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Champagne crayeuse

La Champagne crayeuse (ou « sÚche »[1] ou «pouilleuse»[2]) est une macro-région naturelle relevant de la région administrative française Grand-Est, dont le substrat est essentiellement constitué de craie.

Champagne crayeuse
Image illustrative de l’article Champagne crayeuse
La Champagne crayeuse

Pays France
Subdivision administrative Grand Est
Subdivision administrative Marne
Aube
Ardennes
Villes principales Reims et Troyes, chacune en limite
SiĂšge du pays ChĂąlons-en-Champagne
CoordonnĂ©es 48° 55â€Č 12″ nord, 4° 19â€Č 48″ est
RĂ©gions naturelles
voisines
Dans le sens des aiguilles d'une montre en partant du nord :
- Au nord : Thiérache, Porcien et Ardenne
- À l'est et au sud-est : Argonne, Champagne humide (Perthois, Pays du Der, Briennois et Chaourçais)
- Au sud : Pays d'Othe
- À l'ouest : SĂ©nonais, Nogentais, Brie, Tardenois, Soissonnais et Laonnois
Carte de la champagne crayeuse, avec les rendosols en vert et la limite du vignoble de Champagne en bordeaux.

GĂ©ographie et paysages

Cette rĂ©gion s’étend en arc de cercle entre la ThiĂ©rache au nord, le pays d'Othe au sud, la cĂŽte d'Île-de-France Ă  l'ouest et la Champagne humide Ă  l'est. C'est un vaste plateau, quelque peu ondulĂ© voire vallonnĂ©, dont les vallĂ©es sont trĂšs peu encaissĂ©es et dont l'altitude varie de 60 Ă  180 mĂštres[3].

Géologie et pédologie, utilisation des sols

GĂ©ologiquement, cette macro-rĂ©gion naturelle relĂšve de l’aurĂ©ole sĂ©dimentaire du CrĂ©tacĂ© supĂ©rieur du Bassin parisien, la roche mĂšre est la craie. À la diffĂ©rence d'autres rĂ©gions de craie du Bassin parisien (comme en Picardie, en Haute-Normandie ou dans l'Artois), la craie n'est que peu ou pas recouverte de lƓss (limon) ou d'argile, elle affleure ainsi Ă  la surface et forme directement la base des sols[4].

Les sols sont donc des rendzines sur craie, la couche de terre Ă©tant superficielle (maximum entre 30 et 40 cm) quand la craie n'affleure pas le sol, l'humus y a souvent disparu. Cette Ă©rosion de la surface des sols a commencĂ© dĂšs la dĂ©forestation pour l'agriculture au NĂ©olithique[5]. C'est un phĂ©nomĂšne naturel causĂ© par l’absence de couche de limon (placage de lƓss) ou d'argile, contrairement Ă  beaucoup d'autres territoires calcaires du Bassin parisien (comme la Beauce par exemple, qui est recouverte d'une Ă©paisse couche de lƓss qui a fait sa richesse agricole ancienne). Le limon et l'argile auraient retenu la matiĂšre organique et les Ă©lĂ©ments nutritifs. Le calcaire riche en bases favorise une forte intensitĂ© de l'activitĂ© biologique dans le sol (micro-organismes et invertĂ©brĂ©s de l'humus), l'humus se dĂ©compose ainsi trĂšs vite et ne s’accumule pas, et les Ă©lĂ©ments nutritifs sont rapidement lessivĂ©s par les infiltrations d'eau dans la craie.

La région était ainsi autrefois vouée au pùturage ovin extensif pauvre et sec, avec une faible densité de population.

Au XIXe siĂšcle la rĂ©gion fut convertie en une immense forĂȘt artificielle de pin noir d'Autriche[6], une essence adaptĂ©e aux sols calcaires squelettiques, dans le cadre des grandes campagnes de boisement de la France sous NapolĂ©on III (dans le mĂȘme mouvement que pour la forĂȘt des Landes et la Sologne par exemple, dont les sols sont cependant sableux acides et podzoliques : une forte accumulation d'humus pauvre et acide se dĂ©composant mal et un sol hydromorphe, soit le phĂ©nomĂšne pĂ©dologique qui est l'extrĂȘme inverse de celui de la Champagne crayeuse). Mais cette forĂȘt sur rendzine Ă©tait peu productive. Bien qu'elle eĂ»t un temps couvert la quasi-totalitĂ© de la Champagne crayeuse et formĂ© la deuxiĂšme plus grande forĂȘt de France aprĂšs les Landes de Gascogne, la forĂȘt ne fut pas replantĂ©e par les sylviculteurs aprĂšs les rĂ©coltes dans le milieu du XXe siĂšcle, contrairement Ă  la forĂȘt des Landes de Gascogne qui a perdurĂ©. Seuls les vastes camps militaires, installĂ©s Ă  l'Ă©poque oĂč la rĂ©gion Ă©tait entiĂšrement boisĂ©e, constituent aujourd’hui des tĂ©moins de cette forĂȘt de pin noir.

La rĂ©gion s'est alors reconvertie avec succĂšs dans l'agriculture. À partir du milieu du XXe siĂšcle c'est le dĂ©veloppement de la mĂ©canisation de l'agriculture permettant un meilleur travail du sol, ainsi que des moyens de transport modernes, qui ont permis des amendements Ă  grande Ă©chelle par des apports notamment de fumier et d'argile, crĂ©ant un sol agricole riche grandement favorisĂ© par le mĂ©lange avec le calcaire (riche en Ă©lĂ©ments et en bases), transformant ainsi en peu de temps la champagne crayeuse en une des plus vastes et riches rĂ©gions de production agricole de France et d'Europe, qui rivalise aujourd’hui avec la Beauce.

Hydrographie

« Champagne sÚche » en raison de la porosité de ses sols, par opposition à la macro-région naturelle voisine aux sols moins perméables à l'est, la « Champagne humide », cet espace géographique est parcouru par quatre cours d'eau principaux qui sont du nord au sud :

Histoire

Dans la Craie Champenoise: La preparation de l'offensive

Elle Ă©tait appelĂ©e autrefois « Champagne pouilleuse » qui vient probablement de l’adjectif pouilleux, misĂ©reux, donc peu fertile, par mĂ©tonymie de personne misĂ©rable, qui a des poux (anciennement pĂŒil, peoil, pouil, du latin peduculus, petit pou)[7] ou bien de la plante vivace, la Menthe pouliot trĂšs commune sur la plaine crayeuse laissĂ©e en jachĂšre, appelĂ©e savarts. Ces espaces Ă©taient le domaine du pĂąturage ovin et se tapissaient de rose en mai lors de la floraison des pouliots. C‘est une zone dĂ©pourvue de mares et zones humides Ă  cause de la permĂ©abilitĂ© des sols, pour cette raison peu favorable Ă  l'agriculture et Ă  l'Ă©levage bovin mais qui permettait tout de mĂȘme la cĂ©rĂ©aliculture (Ă  faible rendement) et l'Ă©levage ovin moins exigeant en prairies. Une expression locale disait : « 1 Champenois et 99 moutons font 100 bĂȘtes »[8].

Économie

Jusqu'au milieu du XXe siĂšcle, la rĂ©gion essentiellement agricole reste relativement pauvre et peu peuplĂ©e. En rĂšgle gĂ©nĂ©rale, les corps de fermes y Ă©taient moins cossus que dans la Brie ou la Beauce. Son Ă©conomie qui reposait autrefois sur l'activitĂ© pastorale et cĂ©rĂ©aliĂšre dont il ne reste plus guĂšre de vestiges notamment dans les villages, a Ă©tĂ© convertie au XIXe siĂšcle dans la sylviculture du pin noir d'Autriche. Les vastes camps militaires sont aujourd’hui les seuls vestiges de cette immense forĂȘt artificielle de pins qui a pendant un temps couvert la Champagne crayeuse, mais les rĂ©sultats de cette sylviculture furent Ă©conomiquement peu probants. Quant Ă  l'habitat, les murs faits de torchis, de carreaux de craie ou de sable et les toitures de chaume ont Ă©tĂ© remplacĂ©s Ă  partir du XIXe siĂšcle par des matĂ©riaux issus de l'industrie du bĂątiment tels que la tuile en ardoise ou argile et la brique.

Mais aujourd’hui, elle est devenue l'une des plus grandes rĂ©gions agricoles de France et d'Europe grĂące Ă  la mĂ©canisation, l'utilisation des amendements et des engrais, produisant des cĂ©rĂ©ales, olĂ©agineux, protĂ©agineux, lĂ©gumineuses, cultures industrielles betterave Ă  sucre, pommes de terre, chanvre, lin, etc. ces productions Ă©tant transformĂ©es par les industries agroalimentaires prĂ©sentes sur tout le territoire.

Une autre de ses grandes richesses est que son sous-sol crayeux permet la culture de la vigne nécessaire à l'élaboration du vin de Champagne.

La rĂ©gion est donc devenue plus riche. Ce qui faisait sa faiblesse, un sol permĂ©able naturellement pauvre voire stĂ©rile, est devenu sa force : le sol crayeux et lĂ©ger s'est avĂ©rĂ© un excellent support pour les modes culturaux de l’agriculture moderne. Toutefois, de par son histoire et sa gĂ©ographie, la rĂ©gion reste toujours aussi faiblement peuplĂ©e, et fait partie de ce que les gĂ©ographes ont appelĂ© la diagonale du vide.

Notes et références

  1. « Champagne-Ardenne » (consulté le ), article en ligne de l'encyclopédie Larousse mentionnant le nom.
  2. MichaĂ«l PIERROT, « La Champagne Pouilleuse », Futura,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
  3. Champagne crayeuse, Atlas des paysages de Champagne-Ardenne, D.R.E.A.L., p. 33-43 (lire en ligne)
  4. « Terroir », sur Champagne Oudiette - Le Terroir, (consulté le )
  5. DUBOIS Jean-Jacques, 1989, Espaces et milieux forestiers dans le Nord de la France. Étude de biogĂ©ographie historique. ThĂšse d’État, UniversitĂ© Paris -I PanthĂ©on-Sorbonne, 2 vol., p. 335/1023 pages
  6. M. Bounieras, G. Arnal, C. Bock, Guide des groupements végétaux de la région parisienne, Belin, 2001
  7. Dictionnaire historique de la langue française, Robert, 1998, p. 2877
  8. « 99 Moutons et un Champenois font 100 BĂȘtes ! » (consultĂ© le ), carte postale ancienne.

Annexes

Bibliographie

  • Joseph Garnotel, L'Ascension d'une grande agriculture : Champagne pouilleuse, Champagne crayeuse, Economica, (ISBN 978-2-7178-0913-8)

Articles connexes

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