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LĂ©virat

Le lévirat est un type particulier de mariage où le frère d'un défunt épouse la veuve de son frère, afin de poursuivre la lignée de son frère. Les enfants issus de ce remariage ont le même statut que les enfants du premier mari. Durant l'Antiquité, le lévirat était pratiqué notamment par les Égyptiens, les Babyloniens, les Phéniciens, les Hébreux et les Xiongnu.

Le terme est un dérivé du mot latin levir, qui signifie « frère du mari ».

Dans la Bible

Le lĂ©virat est dĂ©fini dans l'Ancien Testament de la Bible (ou Tanakh dans le judaĂŻsme) au Livre du DeutĂ©ronome (Dt 25,5-10). Chez les HĂ©breux, si deux frères demeurent ensemble et que l'un d'eux vienne Ă  mourir sans laisser d'enfant, le frère survivant devait Ă©pouser la veuve du dĂ©funt, toute autre alliance Ă©tant interdite Ă  la veuve ; en cas de refus de la part du frère, la femme pouvait nĂ©anmoins Ă©chapper Ă  l'interdiction d'exogamie par la cĂ©rĂ©monie de la Halitsa durant laquelle elle devait cracher au visage de son beau-frère, et lui Ă´ter l'une de ses chaussures, et les personnes prĂ©sentes lors de cette cĂ©rĂ©monie, en IsraĂ«l, nommaient la maison, « la maison du dĂ©chaussĂ© » (Dt 25,9-10) . Cela avait pour effet de dĂ©lier les deux protagonistes  de leur mutuelle obligation. 

Le lévirat (Yibboum), et la renonciation au lévirat, jouent un rôle important dans les histoires d'Er, d'Onan et de Tamar, (Gn 38,1-26) d'une part, de Ruth (Rt 4,1-13) d'autre part, donc dans la lignée messianique de David (Rt 4,14-22) et de Jésus-Christ (Mt 1,1-16).

En Afrique

Cette pratique, souvent forcĂ©e et combinĂ©e avec la polygamie, est notamment encore pratiquĂ©e dans certains pays africains. [1] Le BĂ©nin l'a interdite en mĂŞme temps que la polygamie le [2].  Elle est encore pratiquĂ©e dans plusieurs pays d'Afrique de l'Ouest, dont le Burkina Faso[3], le SĂ©nĂ©gal[4], la GuinĂ©e[5] ou le Togo[6].  Elle existe Ă©galement dans certaines communautĂ©s du Tchad

On peut aussi constater que cette pratique est encore en Ă©veil dans certaines ethnies en RĂ©publique du Congo, notamment chez les BĂ©mbĂ©s, Mbochis et TĂ©kĂ©s. 

Le lévirat est dénoncé comme étant une pratique rétrograde, limitant les droits des femmes et maintenant l'idée qu'« une veuve fait partie de l'héritage »[7]. Elle avait notamment été interdite par le gouvernement de Thomas Sankara au Burkina Faso[8].

Certaines campagnes de prĂ©vention du sida, en Afrique, stigmatisent la pratique du lĂ©virat en indiquant que celle-ci favorise la propagation de la maladie.  Outre le fait que cela n'est pas vrai sur le plan Ă©pidĂ©miologique, certains auteurs font remarquer que la pratique du lĂ©virat est la seule mesure de protection sociale dont bĂ©nĂ©ficient les veuves dans ces pays et qu'il n'est pas forcĂ©ment bienvenu de lutter contre elle sans en remplacer l'aspect social[9]

En Amérique

Claude Lévi-Strauss, dans son livre Tristes Tropiques, évoque le lévirat, pratiqué par les Amérindiens tupi-kawahib du Brésil[10].

En Asie

Le lévirat est une tradition déjà pratiquée dans l'antiquité chez les nomades Xiongnu (que certains historiens assimilent aux Huns), et perpétuée chez les Mongols, dans lequel le fils de la veuve doit l'épouser[11]. Il existe également des cas où ça n'est pas l'enfant, mais un frère qui épouse une veuve, comme dans le cas d'Anu khatan, qui épousa Galdan Boshugtu Khan, le frère de son ancien mari, Sengge lorsqu'il succéda au trône de celui-ci après sa mort en 1670[12].

En Europe

Le lévirat était pratiqué en Hongrie jusqu'au règne d'Étienne Ier[13].

Notes et références

  1. Philippe Antoine et Marc Pilon, « La polygamie en Afrique : quoi de neuf ? », La chronique du CEPED,‎ , p.02 (lire en ligne)
  2. Muriel Devey, « Polygamie hors la loi », Jeune Afrique,‎ (lire en ligne)
  3. Immigration and Refugee Board of Canada, « Burkina Faso : information sur la pratique du lévirat, y compris la fréquence et le délai à respecter après le décès pour la demande de lévirat ; la possibilité de refus par le frère de l'homme décédé, y compris les voies de droit qui lui sont ouvertes (2013-juillet 2014) », sur www.refworld.org, (consulté le )
  4. Monique Gessain et Annabel Desgrées du Loû, « L'évolution du lévirat chez les Bassari », Journal des africanistes,‎ , pp. 225-248 (lire en ligne)
  5. Maia GRINBERG et Caroline LEJEUNE, « Étude de jurisprudence sur les pratiques traditionnelles néfastes liées au genre - Le cas de la Guinée » [PDF], sur www.intact-association.org, (consulté le ), p.31
  6. Afrotribune, « Lévirat: les réalités d’une coutume de mariage décriée en Afrique », sur afrotribune.com, (consulté le )
  7. Association des Femmes Juristes du Bénin protégeant les femmes au Bénin
  8. Pierre Lepidi, « Thomas Sankara, le féministe », sur lemonde.fr, (consulté le )
  9. « Revue de presse sur le thème du sida et de la dynamique familiale »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?)
  10. Claude LĂ©vi-Strauss, Tristes Tropiques, Paris, Plon, , poche (ISBN 978-2-266-11982-5), p. 422 et suivantes
  11. https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k414880c/f386.item.zoom
  12. (Courant 1912, p. 48) [lire en ligne]
  13. Joël Chandelier, L'Occident médiéval : D'Alaric à Léonard (400 - 1450), Éditions Belin, coll. « Mondes anciens », , 700 p. (ISBN 978-2-7011-8329-9), chap. 5 (« La naissance de l'Europe féodale (888-1050) »), p. 256.

Voir aussi

Bibliographie

  • Le Tanakh et ancien testament de la Bible chrĂ©tienne : Livre du DeutĂ©ronome - Chap 25, Verset 5-10 : Lois du lĂ©virat
  • (de) P. Koschaker, « Zum Levirat nach hethitischem Recht, 1933, Revue hittite et asianique, n° 3, p. 77-89
  • (en) Millar Burrows, « Levirate Marriage in Israel », 1940, Journal of Biblical Literature, vol. 59, n° 1, p. 23-33
  • P. Cruveilhier, « Le lĂ©virat chez les HĂ©breux et les Assyriens », Revue biblique, 1925, n° 34, p. 524-546
  • Monique Gessain, et Annabel DesgrĂ©es du LoĂ», « L’évolution du lĂ©virat chez les Bassari », Journal des Africanistes, 1998, n° 68, 1-2, p. 225-247.
  • P. S. Sow, B. Guèye, 0. Sylla, M. A. Faye et A. Coll-Seck, « Pratiques traditionnelles et transmission de l'infection Ă  VIH au SĂ©nĂ©gal : l'exemple du lĂ©virat et du sororat », MĂ©decine et maladies infectieuses, 1998, vol. 28, n° 2, p. 203-205
  • B. Taverne, « StratĂ©gie de communication et stigmatisation des femmes : lĂ©virat et sida au Burkina Faso », Sciences sociales et santĂ©, 1996, vol. 14, n° 2, p. 87-106
  • J. Mikilan, « Le Conseil des esprits», L'Harmattan SĂ©nĂ©gal, 2009, p. 41-47
  • Maurice Courant, Asie centrale aux XVIIe et XVIIIe siècles : empire Kalmouk ou empire Mantchou ?, (BNF 31974596, lire en ligne), p. 48-51

Filmographie

  • "Ndono" (Sida et lĂ©virat), court mĂ©trage sĂ©nĂ©galais (13 min) de Mamadou Thioune, sur un scĂ©nario de Serigne Mor Mbaye, rĂ©alisĂ© en 1999 par le Centre de guidance infantile de Dakar (CEGID) en collaboration avec MĂ©dia-Centre de Dakar
  • Le DĂ©chaussĂ©, film de fiction franco-sĂ©nĂ©galais de Laurence Attali, 2003

Articles connexes

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