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Jacques MĂ©decin

Jacques Médecin, né le à Nice (Alpes-Maritimes) et mort le à Punta del Este (Uruguay), est un homme politique français, maire de Nice de 1966 à 1990, président du conseil général des Alpes-Maritimes de 1973 à 1990, et secrétaire d'État au Tourisme de 1976 à 1978 dans les gouvernements Chirac I, Barre I et Barre II.

Jacques MĂ©decin
Illustration.
Fonctions
Maire de Nice
–
(24 ans, 7 mois et 5 jours)
Prédécesseur Jean Médecin
Successeur Honoré Bailet
Président du conseil général des Alpes-Maritimes
–
(16 ans, 11 mois et 13 jours)
Prédécesseur Francis Palmero
Successeur Charles Ginésy
Député français
–
(21 ans, 1 mois et 11 jours)
Circonscription 2e des Alpes-Maritimes
Législature IIIe, IVe, Ve, VIe, VIIe et VIIIe (Cinquième République)
Groupe politique PDM (1967-1972)
NI (1972-1973)
RDS (1973-1975)
RI (1975-1978)
UDF (1978-1981)
RPR (1981-1988)
Prédécesseur Diomède Catroux
Successeur Martine Daugreilh
Secrétaire d'État au Tourisme
–
(2 ans, 2 mois et 19 jours)
Président Valéry Giscard d'Estaing
Premier ministre Jacques Chirac
Raymond Barre
Gouvernement Chirac I
Barre I et II
Prédécesseur Gérard Ducray
Successeur François Abadie (indirectement)
Biographie
Date de naissance
Lieu de naissance Nice (France)
Date de décès
Lieu de décès Punta del Este (Uruguay)
Nationalité Française
Parti politique CR
FNRI
PR
RPR
CNIP
Père Jean Médecin
Profession Journaliste

Famille et vie privée

Ascendance, études et carrière professionnelle

Jacques François Xavier Paul Médecin[1] naît le 5 mai 1928 dans l'appartement familial, au 99 quai des États-Unis à Nice[2]. Il est le quatrième et dernier enfant de Jean Médecin et d'Amélie (ou Amélia) Meyer[3] - [4]. Son père vient d'une famille établie depuis longtemps dans le pays niçois (au XVIe siècle à Villefranche-sur-Mer[5], commune voisine de Nice), et sa mère est d'origine niçoise et suisse-allemande[6]. Il est issu d'une famille d'hommes politiques niçois : son père fut maire de Nice pendant 37 ans (1928-1943 et 1947-1965), son grand-père, Alexandre Médecin, fut conseiller général de Nice[7] et adjoint au maire de Nice entre 1886 et 1890[8], et son arrière grand-père, Pierre Médecin, fut conseiller général de Menton de 1870 à 1884 et maire de Villefranche-sur-Mer[9]. Hormis la politique, la tradition familiale s'inscrit dans le domaine du droit : Jean Médecin fut avocat[10], Paul Médecin, l'oncle de Jacques, fut bâtonnier de l'ordre des avocats de Nice, Alexandre Médecin fut professeur de droit et également bâtonnier des avocats[9] de Nice[4] - [5], Pierre Médecin fut docteur en droit, avocat et juge de paix du canton ouest de Nice[5]. À la naissance de Jacques Médecin, son père est alors adjoint au maire de Nice à l'Instruction publique[11] et sera quelques mois plus tard, en décembre, élu maire de la ville après une élection municipale partielle.

Après des études secondaires au lycée de garçons de Nice (actuel lycée Masséna) et le baccalauréat[2], Jacques Médecin s'inscrit à l'institut d'études juridiques en vue d'obtenir une capacité en droit[12]. Mais au bout d'un an d'études, il décide de s'installer au Danemark, où il restera une année, à la suite d'un voyage dans ce pays[12]. Il effectue ensuite son service militaire en tant qu'interprète au 2e bureau de l'armée de l'air en Allemagne puis à l'état-major à Paris[12]. Il reprend par la suite ses études de droit à Paris et obtient un baccalauréat en droit[12]. Mettant un terme à ses études, il travaille dans différents cabinets ministériels : en 1951 auprès d'Émile Hugues alors secrétaire d'État aux Finances et aux Affaires économiques, en 1952 auprès de Léon Martinaud-Déplat alors ministre de la Justice, et en 1953 auprès du secrétaire d'État à l'Agriculture[12].

Il devient par la suite journaliste[13]. Il exerce cette profession de 1954 à 1966 pour divers journaux français et étrangers[13] : d'abord au service de politique intérieure[14] de Paris-Presse puis de Nice-Matin durant cinq ans ; il devient également correspondant à Nice de Libération (journal édité de 1941 à 1964) et de L'Aurore[12]. En 1959, il quitte Nice-Matin et devient correspondant de United Press International et de Newsweek[12]. Il est également un temps journaliste chez Europe 1[15].

Famille

Il épouse en 1954 Claude Mailley, un mannequin de Givenchy, environ une semaine après l'avoir rencontrée alors qu'il est étudiant à Paris[16] - [17]. Ils ont deux enfants ensemble : Martine en 1954 et Anne-Laure en 1968[16]. En 1977, alors qu'il est secrétaire d'État au Tourisme et qu'il doit s'entretenir à Los Angeles avec Max Factor Junior, à la tête du groupe de cosmétiques Max Factor, il fait la connaissance d'Ilene Joy Graham, une Californienne d'une trentaine d'années[18] - [19]. Même si elle est une petite-cousine du milliardaire Max Factor Junior, elle est désargentée[16]. En janvier 1978, elle part le rejoindre à Paris puis s'installe à Nice en avril de la même année[18]. En juillet 1978, il engage une procédure de divorce avec son épouse Claude, qui aboutira en décembre 1979[18]. Entre-temps, en août 1978, il se marie à Las Vegas avec Ilene Graham[18], avant de se marier à Nice en décembre 1979[20] - [21]. Ils ont une fille en 1982 prénommée Shawn[16], mais divorceront[21]. Le journal Nice-Matin décrit Jacques Médecin comme un « séducteur en diable [qui] a accumulé les conquêtes[2] ».

Jacques Médecin rencontre par la suite Marisol Nicoletti, une journaliste uruguayenne venue au carnaval de Nice dans le cadre du jumelage planifié entre Nice et Punta del Este[22]. Il part la rejoindre dans cette ville en septembre 1990[22]. À son retour en Uruguay en 1996 après sa détention en France, elle l'a quitté[22]. Il rencontre par la suite dans une chapelle Berta Bittar Zaldivar van Humbeck[22], une Paraguayenne de 38 ans, chargée des relations économiques à l'ambassade du Paraguay à Montevideo[23], d'origine belge et syro-libanaise[24]. Il se marie avec elle en mai 1996[23] ; il s'agit de sa dernière épouse[22]. Il formule après son mariage une demande d'acquisition de la nationalité uruguayenne[23].

Propriétés

Image externe
Vue aérienne de Lou Soubran, en octobre 1991

Alors qu'il n'est encore que journaliste sans beaucoup d'argent, son père intervient en sa faveur auprès de son Ă©pouse AmĂ©lia dont la mère vient de donner deux immeubles Ă  seulement deux de leurs quatre enfants[12]. Pour compenser, AmĂ©lia MĂ©decin donne alors trente-cinq millions de francs de l'Ă©poque Ă  son fils Jacques[12]. Ce don lui permet d'acquĂ©rir un terrain Ă  cĂ´tĂ© du domaine familial, sur la colline de Gairaut dans le nord de Nice[12], oĂą vivent ses parents et qui avait Ă©tĂ© achetĂ© Ă  la fin du XIXe siècle par Alexandre MĂ©decin qui s'en servait comme rĂ©sidence secondaire[25]. Il y fait construire une villa qui est inaugurĂ©e peu après son accession Ă  l'hĂ´tel de ville[25]. Au fil du temps, cette villa, appelĂ©e Lou Soubran (« le plus haut » en niçois), offrant une vue sur toute la ville, sera agrandie et modernisĂ©e[25]. Un stand de tir y est par exemple construit au sous-sol[25]. La villa, devenue luxueuse, dispose Ă©galement entre autres d'un mini-golf, d'une salle de cinĂ©ma, d'une grande piscine, d'une centaine d'oliviers[25]. Elle comporte 29 pièces ; sa superficie est de 1 300 m2 et son terrain de 8 700 m2[26]. Une vingtaine de personnes y vivent en comptant les domestiques[25]. Pour l'historien Yvan Gastaut, Lou Soubran « symbolisait toute la puissance de l'homme politique au sommet de sa gloire, au sommet de sa ville[25] ». Au dĂ©but des annĂ©es 1980, Jacques MĂ©decin s'installe avec sa deuxième Ă©pouse Ilene dans l'appartement de fonction du prĂ©sident du conseil gĂ©nĂ©ral des Alpes-Maritimes, situĂ© dans l'ancien palais des rois sardes dans le Vieux-Nice[25]. Ils font par ailleurs l'acquisition en janvier 1981 d'une villa Ă  Beverly Hills au 9856 Whitwell Drive, au nom d'Ilene MĂ©decin[27] - [28] - [29].

Lou Soubran est saisie par l'État après la fuite de Jacques MĂ©decin en Uruguay afin de rembourser sa dette fiscale (voir Redressements fiscaux), et une vente aux enchères est organisĂ©e mais ne trouve pas preneur[30] - [25]. L'État la rachète en septembre 1991 sous l'impulsion du ministre du budget Michel Charasse, pour 12,7 millions de francs[31] - [32] - [30]. Mais les coĂ»ts d'entretien et le fait qu'aucune destination n'ait Ă©tĂ© trouvĂ©e pour cette propriĂ©tĂ© conduisent l'État Ă  la cĂ©der en juillet 1999 pour 3,7 millions de francs Ă  la sociĂ©tĂ© immobilière niçoise IFR qui la divise en cinq appartements avant de les revendre[25] - [33] - [30].

Parcours politique

1961-1965 : débuts en politique

Jacques Médecin fait ses débuts en politique en 1961, en tant que conseiller général des Alpes-Maritimes, élu dans le canton de Nice-4. Ce canton, bourgeois[34], est celui qu'occupe son père depuis 1945. Celui-ci est président du conseil général des Alpes-Maritimes depuis 1951, mais, atteint d'un cancer, il décide de ne pas se représenter aux élections cantonales de 1961, laissant la main à son fils[35]. Les affiches électorales du candidat Jacques Médecin mentionnent alors « J. Médecin », laissant astucieusement planer le doute avec son père[36]. Tout comme son père dans les dernières années de son parcours politique[37], il est membre du Centre républicain, un petit parti politique centriste dirigé par André Morice[38].

Partisan de l'Algérie française comme son père, il appelle à voter non lors du référendum sur les accords d'Évian d'avril 1962 conduisant à l'indépendance de l'Algérie[34]. Il s'oppose à nouveau aux gaullistes lors du référendum sur l'élection au suffrage universel du président de la République en octobre de la même année ; engagé dans la campagne pour le non, il fait référence à Charles de Gaulle en parlant d'« un homme qui ne veut que devenir dictateur »[34].

Aux Ă©lections lĂ©gislatives de 1962, la maladie empĂŞche Ă  nouveau Jean MĂ©decin de se porter candidat Ă  sa rĂ©Ă©lection dans la 2e circonscription des Alpes-Maritimes[34], situĂ©e principalement dans la partie centrale de Nice. Jacques MĂ©decin le remplace, mais au terme d'une campagne très tendue entre mĂ©decinistes et gaullistes[34], il Ă©choue face Ă  l'ancien secrĂ©taire d'État gaulliste de gauche[39] Diomède Catroux qui, sans attaches locales, profite de la poussĂ©e de l'UNR au niveau national[40]. Au premier tour, Jacques MĂ©decin, qui se prĂ©sente sous l'Ă©tiquette « Rassemblement rĂ©publicain »[41] (le mouvement politique local mĂ©deciniste fondĂ© par son père en 1947) obtient 9 691 voix (24,8 %) contre 16 061 voix (41,1 %) pour Diomède Catroux[42] - [43]. Le candidat communiste, arrivĂ© troisième, est Ă©galement qualifiĂ© pour le second tour[39]. La profession de foi prĂ©parĂ©e par Jacques MĂ©decin pour le second tour comporte un appel aux Ă©lecteurs des candidats Ă©liminĂ©s au premier tour, dont ceux de la socialiste ThĂ©rèse RomĂ©o, Ă  voter pour lui et pour une « RĂ©publique libĂ©rale, humaine, sociale »[41]. Bien que tentĂ© par une alliance secrète avec le PCF (en Ă©change notamment de la 1re circonscription des Alpes-Maritimes oĂą le communiste Virgile Barel affronte au second tour le candidat gaulliste Pierre Pasquini), il dĂ©cide finalement de se retirer du second tour, en particulier devant l'appel sĂ©vère de Michel Bavastro dans Nice-Matin dont l'opposition pourrait le gĂŞner pour la suite de sa carrière politique[34]. Il s'agit de l'une des deux Ă©lections perdues par Jacques MĂ©decin au cours de ses 29 ans de vie politique[N 1] - [34].

1966 : accession Ă  la tĂŞte de la mairie de Nice

L'hĂ´tel de ville de Nice en 2007.

En dĂ©cembre 1965, Jean MĂ©decin, maire de Nice, meurt d'un cancer gĂ©nĂ©ralisĂ©[6]. Les conseillers municipaux venus pour veiller Ă  tour de rĂ´le sur la dĂ©pouille du maire installĂ©e dans son bureau Ă  l'hĂ´tel de ville, sont invitĂ©s par HonorĂ© Bailet, un ami de Jacques MĂ©decin et conseiller municipal de la ville (et futur maire de Nice, de 1990 Ă  1993), Ă  signer un appel de soutien Ă  Jacques MĂ©decin pour la prochaine Ă©lection municipale partielle destinĂ©e Ă  pourvoir le siège de conseiller municipal vacant[6]. Sur les 37 conseillers municipaux, 17 signent[6]. D'autres voient en Jacques MĂ©decin un futur rival pour le poste de maire, alors qu'ils s'estiment en mesure d'accĂ©der Ă  cette fonction : le colonel Bouvier, premier adjoint de Jean MĂ©decin et qui a la prĂ©fĂ©rence du prĂ©fet des Alpes-Maritimes Pierre-Jean Moatti[44], le deuxième adjoint Raoul Bosio, le troisième adjoint GĂ©rald Cassin[45], ou encore Louis Bargellini, autre adjoint au maire et cousin de la famille MĂ©decin[6]. L'Ă©lection municipale partielle de janvier et fĂ©vrier 1966 oppose principalement Jacques MĂ©decin au candidat communiste Virgile Barel, et Ă  Maurice Donat[45], candidat qui reçoit le soutien de Nice-Matin[6]. Fort du soutien de la majoritĂ© municipale, y compris finalement de la « vieille garde » de Jean MĂ©decin[6], Jacques MĂ©decin frĂ´le l'Ă©lection dès le premier tour (Ă  343 voix près) avec un score de 49,62 %[45]. Au second tour, il recueille 54 509 voix (63,93 %) contre 30 754 voix (36,07 %) pour Virgile Barel[45]. Il fait pour la première fois son entrĂ©e au conseil municipal.

Eugène Tonietti en particulier, fidèle bras droit de Jean Médecin, l'aide à obtenir le soutien d'une majorité des conseillers municipaux[46] - [47]. La désignation du nouveau maire de Nice se déroule d'abord lors d'un scrutin organisé à huis clos[48]. Jacques Médecin se voit opposer la candidature du colonel Bouvier : il en ressort vainqueur avec 24 voix contre 13. Le lendemain, le 11 février 1966, Jacques Médecin est élu maire de Nice par 36 voix et un bulletin blanc sur 37[48]. Il a alors 37 ans.

1967-1971 : député centriste antigaulliste

Aux Ă©lections lĂ©gislatives de 1967, dans la 2e circonscription des Alpes-Maritimes, il affronte Ă  nouveau le gaulliste Diomède Catroux qui l'avait battu en 1962[49]. Un contexte national plus compliquĂ© pour les gaullistes, sa prise de contrĂ´le rĂ©ussie des rĂ©seaux de son père et ses positions anti-gaullistes et en faveur de l'AlgĂ©rie française lui permettent cette fois-ci de remporter le scrutin et de devenir dĂ©putĂ©[50]. Depuis 1962, plus de dix mille pieds-noirs se sont installĂ©s Ă  Nice[50]. Jacques MĂ©decin se prĂ©sente sans Ă©tiquette mais est soutenu par le Centre dĂ©mocrate[50], le parti de Jean Lecanuet, et dĂ©finit son programme comme « dĂ©mocrate, social, europĂ©en et libĂ©ral »[51]. Au premier tour, il recueille 23 264 voix (43,9 %) contre 16 389 voix (31,3 %) pour Diomède Catroux et 9 820 voix (18,5 %) pour le candidat communiste Francis Lombardi, tous trois qualifiĂ©s pour le second tour[43]. Celui-ci donne lieu Ă  la victoire de Jacques MĂ©decin avec 26 393 voix (49,5 %) contre 16 676 voix (31,3 %) pour Catroux et 10 246 voix (19,2 %) pour Lombardi[43]. Le soir de son Ă©lection, Jacques MĂ©decin se rend dans les locaux du journal communiste local Le Patriote[50]. Ce dernier rapporte qu'il est venu saluer les deux candidats vainqueurs dans les autres circonscriptions de la ville, Paul ClĂ©ricy (FGDS) et le communiste Virgile Barel (une photographie le montre Ă  leurs cĂ´tĂ©s[50]), et qu'il a fait une dĂ©claration publique se fĂ©licitant de la victoire de ces deux candidats et de la gauche[52]. En 1991, dans son ouvrage Et moi je vous dis… ma vĂ©ritĂ©, Jacques MĂ©decin dĂ©mentira avoir adressĂ© ces fĂ©licitations et indiquera qu'il s'est rendu au Patriote pour vĂ©rifier les rĂ©sultats de l'Ă©lection annoncĂ©s par Nice-Matin[52]. Ă€ l'AssemblĂ©e nationale, il s'inscrit dans le groupe centriste Progrès et dĂ©mocratie moderne (PDM) prĂ©sidĂ© par Jacques Duhamel[13] - [53].

Quelques mois plus tard, lors des élections cantonales de 1967, il est réélu facilement dans le canton de Nice-4[50].

Lors des Ă©vĂ©nements de mai 68, il soutient les grĂ©vistes et vote le 22 mai, comme la grande majoritĂ© des membres du groupe PDM[54], la motion de censure dĂ©posĂ©e contre le gouvernement Georges Pompidou (4) (qui Ă©choue avec 233 voix au lieu des 244 nĂ©cessaires[54]), avant de demander le 23 mai aux employĂ©s municipaux niçois de reprendre le travail[55]. En juin, lors des Ă©lections lĂ©gislatives de 1968 qui font suite Ă  la dissolution de l'AssemblĂ©e nationale par Charles de Gaulle, il affronte, toujours dans la 2e circonscription des Alpes-Maritimes, le haut-fonctionnaire gaulliste Jean CĂ©rez[56] (UDR). Celui-ci le qualifie d'« alliĂ© des communistes » et l'accuse d'avoir fait Ă©lire aux lĂ©gislatives de 1967, par un jeu de retrait et de maintien des candidats de son camp, le communiste Virgile Barel et Paul ClĂ©ricy (FGDS)[57]. Jean CĂ©rez bĂ©nĂ©ficie du soutien de la prĂ©fecture et semble avoir les faveurs de Nice-Matin[58] qui met peu en lumière Jacques MĂ©decin dans ses colonnes[59]. La forte poussĂ©e gaulliste au niveau national, en rĂ©action Ă  la crise de mai 1968, conduit Ă  un resserrement des scores entre Jacques MĂ©decin (19 554 voix soit 38,2 %) et le candidat gaulliste (17 775 voix soit 34,7 %) par rapport au scrutin de 1967[43]. Le score du candidat PCF est stable[43]. Au second tour, le dĂ©putĂ© et maire de Nice dĂ©passe Jean CĂ©rez de seulement 1 490 voix, avec un score de 42,1 % (21 759 voix) contre 39,2 % (20 269 voix)[43]. Jacques MĂ©decin survit Ă  la vague gaulliste, de mĂŞme que Virgile Barel (PCF) dans la 1re circonscription des Alpes-Maritimes (Ă©lu avec 253 voix d'Ă©cart avec le candidat gaulliste[43]), ce qui ne manque pas de susciter Ă  nouveau de la part des gaullistes des accusations d'entente entre mĂ©decinistes et communistes[60]. D'après l'universitaire Robert Charvin, il s'est produit « contre le gaullisme (…) des reports de voix suscitĂ©s ou spontanĂ©s » envers Jacques MĂ©decin et Virgile Barel lors de ces Ă©lections lĂ©gislatives[61]. Ă€ nouveau, il siège dans le groupe parlementaire Progrès et dĂ©mocratie moderne[53].

En 1969, il participe activement Ă  la campagne en faveur du non au rĂ©fĂ©rendum sur la rĂ©forme du SĂ©nat et la rĂ©gionalisation proposĂ©e par le prĂ©sident de la RĂ©publique Charles de Gaulle[39] - [62]. Il parcourt Ă  cette occasion le pays, visitant une vingtaine de villes, en compagnie de Jacques Duhamel[39]. DĂ©but avril, il appelle avec ce rĂ©fĂ©rendum Ă  « hâter l'Ă©chĂ©ance Ă  partir de laquelle M. Pompidou serait le dauphin du gĂ©nĂ©ral de Gaulle[63] ». NĂ©anmoins, il prĂ©cisera quelques jours plus tard que son « "non" au gĂ©nĂ©ral n'entraĂ®ne pas un "oui" Ă  Pompidou[64] ». Par ailleurs, dans le mensuel RĂ©alitĂ©s niçoises, il dĂ©clare que voter oui « renforcer[ait] la prĂ©pondĂ©rance de Marseille sur Nice[39] ». Satisfaction pour lui : le non l'emporte avec 52,4 % au niveau national et 62,5 % Ă  Nice[39], et le gĂ©nĂ©ral de Gaulle dĂ©missionne. Lors de l'Ă©lection prĂ©sidentielle de 1969, il soutient le centriste Alain Poher (CD) face au gaulliste Georges Pompidou[13]. Ses Ă©quipes collent sur les murs de la ville une affiche oĂą est inscrit « Pourquoi chasser le maĂ®tre et prendre le valet ? »[65]. Il explique que l'Ă©lection d'Alain Poher permettrait d'Ă©viter le rapprochement des socialistes avec le PCF, car elle conduirait Ă  l'Ă©mergence d'une coalition rassemblant notamment les centristes et les socialistes[66]. Pour autant, après la victoire de Georges Pompidou, il vote la confiance au gouvernement Jacques Chaban-Delmas[67].

En février 1970, il fait partie des parlementaires centristes qui se regroupent au sein de l'Union parlementaire du centre, un intergroupe destiné à rassembler les parlementaires de cette tendance politique au-delà des différentes étiquettes[68]. En tant que l'un des trois vice-présidents du Centre républicain avec Michel Durafour et André Rossi[69] - [70], il participe à la création en novembre 1971 du Mouvement réformateur, une coalition des partis du centre dont le Centre démocrate, le Parti radical et le Centre républicain, dirigée par Jean Lecanuet et Jean-Jacques Servan-Schreiber[71]. En octobre 1972, il quitte le groupe parlementaire Progrès et démocratie moderne, avec trois autres députés de ce groupe dont Michel Durafour, et devient député non-inscrit[69] - [13].

1971 : alliance municipale avec la gauche

En vue de l'Ă©lection municipale de 1971 qui fait suite Ă  son premier mandat de maire, fort de sa bonne entente avec Jacques Chaban-Delmas, il cherche dans un premier temps Ă  constituer une liste d'union avec les gaullistes, mais cette tentative finit par Ă©chouer en novembre 1970 : le PrĂ©sident de la RĂ©publique Georges Pompidou tient Ă  la constitution d'une liste UDR-FNRI distincte de la liste mĂ©deciniste[72]. Jacques MĂ©decin se tourne alors vers la gauche et nĂ©gocie un accord dĂ©but 1971 avec les cadres socialistes locaux approuvĂ© par la direction nationale du Parti socialiste[72]. D'après Bragard et al., dans leur ouvrage J.M. Le feuilleton niçois, la liste MĂ©decin qui se prĂ©sente Ă  cette Ă©lection compte « vingt divers gauche, neuf modĂ©rĂ©s, cinq centristes, deux gaullistes et un indĂ©pendant »[72]. Parmi les reprĂ©sentants de la gauche, on trouve ThĂ©rèse RomĂ©o (ex-SFIO[73]) et les membres du PS Henri Carbuccia (secrĂ©taire de la fĂ©dĂ©ration dĂ©partementale) et Roger Prioris (secrĂ©taire de la section niçoise)[72]. Ă€ l'inverse, il Ă©carte Jacques Peyrat (futur maire de Nice, de 1995 Ă  2008), conseiller municipal de son père, qui s'en va rejoindre la liste FNRI-UDR de Fernand Icart[74]. L'Ă©lection est un vĂ©ritable succès pour Jacques MĂ©decin : sa liste est Ă©lue dès le premier tour avec 56 491 voix (50,1 %) face Ă  la liste du communiste Virgile Pasquetti (31 383 voix soit 27,9 %)[75] et Ă  celle de Fernand Icart. Outre cette nouvelle lĂ©gitimitĂ© acquise, il continue Ă  ne pas avoir d'opposition au sein du conseil municipal.

1973 : accession à la présidence du conseil général

En septembre, lors des élections cantonales de 1973, alors que le découpage des cantons est revu, il décide de se présenter dans le canton de Nice-5, un canton situé au nord du canton de Nice-4 dans lequel il était élu jusqu'alors[76]. C'est un nouveau succès pour lui puisqu'il est largement élu dès le premier tour avec 62,4 % des suffrages[77]. Il n'a toutefois face à lui qu'un candidat PCF et une candidate soutenue par le Parti socialiste[77], tous deux peu implantés[78]. Le 3 octobre 1973[76], succédant à Francis Palmero, il est élu président du conseil général des Alpes-Maritimes avec 31 voix sur 41 ; 9 conseillers généraux votent blanc[79]. Plus tard, en 1978, il déclarera au journal Le Monde que sa désignation à ce poste l'a été « à son corps défendant, à la demande pressante du préfet de l'époque, de ses secrétaires généraux, de M. Michel Bavastro, P.-D.G de Nice-Matin (…) et d'un certain nombre de personnalités politiques »[80].

1972-1975 : début du glissement vers la droite

En avril 1972, il accuse les quatre Maisons des jeunes et de la culture (MJC) de Nice (crĂ©Ă©es entre 1965 et 1971[81]) d'ĂŞtre politisĂ©es[82]. Il s'agit de la première attaque importante en France contre ces structures associatives[82]. Dans Nice-Matin, il dĂ©clare que les MJC sont « des foyers de rĂ©volution qu'[il s'en va] supprimer » et que « les jeunes trouveront beaucoup plus de bonheur Ă  s’exprimer sur un stade que dans des conciliabules plus ou moins putrides »[82]. Par la suite, il dĂ©signe les MJC sous le terme de « Maisons des Jaunes » après avoir Ă©voquĂ© un portrait de Mao Zedong qui aurait Ă©tĂ© trouvĂ© Ă  la MJC de Nice Bon-Voyage[82]. Il leur reproche Ă©galement les Â« "spectacles rĂ©pugnants" offerts Ă  la vue [des] enfants » ainsi que, selon lui, leur militantisme contre la municipalitĂ©[82]. Pour faire concurrence aux quatre MJC, il crĂ©e en 1975[83] (ou 1974[84]) une structure rivale, les CACEL (Centre d’animation de culture et de loisirs[N 2]), dirigĂ©s par ses proches[85], qui seront au nombre de cinq[86] et mieux aidĂ©s financièrement que les MJC[82].

Aux Ă©lections lĂ©gislatives de mars 1973, dans la 2e circonscription des Alpes-Maritimes, la majoritĂ© prĂ©sidentielle lui oppose le rĂ©publicain indĂ©pendant Jean-Claude Dischamps[87], prĂ©sident de l'universitĂ© de Nice depuis 1971 et professeur de sciences Ă©conomiques dans cette mĂŞme universitĂ© depuis 1963[88]. Celui-ci, soutenu par Michel Bavastro[89], dirigeant de Nice-Matin, et une partie des milieux patronaux, l'attaque sur ses changements frĂ©quents de positions politiques, et dĂ©nonce un « "système" dĂ©testable fait d'allĂ©geance personnelle et de favoritisme » et une « fĂ©odalitĂ© anachronique aux mĹ“urs florentines »[87]. Mais au premier tour, Jacques MĂ©decin recueille 20 378 voix (34,9 %) et arrive en tĂŞte avec 4 429 voix d'avance sur Jean-Claude Dischamps (15 949 voix soit 27,3 %)[43]. Devant le score cumulĂ© des trois candidats de gauche et d'extrĂŞme gauche (34,0%), face Ă  ce qu'il nomme le « danger du totalitarisme marxiste »[90], il obtient du Premier ministre Pierre Messmer le retrait de Jean-Claude Dischamps, en Ă©change du retrait du candidat mĂ©deciniste Henri Roubault dans la 3e circonscription des Alpes-Maritimes (ce que ce dernier n'acceptera pas)[87] - [91]. Dans celle-ci, l'appel de Jacques MĂ©decin Ă  voter en faveur du dĂ©putĂ© sortant Fernand Icart[91] contribue Ă  faire perdre Ă  Henri Roubault au second tour la moitiĂ© du nombre de voix qu'il avait recueilli au premier[43]. Jacques MĂ©decin est quant Ă  lui facilement rĂ©Ă©lu avec 62,1 % des suffrages contre 37,7% pour Louis Broch, le candidat communiste d'Union de la gauche[43] - [90]. Avec 33 406 voix, il gagne plus de 13 000 voix par rapport au premier tour[43]. Ă€ l'AssemblĂ©e nationale, il s'inscrit dans le nouveau groupe RĂ©formateurs dĂ©mocrates sociaux[53] (RDS) qui rassemble les dĂ©putĂ©s du Mouvement rĂ©formateur et qui est prĂ©sidĂ© par Michel Durafour.

En 1973, les militants du Parti socialiste se déchirent entre ceux qui ont participé à l'alliance avec Jacques Médecin en 1971, souvent d'anciens cadres de la SFIO, et ceux qui exigent l'exclusion de ces derniers du parti[92]. En juin, le congrès de Grenoble permet aux deuxièmes de s'imposer[92]. Par conséquent, après plusieurs mois de refus, la direction nationale du PS finit par accéder à leur demande et procède à l'exclusion des socialistes médecinistes[92]. Des prises de position récentes de Jacques Médecin sur l'immigration ou encore la dictature chilienne rendaient la position initiale du PS difficile à tenir ; mais également le fait que le parti ait signé le Programme commun en juillet 1972 avec le PCF[92], et plus pragmatiquement les perspectives de victoire électorale du PS à Nice qui s'amenuisaient du fait du basculement à droite de la ville[93].

Jacques Médecin soutient Valéry Giscard d'Estaing (FNRI) à l'élection présidentielle de mai 1974[94]. Il reçoit de la part de ce dernier la promesse de la création d'une région Côte d'Azur distincte de la région marseillaise, et celle de sa nomination dans le futur gouvernement[85], au Tourisme[94]. Durant la campagne, en avril, il reçoit le candidat présidentiel dans sa villa Lou Soubran où ils se font photographier et filmer en train de jouer à la pétanque[85] - [95] - [94]. Alors que l'année précédente, médecinistes et républicains indépendants s'affrontaient, Jacques Médecin met ses équipes militantes à la disposition de Giscard[96] et prononce un discours lors du meeting de celui-ci au Palais des expositions de Nice[85] - [94]. Dans l'entre-deux-tours, il publie dans Minute (alors classé à droite) une tribune intitulée « Pas avec les complices du FLN » et destinée à convaincre les lecteurs de se résoudre à voter pour Giscard pour éviter la gauche ce qui était la position officielle de l'hebdomadaire[97]. Après son élection à la Présidence de la République, Valéry Giscard d'Estaing reçoit une lettre de Jean-Claude Dischamps dans laquelle il le met en garde : « Attention, Médecin aurait trempé dans des affaires louches »[94]. Jacques Médecin n'est pas retenu dans le gouvernement Chirac I. Pour autant, en septembre 1975, il quitte le groupe parlementaire centriste des Réformateurs pour s'apparenter à celui des Républicains indépendants[98]. Le ministre de l'Intérieur Michel Poniatowski lui promet une prochaine entrée au gouvernement, au Tourisme[98].

En mai 1974, Jacques Médecin, qui est depuis sa première élection à l'Assemblée nationale vice-président du groupe parlementaire d'amitié France-Afrique du Sud[99], décide de jumeler Nice avec Le Cap, capitale législative de l'Afrique du Sud alors sous le régime de l'apartheid[100]. Cette décision le place au centre d'une polémique dans le monde politique[100]. Le jumelage a lieu le 6 juillet à la villa Masséna en présence du maire du Cap David Bloomberg[101]. À cette occasion, Jacques Médecin déclare qu'il n'y a pas en Afrique du Sud de « ségrégation correspondant à un esclavage, mais un développement parallèle de deux populations »[101]. Il explique que « pour comprendre l'esprit libéral qui anime le peuple sud-africain, il faut aller sur place »[101]. Néanmoins il assure que les choix de relations internationales d'une municipalité n'expriment pas l'approbation d'un régime politique, en évoquant le fait que Nice soit également jumelée avec Yalta en URSS[101].

1976 : entrée au gouvernement

Lors du remaniement du gouvernement Chirac I du 12 janvier 1976, il est nommé secrétaire d'État au Tourisme, auprès du ministre de la Qualité de la vie, André Fosset (CD), qui fait également son entrée au gouvernement[102]. Il y remplace le républicain indépendant Gérard Ducray. Il est reconduit dans cette fonction en août 1976 dans le gouvernement Barre I qui fait suite à la démission de Jacques Chirac de son poste de Premier ministre. Il est cette fois-ci rattaché au ministre gaulliste Vincent Ansquer. Lors des discussions sur la loi de finances de 1977, il énonce que ses priorités consistent à inciter les Français à partir en vacances, notamment par le financement des équipements pour le tourisme social, le développement du camping et de la petite hôtellerie, à promouvoir la France comme destination touristique auprès des Français comme des étrangers, avec un accent mis le marché américain, ou encore à favoriser l'étalement des vacances dans le temps et dans l'espace, et à développer le tourisme dans les zones rurales[103]. En décembre 1976, il est à l'origine de la création de l'Association française d'action touristique (AFAT), un organisme destiné à faire la promotion des destinations touristiques françaises et composé de représentants de l'État et des comités régionaux de tourisme, de représentants des organismes socio-professionnels du tourisme, et de sociétés privées[104].

1976-1979 : mise en difficulté

Si l'année 1976 est bénéfique pour lui avec sa nomination au gouvernement et sa première réélection à la présidence du conseil général des Alpes-Maritimes, elle est aussi le début d'une période difficile marquée par les dissidences et les élections laborieuses. Bien qu'il ne soit personnellement pas mis en cause, il se voit également associé à diverses affaires judiciaires qui secouent Nice ; la presse s'en fait fortement l'écho, et parle alors très régulièrement de lui[105] - [106].

Dissidences

En 1976, il subit plusieurs dissidences dans son camp. En février 1976, Robert Calviéra, secrétaire général de la mairie depuis 1967, prend sa retraite, jugeant périlleuse la gestion financière de la municipalité[107]. Lors des élections cantonales de mars 1976, le premier adjoint au maire Eugène Tonietti se présente dans le canton de Nice-1 contre Raoul Bosio, le candidat officiel médeciniste, troisième adjoint au maire et conseiller général sortant[107] - [108]. En janvier 1975, Eugène Tonietti avait commencé à critiquer ouvertement le maire de Nice en lui reprochant une utilisation du budget municipal pour son confort personnel[108]. Nettement battu, il est écarté quelques jours plus tard de sa délégation de premier adjoint au profit de Raoul Bosio[108] - [107]. En décembre 1976, Jacques Bounin, conseiller municipal délégué aux affaires culturelles[109] et ancien député, donne sa démission, affirmant être en désaccord avec la gestion de la municipalité depuis 1974[110]. Depuis plusieurs mois, il s'opposait au maire, intervenant en séance du conseil municipal pour contester de « mauvaises méthodes de travail » ainsi que le jumelage de la ville avec Le Cap[109].

Accusations de liens avec Spaggiari

Après le casse de la SociĂ©tĂ© gĂ©nĂ©rale Ă  Nice (qui a lieu en juillet 1976), il s'exclame devant les camĂ©ras de Philippe Bouvard : « Chapeau ! »[111]. Après l'arrestation en octobre 1976 d'Albert Spaggiari, soupçonnĂ© d'ĂŞtre le cerveau du casse, la presse rapporte que ce dernier, outre le fait qu'il exerce son mĂ©tier de photographe lors des mariages Ă  la mairie de Nice, dispose d'un rĂ©seau de relations dans les services municipaux niçois ; les enquĂŞteurs et la presse s'interrogent sur la possibilitĂ© qu'il se soit procurĂ© par ce biais les plans des Ă©gouts de la ville, nĂ©cessaires au casse[111]. D'autre part, en octobre, peu avant son arrestation, Albert Spaggiari participe Ă  un voyage d'affaires au Japon organisĂ© par la mairie de Nice pour l'inauguration d'une exposition sur les trĂ©sors des musĂ©es de la CĂ´te d'Azur[111] - [112]. Jacques MĂ©decin fait partie du voyage et sera obligĂ© de se justifier : « Naturellement, je connais Spaggiari, comme je connais des milliers de Niçois. Je l'ai vu Ă  la mairie (…) exerçant son mĂ©tier de photographe. (…) Je ne l'ai pas vu dans l'avion qui a transportĂ© le groupe des Niçois Ă  Tokyo. »[112]. Il dĂ©nonce alors un « amalgame fabriquĂ© » par les journalistes, relevant d'une « offensive Ă©lectorale »[112]. Plus tard, il expliquera : « Ă€ coups de sous-entendus et en pratiquant toujours le système de l'amalgame, le grand orchestre rouge de la presse gauchiste s'employa Ă  juxtaposer mon nom et celui de Spaggiari sans jamais toutefois oser parler d'amitiĂ© ou de complicitĂ© »[106].

Spaggiari est membre des RĂ©publicains indĂ©pendants[113]. Cette adhĂ©sion a pu s'ĂŞtre faite par amitiĂ© pour Jean Toesca, un proche du maire de Nice, dans le cadre d'une opĂ©ration de Jacques MĂ©decin visant Ă  neutraliser son adversaire rĂ©publicain indĂ©pendant Fernand Icart, en prenant le contrĂ´le de la section niçoise du parti via l'adhĂ©sion de plusieurs centaines de ses partisans[114]. D'après Bernard Bragard et al. dans leur ouvrage J.M. Le feuilleton niçois, Fernand Icart, Ă  qui la police a appris que 41 de ses militants du troisième secteur de Nice (tous parrainĂ©s par le conseiller municipal mĂ©deciniste Jacques Bixio) Ă©taient « fichĂ©s pour proxĂ©nĂ©tisme, vol, attaque Ă  main armĂ©e… » a dĂ©clarĂ© que « Jacques MĂ©decin a voulu noyauter son opposition »[115].

Albert Spaggiari gravitant dans les milieux de l'extrême droite, cette affaire amène également la presse à faire état des liens supposés de Jacques Médecin avec cette famille politique, notamment en affirmant que son entourage professionnel proche compte des personnalités qui en proviennent, faisant référence en particulier à des anciens étudiants de la faculté de droit de Nice[111] - [113] qui étaient à la tête de l'Association générale des étudiants de Nice (Agen), comme Michel Falicon[116] et Hélène Matteï[117] - [84] (association dont Le Monde dira qu'elle est « connue, après 1968, pour la dureté de ses barres de fer[19] »). Jacques Médecin réfute alors le lien qui est fait entre ses proches collaborateurs et l'extrême droite : « Dire qu'Untel est militant d'extrême droite parce qu'il a présidé une association d'étudiants qui s'est valablement opposée à la mainmise communiste sur la faculté de droit de Nice en 1968, ou proclamer que tel autre est fasciste parce qu'il n'accepte pas les menées révolutionnaires d'excités irresponsables me parait un peu fort »[112].

Pour le journaliste Raoul Mille, proche de Jacques Médecin, la proximité supposée entre ce dernier et Albert Spaggiari a été construite par des journalistes locaux[118]. Dans son ouvrage Une dynastie foudroyée, il affirme : « ayant connu personnellement Bert, je peux assurer qu'il ne fréquentait guère Médecin, pas plus qu'il ne l'appréciait comme homme politique ». Il soutient que le « pedigree » de Spaggiari a été utilisé pour « "mouiller" » Médecin, « en cumulant les prétendues sympathies du maire pour l'extrême droite et ses supposées complaisances pour les gangsters. En réalité rien, absolument rien »[118]. Les répercussions médiatiques de cette affaire auront des conséquences dans le parcours politique de Jacques Médecin : les autres membres du gouvernement et les dirigeants des Républicains indépendants se détournent alors de lui ; il raconte qu'en revanche Jacques Chirac lui écrit une lettre pour lui assurer que, s'il avait été Premier ministre, il l'aurait longuement reçu et aurait effectué ensuite une déclaration publique de soutien[118]. Cette démarche pourrait avoir conduit plus tard Jacques Médecin à rejoindre le RPR[118].

Amitié avec Jean-Dominique Fratoni

Le casino Ruhl Ă  la tĂŞte duquel se trouvait Jean-Dominique Fratoni, ami de Jacques MĂ©decin et acteur de la guerre des casinos.

À cette époque a lieu également la « guerre des casinos » dans laquelle Jean-Dominique Fratoni, un ami de longue date de Jacques Médecin[119], est l'un des principaux protagonistes[120]. En 1968, Fratoni a acquis le casino-club[121], un petit casino niçois aux mises modestes[122]. La municipalité lui accorde un prélèvement favorable : 4 % sur les recettes au lieu des 15 % habituels[122]. La fermeture du casino municipal de Nice en 1969 amène à la création d'un nouveau casino, plus moderne et clinquant, inauguré en février 1975, qui récupère la licence des jeux du casino municipal : le casino Ruhl, construit à l'emplacement de l'ancien hôtel Ruhl qui été démoli, et dont Jean-Dominique Fratoni prend la tête[122]. En décembre 1975, Jacques Médecin se réjouit : « Jean-Dominique Fratoni a tenu son premier pari. Celui-ci consistait à faire en sorte que Nice redevienne la capitale du jeu. Voici chose faite puisque le casino Rhul est devenu le rendez-vous des gros joueurs du monde entier »[121]. En deux ans (ou un an[123] selon les sources), le Ruhl devient le deuxième plus important casino français[122]. Les deux hommes rêvent d'un Las Vegas méditerranéen à Nice[120].

Jean-Dominique Fratoni cherche Ă©galement Ă  prendre le contrĂ´le du rival du Ruhl, le casino du Palais de la MĂ©diterranĂ©e[120]. Un soir de juillet 1975, une partie de trente et quarante, Ă  laquelle prennent part des truands notoires, provoque une perte de 5 millions de francs pour le Palais de la MĂ©diterranĂ©e qui n'est pas en mesure de payer[121]. Fratoni propose Ă  RenĂ©e Le Roux, nouvelle PDG du Palais de la MĂ©diterranĂ©e, de racheter le casino, ce qu'elle refuse[121]. En juin 1977, par l'intermĂ©diaire de l'avocat Maurice Agnelet, Fratoni achète le vote d'Agnès Le Roux, la fille de RenĂ©e Le Roux, pour 3 millions de francs, ce qui permet de mettre en minoritĂ© cette dernière au cours de l'assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale du casino, et ce qui conduit Fratoni Ă  mettre la main sur celui-ci[121]. En octobre 1977, Agnès Le Roux disparaĂ®t mystĂ©rieusement[121]. Jacques MĂ©decin dĂ©clare dès juillet 1977 que le Palais de la MĂ©diterranĂ©e « pourrait bien laisser la place Ă  des salles de congrès et Ă  un complexe hĂ´telier »[124]. En septembre, alors qu'il avait affirmĂ© que le Palais n'Ă©tait pas rentable et que la municipalitĂ© serait intĂ©ressĂ©e par le racheter pour en faire un palais des festivals, RenĂ©e Le Roux dĂ©nonce la « convergence Ă©vidente entre le plan mis en Ĺ“uvre par Jean-Dominique Fratoni [pour prendre le contrĂ´le du Palais] et l'intĂ©rĂŞt que M. MĂ©decin porte Ă  ce dernier »[125]. Le casino du Palais de la MĂ©diterranĂ©e dĂ©pose le bilan en avril 1978 du fait de la politique anti-commerciale mise en place par ses nouveaux dirigeants[121]. Plus tard, les liens de Jean-Dominique Fratoni, qui a pris la fuite, avec une filière de blanchiment d'argent italienne seront exposĂ©s[120]. Il sera condamnĂ© par contumace trois fois par la justice en 1983[120]. Alors qu'il est en fuite, sous le coup d'un mandat d'arrĂŞt, la revue mĂ©deciniste L'Action-Nice-CĂ´te d'Azur lui donne longuement la parole en septembre 1980 ; il y explique que des problèmes de santĂ© l'empĂŞchent de revenir Ă  Nice Ă  court terme[126].

Urbain Giaume et méprises du Canard enchaîné

En juillet 1977, l'hebdomadaire Le Canard enchaĂ®nĂ© publie une photographie prise en 1974 de Jacques MĂ©decin et de ValĂ©ry Giscard d'Estaing jouant Ă  la pĂ©tanque dans sa villa Lou Soubran[105]. Ă€ l'arrière-plan, un homme est identifiĂ© par le journal comme Ă©tant Urbain Giaume[105], une figure du grand banditisme niçois, connu en premier lieu pour des trafics de drogue[127]. L'information est reprise par L'HumanitĂ© et Rouge[105]. L'homme s'avère en fait ĂŞtre un poissonnier niçois[106]. Jacques MĂ©decin poursuit les trois journaux en diffamation[105], rĂ©clamant 18 millions de francs de dommages et intĂ©rĂŞts[128]. Il dĂ©nonce des attaques Ă  caractère politique qu'il qualifie de « campagne hargneuse de dĂ©nigrement dont il fait l'objet de la part de la presse d'extrĂŞme gauche et de l'ultra-gauche qui par l'intimidation essaie de culpabiliser et rĂ©duire au silence tous ceux qui, comme moi, ne cessent de dĂ©noncer les dangers de l'alliance socialo-communiste »[106]. En avril 1978, Le Canard enchaĂ®nĂ© est condamnĂ© pour diffamation, et les deux autres journaux pour avoir repris la fausse information[128]. Outre une amende de 2 000 francs, ils doivent verser 1 franc symbolique Ă  Jacques MĂ©decin[128].

Cependant, Jacques MĂ©decin ayant dĂ©clarĂ© qu'il ne connaissait Urbain Giaume « ni d'Éve ni d'Adam », Le Canard enchaĂ®nĂ© rĂ©vèle des documents de police qui montreraient qu'il a rencontrĂ© Urbain Giaume en 1970 Ă  propos d'une opĂ©ration immobilière concernant le Ruhl[105] - [106]. En 1981, il reconnaĂ®tra l'avoir reçu Ă  deux reprises en 1975 dans son bureau de la mairie, notamment Ă  propos de la mesure de fermeture administrative qui avait Ă©tĂ© prise contre son Ă©tablissement, le Mayfair, situĂ© place MassĂ©na[129]. Il admettra ĂŞtre intervenu auprès du prĂ©fet des Alpes-Maritimes pour l'aider Ă  « Ă©courter » cette mesure et justifiera cette intervention par les « intĂ©rĂŞts touristiques de la ville »[129]. Il affirmera qu'il ne savait alors pas Ă  l'Ă©poque qu'Urbain Giaume Ă©tait poursuivi pour trafic de drogue, et rĂ©futera la rumeur selon laquelle Urbain Giaume aurait militĂ© pour son père et lui, en affirmant qu'au contraire il fut un « adversaire rĂ©solu en tant que membre du mouvement gaulliste et responsable du SAC dans les Alpes-Maritimes ; en 1974, encore, il dirigeait la permanence Ă©lectorale de M. Jacques Chaban-Delmas, Ă  Nice »[129].

En août 1977, Le Canard enchaîné affirme qu'une société de promotion immobilière en contrat avec la municipalité niçoise a mis à disposition de Jacques Médecin un avion de tourisme[105]. En fait cet avion appartenait à l'avionneur Aviasud[105]. Poursuivi également pour diffamation, le journal plaidera l'erreur commise de bonne foi[105].

Victoire de justesse aux municipales de 1977

C'est dans ce contexte marqué par les affaires que les élections municipales de mars 1977 ont lieu. Pour ce scrutin, la ville de Nice est découpée en trois secteurs. Jacques Médecin prend la tête d'une liste dans le deuxième secteur[130] mais les trois listes médecinistes portent le nom de M.E.D.E.C.I.N pour Mouvement pour l'expansion, le développement économique de la cité et les intérêts de Nice[131]. Contrairement aux élections municipales précédentes, il réussit à rassembler la droite : médecinistes, FNRI et RPR, ainsi que deux socialistes qui l'avaient rejoint en 1971 (Thérèse Roméo et Roger Prioris)[132]. Ses adversaires principaux sont les listes d'Union de la gauche dominées par le PCF[132] dont le chef de file est Charles Caressa.

La gauche lui reproche des subventions qu'il distribuerait de manière trop importante à certaines associations[132]. Il riposte en parlant des marchés publics qui seraient truqués dans les municipalités communistes[132]. Deux autres sujets font polémiques : tout d'abord celui du terrain de l'ancien hospice de la Charité, en bordure de l' avenue Jean-Médecin, qui a été vendu par la ville à la société Nice-Étoile, propriété d'un promoteur immobilier anglais, pour qu'elle y édifie un centre commercial mais dont les travaux n'avancent pas plusieurs années après l'octroi du permis de construire[132]. Et celle d'une grande opération de promotion immobilière sur le mont Vinaigrier confiée au beau-frère de Jacques Médecin, l'architecte Jean-Claude Aragon[132]. À l'occasion de cette campagne, Jacques Médecin publie un livre intitulé Onze ans de vie commune[132]. Dans celui-ci, il attaque violemment la gauche : « [Les Français] découvriront les méfaits du Programme commun de gouvernement de la gauche, comme ils ont découvert les horreurs de Mein Kampf, dix ans après que tout leur ait été expliqué noir sur blanc »[132]. Par ailleurs, il se fait remarquer par ses affiches. Sur l'une on peut lire : « Une bonne tête, un visage ouvert et le regard franc, il a tout cela. Regardez les autres… Sinistres »[133]. Sur une autre, on voit la chanteuse Mireille Mathieu déclarer : « Si j'étais Niçoise, je voterais Médecin », ce à quoi un autocollant apposé par des opposants répond : « Dimanche, je vais pouvoir voter Médecin », signé Spaggiari[133] (ce dernier s'était évadé du bureau du juge d'instruction trois jours avant le premier tour).

Au premier tour, ses listes arrivent en tête dans les trois secteurs avec environ 45 % des voix, mais elles sont toutes talonnées par les listes d'Union de la gauche (entre 40 et 41 %)[134] - [135]. Ce faible écart entre les deux listes principales n'était pas attendu. L'hebdomadaire L'Express parle d'un maire « sonné comme un boxeur (...) surpris par le punch de son adversaire »[136], alors que Le Monde estime que « les Niçois ne reviennent pas de leur audace (...) ils ont porté un coup sévère au mythe d'invincibilité de leur maire »[133]. Le score d'un autre adversaire constitue également une surprise : les listes d'Henri Roubault, qui rassemblent le Mouvement des démocrates et des écologistes, atteignent autour de 14 %[134], ce qui met en lumière un pan de l'électorat déçu par Jacques Médecin mais se refusant pour autant à voter communiste[136]. Certains proches du maire expliquent ces résultats décevants par le sentiment de délaissement que les Niçois ressentent depuis la nomination de Jacques Médecin au gouvernement[133].

Durant l'entre-deux-tours, Jacques MĂ©decin bĂ©nĂ©ficie de l'appel de Fernand Icart (chef de file historique des RĂ©publicains indĂ©pendants Ă  Nice qui avait prĂ©sentĂ© une liste aux Ă©lections municipales de 1971) Ă  faire barrage aux communistes[136]. Henri Roubault, dont les listes sont Ă©liminĂ©es, ne donne quant Ă  lui pas de consigne de vote Ă  ses Ă©lecteurs, mais Jacques MĂ©decin leur envoie un message en parlant de « protĂ©ger Nice contre l'invasion du bĂ©ton »[136]. Enfin l'organisation militante mĂ©deciniste se montre très efficace : 16 000 coups de tĂ©lĂ©phone sont passĂ©s aux Ă©lecteurs abstentionnistes du premier tour[136] dont les noms ont Ă©tĂ© relevĂ©s sur les listes d'Ă©margement[137]. Le second tour aboutit Ă  la victoire de justesse des listes de Jacques MĂ©decin : sur toute la ville, il recueille 72 888 voix (50,33 %), soit 966 voix de plus que celles des listes d'Union de la gauche (49,67 %)[134]. Il l'emporte dans les trois secteurs mais d'une très courte tĂŞte Ă  chaque fois : entre 294 et 340 voix d'avance selon les secteurs[135]. Cela lui suffit pour gagner la totalitĂ© des sièges du conseil municipal et continuer Ă  ne pas y avoir d'opposition. Tout en appelant la majoritĂ© municipale Ă  « tirer les consĂ©quences de ce scrutin », Nice-Matin juge que la liste de gauche a Ă©chouĂ© en raison de la place trop importante qu'y occupait le Parti communiste français[136].

Législatives de 1978 et fin de l'expérience gouvernementale

Lors des Ă©lections lĂ©gislatives de mars 1978, toujours dans la 2e circonscription des Alpes-Maritimes, il affronte le gĂ©nĂ©ral gaulliste d'opposition François Binoche soutenu par le PCF qui dĂ©cide de ne pas prĂ©senter de candidat[138]. François Binoche faisait partie de la Cour militaire de justice qui a condamnĂ© Ă  mort certains membres de l'Organisation de l'armĂ©e secrète (OAS) au dĂ©but des annĂ©es 1960[139]. Durant la campagne, la revue mĂ©deciniste L'Action-Nice-CĂ´te d'Azur le qualifie de « juge assassin de Bastien-Thiry et de Degueldre »[140]. Face Ă  eux se trouvent Ă©galement Jacques Randon du Parti socialiste ainsi que le chef de file local du RPR Jacques Schonbach[138] - [141]. Jacques Randon attaque notamment Jacques MĂ©decin sur les affaires qui secouent Nice en dĂ©nonçant « une ville livrĂ©e Ă  l'affairisme, aux scandales immobiliers, et oĂą la "mafia" des casinos de la CĂ´te d'Azur fait main basse sur le Palais de la MĂ©diterranĂ©e (…), le scandale du parking de la CharitĂ© (…), les affaires Spaggiari, Giaume (…), De Portu »[141]. Mais la situation apparaĂ®t relativement facile pour Jacques MĂ©decin avec la prĂ©sence d'un gaulliste d'opposition dont le passĂ© ne peut que dĂ©clencher l'hostilitĂ© d'une grande partie des nombreux rapatriĂ©s d'AlgĂ©rie qui vivent Ă  Nice. Au premier tour, il arrive en tĂŞte avec 27 462 voix soit 39,5 % devant le socialiste Jacques Randon (14 744 voix soit 21,2 %), François Binoche (10 515 voix soit 15,1 %) et le candidat RPR (8 338 voix soit 12,0 %)[138]. Le duel du second tour lui donne une victoire confortable avec 41 077 voix (57,4 %), soit 10 577 voix de plus que Jacques Randon (42,6 %)[43]. Par ailleurs, la droite remporte tous les sièges dans les autres circonscriptions de Nice et des Alpes-Maritimes.

Après les élections législatives, affaibli par les affaires qui ébranlent Nice et évité par ses collègues du gouvernement en raison de son image désormais sulfureuse, il n'est pas reconduit dans le nouveau gouvernement Barre III qui entre en fonction début avril 1978, et le poste de secrétaire d'État au Tourisme disparaît[139]. Raymond Barre lui déclare : « Vous n'avez pas démérité, mais vous ne faites plus partie de mon nouveau gouvernement »[139].

Séjours à l'étranger et conflit avec le Parti républicain

Au cours de l'annĂ©e 1978, il s'absente de France pour sĂ©journer assez longuement Ă  l'Ă©tranger. Ces absences suscitent les critiques ainsi que des rumeurs selon lesquelles il s'apprĂŞterait Ă  dĂ©missionner de ses mandats[19]. La première absence a lieu en juin sans que ce dĂ©part ne soit expliquĂ© : « parti sans laisser d'adresse » affirme alors Nice-Matin[19]. Lors de son voyage, Jacques MĂ©decin fait savoir qu'il est en Argentine pour assister Ă  la Coupe du monde de football 1978 Ă  l'invitation d'un ami et qu'il n'a pas l'intention de dĂ©missionner[19]. Peu après, du 20 juillet Ă  dĂ©but septembre, il s'absente Ă  nouveau pour gagner cette fois-ci Los Angeles[19]. Depuis son lieu de villĂ©giature, il donne un entretien au journal Le Monde dans lequel il explique cette absence par les difficultĂ©s qu'il traverse dans sa vie personnelle qui le conduisent Ă  s'Ă©loigner de son « milieu familial »[80]. Il vient en effet d'entamer une procĂ©dure de divorce et est parti rejoindre la Californienne Ilene Graham[19], sa future seconde Ă©pouse (voir Famille). Il dĂ©ment Ă  nouveau toute intention de dĂ©missionner de son mandat de maire, tout en laissant entendre qu'il pourrait abandonner celui de prĂ©sident de conseil gĂ©nĂ©ral après les Ă©lections cantonales de 1979[80].

Il fait Ă©galement un parallèle entre les « dossiers » que prĂ©tendraient avoir ses adversaires sur lui avec les « dossiers » que prĂ©tendaient, selon lui, avoir les adversaires de son père Jean MĂ©decin en son temps lorsqu'il combattait le gaullisme[80]. Il affirme qu'« en revanche, [son] père [lui] a laissĂ©, Ă  sa mort, un dossier d'une centaine de feuillets concernant un certain nombre de personnes Ă  Nice »[80]. Par ailleurs, il attaque les conseillers municipaux de sa majoritĂ© qui le critiquent et qui prĂ©pareraient la constitution d'une liste dissidente aux prochaines Ă©lections municipales[19] ; il y voit l'action des dirigeants nationaux du Parti rĂ©publicain (PR) : « s'il doit y avoir demain une rĂ©bellion au sein du conseil municipal, je sais qu'elle ne sera pas d'origine niçoise. Elle aura Ă©tĂ© tĂ©lĂ©commandĂ©e par une intrigue venant d'un autre niveau politique (…) Cela vient simplement de Paris, qui est très Ă  l'Ă©coute des rumeurs et oĂą l'on a de plus en plus une mentalitĂ© de flic »[80]. Il menace Ă  demi-mot de rejoindre le RPR de Jacques Chirac : « Il est Ă©vident que si je gĂŞne quelqu'un au PR, je m'en irai sans verser de larmes. Les chiraquiens seraient, bien sĂ»r, très attentifs Ă  mon dĂ©part, car homme très puissant et toujours capable de renverser une majoritĂ© Ă  Nice en faveur de l'un ou l'autre des candidats aux Ă©lections prĂ©sidentielles[80]. » NĂ©anmoins Ă  son retour dĂ©but septembre 1978 Ă  Nice, il inaugure l'universitĂ© d'Ă©tĂ© du Parti rĂ©publicain, et assure Ă  cette occasion son soutien aux dirigeants du parti giscardien et Ă  l'action du PrĂ©sident de la RĂ©publique[142].

DĂ©faite aux municipales partielles de 1978

Le Conseil d'État ayant annulé en octobre 1978 les élections municipales de 1977 dans le troisième secteur de la ville, un nouveau scrutin est organisé en décembre 1978[143]. Cette annulation a pour origine la distribution d'un tract anonyme accusant à tort la tête de liste communiste du troisième secteur, Virgile Pasquetti, d'émission de chèques sans provision et de détournement de fonds[144] - [137]. Jacques Médecin ayant été élu dans le deuxième secteur, il ne se présente pas directement à cette élection ; la liste médeciniste est menée par son adjoint aux affaires culturelles Roger Binda[130] (RPR[145]). Elle fait notamment face à une liste réunissant les partis de gauche (PS, PCF, MRG), l'Union des gaullistes de progrès (UGP) de François Binoche (qui figure sur la liste), et Henri Roubault qui conduisait en 1977 la liste jobertiste et écologiste dans ce même secteur[146]. La liste est menée par le communiste Virgile Pasquetti[147] mais le poids attribué au PCF y a été volontairement réduit par rapport à ce à quoi il aurait pu prétendre[146].

Le climat des affaires qui continuent de secouer Nice joue en dĂ©faveur de Jacques MĂ©decin, de mĂŞme que ses longues absences au cours de l'annĂ©e Ă©coulĂ©e. L'Ă©vĂŞque de Nice Jean Mouisset intervient pour dĂ©noncer l'immoralitĂ© qui aurait selon lui gagnĂ© la ville, laquelle serait devenue un « centre de tripots »[148]. Deux jours avant le scrutin, le quotidien Nice-Matin juge que la victoire de la liste d'opposition serait positive pour la dĂ©mocratie[148]. Enfin, le fait que la majoritĂ© municipale soit acquise Ă  Jacques MĂ©decin quelle que soit l'issue de cette Ă©lection, favorise la liste de gauche en dĂ©complexant les Ă©lecteurs qui craindraient un trop grand changement[143]. La liste mĂ©deciniste est ainsi battue dès le premier tour, ne recueillant que 12 600 voix (soit 43,58 %) contre 14 719 voix (50,91 %) pour la liste de Virgile Pasquetti qui remporte la totalitĂ© des 14 sièges en jeu[147]. Pour la première fois, Jacques MĂ©decin a une opposition au conseil municipal. Il dĂ©clare que ces nouveaux Ă©lus « constitueront un Ă©lĂ©ment permanent de perturbation au sein du conseil municipal mais nous nous y habituerons[147] ».

Réélection très serrée aux cantonales de 1979

Lors des Ă©lections cantonales de mars 1979, il est mis en ballottage dans le canton de Nice-5. Alors qu'il avait Ă©tĂ© largement Ă©lu dès le premier tour en 1973, il recueille cette fois-ci 40,35 % des voix contre 20,39 % pour le socialiste HervĂ© Dupont, un professeur d'histoire et gĂ©ographie qui se prĂ©sente Ă  sa première Ă©lection, 17,10 % pour la communiste Mireille Gouhaux, 13,54 % pour le radical de gauche Jean Hancy, un ancien conseiller municipal de Jacques MĂ©decin, et 8,60 % pour Jacques Schonbach (RPR)[149]. Le total des voix des gauche atteint 51 % ; la candidate PCF se dĂ©siste en faveur d'HervĂ© Dupont et Jean Hancy appelle Ă  voter pour ce dernier[149]. Le candidat RPR est quant Ă  lui plus rĂ©servĂ© sur son appel Ă  voter pour Jacques MĂ©decin et nĂ©gocie son ralliement[149]. Au second tour, Jacques MĂ©decin l'emporte d'une courte tĂŞte, avec 145 voix d'avance sur 13 342 votants[150]. Il met cette difficile rĂ©Ă©lection sur le compte de son engagement au sein de la majoritĂ© prĂ©sidentielle et du gouvernement, dont il prend alors ses distances : « Mes Ă©lecteurs sont, dans l'ensemble, des opposants Ă  l'État qui ont pu croire que j'Ă©tais devenu le complice des injustices dont ils sont victimes[149]. »

Le Parti socialiste accuse Jacques Médecin d'avoir gagné grâce à des « procurations douteuses » dans le premier bureau du canton, de la part d'électeurs qui résident à Pondichéry ; ce bureau a donné un score très important à Jacques Médecin[149]. Il désigne ainsi ce dernier sous l'appellation de « conseiller général de Pondichéry »[151]. Un recours en annulation est formulé par Hervé Dupont auprès du tribunal administratif de Nice mettant en cause la validité de 174 procurations[152]. Mais ce recours est rejeté[151], suivant en cela les conclusions du commissaire du gouvernement qui n'établit qu'à une trentaine le nombre de procurations jugées irrégulières[150].

Candidature aux européennes de 1979

Il se présente aux élections européennes de juin 1979, les premières au suffrage universel direct, sur la liste conduite par Philippe Malaud et intitulée Union de défense interprofessionnelle pour une France indépendante dans une Europe solidaire (UDIP-FIDES)[153]. Il est positionné en troisième position sur cette liste, derrière Pierre Poujade, ancien responsable de l'Union de défense des commerçants et artisans[153]. Lors de la campagne, il met en avant ses convictions pro-européennes : « Dès 1945, j'ai adhéré au Mouvement fédéraliste européen et je me suis toujours battu pour l'unité européenne. Ma candidature se situe dans le droit fil de mes engagements antérieurs[153] ». L'une des affiches de la liste dénonce la « bande des quatre » qui « confisquent la radio et la télévision à leur profit[153] ».

Cette dĂ©cision de se prĂ©senter sur une petite liste qui a peu de chances d'atteindre un score qui lui donnerait des Ă©lus, et face Ă  la liste de son propre parti l'UDF, peut sembler Ă©tonnante. L'une des hypothèses d'explication rapportĂ©es par le journal Le Monde est qu'il chercherait Ă  dĂ©montrer son influence Ă©lectorale dans les Alpes-Maritimes auprès de ValĂ©ry Giscard d'Estaing afin que celui-ci ne cherche pas Ă  l'Ă©vincer ultĂ©rieurement[153]. Il affirme que, bien que se prĂ©sentant sur une liste concurrente Ă  celle soutenue par le chef de l'État, sa « fidĂ©litĂ© [Ă  ce dernier] ne peut ĂŞtre mise en doute »[153]. La liste recueille 1,40 % des voix au niveau national, et 3,27 % dans les Alpes-Maritimes[154]. Le journal Nice-Matin assène : « le maire essuie lĂ  une cuisante mais indĂ©niable dĂ©faite[154]. »

Larges succès électoraux et basculement au RPR

En septembre 1980, il prend part Ă  la crĂ©ation d'un comitĂ© de soutien Ă  Ronald Reagan, alors candidat Ă  l'Ă©lection prĂ©sidentielle amĂ©ricaine de 1980[155]. Parmi les autres membres de ce comitĂ© se trouvent Philippe Malaud et Pascal Gauchon du PFN[155]. Il est en janvier 1981 l'une des rares personnalitĂ©s françaises Ă  participer au bal inaugural du premier mandat (en) de Reagan[156].

Au premier tour de l'Ă©lection prĂ©sidentielle de 1981, bien que toujours membre du Parti rĂ©publicain et du groupe UDF Ă  l'AssemblĂ©e nationale, il dĂ©cide de soutenir Jacques Chirac plutĂ´t que ValĂ©ry Giscard d'Estaing[157]. Il explique ce choix par « la dĂ©nonciation du dirigisme Ă©tatique dont la province se sent Ă©crasĂ©e et de la bureaucratie envahissante […] pour lesquelles nous n'avions pas votĂ© en 1974[158] ». Lors d’un rassemblement du candidat RPR Ă  Nice le 8 mars 1981, au théâtre de verdure, devant cinq mille personnes, il prononce un discours[158]. Ce soutien affichĂ© de la part d'un antigaulliste historique Ă©tonne et mĂ©contente certains militants gaullistes locaux ainsi que certains de ses partisans, notamment des rapatriĂ©s d'AlgĂ©rie[157]. En vue du second tour, après l'Ă©limination de Jacques Chirac, il apporte son soutien Ă  ValĂ©ry Giscard d'Estaing « face Ă  un danger de sociĂ©tĂ© collectiviste[157] ». MalgrĂ© l'Ă©lection de François Mitterrand et la poussĂ©e de la gauche aux Ă©lections lĂ©gislatives suivantes qui font suite Ă  la dissolution de l'AssemblĂ©e nationale, il est rĂ©Ă©lu dĂ©putĂ© dès le premier tour dans la deuxième circonscription des Alpes-Maritimes, avec 52,1 % des voix, face au socialiste Jean-Pascal Carlotti (33,4 %), et au conseiller gĂ©nĂ©ral communiste Louis Broch (13,9 %)[43]. Au cours de la campagne, il dĂ©nonce « l'ambition [des socialistes] de gouverner avec les communistes aux ordres de Moscou », et dĂ©fend la « SociĂ©tĂ© de libertĂ©s » face aux « marxistes »[159]. Les deux autres circonscriptions Ă©lectorales niçoises voient en revanche la victoire au second tour des candidats de la gauche dont Max Gallo[160]. Ă€ l'AssemblĂ©e nationale, il choisit de s'apparenter au groupe RPR, actant sa sĂ©paration de l'UDF[161].

En janvier 1982, l'écrivain britannique Graham Greene donne un entretien au Sunday Times dans lequel il annonce la parution de son ouvrage J'accuse ou Nice côté ombre qui dénonce la corruption qui selon lui gangrénerait la Côte d'Azur et particulièrement Nice où police et justice seraient entrées en collusion avec le Milieu[162]. Cet entretien connait un fort retentissement médiatique et contribue à ternir l'image de la Côte d'Azur[162]. Le « système Médecin » est à cette occasion mis en cause par divers journaux[162]. En février, Jacques Médecin réagit dans Le Quotidien de Paris : « Les déclarations de ce vieux gâteux de 77 ans, qui semble vouloir se faire un coup de pub, ne m'impressionnent pas. S'il n'est pas heureux dans le Midi, il n'a qu'à vivre ailleurs. Ce qui m'agace particulièrement, c'est que ma ville soit systématiquement la cible de tous ceux qui veulent dégoiser sur le Midi de la France. Le Milieu niçois n'existe pas à proprement parler (…) c'est un Milieu corso-pied-noir qui ne contient pas de Niçois[163]. » Graham Greene fournit toutefois peu de preuves de ce qu'il avance[162]. La justice interdit la publication du livre en France pour atteinte à la vie privée[164].

Ă€ l'issue des Ă©lections cantonales de mars 1982, auxquelles il ne participe pas directement, il est rĂ©Ă©lu pour la quatrième fois Ă  la tĂŞte du conseil gĂ©nĂ©ral des Alpes-Maritimes, continuant de disposer d'une très large majoritĂ© (39 conseillers gĂ©nĂ©raux sur 46)[165]. En vue des Ă©lections municipales de mars 1983, une alliance avec le Front national est Ă©voquĂ©e. En novembre 1982, Jean-Marie Le Pen dĂ©clare lors d'un discours Ă  Nice ĂŞtre « prĂŞt Ă  faire liste commune avec le maire sortant, d'abord parce que, dans 99 % des cas, Monsieur Jacques MĂ©decin dit Ă  peu près les mĂŞmes choses que ce que je vous dis[166]. » En janvier 1983, le maire de Nice explique que le FN l'a sollicitĂ© pour entrer sur sa liste mais qu'il rejette le nombre de places demandĂ©es tout en Ă©tant « d'accord sur le principe »[167]. L'alliance n'a finalement pas lieu ; le Front national prĂ©sente sa propre liste, tout comme Fernand Icart, qui entre en dissidence de l'UDF, laquelle soutient officiellement Jacques MĂ©decin[168]. Son adversaire principal reste nĂ©anmoins la liste d'union de la gauche menĂ©e par Max Gallo. La campagne est marquĂ©e par l'affaire des fausses factures, relatives Ă  des marchĂ©s publics, qui touche en partie Nice et son centre hospitalier rĂ©gional, et qui implique des proches de Jacques MĂ©decin : son ancien beau-frère et architecte Jean-Claude Aragon (qui sera plus tard innocentĂ©), l'un de ses adjoints RenĂ© Pietruschi, et le conseiller municipal Gilbert Stellardo sont inculpĂ©s en fĂ©vrier et mars 1983[169]. Ces Ă©lections municipales sont pourtant largement remportĂ©es par Jacques MĂ©decin dont la liste est Ă©lue dès le premier tour avec un score de 54,83 % et 90 353 voix, soit un nombre de voix record Ă  des Ă©lections municipales Ă  Nice, face Ă  la liste de Max Gallo (31,25 %) et Ă  celle de Fernand Icart (6,33 %)[170]. C'est un succès personnel pour le maire sortant eu Ă©gard au contexte et Ă  la configuration de ces Ă©lections (une affaire de justice qui touche son entourage, la prĂ©sence d'une liste dissidente de droite Ă  l'image plus modĂ©rĂ©e, l'effacement du PCF au profit du PS au sein de la liste de gauche) et qui dĂ©montre le sentiment d'adhĂ©sion dont il fait l'objet[171].

Lors de la campagne pour les Ă©lections europĂ©ennes de 1984, il refuse de prĂ©sider le comitĂ© dĂ©partemental de soutien Ă  Simone Veil qui mène la liste commune UDF-RPR, et ne prend pas part Ă  sa visite Ă  Nice en juin 1984, officiellement en raison « malencontreusement » d'une sĂ©ance du conseil gĂ©nĂ©ral[172] - [173]. En fĂ©vrier, il avait reçu en privĂ© Jean-Marie Le Pen avant sa rĂ©union publique Ă  Nice Ă  laquelle avaient assistĂ© des Ă©lus mĂ©decinistes[172]. Dans les Alpes-Maritimes, la liste de Simone Veil recueille un score quasiment Ă©gal Ă  sa moyenne nationale (42,8 %), ce qui est inhabituel dans ce dĂ©partement ancrĂ© Ă  droite, alors que la liste du Front national y rĂ©alise sa meilleure performance (21,39 % contre 10,95 % au niveau national)[174].

Ă€ l'occasion de la manifestation pour l'École libre du 24 juin 1984, il fait voter par le conseil gĂ©nĂ©ral des Alpes-Maritimes une subvention de 350 000 francs destinĂ©e Ă  financer l'acheminement Ă  Paris des participants du azurĂ©ens[175]. Cette dĂ©libĂ©ration est annulĂ©e par le prĂ©fet.

Aux Ă©lections cantonales de mars 1985, comme d'autres Ă©lus RPR et UDF des Alpes-Maritimes, il passe des accords Ă©lectoraux avec le Front national[176]. Il reçoit ainsi le soutien du FN dès le premier tour dans son propre canton de Nice-5 ; de mĂŞme que les mĂ©decinistes RenĂ© Pietruschi (dans le canton de Nice-7) et Bernard Asso (dans le canton de Nice-10)[176]. Par ailleurs, dans quatre autres cantons de Nice (8, 11, 12, 14), il conclut un accord dĂ©sistement rĂ©ciproque avec le FN pour le second tour[176]. Ă€ cette occasion, il dĂ©clare : « [Le FN] avait obtenu, l'an dernier, la moitiĂ© de nos voix. Nous Ă©tions donc obligĂ©s de nous entendre. Cela ne me gĂŞne d'ailleurs pas le moins du monde[176]. » Cet accord est un succès pour Jacques MĂ©decin : il est rĂ©Ă©lu dès le premier tour dans son canton avec plus de 70 % des voix contre 28 % pour le candidat de la gauche, et les nombreux duels de second tour entre mĂ©decinistes et FN aboutissent Ă  la victoire systĂ©matique de ces premiers[160] - [177]. Il est Ă  nouveau rĂ©Ă©lu prĂ©sident du conseil gĂ©nĂ©ral des Alpes-Maritimes[177].

Durant la période des « Événements », il s'implique contre le mouvement indépendantiste de Nouvelle-Calédonie. En janvier 1985, il co-organise une manifestation à Nice en faveur de la Nouvelle-Calédonie française au cours de laquelle il prononce un discours devant plusieurs milliers de personnes[178]. En août, peu avant les élections régionales du 29 septembre 1985, il se rend en Nouvelle-Calédonie en compagnie de François Léotard et Roger Chinaud[179] - [180]. Leurs voitures sont caillassées par des indépendantistes à Thio, engendrant une polémique avec le gouvernement socialiste à propos de l'attentisme des gendarmes chargés de leur protection[179] - [180]. En septembre, il accompagne Jacques Chirac en visite en Nouvelle-Calédonie et y rencontre Jean-Marie Le Pen qu'il convainc de retirer sans contrepartie sa liste aux élections régionales néo-calédoniennes dans la région Centre pour ne pas gêner le RPCR, le principal parti anti-indépendantiste[181] - [182].

1985 : premières affaires américaines

En septembre et octobre 1985, Le Canard enchaîné consacre plusieurs articles polémiques à Jacques Médecin[183], qui sont repris et complétés le par l'émission Droit de réponse animée par Michel Polac sur TF1[184].

Il est rendu publique l'information selon laquelle Jacques Médecin a été contrôlé en juillet 1984 par la douane américaine à l'aéroport de Los Angeles en possession de bijoux qu'il n'a pas déclarés, et a dû s'acquitter d'une amende du double de leur valeur[185]. Le maire de Nice minimise l'incident, expliquant qu'il s'agit d'un malentendu avec la douane américaine qui a cru qu'il était résident américain, et qu'il a finalement payé de simples droits de douane[185]. Par ailleurs, une ancienne collaboratrice aux États-Unis de Jacques Médecin, Claudette Pezenas, également ancienne amie intime de son épouse Ilene, interviewée dans Droit de réponse, l'accuse d'avoir importé illégalement aux États-Unis des bijoux et d'autres objets de valeur, et soutient également que son épouse et lui sont propriétaires aux États-Unis d'une maison à Beverly Hills, d'une autre à Pebble Beach, de terrains constructibles, de plusieurs comptes bancaires et d'au moins un important portefeuille d'actions[184] - [186]. Ceci contraste avec les faibles revenus fiscaux de Jacques Médecin en France[183]. Dès mars 1982, Le Canard enchaîné avait révélé qu'un rapport du fisc constatait des « excédents de crédits bancaires inexplicables » chez Jacques Médecin alors que celui-ci n'était pas imposable depuis son divorce[165].

Par ailleurs, plusieurs dĂ©marches commerciales entreprises par Jacques MĂ©decin aux États-Unis sont rĂ©vĂ©lĂ©es[185]. Claudette Pezenas dĂ©taille le montage complexe de sociĂ©tĂ©s qu'il y aurait mis en place[187]. Un autre invitĂ© de Droit de rĂ©ponse, Bernard Bragard, membre du cabinet de la ministre Georgina Dufoix et ancien attachĂ© parlementaire de l'ex-secrĂ©taire d'État socialiste Max Gallo, confirme ces propos en prĂ©sentant comme preuves un certain nombre de documents dont certains a priori rĂ©digĂ©s par Jacques MĂ©decin lui-mĂŞme[184]. Il est expliquĂ© que ce dernier aurait crĂ©Ă© la sociĂ©tĂ© amĂ©ricaine American Regulation Corporation (ARC) qui a pour actionnaires Ă  80 % la Lanta Incorporated, une filiale (domiciliĂ©e aux Antilles nĂ©erlandaises) de la Serel, laquelle est une sociĂ©tĂ© niçoise de signalisation dirigĂ©e par Francis Guillot, et Ă  20 % la sociĂ©tĂ© panamĂ©enne California Regulation Corporation (CRC) qu'aurait crĂ©Ă©e Ă©galement Jacques MĂ©decin[188]. La sociĂ©tĂ© ARC aurait pour but d'importer Ă  Los Angeles un système de rĂ©gulation informatique des bus de la ville dĂ©jĂ  mis en place Ă  Nice par la Serel[188]. La sociĂ©tĂ© CRC possĂ©derait Ă©galement MĂ©dicis Multitechnics qui servirait Ă  commercialiser aux États-Unis les produits de JCDecaux ainsi que de la Compagnie gĂ©nĂ©rale de chauffe[189]. Le rĂ´le d'intermĂ©diaire que Jacques MĂ©decin exercerait entre la mairie de Los Angeles et la sociĂ©tĂ© JCDecaux pour l'installation de sanisettes fait l'objet d'une attention particulière[185]. Un courrier qu'il a adressĂ© Ă  Claudette Pezenas est publiĂ©, dans lequel il l'enjoint : « Tu peux rĂ©clamer pour toi et moi 10 % sur la publicitĂ© susceptible d'ĂŞtre apposĂ©e sur les chiottes[183]. » Le surnom donnĂ© alors Ă  Jacques MĂ©decin par Le Canard enchaĂ®nĂ©, « Monsieur 10 % sur les chiottes[183] », se popularise avec le retentissement mĂ©diatique de cette affaire, qui ne donnera nĂ©anmoins pas lieu Ă  des poursuites judiciaire[190] - [191] - [192] - [193]. Enfin, Claudette Pezenas affirme que son salaire lui parvenait en provenance de Nice via l'Afrique, les Pays-Bas et Panama, et dĂ©clare avoir reçu des menaces de mort par tĂ©lĂ©phone de la part du maire de Nice et de son Ă©pouse[187] - [194].

Jacques Médecin réagit en qualifiant l'émission de « procès politique » avant les élections législatives de mars 1986, parlant de « trucages, mensonges et diffamation » et de « l'étalage de la vengeance d'une femme ulcérée de n'avoir pas mérité de garder son emploi »[184]. Il explique que c'est Claudette Pezenas qui a insisté pour qu'il devienne président d'ARC et qui a eu l'idée de créer Médicis Multitechnics, que c'est également elle qui lui a présenté un avocat qui lui a exposé un montage financier complexe, qu'elle a elle-même démarché la Serel, et que les sociétés en question n'ont jamais rapporté le moindre revenu[184]. Il déclare par ailleurs que la maison de Beverly Hills a été achetée par son épouse avec le produit de la vente de l'appartement qu'elle possédait déjà, qu'ils ne possèdent pas de maison à Pebble Beach, et qu'il a fait amener des bijoux et autres objets de valeur en provenance de sa maison de Nice tout en les déclarant à la douane[184]. Il confirme néanmoins qu'il ne paie pas l'impôt sur le revenu en France car ses indemnités d'élu local ne sont pas soumises à l'impôt, mais s'acquitte de l'ISF, et que son indemnité de parlementaire est versée intégralement à son ex-épouse au titre de pension alimentaire[184]. Il porte plainte pour diffamation mais la justice le déboute face au Canard enchaîné et il finit par abandonner sa plainte contre Droit de réponse et ses participants[183] - [195].

Polémiques sur le Ruhl et Fratoni

Début 1986 et depuis la fin de l'année 1985, Jacques Médecin est accusé de faire ralentir anormalement le processus de reprise de l'exploitation du casino Ruhl (fermé depuis 1982) par un groupe d'investisseurs, pour la plupart dirigeants d'autres casinos à l'étranger et en outre-mer, réunis au sein de la Société d'exploitation du grand casino de Nice (SGCN)[196]. Déjà auparavant, plusieurs offres de reprises s'étaient succédé et avaient échoué, soit parce qu'elles étaient soutenues par le clan de Jean-Dominique Fratoni mais rejetées par le ministère de l'Intérieur socialiste, soit inversement[196] - [197]. L'un des potentiels repreneurs, supposément non adoubé par Jean-Dominique Fratoni, avait même été assassiné en 1983[197]. Dans le dossier de la SGCN, Jacques Médecin finit par déclarer vouloir attendre les élections législatives de mars 1986 et l'éventuel changement de majorité parlementaire au profit de la droite[196]. En juin 1986, il fait voter par le conseil municipal un avis favorable à une nouvelle offre de reprise du casino, cette fois émanant de la Société niçoise des bains de mer (SNBM) dont la plupart des actionnaires sont des proches de Jean-Dominique Fratoni, parmi lesquels son gendre[198]. En décembre 1986, le nouveau ministre RPR de l'Intérieur Charles Pasqua accorde à la SNBM l'autorisation de rouvrir le casino Ruhl[199]. La réouverture a lieu en avril 1987 dans un contexte d'attentats à la bombe perpétrés à l'encontre des intérêts de deux responsables du casinos dont ceux de Max Gilli, un proche de Jacques Médecin[199].

En juin 1987, alors que Jean-Dominique Fratoni, toujours en fuite à l'étranger, cherche un point de chute à la suite du refus des autorités des Antilles néerlandaises de l'autoriser à poursuivre son séjour dans le pays, le ministre de l'Industrie et du Commerce du Paraguay Delfin Ugarte Centurion, présent par ailleurs à la soirée de réouverture du casino Ruhl, propose de l'accueillir au Paraguay[200]. Le ministre déclare à cette occasion être intervenu à la demande de « [son] ami » Jacques Médecin, ce que ce dernier s'empresse de démentir[200].

Dernières victoires électorales sur fond de rivalité avec le FN

En vue des élections régionales de mars 1986, Jacques Médecin prône à nouveau la création d'une région Côte d'Azur, distincte de la région marseillaise, et menace de présenter une liste pour porter ce projet[201] - [202]. Le poids électoral de Jacques Médecin conduit le RPR et l'UDF à soutenir cette proposition[201] - [202]. Jacques Médecin ne présente pas finalement de liste, mais la région Côte d'Azur ne sera jamais créée.

Aux Ă©lections lĂ©gislatives de mars 1986, qui se dĂ©roulent au scrutin proportionnel dĂ©partemental, il conduit la liste commune RPR-UDF dans les Alpes-Maritimes[203]. Sa liste arrive largement en tĂŞte avec 44,01 % des voix devant la liste socialiste (23,51 %) et la liste FN (20,88 %), et obtient cinq dĂ©putĂ©s sur les neuf du dĂ©partement[203]. Son score est similaire sur la ville de Nice (44,39 %)[203]. Ces Ă©lections confirment la concurrence que reprĂ©sente pour Jacques MĂ©decin le FN dans le dĂ©partement ; celui-ci y rĂ©alise en effet son deuxième score national et y fait Ă©lire deux dĂ©putĂ©s dont le chef local du parti Ă  Nice Jacques Peyrat[203] - [204]. Ă€ l'issue de ces Ă©lections, Jacques MĂ©decin adhère pleinement au groupe RPR alors qu'il en Ă©tait apparentĂ© auparavant[205].

En février 1987, il fait concéder par la ville de Nice la chapelle désaffectée de la Visitation Sainte-Claire à la Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X, contre l'avis de l'évêque de Nice François Saint-Macary[206].

En juin 1987, le conseil général des Alpes-Maritimes qu'il préside déclare son intention d'inscrire dans un système informatique les personnes qui sont dépistées positivement au VIH de façon confidentielle mais pas anonyme ; ceci, il est expliqué, afin de recueillir des données sur la diffusion du virus et prendre des décisions en matière de prévention[207]. À cette époque, seuls les cas de SIDA font l'objet d'un recensement, qui est anonyme, avant que celui-ci soit élargi en 1999-2000 à tous les cas d'infection au VIH[207] - [208]. Devant les vives critiques de la CNIL et de la ministre de la Santé Michèle Barzach, il abandonne ce projet[209].

Également en juin 1987, un de ses proches, Jean Oltra, chargé de la communication de la ville, est à l'initiative d'un important rassemblement des pieds-noirs à Nice intitulé « 25 ans après »[210]. L'événement réunit plusieurs dizaines de milliers de personnes pendant trois jours, avec notamment une grande exposition au Palais des expositions, un pique-nique à Cimiez et une messe sur la place Masséna, sur laquelle une grande croix est installée pour l'occasion, en présence de plusieurs personnalités politiques dont le Premier ministre Jacques Chirac[210] - [211] - [212]. Jacques Médecin intervient plusieurs fois au cours du rassemblement, sur fond de rivalité avec le FN pour obtenir les faveurs de l'électorat pied-noir[213].

Lors de l'Ă©lection prĂ©sidentielle de 1988, il s'engage pleinement et de façon remarquĂ©e en faveur de Jacques Chirac[214] - [215]. Le recevant Ă  Nice en mars, celui-ci le qualifie publiquement de « maire exemplaire » et « exceptionnel »[214]. Jacques Chirac n'arrivera pourtant qu'en troisième position Ă  Nice avec 23,43 % des voix alors que Jean-Marie Le Pen est en tĂŞte avec 25,92 %[216]. Lors des lĂ©gislatives qui suivent en juin, touchĂ© par la nouvelle loi sur le cumul des mandats, le maire de Nice choisit de n'ĂŞtre que le supplĂ©ant de la candidate Martine Daugreilh, sa chef de cabinet ajointe et membre du Club de l'Horloge, dans la deuxième circonscription des Alpes-Maritimes[217] - [215]. Dans les autres circonscriptions du dĂ©partement, il place Ă©galement ses jeunes proches, surnommĂ©s alors, tout comme Martine Daugreilh, les « bĂ©bĂ©s mĂ©decin » : Rudy Salles dans la troisième, Christian Estrosi dans la cinquième, Jean-Claude Pastorelli, dirigeant des CACEL, comme supplĂ©ant dans la première, et son chef de cabinet GĂ©rard Renaudo comme supplĂ©ant dans la septième[215]. Ces « bĂ©bĂ©s mĂ©decin », de diverses origines sociales, vouent alors une admiration fidèle et dĂ©jĂ  ancienne Ă  leur mentor[215] - [218] - [219]. Jacques MĂ©decin dĂ©clare Ă  ce propos : « J'ai auprès de moi dix maires potentiels dont aucun ne veut ma mort[215]. » Par ailleurs, pour ces Ă©lections, sans attendre les consignes nationales du RPR et de l'UDF (rĂ©unis au sein de l'URC, l'Union du rassemblement et du centre), il annonce que ses candidats se retireront sans condition si le Front national arrive devant eux au premier tour. Il explique alors : « Si vous saviez comme je me fous des directives de l'URC ! M. Noir et M. Malhuret peuvent aller se faire taper oĂą ils veulent, moi, je suis dans une tranchĂ©e et je ne regarde pas la couleur de l'uniforme de mes camarades de tranchĂ©e. Je me bats contre les marxistes, les lĂ©ninistes, ceux par exemple qui pleurent les terroristes du FLNKS massacreurs de gendarmes français[215]. » NĂ©anmoins, tous ses candidats arrivent en tĂŞte, et c'est le FN qui se retire en Ă©change de dĂ©sistements en sa faveur dans les Bouches-du-RhĂ´ne[220]. La droite remporte les neuf sièges de dĂ©putĂ©s du dĂ©partement, alors mĂŞme qu'au niveau national la gauche reconquiert la majoritĂ© parlementaire[220]. Martine Daugreilh nomme Jacques MĂ©decin comme assistant parlementaire[221].

Le 15 septembre 1988, à la suite de plusieurs assassinats d'enfants en France, il organise avec les députés Charles Ehrmann, Christian Estrosi, Martine Daugreilh et Rudy Salles, une manifestation silencieuse à Nice pour la rétablissement de la peine de mort[222]. D'après Le Monde, cette manifestation réunit trois mille personnes[222]. Elle est destinée en premier lieu à soutenir deux propositions de loi déposées par ces mêmes députés consistant à rétablir la peine de mort pour certains crimes et à instaurer des référendums d'initiative populaire relatifs notamment à ce sujet[222]. La création d'une association pour le rétablissement de la peine capitale, présidée par le maire de Nice, est également annoncée à cette occasion[222]. Le Front national, menée par son chef de file local Jacques Peyrat, se joint à cette manifestation, à la fin du cortège[222].

Ă€ l'issue des Ă©lections cantonales de septembre et octobre 1988 (oĂą son siège n'est pas en jeu), sa majoritĂ© domine Ă  nouveau de manière Ă©crasante le conseil gĂ©nĂ©ral des Alpes-Maritimes avec 46 sièges (soit 1 de plus) sur 51 (l'opposition est constituĂ©e de 5 Ă©lus communistes)[223]. Aux Ă©lections municipales de mars 1989 en revanche, il obtient son score le plus bas Ă  ce type de scrutin au premier tour (42,86 %) face Ă  la liste PS de Jean-Hugues Colonna (19,93 %), Ă  la liste FN de Jacques Peyrat (18,29 %) et Ă  trois autres listes de gauche qui totalisent ensemble 18,92 %[224]. Le nombre de voix recueillies par sa liste (55 666) est le plus faible depuis son Ă©lection de 1966[224]. Au second tour, il parvient nĂ©anmoins, avec une nette avance, pour la cinquième fois Ă  conserver sa mairie, mais il s'agit de l'unique fois oĂą il n'obtient pas de majoritĂ© absolue (46,76 %)[225]. La liste PS qui a fusionnĂ© avec celle du PCF rĂ©unit 33,57 % des suffrages ; et avec 19,67 %, le FN fait son entrĂ©e au conseil municipal[225]. Pour l'universitaire Alain Garrigou, le « fief Ă©lectoral [parait alors] vulnĂ©rable » et l'après-MĂ©decin est ainsi dĂ©sormais envisagĂ© par certains de ses soutiens[217].

1989-1990 : la chute

En mai 1989, il participe en Argentine à la campagne présidentielle du candidat du parti justicialiste Carlos Menem, à l'issue de laquelle ce dernier est élu[226] - [227]. Il envisage de lancer plusieurs projets immobiliers dans ce pays (palais des congrès, complexes hôteliers)[228]. En novembre 1989, il est fait grand officier de l'ordre de Mai par le président argentin[229] - [230].

Le système des associations paramunicipales

Le , l'ancien député socialiste Jean-Hugues Colonna et trois autres conseillers municipaux niçois d'opposition portent plainte contre Jacques Médecin pour délit d'ingérence[231] - [232]. Ils mettent en cause l'achat de publicités de 1986 à 1989 par des associations paramunicipales dans le journal L'Action Côte d'Azur dont le maire de Nice est l'actionnaire majoritaire via la SEGAT[231] - [232]. C'est dans le cadre de cette affaire que le , il est inculpé par le conseiller à la cour d'appel de Grenoble Pierre Bérard pour délit d'ingérence[231] - [233].

Cette plainte relance surtout les enquêtes fiscales et judiciaires, débutées plusieurs années auparavant, autour des comptes de Jacques Médecin et de celui des associations paramunicipales niçoises[233]. En novembre et décembre 1989, les journalistes Jacques Cotta et Pascal Martin révèlent sur Antenne 2, l'enquête en cours sur les versements effectués par l'association municipale Nice-Opéra aux sociétés Costa Real et Oceania Systems dont les policiers soupçonnent Jacques Médecin d'être le bénéficiaire[234] - [233] - [231].

L'opéra de Nice, géré dans les années 1980 par l'association paramunicipale Nice-Opéra qui sera à l'origine de l'affaire du même nom dans laquelle est impliqué Jacques Médecin.

Au cours des annĂ©es 1980, Jacques MĂ©decin met en effet en place de nombreuses associations paramunicipales Ă  qui il attribue la gestion de services municipaux par dĂ©lĂ©gation de service public et dont il fait doter par la ville de Nice de larges moyens financiers[227] - [235]. Ces associations Ă©chappent aux règles classiques de l'administration publique ; leurs dĂ©penses ne sont par exemple par contrĂ´lĂ©es par le conseil municipal de la ville[227] - [235]. Entre 1982 et 1990, l'ensemble des associations, prĂ©sidĂ©es pour certaines par Jacques MĂ©decin, reçoivent près de 2 milliards de francs de subventions de la part de la ville de Nice, soit 20 % du budget de la ville[227]. Sept associations en particulier sont dotĂ©es des budgets les plus importants : Nice-communication, le comitĂ© des fĂŞtes, Nice-animation, Nice-OpĂ©ra, Nice-congrès, Nice-promotion, et le syndicat d'initiative[235]. Leur budget connait une hausse massive : le budget de Nice-communication passe ainsi entre 1982 et 1989 de 6 Ă  77 millions de francs, celui de Nice-OpĂ©ra de 15 Ă  47 millions de francs[227][N 3].

En janvier 1984, le préfet de police de Nice Étienne Ceccaldi communique un rapport à l'intention du préfet des Alpes-Maritimes dans lequel il écrit que « des associations municipales pourraient servir de support à une vaste affaire de fausses factures[236]. ». En mai 1985, il est obligé de quitter son poste et aucune suite n'est donnée à son rapport[236]. En janvier 1986, la Direction nationale des enquêtes douanières interroge l'architecte niçois Georges Marguerita, proche de Jacques Médecin, dans le cadre d'une enquête sur des projets de casino en République dominicaine et à Saint-Martin menés par Jean-Dominique et Noël Fratoni[233] - [237]. Lors d'une perquisition à son domicile, ils découvrent dans son répertoire téléphonique, entre les noms de Claude Muller, un promoteur cannois, et de Jacques Médecin (dont l'adresse mentionnée est celle de sa maison à Beverly Hills), les références d'un compte bancaire à la Bank of California sur Wilshire Boulevard à Los Angeles ainsi que le nom de la société Costa Real[233] - [28]. Il indique alors aux douaniers que ce compte bancaire appartient à Jacques Médecin mais qu'il ne sait pas à quoi correspond Costa Real, et que ces informations notées sur son répertoire lui ont été transmises, alors qu'il était en voyage aux États-Unis, par le maire de Nice en mai 1983[233] - [28]. De son côté, Claude Muller nie être lié à cette affaire, parlant d'usurpation d'identité[233] - [238]. Le lendemain de son interrogatoire, sa « boutique est plastiquée » d'après Bernard Bragard, Frédéric Gilbert et Catherine Sinet[238]. Le ministre du budget Alain Juppé est informé du dossier et le transmet à la Direction nationale d'Enquêtes fiscales[238].

En avril 1987, un contrĂ´le fiscal menĂ© auprès de l'association Nice-OpĂ©ra, prĂ©sidĂ©e par Jacques MĂ©decin, met au jour des factures adressĂ©es par la sociĂ©tĂ© Costa Real Ă  Nice-OpĂ©ra, et des paiements effectuĂ©s par l'association Ă  cette sociĂ©tĂ© sur le mĂŞme compte bancaire que celui mentionnĂ© dans le rĂ©pertoire de Georges Marguerita[233] - [239]. Le premier paiement, de 12 000 dollars, date de septembre 1983[233]. Les dirigeants de Nice-OpĂ©ra expliquent alors qu'un contrat de 48 000 dollars annuels a Ă©tĂ© signĂ© en mai 1983 avec Costa Real confiant Ă  cette sociĂ©tĂ© la vente, la location et la distribution des vidĂ©os produites par l'opĂ©ra de Nice et la recherche de chanteurs aux États-Unis[233]. Pourtant, aucune des missions confiĂ©es Ă  Costa Real ne semble avoir donnĂ© lieu Ă  des prestations concrètes[233]. Il est dĂ©couvert que Costa Real est une sociĂ©tĂ© panamĂ©enne dont l'Ă©tablissement Ă  Century City (Ă  Los Angles) se rĂ©sume Ă  une boite aux lettres hĂ©bergĂ©e dans les locaux de la sociĂ©tĂ© Atlantis grâce Ă  l'entremise de Jean Filippi, un proche de Jacques MĂ©decin[233]. Les enquĂŞteurs constatent Ă©galement qu'Ă  partir de janvier 1984, une sociĂ©tĂ© londonienne de façade crĂ©Ă©e par un cabinet d'affaires de l'ĂŽle de Man, Oceania Systems, a pris la place de Costa Real dans la convention qui la lie Ă  Nice-OpĂ©ra[233]. Son contrat avec l'association est signĂ©, au nom d'Oceania, par « Muller P. »[233]. Costa Real est de son cĂ´tĂ© dissoute en mai 1987[233]. D'après Bernard Bragard, FrĂ©dĂ©ric Gilbert et Catherine Sinet, de fĂ©vrier 1984 Ă  mai 1989, Nice-OpĂ©ra verse 1,26 million de francs Ă  Oceania System[240].

Par ailleurs, l'enquĂŞte fiscale sur les comptes de Nice-OpĂ©ra rĂ©vèle l'existence d'un partenariat depuis 1982 entre l'association et la radio mĂ©deciniste Radio Baie des Anges afin de promouvoir la musique classique : l'opĂ©ra verse Ă  la radio 1 000 francs par heure de musique classique diffusĂ©e sur l'antenne[233]. Ainsi, du au , Nice-OpĂ©ra verse 800 000 francs Ă  Radio Baie des Anges, dont une partie provient de la diffusion des VĂŞpres siciliennes de Giuseppe Verdi durant 103 heures concentrĂ©es sur deux mois de l'annĂ©e 1984[233].

En mai 1987, à la suite de ces découvertes, la direction des services fiscaux de Marseille demande l'autorisation à sa hiérarchie d'effectuer une vérification complète des comptes de Jacques Médecin et des associations paramunicipales[233] - [241]. Le ministre du Budget Alain Juppé rejette cette demande[233]. En avril 1988, dans un numéro de Paris Match, est publiée une photographie du Premier ministre Jacques Chirac dans son bureau de Matignon, où l'on distingue sur son agenda la mention « Aff. fiscale Médecin »[233] - [241]. Interrogé sur cette inscription par Albert du Roy dans l'émission L'Heure de vérité, Jacques Chirac soutient que cela concerne une demande « très pressante » des syndicats de médecins à propos d'« aménagements de la fiscalité » de cette profession[233].

Le , des perquisitions menĂ©es par la police judiciaire sont effectuĂ©es aux deux domiciles de Jacques MĂ©decin (dans sa villa Lou Soubran et au palais prĂ©fectoral de Nice) et aux sièges de plusieurs associations paramunicipales[233]. Dans un coffre de Nice-OpĂ©ra, il est dĂ©couvert une somme 530 000 francs en billets de 500 francs dont les dirigeants de l'association ne savent pas en expliquer l'origine[233].

Le , la chambre d'accusation de la cour d'appel de Grenoble débute l'instruction de l'affaire Nice-Opéra[242].

Démissions d'élus municipaux juifs et déclaration polémique

Le , les conseillers municipaux niçois du Front national votent pour la première fois le budget municipal[217] - [243]. Jacques Médecin observe alors que « la majorité municipale a été agrandie[38] ». À l'occasion du huitième congrès du FN qui se tient à Nice du 30 mars au , le maire de Nice reçoit officiellement à l'hôtel de ville Jean-Marie Le Pen, accompagné de plusieurs autres dirigeants du FN, et lui remet les armoiries de la ville[243]. Durant ce congrès, le FN accueille le dirigeant du parti allemand Les Républicains Franz Schönhuber, qui fut membre des Waffen-SS durant la Seconde Guerre mondiale[38]. En réaction, le 2 avril, trois élus juifs de la majorité municipale de Jacques Médecin (les adjoints André Sfar et Jill-Patrice Cassuto, et le conseiller municipal Harry Lévy) démissionnent de leur mandat[244]. Selon l'universitaire Alain Garrigou, ces démissions se sont faites « non sans réticence et sans que les fidèles du maire le restent[217]. »

Le , sur Antenne 2, le maire de Nice, faisant référence au vote du budget par les élus FN, réagit à ces démissions en déclarant : « Je ne connais pas d'israélite qui refuse un cadeau qu'on lui offre, même si ce cadeau ne lui convient pas. Je ne connais pas pour ma part un maire qui puisse dire : je refuse les voix qui me sont apportées[244]. » Cette déclaration est largement dénoncée et condamnée par le gouvernement de gauche et les principaux responsables politiques nationaux, du PS au RPR[245]. Tout en exprimant sa « plus catégorique réprobation », le secrétaire général du RPR Alain Juppé rejette l'idée de l'exclure du RPR car de toute façon « [il] n'est plus à jour de cotisations depuis 1987[245] ». Outre le monde politique, les condamnations émanent également de nombreux organismes et associations ainsi que d'artistes niçois comme Arman[246].

Le 4 avril, au journal télévisé de La Cinq, Jacques Médecin revient sur ses propos : « J'ai eu une parole malheureuse, je le regrette, mais personne ne pourra faire croire aux israélites de Nice que je suis devenu antisémite », parlant de « procès d'intention », « ridicule et sans fondement »[247]. Le 10 avril, il accuse l'un des adjoints démissionnaires, André Sfar, d'être manipulé par la gauche et de mener une « vengeance personnelle », ajoutant que les deux autres élus lui ont demandé leur « réintégration » et qu'il la refuse[244]. Dans une lettre rendue publique, Jacques Médecin accuse Alain Juppé d'avoir « hurlé avec la meute socialiste » en apportant son « lâche soutien au procès en diabolisation que veut instruire à [son] encontre la socialie haineuse », mais pour autant il rejette l'idée de démissionner du RPR car il reste « attaché » à Charles Pasqua, Robert Pandraud et Pierre Mazeaud[248]. Il met à jour ses cotisations au RPR mais retourne au Centre national des indépendants et paysans (CNI) auquel il avait adhéré dès 1951[246]. Après avoir émis l'idée, juste avant sa déclaration polémique, que des élus FN remplacent les adjoints démissionnaires, ce sont finalement des élus RPR et UDF qui sont nommés adjoints le 29 juin[244] - [249] - [250].

Pour Alain Garrigou, Jacques Médecin s'est permis cette phrase car « fort d'une grande familiarité avec [la] communauté [juive] », il « croyait pouvoir rappeler une vieille complicité par une plaisanterie comme on en fait entre intimes dans les relations inter-ethniques », mais, prononcée à la télévision et dans un contexte national inadapté, elle a été l'« inverse du rappel des relations de connivence et de sympathie qu'il était de fait » ; il la qualifie de « gaffe politique »[251]. Les journalistes Brigitte Renaldi et Claude-Henry Laval rappellent également la longue « amitié » de Jacque Médecin avec les représentants de la communauté juive de la région, et affirment que cette polémique a « profondément meurtri » le maire de Nice[252]. Celui-ci confesse : « C'est certainement le coup qui m'a fait le plus de peine, le plus mal (…) le plus déstabilisant, le plus injuste (…) j'étais impuissant devant ces accusations[250] ». Dans un entretien accordé à Libération en 1996, il déclarera : « Cela reste ma plus profonde blessure, je vous jure sur ma fille que je ne l'ai jamais digérée. Qu'on ait pu, moi, me soupçonner de cette infamie[253]. » Au-delà de la polémique, la démission des trois élus de sa majorité suggère alors aussi l'affaiblissement de son pouvoir local[254].

Gestion de fait

En juillet 1990, Jean-Marie Tarragoni révèle dans l'hebdomadaire Le Standard de Nice que le versement d'une commission de 5,3 millions de francs par la ville de Nice à la société Arefic, chargée de la négociation avec les banques du rééchelonnement en 1986 de la dette municipale, s'est retrouvé sur le compte d'Élisabeth Arnulf[254] - [255]. Celle-ci, qui a retiré en liquide la majeure partie de cette somme, est assistante de direction dans la société Europ Show dirigée par Lucien Salles, également directeur de l'association paramunicipale Nice-Opéra (elle-même présidée par le maire de Nice)[254] - [255]. Le , la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d'Azur déclare provisoirement Jacques Médecin gestionnaire de fait[231]. Elle estime que « l'ordonnateur [Jacques Médecin] ne pouvait ignorer que les fonds étaient destinés à rémunérer d'autres intermédiaires[231]. » Cet arrêt de déclaration de gestion de fait provisoire place le maire sous la menace d'une destitution de ses fonctions en cas d'arrêt définitif[231]. Par ailleurs, début septembre 1990, la chambre demande au maire de s'expliquer par écrit après avoir constaté que la dette municipale avait augmenté de 43,8 millions de francs à la suite de son rééchelonnement[256] - [232].

DĂ©mission

En aoĂ»t 1990, un de ses avocats lui indique que, par rapport aux menaces pĂ©nales et administratives auxquelles il fait face, c'est la procĂ©dure de la chambre rĂ©gionale des comptes qui est la plus dangereuse pour lui et qui « parait objectivement sur le point d'aboutir »[256]. Le , avant un voyage au Japon, Jacques MĂ©decin laisse entendre dans une interview donnĂ©e Ă  RMC qu'il pourrait dĂ©missionner de ses mandats[231] - [257]. Avant son dĂ©part, il a confiĂ© Ă  son avocat deux lettres Ă  l'attention du prĂ©fet Yvon Ollivier, datĂ©es du 23 septembre, dans lesquelles il l'informe de sa dĂ©mission des fonctions de conseiller municipal et conseiller gĂ©nĂ©ral[258] - [255] - [259] - [260]. Mais le 15 septembre, une amie de Jean Oltra, un proche de Jacques MĂ©decin, en partance pour Buenos Aires afin d'apporter des affaires Ă  ce dernier, est arrĂŞtĂ©e Ă  l'aĂ©roport de Paris-Charles-de-Gaulle par les douaniers qui dĂ©couvrent sur elle une enveloppe portant le nom du maire de Nice et contenant 600 000 francs en liquide[259] - [260] - [261]. Il s'agit vraisemblablement d'un coup montĂ©[261]. Depuis Buenos Aires, qu'il a rejoint après avoir quittĂ© Osaka, il dĂ©cide alors d'accĂ©lĂ©rer sa dĂ©mission au 16 septembre : son avocat produit de nouvelles lettres avec une date corrigĂ©e, les fait parapher par le chef de cabinet du maire, et les remet au prĂ©fet qui exige en retour des lettres authentiques, lesquelles lui parviendront finalement le 20 septembre[259] - [260] - [262] - [263]. Le journal Nice-Matin publie le 16 septembre une « lettre aux Niçois » de Jacques MĂ©decin leur annonçant sa dĂ©mission, expliquant sa lassitude face Ă  Â« la haine partisane d'une gauche totalitaire », et recommandant la constitution d'une liste d'union allant du CDS au Front national en cas de nouvelles Ă©lections[258] - [255]. Il prĂ©cise : « En toute libertĂ©, je le fais avant que les agents d'exĂ©cution du pouvoir socialiste ne me dĂ©missionnent d’autoritĂ©, comme ils l'annoncent dans leurs dĂ®ners en ville[264] ». Son premier adjoint HonorĂ© Bailet, qui lui succèdera peu après comme maire de Nice, dĂ©clare alors : « Je suis bouleversĂ© (…) Je suis encore sous le choc. La ville de Nice vient de perdre son plus fidèle et plus efficace serviteur. Il avait la passion de Nice[265]. »

Réalisations à la tête de la ville et du département

Le Mamac.
Le centre commercial Nicetoile.

Au cours de ses vingt-quatre ans de mandat, Jacques MĂ©decin mène une politique intense de modernisation de la ville de Nice[266]. La population de celle-ci a dĂ©jĂ  largement crĂ» lorsqu'il arrive aux responsabilitĂ©s (de 150 000 habitants en 1901 Ă  322 000 en 1968) et se stabilise jusqu'Ă  sa dĂ©mission (342 000 habitants en 1990)[267]. Maire bâtisseur, il la dote d'Ă©quipements et d'infrastructures dignes d'une mĂ©tropole, et dĂ©veloppe son Ă©conomie[266]. Ainsi le journaliste François Caviglioli Ă©crit en 1990 dans Le Nouvel Observateur : « En vingt ans il a fait d'une ville moyenne une ville internationale et il a irriguĂ© les Alpes-Maritimes en devises[268]. » Il est Ă©galement un temps animĂ© par l'idĂ©e de faire de Nice un Las Vegas europĂ©en et de manière gĂ©nĂ©rale un centre important pour les loisirs et les jeux[113] - [266]. Toutes ces rĂ©alisations se concrĂ©tisent au prix d'un endettement très Ă©levĂ© : avec 5 milliards de francs fin 1993, la ville de Nice est l'une des plus endettĂ©es de France[269]. La situation financière s'est notamment dĂ©gradĂ©e Ă  partir des annĂ©es 1980[264].

Les infrastructures routières sont l'un des axes majeurs de sa politique de développement. Il contribue à la construction du contournement de Nice par l'autoroute A8 (dit autoroute urbaine nord), ouvert en décembre 1976[270]. Il poursuit la réalisation de la voie Pierre-Mathis (dite autoroute urbaine sud), entamée par son père : en novembre 1986 est mis en service le tronçon reliant le viaduc Saint-Philippe (achevé en 1982) au tunnel Malraux (1977) sous la colline de Cimiez[271]. Il avait auparavant relié Les Bosquets (dans l'ouest de Nice) au carrefour Saint-Augustin. Désormais, cette voie de 7,5 km de long traverse toute la ville d'est en ouest[271]. Il fait également construire la pénétrante du Paillon, ouverte en juillet 1984, reliant Nice à La Trinité, ainsi que le tunnel sous le Paillon, ouvert en février 1983[270]. Il mène également une politique de construction de parcs de stationnement souterrains en centre-ville. Outre la route, il poursuit le développement de l'aéroport de Nice-Côte d'Azur en lui faisant gagner 200 hectares sur la mer (travaux effectués de 1975 à 1979) ce qui permet d'ouvrir une seconde piste en 1983, et en agrandissant ses équipements[270] - [272] - [273]. L'aéroport devient durablement le premier de province en 1986. Le terminal 2 est inauguré en 1987[272].

En matière d'urbanisme, il complète la couverture du Paillon : le tronçon Garibaldi-Barla est terminĂ© en 1967, Maraldi-BarbĂ©ris est construit en 1968-1969, BarbĂ©ris-Smolett en 1970-1972 et enfin le dernier tronçon de Barla Ă  Smolett est achevĂ© en dĂ©cembre 1974[274] - [270]. Il poursuit la construction des grands ensembles dans les quartiers de l'Ariane et des Moulins Ă  la fin des annĂ©es 1960 et jusqu'en 1976[270]. Le dernier bidonville de Nice disparait en novembre 1979[270]. Il rĂ©habilite et piĂ©tonnise une grande partie du Vieux-Nice en 1978, et crĂ©e la zone piĂ©tonne autour de la rue MassĂ©na en 1976[270]. Il fait bâtir en plein cĹ“ur du centre-ville le centre commercial Nicetoile aux termes de longs travaux de 1972 Ă  1982[270]. Par ailleurs, il met en place en 1988 la station d'Ă©puration Haliotis dans le quartier Ferber, alors l'une des plus efficaces de France[270] - [275]. Il fait aussi construire dans la plaine du Var le Centre administratif dĂ©partemental des Alpes-Maritimes (CADAM), inaugurĂ© en dĂ©cembre 1982, abritant les services de la prĂ©fecture et du conseil gĂ©nĂ©ral[276] - [277].

Il entreprend de diversifier l'Ă©conomie de la CĂ´te d'Azur[266]. Il dĂ©veloppe ainsi le tourisme d'affaire, et fait Ă©difier Ă  ce titre le palais des congrès Acropolis, inaugurĂ© en mai 1985[271]. Outre le tourisme, il soutient la montĂ©e en puissance de la technopole Sophia Antipolis, et crĂ©e les quartiers d'affaires de l'Arenas (95 000 m2 de bureaux), dont la première pierre est posĂ©e en 1987, incluant le parc PhĹ“nix, et de Nice-la-Plaine[268] - [271]. Dans le domaine culturel, il crĂ©e la « promenade des arts » constituĂ©e d'un théâtre moderne abritant le Théâtre national de Nice, inaugurĂ© en dĂ©cembre 1989, et du musĂ©e d'art moderne et d'art contemporain, inaugurĂ© en juin 1990[270]. En outre, six autres musĂ©es ouvrent Ă  partir des annĂ©es 1970 dont le musĂ©e d'art naĂŻf (1982)[278] - [270]. Il relance aussi le festival du jazz de Nice en 1971 (une seule prĂ©cĂ©dente Ă©dition s'Ă©tait tenue en 1948), et met en place le festival du livre Ă  partir de 1969[279] - [280]. Il inaugure Ă©galement le parc des miniatures en mars 1989[270]. CĂ´tĂ© loisirs, il porte le projet du parc d'attraction Zygofolis qui ouvre en juillet 1987, mais qui, très endettĂ© et insatisfaisant commercialement, fermera dès 1991[270]. Dans le domaine sportif, il fait construire le parc des sports de l'Ouest, inaugurĂ© en aoĂ»t 1973, le palais des sports Jean-Bouin, inaugurĂ© en avril 1984, le gymnase Magnan, ouvert en 1982, et la tribune prĂ©sidentielle du stade du Ray[270] - [278] - [276].

En revanche, plusieurs projets d'envergure ne se concrétisent jamais. Il en va ainsi du métro aérien et automatique « Aramis » dont il émet l'idée au début des années 1970 et dont les études sont réalisées à partir de 1974[281]. Il a également pour projet de relier la voie rapide à l'autoroute A8 par un tunnel sous les studios de la Victorine, et de construire un nouveau port de commerce au sud de l'aéroport[271] - [270]. Ce dernier projet va jusqu'au stade de la construction mais est stoppé par un tsunami en 1979[270]. En août 1984, il lance le projet de construction de deux tunnels routiers immergés à 100 mètres du bord de mer, du boulevard Gambetta au jardin Albert Ier, et l'édification sur la promenade des Anglais de piscines d'eau de mer chauffées et d'une grande boite de nuit[282]. D'autres projets grandioses sont avortés : dans les années 1970, un gratte-ciel abritant la mairie érigé sur la couverture du Paillon, puis en 1989 un gratte-ciel de bureaux de 120 mètres de haut sur le tunnel Malraux, ainsi qu'un grand dôme de verre sur l'esplanade De-Lattre-de-Tassigny[282]. Dans les années 1980, il soutient l'idée d'un curé du Vieux-Nice de dresser sur la colline du château une statue de la Vierge de 15 mètres de haut, avant de se rétracter en 1988[282].

Il est critiqué pour avoir accepté ou décidé la démolition d'au moins deux bâtiments emblématiques revêtant selon ses détracteurs un important intérêt architectural : l'hôtel Ruhl, d'architecture Belle Époque, en 1970, remplacé par un immeuble moderne en acier et en verre, et le casino municipal de Nice en 1979[270]. Ses conceptions en matière d'architecture se veulent volontiers modernes. Il parle de la « pâtisserie sur la façade » de l'hôtel Ruhl et qualifie le casino municipal de « grange à foin (…) avec ses murs de placage », et résume : « Les Français adorent les vestiges du passé. Il y a chez eux une certaine paresse »[283].

Fuite en Uruguay et procédures judiciaires

Après sa démission, Jacques Médecin quitte Buenos Aires pour l'Uruguay où il arrive le 17 septembre 1990[284] - [285] - [286]. Le 22 septembre, il tient une conférence de presse à Punta del Este, une station balnéaire dans laquelle il s'est installé, jumelée avec Nice[286]. Il y clame son innocence, affirme qu'il est victime des « staliniens » à l'origine selon lui d'un « coup » exécuté par « des polices plus ou moins parallèles », et déclare que cette conférence met un terme définitif à sa carrière politique[287] - [288] - [289]. Le 24 septembre, il est déclaré officiellement en fuite[22]. Le journal Nice-Matin explique le choix de l'Uruguay parmi les autres pays d'Amérique du Sud qui ne possèdent pas de convention d'extradition avec la France, comme étant lié à sa relation avec l'Uruguayenne Marisol Nicoletti (voir Famille)[22].

Les procédures judiciaires se développent dans les diverses affaires dans lequel il est impliqué. Parallèlement, il démarre une nouvelle vie professionnelle. Rejoint par sa fille Martine et son gendre, il ouvre une boutique de tee-shirts sur l'avenue Juan Gorlero, l'artère principale de Punta del Este[22]. Certains sont siglés « Baisers de Punta del Este[22] ». Il s'investit également un temps dans le commerce d'antennes paraboliques et d'appareils électroniques[290]. En avril 1991, il se lance dans la promotion de terrains à construire[22]. Il s'associe avec un constructeur brésilien de maisons préfabriquées en bois[290]. Toujours en 1991, il fait construire une grande villa dénommée Isla Santiago (île Saint-Jacques) d'une valeur de 2 millions de dollars dans le quartier résidentiel du Rincon del Indio (Coin de l'Indien), où il vit avec sa fille Shawn et Marisol Nicoletti[22] - [290].

Le , il intervient en direct, depuis l'Uruguay, dans l'émission de TF1 Ciel, mon mardi ! à l'occasion de la sortie de son livre-entretien Et moi je vous dis… ma vérité[291]. Interrogé par Christophe Dechavanne, il s'explique sur son action politique passée, ses projets, et appelle à de nouvelles élections municipales pour permettre aux Niçois de lui choisir un successeur[291] - [292]. Cette intervention provoque la colère du président de la République François Mitterrand[293].

En février 1992, Jean-Marie Le Pen, alors tête de liste du Front national pour les élections régionales de 1992 en Provence-Alpes-Côte d'Azur, rend publique une lettre de Jacques Médecin du dans laquelle ce dernier appelle à voter en sa faveur pour « prouver que le complot socialiste [contre moi] est en train d'échouer »[294]. Il annonce également que Martine Médecin, la fille aînée de l'ancien maire de Nice, sera en treizième position sur vingt-huit sur sa liste dans les Alpes-Maritimes[294]. Dans son courrier, Jacques Médecin dénonce sa condamnation du 6 janvier dans l'affaire de l'Action Nice-Côte d'Azur (voir ci-après), qualifiant son procès d'« un des derniers procès staliniens, hors la présence de l'accusé, sans défenseur, devant un tribunal de théâtre politiquement aux ordres »[294]. Il indique que Jean-Marie Le Pen a été le seul à le considérer comme « victime d'une persécution », ajoutant : « Je reconnais, ici, l'homme tranquille, lucide et courageux dont je m'honore d'être l'ami depuis trente ans »[294].

Suite de l'affaire de l'Action Nice-CĂ´te d'Azur

Durant sa conférence du , il annonce qu'il ne se rendra pas à la convocation prévue le 26 septembre du conseiller à la cour d'appel de Grenoble Jean-Marc Armengaud dans le cadre de l'affaire de l'Action Nice-Côte d'Azur où il doit être inculpé pour délit d'ingérence en tant que président du conseil général des Alpes-Maritimes[N 4] - [289]. À la suite de ce défaut de comparution, et sur requête du parquet général, la chambre d'accusation de la cour d'appel de Grenoble lance le un mandat d'arrêt simple à son encontre[295].

Le s'ouvre le premier procès de Jacques MĂ©decin, devant le tribunal correctionnel de Grenoble, concernant l'affaire de l'Action Nice-CĂ´te d'Azur[296]. Le , le tribunal correctionnel de Grenoble le reconnait coupable d'avoir rĂ©coltĂ©, de 1986 Ă  1989, plus de 2 millions de francs par l'intermĂ©diaire de publicitĂ©s payĂ©es par des associations paramunicipales qui sont parues dans le mensuel Action Nice-CĂ´te d'Azur Ă©ditĂ© par la sociĂ©tĂ© SEGAT dont Jacques MĂ©decin Ă©tait le propriĂ©taire[232]. Ces publicitĂ©s reprĂ©sentaient 97 % des ressources de la revue[232]. Le tribunal le condamne par dĂ©faut Ă  un an de prison ferme et 300 000 francs d'amende pour dĂ©lit d'ingĂ©rence[232]. Il est Ă©galement dĂ©clarĂ© incapable, Ă  jamais, d'exercer aucune fonction publique[232]. Il doit en outre verser près de 2,2 millions de francs Ă  Joseph Figueras, un contribuable niçois qui avait Ă©tĂ© autorisĂ© Ă  se constituer partie civile Ă  la place de la commune de Nice[232]. Enfin, le tribunal confirme le mandat d'arrĂŞt de Jacques MĂ©decin du [232].

Comptable de fait au titre de Nice-Communication et du comité des fêtes

Le , la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte-d'Azur déclare provisoirement « comptables de fait » de la commune de Nice Jacques Médecin et plusieurs de ses proches dans le cadre de la gestion de l'association paramunicipale Nice-Communication[297]. Ce jugement est rendu définitif le [297]. La cour juge en effet que les fonds maniés ou détenus par Nice-Communication (350 millions de francs de sa création en 1985 à sa dissolution en 1990) sont restés des deniers publics communaux en raison de l'absence d'indépendance de l'association vis-à-vis de la ville de Nice et de la maitrise qu'exerçaient les responsables municipaux sur ces fonds octroyés par la ville sous forme de subventions[298]. En décembre 1991, la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte-d'Azur publie un rapport sur la dilapidation des fonds de l'association paramunicipale Nice-Communication de janvier 1985 à novembre 1990[296]. Elle accuse Jacques Médecin, président de cette association, d'avoir utilisé ces fonds au bénéfice de son entourage politique et familial[296]. Le , la Cour des comptes confirme le jugement relatif à Jacques Médecin de la chambre régionale des comptes du [297]. Le , cette dernière lui inflige une amende de 5 millions de francs dans cette affaire[299].

Le , il est reconnu pour la troisième fois[N 5] « comptable de fait » par la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d'Azur, cette fois-ci dans le cadre du comité des fêtes de la ville de Nice, avec l'un de ses proches Jean Oltra, pour la somme de 256,2 millions de francs[290].

Instruction de l'affaire Nice-Opéra

Dans le cadre de l'affaire Nice-Opéra, il se rend pas à la convocation du magistrat Jean-Marc Armengaud prévue le et qui était destinée à l'inculper pour abus de confiance[300]. Il est accusé d'avoir détourné la somme d'1,2 million de francs au préjudice de l'association paramunicipale[300]. Durant l'été 1992, de nouveaux détails de l'affaire sont rendus publics. Il s'avère en particulier que Jacques et Ilene Médecin se servaient du compte bancaire de la Costa Real ouvert à la Bank of California comme d'un compte personnel[242]. Les sociétés Costa Real et Oceania Systems ont par ailleurs été créées toutes deux grâce à la société fiduciaire suisse Expert-Consult de l'expert-comptable genevois Jean-Paul Rossier[242].

Par ailleurs, une autre information judiciaire est ouverte le à la suite d'une plainte de la direction des services fiscaux des Alpes-Maritimes du visant Jacques Médecin et le directeur de Nice-Opéra Lucien Salles qui sont soupçonnés d'avoir soustrait au paiement de l'impôt sur les sociétés de cette association pour l'année 1987 la somme de près de 4,2 millions de francs[232].

Le , la chambre d'accusation de la cour d'appel de Grenoble lance un mandat d'arrêt international à l'encontre de Jacques Médecin valant inculpation d'abus de confiance dans le cadre de l'affaire Nice-Opéra[301] - [290]. Aucune convention d'extradition n'existant entre la France et l'Uruguay, l'exécution du mandat dépend de la bonne volonté de l'Uruguay[302]. En janvier 1993, l'instruction de l'affaire Nice-Opéra est achevée. Jacques Médecin est poursuivi pour abus de confiance, faux et usage de faux[31].

Instruction de l'affaire de la renégociation de la dette de la ville de Nice

Le , la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte-d'Azur déclare définitivement « comptables de fait » de la commune de Nice Jacques Médecin et la société Analyses et recherches de financements pour les collectivités locales (AREFIC) dans l'affaire de la restructuration de la dette de la ville de Nice, pour la somme de 5,7 millions de francs[303]. La chambre juge que cette société, qui avait signé une convention en juillet 1986 avec la ville de Nice qui la chargeait de négocier le remboursements d'anciens prêts et leur remplacement par de nouveaux prêts plus avantageux, n'a pu apporter la preuve de l'utilité de son intervention, et qu'elle a donc facturé (à un taux d'honoraires deux fois plus élevés qu'habituellement) des « services qu'elle n'a pas rendus »[303]. L'AREFIC s'est rendue coupable d'« extraction irrégulière de fonds publics », fonds qu'elle a reversés par la suite à l'association Club SUDD, sans existence légale, au titre de son prétendu rôle d'intermédiaire dans la renégociation de la dette, à la tête de laquelle se trouvait Elisabeth Arnulf[303]. De plus, Jacques Médecin est considéré comme ayant « directement organisé l'intervention d'AREFIC » et ayant eu connaissance de ces irrégularités[303].

Le , le parquet général de Grenoble ouvre une nouvelle information judiciaire visant Jacques Médecin pour abus de confiance, faux et usage de faux, et complicité de ces trois délits dans le cadre de l'affaire de la renégociation de la dette de la ville de Nice[290].

Instruction de l'affaire de la SEREL

L'instruction de l'affaire Nice-OpĂ©ra conduit Ă  une nouvelle affaire rĂ©vĂ©lĂ©e Ă  l'Ă©tĂ© 1992. Le compte bancaire d'Oceania Systems ouvert Ă  la Barclays Bank de Londres aurait Ă©tĂ© destinataire de commissions versĂ©es Ă  Jacques MĂ©decin par des entreprises titulaires de marchĂ©s publics attribuĂ©s par la ville de Nice[242]. En particulier la sociĂ©tĂ© niçoise de signalisation et de rĂ©gulation routière SEREL, l'un des leaders europĂ©ens dans son secteur d'activitĂ©, aurait versĂ© 500 000 francs sur ce compte au cours des annĂ©es 1985 et 1986, par l'intermĂ©diaire des sociĂ©tĂ©s belges De Jy et Cobec[242] - [304]. Une partie des sommes se trouvant sur ce compte Ă©tait ensuite transfĂ©rĂ©e en Suisse[242]. Le directeur financier de la SEREL avait lui-mĂŞme rĂ©vĂ©lĂ© l'existence d'une « caisse noire » entre autres destinĂ©e Ă  financer des Ă©lus et des fonctionnaires[304]. Au cours de l'annĂ©e 1993, le système mis en place est davantage prĂ©cisĂ© et les montants en jeu revus Ă  la hausse[304] - [305]. En juillet, le PDG de la SEREL Francis Guillot, par ailleurs membre du RPR, reconnait le versement de 14 millions de francs Ă  des Ă©lus et fonctionnaires, dont 4 millions de francs Ă  Jacques MĂ©decin entre 1986 et 1990, en contrepartie de l'attribution de marchĂ©s publics[304] - [305] - [306]. Il Ă©voque alors un système mis en place sous la pression du maire de Nice et au profit de ce dernier[305]. Le , le doyen des juges d'instruction de Nice Jean-Paul Renard lance un mandat d'arrĂŞt international contre Jacques MĂ©decin pour corruption passive et abus de biens sociaux dans l'affaire de la SEREL[290] - [307] - [305]. Un an après, Francis Guillot revient partiellement sur ses dĂ©clarations en dĂ©clarant que les fonds versĂ©s au maire de Nice avaient en fait servi au financement de campagnes Ă©lectorales[290] - [306].

Extradition vers la France

À la suite du mandat d'arrêt international du dans l'affaire de la SEREL, le procureur de la République de Nice Paul-Louis Auméras formule auprès des autorités judiciaires uruguayennes via Interpol, le , une demande d'arrestation provisoire de Jacques Médecin[290] - [308]. Cette démarche est une initiative du procureur : celui-ci a informé au préalable le ministère de la Justice, qui ne s'y est pas opposé, mais le ministère des Affaires étrangères n'a pas été consulté[308] - [258]. Jacques Médecin est arrêté le et est placé en détention provisoire à la préfecture de police de Maldonado[290]. Une nouvelle demande d'arrestation provisoire est adressée le , cette fois par la chambre d'accusation de la cour d'appel de Grenoble, au titre des deux mandats d'arrêt délivrés dans le cadre de l'affaire de l'Action Nice-Côte d'Azur (pour délit d'ingérence) et dans l'affaire Nice-Opéra (pour abus de confiance)[290]. Le même jour, la justice uruguayenne décide de maintenir l'ancien maire de Nice en détention durant quarante-cinq jours afin que la France puisse déposer une demande officielle d'extradition, ce qui est fait peu après par le ministre des Affaires étrangères Alain Juppé[307] - [308] - [309]. En février 1994, le procureur uruguayen chargé du dossier recommande son extradition, et le 21 février Jacques Médecin est transféré à la prison de Montevideo. Le 28 février, le juge Homéro Da Costa décide de son extradition au titre des charges de corruption passive, d'abus de bien sociaux et d'abus de confiance, mais pas de délit d'ingérence car ce dernier n'existe pas dans le droit uruguayen[290]. Depuis sa prison, Jacques Médecin annonce qu'il a l'intention de se présenter aux élections municipales de 1995 ; néanmoins, ayant été déclaré par trois fois et de manière définitive « comptable de fait », il est inéligible[290] - [310]. Le , la cour d'appel de Montevideo confirme l'extradition. La Cour suprême d'Uruguay rejette le recours de Jacques Médecin contre cette décision le . L'arrêté d'extradition est signé par les autorités uruguayennes le 3 novembre suivant[311]. Le président de l'Uruguay Luis Alberto Lacalle rejette le lendemain la demande d'asile politique qu'avait formulé Jacques Médecin[311]. Celui-ci arrive en France le [311].

Suites judiciaires après l'extradition

Le palais de justice de Grenoble où ont lieu les procès de Jacques Médecin.

Après son arrivée en France, il est placé en détention provisoire au centre pénitentiaire de Saint-Quentin-Fallavier[312]. Le 18 novembre 1994, il est mis en examen à Grenoble pour abus de confiance, faux et usage de faux dans l'affaire Nice-Opéra, et pour corruption passive et abus de biens sociaux dans l'affaire de la SEREL[311]. De son côté, il porte plainte pour enlèvement et séquestration arbitraire[312]. À Nice, trois associations de soutien se constituent, coordonnées par sa première épouse Claude Mailley-Médecin : la Liga nissarda, le Comité de soutien moral et Les pieds-noirs n'oublient pas[313]. Une manifestation de plusieurs centaines de personnes scandant « Libérez Jacques Médecin ! » est organisée devant le palais de justice de Nice derrière la banderole « Avec Jacques Médecin, Nice rayonnait »[313].

Le , Jacques MĂ©decin est reconnu coupable par le tribunal correctionnel de Grenoble d'avoir dĂ©tournĂ© des fonds de Nice-OpĂ©ra « Ă  des fins personnelles »[314]. La justice a en particulier considĂ©rĂ© que le compte bancaire de la sociĂ©tĂ© Costa Real Ă©tait utilisĂ© comme un compte bancaire personnel par l'Ă©lu, ce que niait ce dernier qui estimait qu'il n'Ă©tait coupable que d'avoir Ă©tĂ© « un peu trop confiant dans [son] entourage »[314]. Il est ainsi condamnĂ© pour abus de confiance Ă  deux ans de prison ferme, 200 000 francs d'amende et cinq ans de privation des droits civiques[314]. Par ailleurs, l'ensemble des condamnĂ©s dans cette affaire (outre Jacques MĂ©decin, Lucien Salles, Pierre Michau et Jean Filippi) sont condamnĂ©s Ă  verser solidairement 2,1 millions de francs de dommages-intĂ©rĂŞts[314]. Il fait appel de cette dĂ©cision[314].

En juin 1995 s'ouvre le procès de Jacques MĂ©decin et de quatorze autres prĂ©venus (dont son successeur Ă  la mairie HonorĂ© Bailet) dans l'affaire de la SEREL[304]. Le 16 juin, sa demande de comparaĂ®tre libre (son avocat estime qu'ayant Ă©tĂ© incarcĂ©rĂ© depuis le et en tenant compte des remises de peine, il a dĂ©jĂ  purgĂ© sa peine de prison dans l'affaire Nice-OpĂ©ra), est rejetĂ©e par la cour d'appel de Grenoble[314] - [304]. RĂ©futant l'accusation de corruption, il soutient que les versements dont il a Ă©tĂ© destinataire de la part de la SEREL ont servi Ă  financer les campagnes Ă©lectorales de son parti le Rassemblement rĂ©publicain et qu'il ignorait la provenance de ces fonds[315]. En ce qui concerne l'accusation de recel d'abus de biens sociaux, il plaide l'amnistie au titre de l'article 19 de la loi du 15 janvier 1990 relative Ă  la limitation des dĂ©penses Ă©lectorales et Ă  la clarification du financement des activitĂ©s politiques[315]. Fin juin, il se dĂ©siste de son appel dans l'affaire Nice-OpĂ©ra afin de favoriser la confusion des peines entre son Ă©ventuelle peine dans l'affaire de la SEREL et celle de mai 1995 dans l'affaire Nice-OpĂ©ra pour laquelle il est libĂ©rable le [315]. Le , le tribunal correctionnel de Grenoble le reconnait coupable de corruption passive et de recel d'abus de biens sociaux, et le condamne Ă  trois ans et demi de prison ferme, 1 million de francs d'amende et cinq ans de privation de droits civiques[315]. En outre, la justice rejette sa demande de confusion des peines avec celle prononcĂ©e dans l'affaire Nice-OpĂ©ra[315]. Il fait appel de cette dĂ©cision[315]. Le , après vingt-deux mois de dĂ©tention, la cour d'appel de Grenoble remet finalement Jacques MĂ©decin en libertĂ©, dans l'attente de son procès en appel dans l'affaire de la SEREL fixĂ© au [316]. Il a l'interdiction de se rendre dans les Alpes-Maritimes, de rencontrer les autres prĂ©venus et une somme de 10 millions de francs est consignĂ©e[316]. Le , la cour d'appel de Grenoble rĂ©duit la peine de première instance en condamnant Jacques MĂ©decin Ă  deux ans de prison ferme, 1 million de francs d'amende et cinq ans de privation des droits civiques[317]. La cour estime que « l'enrichissement personnel [de Jacques MĂ©decin] ne paraĂ®t pas suffisamment Ă©tabli », et elle reconnait l'amnistie pour tous les versements antĂ©rieurs Ă  la loi du ce qui ramène la somme en jeu Ă  700 000 francs au lieu de 4 millions de francs[318]. Surtout, elle suit la rĂ©quisition du parquet en prononçant la confusion des peines avec celle dans l'affaire Nice-OpĂ©ra[317]. Il est donc dĂ©sormais dĂ©finitivement libre[317].

Il repart pour Punta del Este en janvier 1996[253]. D'autres poursuites judiciaires restent néanmoins pendantes : l'affaire de la renégociation de la dette de la ville de Nice, et la soustraction présumée de 4,2 millions de francs de l'impôt sur les sociétés de Nice-Opéra pour l'année 1987[318]. Par ailleurs, il est également visé dans l'affaire des fausses factures d'un montant de 8 millions de francs liées au marché public conclu en septembre 1988 entre le conseil général qu'il présidait et la société COM 06, ainsi que son sous-traitant Monaco Sponsoring, chargée de l'installation de salles multimédia dans l'arrière-pays niçois[318] - [319] - [320]. Juste avant son retour en Uruguay, il donne un entretien à Libération dans lequel il explique que sa vie est désormais en Uruguay et, commentant son issue judiciaire favorable, il émet l'hypothèse que « peut-être certains élus du RPR de Nice » ont pu influencer le ministre de la Justice en sa faveur, tout en estimant avoir été de façon générale « victime d'une justice spéciale Médecin », mais aussi de la lutte entre l'UDF et le RPR dans les Alpes-Maritimes[253]. Un peu plus tôt, il avait déclaré avoir été le « rideau de fumée que l'on sortait périodiquement pour masquer les turpitudes (…) des quatorze années du régime mitterrandiste[318]. »

Le , le tribunal correctionnel de Grenoble le condamne par défaut pour fraude fiscale à deux ans de prison[321]. Un mandat d'arrêt est lancé à son encontre[321].

Redressements fiscaux

Une première vĂ©rification fiscale est effectuĂ©e sur les comptes de Jacques MĂ©decin en 1980 Ă  la demande du gouvernement Raymond Barre III qui souhaitait l'Ă©vincer politiquement[322] - [221]. En 1981, Ă  la suite de l'arrivĂ©e au pouvoir de la gauche, un nouveau contrĂ´le fiscal est menĂ©[221]. Il donne lieu en 1984 Ă  un redressement de 2,5 millions de francs au titre des annĂ©es 1977 Ă  1980[323] - [221]. Le maire de Nice conteste celui-ci devant le tribunal administratif de Nice mais le TrĂ©sor public prend une hypothèque sur sa villa Lou Soubran en dĂ©cembre 1984 afin de garantir sa crĂ©ance[221] - [324]. En 1985, Ă  la suite des rĂ©vĂ©lations du Canard enchaĂ®nĂ© sur les biens qu'ils dĂ©tiendraient aux États-Unis (voir 1985 : premières affaires amĂ©ricaines), un nouveau contrĂ´le fiscal est menĂ©[221]. L'administration fiscale dĂ©couvre un patrimoine qu'elle juge « très nettement supĂ©rieur aux revenus dĂ©clarĂ©s » dont une villa Ă  Beverly Hills achetĂ©e 845 000 dollars ou encore un terrain Ă  Benedict Canyon[29]. DĂ©but 1989, un redressement fiscal de 15,5 millions de francs (pĂ©nalitĂ©s comprises) lui est signifiĂ© au titre des annĂ©es 1981 Ă  1983, ce qu'il conteste Ă  nouveau, mais une nouvelle hypothèque est prise sur Lou Soubran pour 9 Ă  10 millions de francs supplĂ©mentaires[N 6] - [221] - [29]. En octobre 1989, la commission dĂ©partementale des impĂ´ts confirme ce redressement[221]. En aoĂ»t 1990, le tribunal administratif de Nice donne raison Ă  l'administration fiscale concernant le redressement au titre des annĂ©es 1977 Ă  1980 pour une somme de 2,1 millions de francs[323]. Mais ce jugement est annulĂ© en dĂ©cembre 1992 par la cour administrative d'appel de Lyon[31]. Le quotidien Le Monde indique alors que Jacques MĂ©decin fait encore l'objet de deux redressements fiscaux : un pour 3,5 millions de francs et un autre pour 26 millions de francs[31]. En juin 1996, le tribunal administratif de Nice confirme le redressement fiscal de 15 millions de francs au titre des annĂ©es 1981 Ă  1983[29].

Mort

Le , il est victime d'un infarctus et de trois arrêts cardiaques alors qu'il se trouve dans l'appartement qu'il habite dans le centre-ville de Punta del Este avec son épouse Berta Bittar qui le découvre inanimé[326] - [327] - [328]. Transporté à l'hôpital de Punta del Este, il subit six nouveaux arrêts cardiaques et est plongé dans un coma profond sous assistance respiratoire[326] - [329] - [330]. Il meurt le [330] - [328] - [331]. Le maire de Nice Jacques Peyrat négocie avec sa veuve le rapatriement de sa dépouille[332]. Les drapeaux de la ville sont mis en berne et son corps est exposé quelques jours dans une chapelle ardente installée dans le hall de la mairie[332]. Les obsèques ont lieu à la cathédrale Sainte-Réparate de Nice et son cercueil est recouvert d'un drapeau niçois[333]. Il repose à Nice, au cimetière de Gairaut[2] - [334]. D'après sa fille Martine, le corps de son père a été incinéré et ses restes ont été déposés dans deux urnes, une qui est restée à Nice et l'autre qui a été récupérée par sa veuve en Uruguay[17]. Celle-ci déclare au quotidien La Nación que les cendres de son mari reposeront près d'une église où est vénérée la Vierge de Caacupé, au Paraguay[327].

Personnalité

Jacques Médecin est décrit comme un homme séducteur, énergique, qui possède un très bon sens du contact, mais qui se montre aussi autoritaire. Les journalistes Michel Franca et Jean Crozier le dépeignent ainsi en 1982 : « Grand, l'allure sportive, la moustache conquérante, c'est avant tout un fonceur (…) Il cultive à merveille un style plébéien qui lui assure un bon contact populaire. Doté d'une faconde intarissable, d'un sens réel de la répartie et surtout d'un culot à toute épreuve, il sait plaire et séduire comme il sait se montrer polémiste violent et corrosif[335]. » Dans Le Monde, en 1985, Laurent Greilsamer confirme ce contraste : « Cette santé ! Cette aisance ! Cette insolence ! (…) La moustache macho et la tripe droitière (…) Maître en sa ville, seigneur en son comté, abrupt, brutal. Charmeur aussi, Don Juan à Ray-Ban, séducteur d'une ville méditerranéenne possessive[336]. » France 3 Côte d'Azur évoque les « différents personnages » incarnés par Jacques Médecin : « le seigneur féodal qui mène sa ville d'une main de fer, Jacques le flamboyant avec ses costumes voyants et ses longs cigares, puis l'enfant du pays, proche du peuple[337]. » Le lien qu'il a su tisser avec les Niçois est qualifié de « charnel » par ses proches[336]. Lui-même dira : « Les Niçois veulent me voir, me toucher, me parler. Ce sont des sentimentaux[336]. » Dans Le Nouvel Observateur en 1990, François Caviglioli fait allusion à « l'ascendant presque surnaturel qu'il exerçait sur les Niçois, par son charme magnétique[268] ».

Son éloquence est également soulignée et identifiée à celle de son père. François Caviglioli commente : « Les Médecin sont des orateurs spécialisés dans le discours enveloppant et convivial, ponctué d'éclats féroces[268] ». Le conseil municipal est son théâtre. Jean-Victor Roux écrit dans Les Sentinelles de la République : « Le maire interrompt ses opposants, se lance invariablement dans des tirades enflammées qui promettent de les envoyer à Moscou[338]. » L'écrivain Louis Nucéra qui le fréquente avant son entrée en politique le décrit comme « un tribun de l'ancien temps. Il peut vous faire un discours sur n'importe quel sujet (…) Il a un savoir quasi encyclopédique[339]. » Les journalistes Brigitte Renaldi et Claude-Henry Laval renchérissent, citant un opposant au maire de Nice : « il était costaud comme un Turc, capable de tenir le "crachoir" pendant des heures au conseil municipal (…) Il supportait tout et gardait la forme. Comment voulez-vous lutter devant cette force de la nature[340] ? » Il se montre également doué pour les langues étrangères, foisonnant d'idées, grand lecteur, et, dira Nice-Matin, possédant un « bagout hors du commun et une mémoire épatante »[338] - [341] - [2].

Brigitte Renaldi et Claude-Henry Laval résument la vision que se fait chacun de Jacques Médecin : ses opposants dénoncent généralement le « fort en gueule, le magouilleur, l'affairiste », tandis que ses partisans évoquent « le fonceur, l'homme des convictions tranchées, sûr de sa vérité, sans nuances, l'homme cultivé, brillant orateur mais aussi sentimental à l'extrême et fidèle dans ses amitiés même les plus périlleuses[340]. »

Postérité

Le forum Jacques-MĂ©decin en 2011.
Panneau indicatif de l'espace Jacques-MĂ©decin sur la promenade du Paillon en 2022.

En mars 2004, sous la mandature de Jacques Peyrat, le conseil municipal de Nice vote pour renommer le forum MassĂ©na, situĂ© en bordure est de la place MassĂ©na, en forum Jacques-MĂ©decin[342]. La dĂ©cision soulève les protestations de l'opposition de gauche et est attaquĂ©e devant le tribunal administratif par le prĂ©fet Pierre Breuil en raison des condamnations pĂ©nales de l'ancien maire[342] - [343] - [344]. Le tribunal annule la dĂ©libĂ©ration du conseil municipal en mars 2006, mais la cour administrative d'appel de Marseille annule en novembre 2007 cette dĂ©cision de justice[342]. Un mois plus tard, le changement de nom est effectuĂ© au cours d'une cĂ©rĂ©monie prĂ©sidĂ©e par Jacques Peyrat devant plusieurs centaines de personnes[345] - [346]. En novembre 2013, le forum Jacques-MĂ©decin prend le nom d'espace Jacques-MĂ©decin Ă  la suite des travaux de la promenade du Paillon ; la plaque est inaugurĂ©e par le maire Christian Estrosi[347]. France 3 CĂ´te d'Azur remarque que le lieu attribuĂ© Ă  Jacques MĂ©decin est en dĂ©calage avec la place que celui-ci a occupĂ© dans la ville : « dans ses lieux publics, la ville semble ignorer le disparu. Il existe bien un espace Jacques-MĂ©decin, un modeste carrĂ© de gazon sur la promenade du Paillon, loin de la dĂ©mesure du personnage (…) Aujourd'hui, le voilĂ  recouvert d'une chape de silence. C'est la seconde mort de Jacques MĂ©decin[348]. »

À la suite d'une décision du conseil municipal niçois, la rue de l'Opéra, située à proximité de l'hôtel de ville et dans l'axe de l'avenue Jean-Médecin au-delà de la place Masséna, porte le nom de Jacques Médecin depuis novembre 2019[349].

Orientation politique

PersonnalitĂ© extravertie et impulsive, anticommuniste, Jacques MĂ©decin a Ă©tĂ© membre du Centre rĂ©publicain, des RĂ©publicains indĂ©pendants, du Rassemblement pour la RĂ©publique (RPR) et du Centre national des indĂ©pendants et paysans (CNIP). Tout comme son père, c'est un antigaulliste farouche, notamment durant la première partie de sa carrière politique[350] - [351] - [352]. Lors du dĂ©bat sur le projet de loi autorisant l'interruption volontaire de grossesse, dĂ©fendu par Simone Veil en 1974, il se prononce contre l'avortement[353], dĂ©clarant notamment que « l'avortement, c'est un meurtre » et parlant de « barbarie organisĂ©e et couverte par la loi comme elle le fut par les nazis », alors que la ministre qui porte le projet est une rescapĂ©e de la Shoah[354]. La mĂŞme annĂ©e, il projette de jumeler Nice avec Le Cap, en Afrique du Sud, alors sous le rĂ©gime de l'apartheid[355]. En 1981, il vote contre l'abolition de la peine de mort, et demande par la suite son rĂ©tablissement, notamment lors d'une manifestation en 1988[356]. Sans pour autant rejoindre le Front national (FN), il dĂ©clare dans National-Hebdo partager Â« 99,9 % des idĂ©es » de ce parti[357] - [217]. Il reçoit enfin Jean-Marie Le Pen en visite officielle Ă  la mairie de Nice en [352].

Engagement maçonnique supposé

Dans Les Frères invisibles[358], Ghislaine Ottenheimer et Renaud Lecadre indiquent que Jacques Médecin n’a jamais fait mystère de son engagement dans la franc-maçonnerie française, et que son appartenance à la franc-maçonnerie était plus dictée par le souhait de monter et contrôler des réseaux affairistes que par conviction. En revanche, Claude Askolovitch écrit en 2002 dans une enquête sur les francs-maçons parue dans Le Nouvel Observateur que Jacques Médecin « ne fut pas initié »[359].

Cuisine niçoise

En 1972, il publie un ouvrage sur la cuisine niçoise, plusieurs fois réédité par la suite, et traduit en anglais en 1983[360] - [361]. Ce livre est souvent considéré comme un ouvrage de référence sur le sujet[362] - [363]. Il comporte plusieurs centaines de recettes que Jacques Médecin présente comme ayant été léguées par son père et par la Tanta Mietta, une paysanne de Gairaut qui aurait transmis ses recettes à la grand-mère de Jacques Médecin dans les années 1880[26] - [364]. Le journaliste culinaire François-Régis Gaudry désigne le chef cuisinier Jacques Maximin comme l'auteur « en sous-main » de l'ouvrage[365].

DĂ©tail des mandats et fonctions

Synthèse des résultats électoraux

Élections législatives

Année Circonscription Premier tour Second tour Note
Voix % Rang Issue Voix % Rang Issue
1962 2e des Alpes-Maritimes 9 691 24,8 2e Ballottage Retrait
1967 2e des Alpes-Maritimes 23 264 43,9 1er Ballottage 26 393 49,5 1er Élu
1968 2e des Alpes-Maritimes 19 554 38,2 1er Ballottage 21 759 42,1 1er Élu
1973 2e des Alpes-Maritimes 20 378 34,9 1er Ballottage 33 406 62,1 1er Élu
1978 2e des Alpes-Maritimes 27 462 39,5 1er Ballottage 41 077 57,4 1er Élu
1981 2e des Alpes-Maritimes 31 067 52,1 1er Élu
1986 Alpes-Maritimes 213 647 44,0 1er Élu Scrutin de liste

Élections cantonales

Année Circonscription Premier tour Second tour
Voix % Rang Issue Voix % Rang Issue
1961 Canton de Nice-4
1967 Canton de Nice-4
1973 Canton de Nice-5 62,4 1er Élu
1979 Canton de Nice-5 4 786 40,3 1er Ballottage 1er Élu
1985 Canton de Nice-5 > 70 1er Élu

Élections municipales

Année Circonscription Premier tour Second tour Sièges obtenus
Voix % Rang Issue Voix % Rang Issue
1966 Nice 44 718 49,62 1er Ballottage 54 509 63,93 1er Élu
1 / 1
1971 Nice 56 491 50,14 1er Élu
37 / 37
1977 Nice (trois secteurs) 63 360 45,37 1er Ballottage 72 888 50,33 1er Élu
49 / 49
1983 Nice 90 353 54,83 1er Élu
56 / 69
1989 Nice 55 666 42,86 1er Ballottage 64 121 46,76 1er Élu
51 / 69

Ĺ’uvres

  • La cuisine du comtĂ© de Nice, Paris, Julliard, , 374 p. (ISBN 2260000258)
  • Nice. Onze ans de vie commune (avec la collaboration de Gilles Lambert), Paris, Presses de la CitĂ©, , 154 p. (OCLC 742938879).
  • Le Terreau de la libertĂ©, Paris, Presses de la CitĂ©, , 221 p. (ISBN 2258003687).
  • Jacques MĂ©decin : signe particulier, rĂ©alisme politique (Ă©ditoriaux parus dans L'Action, 1969-1985, rĂ©unis et prĂ©sentĂ©s par Claire Vivian), Antibes, L'Action-Alp'azur, , 335 p. (ISBN 2902700148).
  • Et moi je vous dis… ma vĂ©ritĂ© : entretiens avec Henri-Christian Giraud, Paris, Michel Lafon/Éditions de La Table ronde, , 333 p. (ISBN 2908652064)
  • Un lynchage exemplaire : Mitterrand m'a tuer, Paris, Première Ligne, , 280 p. (ISBN 284144001X)
  • La RĂ©publique des juges, Hachette/Carrère, , 214 p. (ISBN 2012370500)
  • La bonne cuisine du ComtĂ© de Nice, Paris, Solar, , 275 p. (ISBN 2263035060)

Notes

  1. En 1979, candidat sur la liste de Philippe Malaud, il échoue à se faire élire député européen. Par ailleurs, en 1978, la liste médeciniste perd les élections municipales partielles du troisième secteur de Nice, mais Jacques Médecin n'était pas directement candidat.
  2. On trouve aussi : CĂ´te d'Azur culture et loisirs.
  3. Dans Le Monde du , Georges Marion indique un budget de 56 millions de francs pour Nice Opéra en 1988.
  4. Il avait déjà été inculpé en novembre 1989 pour délit d'ingérence dans l'affaire de l'Action Nice-Côte d'Azur, mais c'était alors en qualité de maire de Nice (voir Le système des associations paramunicipales).
  5. Après une première fois dans l'affaire Nice-Communication, et une seconde fois dans l'affaire de la renégociation de la dette de la ville de Nice (voir Instruction de l'affaire de la renégociation de la dette de la ville de Nice).
  6. Bernard Bragard, Frédéric Gilbert et Catherine Sinet parlent quant à eux d'un redressement au titre des années 1981 à 1984 de « plus de 14 millions de francs » (pénalités comprises) adressé au couple Jacques et Ilene Médecin, ainsi que d'un redressement de près d'1,5 million de francs pour l'année 1986[325].

Références

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Voir aussi

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Articles connexes

Liens externes

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