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Giuseppe Verdi

Giuseppe Fortunino Francesco Verdi (/dʒuˈzɛppe fortuˈniːno franˈtÍĄÊƒesko ˈverdi/[1]), nĂ© Joseph Fortunin François Verdi le Ă  Roncole et mort le Ă  Milan, est un compositeur romantique italien. Son Ɠuvre, composĂ©e essentiellement d’opĂ©ras, unissant le pouvoir mĂ©lodique Ă  la profondeur psychologique et lĂ©gendaire, est l'une des plus importantes de toute l'histoire du thĂ©Ăątre musical.

Giuseppe Verdi
Description de cette image, également commentée ci-aprÚs
Giuseppe Verdi photographié par Giacomo Brogi.
Surnom Le cygne de Busseto
Nom de naissance Joseph Fortunin François Verdi
Naissance
Roncole, Taro,
Drapeau de l'Empire français Empire français
DĂ©cĂšs (Ă  87 ans)
Milan, Drapeau du Royaume d'Italie Royaume d'Italie
Activité principale Compositeur, dramaturge
Style Opéra
ActivitĂ©s annexes PropriĂ©taire terrien, dĂ©putĂ© (1861–1865), sĂ©nateur (1874)
Lieux d'activité Busseto, Roncole, Sant'Agata
Drapeau du Duché de Parme Duché de Parme,
Milan
Drapeau du Royaume de Lombardie-Vénétie Royaume de Lombardie-Vénétie puis
Drapeau du Royaume d'Italie Royaume d'Italie
,
Paris, Drapeau de l'Empire français Empire français
AnnĂ©es d'activitĂ© 1835 – 1901
Collaborations Temistocle Solera, Salvatore Cammarano, Francesco Maria Piave, Arrigo Boito (librettistes)
Éditeurs Giovanni et Giulio Ricordi
MaĂźtres Ferdinando Provesi,
Vincenzo Lavigna
Élùves Emanuele Muzio
Conjoint Margherita Barezzi,
Giuseppina Strepponi
Distinctions honorifiques Ordre de Saint-Stanislas
LĂ©gion d'honneur
Signature de Giuseppe Verdi
Signature de Giuseppe Verdi.

ƒuvres principales

Verdi est l’un des compositeurs d’opĂ©ras italiens les plus influents du XIXe siĂšcle, son influence comparable Ă  celle de Rossini, Bellini, Donizetti et Puccini. Ses Ɠuvres sont frĂ©quemment jouĂ©es dans les opĂ©ras du monde entier et, dĂ©passant les frontiĂšres du genre, certains de ses thĂšmes sont depuis longtemps inscrits dans la culture populaire comme « La donna Ăš mobile » de Rigoletto, le « Brindisi » de La traviata, le « Va, pensiero » de Nabucco ou la « Marche triomphale » d'Aida. Les opĂ©ras de Verdi dominent encore le rĂ©pertoire de l'art lyrique un siĂšcle et demi aprĂšs leur crĂ©ation.

Peu engagĂ© politiquement, il a cependant autorisĂ© l'utilisation de son image et de ses Ɠuvres dans le processus de rĂ©unification de la pĂ©ninsule italienne et demeure de ce fait, aux cĂŽtĂ©s de Garibaldi et de Cavour, une figure emblĂ©matique du Risorgimento.

Biographie

Les dĂ©partements français d’Italie : en haut, en rose, le dĂ©partement du Taro

Lorsque Verdi naßt, le , dans le petit village des Roncole, proche de Busseto en Bassa parmense, la région de Parme est alors sous domination napoléonienne et est appelée le département français du Taro.

Les troupes autrichiennes reprennent le duchĂ© de Parme et Plaisance Ă  peine quelques mois plus tard, en fĂ©vrier 1814. La rĂ©gion restera sous le rĂšgne de l’archiduchesse Marie-Louise d'Autriche, l’ex-impĂ©ratrice des Français, jusqu’à la mort de celle-ci en 1847. Verdi aura Ă©tĂ© français durant les quatre premiers mois de sa vie, ce que semble avoir voulu dissimuler sa mĂšre. Peut-ĂȘtre qu'elle trouvait humiliant qu'il fĂ»t nĂ© français ou plus probablement pour des motifs stratĂ©giques de carriĂšre future, elle a constamment dĂ©clarĂ© Ă  son fils qu’il Ă©tait nĂ© le [2]. Verdi a d’ailleurs tout au long de sa vie fĂȘtĂ© son anniversaire les . Il est baptisĂ© le dans l'Ă©glise paroissiale de San Michele Arcangelo Ă  Roncole sous le nom latin de Joseph Fortuninus Franciscus, son registre de baptĂȘme prĂ©cisant qu'il est « nĂ© hier soir » (natum heri vespere). Son acte de naissance portĂ© le Ă  l’état civil de la commune de Busseto est ainsi rĂ©digĂ© en français :

Acte de naissance de Verdi du 12 octobre 1813 à Busseto dans l'état civil napoléonien de l'Empire français

« L’an mil huit cent treize, le jour douze d’octobre, Ă  neuf heures du matin, par devant nous, adjoint au maire de Busseto, officier de l’état civil de la Commune de Busseto susdite, dĂ©partement du Taro, est comparu Verdi Charles, ĂągĂ© de vingt huit ans, aubergiste, domiciliĂ© Ă  Roncole, lequel nous a prĂ©sentĂ© un enfant du sexe masculin, nĂ© le jour dix courant, Ă  huit heures du soir, de lui dĂ©clarant et de la Louise Uttini, fileuse, domiciliĂ©e aux Roncole, son Ă©pouse, et auquel il a dĂ©clarĂ© vouloir donner les prĂ©noms de Joseph Fortunin François[3]. »

La mention de l'acte de baptĂȘme « nĂ© hier soir » a suscitĂ© un doute sur sa date exacte de naissance. À cette Ă©poque, les jours Ă©taient en effet comptabilisĂ©s Ă  partir du coucher du soleil, cette mention pouvant Ă©voquer le samedi mais il est traditionnellement admis qu'il est nĂ© le dimanche [4].

La branche paternelle

Depuis trois cents ans, la famille paternelle de Verdi vit sur le territoire de Sant’Agata, un hameau de la commune de Villanova sull'Arda dans la province de Plaisance, en Bassa padana, Ă  peu de distance de Busseto. Giuseppe Antonio, le grand-pĂšre du musicien, et son Ă©pouse, Francesca Bianchi, originaire de Villanova sull’Arda, ont douze enfants. Dans les annĂ©es 1780, sans doute poussĂ©s par l’insuffisance des revenus d’un domaine trop modeste pour une si grande famille, les Verdi Ă©migrent aux Roncole oĂč naissent les cinq derniers enfants. Ils y tiennent une ferme-auberge, l’Osteria vecchia et exploitent dans le mĂȘme temps quelques arpents de terre. À la mort de Giuseppe Antonio, Carlo, le pĂšre du compositeur, alors ĂągĂ© de dix-neuf ans, seconde sa mĂšre Ă  l’auberge. Il Ă©pouse en 1805 Luigia Uttini, fileuse de son Ă©tat dans un coin de l'auberge familiale de Busseto[5]. Le couple est installĂ© Ă  l’Osteria vecchia depuis huit ans lorsque naĂźt leur premier enfant, Giuseppe.

La branche maternelle

La famille de Luigia Uttini, originaire du Val d'Ossola, Ă©migre au XVIIe siĂšcle, pour partir Ă  Bologne oĂč ses membres sont forgeron, boulanger, aubergiste
 Une seconde branche s’installe dans la rĂ©gion de Plaisance. On trouve parmi ceux-ci des rĂ©gisseurs, des professeurs, des hommes d’église
 Luigia naĂźt en 1787 Ă  Saliceto di Cadeo oĂč ses parents, Carlo et Angela Villa, tiennent une auberge-Ă©picerie, comme celle qu’ils ouvriront une quinzaine d’annĂ©es plus tard Ă  Busseto et oĂč viendra s’approvisionner Carlo Verdi, ce qui occasionnera sa rencontre avec sa future jeune Ă©pouse.

Contrairement Ă  la lĂ©gende qu’il a lui-mĂȘme contribuĂ© Ă  forger, les origines de Verdi, mĂȘme si sa mĂšre ne sait ni lire ni Ă©crire, ne sont pas celles d’un enfant du popolo minuto[6]. Les deux branches de sa famille appartiennent Ă  la petite bourgeoisie de campagne, relativement aisĂ©e.

« Les Verdi avaient leur banc Ă  l’église des Roncole et le chef du clan (
) Ă©tait membre de la confraternitĂ© de la Sainte Conception Ă  laquelle les Verdi firent des dons importants[7]. »

Les origines de la vocation musicale

Le petit Giuseppe grandit au contact des musiciens ambulants qui font halte à l’auberge

De mĂȘme, bien que Verdi l’ait certainement ignorĂ©, musicalement, « l’enfant n’était pas nĂ© de rien[8] » comme il se plaisait Ă  le laisser penser. On trouve en effet au XVIIIe siĂšcle, dans la branche bolonaise de la famille Uttini, deux cantatrices, un tĂ©nor, contemporain et connu de Mozart et un compositeur, Francesco Antonio Uttini (1723-1795). Ce dernier, mariĂ© Ă  une niĂšce d’Alessandro Scarlatti, est l’auteur d’une vingtaine d’opere serie, de chƓurs pour les tragĂ©dies de Racine[9] et de la messe de couronnement de Gustave III de SuĂšde dont l’assassinat sera le thĂšme de l'opĂ©ra Un bal masquĂ© (Un ballo in maschera) en 1859.

C’est cependant plus en direction de l’environnement social que directement familial qu’il convient de rechercher les origines de cette vocation. L’Italie du XVIIIe siĂšcle s’enthousiasme pour l’art lyrique et bien sĂ»r, ni le duchĂ© de Parme et Plaisance ni la ville de Busseto ne sont exempts de cette passion. Le petit Giuseppe est dĂšs sa prime enfance au contact des musiciens ambulants qui font halte Ă  l’auberge des Roncole. L’enfant essaie les instruments, chante avec les chƓurs, engrange les souvenirs qui nourriront plus tard l’inspiration populaire de ses opĂ©ras.

Mais tout « plongĂ© dans l’extase[10] » qu’il ait pu ĂȘtre Ă  l’écoute des orgues de Barbarie de passage, cette vocation n’aurait pas eu de suite sans la tendre attention que Carlo et Luigia pouvaient accorder Ă  Peppino au sein d’une cellule familiale inhabituellement rĂ©duite pour l’époque[11]. Le jeune Verdi aurait peut-ĂȘtre aussi Ă©voluĂ© dans l’échelle sociale sans nĂ©cessairement devenir musicien si don Pietro Baistrocchi, le maĂźtre d’école, organiste de l’église des Roncole et ami de la famille, n’avait pris conscience du caractĂšre exceptionnel de cet attrait de l’enfant pour la musique. Attrait qu’il avait pu remarquer lorsque Peppino restait des heures Ă  l’écouter jouer le rĂ©pertoire tant sacrĂ© que profane.

Roncole

Son pĂšre lui achĂšte une vieille Ă©pinette sur laquelle Peppino va pouvoir faire ses gammes

Ainsi, le jeune Verdi bĂ©nĂ©ficie-t-il dĂšs l’ñge de quatre ans des rudiments de latin et d’italien[12] dispensĂ©s par Baistrocchi avant de rentrer, Ă  six ans, Ă  l’école du village. Selon les tĂ©moignages rapportĂ©s par ses biographes, il est un Ă©lĂšve attentif au caractĂšre paisible, plutĂŽt solitaire sans toutefois refuser de se mĂȘler aux jeux des autres enfants, exĂ©cutant par ailleurs sans se faire prier les tĂąches qui lui sont confiĂ©es Ă  l’osteria.

CaractĂšre paisible mais affirmĂ© : on ne dĂ©range pas impunĂ©ment Peppino dans son Ă©coute de la musique d’orgue. Don Masini en fait les frais, qui s’entend menacĂ© dans un parfait dialecte d’un furieux : « Dio t’manda ’na sajetta » (« que Dieu te foudroie ») pour avoir envoyĂ© rouler le garçon en bas de l’autel parce que les burettes n’arrivaient pas. Huit ans plus tard, le prĂȘtre est effectivement foudroyĂ© : Verdi, Ă  sept ans, s'est dĂ©jĂ  appropriĂ© le thĂšme de la maledizione[13].

ParallĂšlement Ă  sa scolaritĂ©, il reçoit ses premiĂšres leçons de musique de son maĂźtre organiste et va pouvoir faire ses premiĂšres gammes, alors qu’il a atteint sa septiĂšme annĂ©e, sur une vieille Ă©pinette que lui achĂšte son pĂšre. L’instrument, dĂ©jĂ  ancien et trĂšs sollicitĂ© par un Peppino plus qu’assidu, devra ĂȘtre rĂ©parĂ©. Carlo fait appel Ă  Stefano Cavalletti, facteur d’orgues rĂ©putĂ© dans la rĂ©gion, qui rĂ©digera ainsi sa facture[14] :

« Ces sautereaux ont Ă©tĂ© refaits et empennĂ©s de cuir par moi, Stefano Cavalletti, et j’ai adaptĂ© le pĂ©dalier dont je vous ai fait cadeau ; de mĂȘme j’ai refait gratuitement lesdits sautereaux, voyant les bonnes dispositions du jeune Giuseppe Verdi pour apprendre Ă  jouer cet instrument, ce qui me suffit pour m’estimer totalement rĂ©glĂ©.
Anno Domini (1821) »

Pendant encore deux ans, le jeune garçon complĂšte sa formation musicale par la pratique en assurant le remplacement de don Baistrocchi Ă  l’orgue de l’église. À dix ans, Peppino a dĂ©jĂ  acquis tout ce que l’organiste et le curĂ© des Roncole pouvaient lui apporter.

Busseto

Le jeune garçon tient l’orgue de San Bartolomeo et celui de San Michele Arcangelo aux Roncole

GrĂące Ă  l’intĂ©rĂȘt du nĂ©gociant Antonio Barezzi, amateur de musique, membre de la SocietĂ  Filarmonica locale et ami de Carlo Verdi, le jeune Giuseppe est admis au Ginnasio, le lycĂ©e de Busseto Ă  l’automne 1823. Il y suit brillamment la classe de don Pietro Seletti, directeur de l’école, intellectuel provincial sans doute mais savant linguiste, astronome amateur et musicien, qui envisageait peut-ĂȘtre pour le garçon une carriĂšre professorale ou le sacerdoce. Le pĂšre franciscain Lorenzo da Terzorio, chez lequel il loge, l’entend jouer inlassablement aprĂšs les leçons de latin. Il conseille Ă  Carlo Verdi d’inscrire son fils Ă  l’école de musique de Ferdinando Provesi, directeur de la SociĂ©tĂ© philharmonique de la ville, oĂč il entre en 1825. Le jeune Verdi mĂšne alors de front ses Ă©tudes classiques et musicales Ă  Busseto et ses fonctions d’organiste aux Roncole oĂč il finit par remplacer son vieux maĂźtre Ă  l’ñge de douze ans. Il termine ses humanitĂ©s avec une mention trĂšs bien en 1827 et pendant encore deux ans complĂšte sa formation musicale avec l’harmonie et la composition auprĂšs de Provesi[15].

Don Seletti a abandonnĂ© son projet en entendant Verdi lui rĂ©pondre, alors qu’il lui demandait quelle musique il venait de jouer lorsqu’il avait remplacĂ© au pied levĂ© un organiste dĂ©faillant : « Mais la mienne, maĂźtre, je n’ai fait que suivre mon inspiration[16] ». Provesi le considĂšre dĂšs lors comme son Ă©gal et Barezzi l’introduit dans les salons des notables bussetans, membres de la SocietĂ  Filarmonica. LĂ , il donne ses premiers concerts en soliste (le piano Ă  queue de Barezzi a remplacĂ© sa chĂšre Ă©pinette) ou dirige l’orchestre des Filarmonici. En 1828, il a tout juste quinze ans lorsqu’il compose une symphonie Ă  partir de l’ouverture du Barbiere di Siviglia de Gioachino Rossini, suivie d’une cantate (perdue) pour baryton et orchestre en huit mouvements, I Deliri di Saul, d’aprĂšs la cĂ©lĂšbre tragĂ©die de Vittorio Alfieri, d’un Stabat Mater, d’un Domine ad adjuvandum pour orchestre, flĂ»te et tĂ©nor et d’autres compositions profanes ou sacrĂ©es.

Durant les annĂ©es qui suivent, il poursuit sa formation littĂ©raire (Virgile, CicĂ©ron, Alfieri[17], Manzoni, et bientĂŽt Shakespeare) et continue Ă  composer de nombreuses piĂšces[18] destinĂ©es Ă  la SociĂ©tĂ© philharmonique ou au thĂ©Ăątre de Busseto, maigrement rĂ©munĂ©rĂ©es par la ville ; il remplace de plus en plus souvent Provesi Ă  la classe ou au pupitre ; il tient l’orgue de San Bartolomeo et celui de San Michele Arcangelo aux Roncole. Les difficultĂ©s financiĂšres importantes auxquelles Carlo doit faire face ne lui permettent plus de pourvoir Ă  l’entretien de son fils. Giuseppe qui donne Ă©galement des leçons de piano Ă  sa fille Margherita est finalement accueilli dans sa maison par Barezzi qui le considĂšre un peu comme son propre fils.

Le , encore une fois sur l’insistance de Barezzi qui s’investira personnellement et de maniĂšre importante en doublant ses subsides, Carlo Verdi demande au Monte di PietĂ  (Mont de PiĂ©tĂ©) de Busseto une bourse destinĂ©e au financement des Ă©tudes de son fils au conservatoire de Milan. La rĂ©ponse, favorable, n’arrivera que le , aprĂšs l’intercession de l’archiduchesse Marie-Louise sollicitĂ©e par une seconde lettre de Carlo. Le dĂ©part Ă  Milan de Verdi dont la prime jeunesse s’achĂšve ici, s’il permet de rĂ©soudre le problĂšme posĂ© par les convenances qui n’autorisent plus Giuseppe et Margherita d’habiter sous le mĂȘme toit du fait de leur idylle naissante, va surtout ĂȘtre la boĂźte de Pandore d’oĂč Ă©mergera l’un des plus grands compositeurs d’opĂ©ras de tous les temps[19].

Milan

En 1832, Milan est la capitale du royaume lombard-vénitien sous domination autrichienne

« Haute stature, cheveux chùtains, front élevé, sourcils noirs, yeux gris, nez aquilin, bouche petite, barbe sombre, menton ovale, visage maigre, teint pùle. Profession : étudiant en musique[20] »

Sujet de la Duchesse de Parme (et ex-impĂ©ratrice des Français), Verdi doit remettre son passeport pour accĂ©der Ă  la capitale du royaume lombard-vĂ©nitien oĂč la prĂ©sence autrichienne est autrement perceptible qu’à Parme.

L’examen d’entrĂ©e au conservatoire de Milan, qui porte aujourd’hui son nom, se dĂ©roule Ă  la fin du mois de juin. Le jury est composĂ© de Francesco Basily, le censeur de l’établissement, Gaetano Piantanida et Antonio Angeleri, professeurs de piano et de contrepoint et d’Alessandro Rolla, compositeur et professeur de violon.

Alors que la fugue Ă  quatre voix qu’il prĂ©sente pour l’épreuve de composition est apprĂ©ciĂ©e par le jury, il est refusĂ© Ă  cause de l’épreuve qu’il redoutait le moins : lors de son exĂ©cution au piano du Capriccio en la d’Heinrich Herz la position de ses mains est considĂ©rĂ©e comme irrĂ©mĂ©diablement mauvaise. La position des mains, l’ñge, de quatre ans supĂ©rieur Ă  l’ñge habituel d’admission, le peu de places de l’établissement, le statut d’étranger, toutes ces raisons cumulĂ©es ne pouvaient rendre que rĂ©dhibitoire la dĂ©cision du comte de Hartig, gouverneur de Milan. De cette dĂ©cision sans appel du , Verdi, habituĂ© Ă  ĂȘtre adulĂ© dans le petit cercle des mĂ©lomanes de Busseto, conservera durablement une profonde amertume, comme l'atteste l'enveloppe rappelant le refus de son admission qu'il conservera toujours Ă  portĂ©e de main[21].

En outre, il dĂ©pend dĂ©sormais encore plus de son attentionnĂ© bienfaiteur pour payer les leçons particuliĂšres qu’il va devoir prendre. MĂȘme si la participation de Barezzi Ă  tous ces frais est parfaitement dĂ©sintĂ©ressĂ©e, la fiertĂ© du jeune homme ne peut qu’en ĂȘtre affectĂ©e.

Sur les conseils d’Alessandro Rolla, Verdi suit les cours du claveciniste de la Scala, Vincenzo Lavigna. L’ancien professeur de solfĂšge de l’établissement milanais est offusquĂ© de voir que ses collĂšgues ont pu refuser l’accĂšs du conservatoire Ă  un jeune homme au talent aussi confirmĂ©. Le cycle d’études dure trois annĂ©es pendant lesquelles Verdi se prĂ©pare Ă  rĂ©aliser son ambition : devenir maĂźtre de chapelle Ă  Busseto. Trois annĂ©es pendant lesquelles il Ă©crit : « Des canons et des fugues, des fugues et des canons Ă  toutes les sauces
 ». Mais aussi trois annĂ©es pendant lesquelles il frĂ©quente assidĂ»ment la Scala dĂ©veloppant un goĂ»t de plus en plus affirmĂ© pour la tragĂ©die lyrique et le milieu de l’opĂ©ra.

En avril 1834, il donne son premier concert public lors duquel il dirige brillamment La CrĂ©ation de Joseph Haydn, au Teatro dei Filodrammatici, en prĂ©sence du comte Pompeo Belgioioso, bientĂŽt suivie par La Cenerentola de Rossini, jouĂ©e devant l’archiduc Ranieri. Il Ă©crit, sur commande du comte Borromeo, une cantate en l’honneur de l’empereur d’Autriche[22], un Tantum ergo pour la philharmonie de Busseto et commence Ă  composer un opĂ©ra sur un livret Ă©crit par un journaliste milanais, Antonio Piazza. La derniĂšre annĂ©e d’études lui pĂšse de plus en plus, tant il baigne dĂ©jĂ  dans le monde du lyrique. En juillet 1835, Verdi reçoit enfin de Lavigna le certificat de fin d’études qui lui permet de prĂ©tendre Ă  l’emploi de maestro di cappella.

C’est la mort dans l’ñme que Giuseppe retourne cet Ă©tĂ©-lĂ  Ă  Busseto. Margherita Barezzi l’a bien compris qui dĂ©clare Ă  Ferdinando Galuzzi, le nouveau maire : « Verdi ne se fixera jamais, pour rien au monde Ă  Busseto. Il a dĂ©cidĂ© de se consacrer Ă  la musique lyrique et c’est dans ce domaine-lĂ  qu’il rĂ©ussira, non dans celui de la musique religieuse[23] ».

MaĂźtre de musique Ă  Busseto

Les prĂ©noms de Virginia et Icilio Romano sont choisis en l’honneur du dramaturge piĂ©montais Vittorio Alfieri et en rĂ©fĂ©rence aux sentiments rĂ©publicains et patriotiques clairement affichĂ©s du couple Verdi.

Provesi, le vieux maĂźtre de Verdi Ă  Busseto, est mort depuis deux ans[24]. DĂšs lors s’est ouverte entre libĂ©raux laĂŻques et conservateurs clĂ©ricaux, entre Coccardini et Codini, une guerre de succession clochemerlesque[25], chaque faction cherchant Ă  placer son champion.

L’enjeu en est le double poste, indissociable, de maĂźtre de musique et dirigeant de la Filarmonica, rĂ©munĂ©rĂ© par les premiers, et de maĂźtre de chapelle et organiste payĂ© par les seconds. Bien que le gouvernement ducal ait pris la dĂ©cision d’ouvrir le concours en juin 1835, l’annonce n’en est rendue publique qu’en fĂ©vrier 1836. Entretemps, Verdi a repris en main la Filarmonica et donne des concerts avec l’orchestre et des rĂ©citals d’orgue. Le , il se prĂ©sente Ă  l’examen devant Giuseppe Alvinovi, maĂźtre de chapelle de la cour du duchĂ© de Parme et ami du grand NiccolĂČ Paganini. Satisfaction sans rĂ©serve du maĂźtre qui aurait mĂȘme dĂ©clarĂ© que Verdi Ă©tait le « Paganini du piano »[26], offrant Ă  Giuseppe une belle revanche sur son Ă©chec milanais. Le , Verdi est officiellement maĂźtre de musique de Busseto. Le , il signe avec la commune, reprĂ©sentĂ©e par Antonio Accarini, prĂ©sident du monte di pietĂ , un contrat lĂ©onin : salaire on ne peut plus modeste contre rĂ©sidence obligatoire Ă  Busseto, cinq leçons hebdomadaires Ă  chaque Ă©lĂšve en clavecin, piano, orgue, chant, contrepoint et composition, procurer les instruments nĂ©cessaires, direction de la sociĂ©tĂ© philharmonique pour tous les concerts et toutes les rĂ©pĂ©titions, pendant neuf ans, rĂ©siliable Ă  trois ou six ans sous condition de dĂ©dit. Verdi, qui a pu parler d’esclavage dans une lettre Ă  Lavigna, paye cher le soutien des Filarmonici.

Le , c’est un contrat nettement plus heureux que signe Peppino[27] : il Ă©pouse « Ghita » Barezzi aprĂšs les brĂšves fiançailles qui ont suivi le si long innamoramento. Le jeune couple, aidĂ© lĂ  encore par Barezzi, s’installe au palais Tebaldi oĂč naissent, Virginia, le , et Icilio Romano, le , dont les prĂ©noms, qui manifestent les sentiments politiques et patriotiques du jeune compositeur, sont inspirĂ©s par le thĂ©Ăątre de Vittorio Alfieri, auteur d'une Virginia.

MalgrĂ© le peu de temps dont il dispose en dehors de ses activitĂ©s de maĂźtre de musique et des concerts avec la Filarmonica ou Ă  l’orgue des Ă©glises de la rĂ©gion[28] auxquels se presse un public enthousiaste, Verdi compose. De la musique religieuse : un Tantum Ergo en fa majeur pour tĂ©nor et orchestre (1836), une Messa di Gloria jouĂ©e le en l’Église Croix Saint Esprit de Plaisance. De la musique profane : sur des poĂšmes de Vittorelli, Bianchi, Angiolini et Goethe traduits par le docteur Luigi Ballestra, il Ă©crit Sei romanze pour voix et piano publiĂ©es cette mĂȘme annĂ©e par l’éditeur milanais Giovanni Canti. En 1838, deux sinfonie sont crĂ©Ă©es par la Philharmonie.

Et il poursuit l’écriture de l’opĂ©ra rapportĂ© de Milan.

Walter Scott, auteur de Lord Hamilton l’Ɠuvre Ă  l’origine du premier opĂ©ra de Verdi

En , Lord Hamilton dont le livret est inspirĂ© d’un ouvrage de Walter Scott consacrĂ© au Comte d’Arran, est terminĂ©. Giuseppe DemaldĂš, cousin d’Antonio Barezzi, secrĂ©taire de la Filarmonica, trĂ©sorier du monte di pietĂ , ami et premier biographe de Verdi, lui suggĂšre de prĂ©senter son ouvrage Ă  Parme. Mais, pour l’impresario du Teatro Regio, « il est hors de question de prendre le moindre risque pour un musicien dont la renommĂ©e ne s’étend guĂšre qu’à quelques bourgades du plat pays parmesan »[29]. Nul n’est prophĂšte en son pays.

MĂȘme Ă©chec Ă  Milan oĂč l’influence de Pietro Massini, qui lui avait confiĂ© la direction de l’orchestre des Filodrammatici Ă  la fin de ses Ă©tudes et Ă©tait devenu son ami, le mettant en relation avec Antonio Piazza, le librettiste de son Lord Hamilton, ne suffit pas Ă  persuader Bartolomeo Merelli l’impresario de la Scala. La recommandation du Comte Opprandino Arrivebene n’a pas plus d’effet lors du dĂ©placement du jeune compositeur Ă  Milan au mois de .

Verdi devra-t-il dÚs lors se résoudre à poursuivre cette carriÚre de maßtre de musique à Busseto si éloignée de ses ambitions ?

Le la vie du jeune couple est affectĂ©e par la perte de la petite Virginia. Une pĂ©riode de vacances leur permet cependant de trouver un dĂ©rivatif Ă  leur douleur en rĂ©alisant un nouveau voyage Ă  Milan. Cette fois, le compositeur trouve une Ă©coute favorable auprĂšs du Comte Borromeo auquel il est prĂ©sentĂ© par Massini : son opĂ©ra sera donnĂ© lors de la soirĂ©e annuelle de bienfaisance du Pio Istituto teatrale. Le triste Ă©vĂ©nement et la reprise tant espĂ©rĂ©e de contact avec la capitale de l’art lyrique conduisent Verdi, avec l’accord de Ghita, Ă  prendre une dĂ©cision radicale. Le , il Ă©crit au maire de Busseto :

« Monsieur le Maire,
Je m’aperçois, hĂ©las, que je ne puis rendre Ă  ma malheureuse patrie les services dont j’aurais voulu m’acquitter envers elle. Je regrette que les circonstances ne me permettent pas de donner une preuve effective de mon attachement Ă  la citĂ© qui, la premiĂšre, m’a donnĂ© le moyen de progresser dans l’art que je professe.
La nĂ©cessitĂ© oĂč je suis de me procurer les moyens suffisants pour nourrir ma famille me pousse Ă  chercher ailleurs ce que je ne peux obtenir dans ma patrie. C’est pour cela que, me conformant aux dispositions de l’article 8 du contrat passĂ© entre la mairie et moi-mĂȘme le 20 avril 1836, j’annonce Ă  Votre Excellence, avant que n’expirent les six mois de prĂ©avis, que je ne continuerai plus Ă  servir en qualitĂ© de maĂźtre de musique aprĂšs le 10 mai 1839.
Je conserverai dans mon cƓur la plus vive affection pour ma patrie et une reconnaissante estime pour ceux qui m’y ont aimĂ©, encouragĂ© et assistĂ© [
][30] »

De Lord Hamilton Ă  Oberto, en passant par Rocester

Verdi revient le s’installer Ă  Milan avec Margherita et Icilio Romano. Les rĂ©pĂ©titions d’Oberto dĂ©butent au printemps avec une distribution de rĂȘve, dont Giuseppina Strepponi, mais sont interrompues du fait des dĂ©fections successives. Contre toute attente, Merelli accepte finalement de monter l’opĂ©ra qui serait donnĂ© Ă  la Scala aprĂšs la premiĂšre prĂ©vue au Pio Istituto et aprĂšs quelques retouches apportĂ©es au livret par Temistocle Solera et Ă  la partition par l’ajout d’un quatuor vocal.

Une totale incertitude rĂšgne chez les musicologues car, si Oberto nous est bien parvenu, il ne reste que peu de traces du Lord Hamilton et du Rocester et il est bien difficile de savoir lequel a succĂ©dĂ© Ă  l’autre et lequel est Ă  l’origine d’Oberto. Une lettre de Verdi Ă  Massini du Ă©voque la possibilitĂ© de « monter l’opĂ©ra Rocester Ă  Parme » ce qui laisserait le temps Ă  Piazza de « modifier le livret ici ou lĂ  ». Or, dans une autre lettre de 1871, Verdi prĂ©cise que c’est le Lord Hamilton de Piazza qui serait Ă  l’origine d’Oberto. Se pose encore la question de savoir si Piazza avait fourni un ou deux livrets Ă  Verdi, sous deux titres diffĂ©rents. Qu’il y ait eu un, deux ou trois livrets, il n’y a qu’un librettiste initial et, seule subsiste la composition musicale d’Oberto[31].

Verdi et Margherita amĂ©nagent en septembre dans un appartement plus confortable et alors que le compositeur travaille aux retouches de l’opĂ©ra et que se dĂ©roulent les ultimes rĂ©pĂ©titions, un nouveau drame survient, emportant le petit Icilio Romano, le .

La premiĂšre d’Oberto, Conte di San Bonifacio a finalement lieu le Ă  la Scala et obtient un rĂ©el succĂšs public et une critique suffisamment favorable aux yeux de l’impresario de la Scala pour que celui-ci programme quatorze reprĂ©sentations supplĂ©mentaires et propose Ă  Verdi un contrat que celui-ci qualifiera de « proposition fastueuse pour l’époque » : l’impresario offrait quatre mille livres autrichiennes (quatre fois le salaire d’un maĂźtre de musique pendant trois ans) contre la production de trois opĂ©ras pour la Scala et pour Vienne oĂč Merelli est Ă©galement inspecteur des thĂ©Ăątres de la Cour. À cette proposition se rajoutait en outre celle de Giovanni Ricordi d’éditer Oberto, conte di Bonifacio. Verdi signe les deux contrats.

D’Il proscritto à Un giorno di regno en passant par Il finto Stanislao

Le livret d’Il proscritto fourni au dĂ©but de l’annĂ©e 1840 par Gaetano Rossi sur la commande de Merelli ne convient pas au compositeur qui n’y donnera pas suite. L’impresario le pressant de choisir une Ɠuvre comique parmi plusieurs livrets de Felice Romani, Verdi porte son choix sur Il finto Stanislao, qui lui semble, selon ses propos, le moins mauvais et qui deviendra l’opera buffa Un giorno di regno.

Alors qu’il travaillait d’arrache-pied pour rattraper le retard accumulĂ©, Margherita, sans doute affaiblie par la perte coup sur coup de ses deux enfants, mourut le d’une mĂ©ningite fulgurante.

« J’étais seul, dĂ©sespĂ©rĂ©ment seul[32]. »

Au plus profond de son dĂ©sespoir, Verdi envisage sĂ©rieusement d’abandonner la carriĂšre lyrique. L’amicale fermetĂ© de Merelli, et la menace de devoir payer le dĂ©dit prĂ©vu au contrat, le contraignent Ă  respecter son engagement et Ă  terminer son opera buffa. L’unique reprĂ©sentation d’Un giorno di regno, le est un fiasco. C’est le manque de conviction des chanteurs, sĂ©vĂšrement huĂ©s, qui est Ă  l’origine de cet Ă©chec. La musique de Verdi, quant Ă  elle, est accueillie par des applaudissements. Ce sera son seul essai Ă  la comĂ©die jusqu’à Falstaff, Ă  la fin de sa carriĂšre.

Il n’en fallait pas plus pour rouvrir la blessure. Verdi informe Merelli de sa dĂ©cision de rĂ©silier son contrat et de renoncer Ă  sa carriĂšre de compositeur. Encore une fois, Merelli joue finement en remettant Oberto Ă  l’affiche pour dix-sept reprĂ©sentations dont le succĂšs remet un peu de baume au cƓur du maestro et lui permet de gagner l’argent nĂ©cessaire pour quitter l’appartement oĂč se trouvent trop de douloureux souvenirs.

Nabucco : le dĂ©but d’une fulgurante carriĂšre

La seconde commande de Merelli, sur un livret de Temistocle Solera, est le triomphal Nabucco, reprĂ©sentĂ© pour la premiĂšre fois le Ă  La Scala, avec Giuseppina Strepponi, soprano, dans le rĂŽle d’Abigaille.

D’aprĂšs un des deux rĂ©cits que le compositeur donna de la genĂšse de ce premier chef-d'Ɠuvre, ce sont les paroles du ChƓur des HĂ©breux, le cĂ©lĂšbre Va, pensiero, qui permirent Ă  Verdi de retrouver le goĂ»t de l’écriture.

Partition : premiĂšres mesures de Va, pensiero extrait de Nabucco
Giuseppina Strepponi, créatrice du rÎle d'Abigaille
Dùs Nabucco, Verdi triomphe à La Scala, haut lieu de l’art lyrique
Marie-Louise d'Autriche, assiste à la représentation de Nabucco au Teatro Regio de Parme
Giuseppe Mazzini chantre du patriotisme italien

En rĂ©alitĂ©, une analyse serrĂ©e du drame, mise en regard du Saul d'Alfieri qui avait dĂ©jĂ  inspirĂ© Verdi dans son adolescence, met au jour les moteurs littĂ©raires et symboliques de cette histoire d'un roi sombrant dans la folie pour avoir voulu transcender sa condition[33], thĂšme autrement important que la rĂ©volte politique dans l'Ɠuvre et la psychĂ© verdiennes.

AprĂšs une longue pĂ©riode de dĂ©pression durant l’hiver 1840-1841, Verdi reprend donc progressivement contact avec le milieu musical milanais et se met finalement Ă  la composition en mai 1841. La partition de Nabucco (le nom abrĂ©gĂ© du roi est une tradition italienne depuis le XVIe siĂšcle) est livrĂ©e au dĂ©but de l’automne et mise Ă  l’affiche de la Scala par Merelli pour la saison de Carnaval[34]. DĂšs le finale du premier acte, le rideau tombe sur les acclamations du public et c’est sur une tornade d’applaudissements que se termine la reprĂ©sentation. La presse milanaise est dithyrambique : Verdi triomphe Ă  Milan.

Et pourtant, le public de mars 1842 n'est pas seulement sensible au message politique, du reste exagĂ©rĂ©, de Nabucco. C’est une autre composante de l’opĂ©ra qui, dĂšs la premiĂšre reprĂ©sentation, emporte si spontanĂ©ment l’adhĂ©sion des Milanais pour l’Ɠuvre de Verdi. D’un Verdi qui a Ă©tĂ© nourri par la violence de cette terre Ă©milienne et par la duretĂ© de sa formation, mais aussi par l’amour des chants repris en chƓur par les paysans et les musiciens ambulants. L’Ɠuvre d’un Verdi qui sera qualifiĂ©e de « barbare » par la critique parisienne. Mais qui rĂ©pond pour l’heure Ă  la demande d’un public lassĂ© de psychologisme et en attente de la grandeur qui manque aux opĂ©ras de Gaetano Donizetti ou Saverio Mercadante. C’est le caractĂšre romantique de Verdi qui, faisant fi des rĂšgles du classicisme et du « bon goĂ»t », a touchĂ© le cƓur de ce public.

Giuseppe Mazzini, reprochant Ă  la production lyrique de ce temps « son hĂ©donisme, son individualisme et son absence d’inspiration morale estime que doit se substituer Ă  cet art matĂ©rialiste et dĂ©cadent une nouvelle forme de dramaturgie privilĂ©giant le rĂ©alisme et les prĂ©occupations sociales ». Le patriote italien en appelle, en exergue Ă  la Philosophie de la musique, publiĂ© en 1836 :

« au jeune inconnu qui, peut-ĂȘtre, quelque part dans notre pays, est travaillĂ© par l’inspiration, tandis que j’écris ces lignes, et enferme en lui le secret d’une Ă©poque nouvelle[35]. »

AprĂšs une saison de cinquante-sept reprĂ©sentations triomphales Ă  la Scala, l’opĂ©ra est donnĂ©, pour la premiĂšre fois en dehors de l'Italie, au Theater am KĂ€rntnertor de Vienne avec le mĂȘme succĂšs le [36]. Verdi, dont les relations avec la Strepponi sont dĂ©sormais connues rejoint ensuite la cantatrice Ă  Parme. Nabucco est programmĂ© au Teatro Regio oĂč Carlo Verdi assiste, le 17, en proie Ă  une Ă©motion bien comprĂ©hensible, Ă  la premiĂšre des vingt-deux reprĂ©sentations dont deux, dirigĂ©es par le maestro, ont pour spectatrice Marie-Louise d'Autriche, archiduchesse de Parme.

Des Lombardi alla prima crociata à La battaglia di Legnano : les années difficiles

Ce succĂšs est le dĂ©but d’une fulgurante et longue carriĂšre. Les seize annĂ©es qui suivent, durant lesquelles Verdi Ă©crit en moyenne un opĂ©ra par an, sont qualifiĂ©es par le maestro lui-mĂȘme comme ses « annĂ©es de galĂšre », lors desquelles il est contraint de composer frĂ©nĂ©tiquement pour vivre. Toutes les Ɠuvres de cette pĂ©riode ne sont pas excellentes, mais toutes sont caractĂ©risĂ©es par une thĂ©ĂątralitĂ© typique de Verdi. Des Lombardi alla prima crociata donnĂ©s Ă  la Scala le , Ă  La battaglia di Legnano reprĂ©sentĂ©e au Teatro Argentina de Rome le , c’est une succession quasi ininterrompue de succĂšs, avec des reprĂ©sentations dans les thĂ©Ăątres de toute l’Europe.

Le musicien qui n’est dĂ©sormais plus le jeune inconnu invoquĂ© par Mazzini passe l’étĂ© de 1842 Ă  Busseto oĂč, le goĂ»t retrouvĂ© pour l’écriture, il entreprend la composition des Lombardi alla prima crociata sur le livret que Temistocle Solera a tirĂ© d’un poĂšme de Tommaso Grossi. Verdi est maintenant tout Ă  fait conscient de l’effet produit sur les Milanais par les thĂšmes patriotiques et les chƓurs vibrants de Nabucco. Et force est de constater qu'il n'hĂ©site pas Ă  user de cette « recette », qui ne va pas Ă  l’encontre de ses convictions, pour donner au public cette satisfaction que n’offrent pas les Ɠuvres des autres compositeurs. L’allusion est claire et les autoritĂ©s autrichiennes ne s’y trompent pas : la dĂ©livrance de JĂ©rusalem par les Lombards parle aux Milanais le langage de l’indĂ©pendance par rapport Ă  la domination des Habsbourg. Mais c’est l’église, reprĂ©sentĂ©e par l’archevĂȘque Gaisruck, qui exercera une censure contre laquelle, le compositeur n’ayant aucune intention de changer ni la moindre virgule ni la moindre croche, Bartolomeo Merelli doit lutter pied Ă  pied pour sauver sa saison. Et c’est sur les accents patriotiques du chƓur des croisĂ©s que le public de la Scala acclame encore une fois, le , le compositeur et les chanteurs rappelĂ©s longuement par de vibrants applaudissements. À Florence, les rĂ©actions du public de la Pergola sont plus mitigĂ©es et le fiasco de la Fenice Ă  Venise n’est finalement qu’une parenthĂšse vite refermĂ©e sur la fulgurante carriĂšre qui s’ouvre devant le compositeur pour de longues annĂ©es.

Hernani, la source du nouvel opéra de Verdi

Le comte Mocenigo, directeur de la Fenice, ne s’y est pas trompĂ©, qui souhaite voir Verdi crĂ©er une nouvelle Ɠuvre Ă  Venise. Le compositeur est maintenant un homme d’affaires averti et ce n’est qu’aprĂšs d’ñpres nĂ©gociations que le contrat est signĂ© dans les termes souhaitĂ©s par le maestro. Il Ă©crivait Ă  Mocenigo, le :

« Je mettrai en scĂšne I Lombardi, j’écrirai le nouvel opĂ©ra en laissant toute la partition Ă  la sociĂ©tĂ© de gestion.
Je ferai Ă©crire le livret Ă  mes frais et la sociĂ©tĂ© me versera 12 000 lires autrichiennes.
Ou bien, si on me laisse la propriĂ©tĂ© de la partition, tout en acceptant les autres conditions, on me versera 6 000 lires autrichiennes[37]. »

Le travail sur le livret qui devait ĂȘtre tirĂ© du drame romantique de Victor Hugo, Hernani, consacre le dĂ©but d’une Ă©troite collaboration et d’une grande amitiĂ© avec le librettiste Francesco Maria Piave. Encore une fois, Verdi doit lutter contre la censure et accepter de supprimer les termes de « vengeance » ou de « sang » pour que soit maintenu le titre original (italianisĂ©) d’Ernani contre l’exigence des autoritĂ©s autrichiennes. Il se bat aussi contre la direction de la Fenice pour obtenir des chanteurs capables de faire face aux difficultĂ©s vocales des rĂŽles. Et malgrĂ© les difficultĂ©s, malgrĂ© les contre-temps, malgrĂ© les mauvaises volontĂ©s, la premiĂšre, le est un succĂšs, la seconde un triomphe. Verdi a 30 ans. À Venise, Milan, Parme, Florence, Bologne, il est le maĂźtre de la scĂšne lyrique.

AprĂšs une sĂ©rie de reprĂ©sentations Ă  Vienne organisĂ©e par Gaetano Donizetti qui assurait alors la direction artistique du KĂ€rntnerthor Theater, Ernani fait en trois ans le tour de la planĂšte : Paris, Rio de Janeiro, Londres, Copenhague, Istanbul, et en comptant les thĂ©Ăątres de la pĂ©ninsule, ce sont plus de deux cent cinquante maisons d’opĂ©ra qui accueilleront l’Ɠuvre, assurant ainsi Ă  Verdi la notoriĂ©tĂ© qu’il pouvait attendre en retour d’une vie extĂ©nuante consacrĂ©e autant Ă  la course au cachet qu’à l’écriture.

La comtesse Clara Maffei, Ă©gĂ©rie des patriotes milanais du Risorgimento, qui sera l’amie de Verdi sa vie durant

NotoriĂ©tĂ©, mais aussi double revanche, sociale et Ă©conomique, de ce fils d’aubergiste pauvre aux origines paysannes. Verdi est depuis dĂ©jĂ  quelques annĂ©es bien introduit et parfaitement Ă  l’aise dans les milieux musicaux et aristocratiques milanais. La comtesse Clara Maffei, dont le salon bruissait des dĂ©sirs et projets d’unification italienne, et qui restera son amie sa vie entiĂšre, le reçoit dĂšs cette Ă©poque. Et c’est Ă©galement Ă  cette Ă©poque que Verdi commence sa double vie de musicien et de propriĂ©taire terrien. Sa premiĂšre acquisition, Il Pulgaro, est une ferme qui jouxte les terres que son pĂšre louait jusqu’à la rĂ©siliation du bail par le curĂ© de la Madonna dei Prati lorsque Carlo n’a plus Ă©tĂ© en mesure de faire face Ă  cette charge.

MalgrĂ© l’altĂ©ration de sa santĂ© occasionnĂ©e par la lutte opiniĂątre contre les directeurs de thĂ©Ăątres trop exigeants, le harcĂšlement des Ă©diteurs de musiques rivaux (les Lucca et les Ricordi Ă  Milan, les frĂšres Escudier Ă  Paris ou Benjamin Lumley Ă  Londres) en recherche d’exclusivitĂ©, et surtout par les menaces d'un caractĂšre dĂ©pressif[38], Verdi va encore accĂ©lĂ©rer sa production. Si ses cinq premiers opĂ©ras sont crĂ©Ă©s sur un rythme annuel, les suivants ne seront espacĂ©s que de quelques mois et leur qualitĂ© se ressentira de ces mauvaises conditions.

Le repos forcĂ© qu’il prend Ă  Busseto lors de l’étĂ© 1844 n’est pas complĂštement oisif puisqu’il y termine la composition de I due Foscari sur un livret inspirĂ© au fidĂšle Piave par un drame du mĂȘme nom de Lord Byron. À dĂ©faut d’une Ɠuvre transcendante (Verdi lui-mĂȘme la trouvait trop uniforme de couleur[39]), l'opĂ©ra, dĂ©pourvu de contenu politique, est une sombre et belle mĂ©ditation que, curieusement, le public du Teatro Argentina de Rome accueille avec succĂšs le .

L’annĂ©e suivante, Giovanna d'Arco, inĂ©gale mais mĂ©lodiquement surabondante[40], renforce sa cĂ©lĂ©britĂ©. Trois mois aprĂšs I due Foscari, le nouvel opĂ©ra est prĂȘt. Comme pour les premiĂšres Ɠuvres milanaises, le livret, inspirĂ© d’un poĂšme de Friedrich von Schiller, est ici Ă©crit par Temistocle Solera. Il est donnĂ© le Ă  la Scala oĂč il bĂ©nĂ©ficie du mĂȘme accueil par le public et oĂč il sera reprĂ©sentĂ© dix-sept fois.

La bourse que le Monte di PietĂ  e d’Abbondanza de Busseto avait accordĂ©e Ă  Verdi, loin d’ĂȘtre exceptionnelle, relevait au contraire d’une pratique habituelle dont allait bĂ©nĂ©ficier un autre protĂ©gĂ© du « clan » Barezzi, Emanuele Muzio. De 1844 Ă  1847, envoyĂ© Ă  Milan pour y poursuivre des Ă©tudes musicales dĂ©butĂ©es dans l’école de Ferdinando Provesi, il est l’élĂšve de Verdi. Sa correspondance avec Barezzi nous renseigne sur la vie du maestro dans ces annĂ©es prĂ©sentĂ©es par lui-mĂȘme comme des « annĂ©es de galĂšre ». Muzio en parle comme « le plus fĂȘtĂ©, le plus fameux de toute l’Europe, le signor Giuseppe Verdi, l’idole des Milanais » pendant que le musicologue italien Massimo Mila Ă©voque un « Verdi Ă  l’ombre des jeunes filles en fleur[41] ». Ce qui n’empĂȘche pas Verdi de mener parallĂšlement cette vie de galĂ©rien que lui impose sa phĂ©nomĂ©nale production et ses engagements de plus en plus nombreux. Le jeune Muzio, extrĂȘmement attachĂ© au « Signor Maestro », est alors d’une aide prĂ©cieuse pour le compositeur dont il devient Ă  la fois le secrĂ©taire et l’homme Ă  tout faire et dont il restera sa vie durant l’ami indĂ©fectible.

Verdi, malade pendant la composition d’Alzira, est l’objet de tous les soins de la part du jeune Bussetan dont la sollicitude et l’inquiĂ©tude pour l’état de santĂ© du maestro ressort des lettres envoyĂ©es Ă  Antonio Barezzi. Vincenzo FlaĂčto, impresario du Teatro San Carlo de Naples et commanditaire de l’opĂ©ra, auquel Verdi a demandĂ© un report de la date de crĂ©ation, ne s’y laisse pas prendre qui rĂ©pond Ă  sa lettre :

« Votre guĂ©rison, vous l’obtiendrez grĂące Ă  l’air de Naples et aux conseils que je vous donnerai quand vous serez ici, puisque j’ai Ă©tĂ© moi-mĂȘme mĂ©decin et ai renoncĂ© aux impostures de cette profession[42]. »

FlaĂčto connaĂźt les causes de la « maladie » de Verdi : celui-ci redoute en fait plus que tout autre le public de « la grande dame dĂ©chue du mĂ©lodrame italien ». Et en effet, est-ce en raison de la cabale de la presse qui qualifie sa musique de « barbare », de l’opposition des partisans de Saverio Mercadante (directeur du conservatoire de Naples) rĂ©fractaires Ă  toute nouveautĂ© et donc Ă  la musique romantique, est-ce grĂące Ă  l’excellente prestation des Tadolini, Fraschini et Coletti ou Ă  la rĂ©putation qui avait prĂ©cĂ©dĂ© Verdi et Ă  l’accueil enthousiaste rĂ©servĂ© Ă  I due Foscari, toujours est-il que la premiĂšre de la mĂ©diocre Alzira au Teatro San Carlo le n’est ni un succĂšs ni un fiasco et c’est dĂ©couragĂ© que Verdi quitte Naples aprĂšs la troisiĂšme reprĂ©sentation.

À la fin de l’étĂ© il se rend Ă  Busseto oĂč il achĂšte le palazzo Cavalli, l’imposante demeure bourgeoise de l’ancien maire, l’une des plus magnifiques de la ville et oĂč il entreprend la composition de l’opĂ©ra commandĂ© pour la Fenice.

Nouveau triomphe pour Verdi Ă  la Fenice avec Attila

Venise n’est pas Naples. Verdi est heureux d’y retrouver son ami Francesco Maria Piave, initialement pressenti pour l’écriture du livret d’Attila finalement confiĂ©e Ă  Temistocle Solera. Et le public vĂ©nitien se rĂ©jouit Ă  l’idĂ©e de revoir l’auteur d’Ernani auquel il a fait un accueil triomphal trois ans plus tĂŽt et dont Un giorno di regno, sifflĂ© Ă  Milan, connaĂźt ici un succĂšs qui pourrait paraĂźtre inattendu. Le , terrassĂ© par un refroidissement qui lui impose de garder la chambre pendant plus d’un mois il ne peut cependant assister au gala d’ouverture de la saison oĂč sont prĂ©sents le tsar et la tsarine de Russie et oĂč l’on donne sa Giovanna d'Arco.

Le , l’accueil d’Attila est mitigĂ© lors de la premiĂšre mais, Ă  la direction de l’orchestre de la Fenice et avec une distribution magnifique, Verdi triomphe lors des reprĂ©sentations suivantes. Ce neuviĂšme opĂ©ra, qui, selon certains, marque un tournant[43], approfondit en rĂ©alitĂ© les thĂšmes les plus intimes de l'Ăąme verdienne, en lui permettant de se dĂ©barrasser des facilitĂ©s :

« Je suis fatiguĂ© de ces fanfares sur la scĂšne. [Elles] n’ont plus le prestige de la nouveautĂ©. Et puis des marches, j’en ai dĂ©jĂ  fait beaucoup : une guerriĂšre dans Nabucco, une autre solennelle et grave dans Giovanna d’Arco, et je n’en ferai jamais de meilleure. Enfin ! ne peut-on faire un opĂ©ra grandiose sans le fracas de la fanfare ? Et Guillaume Tell ? et Robert le Diable ? ne sont-ils pas grandioses ? Et pourtant ils n’ont pas de fanfare ! dĂ©sormais la fanfare est un genre provincial [una provincialata] qui n’a plus lieu d’ĂȘtre dans les grandes villes[44]. »

Et, en effet, prĂ©figurĂ©es par Nabucco, I due Foscari ou Attila, les Ɠuvres de la maturitĂ© ne sont pas loin.

Macbeth, qui marque une vĂ©ritable rĂ©volution dans le thĂ©Ăątre de Verdi et l'opĂ©ra italien, est une Ɠuvre si importante et si novatrice que, vingt ans plus tard, Verdi la retouchera sans affecter la gĂ©niale « naĂŻvetĂ© » de la partition originelle[45]. Il y travaille pour la premiĂšre fois le drame pulsionnel des individus plutĂŽt que les sentiments collectifs. Verdi n’est dĂ©jĂ  plus dans les meilleurs termes avec Bartolomeo Merelli aussi le compositeur s’attache-t-il Ă  convaincre Alessandro Lanari, l’impresario du Teatro della Pergola afin de voir son opĂ©ra montĂ© Ă  Florence plutĂŽt que sur la scĂšne milanaise avec laquelle il ne veut plus avoir affaire. Le livret est confiĂ© Ă  Francesco Maria Piave et retravaillĂ© par Andrea Maffei.

Triomphe public pour la premiĂšre, le , rĂ©serve de la critique cependant qui reproche encore au compositeur la « facilitĂ© » de sa musique et de ne pas avoir suffisamment retranscrit la dimension shakespearienne. C’est donc plus le patriote portant, Ă  la veille des rĂ©volutions de 1848, les espoirs de libertĂ© du peuple italien qui est fĂȘtĂ© par les Florentins que le compositeur dont le caractĂšre novateur de l’Ɠuvre n’est pas encore nettement perçu.

L’Italian Opera House de Londres rebaptisĂ© Her Majesty's Theatre oĂč est crĂ©Ă© I masnadieri

Au mois de mai 1847, la partition des masnadieri, commencĂ©e avant celle de Macbeth sur le livret de Maffei, est enfin terminĂ©e. Verdi va peut-ĂȘtre enfin pouvoir rĂ©pondre Ă  la sollicitation de Benjamin Lumley qui lui rĂ©clame cette Ɠuvre depuis plus d’un an pour Her Majesty's Theatre. AprĂšs un intermĂšde parisien d’un mois, lors duquel il retrouve son amante et future compagne Giuseppina Strepponi installĂ©e dans la capitale française oĂč elle donne des cours de chant, le compositeur se rend, sans enthousiasme et pressĂ© d’en repartir, Ă  Londres oĂč l’opĂ©ra est crĂ©Ă© le . La passion sans borne des Londoniens pour le musicien fera passer au second plan les dĂ©fauts d’une Ɠuvre qui souffre de l’indigence de son livret, mais qui pour l’heure bĂ©nĂ©ficie des acclamations du public de la premiĂšre. Ni l’ovation dĂ©lirante[46] au compositeur adulĂ© plutĂŽt qu’à l’Ɠuvre, ni l’accueil triomphal rĂ©servĂ© Ă  Ernani et I due Foscari reprĂ©sentĂ©s Ă  Covent Garden ne le retiendront : cinq jours plus tard, il est de nouveau Ă  Paris. Il y restera sept mois.

À Paris, Verdi se risque pour la premiĂšre fois dans le genre du « grand opĂ©ra », en rĂ©crivant rapidement pour l’OpĂ©ra I Lombardi alla prima crociata jamais reprĂ©sentĂ©s en France. ChantĂ©e en français sur un livret d’Alphonse Royer et Gustave VaĂ«z l’Ɠuvre remaniĂ©e et rebaptisĂ©e JĂ©rusalem ne connaĂźtra qu’un demi-succĂšs. Cette fois c’est Ă  la mĂ©diocritĂ© des interprĂštes, chƓurs et orchestre compris, que Verdi attribuera la mauvaise rĂ©ception de son opĂ©ra[47], le , par le public de la salle de la rue Le Peletier.


C’est Ă  Paris que Verdi Ă©crit, en deux mois, l'inĂ©gale partition d'Il corsaro[48] pour la confier Ă  Muzio en fĂ©vrier 1848 Ă  l’attention de l’éditeur Francesco Lucca avec lequel un contrat avait Ă©tĂ© signĂ© en 1845, car Ricordi subissait Ă  l’époque le mĂȘme ostracisme que le directeur de la Scala de la part du maestro. La crĂ©ation en est rĂ©servĂ©e au Teatro Grande de Trieste oĂč l’Ɠuvre est donnĂ©e le en l’absence de Verdi alors occupĂ©, entre autres, Ă  l’écriture de La battaglia di Legnano.

En ce printemps 1848, c’est encore de Paris que Verdi suit les Ă©vĂ©nements qui mettent Ă  feu et Ă  sang Milan, Venise et toute la pĂ©ninsule et qui vont embraser l’Europe. Ses opĂ©ras Ă  la rĂ©sonance patriotique sont pour une bonne part Ă  l’origine de ce mouvement rĂ©volutionnaire : heureux Ă  Paris auprĂšs de Giuseppina Strepponi, mais attendu par ses amis qui ont fait le coup de feu contre l’occupant autrichien et par toute une nation dont il est devenu le chantre, le compositeur ne peut dĂ©cemment plus rester Ă  l’écart de cet Ă©vĂ©nement historique. Il arrive Ă  Milan le pour se rendre quelques jours plus tard Ă  Busseto puis Ă  Sant’Agata, oĂč il se rend acquĂ©reur d’une propriĂ©tĂ©, et pour reprendre, mi-mai, le chemin vers la France. Ce qui fait dire Ă  Pierre Milza :

« 
 il arrivait aprĂšs la bataille et il repartait avant que les soldats de Radetzky eussent rĂ©occupĂ© la ville[49]. »

pour ajouter aussitĂŽt :

« Simplement, Verdi n’avait ni l’étoffe d’un combattant ni la vanitĂ© de se prendre pour un hĂ©ros. Son combat pour la libertĂ© et pour la patrie italienne, il le menait sur la scĂšne. »

affirmant la sincĂ©ritĂ© du maestro qui ressort de la lettre du envoyĂ©e Ă  Piave. C’est donc Ă  nouveau de Paris que Verdi apprend l’arrestation de nombre de ses amis ou leur exil forcĂ© par la rĂ©pression autrichienne. Clara Maffei et Carlo Tenca sont maintenant des fuorusciti, des rĂ©fugiĂ©s politiques en Suisse.

L’étĂ© 1848 vĂ©cu Ă  Passy, dans une atmosphĂšre que l’on retrouvera dans le deuxiĂšme acte de La traviata, marque un tournant dans la vie de Verdi qui dĂ©cide de faire de Giuseppina Strepponi, alias « Peppina », sa compagne. En attendant l’écriture du livret de La battaglia di Legnano par Salvatore Cammarano, et pour rĂ©pondre Ă  la promesse faite Ă  Giuseppe Mazzini, il Ă©crit la musique de Suona la tromba (Sonne la trompette) sur un poĂšme de Goffredo Mameli qu’il envoie le au fondateur de la Giovine Italia avec ces mots dĂ©notant son engagement patriotique :

« Puisse cet hymne ĂȘtre bientĂŽt chantĂ© dans les plaines lombardes, au son du canon[50]. »

Proclamation de la république romaine en 1849, Piazza del Popolo

Pendant qu’il compose Ă  Paris son nouvel opĂ©ra sur un sujet historique tellement proche de la situation contemporaine : la lutte de la Ligue lombarde contre l’empereur germanique FrĂ©dĂ©ric Barberousse, se dĂ©roulent en Italie les Ă©vĂ©nements qui seront suivis d’un armistice qui ne fera pas rendre les armes aux rĂ©volutionnaires. Radetzky saisira l’occasion de la rupture de cette trĂȘve pour Ă©craser, le , l’armĂ©e piĂ©montaise et aprĂšs deux mois de lutte acharnĂ©e les Autrichiens finiront par venir Ă  bout, le , de la rĂ©sistance du royaume lombard-vĂ©nitien. De son cĂŽtĂ©, Louis NapolĂ©on fait reprendre Rome, le , par les troupes d’Oudinot pour permettre le retour de Pie IX dans les États de l'Église qu’il avait fuis : ce sera la fin de l’éphĂ©mĂšre rĂ©publique romaine.

Mais le , lors de la premiĂšre de La battaglia di Legnano au Teatro Argentina, Rome n’est pas encore perdue et c’est dans une atmosphĂšre de dĂ©lire quasiment hystĂ©rique que sont accueillis l’Ɠuvre et le maestro par un public mis en transe par les airs patriotiques. Verdi est vĂ©ritablement ce soir-lĂ  devenu aux yeux du peuple italien l’incarnation des idĂ©aux du Risorgimento et il en prend la pleine mesure.

Le retour à Busseto : Luisa Miller, Ɠuvre de transition

DĂšs le , Verdi est de nouveau Ă  Paris oĂč il retrouve Giuseppina Strepponi. Il a trente-cinq ans, il est amoureux, ce qui ne l’empĂȘche pas de rester un homme d’affaires intransigeant : estimant que les clauses n’en sont pas respectĂ©es par l’OpĂ©ra, il va mettre fin au contrat qui le lie Ă  l’établissement parisien. Il se prĂ©occupe aussi de la carriĂšre de ses Ɠuvres sur les scĂšnes du monde entier oĂč elles sont maintenant produites. Mais Ă©galement de l’écriture des prochaines : il lui faut en effet honorer le contrat en cours avec Naples. Salvatore Cammarano lui a envoyĂ© au mois de mai la trame du nouveau programme pour le Teatro San Carlo et il commence Ă  travailler sur le spartito[51] de ce qui deviendra, Ă  partir du drame de Friedrich von Schiller Kabale und Liebe, Luisa Miller.

Mais il a, certainement depuis mĂȘme avant le retour Ă  Paris, l’intention de s’installer en Italie oĂč il pourra mieux s’occuper de ses affaires, musicales comme fonciĂšres. L’intention prĂ©cisĂ©ment de s’installer avec Peppina au palazzo Cavalli qu’il a acquis l’annĂ©e prĂ©cĂ©dente. Le maestro et son amie quittent Passy pour Busseto en , non sans apprĂ©hension car ils allaient devoir faire face aux prĂ©jugĂ©s conformistes de la petite ville. Et de fait ils vont passer les mois d’étĂ© Ă  travailler sans contact avec la population bussĂ©tane pour en Ă©viter la malveillance qui ne manque pas de se faire jour. La partition du nouvel opĂ©ra est prĂȘte dĂšs la fin septembre et Verdi se rend Ă  Naples dĂ©but octobre pour un sĂ©jour de deux mois oĂč il va dĂ©couvrir la Campanie en compagnie de son beau-pĂšre Antonio Barezzi. Luisa Miller est donnĂ©e au San Carlo le : la premiĂšre est un peu tiĂšde, le public napolitain Ă©tant un peu dĂ©concertĂ© par la nouveautĂ© de l'ouvrage, mais dĂšs la seconde le succĂšs ne cessera de croĂźtre.

Au terme de ces « annĂ©es de galĂšre », Luisa Miller marque en effet un moment fondamental dans l’évolution stylistique de Verdi : sa pensĂ©e musicale se fait plus raffinĂ©e et sa dramaturgie s’oriente vers une recherche approfondie et subtile de la psychologie des personnages toujours plus liĂ©e Ă  la dimension bourgeoise et plus Ă©loignĂ©e des prĂ©occupations patriotiques exprimĂ©es Ă  grand renfort d’éclatantes manifestations collectives[52]. Mais ce qui occasionne le trouble du public napolitain se situe dans le continuum musical, et dans l’importance accordĂ©e au sens des mots plutĂŽt qu’à leur son. Verdi est ici en accord avec Richard Wagner quant au rapport nouveau entre le livret et la partition.

La commande suivante est un opĂ©ra pour Trieste. Verdi est tentĂ© par plusieurs propositions d’adaptations (Marion Delorme et Ruy Blas de Victor Hugo, La TempĂȘte et Hamlet de Shakespeare, CaĂŻn de Lord Byron, PhĂšdre de Racine, Atala de Chateaubriand). Il aimerait surtout se consacrer enfin au Re Lear qu’il porte depuis si longtemps en lui[53]. Face aux difficultĂ©s, il se rĂ©sout provisoirement Ă  Ă©crire la musique de Stiffelio sur l’adaptation par son ami Francesco Maria Piave d’une piĂšce d’Émile Souvestre et EugĂšne Bourgeois, drame bourgeois qui raconte l’histoire d’une Ă©pouse adultĂšre pardonnĂ©e par son pasteur de mari : l’opĂ©ra Ă©tait dĂ©jĂ  vendu par Ricordi au Teatro Grande. AprĂšs le passage hargneux des ciseaux de la censure, l’Ɠuvre est prĂ©sentĂ©e au public triestain le , dĂ©figurĂ©e, « chĂątrĂ©e » selon les propres termes de Verdi[54]. Stiffelio rencontre malgrĂ© cela un succĂšs qui le fait rĂ©clamer sur plusieurs scĂšnes dont la Scala. AprĂšs le dĂ©part de Bartolomeo Merelli, Verdi Ă©tait prĂȘt Ă  revenir sur la scĂšne milanaise, s’il n’y avait constatĂ© de nouvelles coupes Ă  Gerusalemme et aux Lombardi : la rĂ©conciliation entre Verdi et Milan n’était pas pour tout de suite[55].

Rigoletto, Il trovatore et La traviata : la trilogie populaire

C’est la rĂ©alisation de la pleine maturitĂ©, confirmĂ©e par les trois titres de la « trilogie populaire », un triptyque d’opĂ©ras aux sujets extrĂȘmement diffĂ©rents mais Ă©galement aimĂ©s du public : Rigoletto (La Fenice Venise, 1851), Il trovatore (Teatro Apollo Rome, 1853) et La traviata (La Fenice Venise, 1853), trois mĂ©lodrames destinĂ©s Ă  un succĂšs jamais dĂ©menti malgrĂ© les dĂ©buts difficiles de La traviata.

Le baryton italien Titta Ruffo dans le rĂŽle de Rigoletto

Verdi avait envisagĂ© dĂšs la fin 1849 d’écrire Ă  nouveau, pour la Fenice, sur une Ɠuvre de Victor Hugo. Refus de Cammarano qui redoute non sans raison la censure napolitaine : les ciseaux de la Monarchie de Juillet ont en effet interdit la production, sur les scĂšnes parisiennes, du Roi s’amuse qui dĂ©crit sans dĂ©tour la vie dissolue Ă  la cour du Roi de France, avec au centre le libertinage de François Ier. Le compositeur s’adresse donc une nouvelle fois Ă  Piave en le persuadant qu’il tient lĂ  « l’une des plus grandes crĂ©ations du thĂ©Ăątre moderne », ce qui en dit long sur l'implication affective du compositeur[56]. Croyant se jouer ainsi des censeurs vĂ©nitiens, Verdi change le titre initial pour La maledizione. Ceux-ci ne sont bien sĂ»r pas dupes et qualifient le livret de « rĂ©pugnante immoralitĂ© » et de « trivialitĂ© obscĂšne ». La crainte de voir sa saison ruinĂ©e, Verdi menaçant de ne pas composer sur un nouveau livret avant le Carnaval, conduit Carlo Marzari, le directeur de la Fenice Ă  intervenir auprĂšs du directeur central de l’ordre public Luigi Martello. Verdi accepte finalement le compromis proposĂ© de transfĂ©rer l’action Ă  la cour de Mantoue et de remplacer le roi de France par le duc et s’engage Ă  respecter « les exigences de la dĂ©cence en scĂšne ». Le titre de Rigoletto est enfin substituĂ© Ă  celui de La maledizione.

La partition terminĂ©e, Verdi se rend en fĂ©vrier Ă  Venise oĂč l’Ɠuvre est donnĂ©e le . Accueilli par les ovations du public, Rigoletto commence alors Ă  la Fenice une carriĂšre dont le succĂšs Ă©clatant sur toutes les scĂšnes internationales ne s’est jamais dĂ©menti. Au sortir de la reprĂ©sentation, La donna Ăš mobile, l’air du duc de Mantoue, est sur toutes les lĂšvres. La critique en revanche, qui qualifie l’Ɠuvre de « maudite » (L'Italia musicale), d’ « opĂ©ra le plus faible du signor Verdi » (le Times)[57] ne rĂ©alise pas que Verdi a prĂ©sentĂ© lĂ  une de ses Ɠuvres les plus accomplies.

Antonio García Gutiérrez, auteur d'El Trovador dont Verdi admire la force théùtrale

Au dĂ©but de 1850, peu aprĂšs Luisa Miller, Verdi avait demandĂ© Ă  Cammarano d’écrire un livret sur El Trovador (Le TrouvĂšre) du dramaturge espagnol Antonio GarcĂ­a GutiĂ©rrez dont il admire la force thĂ©Ăątrale. Mais pas plus Cammarano que la direction du San Carlo ne semblent convaincus de l’intĂ©rĂȘt de crĂ©er cet opĂ©ra qui ne manquerait pas d’attirer Ă  nouveau les foudres de la censure sur l’établissement napolitain. Verdi propose alors l’Ɠuvre Ă  Vincenzo Jacovacci, l’impresario du Teatro Apollo de Rome. La mort de Cammarano en interrompt l’écriture du livret. MalgrĂ© sa tristesse, Verdi est trop avancĂ© dans le projet pour y renoncer : il sollicite Leone Emanuele Bardare, jeune artiste parthĂ©nopĂ©en et ami de Cammarano pour terminer le texte.

La douleur occasionnĂ©e par la perte de sa mĂšre en , suivie par la disparition de Cammarano, auxquelles viennent s'ajouter des soucis financiers liĂ©s Ă  la crise que traverse le milieu du spectacle en ces temps rĂ©volutionnaires mais aussi la vie difficile au sein d’une population hostile qui n’accepte pas sa liaison « scandaleuse » avec la Strepponi, ne sont certainement pas Ă©trangers aux pĂ©nibles troubles gastriques (frĂ©quents chez lui) et Ă  une laryngite persistante dont souffre alors Verdi.

S’il est en mesure de faire face pendant l’écriture de son trovatore, tel n’est pas le cas lorsqu’il doit participer aux rĂ©pĂ©titions Ă  Rome au dĂ©but de l’annĂ©e : l’Ɠuvre est particuliĂšrement difficile et exigeante pour les voix, et la mĂ©diocritĂ© des chanteurs mis Ă  sa disposition par le thĂ©Ăątre ne peuvent que faire sombrer Verdi dans une terrible angoisse. Le compositeur demande ici aux voix d’aller Ă  la rencontre de la particularitĂ© des personnages ce qui reprĂ©sente des performances inhabituelles et qui sera Ă  la source, par exemple, de ce que l’on nommera par la suite le « baryton verdien ». InquiĂ©tude qui se rĂ©vĂ©lera finalement infondĂ©e puisque, le , le public du Teatro Apollo ovationne une nouvelle fois le maestro et son Ɠuvre. L'action en est complexe, mais, comme l'a si bien pressenti G. B. Shaw[58], l'Ɠuvre, qu'irriguent « une puissance tragique, une mĂ©lancolie poignante, une vigueur impĂ©tueuse et un pathĂ©tisme Ă  la fois intense et doux »[59], s'adresse « aux instincts et aux sens » et ne peut ĂȘtre comprise que comme un long rĂȘve Ă©veillĂ©, avec ses incohĂ©rences apparentes et ses fulgurations d'outre-monde. Dans toute la pĂ©ninsule, en Angleterre, en France, en Russie, la carriĂšre du trovatore est partout triomphale. Peut-ĂȘtre est-ce lĂ  l’Ɠuvre d’un gĂ©nie dont les angoisses ont Ă©tĂ© adoucies par la tendresse d’une traviata aimante ?

Affiche pour la premiĂšre de La traviata Ă  La Fenice

Lors d’un nouveau sĂ©jour Ă  Paris, Verdi assiste avec Peppina au dĂ©but de 1852 Ă  une reprĂ©sentation de La Dame aux camĂ©lias d’Alexandre Dumas fils. Pour le compositeur, le parallĂšle est inĂ©vitable entre la vie de « dĂ©voyĂ©e » de l’hĂ©roĂŻne Marguerite Gautier et celle de Giuseppina qui, dans la pĂ©riode prĂ©cĂ©dant sa rencontre avec Verdi avait vĂ©cu comme une « traviata ». La comparaison entre le pĂšre d'Armand Duval (Germont dans l'opĂ©ra) et Barezzi, son pĂšre adoptif, ne sera pas moins perceptible dans l'opĂ©ra. Lorsqu'en octobre de la mĂȘme annĂ©e Carlo Marzari, le directeur de la Fenice, presse le maestro de respecter le contrat signĂ© au printemps, Verdi se dĂ©cide pour cette adaptation Ă  laquelle il travaille avec Piave.

Il considĂšre que le sujet est parfaitement situĂ© dans le Paris du Second Empire et n’admet pas la dĂ©cision de la direction de la Fenice de dĂ©caler l’action et de la faire reprĂ©senter en costumes du XVIIe siĂšcle. Verdi sent d’autant plus le fiasco arriver qu’il ne rĂ©ussit pas Ă  avoir la soprano qu’il souhaite pour le rĂŽle de Violetta : « une personnalitĂ© Ă©lĂ©gante, jeune, capable de chanter avec passion »[60]. Le , si la musique de Verdi est acclamĂ©e dans le prologue, il n’en va pas de mĂȘme pour la suite et aprĂšs rires et sifflets, la reprĂ©sentation se termine sous les huĂ©es du public. Les puritains ont rĂ©ussi Ă  dĂ©voyer la puretĂ© de ce drame intimiste, Ă  l'Ă©criture raffinĂ©e, oĂč le pessimisme verdien face au monde social s'accroĂźt singuliĂšrement[61].

Ce n’est que lors de la reprise en 1854 que La traviata triomphe Ă  Venise. Depuis lors ce succĂšs ne s’est jamais dĂ©menti. Pourtant, la satisfaction de Verdi ne sera jamais complĂšte : l’opĂ©ra ne sera reprĂ©sentĂ© dans une mise en scĂšne contemporaine qu’en 1906, cinq ans aprĂšs sa mort.

L’installation Ă  Sant’Agata : des VĂȘpres siciliennes Ă  Un ballo in maschera
La Villa Verdi du domaine de Sant'Agata.

Verdi a installĂ© ses parents sur le domaine dont il avait fait l’acquisition, Ă  son retour de Paris en 1848, Ă  Sant’Agata, le hameau des origines de sa famille paternelle. Or, Carlo Verdi n’admet pas la cohabitation hors mariage, considĂ©rĂ©e en soi comme scandaleuse au XIXe siĂšcle, de son fils avec une femme, au passĂ© de traviata qui plus est. Son attitude hostile achĂšve de dĂ©grader les rapports qui n’étaient dĂ©jĂ  pas des meilleurs entre le pĂšre et le fils, et Verdi se dĂ©cide Ă  demander Ă  ses parents de quitter son toit.

Au printemps de 1851, la vie Ă  Busseto devenant par trop Ă©touffante, le compositeur s’installe Ă  Sant’Agata avec Giuseppina (qu’il n’épousera qu’en 1859). La disparition de Luigia dans cette circonstance est alors une source de remords pour Verdi, ajoutant Ă  la dĂ©chirure de la perte de cette mĂšre aimante. La tendresse de Peppina et la prĂ©sence affectueuse de ses deux amis, Emanuele Muzio son ancien Ă©lĂšve et le librettiste Francesco Maria Piave, se rĂ©vĂ©leront nĂ©cessaires pour lui permettre de sortir de son dĂ©sespoir et de poursuivre la composition des deux derniers opĂ©ras de la « trilogie », les deux premiĂšres Ɠuvres composĂ©es Ă  Sant’Agata.

À son retour de Venise au printemps 1853, Verdi se penche Ă  nouveau sur le projet du Re Lear. AprĂšs avoir rĂ©cupĂ©rĂ©, par l’entremise de son ami napolitain Cesare De Sanctis, le synopsis qu’il avait envoyĂ© Ă  Salvatore Cammarano en 1850, il le propose Ă  Antonio Somma, un dramaturge dont il a fait la connaissance Ă  Venise. MalgrĂ© un livret bien avancĂ©, encore une fois, le maestro laisse l’ouvrage de cĂŽtĂ© pour se consacrer Ă  une autre commande.

La « grande boutique », comme l’appelle Verdi a, selon lui, « assassinĂ© » Luisa Miller et JĂ©rusalem[62]. Or, l’OpĂ©ra du Paris haussmannien est avec La Scala le temple incontournable de l’art lyrique et Nestor Roqueplan a, en 1852, passĂ© commande Ă  Verdi d’un nouvel ouvrage, qui doit ĂȘtre obligatoirement Ă©crit sur un livret produit par EugĂšne Scribe, le dramaturge attachĂ© au thĂ©Ăątre, et livrĂ© pour ĂȘtre reprĂ©sentĂ© Ă  l’occasion de l’Exposition universelle de 1855. Renonçant Ă  cause d’une Ă©pidĂ©mie de cholĂ©ra Ă  un sĂ©jour hivernal Ă  Naples qui devait lui permettre d’échapper Ă  la morositĂ© d’un hiver en tĂȘte Ă  tĂȘte avec Peppina, qui s’adapte difficilement Ă  Sant’Agata et au climat humide de la Bassa padana, Verdi dĂ©cide de poursuivre dĂšs le mois d’octobre 1853 la composition des VĂȘpres siciliennes Ă  Paris, pour le plus grand bonheur de la Strepponi.

Mais Verdi n’aime pas le livret et il se saisit du moindre prĂ©texte pour essayer de se dĂ©gager de ce contrat : la fugue sentimentale de la soprano Sophie Cruvelli, la mauvaise production de « l’usine Ă  livrets » de Scribe, mais surtout, les « graves offenses Ă  l’égard du peuple italien »[63] qui ressortent du texte relatant le massacre Ă  Palerme des troupes d’occupation angevines par les insurgĂ©s siciliens. François-Louis Crosnier qui a succĂ©dĂ© Ă  Nestor Roqueplan Ă  la direction de l’OpĂ©ra doit dĂ©ployer des trĂ©sors de diplomatie pour convaincre Verdi que le contexte international des relations nouvelles entre la France et le royaume de PiĂ©mont-Sardaigne et de la guerre de CrimĂ©e dans laquelle les deux nations (rejointes par l’Angleterre) sont engagĂ©es cĂŽte Ă  cĂŽte exclut le risque d’une manifestation d’italophobie.

L’opĂ©ra est finalement crĂ©Ă© le rue Le Peletier : le prestige de l’Exposition universelle est sauf au grand soulagement du gouvernement impĂ©rial. La rĂ©ception tant par le public que par la critique est plutĂŽt rĂ©servĂ©e. Seul Hector Berlioz, si rarement tendre avec ses contemporains, dans La France musicale voit dans Les VĂȘpres « une empreinte de grandeur, une sorte de majestĂ© souveraine »[64].

Possible reprĂ©sentation de Simone Boccanegra, fresque du Palazzo San Giorgio (GĂȘnes)

Verdi et Peppina ne sont pas pressĂ©s de quitter Paris oĂč ils resteront encore six mois avec un intermĂšde thermal Ă  Enghien-les-Bains. Ils ne regagnent Sant’Agata que pour y passer l’hiver et le printemps 1855-1856. MalgrĂ© des conditions de vie nettement plus faciles (le maestro n’a plus besoin de courir le cachet; Giuseppina est maintenant acceptĂ©e par les notables de la rĂ©gion comme la moglie (l'Ă©pouse) du compositeur; Verdi est devenu le propriĂ©taire foncier le plus important de Sant’Agata avec l’acquisition de huit fermes; il est fait chevalier de l’ordre des Saints-Maurice-et-Lazare par Victor-Emmanuel), l’état de santĂ© du musicien est encore mauvais. Ses maux d’estomac sont sans doute Ă  mettre sur le compte de l’obligation de l’écriture quasi simultanĂ©e de deux autres opĂ©ras qui devaient ĂȘtre produits en mars et en aoĂ»t 1857 mais aussi des prĂ©occupations liĂ©es Ă  la surveillance de son patrimoine musical.

Retour Ă  Paris au milieu de l’étĂ©, nouvelle cure Ă  Enghien, sĂ©jour Ă  la rĂ©sidence impĂ©riale de CompiĂšgne Ă  l’invitation de NapolĂ©on III, nouveau contrat avec « la grande boutique ». Il s’agit cette fois d’adapter pour la scĂšne parisienne Il trovatore qui sera crĂ©Ă© Ă  l’OpĂ©ra le sous le titre du TrouvĂšre et obtiendra un formidable succĂšs, tant public que critique[65]. Il s’agit aussi de protĂ©ger ses Ɠuvres contre les plagiats et autres pirateries dont elles faisaient l’objet et notamment de rĂ©gler le contentieux qui opposait Verdi Ă  Toribio Calzado, le directeur du thĂ©Ăątre des Italiens. S’il obtient gain de cause pour La traviata et Rigoletto, il est dĂ©boutĂ© pour Il trovatore, l’impresario ayant utilisĂ© non la partition de Ricordi mais des copies rĂ©alisĂ©es en Espagne. Le , la soprano Marietta Piccolomini est Ă  Paris et chante pour la premiĂšre reprĂ©sentation de l'opĂ©ra de Verdi, La Traviata, au ThĂ©Ăątre italien de Paris. L'impĂ©ratrice EugĂ©nie, n'ayant pu assister Ă  ce spectacle saluĂ© par les critiques et le public, ordonna Ă  Toribio Calzado, directeur du thĂ©Ăątre italien, de donner une reprĂ©sentation supplĂ©mentaire pour elle et son mari, NapolĂ©on III[66].

Mais l’heure est Ă  la crĂ©ation de Simon Boccanegra. Mi-, Verdi est Ă  Venise pour les rĂ©pĂ©titions de son nouvel opĂ©ra. Le la reprĂ©sentation Ă  la Fenice est catastrophique :

« J’ai eu Ă  Venise un fiasco aussi grand que celui de La traviata. Je croyais avoir fait quelque chose de passable, mais il semble que je me sois trompĂ©[67]. »

Pourtant l’argument est politique, la musique est belle et les interprĂštes, chanteurs, chƓurs et orchestre furent Ă  la hauteur. Mais nous sommes Ă  Venise et les VĂ©nitiens sont historiquement en lutte contre les GĂ©nois dans la conquĂȘte de la suprĂ©matie sur le commerce maritime : Venise boude tout simplement le sujet qui Ă©voque la conjuration de Fiesco contre Simon Boccanegra, le premier Doge de GĂȘnes. Le succĂšs rencontrĂ© par Simon dans les autres villes, notamment Ă  Reggio d'Émilie confirme si besoin Ă©tait que la composition de Verdi n’est effectivement pas en cause dans ce qui ressemble plus Ă  une cabale qu’à une critique musicalement justifiĂ©e. De fait, dans sa rĂ©vision de 1881, l'ouvrage nous paraĂźt aujourd’hui l'un des plus grands et des plus profonds de Verdi[68].

Verdi ne porte pas dans son cƓur les frĂšres Ercole et Luciano Marzi, impresarios notamment de la Fenice de Venise, du Teatro Grande de Trieste et du thĂ©Ăątre de Reggio d'Émilie. Mais un contrat est un contrat et les directeurs du Teatro Nuovo Comunale de Rimini mettent Ă  la disposition du maestro les chanteurs qu’il souhaite et, surtout, la direction de l’orchestre est confiĂ©e Ă  Angelo Mariani, l’un des meilleurs chefs italiens de l’époque — qui deviendra l’un des plus grands amis de Verdi, avant que les deux hommes ne se brouillent.

Le compositeur a donc acceptĂ© dĂšs la fin de 1855 de reprendre son Stiffelio et, avec l’aide du fidĂšle Piave, il s’attelle au remaniement du livret qui passera ainsi plus facilement l’épreuve de la censure de cette ville sous autoritĂ© pontificale et s’adaptera mieux au goĂ»t du public. Un important travail de rĂ©Ă©criture musicale avec notamment l’adjonction d’un quatriĂšme acte finira de transformer Stiffelio en un Aroldo plutĂŽt dĂ©cevant.

AprĂšs une annĂ©e de labeur interrompu par Boccanegra et Le TrouvĂšre parisien, les rĂ©pĂ©titions peuvent enfin dĂ©buter dont Mariani se partage la direction avec Verdi pendant que celui-ci fait travailler les chanteurs. Le , le Teatro Nuovo Comunale de Rimini est inaugurĂ© avec Aroldo. L’accueil est triomphal : applaudissements aprĂšs chaque numĂ©ro, vingt-sept rappels pour le compositeur et son librettiste, raccompagnement de Verdi Ă  son hĂŽtel Ă  la lueur des flambeaux[69]. Reggio d'Émilie, Rimini, le « cigno di Busseto » est prophĂšte en son pays.

L’assassinat de Gustave III de SuĂšde lors d’un bal masquĂ© avait notamment inspirĂ© Scribe et Mercadante avant d’ĂȘtre choisi par Verdi pour sujet initial de son nouvel opĂ©ra

« Je pose en outre la question suivante ; les éléments suivants de mon drame subsistent-ils, oui ou non, dans la version censurée :
Le titre ? Non
Le poĂšte ? Non
La période ? Non
Le cadre ? Non
Les personnages ? Non
Les situations ? Non
Le tirage au sort ? Non
Le bal ? Non
Un musicien qui se respecte et qui respecte son Art ne peut ni ne doit se dĂ©shonorer en acceptant [
] de telles monstruositĂ©s qui violent les principes les plus fondamentaux de l’art dramatique et avilissent la conscience de l’artiste[70] »

L’opĂ©ra composĂ© sur le thĂšme de l’assassinat de Gustave III de SuĂšde lors d’un bal masquĂ©, qui avait dĂ©jĂ  inspirĂ© le drame Ă©crit par EugĂšne Scribe pour l’opĂ©ra de Daniel-François-Esprit Auber, choisi par Verdi pour honorer le contrat conclu avec l’administration du Teatro San Carlo en 1856 et devenu sous la plume d’Antonio Somma Una vendetta in domino, ne sera pas montĂ© Ă  Naples.

AprĂšs avoir rejetĂ© l’idĂ©e d’une adaptation de Ruy Blas, le premier choix de Verdi s’était une nouvelle fois portĂ© sur le Re Lear dont l’idĂ©e ne le quittait pas. La direction du San Carlo n’étant pas en mesure de fournir les seuls chanteurs susceptibles pour Verdi de tenir les rĂŽles de Lear et Cordelia, le compositeur remplace finalement cette proposition par celle d’Un ballo in maschera. Alors qu’il est Ă  Naples en janvier 1858, prĂȘt Ă  commencer les rĂ©pĂ©titions, Verdi connaĂźt, selon ses propres termes[71], une vĂ©ritable descente aux enfers : l’imposition par la censure bourbonienne d’un livret complĂštement mutilĂ©, plus de trois mois aprĂšs avoir proposĂ© son projet dĂ©jĂ  modifiĂ© pour complaire Ă  l’administration. Vendetta in domino, rendu mĂ©connaissable sous l’effet des coups de ciseaux rageurs d’un fonctionnaire zĂ©lĂ©, est devenu Adeglia degli Ademari. Rien ne subsiste, non seulement du titre, mais de la pĂ©riode, des personnages, des situations. Verdi demande aux juges d’apprĂ©cier la mutilation rendant le contrat caduc et obtient gain de cause : il peut reprendre son Ɠuvre ; il devra en compensation accepter de monter Simon Boccanegra Ă  l’automne pour la scĂšne napolitaine. La reprĂ©sentation de Simon donnĂ©e en novembre 1858 est un triomphe : belle revanche pour Verdi.

Entre-temps, le maestro est entrĂ© en contact avec Vincenzo Jacovacci, l’impresario romain ravi de voir une nouvelle Ɠuvre de Verdi Ă  l’affiche du Teatro Apollo. RetournĂ© Ă  Sant’Agata, le compositeur travaille avec Somma Ă  la rĂ©vision du livret dans le sens souhaitĂ© par les censeurs de l’administration pontificale. L’action de Vendetta in domino, qui devient finalement Un ballo in maschera, se trouve transposĂ©e Ă  Boston et Gustave III est remplacĂ© par le comte de Warwick. Les exigences sont moindres et ne portent que sur une soixantaine de vers. Le l’opĂ©ra — le plus mozartien de Verdi, qui marque une nouvelle Ă©tape dans sa conquĂȘte de la « fusion des genres » — est donnĂ© Ă  guichets fermĂ©s et obtient les acclamations dĂ©lirantes du public. Les places des reprĂ©sentations suivantes atteignent des prix faramineux. Tous les soirs, Verdi est rappelĂ© longuement aux cris de :

« Viva V.E.R.D.I[72].! »

Ce rappel n'était pas qu'un hommage à l'auteur : il constituait aussi, pour un peuple qui ne pouvait pas par des voies officielles et ouvertes clamer son patriotisme, l'occasion d'exprimer un souhait politique : « Victor-Emmanuel Roi d'Italie ».

La députation à Turin, La forza del destino à Saint-Petersbourg et l'Inno delle nazioni à Londres

« J'ai adorĂ© cet art, et je l'adore toujours ; quand tout seul, je me dĂ©bats avec mes notes, mon cƓur bat, les larmes me coulent des yeux, mes Ă©motions et mes joies passent toute description[73]. »

Cet aveu Ă  Francesco Maria Piave survient Ă  un moment oĂč, paradoxalement, Verdi semble songer Ă  abandonner la composition. Il vient de rĂ©gulariser sa liaison avec Giuseppina [74]. Peut-ĂȘtre parce que les fonctions officielles qui l'attendent nĂ©cessitent cette aura de respectabilitĂ©. Pendant les deux annĂ©es qui suivent la crĂ©ation du Ballo in maschera, les prĂ©occupations du Bussetan ne sont pas musicales. En cette pĂ©riode oĂč la deuxiĂšme guerre d'indĂ©pendance va conduire Ă  l'aboutissement du processus d'unification, Verdi va accepter la charge de reprĂ©senter ses concitoyens Ă  l'assemblĂ©e des provinces de Parme puis, plus sur l'insistance de Camillo Cavour [75] que par rĂ©elle conviction, la dĂ©putation au Parlement de Turin. Pas plus la demande de Vincenzo Jacovacci d'un nouvel opĂ©ra pour Rome (« La boutique est fermĂ©e » et il n'a « aucun dĂ©sir de la rouvrir ») que les sollicitations qu'il reçoit pour composer alors un hymne Ă  la nation, dont l'unitĂ© n'est pas encore entiĂšrement rĂ©alisĂ©e, ne l'amĂšnent Ă  reprendre sa plume. À cĂŽtĂ© de la politique, une autre de ses prĂ©occupations, l'embellissement de la villa de Sant'Agata, dont le coĂ»t des travaux se rajoute aux charges de son mandat, est peut-ĂȘtre ce qui le dĂ©cide finalement Ă  accepter une nouvelle proposition.

Elle Ă©mane cette fois du thĂ©Ăątre impĂ©rial de Saint-PĂ©tersbourg. Et c'est une Ɠuvre de l'espagnol Ángel de Saavedra, Don Alvaro o la Fuerza de sino (« Don Alvaro ou la force du destin »), qui est choisie dĂšs le mois de juin 1860 par le maestro. L'adaptation en est confiĂ©e une fois encore Ă  son ami Piave. Le , Verdi et Peppina se rendent dans la capitale de l'Empire russe oĂč la fastueuse architecture italianisante de Rastrelli et le chauffage admirable des palais cachent aux yeux de Verdi, trop absorbĂ© par son opĂ©ra, la condition misĂ©rable des classes ouvriĂšres, qui n'Ă©chappe cependant pas Ă  Peppina, choquĂ©e par la situation de ces populations Ă  peine sorties du servage. À l'inverse de Giovanni Paisiello ou de Domenico Cimarosa qui, comme tant d'autres artistes italiens, l'y ont prĂ©cĂ©dĂ© mais qui, en qualitĂ© de maĂźtre de chapelle de la Grande Catherine, occupaient une position subalterne, Verdi, aurĂ©olĂ© de sa gloire et de sa qualitĂ© de reprĂ©sentant de la nation italienne, est traitĂ© en ambassadeur.

AprĂšs plusieurs semaines de rĂ©pĂ©titions, Emma La Grua, la soprano choisie pour le rĂŽle de Leonora tombe malade et Verdi demande l'annulation du contrat dont la qualitĂ© des chanteurs est l'un des Ă©lĂ©ments essentiels. Finalement, la crĂ©ation de l'opĂ©ra est simplement reportĂ©e Ă  la saison suivante. La premiĂšre de La forza del destino est donnĂ©e le avec Caroline Barbot, trĂšs applaudie, comme l'ensemble des chanteurs. Verdi, sans recevoir un accueil aussi dĂ©lirant que ceux auxquels il est maintenant habituĂ©, est ovationnĂ©. Pourtant la critique se montre rĂ©servĂ©e, qui estime que le maestro a « fait du Meyerbeer » en voulant se rapprocher du style « grand opĂ©ra ». Qu'importe : les rĂ©ceptions dans les palais de l'aristocratie pĂ©tersbourgeoise sont agrĂ©ables et la somme encaissĂ©e considĂ©rable. À l'issue de la quatriĂšme reprĂ©sentation, Verdi est reçu dans la loge du couple impĂ©rial. Il a un long entretien avec Alexandre II qui le dĂ©core, quelques jours plus tard, de l'ordre de Saint-Stanislas[76]. Verdi quitte Saint-PĂ©tersbourg riche d'une Ɠuvre pleine d'innovations[77] et d'une nouvelle consĂ©cration.

Entre les deux sĂ©jours Ă  Saint-PĂ©tersbourg, Verdi, alors Ă  Paris, compose la cantate qui lui est commandĂ©e pour l'Exposition universelle de Londres. C'est l'occasion de sa premiĂšre rencontre avec un jeune poĂšte de vingt ans, Arrigo Boito, qui lui est envoyĂ© par Clara Maffei. Fort de sa recommandation et dĂ©jĂ  assurĂ© d'une certaine notoriĂ©tĂ© dans le domaine musical et littĂ©raire (il est notamment l'auteur d'une cantate, Le sorelle d'Italia), il se voit chargĂ© par Verdi de l'Ă©criture du texte de l'Inno delle nazioni. En raison des obstacles crĂ©Ă©s par Michele Costa, le directeur napolitain de Covent Garden, prĂ©textant un soi-disant retard dans la livraison de l'Ɠuvre et un non-respect de la forme exigĂ©e (exclusivement instrumentale), l'hymne n'est pas jouĂ© lors de l'inauguration de l'Exposition. Le la cantate est donnĂ©e au Her Majesty's Theatre avec 260 choristes, la soprano Therese Tietjens et sous la direction de Luigi Arditi. Verdi tient sa revanche, acclamĂ© par le public outrĂ© de l'affront infligĂ© par le ComitĂ© au maestro pour lequel il s'agissait lĂ  d'un vĂ©ritable outrage Ă  la nation italienne. Plus qu'une revanche, puisque cet esclandre a procurĂ© Ă  sa cantate une publicitĂ© inespĂ©rĂ©e et incomparable laissant dans l'ombre les Ɠuvres prĂ©sentĂ©es dans le cadre de l'exposition.

Les reprises pour Paris : les VĂȘpres, Rigoletto, Violetta, Macbeth
Le palais de l'Escurial en 1850

À leur retour de Saint-PĂ©tersbourg, les Verdi se rendent Ă  Paris oĂč ils passent NoĂ«l et le Nouvel An avant de gagner Madrid pour les reprĂ©sentations en fĂ©vrier 1863 de la forza del destino au Teatro Real. En Espagne, Verdi dĂ©couvre grandeur nature les dĂ©cors de ses prĂ©cĂ©dents opĂ©ras et le « morceau de marbre » du palais de l'Escurial qui sera le cadre de sa prochaine Ɠuvre mais le maestro ne le sait pas encore. Pour l'heure Verdi rĂšgle ses comptes avec la « grande boutique » qu'il quitte en claquant la porte, jurant de n'y plus remettre les pieds, dĂ©savouĂ© par la direction de l'OpĂ©ra lors d'un accrochage avec les musiciens de l'orchestre pendant une rĂ©pĂ©tition de la reprise, en juin 1863, des VĂȘpres siciliennes[78]. Juillet voit le couple Verdi reprendre possession du domaine de Sant'Agata.

Durant les dix années qui suivent, en dehors des deux seules créations de Don Carlos et d'Aida, Verdi se consacre à son mandat de député au Parlement de Turin auquel il mettra fin en août 1865 et, essentiellement, à la valorisation de ses deux patrimoines, foncier et musical. Les revenus qu'ils lui procurent, s'ils nécessitent d'incessants et rigoureux contrÎles, lui permettent néanmoins de résister aux sollicitations qui affluent de toutes parts, y compris dans le domaine politique :

« Sachez que pendant plusieurs jours je me suis trouvĂ© pĂȘle-mĂȘle avec des municipalitĂ©s, des congrĂšs, des monuments, des dĂ©putations, des sociĂ©tĂ©s de musique de chambre, des hymnes aux prĂȘtres, aux moines, aux saints archanges, etc[79]. »

Ă©crit-il le Ă  sa grande amie Clara Maffei.

L'Opéra Le Peletier, ancienne salle de l'Opéra de Paris, vers 1821

Le coup de sang qui l'a Ă©loignĂ© de l'OpĂ©ra ne l'empĂȘche cependant pas d'ĂȘtre reconnu Ă  Paris oĂč il est Ă©lu Ă  l'AcadĂ©mie des Beaux-Arts au fauteuil de Giacomo Meyerbeer et oĂč LĂ©on Carvalho, le directeur du ThĂ©Ăątre Lyrique, monte Rigoletto et Violetta, la version française de La traviata. Le triomphe obtenu amĂšne LĂ©on Escudier et Carvalho Ă  proposer Ă  Verdi de remanier son Macbeth pour le public parisien. Le livret est traduit par Charles Nuitter et Alexandre Beaumont sous le contrĂŽle de Francesco Maria Piave pendant que le maestro apporte des modifications importantes mais non essentielles Ă  la partition. La premiĂšre est donnĂ©e le mais l'opĂ©ra est rapidement retirĂ© de l'affiche : la critique reproche Ă  Verdi de « ne pas connaĂźtre Shakespeare ». Verdi, qui se targue de possĂ©der son auteur favori sur le bout des doigts, et mieux sans doute que nombre de lettrĂ©s parisiens, le prend Ă©videmment trĂšs mal.

La carriĂšre d'un compositeur passe inĂ©vitablement par l'OpĂ©ra et Verdi le sait bien qui a bien pris garde de vĂ©ritablement couper les ponts avec la « grande boutique ». Aussi, lorsqu'Émile Perrin lui propose un nouveau contrat, le compositeur est tout Ă  fait prĂȘt Ă  occuper la place laissĂ©e vide par la mort de Meyerbeer et par le rejet de Richard Wagner dont le TannhaĂŒser a Ă©tĂ© sifflĂ© par le public parisien. Les Verdi se rendent Ă  nouveau en Ă  Paris oĂč le compositeur commence Ă  Ă©crire la nouvelle Ɠuvre, qui n'est pas terminĂ©e lorsqu'il reçoit de ses amis patriotes l'information de l'insurrection qui allait aboutir Ă  la libĂ©ration de Venise de l'occupant autrichien. Retour Ă  Sant'Agata au printemps 1866 oĂč le maestro joue Ă  nouveau le rĂŽle de composition qui fut le sien sept ans auparavant. Tout en affirmant ses convictions patriotiques, il se dĂ©sole de n'avoir la force de prendre les armes quand il est capable de chasser des heures durant. Il Ă©crit encore Ă  la comtesse Maffei :

Le Palazzo Sauli Pallavicino, rĂ©sidence des Verdi Ă  GĂȘnes entre 1867 et 1874

« La seule idée que les Autrichiens pourraient venir ici me ferait courir à des milliers de kilomÚtres sans reprendre mon souffle, pour ne pas voir leurs sales gueules. »

Bien sĂ»r, Verdi ne manque ni de rĂ©sistance ni de courage et seul, comme le rappelle Pierre Milza, « le sens aigu qu'il a du ridicule le fait repousser l'image du soldat d'opĂ©rette, du faux hĂ©ros, qui ne manquerait pas d'ĂȘtre accolĂ© Ă  sa personne s'il s'avisait de revĂȘtir l'uniforme »[80]. Avant de rejoindre Paris pour la crĂ©ation de Don Carlos, il s'installe avec Peppina et avec l'aide d'Angelo Mariani au Palazzo Sauli Pallavicino de GĂȘnes qui deviendra sa rĂ©sidence hivernale jusqu'Ă  son installation, aprĂšs la mort de Mariani, dans la Villa del Principe. C'est lĂ  qu'il apprend la cession de la VĂ©nĂ©tie par l'Autriche Ă  la France, ignorant encore l'existence des tractations par lesquelles elle serait finalement cĂ©dĂ©e Ă  l'Italie enfin unie.

Don Carlos pour l'Opéra

Parmi les sujets proposĂ©s par Émile Perrin, Verdi, aprĂšs avoir repoussĂ© l'idĂ©e se rĂ©vĂ©lant une nouvelle fois irrĂ©alisable de crĂ©er son Re Lear, avait retenu le drame de Schiller, Don Carlos. La mise en musique du livret en français tirĂ©, d'abord par Joseph MĂ©ry puis, Ă  sa mort, par Camille du Locle de l'Ɠuvre du poĂšte allemand, avait Ă©tĂ© laborieuse, tant en raison des difficultĂ©s liĂ©es Ă  la langue que du changement de librettiste, mais aussi Ă  cause des exigences de la « grande boutique », inconcevables pour Verdi qui devait malgrĂ© tout s'y plier.

AprÚs une cure en août à Cauterets, durant laquelle le compositeur écrit le cinquiÚme acte, les époux Verdi retrouvent enfin Paris[81]. Les répétitions débutent en septembre mais s'éternisent et se compliquent au point que lorsque Giuseppe apprend la mort, le , de son pÚre Carlo, il ne peut s'absenter pour se rendre à Busseto et doit confier l'organisation des obsÚques à son ami Carrara. Le rapport difficile pÚre-fils que l'on avait déjà pu voir évoqué dans La traviata (Germont/Alfredo) prend dans l'opposition Philippe II/Carlos une signification bouleversante avec la survenance de la mort du pÚre[82]. Pour le fils, « cette année est aussi maudite que 1840 »[83].

La premiĂšre est donnĂ©e le salle Le Peletier en prĂ©sence du couple impĂ©rial et de tout l'establishment. RĂ©action mitigĂ©e, tant du public que de la critique : applaudissements polis, reproches de passĂ©isme comme de novation inaboutie. Jusqu'Ă  Georges Bizet de taxer Ă©trangement Verdi d'avoir voulu « faire son Wagner » quand le maestro ne connaĂźt tout juste de son concurrent allemand que l'ouverture de TannhaĂŒser. ThĂ©ophile Gautier est alors l'une des rares personnes Ă  comprendre la grandeur de Don Carlos du « maĂźtre de Parme » mĂȘme s'il se trompe en parlant de « conversion Ă  la musique moderne »[84]. L'Ɠuvre reste malgrĂ© tout plusieurs mois Ă  l'affiche de l'OpĂ©ra ou elle finit par rencontrer un plus grand succĂšs.

Le c'est au tour d'Antonio Barezzi de disparaßtre, laissant Giuseppe encore plus désespéré par la mort de ce deuxiÚme pÚre. Du fond de sa dépression, Verdi laisse Angelo Mariani s'occuper de monter Don Carlos pour la scÚne italienne. Le Don Carlo (titre adopté pour la péninsule) triomphe sur la scÚne du Teatro comunale di Bologna avec une Teresa Stolz au faßte de sa gloire et Mariani, le plus grand des chefs verdiens, à la baguette.

Le requiem pour Rossini et le retour Ă  la scĂšne milanaise

Années noires pour Verdi que ces années 1867 à 1869 qui voient son ami Francesco Maria Piave paralysé à la suite d'une attaque et ses relations avec Mariani assombries par la suspicion du maestro pour ce fidÚle compagnon. C'est tout d'abord pour une sombre affaire de décoration refusée par l'un et acceptée par l'autre que leurs rapports se dégradent. Un imbroglio autour de la messe écrite par un collectif des plus grands compositeurs en hommage à Gioachino Rossini qui vient de mourir, le , continue d'attiser la fureur de Verdi contre le pauvre Mariani totalement étranger à l'échec qui lui est reproché. Le compositeur le rend responsable du refus par l'impresario du Teatro comunale di Bologna, Luigi Scalaberni, de donner le Requiem qu'il proposait alors que celui qu'il ne considÚre déjà plus comme son ami s'était vu confier l'organisation de la cérémonie de souvenir en l'honneur de Rossini.

Est-ce la déception affichée par rapport au comportement de Mariani ou les tensions qui traversent son couple avec Peppina qui amÚnent Verdi à renouer avec la scÚne milanaise malgré sa promesse de n'y jamais remettre les pieds ? Toujours est-il qu'il y retrouve Teresa Stolz, alors la maßtresse de Mariani, pour la reprise de La forza del destino le . Le triomphe est à la hauteur de l'événement, le public rappelle vingt-sept fois le maestro resté absent plus de vingt ans de la Scala. Verdi comme le public trouve Teresa Stolz « sublime »[85] et son goût pour la composition renaßt.

Il retrouvera bientĂŽt la diva autrichienne sur la scĂšne milanaise. Mais l'heure est sombre pour la sƓur latine. MalgrĂ© son ressentiment contre les Français qui « se sont rendus insupportables par leur insolence, leurs blagues et leurs fanfaronnades[86] », Verdi exprime dans une lettre Ă  son amie Clara Maffei sa tristesse pour la nation Ă  laquelle l'Italie doit la rĂ©alisation de son unitĂ© et lui fait part en ces termes de sa position interventionniste :

« J'aurais aimĂ© une politique plus gĂ©nĂ©reuse, j'aurais aimĂ© que l'on payĂąt une dette de reconnaissance. Cent mille des nĂŽtres pouvaient peut-ĂȘtre sauver la France et nous en mĂȘme temps. Quoi qu'il en soit, j'aurais prĂ©fĂ©rĂ© nous voir signer la paix, vaincus aux cĂŽtĂ©s des Français, plutĂŽt que cette inertie qui nous fera mĂ©priser un jour[87] »

Des raisons plus pragmatiques expliquent aussi l'intĂ©rĂȘt de Verdi pour le sort de la France : le siĂšge de Paris par les prussiens empĂȘche l'acheminement des dĂ©cors d'Aida, l'ouvrage composĂ© pour Le Caire.

Le Caire et la Scala avec Aida
Le Khédive Ismaïl Pacha, commanditaire d'Aida

AprĂšs les deux monumentaux drames historiques de facture « grand opĂ©ra », La forza del destino commandĂ© par le thĂ©Ăątre impĂ©rial de Saint-PĂ©tersbourg et Don Carlos pour l'OpĂ©ra de Paris, cette pĂ©riode d’expĂ©rimentation culmine avec Aida, prĂ©vu initialement pour l'ouverture de l'OpĂ©ra khĂ©dival du Caire lors de l'inauguration de canal de Suez en .

L'ouvrage n'ayant finalement pas Ă©tĂ© utilisĂ© lors des manifestations de 1869, ce n'est qu'en que Verdi reçoit de Camille du Locle le canevas, imaginĂ© par Auguste-Édouard Mariette mais vraisemblablement, parce qu'il est l'Ɠuvre d'« une main trĂšs experte, celle d'un homme qui connaĂźt trĂšs bien le thĂ©Ăątre[88] » comme le dĂ©cĂšle Verdi, Ă©crit par Temistocle Solera, le librettiste de Nabucco, alors chargĂ© de l'organisation des festivitĂ©s. Le KhĂ©dive IsmaĂŻl Pacha souhaite voir l'OpĂ©ra du Caire aurĂ©olĂ© du prestige de la crĂ©ation de l'un des maĂźtres de l'opĂ©ra, Verdi, Wagner ou Gounod. Le compositeur italien accepte la proposition communiquĂ©e par Paul Draneht, le surintendant des thĂ©Ăątres du Caire. Du Locle Ă©crit le livret en prose et en français et Antonio Ghislanzoni est chargĂ© de sa versification en italien. Il va en Ă©merger une Ɠuvre Ă©tonnante, longtemps mal comprise, oĂč les « fanfares » ne sont que l'emblĂšme mortifĂšre du pouvoir bourgeois face Ă  la sublimitĂ© mĂ©lodiques de l'amour impossible[89].

Le retard provoqué par la rétention des décors à Paris sera l'occasion pour Verdi de montrer, dans une lettre adressée au sculpteur romain Vincenzo Luccaroni, une qualité de visionnaire d'une lucidité rare :

« Mon opĂ©ra pour le Caire est fini mais ne peut ĂȘtre donnĂ© car les costumes et dĂ©cors sont restĂ©s enfermĂ©s Ă  Paris. Il n'y a pas grand mal ! Mais un mal plus grave, c'est cette horrible guerre et la prĂ©pondĂ©rance qu'ont prise ces Prussiens ; prĂ©pondĂ©rance qui nous sera fatale plus tard, y compris pour nous. Ce n'est plus une guerre de conquĂȘte, d'ambition ; c'est une guerre de race, et elle durera trĂšs longtemps [...] c'est la force de ces nouveaux Goths qui m'Ă©pouvante[90]... »

Le succĂšs obtenu lors de la premiĂšre au Caire le laisse indiffĂ©rent un Verdi prĂ©occupĂ© par la programmation de l'opĂ©ra Ă  Milan oĂč l'enjeu n'est autre que, certes sa reconnaissance par le public de la Scala, mais surtout, la sauvegarde de la prĂ©pondĂ©rance de l'opĂ©ra italien sur le style germanique de Wagner et français de Meyerbeer. DirigĂ© par Franco Faccio, scapigliato converti, chantĂ© par Teresa Stolz, dont les exigences contractuelles n'avaient permis de l'engager au Caire, Aida triomphe Ă  la Scala le . Le maestro est rappelĂ© trente-trois fois et reçoit en hommage une baguette en ivoire rehaussĂ©e d'une Ă©toile de diamant. PrĂšs de trente ans aprĂšs ses premiers succĂšs au sein du temple de l'art lyrique Verdi en est encore le dieu.

AprĂšs un temps de repli, cet opĂ©ra va ouvrir la pĂ©riode des derniers chefs-d’Ɠuvre : le Requiem, les Quattro pezzi sacri, Otello et Falstaff.

Les révisions

AprÚs Aïda, satisfait des succÚs internationaux et plutÎt critique en regard des progrÚs musicaux de ses contemporains, Verdi décide de se retirer. Il passe les années qui suivent à la révision de ses premiÚres partitions pour en tirer notamment de nouvelles versions de Don Carlos, La forza del destino, et Simon Boccanegra.

Otello et Falstaff

Seul saura le faire sortir de l’isolement Arrigo Boito, le poĂšte et compositeur scapigliato d’un Mefistofele, qui l’avait publiquement offensĂ© en 1863 en le rendant responsable du provincialisme et du retard de la musique italienne de ce temps. Avec les annĂ©es, Boito a cependant compris que seul Verdi Ă©tait en mesure de ramener l’Italie musicale au niveau europĂ©en.

Avec l’aide prĂ©cieuse du clairvoyant Ă©diteur Giulio Ricordi, il rĂ©ussit, en 1879 Ă  convaincre le musicien de collaborer Ă  un nouveau grand projet lyrique en Ă©crivant pour lui le livret d’Otello, un drame du dĂ©cadentisme tirĂ© de la tragĂ©die de Shakespeare, auteur qui, depuis toujours, passionne autant le compositeur d’ñge mĂ»r que le plus jeune Boito. AprĂšs huit ans de travail alternĂ© avec le remaniement de Simon Boccanegra, Otello, pour lequel Verdi a souvent imposĂ© ses vues Ă  l'Ă©crivain subtil et lettrĂ© qu'est Boito, est crĂ©Ă© le Ă  la Scala et accueilli avec un succĂšs Ă©clatant. Pourtant, sa musique continue ne peut aisĂ©ment ĂȘtre scindĂ©e en numĂ©ros pouvant ĂȘtre donnĂ©s en concert. Certains critiques estiment que, bien que magistralement orchestrĂ©, il manque de l’éclat mĂ©lodique si caractĂ©ristique des premiers grands opĂ©ras de Verdi. Beaucoup en revanche considĂšrent Otello comme le plus grand opĂ©ra tragique de Verdi, celui qui contient l’une de ses plus belles, de ses plus expressives musiques. Le fait est qu'Otello est « l'extrĂȘme fruit des audacieuses expĂ©rimentations lancĂ©es avec le Macbeth de 1847 »[91].

Les deux Ɠuvres, reprĂ©sentĂ©es Ă  la Scala, connaissent un accueil diffĂ©rent : si Otello rencontre immĂ©diatement le goĂ»t du public, s’imposant durablement au rĂ©pertoire, Falstaff, crĂ©Ă© le et dont le livret basĂ© sur la traduction par François-Victor Hugo des Joyeuses commĂšres de Windsor de William Shakespeare est Ă©galement d’Arrigo Boito, dĂ©concerte mais subjugue aussi le public italien : non seulement, pour la premiĂšre fois depuis l’infortunĂ© Un giorno di regno, le vieux Verdi se confronte au thĂ©Ăątre comique, mais, montrant son gĂ©nie contrapuntiste, il rĂ©ussit Ă  balayer d’un seul coup toutes les conventions de forme de l’opĂ©ra italien, montrant une vitalitĂ© artistique, un esprit de modernitĂ© et une Ă©nergie crĂ©ative surprenants. Falstaff a toujours attirĂ© les musiciens, et exercĂ© une influence dĂ©cisive sur les jeunes compositeurs d’opĂ©ras, de Puccini Ă  la gĂ©nĂ©ration des annĂ©es quatre-vingt.

Otello et Falstaff, la tragédie et la comédie, sont considérés comme les opéras les plus achevés du maßtre.

Les derniÚres années

Plaque commĂ©morative de la villa del Principe, nouvelle rĂ©sidence des Verdi Ă  GĂȘnes

La vie de Giuseppe Verdi est caractĂ©risĂ©e par deux pĂ©riodes : celle de la jeunesse, faite de tribulations et de luttes et celle de la pleine maturitĂ©, riche de sĂ©rĂ©nitĂ© et d’inspiration. Celle des derniĂšres annĂ©es s’écoule entre Sant’Agata et Milan ainsi qu'Ă  GĂȘnes, dans le nouvel appartement de la Villa del Principe, durant la pĂ©riode hivernale.

Giuseppina Strepponi meurt subitement le .

La casa di riposo per musicisti

Maison de retraite des musiciens fondée par Verdi à Milan

Le , Verdi fonde Ă  Milan la maison de retraite des musiciens (Casa di riposo per musicisti) dans l’objectif d’assurer l’entretien de « ceux qui ont consacrĂ© leur vie Ă  l’art musical » et qui se trouvent en difficultĂ©. Selon sa volontĂ©, les premiers hĂŽtes n’accĂ©deront Ă  la maison de repos qu’aprĂšs sa mort.

DĂ©cĂšs

Alors qu’il sĂ©journait dans un hĂŽtel milanais, Verdi a une attaque le . Il s’affaiblit progressivement et meurt six jours plus tard, le . Dans son testament du , Verdi dĂ©signe en qualitĂ© de lĂ©gataire universel une cousine de Busseto, Maria Verdi Carrara. Nombreux furent les legs destinĂ©s Ă  divers organismes sociaux dont, naturellement, la Casa di riposo per musicisti, dans l’oratoire de laquelle il est enseveli, aux cĂŽtĂ©s de son Ă©pouse Giuseppina, le .

Le jour des funĂ©railles du maestro, la Piazza Duomo et les rues adjacentes sont recouvertes de paille pour que le vacarme des fiacres ne vienne pas troubler son repos. Ses funĂ©railles sont immenses. 250 000 personnes sont prĂ©sentes pour rendre un dernier hommage Ă  l’une des plus importantes figures de la musique italienne. Lorsque son corps est transfĂ©rĂ© du cimetiĂšre Ă  la Casa di riposo, un chƓur de 820 chanteurs dirigĂ© par Arturo Toscanini interprĂšte le Va pensiero et le Miserere du TrouvĂšre.

Analyse

L'Ɠuvre

Giuseppe Verdi laisse un catalogue de 42 Ć“uvres musicales.

Verdi s’est aussi confrontĂ© Ă  l’écriture en dehors du champ de l’opĂ©ra. AprĂšs avoir reçu la formation de maĂźtre de chapelle, selon la pratique de l’époque, il Ă©crit quantitĂ© de musique sacrĂ©e instrumentale, mais abandonne presque complĂštement les genres non lyriques, Ă  l’exception de la romance de salon, dĂšs le dĂ©but de sa carriĂšre de compositeur d’opĂ©ras.

L’Ɠuvre de Verdi est souvent empreinte de patriotisme italien : le ChƓur des esclaves hĂ©breux dans Nabucco, connu sous l'incipit Va, pensiero, est rĂ©guliĂšrement proposĂ© comme un possible hymne national italien. D’autres rĂ©fĂ©rences Ă  des Ă©vĂ©nements politiques sont prĂ©sentes dans I Lombardi alla prima crociata.

Les opéras

On trouvera l’analyse de chacune des Ɠuvres opĂ©ratiques dans l’article qui lui est consacrĂ© auquel on accĂ©dera Ă  partir de la liste ci-dessus.

La musique instrumentale

La partition d'une Valse gracieuse composĂ©e en 1859, d’abord perdue, fut finalement retrouvĂ©e. Dans la fameuse scĂšne du bal du film Il Gattopardo de Luchino Visconti, les invitĂ©s dansent sur cette valse orchestrĂ©e par Nino Rota.

L’unique incursion de Verdi dans le genre de la musique de chambre est constituĂ©e par un magnifique Quatuor Ă  cordes en mi mineur (1873), dans lequel il a voulu montrer qu'il pouvait rivaliser avec la musique allemande.

La musique sacrée

Il Ă©crit une messe de Requiem pour la mort d’Alessandro Manzoni, « l’une des plus formidables piĂšces de l’histoire de la musique sacrĂ©e[92] », exĂ©cutĂ©e en l’église San Marco Ă  Milan le . AprĂšs la mort de Rossini, en 1869, Verdi avait dĂ©jĂ  proposĂ© en hommage collectif au compositeur de Pesaro un Requiem composĂ© par tous les musiciens italiens majeurs de ce temps, et dont il avait rĂ©servĂ© le Libera me qui passera, aprĂšs quelques changements, dans le Requiem pour Manzoni.

Toujours dans le domaine de la musique sacrée, l'athée Verdi laisse un Pater noster, sur le texte en italien du Dante, publié en 1880 et les Quattro pezzi sacri (Quatre piÚces sacrées), composées dans la maturité tardive et publiées en 1898 : Ave Maria, Stabat Mater, Laudi alla Vergine et Te Deum.

Les hymnes

Il compose, pour l'Exposition universelle de Londres en 1862, une cantate, l'Inno delle nazioni, dont le texte est Ă©crit par Arrigo Boito. ƒuvre patriotique, son ouverture invoque la joie du peuple et son finale mĂȘle les hymnes nationaux Fratelli d'Italia, la Marseillaise et God Save the King. À la suite d'un imbroglio, la cantate n'est finalement pas donnĂ©e pour l'ouverture de l'exposition. Verdi furieux, s'en dĂ©clare malgrĂ© tout, dans une lettre Ă  LĂ©on Escudier, parfaitement satisfait :

« Moi qui n'Ă©cris jamais ni cantates ni hymnes ni marches, moi qui dĂ©teste et mĂ©prise toute Ɠuvre de circonstance, vous imaginez combien je me sens heureux de m'en ĂȘtre tirĂ© Ă  si bon compte[93] »

Le style

Les prĂ©dĂ©cesseurs de Verdi qui ont influencĂ© sa musique sont Gioachino Rossini, Vincenzo Bellini, Giacomo Meyerbeer et, plus notablement, Gaetano Donizetti, Giovanni Pacini et Saverio Mercadante. À la possible exception d’Otello et surtout du prĂ©lude d’AĂŻda, il est libre de l’influence de Wagner. Quoique respectueux de Gounod, Verdi est attentif Ă  ne rien apprendre du Français que certains de ses contemporains regardent comme le plus grand compositeur vivant. Quelques traits dans AĂŻda suggĂšrent au moins une connaissance superficielle de l’Ɠuvre du compositeur russe Mikhail Glinka que Franz Liszt, aprĂšs sa tournĂ©e dans l’empire russe a popularisĂ© en Europe de l’Ouest.

Dans toute sa carriĂšre, Verdi a rarement utilisĂ© le contre-ut dans ses arias pour tĂ©nor, considĂ©rant que le fait de chanter cette note particuliĂšre devant une assistance distrait l’interprĂšte avant et aprĂšs que la note apparaĂźt. Toutefois, il a donnĂ© un contre-ut Ă  Duprez dans JĂ©rusalem et Ă  Tamberlick dans La forza del destino. Le contre-ut souvent entendu dans l’aria Di quella pira (Il trovatore) n’apparaĂźt pas sur la partition de Verdi.

Bien que son orchestration soit souvent magistrale, Verdi compte fortement sur son don mĂ©lodique comme ultime instrument d’expression musicale. En fait, dans plusieurs passages, et particuliĂšrement dans ses arias, l’harmonie est ascĂ©tique, tout l’orchestre sonnant comme un grand instrument d’accompagnement, comme une « grande guitare », dira Stravinsky[94]. Certains critiques maintiennent qu’il n’accorde pas suffisamment d’attention Ă  l’aspect technique de la composition, manquant de raffinement comme s’il Ă©tait toujours en train d’apprendre. Verdi lui-mĂȘme a dĂ©clarĂ© : « de tous les compositeurs passĂ©s ou prĂ©sents je suis le moins instruit » s’empressant toutefois d’ajouter : « je le pense tout Ă  fait sĂ©rieusement et par instruction je n’entends pas connaissance de la musique ». Cependant, il serait incorrect d’affirmer que Verdi sous-estime la puissance expressive de l’orchestre ou ne l’emploie pas dans toute sa capacitĂ© lorsque c’est nĂ©cessaire. D’ailleurs, le renouvellement perpĂ©tuel de ses formes musicales, au service d'une idĂ©e dramatique unitaire, est incontestable et force mĂȘme l'admiration des plus grands.

Les innovations de Verdi sont si caractĂ©ristiques qu’aucun autre compositeur ne les emploie ; elles restent encore aujourd’hui la signature exclusive de Verdi. Verdi est l’un des premiers compositeurs Ă  avoir patiemment recherchĂ© le terrain dans lequel enraciner ses talents particuliers. Travaillant Ă©troitement avec ses librettistes et bien conscient que l’expression dramatique est son atout, il s’assure que le travail initial sur lequel est basĂ© le livret est dĂ©barrassĂ© de tous les dĂ©tails inutiles et de tous les personnages superflus, et ne conserve que les rĂŽles dĂ©bordant de passion et les scĂšnes dramatiquement riches.

Bien que ses compositions soient parfois critiquĂ©es pour utiliser un diatonisme sacrifiant au goĂ»t populaire plutĂŽt qu’un idiome musical purement chromatique et pour leur tendance au mĂ©lodrame, les opĂ©ras de Verdi dominent encore le rĂ©pertoire de l'art lyrique un siĂšcle et demi aprĂšs leur crĂ©ation.

Verdi et Wagner

Les deux compositeurs, qui sont les chefs de leurs Ă©coles respectives, semblent ne pas s’apprĂ©cier mais ils ne se sont jamais rencontrĂ©s. Les quelques commentaires de Verdi Ă  propos de Richard Wagner et de sa musique sont loin d’ĂȘtre bienveillants :

« Il choisit invariablement et inutilement la voie inexplorĂ©e, essayant de voler lĂ  oĂč une personne raisonnable marcherait avec de meilleurs rĂ©sultats. »

Mais il a au moins cette parole aimable en apprenant la mort de Wagner :

« Triste ! Triste ! Triste !
 Un nom qui laisse une empreinte des plus puissantes dans l’histoire de notre art. »

L’un des commentaires de Wagner est bien connu : aprĂšs avoir Ă©coutĂ© le Requiem le grand musicien allemand, d’habitude prolixe et Ă©loquent dans ses commentaires sur les autres compositeurs, se contente de dire : « Il vaut mieux ne rien dire. »

La postérité

Plusieurs de ses opĂ©ras, notamment ceux postĂ©rieurs Ă  1851 sont ancrĂ©s dans le rĂ©pertoire. Aucun compositeur d’opĂ©ras italiens n’a atteint la popularitĂ© de Verdi, Ă  l’exception de Puccini et Rossini.

Verdi et la politique

En 1859, pour déjouer les autorités autrichiennes, sous couvert d'acclamations adressées au musicien aprÚs le succÚs du Bal masqué, circule ce qui est en réalité le code de ralliement des partisans de l'Unité italienne : Viva V.E.R.D.I.

Quand Milan, toujours sous l’occupation autrichienne, commence Ă  soutenir les efforts de Victor Emmanuel pour la rĂ©unification, des partisans clandestins commencent Ă  comploter pour que le roi de Sardaigne conquiĂšre Milan et, Ă  cause de la censure autrichienne sĂ©vĂšre, une inscription circule : W VERDI (« Viva Verdi »), dissimulant un code de ralliement contre l’occupant et qui se lisait : ViVa Vittorio Emanuele Re D’Italia[95] - [96]. Le compositeur Ă©tait au courant de cette utilisation de son nom et est supposĂ© y avoir consenti.

Partisan du risorgimento, il participe par les prises de position de ses compositions musicales à l’Unification italienne.

À la demande de son ami Cavour, PrĂ©sident du Conseil italien, Verdi est dĂ©putĂ© du premier parlement du royaume d’Italie (1861 Ă  1865, VIIIe lĂ©gislature). Peu enclin Ă  la politique, il ne se reprĂ©sente pas aux Ă©lections qui suivent la mort de Cavour[96]. Il est nĂ©anmoins nommĂ© sĂ©nateur en 1874[97].

Le propriétaire terrien

Propriétaire de nombreux domaines constitués de terres agricoles et d'élevages à Sant'Agata et alentour, Giuseppe Verdi crée, dans le courant de l'année 1890, une société de commercialisation, sous la marque G.V., de la viande de porc et de la charcuterie issues de la production de ses fermes - [98] - [99].

Autour de Verdi

Quelques lieux et musées dédiés à Giuseppe Verdi

Films biographiques

Films biographiques, plus ou moins librement tirés de la vie de Giuseppe Verdi :

Verdi chez Visconti

Nino Rota a utilisĂ© pour la scĂšne centrale du GuĂ©pard de Visconti, la scĂšne du bal, la Walzer in fa maggiore composĂ©e en 1859 pour piano, en crĂ©ant un arrangement pour l’orchestre symphonique. Cette piĂšce, mineure dans la carriĂšre de Verdi, retrouve chez Visconti la dimension psychologique et sociopolitique de l’Ɠuvre verdienne. Deux extraits de La traviata sont Ă©galement entendus : vers le premier tiers du film, la petite fanfare municipale joue quelques notes du chƓur des bohĂ©miennes de l'opĂ©ra (Noi siamo zingarelle) accompagnant l'entrĂ©e des Salina dans leur village. La scĂšne suivante montre l'entrĂ©e des personnages dans l'Ă©glise : alors que tout le monde s'installe, l'organiste joue un bref extrait du prĂ©lude de l'opĂ©ra[100].

Senso dĂ©bute sur une scĂšne de manifestation des partisans de l’unitĂ© italienne contre l’occupant autrichien, lors d’une reprĂ©sentation d'Il trovatore Ă  La Fenice de Venise. La scĂšne se dĂ©roule sur l’air cĂ©lĂ©brissime de Manrico, Di quella pira. À la fin du troisiĂšme acte, lorsque le chƓur en armes chante « All’armi, all’armi! Eccone presti / a pugnar teco, teco a morir[101] », semblant dĂ©fier les officiers autrichiens, les patriotes lancent des balcons leurs affichettes vert blanc rouge, au cri de « Viva l’Italia » et « Viva Verdi ». LĂ  encore, Visconti rappelle intensĂ©ment le rĂŽle et l’utilisation de Verdi dans le Risorgimento.

Chez les autres réalisateurs

Bernardo Bertolucci ouvre son film 1900 par l’annonce, symbolisant le siĂšcle finissant mais aussi celui qui commence, de la mort de Verdi, aux cris de « Verd, l'Ă© mort » (en dialecte Ă©milien).

La reconnaissance institutionnelle

La riviÚre Truckee à Verdi (Nevada). Lorsque la Central Pacific Railroad atteignit le site en 1868, Charles Crocker, l'un de ses cofondateurs, tira de son chapeau un papier portant le nom de Giuseppe Verdi ; la ville fut ainsi baptisée du nom du compositeur[102].

Trois conservatoires de musique italiens portent son nom : celui de Milan, celui de Turin et celui de CĂŽme.

Nombre de communes ont également dédié leur théùtre au maestro Verdi :

Hommages

Sont également nommés en son honneur :

Des enregistrements faits avec des instruments de l'Ă©poque de Verdi

Instruments

Lorsque Giuseppe Verdi Ă©tait enfant, il avait l'habitude de jouer chez les Barezzi[106]. L'instrument dont il jouait Ă©tait un piano d'Anton Tomaschek[107]. Giuseppe Verdi aimait Ă©galement les pianos de Johann Fritz et a utilisĂ© le piano viennois Fritz Ă  6 pĂ©dales, de l'Ă©poque de Rigoletto en 1851 Ă  Aida en 1871. On peut voir ce mĂȘme piano dans la Villa Verdi du compositeur, dans la province de Piacenza en Italie. En 1857, pour l'inauguration du thĂ©Ăątre A.Galli Ă  Rimini, Verdi a jouĂ© sur un piano Ă  queue de Joseph Danckh[108].

Bicentenaire de la naissance

En 2013, le portail institutionnel www.giuseppeverdi.it recense les cĂ©lĂ©brations qui ont lieu dans le monde entier Ă  l'occasion du bicentenaire de sa naissance, Ă  savoir plus de 1 000 Ă©vĂšnements dans 200 villes sur 5 continents (331 opĂ©ras, 302 concerts, 163 confĂ©rences et dĂ©bats, 84 projections, 44 expositions, 14 reprĂ©sentations thĂ©Ăątrales, 12 spectacles de danse et de ballet)[109].

Annexes

Documents sonores

Ernani (1844) : O sommo Carlo
Mattia Battistini, Emilia Corsi, Luigi Colazza
et Aristodemo Sillich (1906)
Rigoletto (1851) : La donna Ăš mobile
Enrico Caruso (vers 1908)
Rigoletto : Bella figlia dell'amore
Enrico Caruso, Bessie Abott,
Louise Homer, Antonio Scotti (1907)
Il trovatore (1852) : Stride la vampa
Gabriella Besanzoni (1920)

La traviata (1853) : Ah! fors'Ăš lui
Lucrezia Bori (1910)
Un ballo in maschera (1859) : È scherzo od Ú follia
Enrico Caruso, Frieda Hempel,
Maria DuchĂȘne, AndrĂ©s de Segurola
et LĂ©on Rothier (1915)
La forza del destino (1862) : NĂš gustare m'Ăš dato un'ora
Enrico Caruso, Giuseppe de Luca (vers 1918)

Aida (1871) : O patria mia
Marie Rappold (en) (1916)
Aida : La fatal pietra (Morir ! sĂŹ pura e bella !)
Nicola Zerola (en) (1909)
Otello (1887) : SĂŹ, pel ciel marmoreo giuro !,
Enrico Caruso et Titta Ruffo (1914)
Otello : Nium mi tema (Morte d'Otello)
Francesco Tamagno (1903)

Iconographie

Caricature de Verdi pour le magazine Vanity Fair (1879)
Caricature de Verdi en 1860 par Melchiorre De Filippis Delfico (it)
Croquis de Verdi aux répétitions de Falstaff à l'Opéra-Comique en 1894

Bibliographie

La bibliographie verdienne est innombrable, essentiellement en Italie et dans les pays anglo-saxons. Ne sont reprises ici que les publications signalées, dans les ouvrages les plus récents, comme étant les plus facilement accessibles en français ou les plus importantes en langue étrangÚre. On se reportera utilement à la notice bibliographique de ces publications pour un développement plus détaillé.

Nota : Les ouvrages ou articles relatifs Ă  l’un des vingt-huit opĂ©ras de Verdi sont citĂ©s dans l’article correspondant.

Ouvrages

En français
  • Michel Orcel, Verdi, La vie, le mĂ©lodrame, Grasset, Paris, 2001, 367 p. (ISBN 2246610516)
  • Giuseppe Verdi (trad. de l'italien par Margaux Bricler), C’est si beau de rire. Lettres d’un gĂ©nie compris : lettres choisies et prĂ©sentĂ©es par Eusebio Trabucchi, Rome, Paris, L'orma, coll. « Les plis », , 62 p. (ISBN 978-88-31312-19-6, BNF 46673604)
  • Sylvain Fort, Verdi, l'insoumis, Ed. Robert Laffont, Paris, 2020
  • Jean-Pierre Labaune, Giuseppe Verdi, Le souffle du gĂ©nie, Editions Baudelaire, 2014, 566 p. (ISBN 979-10-203-0495-7)
  • Patrick Favre-Tissot-Bonvoisin, Giuseppe Verdi. Éditions Bleu nuit, 2013, 175 p. (ISBN 978-2-35884-022-4)
  • Chantal Cazaux, Giuseppe Verdi mode d'emploi, Avant ScĂšne OpĂ©ra, Paris, 2012, 286 p. (ISBN 978-2-843-85274-9)
  • AndrĂ© Tubeuf, Verdi, de vive voix, Actes Sud, coll. Classica, Arles, 2010, 288 p. (ISBN 978-2-7427-8837-8)
  • Emmanuel Reibel, Verdi (1813-1901), Gisserot, Paris, 2001, 128 p. (ISBN 2877475751)
  • Gilles de Van, Verdi, un thĂ©Ăątre en musique, Fayard, Paris, 2001, 470 p. (ISBN 2213028958)
  • Pierre Milza, Verdi et son temps, Perrin, Paris, 2001, 559 p. (ISBN 2262016194), rĂ©Ă©dit. collection Tempus, 2004 (ISBN 2262022941)
  • GĂ©rard Gefen (trad. de l'italien, textes choisis et prĂ©sentĂ©s par GĂ©rard Gefen), Verdi par Verdi, Paris, L'Archipel, , 285 p. (ISBN 2-84187-278-5, OCLC 716877669, BNF 37218977)
  • Jean-François Labie, Le cas Verdi, Fayard, Paris, 2001, 462 p. (ISBN 221360813X)
  • Alain Duault, Verdi, la musique et le drame, Gallimard, collection « DĂ©couvertes Gallimard/Arts » (no 9), Paris, 2001, 192 p. (ISBN 2070530159)
  • Mary Jane Phillips-Matz (trad. de l'anglais par GĂ©rard Gefen, prĂ©f. GĂ©rard Gefen), Giuseppe Verdi [« Verdi, a biography »], Paris, Fayard, coll. « BibliothĂšque des grands musiciens », , 1034 p. (ISBN 2-213-59659-X, OCLC 911343033, BNF 35817007)
  • Carlo Gatti (trad. de l'italien par Pierre Barbaud), Verdi, Plan de la Tour, Éditions d'Aujourd'hui, coll. « Les introuvables », , 274 p., 2 volumes (OCLC 8899421) (Nota : Reproduction en fac-similĂ© de l’édition de Paris, Gallimard, 1961 (OCLC 460463293).)
Dans les autres langues
  • (de) Christian Springer
    • Giuseppe Verdi – Simon Boccanegra. Dokumente – Materialien – Texte. Éditions Praesens, Vienne, 2008, 719 p. (ISBN 978-3-7069-0432-2)
    • Verdi-Studien : Verdi in Wien ; Hanslick versus Verdi ; Verdi und Wagner ; Zur Interpretation der Werke Verdis ; "Re Lear" – Shakespeare bei Verdi. Édition Praesens, Vienne, 2005, 435 p. (ISBN 3-7069-0292-3)
    • Verdi und die Interpreten seiner Zeit. Holzhausen, Vienne, 2000, 490 p. (ISBN 3-85493-029-1)
  • (it) Claudia Polo, Immaginari verdiani. Opera, media e industria culturale nell'Italia del XX secolo, Milano: BMG/Ricordi, 2004
  • Gabriele Baldini :
    • (it) Abitare la battaglia : la storia di Giuseppe Verdi, Garzanti, collection Saggi blu, Milano, 2001, 335 p. (ISBN 88-11-59703-X)
    • (en) The story of Giuseppe Verdi : Oberto to Un ballo in maschera, traduction Roger Parker, University Press, Cambridge, 1980, (ISBN 0-521-22911-1)
  • Julian Budden, Les OpĂ©ras de Verdi, en 3 volumes :
    • (it) Le opere di Verdi, EDT, Biblioteca di cultura musicale, Torino, Vol. I, 1985, Da Oberto a Rigoletto, 600 p. (ISBN 88-7063-038-2), Vol. II, 1986, Dal Trovatore alla Forza del destino, 601 p. (ISBN 88-7063-042-0), Vol. III, 1988, Da Don Carlos a Falstaff, 629 p. (ISBN 88-7063-058-7)
    • (en) The operas of Verdi, Oxford University Press, New-York, 1973 - 1981, Vol. I (ISBN 0-19-520030-6), Vol. II (ISBN 0-19-816262-6), Vol. III (ISBN 0-19-520254-6)
  • (it) Franco Abbiati, Giuseppe Verdi, Ricordi, Le vite, Milan, 1959, 4 vol.
  • (en) Verdi, the man in his letters, par Franz Werfel, Paul Stefan et Edward Downes, L.B. Fischer, New York, 1942
  • (es) Hercules Cavalli, BiografĂ­as artĂ­sticas contemporĂĄneas de los cĂ©lebres JosĂ© Verdi, maestro de mĂșsica y Antonio Canova, escultor [« Cenni biografici del celebre maestro Giuseppe Verdi »], Madrid, J.M. Ducazcal, , 67 p. (prĂ©sentation en ligne, lire en ligne) sur le site de la BibliothĂšque nationale d'Espagne
  • (it) Giuseppe DemaldĂš, Cenni biografici del maestro di musica Giuseppe Verdi, (prĂ©sentation en ligne)

Articles ou publications collectives

En français
  • Alessandro di Profio, Verdi, Giuseppe, Dictionnaire de la musique en France au XIXe siĂšcle, dir. JoĂ«l-Marie Fauquet, Fayard, Paris, 2003, (ISBN 2-213-59316-7)
  • Maestro Verdi, Christian Merlin, Jean Cabourg, Pierre Flinois, Gilles de Van, Etienne Barilier, Alessandro di Profio, AndrĂ© Lischke, Damien Colas, Jean-François Labie, Hector Bianciotti, Didier Van Moere, Jean-Claude Yon, Alain Perroux, Pierre Michot, JoĂ«l-Marie Fauquet, Jean-Louis Dutronc, Sandro Cometta, Jean-Michel BrĂšque, Elisabetta Soldini, Laureto Rodoni, L'Avant-scĂšne OpĂ©ra, Paris, 2001, 155 p. (ISBN 2-84385-171-8)
  • Guide des opĂ©ras de Verdi, Jean Cabourg, directeur de la publication, avec la collaboration de Ivan A. Alexandre, Christophe Capacci, Michel Debrocq, Gilles de Van, Sylviane Falcinelli, StĂ©phane Goldet, Piotr Kaminski, Fernand Leclercq, Rolland Mancini, Isabelle Moindrot, Marie-Aude Roux, Pascale Saint-AndrĂ©, Georges Voisin et Jean-Paul Williart, traduction des livrets par Yvelaine Duault, Georges Farret, Jacques Fournier, Michel Orcel et BĂ©atrice Vierne, Fayard, collection Les indispensables de la musique, Paris, 1990, 1283 p. (ISBN 2-213-02409-X)
Dans les autres langues
  • (de) Damien Colas, « Verdi und Donizetti: ein Vergleich », Giuseppe Verdi — Große Komponisten und ihre Zeit, Markus Engelhardt (Ă©d.), Laaber, Laaber-Verlag, 2001, p. 317-338 (ISBN 978-3-89007-182-4)
  • (it) Ercole Cavalli, « Giuseppe Verdi. Nuovi particulari inediti ed interessanti », Il Pensiero di Nizza, 29, 30 et et

Notes et références

  1. Prononciation en italien standard retranscrite selon la norme API. Écouter un exemple audio sur Forvo.
  2. GĂ©rard Gefen (textes choisis, traduits et prĂ©sentĂ©s par), Verdi par Verdi, L'Archipel, , 285 p. (ISBN 978-2-84187-278-7, OCLC 716877669), p. 24–26.
  3. L’acte de naissance de Joseph Verdi portĂ© au registre de l’état civil de Busseto est repris ainsi par plusieurs auteurs (notamment Mary Jane Phillips-Matz). Cf. bibliographie supra
  4. (en) Mary Jane Phillips-Matz, Verdi : a biography, Oxford University Press, , p. 12
  5. (en) Mary Jane Phillips-Matz, op. cité, p.13
  6. Petit peuple
  7. Pierre Milza, Verdi et son temps, p. 13 (Cf. bibliographie)
  8. Michel Orcel, Verdi, La vie, le mélodrame, p. 12 (Cf. bibliographie)
  9. GĂ©rard Gefen, Verdi par Verdi, p. 29 (Cf. bibliographie).
  10. Pierre Milza, Verdi, op. cit., p. 19.
  11. Verdi n’aura qu’une sƓur, nĂ©e en 1816, Giuseppa Francesca, qu’il chĂ©rira, mais qui mourra Ă  l’ñge de dix-sept ans
  12. Situation exceptionnelle dans un village oĂč les habitants parlent le dialecte parmesan et oĂč seuls les enfants de notables sont instruits dans la langue du Dante
  13. Ce thÚme de la malédiction se retrouve dans nombre de ses opéras : Nabucco, Macbeth, Rigoletto, Simon Boccanegra, La Force du destin.
  14. L’inscription retrouvĂ©e sur la face infĂ©rieure de la touche la plus aigĂŒe est ainsi reproduite, avec ses errements orthographiques, sur le site de la Casa Verdi : « Da me Stefano Cavalletti fu fato (sic) di nuovo questi saltarelli e impenati a corame e vi adatai (sic) la pedagliera che ci ho regalato ; come anche gratuitamente ci ho fato (sic) di nuovo li detti saltarelli, vedendo la buona disposizione che ha il giovanotto Giuseppe Verdi di imparare a suonare questo strumento, che questo mi basta per essere del tutto sodisfato (sic). ANNO DOMINI 182(1) ». Les traductions donnant « marteaux » pour « saltarelli » sont erronĂ©es : l’instrument serait alors non une Ă©pinette mais un clavicorde.
  15. (en) Mary Jane Phillips-Matz, op. cité, p.23
  16. Pierre Milza, Verdi, op. cit., p. 35.
  17. Sur l'influence fondatrice d'Alfieri dans le théùtre musical de Verdi, v. M. Orcel, Trois Guerriers plus un, Le temps qu'il fait, Cognac, 1993, p. 51-54, et Verdi. La vie, le mélodrame
  18. Filomena Maria Verdi, sa fille adoptive, Ă©tait chargĂ©e de les dĂ©truire aprĂšs la mort de son pĂšre ; certaines ont cependant Ă©tĂ© retrouvĂ©es dans les archives du Monte di PietĂ  e d’Abbondanza de Busseto.
  19. (en) Gabriele Baldini, The Story of Giuseppe Verdi : Oberto to Un Ballo in Maschera, Cambridge University Press, , p. 15
  20. Le passeport de Giuseppe Verdi est conservé au musée de la Scala de Milan
  21. (en) John Rosselli, The Life of Verdi, Cambridge University Press, , p. 19
  22. Dont Verdi prĂ©tendra par la suite qu’elle Ă©tait destinĂ©e Ă  la famille du comte
  23. Pierre Milza, Verdi, op. cit., p. 63
  24. Pas plus que pour celles de sa jeune sƓur, disparue quelques semaines plus tard, Verdi n’avait eu la possibilitĂ© de se dĂ©placer pour assister aux obsĂšques de son maĂźtre.
  25. Guerre civile (!) pour Phillips-Matz, Giuseppe Verdi, p. 80.
  26. Milza, op. cit., p. 67.
  27. Patrick Favre-Tissot-Bonvoisin, Giuseppe Verdi, Bleu nuit Ă©diteur, , p. 20
  28. L’archiduchesse Marie-Louise avait interdit l’exĂ©cution de toute musique dans les Ă©glises de Busseto pour couper court Ă  la querelle entre Coccardini et Codini
  29. Milza, op. cit., p. 71
  30. Lettre conservée au museo civico de Busseto, rapportée par Milza, op. cit., p. 78
  31. Ivan A. Alexandre, Guide des opéras de Verdi, sous la direction de Jean Cabourg, p. 22 et 23
  32. Récit autobiographique de Verdi à Giulio Ricordi en 1879, rapporté par Milza, op. cit., p. 86
  33. M. Orcel, Trois Guerriers plus un, op. cit., p. 51-54, et Verdi. La vie, le mélodrame, op. cit., p 38-44
  34. La programmation de la Scala Ă©tait alors dĂ©coupĂ©e en deux saisons : celle du carnaval qui commençait Ă  NoĂ«l et s’achevait au 21 mars, et celle de l’automne, du 11 aoĂ»t au 30 novembre.
  35. Rapporté par Milza, op. cit., p. 114
  36. (en) « Giuseppe Verdi and Vienna », sur le site de la ville de Vienne (lire en ligne)
  37. Il faut savoir que Donizetti Ă  la mĂȘme Ă©poque se contentait d’un cachet de 3 000 lires : Milza, Verdi, op. cit., p. 121.
  38. M. Orcel, op. cit.
  39. Voir M. Orcel, op. cit., p. 68-70
  40. Voir M. Orcel, op. cit., p. 72-73
  41. Mila Massimo, La giovinezza di Verdi
  42. Milza, Verdi, op. cit., p. 133
  43. Voir M. Orcel, op. cit., p. 82-86
  44. Milza, Verdi, op. cit., p. 140
  45. Voir M. Orcel, op. cit., p. 94-107
  46. Milza, Verdi, op. cit., p. 157
  47. Lettre de Verdi à Clara Maffei, citée par Milza, op. cit., p. 159
  48. Voir M. Orcel, op. cit. p. 122-124
  49. Pierre Milza, Verdi, op. cit., p. 165
  50. Lettre de Verdi à Mazzini citée par Pierre Milza, Verdi, op. cit., p. 170
  51. La partition non orchestrée
  52. Voir M. Orcel, op. cit., p. 142-144.
  53. V. Michel Orcel, op. cit., p. 144-147
  54. Pierre Milza, Verdi, op. cit. p. 186
  55. Mary Jane Phillips-Matz, Verdi, op. cit., p. 317
  56. V. l'analyse de M. Orcel, op. cit., pp. p. 159-164
  57. Pierre Milza, Verdi, op. cit., p. 190
  58. Voir M. Orcel, op. cit, p. 171-172
  59. G. B. Shaw, cité par M. Orcel, op. cit
  60. Lettre de Piave à Marzari citée par Pierre Milza, Verdi, op. cit., p. 201
  61. M Orcel, op. cit., p. 181-185
  62. Pierre Milza, Verdi, op. cit., p. 208
  63. Pierre Milza, Verdi, op. cit., p. 211
  64. Cité par M. Orcel, op. cit., p. 201
  65. Pierre Milza, Verdi, op. cit., p. 224
  66. Ellen Creathorne Clayton, Queens of Song: Being Memoirs of Some of the Most Celebrated Female vocalist, Volume 2, Londres, 1863, p. 388
  67. Lettre de Verdi datée du 13 mars 1857 citée par Pierre Milza
  68. V. Michel Orcel, op. cit., p. 313-321
  69. Pierre Milza, Verdi, op. cit., p. 229
  70. Extrait du mémoire en défense déposé par Verdi auprÚs du tribunal de commerce de Naples le 13 mars 1858. A. Luzio, Carteggi verdiani I, Rome, 1935, p. 269, cité par Mary Jane Phillips-Matz, Verdi, op. cit., p. 449
  71. Mary Jane Phillips-Matz, Verdi, op. cit., p.445
  72. Pierre Milza, Verdi, op. cit., p. 273
  73. Lettre de Verdi à Piave du 3 novembre 1860, citée par Milza, Verdi, op. cit., p. 297
  74. Leur mariage est célébré en grand secret le à Collonges-sous-SalÚve, petit bourg savoyard proche de GenÚve, avec pour témoins le cocher qui les y a conduits et le sonneur de l'église.
  75. Cavour entend bien utiliser, pour « faire l'Italie » le rayonnement international et le symbolisme du « barde de la nation italienne » (Milza, Verdi, op. cit., p. 299).
  76. Pierre Milza, Verdi, op. cit., p. 318
  77. M. Orcel, op. cit., p. 238-242
  78. Pierre Milza Verdi, op. cit., p. 323.
  79. Lettre à la comtesse Maffei citée par Pierre Milza dans Verdi, op. cit. p. 332.
  80. Pierre Milza, Verdi, op. cit. p. 341
  81. AprĂšs une halte, sur le chemin du retour, par Pau, oĂč ils visitent le chĂąteau, et Bordeaux, oĂč ils sont les invitĂ©s de la famille rencontrĂ©e lors de la cure (Mary Jane Phillips-Matz, op. cit., p. 606).
  82. M. Orcel, op. cit., p. 265 et seq.
  83. Lettre de Verdi à Clara Maffei en février 1867, citée par Pierre Milza, Verdi, op. cit., p. 347
  84. Pierre Milza, Verdi, op. cit., p. 349
  85. Pierre Milza, Verdi, op. cit. p. 369
  86. Lettre du 10 août 1870 de Verdi a Cesare De Sanctis, citée par Pierre Milza, Verdi, op. cit. p. 373
  87. Lettre du 30 septembre 1870 de Verdi à Clara Maffei, citée par Milza, ibidem.
  88. Pierre Milza, Verdi, op. cit., p. 371
  89. M. Orcel, op. cit., p. 288-296
  90. Lettre de Verdi à Luccaroni citée par Sylviane Falcinelli dans Guide des opéras de Verdi, op. cit., p. 1042
  91. M. Orcel, op. cit., p. 331
  92. GĂ©rard Gefen, op. cit., p. 15
  93. Mary Jane Phillips-Matz, Verdi, op. cit. p. 528
  94. Christian Merlin, La direction d’orchestre verdienne, L'Avant-ScĂšne OpĂ©ra
  95. Vive Victor Emmanuel, roi d’Italie
  96. « Verdi si ritira dal teatro » (consulté le )
  97. « Scheda di Giuseppe Verdi », sur Senato della Repubblica (consulté le )
  98. Mary Jane Phillips-Matz (trad. de l'anglais par Gérard Gefen, préf. Gérard Gefen), Giuseppe Verdi [« Verdi, a biography »], Paris, Fayard, coll. « BibliothÚque des grands musiciens », , 1034 p. (ISBN 2-213-59659-X, OCLC 911343033, BNF 35817007), p. 989-994
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