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Magdalénien

Le MagdalĂ©nien est la dernière culture archĂ©ologique du PalĂ©olithique supĂ©rieur en Europe de l'Ouest, ou l'avant-dernière si on inclut l'Azilien. Il s'Ă©tend entre environ 17 000 et 14 000 ans avant le prĂ©sent (AP). L'appellation a Ă©tĂ© proposĂ©e par le prĂ©historien français Gabriel de Mortillet d'après le nom du site prĂ©historique de la Madeleine, Ă  Tursac, en Dordogne. Le MagdalĂ©nien est prĂ©cĂ©dĂ© en France par le Badegoulien (18 500 Ă  16 000 ans AP) et suivi par l'Azilien (14 000 Ă  12 000 ans AP).

Magdalénien
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DĂ©finition
Lieu Ă©ponyme Abri de la Madeleine
(Dordogne)
Auteur Gabriel de Mortillet
Caractéristiques
Répartition géographique Europe occidentale et centrale
Période Paléolithique supérieur
Chronologie Environ 17 000 Ă  14 000 ans avant le prĂ©sent
Type humain associé Homo sapiens
Tendance climatique Tardiglaciaire
Signe particulier Art pariétal développé
Chasse hyperspécialisée
Signes d'Ă©change
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Extension de la culture magdalénienne

Subdivisions

Magdalénien inférieur (I à III), Magdalénien supérieur (IV à VI)

Objets typiques

Propulseur, harpon, lamelle Ă  dos, burin bec-de-perroquet

Aire géographique

Le Magdalénien est connu en Europe occidentale, sur les territoires actuels de l'Espagne, du Portugal, de la France, de la Belgique, de la Suisse, de l'Allemagne, de la Tchéquie et de la Pologne[1].

Climat

Le MagdalĂ©nien se dĂ©veloppe pendant le Tardiglaciaire, ultime subdivision de la glaciation de WĂĽrm (le Tardiglaciaire commence vers 19 000 ans AP et se termine avec la fin de la dernière oscillation froide appelĂ©e Dryas rĂ©cent, vers 11 700 ans AP). Le MagdalĂ©nien s'Ă©tend plus prĂ©cisĂ©ment sur les phases climatiques du Dryas ancien (froid) et du Bölling (tempĂ©rĂ©).

AndrĂ© Leroi-Gourhan faisait autrefois commencer le MagdalĂ©nien avec le dĂ©but de l'interstade de Lascaux[2], qui Ă©tait Ă  l'Ă©poque l'avant-dernier interstade de la glaciation de WĂĽrm, datĂ© Ă  Lascaux de 16 950 Ă  16 000 ans AP[3] - [4].

Historique

Vue partielle du propulseur orné dit Le faon aux oiseaux, de la grotte du Mas-d'Azil[5].

En 1912, en se basant sur l'évolution typologique de l'outillage, Henri Breuil a proposé de subdiviser le Magdalénien en deux parties comportant trois phases chacune :

  • MagdalĂ©nien infĂ©rieur : MagdalĂ©nien I Ă  III ;
  • MagdalĂ©nien supĂ©rieur : MagdalĂ©nien IV Ă  VI.

Des recherches plus récentes, conduites notamment par B. Bosselin et François Djindjian sur l'outillage lithique en utilisant des méthodes statistiques multidimensionnelles, tendent à séparer une phase archaïque, nommée Badegoulien et correspondant aux phases I et II d'Henri Breuil, du Magdalénien stricto sensu.

Plus récemment, le Magdalénien se subdivisait en trois phases : Magdalénien inférieur (17 000 - 15 000 ans AP), Magdalénien moyen (15 000 - 13 500 ans AP) et Magdalénien supérieur (13 500 - 12 000 ans AP). Plusieurs préhistoriens le distinguent du Badegoulien (19 000 - 17 000 ans AP), d'après des critères typologiques, technologiques, économiques.

Jacques Allain a défini le Magdalénien à navettes et en a fait l'analyse technologique, typologique et culturelle, à partir de ses fouilles dans la vallée de la Creuse des grottes de La Garenne (surtout Blanchard) à Saint-Marcel avec son ami J. Descouts, de 1946 à 1976[6].

Industrie

L'outillage lithique magdalénien comporte un grand nombre de burins, grattoirs, perçoirs, lames et lamelles. Les propulseurs et les harpons montrent que le travail de l'os y est développé. La vie des Magdaléniens a été rapprochée de la civilisation des Inuits.

Les auteurs reconnaissent trois faciès lithiques dans le Magdalénien :

  • un faciès ancien (M0) caractĂ©risĂ© par des grattoirs, des burins, des pointes Ă  cran, des lamelles Ă  dos et des lamelles Ă  dos tronquĂ©es (ex-triangles) ;
  • un faciès moyen et rĂ©cent (M1) Ă  grattoirs et burins prĂ©pondĂ©rants, pointes Ă  cran et rares lamelles Ă  dos ;
  • un faciès prĂ©sent dans les phases ancienne, moyenne et rĂ©cente (M2), caractĂ©risĂ© par l'abondance des lamelles Ă  dos.

L'art magdalénien

L'art magdalĂ©nien est particulièrement riche et diversifiĂ©. Les peintures et les gravures se comptent par milliers et se caractĂ©risent par un fort naturalisme avec un sens aigu du dĂ©tail et des proportions. Elles Ă©taient rapportĂ©es anciennement au "style IV" d'AndrĂ© Leroi-Gourhan. Les grottes ornĂ©es de Rouffignac, de Niaux, du Roc-aux-Sorciers ou d'Altamira ont livrĂ© quelques-uns des chefs-d'Ĺ“uvre de l'art pariĂ©tal palĂ©olithique. L'art de Lascaux est rapportĂ© au MagdalĂ©nien II. Une datation par le carbone 14 pour Lascaux, sur des dĂ©blais du Puits et par une mĂ©thode diffĂ©rente, tendrait Ă  vieillir les datations prĂ©cĂ©dentes (17 000 ans AP), avec un âge situĂ© Ă  18 900 ans AP, Ă  la charnière du SolutrĂ©en et du Badegoulien[7]. Cependant, pour les prĂ©historiens, il n'y a aucun objet solutrĂ©en dans l'unique couche archĂ©ologique, mais seulement de nombreux objets caractĂ©ristiques du MagdalĂ©nien II qui confirment les datations obtenues.

L'art mobilier magdalénien est également remarquable : les armes et les objets de la vie quotidienne sont souvent décorés de motifs géométriques ou de représentations figuratives (animaux, humains) et le nombre de plaquettes gravées s'amplifie considérablement à cette période[8]. La découverte d'instruments de musique, comme les flûtes d'Isturitz et la conque de Marsoulas, laisse entrevoir une société organisée dont les représentants avaient le temps de s'adonner à l'art.

Art pariétal

Art mobilier

Principaux sites magdaléniens

Sites de référence fouillés récemment

Les sites de référence du Magdalénien stricto sensu qui ont été fouillés récemment suivant des techniques modernes sont :

En France

En Europe

Suisse

Canton de Fribourg

Canton de Neuchâtel

Canton du Jura

Canton de Berne

Canton de Soleure

Grottes ornées

De nombreuses grottes ornées et des abris sous roche ont livré des figurations attribuées au Magdalénien, notamment :

En France

En Europe

Autriche
Espagne

Autres sites

D'autres sites ont livré des témoignages ou des industries attribués au Magdalénien, sans avoir fait l'objet de recherches ou d'évaluation récentes :

Aquitaine

Midi-Pyrénées

Poitou-Charentes

Auvergne

RhĂ´ne-Alpes

Belgique

Génétique

Une Ă©tude de 2016 montre deux changements majeurs dans les populations europĂ©ennes après le dernier maximum glaciaire (LGM). Lors du dĂ©but du recul des glaciers, vers 19 000 ans AP, l’Europe de l'Ouest est repeuplĂ©e par des chasseurs-cueilleurs provenant du sud-ouest de l’Europe, notamment de la pĂ©ninsule IbĂ©rique[14]. La plupart des ancĂŞtres trouvĂ©s chez les individus post-LGM remontent probablement Ă  des groupes associĂ©s au Gravettien d'Europe de l'Ouest et du Sud-Ouest[15].

La signature gĂ©nĂ©tique des Aurignaciens, qui avait disparu d'une grande partie de l'Europe lorsque les Gravettiens Ă©taient arrivĂ©s, il y a environ 30 000 ans, refait surface 15 000 ans plus tard avec la « Dame rouge » de la grotte El MirĂłn (en), près de Ramales de la Victoria, dans le Nord de l'Espagne[16]. Cette grande femme robuste est rattachĂ©e au MagdalĂ©nien, qui a connu une expansion vers le nord quand les calottes glaciaires ont reculĂ©[16].

Bien avant 17 000 ans AP[15], une nouvelle migration a lieu « qui semble venir du sud-est (Balkans ou Anatolie), et non du sud-ouest Â»[14], et qui se caractĂ©rise notamment par la disparition parmi les populations de chasseurs-cueilleurs de l'haplogroupe mitochondrial M[17]. L'affinitĂ© gĂ©nĂ©tique avec cette ascendance dite « Villabruna » est prĂ©sente dans le spĂ©cimen El MirĂłn et chez les individus associĂ©s au MagdalĂ©nien d'Europe occidentale et centrale. Cela suggère que les liens gĂ©nĂ©tiques entre les chasseurs-cueilleurs du sud et du sud-ouest de l'Europe Ă  l'Ă©poque du dernier maximum glaciaire s'Ă©tendaient au nord des PyrĂ©nĂ©es[15]. Les anciens individus de la culture magdalĂ©nienne sont ainsi modĂ©lisĂ©s comme Ă©tant issus d'un mĂ©lange gĂ©nĂ©tique entre une population appartenant au cluster de Fournol (Lot) et une population du cluster de Villabruna[15].

Parmi les individus mésolithiques, des proportions élevées d'ascendance GoyetQ2 ont été identifiées dans les génomes des chasseurs-cueilleurs français de la grotte des Perrats, sur la façade ouest de l'Atlantique au début du Mésolithique, soulignant la persistance tardive du patrimoine génétique associé au Madgalénien en dehors de la péninsule Ibérique. Au Néolithique, des niveaux élevés d'ascendance de type GoyetQ2 ont été signalés chez les Ibères avec les proportions les plus élevées identifiées chez les individus d'Andalousie (Cueva del Toro), et dans des proportions plus faibles en Catalogne (grotte de Chaves). En revanche, aucun individu néolithique de la partie orientale de la Méditerranée française ne semble porter ce type d'ascendance à l'exception d'un individu de Baume Bourbon à Cabrières (Gard). Les autres individus ont une ascendance liée à Villabruna[18].

Notes et références

  1. François Djindjian, J. Koslowski, Marcel Otte, Le Paléolithique supérieur en Europe, éd. A. Colin, 1999, p. 257-287
  2. [Leroi-Gourhan & Leroi-Gourhan 1964] Arlette Leroi-Gourhan et André Leroi-Gourhan, « Chronologie des grottes d'Arcy-sur-Cure (Yonne) », Gallia Préhistoire, t. 7,‎ , p. 1-64 (DOI 10.3406/galip.1964.1238, lire en ligne [sur persee], consulté le ).
  3. Arlette Leroi-Gourhan, « III. Analyse pollinique - L'abri du Facteur à Tursac (Dordogne) », Gallia Préhistoire, vol. 11, no 1,‎ , p. 126-127 (lire en ligne, consulté le ), p. 127.
  4. Leroi-Gourhan & Leroi-Gourhan 1964, p. 18-19
  5. L'interprétation initiale identifie un faon sculpté en ronde-bosse dans la partie distale du propulseur. Il « tourne la tête sur la droite vers son arrière-train pour observer deux oiseaux perchés sur quelque chose de cylindrique sortant de son corps (présumément un « boudin » de matière fécale), la queue de l'un d'eux servant de crochet au propulseur ». Contrairement à cette interprétation, « l'animal représenté n'est pas un faon, mais, selon les détails anatomiques perceptibles, plutôt un isard ou un bouquetin, sans doute assez jeune. Les « oiseaux », eux, ne seraient que de simples stries ornant le propulseur (l'art magdalénien étant plus riche en signes qu'en figures animales). Quant au « boudin », il s'agirait en réalité d'une poche placentaire et l'animal serait ainsi une femelle d'isard en train de mettre bas ». Cf Marc Azéma, Laurent Brasier, Le beau livre de la préhistoire. De Toumaï à Lascaux 4, Dunod, , p. 232.
  6. [Vialou 1997] Denis Vialou, « Le Docteur Jacques Allain (1914-1997) », Bulletin de la Société préhistorique française, vol. 94, no 4,‎ , p. 422-426 (lire en ligne [sur persee]), p. 423.
  7. Norbert Aujoulat, Lascaux. Le Geste, l'Espace et le Temps, Seuil, 2004 (ISBN 2-02-025726-2).
  8. G. Tosello, 2003, Pierres gravées du Périgord Magdalénien, XXXVIe supplément à Gallia Préhistoire, Paris, éd. du CNRS.
  9. Pour Rhodes II, voir Célia Fat Cheung, L'Azilien pyrénéen parmi les sociétés du tardiglaciaire ouest-européen : apport de l'étude des industries lithiques (thèse de doctorat en Préhistoire), université Toulouse le Mirail - Travaux et Recherches Archéologiques sur les Cultures, les Espaces et les Sociétés (UMR 5608 T.R.A.C.E.S), , 437 p. (lire en ligne), p. 53-166.
  10. Pour la grotte des Harpons à Lespugue, voir René de Saint-Périer, « Note sur ses trouvailles dans la grotte des Harpons, à Lespugne (Haute-Garonne) », Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, vol. 65, no 1,‎ , p. 21-22 (lire en ligne [Persée], consulté le ).
  11. Pour La Tourasse, voir :
    • Michel Orliac, « II. — La grotte de Tourasse - Saint-Martory (Haute-Garonne) », Quaternaire, vol. 12, nos 3-4,‎ , p. 189-190 (lire en ligne [PersĂ©e], consultĂ© le )
    • Lucien Michaut et Georges Simonnet, « DĂ©couverte d'une plaquette de pierre gravĂ©e, prĂ©sumĂ©e d'Ă©poque MagdalĂ©nienne, dans la grotte de la Tourasse (Haute-Garonne) », Bulletin de la SociĂ©tĂ© prĂ©historique française, vol. 44, nos 5-6,‎ , p. 191-194 (lire en ligne [PersĂ©e], consultĂ© le ).
  12. I. L. Bayon, E. Teheux, L. G. Strauss et J.-M. Léotard, « Pointes de sagaies au Magdalénien du Bois Laiterie (Profondeville, Namur) », Université de Liège, Liège, 1996, ISSN 0779-8024.
  13. « Magdalénien récent du Bois Laiterie, Dinant », Notae Praehistoricae, no 15,‎ , p. 11-33 (lire en ligne [academia.edu], consulté le ).
  14. (en) The genetic history of Ice Age Europe, Howard Hughes, sciencedaily.com, 2 mai 2016
  15. (en) Cosimo Posth, He Yu, Ayshin Ghalichi, Hélène Rougier, Isabelle Crevecoeur et al., « Palaeogenomics of Upper Palaeolithic to Neolithic European hunter-gatherers », Nature, vol. 615,‎ , p. 117–126 (DOI 10.1038/s41586-023-05726-0 Accès libre, lire en ligne, consulté le ).
  16. (en) DNA secrets of Ice Age Europe unlocked, Paul Rincon, bbc.com, 2 mai 2016
  17. (en) Pre-Neolithic DNA Suggests Major Late Glacial Population Turnover in Europe, sci-news.com, 5 février 2016
  18. (en) Ana Arzelier, Maïté Rivollat et al., Neolithic genomic data from southern France showcase intensified interactions with hunter-gatherer communities, iScience, Volume 25, Numéro 11, 105387, 18 novembre 2022, doi.org/10.1016/j.isci.2022.105387

Bibliographie

Voir aussi

Articles connexes

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