleversĂ© totalement les dessus et les fossĂ©s du fort. Les fortifications subirent tout particulièrement les tirs des canons et obusiers de forts calibres, tels que les pièces allemandes de 420 mm et de 380 mm et les obusiers français de 400 mm : ces gros obus arrivent Ă  percer la carapace de bĂ©ton des forts, faisant s'effondrer les voĂ»tes (dans quelques cas leur action se fait sentir jusqu'Ă  14 mètres de profondeur)[47] ; les garnisons souffrent du manque d'eau (les citernes sont fissurĂ©es par les bombardements) et d'asphyxie (due aux gaz en milieu confinĂ©). L'ouvrage de Thiaumont est totalement dĂ©truit : il reste qu'un tas de ruines de sa casemate, des fragments de sa tourelle et un morceau dĂ©chiquetĂ© de son observatoire. Le fort de Souville est lui aussi largement ruinĂ©, la garnison se rĂ©fugiant dans les souterrains ; le fort de Douaumont a sa tourelle de mitrailleuses occidentale dĂ©truite, l'autre endommagĂ©e ; la tourelle de 75 mm du fort de Vaux a explosĂ©.

« Les forts et les ouvrages modernes ont été tels quels d'un très précieux secours malgré leurs avaries ; les forts plus anciens ont nécessité des travaux d'approfondissement assez considérables, mais ont pu servir utilement. Les troupes ont trouvé par instants un abri sûr, des repas chauds, des approvisionnements certains en vivres et en munitions, et grâce à cet ensemble, elles ne sont jamais arrivées au dernier degré d'épuisement. »

— Charles Mangin (général), Comment finit la guerre, 1920[48].

  • Caricatures
  • « Les baptĂŞmes du feu – Les dragĂ©es de Verdun et le parrain » : les dragĂ©es sont des obus envoyĂ©s par un canon de 155 mm.
    « Les baptĂŞmes du feu – Les dragĂ©es de Verdun et le parrain » : les dragĂ©es sont des obus envoyĂ©s par un canon de 155 mm.
  • Vision nĂ©erlandaise : « le redoutable fort de Douaumont d'après les communiquĂ©s allemands ; la maison forte de Douaumont d'après les communiquĂ©s français. »
    Vision néerlandaise : « le redoutable fort de Douaumont d'après les communiqués allemands ; la maison forte de Douaumont d'après les communiqués français. »
  • « La reprise du fort de Douaumont : L'attaque française, favorisĂ©e par un temps brumeux... (communiquĂ© allemand du 26 octobre) Et la brume se dissipa. »
    « La reprise du fort de Douaumont : L'attaque française, favorisée par un temps brumeux... (communiqué allemand du 26 octobre) Et la brume se dissipa. »

1916-1918, renforcement

Casemate Pamart à proximité du fort de Souville, construite en 1917 pour protéger une mitrailleuse.

Dès l'annĂ©e 1916, des travaux de renforcement des dĂ©fenses de la place sont menĂ©s (appelĂ©s les « travaux de 17 » car ils se poursuivent en 1917) : il s'agit du creusement de galeries et d'abris souterraines, de l'amĂ©nagement de dĂ©fenses Ă  l'intĂ©rieur des forts (chicanes et crĂ©neaux de tir), de la construction de petites casemates pour mitrailleuses et de nouvelles entrĂ©es en arrière des forts. Les ouvrages et forts reçoivent de nouveau des garnisons, armĂ©es de mitrailleuses et de fusils-mitrailleurs. Les casemates de Bourges sont rĂ©armĂ©es avec des canons de 75 mm[49].

Le creusement de nouvelles galeries se fait plus profondĂ©ment, pour Ă©chapper aux effets des obus de gros calibre. 26 forts ou ouvrages de la place de Verdun, y compris de l'enceinte intĂ©rieure ainsi que la citadelle, sont ainsi amĂ©liorĂ©s ; les plus longs rĂ©seaux, directement taillĂ©s dans la roche et accessibles par des puits, se trouvant aux forts de Moulainville (2 070 mètres de long, connectĂ© Ă  l'abri MD1), du Rozelier (1 480 m) et de Vaux (1 385 m)[50]. Les casemates pour mitrailleuses installĂ©es sont de petite taille, souvent qualifiĂ©es de cloches, du modèle « Pamart » conçu par le capitaine du mĂŞme nom en . Ce cuirassement discret doit thĂ©oriquement rĂ©sister Ă  un coup de 220 mm au maximum ; 27 sont installĂ©es sur les glacis des diffĂ©rents forts, reliĂ©s par les galeries souterraines[51].

En , une offensive est lancée à Verdun par les Français sur les deux rives pour repousser la ligne de front un peu plus au nord. La place est définitivement dégagée par la réduction du saillant de Saint-Mihiel les 12 et , puis par l'offensive Meuse-Argonne du au par l'American Expeditionary Force.

  • Chicane barrant le couloir de la caserne du fort de Douaumont.
    Chicane barrant le couloir de la caserne du fort de Douaumont.
  • Galerie taillĂ©e en plein roc en 1916-1917 (ici au fort du Salbert de la place de Belfort).
    Galerie taillée en plein roc en 1916-1917 (ici au fort du Salbert de la place de Belfort).

Après 1918

Entre-deux-guerres

Tous les forts, ouvrages, batteries et abris du nord-est de la place sortent de la Grande Guerre abîmés, voir dans quelques cas totalement pulvérisés (c'est le cas de l'ouvrage de Thiaumont et des batteries). Malgré d'importants dégâts sur la maçonnerie et le béton, les tourelles d'artillerie sont en état de marche (sauf au fort de Vacherauville), tandis que les galeries et cheminements internes sont praticables. En 1921, le général Benoît, commandant le génie à Metz, compare les fortifications construites par les Français à Verdun à celles construites par les Allemands autour de Metz et de Thionville (la Moselstellung)[52]. L'âge des fortifications françaises et leur éloignement de la nouvelle frontière franco-allemande entraînent un déclassement partiel en 1926.

Durant les années 1930, sur les fortifications toujours actives, la restauration du béton de certains ouvrages (casemates de Bourges et tourelles) reprend, et certaines galeries creusées en 1917 sous les forts de la ceinture extérieure sont agrandies et bétonnées, dans le but de faire de Verdun une place de seconde ligne derrière la ligne Maginot.

Le fort de Moulainville sert en 1936 de site-test pour une casemate Ă©quipĂ©e d'un mortier de 50 mm ; de 1937 Ă  1939, les tourelles du fort de Douaumont sont remises en Ă©tat[43]. L'artillerie de la place est confiĂ©e le au 3e groupe du 163e rĂ©giment d'artillerie de position (casernĂ© Ă  la citadelle), qui devient Ă  partir du le 3e groupe du 151e rĂ©giment d'artillerie de position.

Seconde Guerre mondiale

Les généraux allemands Weisenberger et Daluege visitant le champ de bataille, ici sur le fort de Douaumont.

Ă€ la mobilisation de fin aoĂ»t 1939, le groupe du 151e RAP forme l'ossature du nouveau 160e RAP, chargĂ© de la dĂ©fense des forts de Metz (1er groupe) et de Verdun (2e et 3e groupes). Chaque groupe est composĂ© de trois batteries, celles du 2e occupent les forts de la rive droite (casemates de Bourges et tourelles) et disposent de canons de 75 mm modèle 1897 supplĂ©mentaires, tandis que celles du 3e se chargent de la rive gauche avec en plus des canons de 155 mm (des courts Saint-Chamond modèle 1915 et des longs de Bange modèle 1877). En , les deux groupes quittent Verdun, laissant la garde des forts de Verdun Ă  la 10e batterie nouvellement crĂ©Ă©e.

Lors de la campagne de France en 1940, alors que le front français est percé dans les Ardennes () puis sur la Somme () et l'Aisne (), les généraux français envisagent le repli vers le sud des 4e et 2e groupes d'armées, positionnées en Champagne, en Lorraine et en Alsace. Du 11 au , les unités défendant le secteur fortifié de Montmédy (le secteur de la ligne Maginot au nord de Verdun) décrochent, formant une division de marche (division légère Burtaine), suivi à partir du plus à l'est par toutes les autres unités. Ordre est donné de ne pas défendre la ville de Verdun, mais le la 3e division d'infanterie coloniale (du 18e corps de la 2e armée) se déploie au nord-ouest, sur la cote 340, le Mort-Homme et Regnéville, avec comme mission d'arrêter les forces allemandes ; celles-ci attaquent le 14 (36e, 76e et 299e divisions)[53]. À Verdun, les ponts sont sabotés et les derniers états-majors évacuent, tandis que sur la rive droite la division légère Burtaine bat en retraite (à pied) le plus vite possible vers le sud.

Le , les troupes allemandes entrent dans Verdun ; quelques forts sont utilisĂ©s pour ralentir la poursuite pendant toute la journĂ©e, notamment ceux de Douaumont (la tourelle de 155 mm tire quelques coups Ă  cette occasion)[43], de Dugny et du Rozelier (tenus par des unitĂ©s des 132e et 155e RIF, en arrière-garde de la division Burtaine)[54].

Lors du reste de la Seconde Guerre mondiale, le champ de bataille de Verdun sert de destination touristique pour les troupes d'occupation allemandes[55] et de décors pour les services de propagande[56], puis de même pour les troupes américaines. En 1944, ces derniers réalisent des essais d'explosif au fort de Choisel : trois observatoires et les trois tourelles sont détruites[57].

Tourisme d'après-guerre

Trois fortifications sont ouverts au public : le fort de Douaumont, le fort de Vaux et l'ouvrage de La Falouse (ce dernier depuis 2010)[58]. Les trois ont reçu les amĂ©nagements nĂ©cessaires, que ce soit sur les dessus (dĂ©boisement, gazonnage et chemins) ou Ă  l'intĂ©rieur (Ă©clairage, mise en sĂ©curitĂ© et flĂ©chage). Seules les galeries de 17 ne se visitent pas pour des raisons de sĂ©curitĂ©. Le rĂ´le des deux forts de Douaumont et de Vaux lors de la bataille de 1916 en fait des passages obligĂ©s pour les visiteurs venus Ă  Verdun depuis 1918. L'ouvrage de La Falouze, bien qu'en excellent Ă©tat, est Ă  l'Ă©cart des circuits de visite, car il n'a pas participĂ© aux combats de la Grande Guerre, tournant totalement le dos au front distant de plus de 12 km.

L'ouvrage de Froideterre est aussi une fortification visitable et facile d'accès, mais uniquement pour ses dessus (les dessous sont le domaine des chiroptères). Quant aux restes de l'ouvrage de Thiaumont et à l'abri FT1 (plus connu sous le nom de PC 119), très proches de l'ossuaire de Douaumont, ils montrent la puissance destructrice de l'artillerie lors de ce conflit.

  • Verdun, destination touristique
  • Le roi Alphonse XIII d'Espagne visitant le fort de Douaumont.
  • Le roi d'Espagne sur les dessus du fort de Vaux.
    Le roi d'Espagne sur les dessus du fort de Vaux.
  • AmĂ©nagement d'une des pièces de la caserne de Douaumont pour accueillir les touristes.
    Aménagement d'une des pièces de la caserne de Douaumont pour accueillir les touristes.
  • Mise en scène avec des mannequins de l'infirmerie du fort de Vaux.
    Mise en scène avec des mannequins de l'infirmerie du fort de Vaux.

La visite des autres ouvrages et forts est strictement interdite, d'une part puisqu'ils sont toujours propriété de l'armée française, d'autre part parce qu'étant à l'abandon depuis un demi-siècle, les lieux ne sont pas sécurisés (puits, obscurité, effondrement de voûte, tôles rouillés, barbelés ou ardillons), d'autre part des millions de projectiles non explosés restent enfouis dans le sol autour de Verdun et surtout autour des fortifications[59].

Notes et références

Notes

  1. Le fort de Tavannes est d'abord appelé « fort Brûlé » ou « fort du Bois-Brûlé », puis il prend le nom du maréchal de Tavannes, gouverneur de Verdun en 1592. source : « Tavannes (fort de) », sur http://www.fortiff.be/.
  2. Plusieurs auteurs d'ouvrages et de sites rajoutent le fort de Dugny aux redoutes de la Panique.
  3. Les forts et ouvrages sont progressivement recouverts par une carapace de béton : Douaumont en 1887, Souville, Vaux et Marre en 1888, Tavannes et Moulainville en 1889, Rozelier en 1890, Landrecourt et Bois-Bourrus en 1891, Les Sartelles et Choisel en 1894. Source : Le Hallé 2001, p. 93.
  4. Le passage au 75 mm se fait par l'instruction du 18 octobre 1902.
  5. Les ouvrages de Saint-Maure, du Bois-Rogé, du Trimard et de Thierville sont abandonnés vers 1910.
  6. Ouvrage de la cote 343 construit en terre et en rondins ; « ouvrage d'Hardaumont et du Muguet », sur http://pages14-18.mesdiscussions.net/.
  7. Ouvrage de terre et de rondins ; « Muguet (ouvrage du) », sur http://www.fortiff.be/.
  8. L'ouvrage de Josémont, en terre et en rondins, est parfois orthographié « de Josiamont » ; « Josémont (ouvrage de) », sur http://www.fortiff.be/.
  9. Cf. les résumés des JMO dans le document Recherche:Mobilisation de 1914 sur Wikiversité.
  10. L'indemnisation des civils évacués est prévue par la loi du 3 juillet 1877, renforcée par la loi du 5 août 1914, lire en ligne sur Gallica.
  11. Le Règlement sur le service des places de guerres, promulgué par le décret du 7 octobre 1909, donnait aux gouverneurs des places fortes une certaine autonomie vis-à-vis du général en chef, notamment à travers l'article 151 : « le commandant en chef ne peut enlever à une place sous ses ordres aucune fraction de la garnison de défense déterminée par le Ministre ». Le décret du 5 août 1915 modifie ce règlement, plaçant les places situées dans la zone des armées sous les ordres du général en chef, qui « dispose, sans restrictions, de toute la garnison des places fortes sous ses ordres et de toutes les ressources de guerre ou de bouche qui se trouvent soit dans la place, soit dans ses zones de réquisition ».

Références

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  6. Hohnadel et Bestetti 1995, p. 3 et 7.
  7. Hohnadel et Bestetti 1995, p. 7.
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  9. Hohnadel et Bestetti 1995, p. 4-5.
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Voir aussi

Bibliographie

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