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Grotte du Placard

La grotte du Placard est une grotte ornée située sur le territoire de la commune de Vilhonneur, en Charente, à une trentaine de km à l'est d'Angoulême.

Grotte du Placard
La grotte du Placard Ă  Rochebertier.
Localisation
Coordonnées
45° 41′ 23″ N, 0° 25′ 11″ E
Pays
RĂ©gion
DĂ©partement
Commune
Vallée
Voie d'accès
D 109
Caractéristiques
Type
Altitude de l'entrée
125 m
Longueur connue
17 m
Occupation humaine
Patrimonialité
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Localisation

Comme la grotte du Visage, la grotte du Placard est située sur la rive gauche de la Tardoire et sur le territoire de la commune de Vilhonneur, entre Angoulême et Montbron.

Elle se trouve Ă  environ 150 m au nord du moulin du hameau de Rochebertier, dans une falaise qui surplombe la Tardoire[1].

Description

C'est une vaste cavitĂ© longue de 17 mètres et large d'environ 9 mètres, creusĂ©e dans les calcaires bajociens et longĂ©e par un long couloir[2] - [3].

Historique

La grotte du Placard a été découverte par Jean Fermond, qui l'a (grossièrement) fouillée dans les années 1868-1880. L'abbé Bourgeois et l'abbé Delaunay la fouillent eux aussi, dans les années 1870[4] ; l'abbé Delaunay continue seul après le décès de l'abbé Bourgeois[5]. Puis vient Arthur de Maret qui la fouille plus en profondeur[n 1] de 1877 à 1888 et y découvre du Néolithique, quatre niveaux magdaléniens dont certains déjà reconnus par Fermond, deux niveaux solutréens et un niveau moustérien, ces deux derniers alors inconnus[6]. La grotte a livré quelques ossements néandertaliens et de nombreux ossements d'Homo sapiens (Paléolithique supérieur). Certains de ces os (maxillaires, boites crâniennes) portent des incisions, des traces d'ocre et de brûlures, démontrant le concept de pratiques funéraires au Paléolithique. S'ensuit ce qui a été appelé « la bataille Aurignacienne », un débat très agité sur plusieurs dizaines d'années, tant l'idée est contraire à la façon de penser de l'époque[7].

L'Association française pour l'Avancement des Sciences a financé des fouilles en 1902.

Elle a livrĂ© plus d'une dizaine de niveaux du PalĂ©olithique moyen et supĂ©rieur, en particulier du MagdalĂ©nien et du SolutrĂ©en. Les subdivisions du PalĂ©olithique supĂ©rieur prĂ©sentĂ©es par l'abbĂ© Henri Breuil au congrès de Genève de 1912 sont en partie basĂ©es sur les rĂ©sultats des fouilles de la grotte du Placard[8]. Du MagdalĂ©nien de la grotte, Breuil dit : « Il est peu de gisements oĂą le plus vieux magdalĂ©nien soit mieux reprĂ©sentĂ© qu'au Placard, et dĂ©veloppĂ© en couches distinctes donnant l'idĂ©e du long dĂ©veloppement de cette pĂ©riode […][9] Â».

Les fouilles ont été reprises en 1958 par l'abbé Jean Roche à la demande du Pr Jean Piveteau, puis à nouveau à partir de 1987 par Louis Duport, archéologue départemental de la Charente, à la suite de la découverte d'une palmure de renne portant des gravures de bovidés. C'est lui qui, en dégageant à nouveau le couloir latéral des déblais là accumulés, y a découvert en 1990 des gravures pariétales[10]. Les recherches ont été poursuivies ensuite sous la co-responsabilité de Jean Clottes et de Louis Duport.

Stratigraphie

Suivant les résultats des fouilles de 1877 à 1902, il a été distingué :

  • un niveau supĂ©rieur contenant du mobilier d'Ă©poque historique et de l'âge du bronze, sur lequel on ne dispose de pratiquement aucune information ;
  • un niveau du MagdalĂ©nien de 1,50 m d'Ă©paisseur qui se subdivise en quatre couches ;
  • un niveau du SolutrĂ©en de m d'Ă©paisseur ;
  • un niveau du MoustĂ©rien de 1,50 m d'Ă©paisseur.

La stratigraphie relevée par l'abbé Roche à l'extérieur de la grotte comprend la séquence suivante :

L'abbé Roche en fouillant le couloir en a relevé la stratigraphie suivante :

  • MagdalĂ©nien IV mĂŞlĂ© Ă  des Ă©lĂ©ments plus rĂ©cents sur 10 cm[3] ;
  • couche de petits blocs calcaires[11] ;
  • MagdalĂ©nien IVa et IIIb avec de nombreux burins, des grattoirs, des lamelles et autres objets sur 0,20 m[11] ;
  • MagdalĂ©nien moyen sur 17 niveaux[12] ;
  • plancher de la grotte, un lapiaz formĂ© de blocs parallèles[13].

Faune antique

La grotte du Placard fait partie des sites charentais ayant livré de l'antilope saïga (Saiga tatarica)[14] parmi une faune très variée

Restes humains

Un fragment de maxillaire d'enfant réputé néandertalien a disparu. Une dent d'enfant découverte en 1960 était associée à une industrie moustérienne (Paléolithique moyen).

De nombreux os d’Homo sapiens datant du Solutréen (Paléolithique supérieur) ont été trouvés, dont des crânes façonnés en coupes[2].

Art pariétal

Une frise d'environ 5 mètres de long a Ă©tĂ© mise au jour en 1990 sur les parois enfouies partie sous d'anciens dĂ©blais, partie dans la couche solutrĂ©enne. Les dessins sont rĂ©alisĂ©s par incisions très fines. De nombreux chevaux, des cervidĂ©s, des bouquetins, des rennes, un chamois, une antilope saĂŻga, des bovidĂ©s, un aurochs et deux tĂŞtes de bisons tirant la langue y sont reprĂ©sentĂ©s[2].

Une douzaine de signes en accolade ou « aviformes » sont aussi prĂ©sents . Ils sont identiques Ă  ceux dĂ©couverts dans les grottes du Pech Merle et de Cougnac. Des signes similaires ont Ă©tĂ© retrouvĂ©s dans la grotte Cosquer Ă  Marseille, Ă  500 km[15]. Cette large diffusion indique un mode d'expression symbolique largement diffusĂ© sur de très longues distances au cours du SolutrĂ©en.

Le tamisage des déblais a permis de retrouver 640 blocs d'effondrement gravés, ce qui montrerait qu'une grande partie des parois étaient gravées[16]. Dès 1942, Raoul Daniel avait étudié les plaquettes calcaires provenant de l'effritement de la voûte dont une enduite d'ocre rouge et gravée de rennes, une gravée d'un cervidé[17].

Cet ensemble gravĂ© remonte Ă  environ 20 000 ans avant le prĂ©sent (datation par le carbone 14 : 19 708 +/- 250 ans AP), soit Ă  l'Ă©poque solutrĂ©enne. Les signes trouvĂ©s portent dĂ©sormais le nom de « signes de type Placard », d'après l'appellation proposĂ©e par le prĂ©historien Jean Clottes.

Outils et objets

Les outils lithiques du Paléolithique moyen appartiennent au Moustérien (Moustérien de type Quina et Moustérien à denticulés).


Le Solutréen (Paléolithique supérieur) est représenté en particulier par des pointes en feuille de laurier et en feuille de saule. Le Magdalénien ancien est bien représenté par des grattoirs et des burins de divers types.

De nombreuses pointes de sagaies en bois de renne du MagdalĂ©nien ont Ă©tĂ© trouvĂ©es ainsi que d'autres objets en matières dures animales dont un poinçon, des sifflets, des aiguilles et des Ă©lĂ©ments de parures (dents et coquillages percĂ©s). Le site a Ă©galement livrĂ© des propulseurs, dont un propulseur de type mâle Ă  crochet caractĂ©ristique du MagdalĂ©nien moyen Ă  navettes, fabriquĂ© avec la languette corticale d'un bois de renne[18]. Une plaque osseuse de 50 Ă— 36 mm, dĂ©coupĂ©e dans l'omoplate d'un gros animal, trouvĂ©e durant la campagne de fouille de 1961-1962, est dentelĂ©e et sur une face striĂ©e ; elle pourrait ĂŞtre la reprĂ©sentation d'un poisson[11].

Deux objets en bois de renne, en forme d'organes gĂ©nitaux, ont Ă©tĂ© considĂ©rĂ©s comme des bâtons de commandement. L'un, incomplet, long de 140 mm est en forme de pĂ©nis ; l'autre long de 155 mm se termine par un double renflement percĂ© d'un trou et au-dessus de celui-ci a Ă©tĂ© sculptĂ©e une vulve[19].

Un bâton percé en bois de renne[n 2], découvert en 1870 par Arthur de Maret est sculpté en ronde-bosse d'une tête d'animal qui peut être interprétée comme celle d'un renard ou d'un bouquetin[20].

Protection

La grotte du Placard a été classée monument historique par arrêté du [21].

Elle est désormais accessible au public sur réservation durant l'été, grâce à des aménagements financés par le Conseil départemental de la Charente, devenu propriétaire en 1990[22].

Notes et références

Notes

  1. De Maret - comme ses confrères de l'époque - fait des fouilles à la mode de l'époque, c'est-à-dire très destructrices : on ne garde que les objets considérés comme intéressants, on ne note pas ou très mal l'endroit où sont trouvés les objets ni ce qui les environne.
  2. Bâton percĂ© en bois de renne : 34 Ă— 7,4 Ă— 5,3 cm. Saint-Germain-en-Laye, musĂ©e d'archĂ©ologie nationale.

Références

  1. « Grotte du Placard, carte interactive » sur Géoportail. Couches « Cartes IGN classiques », « Limites administratives » et « Hydrographie » activées. Les distances à vol d'oiseau se mesurent avec l'outil « Mesurer une distance » dans l'onglet « Outils cartographiques » à droite (symbole de petite clé plate).
  2. [Debénath 2006] André Debénath, Néandertaliens et Cro-Magnons, les temps glaciaires dans le bassin de la Charente, CroitVif, (ISBN 2-916104-00-3).
  3. Roche 1965, p. 245.
  4. [Bourgeois & Delaunay 1875] Abbé Bourgeois et Abbé Delaunay, « Grotte de Rochebertier », Matériaux pour l'histoire primitive de l'Homme, vol. 10,‎ , p. 191. Cité dans Gaudry 1876, p. 66, note 1.
  5. Gaudry 1876, p. 66.
  6. Delage 2018, p. 49.
  7. Delage 2018, p. 50.
  8. [Breuil 1937] Henri Breuil, « Les subdivisions du Paléolithique supérieur et leur signification », Compte-rendu du Congrès International d'Anthropologie et d'Archéologie préhistoriques XIVe session, Genève, 1912,‎ , p. 5-78 (présentation en ligne, lire en ligne [sur halshs.archives-ouvertes.fr]) : p. 187, fig. 17 ; p. 188, fig. 18 ; p. 191, fig. 19 ; p. 192, fig. 20 ; p. 194, fig. 21 ; p. 195 note 1 ; p. 198, fig. 23 ; et dans le texte : p. 195, 196, 197, 199 (dont fig. 24), 203, 205.
  9. Breuil 1937, p. 205.
  10. « Culture et Patrimoine »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?), sur cg16.fr.
  11. Roche 1965, p. 246.
  12. Roche 1965, p. 247.
  13. Roche 1965, p. 248.
  14. Gaudry 1876, p. 79, 81 et pl. XII, XIV et al..
  15. Thierry Koltes, « Les signes de type Placard dans l'art préhistorique », sur thierry.koltes.free.fr, .
  16. « L'art pariétal de la grotte du Placard »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?), sur solutreen.over-blog.com.
  17. [Daniel 1942] Raoul Daniel, « Pierres gravées de la grotte du Placard », Bulletin de la Société préhistorique française, vol. 39, nos 3-4,‎ , p. 117-119 (lire en ligne [sur persee]).
  18. [Cattelin 2004] Pierre Cattelin, « Un propulseur inédit de la grotte du Placard (Vilhonneur, Charente, France) », Notae Praehistoricae, no 24,‎ , p. 61-67 (lire en ligne [sur academia.edu]).
  19. [Mortillet 1906] A. de Mortillet, « Deux curieuses pièces de la grotte du Placard », Bulletin de la Société préhistorique française, t. 3, no 10,‎ , p. 431-434 (lire en ligne [sur persee]).
  20. [Schwab 2018] Catherine Schwab, « Le bâton percé de la grotte du Placard », Archéologia, no 571,‎ , p. 20-21.
  21. « Grotte du Placard », notice no PA00104539, base Mérimée, ministère français de la Culture
  22. « La grotte du Placard se révèle », sur sudouest.fr.

Voir aussi

Bibliographie

  • « Vilhonneur, Le Placard », large bibliographie du site, sur vdujardin.com (consultĂ© en ).
  • [Delage 2018] Richard Delage, « 150 ans de dĂ©bats autour du Placard », Le Picton, no 249,‎ , p. 48-53 (lire en ligne [sur academia.edu]). Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • [Gaudry 1876] Albert Gaudry, MatĂ©riaux pour l'histoire des temps quaternaires, Paris, Ă©d. F. Savy, , sur books.google.fr (lire en ligne). Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • [Roche 1965] Jean Roche, « La grotte du Placard », Bulletin de l'Association française pour l'Ă©tude du quaternaire, nos 2-3-4,‎ , p. 245-250 (lire en ligne [sur persee]). Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article

Articles connexes

Liens externes

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