Éditions du Cerf
Les éditions du Cerf sont une maison d’édition française fondée en 1929 par le dominicain Marie-Vincent Bernadot. Gérée par l’ordre dominicain qui en est toujours propriétaire, elle est spécialisée dans la publication d'ouvrages religieux, exégétiques, historiques et philosophiques.
Comme un cerf altéré cherche l'eau vive |
Fondation |
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Type | |
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Forme juridique |
Société anonyme à conseil d'administration (s.a.i.) |
Domaine d'activité |
Édition de livres |
Siège |
Paris (24, rue des Tanneries) |
Pays |
Effectif |
20[1] |
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Fondateur | |
Directeur |
Jean-François Colosimo (depuis ) |
Secrétaire général |
Alexandra Berthet (d) (depuis ) |
Chiffre d'affaires |
6 510 700 €[1] |
RĂ©sultat net |
42 500 €[1] |
Site web |
Sous la direction de Jean-François Colosimo depuis 2013, la maison d'édition élargit son champ au profit de textes et d'essais plus médiatisés.
Historique
XXe siècle
Les éditions du Cerf sont fondées en 1929, à la demande du pape Pie XI[2], par le dominicain Marie-Vincent Bernadot (1883-1941), proche de la pensée du souverain pontife[3]. Le cerf fait référence au psaume 41, verset 2 :
« Comme un cerf altéré cherche l'eau vive, ainsi mon âme te cherche toi, mon Dieu[4]. »
Le père Marie-Vincent Bernadot a déjà créé, en 1919, la revue La Vie spirituelle, dans le but de ramener la spiritualité chrétienne à ses vraies sources, l’Écriture sainte, les Pères de l'Église et les grands mystiques. Par la suite, en 1928, le père Bernadot — soutenu par le pape Pie XI qui enjoint au maître général de l'ordre de le transférer à Paris — fonde, avec le père Étienne Lajeunie d’autres intellectuels comme Jacques Maritain, La Vie intellectuelle afin de créer une alternative à l’influence des thèses de Charles Maurras et de son mouvement l’Action française, condamnés par Rome en 1926[5] et dont il est « convaincu du caractère intrinsèquement pervers »[6].
Un an après le lancement de la revue[7] qui marque une inflexion de l'ordre par rapport au thomisme très scholastique du théologien Réginald Garrigou-Lagrange[3], Bernadot fonde, avec le soutien d'amis qui lui fournissent le capital[8], la société anonyme Les Éditions du Cerf le [9]. Elle partage la même ambition de « contrecarrer l'influence de l'Action française »[10].
La société s'installe avec un petit groupe de dominicains dans une maison à Juvisy-sur-Orge[11].
À partir de 1934, les éditions publient la revue Sept, un hebdomadaire dont la ligne éditoriale est similaire à celle de La Vie intellectuelle mais pour un public plus populaire, qui est édité à Paris mais rédigé à Juvisy[8]. Pour pallier cet inconvénient, le père Bernadot acquiert un immeuble au no 29 boulevard de La Tour-Maubourg, dans le 7e arrondissement de Paris, qui bientôt abrite un couvent dominicain ainsi que la maison d’édition[8]. Il y installe le siège du journal et y transfère son équipe au tournant de 1936 et de 1937[8].
Les éditions du Cerf sont alors avant tout une « maison des revues » qui publie parfois des livres mais ne connait longtemps que la collection « Unam Sanctam » développée à partir de 1937 par le théologien dominicain Yves Congar, tandis que le catalogue comporte surtout des périodiques, le père Bernadot ayant développé pas moins de huit en vingt ans : aux titres existants, s'ajoutent le supplément de La Vie spirituelle, les Documents de La Vie intellectuelle ou encore Chrétienté[8].
Les positions des publications du Cerf, souvent considérées comme non-conformiste par une opinion catholique largement marquée à droite, attirent de plus en plus de critique et Sept est contraint par le Saint-Office de cesser ses activités en août 1937[8]. Lorsque en 1939, à peine élu, Pie XII suspend en 1939 les sanctions contre le journal L'Action française, Marie-Vincent Bernadot s’estime désavoué et abandonne ses fonctions de directeur des éditions et de supérieur du couvent au mois de juillet[8]. Après la déclaration de guerre, il reprend le poste de son successeur le père Boisselot mobilisé puis déporté en Allemagne mais, en mauvaise santé et démoralisé, meurt à cinquante-huit ans le 25 juin 1941[8]. Pendant le reste de la guerre, les équipes sont dispersées et les publications suspendues, à l'exception de La Vie spirituelle[8].
XXIe siècle
En 2011, le siège est transféré dans les locaux du couvent Saint-Jacques, au no 24 rue des Tanneries[9].
En 2013, Jean-François Colosimo, après avoir démissionné de la présidence du Centre national du livre, est nommé président du directoire des éditions du Cerf. Il a comme mission, après trois années de pertes importantes, de revenir à l'équilibre financier et de consolider la ligne éditoriale[12] - [13]. Une partie de l'ancienne équipe quitte la maison d'édition ; l'entreprise réduit le nombre de salariés, qui passe de 49 à 15. Mais, surtout, la ligne éditoriale évolue au profit d'auteurs et de titres ayant plus d'échos médiatiques : ce sont notamment d'Eugénie Bastié, Adieu Mademoiselle en 2016 puis Le Porc émissaire : terreur ou contre-révolution en 2018, de Laetitia Strauch-Bonart Vous avez dit conservateur ? en 2016, de Kévin Boucaud-Victoire La Guerre des gauches en 2017, de Mathieu Bock-Côté L’Empire du politiquement correct en 2019. Ce sont aussi L'Erreur de calcul en 2014 ou Le Nouveau Pouvoir en 2017 de Régis Debray, Notre liberté contre leur libéralisme de Clémentine Autain en 2018, ou encore Le Désordre idéologique de Gaël Brustier en 2017[2].
Controverse
En 2016, vingt-sept dominicains regroupés autour d'Henri Burin des Roziers pétitionnent contre l’intrusion d’une « droite perverse » et se disent vraiment tristes de voir Jean-François Colosimo se rendre au cinquantième anniversaire du magazine Valeurs actuelles, ce qui romprait avec toute une tradition progressiste « qui a fait l’honneur de l’ordre dominicain en France »[14].
Selon Joseph Confavreux (Mediapart), cette pétition n'aurait pas empêché la ligne éditoriale du Cerf de prendre une orientation « réactionnaire » notamment avec la parution en 2019 du livre L’Émancipation promise du politologue Pierre-André Taguieff[15].
Publications
Les éditions du Cerf publient la Bible de Jérusalem, traduction catholique de la Bible en français soutenu contemporain. La première édition sort en 1956, la seconde en 1977, la troisième en 1998.
Collections
Les principales collections du Cerf, par ordre chronologique :
- « Sources chrétiennes », créée en 1941 par Henri de Lubac, Jean Daniélou et Claude Mondésert
- « Lex orandi », créée en 1944 par le Centre national de pastorale liturgique
- « Lectio divina », créée en 1946
- « 7e Art », créée en 1952
- « Initiations », créée en 1955
- « Jusqu'à la joie »,créée en 1961 par Eliette Boulen Poèmes lyriques Chrétiens.
- « Cogitatio fidei », créée en 1963 par Claude Geffré
- « Rites et symboles », créée en 1973 par le Centre national de pastorale liturgique
- « La Nuit surveillée », maison d'édition créée à Paris en 1982 par Jacques Rolland, devenue collection aux Éditions Verdier en 1983, puis au Cerf à partir de 1985
- « Passages », créée en 1986 par Heinz Wismann[16]
- « Humanités », créée en 1994 par Jean-Marc Ferry
- « Josèphe et son temps », créée en 1996 par Étienne Nodet
- « Philosophie et théologie », créée en 1996 par Philippe Capelle
- « Histoire religieuse de l'Europe contemporaine », créée en 1997 par Yves-Marie Hilaire
- « Histoire du christianisme », créée en 1997 par Guy Bedouelle
- « Cerf Littérature », créée en 2000 par Sylvie Parizet
- « Les Cahiers d'Histoire de la Philosophie », créée en 2004 [17]
- « Sources franciscaines », créée en 2008 par Jacques Dalarun
- « Cerf Politique », créée en 2010
- « Orthodoxie », créée en 2010, sous la direction de Hyacinthe Destivelle, o.p. et de l'archiprêtre Jivko Panev, en relation avec le site web Orthodoxie.com
Quelques auteurs publiés
Notes et références
- Au .
- Camille Vigogne Le Coat, « Jean-François Colosimo, éditeur des jeunes conservateurs », Le Monde,‎ (lire en ligne).
- Gérard Cholvy (dir.) et Yves-Marie Hilaire (dir.), Histoire religieuse de la France contemporaine, vol. 2 : 1880/1930, Privat, coll. « Bibliothèque historique Privat », (ISBN 27089-53303), p. 319
- « Traduction française de la Bible utilisée par l'Église catholique : psaume 41 », sur AELF.org, (consulté le ).
- voir à ce sujet André Laudouze, Dominicains français et Action française, 1899-1940, Paris, Éditions Ouvrières, (ISBN 978-2-7082-2610-4), chap. 9 (« L'Action Catholique contre l'Action Française »), p. 131-148
- André Laudouze, Dominicains français et Action française, 1899-1940, Paris, Éditions Ouvrières, (ISBN 978-2-7082-2610-4), chap. 9 (« L'Action Catholique contre l'Action Française »), p. 132
- Henri-Jean Martin et Roger Chartier, Histoire de l'édition française, vol. IV : Le livre concurrencé (1900-1950), Fayard, (ISBN 978-2-903181-54-3), p. 275
- Étienne Fouilloux, « BERNADOT Marie-Vincent », Dictionnaire biographique des frères prêcheurs. Dominicains des provinces françaises (XIXe-XXe siècles),‎ (ISSN 2431-8736, lire en ligne, consulté le )
- « Éditions du Cerf (Les) », Dictionnaire biographique des frères prêcheurs. Dominicains des provinces françaises (XIXe-XXe siècles),‎ (ISSN 2431-8736, lire en ligne, consulté le )
- https://www.streetpress.com/sujet/1687965898-action-francaise-ecole-cadres-reactionnaires-darmanin-ministres.
- Martine Sevegrand, Temps présent : Un hebdomadaire (1937-1947), Temps présent, (ISBN 978-2-916842-00-4), p. 18
- Victor De Sepausy, « Jean-François Colosimo nommé à la tête des éditions du Cerf », Actualitte,‎ (lire en ligne).
- Nicolas Senèze, « Jean-François Colosimo à la tête des Éditions du Cerf », La Croix,‎ (lire en ligne).
- Camille Vigogne Le Coat, « Jean-François Colosimo, éditeur des jeunes conservateurs », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
- Joseph Confavreux, « Derrière Taguieff, la dérive éditoriale des éditions du Cerf », sur mediapart.fr, (consulté le ).
- Jean Birnbaum, « Douloureux "Passages" de témoin au Cerf », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
- Recueils collectifs d'études consacrées à des philosophes célèbres. Volumes parus : Heidegger, sous la direction de Maxence Caron (2006) ; Hegel, sous la direction de Maxence Caron, postface de Bernard Bourgeois (2007) ; Kant, sous la direction de Jean-Marie Vaysse (2008) ; Husserl, sous la direction de Jocelyn Benoist, (2008) ; Saint Augustin, sous la direction de Maxence Caron, (2009) ; Simone Weil, sous la direction de Chantal Delsol, (2009) ; Montaigne, sous la direction de Pierre Magnard (2010) ; Saint Thomas d'Aquin, sous la direction de Thierry-Dominique Humbrecht (2010); Schelling, sous la direction de Jean-François Courtine, (2010).
Bibliographie
- Étienne Fouilloux, Tangi Cavalin et Nathalie Viet-Depaule, Les éditions dominicaines du Cerf : 1918-1965, Presses universitaires de Rennes, (ISBN 978-2-7535-5899-1)
- André Laudouze, Dominicains français et Action française, 1899-1940 : Maurras au couvent, Paris, Éditions Ouvrières, (ISBN 978-2-7082-2610-4)
Articles connexes
Liens externes
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