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Paléolithique moyen

Le Paléolithique moyen est la période de la Préhistoire qui succède au Paléolithique inférieur ; il débute vers 350 000 ans environ avant le présent, et s'achève vers 45 000 ans AP, avec le début du Paléolithique supérieur.

DĂ©finition

Le début du Paléolithique moyen est défini par le passage des différentes espèces humaines de la planète aux industries lithiques dites de mode 3, qui succèdent à l'industrie acheuléenne, dite de mode 2. Ce passage se fait progressivement, sur plusieurs dizaines de milliers d'années, et à des époques plus ou moins décalées d'une région à l'autre et d'un continent à l'autre.

En Afrique comme en Europe, le PalĂ©olithique moyen dĂ©bute autour de 350 000 ans avant le prĂ©sent[1], et s'achève en Afrique comme en Europe autour de 45 000 ans AP, avec le passage aux industries lithiques dites de mode 4, vĂ©hiculĂ©es par Homo sapiens.

Variations climatiques et environnementales

Comme tout le Pléistocène, le Paléolithique moyen est marqué par d'importantes fluctuations climatiques globales caractérisées par des alternances de phases glaciaires et interglaciaires, comportant elles-mêmes d'importantes oscillations plus ou moins longues[2].

L'Europe a connu pendant cette période des climats très variés :

Les phases les plus froides s'accompagnent de régressions marines, entraînant d'importantes modifications des lignes de rivage et permettant par exemple le passage de l'Europe continentale aux actuelles Îles Britanniques.

Pendant les phases glaciaires, les latitudes plus méridionales en Afrique et en Asie conservent un climat tropical à tempéré, mais marqué cependant par la chute des précipitations et une sécheresse durable, ce qui réduit sensiblement les ressources végétales accessibles notamment aux humains.

Principales caractéristiques des outillages

Le Paléolithique moyen est marqué par l'apparition d'un ensemble de traits culturels nouveaux : il voit par exemple se généraliser et se diversifier l'utilisation des outils retouchés (pointes, racloirs, denticulés, grattoirs, etc.), et différentes techniques de débitage laminaire.

Les outils en pierre du Paléolithique moyen peuvent être réalisés en utilisant deux types d'opération de taille :

  • Le premier type d'opĂ©ration de taille est le façonnage, c'est-Ă -dire la taille progressive d'un bloc ou d'un gros Ă©clat en un seul outil.
  • Le deuxième type d'opĂ©ration est le dĂ©bitage, c'est-Ă -dire que les outils sont rĂ©alisĂ©s Ă  partir d'Ă©clats dĂ©bitĂ©s aux dĂ©pens de blocs de matière première prĂ©parĂ©s, appelĂ©s nuclĂ©us. Cette façon de procĂ©der permet gĂ©nĂ©ralement d'extraire plusieurs Ă©clats d'un mĂŞme nuclĂ©us.

Plusieurs méthodes de débitage ont été identifiées pour le Paléolithique moyen :

  • IdentifiĂ©e dès le XIXe siècle et relativement bien connue, la mĂ©thode Levallois est caractĂ©risĂ©e par la possibilitĂ© de dĂ©biter de façon rĂ©pĂ©tĂ©e des Ă©clats dont les caractĂ©ristiques morpho-techniques ont Ă©tĂ© prĂ©dĂ©terminĂ©es avant leur dĂ©tachement par la mise en forme du nuclĂ©us lors de sa prĂ©paration.
  • La mĂ©thode Quina (du nom du site de La Quina) produit des Ă©clats Ă©pais Ă  section asymĂ©trique. Avec un percuteur dur frappant assez loin du bord du nuclĂ©us, non spĂ©cialement prĂ©parĂ©, des Ă©clats souvent couverts de cortex sont dĂ©tachĂ©s d'une face, puis d'une autre et ainsi de suite. Les Ă©clats sont ensuite retouchĂ©s, gĂ©nĂ©ralement en racloir Quina dont l'Ă©paisseur favorise la soliditĂ©. Certains Ă©clats deviendront mĂŞme des matrices de production de petits Ă©clats courts et Ă©pais. Ce type de dĂ©bitage est prĂ©sent dans le sud de la France entre 50 000 et 40 000 ans avant le prĂ©sent. Le dĂ©bitage Quina semble avoir Ă©tĂ© utilisĂ© tout particulièrement durant les pĂ©riodes de refroidissement, aussi appelĂ©es glaciations.
  • La mĂ©thode laminaire produit, comme son nom l'indique, des lames et des Ă©clats laminaires. Bien qu'elle ne se gĂ©nĂ©ralise qu'au PalĂ©olithique supĂ©rieur, cette mĂ©thode est documentĂ©e ponctuellement dès 200 000 ans avant le prĂ©sent. Elle permet l'exploitation de volumes de silex moyennant un entretien minimal du nuclĂ©us, alors que la mĂ©thode Levallois permettait l'exploitation de surfaces convexes successives au prix d'un entretien couteux en matière première.
  • L'existence de dĂ©bitages ramifiĂ©s a rĂ©cemment Ă©tĂ© mis en avant pour le MoustĂ©rien, le principal faciès culturel du PalĂ©olithique moyen. Dans le cadre de tels schĂ©mas, les nuclĂ©us produisent une première gĂ©nĂ©ration d'Ă©clats qui sont Ă  leur tour utilisĂ©s comme nuclĂ©us pour produire une seconde gĂ©nĂ©ration d'Ă©clats. Cette dernière gĂ©nĂ©ration d'Ă©clats est ensuite retouchĂ©e pour rĂ©aliser un outillage de type microlithique.

L'emploi des différentes techniques de débitage, dont notamment la méthode Levallois, est l'un des principaux critères utilisés pour reconnaitre sur un site une industrie du Paléolithique moyen.

Les acteurs du Paléolithique moyen

En Europe, en Afrique du Nord, et au Moyen-Orient, la principale manifestation du Paléolithique moyen est l'industrie lithique moustérienne. Le Moustérien est mis en œuvre par l'Homme de Néandertal en Europe, par Homo sapiens en Afrique du Nord, et par les deux espèces alternativement au Moyen-Orient.

Le Paléolithique moyen est aussi marqué par un certain nombre de comportements évolués, tels que la chasse de grands herbivores (rennes[3], bisons, aurochs, chevaux), parfois avec rabattage de troupeaux vers des pièges naturels[4] - [5], la sélection et le transport des silex de très bonne qualité sur des distances pouvant aller jusqu'à une centaine de kilomètres[6], ou encore l'aménagement de l'habitat, dont témoignent des restes de cabanes ou des foyers construits, autant en plein air que sous abri (même si dans ce dernier cas les vestiges sont généralement plus fréquemment et mieux conservés)[7].

On voit en Afrique et en Europe dès le PalĂ©olithique moyen des prĂ©occupations d'ordre esthĂ©tique, telles que l'usage d'ocre, la collecte de fossiles insolites ou de minĂ©raux rares[8], et la rĂ©alisation après 100 000 ans AP de gravures ou d'incisions non figuratives[9] (voir l'article « Art prĂ©historique »). Le plus ancien dessin connu au monde est datĂ© de 73 000 ans. Il a Ă©tĂ© dĂ©couvert dans la grotte de Blombos, en Afrique du Sud[10].

Homo sapiens et l'Homme de NĂ©andertal semblent, Ă  partir d'environ 120 000 ans AP pour le premier, un peu plus tard pour le second, avoir eu leurs premières prĂ©occupations d'ordre spirituel : en effet, plusieurs squelettes humains de cette Ă©poque et postĂ©rieurs ont Ă©tĂ© dĂ©couverts dans des sĂ©pultures, parfois accompagnĂ©es de dĂ©pĂ´ts sans doute rituels d'outils ou de cornes animales[11].

Notes et références

  1. [Bourguignon et al. 2008] Laurence Bourguignon, Hélène Djema, Pascal Bertran, Christelle Lahaye et Pierre Guibert, « Le gisement Saalien de Petit-Bost (Neuvic, Dordogne) à l'origine du Moustérien d'Aquitaine ? », Mémoire XLVII de la Société Préhistorique française,‎ (lire en ligne [sur researchgate.net], consulté le ).
  2. [Jaubert 1999] Jacques Jaubert, Chasseurs et artisans du Moustérien, La maison des Roches, coll. « Histoire de la France préhistorique (J. Clottes dir.) », , 152 p. (présentation en ligne), p. 47.
  3. [Costamagno et al. 2006] (en) Sandrine Costamagno, Liliane Meignen, Cédric Beauval, Bernard Vandermeersch et Bruno Maureille, « Les Pradelles (Marillac-le-Franc, France) : A mousterian reindeer hunting camp ? », Journal of Anthropological Archaeology, no 25 « Multidisciplinary Approaches to the Study of Site Function and Settlement Dynamics in Prehistory »,‎ , p. 466–484 (lire en ligne [sur researchgate.net]).
  4. [Jaubert et al. 1990] Jacques Jaubert, Michel Lorblanchet, Henri Laville, René Slott-Moller, Alain Turq et Jean-Philippe Brugal, Les chasseurs d'Aurochs de La Borde : un site du Paléolithique moyen (Livernon, Lot), Paris, coll. « Documents d'Archéologie Française » (no 27), , 157 p. (résumé, présentation en ligne).
  5. [Farizy, David, Jaubert et al. 1994] Catherine Farizy, Francine David et Jacques Jaubert, « Hommes et bisons du Paléolithique moyen à Mauran (Haute-Garonne) », Gallia Préhistoire, Paris « XXXe supplément (269 p.) »,‎ (lire en ligne).
  6. [Féblot-Augustins 1997] Jéhanne Féblot-Augustins, La circulation des matières premières au Paléolithique (thèse de doctorat en Histoire (1994, 2 vol.)), Liège, CNRS et Université de Paris X Nanterre, aide technique de l'UPR 7549 du CNRS, coll. « Eraul (Études et recherches archéologiques de l'Université de Liège) » (no 75), , 536 p. (résumé, présentation en ligne).
  7. [Desbrosse & Koslowski 2001] René Desbrosse et Janusz-Krzysztof Koslowski, Les habitats préhistoriques : des Australopithèques aux premiers agriculteurs, Paris, CTHS, (présentation en ligne).
  8. [Leroi-Gourhan 1983] André Leroi-Gourhan, Les religions de la Préhistoire, Paris, PUF, .
  9. [Lorblanchet 1999] Michel Lorblanchet, La naissance de l'Art. Genèse de l'art préhistorique, Paris, éd. Errance, , 304 p. (présentation en ligne).
  10. « Découverte du plus ancien dessin au crayon », Communiqué de presse du CNRS, sur cnrs.fr, (consulté le ).
  11. [Maureille 2004] Bruno Maureille, Les origines de la culture : Les premières sépultures, Paris, éd. Le Pommier, coll. « Le collège de la cité / Les origines de la culture (no 1) », (réimpr. 2013, Cité des sciences et de l'industrie), 123 p. (ISBN 978-2-7465-0203-1).

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • [Depaepe 2009] Pascal Depaepe, La France du PalĂ©olithique, Ă©d. La DĂ©couverte et INRAP, coll. « ArchĂ©ologies de la France », , 178 p. (prĂ©sentation en ligne).
  • [Patou-Mathis 2018] Marylène Patou-Mathis, NĂ©andertal de A Ă  Z, (prĂ©sentation en ligne).
  • [Vandermeersch et al. 2008] Bernard Vandermeersch (dir.), Première humanitĂ©, gestes funĂ©raires des NĂ©andertaliens (catalogue de l'exposition du MusĂ©e national de PrĂ©histoire, 28 juin - 12 octobre 2008), Les Eyzies-de-Tayac, Ă©d. RĂ©union des musĂ©es nationaux, , 142 p..
  • [Vandermeersch & Maureille 2007] Bernard Vandermeersch et Bruno Maureille (dir.), Les NĂ©andertaliens, biologie et cultures, Paris, Ă©d. CTHS (ComitĂ© des travaux historiques et scientifiques), coll. « Documents prĂ©historiques » (no 23), , 342 p. (prĂ©sentation en ligne).

Liens externes

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