Homélie
Une homĂ©lie est, dans plusieurs confessions chrĂ©tiennes, un commentaire oral de circonstance prononcĂ© au milieu du service liturgique, aprĂšs la lecture de l'Ăvangile et avant lâEucharistie, et prenant toujours comme point de dĂ©part un extrait des Saintes Ăcritures. Le mot est devenu synonyme de « sermon ». LâhomĂ©lie a reprĂ©sentĂ© un moyen efficace de propager la foi chrĂ©tienne dans toutes les couches de la sociĂ©tĂ©.
Origine
Le mot « homĂ©lie » vient du latin homilia, dĂ©rivĂ© du grec ancien : áœÎŒÎčλία, homilĂa. Le mot dĂ©signait Ă lâorigine aussi bien une rĂ©union, ou une association de personnes quâune relation ou conversation familiĂšres, informelles. Homilia comme sermo renvoient ainsi Ă des actes ordinaires de communication entre les individus, sens bien diffĂ©rent de celui que ces mots prendront plus tard chez les chrĂ©tiens[1].
L'homĂ©lie chrĂ©tienne dĂ©signe un acte liturgique de prĂ©dication devant lâecclesia dont la finalitĂ© est clairement pĂ©dagogique ; en dâautres termes, lâhomĂ©lie chrĂ©tienne est un instrument de catĂ©chĂšse. Ă lâorigine, on trouve l'homĂ©lie synagogale en usage dans le judaĂŻsme depuis Esdras et Ă l'Ă©poque de JĂ©sus. Des chercheurs tels que Maurice Sachot ont dĂ©montrĂ© l'influence de cette pratique sur le christianisme primitif mais aussi sur les sermons de JĂ©sus lui-mĂȘme[2]. Ă partir de la conversion de Constantin en 313, lâhomĂ©lie connaĂźt un brusque surcroĂźt dâintĂ©rĂȘt dans la population urbaine ; « elle plonge alors ses racines dans lâEmpire et sa tradition oratoire dâenseignement urbain entretenue par les philosophes, les rhĂ©teurs et les sophistes que nous pouvons considĂ©rer dâune certaine maniĂšre comme les prĂ©curseurs des orateurs chrĂ©tiens. En sâappropriant les procĂ©dĂ©s de lâĂ©loquence et de la rhĂ©torique paĂŻennes Ă des fins missionnaires, les Ă©vĂȘques et presbytres perpĂ©tuaient donc sans solution de continuitĂ© une activitĂ© culturelle familiĂšre de la citĂ© antique[3]. »
Description
Des temps apostoliques au christianisme primitif
Aux Ier et IIe siĂšcles apr. J.-C., la prĂ©dication demeurait le privilĂšge des prophĂštes et des professeurs. Avec lâinstauration de lâĂ©piscopat, lâĂ©vĂȘque devient le seul autorisĂ© Ă prĂȘcher et se rĂ©serve dĂ©sormais la prĂ©rogative dâinstruire la communautĂ© des fidĂšles. Mais il peut, selon les besoins ou commoditĂ©s du moment, dĂ©lĂ©guer cette responsabilitĂ© aux presbytres, comme le fit Flavien avec Jean Chrysostome. Dans lâAntiquitĂ©, lâhomĂ©lie Ă©tait prononcĂ©e, comme de nos jours, aprĂšs les lectures et avant lâEucharistie. Pendant le CarĂȘme et la semaine de PĂąques, lâofficiant Ă©tait tenu dâĂ©laborer un rĂ©pertoire dâhomĂ©lies spĂ©cifiques. Le contenu du prĂȘche conjuguait frĂ©quemment lâexĂ©gĂšse biblique proprement dite avec des observations de discipline et de morale religieuses. Les homĂ©lies pouvaient ĂȘtre lues, rĂ©citĂ©es de mĂ©moire ou improvisĂ©es, comme dans le cas de Jean Chrysostome. Habituellement longues, elles sâĂ©tendaient entre 44 et 70 minutes, selon la pĂ©riode de lâannĂ©e, les fidĂšles demeurant debout pendant toute cette durĂ©e.
Aux IIe et IIIe siĂšcles, lâĂ©loquence chrĂ©tienne est reprĂ©sentĂ©e par ClĂ©ment d'Alexandrie, Hippolyte de Rome et OrigĂšne. Ce nâest quâau IVe siĂšcle que la prĂ©dication chrĂ©tienne connaĂźt son plein Ă©panouissement avec Basile de CĂ©sarĂ©e, GrĂ©goire de Nysse, GrĂ©goire de Nazianze, Ambroise de Milan, Augustin d'Hippone, et Jean Chrysostome[4]. LâhomĂ©lie eut ainsi pour fonction de rappeler Ă un public parfois illettrĂ© lâenseignement des Ăcritures et de fixer les grandes orientations de lâĂglise en matiĂšre de doctrine morale. En ce sens, elle fut un instrument rhĂ©torique dâĂ©ducation et joua un rĂŽle capital dans lâĂ©tablissement du christianisme au IVe siĂšcle.
Ă lâĂ©poque moderne
- Catholicisme
Dans l'Ăglise catholique, l'homĂ©lie peut ĂȘtre prononcĂ©e par un prĂȘtre ou un diacre[5].
L'homĂ©lie consiste, en suivant le dĂ©veloppement de lâannĂ©e liturgique, Ă expliquer la foi et la vie chrĂ©tiennes Ă partir de la Bible[5]. Elle est recommandĂ©e comme faisant partie de la liturgie elle-mĂȘme. Lors des messes cĂ©lĂ©brĂ©es avec le concours du peuple les dimanches et jours de fĂȘte de prĂ©cepte, on ne lâomet que pour un motif grave[5].
Elle est donnĂ©e juste aprĂšs la lecture des textes bibliques du jour (en clĂŽture de la liturgie de la Parole). Elle est suivie dâun temps de recueillement, avant le Credo (s'il y a lieu) et la poursuite de la cĂ©lĂ©bration par la liturgie eucharistique.
Le pape BenoĂźt XVI, dans lâexhortation apostolique postsynodale Sacramentum Caritatis, insiste sur la qualitĂ© de lâhomĂ©lie et sur sa vocation catĂ©chĂ©tique[6].
- Orthodoxie
- Luthéranisme
- Anglicanisme
Bibliographie
- Gerd Theissen et al., Le Défi homilétique, l'ExégÚse au service de la prédication, Labor et Fides, 1993, 320 p.
Notes et références
- Gilvan Ventura da Silva, « Jean Chrysostome et la christianisation de la citĂ© antique », Revue Française dâHistoire des IdĂ©es politiques, no 31,â 1er semestre 2010, p. 41 (lire en ligne).
- Maurice Sachot, L'Invention du Christ. GenĂšse d'une religion, Ăditions Odile Jacob, « Le champ mĂ©diologique », 1998, rĂ©Ă©d. poche Odile Jacob, 2011.
- Gilvan Ventura da Silva, op. cit., p. 43.
- Gilvan Ventura da Silva, op. cit., p. 41 Ă 43.
- Le Code de droit canonique de 1983 prescrit Ă ce sujet : (Can. 767.) « Parmi les formes de prĂ©dication lâhomĂ©lie, qui fait partie de la liturgie elle-mĂȘme et est rĂ©servĂ©e au prĂȘtre ou au diacre, tient une place Ă©minente ; au cours de lâannĂ©e liturgique, les mystĂšres de la foi et les rĂšgles de la vie chrĂ©tienne y seront exposĂ©s Ă partir du texte sacrĂ©. Ă toutes les messes qui se cĂ©lĂšbrent avec concours du peuple les dimanches et jours de fĂȘte de prĂ©cepte, lâhomĂ©lie doit ĂȘtre faite et ne peut ĂȘtre omise que pour une cause grave. Il est hautement recommandĂ©, sâil y a un concours de peuple suffisant, de faire lâhomĂ©lie mĂȘme aux messes cĂ©lĂ©brĂ©es en semaine surtout au temps de lâAvent et du CarĂȘme, ou Ă lâoccasion dâune fĂȘte ou dâun Ă©vĂ©nement douloureux. »
- « Elle a pour fonction de favoriser une comprĂ©hension plus large et plus efficace de la Parole de Dieu dans la vie des fidĂšles. Câest pourquoi les ministres ordonnĂ©s doivent « prĂ©parer lâhomĂ©lie avec soin, en se basant sur une connaissance appropriĂ©e de la Sainte Ăcriture » (140). On Ă©vitera les homĂ©lies gĂ©nĂ©rales et abstraites. Je demande en particulier aux ministres de faire en sorte que lâhomĂ©lie mette la Parole de Dieu proclamĂ©e en Ă©troite relation avec la cĂ©lĂ©bration sacramentelle (141) et avec la vie de la communautĂ©, en sorte que la Parole de Dieu soit rĂ©ellement soutien et vie de lâĂglise (142). Que lâon garde donc prĂ©sent Ă lâesprit le but catĂ©chĂ©tique et exhortatif de lâhomĂ©lie. Il paraĂźt opportun, Ă partir du lectionnaire triennal, de proposer aux fidĂšles, avec discernement, des homĂ©lies thĂ©matiques qui, tout au long de lâannĂ©e liturgique, traiteront les grands thĂšmes de la foi chrĂ©tienne, puisant Ă ce qui est proposĂ© avec autoritĂ© par le MagistĂšre dans les quatre « piliers » du CatĂ©chisme de lâĂglise catholique et dans le rĂ©cent AbrĂ©gĂ© : la profession de foi, la cĂ©lĂ©bration du mystĂšre chrĂ©tien, la vie dans le Christ, la priĂšre chrĂ©tienne (143). »
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
- HomĂ©lie sur le site de la ConfĂ©rence des Ă©vĂȘques de France