Juda et Tamar
Lâhistoire de Juda et Tamar (hĂ©breu : ŚŚąŚ©Ś ŚŚŚŚŚ ŚŚȘŚŚš MaáżŸaĆĂȘ YehĂ»dĂą we-Tamar, grec : ᜠÎÎżÏÎŽÎ±Ï Îșα᜶ áŒĄ ÎÎŹÎŒÎ±Ï Ho Ioudas kai hĂš Thamar) est un Ă©pisode biblique du Livre de la GenĂšse.
Juda et Tamar | |
Ăpisode du Livre de la GenĂšse | |
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Juda und Thamar, huile sur toile dépeignant GenÚse 38:26 | |
Titre original | ŚŚąŚ©Ś ŚŚŚŚŚ ŚŚȘŚŚš MaassĂš Yehoudah vĂšTamar |
Localisation | GenĂšse 38 |
Parasha | Vayeshev |
Lieu(x) de lâaction | Adullam, Kezib, Timna |
Personnages | Juda et Tamar Hira, Bat Choua, Er, Onan et ChĂȘla |
Faisant immĂ©diatement suite Ă la vente de Joseph instiguĂ©e par Juda, lâĂ©pisode relate ce quâil advient de ce dernier : Juda Ă©pouse tout d'abord Bat Choua avec qui il a trois fils, Er, Onan, et ChĂȘla. Le pĂšre comblĂ© choisit pour Er, son fils aĂźnĂ©, une Ă©pouse du nom de Tamar, mais celui-ci meurt avant de lui avoir donnĂ© des enfants. Son dĂ©cĂšs est rapidement suivi par celui de son frĂšre Onan, et Juda qui met ces malheurs sur le compte de Tamar, la renvoie chez son pĂšre, sans lui donner en mariage son troisiĂšme fils. Cependant, Tamar piĂšge Juda et rĂ©ussit Ă obtenir de lui un acte charnel, dont sont issus deux enfants jumeaux. De cette lignĂ©e est issu David, fondateur de la lignĂ©e royale d'IsraĂ«l qui sâachĂšve dâaprĂšs la Bible avec le Roi-Messie.
Mis en image, en prose ou en vers, ce rĂ©cit nâa pas manquĂ© de susciter lâintĂ©rĂȘt des lecteurs et commentateurs tout au long de l'histoire, jusquâĂ lâĂ©poque contemporaine. Dâaucuns ont soulignĂ© l'originalitĂ© de lâĂ©pisode et son intercalage dans lâhistoire de Joseph ; dâautres cherchĂšrent Ă expliquer lâattitude du patriarche Ă©ponyme de la nation juive et de sa bru dont les rapports, relevant Ă la fois de lâadultĂšre et de lâinceste, leur auraient en thĂ©orie valu dâĂȘtre lapidĂ©s Ă mort en vertu de la loi biblique. L'Ă©pisode revĂȘt une nature d'autant plus paradoxale qu'il est Ă l'origine de la lignĂ©e royale d'IsraĂ«l. Peu prĂ©sent dans le lectionnaire chrĂ©tien jusquâĂ l'Ă©poque moderne, il apparaĂźt en revanche tout au long de lâhistoire des lettres juives, depuis la Bible jusquâĂ la littĂ©rature israĂ©lienne. Le rĂ©cit fait aussi dĂ©bat dans la communautĂ© acadĂ©mique : certains considĂšrent ce passage intercalaire comme un ajout tardif et postĂ©rieur au cycle de Joseph, d'autres y voient en revanche un passage nĂ©cessaire pour expliquer lâentiĂšretĂ© de ce cycle.
Le récit biblique
Présentation
Lâhistoire de Juda et Tamar constitue lâintĂ©gralitĂ© du chapitre 38 de la GenĂšse. Il comporte, dans le texte hĂ©braĂŻque qui a servi de base Ă la Vulgate, 30 versets:
« 1 Il arriva, en ce temps-lĂ , que Juda sâĂ©loigna de ses frĂšres et sâachemina vers un habitant dâAdoullam, nommĂ© Hira.
2 LĂ , Juda vit la fille dâun CananĂ©en, appelĂ© Choua ; il lâĂ©pousa et sâapprocha dâelle.
3 Elle conçut et enfanta un fils, Ă qui il donna le nom dâĂr (« ĂveillĂ© »).
4 Elle conçut encore et eut un fils et elle lui donna le nom dâOnĂ n (« Vigoureux »).
5 De nouveau elle enfanta un fils et elle le nomma ChĂ©la. Il Ă©tait Ă Kezib lorsquâelle lâenfanta.
6 Juda choisit une Ă©pouse Ă Ăr, son premier nĂ© ; elle se nommait Thamar.
7 Ăr, le premier nĂ© de Juda, ayant dĂ©plu au Seigneur, le Seigneur le fit mourir.
8 Alors Juda dit Ă OnĂ n : "Ăpouse la femme de ton frĂšre en vertu du lĂ©virat, afin de constituer une postĂ©ritĂ© Ă ton frĂšre."
9 OnĂąn comprit que cette postĂ©ritĂ© ne serait pas la sienne ; et alors, chaque fois quâil approchait[Note 1] de la femme de son frĂšre, il corrompait sa voie, afin de ne pas donner de postĂ©ritĂ© Ă son frĂšre.
10 Sa conduite dĂ©plut au Seigneur, qui le fit mourir de mĂȘme.
11 Et Juda dit Ă Thamar, sa belle fille : "Demeure veuve dans la maison de ton pĂšre, jusquâĂ ce que mon fils ChĂ©la soit plus grand," car il craignait quâil ne meure, lui aussi, comme ses frĂšres. Et Thamar sâen alla demeurer dans la maison de son pĂšre.
12 Longtemps aprĂšs mourut la fille de Choua, femme de Juda. Quand Juda se fut consolĂ©, il alla surveiller la tonte de ses brebis, avec Hira son ami lâAdoullamite, Ă Timna.
13 On informa Thamar en ces termes : "Ton beau pĂšre monte en ce moment Ă Timna pour tondre ses brebis."
14 Elle quitta ses vĂȘtements de veuve, prit un voile (tsaĂŻf) et sâen couvrit[Note 2] ; et elle sâassit au carrefour des Deux Sources (peta'h einayim)[Note 3], qui est sur le chemin de Timna. Car elle voyait que ChĂ©la avait grandi et quâelle ne lui avait pas Ă©tĂ© donnĂ©e pour Ă©pouse.
15 Juda, lâayant aperçue, la prit pour une prostituĂ©e (zona) ; car elle avait voilĂ© son visage.
16 Il se dirigea de son cÎté et lui dit : "Laisse moi te posséder." Car il ignorait que ce fût sa belle fille. Elle répondit : "Que me donneras-tu pour me posséder ?"
17 Il rĂ©pliqua : "Je tâenverrai un chevreau de mon troupeau." Et elle dit : "Bien, si tu me donnes un gage (eravon) en attendant cet envoi."
18 Il reprit : "Quel gage te donnerai-je ?" Elle rĂ©pondit : "Ton sceau, ton cordon et le bĂąton que tu as Ă la main." Il les lui donna, il approcha dâelle et elle conçut de son fait.
19 Elle se leva et partit ; elle quitta son voile et reprit les vĂȘtements de son veuvage.
20 Juda envoya le chevreau par lâentremise de son ami lâAdoullamite, pour retirer le gage des mains de cette femme ; il ne la trouva point.
21 Il questionna les gens de lâendroit, disant : "OĂč est la prostituĂ©e (qdesha[Note 4]) qui se tient aux Deux Sources, sur le chemin ?" Ils rĂ©pondirent :"Il nây a point de prostituĂ©e ici."
22 Il retourna auprĂšs de Juda et dit : "Je ne lâai pas trouvĂ©e ; et mĂȘme les habitants de lâendroit ont dit quâil nây avait point lĂ de prostituĂ©e."
23 Et Juda dit : "Quâelle garde ce quâelle a et que nous nâayons pas Ă rougir ; car enfin, jâai envoyĂ© ce chevreau et tu nâas pu la trouver."
24 Or, environ trois mois aprĂšs, on informa Juda, en disant :"Thamar, ta bru, sâest prostituĂ©e et elle porte dans son sein le fruit de la dĂ©bauche." Juda rĂ©pondit : "Emmenez la et quâelle soit brĂ»lĂ©e !"
25 Comme on lâemmenait, elle envoya dire Ă son beau pĂšre : "Je suis enceinte du fait de lâhomme Ă qui ces choses appartiennent." Et elle dit : "Examine, je te prie, Ă qui appartiennent ce sceau, ces cordons et ce bĂąton."
26 Juda les reconnut[Note 5] et dit : "Elle est plus juste que moi, car il est vrai que je ne lâai point donnĂ©e Ă ChĂ©la mon fils." Cependant il cessa, dĂšs lors, de la connaĂźtre.
27 Or il se trouva, lors de son enfantement, quâelle portait des jumeaux dans son sein.
28 Au moment de sa dĂ©livrance, lâun dâeux avança la main ; la sage femme la saisit et y attacha un fil dâĂ©carlate, pour indiquer que celui ci Ă©tait nĂ© le premier.
29 Comme il retirait sa main, voici que son frÚre vint au monde. Elle dit : "Avec quelle violence tu te fais jour !" Et on lui donna le nom de Péreç (la « BrÚche »).
30 Ensuite naquit son frĂšre, dont la main portait le fil dâĂ©carlate. On lui donna le nom de ZĂ©rah. »
â Bible HĂ©braĂŻque / Tanakh / Ancien Testament, GenĂšse, chapitre 38 (Bible du Rabbinat)
Structure
Les trente versets du récit sont organisés en chiasme autour de la rencontre entre Tamar et Juda à Einayim[Note 6] :
- 38:1-5 : les enfants de Juda et la fille de Choua, Ă Adullam
- 38:6-11 : aprĂšs la mort des premiers enfants, Juda parle Ă Tamar et la renvoie chez son pĂšre
- 38:12-14 : Tamar met en Ćuvre un stratagĂšme destinĂ© Ă piĂ©ger Juda
- 38:15-18 : Tamar et Juda se rencontrent, dialoguent et se connaissent (charnellement)
- 38:19-23 : Tamar s'en retourne ; Juda est mystifié une nouvelle fois
- 38:12-14 : Tamar met en Ćuvre un stratagĂšme destinĂ© Ă piĂ©ger Juda
- 38:24-26 : sortie de chez son pĂšre pour ĂȘtre mise Ă mort avec ses enfants Ă naĂźtre, Tamar parle Ă Juda
- 38:6-11 : aprĂšs la mort des premiers enfants, Juda parle Ă Tamar et la renvoie chez son pĂšre
- 38:27-30 : les enfants de Juda et Tamar.
Gn 38:1-5 prĂ©sente une succession rapide de naissances, ce qui pourrait indiquer quâelles ne constituent pas lâintrigue principale mais servent Ă la mettre en valeur[2]. Cette section partage avec Gn 38:27-30 les thĂšmes et termes associĂ©s Ă la naissance et la nomination dâenfants (y-l-d « enfanter », y-áčŁ-ÊŸ « sortir », q-r-ÊŸ « appeler », ĆĄ-m « nom »). Toutefois, les noms des premiers enfants sont Ă double sens[3], alors que ceux des seconds enfants â qui apparaissent comme en compensation des premiers[4] â sont exclusivement positifs.
Gn 38:6-11 et 38:24-26 convoient tous deux lâidĂ©e du chĂątiment des fautes aprĂšs jugement, humain ou divin, bien quâEr et Onan aient vĂ©ritablement fautĂ© tandis que Juda reconnait finalement la justesse de Tamar.
Gn 38:12 (« Longtemps aprĂšs⊠Juda⊠monta »), construit sur le modĂšle de Gn 38:1 avec une clause temporelle et un mouvement (« en ce temps-lĂ , Juda descendit de ses frĂšres »), marque un nouveau dĂ©part et le verset 38:13 (« On informa Tamar, (litt.) en disant ») annonce le verset 38:24 (« on informa Juda, en disant ») tant dâun point de vue lexical que causal. Gn 38:16 (litt. « il se dĂ©tourna vers elle sur la route ») reproduit quant Ă lui Gn 38:1 (litt. « il se dĂ©tourna vers un homme dâAdullam »). La symĂ©trie entre Gn 38:12-14 et 38:19-23 se retrouve par ailleurs jusque dans la structure des versets 38:14 (« elle sâassit Ă lâentrĂ©e dâEinayim sur la route de Timna ») et 38:21 (« OĂč est la prostituĂ©e qui se tient Ă Einayim, sur la route ? ») ainsi que 38:14 (« Elle retira ses vĂȘtements de veuve, prit un voile et s'en couvrit ») et 38:19 (« elle retira son voile et (litt.) se revĂȘtit des vĂȘtements de son veuvage »). Gn 38:14 (« car elle voyait que ChĂȘla avait grandi et qu'elle ne lui avait pas Ă©tĂ© donnĂ©e pour Ă©pouse ») renvoie en outre Ă Gn 38:26 (« car il est vrai que je ne l'ai pas donnĂ©e Ă ChĂȘla mon fils »)[5].
Le don (n-t-n « donner[Note 7] ») se retrouve sous diverses formes Ă travers le rĂ©cit, ainsi que la procrĂ©ation (b-w-ÊŸ ÊŸ-l « venir Ă [Note 1] ») et la conception (h-r-h « concevoir »), en particulier dans le membre central du chiasme, Gn 38:15-18, lui-mĂȘme construit en chiasme autour de ces mots-clĂ©s et du gage (« Que me donneras-tu pour (litt.) venir Ă moi ?⊠si tu me donnes un gage⊠quel gage te donnerai-je ?⊠II les lui donna, (litt.) vint Ă elle »)[6].
Le rĂ©cit qui dĂ©bute par trois naissances et se termine sur une double naissance, semble avoir privilĂ©giĂ© le thĂšme de la perpĂ©tuation de la lignĂ©e, qui occupe donc une place centrale tant dans la structure interne du rĂ©cit que dans le livre de la GenĂšse[7] ; câest Ă lâaune de celle-ci que sont jugĂ©s ses acteurs â la tromperie dâOnan qui feint dâappliquer le lĂ©virat mais refuse en rĂ©alitĂ© de donner une descendance Ă son frĂšre, lui vaut la mort tandis que la ruse de Tamar qui trompe par deux fois son beau-pĂšre, est sanctionnĂ©e favorablement, tant par la providence â qui veille au bon accomplissement de chacune de ses phases et suscite des jumeaux â que par Juda qui reconnaĂźt la plus grande justesse de sa bru puisque la descendance quâil lui a refusĂ©e et quâelle sâest Ă©vertuĂ©e Ă obtenir, lui revenait de droit[8].
Traitements intra-bibliques du récit de Juda et Tamar
Le récit dans son contexte
Passant abruptement de Joseph Ă Juda, Gn 38 demeure liĂ© dans ses thĂšmes et termes Ă son contexte immĂ©diat (Gn 37 et 39) ainsi quâau reste du cycle des fils de Jacob (Gn 34-50)[9]: la « descente » (Gn 38:1) situe le rĂ©cit de Juda entre celui de son pĂšre Jacob (Gn 37:35 : « je descendrai vers mon fils, endeuillĂ© dans la Tombe », Gn 45:9 : « (litt.) Descends vers moi, ne demeure pas » & Gn 46:3-4 : « Ne crains pas de descendre en Ăgypte⊠je descendrai avec toi ») et celui de son frĂšre Joseph (Gn 39:1 : « Joseph fut donc (litt.) descendu en Ăgypte »); la rencontre de Juda avec un homme adullamite (GenĂšse 38:1) puis un homme cananĂ©en (GenĂšse 38:2)/ et celle de Joseph avec un homme Ă©gyptien (Gn 39:1) accentuent la comparaison[10] - [11] - [12].
Le rĂ©cit commence favorablement pour Juda, avec une sĂ©rie de naissances en succession rapide, alors que Joseph commence au plus bas. Cependant, Dieu intervient dans la destinĂ©e de Juda non pour « faire prospĂ©rer lâĆuvre de ses mains » (Gn 39:2-3) mais pour mettre Er son fils ainĂ© Ă mort (Gn 38:7). Contrairement Ă Jacob qui demeure inconsolable, Juda rĂ©agit immĂ©diatement en remariant sa bru Ă son second fils, Onan[13]. Comme Juda qui avait sauvĂ© la vie de Joseph « car il est notre frĂšre », Onan assume une responsabilitĂ© familiale de façade en « [venant] Ă la femme de [s]on frĂšre afin de donner une postĂ©ritĂ© Ă [s]on frĂšre » mais en substance, « lorsquâil [vient] Ă la femme de son frĂšre », Onan abuse son pĂšre et corrompt sa semence « afin de ne pas donner de postĂ©ritĂ© Ă son frĂšre » pour des considĂ©rations matĂ©rielles (ses droits sur le patrimoine) de mĂȘme que Juda avait proposĂ© de vendre Joseph Ă des marchands ambulants pour en retirer un avantage financier, avant de tromper son pĂšre (Gn 37:26-27 & 38:8-9)[14]. AprĂšs avoir perdu deux fils, Juda accuse le coup et refuse dâunir ChĂȘla Ă Tamar « de crainte quâil ne meure ⊠comme ses frĂšres » (Gn 38:11), de mĂȘme que Jacob refusera de laisser Benjamin descendre en Ăgypte, « car son frĂšre est mort » (Gn 42:38)[15]. La compassion de Juda ne sâĂ©tend nĂ©anmoins pas Ă sa bru, quâil condamne sciemment Ă vivre en marge dâune sociĂ©tĂ© patriarcale oĂč elle n'est ni Ă©pouse ni mĂšre[16], et il se console assez rapidement de la disparition de son Ă©pouse[17] : si Jacob « refusa dâĂȘtre consolĂ© et dit : "Non car je descendrai vers mon fils"... » (Gn 37:35), Juda, devenu veuf, « (litt.) se consola et monta vers ses tondeurs » (Gn 38:12)[13].
Lorsquâelle apprend la venue de son beau-pĂšre Ă Timna, Tamar se dĂ©fait des habits qui la marquent comme veuve (Gn 38:14) tout comme les frĂšres ont ĂŽtĂ© la tunique permettant dâidentifier Joseph (Gn 37:23)[18]. Ce thĂšme du vĂȘtement identificateur revient en Gn 39 oĂč la femme de Potiphar arrache la tunique de Joseph ainsi quâen Gn 41 lorsque le roi dâĂgypte dote Joseph dâhabits royaux[19]. Les termes employĂ©s par Juda pour approcher la prostituĂ©e (Gn 38:16) rappellent ceux de Jacob lorsquâil sâapprĂȘte Ă connaĂźtre Rachel (avant dâĂȘtre trompĂ© par Laban qui lui donne LĂ©a)[20]. Pour leurrer Juda, qui a trompĂ© son pĂšre en envoyant la tunique de Joseph barbouillĂ©e du sang dâun bĂ©lier (seĂŻr izim), Tamar demande Ă se faire envoyer un chevreau (gdi izim) en salaire[18]. Alors que Joseph conservera sa vertu face Ă une femme des plus insistantes, Juda sâabandonne Ă une relation passagĂšre avec une « prostituĂ©e »[17].
Environ trois mois plus tard, le plan de Tamar atteint sa conclusion. Comme preuves de son adultĂšre supposĂ©, Gn 38:25 utilise la mĂȘme syntaxe et les mĂȘmes termes que Gn 37:32 pour prĂ©senter les preuves de la mort supposĂ©e de Joseph (« ils envoyĂšrent/elle envoya », « Reconnais donc/reconnais donc »)[18]. Juda a failli lĂ oĂč Joseph nâa pas fautĂ©[17] mais il se rĂ©vĂšle Ă ce moment dans sa grandeur dâĂąme : celui qui avait, jusque lĂ , fait indument endosser Ă Tamar la responsabilitĂ© de ses malheurs, reconnait quâ« elle est plus juste que moi car [câest moi qui] ne lâai pas donnĂ©e Ă ChĂȘla mon fils ». Alors qu'il usait volontiers de faux-semblants et tenait Ă sa rĂ©putation impeccable, Juda admet publiquement ses torts, sans avoir Ă©tĂ© acculĂ© par Tamar qui ne l'a pas directement accusĂ©. Finalement, le patriarche qui se laissait guider par ses instincts, « cessa, dĂšs lors, de la connaĂźtre »[21].
Tamar est par contre apparue comme un personnage positif de bout en bout: elle sâest, certes, montrĂ©e aussi artificieuse que la femme de Putiphar et a mystifiĂ© son beau-pĂšre mais elle cherchait Ă accomplir le lĂ©virat comme le lui avait promis Juda, et non à « sâamuser », contrairement Ă lâĂgyptienne innommĂ©e (Gn 39:14 & 17)[22]. Tamar agit sous la contrainte des circonstances comme le reconnaĂźt Juda, et elle nâa compromis quâelle-mĂȘme tandis que la femme de Putiphar a nui par ses agissements Ă Joseph ; les preuves quâa produites Tamar rĂ©tablissent la vĂ©ritĂ© tandis celles de la femme de Potiphar accrĂ©ditent ses mensonges et Joseph finit une nouvelle fois au trou. La mĂȘme conclusion se dĂ©gage de la comparaison entre Rebecca et Tamar dans le contexte plus gĂ©nĂ©ral des rĂ©cits patriarcaux: toutes deux ont eu recours au dĂ©guisement et fait usage dâun chevreau pour leurs subterfuges afin dâobtenir ce que les hommes en position de force nâavaient pas lâintention de leur donner â une descendance pour Tamar, lâassurance pour Rebecca de voir Jacob recevoir la bĂ©nĂ©diction quâIsaac rĂ©serve Ă EsaĂŒ (he) â mais la matriarche a initiĂ© ce faisant un cycle familial de tromperies et entretenu le conflit entre frĂšres sur plusieurs gĂ©nĂ©rations, alors que Tamar y a mis fin[23].
DotĂ© dĂšs lors dâune dimension morale qui lui faisait jusque lĂ dĂ©faut[21], Juda emploiera ses talents de persuasion pour rĂ©unir la famille quâil avait fortement contribuĂ© Ă dĂ©sunir. Comme lors de la vente de Joseph, il dĂ©montre sa supĂ©rioritĂ© sur son frĂšre aĂźnĂ© Ruben en convainquant Jacob de laisser Benjamin accompagner ses frĂšres Ă la demande du vice-roi dâĂgypte qui retient SimĂ©on en otage : Ruben â considĂ©rant apparemment que la mort dâEr et Onan avait Ă©tĂ© le prix Ă payer pour la mort de Joseph â offre deux de ses fils en otage mais Jacob, qui a vĂ©cu la perte dâun fils contrairement Ă Reuben, ne peut accepter cette solution. Juda, qui a lui aussi connu cette Ă©preuve et a appris de Tamar lâimportance du gage (eravon, Gn 38:17-18), sâoffre lui-mĂȘme en garant (arev) de son frĂšre (Gn 43:9), emportant la confiance de son pĂšre. Il se montre prĂȘt Ă assumer ce rĂŽle en substance lorsque Joseph, qui a reproduit les conditions de sa vente en faisant accuser Benjamin de vol, donne la possibilitĂ© aux frĂšres de sâen retourner librement Ă Canaan en « vendant » leur frĂšre ; Juda, qui avait Ă©tĂ© le principal acteur dans cet Ă©pisode et avait brisĂ© le cĆur de son pĂšre en lui causant la perte d'un fils chĂ©ri, s'offre en esclave plutĂŽt que de voir Jacob descendre dans la Tombe ; son discours parle au cĆur de Joseph et le pousse Ă se rĂ©vĂ©ler[17] - [Note 8].
La naissance des jumeaux de Juda et Tamar, seul exemple de grossesse gĂ©mellaire dans la Bible avec la naissance de Jacob (Gn 25:21-26), reprend ses termes presquâĂ lâidentique (notamment, « (litt.) et voilĂ , des jumeaux (tomim/teomim) en son ventre » â Gn 25:24 & 38:27)[24]. Les jumeaux s'affrontent pour l'ordre de naissance (Gn 25:22 & 38:28-30) mais alors que la main de Jacob Ă©tait accrochĂ©e Ă celle de son frĂšre EsaĂŒ/Edom (Gn 25:26), la main de Zera'h, marquĂ©e dâun fil Ă©carlate, retourne dans lâutĂ©rus (Gn 38:28) ; Perets a ainsi pris l'ascendant sur lui non par la ruse, comme son grand-pĂšre Jacob, mais par la force. Zerah, lui, est doublement liĂ© Ă Edom, par la rougeur du fil Ă©carlate et par son homonymie avec lâun des petits-fils dâEsaĂŒ (Gn 36:13 & 17), dâautant que Dieu « est venu du SinaĂŻ et a brillĂ© (zaraâh) sur le SĂ©ĂŻr » (Dt 33:2) et SĂ©ir est un surnom du fils aĂźnĂ© dâIsaac car il naĂźt velu (cf. Gn 25:25). D'autre part, les enfants de Juda sont mis en parallĂšle avec ceux de Joseph lorsque Jacob inverse sur son lit de mort lâordre des deux fils de Joseph (mis sur le mĂȘme pied que les siens propres â Gn 48:5 â et bĂ©nis de Dieu contrairement aux premiers fils de Juda â Gn 48:15-16 & 20) ; Joseph tente lui aussi de rĂ©tablir lâordre de naissance par la force (Gn 48:13-17) mais seulement parce quâil met cette inversion sur le compte de la cĂ©citĂ© de son pĂšre. AprĂšs que Jacob lui a assurĂ© quâil sâagissait dâun choix volontaire (Gn 48:19), Joseph ne persĂ©vĂšre pas dans son attitude[25].
Ă lâheure du bilan, lorsque Jacob bĂ©nit ses fils (he), il loue encore Joseph, seul parmi ses fils Ă nâavoir pas succombĂ© dans lâĂ©preuve, contrairement Ă Ruben, qui a couchĂ© avec Bilha (Gn 35:22), SimĂ©on et Levi, qui se sont vengĂ©s dans la violence des habitants de Sichem (Gn 34), et Juda[26]. Cependant, arrivĂ© au quatriĂšme fils, le patriarche rappelle, aprĂšs avoir fait longuement allusion Ă sa premiĂšre famille â Er est figurĂ© par Êżiroh - lâĂąnon, Onan par [ben] atono - [le fils de] lâĂąnesse, ChelĂą par Shilo et la mort des aĂźnĂ©s par le « sang des vignes »[27] â que Juda sâest amendĂ© Ă la suite de ses dĂ©mĂȘlĂ©s avec Tamar et que son emprise sur ses frĂšres, dĂ©jĂ Ă©vidente lors de la vente de Joseph, nâa cessĂ© de croĂźtre depuis lors, particuliĂšrement lors du rachat de Benjamin. Câest donc entre ses mains que demeurera le sceptre (litt. bĂąton), lui que ses frĂšres « reconnaĂźtront » et câest devant lui, non Joseph, quâils sâinclineront (Gn 49:8)[28].
Le récit et ses échos bibliques
Juda comme Samson sont des hĂ©ros imparfaits, dont la grandeur ou les hauts faits nâempĂȘchent pas les errements, en particulier avec les femmes. Celles-ci sont volontiers dĂ©crites comme des ĂȘtres rusĂ©s et vindicatifs qui mĂšnent lâhomme trop sĂ»r de lui Ă sa perte ; cependant, cet homme, acculĂ©, se rĂ©vĂšle dans toute la grandeur de son caractĂšre ou de sa force[TableB 1]
Au-delĂ de son contexte immĂ©diat, Gn 38 est succinctement mentionnĂ© dans lâĂ©numĂ©ration des fils dâIsraĂ«l descendant en Ăgypte (Gn 46:12), dans celle de ceux qui en sortent (Nb 26:19) et dans la liste des descendants de Juda (2 Chr 2:3-4). Lâun de ses thĂšmes majeurs, le yibboum (lĂ©virat), est Ă©galement dĂ©veloppĂ© en Dt 25:5-10 qui ne met cependant plus lâaccent sur la perpĂ©tuation de la lignĂ©e mais sur le bien-ĂȘtre de la femme, laquelle a, contrairement Ă Tamar, la possibilitĂ© d'en rĂ©fĂ©rer aux juges locaux ou de pratiquer la cĂ©rĂ©monie du dĂ©chaussement si son beau-frĂšre refuse de sâunir Ă elle[29] - [Note 9]. La plupart des rĂ©fĂ©rences bibliques Ă lâhistoire de Juda et Tamar â qui constitue son plus ancien niveau d'interprĂ©tation â sont cependant moins directes, et se font par le biais de parallĂšles littĂ©raires, directs ou inversĂ©s, de jeux de mots ou de sonoritĂ©s.
Comme Juda, Samson sâentiche dâune Ă©trangĂšre, en lâoccurrence une Philistine de Timna, et ses parents dĂ©sapprouvent â comme, sans doute, le narrateur â ce projet dâunion mais ils ne savent pas que, contrairement Ă Juda, lâattrait du Danite pour la Philistine « venait de Dieu [qui] cherchait une occasion de nuire aux Philistins » (Jg 14:4). La condamnation des mariages mixtes se retrouve aussi chez Mic 1:14-15 et Mal 2:11-12 : le premier Ă©voque Gn 38 par les toponymes dâAdullam et Akhziv, jouant de surcroĂźt sur le toponyme Akhziv et lâadjectif akhzav â qui indique la « dĂ©ception » ou la « tromperie » â pour faire savoir tout le mal quâil pense de la descente de Juda parmi les Ă©trangers ; le second vocifĂšre contre les JudĂ©ens qui ont ramenĂ© de leur exil Ă Babylone des conjointes non-juives, unissant dans une mĂȘme imprĂ©cation la nation de Juda qui « a trahi âŠ, profanĂ© ce qui est sacrĂ© devant YHWH », et son patriarche Ă©ponyme qui « a Ă©pousĂ© la fille dâun dieu Ă©tranger », souhaitant que Dieu retranche des tentes de Jacob lâ« ĂȘtre veillant et parlant (Êżer vĂšÊżonĂš) » qui fait allusion Ă Er et Onan[30]. Professant apparemment la position inverse, le Chroniste mentionne factuellement et sans jugement lâunion de Juda Ă Bat Choua la CananĂ©enne ainsi que les enfants qui en sont nĂ©s â y apparaĂźt aussi un autre Er, fils de ChelĂą qui a apparemment tenu Ă ce que le nom de son frĂšre soit prĂ©servĂ©.
La Bible Ă©voque plusieurs fois Er, mentionnant ou non sa mort mais sans jamais y mĂȘler Dieu et, partant, sans expliquer pourquoi Er fut mauvais Ă ses yeux. En revanche, le DeutĂ©ronome condamne le « gaspillage de semence » auquel se livrait Onan afin de ne pas fĂ©conder Tamar[29], le premier chapitre du livre de Samuel prĂ©sente Hophni et Phineas, les deux fils dĂ©voyĂ©s du prĂȘtre Eli qui maltraitent les femmes et mourront dans leur jeunesse de la main de Dieu[31], et le livre de Ruth prĂȘte au parent anonyme dâĂlimelekh le mĂȘme souci quâOnan de conserver son hĂ©ritage, pour se dĂ©gager â bien que sans dommage pour lui â de ses obligations de rachat selon une coutume qui ressemble au lĂ©virat (Ruth 4:16)[32].
LorsquâEli â qui ne voit pas les errements de ses propres fils â aperçoit dans son sanctuaire une femme qui se dĂ©sespĂšre de nâĂȘtre pas mĂšre, il « (litt.) la considĂšr[e] ivre » (1 Sam 1:13) tout aussi indument que Juda qui, apercevant la femme Ă Petaâh Einayim, « (litt.) la considĂ©ra prostituĂ©e » (Gn 38:15). Mis au fait de son erreur, Eli sâamende comme Juda et aidera la femme Ă atteindre son but[TableB 2].
StĂ©rile alors quâelle nâest pas infertile, la protagoniste a recours Ă une ruse Ă©rotique pour sĂ©duire un homme plus ĂągĂ© et, aprĂšs avoir donnĂ© naissance Ă un ancĂȘtre de la maison de David, disparaĂźt nommĂ©ment de la fin du rĂ©cit[33], ne jouant mĂȘme plus de rĂŽle actif lors de son accouchement, contrairement Ă la mĂšre des premiers enfants de Juda[34].
La tactique de Tamar ne consiste cependant pas Ă se rĂ©pandre en priĂšres ; ce nâest pas sans raison qu'on la prend pour une zona ou une qdesha, et la Bible interdira de telles pratiques parmi les filles dâIsraĂ«l (Dt 23:18)[35] - [Note 7]. Comme les filles de Lot (he), Tamar nâhĂ©site pas, pour assurer la continuation de la lignĂ©e, Ă obtenir frauduleusement la semence dâun homme qui nâen a pas conscience ni Ă se compromettre dans une relation que rĂ©prouverait le LĂ©vitique ; ces unions coupables produisent deux enfants (Moab et Ammon/Peretz et Zeraâh) et lâun de ces enfants fonde Ă son tour une lignĂ©e qui aboutit, via Ruth la descendante de Moab/Boaz le descendant de Peretz, au roi David[36].
Il semble d'ailleurs que le livre de Ruth, principalement fondĂ© sur Gn 19:30-38 et Gn 38, a eu pour but de prĂ©senter Ruth la Moabite, descendante des filles de Lot et Ă©quivalent littĂ©raire de Tamar, comme une version plus « acceptable » de ses modĂšles : Ă©trangĂšre Ă la nation israĂ©lite, Ruth se montre aussi rĂ©solue que Tamar Ă perpĂ©tuer la lignĂ©e familiale mais elle le fait pour NoĂ©mi et non pour elle-mĂȘme ; voulant sĂ©duire lâhomme convoitĂ©, elle change de vĂȘtements pour se rendre Ă la fois plus sĂ©duisante et moins identifiable mais elle le fait sur lâinjonction de sa belle-mĂšre et non de sa propre initiative ; elle dort auprĂšs de l'homme qui a bu mais attend son rĂ©veil ; elle donne finalement un enfant Ă Boaz mais seulement aprĂšs leur mariage ; la lignĂ©e davidique issue de Perets a donc bien mal commencĂ© mais elle sâest « corrigĂ©e » par la suite[37] - [TableB 3].
Quelques gĂ©nĂ©rations plus tard, lâhistoire de Juda et Tamar se rĂ©pĂšte avec celle de leur plus illustre descendant, le roi David : prenant de la distance avec ses frĂšres/SaĂŒl, Juda/David se rend/se rĂ©fugie Ă Adullam (Gn 38:1/1 Sam. 22:1). Il sâassocie avec Hira (Gn 38:1)/Hiram (1 Sam 5:11) et a une femme nommĂ©e Bat Choua (Gn 38:2 & 12, 1 Chr 2:3)/Bat Cheva (BethsabĂ©e, appelĂ©e Bat Choua en 1 Chr 3:5). Sa conduite vis-Ă -vis de Tamar/Urie le Hittite est moralement rĂ©prĂ©hensible et sa relation sexuelle avec sa bru/une femme mariĂ©e est Ă©galement embarrassante mais il ne semble pas sâen rendre compte. Cependant, lorsque Tamar/Nathan lâamĂšne Ă le reconnaĂźtre par une voie dĂ©tournĂ©e, sa rĂ©action est immĂ©diate, lapidaire et sans dĂ©robade : « Elle est plus juste que moi » (Gn 38:26)/« Jâai pĂ©chĂ© envers YHWH » (2 Sam 12:13)[38] - [TableB 4].
David sâest rachetĂ© et ne sera pas chĂątiĂ© lui-mĂȘme mais le premier fils quâil aura eu de BethsabĂ©e mourra rapidement, et Nathan prophĂ©tise la discorde parmi ses enfants. BientĂŽt, son fils Amnon viole sa fille Tamar (2 Sam 13) : bien que ce rĂ©cit et sa figure centrale prĂ©sentent davantage de ressemblances avec Gn 37 et Joseph respectivement[39], un associĂ© (reâa), Hira (Gn 38:12)/Jonadab (2 Sam 13:3), est impliquĂ© dans les deux trames, ainsi que les motifs du subterfuge (Tamar se fait passer pour une prostituĂ©e/Amnon se fait passer pour malade) et du vĂȘtement symbolisant le changement dâĂ©tat (la premiĂšre Tamar retire ses vĂȘtements de veuve avant de passer Ă lâaction pour les remettre aussitĂŽt aprĂšs lâobtention des gages/la seconde Tamar dĂ©chire sa tunique aprĂšs avoir Ă©tĂ© violĂ©e). La fĂȘte de la tonte est aussi cruciale pour le plan de Tamar en vue dâattirer et sĂ©duire Juda (Gn 38:12) quâelle lâest pour Absalom â frĂšre de la seconde Tamar et pĂšre de la troisiĂšme â en vue dâattirer et tuer Amnon qui a souillĂ© lâhonneur de sa sĆur (2 Sam 13:23). Enfin, la bru de Juda et sa lointaine descendante homonyme ont toutes deux eu ou subi des relations avec un proche parent dont la Bible interdit de dĂ©couvrir la nuditĂ©, qui avec son beau-pĂšre, qui avec son demi-frĂšre (cf. Lv 18:15-16)[40].
Des gĂ©nĂ©rations plus tard, JĂ©rusalem est assiĂ©gĂ©e puis vaincue par le royaume de Babylone, et lâon y exile lâĂ©lite dirigeante du royaume de Juda, parmi laquelle se distinguent Daniel, remarquĂ© par le pouvoir pour ses dons dâoniromancie comme autrefois Joseph, et ses trois compagnons, Hanania, MishaĂ«l et Azaria. Dans le trente-huitiĂšme chapitre du livre de la GenĂšse/troisiĂšme chapitre du livre de Daniel, Joseph/Daniel est absent ; sommĂ©s de se prosterner devant une statue dâor, les trois compagnons de Daniel refusent et, comme Juda lorsquâil apprend le dĂ©vergondage supposĂ© de sa bru, Nabuchodonosor ordonne de les jeter au feu (Gn 38:24/Dan 3:6) ; Tamar/les trois compagnons rĂ©agissent Ă la sentence en proclamant leur droiture (Gn 38:25/Dan 3:17-18). Contrairement Ă Tamar, les compagnons sont jetĂ©s dans le brasier quâon a fait chauffer sept fois plus quâil nâest nĂ©cessaire, mais pour eux comme pour elle, la situation se renverse et elle/ils sont sauvĂ©s de la fournaise, tandis que Juda/Nabuchodonosor admet ses torts (Gn 38:26/Dan 3:28-29). Tamar/les trois vertueux se voient rĂ©compensĂ©s par la naissance de jumeaux (Gn 38:27-30)/des faveurs royales (Dan 3:30)[41].
Des jumeaux de Tamar, Zerah nâest mentionnĂ© que dans le livre de JosuĂ© lors de lâinconduite de son descendant Akhan. En revanche, Perets et les mots construits sur la racine p-r-áčŁ apparaissent de façon prĂ©pondĂ©rante dans les alĂ©as de la famille royale, pour dĂ©crire le jaillissant roi David ou son effronterie (1 Sam 25:10), Ă©voquer lâirruption dâAbsalom devant son pĂšre (2 Sam 13:25 & 27)[42] ou faire allusion au Messie dont les prophĂ©ties assurent quâil proviendra de la maison de David (Mic 2:12-13, Amos 9:11)[43].
Lectures de lâĂšre antique
LâĂšre du Second Temple qui fait suite Ă la pĂ©riode de la Bible, donne lieu Ă un foisonnement dâidĂ©es et une riche littĂ©rature dont seuls quelques livres seront consacrĂ©s dans le canon biblique. Les autres sont le produit de sectes qui interprĂštent, rĂ©Ă©crivent ou parfois oblitĂšrent GenĂšse 38 de la Bible selon leurs idĂ©es propres (ce fut notamment le cas des sectaires Ă lâorigine des manuscrits de la mer Morte[44]).
Câest aussi une pĂ©riode oĂč de nombreuses communautĂ©s juives se sont dispersĂ©es dans le bassin mĂ©diterranĂ©en, et ne pratiquent plus lâhĂ©breu, ce qui suscite un besoin de traductions â les Targoumim pour les Juifs aramĂ©ophones, la LXX ainsi que, plus tard, les traductions dâAquila de Sinope, Symmaque ou ThĂ©odotion pour les hellĂ©nophones. Or, comme la plupart des textes bibliques, le rĂ©cit de Juda et Tamar fait usage de nombreux termes et tournures de phrase difficiles, Ă lâexemple de Gn 38:3-5 et 29-30 dont il existe plusieurs variantes entre divers manuscrits et traductions, Ă mi-chemin entre transmission et interprĂ©tation[45]. Le contexte culturel, typiquement sĂ©mite, pose parfois problĂšme, notamment en Gn 38:6 oĂč un pĂšre « prend femme » pour son fils, en Gn 38:8 oĂč il est question du « yibboum », et en Gn 38:17-18 oĂč les partenaires sâĂ©changent un « eravon », usages aussi inconnus que les termes dans le monde grĂ©co-romain[46] (les Grecs connaissent certes lâarrabĂŽn, introduit vers le quatriĂšme siĂšcle avant lâĂšre chrĂ©tienne par des marchands phĂ©niciens mais il a le sens dâarrhes et non de gage ou garantie[47]). Un problĂšme similaire survient avec les lieux-dits comme Kezib, la ville Ă©voquĂ©e lors du troisiĂšme enfantement de la femme de Juda, et le lieu de la rencontre entre Juda et Tamar, Peta'h einayim car les pĂšres et les maĂźtres transmettent Ă leurs fils et leurs disciples que ces noms convoient plus quâune information gĂ©ographique[45] - [48].
Les plus grands enjeux de lâinterprĂ©tation et la traduction demeurent les questions soulevĂ©es par le texte mĂȘme : sachant que les rois de la nation juive sont nĂ©s de rapports discutables au vu des normes juives et â plus encore â grecques, d'aucuns accusent les protagonistes d'immoralitĂ© et d'autres les dĂ©fendent de toute critique, abordant aussi la question des rapports entre IsraĂ©lites et non-IsraĂ©lites, et le rĂŽle jouĂ© dans cette histoire par Dieu[49].
GenĂšse 38 dans la Bible samaritaine
Les Samaritains se constituent lors du retour Ă Sion aprĂšs que les JudĂ©ens, revenus de Babylone pour reconstruire leur temple, refusent de reconnaĂźtre lâidentitĂ© israĂ©lite de ces peuplades habitant lâancien royaume dâIsraĂ«l. Ils possĂšdent leur version propre du Pentateuque qui compose, avec le livre de JosuĂ©, la Bible samaritaine.
Les versions samaritaine et hĂ©braĂŻque du Pentateuque divergent principalement sur la question du sanctuaire, situĂ© selon les Samaritains au mont Gerizim avant mĂȘme que les IsraĂ©lites ne soient retournĂ©s Ă la terre promise alors que selon les Juifs, ce lieu sera dĂ©signĂ© par les rois David et Salomon comme JĂ©rusalem. Or la qissa (« passage » ou « histoire ») correspondant Ă Gn 38 nâa pas trait Ă cette controverse et les diffĂ©rences entre les deux textes, quâelles portent sur le texte mĂȘme ou sa prononciation, concernent principalement des points de grammaire. Toutefois, dans la Bible samaritaine, ce sont les femmes seules qui nomment les enfants[TableA 1].
La tradition samaritaine est trĂšs attachĂ©e Ă la lettre, et les traductions aramĂ©ennes de sa Bible â il en existe plusieurs versions â glosent peu sur le texte quâelles traduisent. Elles permettent surtout de lever lâĂ©quivoque sur des termes qui admettent en thĂ©orie plusieurs lectures, comme r-Êż-h-w (Gn 38:12): il pourrait ĂȘtre vocalisĂ© rÄÊżou (« son ami ») ou rouÊżou (« son berger ») mais les Samaritains lâont traduit par Êżavera ou rouÊżama â « son ami »[50].
GenĂšse 38 dans la Septante
La Septante, traduction de la Bible en grec complĂ©tĂ©e vers le deuxiĂšme siĂšcle avant lâĂšre chrĂ©tienne, est destinĂ©e aux communautĂ©s juives dâAlexandrie. Elle prĂ©sente des divergences parfois considĂ©rables avec le texte hĂ©braĂŻque, certaines sâexpliquant par les diffĂ©rences entre les textes-sources tandis que dâautres relĂšvent de choix exĂ©gĂ©tiques des traducteurs[51].
GenĂšse 38 sâouvre dans la Septante sur un « En ce temps-là » (egeneto) assez vague et ne faisant pas forcĂ©ment suite Ă Gn 37:36[52]. Hiras lâOdollamite nâest plus dĂ©signĂ© en Gn 38:12 comme lâassociĂ© ou ami de Judas mais son berger, et le patriarche prend pour Ă©pouse « la fille dâun homme appelĂ©e â et non "appelĂ©" â Saua ». Câest elle qui nomme ses trois enfants Er, Aunan et SelĂŽm (certains manuscrits tardifs portent SelĂŽn ou Siloam[53]), lesquels naissent tous Ă Chasbi oĂč elle se trouve (le texte hĂ©breu indique quâil â Juda ou, moins vraisemblablement, ChĂȘla â se trouve Ă Kezib lorsquâelle accouche). La Septante se distingue encore du texte hĂ©braĂŻque lorsque Thamar se rend aux portes dâAinan car elle voyait vu que « Selom son fils avait grandi et il ne la lui avait pas donnĂ©e pour femme » ; par ailleurs, elle rend vatitalaf par ekallĂŽpissato (« elle sâembellit » ou « se para »), plutĂŽt quâ« elle se voila ». Elle ajoute dâautre part en Gn 38:15 que Judas, lorsquâil la vit, « la prit pour une prostituĂ©e car elle couvrait sa face et il ne la reconnut pas ». Les gages quâil lui laisse jusquâau paiement sont une bague, un collier (ou une chaĂźnette) et un bĂąton. La Septante omet la distinction entre zona et qdesha, rendus par le mĂȘme pornĂš (qui est le degrĂ© le plus bas de la prostitution dans la sociĂ©tĂ© grecque antique[54]). Enfin, elle comprend le ma paratsta de la sage-femme non comme une exclamation (« comme tu tâes fait une brĂšche ! ») mais comme une question (« pourquoi as-tu brisĂ© la clĂŽture ? »)[TableA 2].
Une partie des variantes de la Septante par rapport au texte massorĂ©tique de Gn 38 relĂšve de traditions de lecture divergentes, expliquant notamment les diffĂ©rences de prononciation entre les noms des personnages (le waw en particulier, peut avoir valeur de voyelle en hĂ©breu tandis quâil est invariablement dans la Septante une consonne)[55].
Cependant, la plupart des Ă©carts entre les textes grec et hĂ©braĂŻque semble relever dâune intention exĂ©gĂ©tique, et beaucoup visent Ă relever le caractĂšre de Judas[56]: la diffĂ©rence entre ish et anthropon ainsi quâentre reĂ«hou et roĂ«hou a ainsi pour effet de minimiser lâimplication de Judas dans la sociĂ©tĂ© cananĂ©enne car un anthropon nâa pas la stature dâun ish[57], et un berger est un employĂ© plutĂŽt quâun compagnon[58]. De mĂȘme, signaler la prĂ©sence de la femme de Judas en un lieu donnĂ© lors de son enfantement est anodin tandis que le texte massorĂ©tique dĂ©nonce lâabsence du pĂšre de famille, figure angulaire de la sociĂ©tĂ© patriarcale, lorsque sa femme accouche[59]. La nomination des trois enfants par cette femme, elle-mĂȘme gratifiĂ©e par la Septante dâun nom propre et par lĂ -mĂȘme dâune prĂ©sence plus importante[60], tend Ă la mĂȘme fin: si la nomination de lâaĂźnĂ©, du troisiĂšme etc. incombe au pĂšre, alors le texte massorĂ©tique suggĂšre le dĂ©tachement Ă©motionnel de Juda vis-Ă -vis de sa famille mais si les enfants sont tous nommĂ©s, comme le veut la Septante, par leur mĂšre, il nâen est rien[59].
Les spĂ©cialistes de la Septante ont diversement expliquĂ© les changements apportĂ©s Ă Gn 38:14 par la volontĂ© dâestomper lâimmoralitĂ© des agissements de Thamar[61] ou dâen souligner lâaudace[62] tandis que lâajout Ă Gn 38:15 â qui rehausse indirectement la moralitĂ© de Judas en laissant entendre quâil nâaurait pas consenti Ă nĂ©gocier avec une prostituĂ©e mais quâil aurait eu moins de scrupules face Ă une femme de haut statut quoique de petite vertu[62] â proviendrait des mesures en vigueur Ă Alexandrie pour distinguer les prostituĂ©es des femmes respectables ; cependant, lâabsence de ces changements dans les textes samaritains tandis quâon en retrouve des Ă©chos dans lâensemble des sources juives, du livre des JubilĂ©s au Talmud de Babylone en passant par les Targoumim et le Midrash, pourrait indiquer quâils reflĂštent une tradition judaĂŻque qui veut dissocier le voile portĂ© par Thamar de la prostitution[Note 2]. Lâassimilation de la zona-prostituĂ©e et la qdesha Ă une mĂȘme pornĂš alors que la racine q-d-ĆĄ dĂ©note gĂ©nĂ©ralement la saintetĂ©, nâest pas due Ă une carence lexicale ni Ă l'ignorance des traducteurs car la Septante offre en Dt 23:18 une lecture dĂ©doublĂ©e du mot qdesha, rendu une premiĂšre fois par pornĂš et une seconde par telesphoros (« initiĂ©e »)[63] ; il est possible que les auteurs de la Septante nâaient pas voulu faire la distinction entre ces deux conditions[64] ou que le mot qdesha nâavait pas ici dâautre sens pour eux[Note 4]. Dâaucuns avancent que lâaversion de la Septante pour lâimmoralitĂ© des actes de Thamar quelle quâen soit la justification[Note 10], irait jusquâĂ mitiger la confession de Judas car il reconnaĂźt non pas ses torts mais les objets laissĂ©s en gage et sa dĂ©claration « Thamar est justifiĂ©e plutĂŽt que moi » aurait moins de force quâ« elle est plus juste que moi »[Note 11].
Jubilés XLI et autres écrits de Qumrùn
Le livre des JubilĂ©s, originellement composĂ© en hĂ©breu et Ă peu prĂšs contemporain de la Septante, occupe une place importante voire canonique dans les Ă©crits de la secte de QumrĂąn. Il sâappuie sur dâanciennes traditions, dont certaines se trouvent aussi dans la Septante, mais il sâĂ©carte considĂ©rablement du rĂ©cit biblique quâil rĂ©Ă©crit en fonction de ses fondements idĂ©ologiques, mettant en scĂšne un ange de la PrĂ©sence qui dĂ©voile Ă MoĂŻse lâhistoire du peuple dâIsraĂ«l de la crĂ©ation du monde Ă la rĂ©vĂ©lation sur le SinaĂŻ. Lâange divise le temps en jubilĂ©s qui font, selon la Bible, suite Ă sept « semaines » de sept annĂ©es et closent par consĂ©quent un cycle de quarante-neuf ou cinquante ans (Lv 25:8â13), chaque annĂ©e durant, selon le calendrier en vigueur dans cette secte, 364 jours.
DâaprĂšs cette chronologie, la vente de Joseph a lieu dans la sixiĂšme annĂ©e de la sixiĂšme semaine du quarante-quatriĂšme jubilĂ© tandis que le rĂ©cit de Juda et Tamar (JubilĂ©s XLI) se tient dans les annĂ©es de vaches grasses en Ăgypte ; il nâinterrompt donc pas lâhistoire de Joseph (JubilĂ©s XXXIX et XL), mais lui fait suite.
AprĂšs la vente de Joseph, les fils de Jacob prennent pour femme des AramĂ©ennes, Ă lâexception de SimĂ©on qui se reprendra vite et se choisira une seconde Ă©pouse aramĂ©enne (cf. Gn 46:10) et Juda dont la femme sâappelle Bat Choua la CananĂ©enne[Note 12] (JubilĂ©s LIV:27-28). Dans la deuxiĂšme annĂ©e de la deuxiĂšme semaine du quarante-cinquiĂšme jubilĂ©, soit dix-sept ou dix-huit ans plus tard (qui correspond Ă lâ« en ce temps-là » de Gn 38:1, compris comme « aprĂšs ces faits », ainsi quâen tĂ©moignerait lâĂąge dâEr lors de son mariage avec Tamar[65], Juda dont les JubilĂ©s ne prĂ©cisent pas qu'il est descendu de ses frĂšres ni quâil a pris la mesure des malheurs qui naissent de lâunion avec des CananĂ©ennes (tant la suite du texte est Ă©loquente), prend soin de trouver une fille dâAram pour son fils Er mais Er, contrariĂ© par son pĂšre dans son dĂ©sir de « prendre femme dans la parentĂ© de sa mĂšre », la hait et refuse de coucher avec elle ; comme « ce fils aĂźnĂ© [âŠ] Ă©tait mauvais », absolument mauvais selon les JubilĂ©s et non pas seulement « aux yeux de YHWH » comme en Gn 38:7[66], Dieu le tua. Juda dit alors Ă Onan d'accomplir le lĂ©virat mais lorsque celui-ci se rend dans la maison de la femme de son frĂšre, il dĂ©verse sa semence sur le sol pour les motifs invoquĂ©s dans la Bible et meurt de ce fait. Juda souhaite alors donner son troisiĂšme fils ChĂȘla Ă Tamar mais « Bat Choua, la femme de Juda ne laissa pas son fils Ă©pouser Tamar », et les JubilĂ©s dâenchaĂźner dans le mĂȘme verset que « Bat Choua, femme de Juda, mourut la cinquiĂšme annĂ©e de la semaine » (JubilĂ©s XLI:1-9).
Il sâĂ©coule un an avant que Juda ne monte assister Ă la tonte de ses brebis. Lâapprenant, Tamar se vĂȘt dâun voile, se pare[Note 2] et sâassoit aux yeux de tous Ă la porte de Timna. Juda la voit, la prend pour une prostituĂ©e et vient Ă elle mais, contrairement Ă la Bible, il conserve lâinitiative Ă tout moment et dĂ©cide du salaire ainsi que des objets quâil lui laisse en gage avant de remonter Ă son troupeau tandis quâelle revient vers son pĂšre. Juda lui envoie un berger dâAdullam â les JubilĂ©s lisent, comme la Septante, roĂ«hou au lieu de reĂ«hou or contrairement Ă Hira qui avait vraisemblablement assistĂ© au marchandage et avait Ă©tĂ© dĂ©pĂȘchĂ© en sa qualitĂ© de tĂ©moin oculaire, ce berger anonyme nâest pas prĂ©sent Ă la fĂȘte de la tonte[67] â mais il ne la trouve pas. Comme dans la Bible, Juda ne poursuit pas les recherches par crainte du scandale (JubilĂ©s XLI:10-18). Trois mois plus tard, apprenant la grossesse de sa bru, Juda se rend Ă la maison familiale de Tamar, demandant au pĂšre de celle-ci et ses frĂšres[Note 13] de la faire brĂ»ler car elle a commis lâimpuretĂ© en IsraĂ«l. Cependant, elle produit les preuves et Juda, les reconnaissant, dĂ©clare : « Tamar est plus juste que moi alors ne la brĂ»lez pas » et câest pourquoi elle ne fut pas donnĂ©e Ă ChĂȘla. Peretz et Zerah naissent un an plus tard (JubilĂ©s XLI:19-23).
Le livre Ă©pilogue sur les regrets qui assaillent Juda car il sait quâil a pĂ©chĂ© pour avoir dĂ©couvert la nuditĂ© de son fils. Sâabimant en priĂšres, il est finalement instruit en rĂȘve par les anges de la PrĂ©sence que le pardon lui a Ă©tĂ© accordĂ© en raison de son repentir « car il avait grandement transgressĂ© devant notre Dieu ; que celui qui agit ainsi et celui qui couche avec sa belle-mĂšre, quâon le brĂ»le au feu pour quâil soit brĂ»lĂ©, car il y a impuretĂ© et pollution sur eux ; quâon les brĂ»le au feu ». Lâange instruit MoĂŻse de proscrire aux enfants dâIsraĂ«l de brĂ»ler celui qui a couchĂ© avec sa belle-fille ou sa belle-mĂšre car il a commis lâimpuretĂ©[Note 14]. Dans le cas de Juda cependant, Tamar Ă©tait vierge car ses deux maris nâavaient pas couchĂ© avec elle, et la descendance de Juda ne serait pas retranchĂ©e du peuple (JubilĂ©s XLI:24-32).
JubilĂ©s XLI constitue lâune des plus anciennes tentatives de « rectification » de Gn 38 et plus prĂ©cidĂ©ment du rĂŽle que Juda y a jouĂ© : le livre ne sâĂ©tend pas sur la participation de Juda dans la vente de son frĂšre mais sur lâerreur gravissime quâil a commis ensuite lorsquâil a choisi dâĂ©pouser une CananĂ©enne[68]. Câest sur cette femme ataviquement perverse que les JubilĂ©s font retomber tout le poids des fautes que la Bible hĂ©braĂŻque attribue Ă Juda, et celui-ci en a pris la mesure car il veille particuliĂšrement Ă prendre pour son fils une AramĂ©enne â le lecteur averti comprendra quâelle est plus ou moins apparentĂ©e aux patriarches et de ce fait membre de lâ« engeance sainte »[69]. Comme Er puis Onan refusent dâavoir des rapports avec Tamar â les JubilĂ©s ne laissent, contrairement Ă la Bible, aucun doute sur ce point â et que seuls les rapports sexuels entĂ©rinent le statut lĂ©gal du mariage, il en ressort que Juda est vierge de tout soupçon dâinceste[70]. Sa bonne foi est irrĂ©prochable lorsquâil promet ChĂȘla Ă Tamar, et la tromperie vient de sa femme[71]. Lorsquâil se retrouve face Ă Tamar, qui a dĂ©cidĂ© de se faire passer pour une prostituĂ©e, Juda prend lâinitiative de lui offrir ses effets en gage alors que la Bible dĂ©peint le patriarche en proie Ă ses dĂ©sirs, menĂ© par une femme quâil dĂ©sire sans la connaĂźtre, au point de lui abandonner fĂ»t-ce temporairement ses piĂšces dâidentitĂ© pour un plaisir passager. Enfin, les dĂ©cisions contradictoires de Juda sont, dans les JubilĂ©s, le fruit dâune rĂ©flexion mĂ»rie et adaptĂ©e Ă toute circonstance : son premier arrĂȘt, condamnant Tamar au bĂ»cher, nâest pas une rĂ©action impulsive mais une sentence prononcĂ©e aprĂšs avoir retrouvĂ© la famille de Tamar en conformitĂ© avec le « jugement quâAbraham a ordonnĂ© Ă ses fils » pour les prostituĂ©es (cette loi attribuĂ©e Ă Abraham et Ă©noncĂ©e en JubilĂ©s XX:4, est propre au livre). Lorsque lâinnocence de Tamar est Ă©tablie en la matiĂšre, Juda rend son second arrĂȘt â câest bien lâinnocence de Tamar qui lây mĂšne et non sa propre culpabilitĂ© puisque seule Bat Choua/BedsouĂ«l est responsable de la situation[72]. Il dĂ©clare alors ce qui est dit en Gn 38:26 mais comme il nâa pas menti Ă Tamar et comptait lui donner son fils, la seconde partie de sa confession, « car je ne lâai pas donnĂ©e Ă ChĂȘla », doit devenir « câest pourquoi elle ne fut pas donnĂ©e Ă ChĂȘla » (JubilĂ©s XLI:22). Juda ressort dâautant plus noble quâil reconnaĂźt la « plus grande justesse » dâune femme qui sâest mise elle-mĂȘme dans cette situation par son impatience[73]. Cependant, Juda sait avoir mal agi en couchant avec sa bru et, assailli de remords, il sâafflige devant Dieu (JubilĂ©s XLI:24-25) â cette seconde confession est elle aussi inspirĂ©e de Gn 38:26, participant dâun mĂȘme esprit de contrition et suivant un mĂȘme schĂ©ma de reconnaissance-confession-abandon de la conduite fautive[74]. Dieu lui fait savoir par les anges que le pardon lui est accordĂ©, ce qui nâest pas sans soulever la question de la rĂ©alitĂ© de sa culpabilitĂ©: sâil y a eu, comme le dit JubilĂ©s XLI:26, une offense qui a nĂ©cessitĂ© le pardon divin et que celui-ci nâest survenu quâen raison du repentir du fauteur, pourquoi est-il dit en JubilĂ©s XLI:31-32 quâil nây a pas eu de vĂ©ritable faute puisque Tamar Ă©tait encore pucelle lors de ses rapports avec Juda (cf. JubilĂ©s XLI:2-6)[Note 15]?
Tamar ne bĂ©nĂ©ficie en revanche pas du mĂȘme traitement: elle est certes membre de lâengeance sainte mais les diffĂ©rentes interprĂ©tations de lâauteur pour justifier Juda, ont pour effet de rendre les actes de sa bru inexplicables. Dâautres documents retrouvĂ©s Ă QumrĂąn, oĂč elle nâest pas nommĂ©e mais lâallusion est Ă©vidente, tĂ©moignent indirectement mais plus franchement de la mĂȘme ambivalence: SaraĂŻ apparaĂźt dans le rĂȘve dâAbram sous les traits dâun tamara tandis que lui est figurĂ© par un cĂ©drat, et lorsquâelle enroule ses racines autour des siennes pour le protĂ©ger, il comprend quâil devra prĂ©tendre quâelle est sa sĆur pour quâon nâattente pas Ă sa vie (1Q20 (en) 19:14-16) ; la famille patriarcale pourra donc persister mais au prix dâune transgression dans les relations familiales[75]. Câest cet aspect subversif que retient lâauteur de 4Q184, un poĂšme sapiential essentiellement fondĂ© sur lâallĂ©gorisation de lâhĂ©rĂ©sie par la prostituĂ©e en Proverbes 7, et il affirme que la Tentatrice « par laquelle commencent toutes les voies de la perversion, » Ă©chafaude ses plans Ă la croisĂ©e des chemins[76]. Complexe dans une sociĂ©tĂ© qui cherche la simplicitĂ©, tricheuse dans une communautĂ© qui honnit le mensonge, sexuĂ©e dans une fraternitĂ© qui rĂ©vĂšre lâabstinence, Tamar ne sera, avant longtemps, plus que la personnification des Ă©cueils Ă lâidĂ©al ascĂ©tique des sectaires, et nombre de leurs livres de Torah auront excisĂ© Gn 38 du rĂ©cit[44].
Tamar et Juda selon Philon
GenĂšse 38 est interprĂ©tĂ© dans sept Ă©crits de Philon dâAlexandrie, un auteur et philosophe juif hellĂ©nisĂ© contemporain des dĂ©buts de lâĂšre chrĂ©tienne. Prenant gĂ©nĂ©ralement pour base le rĂ©cit tel quâil figure dans la Septante, Philon livre, plutĂŽt quâun commentaire complet ou suivi, des Ă©laborations distinctes et souvent sans lien entre elles, oĂč il utilise, sans souci de cohĂ©rence, divers passages du chapitre afin dâillustrer ses sermons dans lesquels lâexĂ©gĂšte judĂ©o-alexandrin, imbu de culture grecque et nourri de tradition juive, entend consacrer lâheureuse union entre doctrines de MoĂŻse et de Platon.
Dans Les vertus, § 220-222, Thamar permet Ă Philon dâillustrer la noblesse, que poursuivent non seulement les hommes, comme Abraham, mais aussi parfois les femmes. Comme Gn 38:6 ne dit rien dâelle, Philon peut en faire une native de Syrie-Palestine mais « bien quâĂ©trangĂšre, elle Ă©tait libre, nĂ©e de parents libres, qui peut-ĂȘtre nâĂ©taient pas obscurs ». ĂlevĂ©e au sein dâidoles, elle oublia son ignorance naturelle, « put [alors] apercevoir ⊠lâĂ©clat de la VĂ©ritĂ©, [et] dĂ©serta au pĂ©ril de sa vie pour passer dans le camp de la piĂ©tĂ©, faisant peu de cas de la vie si cette vie ne devait pas ĂȘtre belle », câest-Ă -dire consacrĂ©e tout entiĂšre Ă la Cause unique. On la donna en mariage Ă deux frĂšres, « lâun et lâautre mĂ©chants, Ă©pouse lĂ©gitime du premier, donnĂ©e au second » en vertu des statuts du lĂ©virat mais elle « garda pourtant sa vie de toute souillure, rĂ©ussit Ă obtenir le bon renom qui Ă©choit aux gens de bien et [serait] Ă lâorigine de la noblesse de ses descendants »[78].
Dans le Commentaire allĂ©gorique des lois III, § 69-75, lâexĂ©gĂšte explique quâ« Eir le premier-nĂ© de Judas fut mauvais aux yeux du Theos » (Gn 38:6) car son nom, Eir, signifie « [la] peau », câest-Ă -dire le corps, que le dualisme platonicien juge mauvais de nature et que Philon assimile au cadavre ; combien est vain Ă ses yeux lâathlĂšte qui veille au plaisir de son corps sans considĂ©ration pour lâĂąme qui le porte. Philon explique que câest par consĂ©quent Theos, « le nom de la bontĂ© de la Cause » â et non Kyrios, lâarbitre du monde, comme lâenseigne la Bible â qui a fait mourir Eir sans grief apparent contre lui car « il fallait, pour faire apparaĂźtre les choses meilleures, quâil y eĂ»t aussi la naissance de choses moins bonnes, produites par [âŠ] Theos ». Or Thamar signifie « palmier », le symbole de la victoire au combat mais câest la victoire de lâĂąme, Ă laquelle lâhomme dâesprit tente de parvenir en privilĂ©giant les plaisirs de lâĂąme sur ceux du corps. Il peut, lorsquâil a perfectionnĂ© son Ăąme, espĂ©rer « remporter les prix du combat [sâil a] pour femme Thamar, la belle-fille de Judas » mais lorsque « Judas prit pour Eir son fils aĂźnĂ© une femme dont le nom Ă©tait Thamar » (Gn 38:7), le contraire se produisit: Eir fut « aussitĂŽt trouvĂ© mĂ©chant et [âŠ] tuĂ© »[79].
Dans La postĂ©ritĂ© de CaĂŻn, § 180-181, Philon dĂ©nonce le plaisir intempĂ©rĂ© â le serpent dâĂden est un exemple de cet appĂ©tit pervers, et Aunan, le frĂšre dâEir-la-peau, en est un autre car « sachant que ce ne serait pas une descendance pour lui, [il] corrompait sa semence Ă terre lorsquâil allait vers la femme de son frĂšre » (Gn 38:9). Il dĂ©passe ce faisant « les bornes de lâamour de soi et de lâamour du plaisir[80] » car il est prĂȘt Ă rĂ©duire Ă rien « toutes les valeurs les meilleures, [sâil nâen tire] aucun profit: les Ă©gards pour les parents, la sollicitude pour la femme, lâĂ©ducation des enfants ⊠la prise en charge de la citĂ©, lâaffermissement des lois, la garde des bonnes mĆurs ⊠la piĂ©tĂ© envers Theos, en paroles et en action »[81].
Philon poursuit ce thĂšme dans Sur lâinchangeabilitĂ© de Dieu § 16-18: alors quâAnne nâa enfantĂ© que pour Theos, Aunan nâacceptait de procrĂ©er que pour lui-mĂȘme et il « ne cessa de dĂ©truire la catĂ©gorie des ĂȘtres raisonnables, la meilleure, avant de connaĂźtre la destruction complĂšte, chĂątiment fort juste et convenable » car il mettait Ă mal les valeurs prĂ©citĂ©es alors quâ« il [serait] glorieux de donner sa vie », fĂ»t-ce pour une seule dâelles, et « câest pourquoi Theos lâimpartial supprimera la funeste doctrine contre nature, dĂ©signĂ©e par Aunan » (Gn 38:10). Les passions humaines sont une autre source de corruption dans le monde, et la femme qui rencontre le prophĂšte Ălie (III Rois 17:9) est appelĂ©e veuve car elle a fait son deuil « non pas comme nous lâentendons, [de] son mari mais [âŠ] des passions qui corrompent et souillent la pensĂ©e, comme câest aussi le cas de Thamar »: devenue veuve, « elle reçoit lâordre de sâĂ©tablir dans la maison de son unique PĂšre et Sauveur » (Gn 38:11), pour lequel elle accepte de renoncer « Ă la sociĂ©tĂ© ⊠des mortels afin de vivre dans le veuvage des plaisirs humains ». Elle reçoit alors la semence divine et, pleine de germes de vertu, accouche et enfante de bonnes actions â câest aprĂšs cela quâelle remporte la victoire sur ses adversaires et porte une palme comme symbole de sa victoire car Thamar veut dire « palme » (§ 136-137)[82].
Dans Du commerce de lâĂąme, Philon tire parti de lâexpression eissĂšlein pros (« aller vers ») commune Ă Gn 16:4, 30:16 et 38:18 pour prĂ©senter Agar comme la science vers laquelle marche lâĂ©tudiant et LĂ©a comme la vertu qui part Ă sa rencontre mais Thamar, dĂ©peinte dans les § 124-126, reprĂ©sente une forme plus sophistiquĂ©e dâĂ©ducation qui met lâĂ©tudiant Ă lâĂ©preuve lorsquâelle sâasseoit Ă la croisĂ©e des chemins avec tous les atours de la prostituĂ©e, attendant le vĂ©ritable amant de la connaissance qui retirera son voile pour dĂ©couvrir et contempler la « beautĂ© remarquable de sa pudeur, de sa modestie, beautĂ© intacte, sans souillure, vĂ©ritablement virginale » â Philon sâest, pour les besoins de lâimage, Ă©cartĂ© de la Septante, dans son interprĂ©tation de petaáž„ einayim qui nâest plus « la porte dâAinan ». Cet amant, câest « le plus haut chef militaire, le roi, celui qui demeure joyeusement fidĂšle Ă son adhĂ©sion Ă Theos, Judas » qui, la voyant, se dĂ©tourna vers elle et lui dit: « âlaisse-moi [si tu le veux bien] aller vers toi â cette marque de courtoisie est lâĂ©quivalent philonien du hava na hĂ©braĂŻque ou de lâĂ©asĂłn me septantique[83] â, et examiner quelle est cette force voilĂ©e et pourquoi elle sâest ainsi prĂ©parĂ©eâ ». La conception qui sâensuit illustre, selon Philon, le double Ă©change qui sied Ă la science et lâamant car le synelabe de la Septante (« elle conçut de lui » â Gn 38:18) est ambigu et nâindique pas qui des partenaires a pris lâautre[Note 16].
Philon poursuit sur Gn 38:20-23 dans De la fuite, § 149-153: dĂ©sireux dâ« obtenir le bien le plus beau, la piĂ©tĂ© », Judas a donnĂ© « un cachet, un cordon, un bĂąton, Ă savoir la stabilitĂ© et la foi, le lien et lâaccord de la parole avec la vie et de la vie avec la parole, lâĂ©ducation droite et ferme sur laquelle il est utile de sâappuyer » mais il veut vĂ©rifier sâil lâa fait Ă bon escient car la femme Ă laquelle il les a donnĂ©es, « la vertu invincible qui sâirrite des prĂ©occupations dĂ©risoires des hommes, [celle dont] le nom est Thamar », avait agi comme une prostituĂ©e. Il dĂ©pĂȘche Ă cette fin son berger adullamite (anonyme) avec un chevreau qui figure un appĂąt matĂ©riel, voulant sâassurer quâelle se montrera digne de ces trĂ©sors spirituels en refusant le troc ; le messager ne trouvera pas « le bien dans la confusion de la vie » et, comme il cherche « dans toute la rĂ©gion du bien une Ăąme livrĂ©e Ă la prostitution, il apprendra expressĂ©ment quâil nây en a pas et quâil nây en avait pas auparavant ». Lâapprenant, Judas se rĂ©jouit, et il ne renouvelle pas ses efforts car il craint de sâattirer les moqueries en paraissant avoir fait des cadeaux indignes.
Philon revient sur le sens des objets dans Les songes II, § 44-45, oĂč il compare les babioles de gloriole quâa reçues Joseph du roi dâĂgypte, avec les cadeaux offerts Ă Thamar par Judas, le « roi dâIsraĂ«l, le Voyant »: elle nâa pas reçu un collier mais un cordonnet, « suite rĂ©guliĂšre des phases de lâexistence[,] enchaĂźnement naturel dâactivitĂ©s » et son anneau est « un sceau pour lâĂąme [par lequel Judas enseigne que Dieu] a mis sur lâensemble de lâunivers le sceau de lâimage et de lâidĂ©e, Son propre Logos ».
Ils sâĂ©lĂšvent dĂ©finitivement au rang de gages divins dans Les changements de nom, § 134-136, lorsque, par un renversement homilĂ©tique, le voile qui cachait le visage de Thamar (Gn 38:15) et lui avait permis de nâĂȘtre pas reconnue, devient un Ă©cran entre elle et celui qui la fĂ©conde, non plus Judas mais Dieu lui-mĂȘme[84] ; câest donc elle qui ne le voit pas, « tel MoĂŻse, quand il se dĂ©tourna prudemment pour ne pas voir Theos (Exode 3:6) » mais elle le reconnaĂźtra aux gages quâil lui a laissĂ©s, parce quâun mortel nâen donne pas de semblables: « Ă qui appartient lâanneau (Gn 38:25): la foi, le sceau de lâunivers, lâidĂ©e archĂ©typique par quoi toutes choses [informes] ont reçu la marque qui leur a imprimĂ© une forme? Ă qui est le collier: le monde, le destin, lâordre rĂ©gulier, la correspondance de tous les ĂȘtres avec le lien indissoluble quâils renferment? Ă qui est le bĂąton, [âŠ] lâĂ©ducation, le sceptre, la royautĂ©, Ă qui? ». Et Judas, « la disposition dâĂąme qui reconnaĂźt Theos, charmĂ© par ce quâelle dĂ©tient, ce quâil y a en elle de divinement inspirĂ© » Ă©noncera simplement quâ« âElle est justifiĂ©e pour la raison que je ne lâai donnĂ©e Ă aucun mortelâ (Gn 38:26), car il estime impie de souiller le divin par le profane ».
La conclusion de lâhistoire a Ă©tĂ© Ă©voquĂ©e dans Les vertus, § 222, oĂč il est dit que Thamar a eu des enfants nobles comme elle, et dans dâautres passages plus allĂ©goriques oĂč la vertu met au monde les bonnes actions, fruit des germes divins[84] - [85].
LâallĂ©gorisation extrĂȘme Ă laquelle Philon soumet le plus souvent Gn 38, a pu naĂźtre de sa perplexitĂ© devant le placement de ce chapitre[86] mais lâinterprĂšte lâa façonnĂ©e pour rĂ©pondre aux accusations dâune sociĂ©tĂ© qui, aprĂšs avoir briĂšvement louĂ© les doctrines du judaĂŻsme, critique ouvertement ses mĆurs. Ainsi, son excursus sur la mise Ă mort du premier fils de Juda par Theos, vise tant Ă rĂ©soudre une difficultĂ© interne â si Theos est, comme lâa enseignĂ© Philon Ă lâencontre du judaĂŻsme traditionnel, lâattribut de bontĂ© rattachĂ© Ă cet aspect de la Cause unique, comment a-t-il pu tuer ? â quâĂ nullifier ces attaques externes, et lâexĂ©gĂšte y parvient au moyen du midrash shem, une technique juive qui devine le devenir des personnages bibliques en interprĂ©tant leur nom â le jeu de mots adoptĂ© par la Bible hĂ©braĂŻque entre le nom dâEr et son anagramme, raÊż (« mauvais »), sâest perdu dans la traduction en grec, et Philon rapproche Eir de son paronyme hĂ©braĂŻque, Êżor (« la peau »)[Note 17], ce qui lui permet dâune part de traiter sa mort Ă la lumiĂšre des thĂ©matiques platoniciennes sur le combat entre lâĂąme et le corps, et de rĂ©concilier dâautre part la Loi de MoĂŻse avec la morale de la polis[87]. Il en est de mĂȘme pour la mort dâAunan, justifiĂ©e en le prĂ©sentant comme le pur et pire exemple des principes dâĂpicure[80], lesquels lâĂ©loignent de ses devoirs envers la famille, la citĂ© et ses traditions.
Judas est, conformĂ©ment Ă Gn 29:35, « celui qui connaĂźt » ou « reconnaĂźt, » prĂ©sentĂ© par Philon comme une figure idĂ©ale, en particulier lorsquâil le compare Ă Joseph â Judas, qui nâest du reste pas mentionnĂ© dans le traitĂ© oĂč Philon analyse la vente de Joseph, devient lâamant de la sagesse, câest-Ă -dire le philosophe dont le jugement nâest jamais pris en dĂ©faut.
Thamar ne rĂ©pond pas aux critĂšres philoniens de la femme idĂ©ale, soumise Ă son Ă©poux, mais elle nâest pas non plus de ces quasi-prostituĂ©es auxquelles Philon assimile gĂ©nĂ©ralement les femmes libres. LâexĂ©gĂšte a, une fois de plus, jouĂ© sur son nom quâil nâa toutefois pas associĂ© Ă la droiture du palmier comme en Ps 92:13 ni Ă sa stature comme en Cant 7:8 mais au phoĂŻnix, feuille de palme dont on orne le vainqueur des jeux et compĂ©titions grĂ©co-romaines â Thamar, câest la rĂ©compense qui attend celui qui a pu remporter les embĂ»ches et Ă©preuves sprituelles (Philon ne sâadresse pas aux femmes)[77].
Dans sa reprĂ©sentation de la rencontre entre Juda et Thamar, Philon mĂȘle une fois de plus traditions juives â la comparaison de Thamar Ă la Sagesse qui hĂšle les passants aux coins des routes, se fonde apparemment sur les points de rencontre textuels entre Gn 38:14 et Proverbes 8:1-3 dans leur version hĂ©braĂŻque[88] â et considĂ©rations hellĂ©nistiques sur lâĂ©ducation, ce qui lui permet de sublimer la sexualitĂ© du texte[89], et de prĂ©senter aux Gentils les Juifs comme une civilisation dâascĂštes, aux antipodes des accusations de luxure quâon formule constamment Ă leur Ă©gard dans la sociĂ©tĂ© alexandrine.
Câest aussi pour cette raison que Philon ne sâĂ©tend pas sur la progĂ©niture issue de cette union â lorsquâil nâallĂ©gorise pas, il se borne Ă signaler la noblesse de la descendance, dĂ©livrant un message subliminal dâautant plus favorable aux enfants nĂ©s dâunions mixtes, que câest Thamar lââallophylleâ, archĂ©type des prosĂ©lytes ou sympathisants, qui la leur a transmise ; lorsquâil allĂ©gorise, cette engeance est Ă©liminĂ©e de la dimension tangible car Thamar ayant atteint la stature des matriarches, dâAbraham et mĂȘme de MoĂŻse, elle retrouve la virginitĂ© qui permet sa fĂ©condation par le divin et la venue Ă terme de bonnes actions[90].
Tamar et Juda selon le Pseudo-Philon
GenĂšse 38 est Ă©voquĂ© dans le Liber Antiquitatum Biblicarum du Pseudo-Philon, un auteur juif proche des milieux rabbiniques dont lâĆuvre, traduite en latin avec divers traitĂ©s de Philon, semble avoir Ă©tĂ© rĂ©digĂ©e peu avant la destruction du second Temple de JĂ©rusalem.
Aux dĂ©buts de lâesclavage en Ăgypte, les Ăgyptiens ont ajoutĂ© aux dĂ©crets pharaoniques sur les nouveau-nĂ©s mĂąles des mesures dâesclavage pour les femmes. Les anciens dâIsraĂ«l dĂ©crĂštent conjointement un jeĂ»ne et la proscription des rapports conjugaux. Lorsquâil prend mesure de ces dĂ©crets, Amram refuse de sây conformer et enjoint aux HĂ©breux de se souvenir de « Tamar notre mĂšre », qui put cacher sa grossesse pendant trois mois.
Il rappelle alors que Tamar fit ce quâelle fit non par envie de forniquer mais afin de demeurer auprĂšs des enfants dâIsraĂ«l car elle prĂ©fĂ©rait mourir pour avoir pĂ©chĂ© en couchant avec son beau-pĂšre quâĂȘtre donnĂ©e Ă des Gentils. Sa grossesse devenue apparente, elle fut condamnĂ©e Ă mort mais elle affirma ses intentions en dĂ©clara ĂȘtre enceinte de celui auquel appartenaient « le bĂąton, lâanneau et la pelisse de chĂšvre[Note 18] » et, les faisant connaĂźtre, elle fut miraculeusement sauvĂ©e du pĂ©ril.
Amram conclut quâen agissant comme elle, les IsraĂ©lites conduiront peut-ĂȘtre Dieu Ă se manifester pour son peuple. Convaincus, ils retournent Ă leurs femmes, et lui se voit agrĂ©Ă© par Dieu qui dĂ©cide que lâenfant Ă naĂźtre dâAmram le servira pour toujours et quâil sera lâintermĂ©diaire par lequel Dieu rĂ©alisera des miracles pour la maison de Jacob (LAB IX:1-8).
La relecture de Gn 38 par le Pseudo-Philon se fonde sur le rapprochement entre les trois mois de la grossesse de Tamar et les « trois lunes » pendant lesquelles YokĂ©bed parvient Ă cacher MoĂŻse (Exode 2:2)[91]. Gn 38 est dissociĂ© non seulement de lâhistoire de Joseph mais de lâensemble du contexte patriarcal, et Juda est absent du Liber IX, ainsi que PharĂšs et Zara (le Pseudo-Philon les Ă©voque ailleurs dans son livre mais il ne mentionne cette fois pas Tamar[92])[93].
LâĂ©lision de tout ce qui concerne Juda â sa promesse non tenue, sa rencontre incongrue et son humiliation publique â Ă©limine ce qui pourrait ternir son image mais une allusion pourrait avoir subsistĂ© avec le dĂ©cret des anciens, qui condamnent comme Juda les femmes israĂ©lites Ă la stĂ©rilitĂ© de facto. Quant Ă Tamar, que le Pseudo-Philon a Ă©levĂ©e Ă la dignitĂ© de matriarche, elle est vraisemblablement IsraĂ©lite: bien que condamnables, ses actes sont excusĂ©s, louĂ©s et Ă imiter car ils ont permis de maintenir non seulement la continuitĂ© du peuple juif mais aussi son endogamie[94] ; le commentateur rappelle en outre que son plan avait reçu lâapprobation divine puisquâun miracle a Ă©tĂ© suscitĂ© pour la sauver[95].
Lâhistoire de Tamar et Juda dans les targoumim
Les targoumim (litt. « traductions »), dont la lecture accompagne celle de la Torah dans les synagogues oĂč se cĂŽtoient des Juifs de divers horizons doctrinaux sur base de leur ancestralitĂ© commune, offrent aux orants aramĂ©ophones une traduction de la langue liturgique quâils ne pratiquent plus. Cependant, ils sont aussi « explications », et amplifient nettement plus le texte que la Septante, insĂ©rant dans la narration ou leurs paraphrases des interprĂ©tations qui reflĂštent les attentes et prĂ©occupations de leurs auteurs â celles du Targoum Onkelos et du Targoum attribuĂ© Ă Jonathan ben Ouzziel ont leurs sources dans les collĂšges pharisiens puis rabbiniques mais le Targoum dit des NĂ©ophytes ainsi que divers manuscrits conservĂ©s dans les bibliothĂšques nationales ou fragments exhumĂ©s de la Gueniza du Caire, reflĂštent des opinions diffĂ©rentes. Sây ajoutent des targoumim dits supplĂ©mentaires (tossefta) qui constituent autant de notes marginales aux targoumim courants.
Gn 38:1 est ainsi restituĂ© dans le Targoum Pseudo-Jonathan par « Il arriva, en ce temps-lĂ , que Juda descendit de sa fortune, se sĂ©para de ses frĂšres et sâachemina etc. »[96]. Son Ă©pouse y devient « la fille dâun homme de commerce », tout comme dans plusieurs manuscrits du Targoum Onkelos mais non dans le Targoum des NĂ©ophytes, et le Pseudo-Jonathan ajoute que Juda ne lâa prise pour femme quâaprĂšs lâavoir convertie[97]. Elle lui donne trois enfants mais Er mourra Êżariri (« sans descendance »), Onan causera de lâaninout (« affliction ») Ă son pĂšre, et leur mĂšre nommera son troisiĂšme fils ChelĂą parce que son mari lâa dĂ©laissĂ©e (sheli) Ă Kezib, devenu dans la traduction Pasqat (« Cessation ») car elle cessera ensuite dâenfanter[98].
« Juda prit pour Er ⊠une femme, la fille du grand Sem, dont le nom Ă©tait Tamar ». Cependant, dit le Targoum Neofiti, Er « fit des choses mauvaises devant Dieu â il ne couchait pas, ainsi que lâajoute le Targoum Pseudo-Jonathan, selon les voies de la terre â et il mourut par dĂ©cret devant Dieu » car il avait, comme le dit plus clairement le Targoum Pseudo-Jonathan, excitĂ© « de la sorte le courroux de Dieu, si bien que Dieu le tua »[99]. Juda demande alors Ă Onan de donner Ă sa semence le nom de son frĂšre mais celui-ci refuse ; ce quâil fait le rend mauvais devant Dieu, et Dieu le fait mourir, lui aussi, par dĂ©cret divin (selon le Targoum Neofiti ; le Targoum Pseudo-Jonathan est, encore une fois, moins rĂ©servĂ©)[100]. Tamar est priĂ©e de demeurer veuve dans la maison de pĂšre etc.
De nombreux jours passent et la fille de Shoua â le Targoum Onkelos lit, contrairement au Targoum Neofiti, « Bat Shoua » comme un prĂ©nom â meurt ; aprĂšs sâĂȘtre consolĂ©, Juda monte avec son ami Hira Ă Timnat (sic)[101]. Lorsque Tamar lâapprend, elle retire ses habits de veuve, se couvre dâun voile et « sâhabille » ou « sâenveloppe »[Note 2] avant de se rendre Ă la croisĂ©e des sources (Targoum Onkelos)/des routes (Targoum Neofiti)/des chemins oĂč tous les yeux observent (Targoum Pseudo-Jonathan)[102] car elle avait vu etc. Juda la vit et la considĂ©ra comme une « femme qui sort dans le champ » car elle avait voilĂ© son visage et il ne lâavait pas reconnue, câest-Ă -dire, prĂ©cise le Targoum des NĂ©ophytes, quâelle avait toujours Ă©tĂ© voilĂ©e lorsquâelle habitait chez lui et lui nâavait par consĂ©quent aucun moyen de la reconnaĂźtre[103].
Les targoumim traduisent assez fidĂšlement les versets qui ont trait Ă lâĂ©change prĂ©liminaire mais ils interprĂštent plus librement le gage ou caution demandĂ©e par Tamar: le sceau devient une bague Ă cachet et le fil des fils voire un manteau[104]. Lorsque Hira vient les rĂ©cupĂ©rer, il sâenquiert auprĂšs des gens du lieu de la qdesha que le Targoum Onkelos rend presque mot pour mot par meqadashta tandis que le Targoum Neofiti reprend lâeuphĂ©misme utilisĂ© en Gn 38:15 et que le Targoum Pseudo-Jonathan traduit cette fois sans ambages ; il conserve par ailleurs la forme passĂ©e (« il nây avait pas ici ⊠») qui figure dans le texte hĂ©braĂŻque alors que les autres Targoumim, y compris fragmentaires, recourent Ă un prĂ©sent (« il nây a pas ici ⊠») plus logique[105]. Hira rentre bredouille et lâon annonce « trois mois plus tard » Ă Juda que sa bru sâest prostituĂ©e et est enceinte de la prostitution ; Juda rĂ©pond, selon le Targoum attribuĂ© Ă Jonathan: « Nâest-elle pas fille de prĂȘtre? Faites-la sortir etc. »[106].
Le Targoum Neofiti qui glosait jusque lĂ aussi parcimonieusement que le Targoum Onkelos, sâĂ©tend subitement davantage que le Pseudo-Jonathan: au moment oĂč Tamar est menĂ©e au bĂ»cher, elle ne retrouve plus ses trois âtĂ©moinsâ et implore Dieu de lui venir en aide, lui promettant dâengendrer trois justes qui sanctifieront le nom divin en descendant dans la fournaise Ă Doura. Dieu dĂ©pĂȘche lâange MichaĂ«l pour desciller ses yeux â selon des targoumim alternatifs, vraisemblablement plus tardifs et tributaires du Talmud de Babylone, Dieu envoie Gabriel pour restituer les tĂ©moins que SamaĂ«l a dissimulĂ©s â mais aprĂšs que Tamar a prĂ©sentĂ© les preuves aux juges, elle demeure prĂȘte Ă mourir plutĂŽt que de dĂ©noncer le propriĂ©taire de ces objets, confiante que Dieu lâencouragera Ă se faire connaĂźtre de lui-mĂȘme. Alors Juda les reconnaĂźt en mĂȘme temps quâil reconnaĂźt la justice divine qui le rĂ©tribue pour ce quâil a fait Ă Jacob et Joseph, et sâapprĂȘte, aprĂšs un monologue intĂ©rieur devenu dans la plupart des traditions ultĂ©rieures une confession publique, Ă se jeter au feu ; cependant, nul ne meurt car Dieu se manifeste pour les sauver[107], et il dit: « câest de devant Moi quâest venue toute lâaffaire ». Juda dit Ă son tour « câest de moi quâelle a conçu », reconnaissant que « ceci â non la grossesse de Tamar mais son humiliation publique â a eu lieu parce que je ne lâai pas donnĂ©e Ă ChĂȘla mon fils ». Les targoumim canoniques redeviennent des traductions, et rendent fidĂšlement la conclusion de Gn 38:26 par « il nâajouta plus » de la connaĂźtre mais un targoum alternatif porte en lieu et place « ne cessa plus »[108]. Ils suivent le texte sans Ă©carts dans ses derniers versets, bien que le Targoum du Pseudo-Jonathan glose encore sur les noms de Peretz et Zeraâh[TableA 3].
Les traductions judĂ©o-aramĂ©ennes de Gn 38 y voient toutes une histoire de salut, depuis le Targoum Onkelos, qui est le plus fidĂšle au texte biblique et ne sâen Ă©carte que pour exhumer les germes de la maison de David qui y ont Ă©tĂ© plantĂ©s, au Targoum Neofiti qui entend le faire sortir des sentiers battus en le prĂ©sentant comme une promesse de rĂ©demption providentielle pour les fidĂšles mis au dĂ©fi de vivre dans la faute ou mourir pour leur foi â de nombreux partisans du judaĂŻsme lâont fait lors des dĂ©crets dâAntiochos et qualifient, depuis les persĂ©cutions hadrianiques, cette attitude de sanctification du nom divin. Le Targoum attribuĂ© Ă Jonathan qui retourne chaque pierre du texte en faisant usage de traditions analogues, entend Ă©taler la dimension messianique du rĂ©cit, comme le Targoum Onkelos.
Ces deux targoumim font par consĂ©quent du CananĂ©en un marchand car Juda nâa pu descendre si bas, et le Targoum Pseudo-Jonathan veille Ă le dĂ©gager de toute responsabilitĂ© dans la mort de ses fils tandis que le Targoum des NĂ©ophytes cherche plutĂŽt Ă gommer le rĂŽle quây a jouĂ© Dieu car il est peu compatible avec celui quâil veut mettre en lumiĂšre.
Tous sâaccordent Ă prĂ©senter la rencontre de Juda et Tamar comme des plus convenables â non seulement Tamar nâest pas une prostituĂ©e mais son voile est une marque de pudeur ou de retenue, et les gages quâelle a, selon certains, demandĂ©s dans un accĂšs dâextra-luciditĂ© proche de la prophĂ©tie (en), sont pour les uns des insignes royaux et pour les autres des « tĂ©moins » qui transportent la confrontation de Juda et Tamar dans le cadre du tribunal et en font une « Ă©piphanie Ă©thique[109] » mais ils ne comportent certainement pas les franges rituelles qui distinguent, Ă lâĂšre du Targoum, les membres du SanhĂ©drin car il nâest pas envisageable que Juda ait pu sâen dĂ©lester : câest que Juda et Tamar sont les ancĂȘtres, donc les modĂšles, du roi-messie ou des hĂ©ros de Daniel 3, prototypes bibliques de la situation oĂč lâon prĂ©fĂšre mourir pour Dieu par le feu que vivre dans le pĂ©chĂ©.
Lâadresse pour le moins oblique de Tamar Ă Juda alors quâon la mĂšne au bĂ»cher, permet de la prĂ©senter comme une figure pieuse qui ne peut, selon un targoum alternatif, quâĂȘtre une fille dâIsraĂ«l ; elle refuse de diffamer autrui, fĂ»t-ce pour se sauver, prie en temps de troubles, exprime son vĆu au prĂ©sent pour un avenir lointain appelĂ© Ă se rĂ©aliser comme cela se voit chez les prophĂštes, et est exaucĂ©e Ă lâinstant mĂȘme, comme il sied aux justes parfaits, mĂ©ritant, comme Ă Dura, quâun ange associĂ© dans le Livre de Daniel au salut dâIsraĂ«l, lui soit dĂ©pĂȘchĂ© afin de la sauver. La rĂ©ponse de Juda Ă cette adresse nâest jamais lue « elle a Ă©tĂ© plus juste que moi » mais « elle a Ă©tĂ© juste, câest de moi » â il nâapparaĂźt donc jamais infĂ©rieur Ă Tamar, et la lecture du second membre permet toutes les interprĂ©tations possibles : dans le Targoum Onkelos, son admission dâiniquitĂ© est transfigurĂ©e en reconnaissance de paternitĂ© tandis le Targoum Neofiti veut y lire « câest de Moi » plutĂŽt que « câest de moi, » et impose ainsi la prĂ©sence de Dieu dans lâhistoire. Quant au premier membre de la phrase, « elle a Ă©tĂ© juste/elle sâest trouvĂ©e ĂȘtre dans son droit, » il devient une confession publique dĂ©taillĂ©e (ou un repentir intĂ©rieur circonstanciĂ© dans le Targoum Pseudo-Jonathan) oĂč ne manquent ni lâĂ©talage des fautes de Juda, qui ont moins Ă voir avec Gn 38 que Gn 37, ni la louange de la justice divine et sa proportionnalitĂ© poĂ©tique. Il en rĂ©sulte, dans le Targoum Neofiti, un repentir dâune telle poignance quâun Ă©cho de voix divin rĂ©sonne pour sauver les deux figures pieuses qui viennent de tĂ©moigner de la grandeur de Dieu et se montrent prĂȘtes Ă pousser le martyre au sacrifice ultime tandis que dans les targoumim alternatifs, ce repentir acquiert une telle puissance quâil initie la venue du messie rĂ©dempteur. Tous les targoumim ont donc fait de Gn 38 une histoire de salut, individuelle dans le Targoum des NĂ©ophytes, nationale dans les autres oĂč la promesse du messie conquĂ©rant apparaĂźt dans lâexclamation de lâaccoucheuse Ă la naissance de Peretz (le Targoum Neofiti sur ce passage dĂ©montre quâil nâignore pas ce propos mais il le gomme, afin de ne pas distraire son auditoire du message quâil a dĂ©livrĂ© quelques versets auparavant)[110].
Dans la littérature tannaïtique
Lorsque les tannaĂŻm (« rĂ©pĂ©titeurs » des enseignements antĂ©rieurs) couchent par Ă©crit leurs traditions interprĂ©tatives, et les organisent par thĂšmes dans la Mishna et son « ComplĂ©ment », la Tossefta, aprĂšs les avoir agencĂ©s selon lâordre des versets bibliques dans les premiers recueils du Midrash, le Livre de la GenĂšse semble avoir Ă©tĂ© laissĂ© pour compte puisquâon ne lui connaĂźt, contrairement aux quatre autres livres du Pentateuque, pas de Midrash tannaĂŻtique complet. Gn 38 nâen a pas moins bĂ©nĂ©ficiĂ©, outre ses apparitions Ă©pisodiques dans les ouvrages connus de la littĂ©rature tannaĂŻtique, dâun commentaire midrashique complet situĂ© dans le mĂȘme univers que les Targoumim, demeurĂ© pendant longtemps manuscrit et par consĂ©quent inĂ©dit, bien que nombre de ses interprĂ©tations se retrouvent dans le Midrash classique ainsi que le corpus Tanhouma et dâautres Midrashim dâĂ©poques ultĂ©rieures[111].
(Cette distinction a Ă©galement cours pour la Mishna et la Halakha)
â Tossefta Berakhot 4:16 (Ă©dition Sefaria)
Quelques enseignements ont pour prĂ©occupation premiĂšre de dĂ©finir au mieux la « voie de Dieu » (dâaprĂšs Lv 26:3-4) : lâon tire ainsi de Gn 38:21 que lâinterdiction de pratiquer ou consommer la prostitution (Dt 23:18), sâapplique Ă©galement aux personnes libres de tout engagement conjugal puisque Juda nâest pas mariĂ© lorsquâil rencontre sa bru dĂ©guisĂ©e[113], et Symmaque rapporte au nom de Rabbi MeĂŻr quâune femme enceinte nâest interdite Ă son mari que lorsquâon reconnaĂźt la grossesse, soit « environ au bout de trois mois » comme lâatteste Gn 38:24[114].
[âŠ] Ils dirent : pour avoir dit « Quel profit y a-t-il si nous tuons notre frĂšre, etc. » par lequel il le sauva de la mort ? Rabbi Tarphon : Câest bien assez que ce sauvetage expie la vente car [câest lui] qui a conseillĂ© quâon vende Joseph et quâon ne le rende pas Ă son pĂšre !
Eux : [Alors] pour avoir dit « Elle a raison, câest de moi » ? R. Tarphon : Câest bien assez que lâaveu expie le rapport [sexuel] !
Eux : Pour le mĂ©rite dâavoir dit « Que ton serviteur reste Ă la place du jeune » ? R. Tarphon : Nous trouvons partout que le garant [se doit de tenir sa promesse]
[âŠ]R. Tarphon : Quand les tribus Ă©taient devant la mer [âŠ], Nahshon le fils dâAminadav et sa tribu aprĂšs lui sautĂšrent dans les vagues de la mer - c'est pourquoi il mĂ©rita la royautĂ©, comme il est Ă©crit (Ps 114 : 1-2) « Quand IsraĂ«l sortit dâĂgypte, la maison de Jacob du peuple dâune langue Ă©trangĂšre, Juda devint son sanctuaire, IsraĂ«l, le domaine de son empire »
â Mekhilta deRabbi IshmaĂ«l Beshallah 5, s.v Ex 14:22, § 2 (Ă©dition Sefaria)
Cependant, la mishna Meguila 4:10 qui discute de la pertinence de rendre « lâhistoire de Tamar » plus accessible en la faisant accompagner de son targoum lors de la lecture synagogale â sans prĂ©ciser si lâ« histoire » couvre lâentiĂšretĂ© de Gn 38 ou seulement Gn 38:18 â, part bien dâun point de loi mais elle a pour enjeu vĂ©ritable la moralitĂ© du texte[115]. De mĂȘme, le Midrash nâignore pas davantage les problĂšmes que lâhistoire de Juda et Tamar peut susciter â deux grandes Ă©coles sâaffrontent sur la maniĂšre de les aborder : celle de Rabbi Akiva, qui est Ă lâorigine de la Mishna et la Tossefta[Note 19], enseigne que Juda a, en admettant ses torts face Ă Tamar, amenĂ© Ruben Ă confesser lâacte de Bilha et quâil a reçu en rĂ©compense la royautĂ©, tandis que celle de Rabbi IshmaĂ«l, reprĂ©sentĂ©e ici par Rabbi Tarphon, explique Ă lâombre dâun bosquet de YavnĂ© que la royautĂ© judĂ©enne nâa rien Ă voir avec Juda, dont les hauts-faits compensent Ă grand-peine les mĂ©faits, et quâelle commence seulement avec son descendant Nahshon lors de la traversĂ©e de la Mer des Joncs[116].
Une gĂ©nĂ©ration plus tard, Rabbi Yosse le GalilĂ©en qui a, par ailleurs Ă©tabli que lâhistoire de Juda et Tamar se tient dans un intervalle de vingt-deux ans sur base de Gn 37:2, 41:46-49 et 45:6-7[117], lit les alĂ©as de Ruben et Juda devant une certaine Matrona qui doute de la vertu de lâadolescent Joseph face Ă la femme de Potiphar, afin de lui montrer que rien dans la Bible nâest passĂ© sous silence ou enjolivĂ©[118]. Câest peut-ĂȘtre dans le contexte de ce dĂ©bat quâil convient dâexpliquer le silence du Juif romanisĂ© Flavius JosĂšphe sur ce chapitre dans ses AntiquitĂ©s judaĂŻques alors quâil avait promis dans sa prĂ©face de ne rien omettre, bien quâil puisse aussi dâagir dâun choix personnel de ne pas offenser son public grĂ©co-romain ou, comme Philon, de ne pas susciter ses critiques[119].
La Mishna se prononce toutefois contre la censure, et lâhistoire de Tamar se lit avec son targoum car les Ă©coles judĂ©ennes rivales sâaccordent, au-delĂ de leurs diffĂ©rences interprĂ©tatives et doctrinales, Ă porter le rĂ©cit au crĂ©dit de Juda, mĂȘme si lâaveu de Juda a, de lâavis de Rabbi Tarphon, tout au plus rachetĂ© son inconduite avec sa bru[120].
Dans un autre midrash de lâĂ©cole de Rabbi Akiva, Rabbi MeĂŻr compare Ruth et Tamar, « deux femmes [Ă©trangĂšres] appariĂ©es au peuple saint quâon a voulu ramener Ă leur tente lorsquâelles sont devenues veuves, et qui nâont pas voulu se sĂ©parer de la PrĂ©sence divine, câest pourquoi la royautĂ© et la prĂȘtrise sont sorties dâelles » ; le midrash figure alors Tamar « pleurant jour et nuit » (Jrm 8:23) « car elle voyait que ChĂ©la avait grandi et quâelle ne lui avait pas Ă©tĂ© donnĂ©e pour Ă©pouse, » morfondue quâon veuille la renvoyer « de la maison de ce juste »[121]. Dieu, « grand dans le dessein, souverain dans l'exĂ©cution » (Jrm 32:19), entend sa pensĂ©e et lui souffle le plan quâelle met alors en exĂ©cution. Lorsquâelle veut produire ses « tĂ©moins » (i.e. les gages demandĂ©s Ă Juda) sans les trouver puisque le Satan les a cachĂ©s, elle sâadresse une nouvelle fois Ă Dieu avec une courte priĂšre : « MaĂźtre du monde, rappelle-toi en ma faveur lâunification de ton Nom (he) car jâai unifiĂ© ton Nom dans la maison de mon pĂšre, et sauve-moi de cette mise Ă mort. » Dieu dĂ©pĂȘche alors MichaĂ«l qui prend les « signes » de la main du satan et les amĂšne Ă lâendroit dont « on lâemmenait »[122].
Le midrash nâĂ©voque, pas plus que la Tossefta, le « tribunal de Sem » ou la voix qui sort des cieux pour dĂ©clarer lâinnocence de toutes les parties en jugement ; cette derniĂšre enseigne cependant que la derniĂšre clause de Gn 38:26, « il ne la connut plus, » a Ă©tĂ© profĂ©rĂ©e par lâesprit de saintetĂ©[123], et le midrash, glosant sur Gn 38:26 (« Elle est plus juste que moi »), figure Dieu disant Ă Juda : « Comme tu as reconnu trois tĂ©moins, je te pardonne trois choses que tu as faites Ă Joseph car sans ton conseil, tes frĂšres nâauraient jamais portĂ© la main sur lui, puisquâils te rĂ©vĂ©raient » â si le second membre de la phrase est commun Ă dâautres midrashim, le premier est sans Ă©quivalent dans lâensemble de la littĂ©rature tannaĂŻtique (et mĂȘme rabbinique), contredisant lâexĂ©gĂšse rabbinique couramment acceptĂ©e de Lv 16:30 qui fait dĂ©pendre la propitiation des fautes commises envers autrui de son pardon[124]. Son admission lui vaut par ailleurs dâengendrer des jumeaux et dâobtenir la royautĂ© ainsi que lâabsolution dans le jugement de Joseph, et Juda se met Ă psalmodier des louanges Ă Dieu, oĂč Ps 16:6 (« Un hĂ©ritage mâest Ă©chu en des lieux de dĂ©lices ; oui, mon patrimoine me plaĂźt tout Ă fait ») est interprĂ©tĂ© pour dĂ©crire la royautĂ© et les terres qui lui reviennent en partage. Rabbi Eliezer en tire pour sa part un Ă©loge de la terre dâIsraĂ«l : y sĂ©journer vaut lâaccomplissement de tous les commandements et rachĂšte les fautes de lâhomme, de son vivant et aprĂšs sa mort[125].
ExégÚse judéo-chrétienne
GenĂšse 38 dans les Ăvangiles
Gn 38 est rarement Ă©voquĂ© dans la somme des Ă©crits rassemblĂ©e par les PĂšres apostoliques en Nouveau Testament, apparaissant par allusion dans la controverse entre JĂ©sus et les SadducĂ©ens sur le mariage lĂ©virat (Matt 22:24-28) et surtout dans les gĂ©nĂ©alogies de JĂ©sus qui figurent au troisiĂšme chapitre de lâĂvangile selon Luc et au premier chapitre de lâĂvangile selon Matthieu[126].
La version matthĂ©enne choisit contrairement Ă Luc dâinclure des femmes[127] et, fait dâautant plus remarquable, ne commence pas par les matriarches Sarah, Rebecca, Rachel ou LĂ©a mais par Thamar:
« Juda, de Thamar, engendra PharÚs et Zara; Phares engendra Esrom; Esrom engendra Aram (Matthieu 1:3). »
Lâauteur de ce passage a pu sâinspirer des gĂ©nĂ©alogies davidiques du livre des Chroniques (en particulier I Chroniques 2:4 â « Tamar, sa bru, lui enfanta PĂ©reç et ZĂ©rah. Total des fils de Juda: cinq » â dont il nâaurait toutefois retenu que les enfants de Thamar et non ceux de Juda). Il destine son texte Ă un public juif, familier comme lui des traditions interprĂ©tatives autour des textes quâil Ă©voque. Cependant, sâil connaĂźt Ă lâĂ©vidence les traditions juives de son temps, et en particulier les targoumim sur Gn 38 puisquâon retrouve en Matt 7:1-2 lâaxiome mesure pour mesure, placĂ© par la tradition dans la bouche de Juda lors de sa confession publique[128], il ne semble pas que la Thamar de lâĂ©vangile soit en continuitĂ© directe avec la Tamar des rabbins ou du Targoum[Note 20].
Le gĂ©nĂ©alogiste, sâinspirant de Ruth 4:12-16, fait suivre Thamar par Rahab, Ruth, la « femme dâUrie » et Marie, ce qui semble plutĂŽt introduire une faille dans une gĂ©nĂ©alogie rĂ©guliĂšre, car ces femmes â dont Thamar semble ĂȘtre le prototype â ont la biographie alternativement sulfureuse et vertueuse : Rahab, prostituĂ©e par profession et non par circonstance, sâest mise en danger en offrant refuge aux espions israĂ©lites dĂ©pĂȘchĂ©s par JosuĂ© avant la prise de JĂ©richo, et a mĂ©ritĂ© dâĂȘtre la mĂšre de Booz[Note 21] ; dans le cas de Ruth, amante de Booz et mĂšre dâObed (Matthieu 1:5), ses similitudes avec Thamar sont suggĂ©rĂ©es par le texte biblique lui-mĂȘme ; la mĂšre de Salomon (Matthieu 1:6) est appelĂ©e « femme dâUrie » Ă chaque fois que la Bible veut rappeler son adultĂšre ou son chĂątiment (II Samuel 12:15), et ne redevient « BethsabĂ©e » quâaprĂšs la mort de son fils et le repentir de David, pĂ©titionnant alors le roi pour faire accĂ©der Salomon au trĂŽne ; enfin Marie, mĂšre de JĂ©sus, est enceinte dâun enfant quâelle nâa apparemment pas conçu de lâhomme auquel elle est, de surcroĂźt, fiancĂ©e mais non encore mariĂ©e et avec lequel elle ne vit mĂȘme pas en concubinage (Matthieu 1:18)[129].
LâĂ©vangĂ©liste semble donc avoir initiĂ© avec Thamar une lignĂ©e de « mĂšres du messie » qui ont acquis une rĂ©putation douteuse ou se sont retrouvĂ©es en position scabreuse alors mĂȘme quâelles contribuaient Ă la lignĂ©e messianique[130] sans affirmer clairement si Marie se situe dans la continuitĂ© ou en rupture avec cette lignĂ©e. Ă lâappui de la seconde lecture, la mĂšre de JĂ©sus apparaĂźt en effet comme passive dans lâengendrement de son fils alors que les quatre femmes ont activement perpĂ©tuĂ© la dynastie de Juda Ă Salomon[131], et un ange annonce en songe Ă Joseph que lâenfant a Ă©tĂ© conçu non pas ek porneias, « de la prostitution » comme en Gn 38:24, mais ek pneumatos, « par lâaction du Saint-Esprit » (Matt 1:20) [132]. Cependant, lâĂ©vangĂ©liste qui insiste Ă maintes reprises sur lâimportance de la droiture morale, veut peut-ĂȘtre faire entendre que chez Marie comme chez Thamar, lâadultĂšre nâĂ©tait que supposĂ© mais la justesse avĂ©rĂ©e[133] ; et lâange lui permet dâanticiper les procĂšs en lĂ©gitimitĂ© du prĂ©tendant Ă la messianitĂ©[134] car câest lâentiĂšretĂ© de la lignĂ©e davidique qui a Ă©tĂ© conçue dans lâirrĂ©gularitĂ©, par lâaction du Saint-Esprit[135].
GenĂšse 38 dans la Peshitta
La Peshitta (ou Peshitto, selon la prononciation occidentale), traduction de la Bible en syriaque, est utilisĂ©e par les communautĂ©s chrĂ©tiennes aramĂ©ophones dâOrient. Sa partie dite vĂ©tĂ©rotestamentaire a vraisemblablement Ă©tĂ© rĂ©digĂ©e Ă partir de manuscrits hĂ©braĂŻques proto-massorĂ©tiques par des Juifs ou des chrĂ©tiens dâorigine juive qui sâĂ©taient installĂ©s Ă Ădesse vers le milieu du deuxiĂšme siĂšcle de lâĂšre chrĂ©tienne. Elle prĂ©sente quelques diffĂ©rences avec le texte massorĂ©tique Ă©tabli, relevant de contraintes propres au syriaque, de variantes textuelles ou de rares interprĂ©tations dans lesquelles se dĂ©cĂšle occasionnellement lâinfluence de targoumim contemporains[136].
La Peshitta sur le trente-huitiĂšme chapitre du Livre de lâAlliance â ainsi quâelle nomme le premier livre du Pentateuque â se veut nĂ©anmoins « simple », câest-Ă -dire dĂ©nuĂ©e au possible de ces interprĂ©tations paratextuelles, et elle traduit sans gloser sur la descente de Juda, lâethnicitĂ© de sa femme ou les noms de leurs fils ; ils sont toutefois nommĂ©s tous trois par leur pĂšre, contrairement au texte massorĂ©tique, et la Peshitta indique ensuite quâ« elle cessa dâenfanter ». La traduction syriaque sâĂ©carte encore lĂ©gĂšrement mais significativement de lâoriginal hĂ©breu lorsquâelle rend « demeure veuve » par « demeure dans le veuvage ». Elle adopte dans son approche de Gn 38:14 la ligne de la Septante, traduisant vatitâalaf par waÊŸiáčŁáčabtat (« elle se para »)[Note 2] et petaâh einayim par palshat ÊŸouráž„ata (« la croisĂ©e des chemins ») ; elle ne fait pas non plus la part entre zona et qdesha, confondus dans un mĂȘme zanaytaÊŸ. Elle semble par ailleurs guidĂ©e par un besoin de cohĂ©rence interne, et lorsque son ami revient avec le chevreau promis en salaire sans avoir trouvĂ© la zanaytaÊŸ, Juda dit renoncer aux gages quâil lui a laissĂ©s « afin que je ne devienne pas [objet de] risĂ©e » car il nây a, pour la Peshitta, aucune raison de penser que Hirah puisse pĂątir des ragots redoutĂ©s. Or, « au bout de trois mois », lâon dit Ă Juda que Tamar sa bru « a conçu de la prostitution » ; Juda ordonne quâon la sorte pour ĂȘtre brĂ»lĂ©e et « ils la sortent » â ici, câest une carence du syriaque qui ne comprend pas non plus le [haker] na de Tamar. Le texte suit son cours jusquâĂ lâaccouchement des jumeaux qui sont tous deux nommĂ©s, comme câest le cas dans plusieurs tĂ©moins textuels, par une femme, leur mĂšre ou la sage-femme[TableA 4].
Le Testament de Juda
Le Testament de Juda, sous-titrĂ© « de la virilitĂ©, de lâamour du lucre et de la luxure (peri andreias, philarguria kai porneias) », est lâun des Testaments des douze patriarches, au cours duquel un patriarche Ă lâarticle de la mort, fait le bilan de sa vie devant ses enfants, en les encourageant particuliĂšrement Ă adopter ses vertus personnelles autant quâĂ se prĂ©munir de ses vices. Adaptant librement diverses traditions juives sans se soucier des incohĂ©rences suscitĂ©es par leur collation, les Testaments contiennent aussi de nombreux passages et messages chrĂ©tiens qui rendent leur attribution malaisĂ©e: certains penchent pour une rĂ©daction originellement juive Ă lâĂ©poque des HasmonĂ©ens, avec de nombreuses interpolations ultĂ©rieures dont celles dâun Ă©diteur judĂ©o-chrĂ©tien, tandis que pour dâautres, lâĆuvre est contemporaine des pĂšres de lâĂglise apostoliques et, dĂšs le dĂ©part, chrĂ©tienne[137].
QuatriĂšme fils de Jacob et LĂ©a, Juda obĂ©it aux moindres paroles de son pĂšre, et reçoit en salaire la royautĂ© sur ses frĂšres avec la bĂ©nĂ©diction de Jacob, mais aussi dâIsaac (T. Juda I:1-6 & XVII:5). Il est alors un modĂšle dâandreia, se montrant plus rapide que les gazelles et les juments, plus fort aussi que les lions, les ours, les sangliers, les panthĂšres et les taureaux lorsquâil garde les troupeaux de son pĂšre (T. Juda II:1-7). PrĂ©cĂ©dĂ© par un ange de puissance, il mĂšne ses frĂšres de victoire en victoire lorsque de leurs guerres contre les tribus de Canaan, bien quâil ait manquĂ© de mourir Ă Thamna si Dan nâavait pas Ă©tĂ© Ă ses cĂŽtĂ©s (T. Juda III-VII). Il mettra cependant ses enfants en garde contre la tentation de se vanter des exploits de la jeunesse car, aprĂšs avoir conservĂ© sa vertu face Ă une jolie captive lors de sa campagne militaire, il tance Ruben dâimportance pour sa conduite avec Balla et devient dĂšs lors la proie de son propre esprit de luxure: ĂągĂ© de vingt ans, il se rend avec le chef de ses bergers, Hiram (sic) lâAdullamite[138], Ă la cour du roi Bar Choua dâAdullam[Note 22], et prend sa fille Bathshoua en mariage. Il rapporte une premiĂšre fois ce mariage factuellement, indiquant quâil a eu dâelle trois dâenfants, « mais le Seigneur en reprit deux » et câest aux enfants du fils survivant, ChelĂą, quâil sâadresse (T. Juda VIII:1-3). Son erreur apparaĂźt cependant rapidement aprĂšs une nouvelle guerre contre les Ădomites â qui se conclut sur une nouvelle victoire de Jacob et ses fils (T. Juda IX:1-8) â car son premier fils Er prend pour femme Thamar, une « MĂ©sopotamienne fille dâAram », mais la prend en haine aprĂšs avoir Ă©tĂ© excitĂ© par sa mĂšre qui rĂ©prouve cette non-CananĂ©enne ; il ne veut pas en avoir dâenfants et un ange du Seigneur le fait mourir la troisiĂšme nuit. Il en va de mĂȘme avec Onan qui ne connaĂźt pas sa femme pendant un an et ne sâunit Ă elle que sous la menace de Juda mais, incitĂ© par sa mĂšre, il rĂ©pand sa semence au sol lors de leurs rapports et meurt lui aussi dans la malice. Quant au troisiĂšme fils, Juda veut lui donner Thamar mais Bathshoua le marie Ă une CananĂ©enne pendant que son pĂšre est parti â Juda maudit alors cette femme de race perverse, quâil a Ă©pousĂ©e sans consulter Jacob, car il Ă©tait Ă©garĂ© par sa jeunesse, Ă©tourdi par son ivresse et Ă©bloui par les richesses qu'elle et son pĂšre avaient Ă©talĂ©es ; Bathshoua meurt dans sa malice avec ses fils (T. Juda X:1-2 & 6, XI:5 & XIII:4-7).
Deux ans plus tard, Thamar qui est toujours veuve, apprend que Juda monte tondre les brebis. Elle revĂȘt alors ses habits de mariĂ©e et se poste Ă la porte dâEnaĂŻm oĂč les jeunes Amorrites Ă marier ont coutume de se prostituer pendant sept jours. EnivrĂ©, Juda ne reconnaĂźt pas sa belle-fille. SĂ©duit par sa parure et sous lâemprise de la luxure, il lui offre pour la possĂ©der son sceptre, sa ceinture[Note 23] et le diadĂšme de sa royautĂ© â qui symbolisent le soutien de la tribu, la force et la gloire du royaume. Revenu de son Ă©briĂ©tĂ© et ignorant de ce quâil a fait, il veut la tuer mais elle lui envoie secrĂštement les gages et lui rapporte les secrets quâil lui a dĂ©voilĂ©s dans son ivresse « et je ne pus la tuer â conclut-il â car le Seigneur avait permis que cela arrivĂąt ». Juda continuera Ă se demander si Thamar nâavait pas reçu les gages dâune autre femme mais quoi quâil en soit, il est dĂ©finitivement revenu de ses excĂšs et ne lâapprochera plus, aprĂšs avoir fait cette abomination aux yeux de tout IsraĂ«l. DĂ©sormais ĂągĂ© de 46 ans, le patriarche descend en Ăgypte avec sa famille auprĂšs de Joseph Ă cause de la famine, et y vivra 73 ans (T. Juda XII:1-11).
Juda met ses fils en garde contre lâabus de boisson, prĂ©conisant la pondĂ©ration voire lâabstention en la matiĂšre car lorsque le vin entre, les secrets sortent (T. Juda XVI:1-6), et de mĂȘme pour la porneia qui lâa poussĂ© dans les lits de Thamar et Bathshoua. Enfin, la philarguria lâa non seulement menĂ© Ă la faute mais lâaurait fait mourir sans son repentir et les priĂšres de son pĂšre qui ont fait triompher lâesprit de vĂ©ritĂ© sur lâesprit dâĂ©garement (T. Juda XVII:1-XX:5).
Gn 38 joue un rĂŽle de premier plan dans lâĂ©conomie du Testament attribuĂ© Ă Juda. Du fait de la rĂ©organisation des Ă©vĂ©nements opĂ©rĂ©e par lâauteur, laquelle reflĂšte peut-ĂȘtre sa perplexitĂ© devant la chronologie biblique, Juda nâest plus lâinstigateur de la vente de Joseph dont il escomptait tirer profit mais un modĂšle dâamour filial, destinĂ© pour cette raison Ă rĂ©genter les fils dâIsraĂ«l dĂšs son jeune Ăąge[139]. Il rappelle autant David au lecteur juif quâHĂ©raclĂšs au lecteur grec: la course avec les gazelles et la lutte avec les lions ou les sangliers Ă©voquent Ă ce dernier les douze travaux du fils de Zeus tandis que le premier reconnaĂźt le fils de JessĂ© et, dans une moindre mesure, Samson dans la scĂšne du lion et de lâours[140]. LâancĂȘtre de David occupe le premier plan au cours des guerres menĂ©es par son pĂšre Jacob contre les rois indigĂšnes, vraisemblablement extrapolĂ©es de Gn 48:22 mais peut-ĂȘtre inspirĂ©es des exploits de Juda MaccabĂ©e au cours des campagnes maccabĂ©ennes[141].
Divers motifs de Gn 38 y sont subtilement exploitĂ©s: Juda vient Ă bout de trois places fortifiĂ©es par la ruse, connaĂźt sa seule humiliation militaire dans la ville de Thamna et succombe Ă lâivresse dans les eaux de Kozeba[142] (la mention de Kozeba, Ă©quivalent aramĂ©en de Kezib, aux cĂŽtĂ©s de lâivrognerie de Juda alors que la racine k-z-b peut traduire lâĂ©garement, indique probablement un jeu de mots qui sâest perdu dans la traduction grecque[143]).
Cependant, tel HĂ©raclĂšs, Juda est devenu dans le Testament un hĂ©ros tragique ainsi que lâa dĂ©fini Aristote â et câest de fait ainsi quâil apparaĂźt lorsque Gn 38 est lu isolĂ©ment[144]. Comme David, il est assailli par lâesprit de porneia aprĂšs sâĂȘtre vantĂ© de sa vertu[145], et il la perd en mĂȘme temps que sa grandeur face aux femmes : le Testament invente lâintervention de Bar Choua, ses richesses et son vin pour expliquer son union Ă la CananĂ©enne mais plus que sa faiblesse devant ces tentations, la vraie faute de Juda est dâavoir manquĂ© â pour la premiĂšre fois â aux commandements de son pĂšre, Ă©tablis dans les Testaments comme tautologiques de la loi divine avant le don de la Torah[146]. Le Testament se montre encore plus sĂ©vĂšre vis-Ă -vis de la femme de Juda car la mort de leurs fils nâest pas tant imputĂ©e aux penchants de leur pĂšre quâĂ la malice de leur mĂšre, ce qui avait dĂ©jĂ Ă©tĂ©, bien que moins franchement, Ă©tabli dans le livre des JubilĂ©s. Il innove totalement dans son traitement de Thamar qui y devient une tentatrice dĂ©crite dans les mĂȘmes termes que la premiĂšre femme de Juda. En omettant Gn 38:11-14 de sa trame, le Testament laisse entendre quâelle a agi par pure malignitĂ©, utilisant son voile afin de tromper Juda Ă lâinstar de Laban qui a voilĂ© LĂ©a pour berner Jacob[Note 24]. Juda se dĂ©voile une nouvelle fois dans toute sa faiblesse lorsquâil se laisse prendre Ă deux fois par une mĂȘme conjonction de griserie avinĂ©e, dâartifices fĂ©minins et de parures ornementĂ©es â le kosmeia du testament marque davantage lâartificialitĂ© que lâekallopissato de la Septante â et il descend si bas que non content dâavoir abandonnĂ© les symboles politiques de sa royautĂ© Ă la catin, il lui dĂ©voile les mystĂšres que lui avait lĂ©guĂ©s son pĂšre. Le jugement est sans appel, et si lâauteur du Testament connaĂźt la paraphrase de Gn 38:26 â oĂč le « câest de moi » est devenu « câest de Moi » â, il en retient seulement que la condamnation de Juda a Ă©tĂ© voulue par Dieu, en chĂątiment de son orgueil et pour avoir humiliĂ© son frĂšre[147].
La relecture de Gn 38 par le Testament de Juda dĂ©montre des prĂ©occupations propres aux Juifs hellĂ©nisĂ©s: elle se fonde sur une thĂ©matique misogyne, partagĂ©e avec Philon et la GrĂšce antique, oĂč la femme est perçue comme un danger pour la sociĂ©tĂ© patriarcale en raison des « instincts interdits (epithymia) » quâelle est susceptible de susciter ; lâexaltation des vertus lâemporte dans le Testament sur la rĂ©vĂ©rence due au patriarche car il nâa, contrairement au Juda de Philon, aucune maĂźtrise sur ces pulsions[148]. Lâauteur parvient Ă illustrer ces idĂ©es en prĂ©sentant la royautĂ© de Juda comme assurĂ©e par son ardent amour filial, et non pour la reconnaissance de sa responsabilitĂ© vis-Ă -vis de Thamar ou en rĂ©compense de ses exploits guerriers ; leurs rapports ne pourraient pas donner le moindre germe positif, et câest pourquoi PharĂšs et Zara sont oblitĂ©rĂ©s dâun rĂ©cit dont ils auraient reprĂ©sentĂ© la plus totale antithĂšse[149].
InterprĂ©tations de lâAntiquitĂ© tardive
Deux siĂšcles aprĂšs la destruction du Second Temple, les deux grandes tendances qui se sont dĂ©gagĂ©es parmi ceux des Juifs dont la ferveur messianique nâavait pas Ă©tĂ© entamĂ©e par les consĂ©quences des rĂ©voltes des Juifs contre Rome, se sont dotĂ©es de leurs statuts : le judaĂŻsme rabbinique, formĂ© par Yohanan ben ZakkaĂŻ Ă lâacadĂ©mie de Yabneh, a trouvĂ© son champion avec Juda le Prince qui a rassemblĂ© et compilĂ© les traditions orales autour de la Torah dans la Mishna, dont le nom signifie Ă la fois « RĂ©pĂ©tition » et « seconde en importance » aprĂšs la Torah ; les sages dâIsraĂ«l continuent de perpĂ©tuer le judaĂŻsme dans une JudĂ©e dĂ©possĂ©dĂ©e de son passĂ© par Hadrien qui lâa renommĂ©e Syrie-Palestine, ne dĂ©sespĂ©rant pas de la fin dâEdom (câest-Ă -dire Rome[150])[151] ni de la rĂ©alisation des prophĂ©ties de la Bible avec la venue du messie. Or, le Talmud de JĂ©rusalem et le 85e chapitre du Midrash Bereshit Rabba (ci-aprĂšs GenR 85) enseignent que câest prĂ©cisĂ©ment avec lâhistoire de Juda et Tamar que le projet messianique a commencĂ©, et elle fournit les meilleures garanties quâil sera exaucĂ©[152] car les problĂšmes apparaissant lorsque lâhistoire est comprise au sens simple, se rĂ©vĂšlent aprĂšs lecture adĂ©quate comme autant dâenseignements positifs sur les dignes ascendants du messie attendu[153]
Le christianisme, fondĂ© par ceux qui ont emboĂźtĂ© le pas Ă Jacques, Pierre et Paul pour colporter la bonne nouvelle â selon laquelle le messie est venu, sâappelait JĂ©sus et a apportĂ© sur tous le salut â Ă travers lâempire romain, a suivi Paul et dit le messie JĂ©sus nĂ© de Dieu puis Dieu soi-mĂȘme, incluant ses Ă©pĂźtres dans la compilation des Ă©crits dĂ©nommĂ©e Nouveau Testament[154].
Lorsque Justin de Naplouse ou IrĂ©nĂ©e de Lyon Ă©voquent quelque point de lâhistoire comme le bĂąton de Juda ou le fil rouge Ă la main de Zara, en adoptant et adaptant Ă leurs besoins les interprĂ©tations juives, câest pour souligner la supĂ©rioritĂ© du Nouveau sur lâAncien, quâil a vocation Ă remplacer[155] (le judĂ©o-christianisme historique qui leur accordait une importance Ă©gale, a disparu, aprĂšs avoir Ă©tĂ© disqualifiĂ© en Anatolie par Ignace dâAntioche[156] et supplantĂ© sur la terre qui lâa vu naĂźtre par le judaĂŻsme rabbinique[157] ; le dualisme de Valentin qui voudrait, prenant Paul au mot, totalement dĂ©tacher le Nouveau de lâAncien, a Ă©tĂ© dĂ©noncĂ© comme hĂ©rĂ©tique par IrĂ©nĂ©e sous le nom de gnose).
Tertullien, suivi par Cyprien, souligne tout de mĂȘme le contraste entre le messie exemplaire, et ses ancĂȘtres aux actions si contraires, en particulier celle qui a, sous lâimpulsion de Philon, Ă©tĂ© faite paĂŻenne par les pĂšres[Note 25]. Rejetant la tentative par Hippolyte de Rome de prĂ©senter lâhistoire de Juda et Thamar comme une prĂ©figuration des rapports entre JĂ©sus et lâĂglise de JĂ©rusalem au moyen du Targoum[158] et lâinterprĂ©tation de ClĂ©ment dâAlexandrie qui condense celle de Philon, OrigĂšne enseigne que le messie nâest pas nĂ© par le mĂ©rite de ses ancĂȘtres mais quâil a misĂ©ricordieusement choisi cette lignĂ©e pour sâincarner. EusĂšbe et dâautres pĂšres, rappelant la place de Thamar en Matthieu 1:3, modĂšrent ce ton sĂ©vĂšre, et prĂ©fĂšrent conclure sur ce point au mystĂšre[159].
Tertullien formule par ailleurs la tripartition de la divinitĂ©, dont les constituants ne sont ni tout Ă fait autres ni tout Ă fait les mĂȘmes bien quâils soient dâun mĂȘme tenant, et les dĂ©bats qui en rĂ©sultent, morcellent encore plus la chrĂ©tientĂ©, particuliĂšrement dans la pars orientalis dâun empire romain dĂ©jĂ bigarrĂ©, oĂč la synagogue de Doura Europos voisine avec un baptistĂšre chrĂ©tien, un mithraeum romain et un temple dĂ©diĂ© Ă BĂȘl, tous ornĂ©s de fresques issues des canons de lâart grec antique. Par delĂ la bifurcation doctrinale entre Juifs et chrĂ©tiens â au reste permĂ©able puisque des chrĂ©tiens de toutes origines et positions dans la hiĂ©rarchie ecclĂ©siastique adoptent, des croyances ou pratiques juives (ils sont appelĂ©s, depuis lâincident Ă Antioche, âjudaĂŻsantsâ) â, il est difficile de distinguer entre Juifs et chrĂ©tiens Ă Antioche[160] comme en Babylonie[161], redevenue le principal centre de peuplement juif dĂšs le iiie siĂšcle[162] â le dialecte des Juifs babyloniens est mutuellement intelligible avec le syriaque des chrĂ©tiens, le mandĂ©en des gnostiques et le parler dâautres minoritĂ©s religieuses au sein de lâempire sassanide[163], et les ressemblances sâĂ©tendent jusquâaux lieux dâinstruction, entre lâĂ©cole thĂ©ologique de Nisibe et les acadĂ©mies talmudiques de Babylonie[164] .
Les uns comme les autres ne sont, de surcroĂźt, pas plus rigides avec les paĂŻens : beaucoup se montrent accomodants envers les fidĂšles voire les objets de cultes idolĂątres, et il nâest pas rare que tous se retrouvent aux mĂȘmes fĂȘtes et tables, ce qui incommode tant les doctrinaires juifs que chrĂ©tiens[165] que lâempereur Constantin le Grand, rĂ©cemment christianisĂ© et dĂ©sireux de fĂ©dĂ©rer lâempire contre ses ennemis barbares derriĂšre la nouvelle religion. Une sĂ©rie de mesures est prise en faveur des chrĂ©tiens dont le premier concile de NicĂ©e, oĂč la trinitĂ© est adoptĂ©e en dogme du christianisme ; 70 ans plus tard, il est la seule religio licita de lâempire tandis que le judaĂŻsme a perdu ce statut, et ceux qui le professent ont Ă©tĂ© dĂ©chus, sinon de leur citoyennetĂ© romaine, de la majeure partie de leurs droits et dignitĂ©s.
Le symbole de NicĂ©e, renouvelĂ© Ă Constantinople, marque le point de dĂ©part dâune vaste littĂ©rature polĂ©mique qui Ă©pouse les arts, hymnes, poĂšmes et homĂ©lies utilisĂ©s par les adversaires idĂ©ologiques du christianisme orthodoxe pour mieux les retourner contre eux : Ă la lisiĂšre orientale de lâempire romain, Ephrem de Nisibe â qui finit sa vie Ă Ădesse aprĂšs la rĂ©trocession de Nisibe aux Sassanides, et y meurt au cours dâune pandĂ©mie â reprend ainsi la forme hymnique qui avait Ă©tĂ© jusque-lĂ le mĂ©dium privilĂ©giĂ© des gnostiques et les traditions juives sur Tamar qui imbuaient les milieux chrĂ©tiens de son temps, pour en parer les femmes de Matthieu et mieux prĂ©senter la bru, femme et veuve de Juda telle que la conçoit son Ăglise[166]. ZĂ©non de Mauritanie dĂ©livre Ă VĂ©rone son TraitĂ© de Juda lors du troisiĂšme dimanche du CarĂȘme entre 362 et 380, soumettant lâhistoire de Juda et Thamar Ă une lecture allĂ©gorique pour clamer le triomphe de lâĂglise sur le paganisme, les hĂ©rĂ©sies et les Juifs[167], en usant vis-Ă -vis de ces derniers dâun antisĂ©mitisme thĂ©ologique qui ne sâattaque plus Ă leur lecture supposĂ©ment littĂ©rale mais Ă leurs personnes. Jean Chrysostome dâAntioche, qui propage le chant antiphonique pour concurrencer les paĂŻens et lâaccusation de peuple dĂ©icide pour extirper de lâĂglise toute trace de pratique juive, en des termes que rĂ©pĂ©teront encore les Nazis contre les Juifs au XXe siĂšcle[168], reprend lâinterprĂ©tation dâEusĂšbe pour prĂ©senter Thamar et son engeance comme la preuve avant la lettre de lâuniversalitĂ© du message Ă©vangĂ©lique, et de sa supĂ©rioritĂ© sur la loi juive[169]. Ambroise de Milan, qui introduit le chant byzantin dans le rite romain et intervient auprĂšs de lâempereur ThĂ©odose pour le dissuader de faire reconstruire une synagogue abattue par des chrĂ©tiens, appuie cette lecture dont il dĂ©voile le sens mystique[155].
Cependant, lâopinion dâOrigĂšne sâimpose dans lâOccident chrĂ©tien, par lâintermĂ©diaire de JĂ©rĂŽme de Stridon â qui a produit la Vulgate, nouvelle traduction de la Bible en latin, devenu la langue majoritaire de lâOccident au IIIe siĂšcle, sur base du texte hĂ©braĂŻque car il lâestime plus authentique que la Septante, nĂ©cessaire pour la comprĂ©hension du Nouveau Testament et utile pour la conversion des Juifs[170] â et dâAugustin dâHippone qui a dâune part formulĂ© la condition de tĂ©moins du triomphe chrĂ©tien Ă laquelle les Juifs doivent ĂȘtre rĂ©duits, et dâautre part Ă©tabli le distinguo entre lectures allĂ©goriques de Gn 38, oĂč il est permis dâinterprĂ©ter le rĂ©cit favorablement, et littĂ©rale oĂč le modĂšle origĂ©nien doit prĂ©valoir sous peine de bouleverser les bases Ă©thiques de la sociĂ©tĂ©[171].
La distinction entre Orient et Occident apparaĂźt aussi dans le judaĂŻsme rabbinique, oĂč lâOccident ne dĂ©signe pas lâEurope mais ce que les Juifs continuent Ă appeler terre dâIsraĂ«l : exilarques et scholarques juifs de Babylone mettent Ă profit leur Ă©loignement du tumulte (bien que leur quiĂ©tude soit relative car ils doivent eux aussi se mesurer au zoroastrisme de lâempire sassanide) pour prendre lâascendant vers 359 sur le berceau juif du Levant Sud[162], et dĂ©veloppent une autre interprĂ©tation de lâhistoire de Juda et Tamar qui se soucie moins de la rĂ©demption que du respect des prescriptions[172]. Câest du reste en filigrane des pages du Talmud de Babylone quâapparaissent les premiĂšres rĂ©ponses juives aux enseignements chrĂ©tiens[173], et lâhistoire de Tamar donne en particulier matiĂšre Ă dĂ©nigrer leurs idĂ©aux en matiĂšre de sexualitĂ©[174].
Interprétations en Terre sainte
Juda et Tamar dans les Memre Marka
Le deuxiĂšme siĂšcle de lâĂšre chrĂ©tienne commence une pĂ©riode dâessor pour la communautĂ© samaritaine, libĂ©rĂ©e de la fĂ©rule juive et laissĂ©e tranquille par le nouveau pouvoir rĂ©gnant qui, occupĂ© Ă Ă©tablir ses structures, a dâautres soucis. Elle prend fin deux siĂšcles plus tard, lorsque les Samaritains tentent, conjointement aux Juifs ou avec leur appui, de secouer Ă leur tour le joug romain, avec des rĂ©sultats similaires. Câest au cours de cet intermĂšde que la liturgie samaritaine se met en place et que sont formulĂ©es la plupart de leurs interprĂ©tations, compilĂ©es dans leurs traductions ou dans les poĂšmes de Marka ben Amram[176].
Lâessentiel des interprĂ©tations samaritaines sur la pĂ©ricope surviennent dans le cadre de la guerre en lĂ©gitimitĂ© que se livrent Juifs et Samaritains, et lâhistoire de Juda et Tamar sây lit comme une critique du patriarche: « Tu as dĂ©laissĂ© Rebecca et sa demande pour Tamar », est-il dit Ă Juda dans les Memre Marka car lâancĂȘtre des JudĂ©ens a, nonobstant l'injonction de son aĂŻeule, fondĂ© sa maison avec Tamar que tous les indices textuels dĂ©signent comme CananĂ©enne[177].
Lâune des traductions samaritaines rend dâautre part afKazzÄ«ba par « âŠdans son mensonge » â Juda nâa donc pas seulement menti Ă sa bru mais aussi Ă son Ă©pouse[178]. Lâesprit du temps semble avoir par ailleurs inspirĂ© une variante textuelle de Gn 38:18 oĂč yaat figure au lieu de wyĂ„áč â comme Yaat dĂ©signe pour les Samaritains un ange, Juda ne dĂ©vie plus de sa route pour approcher la femme quâil a prise pour une prostituĂ©e, câest un ange qui lây pousse[179].
Dans le Talmud de JĂ©rusalem
AprĂšs la clĂŽture de la Mishna, câest celle-ci et non plus la Bible qui devient la seule source de loi Ă pouvoir ĂȘtre discutĂ©e, dâoĂč le nom des docteurs qui cessent dâĂȘtre des « rĂ©pĂ©titeurs » pour devenir des « expositeurs » (amoraĂŻm). La guemara (« Ă©tude ») qui rĂ©sulte de la somme de ces discussions, est hĂątivement compilĂ©e aprĂšs des articles correspondants de la Mishna dans le Talmud de JĂ©rusalem vers la fin du ive siĂšcle[180]. Outre la mishna Meguila 4:10 qui lâĂ©voque explicitement, lâhistoire de Juda et Tamar apparaĂźt Ă lâoccasion de dĂ©bats sur quelque point dâautres mishnayot et, plus frĂ©quemment, en marges ou en illustration de ceux-ci.
La mishna Ketoubot 7:5 ayant Ă©noncĂ© quâun mariage est nul si le mari a donnĂ© pour condition « quâelle remplisse quelque chose et le dĂ©verse (meÊżera) aux ordures, » des rabbins jouent sur le nom dâEr et le mot meÊżera pour enseigner que lui et â selon toute vraisemblance â son frĂšre, exemplifient ce type de mari[181].
De mĂȘme, comme la mishna Sota 1:8 Ă©voque, parmi ses exemples de rĂ©tribution mesure pour mesure, « Samson [qui] suivit ses yeux [et] câest pourquoi les Philistins crevĂšrent ses yeux, » la guemara correspondante fait remarquer quâ« un verset dit âSamson descendit Ă Timnaâ (Jg 14:1), et un autre verset dit âVoici que ton beau-pĂšre monte Ă Timnaâ » ; certains tentent des explications gĂ©ographiques mais Rabbi Simon (he) explique que lâarrivĂ©e de Juda, effectuĂ©e « au nom des cieux », est qualifiĂ©e de montĂ©e tandis que celle de Samson « nâĂ©tait pas au nom des cieux »[182].
Câest au cours dâune discussion sur les bonnes relations avec les femmes que sont abordĂ©s trois versets que Rabbi prĂ©fĂšre interprĂ©ter favorablement, dont « elle sâassit au Petaâh Einayim » (Gn 38:14) : le sens qui apparaĂźt assez Ă©videmment en premiĂšre lecture[48] ne peut, selon lui, ĂȘtre correct car « mĂȘme la prostituĂ©e parmi les prostituĂ©es nâagi[rai]t pas ainsi, » et câest donc quâelle a regardĂ© « la porte vers laquelle tous les yeux se tournent », en priant le MaĂźtre du monde de ne pas sortir « vide de cette maison » ou bien quâ« elle ouvrit les yeux » au pharisien avant lâheure quâest Juda, en lâassurant ĂȘtre « libre » de tout lien conjugal et « pure » de toute impuretĂ© menstruelle[183].
Dâanciennes traditions lĂ©gales sont resservies, dont lâutilisation par Rabbi MeĂŻr de Gn 38:24 pour interdire le remariage lĂ©virat avant trois mois Ă dater de la mort du mari[184] ou lâinterprĂ©tation rabbinique de Job 15:18 pour justifier la lecture de Gn 38 aux femmes soupçonnĂ©es dâadultĂšre par leurs maris afin de les amener Ă confesser leur acte avant de leur faire boire lâeau amĂšre[185]. Enfin, Rabbi Ba enseigne au nom de Rav Hasda que lâaccoucheuse est de ces trois personnes « qui sont crues sur le moment mĂȘme [puisque] âlâaccoucheuse prit et noua Ă sa main de lâĂ©carlate, disant celui-ci est sorti en premierâ (Gn 38:28) »[186].
Dans le Midrash classique
Ălaborant sur le Talmud de JĂ©rusalem et poursuivant les tendances exĂ©gĂ©tiques qui lâavaient prĂ©cĂ©dĂ©, le Midrash GenĂšse Rabba est compilĂ© vers le ve siĂšcle (bien que sa dĂ©nomination et son inclusion au sein du Midrash Rabba, n'aient lieu qu'un millĂ©naire plus tard) ; il adopte, comme les Midrashim tannaĂŻtiques, la forme dâun commentaire suivi mais lâinvestigation des rabbins a dĂ©sormais pour but de tirer non plus des lois du texte mais son essence et son esprit[187].
Lâhistoire de Juda et Tamar est traitĂ©e verset par verset dans le 85e chapitre de GenĂšse Rabba outre des commentaires Ă lâoccasion de la naissance de Juda ou de lâarrivĂ©e de Jacob Ă Salem, qui montrent les a priori favorables de nombre de rabbins vis-Ă -vis du rĂ©cit. Le Midrash rĂ©sulte toutefois dâune lecture approfondie des textes interprĂ©tĂ©s qui prend en compte leurs interactions avec leurs parallĂšles thĂ©matiques et littĂ©raires[120], et connaĂźt les nombreuses difficultĂ©s de la parasha â non content de rappeler lâenseignement de Rabbi Yosse[118], le Midrash enseigne que Juda devra rĂ©pondre de ses actes ainsi que de ceux de Ruben, SimĂ©on et LĂ©vi (he) devant le vicaire du roi dâĂgypte[188].
Ces opinions ne reprĂ©sentent quâune partie des lectures parmi la panoplie quâĂ©talent pĂȘle-mĂȘle les premiers articles de GnR 85, lesquels se concluent implicitement sur une tendance Ă minimiser ou sublimer chaque problĂšme rencontrĂ© au fil du rĂ©cit, tout au moins jusquâĂ la conception du messie â lâĂ©loignement de Juda, son mariage avec une CananĂ©enne malgrĂ© les avertissements rĂ©pĂ©tĂ©s de ses pĂšres, la mort de ses fils (perçue dĂšs lâĂ©poque de la Bible comme une chĂątiment pour leur pĂšre[189]), son double langage avec Tamar, lâaudace de celle-ci et le manque de scrupules de Juda Ă frĂ©quenter une prostituĂ©e[49].
Les sages du Midrash expriment Ă plusieurs reprises leur confiance en Dieu qui, disent-ils, nâenverrait aucune plaie sur le peuple dâIsraĂ«l sans en avoir prĂ©parĂ© le remĂšde auparavant.
Lâon passe ainsi progressivement, au prĂ©texte dâaborder la question du placement de lâhistoire de Juda au sein de celle de Joseph, de la critique la plus implacable Ă la dĂ©fense la plus impeccable : le rabbin galilĂ©en Lazar qui considĂšre Juda comme le seul responsable de la vente-descente de Joseph en vertu de Gn 37:27, pense que Gn 38 a Ă©tĂ© accolĂ© Ă Gn 37 « afin dâapposer descente Ă descente » â de mĂȘme que Daniel 5-8 passe de Nabuchodonozor (Dan 5:30) Ă Darius (Dan 6:1) et Balthazar (Dan 8:1) en faisant lâimpasse sur Evil-Merodach, le seul « bon » roi de Babylonie (cf. 2R 25:27â30 & Jrm 52:31â34), « afin dâapposer mĂ©chant Ă mĂ©chant » â, montrant comment Juda descend, mesure pour mesure, pour avoir fait descendre Joseph car « Juda a trahi » et menti, perpĂ©trant « une abomination ⊠en IsraĂ«l ⊠oui, Juda a profanĂ© ce qui est sacrĂ© devant Dieu » (Mal 2:11) lorsquâil est descendu Ă Adullam car « ce [serait] une descente pour lui quâil ait Ă©pousĂ© une Gentille [, ce serait une descente pour lui quâil ait enterrĂ© sa femme et ses fils][192] ».
Rabbi Yohanan sâappuie quant Ă lui sur Gn 37:26 pour voir en Juda le meneur et porte-parole de ses frĂšres, et Gn 38 suit Gn 37 « afin dâapposer âConnais doncâ Ă âConnais doncâ » â de mĂȘme que les chapitres 5-8 de Daniel apposent, selon Rabbi Shmouel bar Nahman, fin de rĂšgne Ă fin de rĂšgne. Il y a bien mesure pour mesure mais câest lorsque Juda qui avait demandĂ© Ă Jacob de reconnaĂźtre la tunique de son fils (Gn 37:32), sâentend formuler, au comble de lâhumiliation, la mĂȘme requĂȘte dans les mĂȘmes termes par sa bru (Gn 38:25). Quant aux dĂ©boires quâil a connus avant ce point du rĂ©cit, ils illustrent, comme le rapportent les rabbins Juda bar Simon (he) et Hanin au nom de Rabbi Yohanan, que « qui nâaccomplit pas la mitsva quâil a entamĂ©e, enterre sa femme et ses enfants » : tant quâĂ dissuader ses frĂšres de faire mourir Joseph, il aurait dĂ» les convaincre de le ramener Ă leur pĂšre ou sâen charger lui-mĂȘme mais nâa, pour son malheur, pas jugĂ© utile dâaller au bout de sa responsabilitĂ©[193].
Cependant, Rabbi Shmouel bar Nahman se garde de blĂąmer quelque personnage de la Bible que ce soit, et Ă©nonce que tout ce quâil arriva Ă Jacob et ses fils, fut le rĂ©sultat de la providence divine qui « prĂ©parait la lumiĂšre du messie » âcar je connais bien, moi, les desseins etc.â (Jrm 29:11)[194]. Ce nâest, pour ce rabbin, pas la juxtaposition de Gn 38 Ă Gn 37 mais Ă Gn 39 quâil convient dâinterprĂ©ter, afin dâenseigner que la femme de Potiphar Ă©tait mĂ»e, comme Tamar, par lâintention louable de perpĂ©tuer la lignĂ©e des justes, et sa mĂ©prise vint de la confiance quâelle plaçait dans lâastrologie car les astres lui prĂ©disaient que de sa maison sortirait une engeance pour Joseph sans lui prĂ©ciser que ce dessein ne serait pas rĂ©alisĂ© par elle mais sa fille Asnath[195] - [Note 27].
Prolongeant cette ligne, Rav Houna, contemporain babylonien des prĂ©cĂ©dents qui ne porte pour cette raison pas le titre de rabbi car la cĂ©rĂ©monie dâimposition ne peut se faire quâen prĂ©sence du sanhĂ©drin qui siĂšge Ă JĂ©rusalem, enseigne au nom de Rabbi Aâha quâil nây a rien Ă tirer de plus de lâaccolement de Gn 38 Ă 37 que du dĂ©sordre de Daniel 5-8 â tous deux sont des passages divinement inspirĂ©s, et il serait vain dây chercher un ordre ou une organisation comme on le verrait dans des ouvrages composĂ©s. Il rapporte dâautre part au nom de Rabbi Eliezer le fils de Rabbi Yosse le GalilĂ©en, que « qui nâaccomplit pas la mitsva quâil a entamĂ©e, cĂšde le crĂ©dit de la mitsva Ă qui la parfaira » â le verset Jos 24:32 utilisĂ© comme preuve de ces dires, puisquâil indique que les enfants dâIsraĂ«l, et non MoĂŻse, ont rapportĂ© les ossements de Joseph en terre dâIsraĂ«l alors que MoĂŻse les avait emportĂ©s dâĂgypte (Ex 13:19), est sollicitĂ© pour affirmer dâune part que la responsabilitĂ© de la vente de Joseph ne peut retomber sur le seul Juda et, dâautre part, que la seule rĂ©tribution attendue par Joseph ou mĂȘme par Dieu des enfants dâIsraĂ«l, fut de ramener ses ossements Ă lâendroit oĂč il avait Ă©tĂ© enlevĂ©, câest-Ă -dire Sichem (cf. Gn 37:13)[196].
Enfin, « les rabbins », câest-Ă -dire lâensemble du collĂšge rabbinique, rapportent les conclusions de Rav Houna Ă tout le Livre de Daniel et achĂšvent dâexonĂ©rer Juda en sâappuyant sur Mic 1:15 pour prĂ©senter sa descente comme la glorieuse campagne du « saint », « roi » et « Ă©lite dâIsraĂ«l »[197]. Sâil est descendu, câĂ©tait pour montrer Ă ses frĂšres comment se dĂ©brouiller et prendre femme puisque Jacob, obnubilĂ© par la disparition de Joseph, nâavait plus le cĆur Ă le faire[198] ; le compagnon quâil se ferait Ă Adullam, « Hira, câest Hiram [âŠ] ainsi quâil est dit âCar Hiram avait, de tout temps, aimĂ© Davidâ (1 Rois 5:15) »[199] ; la femme quâil sâest choisie est la fille dâun « homme du lieu », soit un habitant du pays de Canaan mais non un membre des tribus cananĂ©ennes qui le peuplent, et mĂȘme un « luminaire local » car le midrash lit Shoua comme shoÊża (« notable, » cf. Job 34:19)[200]. Quant aux enfants de Juda, leur nom dicterait leur devenir : « elle conçut un fils, et elle (sic) lâappela ÊżEr [car il fut] vidĂ© (houÊżara) du monde, [...] elle lâappela ÊŸOnan [car il apporterait] lâaffliction (ÊŸanina) sur lui-mĂȘme [et] elle lâappela ChĂȘla [car il fut] implantĂ© (nishtal) dans le monde » ou, selon les Ă©ditions courantes, « y Ă©tablit une descendance (nishtalshel) »[201]. Si le texte prĂ©cise quâ« il â ChĂȘla et non, comme le texte biblique le laisse entendre, Juda â Ă©tait Ă Kezib », câest pour expliquer quâelle cessa (pasqat), aprĂšs cette naissance, dâenfanter[Note 28].
LâapologĂšte a-t-il lu « parce quâelle avait voilĂ© son visage » comme « lorsquâelle voila son visage, [il dĂ©via etc.][202] » ?
A-t-il substitué au lÚzona (« comme une prostituée ») de Gn 38:15, lo zona (« non-prostituée)[203] » ?
Sâest-il basĂ© sur les normes du port du voile qui avaient cours en son temps[Note 2] ?
Le midrash disculpe Juda de la mort de son fils aĂźnĂ©, en jouant une nouvelle fois entre le nom dâEr et la racine Êż-r-h (« Ă©vider »), car il fut mauvais aux yeux de Dieu de son propre fait, pour avoir « labourĂ© dans les jardins » et « dĂ©vidĂ© dans les ordures »[204]. Juda est de plus â de nombreuses traditions le rappellent â un juste qui accomplit, Ă lâinstar dâAdam, NoĂ©, les patriarches dâIsraĂ«l et Joseph ce qui est Ă©crit dans la Torah avant quâelle ne fĂ»t donnĂ©e Ă MoĂŻse lorsquâil initia, en ordonnant Ă son fils Onan de venir Ă la femme de son frĂšre pour donner une semence Ă celui-ci, un commandement biblique[205]. Cependant, Onan sây refusa, « batta[n]t au dedans et jeta[n]t en dehors »[206]. Juda est excusĂ© dâavoir prĂ©sumĂ© que Tamar portait malheur Ă ses Ă©poux â bien que Gn 38 ait eu, entre autres buts, de contester cette croyance[207] â car si la devination est interdite dans le judaĂŻsme, il est tout de mĂȘme permis de se fier aux « signes » lorsquâil sâagit dâune femme, dâune maison ou dâun enfant[208].
« Longtemps aprĂšs » (Gn 38:12), câest-Ă -dire douze mois selon la chronologie Ă©tablie par Rabbi Yosse[209], la femme de Juda meurt et il se rend Ă la fĂȘte de la tonte â le midrash qui rappelle les chamboulements qui se sont produits ou se produiront pour Nabal, Laban et Absalon, souligne que Juda « monte Ă Timna, » contrairement Ă Samson car lui y va pour Ă©tablir une lignĂ©e de rois[210]. Quant Ă Tamar qui se couvre dâun voile lorsquâelle apprend la venue de son beau-pĂšre, le midrash utilise le silence biblique sur son monde intĂ©rieur[49] et le prĂ©cĂ©dent de Rebecca pour suggĂ©rer quâelles lâont toutes deux fait non par dissimulation mais par pudeur, et quâelles en seront toutes deux rĂ©compensĂ©es par la naissance de jumeaux[211]. RĂ©cusant implicitement la lecture simple â et inconvenante â du texte, Rabbi Ammi propose de lire petaâh Einayim comme le « portail vers lequel tous les yeux sont pendus, » et Tamar prie de ne pas « sortir âvideâ de la maison de Juda » ou comme lâ« ouverture de lâĆil, » et Tamar donne Ă Juda toutes les garanties que leur commerce nâentraĂźne aucune impuretĂ© menstruelle ou relation extramatrimoniale[183].
« Juda la vit, » et Rabbi Aâha (les Ă©ditions courantes portent « Rabbi Hiyya bar Zabda[Note 29] »), peut-ĂȘtre gĂȘnĂ© par la redondance entre Gn 38:15 et 38:14 puisquâil y est dĂ©jĂ dit que Tamar avait pris un voile pour sâen recouvrir avant de retrouver son beau-pĂšre, conclut Ă une nouvelle marque de pudeur : elle avait voilĂ© son visage non au moment de leur rencontre mais lorsquâelle habitait chez lui. Le rabbin conseille toutefois de toujours savoir Ă quoi ressemblent sa belle-sĆur et dâautres proches afin de ne pas commettre, comme Juda, dâinceste par inadvertance. Selon une autre lecture qui va Ă lâencontre du sens simple du verset, Juda considĂ©ra quâil ne pouvait pas sâagir dâune prostituĂ©e puisquâelle sâĂ©tait voilĂ©e et il sâapprĂȘtait Ă passer son chemin mais Dieu soi-mĂȘme le fit dĂ©vier de la route contre son grĂ© ou en lui suscitant, selon Rabbi Yohanan, un ange prĂ©posĂ© au dĂ©sir pour lui dire : « Juda, oĂč vas-tu ? DâoĂč les rois se dressent, dâoĂč les grands se dressent[202] ? » Rabbi Hounya ajoute que Tamar Ă©tait non seulement pudique mais presciente car « lâesprit de saintetĂ© (en) scintilla » en elle lorsquâelle demanda Ă Juda des gages qui reprĂ©sentaient, versets bibliques Ă lâappui, la royautĂ©, les sages du sanhĂ©drin et le roi-messie appelĂ©s Ă descendre dâeux ; le midrash poursuit en tirant de lâexpression « de lui », apparemment superfĂ©tatoire, que Tamar conçut « des hommes forts comme lui et des justes comme lui[212] ».
La mise en branle de la lignĂ©e messianique marque un tournant dans le chapitre : le Midrash sâapplique dĂ©sormais Ă montrer que Dieu dirige tout, et il revient Ă une position plus nuancĂ©e envers Juda et Tamar, comportant mĂȘme des opinions mitigeant les mĂ©rites de Juda Ă lâencontre du texte biblique[213] â Juda bar Nahman (he) renoue au nom de Rech Lakich avec la ligne dâinterprĂ©tation gĂ©nĂ©rale de Rabbi Yohanan pour souligner lâironie divine lorsque Hira revient bredouille avec le chevreau que Juda avait promis en paiement car Juda qui avait trompĂ© son pĂšre avec un chevreau, aura Ă©tĂ© trompĂ© par Tamar avec un chevreau[214]. Au bout de trois mois â mais peut-ĂȘtre plus tĂŽt car Rav Houna objecte au nom de Rav Yossef quâil est dit « environ trois mois » et un maĂźtre anonyme tire dâ« et la voilĂ enceinte de la prostitution » que la grossesse de Tamar fut connue avant mĂȘme dâĂȘtre apparente parce quâelle se caressait le ventre en se fĂ©licitant de porter en ses entrailles des rois et des rĂ©dempteurs[215] â, on rapporta lâaffaire Ă Juda et comme sa bru Ă©tait, ainsi que le rapporte Efrayim Meqshaa au nom de Rabbi MeĂŻr, la fille de Sem (identifiĂ© par les rabbins Ă MelchisĂ©dek, roi de Salem et prĂȘtre du dieu suprĂȘme), il ordonna quâelle soit sortie pour ĂȘtre brĂ»lĂ©e car « la fille dâun prĂȘtre qui se dĂ©shonore par la prostitution, c'est son pĂšre qu'elle dĂ©shonore : elle pĂ©rira par le feu » (Lv 21:9)[216].
Les premiers mots de Gn 38:25 que lâon traduit par « on lâemmenait » (littĂ©ralement : « elle Ă©tait sortie »), sont Ă©crits h-w-ÊŸ moutsÊŸet mais h-w-ÊŸ qui sâĂ©crit hou (il), doit se lire hi (elle) (en) â Rav Houna en tire quâ« elle et lui doivent sortir » pour ĂȘtre brĂ»lĂ©s. Par ailleurs, la suite du verset pose deux problĂšmes Ă Rabbi Youdan : il est, dâune part, incommodĂ© par cette forme verbale inhabituelle de la racine y-áčŁ-ÊŸ (qui correspond Ă lâ« Emmenez-la » du verset prĂ©cĂ©dent), et dĂ©cide quâil ne faut pas lire hi moutsÊŸet mais hi motsÊŸet (« elle trouv[a] »), de la racine m-áčŁ-ÊŸ car il est question ici, comme en Lv 5:22 (« ou si trouvant un objet perdu etc. ») dâobjets perdus et retrouvĂ©s, dâautant plus que Gn 38:20-23 a utilisĂ© cette racine Ă trois reprises (« il ne la trouva point ⊠Je ne l'ai pas trouvĂ©e ⊠tu n'as pu la trouver ») ; dâautre part, Tamar marchande avec Juda « ton cordon » en Gn 38:18 mais elle lui demande en Gn 38:25 « Ă qui appartiennent ⊠ces cordons » â le rabbin rĂ©sout ces difficultĂ©s en enseignant que Dieu a miraculeusement mais discrĂštement crĂ©Ă© dâautres gages pour que Tamar puisse les trouver aprĂšs que les premiers avaient Ă©tĂ© perdus[217]. Enfin, Gn 38:25 emploie deux fois le mot « dire » puisque Tamar « envoya dire ⊠pour dire » â le midrash dĂ©duit de cette redondance que Juda a dâabord voulu « couvrir » lâaffaire et câest pourquoi sa bru a coupĂ© court Ă cette tentative en lui intimant « Connais donc ! ». Non seulement sâest-elle faite lâagent de la rĂ©tribution divine mesure pour mesure, comme lâenseigne Rabbi Yohanan, en rappelant Ă Juda ce quâil avait dit Ă son pĂšre mais elle a sous-entendu « âReconnais doncâ ton crĂ©ateur [car] ceux-lĂ â « ces gages » ou peut-ĂȘtre « ces enfants[Note 30] » â sont Ă toi et Ă ton crĂ©ateur[218]. »
Rabbi Yirmeya rapporte lui aussi, au nom dâun autre rabbin, que Juda ne se rĂ©solvant pas Ă avouer, câest le souffle de saintetĂ© qui fait entendre « câest de moi » (une autre version de ce midrash modĂšre la critique envers Juda : il ne pouvait pas dire « câest de moi » car Dieu seul peut tĂ©moigner de ce quâil a cachĂ© aux hommes)[219]. Pour dâautres, il est Ă©vident que câest Juda qui lâa dit, et il a accompli Ă ce moment lâessence de son nom, Yehouda, Celui-qui-reconnaĂźt (Dieu)[220]. Un autre midrash, glosant sur Prov 28:13, adopte la position mitoyenne en rapportant « celui qui confesse [ses pĂ©chĂ©s] et y renonce, sera pardonnĂ© » à « Juda le juste » â Juda a fautĂ© mais il est gratifiĂ© par son repentir dâun qualificatif qui Ă©choit gĂ©nĂ©ralement Ă Joseph[221].
La controverse entre ces interprĂ©tations de Juda, juste imparfait ou accompli, revient dans deux midrashim, lesquels Ă©laborent autour dâune tradition plus ancienne qui compare Tamar et ses enfants aux compagnons de Daniel sauvĂ©s du feu : selon cette ancienne tradition, consignĂ©e dans un Midrash sur le Cantique des Cantiques, « cette taille qui te distingue est semblable Ă un palmier » (Cant 7:8) doit ĂȘtre compris comme « cette grandeur te fait ressembler Ă Tamar » parce quâĂ lâinstar de Tamar qui devait brĂ»ler et fut sauvĂ©e, les compagnons de Daniel se tinrent droits devant la fournaise dans laquelle on voulait les jeter, et « que tes seins soient pour moi comme des grappes de la vigne » (Cant 7:9) suggĂšre quâil en fut de mĂȘme pour Peretz et Zeraâh qui sont figurĂ©s par « tes deux seins sont comme [âŠ] les jumeaux de la biche » (Cant 7:4)[222]. Dans les deux Ă©laborations qui figurent en deux endroits distincts de GenĂšse Rabba, Juda a mĂ©ritĂ©, mesure pour mesure, de sauver Daniel et ses compagnons pour avoir sauvĂ© non pas trois mais quatre Ăąmes justes[Note 31] : selon le midrash plus « critique », cette quatriĂšme Ăąme est la sienne puisque Juda a reconnu, en disant « elle est plus juste que moi, » quâil aurait dĂ» lui aussi brĂ»ler tandis que dâaprĂšs lâautre, le quatriĂšme juste sauvĂ© par Juda est Joseph[223] (la justice innĂ©e des enfants de Tamar, est quant Ă elle dĂ©duite par le Midrash de la forme pleine (en) du mot teomim, « jumeaux, » en Gn 38:27 alors que dans le cas de Rebecca, il Ă©tait Ă©crit tomim Ă la forme dĂ©fective (en) puisque seul Jacob naĂźtrait juste[224]).
Le fin mot de lâhistoire revient Ă Jacob, dont les rabbins sollicitent de la rĂ©pĂ©tition de « je savais » en Gn 48:19 quâil avait une connaissance surnaturelle des alĂ©as de ses fils Juda et Ruben[225] bien quâil nâen ait pas eu besoin selon dâautres, puisque la confession publique de Juda entraĂźna celle de Ruben, et la paix revint dans la tente de Jacob[226]. AprĂšs quâIsraĂ«l a fait rougir Ruben, Simon et LĂ©vi en leur rappelant leurs disgrĂąces avec les femmes, Juda craint que Jacob ne lui reproche son histoire avec Tamar mais il lui dit: « Juda, tes frĂšres te reconnaĂźtront » (Gn 49:8)[227], car finalement, Juda a pu raidir sa nuque lorsquâil a dĂ©clarĂ© Tamar plus juste que lui et, mesure pour mesure, « ta main fera ployer le cou de tes ennemis » (Gn 49:8) ; pour avoir fait preuve de justice et non de simple vaillance, il sera appelĂ© Ă diriger les enfants dâIsraĂ«l et ceux-ci le reconnaĂźtront comme leur seul roi, puisquâils ne sont plus, comme le fait remarquer Rabbi Shimon bar YohaĂŻ, appelĂ©s RubĂ©nites ou Simonites et caetera mais JudĂ©ens[228].
Lâaccouchement de Tamar donne lâoccasion au Midrash de rappeler lâhabilitation dâune sage-femme Ă tĂ©moigner illico de lâordre des naissances en cas de grossesses multiples ainsi que de l'identitĂ© se la mĂšre[186] mais surtout de gloser sur le nom de Peretz, « celui qui brise la clĂŽture [et] monte devant eux » (Mic 2:13)[229]. Vient ensuite son frĂšre Ă la main sertie dâĂ©carlate et il est par consĂ©quent appelĂ© Zeraâh â le midrash compte quatre occurrences du mot « main » en Gn 38:28-30, ce qui prĂ©figure selon Rabbi Youdan les quatre fois oĂč Akhan le Zarâhite avancera la main vers les butins consacrĂ©s auxquels les IsraĂ©lites nâavaient pas le droit de toucher (en) ; Rav Houna, ne trouvant pas trace de ces quatre infractions mais dâune seule, enseigne quâil a pris au cours de celle-ci quatre objets, « un belle armure de Shinaar, deux cents shekalim d'argent [et] un lingot d'or du poids de cinquante shekalim » (Jos 7:21), ce qui nâen fait toutefois que trois[230].
LâinterprĂ©tation de Gn 38 par les sages du Midrash sâappuie Ă lâĂ©vidence sur les prĂ©mices du messianisme contenus dans le texte, et ils veulent mettre en Ă©vidence, en appuyant occasionnellement le trait, la naissance ou la rĂ©demption du futur dirigeant de la nation juive Ă lâaide dâune dame de grande vertu ; Juda ressort au terme de GenĂšse Rabba comme un juste accompli ou Ă tout le moins un repentant qui se tient, selon la tradition juive ultĂ©rieure, lĂ oĂč les plus grands justes ne peuvent se tenir[221]. Bien que lâon ne trouve pas de lien convaincant entre le messianisme du Midrash amoraĂŻque et les soulĂšvements populaires de son temps comme la rĂ©volte juive contre Constance Gallus[231], le but des sages est bien dâenseigner Ă une nation de plus en plus dĂ©sespĂ©rĂ©e que le messie peut encore venir et restaurer la royautĂ© de Juda[232], mĂȘme et surtout si les dirigeants du sanhĂ©drin descendant de David, ne semblent plus Ă la hauteur de la tĂąche depuis Juda le Prince[233].
Les rabbins ont, quoiquâil en fĂ»t, dĂ©livrĂ© un autre message, plus thĂ©ologique et moins soumis aux circonstances du moment : si la Bible mentionne seulement que Dieu a mis Ă mort deux individus qui lui dĂ©plaisaient sans que le motif soit forcĂ©ment Ă©vident, les sages montrent la prĂ©sence immanente et permanente de Dieu dans ce rĂ©cit sans thĂ©ophanie apparente[234], enseignant quâil guide les Ă©vĂšnements vers leur conclusion voulue en rĂ©tribuant les actes de lâhumanitĂ© mesure pour mesure selon leur dĂ», ce qui garantit dans le mĂȘme temps le respect du libre-arbitre humain et le savoir absolu du divin[190].
Juda et Thamar au cénacle de Césarée
Les premiers pĂšres de lâĂglise florissent aux cĂŽtĂ©s des rabbins dont ils frĂ©quentent un temps les acadĂ©mies avant dâouvrir leurs propres cĂ©nacles oĂč OrigĂšne, le compatriote chrĂ©tien de Philon dâAlexandrie, utilise dâune part les Ă©crits de celui-ci pour gagner sous couvert de platonisme les jeunes paĂŻens aux nouvelles doctrines[235], et tente dâautre part de convertir les sages juifs Ă sa cause[236]. Ces missionnaires, moines, prĂ©cheurs, ermites ou dignitaires qui entendent promouvoir le christianisme comme seul vĂ©ritable porteur de la rĂ©vĂ©lation du dieu dâIsraĂ«l tandis que le judaĂŻsme nâen serait plus quâun moment dorĂ©navant rĂ©volu, nâen recourent pas moins, quoiquâassez peu fidĂšlement, aux traditions et mĂ©thodes dâinterprĂ©tation juives pour trouver dans la Bible hĂ©braĂŻque de quoi prĂ©senter la nouvelle doctrine comme la vĂ©ritable foi dâIsraĂ«l[237] : Justin de Naplouse remet des traditions juives au goĂ»t du jour pour tirer du bĂąton de Juda (Gn 38:18) une rĂ©fĂ©rence Ă la croix et Ă la passion en vertu dâune infĂ©rence analogique entre ce bĂąton et celui de Ps 23:4 (« ton bĂąton et ta houlette sont ceux qui me consolent »)[238] - [Note 32], et pour lier les fils Ă©carlates pendus Ă la main du premier-nĂ© et Ă la fenĂȘtre de Rahab afin de figurer « le sang du Christ par lequel sont sauvĂ©s les prostituĂ©s ou injustes de jadis dans toutes les nations »[239] - [Note 33]. Poursuivant dans cette veine, IrĂ©nĂ©e de Lyon qui opĂšre sous dâautres cieux, y voit le sang versĂ© par les justes â câest-Ă -dire Abel et tous les personnages de lâAncien Testament qui annonçaient de prime abord JĂ©sus et sa Passion et, plus gĂ©nĂ©ralement, le symbole de la foi sans la circoncision â le christianisme renoue dans cette optique avec la spiritualitĂ© des patriarches avant Abraham (qui a, selon Tertullien, cessĂ© dâĂȘtre le pĂšre spirituel des chrĂ©tiens aprĂšs sa circoncision[240]), refermant la parenthĂšse du judaĂŻsme oĂč lâon a eu besoin de la circoncision comme signe dâalliance, et qui lui avait temporairement laissĂ© la place de mĂȘme que Zara avait retirĂ© sa main[241]. Hippolyte de Rome qui sâintroduit comme lâexĂ©gĂšte du Targoum, avance que Juda qui renvoie Thamar, câest JĂ©sus qui, arrivĂ© au sommet du Golgotha, prie les femmes qui lâavaient accompagnĂ© (en) de sâen aller et, comme elles â dit le prĂȘcheur â, Thamar sâexĂ©cute en pleurant ; Juda lui promet alors, afin de la consoler, quâil lui donnera SĂ©la comme JĂ©sus leur annonce quâil sâapprĂȘte Ă ressusciter. Thamar quâon avertit de la venue de Juda et qui se dĂ©fait de ses habits de veuve pour se draper dâun voile avant dâaller le retrouver, câest la sainte communautĂ© qui est avertie de lâarrivĂ©e de JĂ©sus par les apĂŽtres et qui se dĂ©fait de ses habitudes de jadis pour se draper dans les « habits [âŠ] de la Nouvelle Alliance » afin dâaller le retrouver. Les trois gages quâelle reçoit de Juda, sont le sang, le corps et la confession dont JĂ©sus a fait cadeau Ă la sainte communautĂ© afin de la libĂ©rer de la honte liĂ©e aux anciennes pratiques, « [de mĂȘme que] Thamar espĂ©rait de la progĂ©niture de la race dâAbraham afin dâĂȘtre libĂ©rĂ©e de la honte »[158].
Le cas de Gn 38 est cependant particulier car dĂšs le moment oĂč son contenu est relu Ă la lumiĂšre des gĂ©nĂ©alogies de JĂ©sus, câest Marie qui est reconnue comme la mĂšre du messie, tandis que Juda et Thamar nâen sont plus que de lointains ancĂȘtres. Or, dĂšs lâinstant oĂč le christianisme a cessĂ© dâĂȘtre affaire de Juifs pour essaimer en terres grecques ou romaines oĂč lâon prĂŽne la droiture et la puretĂ© des mĆurs, les problĂšmes soulevĂ©s par le rĂ©cit le rendent dâautant plus piquant que le messie JĂ©sus est appelĂ© Ă racheter lâhumanitĂ© de ses fautes. OrigĂšne qui a popularisĂ© lâinterpĂ©tation de la Bible selon les quatre sens de lâĂ©criture, a certes lu et traduit Gn 38 dans ses Hexaples mais il annonce Ă ses catĂ©chumĂšnes quâil ne commentera ni « lâhistoire de Juda et Thamar ni ce qui se rapporte Ă elle »[242] car
« en ce qui concerne donc lâhistoire, il y a des choses utiles pour tous et dâautres qui ne le sont pas pour tous. Ainsi, [âŠ] lâhistoire de Lot et de ses filles a-t-elle une utilitĂ© au sens spirituel ? Dieu le sait, comme le saurait aussi celui Ă qui il ferait la grĂące de savoir expliquer ce passage. Mais au sens historique, on peut toujours chercher ! [âŠ] Pareillement quel profit ai-je Ă tirer, si on se borne Ă la raconter, de lâhistoire de Juda, de Tamar et de ce qui advint Ă cette derniĂšre[243] ? »
Sa rĂ©serve ne porte cependant, Ă premiĂšre vue, que sur le sens « historique, » câest-Ă -dire littĂ©ral de Gn 38, mais non sur lâallĂ©gorie quâil utilise pour expliquer le destin dâEir, lâaĂźnĂ© de Juda qui nâest que peau, selon lâinterprĂ©tation du nom par Philon : il ne pouvait, dit OrigĂšne, pas plus agrĂ©er Ă Dieu que la peau des offrandes en holocaustes ne peut lui ĂȘtre offerte (Lv 1:6)[244]. Pour lui et ceux qui sont, comme lui, si extrĂȘmement dĂ©plaisants Ă Dieu, la mort est un dernier ressort « car il est mort et câest pour le pĂ©chĂ© qu'il est mort une fois pour toutes ; il est revenu Ă la vie et câest pour Dieu quâil vit » (Rom 6:10)[245]. Aunan aussi devait mourir car il avait choisi, dans son Ă©goĂŻsme philonien, de retenir pour lui la semence de la connaissance naturelle, prĂ©fĂ©rant la rĂ©pandre au sol que la faire germer dans le monde Ă lâinstar du serviteur de la parabole des talents (Matt 25:18) ; or, comme lâenseignent les Ă©critures, « celui qui sĂšme pour sa chair moissonnera de la chair la corruption » (Gal 6:8)[246].
OrigĂšne ne dit toutefois, contrairement Ă Hippolyte, rien de Selom ou du renvoi de Thamar par Juda, et il revient Ă son intransigeance premiĂšre sur la rencontre entre Juda et Thamar aux portes dâAinan â tandis que son prĂ©dĂ©cesseur Ă la DidascalĂ©e, ClĂ©ment dâAlexandrie, reprend sous forme condensĂ©e lâinterprĂ©tation de Philon pour la prĂ©senter comme celle du « vĂ©ritable amoureux de la science » avec la science mĂȘme, sans jamais cesser de confesser Dieu (ClĂ©ment ajoute au passage que la prostituĂ©e, sâil devait y en avoir une, serait la philosophie sans Dieu)[247], OrigĂšne explique dans son HomĂ©lie sur Luc 3, que lâĂ©vangĂ©liste a fort judicieusement Ă©vitĂ© de mentionner les femmes dans la gĂ©nĂ©alogie du Christ car elles ont fait, Ă lâexception de Marie dont la virginitĂ© est perpĂ©tuelle et la conception immaculĂ©e, « ce que les Ă©critures rĂ©prĂ©hendent. » LâallĂ©gorie aurait seulement dĂ©placĂ© les rapports amoureux sur un terrain plus convenable, et rien ne devrait, aux yeux du prĂ©dicateur hellĂšne, occulter lâimmoralitĂ© de Thamar qui sâest « unie par fraude Ă son beau-pĂšre » ; seul JĂ©sus avait le pouvoir et la mansuĂ©tude de la sauver, ainsi que Rahab la femme lĂ©gĂšre, Ruth lâĂ©trangĂšre et la femme dâUrie adultĂšre, en choisissant leur lignĂ©e pour se faire chair[248].
OrigĂšne renoue avec ses prĂ©dĂ©cesseurs et lâallĂ©gorie dans son commentaire sur le Cantique des Cantiques : Ă lâinstar de Justin de Naplouse qui avait rapprochĂ© croix de JĂ©sus et bĂąton de Juda (Gn 38:18)[238], OrigĂšne joue sur les colliers de Gn 38:18 (dans la version septantique) et Cant 1:10 (« Charmantes sont tes joues ornĂ©es de rangs de perles, ton cou parĂ© de collier[s] ») pour figurer le rachat de la communautĂ© proto-chrĂ©tienne par les cadeaux dont JĂ©sus lui a fait don (OrigĂšne suit lĂ Hippolyte de Rome[158]) â lâĂglise Ă©tait, comme Thamar, pĂ©cheresse et hantĂ©e par des fausses doctrines avant de rencontrer JĂ©sus mais il a transformĂ© ses erreurs en autant de dogmes quâil a alignĂ©s, comme on enfile les perles dâun collier[249].
Il suit une nouvelle fois Justin sur le fil rouge de Zara[239] Ă lâoccasion dâhomĂ©lies sur Lv 14:4 et Matt 27:28 : si lâĂ©toffe rouge a le pouvoir de purifier le lĂ©preux, câest quâelle et le manteau rouge quâon fait revĂȘtir Ă JĂ©sus lors de la Passion, figurent le sang sacrĂ© qui a coulĂ© de son flanc lorsquâun soldat lâa transpercĂ© de sa lance (Jn 19:34). PharĂšs n'est pas oubliĂ© puisquâOrigĂšne Ă©tablit une correspondance entre la clĂŽture brisĂ©e par PharĂšs, et la paroi mitoyenne abattue par JĂ©sus (Eph 2:14-15)[250].
La figure dâOrigĂšne et son modĂšle dâinterprĂ©tation oĂč Thamar (ni Juda) ne joue plus de rĂŽle dans le projet messianique, feront fortune dans le christianisme ultĂ©rieur mais elles nâen seront pas moins contestĂ©es, dans sa propre acadĂ©mie et en dehors de celle-ci.
EusĂšbe de CĂ©sarĂ©e, instruit par Pamphile de CĂ©sarĂ©e dans lâenseignement du maĂźtre alexandrin prĂšs dâun siĂšcle aprĂšs quâil lâa formulĂ©, est lâauteur prolifique dâune Ćuvre hagiographique, historique et hermĂ©neutique qui a Ă©tabli dans sa Preparatio evangelica que vingt-deux ans sĂ©parent la vente de Joseph de ses retrouvailles avec son pĂšre[251]. Il a aussi rĂ©digĂ© un guide des noms (et lieux) hĂ©breux pour les pĂšlerins en Terre sainte, oĂč il situe Odollam et Kasbi par rapport aux villes dâĂleuthĂ©ropolis et Diospolis tandis quâAinan se trouve Ă mi-chemin entre cette derniĂšre et Ălia, et devrait son nom Ă une source locale ; un culte idolĂątre sây tient et sâest poursuivi jusquâĂ son Ă©poque malgrĂ© les efforts de lâempereur Constantin, ce qui expliquerait que Juda ait pu prendre Thamar pour une hiĂ©rodule[252].
Ăpiphane de Salamine, qui Ă©crit environ un demi-siĂšcle plus tard, compte quant Ă lui parmi les pĂšres du dĂ©sert qui ont remplacĂ© les sectaires judĂ©ens dans les dĂ©serts d'Ăgypte et de Syro-Palestine. Il est principalement connu pour son Panarion, un catalogue des hĂ©rĂ©sies oĂč il entend prouver Ă coup de versets lâinconduite des sectes par lui recensĂ©es. OutrĂ© par lâinfluence de la philosophie grecque sur OrigĂšne car elle lâa conduit Ă subordonner JĂ©sus Ă Dieu, il assĂšne que les « origĂ©nistes » rĂ©alisent, « pour le dire poliment, lâacte dâAunan le fils de Judas » : professant un mode de vie monastique et rejetant par consĂ©quent le mariage, ils sâadonnent hypocritement aux plaisirs dâici-bas en pratiquant le coitus interruptus ou en gaspillant leur semence dans la terre. Il a condamnĂ© auparavant une autre secte qui en fait de mĂȘme mais dans le cadre du mariage, et attribue erronĂ©ment ce comportement Ă Selom plutĂŽt quâEr[253].
EusĂšbe qui a adoptĂ© sur la trinitĂ© une opinion proche dâOrigĂšne oĂč Dieu et JĂ©sus sont dâune substance similaire mais diffĂ©rents, diverge de sa position sur Gn 38 : priĂ© par son disciple StĂ©phane de donner la raison de lâinclusion de Thamar en Matt 1:3, il explique â aprĂšs avoir soulignĂ© lâanachronisme des accusations dâenfreinte Ă la loi des Ă©critures, puisquâil nây avait ni MoĂŻse pour lâavoir donnĂ©e ni prophĂštes pour la vouloir appliquĂ©e â que la volontĂ© de procrĂ©ation qui anime Thamar est louable Ă plus dâun titre. Elle a non seulement voulu Ă©viter lâopprobre dâĂȘtre « sans nom » (lâargument sera repris par Jean Chrysostome[254]) mais elle aurait pu trouver un autre homme avant ou aprĂšs ses rapports avec Juda ; quâelle ne lâait pas fait prouve amplement aux yeux dâEusĂšbe quâelle tenait Ă ce que ses enfants soient de lâengeance dâAbraham, Isaac et IsraĂ«l. Dâautre part, la qualifier de prostituĂ©e va Ă lâencontre du sens moral du texte : elle a vĂ©cu dans la chastetĂ© aussi longtemps quâelle avait pris le veuvage dans la maison de son pĂšre, et a honorĂ© les engagements pris par son beau-pĂšre pour elle. MĂȘme lorsquâelle a choisi de sâunir avec un homme mĂ»r aprĂšs y avoir Ă©tĂ© poussĂ©e par la crainte de perdre sa fĂ©conditĂ©, elle a eu la dĂ©cence de ne pas rencontrer Juda du vivant de son Ă©pouse et a fait montre de continence tout au long de leur Ă©change ; Juda nâavait en revanche aucune intention dâhonorer ses engagements depuis le dĂ©but, et il a lĂąchĂ© la bride Ă ses envies sitĂŽt sa femme dĂ©cĂ©dĂ©e. Câest, conclut EusĂšbe, pour toutes ces raisons que Dieu dĂ©cida de lui donner assistance : elle aura non seulement Ă©tĂ© justifiĂ©e par Juda mais une naissance gĂ©mellaire surviendra au terme dâun unique rapport pour la rĂ©compenser dâavoir voulu « faire partie du peuple de ceux qui sont amis de Dieu quoiquâelle fĂ»t Ă©trangĂšre »[255].
EusĂšbe se dĂ©marque ensuite de Philon pour enseigner Ă StĂ©phane ce qui lui semble la principale leçon du texte ainsi que lâun de ses plus grands mystĂšres : Matt 1:3 signale aussi Zara, lâaĂźnĂ©-puĂźnĂ© marquĂ© de lâĂ©carlate, alors que cet enfant ne participe pas de la gĂ©nĂ©alogie de JĂ©sus. Ălaborant sur le prĂ©cĂ©dent dâIrĂ©nĂ©e, EusĂšbe dĂ©place la rupture entre christianisme et judaĂŻsme au don de la loi Ă MoĂŻse : Zara, exemplifiĂ© entre autres par HĂ©noch, NoĂ©, Japhet, Sem ou MelchisĂ©dek â le christianisme rejette lâidentification rabbinique entre les deux personnages â a brillĂ©, conformĂ©ment Ă son nom, sur les peuples dâavant MoĂŻse tandis que PharĂšs, la « division, » reprĂ©sente les Pharisiens qui se sont â comme lâexpliquera aussi JĂ©rĂŽme de Stridon[256] â sĂ©parĂ©s (littĂ©ralement, « divisĂ©s ») de ces peuples par leurs statuts, Ă©rigeant une paroi mitoyenne qui les en coupait, et que JĂ©sus a abattue lorsquâil a portĂ© la bonne nouvelle aux Gentils[257].
Juda et Tamar dans le Talmud de Babylone
Le Talmud de Babylone qui sâĂ©labore parallĂšlement au Talmud de JĂ©rusalem sur base dâun mĂȘme matĂ©riau mishnaĂŻque, traite comme lui de Gn 38 sous diffĂ©rents points de vue, selon le sujet Ă©tudiĂ© : les rabbins commentent par exemple Gn 38:6-10 dans le cadre dâune discussion sur les bonnes pratiques conjugales Ă la page 34, folio b, du traitĂ© YĂ©vamot, et le passage est Ă©galement traitĂ© avec Gn 38:12 sous lâangle de rĂ©tribution mesure pour mesure Ă la page 13b du traitĂ© Sota, oĂč le corps du rĂ©cit â Gn 38:13-26, Ă lâexception du passage oĂč Hira cherche Tamar sans la trouver â a Ă©tĂ© analysĂ© trois pages plus tĂŽt (Sota 10a-b), au sein dâun long exposĂ© sur cette doctrine. Des Ă©lĂ©ments du texte apparaissent plus ponctuellement Ă travers le corpus pour en tirer qui des ordonnances lĂ©gales qui des leçons Ă©difiantes[258].
Toutefois, le Talmud babylonien qui partage avec son homologue galilĂ©en les mĂȘmes mĂ©thodes et utilise les mĂȘmes traditions, ne parvient pas aux mĂȘmes conclusions : il enseigne, au nom de Rabbi Yosse ben Halafta, que lâ« en ce temps-là » de Gn 38:1 est lâun de ces « temps » marquĂ©s pour la calamitĂ© (cette affirmation a donnĂ© lieu Ă divers commentaires ultĂ©rieurs, Rachi pensant que la calamitĂ© est Ă venir car Juda perdra ses fils et Tamar manquera de mourir sur le bĂ»cher tandis que le Ner Heskelim (he) la rapporte Ă Jacob sâaffligeant de la perte de Joseph)[259].
Pour nâavoir pas menĂ© le sauvetage de Joseph Ă son terme, Juda en a non seulement perdu le mĂ©rite, comme lâenseigne Rabbi Hama le fils de Rabbi Hanina (en) mais il est aussi descendu, selon Rabbi ElĂ©azar, de son statut parmi ses frĂšres < en rĂ©tribution mesure pour mesure de sa « descente » du sauvetage de Joseph > et il enterre, selon Rabbi Shmouel bar Nahmani, sa femme et ses enfants, ainsi quâon le tire de Gn 38:12 et Nb 46:12 < oĂč la mort des fils de Juda est mentionnĂ©e sans prĂ©ciser ce quâils firent pour dĂ©plaire Ă Dieu >[260].
Cependant, le Talmud de Babylone nâaccepte, pas plus que les targoumim et le Midrash, la lecture littĂ©rale de Gn 38:2 car Juda nâaurait jamais Ă©pousĂ© « la fille dâun CananĂ©en » alors que les patriarches avaient mis un point dâhonneur Ă se transmettre cet interdit de pĂšre en fils, et Rech Lakich en fait la fille dâun homme de commerce, dâaprĂšs le sens quâaurait acquis âCananĂ©en(s)â en Os 12:8 (« Le CananĂ©en manie des balances frauduleuses ») et Is 23:8 (« Qui donc a conçu ce dessein contre Tyr [âŠ] dont [âŠ] les marchands [sont] des grands de la terre ? »)[261]. Par ailleurs, Rav Nahman bar Itzhak (en) tire de « lui aussi » (Gn 38:10) quâOnan mourut pour la mĂȘme faute quâEr <, et Juda nây est pour rien> ; le Talmud conjecture quâEr voulait faire durer la beautĂ© de sa femme, quâune grossesse aurait gĂątĂ©e, et lui imposait donc des relations « contre nature »[262] ; alternativement, Rabbi Yohanan en retire que toute Ă©mission de sperme en vain, est passible de mort, quâelle dĂ©coule dâune manipulation active (et Rabbi EliĂ©zer recommande pour cette raison de ne jamais se tenir la verge, fĂ»t-ce pour uriner) ou de ruminations lascives, comme lâenseigne Rabbi Ammi[263].
Comme Juda intime Ă sa bru de « demeurer veuve (almana) dans la maison de [s]on pĂšre » (Gn 38:11) et quâil sâagit de la premiĂšre occurrence dâalmana dans la Bible, les rabbins tiennent Ă prĂ©ciser quâil y a, comme Tamar, des almanot de mari mais aussi de fiancĂ© et de promis quand bien mĂȘme la promesse dâunion ne se serait pas concrĂ©tisĂ©e, et toutes sont interdites au grand-prĂȘtre dâIsraĂ«l[264]. Tamar aurait, tant quâelle est assise dans la maison de son pĂšre, le statut de « gardienne du lĂ©virat » (shomeret yabam) en vertu de la loi rabbinique[265] mais Juda semble la considĂ©rer comme ce que le Talmud nomme une femme fatale qui fait, dâune maniĂšre ou dâune autre, mourir ses maris, bien que les rabbins eux-mĂȘmes nâaient pas inclus Tamar dans leurs discussions sur le sujet[207].
Abordant Gn 38:13-15 Ă partir de la mishna Sota 1:8, le Talmud de Babylone fait remarquer, comme celui de JĂ©rusalem, que Juda monte Ă Timna alors que Samson y descend â Rabbi Shmouel bar Nahmani en dĂ©duit quâil y a la Timna de Juda et celle de Samson, Rav Papa que câest une seule et mĂȘme Timna, sise Ă mi-chemin entre monts et vaux mais Rabbi ElĂ©azar ne situe pas la solution Ă ce niveau : « pour Samson qui sây dĂ©prava < car il sây Ă©prit dâune Philistine quâil finit par Ă©pouser >, il est Ă©crit "descente" ; pour Juda qui sây Ă©leva < car il y sanctifia le ciel >, il est Ă©crit "montĂ©e"[266] » â dans les deux versions du Talmud, jĂ©rusalĂ©mite comme babylonien, ce sont les sages de la terre dâIsraĂ«l qui proposent lâinterprĂ©tation la plus favorable des Ă©vĂšnements[233].
Cette dichotomie se poursuit dans lâanalyse des versets suivants : entre deux interprĂ©tations du Petaâh EinaĂŻm de Gn 38:14 par des rabbins syro-palestiniens, Rav Hanin explique au nom de Rav que câest tout simplement lâentrĂ©e dâEinam, une ville qui sera assignĂ©e Ă la tribu de Juda aprĂšs la conquĂȘte de la terre promise (Jos 15:34)[267], et Oula (en) sâen tient lui aussi au sens premier des versets lorsquâil Ă©nonce que « Tamar sâest prostituĂ©e [comme] Zimri sâest prostituĂ© » mais lui a amenĂ© la pestilence sur IsraĂ«l tandis quâelle leur a donnĂ© des rois et des prophĂštes, ce qui montre selon Rav Nahman bar Itzhak quâ
« une transgression rĂ©alisĂ©e dans le but de sanctifier les cieux (he) vaut mieux quâune prescription qui nâest pas rĂ©alisĂ©e dans le but de sanctifier les cieux (gdola Êżaveira lishma mĂšÊŸasher mitzva shĂšlo lishma)[268]. »
*Amotz est identifiĂ© dans le Seder Olam Rabba (ch. 2) Ă lâun des quarante-huit « hommes de Dieu » venus dĂ©livrer une prophĂ©tie au roi Amasias (cf. 2 Chroniques 25:7).
Les rabbins de GalilĂ©e sâingĂ©nient par contre Ă trouver lâexplication la plus accommodante pour les protagonistes : Rabbi Alexandri sâappuie sur Gn 18:1-2, oĂč figurent le petaâh de la tente dâAbraham et les « yeux » quâil lĂšve vers lâhorizon pour apercevoir les trois hommes (he) (ainsi que sur la lecture midrashique de ce passage qui situe la tente dâAbraham Ă la croisĂ©e des chemins), pour expliquer que Petaâh Einayim nâest pas un nom de lieu mais bien « lâentrĂ©e de la tente dâAbraham câest-Ă -dire [âŠ] un lieu < dâhospitalitĂ© ou de priĂšre > oĂč tous les yeux dĂ©sirent le voir », et par consĂ©quent, câest, plutĂŽt que dâadopter une pose suggestive, sa tente que Tamar ouvre Ă tous les vents[267]. Rabbi Shmouel bar Nahmani lit quant Ă lui Petaâh Einayim comme patâha einayim, « elle a ouvert les yeux, » et enseigne ce faisant quâun dialogue sâest tenu Juda et Tamar aprĂšs lâĂ©change prĂ©liminaire au commerce de la chair, au cours duquel elle « a ouvert les yeux de Juda » en apaisant une par une ses craintes dâincorrection au regard de la Loi juive[269]. Les soupçons de prostitution entretenus par Juda en Gn 38:15 sont eux-mĂȘmes, dâaprĂšs Rabbi ElĂ©azar, la preuve de la pudeur de Tamar car « elle avait < toujours > voilĂ© son visage < du temps oĂč elle habitait > dans la maison de son beau-pĂšre », et câest cette pudeur qui lui vaudrait dâengendrer des rois et des prophĂštes[270].
Gn 38:18 rapporte que Tamar conçoit de son rapport avec Juda, et Rava fait remarquer Ă son maĂźtre Rav Nahman quâelle Ă©tait techniquement vierge puisque ses maris nâavaient jamais fait les choses comme il faut, or les rabbins tiennent pour avĂ©rĂ© quâune vierge ne peut concevoir dâun premier rapport < puisque lâhymen fait barriĂšre >. Rav Nahman (en) lui rĂ©pond quâelle sâĂ©tait manuellement dĂ©florĂ©e auparavant, et la guemara qui condamnait la trituration pĂ©nienne, rapporte immĂ©diatement au nom de Rabbi Itzhak que « toutes les femmes de la maison de Rabbi qui se dĂ©florent < car elles se sĂ©parent souvent de leur mari pour leur permettre dâĂ©tudier la Torah, et souhaitent concevoir de leurs rares rapports >, sont < honorifiquement > appelĂ©es Tamar[271]. »
Lâinsistance de Gn 38:20 Ă parler dâun « petit des chĂšvres » et non dâun « petit » sans autre prĂ©cision, permet Ă Rabbi ElĂ©azar de dĂ©duire que le « chevreau » dont il est dit Ă trois reprises dans la Torah quâil ne doit pas ĂȘtre cuit dans le lait de sa mĂšre (Ex 23:19, ibid. 34:26 et Dt 14:21), est en rĂ©alitĂ© le petit de toute tĂȘte de bĂ©tail, et il convient par consĂ©quent dâinterdire toute cuisson simultanĂ©e de lait et de viande dans un mĂȘme rĂ©cipient[272]. De mĂȘme, le dĂ©lai dâ« environ trois mois aprĂšs » au terme duquel la grossesse de Tamar devient apparente (Gn 38:24), est un argument employĂ© par Symmaque au nom de Rabbi MeĂŻr pour dĂ©crĂ©ter un dĂ©lai de trois mois avant dâautoriser le mariage dâune veuve sans enfants Ă son lĂ©vir, car il convient de sâassurer que le mari mort nâa laissĂ© aucun enfant, fĂ»t-ce en gestation[273]. SitĂŽt aprĂšs avoir appris la grossesse de sa bru, Juda porte lâaffaire devant le tribunal de Sem, non pour la prostitution per se mais parce quâil la prĂ©sume coupable dâavoir fricotĂ© avec un paĂŻen alors quâelle est israĂ©lite, et que les sages de lâĂ©poque ont proscrit tout rapport, de mariage ou de prostitution, avec les non-Juifs[274].
David et ses ancĂȘtres mĂ©ritent cependant la faveur divine en raison de leur observance scrupuleuse de la Loi, Ă©crite comme orale.
Estimant que le hi moutsÊŸet de Gn 38:25 ne traduit pas aussi bien « on la fait sortir » que hi mitoutsÊŸet, les rabbins enseignent quâil faut lire hi motsÊŸet (âelle trouveâ), et Rabbi ElĂ©azar relit le verset comme : âaprĂšs que ses signes furent trouvĂ©sâ, elle envoya dire etc. â lorsque Tamar avait Ă©tĂ© informĂ©e de la sentence, elle avait cherchĂ© les gages laissĂ©s par Juda mais SamaĂ«l <, lâange tutĂ©laire dâEdom qui tente dâempĂȘcher la naissance du roi David, futur vainqueur des Ădomites > les avait Ă©loignĂ©s, et Tamar aurait Ă©tĂ© perdue si Gabriel ne les avait pas ramenĂ©s <, ce qui prouve que lâacte de Tamar nâest immoral quâen apparence >[275].
Cette chaĂźne dâĂ©vĂ©nements, Rabbi Yohanan la dĂ©duit pour sa part de lâentĂȘte au Psaume 56, « Au chef des chantres. Sur Yonat Elem Rehokim, Mikhtam de David (LamÊŸnatsÄaâh, Êżal yonat ÊŸelem rehokim, lĂšDavid mikhtam) » â lamÊŸnatsÄaâh devient âpour le vainqueurâ par polysĂ©mie, Êżal yonat ÊŸelem rehokim, qui dĂ©signait peut-ĂȘtre un air connu sur lequel il fallait chanter le psaume ou un instrument de musique qui devait lâaccompagner, devient Êżal yona ÊŸilemet mishoum rehokim, âen faveur de la colombe [rendue] muette Ă cause des [objets] lointains,â et lĂšDavid mikhtam, une musique composĂ©e par David, devient âDavid le Makh-Tam,â car il Ă©tait « humble et intĂšgre » selon une interprĂ©tation, « nĂ© sans prĂ©puce » conformĂ©ment Ă une autre, et « humble dans son jeune Ăąge comme dans sa maturitĂ© pour apprendre la Torah » dâaprĂšs la troisiĂšme â au total, âPour celui qui a conquis en faveur de la colombe muette les objets Ă©loignĂ©s, en faveur de David le Makh-tamâ : dĂšs lâinstant oĂč les objets furent Ă©loignĂ©s, Tamar devint comme une colombe muette car elle ne pouvait plus rien dire pour sa dĂ©fense mais elle fut sauvĂ©e par la grĂące de celui qui a triomphĂ© de lâadversaire en dĂ©pĂȘchant Gabriel pour ramener les objets, et elle engendra la lignĂ©e qui aboutirait Ă lâhumble et honnĂȘte roi David[276].
Les gages rĂ©cupĂ©rĂ©s, « elle envoya dire Ă son beau-pĂšre, » par lâintermĂ©diaire dâun messager dans un souci de discrĂ©tion[277], et elle dit « de lâhomme auquel etc. » sans impliquer Juda directement, bien quâelle risquĂąt, Ă force de ne pas vouloir lui faire honte, dâĂȘtre jetĂ©e au feu â câest ce quâenseignent trois rabbins au nom de trois rabbins (Rav Zoutra bar Touvia au nom de Rav, Rav Hana bar Bizna (he) au nom de Rabbi Shimon Hassida (he) et Rabbi Yohanan au nom de Rabbi Shimon ben YohaĂŻ) en quatre endroits du Talmud :
« Il est prĂ©fĂ©rable de se prĂ©cipiter dans une fournaise ardente que de faire pĂąlir son prochain en public (noaâh lo lĂšadam sheyapil atsmo lĂštokh kivshan haÊŸesh vĂšÊŸal yalbin pnei havero). »
Rabbi Hama berabbi Hanina enseigne toutefois que les mots de Tamar Ă©taient en vĂ©ritĂ© soigneusement choisis, rappelant dâune part Ă Juda que tout se rĂšgle mesure pour mesure car « Par "Reconnais" il annonça (Gn 37:32), par "Reconnais" il lui fut annoncĂ© (Gn 38:25) », et exprimant dâautre part une priĂšre : « Reconnais je tâen prie ton crĂ©ateur et ne dĂ©tourne pas les yeux de ma personne »[278].
*YehĂ»dĂą sâĂ©pelle yĆáž-hÄ-wÄw-dÄlet-hÄ (Y-H-W-D-H), contenant donc les quatre lettres du tĂ©tragramme
Lâadmission de Juda en Gn 38:26 est pour beaucoup le point dâorgue du rĂ©cit : sur le plan purement lĂ©galistique, câest parce quâil a assumĂ© sa responsabilitĂ© que lâhistoire de Juda et Tamar est lue et traduite en public, et câest pour cette raison quâon la raconte-t-on aux femmes soupçonnĂ©es par leur mari dâadultĂšre, alors quâelle relĂšve de ces « choses quâil vaut mieux ne pas mettre Ă la portĂ©e de toutes les oreilles (litt. faire entendre) » < car on espĂšre les amener Ă avouer la chose avant de les soumettre Ă lâĂ©preuve de lâeau amĂšre, dont la prĂ©paration implique dâeffacer le nom divin Ă©crit sur parchemin >[279].
En outre, Rav Hanin (sic) bar Bizna enseigne au nom de Rabbi Shimon Hassida quâen avouant sa faute, Juda a sanctifiĂ© le nom divin en public, alors que la sanctification de Joseph face Ă la femme de Potiphar sâest faite en privĂ© car il nây avait pas de tĂ©moins alentour, et câest pourquoi Joseph a obtenu que lâune des lettres du tĂ©tragramme soit ajoutĂ©e Ă son nom mais Juda a mĂ©ritĂ© que toutes les lettres du tĂ©tragramme figurent dans le sien. La guemara poursuit quâun Ă©cho de voix cĂ©leste retentit au moment oĂč Juda avoua pour annoncer que les compagnons de Daniel, ses descendants, seraient sauvĂ©s par son mĂ©rite dâavoir sauvĂ© Tamar et ses deux enfants, et Shmouel Sabba rapporte au nom de son gendre Rav Shmouel bar Ammi que la fin du verset, couramment lue « il nâajouta pas de la connaĂźtre », signifie en fait que Juda « ne cessa plus dĂšs lors de la connaĂźtre »[280].
Dâautres rabbins sont cependant plus circonspects face Ă la dĂ©ferlante de mĂ©rites qui dĂ©fausse le sens premier du rĂ©cit : une tradition, qui interrompt briĂšvement le flot des prĂ©cĂ©dentes, rapporte que lâĂ©cho de voix annonce « [câest] de Moi », câest-Ă -dire « Câest par moi que les secrets ont Ă©tĂ© mis au jour ». Cette tradition, rapportĂ©e ailleurs au nom de Rabbi ElĂ©azar, enseigne que lâĂ©cho de voix sâest manifestĂ© dans le tribunal de Sem pour confirmer la paternitĂ© de Juda car il aurait pu essayer dâarguer que Tamar Ă©tait enceinte dâun autre homme ; Rava â qui ne rĂ©agirait pas seulement au dit de Rabbi ElĂ©azar mais Ă lâensemble des traditions qui font dĂ©couler la prise de conscience de Juda dâune rĂ©vĂ©lation cĂ©leste â rĂ©torque que Juda nâavait pas besoin de cet Ă©cho et serait arrivĂ© Ă la conclusion qui sâimposait par calcul des dates car « on peut tirer des prĂ©somptions de ce quâon voit et on ne peut tirer des prĂ©somptions de ce quâon ne voit pas »[281].
Enfin, Gn 38:28-29 qui dĂ©crit lâaccouchement inhabituel des jumeaux oĂč Zeraâh passe sa main avant de la retirer, constitue un prĂ©cĂ©dent sur base duquel Rav Houna dĂ©clare la parturiente impure dĂšs le moment oĂč le fĆtus sort la main, sans attendre la fin du processus[282].
LâinterprĂ©tation de Gn 38 par les sages du Talmud de Babylone se base sur la mĂȘme thĂ©ologie mesure pour mesure que le Midrash mais ils nâattendent rien des Princes dâIsraĂ«l en lesquels leurs frĂšres de lâancienne JudĂ©e ont placĂ© leurs espoirs[233], et mitigent de ce fait le bilan de Juda en ramenant les interprĂ©tations des « rabbins de lâOuest », dont sa confession qui renverse les rapports entre Juda le fauteur repentant et Joseph le juste impeccable, Ă dâhumaines proportions[283]. Dans leur thĂ©orie de la rĂ©demption qui viendra de lâobservance des prescriptions bibliques et rabbiniques[284], Juda illustre le sort de ceux qui y manquent[260] et il aura, en dĂ©pit de sa grandeur, besoin de lâappui de MoĂŻse pour avoir sa part au monde Ă venir[285].
Tamar â dont les rabbins font une IsraĂ©lite ou une convertie mais en aucun cas une AramĂ©enne ou fille de Sem puisque Rav a tirĂ© de Mal 2:11 quâavoir des rapports avec une Ă©trangĂšre Ă©quivaut Ă Ă©pouser le culte des idoles, et dĂšs lors, « celui qui a des rapports avec une AramĂ©enne, est frappĂ© par des zĂ©lotes »[286] â est en revanche inconditionnellement sublimĂ©e[287] : les interprĂ©tations paratextuelles soulignent son observance extrĂȘme des rites et rĂšgles de pudeur â dont lâexcĂšs nâest plus, comme dans le Midrash, la cause dâune erreur Ă Ă©viter mais une marque de candeur Ă imiter[288] et elle lui vaudra le mĂ©rite de faire venir le roi David, lequel bĂ©nĂ©ficie lui-mĂȘme de la faveur divine en raison de sa dĂ©votion pour les sages de la Torah[276] â et son abnĂ©gation est citĂ©e en exemple Ă travers le corpus talmudique[153]. Quant aux interprĂ©tations qui privilĂ©gient le sens simple du texte et abordent par consĂ©quent lâacte sexuel sans dĂ©tour, elles parviennent Ă la conclusion quâune diffĂ©rence de taille existe entre Tamar et Zimri car une « transgression pour une bonne raison » vaut mieux quâune bonne action sans intention[287]â certains ont compris cette formule comme lâĂ©quivalent babylonien de âla fin justifie les moyensâ si cette fin est la sanctifiation de Dieu, par lâobtention du lĂ©virat pour des maris morts[289] ; dâautres ont rĂ©duit le champ des transgressions aux relations sexuelles, et pensent que les rabbins les autoriseraient aux femmes pour peu quâelles soient rĂ©alisĂ©es dans le but de construire la nation israĂ©lite, alors que les hommes sont toujours guidĂ©s par leurs instincts les plus bas, et quâil vaut mieux pour eux mourir que pĂ©cher[290].
Ce fait Ă©tant Ă©tabli, les rabbins babyloniens utilisent le texte Ă des fins Ă©ducatives pour les Juifs et polĂ©miques envers les chrĂ©tiens : la discussion sur lâauto-dĂ©floration de Tamar participe moins dâune entreprise exĂ©gĂ©tique â câest lâinterprĂ©tation de Rabbi ElĂ©azar qui a crĂ©Ă© la difficultĂ©, et elle disparaĂźt si lâon admet quâau moins lâun de ses maris a pratiquĂ© le coĂŻtus interruptus â que dâune critique de lâobsession de la virginitĂ© en vogue parmi les chrĂ©tiens car ils lâassocient Ă la puretĂ©[174].
Les rabbins, eux, enseignent Ă travers lâhistoire de Rav Hiyya bar Ashi les mĂ©faits de ces pratiques sur lâindividu et sa famille.
Un autre rĂ©cit talmudique, vraisemblablement tardif, combine les ressorts narratifs de Gn 38 â un homme qui prive sa femme des rapports quâil lui doit, une femme qui prend les choses en main pour tenter de rĂ©tablir lâordre des choses, une scĂšne de marchandage avant sexe et une rĂ©vĂ©lation dramatique â Ă divers realia chrĂ©tiens dâOrient pour produire lâhistoire de Rav Hiyya bar Ashi et sa femme qui exalte les relations conjugales en mĂȘme temps quâelle critique les positions chrĂ©tiennes sur ce point : le rabbin, qui comptait parmi les intimes de Rav, se prosterne quotidiennement (alors que les Juifs ont abandonnĂ© cette coutume en raison â prĂ©cisĂ©ment â de leur adoption dans le christianisme) pour ĂȘtre prĂ©servĂ© de sa « mauvaise nature (he) » libidineuse dans une priĂšre qui tient davantage du monologistos chrĂ©tien que de la liturgie juive, et il se retire du monde pour se consacrer Ă lâĂ©tude dans son jardin au lieu de se mĂȘler aux dĂ©bats de ses collĂšgues â comme le prĂ©conisent les sages dâIsraĂ«l pour lutter contre la mauvaise nature dont il demande Ă ĂȘtre dĂ©barrassĂ©. Sa femme parade devant lui et se prĂ©sente comme Harouta (« LibertĂ© »), un terme aramĂ©en qui dĂ©signe Ă la fois, dans le lexique syriaque, le libertinage et la libĂ©ration par lâascĂšse de ces pulsions. Le rabbin, qui se croit apparemment face Ă un daimĂŽn et non Ă sa femme de chair et dâos, saute littĂ©ralement sur lâoccasion puis choisit, nonobstant les cris de sa femme, de se « purifier » par le feu, un supplice en vogue parmi les pĂšres du dĂ©sert pour expier leurs concessions au dĂ©sir, quâil soit charnel ou spirituel. Lâintervention de la femme nâaura pu rĂ©tablir lâunitĂ© familiale, lâhistoire se finit mal, et les sages du Talmud â qui partagent pourtant les rĂ©serves de Rav Hiyya bar Ashi sur la « mauvaise nature[291] » â ont ainsi montrĂ© combien il est nĂ©faste de vivre selon les idĂ©aux chrĂ©tiens, particuliĂšrement en matiĂšre de sexualitĂ©[292].
Juda et Tamar dans la patristique syriaque
NĂ© dans les ensembles aramĂ©ophones de lâempire romain, le christianisme syriaque voisine avec de nombreuses communautĂ©s juives, partageant avec elles de nombreuses affinitĂ©s culturelles, tout en se rĂ©clamant des thĂ©ologiens hellĂ©nophones dont ils reçoivent les enseignements par le biais de passeurs comme EusĂšbe dâĂmĂšse. Disciple dâEusĂšbe de CĂ©sarĂ©e et Patrophile de Scythopolis (en) ce pĂšre bilingue, notoirement anti-nicĂ©en, comprend que de nombreux points obscurs de la Septante qui ont menĂ© OrigĂšne Ă allĂ©goriser, sont Ă©clairĂ©s par le contexte et les passages parallĂšles ou par les versions syriaque et hĂ©braĂŻque de la Bible. Il contribue ainsi Ă dĂ©finir lâexĂ©gĂšse littĂ©rale-historique de lâĂ©cole thĂ©ologique dâAntioche qui sâoppose Ă lâallĂ©gorie pratiquĂ©e Ă la DidascalĂ©e, et sâattache scrupuleusement, comme le formuleront plus tard Diodore de Tarse et ThĂ©odore de Mopsueste, Ă la lettre sans verser dans lâallĂ©gorie, la typologie ou mĂȘme la christologie[293].
Tributaire de ce prĂ©curseur, Ăphrem de Nisibe ne comprend cependant pas le grec, et les interprĂ©tations quâil produit sur le trente-huitiĂšme chapitre du Livre de lâAlliance dans un poushÄqÄ en prose et dans des madrÄshĂš en vers, dĂ©montrent des diffĂ©rences avec la patristique grecque, comblĂ©es par des enseignements originaux qui exhibent une familiaritĂ© manifeste avec les traditions juives de ses voisins[294], et quâil met au service du symbole de NicĂ©e.
Poushoqo de GenĂšse 38
Ălimant Gn 38:1-2, le diacre de Nisibe fait commencer la trente-quatriĂšme section de son poushÄqÄ par « aprĂšs ces choses, Juda prit femme de laquelle il eut trois fils. Er son premier-nĂ© prit Tamar pour femme mais comme il Ă©tait mauvais, câest-Ă -dire comme il Ă©tait mĂ©chant, devant le Seigneur, le Seigneur le tua ». Onan prend ensuite Tamar pour Ă©pouse par amour pour elle mais refuse de donner une engeance Ă son frĂšre par haine pour lui. Lorsque Dieu le met Ă mort en raison de son mĂ©chant stratagĂšme, lâon se figure que tous deux sont morts par les pĂ©chĂ©s de Tamar. Juda la renvoie vers son pĂšre en lui promettant de lui donner ChĂȘla lorsquâil grandirait[295].
Le commentaire qui collait jusque-lĂ au texte, insĂšre les pensĂ©es de Tamar aprĂšs que ChĂȘla a grandi mais que Juda nâa pas fait revenir sa bru de la maison de son pĂšre oĂč il lâavait envoyĂ©e :
« Comment puis-je faire connaĂźtre aux HĂ©breux que ce nâest pas le mariage que je dĂ©sire mais la bĂ©nĂ©diction cachĂ©e en eux que je dĂ©sire? Je pourrais montrer avec ChĂȘla que je suis capable mais ma foi ne pourra pas triompher par ChĂȘla ; je montrerai donc avec Juda, et par le trĂ©sor que je reçois de lui, jâenrichirai ma pauvretĂ©, et (sic) par le veuvage que je garde, je ferai connaĂźtre que ce nâest pas le mariage pour lequel je languis[296]. »
Le poushÄqÄ Ă©labore ensuite directement sur Gn 38:16 oĂč Tamar, craignant que Juda la reconnaisse et la tue par vengeance pour ses deux fils, quĂȘte un signe divin comme Ăliezer : lâimplorant de ne pas la condamner pour cet acte de dĂ©sir, elle rappelle une nouvelle fois que « tu sais que câest de ce qui est cachĂ© dans les HĂ©breux que je suis assoiffĂ©e », prie dâapparaĂźtre Ă Juda sous une forme diffĂ©rente et de lui faire dire ce quâil dira effectivement en Gn 38:16, afin quâelle puisse savoir « quâil tâest acceptable que le trĂ©sor qui est cachĂ© chez les circoncis, puisse ĂȘtre transmis mĂȘme par le biais dâune fille dâincirconcis »[297].
Tandis que Tamar est en priĂšre, voici que Juda la voit, et la supplique a pour effet de le dĂ©tourner de sa voie pour se rendre, contre ses habitudes, vers lâapparente prostituĂ©e. Celle-ci, effrayĂ©e, se tient voilĂ©e devant lui mais lorsquâil lui dit ce quâelle avait escomptĂ©, elle se dĂ©voile sans crainte et demande mĂȘme rĂ©munĂ©ration au propriĂ©taire du trĂ©sor[298]. AprĂšs avoir dĂ©pouillĂ© lâhomme de son bĂąton, anneau et cordon et pris ces trois tĂ©moins pour quâils servent de preuve auprĂšs des tiers, elle a des rapports avec lui et retourne vers son pĂšre. AprĂšs trois mois, lâon rapporte Ă Juda que Tamar sâest prostituĂ©e et en a conçu. AprĂšs quâil lâa convoquĂ©e et constatĂ© quâelle nâa rien Ă dire pour sa dĂ©fense, Juda ordonne quâelle soit brĂ»lĂ©e. Lorsque les gens de HĂ©bron sâassemblent pour la voir brĂ»ler, elle produit ses tĂ©moins et fait savoir Ă son beau-pĂšre par lâintermĂ©diaire de parents ce quâelle a dit en Gn 38:25. Voyant ses gages, Juda est Ă©bahi par la foi de cette femme et, alors quâil tend la main pour les prendre, repense au temps oĂč il les lui a donnĂ©s[299].
« Il dit alors: âelle est plus innocente que moiâ, câest-Ă -dire 'Elle est plus juste que moi', âQuels grands pĂ©cheurs Ă©taient mes fils. Ă cause de cela, je ne lui ai pas donnĂ© mon fils ChĂȘla, elle est innocente de cette mĂ©chante suspicion que jâentretenais Ă son Ă©gard [et en raison de laquelle] jâavais Ă©loignĂ© mon fils ChĂȘla dâelle.â Elle qui avait Ă©tĂ© grugĂ©e du mariage, avait Ă©tĂ© justifiĂ©e dans sa fornication et lui qui lâavait renvoyĂ©e Ă cause de ses deux premiers fils, la ramena Ă cause de ses deux premiers fils. »
âIl ne la connut plusâ « parce quâelle avait Ă©tĂ© la femme de ses deux premiers fils » mais il ne prit pas dâautre femme « parce quâelle Ă©tait la mĂšre de ses deux derniers fils[300], » et câest ainsi que son commentaire se conclut.
Lorsquâil traite des fils de Juda, le commentaire de MÄr Aphrem semble typique de lâĂ©cole thĂ©ologique dâAntioche[301] mais lorsquâil en vient Ă Tamar, le silence biblique sur son monde intĂ©rieur est remplacĂ© par des interprĂ©tations qui changent la lecture sinon le cours de lâhistoire, et sont sans Ă©quivalent dans le monde chrĂ©tien car elles sont juives â il nâen cite pas la provenance, ne se soucie pas de les rattacher au point du texte qui les a suscitĂ©es chez les sages dâIsraĂ«l ni ne les reproduit verbatim mais câest bien parce que la Tamar des rabbins se sait enceinte de rois et de prophĂštes, que celle du diacre de Nisibe devine « la bĂ©nĂ©diction cachĂ©e dans les HĂ©breux » dans les reins de Juda. La puretĂ© de ses intentions excuse ses actions, celles-ci sont justifiĂ©es par les soupçons que nourrit Juda Ă son encontre, et agrĂ©Ă©es par Dieu soi-mĂȘme qui rĂ©pond Ă la priĂšre de Tamar en changeant son apparence et en suscitant chez Juda le signe quâavait demandĂ© lâĂ©missaire innommĂ© dâAbraham, identifiĂ© Ă Ăliezer le DamascĂ©nien[302].
Cependant, la Tamar dâEphrem est une exaltĂ©e qui ne cherche pas Ă procrĂ©er mais Ă faire triompher sa foi[303]. Elle affirme par deux fois quâelle ne cherche pas le mariage mais le « veuvage perpĂ©tuel », câest-Ă -dire la vie dans lâabstinence aprĂšs avoir Ă©tĂ© consacrĂ©e Ă son Ă©poux par leurs rapports. Du reste, que Juda « nâajout[Ăąt] plus de la connaĂźtre », est la seule issue possible Ă cette union : il ne pouvait pas la prendre pour Ă©pouse « puisquâelle Ă©tait la femme de ses deux premiers fils » mais il ne pouvait nĂ©anmoins prendre dâautre femme « parce quâelle Ă©tait la mĂšre de ses deux derniers fils » â câest par une proposition de ce genre, qui nâa pas dâĂ©quivalent dans le droit romain ni dans la loi juive, mais qui se trouve dans la lignĂ©e de Marc 10:6-9 oĂč JĂ©sus enseigne que lâunion des corps crĂ©e un lien marital (et câest pourquoi le divorce est interdit), quâEphrem asseoit lâidentitĂ© propre de son Ăglise[304].
Madroshe basés sur le poushoqo
Ayant ainsi campĂ© le personnage, le commentateur devient hymnographe pour faire intervenir Tamar en divers madrÄshĂš (hymnes didactiques) sur la NativitĂ©, la VirginitĂ© ou lâĂglise. Si un doute pouvait subsister sur lâidentitĂ© de la « bĂ©nĂ©diction cachĂ©e dans les HĂ©breux » dans le poushÄqÄ, bien quâĂphrem lâidentifie explicitement mais ailleurs comme le messie attendu par les chrĂ©tiens[305], il nâexiste plus dans les madrÄshĂš, tant la christologie y est manifeste : dans le neuviĂšme madrÄshÄ sur la NativitĂ©, composĂ© pour lâĂpiphanie (qui est alors une nouvelle addition au calendrier liturgique), la « Harpe de lâEsprit » fait dire Ă Maryam mĂšre dâIshoÊż qui sâest faite port pour cette « grande mer », que des femmes honorables se sont hĂątĂ©es pour lui auprĂšs dâhommes, et se sont faites mĂ©prisables :
« Tamar a désiré / un homme enveuvé,
et Ruth a aimé / un homme qui était vieux,
mĂȘme Rahab / qui captivait les hommes / a Ă©tĂ© captivĂ©e par toi (Nat 9:6-7). »
Câest par et pour lui que Tamar a assumĂ© la disgrĂące de la prostitution aux carrefours (Virg 22:19f),
« et dans lâobscuritĂ© / elle vola la lumiĂšre,
et dans lâimpuretĂ© / elle vola la saintetĂ©,
et dans la nudité / elle vola et te fit entrer
toi, lâhonorable / qui fait naĂźtre des gens chastes
de gens licencieux (Nat 9:8). »
Le « soleil des Syriens » sâinscrit cependant en porte-Ă -faux de la lecture origĂ©nienne de Matt 1:1-16 : construisant sa rhĂ©torique sur le contraste et le paradoxe comme son aĂźnĂ© Aphrahat, lâhymnographe explique que Tamar et les autres femmes de la gĂ©nĂ©alogie matthĂ©enne sont en vĂ©ritĂ© des exemples de saintetĂ© cachĂ©e au moment mĂȘme oĂč elles apparaissent aux yeux du monde comme les pires des sybarites, ces contradictions Ă©tant peu de choses devant celle du dieu fait homme[306]. En effet, « câĂ©tait chose sainte que lâadultĂšre de Tamar [car] câĂ©tait de toi, la source pure, dont elle avait soif », et câest parce que Juda la privait de cette boisson que la source tarie lâavait volĂ©e de sa fontaine aux carrefours (Nat 9:10). CâĂ©tait certes un vol mais câest au pĂ©chĂ© quâelle avait volĂ© la droiture que lui-mĂȘme avait tentĂ© dâempaumer (Nat 16:14). En assumant la disgrĂące de son rĂŽle, Tamar a non seulement rachetĂ© sa famille de la disgrĂące mais elle a contribuĂ© Ă la rĂ©demption de lâensemble de la famille humaine[307].
Cette rĂ©demption sâest indubitablement faite par le messie trinitaire dont elle, ses consĆurs et le roi David seraient les apĂŽtres : dans une sociĂ©tĂ© chrĂ©tienne alors dominĂ©e par les thĂ©ories de Marcion, BardaĂŻsan et Mani qui professent dâautres principes ou dont le dualisme nie la transubstantiation, Ăphrem le proclame en utilisant la forme du madrÄshÄ quâaffectionnaient bardesanites et manichĂ©ens.
Aux chrĂ©tiens qui nâacceptent pas la consubstantialitĂ© de Dieu-pĂšre-et-fils, il affirme que suivre David â qui appelle le messie « Seigneur » dans lâentĂȘte du psaume 110 et « fils » en Ps 2:7 â, rĂ©tablit lâharmonie parmi les fidĂšles[308].
Les diverses traditions quâil emprunte aux Juifs â la prescience du Roi cachĂ© en Juda (Nat 1:12), « lâĂ©pice de vie » quâelle dĂ©robe au « marchand » (Ăgl 11:10), lâintervention de « Satan, le maĂźtre de lâadultĂšre [qui] avait pris peur de cet adultĂšre-là » et tenta de lâempĂȘcher en orchestrant la mise Ă mort de Tamar, le sauvetage miraculeux par la source de vie mĂȘme quâelle avait dĂ©robĂ©e (Nat 9:9-13), lâintervention du seigneur pour priver la mort de ses gages (Ăgl 11:10), avant mĂȘme que Juda ne la justifie (Nat 15:8) â participent aussi dâune volontĂ© polĂ©mique : la « colonne de lâĂglise » ne fait certes pas montre, dans ces madrÄshĂš, de lâantijudaĂŻsme enragĂ© quâil Ă©tale par exemple dans les hymnes sur PĂąques[309] mais ses amplifications sur Tamar et ses consĆurs, dont il insiste lourdement sur lâappartenance aux « peuples » incirconcis et non au « peuple » juif, ne peuvent Ă©chapper aux oreilles juives ; dĂšs lors, chacune de ces traditions devient une insinuation envers ceux qui les ont dĂ©veloppĂ©es pour justifier les outrages des ancĂȘtres du messie mais non pour la mĂšre dâIshoÊż[310]. Ăphrem va encore plus loin en enseignant, Ă lâencontre des rabbins, que la destinĂ©e messianique ne sâest pas mise en branle lorsque Juda a, accomplissant ce que contenait son nom, reconnu sa responsabilitĂ© en mĂȘme temps que la main de Dieu au tribunal de Sem mais lorsquâil prit pour son fils une femme dont le nom Ă©tait Tamar car il ne faut pas lire Tamar mais Ta mar (syriaque : ÜŹÜ ÜĄÜȘÜ Â« Viens, mon seigneur, » le yod final Ă©tant muet)[311] : celle qui avait gardĂ© le veuvage pour JĂ©sus, « devint mĂȘme une prostituĂ©e (znyta) ⊠se rĂ©serva et devint meqadeshta » ; tout son ĂȘtre, son nom mĂȘme, « proclamait le fils de son seigneur » et lâappelait Ă venir Ă elle (Nat 9:12).
La « Harpe de lâEsprit » dĂ©veloppe enfin des thĂšmes typiquement syriaques, en Ă©crivant que Tamar embaumait du doux parfum alors que la femme de Potiphar nâavait pu sâimprĂ©gner de lâodeur du vĂȘtement de Joseph (Nat 16:14) : le messie du christianisme qui nâavait Ă©tĂ© dĂ©crit jusque lĂ quâen termes de lumiĂšre ou de verbe (et les hymnes choraux prolongeaient cette dimension auditive), devient connaissable dans la poĂ©sie dâĂphrem par le goĂ»t et surtout par lâodeur (cf. Lv 1:9), associĂ©e Ă la vie ascĂ©tique tandis que lâencens des cultes idolĂątres exsude une odeur nausĂ©abonde[312].
Juda et Thamar Ă lâĂ©cole dâAntioche
Antioche-sur-lâOronte est le siĂšge dâune importante colonie dâadeptes de JĂ©sus qui sont, dâaprĂšs Actes 11:26, les premiers de lâHistoire Ă recevoir le nom de « chrĂ©tiens » mais elle accueille aussi des Ă©lĂ©ments paĂŻens influents, appuyĂ©s par lâempereur Julien lors de sa tentative de dĂ©christianiser lâempire et une communautĂ© juive. Cette communautĂ©, bien que populeuse, nâa pas laissĂ© dâĂ©crits notables, peu de traces Ă©pigraphiques et des tĂ©moignages littĂ©raires fort diffĂ©rents dans les Ă©crits des rabbins et de Jean Chrysostome[313], le prĂ©dicateur grec dont la liturgie lutte contre lâinfluence des hymnes paĂŻens, et les incessantes diatribes contre les Juifs qui abuseraient des libertĂ©s dont ils disposent pour influencer les chrĂ©tiens.
Il est Ă©galement lâauteur de nombreuses prĂȘches sur la Bible, bien que cette facette de son Ćuvre semble avoir Ă©tĂ© moins apprĂ©ciĂ©e de son temps[314]. Sa soixante-deuxiĂšme homĂ©lie sur la GenĂšse, qui couvre Gn 38:2-39:22, a probablement Ă©tĂ© donnĂ©e en 388, deux jours avant la prĂ©cĂ©dente qui traitait de Gn 37 : « Jean bouche dâor » omet Gn 38:1 de son prĂȘche, et prĂ©sente son traitement de Juda comme une interruption totale dans lâhistoire de Joseph. Il se montre dans les grandes lignes reprĂ©sentatif de lâĂ©cole thĂ©ologique dâAntioche â son traitement de la majeure partie du texte reproduit ou paraphrase la version septantique, et la faute dâOnan dĂ©rive, comme lâindique la Bible, de sa rĂ©sistance Ă assumer le lĂ©virat quâil lui revient dâaccomplir[315]. Cependant, la Thamar de lâhomĂ©liste nâest pas exactement celle de la Septante : alors que Juda lui demande, selon la Bible, de « demeure[r] veuve dans la maison de [s]on pĂšre jusquâĂ ce que grandisse etc. » celle de lâhomĂ©lie demeure dans la maison de son pĂšre dans lâattente de la promesse puis, ayant compris que Juda ne veut pas remplir ses engagements, se rĂ©signe au veuvage plutĂŽt que prendre un autre Ă©poux. Elle tient en effet Ă engendrer de son beau-pĂšre, « non par libertinage, Ă Dieu ne plaise, mais pour ne pas ĂȘtre regardĂ©e comme une femme sans nom[254] ». Chrysostome prend encore la libertĂ© de dire Ă deux reprises que « Thamar servait les desseins de la Providence, » fĂ»t-ce Ă son insu, et aucun blĂąme ne doit retomber sur elle ou Juda car « si vous partez de lĂ en suivant l'ordre des temps, vous trouverez que le Christ descend des enfants issus de cette union »[316].
Tenant sa promesse, Juda envoie son esclave avec le salaire mais quand ce dernier revient bredouille, il sâĂ©crie « Pourvu que jamais nous ne soyons accusĂ©s d'ingratitude ! » Quand les choses sont sues trois plus tard, Juda condamne sa bru Ă ĂȘtre brĂ»lĂ©e pour son indignitĂ© mais elle, faisant entendre bien plus par son long silence que par ses courtes sentences, « produit des tĂ©moins dignes de foi qui parleront en sa faveur et pourront la mettre Ă l'abri de toute accusation ». Sans avoir bougĂ© de la maison, sans avoir parlĂ©, elle « a remportĂ© la victoire » : par son aveu tout aussi bref, Juda reconnaĂźt lâinnocence de sa bru et se condamne sans que personne lâaccuse car « ces gages que j'ai donnĂ©s ne sont-ils pas contre moi une preuve suffisante ? » Quant Ă la seconde partie de sa confession qui justifie Thamar, elle en dit, comme la premiĂšre, aussi long que son intitulĂ© est succinct â puisque sa bru est juste, câest que ses fils ne sont pas morts par sa faute mais en chĂątiment de leur perversitĂ©[317]. « Cependant, poursuit le texte, il ne la connut plus, » et Jean Chrysostome y voit la suite logique de Gn 38:15-16 : Juda avait agi Ă ce moment non par immoralitĂ© mais par ignorance, et c'est pourquoi le texte a soulignĂ© quâil nâavait pas reconnu sa bru ; dĂšs lors que la chose lui fut connue, il nây avait quâune conclusion possible[318].
LâapothĂ©ose reste nĂ©anmoins Ă venir car, ainsi que Jean lâa dit plus haut, « les deux fils qui lui naquirent Ă©taient la figure des deux peuples, et la rĂ©vĂ©lation de la vie judaĂŻque et de la vie spirituelle » â le prĂ©dicateur sâĂ©loigne ici tant du texte que de lâenseignement de ses maĂźtres : ainsi que le rappelle Cyrille de JĂ©rusalem au nom de Diodore de Tarse, celui qui a brisĂ© la clĂŽture nâest pas Zara mais PharĂšs, câest de lui que JĂ©sus tire son ascendance messianique, et câest sur lui quâest basĂ© le rapprochement avec Ep 2:14-15[319]. Jean Chrysostome reprend pourtant lâinterprĂ©tation onomastique dâ« autres personnes qui ont examinĂ© le texte » : Zara, qui signifie Orient (« c'est-Ă -dire l'Eglise »), Ă©tait le premier, « avançant la main [comme] NoĂ© et Abraham ou plutĂŽt avant NoĂ© Abel et Enoch, lesquels furent les premiers qui se prĂ©occupĂšrent spĂ©cialement de plaire Ă Dieu » mais il cĂ©da miraculeusement le pas Ă son frĂšre. PharĂšs, qui signifie sĂ©paration ou partition et personnifie la Loi, « qui sans effacer les pĂ©chĂ©s, les signalait du moins, les rendait manifestes », naquit le premier, de sorte que le second fut le premier et le premier le dernier. Cependant, les hommes continuaient de pĂ©cher en dĂ©pit de la loi, et « le MaĂźtre commun descendit ici-bas pour octroyer aux hommes cette spirituelle et parfaite constitution, dont Zara avait Ă©tĂ© la figure. VoilĂ pourquoi l'EvangĂ©liste lui-mĂȘme fait mention de Thamar et de ses enfants, en disant: Et Juda eut PharĂšs et Zara de Thamar »[320].
Gn 38 semble avoir fait lâobjet dâun traitement particuliĂšrement rare chez son auteur : plutĂŽt que dâexaminer le texte pour ce quâil donne Ă voir et pour les « instructions » et conduites pratiques que lâon peut en retirer, comme il le fait pour lâensemble de lâhistoire de Joseph, lâĂ©vĂȘque de Constantinople â qui a tout de mĂȘme dĂ©duit de Gn 38:22-23 que lâignorance ne doit pas conduire Ă lâingratitude â met en garde son lectorat contre une lecture Ă©tourdiment superficielle des paroles de lâĂcriture qui nâirait pas « au fond [pour dĂ©couvrir] les richesses qu'elles recĂšlent [⊠sans] rechercher le but et le motif de chaque chose ». Il a, en clair, dĂ©laissĂ© le sens littĂ©ral prĂŽnĂ© par ses maĂźtres pour suivre les « autres personnes qui ont examinĂ© le texte, » câest-Ă -dire EusĂšbe de CĂ©sarĂ©e, en particulier lorsquâil aborde le cas de Thamar dont il fait une eulogie particuliĂšrement rare pour un personnage fĂ©minin (et dont il semble dâautant plus prompt Ă prendre la dĂ©fense que la victime de ses malversations est liĂ©e aux Juifs[321]). Câest quâune autre lecture mĂšnerait Ă juger Thamar pour ses actes, et « on en accuserait Abraham lui-mĂȘme, comme ayant eu l'intention de tuer son fils, et PhinĂ©es comme coupable d'un double homicide », alors que la typologie dâEusĂšbe permet dâune part de dĂ©couvrir â comme lâenseigne Ambroise de Milan et lâenseignera Cyrille dâAlexandrie[316] â le « mystĂšre de lâincarnation du sauveur » et, dâautre part, de relĂ©guer les Juifs Ă lâarriĂšre-plan de lâhistoire[320].
InterprĂ©tations dans lâempire romain dâOccident
Augustin dâHippone semble le premier Ă avoir soulevĂ© la disparitĂ© entre les diverses naissances, morts et unions relatĂ©es en Gn 38, et le cadre temporel de vingt-deux ans au sein desquelles elles sont censĂ©es sâĂȘtre tenues ; il en conclut que « ce temps-là » (Gn 38:1) sâest nĂ©cessairement produit avant la vente de Joseph[322]. JĂ©rĂŽme de Stridon qui a traduit du grec et mis Ă jour lâonomasticon dâEusĂšbe, nâen dĂ©vie pas sensiblement sur Adullam ni Chasbi mais lorsquâil rend Gn 38:5 dans la Vulgate quelques annĂ©es plus tard, vehaya biKhziv belideta oto (« il Ă©tait Ă Kezib quand elle accoucha de lui ») est rendu par quo nato parere ultra cessavit (« lorsquâil naquit, elle cessa de concevoir encore »), suivant la tradition adoptĂ©e par Aquila et les targoumim[323], et dans son lexique des noms hĂ©breux, Chasbi devient mendacium (« mensonge ») en vertu dâune autre tradition juive. Il y explique aussi que le prĂ©nom Juda signifie « reconnaissance » ou « louange », Hiram[138] « leur citoyennetĂ© », Sua « chantant » ou « parlant, » Her « lâĂ©veillĂ©, » Onam (sic) « notre chagrin » et Thamar « palmier » ou « amertume, » en rapprochant apparemment la racine t-m-r du vocable hĂ©braĂŻque tamrour[324]. Augustin connaĂźt aussi la signification « changement » qui est, elle, tributaire de la racine hĂ©braĂŻque h-m-r[325].
Ajustant le texte hĂ©braĂŻque aux mĆurs de Rome, JĂ©rĂŽme Ă©crit que Juda « donna » (et non « prit ») femme pour son fils Her car cette coutume sĂ©mite est inexplicable pour un lecteur romain, et il ajoute de mĂȘme uxore (« pour femme ») Ă Gn 38:2, afin de prĂ©ciser ce que la Bible entend par « [Juda] la prit et vint Ă elle »[326].
Dieu se manifeste pour mettre Her Ă mort, et ZĂ©non de VĂ©rone qui se trouve en butte face Ă une difficultĂ© thĂ©ologique de taille puisque JĂ©sus donne la mort sans raison explicite, enseigne Ă ses catĂ©chumĂšnes que lâaĂźnĂ© de Juda reprĂ©sente les gens du « premier peuple » antĂ©diluvien (cf. Gn 6:2) : ces demi-dieux portĂ©s Ă lâauto-dĂ©ification et lâimmoralitĂ©, sâĂ©taient Ă©levĂ©s contre Dieu et, nâĂ©tant de ce fait « pas considĂ©rĂ©s dignes de lâhumanitĂ© par des gens raisonnables, » ils sâĂ©taient par consĂ©quent condamnĂ©s Ă la damnation Ă©ternelle[327]. Augustin dâHippone poursuit dans la veine allĂ©gorique dâOrigĂšne, faisant de Her un tanneur qui traitait les peaux faites par Dieu pour Adam et Ăve lors de leur expulsion du paradis ou, sur un plan typologique, le prĂ©curseur des rois de Juda dont il est Ă©crit quâils firent le mal aux yeux de Dieu[328]. Cependant, JĂ©rĂŽme de Stridon qui ne fait pas appel Ă lâallĂ©gorie dans sa traduction, semble avoir laissĂ© la question en suspens: son rendu de Gn 38:7 par « Her, le premier-nĂ© de Juda, Ă©tait mauvais au regard du Seigneur, et il fut occis par lui », traduit un certain malaise qui lâamĂšne Ă relativiser une premiĂšre fois lâintervention divine et Ă lâestomper la seconde[329].
Pour Onam (sic) dont JĂ©rĂŽme a dĂ©crit lâenfantement en des termes habituellement rĂ©servĂ©s aux bestiaux, lâexplication est plus aisĂ©e: priĂ© de « sâassocier » Ă la femme de son frĂšre afin de susciter une semence Ă son frĂšre, Onam « Ă©mettait sa semence au sol » afin « que ne naissent pas dâenfants au nom de » son frĂšre â cette Ă©mission vaine devient dans la Vulgate synonyme de masturbation et JĂ©rĂŽme la qualifie par les termes extraordinairement sĂ©vĂšres de rem detestabilem (« chose dĂ©testable »)[331]. Augustin dâHippone en retire une condamnation plus gĂ©nĂ©rale des rapports sans procrĂ©ation car si celle-ci nâest selon lui plus un but, et quâelle est Ă rĂ©server aux incontinents sexuels dans le cadre du mariage (obligatoirement unique), les rapports gratuits ou avec contraception sont illicites et immoraux, mĂȘme dans ce cadre[332]. Il propose ailleurs une interprĂ©tation typologique qui fait son lit dans lâĂ©tymologie de JĂ©rĂŽme: le chagrin signifiĂ© par le nom dâOnam est celui des gens qui ne font rien de bon et rĂ©pandent leur bien sur la terre, figurant les rois de Juda dont il est Ă©crit quâils ne firent pas le bien aux yeux de Dieu; sa mort et celle de son frĂšre, appelĂ© aĂźnĂ© parce que son crime est plus grand, figure la dĂ©position de ces rois qui Ă©taient impropres Ă gouverner[328]. Enfin, ZĂ©non de VĂ©rone fait du deuxiĂšme fils le reprĂ©sentant du « deuxiĂšme peuple » par le biais de la parabole du semeur : Onam qui verse la semence du cĆur (or « la semence du cĆur, câest la parole de Dieu », dâaprĂšs Luc 8:11), devient lâallĂ©gorie du peuple juif, lequel aurait dĂ» dĂ©tourner les Gentils de lâidolĂątrie par lâexemple dâune bonne vie suivant les prĂ©ceptes de la loi sacrĂ©e mais qui a « versĂ© sa semence sur la terre » en refusant de suivre JĂ©sus, et a choisi de vĂ©nĂ©rer une divinitĂ© qui lui Ă©tait confortable (cette charge Ă©loquemment anti-juive, pourrait se doubler dâune critique envers Valentinien et surtout Julien II, qui ont laissĂ© prolifĂ©rer le paganisme quand ils ne lâont pas activement encouragĂ© ou les gnostiques qui professaient la cohabitation de Dieu avec dâautres principes) ; il connaĂźtra, assure lâĂ©vĂȘque de VĂ©rone, le sort du second fils de Juda[333].
Selon la suite du texte, Juda a dit Ă sa bru Thamar « dâĂȘtre » veuve dans la maison de son pĂšre jusquâĂ ce grandisse son fils SĂ©la car il « craignait » â le texte hĂ©braĂŻque porte « disait » mais le traducteur a voulu faire comprendre que le monologue de Juda est intĂ©rieur[334] â que SĂ©la ne meure comme ses frĂšres. AllĂ©gorisant, ZĂ©non de VĂ©rone fait de SĂ©la le reprĂ©sentant du peuple des Gentils auquel est destinĂ© le message de lâĂglise, symbolisĂ©e par Thamar : comme il renaĂźt avec la venue du Christ, il est trop jeune pour ĂȘtre lâĂ©poux de lâĂglise et ne pouvait quâĂȘtre son fils[335]. Pour Augustin dâHippone, SĂ©la, dont le nom signifie « rejet, » reprĂ©sente les HĂ©rodiens. Lâunion de la tribu de Juda, figurĂ©e par Thamar, au troisiĂšme fils de Juda Ă©tait impossible puisque les HĂ©rodiens qui la rĂ©gentaient, nâĂ©taient eux-mĂȘmes pas dâIsraĂ«l, et le peuple de Juda continuait Ă attendre le roi qui ne viendrait pas de lâun de ces trois fils mais de David[328].
En traduisant par bivium itineris, JérÎme allie simplicité et concision.
De nombreux jours passent et la fille de SuĂ© â assimilĂ©e par ZĂ©non de VĂ©rone Ă la Synagogue[336] â meurt ; aprĂšs sâĂȘtre consolĂ© â aprĂšs avoir Ă©tĂ© confortĂ© par la promesse de la venue du Christ, selon le mĂȘme[336], Juda monte Ă Thamna â qui signifie « Ă©chec »[337] â vers les tondeurs de ses moutons avec Hiras lâOdollamite, « berger de son troupeau »[50] â ZĂ©non de VĂ©rone voit en Juda celui qui va chercher le bien et le fruit des Ćuvres, et donc une semblance de Dieu ou de JĂ©sus[338]. Pour Augustin dâHippone, ces moutons sont « les brebis perdues de la maison d'IsraĂ«l » (Matt 10:6 & 15:24)[337].
Thamar, ayant appris sa venue, retire ses habits de veuve, « prend » â la Vulgate esquive ainsi le problĂšme posĂ© par le verbe vatekhas, qui se traduirait « elle couvrit » alors quâ« elle se couvrit » semble plus correct[339] â un theristrum. Ses habits changĂ©s, elle part sâasseoir « au carrefour » menant Ă Thamna â JĂ©rĂŽme explique dans son index des lieux hĂ©braĂŻques quâ« Ănam ne dĂ©signe pas un lieu mais un bivium (carrefour) oĂč un regard attentif est nĂ©cessaire afin de choisir la route Ă prendre »[340] â car SĂ©la a grandi et elle ne lui a pas Ă©tĂ© mariĂ©e. Sur le theristrum, calque latin du theristron de la Septante qui traduit ainsi tsaĂŻf, Tertullien indique que câĂ©tait Ă coup sĂ»r la marque de la prostitution et une « parure extraordinaire » qui a fascinĂ© Juda puisquâil ne put reconnaĂźtre sa bru qui se tenait devant lui dĂ©voilĂ©e[240]. Ambroise de Milan qui traite de Gn 38 dans son commentaire sur Luc selon les sens historique, moral et mystique, reprend en substance et en latin le point de vue dâEusĂšbe de CĂ©sarĂ©e, critiquant encore plus durement Juda â quâil dĂ©crit en train de se dĂ©faire de ses habits de veuvage et se rasant le crĂąne avant de monter dans la couche « comme un amaut », incapable dâendurer une seule heure la chastetĂ© quâil avait prescrite Ă sa bru pour des annĂ©es â « mais nous ne dĂ©fendons pas lâune pour accuser lâautre â ajoute lâĂ©vĂȘque de Milan â, nous devons plutĂŽt excuser lâun et lâautre, non pas nous mais le mystĂšre que traduisit le fruit de cette union »[316] - [341]. La Vulgate est Ă premiĂšre vue moins catĂ©gorique que Tertullien puisque Juda ne fait que la « soupçonner dâĂȘtre une prostituĂ©e ». Toutefois, le theristrum est, plutĂŽt quâun voile, un surtout dâĂ©tĂ©, pareil Ă ceux que JĂ©rĂŽme a vus portĂ©s par les femmes en Arabie et en MĂ©sopotamie de son temps, qui redevient un habitus en Gn 38:19 aprĂšs quâil a rempli son office[342] et dâautre part, JĂ©rĂŽme renchĂ©rit sur OrigĂšne dans son commentaire sur Matt 1:3, faisant remarquer au lecteur que lâĂ©vangĂ©liste matthĂ©en
« [âŠ] ne nomme aucune des saintes femmes de lâancienne loi, mais uniquement celles dont lâĂcriture blĂąme la conduite. En voulant naĂźtre ainsi de femmes pĂ©cheresses, celui qui Ă©tait venu pour les pĂ©cheurs veut nous apprendre qu'il venait effacer les pĂ©chĂ©s de tous les hommes[343]. »
ZĂ©non de VĂ©rone voit au contraire dans cet « habit dâĂ©tĂ© » la vie sans soucis de ceux qui la mĂšnent dans lâĂglise : Thamar lâa allĂšgrement revĂȘtu lorsque, lasse de demeurer dans la maison de son pĂšre, câest-Ă -dire au milieu des temples paĂŻens, elle se hĂąte Ă la rencontre de Juda qui figure JĂ©sus, et retire ses habits de veuvage qui reprĂ©sentent les « coutumes sordides dâune religion sordide »[344].
Cependant, Augustin dâHippone, compatriote de ZĂ©non, disciple dâAmbroise et correspondant de JĂ©rĂŽme, statue quâon ne peut, nonobstant le bien-fondĂ© des motifs de Thamar, excuser ses actes : câest le fait de « faux maĂźtres » comme Priscillien que dâen tirer la permission de mentir si câest fait dans un but honorable. Que les Ăcritures dĂ©crivent les actions de Juda et Thamar sans les juger, ne permet pas dâen dĂ©duire quâelle a bien agi ou que sa faute Ă©tait justifiable par les circonstances car il faudrait en ce cas plaider de mĂȘme pour la fornication Ă laquelle certains â mais non Juda â recourent pour des desseins tout aussi nobles, et lâon en viendrait alors Ă saper les fondements Ă©thiques de monde en trouvant des excuses aux plus grands crimes et sacrilĂšges[345]. Ă ceux qui voudraient arguer pour la dĂ©fense de Juda de son haut rang parmi les douze fils de Jacob ou de la bĂ©nĂ©diction quâil a reçue de son pĂšre, Augustin rĂ©torque quâon a bien vu Judas comptĂ© parmi les douze apĂŽtres, et que la bĂ©nĂ©diction visait en rĂ©alitĂ© le messie relevant de David, apparu comme lâannonçait la prophĂ©tie lorsque le sceptre quitta les mains de Juda pour celles des HĂ©rodiens.
NĂ©anmoins, conclure que Juda et Thamar ont fautĂ©, ne doit pas mener Ă la lecture de Fauste de MilĂšve qui dĂ©peint Thamar comme une tentatrice criminelle, abusant Juda par sa tenue car elle le savait lubrique et enclin Ă frĂ©quenter les prostituĂ©es. Ce portrait est outrancier, et il fustige assez spĂ©cifiquement les ancĂȘtres de JĂ©sus tout en ignorant assez spĂ©cieusement des rĂ©cits non moins critiquables comme lâinceste de Ruben, lequel nâa de surcroĂźt pas mĂȘme lâexcuse dâavoir Ă©tĂ© abusĂ© par un dĂ©guisement. Câest que Fauste le ManichĂ©en rejette non pas lâimmoralitĂ© de ces personnages mais lâidĂ©e que le bon Dieu ait pu sâimmiscer dans la lignĂ©e dâindividus si mauvais, et il nie ce faisant la doctrine de lâincarnation qui enseigne prĂ©cisĂ©ment que le messie rĂ©dempteur voulut naĂźtre du bon et du mauvais pour dĂ©montrer lâouverture de son Ă©glise Ă tous, mĂȘme aux enfants de fauteurs.
En outre, comme le prophĂšte a rĂ©digĂ© la Bible sous la guidance du Saint-Esprit, le mauvais peut annoncer le bien, et bien que Juda nâeĂ»t pas plus lâintention dâagir en ce sens lorsquâil voulut Ă©tancher son appĂ©tence pĂ©cheresse que Judas lorsquâil a vendu JĂ©sus, tous deux nâen ont pas moins amenĂ© la rĂ©demption. Une lecture entiĂšrement positive de Gn demeure possible mais uniquement sur ce plan typologique : Augustin, reprenant lâĂ©tymologie de JĂ©rĂŽme, explique que Thamar qui avait jusque-lĂ figurĂ© lâamertume du vin mĂȘlĂ© de fiel (Matt 27:34), change de caractĂšre en changeant de vĂȘtements, et lâamertume est dĂ©sormais celle du repentir, typifiant les pleurs de Pierre aprĂšs quâil eut reniĂ© JĂ©sus par trois fois (Matt 26:75). La rencontre entre cette amertume et la confession typifiĂ©e par Juda, suscite la vĂ©ritable repentance sur laquelle peut alors fleurir lâĂglise Ă©tablie parmi les nations, puisquâ« il est Ă©crit que le Christ souffrirait, quâil ressusciterait des morts le troisiĂšme jour, et que la repentance et le pardon des pĂ©chĂ©s seraient prĂȘchĂ©s en son nom Ă toutes les nations, Ă commencer par JĂ©rusalem » (Luc 24:46-47). Dans la robe portĂ©e par Thamar se trouve aussi la confession et lâĂglise, assise « Ă la porte dâĂnam ou Einayim qui veut dire "sources" », court telle une biche vers ces sources Ă la rencontre de lâengeance dâAbraham, se faisant engrosser par un homme qui ne la connaĂźt pas, ainsi quâil est dit: « un peuple que je ne connaissais pas mâest asservi » (Ps 18:43)[346].
Le stratagĂšme de Thamar a fonctionnĂ© : « Juda, lâayant aperçue [âŠ] ignora que ce fĂ»t sa belle fille » car elle Ă©tait paĂŻenne, dit ZĂ©non de VĂ©rone or les prophĂ©ties Ă©taient destinĂ©es aux Juifs ; il « la prit pour une prostituĂ©e » parce quâelle servait le peuple juif, « et lui dit : "Laisse-moi coucher avec toi" » (le dialogue entre Juda et Thamar est, dans la Vulgate, cru voire vulgaire[348]) car il y eut plus de paĂŻens que de Juifs pour croire Ă la prophĂ©tie qui annonçait JĂ©sus, et câest pourquoi « le Seigneur a dit (Matt 21:31): "en vĂ©ritĂ© je vous dis, que les pĂ©agers et les femmes de mauvaise vie vous devancent au Royaume de Dieu" ». Il lui promet en salaire un petit de son troupeau â quâelle se garde dâaccepter dâaprĂšs ZĂ©non de VĂ©rone, car ce chevreau quâil compte lui envoyer, reprĂ©sente le salaire du pĂ©chĂ© dâadultĂšre, et la mĂšnerait directement en enfer[347].
Thamar demande une garantie â que la Vulgate, imitant la Septante, traduit ici par arrabonem[349] â en attendant le payement, et choisit pour ce faire « ton anneau et le collier et le bĂąton que tu tiens en mainâŠ[350] » â imitant Justin de Naplouse, ZĂ©non de VĂ©rone voit dans le bĂąton de Juda un symbole de la croix par laquelle Dieu-le-fils a initiĂ© la rĂ©demption, dans le collier lâinsigne de la loi de Dieu-le-PĂšre qui devrait enserrer non seulement le cou mais aussi le cĆur des fidĂšles, et dans lâanneau Ă sceau la figuration du messie dont lâimage est gravĂ©e dans lâesprit des fidĂšles par le Saint-Esprit â les trois gages attestent donc de la trinitĂ©, Ă lâencontre de lâarianisme[351]. Ambroise de Milan, dĂ©fendant une nouvelle fois Thamar contre la sĂ©vĂ©ritĂ© dâOrigĂšne, fait remarquer que ces gages la justifient au sens littĂ©ral-historique car de tels cadeaux ne sont pas donnĂ©s au tout venant ; il approfondit ensuite le sens mystique de « lâanneau, le bijou et le bĂąton » qui reprĂ©sentent pour lui « le sceau des actes, l'ornement de la poitrine, l'insigne de la libertĂ© royale »[352]. Augustin dâHippone qui se fie Ă©galement au rĂŽle jouĂ© par les gages, mais demeure dans sa perspective typologique, Ă©crit quâau moment oĂč Thamar
« a reçu en secret lâanneau, le collier et le bĂąton, elle est marquĂ©e de la vocation, ornĂ©e de la justification, exaltĂ©e par la glorification car "ceux quâil a prĂ©destinĂ©s, il les a appelĂ©s, ceux quâil a appelĂ©s, il les a aussi justifiĂ©s et ceux quâil a justifiĂ©s, il les a aussi glorifiĂ©s" (Rom 8:30)[353]. »
La Vulgate souligne que « dâun rapport la femme conçut » (Gn 38:18) alors que le texte hĂ©braĂŻque ne fait pas mention « dâun rapport, » et JĂ©rĂŽme signale par cet ajout le caractĂšre exceptionnel de la chose, reflĂ©tant lâĂ©tonnement de la tradition juive Ă ce sujet[350]. ZĂ©non voit dans cet accouplement lâunion de lâĂglise Ă ses fidĂšles aprĂšs quoi elle remet ses habits de veuve, non parce que lâĂglise revient Ă son idolĂątrie premiĂšre mais parce quâelle prend le deuil de ce quâelle Ă©tait avant sa rencontre avec JĂ©sus[354]. Juda dĂ©pĂȘche son « berger » avec le petit promis pour conclure le nĂ©goce â câest lâune des rares fois oĂč JĂ©rĂŽme privilĂ©gie dans la traduction la version septantique au texte hĂ©braĂŻque â avec la prostituĂ©e et reprendre « le gage (pignus) quâil avait donnĂ© Ă la femme »[355]. â Cependant, ce dernier est incapable de la trouver car elle nâest, selon ZĂ©non de VĂ©rone, plus une prostituĂ©e dĂšs quâelle a Ă©tĂ© renouvelĂ©e par lâeau du baptĂȘme et le Saint-Esprit[356]. Pour Augustin dâHippone, le berger adullamite qui vient tĂ©moigner avec son chevreau, symbolise lâapĂŽtre Jean qui harangue la gĂ©nĂ©ration pour ses fautes (Matt 3:7) mais cela ne concerne plus Thamar car elle a Ă©tĂ© changĂ©e par lâamertume de la confession[353].
Le berger sâenquiert alors, mais en vain, de « la femme qui Ă©tait assise au carrefour » mais « tous » lui rĂ©pondent quâ« il nây avait pas en ce lieu de meretrix », et il revient Ă Juda pour lui faire savoir quâil ne lâa pas trouvĂ©e et quâil nây avait pas en cet endroit de scortum[357] â le traducteur chĂątie dâabord son langage encore plus quâIras mais câest pour mieux la gratifier ensuite dâune sĂ©rie dâĂ©pithĂštes aussi variĂ©s quâinjurieux â contrairement Ă Ambroise pour lequel Thamar avait « pris la parure d'une courtisane sans ĂȘtre courtisane »[341], JĂ©rĂŽme estime quâelle lâest et que tous ses actes vont Ă lâencontre du mode de vie ascĂ©tique quâil entend prĂŽner. Lorsque Jovinien trouve en Gn 38 de quoi louer Thamar, JĂ©rĂŽme argue que câest son appĂ©tit pour la prostitution qui sâexprime et lorsque la jeune veuve Geruchia exprime son dĂ©sir de se remarier aprĂšs son veuvage, câest lâhistoire de Thamar quâil lui prĂ©sente comme repoussoir car, assure-t-il, la procrĂ©ation nâest plus un but depuis la venue de JĂ©sus, et ce quâelle procurait auparavant est accessible par lâabstinence[358]. Cependant, JĂ©rĂŽme assure, comme Jean Chrysostome avant lui, que ce nâest pas la honte de sâĂȘtre compromis avec une telle personne qui mine Juda mais la crainte quâon puisse lâaccuser dâimprobitĂ© en affaires, et il dit Ă son Ă©missaire : « Quâelle les garde! Elle ne pourra sĂ»rement pas nous accuser de mensonge: moi, je lui ai envoyĂ© le petit que je lui avais promis et toi, tu ne lâas pas trouvĂ©e »[359].
« Trois mois plus tard », des gens viennent dire Ă Juda que sa bru Thamar « a Ă©tĂ© forniquĂ©e et quâon voit son utĂ©rus gonfler » â le texte hĂ©breu porte « enceinte de la prostitution » mais JĂ©rĂŽme de Stridon estime le tumor uteri plus dĂ©goĂ»tant encore[361]. ZĂ©non de VĂ©rone retient cependant lâaccusation de prostitution portĂ©e Ă lâencontre de Thamar car lâĂglise quâelle reprĂ©sente a Ă©tĂ©, comme elle, incriminĂ©e dâadultĂšre par les anciens de la loi juive aprĂšs quâelle a supprimĂ© le sabbat et rejetĂ© leurs traditions[362].
Juda ordonne quâon la fasse sortir pour ĂȘtre brĂ»lĂ©e. Or, « comme on la sort vers sa punition, elle envoie Ă son beau-pĂšre, disant: de lâhomme Ă qui sont ces [choses] jâai conçu. Sache de qui est lâanneau et le collier et le bĂąton. Et lui, reconnaissant les cadeaux, dit: "Elle est plus juste que moi parce que je ne lâai pas livrĂ©e Ă SĂ©la mon fils"[363] » â Ambroise de Milan citera cet exemple comme lâun des plus beaux exemples de repentir et estime quâen sâaccusant plus quâil nâaccusait Thamar, Juda sâest soustrait au chĂątiment quâil aurait autrement mĂ©ritĂ©[364]. Ni JĂ©rĂŽme ni Tertullien ne partagent cet enthousiasme : le premier affirme que câest seulement en comparaison avec Juda que Thamar est juste[256], et le second estime que lâadmission de Juda ne modĂšre nullement la gravitĂ© des agissements de Thamar, dâautant plus que la Bible cautionne dâautres enfreintes de ce genre comme le mariage dâOsĂ©e avec une prostituĂ©e ou le remariage dâAbraham sans parler de la polygamie[240]. Toutefois, comme Fauste de MilĂšve fait usage dâarguments simiaires pour condamner Thamar sur le plan littĂ©ral et le terrain Ă©thique, Augustin dâHippone lui rĂ©pond quâelle typifie lâĂglise tandis que Juda prĂ©figure les Juifs â il faut par consĂ©quent comprendre quâaprĂšs avoir Ă©talĂ© les gages qui attestent de son appel, sa justification et sa glorification, lâĂglise lâemporte sur les Juifs qui se voulaient seule engeance dâAbraham ; ils ne peuvent dĂšs lors plus que constater la plus grande justification des chrĂ©tiens (et, peut-ĂȘtre, se convertir Ă la nouvelle foi)[365].
Avant lui, ZĂ©non ajoute Ă cette victoire de lâĂglise sur la Synagogue, le triomphe des fidĂšles sur le diable et mĂȘme sur les flammes du jugement dernier[362]. Câest, dans la plupart des Ă©ditions, sur ce point que sâachĂšve le sermon du prĂȘcheur de VĂ©rone mais un mansucrit comporte aussi sa pĂ©roraison oĂč ZĂ©non fĂ©licite ses catĂ©chumĂšnes dâavoir rejoint lâĂglise ; Gn 38 a ainsi retracĂ© lâhistoire de lâhumanitĂ©, depuis ses dĂ©buts paĂŻens jusquâĂ son salut dans lâĂglise, justifiĂ©e par sa doxologie trinitaire qui confirme lâinterprĂ©tation allĂ©gorique opĂ©rĂ©e par ZĂ©non sur les gages[366].
Gn 38 se poursuit cependant sur quatre versets, consacrĂ©s au fruit de ces rapports : ceux-ci nâont, dans leur physicalitĂ©, pas la faveur de lâauteur de la Vulgate qui imprime plusieurs contorsions au texte pour Ă©viter de dĂ©crire la mise Ă bas[367]. Il ne peut toutefois faire impasse sur une naissance si importante pour la thĂ©ologie de substitution : « au cours de cette effusio, un enfant sortit la main, Ă laquelle lâobsetrix noua un coccinum », disant que « celui-ci est sorti premier » â et non âen premierâ comme dans le texte hĂ©breu â tandis que PharĂšs nâest plus « son frĂšre » mais « lâautre »[368]. Il ajoute dans sa missive Ă Geruchia quâĂ lâaccouchement de Thamar, un mur de division sĂ©para deux peuples, et la main Ă laquelle le coccinum Ă©tait liĂ© accusait dĂ©jĂ les Juifs de la souffrance du Christ[358].
Aussi copieux sur ce point que JĂ©rĂŽme est sobre, Ambroise de Milan glose une premiĂšre fois sur la naissance des jumeaux dans lâApologie de David : elle est rapprochĂ©e de la naissance dâIsaac et IsmaĂ«l, dont Gal 4:21-31 avait fait lâallĂ©gorie des deux Testaments â le premier, PharĂšs, reprĂ©sente la souffrance et la mort du Christ, tandis que Zara figure lâĂvangile qui a dĂ©truit la clĂŽture Ă©rigĂ©e par les anciens et dont la main retirĂ©e signifie la primautĂ© bien quâil soit nĂ© plus tard.
LâĂ©vĂȘque de Milan dĂ©veloppe ce discours dans son commentaire sur Luc, reprenant Ă quelques dĂ©tails prĂšs celui dâEusĂšbe : aprĂšs avoir justifiĂ© Thamar selon les sens historique et moral, Ambroise sâapesantit sur le mystĂšre de la naissance gĂ©mellaire en vertu duquel Juda et Thamar doivent ĂȘtre excusĂ©s. Les jumeaux sont, cette fois, deux Ă©coles de saintetĂ©, oĂč la grĂące et la foi de Zara ont prĂ©sĂ©ance sur la loi et la lettre de PharĂšs car elles nâavaient pas besoin dâĂȘtre inculquĂ©es par MoĂŻse ou toute autre personne mais se communiquaient spontanĂ©ment « par un bienfait de la sagesse », et tous les patriarches antĂ©-mosaĂŻques en ont eu lâintuition, ainsi quâIsaĂŻe qui a vu le vĂȘtement rouge (Is 63:2) reprĂ©sentant le sang salvateur. Zara figure non seulement les chrĂ©tiens mais le Christ, prĂ©existant au monde mais arrivĂ© tardivement dans la chair, anoblissant lâhumanitĂ© « par le signe de sa croix et par lâeffusion de son sang » reprĂ©sentĂ© par lâĂ©carlate. Câest son retrait qui permet la venue de PharĂšs, lequel brise lâharmonie prĂ©existante comme les Pharisiens qui se sont sĂ©parĂ©s de la multitude en nâĂ©tant pas capables dâimiter pas la vie de leurs ancĂȘtres. JĂ©sus sâest incarnĂ© pour permettre aux Juifs de retrouver le salut quâils ont perdu en rompant la clĂŽture (Eph 2:14), câest-Ă -dire en rĂ©tablissant la concorde primordiale de la foi bien quâil ait aussi aplani par ce mouvement les diffĂ©rences entre corps et Ăąme, extĂ©rieur et intĂ©rieur, Juif et Grec ; il a, en abolissant la loi des commandements qui nâavait dâutilitĂ© que pour les incrĂ©dules et les faibles mais dĂ©tournait les croyants de la piĂ©tĂ© par la difficultĂ© des prescriptions, offert en un mot le salut pour tous. Or, aprĂšs avoir enseignĂ© que « la figure [du Seigneur] a dâabord fait son apparition en Zara », Ambroise affirme, Ă lâencontre de la lettre et dâEusĂšbe que « le Seigneur JĂ©sus fut, dans sa chair, de la tribu et descendance de ce Zara, ayant Ă©tĂ© engendrĂ© non seulement d'une femme mais sous la Loi (Gal 4:4), afin de racheter ceux qui Ă©taient sous la Loi au prix de son sang »[369].
La naissance des jumeaux sert si bien les prĂ©tentions chrĂ©tiennes quâelle est en dĂ©finitive la seule partie de Gn 38 Ă nâavoir pas perdu de sa substance dans le christianisme dâOccident, le seul Ă©lĂ©ment de son histoire sur lequel le poĂšte Commodien a jugĂ© bon dâattirer lâattention dans ses Instructions (« Item aux Juifs ⊠Lisez lâhistoire des jumeaux de Thamar ⊠Apprenez donc par lĂ que les cadets sont aimĂ©s du Christ »)[370] puisque contrairement Ă Juda qui nâest plus tant lâancĂȘtre du messie que des Juifs qui sâobstinent Ă ne pas lâaccepter ou Thamar quâon peut â Ă la rigueur â excuser mais aucunement admirer pour ses pĂ©chĂ©s, leurs enfants figurent soit le peuple nouveau soit la primautĂ© de lâĂvangile sur la Torah dont il sâest affranchi[371].
ExĂ©gĂšses du Haut Moyen Ăge
Le rĂšgne de Justinien, dernier empereur Ă tenter de restaurer lâempire romain sur toutes ses anciennes possessions, sâaccompagne dâimportants bouleversements dans lâhistoire dâEurope et dâOrient : sur le plan religieux, il se veut le champion du christianisme orthodoxe, dĂ©fini par les conciles dâĂphĂšse et de ChalcĂ©doine qui ont Ă©tĂ© convoquĂ©s pour clarifier les ambiguĂŻtĂ©s du symbole de NicĂ©e-Constantinople sur la ou les natures du messie chrĂ©tien. Or, loin dâunifier les esprits, ces conciles ont mis fin de facto Ă lâĂšre patristique[373], rĂ©cusant le nestorianisme, dont les adeptes se sont excentrĂ©s vers la Perse, puis le monophysisme qui sâĂ©panouit en ArmĂ©nie, en Ăgypte et en Syrie, oĂč Jacques de Saroug compose un mimra sur Gn 38 dans la lignĂ©e dâEphrem de Nisibe, intitulĂ© Tamar et le MystĂšre de lâĂglise[374]. Câest en accusant les artistes de professer lâune ou lâautre de ces hĂ©rĂ©sies, que les chrĂ©tiens de la communautĂ© byzantine feront la chasse aux icĂŽnes qui reprĂ©sentent les ancĂȘtres de lâhomme JĂ©sus, dont la mosaĂŻque de Juda et Tamar de la basilique Saint-Laurent de Milan et, probablement, une autre Ă la basilique Sainte-Marie-Majeure de Rome[375], construites Ă une Ă©poque oĂč la multiplicitĂ© dâinterprĂ©tations quant au sens correct du message biblique, avait dĂ©jĂ menĂ© Procope de Gaza et dâautres rhĂ©teurs chrĂ©tiens Ă les compiler en chaĂźnes bibliques[376].
Justinien laisse Ă©galement sa marque sur les Juifs et le judaĂŻsme byzantins : bien que mieux traitĂ©s que les chrĂ©tiens hĂ©tĂ©rodoxes, ils nâen sont pas moins discrĂ©ditĂ©s comme membres dâune « secte » suspecte, et Justinien promulgue la novelle 146 qui prescrit la lecture synagogale de la Bible en grec et proscrit le recours Ă la deuterosis, câest-Ă -dire la tradition orale juive â cette mesure favorise assurĂ©ment la diffusion du christianisme car les Juifs qui prenaient pour base la Septante, Ă©taient pratiquement dĂ©sarmĂ©s face aux prĂ©dicateurs chrĂ©tiens ; elle freine dans le mĂȘme temps lâusage de lâhĂ©breu, adoptĂ© par nationalisme face aux RomĂ©es, dont les Juifs ont par ailleurs tentĂ© de contenir voire contrarier lâexpansion, de Naples Ă Babylone[377]. Elle a eu pour principales consĂ©quences de stimuler la production de nouvelles traductions par ceux des Juifs qui pratiquaient la Bible en grec â elles se retrouvent notamment dans les scholies du Codex Ambrosianus â et la reformulation des Midrashim par la poĂŻetika hĂ©braĂŻque des Juifs demeurĂ©s sur la terre ancestrale â on compte dâabord des piĂšces pour accompagner les offices de priĂšre mais les thĂšmes de lâhistoire de Juda et Tamar sont ensuite exploitĂ©s dans des priĂšres pĂ©nitentielles ou des chants de mariage â tandis que les Juifs migrant vers lâOrient ou lâItalie afin dâĂ©chapper au zĂšle convertisseur des Byzantins, emportent avec eux leurs homĂ©lies midrashiques et donnent naissance au corpus Tanhouma-Yelamdenou ; la conscience de lâexil pourrait avoir influencĂ© les attentes eschatologiques de leurs auteurs, et toutes les versions du corpus sâaccordent pour inverser les rapports de valeur entre Joseph et Juda, et juger le protagoniste de lâhistoire de Juda et Tamar plus sĂ©vĂšrement quâaux Ă©poques prĂ©cĂ©dentes[378].
Les intempĂ©ries, Ă©pidĂ©mies et avanies (en) du sixiĂšme siĂšcle â qui marquent le dĂ©clin de la culture classique en Occident, et le dĂ©but du Moyen Ăge, oĂč Isidore de SĂ©ville et BĂšde assoient les enseignements des pĂšres â, donnent en effet lieu Ă une intense activitĂ© messianique en Orient : les chrĂ©tiens y voient les signes de la fin des temps annoncĂ©e par Hippolyte de Rome et Jules lâAfricain, prĂ©lude Ă lâapocalypse et au retour du Christ, tandis que les Juifs spĂ©culent sur la venue dâun messie issu du Joseph qui mourra en terrassant lâAdversaire chrĂ©tien, aprĂšs quoi le messie issu de David consacrera le retour de Dieu dans son temple Ă JĂ©rusalem[379]. Lâaffaiblissement des grands empires, byzantins comme sassanides, facilite les conquĂȘtes des nomades arabes fĂ©dĂ©rĂ©s sous lâislam. Lâhistoire de Juda et Tamar ne semble pas avoir occupĂ© les docteurs de la nouvelle foi â Juda y est hissĂ© au rang de prophĂšte, et est par consĂ©quent impeccable â mais la conquĂȘte nâen chamboule pas mois lâhistoire de son interprĂ©tation : lâĂ©tablissement des Abbassides Ă Bagdad favorise le devenir des communautĂ©s juives de Babylone, oĂč le Talmud vient dâĂȘtre achevĂ©, et ses scholarques militent pour lâimposer Ă tout IsraĂ«l. Le soin portĂ© par les Arabes Ă leur langue entraĂźne par ailleurs lâapparition de la philologie hĂ©braĂŻque, prĂ©cĂ©dĂ©e de peu par la mise au propre des diffĂ©rentes traditions de la massore, câest-Ă -dire la transmission du texte biblique hĂ©braĂŻque. De surcroĂźt, lâapparition de factions au sein de lâislam qui se divisent sur le rapport Ă la loi orale, et les dĂ©bats philosophico-thĂ©ologiques, encourage des Juifs Ă nâaccepter comme autoritaire que le « texte donnĂ© Ă lire » (Miqra, dâoĂč leur nom de qaraĂŻtes) et non ses commentaires par les rabbins, surtout sâils sont perçus comme contraires au sens littĂ©ral, Ă la grammaire ou Ă la raison. Câest en rĂ©ponse aux dĂ©fis posĂ©s par ces derniers et par lâassimilation dans la culture arabe, ainsi quâau mĂ©pris professĂ© par les musulmans envers les Juifs qui seraient incapables de comprendre leur propre texte, que Saadia Gaon compose le Tafsir (« explication »), une traduction assistĂ©e et par consĂ©quent interprĂ©tative de la Bible en judĂ©o-arabe. AncrĂ©e dans son environnement, elle suit gĂ©nĂ©ralement le sens simple des versets mais se conforme au style littĂ©raire arabe et fait usage de termes musulmans[380].
GenĂšse 38 dans lâart byzantin
Lâimage joue un rĂŽle majeur dans lâart byzantin qui reprend les canons de lâart grec antique, et lâon trouve des mosaĂŻques Ă travers les empires romain puis byzantin dans les lieux communautaires juifs comme chrĂ©tiens[381].
Cependant, hormis de possibles reprĂ©sentations imagĂ©es de lions et de palmiers[382], les figures de Juda et Tamar sont absentes de lâart synagogal et la mise en image de leur histoire semble ĂȘtre le fait des seuls chrĂ©tiens jusquâĂ lâĂšre moderne : une femme voilĂ©e tendant un bĂąton Ă un homme, figure dans les fioritures du cubicule A des catacombes sur la via Latina (bien que lâimage soit trop dĂ©gradĂ©e pour permettre une identification sans Ă©quivoque), une mosaĂŻque dans lâatrium de la chapelle Saint Aquilin attenant Ă la basilique Saint-Laurent de Milan, figure Juda et un encart le montre aux cĂŽtĂ©s de Tamar et leurs jumeaux (la mosaĂŻque complĂšte devait vraisemblablement figurer dâautres personnages vĂ©tĂ©rotestamentaires, remplissant un rĂŽle similaire aux mosaĂŻques sixtines dans la nef de la basilique Sainte-Marie-Majeure de Rome). Neuf miniatures dĂ©peignent en outre leur histoire dans la GenĂšse de Cotton, et des Bibles illustrĂ©es plus tardives comme la Bible dâAmiens ou la GenĂšse dâEgerton[383].
Les mosaĂŻques monumentales datent vraisemblablement de la pĂ©riode entre les conciles dâĂphĂšse et de ChalcĂ©doine[384].
Visant Ă Ă©tablir le triomphe du christianisme sur le judaĂŻsme, les miniatures des Octateuques exploitent le motif de la naissance gĂ©mellaire car Zara qui reprĂ©sente lâĂglise aura, comme Jacob, prĂ©sĂ©ance sur PharĂšs qui figure, avec EsaĂŒ, la Synagogue ; le lecteur byzantin aura en outre les interprĂ©tations christologiques dâOrigĂšne et dâEusĂšbe, voire dâEphrem Ă lâesprit[385].
GenĂšse 38 dans les chaĂźnes grecques
Directeur dâune acadĂ©mie rhĂ©torique, Procope de Gaza signe lâune des plus anciennes exegetikaĂŻ eklogaĂŻ (« compilations exĂ©gĂ©tiques ») sur le Livre de la GenĂšse : constatant la prolifĂ©ration de commentaires, il en rĂ©dige une compilation Ă partir des enseignements de divers auteurs â dont beaucoup ne sont connus que par son commentaire, assemblant des opinions parfois contradictoires et sâappliquant alors Ă les concilier. Il dĂ©laisse cependant la collation pure dâextraits complets pour la paraphrase, abrĂ©geant ses sources et les remaniant pour prĂ©senter un commentaire continu qui sâĂ©carte parfois de lâordre des versets[376].
Tamar et Juda dans lâhymnodie versifiĂ©e de Jacques de Saroug
ConsidĂ©rĂ© dans son Ăglise comme le digne successeur dâEphrem de Nisibe et exerçant comme lui son ministĂšre aux confins de lâempire romĂ©en, Jacques (Yaqoub) de Saroug a composĂ© une longue sĂ©rie dâhomĂ©lies versifiĂ©es Ă rĂ©citer plutĂŽt quâĂ chanter devant un public de moines ou de fidĂšles ; lâun de ces mimre, composĂ© dans un vers Ă douze pieds que lâĂ©vĂȘque de Batnan aurait inventĂ© Ă lâĂąge de douze ans, est consacrĂ© au mystĂšre de Tamar[386].
Informant son public du sujet dĂšs lâincipit car il sâadresse au Seigneur en reprenant le jeu de mots ephrĂ©mien sur le nom de Tamar[311], Mor Yaqoub commence par louer longuement le crĂ©ateur divin et humain du christianisme, le prie de lui donner lâinspiration pour composer son mimrÄ puis Ă©voque sa promesse Ă Abraham et les extrĂ©mitĂ©s auxquelles se sont prĂȘtĂ©es les femmes depuis Rachel et LĂ©a jusquâĂ Ruth pour avoir le privilĂšge de le faire venir au monde. Cependant, nulle nâest allĂ©e aussi loin que Tamar, « emplie de mystĂšres » car elle est devenue de plein grĂ© une prostituĂ©e au cĆur libertin, sâasseyant sur le bord des routes pour piĂ©ger un homme, renonçant Ă sa noblesse et ses bonnes maniĂšres afin de faire venir son seigneur car elle avait compris quâelle nây parviendrait pas autrement. Câest avec discernement et amour des mystĂšres que lâhymnographe enjoint son auditoire Ă Ă©couter son histoire, sans faire de reproches car chaque mot placĂ© par le Saint-Esprit dans les Ăcritures en est riche, et si « le scribe MoĂŻse a placĂ© lâhistoire de Tamar dans son livre comme un bijou, de façon que sa beautĂ© puisse briller parmi ses sections, » câest quâil devait y avoir un mystĂšre â comment MoĂŻse exalterait-il sinon une prostituĂ©e alors quâil condamnait la prostitution, comment bĂ©nirait-il, ainsi que Jacob, un homme quâils qualifient dâintĂšgre alors que Juda savait parfaitement quâil se dĂ©tournait vers une prostituĂ©e, quand bien mĂȘme ignorĂąt-il quâelle Ă©tait sa bru, comment Dieu soi-mĂȘme permettrait donc que ce stratagĂšme aboutisse sâil lui eĂ»t Ă©tĂ© haĂŻssable ? Câest quâelle Ă©tait belle, la foi de Tamar en son seigneur, si bien quâelle a rendu beaux des actes qui sont laids.
Ayant ainsi mis en garde son public contre la tentation de juger mal Ă propos, le poĂšte relate lâhistoire de la jeune bru qui entre dans la maison de Juda, radieuse de foi en la maison dâAbraham, prĂȘte Ă faire venir au monde le messie mais elle dĂ©chante une premiĂšre fois lorsque son premier mari meurt aprĂšs avoir semĂ© sans la moindre rĂ©colte, puis lorsque son faquin de frĂšre qui regimbe Ă la prendre et frustre ses attentes, est lui aussi mis Ă mort par Dieu. La famille de Juda traite alors cette bru qui a enterrĂ© ses deux premiers maris, comme un champ de ronces qui Ă©touffe les graines â ils lâhumilient et la condamnent Ă ĂȘtre un sol sauvage et inculte que personne nâose approcher.
GuidĂ©e par la lumiĂšre des mystĂšres qui brille en son Ăąme et consciente que demeurer dans son attitude pudique ne lui apportera pas le mari quâelle attend, elle dĂ©cide de voler la sainte semence afin dâĂȘtre confortĂ©e par elle, et de prendre Juda dans ses filets afin dâextraire le trĂ©sor qui enrichira le monde Ă mĂȘme son Ă©crin. AprĂšs avoir priĂ© Dieu de faire rĂ©ussir son entreprise, elle prĂ©pare ses piĂšges et retire sa chastetĂ© et sa noblesse en mĂȘme temps que ses habits de deuil pour sâasseoir sur la route, vĂȘtue des apparats des filles de joie, scrutant des yeux la route pour apercevoir le marchand Ă piller. Le poĂšte souligne tout le contraste entre la beautĂ© du cĆur, de lâĂąme et des yeux de Tamar qui les lĂšve vers Dieu en priĂšre et son apparence ignoble.
Juda la voit et passe sans intention de sâattarder auprĂšs de cette prostituĂ©e mais Dieu a dĂ©cidĂ© dâintervenir en faveur de la femme qui est si dĂ©sireuse et digne de faire venir son fils au monde, et dĂ©cide quâil lui donnera deux enfants en Ă©change de ces deux maris quâil lui a fort justement pris. Dieu lâayant ainsi dĂ©crĂ©tĂ©, le « jeune lion » ne peut que sâarrĂȘter, intriguĂ© par ce curieux mĂ©lange de licence et de chastetĂ© car il prend le voile qui dissimule son identitĂ© pour une marque de pudeur. Le cĆur de la femme sâemplit de joie lorsquâelle arrache sa richesse au marchand, et elle lui demande son salaire insolemment, comme il sied Ă une prostituĂ©e, prenant son anneau, son bĂąton et un voile qui lui serviront lors dâun grand pĂ©ril, tandis quâil donne ce quâil croit ĂȘtre de simples gages, inconscient dâavoir fourni des tĂ©moins pour sâaccuser alors quâil vient dâĂȘtre dĂ©pouillĂ©. Il sâen va alors, aprĂšs que le champ a reçu la sainte semence tant attendue, et elle sâen retourne avec Dieu pour seul tĂ©moin, remettant sa tenue de deuil tandis quâil façonne mystĂ©rieusement deux belles formes qui grandissent discrĂštement. Le fermier ignore avoir perdu sa graine et que celle-ci a pris dans le champ tandis que Tamar, qui a repris le deuil, chĂ©rit lâanneau, le bĂąton et le voile comme des enfants et hĂ©ritiers.
Cependant, la graine est devenue gerbe et ses voisins pourraient bien tĂ©moigner de sa moralitĂ©, de sa retenue, de son humilitĂ©, son ventre arrondi raconte une autre histoire. Les accusations se rĂ©pandent contre la tribu, et la maison de Juda bruit de dĂ©lations et suspicions tandis que redoublent les insinuations envers lâexclue, qui nâen a cure. AprĂšs avoir eu confirmation des faits, Juda ordonne « quâon la prenne pour ĂȘtre brĂ»lĂ©e, au vu de lâadultĂšre quâelle a mĂ©prisablement commis ». Il a, dit le poĂšte, Ă©tĂ© mis au fait par la Providence du stratagĂšme de sa bru et, ne pouvant accepter lâadultĂšre, rend la sentence que rendra MoĂŻse envers lâadultĂšre alors que la Loi nâa pas encore Ă©tĂ© donnĂ©e.
On se hĂąte dâappliquer le dĂ©cret, et lâaffligĂ©e se prĂ©cipite vers ses secrets, quâelle exhibe maintenant au juge en disant :
« Mon seigneur juge, jâai des tĂ©moins, convoque-les et quâils tĂ©moignent : examine-les et sâils sont vrais, accepte-les. Interroge le bĂąton et le voile sur lâhistoire, regarde lâanneau, de qui est le cachet: il ne mentira pas.
Que tu es droit et juste, tous le savent. EnquĂȘte sur lâaffaire, regarde les tĂ©moins et rends ta sentence [car] pourquoi brĂ»lerais-je alors que jâai des tĂ©moins qui prouveront mon innocence ? Fils dâIsraĂ«l, juge avec justice une femme affligĂ©e. »
Juda, voyant les objets, rĂ©alise quâils sont Ă lui, et
« lâhomme droit trembla car la culpabilitĂ© lâavait saisi. Le bĂąton lui indiquait âje suis Ă toi, dĂ©laisse le jugementâ, le voile criait âRetiens le feu de cette misĂ©rableâ tandis que lâanneau disait: âJe suis inscrit et ai Ă©tĂ© gardĂ© intact, mon maĂźtre me connaĂźt et si je suis perdu, son nom tĂ©moignera pour moi. ArrĂȘte-lĂ la conflagration, retires le feu de cette femme nĂ©e libre, prends les gages, dĂ©laisses lâaffaire et prononces-la innocenteâ. »
Voyant « ses propres tĂ©moins ⊠de sa propre maison », le juste juge se hĂąte dâinnocenter Tamar et, redevenu calme, il Ă©nonce : « Elle est plus innocente que moi, ne la laissez pas ĂȘtre maltraitĂ©e ». Tamar, « veuve, catin et femme de haut lignage tout Ă la fois », reçoit maintenant la couronne comme un athlĂšte qui a vaincu dans lâarĂšne ainsi que les fĂ©licitations de lâhymnographe qui clĂŽt son hymne sur une rĂ©capitulation suivie de deux appels â lâhistoire, câest la recontre entre lâĂglise et le « Sauveur des Ăges » quâelle a quĂȘtĂ©e aux carrefours lorsque JĂ©sus allait sâoccuper de lâhumanitĂ© de mĂȘme que Juda rencontra Tamar lorsquâil se rendait auprĂšs de son troupeau, et elle se doit de lui demander trois gages, « la Foi, le BaptĂȘme et la Croix de LumiĂšre », quâelle devra ensuite conserver pour prouver son innocence lors du jugement dernier et ĂȘtre sauvĂ©e de la GĂ©henne : le bĂąton, câest la croix qui fera honte au feu et le baptĂȘme qui Ă©teint les flammes ; lâanneau, câest la foi de Tamar, la fille des peuples (i.e. Gentils), qui Ă©touffe la flamme au sein du feu, et le voile, câest la FiancĂ©e de LumiĂšre, i.e. lâĂglise mĂȘme.
Le poĂšte prie alors lâĂglise de conserver ces trois gages, et Ă lâĂąme qui aime le monde comme une prostituĂ©e, il demande de supplier le Christ sur le bord de la route et de se couvrir de ses gages une fois quâelle lâaura trouvĂ© afin de nâĂȘtre pas lĂ©chĂ©e par le feu. Enfin,
« que Tamar serve de miroir au monde entier, que chacun prĂ©serve sa foi et son baptĂȘme, et lorsque le feu du jugement est rĂ©vĂ©lĂ© en cette vie, que soit bĂ©ni celui qui sauve de cette flamme la personne qui lâaime[387] »
La « FlĂ»te de lâEsprit » a composĂ© ce mimrÄ pour enseigner Ă lâassemblĂ©e Ă voir au-delĂ des apparences : si MoĂŻse nâa pas condamnĂ© Juda ni Tamar, ce nâest, Ă plus forte raison, pas au lecteur de le faire. Ceci prĂ©cisĂ©, Mor Yaqoub lui livre la lecture appropriĂ©e, fondĂ©e sur celle dâEphrem et sa finalitĂ© christologique quâil annonce tout de go. Comme de nombreux poĂštes syriaques, lâĂ©vĂȘque de Batnan attise lâintĂ©rĂȘt de ses ouailles en les prenant plusieurs fois Ă partie, interjetant ses apprĂ©ciations dans le rĂ©cit et donnant littĂ©ralement la parole Ă ses personnages voire ses objets qui prennent le rĂŽle de la voix divine des traditions juives. Cependant, si lâorateur prend Ă cĆur de dĂ©voiler Ă son public le monde intĂ©rieur de Tamar â tout entier tendu vers lâaccomplissement de la promesse faite par Dieu Ă Abraham que tous les peuples de la terre seraient bĂ©nis par sa semence (Gn 22:18), laquelle a Ă©tĂ© identifiĂ©e Ă JĂ©sus de Nazareth par Paul de Tarse (Gal 3:16) â, ce nâest quâen fin de rĂ©cit quâil la laisse sâexprimer, amplifiant de la sorte Gn 38:25. La rĂ©capitulation du poĂšte est en vĂ©ritĂ© une seconde interprĂ©tation qui fait de Juda et Tamar les types de JĂ©sus et son Ăglise tandis que les gages sont des cadeaux, Ă la maniĂšre dâHippolyte de Rome[388].
Le mimrÄ aura peut-ĂȘtre produit un Ă©cho, comme dans un hymne rĂ©citĂ© lors des mariages mais Gn 38 demeure absent de tous les lectionnaires de rite syriaque.
Juda et Tamar dans le corpus Tanhouma-Yelamdenou
FondĂ© sur les enseignements de docteurs galilĂ©ens de la seconde moitiĂ© du IVe siĂšcle, le corpus Tanhouma-Yelamdenou sâĂ©labore au cours des siĂšcles suivants et au grĂ© des migrations juives Ă travers lâespace byzantin. LâĂ©dition courante du Midrash, imprimĂ©e pour la premiĂšre fois Ă Constantinople en 1520, semble avoir desservi les communautĂ©s orientales tandis quâune autre version, Ă©ditĂ©e par Solomon Buber, apparaĂźt en Italie du Sud vers le IXe siĂšcle et se rĂ©pand dans les communautĂ©s rhĂ©nanes â cette version comporte un commentaire multipartite mais presque complet de lâhistoire de Juda et Tamar, virtuellement ignorĂ©e du Tanhouma imprimĂ© ; dâautres traditions se retrouvent un ou deux siĂšcles plus tard dans des Midrashim du mĂȘme corpus, ultĂ©rieurement connus comme Exode Rabba et DeutĂ©ronome Rabba, ainsi que de nombreuses citations dans des ouvrages ultĂ©rieurs au nom de Tanhouma ou Yelamdenou.
Le corpus Tanhouma dĂ©laisse le commentaire suivi de la Bible qui veillait Ă lier chaque enseignement au verset qui lâavait suscitĂ©, pour produire des suites dâhomĂ©lies plus ou moins rattachĂ©es Ă un verset dont la ressemblance formelle avec les chaĂźnes de Procope de Gaza a Ă©tĂ© maintes fois soulignĂ©e[389] (ce procĂ©dĂ© littĂ©raire trouve son aboutissement avec le Pirkei deRabbi Eliezer qui prend la forme dâune Bible rĂ©inventĂ©e[390], et dont Gn 38 est absent).
Une premiĂšre suite apparaĂźt sur « Ce fut en ce temps, et Juda descendit » (Gn 38:1), aux chapitres 8 Ă 13 de la section Vayeshev : examinant sâil est licite dâĂ©vacuer les dĂ©combres dâune ruine qui sâĂ©croule Ă shabbat lorsquâon nâest pas sĂ»r que des IsraĂ©lites y sont ensevelis, le Midrash tisse une sĂ©rie dâenseignements pour conclure que Dieu rĂ©tribuera celui qui agit ainsi par la rĂ©surrection, et Jacob ne devrait pas demeurer inconsolable lorsque ses fils lui rapportent la tunique de Joseph â câest quâil pressent son fils vivant ou quâil a conscience de la rĂ©sonance cosmique du drame par-delĂ sa dimension personnelle car les tribus ne sont plus au nombre de douze, or câest sur douze constellations que tient le zodiaque, sur douze mois lâannĂ©e, sur douze heures le jour, sur douze heures la nuit etc. Gn 38 est donc de ces histoires qui commencent mal dĂšs leur incipit car vayehi, « il arriva [en ce temps-lĂ etc.], » doit ĂȘtre lu vay-hi, « malheur et lamentation » ! Or toutes les traditions du Tanhouma, nonobstant une tentative isolĂ©e de dĂ©tacher la descente de Juda de celle de Joseph car elle lui serait antĂ©rieure (elle est d'ailleurs immĂ©diatement contredite par lâenseignement, rapportĂ© au nom de Rabbi Yohanan, qui appose, mesure pour mesure, la descente de Juda Ă celle de Joseph, de mĂȘme que le Livre de Daniel appose Darius Ă Balthasar pour enchaĂźner destructeur Ă destructeur, dĂ©molisseur Ă dĂ©molisseur et fin de royautĂ© Ă fin de royautĂ©)[391], appuient sur la responsabilitĂ© de Juda dans ces pleurs â une interprĂ©tation, relativement indulgente, les fait commencer lorsque Ruben revient au puits sans y trouver Joseph mais la plus sĂ©vĂšre, qui est aussi la plus souvent rĂ©pĂ©tĂ©e, les fait Ă©clater lorsque les fils de Jacob lui prĂ©sentent la tunique de son fils ; mĂ»s par le remords ou la crainte du courroux, ils accusent Juda de nâavoir pas pris la bonne dĂ©cision, et « le descend[ent] de sa grandeur » puisquâil est dit « Juda descendit » (Gn 38:1) â « descendre » est lu « dĂ©choir, » et fait suite Ă une rĂ©primande comme en Ex 32:7, oĂč Dieu congĂ©die brutalement MoĂŻse par ce mĂȘme âDescendsâ lorsque le peuple se fait un veau dâor[392].
Le Midrash Tanhouma fait dĂ©couler de cette faute capitale la suite des Ă©vĂšnements, câest-Ă -dire la mort des enfants â quâil choisit de prĂ©senter dâaprĂšs Gn 46:12, sans indication de la moindre faute de leur part, alors que les auteurs dâExode Rabba soulignent que lâacte dâOnan avait pour but et fonction de le rendre inapte Ă procrĂ©er[393] â dans la section Vayeshev, il est rapportĂ© par Rabbi Hiyya bar Abba au nom de Rabbi Yohanan, que qui a commencĂ© une prescription sans la terminer, sâexpose Ă la dĂ©chĂ©ance et Ă enterrer ses enfants tandis quâun enseignement, consignĂ© dans la section Vayigash des deux Ă©ditions, figure Dieu soi-mĂȘme condamnant Juda Ă connaĂźtre la « peine des fils » pour avoir « frit les entrailles » de son pĂšre[394]. Le chĂątiment commence par la prise dâune femme, dont ce nâest plus seulement Mal 2:11 (« Juda a trahi » etc.) mais Mic 1:15 (« JusquâAdoullam viendra â câest-Ă -dire descendra â lâhonneur dâIsraĂ«l ») qui fustigent Juda de son union scandaleuse avec une CananĂ©enne. Prov 28:13 (« Qui confesse et renonce, sera pardonnĂ© ») devient une preuve Ă charge contre Juda qui nâa, pas plus que les habitants de JĂ©rusalem, acceptĂ© dâendosser la responsabilitĂ© de la vente de Joseph alors que ses frĂšres lâavaient fait roi sur eux[395].
Le chapitre 17 comprend une seconde suite pour lâ« acte de Tamar, » vaguement reliĂ© Ă Gn 38:13-26 : Tamar a, comme Rebecca, pris le voile et en a Ă©tĂ© rĂ©compensĂ©e par la naissance de jumeaux ; elle Ă©tait pudique dans la maison de son beau-pĂšre, et sâest rendue au Petaâh Einayim qui est un lieu de priĂšre ; elle a dâailleurs adressĂ© une supplique Ă Dieu lorsque Juda, la prenant pour une prostituĂ©e, a voulu passer sans regarder en arriĂšre â selon le Midrash, Dieu y rĂ©pond en dĂ©pĂȘchant MichaĂ«l pour faire dĂ©vier Juda de sa route, et une tradition plus tardive, notĂ©e dans les marges du manuscrit Oxford dont Buber sâest servi, remplace lâarchange par un ange prĂ©posĂ© au dĂ©sir ; lâexĂ©gĂšte peut ainsi mettre lâattitude de Juda face Ă Tamar sur le compte dâun appĂ©tit aiguisĂ©, et affirmer que son caractĂšre est si exemplaire dâordinaire, que MichaĂ«l se compare Ă lui[396]. Une autre tradition satellite, incluse par Buber en prĂ©face Ă son Ă©dition, ajoute que les gages demandĂ©s par Tamar reprĂ©sentent la pension alimentaire, lâhabit et les devoirs conjugaux quâun mari est tenu de fournir Ă son Ă©pouse â les rapports de Juda et Tamar nâont donc rien Ă voir avec la prostitution et sont une forme dâunion matrimoniale lĂ©gitime et correcte au possible[397]. Cependant, et bien que le Midrash Tanhouma explique quâ« elle conçut de lui » signifie quâelle enfanterait des hommes nobles comme lui, il indique, au chapitre 13, que Juda est un pĂ©cheur qui a eu la chance d'avoir la providence de son cĂŽtĂ© :
« [âŠ] Il y en a un qui a forniquĂ© et a perdu, câest Zimri, il y en a un qui a forniquĂ© et a Ă©tĂ© rĂ©compensĂ©, câest Juda car de lui sont issus Peretz et Hetzron qui engendreraient David et le Roi Messie qui devra racheter IsraĂ«l. Vois combien de pĂ©ripĂ©ties le Saint, bĂ©ni soit-il, a suscitĂ©es pour faire venir le roi messie de Juda â Tanhouma (Ă©dition Buber) Vayeshev 13:13 »
AprĂšs trois mois, lâaffaire est sue, soit que la grossesse de Tamar devient manifeste, soit quâelle entre au bain en demandant Ă ses amies de lui faire place car elle porte des rois ; un tribunal de trois membres oĂč siĂšgent Isaac, Jacob et Juda, se tient pour dĂ©libĂ©rer de la chose, et Juda qui est le plus jeune des juges â car lâon prĂ©fĂšre, lorsquâon juge dâun crime capital, que la responsabilitĂ© des dĂ©cisions du plus jeune, souvent moins rĂ©flĂ©chies que celles de juges plus avertis, ne retombe pas sur eux ordonne quâelle soit brĂ»lĂ©e car elle Ă©tait, aux dires dâEfraĂŻm Meqshaa au nom de Rabbi MeĂŻr, la fille de Sem (câest-Ă -dire MelchisĂ©dek, prĂȘtre du Dieu suprĂȘme Ă Salem). Le Midrash Tanhouma se frotte ensuite au jeu de lectures sur moutsÊŸet/motsÊŸet (« elle Ă©tait sortie/elle trouva »), quâil rĂ©cuse : soit on lit moutsÊŸet â et Tamar, qui Ă©tait traĂźnĂ©e de force, leva les yeux aux cieux car elle ne trouvait plus les gages, aprĂšs quoi dâautres gages furent miraculeusement crĂ©Ă©s pour la sauver â soit on lit motsÊŸet, comme Rabbi Juda berabbi Shalom le LĂ©vite â et Dieu dessilla les yeux de Tamar pour quâelle trouve les gages quâelle avait perdus â car Lv 5:22 indique clairement que lâon ne peut « trouver » que ce qui a Ă©tĂ© auparavant « perdu. » Un midrash marginal lit moutsÊŸet comme moutset (« elle brĂ»le »), ajoutant Ă la poignance du moment : Tamar qui ne trouve pas les gages, se consume dĂ©jĂ sur le bĂ»cher lorsquâelle adresse sa supplique Ă Dieu, et Dieu dĂ©pĂȘche lâange Gabriel â peut-ĂȘtre sous lâinfluence de la tradition talmudique babylonienne â pour les lui transmettre[398].
Le moment qui suit a Ă©tĂ© abondamment commentĂ© en plusieurs endroits, et la tradition de la section Vayeshev compte parmi les moins clĂ©mentes envers Juda : la requĂȘte dâexamen, si dĂ©licatement formulĂ©e par Tamar, est en fait une injonction Ă reconnaĂźtre son crĂ©ateur, et la voix cĂ©leste qui se fait entendre, ne lui laisse pas dâautre option que de proclamer publiquement sa paternitĂ© â dans ce qui semble ĂȘtre une version passablement corrompue des traditions antĂ©rieures, « [Juda] admit ensuite : Câest de moi quâest sortie lâaffaire. » AprĂšs lâaveu cependant, Dieu assure Juda quâil sauvera Daniel et ses trois compagnons en Ă©change de Joseph et Tamar qui porte deux justes, et Ruben se lĂšve aprĂšs avoir entendu Juda pour confesser lui aussi ce quâil a fait avec Bilha, ainsi quâil est dit en Job 15:17-19 :
« Je veux tâinstruire, Ă©coute-moi ; je veux tâexposer ce que jâai vu, ce que racontent les sages â ce sont Ruben et Juda â et câest pourquoi ils furent, seuls, maĂźtres de ce pays â Quand ? Lorsque nul Ă©tranger ne sâest mĂȘlĂ©. â Et lorsque MoĂŻse vint les bĂ©nir, que dit-il ? Que Ruben vive et ne meure pas etc. et voici pour Juda (Dt 33:6-7) »
Les traditions consignĂ©es par les deux versions dans la section Vayehi, se concentrent sur la force de lâaveu : câest parce quâelle avait vu que Juda reconnaĂźtrait ses torts, contrairement Ă Ruben, Simon et LĂ©vi, et contrairement Ă leurs descendants Dothan, Aviram, Zimri et KorĂ©, que LĂ©a remercia Dieu, et nomma son quatriĂšme fils Juda (compris comme « il reconnaĂźtra »), et câest pour rĂ©compenser le fils et la mĂšre que Jacob, bĂ©nissant Juda, lui promit : « tes frĂšres te reconnaĂźtront. » Exode Rabba et DeutĂ©ronome Rabba sont, quant Ă eux, dithyrambiques â pour le premier, les frĂšres de Juda, prĂ©sents dans lâaudience, tentent dâinnocenter Juda mais celui-ci tient Ă ce que la vĂ©ritĂ© soit faite, fĂ»t-ce Ă son dĂ©triment, et câest pour avoir rendu un jugement vĂ©ritable (oĂč lâaccusateur biblique devient au passage le dĂ©fenseur midrashique de Tamar) quâil est fait prince Ă lâorigine dâune lignĂ©e de rois[399] ; pour le second, « tout ce quâa fait Juda [âŠ], câest pour [Dieu] quâil lâa fait, » y compris ses transgressions.
Le chapitre 21 de la section Vayeshev comprend un dernier dĂ©veloppement sur la naissance des jumeaux â Peretz est le meneur, dâaprĂšs Ruth 4:18, et Zeraâh le prĂȘtre, tous deux prĂ©figurant MoĂŻse et Aaron qui feraient sortir les HĂ©breux dâĂgypte et les dirigeraient pendant leur pĂ©riode dâIsraĂ«l, avant mĂȘme que Joseph y descende.
Les deux principales moutures du Midrash Tanhouma se caractĂ©risent par leur sĂ©vĂ©ritĂ© vis-Ă -vis de Juda, laquelle contraste avec le traitement de GenĂšse Rabba, et est adoucie par les traditions satellites avant dâĂȘtre oubliĂ©e dans Exode Rabba et DeutĂ©ronome Rabba, plus tardives dâun siĂšcle que le reste du corpus. Il nâest cependant pas question de puritanisme puisque la critique ne touche pas Tamar, ni de rĂ©tribution pour la nĂ©gligence de Juda, bien que la section Vayeshev en ait repris lâidĂ©e (peut-ĂȘtre inspirĂ©e par le Talmud de Babylone), mais de dĂ©sunion familiale : le corpus Tanhouma-Yelamdenou et les poĂšmes qui en dĂ©rivent, vivent la vente de Joseph comme une tache indĂ©lĂ©bile sur les consciences juives[400], et la section Vayigash est la plus crue dans son contraste entre Joseph, Ă©pitome dâamour filial, et Juda, accusĂ© dâavoir fait frire les entrailles de Jacob. Lâinversion des rapports de force entre les frĂšres qui se produit de GenĂšse Rabba aux Midrashim Tanhouma, a peut-ĂȘtre pour origine celle qui se produit parallĂšlement dans leurs milieux dâĂ©laboration, entre maison dâĂ©tude et synagogue, mais peut-ĂȘtre est-ce aussi un changement dâattente eschatologique[378] â les homĂ©listes juifs tirent dâObadia 1:18 (« La maison de Jacob sera un feu, et la maison de Joseph une flamme, et la maison d'EsaĂŒ un amas de chaume ») que seul Joseph est capable de tenir tĂȘte Ă lâange tutĂ©laire dâEsaĂŒ-Edom, qui dĂ©signe dans la littĂ©rature juive Rome puis Byzance et la chrĂ©tientĂ© en gĂ©nĂ©ral[150], alors que lâaffaire de Tamar est un passif honteux pour Juda, et la raison pour laquelle il nâa pu lâemporter sur lâange[401] - [Note 35].
Juda et Tamar dans le cycle des qedoushtot
La qedoushta composĂ©e par YannaĂŻ pour agrĂ©menter les trois premiĂšres bĂ©nĂ©dictions de la priĂšre du chabbat au cours duquel lâhistoire de Juda et Tamar Ă©tait lue dans le cycle triennal (en), comportait neuf parties dont seules les cinquiĂšme (Ish Yehouda heâhel bemitsva velo gamra), sixiĂšme (Ish asher makhar Porat lamidyanim), septiĂšme (Eâhav niqreou yehoudim leshem Yehouda) et une bribe de la huitiĂšme ont pu ĂȘtre reconstituĂ©es. Construites en acrostiche alphabĂ©tique simple et veillant Ă lâallitĂ©ration au prix de nombreux nĂ©ologismes et au dĂ©triment du bon usage grammatical, les compositions demeurent aisĂ©ment comprĂ©hensibles et leurs allusions Ă la littĂ©rature extra-biblique faciles Ă Ă©lucider. Chacune de ces parties dĂ©veloppe un aspect de lâhistoire et se combine pour la rendre dans toute sa complexitĂ© : le cinquiĂšme membre rapporte schĂ©matiquement et dans les termes de YannaĂŻ, comment la « mesure pour mesure » a fait perdre Ă Juda puis retrouver la royautĂ© sur ses frĂšres, la section suivante revient plus globalement sur lâensemble de lâhistoire mais toujours dans la mĂȘme optique, la septiĂšme et ce qui demeure de la suivante sont des hymnes Ă la gloire de Juda aprĂšs quâil se rĂ©vĂ©lĂąt dans toute sa noblesse, ainsi quâune supplique Ă Dieu de restaurer Juda (câest-Ă -dire la JudĂ©e) dans son ancienne splendeur.
3. lorsque les frĂšres demandĂšrent Ă tuer un frĂšre et verser les sangs,
4. [il demanda] âquâobtiendrions-nous avec son sang ? Vendons-le pour de lâargent [âŠ]â
13. Celui-ci trébucha dans les rets de la femme de ses enfants,
14. et celui-lĂ fuit les griffes de la femme de son maĂźtre
15. Pour avoir dit au pĂšre âReconnais doncâ,
16. lui aussi Ă©couta âReconnais doncâ [âŠ]
19. pour avoir dit âelle a eu raisonâ, il eut lui aussi raison.
20. En Ă©change de ce quâil nâeut pas honte de reconnaĂźtre, ses frĂšres le reconnaĂźtraient ».
Ce fut en ce temps oĂč « lâhomme Juda initia une mitzva et ne la termina pas » lorsquâil convainquit ses frĂšres de vendre Joseph. La « gloire de Jacob diminua » avant mĂȘme la descente de Joseph en Ăgypte[402], et lâ« homme qui avait vendu Porat aux Midianites, tomba dans les mains des frĂšres » pour ĂȘtre jugĂ©. Juda qui avait trahi par des marchands (kinÊżanim), descendit et convola avec des CananĂ©ens (knaÊżanim) car celui qui avait Ă©tĂ© jusque-lĂ le chef, voyant ce quâil avait causĂ© lorsque son pĂšre clama « ma voie a Ă©tĂ© dissimulĂ©e », craignit son courroux. « Le lion leva alors les jambes », et « sâĂ©loigna, et dĂ©via jusquâĂ Hira ». La descente du vendu deviendrait son ascension jusquâau trĂŽne, tandis que le vendeur qui avait Ă©tĂ© roi choirait de sa grandeur parmi ses frĂšres. Il Ă©pousa une femme vaillante, et fut fait maĂźtre du tribunal.
« Sa vigne donna trois pampres, deux dâentre eux furent faits scories, pĂ©cheurs et reculant, dĂ©bauchĂ©s dans tous leurs actes. » Il revendiqua pour Er son aĂźnĂ© une Ă©pouse, « Tamar, ma sĆur-fiancĂ©e » mais « Yah vit sa mĂ©chancetĂ© destructrice, et pour sa mĂ©chancetĂ© lâannihila ». Juda attendit alors dâOnan de rĂ©aliser ses obligations en tant que frĂšre du mort sans enfants, et celui-ci « fut forcĂ© de venir et sâunir Ă elle » mais il ne voulait pas lâensemencer ni la prendre en pitiĂ©, et il corrompit sa semence pour ne pas lâengrosser. Voyant dâen-haut quâil corrompait comme les « effacĂ©s » (la gĂ©nĂ©ration du DĂ©luge), Dieu en conclut Ă sa mĂ©chancetĂ© et « comme la mort de son frĂšre il le fit mourir lui aussi ». Juda, « lâhomme de certitudes », parla Ă sa bru des [fragment manquant] de vĂ©ritĂ©: aprĂšs avoir vu que « la faute a causĂ© la perte de deux portions », il lui demande de retourner sâasseoir en veuve car ayant compris que câest un signe, le lion veut prĂ©server son troisiĂšme fils « jusquâĂ ce quâil grandisse car câest un enfant, car il disait âafin quâil ne meure pas lui aussiâ ».
Dans la cinquiĂšme qedoushta qui prĂ©sente les faits du seul point de vue de Juda, ce quâil arriva ensuite dĂ©coulait de sa descente consĂ©cutive Ă la vente de Joseph car il « trĂ©buch[erait] dans les rets de la femme de ses enfants » tandis que Joseph fuirait la femme de son maĂźtre, et celui qui avait dit âReconnais doncâ Ă son pĂšre, sâentendrait lui-mĂȘme dire âReconnais doncâ. Cependant, la sixiĂšme qedoushta affirme que « la sainte Tamar sanctifia le nom car elle se languissait de la semence de saintetĂ©. Elle tricha et fit la qeidesha, et Lui fit rĂ©ussir sa sainte voie. Elle conserva son veuvage devant YY [fragment manquant] YY ne la renvoya pas vide, elle dĂ©sirait faire souche dans le peuple de YY car ils sont la semence quâa bĂ©nie YY ». Quant Ă Juda, la main de Dieu est « ouverte Ă tout pĂ©nitent, et Il agrĂ©a son repentir lorsquâil Ă©tait assis en jugement » : parce quâil avait dit « âelle a eu raisonâ, juste il fut lui aussi, et en Ă©change de nâavoir pas eu peur de reconnaĂźtre » ses fautes, ses frĂšres le reconnaĂźtraient.
Alors, ses frĂšres furent appelĂ©s « juifs » de son nom, il fut plus puissant quâeux, câest par lui que le nom divin se rĂ©pandit, et Dieu dit de Juda quâil Ă©tait son sceptre (cf. Ps 60:9) et quâelle (sic) Ă©tait son sanctuaire (cf. Ps 114:2), de ses princes quâils Ă©taient ses frondeurs (cf. Ps 68:28). YannaĂŻ poursuit par une supplique Ă celui qui a confĂ©rĂ© la royautĂ© Ă Juda, de dĂ©faire ses ennemis, dâenterrer ses pĂ©chĂ©s, et « que tous soient bĂ©nis par Juda comme Tamar qui a enfantĂ© de Juda », quâil fasse revenir lâengeance dans les villes de Juda, et restaure la royautĂ© de Juda car câest Ă un lion que fut comparĂ© Juda. La huitiĂšme qedoushta, dont il ne reste que des fragments, suit apparemment la mĂȘme voie mais en jouant sur le nom de Juda et la racine h-d-h[403].
RĂ©digĂ©e dans un hĂ©breu qui nâest plus celui de la Bible ou de la Mishna, la poĂ©sie de YannaĂŻ dĂ©montre une profonde connaissance de ces derniĂšres, ainsi quâune maĂźtrise consommĂ©e du Targoum et du Midrash. Cependant, si le poĂšte reconnaĂźt la stature de Juda dĂšs le dĂ©but de lâhistoire, il refuse de verser dans le panĂ©gyrisme des docteurs qui avaient tentĂ© de minimiser sa part dans la vente de Joseph : plutĂŽt que « commencer une prescription sans la terminer, » Juda revint sur son propos et ne sauva les sangs (damim) de Joseph que pour en tirer des Ă©moluments (Ă©galement damim), et la « gloire de Jacob sâamoindrit » (dâaprĂšs Is 17:4 ; YannaĂŻ invective Ă la fois Juda en tant que lui-mĂȘme, et en tant que reprĂ©sentant de tous les fils dâIsraĂ«l, qui traĂźneront des gĂ©nĂ©rations durant le poids de la vente de Joseph). Ce nâest pas non plus Ă la demande des frĂšres dâĂȘtre instruits de leurs moyens subsistances quâil sâen alla mais bien aprĂšs avoir Ă©tĂ© jugĂ© par eux ou pour fuir le courroux de son pĂšre et YannaĂŻ, suivant le Targoum, ajoute quâil « sâĂ©loigna et dĂ©via (wayet wayest) jusquâĂ Hira ». En outre, comme des sages avaient fait du CananĂ©en un marchand, YannaĂŻ construit sa strophe sur les paronymes kinÊżanim et knaÊżanim, en prenant soin de les employer dans leur sens propre afin de mieux les dissocier. Son Ă©pouse peut bien ĂȘtre une « femme vaillante » (qui donne sa ceinture au CananĂ©en/marchand selon Prov 31:24) puisque les mĂȘmes rabbins avaient dit que son pĂšre faisait le lustre du lieu, elle nâen est pas moins une vigne, ostensiblement parce quâ« Ă cette vigne Ă©taient trois pampres » (Gn 40:10) mais aussi parce que « tu as oubliĂ© ton Dieu, ton sauveur ⊠câest pourquoi tu cultives des vignes Ă©trangĂšres » (Is 17:10), alors que Tamar est, selon lâĂ©pithĂšte de Cant 4:12 & 7:8, « ma sĆur-fiancĂ©e » afin de mieux souligner sa parentĂ© avec Juda et son innocence[404] - [Note 36]. Les deux premiers fils de Juda sont, comme dans le Midrash, des dĂ©bauchĂ©s sexuels qui reproduisent les dĂ©pravations de la gĂ©nĂ©ration du DĂ©luge, et sont supprimĂ©s Ă ce titre ; Onan est de plus insensible Ă la dĂ©tresse de sa belle-sĆur quâil refuse dâengrosser (le poĂšte joue sur la paronymie inhĂ©rente Ă la racine r-áž„-m). Alors Juda, « homme de certitudes » car les rabbins affirment en GnR 93:8 quâil ne prenait jamais la parole avant dâĂȘtre sĂ»r de son fait, prend acte de la faute de ses fils et prie sa bru dâattendre que son fils grandisse pour Ă©viter quâil ne faute lui aussi (le vers est incomplet, et ne permet pas de savoir si Juda comptait honorer sa parole). Languissant de la « semence de saintetĂ©, » câest-Ă -dire « le peuple de YY », Tamar se travestit et parvint Ă son but avec lâaide de Dieu (« Dieu ne la renvoya pas vide » fait rĂ©fĂ©rence Ă la supplique formulĂ©e selon GnR 85:7 par Tamar en ce sens) tandis que Juda, qui poursuivrait sa descente jusquâĂ ce quâil sâentende dire les mots quâil avait lui-mĂȘme profĂ©rĂ©s, trĂ©buchait dans les rets de la femme de ses enfants. Câest cependant Ă ce moment quâil retrouva Dieu, et pour avoir reconnu quâelle Ă©tait juste, il fut lui aussi reconnu juste, de sorte quâil retrouva son emprise sur ses frĂšres par lâintermĂ©diaire de Tamar (le dernier vers de la cinquiĂšme qedoushta, « temour lo vosh lehodot etc. » est un jeu de mots sur le nom de Tamar), et devint ce patriarche vĂ©nĂ©rĂ© par la tradition juive, sur le mĂ©rite personnel duquel YannaĂŻ implore Dieu de restaurer sur leur terre les enfants IsraĂ«l, qui sont dâailleurs devenus sous son calame la terre et les enfants de Juda[403].
Tamar dans les hoshaÊżanot
ElĂ©azar Hakalir nâa pas consacrĂ© de poĂšme Ă lâhistoire de Juda et Tamar mais il pourrait y avoir glissĂ© une allusion dans la hoshaÊżana ÊŸOm ÊŸani âhoma.
Juda et Tamar dans le cycle des shabtaot
La shabtaÊŸa vayered Yehouda Ă©tait insĂ©rĂ©e lors des mĂȘmes sabbats dans lâun des offices de priĂšre Ă sept bĂ©nĂ©dictions oĂč lâon ne rĂ©citait pas de qedousha. Rien nâindique quâelle Ă©tait la seule mais elle seule a Ă©tĂ© conservĂ©e qui traite spĂ©cifiquement de lâhistoire de Juda et Tamar. Elle a Ă©tĂ© composĂ©e aprĂšs YannaĂŻ par un poĂšte qui vivait comme lui dans lâantique terre dâIsraĂ«l passĂ©e sous domination byzantine. Son style est plus alambiquĂ©, et ses allusions moins transparentes.
Les sept strophes du piyyout commencent par le mĂȘme incipit que la section de lecture, « il descendit » et se conforment aux contraintes des bĂ©nĂ©dictions quâelles embellissent : dans la premiĂšre strophe, un homme fort dâentre ses frĂšres (cf. I Chr 5:2), se sĂ©para de ses frĂšres lorsque fut vendu en esclave lâaimĂ© par les frĂšres, dĂ©chu et ternissant lâhonneur de tous les frĂšres mais câest une manĆuvre de celui qui protĂšge les amis et les frĂšres (cf. Ps 122:8), « b<Ă©ni es-tu Seigneur qui protĂšge les pĂšres> ».
Dans la seconde, il descendit en ce temps, celui qui attristait son pĂšre de morfonte et dâabaissement, mais celui qui trace les cours [des intrigues] lâempĂȘcha de vaciller car son dessein se rĂ©aliserait et sâaccomplirait, lui qui multiplie pour ceux qui sâabritent en lui les rosĂ©es de vivacitĂ©, « b<Ă©ni es-tu Seigneur qui fais tomber la rosĂ©e> ».
Dans la troisiĂšme, le lionceau descendit et vaqua jusquâAdoullam, alors le monde erra car lâhonneur de la stĂšle Ă©ternelle fut foulĂ© et menĂ© jusquâAdoullam (cf. Mic 1:15) mais la grĂące du Saint dure dâĂ©ternitĂ© en Ă©ternitĂ© (cf. Ps 103:17), « b<Ă©ni es-tu Seigneur le dieu saint> ».
Dans la quatriĂšme, il descendit, celui qui sâaccola Ă Bat Choua et le pauvre ne fut pas reconnu devant le riche (i.e. le « riche » Juda sâabaissa tant, en se mariant avec une CananĂ©enne, quâil devint indiscernable du « pauvre », cf. Job 34:19), « b<Ă©ni es-tu Seigneur le dieu saint> », il conçut un trio de plaisir mais deux moururent pour leur mal et leur mĂ©chancetĂ©, et le rescapĂ© qui survĂ©cut de Juda, connut le repos et la sauvegarde (cf. 2 Rois 19:30=IsaĂŻe 37:31), « b<Ă©ni es-tu Seigneur qui sanctifie le sabbat> ».
Dans la cinquiĂšme, il descendit, celui qui dit âReconnais doncâ, pour ĂȘtre mesurĂ© Ă la mesure de âReconnais doncâ. Dans le jugement, il ne fit pas de faveur Ă la veuve (quâil condamna au feu). Juda, comme son nom, reconnut la vĂ©ritĂ© et son tĂ©moignage de vĂ©ritĂ© (cf. Ps 19:8) fut agrĂ©Ă© (par Dieu qui dĂ©voila sa prĂ©sence au tribunal de Sem), « b<Ă©ni es-tu Seigneur qui fait revenir sa prĂ©sence Ă Sion> ».
Dans lâavant-derniĂšre strophe, il descendit, le juste qui sâabaissa car il fut sĂ©parĂ© de ce qui faisait sa grandeur mais lorsquâil siĂ©gea en jugement et sâabstint de pĂ©cher, il fut glorifiĂ© et magnifiĂ© de tous, « b<Ă©ni es-tu Seigneur dont le nom est bon et quâil est agrĂ©able de reconnaĂźtre> ».
Dans la derniĂšre, il descendit, celui qui semait la justice dans le jugement, assis sur le chemin et sur le jugement (dâaprĂšs Juges 5:10), qui ne faisait pas rougir le visage lors du jugement, et dont nâarrĂȘterait pas, jusquâĂ la venue du jugement [dernier], le sceptre entre ses jambes de paix, justice et Ă©quitĂ©, « b<Ă©ni es-tu Seigneur qui bĂ©nit son peuple par la paix> »[405].
Dans la premiĂšre strophe, lâauteur met lâaccent sur la sĂ©paration de Juda avec ses frĂšres, la mettant sur le compte de la vente de Joseph et la prĂ©sentant comme un Ă©vĂšnement nĂ©gatif. Il revient sur ce motif dans la seconde, signalant cette fois que Dieu veille Ă prĂ©server Juda de lâĂ©garement, la troisiĂšme insiste sur lâendroit oĂč il sâĂ©tablit[406].
Entre patristique et scolastique : exégÚse chrétienne en Occident
Passeur des enseignements patristiques, lâĂ©rudit anglo-saxon BĂšde poursuit leur Ćuvre et dĂ©veloppe la Bible selon les quatre sens de lâĂ©criture mais il nâa pu achever son commentaire sur le Livre de la GenĂšse au-delĂ du 21e chapitre, et tout ce qui est transmis en son nom au-delĂ , y compris le commentaire sur Gn 38, est lâĆuvre dâun commentateur ultĂ©rieur anonyme. Il se base pour lâensemble du rĂ©cit sur le 29e chapitre des QuĂŠstiones in Vetus Testamentum dâIsidore de SĂ©ville, lequel reprend Ă peu de chose prĂšs le Contra Faustum 22:84-86 dâAugustin dâHippone, et sur les HebraicĂŠ QuĂŠstiones de JĂ©rĂŽme pour les explications terminologiques mais interprĂšte erronĂ©ment SĂ©la comme divisio (« division ») au lieu de dimissio (« abandon »), et provoque ainsi une confusion avec PharĂšs[407].
Les enseignements de BĂšde parviennent Ă la cour de Charlemagne par lâentremise dâAlcuin et jouent un rĂŽle capital dans la renaissance carolingienne. Outre sa prĂ©paration de lâune des premiĂšres « corrections » de la Vulgate (c. 801), Alcuin produit son propre commentaire biblique, la section sur Gn 38 se prĂ©sentant sous forme dâ« Interrogations » (257-260), lesquelles sont essentiellement un condensĂ© des Hebraicae quaestiones in libro Geneseos de JĂ©rĂŽme et Quaestiones in Heptateuchum dâAugustin. RĂ©alisĂ© Ă la demande de lâempereur, le Quaestionum super Genesis ex dictis patrum dialogus est une autre anthologie compilĂ©e par Wigbald. Gn 38 y est abordĂ© en rĂ©ponse Ă la « Question » sur le retard dâEsaĂŒ ; lĂ aussi, lâauteur cite extensivement JĂ©rĂŽme et Isidore de SĂ©ville qui sâest lui-mĂȘme inspirĂ© dâAugustin.
Autres midrashim médiévaux
La marche des siĂšcles et les bouleversements quâelle entraĂźne, nâont pas interrompu lâactivitĂ© midrashique qui migre progressivement au cours de cette pĂ©riode de la Palestine Ă lâItalie byzantines. TĂ©moins de leur temps, les midrashim de cette Ă©poque ajoutent moins aux enseignements prĂ©cĂ©dents quâils ne les remanient en rĂ©action aux tentatives de rĂ©cupĂ©ration par le christianisme et lâislam.
Aux midrashim classiques sur les Livres de la GenĂšse et du LĂ©vitique sâajoutent des compositions sur les autres livres du Pentateuque qui formeront avec eux le Midrash Rabba ou des recueils indĂ©pendants comme lâAggadat Bereshit: Gn 38 y apparaĂźt occasionnellement Ă titre de tĂ©moin, comme lorsque les rabbins sâentretiennent sur la plaie des grenouilles, et dĂ©duisent du rĂ©cit parallĂšle en Ps 78:45 que les batraciens ont stĂ©rilisĂ© les Ăgyptiens puisquâ« il lança [âŠ] des grenouilles pour les ruiner (vatashâhitem) » de mĂȘme quâOnan ruinait (veshaâhat) sa semence en Gn 38:9, afin de se rendre inapte Ă procrĂ©er[393].
Cependant, ce sont plus souvent les traditions des anciens sur Gn 38, que les rabbins byzantins reprennent pour les adapter Ă leur temps: on enseignait dans lâune des versions du Tanhouma que Juda avait perdu femme et enfants pour avoir frit les entrailles de son pĂšre en le trompant sur le destin de Joseph, lâAggadat Bereshit prĂ©cise que câĂ©tait le cas Ă lâĂ©poque mais non Ă lâavenir, oĂč « le fils ne portera pas la faute du pĂšre, et le pĂšre ne portera pas la faute du fils » (Ăz 18:20)[408] ; de mĂȘme, le Midrash antique avait masquĂ© lâobjurgation de MichĂ©e 1:15 pour la descente de Juda jusquâĂ Adoullam en faisant ressortir le parfum messianique de lâhistoire, lâAggadat Bereshit Ă©tablit au contraire le parallĂšle entre la descente de Juda et celle des JudĂ©ens lorsquâils furent dĂ©portĂ©s en Babylonie â il leur restait un quelque chose dâhonneur jusquâĂ Adoullam, et ils en furent dĂ©possĂ©dĂ©s, qui pour sâĂȘtre alliĂ© Ă moindre que lui, qui pour avoir Ă©tĂ© dĂ©possĂ©dĂ©s de leurs habits ; il est cependant dit (OsĂ©e 12:1): « Juda demeure soumis Ă Dieu » â compris « Juda descend encore avec Dieu » â car mĂȘme dans sa dĂ©chĂ©ance, le peuple de Juda appelle Dieu et Dieu choisit par consĂ©quent de demeurer avec lui, dans sa descente comme dans sa montĂ©e. Le midrash affirme en outre que Dieu avait de toute Ă©ternitĂ© promulguĂ© que le messie descendrait de Juda, et son mariage Ă Bat Choua a provoquĂ© les Ă©vĂšnements qui ont suivi jusquâĂ la rencontre de Juda avec Tamar, prĂȘtresse et fille de Sem, afin de ramener lâhistoire dans les voies que Dieu avait tracĂ©es[409]. Juda nâen aura pas moins Ă rendre compte de ses actes devant les juges ; lĂ aussi, on avait enseignĂ© dans GenĂšse Rabba et diverses versions du Midrash Tanhouma que Jacob et Isaac siĂ©geaient au tribunal, Exode Rabba y ajoute cette fois les frĂšres de Juda, et annonce quâils tentent dâinnocenter leur frĂšre avec la mĂȘme fougue que lui sâaccuse publiquement mais il repousse cependant leurs plaidoiries avec dâautant plus dâĂ©nergie que la probitĂ© dans le jugement lui importe plus que sa fiertĂ© voire sa vie ; or, câest cet amour des jugements Ă©quitables, prescrits par la Bible lorsquâon juge la veuve et lâorphelin, qui a valu la royautĂ© Ă Juda (et non sa vaillance car ses frĂšres nâĂ©taient pas moins vaillants que lui), ainsi que le mĂ©rite dâengendrer la lignĂ©e du messie[410]. Dâautres rabbins adaptent un vieux motif Ă leur lecture de « Juda est mon sceptre » (Ps 60:9): comme Guilad, ManassĂ© et EphraĂŻm, câest-Ă -dire Ălie, GĂ©dĂ©on et JosuĂ©, tout ce quâa fait Juda y compris la prostitution avec sa bru dont il sâaccuse, a Ă©tĂ© fait pour Dieu et selon son plan puisque « Juda reconnut et dit: âelle a Ă©tĂ© juste, câest de moiâ », âcâest de moi quâest sortie lâaffaireâ[411]. Enfin, lâAggadat Bereshit enseigne, en Ă©laborant sur Gn 38:18, quâil reçut en salaire de son aveu trois couronnes Ă©quivalant aux trois gages quâil avait laissĂ©s â âton sceauâ, câest Zorobabel ainsi quâil est dit (Ag 2:23): « En ce jour, dit YHWH-Cebaot, je te prendrai, ĂŽ Zorobabel ⊠et je te considĂ©rerai comme un sceau ⊠», âton cordonâ, câest le temple ainsi quâil est dit (Ăz 40:3): « ⊠avec un cordeau de lin dans la main et une canne Ă mesurer ⊠», et âton bĂątonâ, câest le messie issu des fils de ses fils ainsi quâil est dit (Ps 110:2): « Le bĂąton de ta puissance, YHWH lâĂ©tendra de Sion ⊠»[412]. Un auteur contemporain applique cependant Ps 101:5 (« des yeux hautains et un cĆur enflĂ© dâorgueil, je ne puis les supporter ») Ă Juda pour expliquer quâil a dĂ©mĂ©ritĂ© le sacerdoce du dieu dâIsraĂ«l lorsquâil a posĂ© les yeux sur sa bru et lâa considĂ©rĂ©e comme une prostituĂ©e[413], partageant le point de vue dâun autre midrash qui cite Gn 38:26 comme le premier des sept endroits oĂč la prĂ©sence divine sâest manifestĂ©e sur IsraĂ«l, mais inverse les rĂŽles car câest lâesprit de saintetĂ© qui dit « Elle est juste » tandis que Juda reconnaĂźt que « câest de moi » â câest que Tamar est absolument et non pas relativement juste, dâautant plus que Dieu sâest manifestĂ© soi-mĂȘme pour le proclamer[414]. Quoi quâil en soit, nul ne conteste que Juda mĂ©rita en ce jour que trois de ses descendants soient sauvĂ©s car, comme lâavait dĂ©jĂ dit GenĂšse Rabba, Juda a surmontĂ© la « proie de Tamar » puisque celle-ci et ses deux fils Ă©taient sur le point dâĂȘtre mis en piĂšces[415]. Les jumeaux sont en effet des justes, ainsi que lâavaient dĂ©duit GenĂšse Rabba de lâĂ©criture pleine de jumeaux, et un article dâEsther Rabba enseigne que câest par leur mĂ©rite que le massacre des Juifs planifiĂ© par Haman nâaura pas pu avoir lieu au mois de sivan car il est placĂ© sous le signe des GĂ©meaux[416]. Le midrash prĂ©cise tout de mĂȘme que lorsque Zerah voulut sortir le premier, Dieu soi-mĂȘme dĂ©cida que Peretz sortirait le premier, puisque le messie sortirait de lui[417].
GenĂšse 38 dans la Massore
Câest Ă TibĂ©riade, aux alentours de 920, quâest produit et rĂ©visĂ© le codex dâAlep, considĂ©rĂ© comme le joyau du scriptorium des Ben Asher, lesquels font figure dâautoritĂ© suprĂȘme en matiĂšre de massore. Dans le texte fixĂ© par ce codex, « ce fut en ce temps » est sĂ©parĂ© des versets prĂ©cĂ©dents par une section de lecture dite ouverte car elle sâaccompagne dâun retour Ă la ligne et marque le dĂ©but dâun nouveau sujet ; « il lâappela Zeraâh » est sĂ©parĂ© dâ« Or Joseph fut descendu » par un blanc Ă©quivalent Ă quelques lettres, soit une section fermĂ©e.
La massore Ă©tablit ensuite la forme correcte de chaque terme, câest-Ă -dire avec ou sans matres lectionis, ainsi que le nombre de leurs occurrences Ă travers la Miqra â une note massorĂ©tique fait remarquer Ă lâoccasion de Gn 38:3 que la forme « il appela â son nom » apparaĂźt en dix endroits de la Bible, Ă©numĂ©rĂ©s dans les notes sur Gn 35:10, et que « trois induisent en erreur », câest-Ă -dire que la lecture « elle appela », apparemment plus logique en Gn 38:3 ainsi quâen Ex 2:22 & 1 Chr 7:23, est fausse. La prononciation, qui suit les inflexions du systĂšme tibĂ©rien, ne marque plus la diffĂ©rence entre le áž„et uvulaire (/Ï/) et le ħet pharyngal (/ħ/), dont le son se situe entre le 'Hira hĂ©breu, lâIras grec et le Hiram latin. Elle est notĂ©e au moyen de diacritiques et marques de vocalisation qui permettent aux massorĂštes dâeffectuer des choix interprĂ©tatifs discrets mais dĂ©cisifs car le texte consonantique de Gn 38:14, whwÊŸ lÊŸ ntnh lw lÊŸĆĄh, est vocalisĂ© vĂšhi loÖŸnitna lo lĂšisha (« et elle ne lui avait Ă©tĂ© donnĂ©e pour femme ») alors que la Septante avait lu vĂšhou lo natna lo lĂšisha (« et il ne la lui avait pas donnĂ©e pour femme »)[418], et câest sur lâautoritĂ© de la massore que sâappuient les commentateurs ultĂ©rieurs pour expliquer quâeinayim nâest pas un nom de lieu, puisque le bet de baÊżeinayim (Gn 38:21) est ponctuĂ© par un qamaáș et non un schwa comme il siĂ©rait aux toponymes [419]. Elle ajoute enfin les marques de cantillation qui renseignent le lecteur sur la prosodie du texte, ses accents toniques et ses temps forts[TableM 1].
GenĂšse 38 dans le Tafsir
Les diffĂ©rentes interprĂ©tations du Tafsir sur Gn 38 rĂ©pondent gĂ©nĂ©ralement au besoin de clarification qui qualifie lâĆuvre dans son ensemble, et transposent le plus souvent les leçons du Targoum Ă lâarabe, jusques et y compris dans son rendu de Gn 38:3 qui va Ă lâencontre de la leçon massorĂ©tique. Saadia Gaon innove cependant dans son traitement de termes difficiles comme yabem quâil dĂ©cide de lire yaben, « fais-lui des fils », et des diffĂ©rents vocables de prostitution quâil rend par le mĂȘme almoumtaâa. Il choisit aussi de lire diffĂ©remment Gn 38:23, et fait dire Ă Juda quâil faut continuer Ă chercher la femme afin de nâĂȘtre pas la risĂ©e du voisinage[421] - [TableM 2].
Le Tafsir veut donc replacer chaque terme dans son contexte, et faire piĂšce aux railleries des auteurs musulmans mais lâapologĂ©tique va au-delĂ de la dĂ©fense du texte: lâalmoumtaâa, assimilable Ă la zona hĂ©braĂŻque, nâest cependant pas une zaniya ou fajira comme Saadia le traduit ailleurs mais « une femme qui contracte un nikaâh al-moutâa » (litt. mariage de plaisir), câest-Ă -dire un mariage temporaire sanctionnĂ© par la jurisprudence chiite ; cette institution nâest pas inconnue du Talmud de Babylone qui exige cependant une lettre de rĂ©pudiation pour acter la fin de cette union, et pourrait provenir comme son homologue chiite dâune coutume persane[420]. Le chiisme entend Ă©tablir par ce moyen un cadre plus respectable pour la prostitution que proscrit le Coran, bien que la distinction soit essentiellement sĂ©mantique[422], tandis que le sunnisme le condamne, Ă tout le moins sur le plan thĂ©orique â Juda et Tamar sont donc prĂ©servĂ©s, Ă ce point du rĂ©cit biblique, dâune fĂącheuse accusation dâimmoralitĂ© mais le gaon expliquera dans son commentaire sur le septiĂšme commandement du DĂ©calogue, oĂč Tamar est explicitement citĂ©e en exemple, que ce mariage temporaire constitue la premiĂšre des sept catĂ©gories dâadultĂšre, et quâil est Ă ce titre proscrit aux enfants dâIsraĂ«l aprĂšs le don de la Torah sur le mont SinaĂŻ (Saadia Gaon compte, outre ces sept degrĂ©s, le coĂŻtus interruptus qui est interdit en soi, et passible de mort ainsi quâon lâapprend du destin dâOnan)[420]. De mĂȘme, la pire atteinte Ă sa rĂ©putation que peut craindre un Juif dont la moralitĂ© ne peut ĂȘtre mise en doute, est lâaccusation de cautĂšle, et lâattitude de Juda montre au contraire toute sa probitĂ©[421].
GenĂšse 38 dans lâĂąge dâor du qaraĂŻsme
Les commentateurs de « lâĂąge dâor du qaraĂŻsme » (entre les ixe et xie siĂšcles) sont contemporains de Saadia Gaon, comme Daniel al-Qoumissi et Jacob al-Qirqissani ou postĂ©rieurs comme Joseph ben Noah dit le Grammairien qui compose un Tafsir pour concurrencer celui de Saadia Gaon, et Yefet ben Ali Halevi qui produit une traduction dans le mĂȘme but.
Selon le Talkhis (« AbrĂ©gĂ© ») dâAaron de JĂ©rusalem qui condense le Tafsir du Grammairien, le positionnement de Gn 38 sâexplique par la briĂšvetĂ© de lâhistoire de Juda alors que celle de Joseph est plus longue[423]. Yefet ben Ali explique que lâhomme dont Juda prend la fille, est dit cananĂ©en non car il descendrait des tribus de Canaan mais parce quâil habite la terre quâils peuplent ; « cananĂ©en » ne peut en effet pas signifier « marchand » en raison de 1 Chr 2:3 mais sâil Ă©tait vĂ©ritablement issu de Canaan, Juda aurait pĂ©chĂ© comme EsaĂŒ, et serait indigne de rĂ©gir ses frĂšres. Les mots « afin quâil ne meure pas comme ses frĂšres » dĂ©montrent quâil nâa pas lâintention de tenir sa promesse mais il ne veut pas le dire franchement Ă sa bru car il craint quâelle nâĂ©pouse un autre homme, alors quâil a lâintention de le faire lui-mĂȘme aprĂšs la mort de son Ă©pouse. Cependant, Tamar voit ChelĂą grandir sans quâelle ne lui soit donnĂ©e et elle dĂ©cide de duper son beau-pĂšre comme lui-mĂȘme lâa flouĂ©e. Cette opinion est propre Ă lâinterprĂšte: lâun de ces devanciers, Jacob al-Qirqissani, fait dire Ă Juda quâil sait que Tamar joue des tours aux hommes, et quâil a voulu prĂ©server son troisiĂšme fils de ce sort ; quant Ă Yeshoua ben Yehouda, considĂ©rĂ© comme lâun des plus Ă©minents QaraĂŻtes un siĂšcle aprĂšs Yefet ben Ali, il affirme que Juda a tout simplement Ă©tĂ© distrait par ses nombreuses occupations.
AprĂšs avoir affirmĂ© plutĂŽt que Juda ne vient pas Ă Tamar comme il se ferait avec une prostituĂ©e, Jacob al-Qirqissani et Yefet ben Ali Halevi expliquent quâil y avait Ă lâĂ©poque deux façons de prendre une femme, la premiĂšre permanente et la seconde pour une pĂ©riode fixĂ©e dâavance mais cette union a Ă©tĂ© dĂ©finitivement interdite avec la promulgation de Dt 23:18. Cependant, si Gn 38:16 prĂ©cise que Juda ignorĂąt se tenir devant sa bru, câest que ce genre dâunion Ă©tait dĂ©jĂ interdit avant le don de la Torah â Tamar a peut-ĂȘtre fautĂ© par ignorance de cette prohibition, et Juda parce quâil ne lâa pas reconnue, soit parce quâil ne lâavait pas connue lorsquâelle Ă©tait lâĂ©pouse de son fils, soit parce quâelle avait couvert son visage lors de leur rencontre. Jacob al-Qirqissani va plus loin dans la condamnation de Tamar: il est possible que Juda, ignorant tout des pĂ©chĂ©s de ses fils, lâait mal jugĂ©e mais il nâest pas moins possible quâil ait eu raison, et que Tamar dont le subterfuge prouverait la malignitĂ©, soit responsable de la mort de ses premiers maris en les dĂ©voyant ou en les y aidant, « bien que le Texte ne le formule pas explicitement ». Concluant le rĂ©cit, Yefet ben Ali enseigne quâil ne la connut plus car elle lui Ă©tait interdite, sans quoi il nâaurait pu choisir de ne pas dormir avec elle car elle Ă©tait devenue la mĂšre de ses enfants, et le serait jusquâĂ la mort[424].
Par-delĂ leurs interprĂ©tations propres et indĂ©pendantes les unes des autres, les exĂ©gĂštes qaraĂŻtes partagent entre eux et avec leurs opposants rabbanites une mĂȘme vĂ©nĂ©ration Ă lâĂ©gard de Juda, au-delĂ de leur attachement professĂ© Ă la lettre. Les commentaires de Jacob al-Qirqissani et Yefet Halevi sur Gn 38 comprennent par consĂ©quent un florilĂšge dâinterprĂ©tations non-littĂ©rales issues du Midrash ou de lâarsenal syriaque â qui leur est connu directement par leur pratique de lâaramĂ©en ou indirectement par lâintermĂ©diaire de David al-Mukkamis, un auteur juif du siĂšcle prĂ©cĂ©dent qui sâest fait disciple de Nonnos de Nisibe â voire du Tafsir de Saadia Gaon malgrĂ© toute leur abhorration pour lâadversaire honni des QaraĂŻtes[425]. Transposant en milieu juif les mĂ©thodes du Kalam arabo-musulman, les auteurs qaraĂŻtes font de ces interprĂ©tations un usage libre et inconsĂ©quent, particuliĂšrement lorsque Jacob al-Qirqissani reprend les traditions syriaques car la critique de Tamar, si importante pour ses sources, nâa dâautre finalitĂ© que lâapologie de Juda[426].
Les successeurs de Saadia Gaon
LâĆuvre de Saadia Gaon connaĂźt un retentissement considĂ©rable et provoque un foisonnement intellectuel Ă travers le monde musulman. La plupart de ces Ă©crits ne survivent cependant au-delĂ de leur Ă©poque que par les citations dâauteurs ultĂ©rieurs â tel est le cas de Samuel ben Hophni ou de Hananel ben Houshiel. Adonim Halevi, un disciple marocain de Saadia Gaon sâĂ©tablit par ailleurs Ă la cour du vizir officieux du calife de Cordoue, et a tĂŽt fait de railler le dictionnaire du secrĂ©taire de celui-ci, Menahem ben Sarouq, citant parmi ses nombreux dĂ©fauts sa dĂ©finition unidimensionnelle de la racine Êż-l-f dâaprĂšs son sens en Gn 38:14 (lâ« enveloppement ») sans prendre en compte lâ« Ă©vanouissement, » Ă©vident en IsaĂŻe 51:20[427].
ExĂ©gĂšses du Moyen Ăge central
Le Moyen Ăge central sâaccompagne dâun renouveau intellectuel et se marque par une volontĂ© dâĂ©lucidation des textes anciens : hormis GenĂšse Rabbati qui entend encore rectifier les messages chrĂ©tiens du Testament de Juda, le midrash du rabbin romaniote Touvia ben Eliezer entend retrouver le sens simple des versets bibliques de mĂȘme que le commentaire du rabbin champenois Salomon ben Isaac dit Rachi qui explique aussi le Talmud de Babylone tandis quâun lettrĂ© grec ou italien erronĂ©ment pris pour Rachi, en fait de mĂȘme avec le Midrash Rabba. LâĂ©cole française qui poursuit lâĆuvre de Rachi et se marque par un littĂ©ralisme de plus en plus strict, est contemporaine des savants de lâabbaye Saint-Victor tandis que lâĆuvre de Rachi se propage au-delĂ des PyrĂ©nĂ©es, non sans rencontrer une certaine rĂ©sistance de la part des lettrĂ©s juifs andalous, hĂ©ritiers dâune tradition philologique autrement solide[428].
Pourquoi ce récit figure-t-il ici ?
Rachi interroge dâemblĂ©e le positionnement de cette histoire qui occasionne une cĂ©sure dans lâhistoire de Joseph, et explique quâil a pour fonction dâenseigner que les fils de Jacob dĂ©churent leur frĂšre de sa grandeur aprĂšs avoir vu le chagrin de leur pĂšre Ă la suite de la vente de Joseph quâil aurait pu aisĂ©ment empĂȘcher â câest, ainsi que le rappellent les auteurs du Daat Zqenim, un midrash des « rabbins de mĂ©moire bĂ©nie » mais Rachi, qui ne mentionne pas explicitement la doctrine mesure pour mesure qui le sous-tend, le rattache, comme lâexplique le Hizqouni, Ă la descente « de ses frĂšres », comprise « par rapport Ă ses frĂšres ». Cependant, le rabbin espagnol Abraham ibn Ezra rĂ©fute cette interprĂ©tation et sa chronologie, fondĂ©es sur des calculs et identifications sanctionnĂ©s par le Midrash mais irrecevables pour un esprit rationnel car lâintervalle de vingt-deux ans est trop court pour que les petits-fils de Juda, Hetsron et Hamoul fils de Perets, puissent compter au nombre des IsraĂ©lites descendus en Ăgypte Ă lâinvitation de Joseph. Les rĂ©cits ont, selon lui, Ă©tĂ© juxtaposĂ©s pour comparer Joseph et Juda face aux avances de femmes quâil ne leur convient pas dâapprocher mais les alĂ©as de Juda ont prĂ©cĂ©dĂ© la vente de Joseph. LâinterprĂ©tation des sages dâIsraĂ«l sur la descente de Juda est quant Ă elle pure homĂ©lie sur ce qui nâest que le passage des montagnes aux plaines de Canaan. Un siĂšcle auparavant, lâauteur romaniote du Midrash Leqah Tov Ă©nonçait que le mariage de Juda avait eu lieu avant la vente de Joseph â son commentateur italien, le Sekhel Tov, prĂ©cise que Joseph Ă©tait Ă ce moment ĂągĂ© de quinze ans â mais que la mort de sa femme et de ses enfants en a Ă©tĂ© la consĂ©quence mesure pour mesure.
Passages talmudiques Ă lâappui, les auteurs du Daat Zqenim et le Hizqouni arguent contre Ibn Ezra quâon Ă©tait, Ă cette Ă©poque, capable de procrĂ©er Ă lâĂąge de sept ans. Le Hizqouni se range cependant Ă lâavis de son maĂźtre, Joseph Bekhor Shor qui postule, sans entrer dans ces considĂ©rations, que Juda a dĂ©cidĂ© de partir aprĂšs avoir vu son pĂšre inconsolable. Un autre rabbin formĂ© Ă cette Ă©cole, Eliezer bar Itzhaq, Ă©met la mĂȘme opinion mais en Ă©voquant une nouvelle fois la rĂšgle mesure pour mesure : si Juda dĂ©cide de descendre, câest quâil a entendu son pĂšre dire : « je descendrai vers mon fils, endeuillĂ© au sheol ». Le rabbin provençal David Kimhi, qui interprĂšte au demeurant la descente comme Ibn Ezra, indique simplement que le temps oĂč Juda descendit se produisit aprĂšs la vente de Joseph, sans autre explication et comme une Ă©vidence[429].
Du reste, Rachi ne suit pas entiĂšrement le Midrash : Juda « sâĂ©loigna » seulement de ses frĂšres (et non de sa voie). Sâil rejoint un Adullamite, câest pour en faire un associĂ© en affaires ainsi quâil appert en Gn 38:12. La femme quâil Ă©pouse est en revanche la fille dâun marchand, et son son petit-fils SamuĂ«l suit, malgrĂ© son littĂ©ralisme proclamĂ©, la mĂȘme ligne. Rachi ne glose pas sur le nom des trois enfants mais le nom du lieu oĂč naĂźt le troisiĂšme, Kezib, indique quâelle cessa dâenfanter « car sinon, que viendrait-il nous apprendre? »[430].
Il la repoussait avec un brin de paille
Er est mauvais aux yeux de Dieu car il agit comme Onan afin de ne pas gĂąter la beautĂ© de sa femme par une grossesse. Juda demande Ă ce dernier dâĂ©tablir une descendance Ă son frĂšre en lui donnant un enfant qui portera son nom mais Onan refuse, et corrompt sa semence en battant Ă lâintĂ©rieur pour vanner Ă lâextĂ©rieur. Rachi ne commente pas la mort des fils de Juda in loco mais indique dans son commentaire sur TB SanhĂ©drin 52b que dĂ©crĂ©tĂ©e par le ciel, elle est apparue comme naturelle car elle nâa pas laissĂ© de marque[431]. Juda renvoie alors Tamar chez son pĂšre en « la repoussa[n]t avec un brin de paille car il nâavait pas rĂ©ellement lâintention de la faire Ă©pouser par son fils, » craignant quâelle ne soit ce que le Talmud dĂ©finit comme une femme fatale car ses deux maris sont morts (les rabbins semblent toutefois avoir considĂ©rĂ© Tamar comme une exception plutĂŽt quâun exemple en la matiĂšre)[432]
Il la prit pour une prostituĂ©e â parce quâelle se trouvait au carrefour des routes
Rachi prĂ©cise ensuite que Juda monta « Ă Timna » vers les tondeurs de son troupeau, et que la localitĂ© se situait Ă flanc de montagne. Se couvrant le visage pour nâĂȘtre pas reconnue, Tamar parvient Ă lâ« Ouverture des yeux, » que Rachi comprend comme un point dâobservation aisĂ©e pour mieux apercevoir le carrefour, bien quâil signale aussi lâinterprĂ©tation des sages, « la porte de la tente dâAbraham, » car elle voyait que ChĂȘla avait grandi et, ne lui ayant pas Ă©tĂ© donnĂ© pour femme, sâabandonna Ă Juda car elle dĂ©sirait concevoir des fils de lui. Il la prit pour une prostituĂ©e car elle se tenait au carrefour des routes et elle avait voilĂ© son visage, ce qui empĂȘchait le patriarche dâidentifier sa belle-fille, bien quâil faille peut-ĂȘtre comprendre selon le Midrash quâĂ©tant toujours voilĂ©e dans la maison de son beau-pĂšre, Juda savait Tamar pudique et ne la soupçonnait pas. Il se « destorna (en laaz) du chemin sur lequel il se trouvait pour aller vers celui oĂč elle Ă©tait » et lui dit « prĂ©pare-toi donc[, je viendrai Ă toi etc.] » Ils sâaccordĂšrent sur lâaffaire et elle demanda un gage, câest-Ă -dire « une garantie » en attendant quâelle soit conclue.
Lâanneau avec lequel tu scelles et la veste avec laquelle tu te couvres
Rachi suit le Targoum Onkelos sur les gages et le Midrash sur la conclusion de Gn 38:18. Il explique le terme qdesha comme « consacrĂ©e [âŠ] Ă la prostitution », et la phrase de Juda lorsque son compagnon rentre sans les gages comme « Quâelle garde ce quâelle a, de peur que nous ne soyons mĂ©prisĂ©s [car] si tu continues de la chercher, cela finira par se savoir, et ce sera une honte. Que puis-je en effet faire de plus pour tenir parole ? » ; il note au passage lâenseignement du Midrash sur le chevreau par lequel Juda avait Ă©garĂ© son pĂšre et par lequel il est maintenant Ă©garĂ© lui-mĂȘme.
Et elle envoya Ă son beau-pĂšre â elle ne voulait pas lui faire honte
« Environ lorsque les mois se triplĂšrent, » comme lâa compris le Midrash et traduit Onkelos, on rapporta Ă Juda que sa bru Tamar (litt.) avait prostituĂ© et Ă©tait maintenant enceinte de ses prostitutions â hara est, dit Rachi, un adjectif et non un verbe. La sentence de Juda est expliquĂ©e selon lâopinion dâEphraĂŻm Meqshaa au nom de Rabbi MeĂŻr, telle quâenregistrĂ©e dans le Midrash. Elle fut alors sortie « pour ĂȘtre brĂ»lĂ©e » et envoya Ă son beau-pĂšre [les gages ainsi que le message « de lâhomme auquel etc. »] pour ne pas lui faire honte, car elle prĂ©fĂ©rait se laisser jeter dans la fournaise que lâhumilier en public. Na nâindique en effet que la supplication, et Tamar disait : « Reconnais, je te prie, ton crĂ©ateur, et ne sois pas la cause de la perte de trois vies ! » Comme ses devanciers, Rachi dĂ©compose la rĂ©ponse de Juda : « Elle est plus juste dans ses paroles, câest de moi quâelle est enceinte », et ajoute lâinterprĂ©tation des sages, Ă laquelle il surajoute : « Câest parce quâelle Ă©tait pudique dans la maison de son beau-pĂšre que jâai dĂ©crĂ©tĂ© que câest dâelle que serait issue la lignĂ©e des rois et de la tribu de Juda que sortiraient les rois dâIsraĂ«l » ; elle avait en effet le droit dâagir de la sorte puisquâil ne lâavait pas donnĂ©e Ă ChĂȘla, et il nâajouta plus ou ne cessa plus de la connaĂźtre, de mĂȘme quâ« [Eldad et MĂ©dad] nâajoutĂšrent pas de prophĂ©tiser » a Ă©tĂ© traduit « ils nâarrĂȘtĂšrent pas de prophĂ©tiser ».
Au moment de son engendrement â avant terme
Comparant les deux naissances gĂ©mellaires de GenĂšse, Rachi dĂ©duit que Tamar accoucha avant terme de ce quâil nâest pas dit, comme pour Rebecca, que ses jours furent remplis. Cependant, câĂ©taient des temim (jumeaux) pleins et non des tomim dĂ©fectifs, signe que tous deux seraient justes. « Lâun dâeux donna, » câest-Ă -dire sortit sa main Ă lâextĂ©rieur, et aprĂšs que la sage-femme y eut attachĂ© un fil Ă©carlate, la rĂ©introduisit. Rachi interprĂšte lâexclamation de lâaccoucheuse comme « Avec quelle force tu tâes fait un passage ! » Quant Ă Zeraâh, aprĂšs avoir rĂ©itĂ©rĂ© lâinterprĂ©tation du Midrash sur les quatre occurrences de sa « main, » Rachi explique quâil fut appelĂ© de ce nom du fait de lâĂ©clat du fil dâĂ©carlate.
ExĂ©gĂšses de lâĂšre moderne
Commentateurs juifs ultérieurs
Le Tzemah Tzedek, le troisiĂšme rabbin de la Dynastie hassidique Habad-Loubavitch, Menachem Mendel Schneersohn (1789-1866), dans son journal personnel discute de la question de Juda et Tamar, et comment la traiter, en particulier vis-Ă -vis des tenants de la Haskalah[434].
Il discute de la proposition d'enseigner des extraits du Tanakh pour des jeunes, en omettant des portions jugĂ©es superflues ou inappropriĂ©es pour des jeunes Ă©tudiants. Des exemples, les rĂ©cits de Bilhah et Ruben (GenĂšse 35:22) et de Juda et Tamar (GenĂšse 38), comme des questions ont Ă©tĂ© posĂ©es sur leur interprĂ©tation, mĂȘme Ă l'Ă©poque talmudique.
Il répond:"Comment peut-on oser omettre des portions de la Torah de Moïse, le serviteur de Dieu, et déclarer avec une compréhension de mortels qu'elles ne sont pas 'vitales' ou ne sont pas 'appropriées' pour les jeunes? Toutes les portions, phrases, et mots ont été prononcés par la bouche de Dieu à Moïse, qui les a réitérées et transmis, comme affirmé dans Bava Batra (15a) (Talmud)."
ExégÚse critique
Le rĂ©cit de Juda et Tamar, introduisant une rupture littĂ©raire entre le rĂ©cit de la vente de Joseph et son ascension dans la maison de Potiphar reconnaissable Ă sa Wiederaufnahme (« reprise ») en GenĂšse 37:36 et 39:1, indiquerait quâil sâagit dâun ajout tardif Ă l'histoire de Joseph[435]. L'analyse des motifs terminologiques du texte dĂ©montrerait tant son unitĂ© que son inclusion harmonieuse dans le Livre de la GenĂšse, « quelle quâait pu ĂȘtre la prĂ©histoire de ces textes »[6]. Pour Shinan et Zakovitch, la prĂ©sence de nombreux liens intertextuels de GenĂšse 38 avec son contexte indiquerait Ă©galement lâunitĂ© de GenĂšse 37-50 qui aurait Ă©tĂ© Ă©crit Ă la cour dâEphraĂŻm[11].
Analyse littéraire
Gary Rendsburg dĂ©cĂšle de nombreuses correspondances entre les entourages de Juda en Gn 38 et de David en 2Sam : outre les compagnons Hira/Hiram, Juda et David prennent pour femme Bat Choua/Bat Cheva, ont deux fils qui meurent, Er/un fils (naÊżar) innommĂ© et Onan/Amnon qui se conduisent mal qui vis-Ă -vis de sa femme et vis-Ă -vis de sa sĆur Tamar, tandis que ChĂȘla et ChĂȘlomo perpĂ©tuent la lignĂ©e de leur pĂšre[436]. Ces parallĂšles sont plus ou moins avalisĂ©s par Shinan et Zakovitch, Craig Ho, Graeme Auld et Fokkelien van Dijk-Hemmes, bien que chaque auteur en tire des conclusions diffĂ©rentes : pour Rendsburg qui pense que le Livre de la GenĂšse a Ă©tĂ© composĂ© dans son intĂ©gralitĂ© par un courtisan du roi David, Gn 38 est une satire Ă moindre risque des inconduites royales ; Zakovitch y voit lâattaque Ă peine voilĂ©e contre une famille de dĂ©bauchĂ©s mais pour Ho, elle vise Ă Ă©tablir la judĂ©itĂ© dâun roi dont on rappelle trop souvent les origines moabites et van Dijk-Hemmes voit en Gn 38 un midrash de 2Sam oĂč la victime des hommes prend sa revanche sur ses tourmenteurs. Paul R. Noble Ă©met cependant des rĂ©serves sur les parallĂ©lismes proposĂ©s par Rendsburg, lesquels rĂ©sultent selon lui de critĂšres de ressemblance trop peu rigoureux et mĂšnent Ă des correspondances inacceptables (YHWH/Absalom), trop diffuses (Tamar=BethsabĂ©e mais aussi Urie, NathanâŠ) ou confuses (Tamar=BethsabĂ©e mais BethsabĂ©e=Bat Choua)[437].
ExégÚse féministe
Le rĂ©cit de Juda et Tamar illustre la lutte dâune femme dans une sociĂ©tĂ© patriarcale qui ne lui reconnaĂźt aucun statut.
Comme Tamar ne demande rien avant que Juda ne la possĂšde, il se pourrait quâelle nâavait pas lâintention de se conduire en prostituĂ©e[438].
Ălaborant sur lâimage botanique du palmier-dattier telle quâexploitĂ©e dans lâApocryphe Ă GenĂšse et sur les travaux de Susan Niditch, Jacqueline Vayntrub conclut que les deux Tamar de la Bible partagent cet aspect disruptif, la premiĂšre entourant Juda de ses racines pour perpĂ©tuer dans la transgression la lignĂ©e du patriarche, la seconde se retrouvant au centre dâun acte qui mĂšnera Ă la rupture de la famille davidique[75].
Tamar et Juda dans lâart
Juda et Tamar
- Gerbrand van den Eeckhout, huile sur toile, 1650-60.
- Arent de Gelder, huile sur toile, 1667.
- idem, huile sur toile, 1681.
Tamar menée au bûcher
- Jacopo da Ponte, 1566.
Notes et références
Notes
- Lâexpression « venir à » ou « approcher de » (b-w-ÊŸ ÊŸ-l) est un euphĂ©misme Ă connotation sexuelle que JubilĂ©s XLI:5 feint de ne pas entendre afin de suggĂ©rer la virginitĂ© de Tamar lors de sa rencontre avec Juda. JĂ©rĂŽme choisit lui aussi de le rendre par introiens (« venant [chez sa femme] »), sexuellement neutre contrairement Ă lâingressus employĂ© pour traduire la mĂȘme racine en Gn 38:2. Câest ainsi quâil popularise le mythe de lâonanisme, participant dâun mouvement de condamnation de la pratique qui se retrouve dâune part dans les sources juives contemporaines et dâautre part chez Ăpiphane de Salamine â Shinan et Zakovitch 1992, p. 18, 31, 63 & 70, Hilbrands 2007, p. 94-95
- (Va)titÊżalaf est la premiĂšre occurrence dâun terme rare, formĂ© sur la racine Êż-l-f qui exprime gĂ©nĂ©ralement la pĂąmoison (cf. IsaĂŻe 51:20 & Amos 8:13) mais il nâa Ă©videmment pas ce sens en Gn 38:14 ni en Cantique des Cantiques 5:14 (« Ses mains sont des cylindres d'or, incrustĂ©s d'onyx, son corps une Ćuvre d'art en ivoire, meÊżoulefet sappirim ») â le Targoum attribuĂ© Ă Jonathan rend (va)titÊżalaf par aÊżaáčfat et le Targoum Neofiti par itÊżaáčaft, ajoutant en outre ba afin de prĂ©ciser quâelle sâenveloppe dâun voile tandis ; tous deux font usage de la racine Êż-áč-f qui comprend la mĂȘme polysĂ©mie « recouvrir/sâĂ©vanouir », tant en aramĂ©en quâen hĂ©breu, mais sâemploie plus frĂ©quemment dans la premiĂšre acception, encore que plusieurs versets utilisent la seconde. Le Targoum Onkelos Ă©vite lâĂ©quivoque liĂ© Ă ces racines (e.g. Jonas 4:18 & Psaume 102:1 qui acceptent les deux sens) en traduisant par itkanat (« elle arrangea [son voile] »). Cependant, la Septante porte ekallopissato, la Peshitta [w]ÊŸáčŁáčbtt (Heller 1927, p. 48), le livre des JubilĂ©s [wa]yâbela (Charles, 1902, p. 229n9) et le Testament de Juda kosmeteira, « elle se para » ou « se fit plus belle » car ils choisissent de traduire Êż-l-f par « orner », ce qui peut se comprendre dans le contexte de Cantique 5:14 mais vise, dans le cas de Gn 38:14, Ă dissocier la dissimulation du visage de celle du corps et partant le voile de la prostitution â cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 89-92 & 101, Menn 1997, p. 153, Dahan 2015, p. 66 & Blachman 2013, p. 84.Un orant, enveloppĂ© (Êżaáčouf) dans son chĂąle de priĂšre.
Wevers 1993, p. 638-639 attribue cette interprĂ©tation Ă une rĂ©pugnance toute hellĂ©nique pour lâimmoralitĂ© mais Huddlestun 2001 lâinscrit au contraire dans un cadre juif post-biblique, quâil rapproche des lois mĂ©dio-assyriennes oĂč le voile est non seulement lâapanage des femmes « respectables » mais aussi prohibĂ© aux prostituĂ©es. Elle fournit selon lui le contexte culturel commun Ă lâajout septantique Ă Gn 38:15 dâune part et, dâautre part, aux amplifications targoumiques sur ce verset, ainsi quâĂ BR 85:8 (1041-2) et Ă TB Sota 10b, oĂč Juda nâa jamais connu Tamar autrement que voilĂ©e.
Les traductions analogues Ă la Septante entraĂźnent une tension interprĂ©tative car elles supposent Thamar mĂ©connaissable, bien que dĂ©voilĂ©e, et Tertullien fait de la parure de Thamar le type mĂȘme de lâartifice fĂ©minin trompeur, y consacrant deux traitĂ©s pour en prĂ©munir son lectorat Ă©vangĂ©lisĂ©. - Lâexplication la plus simple et concise sur la signification de cette expression semble se trouver dans lâonomasticon de JĂ©rĂŽme de Stridon qui indique que selon les HĂ©breux, « Ănam ne dĂ©signe pas un lieu mais un bivium (carrefour) oĂč un regard attentif est nĂ©cessaire afin de choisir la route Ă prendre » â De situ et nominibus locorum hebraicorum s.v Ănam, in Hilbrands 2007, p. 80-82, et câest ainsi que les traducteurs de la Bible en aramĂ©en juif ou syriaque ont choisi de le rendre. Lâincorrection de la chose avait cependant Ă©tĂ© relevĂ©e par les Ă©lĂšves de Juda le Prince qui rapportaient en son nom des interprĂ©tations plus acceptables comme « Porte des priĂšres » ou « RĂ©solution des doutes religieux. » La traduction dâEinayim par « sources » avait Ă©tĂ© acceptĂ©e par EusĂšbe de CĂ©sarĂ©e avant dâĂȘtre relativisĂ©e par JĂ©rĂŽme de Stridon ; elle a cependant Ă©tĂ© rĂ©itĂ©rĂ©e par le Sforno et Bitton 1978 suggĂšre sur base de celle-ci que la forme dâun tel carrefour pourrait Ă©voquer celle dâun Ćil.
- Gershoni suggĂšre quâau Proche Orient, le commerce charnel au service dâun culte Ă©tait, contrairement Ă la prostitution, une occupation honorable et les hiĂ©rodules nâavaient donc pas besoin de se voiler ; dans cette hypothĂšse, Hira prĂ©fĂšre sâenquĂ©rir de « la hiĂ©rodule qui se trouvait sur la route » afin dâĂ©viter tout soupçon, et espĂšre que ses interlocuteurs lui rĂ©pondront quâ« il nây a point ici de hiĂ©rodule mais il y a une prostituĂ©e etc. », et Lambe 1999, p. 56-57 voit en cette distinction le point de conflit entre lâidentitĂ© hĂ©braĂŻque de Juda et son assimilation dans la sociĂ©tĂ© cananĂ©enne.
Toutefois, Gruber 1986 et Westenholz 1989 ne trouvent aucune preuve de lâassociation entre culte et prostitution dans une revue des textes sĂ©mitiques, et il nâen existe pas non plus de preuve archĂ©ologique selon LipiĆski 2014.
Cependant, au vu de la persistance de cette association dans la littĂ©rature secondaire et des conclusions diamĂ©tralement opposĂ©es de M.I. Gruber et J. Westenholz (pour le premier, une qdesha est exclusivement une prostituĂ©e tandis que pour la seconde, elle est seulement une prĂȘtresse), DeGrado 2018 examine la polysĂ©mie de la racine Q-D-Ć dans les Targoumim et la littĂ©rature rabbinique, concluant Ă un glissement sĂ©mantique de âprĂȘtresseâ Ă âfemme seuleâ avec toutes les connotations sociales attachĂ©es Ă ce terme â câest ce sens et lui seul que les traducteurs de la Septante, et les rabbins, auraient appliquĂ© Ă Gn 38:21 & 24
Voir aussi (en) Charles J. Conroy, « The Question of So-Called Sacred or Cultic Prostitution » (consultĂ© le ), un rĂ©fĂ©rentiel complet sur la question. - Bien quâune lecture littĂ©rale suggĂšre que Juda reconnaĂźt les gages (les traductions juives et chrĂ©tiennes de la Bible en français portent en cet endroit « Juda les reconnut »), le texte hĂ©braĂŻque ne prĂ©cise pas ce quâil reconnaĂźt â ce vide est Ă la base de nombre dâinterprĂ©tations ultĂ©rieures dont celles des JubilĂ©s (Segal 2007, p. 70). Selon E.T. Blachman, le Juda de la version hĂ©braĂŻque reconnaĂźt, pour la premiĂšre fois, Tamar et la Septante, en traduisant « Juda les reconnut », attĂ©nue la force de cette reconnaissance ainsi que de la confession qui suit (Blachman 2013, p. 106)
- DâaprĂšs Samet 2003 qui utilise le texte massorĂ©tique et la structure proposĂ©e par Van Dijk-Hemmes 1989 ; voir aussi (en) David A. Dickey, « Genesis 38 - A Chiasm » (consultĂ© le ) & (en) Hajime Murai, « Literary structure (chiasm, chiasmus) of Book of Genesis », (consultĂ© le ) qui proposent une division basĂ©e sur la New American Bible, la New Revised Standard Version et la Nouvelle Bible de JĂ©rusalem respectivement.
A.J. Lambe suggĂšre un dĂ©coupage se basant sur les verbes de mouvement et suivant les cinq phases classiques de la structure dramatique : Ă©quilibre (GenĂšse 38:1-6), descente (GenĂšse 38:7-11), dĂ©sĂ©quilibre (GenĂšse 38:12a), remontĂ©e (GenĂšse 12b-26), nouvel Ă©quilibre (GenĂšse 27-30). Cependant, W. Warning juge ce modĂšle artificiel et critique son manque dâappui sur des considĂ©rations terminologiques. - Les nombreuses variations autour de la racine n-t-n dans Gn 38:15-18 pourraient par ailleurs jouer sur la phonĂ©tique analogue de lâetnan zona, « salaire de la prostituĂ©e » que la lĂ©gislation biblique interdit de consacrer au sanctuaire (Dt 23:19) et qui a financĂ©, selon le prophĂšte, les idoles de Samarie (Mic 1:7) - (Kiel 2003, p. 85)
- (he) Y. Bin-Nun & Y. Medan, « Hapiloug vĂšhaaâhdout - kefel hataout hamara » (consultĂ© le ), citĂ© in Navon 2014, p. 132-133 ; voir aussi Zhao 2014 qui cite les prĂ©cĂ©dents mais interprĂšte diffĂ©remment â Juda, qui avait « bien » commencĂ© en sauvant Joseph, se comporte ensuite « mal », prenant une dĂ©cision qui amĂšnera le deuil sur sa famille. Il persĂ©vĂšre un temps dans cette voie avant de connaĂźtre lui-mĂȘme le deuil et dâĂȘtre amenĂ© Ă assumer ses responsabilitĂ©s par Tamar. Il est dorĂ©navant lâautoritĂ© familiale et le vĂ©ritable hĂ©ros du cycle de Joseph. Selon Clifford 2012, Joseph se trouve dans le mĂȘme Ă©tat dâesprit que Juda au dĂ©but de Gn 38 lorsquâil renvoie ses frĂšres au pays de Canaan, et le discours de Juda a sur lui le mĂȘme effet que celui de Tamar sur Juda.
- Cf. Menn 1997, p. 55-64 et Brandes 2010, p. 82-84 mais voir Ravid 2009, p. 168 ; selon Brandes, la loi du lĂ©virat est, avec celle du fils rebelle et de la femme soupçonnĂ©e dâinfidĂ©litĂ©, une innovation biblique ultĂ©rieure visant Ă circonscrire lâautoritĂ© du chef de famille qui nâest dorĂ©navant plus seul Ă dĂ©cider du sort de sa maisonnĂ©e tandis que pour Ravid, les lois du lĂ©virat deutĂ©ronomique sont en pleine vigueur Ă lâĂ©poque des patriarches mais elles ne peuvent sâappliquer Ă Tamar car elle se trouve trop Ă©loignĂ©e des anciens de sa ville pour faire appel Ă eux. Mass estime lui aussi que, du point de vue exĂ©gĂ©tique, Gn 38:26 (« il cessa, dĂšs lors, de la connaĂźtre ») se comprend plus aisĂ©ment si lâon admet que Tamar devait, pour ĂȘtre permise Ă un autre homme, dĂ©chausser ChelĂą et ne pouvait plus le faire aprĂšs sâĂȘtre unie au pĂšre de celui-ci (Mass 2016, p. 76)
- Blachman, p. 106 signale la traduction anglaise par Brenton de la Septante, qui indique en Gn 38:24 que Thamar « a griĂšvement jouĂ© Ă la prostituĂ©e », insistant sur la sĂ©vĂ©ritĂ© de lâoffense â cette insistance est cependant propre Ă Brenton (Smith 2018, p. 32).
- DâaprĂšs Blachman 2013, p. 106 qui suit la traduction Brenton et Harl 1986, p. 266. Toutefois, Wevers 1993 et Brayford 2007 traduisent autrement, et Hayes 1995, p. 73-74 se borne Ă signaler le choix du parfait dedichaiĂŽtaĂŻ (« a Ă©tĂ© justifiĂ©e ») qui indique une action passĂ©e et rĂ©volue (« a Ă©tĂ© justifiĂ©e [Ă ce moment mais plus maintenant] ») plutĂŽt que de lâaoriste qui dĂ©signe une action passĂ©e mais encore en cours (« a Ă©tĂ© justifiĂ©e [et lâest encore] »), sans se prononcer sur la raison de ce choix.
- DâaprĂšs les Ă©ditions hĂ©braĂŻques ainsi que Philonenko et Caquot 1987 ; lâĂ©dition Charles, basĂ©e sur les manuscrits Ă©thiopiques, porte BedsouĂ«l en JubilĂ©s XLI:7 et BetasouĂ«l en JubilĂ©s XXXIV:20, cf. Menn 1997, p. 164 qui constate le phĂ©nomĂšne mais nâen propose pas dâexplication.
- Cette exĂ©gĂšse est justifiĂ©e par la forme plurielle de (litt.) « Faites-la sortir [et quâelle soit brĂ»lĂ©e] », et, possiblement, par le rĂŽle des frĂšres comme gardiens de la vertu des sĆurs, ainsi quâil ressort de Gn 34 â Shinan et Zakovitch 1992, p. 150-151
- Cette loi est inconnue de la Bible et des rabbins. Elle provient, selon Shinan et Zakovitch 2009, p. 133-142, de lâamalgame entre Lv 20:12 (« Si un homme cohabite avec sa bru, que tous deux soient mis Ă mort: ils ont agi dĂ©sordonnĂ©ment, leur sang est sur eux ») et 20:14 (« Celui qui Ă©pouse une femme et sa mĂšre, c'est une impudicitĂ© : on les fera pĂ©rir par le feu, lui et elle, pour qu'il n'y ait point d'impudicitĂ© parmi vous »). Selon Segal 2007, p. 51-52, cette loi ainsi que celle dâAbraham seraient plutĂŽt une extension de Lv 21:9 (« Et si la fille dâun prĂȘtre se dĂ©shonore par la prostitution, c'est son pĂšre qu'elle dĂ©shonore: elle pĂ©rira par le feu ») Ă lâensemble des filles dâIsraĂ«l.
- Cette apparente contradiction, demeurĂ©e sans explication dans le livre des JubilĂ©s, a rĂ©cemment fait lâobjet de plusieurs interprĂ©tations : selon Zakovitch et Shinan, p. 120-121, tout pourrait ĂȘtre affaire de point de vue : Juda sâaccuse dâune faute dont les anges, qui bĂ©nĂ©ficient contrairement Ă lui dâune mesure dâomniscience, lâabsolvent ; C. WassĂ©n, p. 362 abonde, situant le nĆud du problĂšme sur lâignorance de Juda quant aux non-rapports dâOnan avec Tamar. Cependant les prĂ©cĂ©dents auteurs nâexcluent pas, Ă lâinstar de Kugel, la possibilitĂ© dâune coexistence au sein des JubilĂ©s de traditions voire de couches rĂ©dactionnelles diffĂ©rentes. Michael Segal, p. 53-58, Ă©laborant sur ces prĂ©misses, dĂ©veloppe une hypothĂšse documentaire dans laquelle JubilĂ©s XLI:32 serait la conclusion dâune partie narrative favorable Ă Juda tandis que JubilĂ©s XLI:24-25 serait inclus dans un Ă©pilogue lĂ©gislatif originellement indĂ©pendant, qui juge lâacte en fonction des critĂšres de la communautĂ© Ă lâorigine des JubilĂ©s, et ne peut que rendre un verdict dĂ©favorable. Devorah Dimant reprend la thĂ©orie de deux traditions mais le dĂ©doublement constitue selon elle la rĂ©ponse dâun seul auteur Ă deux problĂšmes distincts : JubilĂ©s XLI:31-32 traite de la question de la lĂ©gitimitĂ© des fruits dâune union Ă premiĂšre vue incestueuse, effectivement rĂ©solue par la virginitĂ© de Tamar car le mariage nâa pas Ă©tĂ© consommĂ© mais il nâen demeure pas moins quâun beau-pĂšre a eu des rapports avec la femme quâil a donnĂ©e Ă ses fils, et ceci devrait les condamner au bĂ»cher en vertu du jugement dâAbraham, ainsi que le rappelle JubilĂ©s XLI:24-25 dans toute sa sĂ©vĂ©ritĂ© ; ce crime-lĂ nâest absolument pas excusable par la virginitĂ© de Tamar mais il est attĂ©nuĂ© par lâignorance de Juda quant Ă lâidentitĂ© de sa partenaire, puis est annulĂ© par son repentir.
- DâaprĂšs Wendland & Colson ; cependant M. Alexandre rattache le commentaire de Philon Ă Gn 38:14-16, et la derniĂšre clause se rapporterait seulement Ă Gn 16:4
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 28 signalent un midrash yĂ©mĂ©nite « dont la source sâest perdue » qui explique le nom dâEr par le souhait quâa Juda de consoler Jacob de la perte de Joseph comme une peau recouvre une plaie.
- melotis est le calque latin du mĂšlĂŽtĂš grec, Ă©quivalent du ĆĄoĆĄipÌ des Targoumim aramĂ©ens, cf. Petit 1987, p. 114
- Murcia 2018, p. 189-190 fait remarquer (Ă propos dâune tradition sans rapport avec GenĂšse 38) que lâenseignement dâun sage citĂ© dans la Tossefta, reflĂšte parfois davantage lâopinion du compilateur que celle du sage â
- Cette thĂšse de RenĂ©e Bloch, p. 381-9 qui reconstruit en ce sens un portrait de Thamar dâaprĂšs les targoumim, est Ă©cartĂ©e par E.M. Menn, p. 283n211 qui estime que rien de cette image ne transparaĂźt dans le Targoum (et dans le Targoum des NĂ©ophytes en particulier) ; sur lâinfluence des traditions juives dans lâĂ©vangile selon Matthieu, voir (en) Herbert W. Basser et Marsha B. Cohen, The Gospel of Matthew and Judaic Traditions : A Relevance-based Commentary, Boston (Mass.), Brill, coll. « The Brill Reference Library of Judaism » (no 46), , 794 p. (ISBN 978-90-04-29179-9) ; de multiples analogies ont Ă©galement Ă©tĂ© notĂ©es entre divers points du Targoum des NĂ©ophytes sur Gn 38 et de lâĂvangile selon Jean : sur le memra deYYY et ses ressemblances avec le logos de Philon ou de Jean, voir (en) Ks. MirosĆaw S. WrĂłbel, « The Gospel According to St. John in the Light of Targum Neofiti 1 to the Book of Genesis », Biblica et Patristica Thorunensia, vol. 9, no 4,â , p. 115-130 (ISSN 2450-7059), et sur les parallĂšles entre « lâheure de dĂ©tresse » du TN et « lâheure » de Jean, cf. (en) Craig E. Morrison, « The "Hour of Distress" in "Targum Neofiti" and the "Hour" in the Gospel of John », The Catholic Biblical Quarterly, vol. 67, no 4,â , p. 590-603 (JSTOR 43725582).
- Cette tradition est propre au christianisme car le judaĂŻsme voit en Rahab lâĂ©pouse de JosuĂ© et la mĂšre de plusieurs prophĂštes - cf. Nowell 2008, p. 5n13
- Selon E.S. Artom, ce nom est une corruption de Ben Chwa, devenu Bar Chwa en aramĂ©en puis Bar Sawa en grec ; alternativement, le Testament pourrait sâĂȘtre inspirĂ© du roi B-r-ĆĄ-Êż de Gomorrhe (Gn 14:2), que la Massora appelle Birsha mais la Septante Barsawa â cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 19
- La rĂ©union de deux fragments des manuscrits de la Mer Morte, a elle aussi permis de former la phrase « ptil, câest sa ceinture » â in (en) Nir Hasson, « Was Noah's Ark Shaped Like a Pyramid? Digitized Dead Sea Scrolls Reveal New Secrets », (consultĂ© le )
- Cf. Himmelfarb 1984, p. 69-70 mais voir Blachman 2013, p. 116-117 pour laquelle ce voile nuptial pourrait reprĂ©senter le seul Ă©lĂ©ment rĂ©dempteur pour Thamar qui a peut-ĂȘtre lâintention de se marier et non de se prostituer avec Juda. Cependant, mĂȘme dans ce cas de figure, qualifier cette coutume dâamorrite, place Thamar sur le mĂȘme pied que les ennemis dĂ©faits par Juda.
- ConsidĂ©rer les ancĂȘtres de JĂ©sus comme Ă©trangĂšres nâallait pas de soi avant Philon: il nây avait aucun doute pour Ruth et Rahab, dĂ©signĂ©es comme telles par la Bible mĂȘme mais celle-ci restait silencieuse sur Thamar et BethsabĂ©e. Heil 1991 avance dâailleurs lâhypothĂšse que lâauteur de lâĂ©vangile selon Matthieu considĂ©rait Thamar et BethsabĂ©e comme membres Ă part entiĂšre de la famille abrahamique, ce qui accentuerait dâautant plus leurs fautes que Ruth et Rahab avaient, bien quâĂ©trangĂšres, agi correctement.
- LâĂ©dition Theodor-Albeck (p. 1030) porte « dernier asservisseur ⊠premier rĂ©dempteur » qui serait Peretz lui-mĂȘme. Shinan et Zakovitch 1992, p. 4 font remarquer que cette version est contredite par de nombreux manuscrits, plus difficile Ă comprendre et quâelle ne sâaccorde pas avec TanB Vayeshev 11
- Asnath est dĂ©signĂ©e en Gn 41:45 comme la fille du prĂȘtre Poti-phera, et un midrash identifie ce dernier Ă son paronyme exĂ©cuteur-en-chef â GnR 86:3 (p. 1054), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 4
- GnR 85:4 (p. 1037) â J. Theodor signale la variante « elle lâappela ChĂȘla â Pasqat », et l'explique par la proximitĂ© des racines k-z-b et ĆĄ-l-ÊŸ, qui seraient toutes deux rendues par p-s-q. Shinan et Zakovitch 1992, p. 37 jugent toutefois la version tronquĂ©e: k-z-b exprime, au sens direct, le tarissement dont lâĂ©quivalent aramĂ©en est p-s-q et, au sens dĂ©rivĂ©, la dĂ©ception ou la tromperie dont la racine ĆĄ-l-ÊŸ est proche en hĂ©breu (cf. II Rois 4 oĂč la Sunamite demande Ă ĂlisĂ©e de ne pas la « tromper », usant de la premiĂšre racine en 4:16 et de la seconde douze versets plus loin) mais ne peut plus ĂȘtre traduite par p-s-q. Selon les mĂȘmes, deux traditions s'affrontent (cf. les Targoumim sur le verset): lâune fait de Kezib une simple mention gĂ©ographique, lâautre â Ă laquelle appartient le midrash â estime quâelle enseigne allusivement la fin de la fertilitĂ© de Bat Choua (mais voir Daat Miqra, selon lesquels cette information serait en vĂ©ritĂ© fournie par le verbe vatossĂšf, porteur de la mĂȘme ambiguĂŻtĂ© que yassaf en Gn 38:26 â tous deux sont compris comme des ajouts alors quâil peuvent tout aussi bien signifier lâarrĂȘt).
- Ce nom qui nâapparaĂźt quâici rĂ©sulte, selon le Minhat Yehouda, dâune corruption dâAáž„a bar ZeÊżira
- La plupart des commentateurs du Midrash rapportent « ceux-là » aux gages perdus et retrouvĂ©s, qui sont Ă la fois Ă Juda et Ă Dieu mais « ceux-là » pourrait aussi dĂ©signer les jumeaux que porte Tamar car « il y a trois partenaires en lâhomme: le saint, bĂ©ni soit-il, le pĂšre et la mĂšre » (T.B. Kiddoushin 30b) â Shinan et Zakovitch 1992, p. 163
- Bien que le destin des compagnons de Daniel soit liĂ© Ă celui de Juda ou Tamar dans le Targoum des NĂ©ophytes et dans le Midrash, il sâagit de traditions interprĂ©tatives distinctes: dans le Targoum des NĂ©ophytes, Tamar « donne » les trois compagnons en Ă©change des trois gages tandis que dans le Midrash, Juda « reçoit » les trois compagnons en Ă©change de Tamar et ses enfants - cf. Hayes 1995, p. 177n6
- Dans un midrash consignĂ© dans le Yalkout Shimoni sur Bemidbar 763 au nom du Yelamdenou, câest avec le bĂąton de Juda que Jacob a traversĂ© le Jourdain, que MoĂŻse puis Aaron ont rĂ©alisĂ© les prodiges devant le pharaon dâĂgypte et devant les tribus dâIsraĂ«l dans le dĂ©sert, que David a terrassĂ© Goliath, que tous les rois de Juda ont rĂ©gnĂ© jusquâĂ la destruction du temple et que le messie rĂ©gnera sur les nations du monde (Shinan et Zakovitch 1992, p. 127). Bien que consignĂ©es plus tardivement que les Ă©crits des pĂšres, de nombreuses traditions orales rapportĂ©es au nom du Tanhouma ou du Yelamdenou sont plus anciennes, et leur ont servi de sources.
- LâĂ©quation entre les fils Ă©carlates apparaĂźt dans des traditions juives, conservĂ©es Ă la gueniza du Caire ou recueillies dans le Midrash Hagadol et le Sefer Hamaor, ce dernier voyant dans le fil un signe dâexpiation des fautes, dâaprĂšs IsaĂŻe 1:18. La source de la tautologie serait un midrash perdu sur le livre des Proverbes (Shinan et Zakovitch 1992, p. 194-5).
- Rachi conclut sur base de calculs chronologiques que cette rĂ©ponse contredit, plus encore que la premiĂšre, le consensus rabbinique qui fait de Tamar la fille de Sem, car ce dernier meurt lorsque Jacob est ĂągĂ© de cinquante ans et le mariage de Tamar ayant lieu soixante ans plus tard, câest quâelle nâest pas sa fille ou plus assez jeune pour ne pas exprimer son refus. Le Maharsha conteste ce commentaire, et comprend que Tamar indique simplement ĂȘtre orpheline de pĂšre Ă sa naissance. La majoritĂ© des autoritĂ©s ultĂ©rieures se sont cependant rangĂ©es Ă lâavis de Rachi â Metivta Sota 10a[4-5] n60
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 150 rapportent une tradition similaire exprimĂ©e dans un targoum tossefta sur Gn 44:18 oĂč la plaidoirie de Juda qui se tient devant le vice-roi dâĂgypte, devient une joute verbale qui menace de se faire physique â lorsque Juda se dit animĂ© par le feu de Sichem, Joseph lui rĂ©pond quâil peut lâĂ©teindre avec le feu dans lequel Juda a voulu brĂ»ler sa bru.
- Lieber propose une lecture alternative oĂč lâĂ©pithĂšte Ă©logieux serait adressĂ© Ă celle dont le Midrash a fait la fille du roi-prĂȘtre Sem (Lieber 2010, p. 670-671)
Références
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- Levenson 2016
- Daâat Mikra sur Bereshit 37-50, p. 76-77 ; voir aussi Zakovitch 2005, p. 130-131
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 218
- Samet 2003, Shinan et Zakovitch 1992, p. 207-219 ; sur lâusage du terme vatekhas (« elle se couvrit ») dans le verset 38:14 contre vatilbash (« elle se vĂȘtit ») du verset 38:19, voir Huddlestun 2001
- Warning 2000
- Alexander 1999
- Samet 2003, cf.Shinan et Zakovitch 1992, p. 219, Hayes 1995, p. 66 et Menn 1997, p. 43-44
- Alter 1975
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 208 & 220
- Shinan et Zakovitch 2009, p. 133-4
- Voir cependant Kugel 2007 qui relativise la portée de ces parallÚles
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 208-212, cf. Brayford 2007, p. 399 &Alter 2004, p. 145n7
- Bazak, Yehudah and Tamar & Menn 1997, p. 20-21 & 38-39, voir aussi Bazak 2013, p. 140
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 221 & Kraut 2018
- Ravid 2009, p. 167-168
- Grossman, Background
- (en) Nehama Leibowitz, « Yehuda and Tamar », sur Lookstein.org (consulté le )
- Huddlestun 2002, Shinan 2008
- Kraut 2018 mais voir Alter 2004, p. 147n16
- BarkaĂŻ 2007, Bazak 2013, p. 141-144
- Cf. Zucker 2011
- Rendsburg 2003, p. 53 & Adelman 2011
- Cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 223-224 & Hilbrands 2007, p. 26-27
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 205, 218-219 & 223-224, Brayford 2007, p. 402
- Alexander 1999, p. 265
- Carmichael, cité in Hilbrands 2007, p. 32-33
- Menn 1997, p. 79-82
- Halakhot vehalikhot besefer Bereshit, p. [69]
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 229-231, voir aussi Friedman 1990, p. 32 & Gibson 2014
- Klitsner, Literary Parallels
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 62
- Van Wolde 1997, p. 434-437
- Menn 1997, p. 33
- Halakhot vehalikhot besefer Bereshit, p. [70]
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 224
- Adelman 2012, voir aussi Kaniel 2014 & Kaniel 2014a
- Cf. Rendsburg 1986 & Geoghegan 2006, p. 58
- Galpaz-Feller 2008, Bazak 2013, p. 149-161
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 228-229, Geoghegan 2006 & Kaminsky 2014, p. 119
- Zvi Ron 2013
- Geoghegan 2006
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 231
- Paul 2001, p. 41
- Emerton 1975
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 43-44
- Harl 1986, p. 265, Shinan et Zakovitch 1992, p. 115 & Wevers 1993
- Cf. Robinson 1977, Shinan et Zakovitch 1992, p. 213 & Huddlestun 2001
- Cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 240-241 & 243, Menn 1997, p. 28-48, Reif 2009, p. 226 & Kadari 2009
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 81 & Tal 2016, p. 170* (sic)
- Cf. Tov 2008
- Wevers 1993, p. 631
- Wevers 1993, p. 632
- Cf. Artman et Kaniel 2020, p. 127
- Cf. Zipor 2006, p. [465]n1,3&4
- Cf. Wevers 1993, Huddlestun 2001 & Zipor 2006
- DâaprĂšs Daat Mikra & Zipor 2006, p. [464] mais selon Dahan 2015, p. 10, cette distinction serait propre Ă lâhĂ©breu moderne
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 80 & Werman 2015, p. 493
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 27-30, 35-42 & 209, voir aussi Lambe 1999, p. 55-56
- Brayford 2007, p. 398
- Wevers 1993, p. 638-639
- Brayford 2007, p. 400
- Wevers 1993, p. 642
- Brayford 2007, p. 401, dâaprĂšs Westermann 1986, p. 54
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 2 & 43
- Cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 49
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 215, Werman 2015, p. 493
- Sur les unions hors du judaïsme considérées dans le livre des Jubilés comme un acte de sexualité immorale, voir Loader 2007, p. 155-195, en particulier 186-190
- Cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 18 & Halpern-Amaru 1999, p. 113-114, cités in Dimant 2012, p. 792, Zucker et Reiss 2015, p. 197
- Segal 2007, p. 18 & 48-51
- Dimant 2012, p. 790
- Segal 2007, p. 51-52
- Wassén 1994, p. 361
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 172-173 & Hayes 1995, p. 68
- Vayntrub 2020
- Aubin 2001
- Petit 1987, p. 78-79 & 107 mais voir Shinan et Zakovitch 1992, p. 102
- Petit 1987, p. 79-81 ; sur la conversion de Thamar, voir Feldman 2006, p. 248-249
- Petit 1987, p. 80-81, Shinan et Zakovitch 1992, p. 50
- Cf. Ranocchia 2008, en particulier p. 95
- Petit 1987, p. 81, Shinan et Zakovitch 1992, p. 64
- Petit 1987, p. 81 & 86-87, Blachman 2013, p. 144-145
- Cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 109
- Sur la fĂ©condation de lâĂąme par Dieu, voir De Cherubim, § 43-48, cf. Sly 1990, chap. 5 & 8
- Petit 1987, p. 81-87
- Goldin 1977, p. 28, suivi par Kronholm 1991
- Cf. Harl 1986, p. 265, Petit 1987, p. 81 & 108
- Cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 93 & Blachman 2013, p. 147 ; voir aussi les notes dâEsther Starobinski-Safran Ă De Fuga pour un inventaire des relations entre Philon et les autres traditions juives
- Cf. Loader 2011
- Blachman 2013, p. 134-154
- Hilbrands 2007, p. 56-58
- Feldman 2006, p. 110
- Petit 1987, p. 89
- Feldman 2006, p. 291
- Polaski 1995, voir aussi Petit 1987, p. 90, Wassén 1994, p. 362-364, Loader 2011, p. 264-268, Zucker et Reiss 2015, p. 199-200
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 1-2
- TPJ & TO sur Gn 38:2, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 17-18, Reif 2009, p. 230 & Elitzur, Royal propaganda
- TPJ sur Gn 38:5, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 27, 31 & 36, voir Bloch 1955, p. 383
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 48-49
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 58, 62-63 & 69
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 80-81
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 89-90
- Cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 101-102, Huddlestun 2001, p. ***
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 119
- Cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 138-139
- Cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 149-150
- Cf. Hayes 1995, p. 78-80, Menn 1997, p. 223-229 & 270-273, Menn 1998 & Adelman 2013
- TO, TN & TPJ s.v. Gn 38:25, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 160-161 & 170-172, Menn 1997, p. 223-229 et voir Hayes 1995, p. 70-73 & 76-77 ; sur la décomposition de tzadka mimeni, voir aussi Frymer-Kensky 2009 qui considÚre cette version comme une lecture alternative mais entiÚrement légitime du verset.
- Adelman 2013
- Blachman 2013, p. 94-99
- Cf. Chwat 2017
- Lewis Barth, Midrashic Enterprise, cité in Blachman 2013, p. 159
- Sifre Devarim 260, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 140
- Tossefta Nidda 1:7, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 151
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 122 & Reif 2009, p. 227
- Mekhilta deRabbi Ishmael Beshallah 5 (106), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 174-176, Sifrei Devarim 348:1, Tossefta Berakhot 4:18 & Mekhilta deRabbi Shimon Beshallah 14:22, in Hayes 1995, p. 178 & 180-181
- Seder Olam Rabba chapitre 2, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 3
- GnR 87:10 (p. 1070-1071) , cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 123, Ilan 1994, p. 39-41 & Posen, Reuben ; pour une discussion sur lâorigine authentiquement tannaĂŻtique des sept dialogues de Matrona et Rabbi Yosse mentionnĂ©s dans GenĂšse Rabba et le corpus de ces traditions en gĂ©nĂ©ral, voir (en) Tal Ilan, « Matrona and Rabbi Jose: An Alternative Interpretation », Journal for the Study of Judaism, vol. 25,â , p. 18-51 (lire en ligne, consultĂ© le )
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 122 & 234, Feldman 2006, p. 292, Blachman 2013, p. 157
- Cf. Adelman 2013
- Comp. Ruth Zoutta s.v. Ruth 1:17, cf. Chwat 2017
- Cf. Chwat 2017, qui estime que le jeu sur moutset/motset provient dâune lecture volontairement faussĂ©e du texte hĂ©braĂŻque consonantique.
- Tossefta Sota 9:3, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 174
- Comp. Mishna Yoma 8:9, Sifra Aâharei Mot chap. 8:1-2 & Mekhilta deRabbi Shimon 32:12, cf. Chwat 2017
- Comp. Sifre Devarim 80 & 333, Tossefta Avoda Zara 4:3, Chwat 2017
- Kronholm 1991, p. 157
- Marguerat 2016, p. 128
- Massey 1991, p. 74-89, en particulier 74 & 85
- Cf. Petit 1989, p. 146-7
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 199, Kaniel 2014a, p. x
- Kaniel 2014a, p. y
- Miller 2008
- Siker 2015, p. 66-7
- Cf. Menn 1997, p. 84-85n156, voir aussi Miller 2008
- Anderson 1987, p. 188 & Heil 1991, voir aussi Hilbrands 2006, p. 79
- Maori 1995, p. 9-10 & Lund 2012
- Cf. Petit 1987, p. 110-112, (en) J.R. Davila, « A Difficult Case: The Testaments of the Twelve Patriarchs », sur University of St Andrews School of Divinity, (consulté le ), Veldt 2007, p. 117 et seq. & Opoku-Gyamfi 2014. Pour ce qui concerne le T. Juda, voir Menn 1997, p. 112, en particulier n17
- Cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 6
- Menn 1997, p. 110-115 & 359, voir en particulier p. 113n19
- Juges 14:5-6 & 1 Samuel 17:34-37, cf. Menn 1997, p. 121-2
- Cf. Menn 1997, p. 128
- Menn 1997, p. 132-3
- Himmelfarb 1984, p. 69
- Ravid 2002
- TB Sanhédrin 107a, cf. JE
- Menn 1997, p. 116-7
- Menn 1997, p. 358-360
- Menn 1997, p. 108, Rosen-Zvi 2006 & Blachman 2013, p. 117.
- Cf. Blachman 2013, p. 117
- Simkovich 2018
- Irshai 2011, p. 22
- Cf. Petit et Menn ; sur le caractĂšre messianique de GenĂšse Rabba, voir de Lange 1989
- Cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 240-242 & 246 & Blachman 2013, p. 200
- Strouma 2005
- Petit 1989, p. ***
- Mimouni 2018, p. 149
- Alexander 1992, p. 3
- Cf. Petit 1989, p. 151-2
- Petit 1989, p. ***, Hilbrands 2007, p. 85 & de Lange 2012
- Fredriksen 2003
- Stroumsa 2015, p. 103-104
- HUJ, p. 64-65 & 68-69 & (en) « Ancient Jewish History: The Babylonian Jewish Community », sur The Jewish Virtual Library (consulté le )
- Cf. Kalmin 2021
- DâaprĂšs Botha 1995, p. 23 mais voir Herman et Rubinstein 2018, p. xxii-xxvi pour un examen plus approfondi sur la question
- Fredriksen et Irshai 2015
- Botha 2006, Wickes 2008 & Monnickendam 2020
- Kamczyk 2018, p. 51
- (en) Walter Laqueur, The Changing Face of Antisemitism : From Ancient Times To The Present Day, Oxford University Press, , p. 48
- Bauckham 1995, Smit 2010 & Marguerat 2016, p. 128 & 164
- Cf. Markschies 1994 & Loader 2008
- Cf. Hilbrands 2007, p. 111-113
- Cf. Elitzur, Royal propaganda & Segal 2007 pour Gn 38, voir (en) Ronit Nikolsky et Tal Ilan, Rabbinic Traditions between Palestine and Babylonia, Leiden, Brill, (ISBN 978-9004267893, présentation en ligne) pour un aperçu plus général
- Bar-Asher Siegal 2020
- Malkiel 2006
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 44
- Ayala Loewenstamm, « Baba Rabbah », dans Encyclopedia Judaica (2d edition), Detroit, Macmillan Reference, (lire en ligne)
- Tevat Marka 136b, in Ben-Hayyim 1988, p. [196]-[197], cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 44
- Tal 2016, p. 170* (sic)
- Tsedaka et Sullivan 2013, p. 91
- « Jerusalem Talmud », dans Encyclopedia Judaica (2d edition), Detroit, Macmillan Reference, (lire en ligne)
- TJ Ketoubot 7:5 (31b), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 51
- TJ Sota 1:8 (17a), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 86
- TJ Ketoubot 13:1 (60a) & Sota 1:4 (4a), BR 85:7, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 93
- TJ Yebamot 4:11 (6a) & TJ Nidda 1:3 (49a), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 152
- TJ Sota 1:4 (5b), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 175
- T.J. Kiddoushin 4:2 (37b) & Baba Batra 3:1 (3a), BR 85:13 (p. 1048) in Shinan et Zakovitch 1992, p. 194
- Blachman 2013, p. 159
- GnR 92:9 (p. 1148-1149), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 123-4
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 47 & 2**
- Cf. (he) Isaak Heinemann (he), Darkei HaAggada [« The Methods of the Aggada »], JĂ©rusalem, Magnes Press,â , 2e Ă©d. (1re Ă©d. 1954), p. 64 et seq. & Shinan et Zakovitch 1992, p. 246
- GnR 85:2 (p. 1030), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 4
- GnR 85:1-3 (p. 1030-1034), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 4-5 (LâĂ©dition Theodor-Albeck signale que plusieurs versions omettent le membre entre crochets)
- GnR 85:3 (p. 1034), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 5
- GnR 85:1 (p. 1030), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 3
- GnR 85:1 (p. 1030), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 4 & Reif 2009, p. 228
- GnR 85:2 (p. 1033), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 5
- GnR 85:1 (p. 1029), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 3
- GnR 85:2 (p. 1033-1034), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 5
- GnR 85:4 (p. 1035-1036), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 5-6
- GnR 85:4 (p. 1036), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 19 & 21
- GnR 85:4 (p. 1037), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 27-28, 31-32, 36-37 & Petit 1987, p. 90
- GnR 85:8 (1041-2), in Shinan et Zakovitch 1992, p. 102-3
- Menn 1997, p. ***
- GnR 85:4 (p. 1037), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 51
- GnR 85:5 (1038), LvR 2:10, PdRK 12:1 & CantR 1:2, §5, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 59 & Kadari 2009
- GnR 85:5 (p. 1039), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 64
- Cf. Friedman 1990, cité in Menn 1997, p. 46 (note 45) & 47 (n. 47)
- GnR 85:5 (p. 1039), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 74
- Steinberger 1988, p. 440 & Shinan et Zakovitch 1992, p. ***
- GnR 85:6 (p. 1039-1040), cf. Petit 1987, p. 93, Shinan et Zakovitch 1992, p. 82 & 86, Menn 1997, p. 331 & Elitzur, Royal propaganda
- GnR 85:7 (p. 1040), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 94 ; sur la parentĂ© textuelle de Rebecca avec Tamar, voir Adelman 2011 ; sur la tendance du Midrash Ă justifier les comportements a priori condamnables des femmes de la Bible lorsquâelles veulent perpĂ©tuer la lignĂ©e dâIsraĂ«l, voir Menn 1997, p. 340n141 & Blachman 2013, p. 163-165
- GnR 85:9 (1043), cf. Emmanueli 1973, p. 25-32, Shinan et Zakovitch 1992, p. 123, Kadari 2009 & Reif 2009, p. 228-9
- Cf. Hayes 1995, p. 181-185 & Reif 2009, p. 228-229
- GnR 85:9 (1043), in Shinan et Zakovitch 1992, p. 116, cf. ibid p. 136
- GnR 85:10 (1043-4) & 95:8, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 151-2 & Kadari 2009
- GnR 85:10 (1043-4), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 152-4 & Hayes 1995 ; voir aussi Ruth Rabba 8:1 oĂč lâascendance sĂ©mite de Tamar est utilisĂ©e pour dĂ©fendre la lĂ©gitimitĂ© de la dynastie davidique, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 44
- BR 85:11 (1044-5), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 162 & 164 & Menn 1997, p. 224-225
- GnR 85:11 (1045), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 163
- GnR 85:12 (version courante & version D), p. 1045, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 176 & 180 et voir Hayes 1995, p. 182-183
- GnR 71:5 (828) & 85:12 (1045), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 176 & Hayes 1995, p. 174-175 & 182-183
- GnR 97 (1216), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 176 et voir Hayes 1995, p. 177 qui cite TB Sanhédrin 79a
- CantR 7:8, §13 & 7:9, §1, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 177
- GnR 97:8 (1207) & 99:9 (1279), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 153 & 177 & voir en particulier Hayes 1995, p. 177-179
- GnR 85:13 (1048), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 190-191
- GnR 96 (1236), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 124
- GnR 79:1 (p. 937), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 122
- GnR 99:8 (1279), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 124
- GnR 98:8 (1257), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 177
- BR 85:14 (1049), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 199
- GnR 85:14 (1049-50), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 203-4
- Cf. de Lange 2007, p. 275
- Petit 1989, p. 145 & Reif 2009
- Elitzur, Royal propaganda
- Reif 2009, p. 225
- Cf. (en) Roger E. Olson, The Story of Christian Theology : Twenty Centuries of Tradition and Reform, Downers Grove, Illinois, InterVarsity Press, (ISBN 978-0-8028-4827-7), p. 102 & (en) Edward J. Watts, City and School in Late Antique Athens and Alexandria, University of California Press, (ISBN 978-0-5202-5816-7), p. 161-166
- Cf. Niehoff 2016 pour une illustration de leur chassé-croisé exégétique
- cf. DEJ, p. 781-2, Kronholm 1991, p. 151
- Cf. Hilbrands 2007, p. 98-99
- Dialogue avec Tryphon 111:4, in Petit 1989, p. 150
- Tertullien, Toilette des femmes 160, in Hilbrands 2007, p. 91
- Adversus haereses IV 16:1 & 25:1-2, in Petit 1989, p. 150 & Hilbrands 2007, p. 99, 106-107
- In Petit 1989, p. 153
- Homélies sur Sam 5.2, cf. Hilbrands 2007, p. 102 & Petit 1987, p. 113
- Homélies sur Lv 5.4, in Hilbrands 2007, p. 101
- Commentaire sur lâĂ©pĂźtre aux Romains, cf. Hilbrands 2007, p. 103
- Commentaire sur le Cantique 1.376, cf. Hilbrands 2007, p. 91-92 & 102
- Stromates I 31:6, cf. Petit 1989, p. 150 & Hilbrands 2007, p. 100
- HomĂ©lie 28 sur lâĂ©vangile selon Luc, cf. Petit 1989, p. *** & Hilbrands 2007, p. 85
- Commentaire sur le Cantique 2,7:10-16, cf. Hilbrands 2007, p. 102 & Soto Varela 2018, p. 415-416
- Homélie sur Lv 8.10 & Commentaire sur Matthieu, in Petit 1989, p. 153-155 & Hilbrands 2007, p. 101-103
- Preparatio Evangelica 9:21, in Hilbrands 2007, p. 83-84
- Onomasticon, in Hilbrands 2007, p. 80-83
- Panarion XXVI.11:10-11 (Selom) & LXIII.1:3-7 (Aunan), in Hilbrands 2007, p. 93-94 ; voir aussi les conclusions de Grelot 1999
- Homélie 62 sur la GenÚse, cf. Sheridan et Oden 2002, p. 243
- EusÚbe, Questions à Stéphane, édition Pearse 2010, p. 47-48, cf. Hilbrands 2007, p. 85
- Hebraice quaestiones 46, in Hilbrands 2007, p. 82
- EusÚbe, Questions à Stéphane 7:3-7, cf. Hilbrands 2007, p. 107-108
- Petit 1987, p. 106-107
- Talmud de Babylone traitĂ© SanhĂ©drin, page 102, folio a (= TB SanhĂ©drin 102a, p. 1130 de lâlâEin Yaakov, Ă©dition Verdier), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 6 ; le Torah Shelema p. 1443n[3], suivi par Reif 2009, p. 236 et Blachman 2013, p. 187n11, lie le passage aux punitions qui sâabattent sur Juda en raison de ses fautes.
- TB Sota 13b (765), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 6 & Reif 2009, p. 228-9
- TB Pessahim 50a, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 21 & Blachman 2013, p. 187-188
- TB Yebamot 34b, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 51-52
- TB Nidda 13a & b (1356 & 1358), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 70-71
- TB Yebamot 59a, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 75
- Mishna Sota 2:3, cf. Adelman 2012, p. 17n26
- TB Sota 10a (746), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 86 (sur la parenté littéraire entre Gn 38 et le cycle de Samson, voir ibid., p. 229-230) & S.C. Reif, p. 230
- TB Sota 10a (746), cf. Petit 1987, p. 103, Shinan et Zakovitch 1992, p. 94, Kadari 2009 & Blachman 2013, p. 189
- TB Nazir 23a & Horayot 10b, cf. Petit 1987, p. 102-3, Shinan et Zakovitch 1992, p. 103, Bronner 1993, p. 38-40 & Blankovsky 2014, traduction dâaprĂšs ce dernier qui suit Rachi et les Tossafistes. Kaniel 2013, p. 36 estime cependant que le sens originel, et non lĂ©gal, de lishma est « dans une bonne intention »
- TB Sota 10a, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 94
- TB Meguila 10b (***) et Sota 10b (***), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 103, Kadari 2009 & Blachman 2013, p. 190
- TB Yebamot 34b avec les commentaires du MeÊŸiri et du Ritva ad loc, cf. Petit 1987, p. 101, Shinan et Zakovitch 1992, p. 124 & Blachman 2013, p. 186
- TB Houllin 113a-b, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 136
- TB Nidda 8b, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 152
- TB Avoda Zara 36b, cf. Petit 1987, p. 101 (selon laquelle cette opinion est dĂ©mentie par TB SanhĂ©drin 52b, qui rĂ©serve la pĂ©nalitĂ© du bĂ»cher Ă la fille adultĂšre dâun prĂȘtre) & Shinan et Zakovitch 1992, p. 153
- TB Sota 10b, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 163 & Gebhard 5758, p. ***
- TB Sota 10b, cf. Petit 1987, p. 103-4, Shinan et Zakovitch 1992, p. 163 & Projet 929. Selon Gebhard 5758, p. 50, Tamar ressemble Ă la colombe qui face Ă lâabatteur, tend le cou en silence, dâautant plus quâelle ne veut pas faire pĂąlir Juda en public ; mesure pour mesure, Tamar a mĂ©ritĂ©, en salaire de yonat ÊŸelem, David makh-tam.
- Blachman 2013, p. 192
- TB Sota 10b (ainsi que TB Berakhot 43a, Baba Metsia 59a & Ketoubot 67b qui rattachent cependant noaâh lo Ă Gn 38:24), cf. Petit 1987, p. 104-5 & Shinan et Zakovitch 1992, p. 161-2
- TB Meguila 25b & TB Sota 7b, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 122 & 178
- TB Sota 10b (749), cf. Petit 1987, p. 106 & Shinan et Zakovitch 1992, p. 178-179
- TB Sota 10b (version courte) & Makkot 23b (version longue), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 179-180 & 238, Hayes, p. 183 & S.C. Reif, p. 236
- TB Nidda 28a, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 194
- C. Hayes, p. 177 & 183
- Alexander 2009
- Reif 2009, p. 229 mais voir Shinan et Zakovitch 1992, p. 178 qui suivent les commentateurs traditionnels, et comprennent que Juda est en exil dans le monde prĂ©sent et Ă venir aprĂšs sây ĂȘtre condamnĂ© lorsquâil a fait vĆu Ă son pĂšre de ne plus jamais reparaĂźtre devant lui sâil ne ramenait pas Benjamin, et ce bien quâil ait rempli les conditions pour son retour.
- TB Sanhédrin 81b-82a, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 94 & Metivta Sota 10a[4] n58
- Reif 2009, p. 231-232
- Segal 2007
- (Blachman 2013, p. 191) et Blankovsky 2014
- Kaniel 2013
- Kiel 2016
- TB Qiddoushin 81b dâaprĂšs Naeh 1997, Schremer 2007 (sur le caractĂšre anti-ascĂ©tique du passage), Kaniel 2013 & Bar-Asher Siegal 2020 ; Feintuch, Disguise and Disaster compare les deux histoires sans rĂ©fĂ©rence au syro-christianisme.
- Cf. Romeny 1997 & Romeny 2014
- Cf. Monnickendam 2015
- Ăphrem, CGn 34.1, in McVey 2010, p. 182
- Ăphrem, CGn 34.2, in Sheridan et Oden 2002, p. 243, Wickes 2008, p. 58 & McVey 2010, p. 183
- Ăphrem, CGn 34.3, in McVey 2010, p. 183
- Ăphrem, CGn 34.4, in Sheridan et Oden 2002, p. 243-244, cf. Wickes 2008, p. 58, McVey 2010, p. 184 & Monnickendam 2020
- Ăphrem, CGn 34.5, in McVey 2010, p. 184
- Ăphrem, CGn 34.6, in Sheridan et Oden 2002, p. 245 & McVey 2010, p. 184-5
- Wickes 2008, p. 48
- Botha 1995 & Wickes 2008
- Botha 1995
- Cf. Wickes 2008, p. 58 & Monnickendam 2020
- Wickes 2008, p. 59
- Harvey 2010
- Kronholm 1991 & Botha 2006
- Botha 2014
- Botha 1990 mais voir Narinskaya 2010 qui soutient, sur base de comparaisons entre Ăphrem de Nisibe et ThĂ©odoret de Cyr, que cet antijudaĂŻsme, fruit des circonstances, ne serait devenu rabique quâaprĂšs sa rĂ©cupĂ©ration par les gĂ©nĂ©rations ultĂ©rieures
- Botha 2006
- Brock 2002, p. 306
- Harvey 1998
- (en) Shaye D. Cohen, « Jews and Judaism in Antioch as Portrayed by John Chrysostom and the Rabbinic Sages », dans Markus Witte, Jens Schröter & Verena M. Lepper, Torah, Temple, Land: Constructions of Judaism in Antiquity, TĂŒbingen, Mohr Siebeck, (ISBN 978-3-16-159853-1, lire en ligne), p. 257-275
- Hilbrands 2007, p. 89-90
- Cf. Hilbrands 2007, p. 94
- Homélies sur la GenÚse 62, Glaphyra sur la GenÚse 6.1 & Sur saint Luc III:17-19, in Sheridan et Oden 2002, p. 243-244
- Homélie sur Gn 62, in Sheridan et Oden 2002, p. 246-247
- Cf. Monnickendam 2020
- Cf. Petit 1989, p. 153-5
- Cf. Hilbrands 2007, p. 99 & 107-108 & Pomeroy 2021, p. 236-237
- Hill 2006, p. 199n6
- Quaestiones in Heptateuchum 1128, in Hilbrands 2007, p. 83-84
- In Shinan et Zakovitch 1992, p. 31 & 36, cf. Hayward 1995, p. 221-222 & Hilbrands 2007, p. 61
- Liber interpretationis Hebraicorum nominum 11:21-22, in Hilbrands 2007, p. 82-83
- Contra Faustum XXII:86, cf. Hilbrands 2007, p. 112 qui nâindique pas lâĂ©tymologie & Blachman 2013, p. *** qui lâindique lorsquâelle passe en revue les paronomases midrashiques de GenĂšse Rabbati
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 18
- Tractatus 1.13:4, in Hilbrands 2007, p. 104 & Kamczyk 2018, p. 46-47
- Contra Faustum XXII:84, cf. Hilbrands 2007, p. 97
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 49
- Grelot 1999, p. 143-145 & 155
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 18, 63 & 70, Hilbrands 2007, p. 94
- De adulterinis coniugiis 2:12, cf. Hilbrands 2007, p. 98
- Traité I.13:5-6, cf. Hilbrands 2007, p. 104 & Kamczyk 2018, p. 48-50
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 73
- Traité I.13:7, in Hilbrands 2007, p. 104 & Kamczyk 2018, p. 50-51
- Traité 1.13:7-8, cf. Hilbrands 2007, p. 104
- Contra Faustum 22:85, cf. Hilbrands 2001, p. 112
- Kamczyk 2018, p. 45
- Tal 2016, p. 171* (sic)
- Onomasticon s.v. Ainan & De situ et nominibus locorum hebraicorum s.v Ănam, in Hilbrands 2007, p. 80-82
- Ambroise, Sur saint Luc III:17-19, Ă©dition Cerf 1956 cf. Hilbrands 2007, p. 87-89
- Hayward 1995, p. ***, Shinan et Zakovitch 1992, p. 91 & 133
- Commentaire sur Matt 1:3, in Hilbrands 2007, p. 89
- Traité I.13:4-8, cf. Hilbrands 2007, p. 105 & Kamczyk 2018, p. 51-53, 56-57
- Contra mendacium II.14:30, cf. Hilbrands 2007, p. 96
- Contra Faustum XXII:63-64 & 83-85, cf. Hilbrands 2007, p. 96-97 & 111-113
- Traité 1.13:9, in Kamczyk 2018, p. 52
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 108
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 115
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 120
- Dialogue avec Tryphon 86:6 & Traité 1.13:10, in Petit 1989, p. 150, Hilbrands 2007, p. 86-87 & 98-99, Descourtieux 2009, p. 369 & Kamczyk 2018, p. 53-54
- Expositio 3:20, cf. Hilbrands 2007, p. 108
- Contre Fauste XXII:86, in Hilbrands 2007, p. 113
- Cf. Kamczyk 2018, p. 58
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 135
- Traité I.13:12, cf. Kamczyk 2018, p. 57
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 139 & 143
- Adversus Jovinianum I.20 & In veteri via novam (Sancti Eusebii Hieronymi Epistulae, 123), cf. Sheridan et Oden 2002, p. 247 & Hilbrands 2007, p. 94-96
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 146
- Barr 1982
- Cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 150 & Barr 1982
- Traité I.13:12-13, in Hilbrands 2007, p. 105 & Kamczyk 2018, p. 58
- Cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 161 & 172
- De Penitentia II.8:73-77, in Hilbrands 2007, p. 93
- Augustin, Contra Faustum 691, in Hilbrands 2007, p. 112-113
- Tractatus 1,13,13 in Hilbrands 2007, p. 105-106
- Cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 190 & Barr 1982
- Cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 190, 194 & 199
- Apologia David 11-12 & Expositio 3:20-24, cf. Hilbrands 2007, p. 108-110
- Commodien, Instructiones, Livre premier, poĂšme 39, cf. Petit 1989, p. 149
- Petit 1989, p. 153-157
- Mircea Eliad, Dictionnaire des religions, Paris, Pocket, coll. « Agora », , 364 p. (ISBN 2-266-05012-5), p. 129.
- Cf. McGrath 1998, p. 17-24
- Cf. Brock 2002
- FolgerĂž 2017
- Constas 2021
- de Lange 2005
- Cf. Nikolsky 2021
- de Lange 2007, p. 277-278
- Freidenreich 2003, p. 353-4
- Sur lâimportance lâimage dans le judaĂŻsme de lâantiquitĂ© tardive, cf. (en) Israel L. Levin, Visual Judaism in Late Antiquity : Historical Contexts of Jewish Art, New Haven, Connecticut, Yale University Press, .
- Cf. Beach 1997
- Leone 2014
- Olav FolgerĂž 2017
- Meyer 2011, p. 989-991
- Elkhoury 2017, p. 15 & 24-25
- Brock 2002, p. 293-302
- Brock 2002, p. 304-306
- Notamment de Lange 2009, p. 404
- Atzmon 2009
- TanB Vayeshev 11:3, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 7
- TanB Vayeshev 8 & 12:1, comp. Tan Ki Tissa 22, ExR 42:3 & DtR 8:4 â Shinan et Zakovitch 1992, p. 4 & 7 & Reif 2009, p. 227-228
- ExR 15:27, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 64-65
- TanB Vayigash 10 & Tan Vayigash 9:3, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 8
- TanB Vayeshev 8 & 12, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 244-245 & Reif 2009, p. 228
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 109-110
- Reif 2009, p. 235
- TanB Vayeshev 17 & midrash inclus en préface, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 164-165 & Menn 1997, p. 224-225
- Cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 153 & 181 & Hayes 1995, p. ***
- Elizur 2007, p. 72-76
- Tan Ki Tetse 10 & TanB Vayeshev 13, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 125
- Selon Lieber 2010, p. 669 mais voir Shinan et Zakovitch 1992
- Lieber 2010, p. 668-676
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 23, 28, Blachman 2013, p. 214 (& voir 210)
- Elizur 1993, p. 138-140
- Elizur 1993, p. 46-48
- Cf. Hilbrands 2007, p. 127-128
- AgB 60 (124), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 8
- AgB 62-64 (127-129), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 8-9, 52 & 83
- ExR 30:19, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 153-4 & 181
- DeutR (Ă©d. Lieberman) p. 72, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 181
- AgB 27 (55), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 126
- Midrash Tehillim 101:2, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 104
- Mishnat Rabbi Eliezer 15, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 181-182
- AgB 38 (67), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 183
- EstR 7:11, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 190-191
- AgB 63 (129), cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 200
- Shinan et Zakovitch 1992, p. 89
- Rashbam s.v. Gn 38:21, cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 91 & 97
- Freidenreich 2003, p. 368-372, cf. Friedman 1990, p. 57 & sq.
- Blachman 2013, p. 223-4
- Meri et Bacharach 2006, p. 646-7
- Golstein 2011, p. 92-93 & 189-190
- Zoref 2016
- Cf. Friedman 1990 & Erder 1994 ; sur la mĂ©thode exĂ©gĂ©tique de Yefet, et son rapport aux sources rabbiniques ainsi quâĂ Saadia Gaon, voir (en) Michael Wechsler, The Arabic Translation and Commentary of Yefet ben 'Eli the Karaite on the Book of Esther : Edition, Translation, and Introduction, Brill, coll. « Karaite Texts and Studies / Ătudes sur le judaĂŻsme mĂ©diĂ©val » (no 1), (ISBN 978-904743236-4), p. 58-70
- Zoref 2016, p. ***
- Etzion 2010
- Lawee 2007
- Cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 10 & 12-13
- Cf. Shinan et Zakovitch 1992, p. 12
- Cf. Petit 1987, p. 102 qui attribue erronĂ©ment lâopinion de Rachi au Talmud mĂȘme
- TB Yevamot 64b, cf. Blachman 2013, p. 184-5
- Bitton 1978
- Voir, (en) The Tzemach Tzedek and The Haskalah Movement. From the Diary of Rabbi Yosef Yitzchk of Lubavitch. Translated by Rabbi Zalman I. Posner. Kehot Publication Society, Brooklyn, New York, 2015. 145 pages, p. 73. (ISBN 9780826608024)
- Christoph Uehlinger, Introduction Ă l'Ancien Testament, p. 248
- Rendsburg 1986
- Noble 2002
- Halpern-Amaru 1999, p. 115
Annexes
Ăpoque biblique
- ParallĂšles entre GenĂšse 38 et Juges 14-16, dâaprĂšs Shinan et Zakovitch 1992, p. 229-230 mais voir Noble 2002, p. 228-230
GenĂšse 38 Juges 14-16 II arriva, en ce temps-lĂ , que Juda descendit de ses frĂšres [âŠ]. LĂ , Juda vit la fille d'un CananĂ©en [âŠ] il lâĂ©pousa [âŠ] (Gn 38:1-2) Samson, Ă©tant descendu un jour Ă Timna, y vit une femme entre les filles des Philistins [âŠ] Je dĂ©sire que vous me la procuriez pour Ă©pouse." (Jg 14:1-2) La fille du CananĂ©en est innommĂ©e La fille du Timnite est innommĂ©e Juda Ă©loigne sa belle-fille de son promis, provoquant son passage Ă lâacte (Gn 38:11 & 14) Samson est Ă©loignĂ© par son beau-pĂšre de sa promise, provoquant son passage Ă lâacte (Jg 15:1-2) Quand Juda fut consolĂ©, il monta [âŠ] Ă Timna (Gn 38:12) Samson, Ă©tant descendu [âŠ] Ă Timna⊠(Jg 14:1) [AprĂšs la mort de son Ă©pouse], Juda [âŠ] la prit pour une prostituĂ©e [et se dĂ©tourna vers elle] (Gn 38:15-16) [AprĂšs la mort de son Ă©pouse], Samson [âŠ] y remarqua une prostituĂ©e et se rendit auprĂšs dâelle (Jg 16:1) Juda envoya le chevreau (Gn 38:20) Samson [âŠ] lui apporta un chevreau (Jg 15:1) Tamar [emmenĂ©e depuis la maison de son pĂšre] manque de mourir brĂ»lĂ©e (Gn 38:24) La femme de Samson, fille du Timnite, pĂ©rit brĂ»lĂ©e [avec son pĂšre] (Jg 15:6) - ParallĂšles entre GenĂšse 38 et 1 Samuel 1, dâaprĂšs S. Klitsner,
GenĂšse 38 1 Samuel 1 [âŠ] afin de ne pas donner de (litt.) semence Ă son frĂšre (GenĂšse 38:9) Si tu donnes [âŠ] une (litt.) semence » - I Sam. 1:11 (1 Sam. 1:11) Juda a deux fils dĂ©voyĂ©s (Er et Onan) dont il ne semble pas voir les torts et qui meurent de la main de Dieu. Eli a deux fils dĂ©voyĂ©s (Hofni et Pin'has) dont il ne semble pas voir les torts et qui meurent de la main de Dieu. Juda dit Ă Tamar de demeurer en la maison de son pĂšre jusquâĂ ce que lâenfant (ChĂȘla) devienne assez grand pour se marier (GenĂšse 38:11) Hanna demande Ă Elkana de demeurer Ă RamataĂŻm-Ăofim jusquâĂ ce que lâenfant (Samuel) soit sevrĂ© (1 Samuel 1:23). [Juda] (litt.) la crut prostituĂ©e (GenĂšse 38:15) Eli la crut ivre (1 Sam. 1:13) Il est en outre possible que « [Dieu tâaccorde] (litt.) ta requĂȘte » (1 Sam. 1:17) â Ă©crit sous la forme dĂ©fective shelatekh, inemployĂ©e ailleurs dans la Bible â soit une autre rĂ©fĂ©rence Ă ChĂȘla bien que plusieurs manuscrits comportent la forme pleine sheĂ«latekh - ParallĂšles entre GenĂšse 38 et Ruth, dâaprĂšs Zakovitch 1990 et Shinan et Zakovitch 1992, p. 224
GenĂšse 38 Ruth Juda descend Ă Adoullam Ălimelech et NoĂ©mi partent sâinstaller en terre Ă©trangĂšre Juda devient veuf NoĂ©mi devient veuve Juda dit Ă Onan de venir Ă sa belle-sĆur afin de donner un enfant Ă Er (GenĂšse 38:8) NoĂ©mi prie Ruth de rejoindre sa belle-sĆur partie chez ses parents (Ruth 1:15) Juda dit Ă Onan de venir Ă Tamar afin de constituer une postĂ©ritĂ© Ă ton frĂšre (GenĂšse 38:8) Boaz dit au parent quâen acquĂ©rant le champ de NoĂ©mi, il acquiert aussi Ruth, la femme du dĂ©funt, pour maintenir le nom du dĂ©funt Ă son patrimoine (Ruth 4:5) Onan dĂ©truit sa semence, ne voulant pas donner de postĂ©ritĂ© Ă son frĂšre (GenĂšse 38:9) Le parent ne veut pas prendre Ruth sous peine de (litt.) dĂ©truire [s]on patrimoine (Ruth 4:6). Juda renvoie Tamar chez son pĂšre jusquâĂ ce que ChĂȘla grandisse (GenĂšse 38:11) NoĂ©mi veut renvoyer Ruth et Orpa dans leur famille, arguant quâelles ne peuvent demeurer veuves jusquâĂ ce que dâĂ©ventuels futurs fils de NoĂ©mi fussent devenus grands (Ruth 1:13) Tamar attend dâĂȘtre mariĂ©e Ă ChĂȘla en vertu de la coutume du lĂ©virat (GenĂšse 38:11-14) Ruth demande Ă ĂȘtre mariĂ©e en vertu de la coutume du rachat (Ruth 3:9) Enfin, les deux femmes sâunissent Ă un homme sensiblement plus ĂągĂ© quâelles qui nâest de surcroĂźt pas celui qui devait leur Ă©choir (ChĂȘla/le parent innommĂ©). - ParallĂšles directs et inversĂ©s entre GenĂšse 38 et 2 Samuel 11, dâaprĂšs Rendsburg 1986, Shinan et Zakovitch 1992, p. 226-228, Zakovitch 1995, p. 51-53, Shinan et Zakovitch 2009, p. 133 et Bazak 2013, p. 144-148
GenĂšse 38 2 Samuel 11-12 Le protagoniste principal de GenĂšse 38 est Juda, fondateur de la tribu qui porte son nom Le protagoniste principal de 2 Samuel 11-12 est David, fondateur de la dynastie qui porte son nom Bat Choua, Ă©tant la fille dâun CananĂ©en, nâest pas une IsraĂ©lite Bat Cheva, Ă©tant la femme dâUrie le Hittite, nâest (vraisemblablement) pas une IsraĂ©lite Bat Choua est lâĂ©pouse de Juda depuis le dĂ©but de lâhistoire Bat Cheva nâĂ©pouse David quâĂ la fin de lâhistoire Er [âŠ] ayant dĂ©plu aux yeux de YHWH [âŠ] ce que fit [Onan] dĂ©plut aux yeux de YHWH (GenĂšse 38:7-10) Lâaction commise par David dĂ©plut aux yeux de YHWH (2 Samuel 11:27) Er et Onan meurent par leurs propres fautes (GenĂšse 38:7-10) Le fils (naÊżar) innommĂ© meurt par la faute de ses parents (2 Samuel 12:15-18) Il se rendit mauvais aux yeux (vayera be-einei) de Dieu et Il le fit mourir lui aussi (GenĂšse 38:10) [âŠ] Parle ainsi Ă Joab : (litt.) que cette chose ne soit pas mauvaise Ă tes yeux (al yera be-eineikha hadavar - 2 Samuel 11:25) Tamar (litt.) sâen alla et retourna Ă la maison de son pĂšre [car Juda ne veut pas quâelle ait de rapports avec son fils] (GenĂšse 38:11) BethsabĂ©e retourna dans sa maison [aprĂšs avoir eu des rapports avec David] (2 Samuel 11:4) Tamar se fait passer pour une qdesha (cf. GenĂšse 38:21) BethsabĂ©e se sanctifie (mitqadeshet) de son impuretĂ© avant de venir Ă David (2 Samuel 11:4) Tamar a des rapports avec Juda alors quâelle est lĂ©galement liĂ©e Ă ChĂȘla BethsabĂ©e a des rapports avec David alors quâelle est lĂ©galement liĂ©e Ă Urie Juda ignorait que ce fĂ»t sa belle-fille (GenĂšse 38:16) David sait que BethsabĂ©e, la fille dâEliam, [est] lâĂ©pouse d'Urie le HĂ©thĂ©en (2 Samuel 11:3) Juda ne cherche Ă sâinformer sur la prostituĂ©e quâaprĂšs leurs rapports (GenĂšse 38:21) David sâinforme sur la belle femme avant leurs rapports (2 Samuel 11:3) Apprenant la grossesse de Tamar, Juda veut la faire (injustement) exĂ©cuter (GenĂšse 38:24) Apprenant la grossesse de BethsabĂ©e, David fait (injustement) exĂ©cuter Urie (2 Samuel 11:15) [âŠ] elle envoya dire Ă son beau-pĂšre: "Je suis enceinte [âŠ]" (ani hara - GenĂšse 38:25) [âŠ] elle envoya dire Ă David: "Je suis enceinte" (hara anokhi - 2 Samuel 11:5) Juda reconnaĂźt quâ« elle est plus juste que moi car je ne lâai pas donnĂ©e Ă ChelĂą mon fils » (GenĂšse 38:26) David reconnaĂźt que « jâai pĂ©chĂ© envers YHWH » (2 Samuel 12:13) Juda cessa de connaĂźtre [Tamar] (GenĂšse 38:26) David fit amener [BethsabĂ©e] dans sa demeure [et] la prit pour femme (2 Samuel 11:27)
Ăpoque antique
- DiffĂ©rences entre les versions massorĂ©tique et samaritaine de GenĂšse 38, dâaprĂšs Tal et Florentin 2010, p. 159-162 :
verset texte massorĂ©tique et traduction du Rabbinat texte samaritain dâaprĂšs lâĂ©dition Tal et Florentin 2010, transcription dâaprĂšs Ben-Hayyim 1975 Explications et remarques, dâaprĂšs Shinan et Zakovitch 1992 38:3 vayikra (« il » lâappela Er) wtiqra (« elle » lâappela ÊżĂ r) Harmonisation du verset avec les deux suivants. 38:5 vehaya biKhziv (« et il se trouvait Ă Kezib ») wyÄÌÊŸi afKazzÄ«ba (« et il Ă©tait Ă Kaziba ») WyÄÌÊŸi: harmonisation avec les constructions verbales prĂ©cĂ©dentes qui font usage du waw conversif (wtÄÌsÉf ⊠wtÄÌlĂ„d ⊠wtiqra)
Kaziba: Shinan et Zakovitch font remarquer quâil sâagit de la mĂȘme forme quâen I Chroniques 4:22 (Kozeba).38:10 asher assa (« ce quâil avait fait ») it ÄĆĄĂ„r ÊżÄĆĄa (« ce quâil avait fait ») Les Samaritains prĂ©sentent une propension Ă ajouter la prĂ©position it pour marquer lâaccusatif. On retrouve cependant un Ă©quivalent aramĂ©en de cette version dans le Targoum des NĂ©ophytes. 38:12 Êżal gozezei tsono (litt. « sur les tondeurs de son troupeau ») al gÄÌzÄÌzi áčŁÄÊŸĆ«nu (« vers les tondeurs de son troupeau ») Le al samaritain est lâĂ©quivalent du el hĂ©braĂŻque (« vers »). Selon Shinan et Zakovitch, la version samaritaine dont on retrouve un Ă©quivalent dans la Peshitta, semble plus naturelle que la version massorĂ©tique et pourrait reflĂ©ter la lecture originelle, Ă moins que les deux versions ne reprĂ©sentent les variations dâun verset qui aurait portĂ© lĂšgozezei (« vers les tondeurs » [de son troupeau]) ou lĂšgozez (« pour tondre » [son troupeau]). 38:13 vayougad lĂšTamar (litt. « il fut dit Ă Tamar ») wyiggĂ„d alTÄÌmĂ„r kaltu (litt. « il fut dit Ă Tamar sa bru ») Cet ajout, que lâon retrouve aussi dans la Septante, pourrait rĂ©sulter dâune harmonisation avec le verset 38:11. 38:14 vatekhas batsaÊżif (litt. « elle couvrit dâun voile ») wtitkassi afâáčŁÄ«f (« elle se couvrit dans un voile ») Le verbe est dĂ©clinĂ© Ă la forme hitpaĂ«l qui indique la rĂ©flexivitĂ©, comme en Gn 24:65. La prĂ©sence dâune forme rĂ©flexive dans les Targoumim aramĂ©ens et la Peshitta suggĂšre que câest cette version qui figurait dans le texte proto-massorĂ©tique mais inversement, tous pourraient avoir cherchĂ© Ă harmoniser le verset de Gn 38 avec celui de Gn 24. 38:21 ÊżĂštt anshei mĂšqoma ⊠ayĂš hakdesha hi ([il demanda] « aux gens de litt. son lieu ⊠oĂč est la prostituĂ©e qui etc. ») ÊŸit ÄnÄÌĆĄi ammÄÌqom ⊠ayye aqqÄdÄ«ĆĄa ÄÌÊŸÄ« ([il demanda] « aux gens du lieu ⊠oĂč est cette prostituĂ©e qui ») Les variantes du texte samaritain semblent avoir voulu lever les difficultĂ©s du texte massorĂ©tique qui parle de « son lieu » (Ă la prostituĂ©e) alors quâelle nâen Ă©tait pas originaire. La convergence du texte samaritain avec dâautres tĂ©moins dont la Septante, les Targoumim judĂ©ens et la Peshitta pourrait suggĂ©rer lâexistence dâune autre version, commune Ă ces tĂ©moins. 38:24 vayehi kemishlosh hodashim ⊠hara liznounim (litt. « environ trois mois plus tard ⊠elle a engendrĂ© des prostitutions ») wyÄÌÊŸi kÄÌmiĆĄĆĄÄlÄÌĆĄat ÄÌdÄĆĄÉm ⊠ÄÌrĂ„ alzÄÌnÉm (litt. « environ trois mois plus tard ⊠elle a engendrĂ© de prostituĂ©s ») KamiĆĄĆĄÄlaĆĄat - accord grammatical entre ĆĄÄlaĆĄ (fĂ©minin) et ÄÌdÄĆĄÉm (masculin)
AlzÄÌnÉm - correction pour indiquer le responsable de la procrĂ©ation plutĂŽt quâun concept gĂ©nĂ©ral moins immĂ©diat.38:25 lemi hahotemet vehaptilim (« Ă qui sont ce sceau, ces cordons ») almi ÄÌÊżÄtÉm waffÄÌtÉl (« Ă qui sont ce sceauâ ce cordon ») ÊżÄtÉm et fÄÌtÉl sont harmonisĂ©s avec le verset 38:18 38:26 tzadka mimeni (litt. « Elle a eu plus raison que moi ») áčŁÄÌdÄ«qa mimminni (« Elle est plus juste que moi ») Tradition de vocalisation diffĂ©rente dâun mĂȘme texte consonantique (Tal et Florentin 2010, p. 650) 38:28 zĂš yatsa rishona (litt. « celui-ci est sorti en premier ») zÄ yiáčŁáčŁĂ„ rÄÌÊŸÄ«ĆĄon (« celui-ci est sorti le premier ») Rishona se rapporte au verbe tandis que rÄÌÊŸÄ«ĆĄon est attribut du sujet zĂš (« celui-ci »), peut-ĂȘtre par harmonisation avec Gn 38:25 38:29 ma paratsta aleikha paretz vayikra shemo Pharetz (« "Comme tu as fait une brĂšche pour toi", et il lâappela Pharetz ») ma fÄÌrĂ„áčŁta ÊżÄlÄ«nu fÄÌrĂ„áčŁ wtiqra it ĆĄÄmu FÄÌrĂ„áčŁ (« "Comme tu as fait une brĂšche vers nous", et elle lâappela Faras ») ÊżÄlÄ«nu - tentative de faciliter la lecture.
Wtiqra - la forme fĂ©minine apparaĂźt aussi dans certains manuscrits hĂ©braĂŻques des Targoumim aramĂ©ens et la Peshitta.38:30 vĂšaâhar yatza ⊠vayikra wÄÌâĆ«ri kan yÄÌáčŁĂ„ ⊠wtiqra WÄÌâĆ«ri kan - version diffĂ©rente ou tentative dâallĂ©vier la lecture.
Wtiqra - cf. verset prĂ©cĂ©dent et Gn 38:3-5 - DiffĂ©rences entre les versions massorĂ©tique et grecque de GenĂšse 38, dâaprĂšs Zipor 2006 :
verset texte massorĂ©tique et traduction du Rabbinat, dâaprĂšs les remarques du Daat Mikra Septante, traduction Giguet, dâaprĂšs les remarques de Zipor 2006 Explications et remarques, dâaprĂšs Wevers 1993 et Brayford 2007 38:1 Juda⊠s'achemina vers un homme [important] d'Adoullam, nommĂ© Hira. Judas⊠sâen alla (litt. « sâĂ©loigna jusque ») chez un Odollamite, dont le nom Ă©tait Hiras Traduction dâaprĂšs ad, (litt.) « vers » ou « jusquâà » (Shinan et Zakovitch 1992, p. 1) 38:2 LĂ , Juda vit la fille dâun CananĂ©en, appelĂ© Choua Judas vit lĂ une fille de ChananĂ©en, appelĂ©e SuĂ© Choix des traducteurs, propre Ă la Septante (Shinan & Zakovitch suggĂšrent lâinfluence de Gn 38:6, « oushma Tamar »). OrigĂšne ajoute dâailleurs tugater (« fille de ») sous un astĂ©risque avant Saua dans les Hexaples. 38:3 ⊠un fils, Ă qui il donna le nom dâEr ⊠un fils quâelle nomma Her InterprĂ©tation dâaprĂšs les versets suivants, oĂč la mĂšre nomme les deux enfants 38:5 ⊠Il Ă©tait Ă Kezib lorsquâelle lâenfanta ⊠elle habitait Chasbi lorsquâelle les enfanta John W. Wevers penche pour une erreur de copiste dans la version massorĂ©tique mais Shinan et Zakovitch 1992, p. 35-42 & 209 la jugent au contraire prĂ©fĂ©rable du fait dâI Chroniques 4:21, oĂč ChelĂą et Kezib sont spĂ©cifiquement associĂ©s 38:7 ⊠Er⊠fut mauvais aux yeux de YHWH et YHWH le fit mourir ⊠Her⊠fut mĂ©chant devant Kurios et Theos (Elohim) le fit mourir La malice dâEr ne portant pas sur un point de loi assignĂ© Ă la seule nation israĂ©lite mais sur la relation « gĂ©nĂ©rale » entre lâhomme et Dieu, elle nĂ©cessite une rĂ©tribution divine « gĂ©nĂ©rale » du Theos qui rĂšgne sur le monde et non du seul Kurios dâIsraĂ«l 38:8 veyabbem ota (« fais avec elle le yibboum ») gambreusai (« agis avec elle en beau-frĂšre ») Le mariage lĂ©virat est une institution sĂ©mite, inconnue dans le monde hellĂšne, et le traducteur doit ressortir Ă un nĂ©ologisme façonnĂ© sur le terme gambros (membre de la belle-famille) 38:9 veshiâhĂšt artsa et zarÊżo (« il corrompait sa semence au sol ») exĂ©cheen epi tĂšn guen (« il rĂ©pandait sa semence au sol ») Traduction dâaprĂšs artsa, (litt.) « vers le sol » 38:10 Ce quâil avait fait fut mauvais aux yeux de YHWH Il parut mĂ©chant aux yeux de Theos pour avoir fait cela Cf. Gn 38:7 ; la seconde clause est une traduction diffĂ©rente dâaĆĄer aĆa (« ce quâil avait fait ») 38:12 Longtemps aprĂšs mourut la fille de Choua, femme de Juda. Quand Juda se fut consolĂ©, il alla⊠avec Hira son ami l'Adoullamite Les jours sâĂ©coulĂšrent et SuĂ©, femme de Juda, mourut. AprĂšs que Judas se fut consolĂ©, il sâen alla avec Hiras, son pĂątre Odollamite Cf. Gn 38:2 ; la lecture roĂ«hou est liĂ©e au contexte dâune fĂȘte de la tonte des ovins 38:13 On informa Tamar (litt. « Il fut dit Ă Tamar ainsi ») Des gens dirent Ă Thamar, sa bru⊠Ajout « des gens » pour transformer une phrase passive en active et faire ressortir que câest Ă Tamar quâon sâadresse 38:14 ⊠car elle voyait que ChĂȘla avait grandi et quâelle ne lui avait pas Ă©tĂ© donnĂ©e pour Ă©pouse ⊠car elle voyait que SĂ©la avait grandi et que Judas ne la lui faisait point prendre pour femme Divergence de tradition de lecture entre la Massore, qui lit le h-w-ÊŸ du texte consonantique comme un hi (« elle »), et la Septante, qui le lit hou (« il »), voir aussi sâĂ©crit il, se lit elle ; la Septante ajoute alors « Ioudas » afin de clarifier la lecture car Juda nâest pas mentionnĂ© dans la clause prĂ©cĂ©dente 38:15 ⊠car elle avait voilĂ© son visage ⊠car elle avait voilĂ© sa figure et il ne la reconnut pas Wevers considĂšre lâajout comme superflu et signale que câest lâavis des Hexaples qui placent le bout de phrase sous un obĂšle ; voir cependant Huddlestun 2001 38:18 ⊠ton sceau (hotamkha), ton cordon (ptilekha) et ton bĂąton ⊠ta bague (daktulion), ton collier (ormiskon) et ton bĂąton Aquila de Sinope rend plus fidĂšlement hotam par sfragida ; quant Ă ormiskon, le traducteur a compris le ptil comme une cordelette ou chaĂźnette attachant le sceau 38:23 ⊠Qu'elle garde ce qu'elle a et que nous n'ayons pas Ă rougir ; car enfin, j'ai envoyĂ© ce chevreau et tu nâas pu la trouver ⊠Quâelle retienne les gages mais que lâon se garde de nous faire des reproches : car j'ai envoyĂ© le chevreau et tu nâas point trouvĂ© la personne Le « mais » amplifie le contraste ; Wevers, suivi par Brayford, suggĂšre en outre de lire « jâai [pour ma part] envoyĂ© le chevreau mais [quant Ă toi, ] tu nâas pas trouvĂ© la personne » 38:26 ⊠Elle est plus juste que moi⊠⊠Thamar est plus juste (litt. : a Ă©tĂ© plus justifiĂ©e) que moi⊠Transformation dâune phrase active en passive afin de mieux rendre le sens 38:29 ⊠(litt.) Comme tu tâes fait une brĂšche ! ⊠Pourquoi est-ce toi qui as rompu la clĂŽture? LâinterprĂ©tation Ă©tymologique du nom de lâancĂȘtre davidique avancĂ©e dans le texte massorĂ©tique, Perets-La BrĂšche, se perd dans la traduction en grec et les auteurs de la Septante prĂ©fĂšrent se figurer une cĂ©sarienne â le ventre est une clĂŽture quâon a dĂ» couper pour faire naĂźtre PharĂšs ; Aquila a traduit plus fidĂšlement. - DiffĂ©rences entre le texte massorĂ©tique de GenĂšse 38, le Targoum Onkelos (ci-aprĂšs TO), le Targoum des NĂ©ophytes (ci-aprĂšs TN), les divers targoumim fragmentaires (TF, TG et TT dâaprĂšs la nomenclature du CAL: FT - Fragmentary Targum, GT - Geniza Targum, TT - Tosefta Targum) et le Targoum attribuĂ© Ă Jonathan ben Ouzziel (ci-aprĂšs TPJ) :
verset texte massorĂ©tique et traduction du Rabbinat TO, traduction dâaprĂšs Grossfeld 1988 TN, traduction dâaprĂšs McNamara 1992 Targoumim fragmentaires et supplĂ©mentaires, Ă©dition Klein 1980 & Klein 1986, traduction dâaprĂšs McNamara 1992 TPJ, traduction Le DĂ©aut et Robert 1978 et dâaprĂšs Maher 1992 Explications et remarques dâaprĂšs les mĂȘmes, ainsi que Shinan et Zakovitch 1992, Grossfeld 2000 & Blachman 2013 38:1 ⊠Juda descendit de ses frĂšres et ⊠alla (litt.) jusquâun homme adoullamite ⊠dĂ©via vers un homme adoullamite ⊠dĂ©via vers un homme adoullamite N/A ⊠Juda descendit de sa fortune et se sĂ©para de ses frĂšres, et il dĂ©via vers un homme adoullamite Le TPJ combine deux lectures de vayered (« il descendit »): la premiĂšre est financiĂšre, se base sur Gn 37:26 et ne se retrouve dans aucun midrash connu, la seconde rend vayered comme vayipared (« il se sĂ©para »).
Les targoumim lisent tous vayet (litt. « il tendit ») comme vayesáč (« il dĂ©via »), subtilement plus pĂ©joratif. Ils emploient par ailleurs lewat qui traduit el plutĂŽt quâÊżad (« jusque »), sous lâinfluence de Gn 38:16 dâune part et, dâautre part, parce que lâÊżad du texte hĂ©breu â qui permet une allitĂ©ration avec Adoullam(ite), reproduite en MichĂ©e 1:15 â nâindique en aramĂ©en quâune limite temporelle mais non spatiale â Shinan et Zakovitch 1992, p. 1-2 & (en) « ÊżAd et levat », sur CALP ; sur la duplication ou triplication des interprĂ©tations targoumiques, cf. (en) Michael Carasik, « Syntactic Double Translation in the Targumim », dans Aramaic in Postbiblical Judaism and Early Christianity, Winona Lake, Indiana, Eisenbrauns, (lire en ligne), p. 217-231.38:2 ⊠la fille dâun homme canaanite ⊠il la prit ⊠la fille dâun homme de commerce ⊠il la prit ⊠la fille dâun homme canaanite ⊠il la prit N/A ⊠la fille dâun homme de commerce ⊠et il la convertit et vint Ă elle La version « commerçant » est attestĂ©e dans les manuscrits J, A, B & E du TO mais le Taj porte Kenaani sans interpolation, comme le TN. Cette tradition est abondamment reprĂ©sentĂ©e dans le Midrash et sera explicitĂ©e dans le Talmud de Babylone â Grossfeld 1988, p. 128-129, Shinan et Zakovitch 1992, p. 17-18 & SmilĂ©vitch.
« Il la convertit etc. » dĂ©note dâun mĂȘme souci apologĂ©tique, et prĂ©sente deux interprĂ©tations contradictoires (cf. Shinan 1985, Maher 1992, p. 127n4 & Blachman 2013, p. 86), Ă moins que le traducteur ne joue sur lâassonance entre tagar (« commerce ») et ouggiyera (« et il la convertit ») (Shinan et Zakovitch 1992, p. 18)38:3-5 ⊠et il lâappela ÊżEr ⊠elle lâappela Onan ⊠ChĂȘla, et il Ă©tait Ă Kezib lorsquâelle lâenfanta ⊠et il lâappela ÊżEr ⊠elle lâappela Onan ⊠ChĂȘla, et il Ă©tait Ă Khzev lorsquâelle lâenfanta ⊠et elle lâappela ÊżEr ⊠elle lâappela Onan ⊠ChĂȘla, et elle cessa [dâengendrer] aprĂšs quâelle lâenfanta (TF P) Et il Ă©tait Ă Kezib - et il Ă©tait Ă MapÌseqa (« Interruption »)
(TF V) Et il Ă©tait Ă Pasqat⊠et elle lâappela ÊżEr car il mourrait sans enfants ⊠elle lâappela Onan car son pĂšre prendrait en effet le deuil pour lui ⊠ChĂȘla, car son mari lâavait oubliĂ©e, et il Ă©tait Ă Pasqat lorsquâelle lâenfanta « Il/elle lâappela »: la version h du TO porte le fĂ©minin, comme le TPJ, le TN et BR 85:4.
Le TPJ propose dâexpliquer le destin des fils de Juda au moyen de diverses paronomases, ÊżEr - Êżariri (« seul », au sens de « sans hĂ©ritier »), Onan - ÊŸanina (« chagrin ») et ChĂȘla - ĆĄely (« abandonner » ou « nĂ©gliger ») â Grossfeld 1988, p. 128, Maher 1992, p. 128 & Shinan et Zakovitch 1992, p. 27, 31 & 35-36
Les TN et TPJ ainsi que les deux TF ont ensuite appliquĂ© le mĂȘme traitement Ă Kezib, et traduit la racine k-z-b, qui marque le tarissement puis lâarrĂȘt, par son Ă©quivalent aramĂ©en p-s-q (cf. IsaĂŻe 58:11, JĂ©rĂ©mie 15:18 et le Targoum Jonathan sur ces deux versets) ; le TN en a fait un verbe dâaction tandis que les autres lui ont conservĂ© sa fonction toponymique, cf. BR 85:4 â Maher 1992, p. 128, McNamara 1992, p. 174, Shinan et Zakovitch 1992, p. 35-36 & Grossfeld 2000, p. 244-24538:6 ⊠et son nom Ă©tait Tamar ⊠et son nom Ă©tait Tamar ⊠et son nom Ă©tait Tamar N/A ⊠la fille de Sem le Grand, et son nom Ă©tait Tamar La prĂ©cision du TPJ, « fille de Sem le Grand », est un ajout mi-exĂ©gĂ©tique (cf. Gn 38:24 & TPJ ad loc.), mi-homilĂ©tique car lâascendance du roi David ne comporte aucun idolĂątre, mĂȘme dans la lignĂ©e non-israĂ©lite â Maher 1992, p. 128 & Shinan et Zakovitch 1992, p. 43 38:7 ÊżEr fut ⊠mauvais aux yeux de YHWH et YHWH le tua ÊżEr fut ⊠mauvais devant YVY et YVY le tua ÊżEr ⊠fit de mauvaises choses devant YYY, et il mourut par dĂ©cret de devant YYY N/A ÊżEr fut ⊠mauvais devant YYY car il ne (litt.) servait pas avec sa femme selon les voies de la terre/ne donnait pas sa semence Ă sa femme, et la colĂšre de YYY (litt.) lâattaqua et YYY le tua Le verset pose plusieurs dĂ©fis thĂ©ologiques que les targoumim, et en particulier le TN, se font un devoir dâaplanir: il traduit « fut mauvais » par « fit de mauvaises choses » pour justifier la dĂ©cision divine qui pourrait paraĂźtre arbitraire, et le TPJ Ă©taie Ă son tour ces « mauvaises choses » en deux versions, la premiĂšre figurant dans les Ă©ditions imprimĂ©es, la seconde dans les manuscrits, et toutes deux sont, bien quâallusives, plus explicites que le TN. Les targoumim Ă©liminent ensuite lâanthropomorphisme « yeux de Dieu », et la mention en vain du nom divin Ă quatre lettres par les abrĂ©viations YVY et YYY. Enfin, lâacte divin nâest plus, dans le TN, quâun dĂ©cret â Grossfeld 1988, p. 128-129, Maher 1992, p. 128, McNamara 1992, p. 175, Shinan et Zakovitch 1992, p. 48-49 & Grossfeld 2000, p. 245 38:8 ⊠et (litt.) Ă©riges une semence Ă ton frĂšre ⊠et Ă©lĂšves une semence Ă ton frĂšre ⊠et Ă©lĂšves une semence de fils pour le nom de ton frĂšre N/A ⊠et Ă©lĂšves une semence au nom de ton frĂšre Selon les TN et TPJ, le premier fils nĂ© du mariage lĂ©virat doit porter le nom de son oncle mort, « afin que son nom ne soit pas effacĂ© dâIsraĂ«l. » Le TN ajoute par ailleurs « [semence de] fils » (forme plurielle) et au verset suivant, « semence » est remplacĂ© dans ce targoum par « des fils, » peut-ĂȘtre sous lâinfluence de la fin du rĂ©cit â Grossfeld 1988, p. 129, Maher 1992, p. 128, McNamara 1992, p. 175 & Shinan et Zakovitch 1992, p. 58, 62-63 ; sur lâimportance du nom dans lâimaginaire israĂ©lite et son rĂŽle dans la survie post-mortem, cf. J. Levenson, citĂ© in Jacqueline Vayntrub, « Like Father, Like Son: Theorizing Transmission in Biblical Literature », Hebrew Bible and Ancient Israel, Mohr Siebeck, vol. 7, no 4,â (ISSN 2192-2276, lire en ligne, consultĂ© le ). 38:9 ⊠que la (litt.) semence ne serait pas Ă lui ⊠et il corrompait Ă terre pour ne pas donner de semence Ă son frĂšre ⊠que la semence ne serait pas appelĂ©e Ă son nom ⊠et il corrompait sa voie sur la terre pour ne pas Ă©riger de semence Ă son frĂšre ⊠que les fils ne seraient pas appelĂ©s Ă son nom ⊠il corrompait ses Ćuvres sur la terre pour ne pas Ă©riger de fils au nom de son frĂšre N/A ⊠que les fils ne seraient pas appelĂ©s Ă son nom ⊠il corrompait ses Ćuvres sur la terre pour ne pas Ă©riger de fils au nom de son frĂšre Le TPJ effectue ici les mĂȘmes choix que le TN, et ils ajoutent ainsi que le TO un complĂ©ment dâobjet que le texte hĂ©breu ne prĂ©cise pas (le TO indique « sa voie », sous lâinfluence de Gn 6:12 et les autres « ses Ćuvres », dâaprĂšs Sophonie 3:7). Tous rendent la racine n-t-n par q-w-m, en raison de Gn 38:8 (haqem) ou Dt 25:6-7 qui utilise abondamment la racine q-w-m â Grossfeld 1988, p. 129, Shinan et Zakovitch 1992, p. 62-63 38:10 (litt.) Et ce fut mauvais aux yeux ⊠et il le fit mourir lui aussi Et ce fut mauvais devant ⊠et il le fit mourir lui aussi Et ce fut mauvais devant [mot manquant?] ce ⊠et il mourut lui aussi par dĂ©cret de devant YYY N/A Et ce fut mauvais devant ⊠et il mit un terme Ă ses jours Les targoumim reproduisent leurs choix de Gn 38:7, le TN omettant mĂȘme le nom divin mais il pourrait sâagir dâune haplographie (qdam Y[YY y]at).
Le TPJ traduit la fin du verset par « mit un terme », indiquant la mort prĂ©maturĂ©e des fils de Juda ; cette tradition inconnue a peut-ĂȘtre Ă©tĂ© dictĂ©e par un midrash aujourdâhui disparu â McNamara 1992, p. 175,Shinan et Zakovitch 1992, p. 6938:11 ⊠(litt.) la maison de ton pĂšre jusquâĂ ce que grandisse ChelĂą mon fils car il disait âde crainte quâil ne meure lui aussi comme ses frĂšresâ ⊠elle retourna/demeura dans la maison de son pĂšre ⊠la maison de ton pĂšre jusquâĂ ce que grandisse ChelĂą mon fils car il disait âpeut-ĂȘtre mourra-t-il lui aussi comme ses frĂšresâ ⊠elle retourna/demeura dans la maison de son pĂšre ⊠(litt.) sa maison Ă ton pĂšre jusquâau temps oĂč grandira ChelĂą mon fils car il disait âquâil ne meure pas lui-mĂȘme comme ses frĂšresâ ⊠elle retourna/demeura dans (litt.) sa maison de son pĂšre N/A ⊠la maison de ton pĂšre jusquâĂ ce que grandisse ChelĂą mon fils car il disait âpeut-ĂȘtre mourra-t-il lui aussi comme ses frĂšresâ ⊠elle retourna/demeura dans la maison de son pĂšre Les targoumim font usage dâaccommodements divers avec le judĂ©o-aramĂ©en (dilmaÊŸ/deloÊŸ) pour exprimer les craintes de Juda (Shinan et Zakovitch 1992, p. 73) 38:12-13 ⊠mourut Bat Choua/la fille de Choua ⊠lui et Hira son ami ⊠à Timna ⊠mourut Bat Choua ⊠lui et Hira son compagnon ⊠à Timnat ⊠mourut la fille de Choua ⊠lui et Hira son compagnon ⊠à Timnata N/A ⊠mourut la fille de Choua ⊠lui et Hira son compagnon ⊠à Timnat Le TO ne traduit pas « Bat [Choua] » car il le comprend comme un nom propre tandis que le TN et divers manuscrits du TPJ en font un nom commun (mais voir Shinan et Zakovitch 1992, p. 80)
Pour lâensemble des targoumim ainsi que les traductions samaritaines et la Peshitta, Hira est un « compagnon » et non un « berger », et la racine r-Êż-h est rendue par r-áž„-m qui implique lâintimitĂ©.
Ils montent à « Timnat[a] » (ainsi quâen Gn 38:14) et non Timna car cette forme, attestĂ©e en JosuĂ© 15:10 et 2 Chroniques 28:18, est moins frĂ©quente que Timnat(a) qui apparaĂźt, outre Gn 38, en Juges 14. Le TN comprend mĂȘme que le nom de lâendroit est Timnata, comme en Juges 14:2.38:14 ⊠[elle] (litt.) couvrit dâun voile, et sâen enveloppa, et sâassit au petaáž„ Êżeinayim, qui est sur le chemin de Timna ⊠[elle] se couvrit dâun voile, et sâarrangea, et sâassit au carrefour dâEinayim, qui est sur le chemin de Timnat ⊠[elle] (litt.) couvrit dâun surtout, et sâen enveloppa, et elle sâassit au carrefour des voies sur le chemin de Timnata N/A ⊠[elle] (litt.) couvrit dâun surtout, et sâenveloppa, et sâassit au carrefour des voies vers lequel les yeux regardent, qui est sur le chemin de Timnat Le TO use dâune forme rĂ©flexive (« se couvrit ») Ă la diffĂ©rence des autres targoumim mais en conformitĂ© avec la Bible samaritaine, ce qui suggĂšre lâexistence dâune version vatitkas.
Il traduit fidĂšlement áčŁeÊżipÌ par ÊżipÌa (« voile ») alors que les TPJ et TN portent redida (« surtout »), dâaprĂšs IsaĂŻe 3:23 et Cantique 5:7. Il est en revanche plus libre dans sa traduction du verbe titÊżalapÌ quâil rend par « sâarrangea », en sâinspirant peut-ĂȘtre du sens alternatif de la racine Êż-l-pÌ en Cantique 5:14, a moins quâil nâait permutĂ© entre vatitÊżalapÌ et vatitáž„alapÌ (« elle se changea »).
Face au petaáž„ ÊżĂȘnayĂźm, le TN donne la traduction la plus contextuelle avec Êżoráž„ata (« chemins ») mais le TO et le TPJ sentent que cette tournure inhabituelle renferme dâautres acceptions ; le premier suggĂšre cette amphibolie en Ă©vitant de traduire le terme (Ă moins quâil nâait voulu faire comprendre quâEinayim signifie Einam), tandis que le second juxtapose les interprĂ©tations « chemins » et « yeux » â Grossfeld 1988, p. 130, Shinan et Zakovitch 1992, p. 89-91 & Grossfeld 2000, p. 246-738:15 ⊠(litt.) et il la pensa prostituĂ©e parce quâelle avait couvert son visage ⊠(litt.) et il la pensa comme une-qui-sort-au-champ parce quâelle avait couvert son visage ⊠(litt.) et Juda la pensa une-qui-sort-au-champ parce quâelle avait couvert son visage dans la maison de Juda et Juda ne lâavait pas connue (TF V) parce quâelle avait restreint [la partie visible de] son visage ⊠et il la compara Ă ses yeux Ă une-qui-sort-au-champ parce quâelle avait le visage courroucĂ© dans la maison de Juda et Juda ne lâavait pas aimĂ©e Les targoumim ont unanimement traduit zona par « une qui-sort-au-champ » (napÌqat bar[aÊŸ]) plutĂŽt que par les habituels znita ou [ma]áčÊżita, peut-ĂȘtre par Ă©gard pour Tamar ; il sâagit clairement dâune litote pour le TO qui le rĂ©utilise en Gn 38:21 et ne cherche pas Ă traduire lâeuphĂ©misme biblique qdeĆĄa mais les autres targoumim nâen font pas de mĂȘme et les raisons qui les y ont poussĂ©s ici sont moins Ă©videntes.
Le TN embellit le texte en mĂȘme temps que le caractĂšre de Tamar, ajoutant quâelle nâĂ©tait pas voilĂ©e Ă ce moment mais dans la maison de Juda, et câest pour cela quâil ne la reconnaĂźt pas lors de leur rencontre. Le TPJ porte keÊżiĆat [panim] au lieu de keĆiat [apin] et raáž„im au lieu de áž„akim, suggĂ©rant une corruption du manuscrit car il ne sâaccorde plus avec le texte, contrairement au TN â Tamar aurait, selon cette version, Ă©tĂ© perpĂ©tuellement fachĂ©e des mauvais traitements que lui infligeaient ses maris, et Juda qui nâen connaissait pas le motif, ne lâavait jamais aimĂ©e pour cette raison. Le rĂ©sultat est identique: peu familier avec sa bru, Juda la reconnaĂźt dâautant moins quâelle a changĂ© ses apparences â Shinan et Zakovitch 1992, p. 101-2 & Kiel 2003, p. 8438:16 Il alla vers elle ⊠Viens donc/je te prie ⊠Il dĂ©via vers elle ⊠Viens donc ⊠Il dĂ©via vers elle ⊠Viens je te prie ⊠(TG D) >me donneras-tu afin que tu montes Ă moi?>
(TG E) >âEh, viens donc et apprĂȘtons-nous [Ă aller] vers toiâ car il ne savait pas quâelle Ă©tait sa bru, et elle dit: âQue me donneras-tu afin que tu tâassembles Ă moi ?âIl dĂ©via vers elle ⊠Viens donc ⊠Sur la traduction de wayet, voir Gn 38:1.
Le terme na, qui apparaĂźt deux fois en Gn 38, peut indiquer lâinvitation comme en Gn 12 et 18:4 ou lâinjonction comme en Gn 25:30 et Gn 27:3. Les targoumim traduisent keÊżan ou kedoun qui conservent Ă na toute sa polysĂ©mie puisque Grossfeld 1988, p. 130 le traduit par « Come now » (de mĂȘme que Maher 1992, p. 128 avec kedoun) tandis que McNamara 1992, p. 175 le rend par « Allow me, I pray » .38:17 ⊠jâenverrai un petit de chevreau ⊠jusquâĂ ce que tu [lâ]envoies. ⊠jâenverrai un petit de chevreau/chevreau de choix ⊠jusquâĂ ce que tu [lâ]envoies. ⊠jâenverrai un petit de chevreaux ⊠jusquâau moment oĂč tu [lâ]enverras. Il dit:âVoici que jâenvoie [D: Jâenverrai promptement] un petit de chevreaux du troupeauâ, et elle dit:âSi tu me donnes un gage jusquâau moment oĂč tu enverras vers moi [D: jusquâĂ ce que tu envoies]â. ⊠jâenverrai un petit de chevreau ⊠jusquâĂ ce que tu [lâ]envoies. Le texte hĂ©breu porte deux occurrences de la racine ĆĄ-l-áž„ que plusieurs versions du TO font alterner avec ĆĄ-d-r, apparemment pour agrĂ©menter la lecture. Le TPJ nâutilise que ĆĄ-d-r, et le TN ĆĄ-l-áž„ (il insĂšre zÇman ainsi que le car lâenvoi ne comporte pas en lui-mĂȘme une temporalitĂ©) â Shinan et Zakovitch 1992, p. 115.
Grossfeld 1988, p. 130 comprend [gadyĂą] bar [Êżizi] comme « hors de », et traduit « a choice goat » mais pour Shinan et Zakovitch 1992, p. ibid, il signifie simplement « fils de ».38:18 ⊠ton sceau, ton fil et ton bĂąton ⊠⊠ton anneau et ton manteau et ton bĂąton ⊠⊠ton anneau et ton manteau et ton bĂąton ⊠(TG D & E) Il dit: âQuel est le gage que je te donnerai?â Et elle dit: âTon anneau, ton manteau et ton bĂąton qui est dans ta main.â Il les lui donna, sâinvita vers elle [D: monta vers elle] et elle conçut de lui. ⊠ton cachet et tes fils et ton bĂąton ⊠Le hotam demandĂ© par Tamar est un sceau qui repose selon les targoumim sur un support, et devient donc un « anneau » â Êżizqeta et siáčoumta sont Ă©galement employĂ©s dans le Livre dâEsther pour traduire « bague » ou « anneau », siáčoumtaÊŸ Ă©tant spĂ©cifique Ă Esther 8:8 (« ⊠car une lettre cachetĂ©e de l'anneau du roi ne peut ĂȘtre rĂ©voquĂ©e »)
Le ptil qui est un fil, est associĂ© par les targoumim au ptil dâazur du áčŁiáčŁit qui orne les franges des vĂȘtements (Nb 15:38), et le TPJ en fait des fils, peut-ĂȘtre par harmonisation avec Gn 38:25. Il semble que le TO et le TN aient voulu dĂ©tourner par leur traduction lâattention des fils vers le vĂȘtement auquel ils Ă©taient cousus (lequel ressemble, Ă lâĂšre du second Temple, Ă une robe) car il serait de mauvais ton de suggĂ©rer que Juda a pu se dĂ©barrasser insouciamment dâun bien si prĂ©cieux â Petit 1987, p. 113, Grossfeld 1988, p. 130 & 131n9, Shinan et Zakovitch 1992, p. 119-120.38:19 ⊠et elle ĂŽta son voile dâelle ⊠et elle retira son voile dâelle ⊠et elle (litt.) fit passer son surtout dâelle (TF V) voile - surtout
(TG D & E) Et elle se leva et sâen alla, et elle (litt.) fit passer le surtout dâelle et elle sâhabilla des habits de veuvage⊠et elle retira son surtout dâelle Sur le « voile/surtout », cf. Gn 38:14. 38:20 ⊠le petit de chĂšvres dans la main de son ami lâAdoullamite pour prendre le gage ⊠⊠le petit de chĂšvres/chevreau de choix dans la main de son compagnon adoullamite pour prendre la caution ⊠⊠le petit des chĂšvres dans la main du compagnon adoullamite pour prendre les gages ⊠(TG D & E) Juda envoya le petit de/des chĂšvres par la main de lâami adoullamite, pour prendre le gage des mains de la femme, et il ne la trouva pas. ⊠le petit de chĂšvres dans la main de son compagnon adoullamite pour prendre la caution ⊠Sur le « compagnon » et le « petit de[s] chĂšvres », cf. Gn 38:12 & 17.
Le TN, parlant de « gages », diffĂšre ici des TG D & E, gĂ©nĂ©ralement considĂ©rĂ©s comme proches de ses sources, en ce quâil dĂ©taille davantage en quoi consistent « son gage » [Ă Juda] ou « les gages » qui sont trois (Shinan et Zakovitch 1992, p. 135).38:21 ⊠aux gens de litt. son lieu [Ă la femme], disant: âOĂč est la prostituĂ©e/consacrĂ©e qui se tient Ă /aux einayim sur le chemin?â ⊠âIl n'y a pas eu ici de prostituĂ©e/consacrĂ©eâ." ⊠aux gens de son lieu, disant: âOĂč est la prostituĂ©e/consacrĂ©e qui se tient aux einayim sur le chemin?â ⊠âIl n'y a pas ici de prostituĂ©e/consacrĂ©eâ. ⊠à la populace du lieu, disant: âOĂč est la [femme-]qui-sort-au-champ qui siĂ©geait Ă la croisĂ©e des routes sur le chemin?â ⊠âIl n'y a pas ici de qui-sort-au-champâ. (TG D & E) Il demanda auprĂšs des gens du lieu, disant: âOĂč est-elle, [TG D:+ la femme] qui-sort-au-champ, qui fut [TG D: Ă©tait] assise au croisement des routes [TG D:+ sur le chemin] ?â, et ils dirent: âIl nây a pas chez nous [TG D: il nây a pas eu] ici de [TG D:+ femme] qui-sort-au-champâ. ⊠aux gens du lieu, disant: âOĂč est la prostituĂ©e qui se tient Ă la contemplation des yeux sur le chemin?â ⊠âIl n'y a pas eu ici de prostituĂ©eâ. Le TO suit fidĂšlement le texte hĂ©breu, traduisant « son lieu » mais les autres prĂ©fĂšrent (comme la Septante et les traductions samaritaines, cf. supra) traduire « le lieu », ce qui pourrait tĂ©moigner dâune version diffĂ©rente mais aussi dâun choix commun Ă la plupart des traducteurs car la femme ne rĂ©side pas en ce lieu, et elle nâen est pas originaire.
Qualifiant la femme, le TO utilise lâeuphĂ©misme du texte biblique, et le TN revient Ă la litote employĂ©e en Gn 38:15 de mĂȘme que les TF mais le TPJ ne juge pas nĂ©cessaire de chĂątier son langage.
Traduisant une nouvelle fois « Êżeinayim », le TO (dont une autre version porte bepÌarĆĄout Êżeynayin) et le TN renvoient Ă leur traitement de Gn 38:14, tandis que le TPJ apporte une nouvelle interprĂ©tation, traduisant « le regard des yeux [sur la route]. »
Quant au dernier membre du verset, les TO, TN et TF ont choisi de le traduire par « il nây a pas ici » car les gens du lieu nâont pas assistĂ© Ă la rencontre entre Juda et Tamar, et ne peuvent donc tĂ©moigner que sur ce qui leur est actuellement connu (la traduction du TG E est encore plus catĂ©gorique) ; le TPJ a cependant conservĂ© le passĂ©, dans un but apparemment homilĂ©tique â Shinan et Zakovitch 1992, p. 138-139.38:22 ⊠il nây avait pas ici de prostituĂ©e ⊠il nây a pas ici de consacrĂ©e ⊠il nây a pas eu ici de qui-sort-dans-les-champs (TG D & E) Il retourna vers Juda et dit: âJe ne lâai pas trouvĂ©e et en outre (ouleáž„od/lehod), le peuple du lieu disent [D: ont dit] "nous nâavons pas [D: il nây avait pas] ici de [TG D: femme] qui-sort-au champâ ⊠il nây avait pas ici de prostituĂ©e Le TG D porte leáž„od alors que le TG E indique lehod, ce qui suggĂšre une rĂ©daction ou une correction Ă une Ă©poque oĂč la lettre áž„et, qui pouvait transcrire une consonne fricative uvulaire sourde /Ï/ aussi bien quâune consonne fricative pharyngale sourde /ħ/ au temps du TG D, nâest plus employĂ©e que pour la premiĂšre tandis que la seconde est dĂ©sormais rendue par la lettre he. Cependant, la tradition reflĂ©tĂ©e par le TG E est plus ancienne que celle du TG D, comme lâa dĂ©montrĂ© RenĂ©e Bloch â Cf. CAL et Blachman 2013, p. 81 38:23 ⊠quâelle se [les] prenne de crainte que nous ne soyons [jetĂ©s] Ă lâopprobre ⊠et toi, tu ne lâas pas trouvĂ©e ⊠quâelle se [les] prenne de crainte que nous ne soyons [objets de] risĂ©e ⊠et toi, tu ne lâas pas trouvĂ©e ⊠quâelle se [les] prenne afin que nous ne soyons pas [exposĂ©s] au scandale ⊠et voilĂ maintenant que je ne lâai pas trouvĂ©e (TG D & E) Juda dit: âquâelle se [les] prenne afin que nous ne soyons pas [exposĂ©s] au ridicule, voici que [TG E: car] je lui ai envoyĂ© ce chevreau et toi, tu ne lâas pas trouvĂ©eâ ⊠quâelle se prenne les cautions de crainte que nous ne soyons [exposĂ©s] au ridicule ⊠et toi, tu ne lâas pas trouvĂ©e « Cautions » est un ajout explicatif du TPJ pour amĂ©liorer la comprĂ©hension du texte.
La traduction du TN (« et maintenant ⊠je ne lâai pas trouvĂ©e ») est idiosyncrasique car elle ne se retrouve pas dans les TG D et E, ses tĂ©moins textuels habituels ; il semble avoir lu Êżata (« maintenant ») au lieu dâÊŸata (« tu »), et a compris que lâenvoyeur reprend Ă son compte les rĂ©sultats de lâĂ©missaire â Shinan et Zakovitch 1992, p. 145.38:24 (litt.) Et ce fut vers trois mois ⊠et aussi, voici quâelle a conçu des prostitutions Ce fut vers le tiers des lunaisons ⊠et aussi, voici quâelle a conçu de sa prostitution Ce fut au temps de trois lunes ⊠et Ă part cela, voici quâelle a conçu Ă cause des prostitutions ⊠(TG D & E) Ce fut Ă la fin de trois lunes, et ils vinrent Ă Juda, disant: âTamar ta bru (litt.) a prostituĂ© et en outre, voici quâelle a conçu des fils des prostitutionsâ, et Juda dit: âSortez-la et quâelle soit brĂ»lĂ©e [D:+ dans le feu]â Ce fut au temps de trois lunes, il fut (litt.) su quâelle Ă©tait enceinte ⊠et aussi, voici quâelle a conçu de prostituer ⊠nâest-elle pas fille de prĂȘtre ? Le texte biblique comporte deux termes malaisĂ©s Ă traduire car ambigus, kemiĆĄloĆĄ áž„odaĆĄim (« quelque trois mois ») et liz'nounim (« Ă /pour des actes de prostitutions »), et ils nâindiquent pas ce qui a poussĂ© les gens Ă avertir Juda des mĂ©sactions supposĂ©es de sa bru. Tous ont tentĂ© de pallier cette absconsitĂ© : le TO lit kemiĆĄliĆĄ áž„odaĆĄim (« au tiers des [neuf] mois [de la grossesse] »), les TN et TPJ rĂ©solvent le problĂšme en insĂ©rant des termes plus dĂ©finis (« au temps de », « Ă la fin de »), de mĂȘme que les TG (et la Septante). Le TPJ ajoute par ailleurs quâ« il fut su quâelle Ă©tait enceinte » afin de combler un vide narratif. Le TO traduit ensuite liz'nounim par mizenoutah, « de sa prostitution » (dâautres versions de ce targoum portent liz'noutah, en conformitĂ© avec le texte biblique mais sans rĂ©soudre sa difficultĂ©), et le TN semble recourir au mĂȘme choix mais peut-ĂȘtre faut-il corriger la leçon dâaprĂšs les TG D & E, et lire banin dazenou, « des fils de prostitutions » (cf. OsĂ©e 2:6, banim zÇnounim). Enfin, le TPJ effectue un ajout exĂ©gĂ©tique-homilĂ©tique dans la lignĂ©e de son amplification Ă Gn 38:6 pour expliquer la sentence de Juda en vertu de Lv 21:9 â Shinan et Zakovitch 1992, p. 149-150. 38:25 Elle (litt.) Ă©tait sortie, et elle envoya Ă son beau-pĂšre dire: âDe lâhomme auquel sont ceux-ci, je suis enceinteâ, et elle dit: âConnais, je te prie, Ă qui sont ce sceau, ces cordons et ce bĂątonâ. Elle (litt.) Ă©tait sortie, et elle envoya Ă son beau-pĂšre dire: âDe lâhomme auquel sont ceux-ci, je suis enceinteâ, et elle dit: âReconnais donc Ă qui sont ce cachet, ces manteaux et ce bĂątonâ. Tamar (litt.) Ă©tait sortie pour ĂȘtre brĂ»lĂ©e dans le feu, et elle chercha ses trois tĂ©moins mais ne les trouva pas. Elle (litt.) pendit les yeux vers les cieux, disant: « Je prie la clĂ©mence de devant YYY, toi qui rĂ©ponds aux opprimĂ©s Ă lâheure de leur dĂ©tresse, rĂ©ponds-moi en cette heure qui est lâheure de ma dĂ©tresse, Eloha qui rĂ©pond[s] aux opprimĂ©s, Ă©claires mes yeux et donne-moi trois tĂ©moins, et moi, je tâĂ©lĂšverai trois justes dans la vallĂ©e de Doura, Hanania, MishaĂ«l et Azarya qui descendront dans le feu de la fournaise et sanctifieront ton saint Nom »
. YYY entendit aussitĂŽt la voix de sa priĂšre, et il dit Ă MichaĂ«l: « Descends lui porter ces trois tĂ©moins et Ă©claire ses yeux. » Elle les vit et les donna aux mains du juge, en lui disant:« Lâhomme Ă qui ces objets appartiennent, câest de lui que je suis enceinte mais, dussĂ©-je brĂ»ler, je ne le ferai pas connaĂźtre. Puisse cependant le TĂ©moin entre lui et moi donner en son cĆur de les voir en cette heure, et il me sauvera de ce jugement redoutable. »
Juda se leva aussitĂŽt sur ces pieds et dit:« "Je vous prie, mes frĂšres et vous, gens de la maison de [mon] pĂšre, de mâĂ©couter. Il est bon de brĂ»ler en ce monde dans un feu extinguible et ne pas brĂ»ler dans le monde Ă venir dans un feu dĂ©vorant le feu, il est bon dâavoir honte dans ce monde qui est un monde passager (orig.:crĂ©Ă©) et ne pas avoir honte devant les ancĂȘtres justes dans le monde Ă venir. Recevez de moi, mes frĂšres et la maison de PĂšre, par la mesure avec laquelle un homme mesure, il est mesurĂ©, que ce soit une bonne ou une mauvaise mesure et bĂ©ni soit chaque homme qui confesse ses actes: parce que jâai pris la tunique de Joseph mon frĂšre, lâai donnĂ©e dans le sang dâun chevreau, disant Ă Jacob [mon] pĂšre âReconnais donc si câest la tunique de ton fils ou nonâ, il mâest dit maintenant âĂ qui sont ce cachet, ce manteau et ce bĂąton?â Câest de moi quâelle est enceinte, [et] elle est dans son droit, Tamar ma bru, câest de moi quâelle est enceinte, loin dâelle, Tamar ma bru, de concevoir des fils de la prostitution. »
Un Ă©cho de voix (orig. :cependant une voix) sortit du ciel, disant:« Vous ĂȘtes tous deux justes, câest de devant YYY que la chose a eu lieu. »Tamar (litt.) Ă©tait sortie pour ĂȘtre brĂ»lĂ©e dans le feu, et elle chercha ses trois tĂ©moins [TF P:+ et] ne les trouva pas [TG FF:+ SamaĂ«l Ă©tait venu (et les avait cachĂ©s) de devant elle]. Elle (litt.) pendit les yeux vers le haut, disant: « [TG E & FF, TF P & V: En demandant la clĂ©mence de devant toi, TG E: Hâ lâel*im /TF P: YYY Elohim /TG FF: Eloha vivant et Ă©ternel], [TG D & TF V: toi qui es Hâ qui rĂ©pond (sic) aux priĂšres des opprimĂ©s Ă lâheure de leur dĂ©tresse /TG FF: toi lâeloha dâAbraham, Isaac et IsraĂ«l mes pĂšres], rĂ©ponds-moi en cette heure [TG E & FF, TF P & V:+ qui est lâheure de ma dĂ©tresse] et moi, je tâĂ©leverai trois justes dans la vallĂ©e de Doura, Hanania, MishaĂ«l et Azarya [TG FF: lesquels vont se jeter dans la fournaise de feu brĂ»lant <suite indĂ©chiffrable>]. »
Ă lâinstant mĂȘme, [TG E: Hâ /TG FF: YY /TF P: le Saint, bĂ©ni soit-il /TF V: la parole dâHâ entendit sa priĂšre et] fit signe [TF V: dit] Ă [TG D:- lâange] MichaĂ«l [TG FF: Gabriel et il descendit Ù Ù Ù ]: « [TF P:- Descends /TF V:+ et] donne ceux-lĂ pour Ă©clairer ses yeux ». [TG D, TF V:- Lorsquâelle les prit,] ses yeux sâĂ©clairĂšrent, et elle les jeta aux pieds des juges, disant:« Lâhomme auquel appartiennent ces cautions, câest de lui que je suis enceinte
[TG FF:+ de fils de prostitution, et elle dit: Reconnais maintenant] /
afin de brĂ»ler [TF V: bien que je doive brĂ»ler], et je ne le ferai pas connaĂźtre. Cependant, [TF V:+ jâai foi en le maĂźtre de tous les mondes, Hâ, qui est] le tĂ©moin entre moi et lui donnera dans son cĆur [TF V: le cĆur de lâhomme Ă qui ceux-ci appartiennent] de reconnaĂźtre Ă qui sont ce cachet, cette cape et ce bĂąton. »
(TG X=TT) SupplĂ©ment Ă âelle est sortieâ: et Tamar Ă©tait sortie pour ĂȘtre brĂ»lĂ©e ; et elle demanda les trois tĂ©moins mais (litt. et) elle ne les trouva pas car SamaĂ«l les avait dissimulĂ©s de devant elle. Elle leva les yeux vers lĂ -haut et elle dit: âJe te prie, Dieu vivant, rĂ©ponds-moi en cette heure car je suis pure, et moi, je donnerai trois justes dans la vallĂ©e de Doura qui tomberont dans le feu pour toiâ. En cette heure, YHâ fit signe Ă Gabriel et il descendit et il les lui donna. Elle les < fragment manquant > devant les pieds des juges et dit: âDe lâhomme auquel sont ceux-ci, câest de lui dont je suis enceinte des fils de prostitutionâ, et elle dit: âConnais maintenant Ă qui sont ces cachets, cape et bĂątonâ.Tamar (litt.) Ă©tait sortie pour ĂȘtre brĂ»lĂ©e, et elle chercha ses trois cautions mais ne les trouva pas. Elle (litt.) pendit les yeux au ciel, disant: « Je te prie, pour lâamour de devant Toi YYY qui rĂ©ponds aux opprimĂ©s (litt. ceux qui sont dans la dĂ©tresse) dans leur dĂ©tresse, dâilluminer mes yeux pour que je retrouve mes trois tĂ©moins et moi, je te susciterai de mes reins trois justes qui sanctifieront ton Nomâ »
. Alors mĂȘme, le Saint fit signe Ă lâange MichaĂ«l qui illumina ses yeux et elle les trouva.
Elle les prit alors et les jeta aux pieds des juges, disant:« Lâhomme auquel appartient ces cautions, câest de lui que je suis enceinte mais dĂ»ssĂ©-je brĂ»ler, je ne le ferai pas connaĂźtre publiquement. Mais le maĂźtre du monde mettra en son cĆur de les reconnaĂźtre et me sauvera de ce jugement redoutable »
. Quand il les vit, Juda les reconnut et se dit en son cĆur:« Je prĂ©fĂšre la honte en ce monde passager quâĂȘtre confondu devant mes pĂšres dans le monde Ă venir, je prĂ©fĂšre ĂȘtre brĂ»lĂ© en ce monde par un feu qui sâĂ©teint plutĂŽt quâĂȘtre brĂ»lĂ© dans les flammes dĂ©vorant les flammes du monde Ă venir. Câest bien mesure pour mesure que je reçois car jâai dit Ă mon pĂšre Jacob âReconnais donc la tunique de ton filsâ, câest pour cela que je suis dans la nĂ©cessitĂ© dâentendre au tribunal âĂ qui sont ce sceau, ces fils et ce bĂąton ?â »
La traduction de ce verset donne lieu, Ă lâexception du TO, Ă une amplification narrative dont le TN, et non le TPJ, contient la collation la plus exhaustive tandis que le TG E prĂ©sente la forme la plus basique (et par consĂ©quent la plus ancienne selon RenĂ©e Bloch â Blachman 2013, p. 81). Tous les targoumim, y compris le TO traduisent dâabord le terme mĂ»áčŁeÊŸt (« elle Ă©tait sortie ») littĂ©ralement par la racine n-pÌ-q. Le TN et ses parallĂšles ajoutent ensuite « pour ĂȘtre brĂ»lĂ©e [dans le feu] », autant pour harmoniser Gn 38:25 avec le verset prĂ©cĂ©dent que pour Ă©voquer implicitement Lv 21:9 (Menn 1998, p. 224)
Les « cautions » (miĆĄkonaya) des TO et TPJ deviennent des « tĂ©moins » (sahadei) dans le TN et ses parallĂšles, ce qui dĂ©place la prostitution vers une confrontation dans un tribunal oĂč Dieu sera lui-mĂȘme appelĂ© par Tamar comme tĂ©moin.
« Et elle ne les trouva pas » â car le traducteur joue sur le mot mĂ»áčŁeÊŸt, quâil dĂ©cide de lire moáčŁeÊŸt (« elle trouve », câest-Ă -dire âelle tente de trouverâ) ainsi que lâindique le TT ; ce dernier et le TG FF font en outre intervenir SamaĂ«l pour expliquer la perte. Quoi quâil en soit, la Tamar des targoumim est plus faillible que celle de la Bible, et a besoin dâaide.
« Elle pendit ses yeux » â car les auteurs des targoumim insĂšrent volontiers des priĂšres dans la bouche des personnages bibliques, reflĂ©tant leur propre piĂ©tĂ©. Dans le cas prĂ©sent, lâimportance accordĂ©e aux âyeuxâ de Tamar, âpendus au cielâ avant dâĂȘtre âĂ©clairĂ©sâ, suggĂšre une lecture homilĂ©tique de petaáž„ einayim.
La priĂšre commence, Ă lâexception du TG D, par une formule dâadresse classique, « En priant [ta misĂ©ricorde (absent de plusieurs manuscrits)] » ; sommaire dans les TG E, TF P et le TPJ, elle donne lieu Ă diverses Ă©laborations ultĂ©rieures : la Tamar du TG X implore le « Dieu vivant », et celle du TG FF invoque le « Dieu vivant et Ă©ternel [âŠ] de mes pĂšres Abraham, Isaac et IsraĂ«l ». Lâadresse du TG D, accolĂ©e dans le TN Ă la formule classique, est en rĂ©alitĂ© lâobjet de la priĂšre de Tamar qui demande Ă Dieu de lui rĂ©pondre Ă lâheure de « son affliction ». Le terme employĂ© pour « affliction » dans le TG E, ÊŸananqi, est un calque corrompu du grec anagke (oĂč le ghimel a Ă©tĂ© remplacĂ© par un noun en raison de leur ressemblance graphique dans lâalphabet hĂ©breu carrĂ©, et du fait de la mĂ©connaissance du grec) ; lâÊżaqat'hon qui figure dans les adresses des TG D et TN (cf. supra), en est lâĂ©quivalent aramĂ©en ; le TN reprend en outre la priĂšre du TG E avec la forme grecque, devenue dans le TG X ÊŸana nqiÊŸ (« [car] je suis pure »).
Tamar formule ensuite, Ă lâinstar de Jacob et dâautres figures bibliques, le vĆu de rendre ultĂ©rieurement Ă Dieu la faveur quâelle lui demande, en lui suscitant les trois compagnons dans la vallĂ©e de Doura ; les TG D et E ainsi que les TF P et V nâen ont pas dĂ©taillĂ© la raison mais les autres ont souhaitĂ© insister sur les cas quâils feront pour « sanctifier ton nom » .
Dieu rĂ©pond Ă sa priĂšre Ă lâinstant oĂč elle lâa formulĂ©e, dĂ©pĂȘchant selon les versions MichaĂ«l ou Gabriel (qui font toute deux leur premiĂšre apparition biblique dans le Livre de Daniel), MichaĂ«l ayant pour fonction de desciller les yeux de Tamar tandis que Gabriel est appelĂ© pour dĂ©faire SamaĂ«l ou, selon certaines sources qui sont Ă©galement inspirĂ©es de Daniel 3, parce quâil est lâange du feu (Menn 1998, p. 222n47).
Tamar jette les prĂ©cieux tĂ©moins aux pieds du « juge » selon la version originale du TN et comme le suggĂšre la suite de la phrase ; un correcteur a fait du mot un pluriel, sans doute dâaprĂšs le TPJ mais cette version est Ă©galement attestĂ©e dans les TG D & E, et la tradition juive demande quâun tribunal jugeant des peines capitales comporte au moins trois juges.
Tamar leur dĂ©clare ĂȘtre prĂȘte Ă brĂ»ler, non pour la prostitution dont elle vient dâĂȘtre innocentĂ©e mais afin de ne pas diffamer lâhomme dont elle est enceinte ; les traducteurs tirent cette abnĂ©gation extrĂȘme du naÊŸ de Tamar qui, bien que faisant pendant au na de Juda (Gn 38:16), a Ă©tĂ© univoquement compris comme une supplication.
« Cependant, » Tamar rĂ©affirme lâardeur de sa foi en proclamant sa confiance dans le TĂ©moin qui remuera le cĆur de Juda ; cette profession ardente se retrouve dans le TPJ et le TF V mais est absente des TG FF & X, qui reprennent la trame des versets. Le TN poursuit avec une tradition qui relĂšve en vĂ©ritĂ© de Gn 38:26 (« AussitĂŽt, Juda se leva » etc.), Ă©laborant sur le áčŁadqa mimeni de Gn 38:26 tandis que le TPJ revient Ă Gn 38:25 ; la phrase est traduite par « elle est dans son droit, Tamar ma bru » qui se conclut Ă lâavantage de Tamar, et la lave de tout soupçon de prostitution (y compris lorsquâelle sâen accuse elle-mĂȘme, selon le TG FF) mais sans porter prĂ©judice Ă Juda â Shinan et Zakovitch 1992, p. 160-161 & 170-17138:26 Juda les reconnut et dit: "Elle est plus juste que moi, car en vĂ©ritĂ© je ne lâai pas donnĂ©e Ă ChĂȘla mon fils," et il nâajouta plus, dĂšs lors, de la connaĂźtre. Juda prit acte et dit: "Elle est dans son droit, câest de moi quâelle est enceinte, car en vĂ©ritĂ© je ne lâai pas donnĂ©e Ă ChĂȘla mon fils," et il nâajouta plus, dĂšs lors, de la connaĂźtre. Juda connut et dit: « Elle est dans son droit, Tamar ma bru, Ă cause de cela: je ne lâai pas donnĂ©e Ă ChĂȘla mon fils », et il nâajouta plus de la connaĂźtre. (TG E) Comme il les vit, Juda se dit en son cĆur: « Il vaut mieux pour moi dâĂȘtre humiliĂ© en ce monde que dâĂȘtre humiliĂ© dans le monde Ă venir. Il vaut mieux pour moi brĂ»ler dans un feu extinguible en ce monde-ci que brĂ»ler dans un feu dĂ©vorant le feu dans le monde Ă venir. »
Juda reconnut et dit: « Elle est juste, Tamar ma bru, Ă cause de ce que je ne lui ai pas donnĂ© ChĂȘla, » et il nâajouta plus de la connaĂźtre.
(TG D, TF P & VNL) [TG D: Lorsquâil vit/TF P: reconnut/TF V:Juda reconnut] les trois tĂ©moins, [TG D & TF P: Juda] se dressa sur ses pieds et [TG D: + Ă©levant la voix,] dit :
Un Ă©cho de voix sortit des cieux et dit: « Vous ĂȘtes tous deux justes [TF V: dans le jugement], câest de devant [TF P:moi/TF V:Hashem] quâest sortie lâaffaire, » et il nâajouta plus de la connaĂźtre.« "Je vous prie, mes frĂšres et vous, gens de la maison de mon/mes pĂšres, Ă©coutez [TF P:+ cette parole de] moi. Par la mesure avec laquelle un homme mesure (TF P:+ sur terre), il sera mesurĂ© (TF P: dans les cieux), que ce soit une bonne ou une mauvaise mesure ; et bĂ©ni soit- TF P: lâhomme qui fait de bonnes choses, il nâa pas honte dans ce monde-ci et il nâa pas honte dans le monde Ă venir
- TF V: lâhomme qui confesse ses faits. Parce que jâai pris la tunique de Joseph mon frĂšre, lâai trempĂ©e dans le sang dâun chevreau, lâai apportĂ©e aux pieds de mon pĂšre et lui ai dit âReconnais donc si câest la tunique de ton fils ou nonâ, la mesure est selon la mesure et la rĂšgle selon la rĂšgle. Il vaut mieux pour moi dâavoir honte en ce monde que dâavoir honte dans le monde Ă venir.
(TG X & FF) [TG X: +âConnutâ â] ce fut lorsque Juda les vit et il dit :« Elle est dans son droit, câest de moi quâelle est enceinte et elle nâest pas enceinte de fils de prostitutions. [TG FF: +Recevez de moi, mes frĂšres et gens [de la maison] de pĂšre,] Par la mesure avec laquelle un homme mesure il est mesurĂ© : comme jâai pris la tunique de Joseph mon frĂšre et lâai [TG X:teinte/TG FF: trempĂ©e] de sang et lâai donnĂ©e Ă mon pĂšre et lui ai dit âReconnais donc si câest la tunique de ton fils ou non,â ils mâont dit maintenant âReconnais donc Ă qui lâanneau, la robe et le bĂąton que voilĂ .â Recevez de moi mes frĂšres et gens de la maison de pĂšre, il vaut mieux moi ĂȘtre jugĂ© en ce monde quâĂȘtre jugĂ© dans le monde Ă venir, il vaut mieux pour moi ĂȘtre jugĂ© par un feu extinguible quâĂȘtre jugĂ© par un feu dĂ©vorant. »
Et un Ă©cho de voix sortit et leur dit : « Tous deux avez Ă©tĂ© [TG X: jugĂ©s dans votre droit/TG FF: acquittĂ©s, car de lĂ viendra le messie de YY, et il rĂ©gnera sur toutes les nations, et il fera sortir mon peuple dâentre les peuples vers la maison de saintetĂ©. Par consĂ©quent, rĂ©jouissez-vous car] câest de moi quâest sortie lâaffaire, » [TG FF:+ Juda dit donc : « Câest parce que je ne lâai pas donnĂ©e Ă ChĂȘla mon fils, »] et il nâajouta plus de la connaĂźtre.Juda connut et dit: « Tamar est innocente, câest de moi quâelle a conçu », (litt.) et un Ă©cho de voix tomba du ciel, et dit: « Câest de devant Moi [quâest venue toute lâaffaire] et vous ĂȘtes tous deux (litt.) sauvĂ©s du jugement », et [Juda] dit: « [câest] parce que je ne lâai pas donnĂ©e Ă ChĂȘla mon fils que ceci mâest arrivĂ© », et il nâajouta plus de la connaĂźtre dans la couche. Le repentir de Juda prend sa source, comme les Ă©lucubrations du verset prĂ©cĂ©dent, dans un dĂ©doublement homilĂ©tique : Juda reconnaĂźt non seulement les gages mais la nature de ses fautes.
Dans le TG E, Juda parle « en son cĆur », et le traducteur dĂ©voile ses arriĂšre-pensĂ©es lorsquâil sâapprĂȘte Ă exonĂ©rer Tamar ; ce repentir prend une autre dimension dans le TG D, le TN et les TF oĂč Juda se lĂšve pour faire connaĂźtre ses fautes publiquement, ainsi que le recommande le rite rabbinique, et il le fait en prĂ©sence de sa famille ; lâinsertion de la doctrine mesure pour mesure, particuliĂšrement dĂ©taillĂ©e dans les TF, a pour effet de magnifier la justice divine dans lâhumiliation publique de Juda, et elle permet mĂȘme au TN de passer sous silence sa promesse non tenue car si lâhistoire sâest ainsi dĂ©roulĂ©e, câest â comme le rappellent le TG E et le TPJ â surtout « parce que je ne lâai pas donnĂ©e etc. ». En augmentant lâobjet de la confession de Juda et en magnifiant ses circonstances, les traducteurs en amplifient la portĂ©e jusquâĂ lâaffirmation du TG FF que câest par elle que viendra le messie. Le TN, qui nâa pas insĂ©rĂ© cette derniĂšre tradition, a rattachĂ© comme le TPJ la confession de Juda Ă la priĂšre de Tamar au verset prĂ©cĂ©dent, de sorte quâelle a vu sa priĂšre exaucĂ©e sans dĂ©lai (dans le TPJ s.v. Gn 38:25, lâaccent est mis sur la reconnaissance de la tunique identifiant Joseph/des objets identifiant Juda tandis que dans le TN, câest le chevreau utilisĂ© comme leurre dans les deux rĂ©cits que le traducteur a choisi de mettre en parallĂšle) ; il effectue un nouveau dĂ©doublement dans sa traduction de Gn 38:26, confondant dans une mĂȘme racine áž„-k-m la racine n-k-r (connaĂźtre) qui ouvre le verset et y-d-Êż (savoir) qui le conclut.
Le TG E introduit par ailleurs le motif du brĂ»lement de Juda, absent du texte biblique mais repris par lâensemble des targoumim Ă lâexception du TO, car il est tirĂ© de Lv 20:10 quâun mĂȘme chĂątiment doit sâappliquer aux partenaires coupables dâinconduite sexuelle (cette interprĂ©tation nâest cependant pas celle des rabbins, lesquels prescrivent la lapidation ou lâĂ©touffement mais non le bĂ»cher pour le crime dâadultĂšre). Or dans les targoumim oĂč Juda dĂ©clare son intention de brĂ»ler, il est tenu de sâexĂ©cuter.
Les targoumim qui traduisent « elle a eu raison » par « elle lâa emportĂ© » [dans le jugement], crĂ©ent de la sorte un lien entre Tamar et la sotĂą, « femme dĂ©viante » ou supposĂ©e telle par son mari qui lâaccuse injustement dâadultĂšre. Le TG E et le TN escamotent ensuite la seconde partie de la phrase mais le TO a profitĂ© de lâabsence de comparatif en aramĂ©en pour dĂ©composer « elle est plus juste que moi » en « elle est dans son droit, câest de moi, » de sorte que Tamar est juste sans que Juda soit pris en faute, et lâadmission dâiniquitĂ© est transformĂ©e en reconnaissance de paternitĂ©. Les targoumim alternatifs dĂ©clinent quant Ă eux la racine z-k-ÊŸ au pluriel â « vous ĂȘtes tous deux dans votre droit » i.e. tous deux Ă©galement justes et acquittĂ©s ; le TPJ a combinĂ© ces deux lectures âShinan et Zakovitch 1992, p. 170.
Les targoumim semblent unanimes Ă traduire le dernier membre du verset par « il nâajouta plus de la connaĂźtre » mais le rabbin mĂ©diĂ©val David Kimhi signale lâexistence dâun targoum qui lit âne cessa plusâ, et parvient donc Ă la conclusion opposĂ©e.38:27 ⊠au moment de son accouchement ⊠dans son ventre ⊠au moment de son accouchement ⊠dans litt. son entraille ⊠au moment oĂč elle accouche [i.e. est en train dâaccoucher] ⊠dans ses entrailles (TG E) Et ce fut au moment de son accouchement et voici des jumeaux dans ses entrailles ⊠au moment de son accouchement ⊠dans litt. son entraille Le TN traduit apparemment sur le modĂšle de Gn 24:11 et 31:10, et fait usage comme les autres targoumim dâun terme plus âinterneâ que beáčen, qui dĂ©signe plutĂŽt la paroi ventrale. 38:28 Et ce fut lors de sa dĂ©livrance, et il donna la main, et la sage-femme prit et attacha Ă sa main de lâĂ©carlate, pour dire âcelui-ci est sorti en premierâ. Et ce fut lors de sa dĂ©livrance, et il donna la main, et la sage-femme prit et attacha Ă sa main de lâĂ©carlate, pour dire âcelui-ci est sorti dâabordâ. Et ce fut comme elle Ă©tait en train de dĂ©livrer, et lâenfant tendit sa main, et la sage-femme prit et attacha Ă sa main de lâĂ©carlate, pour dire âcelui-ci est sorti dâabordâ. (TG E) Et ce fut dans la pupille de sa naissance, et lâenfant Ă©tendit sa main, et lâaccoucheuse la prit et noua Ă sa main de lâĂ©carlate pour dire âcelui-ci est sorti dâabordâ. Et ce fut lors de sa dĂ©livrance, et lâenfant tendit sa main, et la sage-femme prit et attacha Ă sa main un fil dâĂ©carlate, pour dire âcelui-ci est sorti dâabordâ. Les TPJ et TN traduisent lâexpression « (litt.) donner la main » par « Ă©tendre » ou « envoyer la main » qui est ce quâelle signifie, et ils ajoutent en outre vladah pour prĂ©ciser le sujet de lâexpression ; [yat] yadah traduit par ailleurs « sa main », plutĂŽt que « la main » du texte massorĂ©tique, ce qui pourrait signaler une haplographie de celui-ci (mais elle serait alors partagĂ©e avec le TO), une dittographie de la version traduite par les traducteurs ou une harmonisation avec la seconde occurrence de la « main » de lâenfant dans le verset. Le TPJ est le seul Ă mentionner un « fil » dâĂ©carlate, inspirĂ© de JosuĂ© 2:18 et de Cantique 4:3.
Les targoumim ont traduit r-ÊŸ-ĆĄ par q-d-m afin de mieux marquer lâantĂ©rioritĂ© (le TPJ ajoute mĂȘme le prĂ©fixe circonstanciel ba pour Ă©voquer le bariĆĄonaÊŸ de 2 Samuel 7:10), et ainsi la surprise qui se produit au verset suivant.38:29 Ce fut comme il retirait ⊠"Comme tu as jailli, sur toi le jaillissement !" Et il appela ⊠Ce fut lorsquâil retira ⊠"Quelle grande force est sur toi dâavoir la force !" Et il appela ⊠Ce fut lorsquâil rentrait ⊠"Avec quelle grande force tu as attaquĂ© et tu attaqueras, mon fils !" Et il appela ⊠(TG E) Et ce fut quand il rentra sa main et voici que sortit son frĂšre, et elle dit: âComme tu as attaquĂ© et en outre, tu es destinĂ© Ă attaquerâ, et elle appela son nom PÌareáčŁ Ce fut lorsque lâenfant retirait ⊠"Avec quelle grande force tu as attaquĂ© et il tâincombera dâattaquer car tu hĂ©riteras de la royautĂ© !" Et elle appela ⊠Les targoumim simplifient tous la lecture de « comme il retirait », devenu « lorsquâil retirait », le TPJ se voulnt plus informatif, tandis que le TN utilise un verbe plus explicite quâÊŸateiv (qui peut aussi signifier « rĂ©pondre » ou « rendre »)
Lâexclamation de lâaccoucheuse devient dans les targoumim une maniĂšre de prophĂ©tie, en jouant sur la polysĂ©mie de p-r-áčŁ qui sâemploie pour g-b-r (indiquant la force et la vaillance), áž„-z-q (force et renforcement) ou p-r-h (fertilitĂ©, croissance), et en prenant prĂ©texte de sa rĂ©pĂ©tition dans le verset ; les circonstances du passĂ© proche annoncent un avenir plus lointain qui est, dans le cas prĂ©sent, la royautĂ© de la maison de David le Parsite ; le TPJ en fait expressement Ă©tat tandis que le TN floute quelque peu la rĂ©fĂ©rence, Ă peine suggĂ©rĂ©e dans le TO.
Un mĂȘme flottement existe dans les targoumim sur lâidentitĂ© de la personne qui nomme : alors que les TO, TG E et TN portent le masculin, et dĂ©signent donc Juda (le TN ajoute dâailleurs « mon fils »), le TPJ emploie ici et au verset suivant une forme fĂ©minine, indiquant que câest lâaccoucheuse ou Tamar qui nomme les enfants.38:30 Et aprĂšs [sortit] ⊠lâĂ©carlate, et il appela son nom Zaraáž„ Et aprĂšs cela ⊠lâĂ©carlate, et il appela son nom Zaraáž„ Et dĂšs aprĂšs cela ⊠lâĂ©carlate, et il appela son nom Zaraáž„ (TG E) Et dĂšs aprĂšs cela sortit son frĂšre dont il y a sur sa main lâĂ©carlate, et il appela son nom Zaraáž„ Et aprĂšs cela ⊠était attachĂ© un fil dâĂ©carlate, et elle appela son nom Zaraáž„ Lâajout de « cela » dans lâensemble des targoumim mais aussi la Bible samaritaine, suggĂšre une version diffĂ©rente du texte massorĂ©tique.
Sur le « fil dâĂ©carlate » â et « il/elle appela », cf. Gn 38:28-29 - DiffĂ©rences entre les versions massorĂ©tique et syriaque de GenĂšse 38, dâaprĂšs Heller 1927, p. 47-49 & Lamsa 1985:
verset texte massorĂ©tique et traduction du Rabbinat texte syriaque, translittĂ©rĂ© en caractĂšres hĂ©braĂŻques par Heller 1927 et traduit en anglais par Lamsa 1985 Explications et remarques, dâaprĂšs Shinan et Zakovitch 1992 38:1 Adoullami (« Adullamite ») Êżdlmya (« Adoulmaya ») dans la version Heller mais Lamsa a lu Êżrlmya et traduit par Arlemite 38:3 vatahar vateled ben (« elle conçut et enfanta un fils ») wbáčnt wyldt lh brÊŸ (« elle conçut et lui enfanta un fils ») Lh: occurrence unique dans la Peshitta sur ce chapitre, qui ressemble Ă OsĂ©e 1:3 et indique peut-ĂȘtre une version diffĂ©rente. 38:4 vatiqra ett-shmo Onan (« elle lui donna le nom dâOnan ») wqrÊŸ ĆĄmh ÊŸwnn (« il appela son nom Onan ») WqrÊŸ: Ă©galisation avec le verset prĂ©cĂ©dent. 38:5 vatiqra ett-shmo Shela vĂšhaya biKhziv bĂšlideta oto (« elle lui donna le nom de ChĂȘla et il Ă©tait Ă Kezib lorsquâelle lâenfanta ») wqrÊŸ ĆĄmh ĆĄlÊŸ wpsqt hwt kd yldth (« il appela son nom ChĂȘla et elle cessa [ensuite] dâenfanter ») WqrÊŸ: idem
Wpsqt hwt kd yldth: cf. Targoum Neofiti ad loc. et lâensemble de la tradition midrashique sur ce verset: K-Z-B nâest pas un nom de lieu mais indique une cessation (cf. II Rois 4).38:8 vayomer Yehoudah lĂšOnan (« Alors Juda dit Ă Onan ») wÊŸmr YhwdÊŸ lÊŸwnn brh (« Alors Juda dit Ă Onan son fils ») Brh: ajout explicatif ou version diffĂ©rente. 38:11 shvi almana (« Demeure veuve ») tby bÊŸrmlwth (« Demeure dans le veuvage ») BÊŸrmlwth: la substitution du statut (veuvage) Ă lâĂ©pithĂšte se retrouve aussi chez YannaĂŻ. Il est riche de sens dans lâĂ©glise syiaque oĂč le veuvage â incluant les femmes qui sâabstiennent de relations aprĂšs le mariage â est un idĂ©al hautement encouragĂ©, cf. Botha 1995 & Monnickendam 2019 38:13 vayougad lĂšTamar lĂšmor ⊠Timnata (« Il fut annoncĂ© Ă Tamar en ces termes ⊠à Timna ») wáž„wyw ltmr wÊŸmrw ⊠ltmnt (« Ils annoncĂšrent Ă Tamar et ils dirent ⊠à Timnat ») Wáž„wyw ⊠wÊŸmrw: possible diffĂ©rence de version
ltmnt: cf. les autres occurrences du nom de ce lieu (Gen 38:14, JosuĂ© 19:43 & Juges 14:2 & 5)38:14 vĂšhi lo nitna lo lÚïsha (« et elle ne lui avait Ă©tĂ© donnĂ©e pour femme ») why lÊŸ mtyhbÊŸ lh (« et elle ne lui avait Ă©tĂ© donnĂ©e ») La version Heller omet de traduire ici lÚïsha alors quâelle le fait en dâautres occurrences, ce qui pourrait indiquer une autre version (mais Lamsa ne lâomet pas) 38:16 vayomer hava na ⊠ma titen li (« il dit: prĂ©pares-toi donc ⊠que me donneras-tu? ») wÊŸmr lh ty ⊠mnÊż yhb Êżnt (« il lui dit: prĂ©pares-toi ⊠que me donnes-tu? ») Lh: ajout de clarification
yhb: au prĂ©sent et non au futur (Lamsa conserve le futur dans sa traduction)38:17 ÊŸim titen eravon Êżad shelakhekha (« si tu donnes un gage jusquâĂ ton envoi ») ÊŸn thl li mĆĄknÊŸ ÊżdmÊŸ dmĆĄdr ÊŸnt (« si tu me donnes un gage jusquâau moment oĂč tu lâenverras ») Li: ajout de clarification
ÊżdmÊŸ dmáčŁdr: idem38:18 áž„otamekha ouftilekha oumatekha ⊠vatahar lo (« Ton sceau, ton cordon et le bĂąton ⊠et elle (litt.) lui conçut ») Êżzqtk wĆĄwĆĄpk wáž„wáčrÊŸ ⊠wbáčnt mnh (« et elle conçut de lui ») SwĆĄpk: « habit » ou « voile », cf. Lamsa et les Targoumim
Mnh: contrairement aux Targoumim qui ont rendu [vatahar] lo par leih en conservant la prĂ©position accusative du verset hĂ©breu, la Peshitta prĂ©fĂšre mnh qui marque un datif comme câest le cas en Gn 19:36 (vatehareina ⊠mĂšavihen) ; les Targoumim effectuent le mĂȘme choix en Gn 38:35, oĂč lo [ani hara] est rendu par mineih.38:21 ett anshei meqoma ⊠ayĂš haqdesha hi baeinayim Êżal haderekh ⊠lo hayta bazĂš qdesha (« aux gens de (litt.) son lieu ⊠OĂč est la prostituĂ©e qui se tient Ă Einayim sur le chemin? ⊠Il (litt.) nây avait pas ici de prostituĂ©e ») lÊżnĆĄy ÊŸtrÊŸ ⊠ʟykÊŸ hy znytÊŸ dytbÊŸ bplĆĄt ÊŸwráž„tÊŸ ⊠lyt hrkÊŸ znytÊŸ (« aux gens du lieu ⊠OĂč est la prostituĂ©e qui Ă©tait assise Ă la croisĂ©e des chemins? ⊠Il nây a pas ici de prostituĂ©e ») ÊŸtrÊŸ: cf. la Bible samaritaine sur ce verset
znytÊŸ: la Peshitta ne distingue pas zona de qdesha
BplĆĄt ÊŸwráž„tÊŸ: traduction Ă©vitant les interprĂ©tations homilĂ©tiques
Lyt hrkÊŸ: rĂ©ponse au temps prĂ©sent et non au passĂ©.38:23 pen niyhyĂš labouz (« de crainte que nous soyons raillĂ©s ») dlmÊŸ ÊŸhwÊŸ gwáž„kÊŸ (« de crainte que je ne sois raillĂ© ») ÊŸhwÊŸ: au singulier car le compagnon nâest quâun Ă©missaire et Juda est le seul concernĂ© par lâaffaire. 38:24 Vayehi kemishlosh áž„odashim ⊠lĂšmor ⊠vĂšgam hinĂš hara liznounim (« Environ trois mois aprĂšs, ⊠en disant:"⊠et elle porte aussi dans son sein le fruit de la prostitution". ») VhwÊŸ mn btr tltÊŸ yráž„yn ⊠wÊŸmrw ⊠whÊŸ mn znywtÊŸ báčnÊŸ (« Au bout de trois mois ⊠et ils dirent:"⊠et câest de la prostitution quâelle a engendrĂ©" ») VhwÊŸ mn btr tltÊŸ yráž„yn: la version Heller traduit comme la Septante (mais Lamsa traduit "about three months later")
wÊŸmrw: cf. Peshitta sur Gn 38:13
mn znywtÊŸ: tournure de phrase plus conforme au syriaque.38:25 Hi moutset ⊠lo ani hara ⊠haker na ⊠vĂšhaptilim (« Elle Ă©tait sortie, ⊠(litt.) lui jâai conçu ⊠reconnais donc ⊠et ces cordons ») Wkd hnwn mpkyn lh ⊠mnh báčnÊŸ âŠ ÊŸĆĄtwdÊż ⊠wĆĄwĆĄpÊŸ (« Ils la font sortir ⊠de lui jâai conçu ⊠reconnais ⊠et ce cordon ») Wkd hnwn mpkyn lh: hi moutset est sans Ă©quivalent direct en syriaque
mnh báčnÊŸ: cf. Peshitta sur Gn 38:18
ÊŸĆĄtwdÊż: le na hĂ©breu nâa pas dâĂ©quivalent syriaque
wĆĄwĆĄp: au singulier (possible diffĂ©rence de version).38:26 ki Êżal ken ⊠(« [elle est plus juste que moi] car il est vrai que ⊠») máčl hnÊŸ ⊠(« [elle est plus juste que moi] Ă cause de ceci: ») Máčl hnÊŸ: traduction littĂ©rale mais qui peut donner lieu Ă la lecture alternative « [elle est plus juste que moi.] Ă cause de ceci, je ne lâai pas donnĂ©e ⊠» (cf. JubilĂ©s XLI:22). Il semble nĂ©anmoins que la premiĂšre lecture doive ĂȘtre prĂ©fĂ©rĂ©e (Hayes 1995, p. 75-76).
Lamsa traduit « She is more righteous than I; because I did not give her in marriage to Shelah my son »38:28 vayehi velitedah vayiten yad ⊠vatikshor Êżal yado shani (« (litt.) Ce fut lors de son accouchement et il donna la main ⊠elle attacha Ă sa main de lâĂ©carlate ⊠») whwÊŸ dkd yldÊŸ yhb ÊŸydh ⊠ងwáčÊŸ dzhwrytÊŸ wqáčrt Êżl ÊŸydh (« (litt.) Ce fut lorsque lâenfant donna la main ⊠[elle prit] un fil dâĂ©carlate quâelle attacha Ă sa main ») WhwÊŸ dkd: C. Heller indique que cette tournure de phrase rend la lecture plus fluide et se retrouve aussi dans la traduction arabe de Saadia Gaon. Cependant, elle figure par ailleurs dans le Targoum des NĂ©ophytes â qui nâomet cependant pas de prĂ©ciser que « ce fut lorsquâelle accouchait » â et pourrait reflĂ©ter une diffĂ©rence de versions avec le texte massorĂ©tique.
HwáčÊŸ dzhwrytÊŸ: Cf. Targoum Neofiti et Pseudo-Jonathan ; ces lectures rĂ©sultent de JosuĂ© 2:18 t Cantique 4:3.38:29-30 vayqra (« il appela ») wqrt (« elle appela ») DiffĂ©rence de version ou harmonisation. - Convergences et divergences entre le Testament de Juda et les JubilĂ©s, dâaprĂšs Shinan et Zakovitch 1992, p. 234-236,
Testament de Juda JubilĂ©s 41 Hiram lâAdullamite est le chef des bergers de Juda (T. Juda 8:1) Juda envoie auprĂšs de Tamar son berger (JubilĂ©s 41:14) Le roi dâAdullam dont Juda Ă©pouse la fille sâappelle Parsaba/Bar Choua ; Juda lâĂ©pouse aprĂšs avoir Ă©tĂ© enivrĂ© et appĂątĂ© par le roi et sa fille (T. Juda 8:2) La femme prise par Juda comme Ă©pouse a pour nom BedsouĂ«l/Bat Choua ; le livre nâexplique pas ce qui a poussĂ© Juda Ă la prendre en mariage alors quâelle nâest pas aramĂ©enne (JubilĂ©s 41:7-8, cf. 34:20) Er prend pour femme « Thamar dâAram-NaharaĂŻm, fille dâAram » (T. Juda 10:1) Juda prend pour son fils Tamar, une « femme des filles dâAram » (JubilĂ©s 41:1) « Mais Er Ă©tait mauvais, et il lui dĂ©plut quâelle ne soit pas du pays de Canaan ; un ange de Dieu le fit mourir la troisiĂšme nuit, et il ne lâavait pas connue Ă lâinstigation de sa mĂšre car il nâavait pas envie dâengendrer des enfants dâelle » (T. Juda 10:2-3) « Il la prit en haine et ne coucha point avec elle car sa mĂšre Ă©tait des filles de Canaan et il aurait voulu Ă©pouser une femme de la famille de sa mĂšre mais Juda son pĂšre ne le lui permettait pas. Et cet aĂźnĂ© Ă©tant mĂ©chant, Dieu le fit mourir » (JubilĂ©s 41:2-3) Juda voulait donner ChelĂą Ă Thamar « mais sa mĂšre ne mâen donna pas lâoccasion » car elle en voulait Ă Thamar de ne pas ĂȘtre des filles de Canaan comme elle [âŠ] Lorsque Juda Ă©tait parti, elle alla prendre une femme pour ChelĂą parmi les filles de Canaan. Juda, lâapprenant, la maudit dans son amertume « et elle mourut elle aussi dans sa mĂ©chancetĂ© avec ses fils » (T. Juda 10:7 & 11-3-5) « Il grandit et Bat Choua la femme de Juda ne donna pas son fils ChelĂą Ă Tamar ; Bat Choua la femme de Juda mourut en la cinquiĂšme annĂ©e de ces sept ans » (JubilĂ©s 41:7-8) Thamar Ă©blouit Juda par ses atouts dâapparat. Juda Ă©tant un roi, les gages quâil donne Ă Thamar sont des insignes royaux (T. Juda 12:4) Tamar sâembellit en se parant ; les JubilĂ©s ne glosent pas sur les gages laissĂ©s Ă Tamar par Juda (JubilĂ©s 41:9) Aucune mention nâest faite des jumeaux nĂ©s de Thamar Il est Ă peine fait mention des jumeaux nĂ©s de Tamar, sans sâattarder sur les circonstances de leur naissance (JubilĂ©s 41:21-22) Lâunion de Juda et Thamar est un scandale moral Lâunion de Juda et Tamar est un scandale lĂ©gal Juda confesse que sans son repentir et les priĂšres de Jacob, il serait mort sans descendance mais le Dieu de ses pĂšres le prend en pitiĂ© car il a fait ces choses sans en avoir conscience (T. Juda 19:3) Juda confesse amplement sa faute dâavoir couchĂ© avec sa bru et sâen repent jusquâĂ ce quâil lui soit annoncĂ© en rĂȘve que le pardon lui a Ă©tĂ© accordĂ© (JubilĂ©s 41:23-26)
Ăpoque mĂ©diĂ©vale
- Du texte hébreu au texte massorétique de GenÚse 38, avec les notes massorétiques (se lit de droite à gauche):
Notes massorĂ©tiques Traduction (Chouraqui) Transcription dâaprĂšs la norme acadĂ©mique de la SBL Texte massorĂ©tique Texte hĂ©breu verset Et câest en ce temps: Iehouda descend de chez ses frĂšres. Il tend jusque chez un homme dââAdoulĂąm. Son nom, Hira. WayÄhĂź bÄÊżÄáč hahĂźÊŸ wayÄred yÄhĆ«dĂą mÄÊŸÄt ÊŸeáž„Äyw wayÄáč Êżad ÊŸĂźĆĄ ÊżÄdullÄmĂź ûƥmo áž„ĂźrĂą ŚÖ·ÖœŚÖ°ŚÖŽŚÖ ŚÖžÖŒŚąÖ”ÖŁŚȘ ŚÖ·ŚÖŽÖŚŚ ŚÖ·ŚÖ”֌քŚšÖ¶Ś ŚÖ°ŚŚÖŒŚÖžÖŚ ŚÖ”ŚÖ”ÖŁŚȘ ŚÖ¶ŚÖžÖŚŚ ŚÖ·ŚÖ”ÖŒÖŚ ŚąÖ·ŚÖŸŚÖŽÖ„ŚŚ©Ś ŚąÖČŚÖ»ŚÖžÖŒŚÖŽÖŚ ŚÖŒŚ©Ö°ŚŚÖ„ŚÖč ŚÖŽŚŚšÖžÖœŚŚ ŚŚŚŚ ŚŚąŚȘ ŚŚŚŚ ŚŚŚšŚ ŚŚŚŚŚ ŚŚŚȘ ŚŚŚŚ ŚŚŚ ŚąŚ ŚŚŚ© ŚąŚŚŚŚ ŚŚ©ŚŚ ŚŚŚšŚ 38:1 38:2 38:3 38:4 38:5 38:6 38:7 38:8 38:9 38:10 ĆĄážy ÊŸalmÄnĂą ážĂȘt (retour Ă la maison) - six occurrences: Gn 38:11 (deux fois), 2 Sam 6:11 & 13:20, JĂ©r 36:22, 2 Chr 26:21
watÄĆĄeáž: douze occurrences, listĂ©es en Gn 31:34Iehouda dit Ă Tamar, sa bru: « Habite en veuve la maison de ton pĂšre, jusquâĂ ce que grandisse ShĂ©la, mon fils. » Oui, il avait dit: « Afin quâil ne meure pas, lui aussi, comme ses frĂšres ! » WayoÊŸmÄr yÄhĆ«dĂą lÄtÄmÄr kalÄtĂŽ ĆĄážy ÊŸalmÄnĂą ážĂȘtÖŸÊŸÄážyáž” ÊżadÖŸyigdal ĆĄÄlĂą ážnĂź kĂź ÊŸÄmar penÖŸyÄmĂ»t gamÖŸhĂ»ÊŸ kÄÊŸeáž„Äyw watÄleáž” tÄmÄr watÄĆĄeáž bĂȘt ÊŸÄážĂźhÄ ŚÖ·ŚÖčÖŒÖŁŚŚÖ¶Śš ŚÖ°ŚŚÖŒŚÖžŚÖ© ŚÖ°ŚȘÖžŚÖžÖšŚš ŚÖ·ÖŒŚÖžÖŒŚȘÖŚÖč Ś©Ö°ŚŚÖŽÖ§Ś ŚÖ·ŚÖ°ŚÖžŚ ÖžÖŁŚ ŚÖ”ŚŚȘÖŸŚÖžŚÖŽÖŚŚÖ° ŚąÖ·ŚÖŸŚÖŽŚÖ°ŚÖ·ÖŒŚÖ Ś©Ö”ŚŚÖžÖŁŚ ŚÖ°Ś ÖŽÖŚ ŚÖŽÖŒÖŁŚ ŚÖžŚÖ·ÖŚš Ś€Ö¶ÖŒŚÖŸŚÖžŚÖ„ŚÖŒŚȘ ŚÖ·ÖŒŚÖŸŚÖŚÖŒŚ ŚÖ°ÖŒŚÖ¶ŚÖžÖŚŚ ŚÖ·ŚȘÖ”ÖŒÖŁŚÖ¶ŚÖ° ŚȘÖžÖŒŚÖžÖŚš ŚÖ·ŚȘÖ”ÖŒÖŚ©Ö¶ŚŚ ŚÖ”֌քŚŚȘ ŚÖžŚÖŽÖœŚŚÖžŚ ŚŚŚŚŚš ŚŚŚŚŚ ŚŚȘŚŚš ŚŚŚȘŚ Ś©ŚŚ ŚŚŚŚ Ś ŚŚŚȘ ŚŚŚŚ ŚąŚ ŚŚŚŚ Ś©ŚŚ ŚŚ Ś ŚŚ ŚŚŚš Ś€Ś ŚŚŚŚȘ ŚŚ ŚŚŚ ŚŚŚŚŚ ŚŚȘŚŚ ŚȘŚŚš ŚŚȘŚ©Ś ŚŚŚȘ ŚŚŚŚ 38:11 - DiffĂ©rences entre le texte massorĂ©tique de GenĂšse 38 et le Tafsir :
verset texte massorĂ©tique et traduction du Rabbinat Tafsir dâaprĂšs lâedition Derenbourg et les notes de Kappah 1984, p. 56-57 Explications et remarques dâaprĂšs le mĂȘme, ainsi que Blachman 2013 38:2 ⊠fille dâun homme cananĂ©en ⊠fille dâun homme de commerce LâĂ©dition Derenbourg reproduit lâeuphĂ©misme prĂ©sent dans certains Targoumim mais le Taj traduit « cananĂ©en » sans interpolation. 38:3-5 ⊠il appela ⊠elle appela ⊠elle appela ⊠et il Ă©tait Ă Kezib ⊠et elle lâappela ⊠et elle lâappela ⊠et elle lâappela ⊠et Juda se trouvait Ă Khziv Le Tafsir de lâĂ©dition Derenbourg reproduit la version du Targoum Pseudo-Jonathan, Ă lâencontre du texte massorĂ©tique. Le rabbin Qappah nâen fait cependant pas mention.
Table récapitulative des variantes entre les divers témoins textuels de GenÚse 38
verset | Texte massorétique | Bible samaritaine | Septante | Targoum Onkelos | Targoum Pseudo-Jonathan | Targoum Neophyti | Peshitta | Vulgate | Explications et remarques |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
38:2 | ûƥmo ĆĄĂ»Êża (masc.) | wĆĄÄmu ĆĄĆ« (m) | Ăš onoma Sava (fĂ©m.) | ûƥmĂȘ ĆĄĂ»Êża (m) | ûƥmĂȘ ĆĄĂ»Êża (m) | ûƥmĂȘ ĆĄĂ»Êża (m) | wĆĄmÊŸ ĆĄwÊż (f?) | vocabulo Suae (m) | La lecture de la Septante semble lui ĂȘtre propre car celle de la Peshitta est tout entiĂšre tributaire dâun point diacritique qui figure dans la version Heller 1927 mais non dans le Codex Ambrosianus B21, principal manuscrit de lâĂ©dition Leiden de la Peshitta (Tal 2016, p. 169* sic). |
38:3-5 | vayiqra vatiqra vatiqra (masc. *1, fém. *2) |
wtiqra wtiqra wtiqra (f *3) |
ekalessen ekalessen ekalessen (f *3) |
ouqra ouqrat ouqrat (m *1, f *2) |
ouqrat ouqrat ouqrat (f *3) |
ouqrat ouqrat ouqrat (f *3) |
wqrÊŸ wqrÊŸ wqrÊŸ (m *3) |
vocavitque nominavit appelavit (f *3) |
La version figurant dans la Bible samaritaine et la Septante apparaĂźt dans dâautres tĂ©moins textuels ainsi que dans des manuscrits de la Bible hĂ©braĂŻque et dans les manuscrits connus de GenĂšse Rabba. Emerton juge de ce fait raisonnable dâamender la version massorĂ©tique de GenĂšse 38:3 selon la Septante, Shinan et Zakovitch pensent au contraire que leur lecture relĂšve dâune volontĂ© dâharmonisation, ainsi quâillustrĂ© par le contre-exemple de la Peshitta. |
38:25 | vĂšhaptilim (pluriel) |
waffÄÌtÉl (singulier) |
ormiskos (singulier) |
shoshifei/shoshifa (pluriel/singulier) |
ĆĄwĆĄypÌÊŸ (singulier) |
armilla (singulier) |
|||
Sources juives
- (he)/(fr) MĂ©chon MamrĂ© et Sefarim, « La GenĂšse Chapitre 38 - ŚÖ°ÖŒŚšÖ”ŚŚ©ÖŽŚŚŚȘ ŚŚ », dans La Bible bilingue HĂ©breu-Français,â (lire en ligne)
- (he)/(en) Abraham Tal, Genesis, Stuttgart, Deutsche Bibelgesellschaft, coll. « Biblia Hebraica Quinta » (no 7),
- (he) « Miqraot gdolot Haketer, Bereshit lamed het im Ein Hamassora » (consulté le )
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Voir aussi
Article connexe
Liens externes
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